04.032 Message relatif à la révision partielle de la loi fédérale sur l'assurance-maladie (liberté de contracter) du 26 mai 2004

Messieurs les Présidents, Mesdames et Messieurs, Nous vous soumettons, par le présent message, une modification de la loi fédérale sur l'assurance-maladie, en vous proposant de l'approuver.

Par la même occasion, nous vous proposons de classer les interventions parlementaires suivantes: 2002

P 02.3446

Limitation du nombre de médecins. Accompagnement scientifique (N 13.12.02, Groupe radical-libéral)

2003

P 02.3644

Rapport sur la liberté contractuelle (N 8.12.03, Commission de la sécurité sociale et de la santé publique CN 00.079)

Nous vous prions d'agréer, Messieurs les Présidents, Mesdames et Messieurs, l'assurance de notre haute considération.

26 mai 2004

Au nom du Conseil fédéral suisse: Le président de la Confédération, Joseph Deiss La chancelière de la Confédération, Annemarie Huber-Hotz

2004-1048

4055

Condensé La loi fédérale du 18 mars 1994 sur l'assurance-maladie (LAMal; RS 832.10) prévoit plusieurs instruments de maîtrise des coûts dans le domaine hospitalier qui ont commencé à porter leurs fruits, comme la planification des hôpitaux et des EMS par les cantons (art. 39) ou la compétence pour les cantons d'introduire un budget global (art. 51). Par contre, dans le domaine ambulatoire, les assureurs-maladie sont tenus de conclure une convention tarifaire et de prendre en charge les prestations fournies par tous les fournisseurs de prestations admis selon la loi. Un fournisseur de prestations qui remplit les conditions légales d'admission (art. 35 à 40) peut en effet pratiquer à la charge de l'assurance obligatoire des soins sans que les assureurs-maladie aient la possibilité de l'exclure de ce marché. En ce sens, il y a obligation de contracter. Les assureurs n'ont de ce fait en principe aucun moyen de s'opposer à l'accroissement du volume des prestations provoqué par l'augmentation constante du nombre de fournisseurs de prestations.

Le Parlement a adopté, le 24 mars 2000, dans le cadre de la 1re révision de la LAMal, un art. 55a qui confère au Conseil fédéral la compétence, pour une durée limitée à trois ans au maximum, de faire dépendre de la preuve d'un besoin l'admission de certains fournisseurs de prestations à pratiquer dans le secteur ambulatoire à la charge de l'assurance obligatoire des soins. Selon cette disposition, il incombe au Conseil fédéral de fixer les critères correspondants et aux cantons de désigner les fournisseurs de prestations. Cette mesure a été adoptée d'une part, dans la perspective de l'entrée en vigueur des accords bilatéraux avec la Communauté européenne et ses Etats membres, et notamment de l'accord sur la libre circulation des personnes, et d'autre part, en tant que mesure extraordinaire à court terme afin de donner un coup de frein à l'augmentation des coûts de la santé dans le secteur ambulatoire résultant de l'augmentation constante du nombre de fournisseurs de prestations.

Le 3 juillet 2002, faisant usage de la délégation de compétence que lui confère l'art. 55a LAMal, le Conseil fédéral a décidé de limiter l'admission des fournisseurs de prestations à pratiquer à la charge de l'assurance obligatoire des soins. Il a fixé les modalités de cette limitation
dans une ordonnance édictée spécialement à cet effet (ordonnance sur la limitation de l'admission des fournisseurs de prestations à pratiquer à la charge de l'assurance-maladie obligatoire; RS 832.103). Cette ordonnance est entrée en vigueur le 4 juillet 2002. Le Conseil fédéral a souligné d'emblée que cette limitation de l'admission devait constituer une mesure extraordinaire, limitée dans le temps, qui doit courir jusqu'à l'entrée en vigueur d'une nouvelle réglementation visant à limiter l'admission des fournisseurs de prestations, mais au plus tard jusqu'au 3 juillet 2005, date où l'ordonnance arrive à échéance.

L'objectif du Conseil fédéral était que soit élaboré, dans l'intervalle, par le Parlement, un modèle réaliste de suppression de l'obligation de contracter.

Des discussions à ce sujet ont précisément eu lieu lors des débats sur la 2e révision de la LAMal. La conférence de conciliation est parvenue à trouver un accord sur un modèle de suppression partielle de l'obligation de contracter. Toutefois, le Conseil

4056

national a rejeté le projet de révision de la LAMal lors du vote final intervenu lors de la session d'hiver 2003. Cette situation comme l'échéance au 3 juillet 2005 de l'ordonnance sur la limitation de l'admission des fournisseurs de prestations à pratiquer à la charge de l'assurance-maladie obligatoire obligent le Conseil fédéral à proposer au Parlement, dans des délais très brefs, une nouvelle réglementation en matière d'admission des fournisseurs de prestations dispensant des prestations ambulatoires pour éviter d'être confronté à une augmentation brutale du nombre de ces derniers.

Avec son modèle de suppression de l'obligation de contracter dans le secteur ambulatoire, le Conseil fédéral entend notamment renforcer la concurrence entre les fournisseurs de prestations d'une même branche en conférant aux assureursmaladie la liberté de les choisir mais aussi créer les conditions propres à permettre une limitation de la couverture excédentaire en soins ambulatoires là où cela s'avère nécessaire, en responsabilisant les cantons à cet égard. Le Conseil fédéral souhaite également renforcer l'arsenal et accroître la portée des sanctions qui peuvent être prononcées contre les fournisseurs de prestations qui ne respectent pas les préceptes d'économicité et de qualité des prestations («moutons noirs») afin de rendre le système répressif de la LAMal plus dissuasif qu'actuellement.

4057

Table des matières Condensé

4056

1 Partie générale 1.1 Genèse 1.2 Demandes de révision 1.2.1 Interventions parlementaires 1.2.2 Deuxième révision de la LAMal 1.3 Propositions de réforme par des experts 1.3.1 Bases d'une 3e révision de la LAMal: projet partiel «obligation de contracter» 1.3.2 Etude sur la «Sécurité de l'approvisionnement en médecine de ville dans le cadre de la suppression de l'obligation de contracter» 1.4 Objectifs politiques 1.5 Effet socio-politique 1.6 Procédure de consultation relative à la proposition du Conseil fédéral concernant une révision partielle de la LAMal

4059 4059 4060 4060 4061 4062

2 Principes de bases du projet

4068

3 Partie spéciale: commentaires des différentes propositions

4069

4 Concomitance de la proposition avec les autres modifications de loi en discussion

4079

5 Conséquences 5.1 Conséquences financières 5.1.1 Conséquences financières pour la Confédération 5.1.2 Conséquences financières pour les cantons 5.1.3 Conséquences financières pour l'assurance-maladie 5.2 Conséquences économiques

4079 4079 4079 4079 4080 4080

6 Lien avec la réforme de la péréquation financière et de la répartition des tâches entre la Confédération et les cantons

4081

7 Lien avec le programme de la législature

4081

8 Relation avec le droit européen 8.1 Le droit de la Communauté européenne 8.2 Les instruments du Conseil de l'Europe 8.3 Compatibilité du projet avec le droit européen

4081 4081 4082 4083

9 Bases juridiques 9.1 Constitutionnalité 9.2 Délégation des compétences législatives

4083 4083 4083

Loi fédérale sur l'assurance-maladie (Projet)

4085

4058

4062 4063 4064 4067 4068

Message 1

Partie générale

1.1

Genèse

C'est lors des délibérations sur la 1re révision de la LAMal qu'a été abordée pour la première fois par le Parlement la question de la suppression de l'obligation de contracter. Dans son message du 21 septembre 1998 relatif à cette révision (FF 1999 727), le Conseil fédéral a proposé d'introduire des budgets globaux dans le secteur ambulatoire afin de maîtriser les coûts. Lors des débats, les deux Chambres ont estimé que cet instrument, notamment son mode de fonctionnement, n'était pas encore au point. Le Parlement et le Conseil fédéral se sont cependant accordés sur le fait qu'il était nécessaire de poursuivre les efforts dans le domaine de la maîtrise des coûts et qu'il fallait pour cela développer de nouveaux instruments en la matière.

Lors de ses délibérations, le Parlement s'est donc opposé à l'introduction du budget global dans le domaine ambulatoire, mais a décidé en revanche d'ouvrir le débat sur la suppression de l'obligation de contracter. A cette occasion en effet, le Conseil national a approuvé une proposition qui prévoyait que le Conseil fédéral devait fixer les critères de qualité et d'économicité des prestations auxquels doivent répondre les fournisseurs de prestations pour pouvoir adhérer à une convention tarifaire. Toutefois, lors de la procédure d'élimination des divergences, cette proposition du Conseil national a été rejetée au profit de la solution retenue à l'art. 55a LAMal.

La commission de la sécurité sociale et de la santé publique du Conseil national a par la suite déposé une motion (00.3003) qui demandait au Conseil fédéral d'examiner la question de la suppression de l'obligation de contracter dans les secteurs ambulatoire, semi-hospitalier et hospitalier et de présenter des modifications législatives y relatives dans le cadre de la 2e révision de la LAMal. Début 2000, le Conseil fédéral a reçu des deux chambres le mandat d'examiner cette question.

La proposition mise en consultation par le Conseil fédéral en juin 2000 prévoyait un modèle qui limitait la suppression de l'obligation de contracter au seul domaine ambulatoire, la loi prévoyant déjà, dans le domaine hospitalier, divers instruments pour réguler le volume des prestations fournies et maîtriser les coûts. Selon ce modèle, les assurés ne pouvaient plus choisir, dans le secteur ambulatoire, que parmi les
fournisseurs de prestations avec qui leur assureur avait conclu un contrat d'admission et qui par conséquent étaient habilités à pratiquer pour ce dernier à charge de l'assurance-maladie. Les résultats de la procédure de consultation ont mis en évidence que si de nombreux milieux étaient en principe favorables à un renforcement de la notion de concurrence dans la LAMal et donc aussi à l'idée de supprimer l'obligation de contracter, ils étaient par contre sceptiques envers le modèle proposé; ils le jugeaient inadapté, impossible à mettre en pratique voire lui déniaient une quelconque efficacité au niveau des coûts. Ils lui reprochaient également un trop gros transfert de pouvoir au profit des assureurs et l'absence d'indicateurs pour juger du respect des conditions du caractère économique et de la garantie de la qualité des prestations. Après analyse, le Conseil fédéral a renoncé à proposer au Parlement, dans le cadre de son message du 18 septembre 2000 concernant la révision partielle de la LAMal (FF 2001 693), une suppression de l'obligation de contracter concer4059

nant tous les fournisseurs de prestations actifs dans le secteur ambulatoire. Il s'est prononcé par contre pour une suppression limitée aux fournisseurs âgés de plus de 65 ans révolus. Le Conseil fédéral a toutefois renoncé à soutenir sa proposition durant les débats parlementaires.

