1 # S T #

N °

2 7

FEUILLE FÉDÉRALE 109e année

# S T #

7438

Berne, le 4 juillet 1957

Volume II

MESSAGE du

Conseil fédéral à l'Assemblée fédérale concernant l'approbation d'une convention entre la Confédération suisse et la République italienne au sujet de l'utilisation de la force hydraulique du Spöl (Du 28 juin 1957) Monsieur le Président et Messieurs, Nous avons l'honneur de vous soumettre un projet d'arrêté fédéral concernant l'approbation de la convention conclue le 27 mai 1957 entre la Suisse et l'Italie au sujet de l'utilisation de la force hydraulique du Spöl.

I. HISTORIQUE 1. Le point de départ L'idée d'utiliser des forces hydrauliques appartenant au bassin versant du Spöl est aussi ancienne que l'article 24 bis de la constitution, adopté en 1908 et qui, sans toucher en principe à la souveraineté des cantons sur les cours d'eau, soumet l'utilisation des forces hydrauliques à la haute surveillance de la Confédération.

Un projet de petite usine dans le Val Cluozza, à gauche du Spöl, fut établi en -1908. En 1914, parut, dans la publication officielle Les forces hydrauliques de la Suisse, un plan général d'aménagement prévoyant deux usines sur le Spöl. La première, en amont, devait être une usine internationale avec un bassin d'accumulation de 15 millions de mètres cubes dans le Val Mora. La seconde, en aval, devait être une usine nationale, avec centrale à Zernez, Cette époque fut aussi celle de la création du parc national suisse en Basse-Engadine (arrêté fédéral du 3 avril 1914) et de l'approbation du contrat de servitude passé avec la commune de Zernez au sujet du même objet.

Feuille fédérale. 109e année. Vol. II.

1

Le 1er mars 1919, l'ingénieur grison Adolf von Salis, membre d'un consortium pour l'utilisation des forces hydrauliques de l'Engadine et du Val Bregaglia, présenta un projet d'usine du Spöl et de l'Inn, avec bassin d'accumulation dans la vallée du Spöl, s'étendant de Praspöl jusque près de la frontière italo-suisse à Punt dal Gali. Le rapport du Conseil fédéral sur sa gestion en 1919 mentionne ce projet (FF 1920,119/20), Au degré de développement qu'avait atteint à cette époque l'utilisation des forces hydrauliques, cet ouvrage aurait été, par l'importance, le second du genre en Suisse. D'autres possibilités de tirer parti des eaux du bassin du Spöl furent étudiées entre 1920 et 1930.

Mais au cours de cette période, les milieux de la ligue suisse pour la protection de la nature commencèrent à ressentir de l'inquiétude à l'idée d'une utilisation des forces hydrauliques à l'intérieur du parc national. C'est probablement ce qui décida, en 1926, le conseiller national Gelpke à poser au Conseil fédéral une question écrite sur laquelle nous aurons l'occasion de revenir dans ce message.

Le cours supérieur du Spöl, dans le val italien de Livigno, avant l'entrée de la rivière en territoire suisse, et son principal affluent de la rive droite, en provenance du Val del Gallo, n'ont été englobés dans les plans d'utilisation internationale qu'à partir de 1940. En 1943, un nouveau groupe d'études, le consortium pour les projets d'usines électriques dans l'Engadine, en abrégé le KEK, établit pour cette région un plan d'ensemble prévoyant les quatre usines suivantes: -- une usine italo-suisse avec centrale à Zernez, utilisant le cours du Spöl de Santa Maria di Livigno jusqu'à Zernez. Le bassin d'accumulation de Livigno aurait eu une contenance de 190 millions de mètres cubes; ·-- une usine cantonale de l'Inn, utilisant le cours de l'Inn de Madulain à Zernez; -- une autre usine cantonale, utilisant le cours de l'Inn de Zernez à Tarasp ; -- une usine austro-suisse de l'Inn, tirant parti de cette rivière de Scuol/ Schuls jusque près de Finstermünz, au-dessous de Martina, avec un bassin d'accumulation de 438 millions de mètres cubes dans la BasseEngadine.