1.2

Demandes de révision

1.2.1

Interventions parlementaires

Motion Groupe radical-libérage «Limitation du nombre de médecins. Accompagnement scientifique» La motion déposée le 18 septembre 2002 (02.3446) demande que soit confiée à des experts extérieurs à l'administration une étude scientifique sur les effets du moratoire instituée le 3 juillet 2003 par le Conseil fédéral sur l'admission de nouveaux fournisseurs de prestations actifs dans le secteur ambulatoire et qu'un rapport à cet effet soit présenté au Parlement avant l'expiration de ce moratoire, portant notamment sur les points suivants: mise en oeuvre du moratoire dans les cantons; effets de cette mesure sur la quantité et la qualité des soins prodigués par région et par catégorie de fournisseurs de prestations; effets du moratoire sur la profession de médecin et perspectives d'évolution à terme de la densité de médecins; effets du moratoire sur les coûts de la santé en général; effets du moratoire sur la liberté économique garantie par la Constitution; compatibilité de l'ordonnance du Conseil fédéral et de sa mise en oeuvre par les cantons avec l'art. 55a LAMal; chiffres ayant servi de base à l'élaboration de l'ordonnance. Dans sa prise de position, le Conseil fédéral s'est déclaré prêt à faire étudier les quatre premiers points; par contre, il s'est opposé à l'examen des trois suivants considérant qu'ils ne se rapportaient pas aux effets de la mesure prise, mais à des problématiques qui ont été abordées lors des discussions ayant précédé l'adoption de l'art. 55a LAMal et sur lesquelles il n'est pas utile de revenir dans le cadre d'une évaluation des effets de la loi. C'est pour cette raison que le Conseil fédéral n'a pas pu accepter la motion et a proposé de la transformer en postulat. Depuis lors, dans le cadre de la deuxième phase de l'analyse des effets de la LAMal inscrite à l'art. 32 de l'ordonnance sur l'assurance-maladie (OAMal), un mandat de recherche sur l'application du moratoire a été confié par l'administration à un expert indépendant (Ch. Rüefli, Büro Vatter Politikforschung & -beratung, Wirkungsanalyse Bedürfnisabhängige Zulassungsbeschränkung für neue Leistungserbringer, Berne 2004). Le rapport final de ce dernier fera prochainement l'objet d'une publication.

Postulat de la Commission de sécurité sociale et de la santé publique du Conseil national demandant un rapport sur la liberté
contractuelle Dans le cadre des délibérations sur la 2e révision de la LAMal (00.079), la Commission a déposé, le 14 novembre 2002, un postulat (02.3644) priant le Conseil fédéral de présenter un rapport sur l'introduction de la liberté contractuelle dans les domaines ambulatoire et hospitalier en même temps que le projet de financement moniste et d'y faire notamment état des possibilités de mise en oeuvre dans les cantons. Le Conseil fédéral s'est déclaré prêt à accepter le postulat. Depuis lors, dans le but de jeter les bases d'une 3e révision de la LAMal, le Conseil fédéral a précisément chargé le Département fédéral de l'intérieur (DFI) d'examiner de manière approfondie des réformes à long terme, portant notamment sur la suppression de l'obligation 4060

de contracter également pour le domaine hospitalier et le passage à un système de financement moniste, et de lui faire des propositions en la matière (cf. à cet égard, ch. 1.3.1). Il est prévu que le Conseil fédéral prendra connaissance des rapports y relatifs, établis par des experts externes, en même temps que les messages partiels.

Avec la prochaine publication de ces rapports, le Conseil fédéral considère que le mandat est rempli.

1.2.2

Deuxième révision de la LAMal

Lors des délibérations sur la 2e révision de la LAMal, la Conférence de conciliation a adopté un modèle de suppression partielle de l'obligation de contracter qui a toutefois été rejeté lors du vote final devant le Conseil national au même titre que l'ensemble du projet de révision. Ce modèle contenait notamment les propositions suivantes: ­

Pour être admis à pratiquer à la charge de l'assurance obligatoire des soins, les fournisseurs de prestations doivent soit, s'ils sont actifs dans le secteur ambulatoire, conclure un contrat d'admission avec un ou plusieurs assureurs, soit fournir toutes leurs prestations dans le cadre d'un réseau de soins coordonnés qui est une forme particulière d'assurance reposant sur un contrat conclu entre un ou plusieurs assureurs et un groupe de fournisseurs de prestations.

­

Les fournisseurs de prestations et les assureurs sont libres de choisir leurs partenaires contractuels. Cette liberté est subordonnée au respect d'un certain nombre de conditions (caractère économique et qualité des prestations, garantie d'une couverture en soins suffisante, respect de la loi sur les cartels) et est exclue dans un cas particulier (patients âgés souffrant de maladies chroniques et ayant une relation thérapeutique durable avec leur fournisseur de prestations).

­

Les cantons sont tenus de déterminer, dans le domaine ambulatoire, le nombre de fournisseurs de prestations nécessaire pour garantir la couverture en soins et la liberté de choix dans le rapport d'assurance. Les assureursmaladie sont tenus de conclure un contrat d'admission avec au moins autant de fournisseurs de prestations que le nombre fixé par le canton. Le Conseil fédéral détermine la date à laquelle les cantons doivent avoir déterminé ce nombre. Jusque-là, les chiffres relatifs à la couverture en soins fixés sur la base de l'art. 55a LAMal valent comme nombres minimaux.

­

Les fournisseurs de prestations et les assureurs peuvent porter le refus de conclure un contrat d'admission devant une commission arbitrale cantonale, statuant à titre définitif, composée de deux représentants de leurs organisations respectives et d'un représentant du canton qui la préside.

­

Les contrats d'admission sont conclus pour une durée minimale de quatre ans. Il est possible de les résilier pour la fin d'une année civile moyennant un délai de résiliation de 18 mois. La résiliation doit être motivée si le fournisseur de prestations le demande.

4061

­

Les assureurs sont tenus de conclure un contrat d'admission d'une durée transitoire de quatre ans avec tous les fournisseurs de prestations actifs dans le secteur ambulatoire qui, le 1er janvier 2003, étaient autorisés à pratiquer à la charge de l'assurance obligatoire des soins.

1.3

Propositions de réforme par des experts

1.3.1

Bases d'une 3e révision de la LAMal: projet partiel «obligation de contracter»

Lors d'une séance spéciale du 22 mai 2002 portant sur l'assurance-maladie sociale, le Conseil fédéral est arrivé à la conclusion que la LAMal a donné globalement de bons résultats, mais qu'il faut renforcer les mesures de maîtrise des coûts et réformer l'assurance-maladie par étapes en ce sens. Le Conseil fédéral a chargé le DFI d'examiner de manière approfondie des réformes à long terme dans différents domaines, dont celui de l'admission des fournisseurs de prestations, et de lui faire des propositions pour la mi-juin 2003. Dans ce cadre, mandat a notamment été donné au DFI d'élaborer des modèles réalisables de suppression de l'obligation pour les assureurs-maladie de contracter avec les médecins et éventuellement les hôpitaux. Pour réaliser cette tâche, le DFI a mis sur pied un groupe de travail dirigé par un expert en économie de la santé (Dr. oec. HSG W. Oggier, Gesundheitsökonomische Beratungen AG).

En résumé et compte tenu des conditions formulées dans le mandat, l'expert consulté a considéré que les éléments suivants jouent en particulier un rôle capital dans l'optique d'une suppression de l'obligation de contracter: ­

La suppression de l'obligation de contracter doit être mise en oeuvre tant dans le domaine ambulatoire que dans le domaine hospitalier.

­

Les fournisseurs de prestations ne doivent pas pouvoir avoir d'intérêts financiers dans les assureurs, ni les assureurs dans les fournisseurs de prestations.

Une réglementation analogue doit être prévue pour les «sous-traitants» (firmes pharmaceutiques, entreprises spécialisées en technique médicale, etc.).

­

Les prix doivent être fixés dans le cadre de négociations contractuelles entre les fournisseurs de prestations et les assureurs, avec pour effet une libéralisation des prix, des solutions de remplacement étant formulées pour le cas où les négociations n'aboutiraient pas. Une libéralisation des prix impliquerait la suppression de l'art. 43, al. 5, LAMal. De ce fait, les prestations individuelles ne doivent plus impérativement être remboursées sur la base du nouveau tarif médical TARMED. Tant les assureurs-maladie que les fournisseurs de prestations doivent pouvoir négocier plus souvent des formes et des niveaux différents de rémunération ou des combinaisons de formes de rémunération pour des groupes d'assurés ou des traitements différents.

­

En cas d'échec des négociations tarifaires, il faut prévoir une voie de recours: Commission de la concurrence, Commission de recours, puis Tribunal fédéral ou Conseil fédéral.

Si l'objectif principal de la suppression de l'obligation de contracter est la maîtrise des coûts, il y a lieu de retenir au moins les points supplémentaires suivants:

4062

­

Les chiffres relatifs à la planification des besoins cantonaux doivent être fixés à un niveau aussi bas que possible. Ces valeurs ne doivent pas être partout les mêmes, pour tenir compte du fait que les besoins varient selon les régions. Les différences entre ville et campagne, ainsi que les disparités démographiques doivent en particulier être prises en considération.

­

L'offre extracantonale doit être prise en compte. Le critère décisif doit être dans ce cas l'accessibilité.

­

Si les cantons prévoient une offre en soins dépassant celle minimale fixée par la Confédération, on pourrait imaginer une participation cantonale proportionnelle au remboursement incombant à l'assureur. Dans ce cas, les assureurs ne sont plus tenus de payer la part correspondante des coûts. Si par contre les assureurs concluent davantage de contrats que ne le prévoit le canton en respectant les dispositions fédérales, ils doivent prendre en charge l'intégralité des coûts.

Sur la base de ce qui précède, le rapport d'expert préconise un modèle de suppression de l'obligation de contracter présentant les caractéristiques suivantes: ­

La suppression s'applique tant dans le domaine ambulatoire que dans le domaine hospitalier.

­

Tous les fournisseurs de prestations sont concernés.

­

La suppression s'applique à tous les traitements, donc aussi aux urgences.

Les réseaux disposent impérativement d'un service d'urgences et d'une permanence, auxquels les assurés doivent d'abord s'adresser. En cas d'urgence, ce service exerce une fonction de triage.

­

La couverture en soins est définie par des normes minimales formulées par les offices fédéraux compétents, qui doivent être respectées par les cantons et les partenaires contractuels. Les cantons qui fixent des valeurs supérieures sont tenus d'en assumer les coûts, et non pas les assureurs.

­

La loi sur les cartels s'applique: ­ il n'y a pas de conventions conclues par des associations faîtières; ­ les hôpitaux deviennent autonomes sur les plans économique et organisationnel.

1.3.2

Etude sur la «Sécurité de l'approvisionnement en médecine de ville dans le cadre de la suppression de l'obligation de contracter»

En juin 2001, santésuisse, l'association faîtière des assureurs-maladie, a mandaté deux éminents économistes de la santé, les professeurs Gianfranco Dominighetti et Luca Crivelli, pour élaborer un concept pour la promotion de la sécurité de l'approvisionnement en soins en tant qu'outil d'appui à la suppression de l'obligation de contracter dans le cadre de la 2e révision de la LAMal. Le résultat de leur travail figure dans une étude intitulée «Sécurité de l'approvisionnement en médecine de ville dans le cadre de la suppression de l'obligation de contracter» qui date du mois d'août 2001. Les auteurs sont arrivés à la conclusion que les différentes densités médicales constatées en Suisse ne paraissent pas avoir d'influence sur la qualité et la 4063

sécurité de l'approvisionnement en soins en comparant différents indicateurs sanitaires subjectifs et objectifs comme la satisfaction des patients, leur mortalité, l'activité et les coûts. Selon cette étude, la Suisse comptait fin 2000 un peu plus de 19 médecins en pratique privée pour 10 000 habitants; pour le canton de Bâle-ville ce chiffre était presque de 36, pour le canton de Genève de 32, alors que différents cantons de Suisse orientale et de Suisse centrale en recensaient moins de 13. Les auteurs de l'étude constatent cependant que le degré de satisfaction de la population quant aux soins reçus, ainsi que le degré de perception de signes de rationnement tout comme les résultats sanitaires mesurés en terme de mortalité évitable grâce aux interventions médicales sont pratiquement identiques en dépit de différences très importantes en termes de densité médicale. Par contre, cette dernière a une nette influence sur l'activité (visites et consultations) et les coûts par assuré à la charge de l'assurance obligatoire des soins. Afin d'étayer leur thèse, les auteurs ont comparé, sur la base des indicateurs susmentionnés, cinq groupes de cantons à densité médicale croissante (de 11 à plus de 30 médecins pour 10 000 habitants) ainsi qu'une zone relativement homogène de la Suisse orientale (Saint-Gall et les deux cantons d'Appenzell). La comparaison laisse apparaître qu'en présence d'une densité médicale d'environ 15 médecins par 10 000 habitants, qui est celle que connaît la région de Suisse orientale (région de référence), les indicateurs de satisfaction, de perception de rationnement et de mortalité sont pratiquement identiques à la valeur de la moyenne suisse et à ceux des cantons ayant des densités médicales doubles. En revanche, les indicateurs d'activité et notamment de coûts montrent des dépenses par assuré pour la médecine ambulatoire dispensée en cabinet et à l'hôpital significativement inférieures pour cette région de référence. Une densité médicale moindre permet donc de garantir un approvisionnement médical adéquat et d'atteindre le même taux de satisfaction de la population, tout en ayant un effet réducteur de coûts.

Les auteurs de l'étude se déclarent persuadés que la suppression de l'obligation de contracter et le renforcement de la concurrence qui s'en suit constituent des instruments
adéquats pour parvenir à maîtriser le nombre croissant de fournisseurs de prestations qui a conduit dans plusieurs régions à une surmédicalisation. Cependant, ils font remarquer que le marché à lui seul ne saurait garantir automatiquement la sécurité de l'approvisionnement en soins; de ce fait, l'Etat devrait exercer une fonction régulatrice dans le but de garantir à l'ensemble de la population un accès aux soins à des conditions financières supportables. L'étude propose que le nombre de médecins libres praticiens nécessaire pour garantir la sécurité de l'approvisionnement soit décidé sur la base d'un paramètre établi pour l'ensemble de la Suisse ainsi que la proportion de «médecins de base». Les cantons doivent ensuite pouvoir modifier le paramètre national en fonction de conditions locales.

1.4

Objectifs politiques

La LAMal répond à trois objectifs majeurs qui sont l'accès de l'ensemble de la population à une offre de soins de haute qualité, le renforcement de la solidarité entre assurés et la maîtrise des coûts. Si des évaluations des effets de la loi effectuées par des experts indépendants ont mis en évidence que les deux premiers buts ont pour l'essentiel été réalisés, force est de constater que l'objectif de la maîtrise des coûts n'a pas pu être atteint dans la mesure souhaitée par le Conseil fédéral. En effet, la hausse des coûts à la charge de l'assurance obligatoire des soins a été constante. Or, selon les experts, une des causes essentielles de cette évolution des coûts 4064

est l'augmentation régulière du nombre de fournisseurs de prestations pratiquant à la charge de cette assurance, notamment dans le secteur ambulatoire. C'est précisément sur cet aspect que le Conseil fédéral entend mettre l'accent dans le cadre du présent projet, avec comme objectif de parvenir à maîtriser l'évolution des coûts à la charge de l'assurance obligatoire des soins.

Il existe trois moyens de freiner l'accroissement du volume des prestations et des coûts provoqué par une augmentation du nombre de fournisseurs de prestations. Il s'agit d'une part du budget global, d'autre part de la clause du besoin et enfin de la liberté de contracter.

S'agissant de l'établissement de budgets globaux dans le secteur ambulatoire, nous avons déjà relevé sous ch. 1.1 que les deux Chambres sont parvenues à la conclusion, lors des débats parlementaires sur la 1re révision de la LAMal, que cet instrument n'était pas encore au point. Force est aujourd'hui de constater que la situation n'a guère évolué. L'établissement de tels budgets, mais surtout leur gestion ne sont pas sans poser problème comme le prouvent les expériences faites en Allemagne.

Pour ces raisons, le Conseil fédéral n'entend pas proposer ce moyen dans le cadre de la présente révision.

Pour ce qui est de la clause du besoin, le Parlement a retenu cette mesure dans le cadre de la 1re révision de la LAMal. Le Conseil fédéral n'entend toutefois pas la reprendre dans le cadre du présent projet en la prolongeant dans le temps. Il était en effet clair dès le départ que la clause du besoin constituait une mesure extraordinaire qui devait être limitée dans la durée. Avec cet instrument en effet, la pression qui devrait normalement être exercée par la concurrence de nouveaux fournisseurs de prestations désireux de s'installer et qui devrait pousser les fournisseurs de prestations déjà en activité à fournir des prestations de qualité au meilleur coût fait défaut.

La liberté de contracter a quant à elle été proposée par les deux chambres dans le cadre de leurs délibérations sur la 2e révision de la LAMal. Contrairement aux deux moyens évoqués ci-dessus, cette mesure présente non seulement l'avantage de conduire à une limitation du nombre de fournisseurs de prestations, mais aussi de constituer une incitation pour les fournisseurs de prestations placés
dans une situation de concurrence sur le marché de l'assurance à fournir des prestations de qualité tout en veillant à leur caractère économique précisément pour avoir une chance d'accéder à ce marché ou d'y rester. Avec la LAMal, des éléments de concurrence ont certes été introduits dans le domaine de l'assurance obligatoire des soins, mais les assureurs ne disposent aujourd'hui toujours pas de l'instrument classique de concurrence à savoir la possibilité de choisir entre plusieurs fournisseurs de prestations. Avec l'obligation actuelle de contracter, la question de savoir si la couverture en soins dans un canton ou dans une région est excessive ou non, ou encore si la fourniture de prestations intervient de manière efficiente ou non, ne joue en outre pratiquement aucun rôle. Dans un tel contexte juridique, il est quasi impossible d'enrayer l'expansion quantitative des fournisseurs de prestations et des prestations ainsi que l'augmentation des coûts qui en découle. La suppression de l'obligation de contracter paraît aujourd'hui être la seule mesure qui permet de freiner cette spirale infernale de manière efficace. C'est la raison pour laquelle le Conseil fédéral, après mûres réflexions, se prononce pour cette mesure dans le cadre de la présente révision; il entend toutefois l'assortir d'un certain nombre de garde-fous sur lesquels il reviendra plus loin.

4065

Avec le modèle de liberté de contracter qu'il entend proposer dans le cadre de la présente révision, le Conseil fédéral poursuit avant tout deux objectifs.

Le premier est le renforcement de la concurrence entre les fournisseurs de prestations d'une même profession dans le secteur ambulatoire et la mise à l'écart du marché de l'assurance obligatoire des «moutons noirs», soit les fournisseurs qui dispensent des prestations non économiques ou qui ne sont pas de qualité. Pour ce faire, le Conseil fédéral entend laisser aux assureurs-maladie la liberté de choisir leurs partenaires contractuels et, partant, les responsabiliser à ce sujet. La concurrence ne peut fonctionner que si les assureurs peuvent négocier avec les fournisseurs de prestations en disposant d'une certaine marge de manoeuvre. Les assureurs ou les groupes d'assureurs doivent pouvoir acquérir leur profil propre de manière à offrir à leurs assurés différentes possibilités de choix. Or il faut bien convenir que le profil de l'assureur se forge avant tout à partir du choix des fournisseurs de prestations avec lesquels il veut travailler. En effet, dans le cadre de l'assurance obligatoire des soins, les assureurs ne peuvent pas se faire concurrence sur les prestations qu'ils prennent en charge puisque le catalogue des prestations remboursées par cette assurance s'impose à tous les assureurs de la même manière.

Le second objectif que poursuit le Conseil fédéral avec son modèle est la diminution de la couverture excédentaire des besoins en soins ambulatoires dans les cantons, lorsqu'elle existe. Pour ce faire, il entend responsabiliser les cantons en les contraignant à déterminer un nombre minimal de fournisseurs de prestations nécessaire pour garantir la couverture des besoins en soins de leur population pour chacune des catégories de fournisseurs de prestations actifs dans le secteur ambulatoire. La volonté du Conseil fédéral de renforcer le rôle des cantons en matière d'approvisionnement en soins et de les placer devant leurs responsabilités résulte en premier lieu de la répartition constitutionnelle des compétences entre cantons et Confédération dans le domaine sanitaire. En effet, faute de compétence expresse de la Confédération en la matière dans la Constitution fédérale, il incombe aux cantons de garantir la couverture des besoins en
soins de leur population. La volonté du Conseil fédéral d'impliquer plus fortement les cantons sur ce point dépasse toutefois le simple cadre de la répartition des compétences entre cantons et Confédération. En effet, le Conseil fédéral considère que le marché de l'assurance obligatoire des soins ne saurait à lui seul garantir automatiquement la sécurité de l'approvisionnement en soins ambulatoires de l'ensemble de la population. Si le modèle contractuel fondé sur la concurrence devait être introduit en dehors de toute contrainte étatique en la matière, il ouvrirait des horizons aux assureurs-maladie pour procéder à une sélection des risques sur le marché de l'assurance dans la mesure où la liberté contractuelle pleine et entière dont il jouirait leur permettrait de sélectionner les patients en choisissant les fournisseurs de prestations en fonction du degré de risque de leur clientèle. Les assureurs pourraient ainsi être tentés, notamment pour faire baisser leurs primes, de ne pas conclure de contrat avec des fournisseurs de prestations dont la clientèle se compose pour l'essentiel de malades chroniques ou de personnes âgées, le but final étant de pousser ces catégories d'assurés à changer d'assureur pour pouvoir poursuivre la relation thérapeutique auprès leur fournisseur de prestations actuel. Le risque existe ensuite que, par crainte de se voir refuser l'accès au marché de l'assurance-maladie, les fournisseurs de prestations soient eux-mêmes incités à sélectionner leur clientèle en fonction des risques que chaque individu présente et à se débarrasser des patients qui génèrent des coûts particulièrement élevés.