Ce plan d'aménagement était un programme maximum d'utilisation rationneUe des forces disponibles.

Les projets des deux usines cantonales de l'Inn furent remis
par le KEK le 31 mars 1943 aux communes auxquelles le droit cantonal attribue le droit de disposer de la force hydraulique des cours d'eau publics. Le 15 juillet de la même année, le KEK remettait au Conseil fédéral les projets et les demandes de concession concernant les deux usines internationales.

.Le Conseil fédéral revendiqua dès le début la compétence d'accorder les

concessions pour les deux usines touchant la frontière nationale. La délivrance des concessions pour les usines cantonales était en revanche du ressort des communes politiques, sous réserve d'approbation par le gouvernement cantonal. Ce partage des attributions résultait de l'article 24 ois, 4e alinéa, de la constitution et des articles 7 et 38, 1er et 2e alinéas, de la loi du 22 décembre 1916 sur l'utilisation des forces hydrauliques. Il n'a donné lieu à aucun conflit entre la Confédération et le canton.

Durant la guerre et les premières années d'après-guerre, les demandes de concession et les projets concernant les deux usines internationales ne purent être étudiés de plus près. Le projet d'un ouvrage austro-suisse ne tarda cependant pas à susciter l'opposition des habitants de la vallée, qui ne voulaient pas d'un grand bassin d'accumulation en Basse-Engadine ; cette opposition était aussi vive que celle que rencontrait, au même moment, le projet du bassin d'accumulation du Splugen, dans le Rheinwald.

Le KEK se vit ainsi amené à renoncer à son dessein et à concentrer ses efforts sur le projet d'usine italo-suisse de Livigno-Zernez, ainsi que sur les usines cantonales de l'Inn. Pour la première, connue sous le nom d'usine internationale du Spöl, un projet mis au net fut présenté par le KEK en 1947. En même temps que l'Azienda elettrica municipale di Milano (AEM), c'est-à-dire le service de l'électricité de la ville de Milan, le KEK introduisit une demande de concession pour l'utilisation de la partie italienne des sections à aménager du Spöl et de son affluent de droite provenant du Val del Gallo.

Le canton des Grisons et les communes intéressées de l'Engadine se prononcèrent dès le début en faveur de l'usine internationale du Spöl et des deux usines nationales sur l'Inn. A plusieurs reprises, le canton des Grisons, en son nom et en celui des communes, demanda au Conseil fédéral d'engager sans délai des pourparlers avec l'Italie en vue d'une utilisation commune des forces du Spöl. Les milieux s'intéressant au parc national, à la protection de la nature et des sites, prirent en revanche position de façon toujours plus décidée contre ces intentions.

2. Le développement ultérieur Conformément à la décision du Conseil fédéral, du 20 février 1948, des pourparlers entre la Suisse et l'Italie furent ouverts pour fixer, sur la base du projet de l'usine internationale du Spöl, les conditions dans lesquelles la force hydraulique de cette rivière pourrait être aménagée et exploitée en commun. Lors de la première réunion des délégués chargés de la négociation, il apparut aussitôt qu'un projet concurrent avait été soumis aux autorités italiennes par la Società Montecatini, à Milan ; il prévoyait l'utilisation du bassin d'accumulation de Livigno dans la direction du val de Münster et de

l'Adige, région où cette société avait déjà des usines hydroélectriques en exploitation ou en construction. Par la suite, l'idée de dériver une partie des eaux vers l'Italie prit toujours plus fortement racine, parce qu'on croyait, du côté italien, que les difficultés seraient plus aisément vaincues s'il n'était plus question de constructions à l'intérieur des limites du parc national. La Società Montecatini présenta même un projet de dérivation de l'eau de l'Inn et du Spöl vers le bassin de l'Adige, d'une volume annuel de 625 millions de mètres cubes, soit le tiers du débit de FInn à Martina.

Des variantes réduites, prévoyant la dérivation de 400, puis de 350 millions de mètres cubes, furent expressément soutenues par la délégation italienne.

Ces initiatives incitèrent le service de l'électricité de la ville de Milan à présenter, lui aussi, des projets de dérivation, mais cette fois vers la vallée de l'Adda, où il a des usines en activité, en construction ou en projet. Dans la suite des pourparlers, il ne fut en tout cas plus possible d'amener les délégués italiens à renoncer au principe d'une dérivation.