4066

1.5

Effet socio-politique

Le modèle de liberté de contracter préconisé par le Conseil fédéral devrait conduire à une stagnation, voire à une réduction du nombre global de fournisseurs dispensant des prestations sous forme ambulatoire en Suisse. A moyen terme, cette mesure devrait constituer un frein à l'augmentation constante des coûts à la charge de l'assurance obligatoire des soins et à l'augmentation des primes qui en résulte. Les avantages financiers liés en Suisse à l'ouverture d'un cabinet de praticien privé s'en trouveraient diminués, à tout le moins dans les régions et dans les spécialités où il existe une couverture excédentaire en soins. Considérant le risque économique entraîné par l'ouverture d'un tel cabinet si l'obligation de contracter devait être supprimée, il y a lieu de penser que certains fournisseurs de prestations, notamment les médecins, renonceront à s'installer à leur compte aux termes de leurs études et préféreront rester dans le secteur hospitalier, où sévit par ailleurs une pénurie de médecins nécessitant aujourd'hui de faire appel à des médecins étrangers.

Le modèle préconisé par le Conseil fédéral devrait dans le même temps favoriser une meilleure répartition de la couverture en soins sur le territoire suisse, notamment dans le domaine médical. Il devrait en effet inciter les fournisseurs de prestations, notamment les médecins, qui avaient pris l'habitude, aux termes de leur formation, d'ouvrir leur cabinet dans les zones urbaines ou péri-urbaines, zones dans lesquelles il existe déjà souvent une offre excédentaire en soins, à s'établir plutôt dans les zones périphériques, zones qui connaissent souvent une lacune dans la couverture médicale, pour bénéficier d'un contrat d'admission avec les assureurs-maladie. La liberté de contracter devrait ainsi contribuer à terme à un certain nivellement des coûts et, partant, des primes entre les cantons et les régions.

Avec l'introduction de la liberté de contracter, les assurés seront cependant quelque peu limités dans leur possibilité de choix de leur assureur; en effet, ils ne pourront plus choisir leur assureur seulement sur la base du montant des primes qu'il pratique et éventuellement des prestations de services offertes. Le fait de savoir quels sont les fournisseurs de prestations avec qui leur assureur est lié contractuellement constituera également
un facteur décisif dans la mesure où le contrat d'admission déterminera si les prestations d'un fournisseur donné seront prises en charge ou non. Partant, chaque assuré pourra choisir son assureur sur la base d'une combinaison optimale à ses yeux entre la prime à payer et l'offre offerte et souhaitée. On peut certes voir dans cette mesure un désavantage pour les assurés qui pourraient être contraints de changer d'assureur pour continuer d'être suivi par leur médecin de famille par exemple si celui-ci n'est pas ou plus lié par un contrat d'admission à leur assureur actuel et que donc ses prestations ne sont plus prises en charge par ce dernier. Mais, en même temps, les assurés seront tenus de comparer la qualité et les coûts des diverses offres, ce qui ne peut que les responsabiliser quant à leur façon de consommer des soins. Il devrait en résulter d'autre part un renforcement de la concurrence entre assureurs notamment quant à l'étendue de leur offre, mais aussi et surtout entre fournisseurs de prestations sur le plan de la qualité et de l'économicité des prestations fournies. En effet, si les fournisseurs de prestations du secteur ambulatoire, mais aussi les assureurs-maladie, désirent être concurrentiels et surtout attractifs sur le marché de l'assurance obligatoire des soins, il est dans leur intérêt de veiller à ce que les soins fournis aux patients-assurés soient appropriés et leur qualité de haut niveau, tout en étant le plus avantageux possible.

4067

1.6

Procédure de consultation relative à la proposition du Conseil fédéral concernant une révision partielle de la LAMal

La proposition du Conseil fédéral concernant la révision partielle de la LAMal dans le domaine de la liberté de contracter a été mise en consultation auprès des cantons, des partis politiques et des milieux intéressés en mars 2004. Les résultats ont mis en évidence qu'un nombre important de participants sont en principe favorable à un renforcement de la concurrence, mais qu'ils sont sceptiques quant au modèle proposé, le jugeant inadapté et difficile à mettre en pratique, voire lui déniant un quelconque effet sur les coûts.

Parmi les principales critiques émises contre le projet du Conseil fédéral, relevons le fait qu'il ne prévoit pas de critères de sélection positifs pour le choix des fournisseurs de prestations et de voie(s) de recours en cas de refus d'un partenaire de contracter et partant, qu'il se caractérise par un trop grand transfert de pouvoir vers les assureurs. Les cantons, opposés à la poursuite du gel actuel des admissions fondé sur l'art. 55a LAMal, soutiennent dans leur majorité le projet de liberté de contracter, avec toutefois un certain nombre de réserves; ils estiment en particulier que la liberté de contracter doit être limitée aux médecins et aux chiropraticiens car ce sont les seuls fournisseurs de prestations qui prescrivent des prestations et qui sont en mesure d'influer sur le volume des prestations qu'ils fournissent eux-mêmes. Ils font en outre valoir qu'il n'est en l'état pas concevable de planifier le secteur ambulatoire dans le sens de ce que prévoit le projet de loi, du fait de l'insuffisance actuelle de données sur les fournisseurs de prestations ambulatoires, et ils réclament que la Confédération remédie au préalable à cette lacune. Quelques-uns des participants, favorables à l'introduction de la liberté de contracter, souhaiteraient l'étendre également au domaine hospitalier, en particulier pour éviter les problèmes de délimitation avec le secteur ambulatoire. Les fournisseurs de prestations et les organisations d'assurés et de consommateurs ont surtout mis l'accent sur l'importance de la relation entre le fournisseur de prestations, notamment le médecin, et son patient pour critiquer la limitation du choix du fournisseur de prestations, notamment du médecin, qu'occasionnera pour les assurés le projet de liberté de contracter. En résumant, on peut dire que,
pour autant que l'idée et le modèle du Conseil fédéral aient rencontré quelque acceptation, aucun des points proposés, à l'exception de l'obligation des assureurs d'informer les assurés et du renforcement du mécanisme de sanctions en cas de non-respect des préceptes d'économicité et de qualité des prestations, n'a recueilli une approbation sans restriction.

2

Principes de bases du projet

En proposant de supprimer l'obligation actuelle de contracter, le Conseil fédéral entend freiner l'évolution des coûts de l'assurance obligatoire des soins par le biais d'une maîtrise du volume des prestations. Pour atteindre cet objectif, il entend d'une part renforcer la concurrence entre les fournisseurs de prestations d'une même profession dans le secteur ambulatoire en conférant aux assureurs-maladie la liberté de les choisir et d'autre part, créer les conditions propres à permettre une limitation de l'offre excédentaire en soins ambulatoires là où cela s'avère nécessaire, en responsabilisant les cantons à cet égard. Avec son projet, le Conseil fédéral souhaite 4068

offrir une plus grande marge de manoeuvre aux assureurs-maladie et aux fournisseurs de prestations quant au choix de leurs partenaires contractuels. Il souhaite toutefois l'assortir de quelques garde-fous qui constituent autant de conditions-cadre nécessaires à la réalisation de son modèle: ­

Garantie de la couverture des besoins en soins: Tout comme les deux chambres lors des délibérations sur la 2e révision de la LAMal, le Conseil fédéral souhaite que les cantons définissent et garantissent la couverture des besoins en soins de leur population, mais à l'intérieur d'un cadre préalablement établi par lui pour éviter de trop grandes disparités dans la couverture en soins entre cantons. Il entend ensuite que les assureurs respectent les nombres minimaux de fournisseurs de prestations fixés par les cantons pour garantir la couverture en soins des assurés, sans pour autant les empêcher d'aller au-delà en fonction de leur politique d'entreprise. Lorsque la sécurité de l'approvisionnement en soins est garantie, les assureurs doivent pouvoir refuser de conclure un contrat d'admission avec un autre fournisseur de prestations.

­

Respect des exigences du caractère économique et de la garantie de la qualité des prestations: Ce n'est pas parce qu'un fournisseur de prestations remplit les conditions légales en matière de formation et qu'il répond aux exigences d'économicité et de qualité des prestations fixées par la loi qu'il a droit à un contrat d'admission. Par contre, les fournisseurs de prestations qui sont au bénéfice d'un contrat d'admission doivent respecter les exigences légales voire conventionnelles relatives au caractère économique et à la qualité des prestations. Pour ceux qui ne s'y soumettraient pas pendant la durée du contrat d'admission («moutons noirs»), le Conseil fédéral entend élargir le catalogue des sanctions pouvant être prononcées par le tribunal arbitral cantonal et, le cas échéant, par le tribunal fédéral des assurances, sur proposition d'un assureur ou d'une fédération d'assureurs.

3

Commentaires des différentes propositions

Art. 35, al. 1 Le principe du droit actuel selon lequel les fournisseurs de prestations doivent remplir les exigences énoncées aux art. 36 à 40 LAMal pour être admis à pratiquer à la charge de l'assurance obligatoire des soins demeure inchangé; il ne constituera toutefois plus à lui seul une condition suffisante permettant aux fournisseurs qui dispensent des prestations sous forme ambulatoire d'accéder au marché de l'assurance obligatoire des soins. Ceux-ci devront en effet en plus être liés par un contrat d'admission à un ou plusieurs assureurs-maladie reconnus. Un des objectifs principaux de l'introduction de la liberté contractuelle est précisément que les assureurs, sous réserve des traitements intervenant dans des cas d'urgence, ne prennent plus en charge que les prestations des fournisseurs avec lesquels ils ont conclu un contrat d'admission. Pour que la liberté de contracter puisse véritablement déployer tous ses effets, et notamment créer les incitations nécessaires à la promotion de réseaux de soins intégrés offrant toutes les prestations de l'assurance obligatoire des soins, cette mesure doit s'appliquer à tous les fournisseurs qui dispensent des prestations sous forme ambulatoire et à eux seuls. Seront donc concernés non seulement les méde4069

cins, les institutions de soins ambulatoires dispensés par des médecins, les pharmaciens, les dentistes, les chiropraticiens et les sages-femmes, mais aussi toutes les personnes prodiguant des soins sur prescription médicale et les organisations qui les emploient, à savoir les physiothérapeutes, les ergothérapeutes, les infirmières et les infirmiers, les logopédistes/orthophonistes, les diététiciens ainsi que les organisations de soins et d'aide à domicile et les organisations d'ergothérapie. Il en va de même des établissements de cure balnéaire et des laboratoires. Le Conseil fédéral considère que le domaine ambulatoire des hôpitaux doit également être soumis à la réglementation concernant la liberté de contracter, même si cela pourra poser quelques problèmes de délimitation par rapport au secteur hospitalier des hôpitaux dans la pratique. Il s'agit d'éviter de fausser la concurrence entre les prestations ambulatoires fournies en milieu hospitalier et celles dispensées ambulatoirement en cabinet privé voire à domicile. Par contre, s'agissant du domaine hospitalier des hôpitaux et des établissements médico-sociaux, l'obligation de contracter des assureurs doit être maintenue. En effet, dans ces deux domaines, la loi prévoit déjà divers instruments de régulation du nombre de fournisseurs de prestations et de maîtrise des coûts qui ont commencé à porter leurs fruits.

Art. 35a, al. 1 (nouveau) Dans un système fondé sur un modèle de contrat ouvert à la concurrence qui tend à renforcer l'autonomie contractuelle des parties, fournisseurs de prestations et assureurs doivent en principe pouvoir choisir librement leurs partenaires contractuels.

Pour les uns comme pour les autres, la seule véritable restriction au libre choix de leurs partenaires contractuels doit résider dans la garantie pour les assurés de pouvoir disposer des soins nécessaires à leur état de santé, autrement dit d'une couverture en soins suffisante. Il y a toutefois lieu de formuler une réserve générale de portée déclaratoire dont l'objectif est de rappeler aux fournisseurs de prestations et aux assureurs qu'ils sont liés par les dispositions pertinentes de la loi fédérale sur les cartels (RS 251) et qu'ils ne peuvent exercer leur activité que dans les limites de cette loi.

Art. 35a, al. 2 (nouveau) Comme déjà relevé, le Conseil fédéral
est d'avis que le marché de l'assurance à lui seul ne saurait garantir la sécurité de l'approvisionnement en soins et qu'il faut donc que les cantons, du fait de leur compétence historique en matière d'approvisionnement en soins, exercent une fonction régulatrice pour garantir à la population un accès égal aux soins à des conditions financièrement supportables. Se basant sur le constat selon lequel les différentes densités médicales constatées en Suisse dans les cantons ne paraissent pas avoir d'influence sur la qualité et la sécurité de l'approvisionnement en soins, et pour éviter qu'à l'avenir se perpétuent sur le territoire suisse des disparités par trop importantes s'agissant de la couverture en soins qu'aucun motif de santé publique ne justifierait, le Conseil fédéral estime nécessaire de s'attribuer la compétence de fixer des fourchettes, soit des limites minimales et des limites maximales au nombre de fournisseurs de prestations nécessaire pour garantir, dans les cantons, pour chaque catégorie de fournisseurs de prestations, la couverture des besoins en soins ambulatoires. Cette fixation ne pourra manifestement pas s'appuyer sur des bases strictement scientifiques. Elle sera avant tout le résultat d'une approche pragmatique fondée sur une analyse comparative de la densité médicale dans les différents cantons suivie d'un processus de rapprochement 4070

pour arriver à un paramètre national de densité pour les différentes catégories de fournisseurs de prestations, avec une certaine marge vers le bas et vers le haut pour permettre aux cantons de tenir compte des particularités locales. Dans le cadre des délibérations sur la 2e révision de la LAMal, la Commission de la sécurité sociale et de la santé publique du Conseil national a déposé un postulat (03.3236) priant le Conseil fédéral, par l'entremise du DFI et en collaboration avec les cantons, l'Office fédéral de la statistique et l'Observatoire suisse de la santé, de réaliser une étude prospective sur la démographie médicale à l'échelle nationale. Ladite Commission considérait que la suppression de l'obligation de contracter et la définition des besoins médicaux par les cantons pose le problème de la maîtrise scientifique de la démographie médicale et que, d'un point de vue méthodologique, la définition de ces besoins de manière cloisonnée, canton par canton, n'est pas la solution adéquate.

Le Conseil fédéral s'est déclaré prêt à accepter le postulat.

Selon le projet du Conseil fédéral, il appartiendra ensuite aux cantons de déterminer, à l'intérieur des fourchettes fixées par le Conseil fédéral, en fonction de conditions locales objectives (p. ex. immigration-émigration de patients, degré d'urbanisation, composition de la population selon l'âge), le nombre de fournisseurs de prestations nécessaire pour garantir la couverture en soins de leurs résidants. Ces nombres comme les fourchettes qui les encadrent devront être fixés sur la base d'une activité à temps plein. Dans le cadre de son travail d'évaluation et de détermination de l'approvisionnement sanitaire, le gouvernement cantonal devra veiller à une répartition territoriale équitable des fournisseurs de prestations, par exemple en fixant le nombre de fournisseurs de prestations nécessaire dans tel ou tel district d'un canton, mais aussi tenir compte de l'offre en soins dans les cantons limitrophes. Il prendra également en considération l'ensemble de l'offre en soins ambulatoires dispensés par des médecins ayant le statut d'employés dans le cadre d'institutions au sens de l'art. 36a LAMal, celle représentée par les ergothérapeutes employés par des organisations d'ergothérapie. Il faudra en outre régler la question de la prise en compte de
l'offre en soins ambulatoires dispensés dans le secteur ambulatoire de l'hôpital ou celle fournie par les organisations de soins et d'aide à domicile. Cela passera certainement par une planification des capacités. Pour ce qui est de prise en compte des médecins pratiquant la propharmacie dans la détermination de l'offre, la loi prévoit déjà aujourd'hui que les cantons fixent les conditions auxquelles les médecins autorisés à tenir une pharmacie sont assimilés aux pharmaciens (art. 37, al. 3, LAMal).

Le Conseil fédéral entend souligner à ce stade qu'il est tout à fait conscient des difficultés liées au travail d'évaluation et de détermination de la couverture en soins qu'impose son projet et qu'il ne souhaite pas les occulter. Il estime cependant que ce n'est pas une raison pour ne rien entreprendre dans le domaine de l'offre en soins où il existe un véritable besoin d'agir, même si le résultat de ce travail ne pourra dans un premier temps apparaître qu'imparfait. Ce travail d'évaluation et de détermination de l'offre constitue un processus dynamique qui ne pourra que s'améliorer et s'affiner avec le temps sur la base des expériences acquises.

Art. 35a, al. 3 (nouveau) Pour renforcer la concurrence entre les fournisseurs de prestations visés à l'art. 35, al. 1, let. b, du projet mais aussi entre les assureurs-maladie, le Conseil fédéral entend laisser à ces derniers la liberté de choisir avec quels fournisseurs de prestations ils entendent collaborer, la seule restriction étant qu'ils devront conclure un contrat d'admission avec un nombre de fournisseurs de prestations au moins équiva4071

lent au nombre fixé par le canton. Dans le cadre de leur politique d'entreprise, les assureurs pourront toutefois très bien décider de contracter avec un nombre de fournisseurs de prestations supérieur, de manière à offrir un choix plus large pour s'attirer de nouveaux assurés prêts à payer pour cela des primes plus importantes dans le cadre de l'assurance obligatoire des soins.

Il n'en demeure pas moins qu'une fois atteint le nombre fixé par le canton, les assureurs peuvent refuser de conclure un contrat d'admission avec un fournisseur de prestations qui le leur demanderait, en invoquant le fait que la couverture des besoins en soins est déjà garantie. Le projet ne prévoit donc pas un droit au contrat d'admission, même si le fournisseur de prestations en question respecte les exigences légales du caractère économique et de la garantie de la qualité (art. 56 et 58 LAMal). Lors des délibérations sur la 2e révision de la LAMal, le Conseil fédéral a déjà eu l'occasion de relever que la réglementation proposée ne remettait pas en cause la liberté économique, protégée par l'art. 27 de la Constitution fédérale, qui comprend notamment le libre accès à une activité lucrative privée et son libre exercice, mais qui ne confère pas un droit pour les fournisseurs de prestations à exercer à la charge d'un système de sécurité sociale. Dans le cadre de son projet, le Conseil fédéral n'entend pas reprendre la procédure retenue par la conférence de conciliation dans le cadre de la 2e révision de la LAMal, qui permettait aux fournisseurs de prestations et aux assureurs de porter le refus de conclure un contrat d'admission devant une commission arbitrale cantonale (cf. ch. 1.2). Cela étant, au vu de l'art.

29a de la Constitution fédérale et de l'art. 6 de la Convention européenne des droits de l'Homme, qui garantissent l'accès au juge, une exclusion de toute voie de recours n'est pas admissible. Il faut dès lors partir de l'idée que l'art. 89, al. 1, LAMal est applicable et que partant, le tribunal arbitral, qui est déjà aujourd'hui l'instance compétente pour trancher en première instance des différends entre assureurs et fournisseurs de prestations, pourrait connaître des litiges relatifs au contrat d'admission. L'ouverture d'une voie de droit devant ce tribunal en cas de refus de contracter ne signifie toutefois
pas qu'il peut décider en lieu et place de l'assureur ou du fournisseur de prestations si un contrat aurait dû être conclu. Dans la mesure où le projet laisse aux fournisseurs de prestations et aux assureurs la liberté de contracter ou de ne pas contracter, le fournisseur ou l'assureur qui se sera vu opposer un refus de contracter pourra au plus se prévaloir de culpa in contrahendo, autrement dit d'une violation des règles de la bonne foi dans les pourparlers contractuels. La réalisation des conditions de la culpa in contrahendo donnerait droit non pas à la conclusion d'un contrat d'admission, mais seulement à des dommages-intérêts.

Art. 35a, al. 4 (nouveau) Pour que la bonne exécution par les assureurs de la tâche qui leur est imposée à l'art. 35a, al. 2, du projet, soit assurée, chaque assureur doit communiquer à l'organisme désigné par le gouvernement du canton où il exerce son activité la liste des fournisseurs de prestations avec lesquels il a conclu un contrat d'admission au sens de l'art. 35a. Si cet organisme constate qu'un assureur n'a pas respecté l'obligation qui lui incombe, il doit en aviser l'autorité de surveillance, à savoir l'office fédéral de la santé publique (OFSP), qui prendra les mesures prévues par la loi.

4072

Art. 35a, al. 5 (nouveau) Pour garantir aux assurés une certaine stabilité dans la relation thérapeutique qu'ils ont avec leur fournisseur de prestations, il y a lieu d'interdire aux assureurs-maladie d'exclure de leur liste des fournisseurs de prestations admis, en cours d'année, ceux avec lesquels ils ont conclu un contrat d'admission. Est réservé le cas où, en cours d'année, un fournisseur est exclu temporairement ou définitivement de toute activité à la charge de l'assurance obligatoire des soins en vertu de l'art. 59 LAMal.

Art. 35b (nouveau) Les propositions formulées dans le cadre de la 2e révision de la LAMal en relation avec l'information des assurés par les assureurs d'une part (art. 7a), et par les fournisseurs de prestations d'autre part (art. 41a), doivent être reprises. Pour des raisons de cohérence, il y a toutefois lieu de les regrouper dans un seul article de loi intitulé «information des assurés», article qui doit suivre directement la proposition légale qui consacre l'ancrage du principe contractuel dans la loi pour les fournisseurs qui dispensent des prestations sous forme ambulatoire. En effet, comme nous le verrons ci-dessous, ces deux aspects sont en lien direct.

Information par les assureurs (al. 1): Pour les assurés, la suppression de l'obligation de contracter aura pour effet que l'assurance obligatoire des soins perdra quelque peu de sa transparence, dans la mesure où les assureurs ne seront plus tenus de prendre en charge les traitements effectués par tous les fournisseurs de prestations dispensant des prestations sous forme ambulatoire. Pour y remédier, le projet prévoit que les assureurs seront tenus d'annoncer suffisamment tôt (pour permettre aux assurés de changer d'assureur, cf. art. 7 LAMal) et de manière complète à leurs assurés la liste des fournisseurs de prestations avec lesquels ils sont liés par un contrat d'admission. Cette liste doit également pouvoir être consultée par les autres assurés. Le but est de permettre aux assurés de savoir quels fournisseurs de prestations sont admis à pratiquer à la charge de l'assurance obligatoire des soins pour quels assureurs et de pouvoir se déterminer sur le choix de leur assureur sur cette base.

Information par les fournisseurs de prestations (al. 2): La liberté de choix de l'assuré qui veut ou qui doit consulter un
fournisseur de prestations dépend ­ en l'état actuel du droit ­ avant tout de la question de savoir dans quelle mesure l'assureur, selon le choix du lieu où le fournisseur de prestations exerce son activité, est tenu de prendre les coûts en charge. En effet, l'art. 41 LAMal prescrit que, en cas de traitement ambulatoire, l'assurance obligatoire des soins prend en charge les coûts jusqu'à concurrence du tarif applicable au lieu de résidence ou de travail de l'assuré ou dans les environs. Si la liberté de contracter est introduite dans la LAMal, la liberté de choix de l'assuré dépendra à l'avenir de la question de savoir si son assureur est lié ou non par un contrat d'admission au fournisseur de prestations qu'il entend consulter. Actuellement, les assurés peuvent normalement en tout temps partir du principe que leur assureur remboursera effectivement les prestations ambulatoires qui leur sont dispensées par un fournisseur de prestations. Il incombe seulement à ce dernier d'attirer l'attention de son patient lorsqu'il sait qu'un traitement, une intervention ou ses honoraires ne sont pas couverts par l'assurance obligatoire des soins ou lorsqu'il éprouve ou doit éprouver des doutes à ce sujet (ATF 119 II 456). Si demain la liberté de contracter est introduite dans la LAMal, les assurés n'auront plus cette garantie, avec le risque de se retrouver avec des factures à payer 4073

de leur poche lorsqu'ils auront consulté des fournisseurs de prestations non admis par leurs assureurs. C'est pour éviter cette situation que le Conseil fédéral entend contraindre les fournisseurs de prestations à attirer l'attention de leurs patients, avant le traitement, s'ils ne peuvent pas fournir des prestations pour leurs assureurs à la charge de l'assurance obligatoire des soins faute de contrat d'admission les liant. Le fournisseur de prestation qui omet d'informer n'a pas droit à une rémunération selon la LAMal, précisément en raison de l'absence de contrat d'admission le liant à l'assureur du patient qui le consulte ; il ne peut pas prétendre non plus à des honoraires dans une procédure de droit civil. Il va de soi que les cas d'urgence au sens de l'art. 41, al. 2, let. a, sont réservés. De même, cette réglementation n'est pas applicable dans le cas d'un patient qui, bien qu'ayant été informé par le fournisseur de prestations de l'absence de contrat avec son assureur, entend malgré tout se faire soigner par lui. Il pourra alors faire l'objet de prétentions civiles.

Art. 41, al. 1 et 2, let. a Le principe selon lequel l'assuré a le libre choix entre les fournisseurs de prestations admis et aptes à traiter sa maladie n'est pas remis en cause, même si, dans les faits, avec l'introduction de la liberté de contracter dans le secteur ambulatoire, sa portée devrait être quelque peu réduite. L'art. 41, al. 1, 1re phrase, LAMal peut être maintenu tel quel.

Cela étant, comme déjà relevé en relation avec la proposition d'art. 35b, l'introduction de la liberté de contracter dans le domaine ambulatoire aura des répercussions sur la prise en charge des coûts en cas de traitement ambulatoire qui nécessitent de modifier la disposition topique. Par contre, la réglementation de la prise en charge des coûts en cas de traitement hospitalier n'est pas touchée par cette mesure.

Actuellement, la liberté de choix du fournisseur de prestations par les assurés est quasi totale dans le secteur ambulatoire, la seule restriction étant que l'assureur ne prend en charge les coûts que jusqu'à concurrence du tarif applicable au lieu de résidence ou de travail de l'assuré ou dans les environs, le reste étant à la charge de l'assuré ou d'une éventuelle assurance complémentaire si l'assuré ne tient pas compte de ces
conditions de lieu. Avec le modèle de liberté de contracter du Conseil fédéral par contre, la liberté de choix du fournisseur de prestations par les assurés dépendra uniquement de la question de savoir si l'assureur, selon le choix du fournisseur de prestations qui a été fait par son assuré, est tenu ou non de prendre en charge les coûts des prestations dispensées à ce dernier. Si l'assureur a conclu un contrat d'admission avec le fournisseur de prestations consulté par son assuré, il devra seulement prendre en charge les coûts correspondant au tarif convenu avec ce fournisseur de prestations. Par contre, si l'assuré choisit un fournisseur de prestations non admis par son assureur, ce dernier ne devra pas prendre en charge les coûts. Fait exception le cas d'urgence. La réglementation de la prise en charge des coûts dans les cas d'urgence demeure ainsi inchangée. Ainsi les assurés auront la garantie que leur assureur leur remboursera les coûts liés à un traitement ambulatoire d'urgence, même si le fournisseur de prestations concerné n'a pas conclu de contrat d'admission avec ce dernier. Dans ce cas toutefois, seul un fournisseur de prestations remplissant les conditions d'admission de l'art. 35, al. 1, let. a, LAMal et lié par un contrat à un ou plusieurs autres assureurs-maladie reconnus peut entrer en considération. Le tarif applicable en l'occurrence sera également le tarif conclu entre les partenaires tarifaires ou le tarif fixé d'autorité par le gouvernement cantonal en application de l'art. 47 LAMal. Si ce fournisseur de prestations peut appliquer 4074

plusieurs tarifs, il établit sa facture selon le tarif de son choix puisqu'il s'agit dans tous les cas de tarifs approuvés. Les assureurs peuvent éviter ces tarifs différenciés en concluant des conventions tarifaires autant que possible sur une grande échelle.

Art. 45, al. 2 (nouveau) On peut partir du principe que les fournisseurs de prestations ont intérêt à pratiquer dans le cadre de l'assurance obligatoire des soins, tant il est vrai que l'expérience montre qu'elle constitue pour eux un très large réservoir de patients et, pour une majorité d'entre eux, l'essentiel de leur gagne-pain. Il en ira certainement de même en cas d'introduction de la liberté de contracter. Il se peut toutefois que, du fait de circonstances extraordinaire, par exemple en raison d'une crise de confiance entre partenaires ou d'une situation de position de force sur le marché, un ou plusieurs fournisseurs de prestations refusent de conclure un contrat d'admission avec un ou plusieurs assureurs-maladie. La conséquence en serait que ces derniers ne pourront pas satisfaire à l'obligation qui leur est faite de conclure un contrat d'admission avec un nombre de fournisseurs de prestations au moins équivalent au nombre minimal fixé par le canton, et qu'ainsi la couverture des besoins en soins ambulatoires ne pourrait plus être garantie pour tous les assurés dans un ou plusieurs secteurs de prestations ou dans certaines spécialités. Pour remédier à cette situation très hypothétique, mais qu'on ne saurait exclure, il y a lieu de prévoir que le gouvernement cantonal devrait être appelé à prendre des mesures temporaires pour garantir malgré tout la conformité du traitement des assurés avec les dispositions de la loi et le respect de la protection tarifaire. C'est là une sorte de clause de dernier recours devant permettre de rétablir une situation normale le plus rapidement possible. Cette mission de maîtrise des situations de crise entre dans la sphère de compétence traditionnelle des cantons en matière de santé publique.

La possibilité pour les cantons de garantir la fourniture des soins médicaux est déjà prévue dans la LAMal pour faire face à une éventuelle récusation massive des fournisseurs de prestations (cf. à ce propos message du 6 novembre 1991 du Conseil fédéral concernant la révision de l'assurance-maladie; FF 1992 I
159). Compte tenu de la similitude des situations, il faut donner aux gouvernements cantonaux la même possibilité de garantir l'accès aux soins médicaux pour la population dans des cas extrêmes et donc prévoir que la réglementation relative à la récusation de fournisseurs de prestations (al. 1) s'applique par analogie.

Cette disposition constitue le pendant de l'art. 35a, al. 4, du projet, qui couvre le cas où, sans que le comportement d'un ou de plusieurs fournisseurs de prestations en soit la cause, un assureur ne s'est pas conformé à l'obligation qui lui est faite à l'art. 35a, al. 3, avec comme conséquence que la couverture des besoins en soins ambulatoire de ses assurés n'est plus garantie.

Art. 46, al. 5 Dans le système actuel, le délai de dénonciation ou de retrait d'une convention tarifaire est d'au moins six mois pour les assureurs et les fournisseurs de prestations.

Ce délai restera inchangé pour autant que les partenaires tarifaires soient liés par un contrat d'admission. Par contre, dès l'instant où un fournisseur de prestations n'est plus lié par un tel contrat à un assureur, il y a lieu de considérer qu'il n'est plus partie à la convention tarifaire qui les liait. En effet, l'existence d'un contrat d'admission constitue un préalable indispensable à l'existence d'une convention 4075

tarifaire dans le système prévu par la présente révision. Les partenaires sont toutefois tout à fait libres de convenir de régler la question de l'admission et celle tarifaire dans un seul et même contrat.

Art. 47, al. 2 Avec le projet de liberté de contracter du Conseil fédéral, les prescriptions actuelles de la LAMal relatives à l'absence de convention tarifaire resteront pleinement applicables au domaine hospitalier et semi-hospitalier et pour partie au domaine ambulatoire. Ainsi la compétence de fixer un tarif en situation de régime sans convention, actuellement impartie au gouvernement cantonal, doit être maintenue. Par contre, avec l'introduction de la liberté de contracter, il y a lieu de modifier l'art. 47, al. 2, LAMal, qui réglemente le cas où il n'existe aucune convention tarifaire pour le traitement ambulatoire d'un assuré qui recourt à un fournisseur de prestations extérieur à son lieu de résidence ou de travail ou dans les environs (cf. le commentaire sur l'art. 41 du projet). Il faut obliger le gouvernement du canton où le fournisseur de prestations est installé à titre permanent à fixer un tarif lorsque celui-ci fait défaut et que le traitement ambulatoire a été dispensé en dehors d'un contrat d'admission s'il y a des raisons médicales. Comme déjà relevé, avec le modèle contractuel du Conseil fédéral, l'existence d'un contrat d'admission constitue un préalable indispensable à la conclusion d'une convention tarifaire.

Art. 59 Selon l'art. 59 LAMal, un fournisseur de prestations peut, pour des motifs graves, être exclu par un assureur du droit de fournir des prestations pour l'assurancemaladie, en particulier en cas de manquements aux exigences formulées aux art. 56 et 58 LAMal. L'exclusion est applicable si, pour des motifs graves tirés soit de sa personne, soit de son activité professionnelle, un fournisseur de prestations, notamment un médecin, provoque une telle atteinte au rapport de confiance devant exister entre partenaires, qu'une collaboration n'est plus jugée possible de la part de l'assureur-maladie qui en demande le prononcé. L'exclusion vaut actuellement pour l'assureur qui la sollicite, mais plusieurs assureurs peuvent aussi la demander pour le même fournisseur de prestations. Sa portée s'étend à l'ensemble du territoire suisse.

Il va sans dire que l'exclusion, dans
une situation où l'assurance obligatoire des soins constitue pour les fournisseurs de prestations actifs dans le secteur ambulatoire un très large réservoir de patients et, pour une majorité d'entre eux, l'essentiel de leur gagne-pain, signifie pratiquement la fin de l'exercice de la profession pour celui qui en serait frappé, en tous les cas à titre indépendant. C'est dire si cette sanction est une arme de dernier recours. Bien qu'envisageable pour un comportement contraire au précepte de l'économicité, elle ne trouve généralement à s'appliquer que lorsque le fournisseur de prestations a fait preuve, objectivement et subjectivement, d'un tel mépris de ses obligations légales et contractuelles, que l'exclusion du droit d'exercer à la charge de l'assurance obligatoire des soins ne peut apparaître comme contraire au principe de proportionnalité.

Jusqu'à ce jour, les procédures d'exclusion se sont terminées le plus souvent par le remboursement du montant perçu en trop au sens de l'art. 56 LAMal. Les tribunaux arbitraux cantonaux, qui connaissent une composition paritaire (un juge professionnel, avec deux représentants des assureurs-maladie et deux représentants des fournisseurs de prestations), renoncent le plus souvent à prononcer une mesure aussi 4076

radicale que l'exclusion temporaire ou définitive de toute activité à la charge de l'assurance-maladie. Pour remédier à cette relative impunité dont jouissent les «moutons noirs», il y a lieu de prévoir les mesures suivantes: ­

Extension, dans un nouvel al. 1, du catalogue des sanctions qui peuvent être prononcées contre les fournisseurs de prestations qui ne se conforment pas aux exigences légales ou contractuelles relatives au caractère économique et à la garantie de la qualité des prestations. Cette proposition a été retenue par les deux Chambres du Parlement lors des délibérations sur la 2e révision de la LAMal. Ce catalogue ne doit plus se limiter à la seule exclusion temporaire ou définitive de toute activité à la charge de l'assurance obligatoire des soins en cas de récidive, mais comprendre également d'autres sanctions comme l'avertissement, la restitution de tout ou partie des honoraires touchés pour des prestations fournies de manière inappropriée et l'amende. Les tribunaux compétents auront ainsi une plus grande marge de manoeuvre.

­

Extension aux fédérations d'assureurs de la possibilité de saisir les tribunaux arbitraux cantonaux pour demander qu'ils prononcent une des sanctions évoquées ci-avant. Cette proposition qu'avait déjà faite le Conseil fédéral dans le cadre de son projet de 2e révision de la LAMal (FF 2001 775), augmenterait l'impact d'une sanction telle que l'exclusion, dans la mesure où le nombre d'assurés que le fournisseur de prestations concerné ne pourrait plus traiter à la charge de cette assurance serait nettement plus important.

­

Concrétisation dans la loi, plus précisément dans un nouvel art. 59, al. 3, d'une liste non exhaustive des principaux manquements aux exigences du caractère économique et de la garantie de la qualité qui justifient selon le Conseil fédéral le prononcé d'une des sanctions prévues à l'art. 59, al. 1, de son projet. Cette liste reprend celle qui figurait dans le projet de 2e révision de la LAMal du Conseil fédéral (FF 2001 775). Ces manquements sont le non-respect du caractère économique des prestations au sens de l'art. 56, al. 1, LAMal (remplace le terme de «polypragmasie»), l'inexécution ou la mauvaise exécution du devoir d'information selon l'art. 57, al. 6, LAMal, l'obstruction aux mesures de contrôle de qualité prévues à l'art. 58 LAMal, le non-respect de la protection tarifaire au sens de l'art. 44 LAMal, la nonrépercussion sur le débiteur de la rémunération des avantages directs ou indirects perçus par le fournisseur de prestations en violation de ce que prévoit l'art. 56, al. 3, LAMal ainsi que la manipulation frauduleuse de décomptes ou l'attestation contraire à la vérité (cf. pour un commentaire, FF 2001 693, 746­749). Il s'agit de comportements contraires au principe d'économicité et de qualité des prestations qui ne lèsent pas seulement les assurés en tant que consommateurs individuels de soins par le biais de la participation aux coûts, mais également en tant que membres d'une mutuelle de risques, et partant qui portent atteinte au système d'assurance-maladie dans son ensemble.

Dispositions transitoires al. 1 Lors des débats sur la 2e révision de la LAMal, les deux Chambres ont souhaité obliger les assureurs à rester liés contractuellement pendant une période transitoire de quatre ans avec tous les fournisseurs de prestations actifs dans le secteur ambulatoire qui, en date du 1er janvier 2003, étaient autorisés à pratiquer à la charge de 4077

l'assurance obligatoire des soins et donc à les contraindre à prendre en charge les prestations dispensées par ces derniers pendant cette période. L'objectif de cette proposition était d'amoindrir les conséquences que pourrait avoir pour les fournisseurs de prestations en exercice une introduction immédiate de la liberté de contracter. Si le Conseil fédéral partage cet objectif, il considère toutefois que la période transitoire proposée est trop longue. Pour le Conseil fédéral, il y a lieu de maintenir seulement pour une durée de deux ans l'obligation pour les assureurs-maladie de contracter avec les fournisseurs dispensant des prestations sous forme ambulatoire qui, au moment de l'entrée en vigueur du présent projet de modification de loi, seront autorisés à pratiquer à la charge de l'assurance obligatoire des soins. Une durée plus longue empêcherait le modèle contractuel préconisé dans le cadre du présent projet de déployer ses effets à court et à moyen terme; elle protégerait en effet pendant encore de trop longues années les fournisseurs de prestations en place qui ne seraient pas incités à modifier leur comportement en matière de fourniture en soins, ce au détriment de nouveaux fournisseurs de prestations désireux d'accéder au marché de l'assurance-maladie et susceptibles de fournir un travail plus économique et de meilleure qualité.

Dispositions transitoires al. 2 Selon le projet (art. 35a, al. 2), les cantons doivent déterminer, sur la base de fourchettes préalablement fixées par le Conseil fédéral, le nombre minimal de fournisseurs de prestations nécessaire pour garantir la couverture des besoins en soins ambulatoires pour chaque catégorie de fournisseurs de prestations et pour chaque spécialité. Cette obligation imposée aux cantons nécessite de leur part un certain temps de préparation car une telle évaluation n'a encore été faite par aucun canton à ce jour dans le secteur ambulatoire. Une période transitoire est donc nécessaire pour permettre aux cantons de consulter les milieux intéressés et de se déterminer sur ce nombre minimal, en fonction des conditions locales. Un délai de deux ans paraît approprié, notamment au regard de la proposition d'al. 1 des dispositions transitoires qui oblige les assureurs-maladie à conclure un contrat d'admission pour une durée de deux ans avec les
fournisseurs de prestations qui, au moment de l'entrée en vigueur du présent projet de modification de loi, seront autorisés à pratiquer à la charge de l'assurance obligatoire des soins. Pour le surplus, le Conseil fédéral fixera suffisamment tôt les fourchettes à l'intérieur desquelles les cantons devront déterminer le nombre minimal de fournisseurs de prestations nécessaire pour garantir la couverture en soins de leur population.

Jusqu'à la date fixée par le Conseil fédéral, et à moins les cantons aient apporté dans l'intervalle la preuve d'un besoin, il y a lieu de prévoir que le nombre de fournisseurs de prestations qui, au moment de l'entrée en vigueur de la présente proposition de modification de loi, sont admis à pratiquer à la charge de l'assurance obligatoire des soins vaut comme limite maximale. Du fait de l'échéance de l'ordonnance sur la limitation de l'admission des fournisseurs de prestations à pratiquer à la charge de l'assurance obligatoire des soins le 3 juillet 2005, il faut en effet éviter que, dans l'intervalle, le nombre de fournisseurs de prestations actifs dans le secteur ambulatoire n'augmente.

4078

Entrée en vigueur Afin que l'al. 2 des dispositions transitoires puisse déployer ses effets à l'échéance de l'ordonnance précitée, il y a lieu de prévoir que la présente loi entrera en vigueur le 1er juillet 2005. S'il devait y avoir référendum et que celui-ci échoue devant le peuple, autrement dit en cas d'acceptation de la présente loi, il y a lieu de prévoir que le Conseil fédéral fixera son entrée en vigueur.

4

Concomitance de la proposition avec les autres modifications de loi en discussion

Le modèle de liberté de contracter proposé par le Conseil fédéral n'influence pas les autres modifications de la LAMal qu'il préconise dans le cadre de son premier paquet de révision législative (carte de santé, prolongation de la compensation des risques, allégement des primes des familles et participation aux coûts) et vice versa.

Il est compatible avec les modifications de loi que le Conseil fédéral entend présenter dans le cadre de son deuxième paquet de révision législative en relation avec la réforme du financement hospitalier et la promotion du managed care. Pour ce qui est de cette dernière, la liberté de contracter préconisée par le gouvernement devrait inciter les fournisseurs de prestations, mais aussi les assureurs-maladie à s'intéresser davantage à des modèles d'assurance de type managed care comportant un choix limité de fournisseurs de prestations en échange d'une réduction de la prime à payer par les assurés. Les experts admettent en effet que l'obligation actuelle de contracter constitue un frein à cet égard. Les fournisseurs de prestations ne trouvent aujourd'hui ni très intéressant, ni très nécessaire d'encourir un risque économique en adhérant à ces modèles.

5

Conséquences

5.1

Conséquences financières

5.1.1

Conséquences financières pour la Confédération

La Confédération se voyant confier la tâche, selon l'art. 35a, al. 2, du projet, de définir des limites minimales et des limites maximales au nombre de fournisseurs de prestations nécessaire pour garantir, dans les cantons, la couverture des besoins en soins (fourchettes), il faut s'attendre temporairement à un surcroît de travail pour l'administration fédérale qui devrait toutefois pouvoir être absorbé avec les ressources en personnel actuellement à disposition.

5.1.2

Conséquences financières pour les cantons

L'obligation faite aux cantons de déterminer le nombre minimum de fournisseurs de prestations nécessaire pour garantir la couverture des besoins en soins ambulatoires de leur population implique qu'ils devront procéder à une évaluation de ces besoins.

La mise en oeuvre de cette dernière donnera certainement lieu à un surcroît de travail administratif pour les cantons, en tous les cas pendant la période transitoire qui leur

4079

sera accordée pour remplir cette tâche, dont l'importance dépendra en premier lieu du sérieux avec lequel ils procéderont à cette évaluation et de son ampleur.

5.1.3

Conséquences financières pour l'assurance-maladie

L'instauration de la liberté de contracter nécessitera de la part des assureurs, mais aussi des fournisseurs de prestations, de nouvelles compétences en matière de gestion d'entreprise, en économie de la santé et en épidémiologie. Elle impliquera d'autre part que les assureurs-maladie pourront être amenés à conclure des contrats d'admission séparés avec chacun des fournisseurs de prestations qu'ils entendent admettre et dès lors qu'ils devront gérer cette diversité. Dans une première phase, il devrait en résulter un surcroît de travail administratif pour les assureurs-maladie et partant une augmentation de leurs frais administratifs qu'il est toutefois difficile d'évaluer en l'état. La position des assureurs-maladie sera cependant en principe renforcée par le présent projet de révision. La suppression de l'obligation de contracter et le renforcement de la concurrence qui en résultera devraient en effet engendrer à moyen et long terme des répercussions positives sur l'évolution des coûts à la charge de l'assurance obligatoire des soins.

5.2

Conséquences économiques

Les statistiques démontrent qu'il existe une relation directe entre la densité médicale et les coûts. La comparaison intercantonale des coûts par habitant pour les traitements ambulatoires montre que plus la densité médicale est importante, plus les coûts par assuré à la charge de l'assurance obligatoire des soins sont élevés. Un accroissement de la densité médicale de 30 % s'accompagne ainsi d'une augmentation des coûts par habitant du canton de 20 %. Les données disponibles ne permettent toutefois ni de conclure que cette relation se poursuivra de manière linéaire en cas d'augmentation de la densité médicale ni de démontrer que les chiffres relatifs aux deux cantons ayant les coûts les plus élevés par habitant laissent augurer une certaine saturation du marché.

Si l'obligation de contracter est supprimée, il y a lieu de partir du point de vue qu'une pression sur les coûts s'exercera sur les médecins actifs dans des régions ayant une densité médicale élevée, en particulier dans les centres urbains, et qu'elle ne sera pas sans effet sur leur revenu. Partant, l'exercice de la profession de médecin libre praticien en cabinet médical dans ces régions notamment deviendra moins attractif, contrairement à l'exercice avec un statut d'employé ou dans une organisation managed care. En contrepartie, il y a lieu de considérer que des cantons qui connaissent aujourd'hui des difficultés pour garantir la sécurité de la couverture en soins de leur population dans des régions plutôt périphériques, pourront garantir à l'avenir à celle-ci un meilleur approvisionnement en soins ambulatoires. En ce sens, les nouvelles dispositions exercent une influence sur le marché du travail. Il paraît toutefois peu vraisemblable que la suppression de l'obligation de contracter aura des répercussions importantes sur l'économie dans son ensemble. Il faut plutôt partir du point de vue qu'il en résultera dans une première phase des changements dans la répartition de l'offre en soins, que ce soit à l'intérieur du corps médical ou entre les régions ou plutôt entre les cantons. Il est pratiquement impossible d'estimer dans 4080

quelle mesure la pression sur les coûts occasionnée par la suppression de l'obligation de contracter pourra déployer des effets à long terme sur la productivité et la qualité des prestations.

6

Lien avec la réforme de la péréquation financière et de la répartition des tâches entre la Confédération et les cantons

La nouvelle péréquation financière a pour objet le désenchevêtrement des tâches, des compétences et des flux financiers entre la Confédération et les cantons, ainsi que la clarification des responsabilités entre ces deux niveaux étatiques (message du Conseil fédéral du 14 novembre 2001 dans FF 2002 2155). Dans le cadre des travaux y relatifs, on examine également une redistribution des tâches dans le domaine des assurances sociales. Le nouveau modèle d'admission des fournisseurs de prestations préconisé par le Conseil fédéral dans la présente révision n'est pas concerné par cette redistribution.

7

Lien avec le programme de la législature

Le projet figure dans le rapport sur le programme de la législature 2003­2007 du 25 février 2004 en tant qu'objet des Grandes lignes (FF 2004 1063).

8

Relation avec le droit européen

8.1

Le droit de la Communauté européenne

Aux termes de l'art. 2 du Traité instituant la Communauté européenne (traité CE), la Communauté a pour mission de promouvoir un niveau de protection sociale élevé.

La libre circulation des travailleurs à l'intérieur de la Communauté est consacrée à l'art. 39 du traité CE. Elle requiert une coordination des régimes nationaux de sécurité sociale, ce que prévoit l'art. 42 du traité CE. Le droit communautaire ne prévoit pas l'harmonisation des régimes nationaux de sécurité sociale, les Etats membres conservant la faculté de déterminer la conception, le champ d'application personnel, les modalités de financement et l'organisation de leur système de sécurité sociale. La coordination des régimes nationaux de sécurité sociale est mise en oeuvre par le règlement du Conseil n° 1408/71 relatif à l'application des régimes de sécurité sociale aux travailleurs salariés, aux travailleurs non salariés et aux membres de leur famille qui se déplacent à l'intérieur de la Communauté et par son règlement d'application n° 574/72 (Règlements codifiés par le règlement du Conseil n° 118/97, JOCE n° L 28 du 30.1.1997, p. 1; modifiés en dernier lieu par le règlement du Conseil n° 859/2003, JOCE n° L 124 du 20.5.2003, p. 1). Depuis le 1er juin 2002, date de l'entrée en vigueur de l'Accord sur la libre circulation des personnes conclu avec la CE et ses Etats membres, la Suisse participe à ce système de coordination.

La recommandation du 27 juillet 1992 relative à la convergence des objectifs et politiques de protection sociale (JOCE n° L 245 du 26.8.1992, p. 49) invite les Etats membres à assurer notamment aux personnes qui résident légalement sur leur terri-

4081

toire l'accès aux soins nécessaires de santé ainsi qu'aux mesures visant à la prévention des maladies.

8.2

Les instruments du Conseil de l'Europe

La Charte sociale européenne du 18 octobre 1961 est le pendant de la Convention européenne des droits de l'homme, pour les droits économiques et sociaux. L'art. 12 consacre le droit à la sécurité sociale: les Etats parties s'engagent à établir ou à maintenir un régime de sécurité sociale, à le maintenir à un niveau satisfaisant, à s'efforcer de le porter progressivement à un niveau plus élevé et à prendre des mesures pour assurer l'égalité de traitement entre les nationaux et les ressortissants des autres Etats parties. La Suisse a signé la Charte le 6 mai 1976, mais le Parlement en ayant refusé la ratification en 1987, ce traité ne lie pas notre pays.

La Charte sociale européenne (révisée) du 3 mai 1996 met à jour et adapte le contenu matériel de la Charte de 1961. Elle constitue un accord distinct de la Charte sociale européenne de 1961 qu'elle n'abroge pas. Le droit à la sécurité sociale figure également à l'art. 12. La Charte sociale révisée est entrée en vigueur le 1er juillet 1999. La Suisse n'a pas ratifié cet instrument.

Le Code européen de sécurité sociale du 16 avril 1964 a été ratifié par la Suisse le 16 septembre 1977 (RO 1978 1491). Notre pays n'en a toutefois pas accepté la partie II relative aux soins médicaux. Tout Etat qui entend accepter les obligations découlant de la partie II du Code doit notamment garantir que les personnes protégées ont accès aux prestations médicales en cas d'état morbide, quelle qu'en soit la cause, et en cas de maternité. Le bénéficiaire peut être tenu de participer aux frais des soins médicaux reçus en cas d'état morbide et la durée des prestations servies peut être limitée à 26 semaines par cas.

Le Code européen de sécurité sociale est complété par un Protocole qui fixe des normes supérieures. La Suisse n'a pas ratifié le Protocole au Code.

Le Code européen de sécurité sociale (révisé) du 6 novembre 1990 constitue aussi un accord distinct du Code européen de sécurité sociale qu'il n'abroge pas. Le Code (révisé) élève les normes du Code européen de sécurité sociale, notamment par l'extension du champ d'application personnel, par l'octroi de nouvelles prestations et par l'augmentation du montant des prestations en espèces. Il introduit parallèlement une plus grande flexibilité en ce sens que les conditions de ratification ont été assouplies et que les
normes sont formulées d'une manière suffisamment souple pour tenir compte au mieux des réglementations nationales. N'ayant été ratifié par aucun pays, le Code (révisé) n'est pas encore en vigueur.

Parmi les instruments du Conseil de l'Europe, il faut encore mentionner les recommandations suivantes du Comité des Ministres aux Etats membres: ­

Recommandation n° R (80) 15 du 14 novembre 1980 concernant une meilleure distribution des soins médicaux à l'intérieur et à l'extérieur des hôpitaux;

­

Recommandation n° R (86) 5 du 17 février 1986 sur la généralisation des soins médicaux.

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8.3

Compatibilité du projet avec le droit européen

Le droit européen (droit de la Communauté européenne et droit du Conseil de l'Europe) n'établit pas de normes dans les domaines que traite le présent projet de révision. Les Etats demeurent libres de déterminer ces aspects comme ils l'entendent.

9 9.1

Bases juridiques Constitutionnalité

Le projet se fonde sur l'art. 117 de la Constitution.

9.2

Délégation des compétences législatives

L'art. 96 prévoit la délégation au Conseil fédéral de la compétence d'édicter les dispositions d'exécution dans le domaine de l'assurance-maladie sociale. Le présent projet l'habilite nouvellement à légiférer dans les domaines suivants: fixation des limites minimales et des limites maximales au nombre de fournisseurs de prestations nécessaire (art. 35a, al. 2).

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