En Suisse, les études se poursuivaient. Le consortium des forces hydrauliques de l'Inn (le KIK), se constitua, et la Società Montecatini en était membre. La lutte entre le KIK et le KEK, qui a fait quelque bruit, commença, les concurrents cherchant, de part et d'autre, à gagner la faveur des communes grisonnes. Chaque groupe fonda une société anonyme pour construire et exploiter les ouvrages qu'il recommandait; pour le KIK, ce furent les «Forces hydrauliques de l'Inn S.A.», avec siège à Scuol/Schuls, et pour le KEK les «Usines électriques de l'Engadine S.A.», avec siège à Zernez. La polémique dura longtemps, mais, en 1954, les intéressés suisses finirent par s'entendre pour un plan d'action commun. De nouvelles études auxquelles toute idée de concurrence était désormais étrangère, furent entreprises en vue d'un plan d'ensemble pour l'aménagement des eaux de l'Inn et de ses affluents. Ces études conduisirent, en juillet 1955, à un premier résultat concret: le projet des «Usines électriques de l'Engadine S.A.» pour l'aménagement, sur le plan cantonal, de l'Inn et de ses affluents.

Répondant à l'interpellation Dietschi-Soleure concernant l'usine du Spöl et le parc national, à la séance du Conseil
national du 30 septembre 1955, nous avons déclaré entre autres choses que le plan cantonal d'aménagement de l'Inn et de ses affluents répondait aux exigences d'une utilisation rationnelle de ces eaux. Nous ajoutions que l'accumulation prévue des eaux du Spol dans le parc national, sans que la frontière italo-suisse fût atteinte, procédait de l'idée exprimée par l'ingénieur A. von Salis dans son projet de 1919, idée reprise en 1920 dans un avenant au contrat de servitude conclu en 1913-1914 entre la Confédération et la commune de Zernez au sujet du parc national. Nous donnions aussi des renseignements sur l'état des pourparlers avec l'Italie, et relevions que ces pourparlers se concentraient désormais sur les conditions dans lesquelles le bassin de Livigno pourrait être utilisé comme complément de l'aménagement cantonal de l'Inn et de ses affluents. On trouvera le texte exact de notre réponse

5

dans le Bulletin sténographique de l'Assemblée fédérale (CN, session d'automne 1955, p. 425 s.). Nous pouvons donc renoncer à revenir ici sur les détails.

En résumé, notre réponse constatait que le problème du Spol présentait désormais un aspect national et un aspect international. L'aspect national apparaissait dans l'utilisation de sections de cours d'eau placées exclusivement sous la souveraineté suisse. L'aspect international était représenté par le bassin de Livigno, avec la centrale reportée de Zernez à Punt dal Gali, et par la dérivation vers le cours de l'Adda d'une partie des eaux du bassin versant supérieur du Spöl, situé en territoire italien. Nous relevions que nous demeurions résolus de défendre les intérêts du parc national, conformément à l'arrêté fédéral de 1914 et aux contrats conclus avec les communes, en leur qualité de propriétaires fonciers, d'une part, et la société suisse des sciences naturelles et la ligue suisse pour la protection de la nature d'autre part, mentionnions que les précédentes divergences d'opinions à propos du parc national avaient toujours été aplanies par voie de pourparlers et que 15 communes de l'Engadine avaient spontanément exprimé leur volonté de collaborer. Nous exprimions le voeu que l'indispensable solution de bonne entente fût trouvée cette fois encore, dans l'intérêt du parc national.

II. LES PLANS ACTUELS D'AMÉNAGEMENT 1. Qui désire acquérir des concessions de droits d'eau ï Du coté suisse, la concession est requise par une seule personne morale, constituée sous la raison sociale de «Engadiner Kraftwerke AG» (Ouvras Electricas d'Engiadina, S.A.), avec siège à Zernez. Le but statutaire de la société est de construire et d'exploiter des usines pour utiliser les forces hydrauliques de l'Engadine et des bassins versants voisins, plus particulièrement de PInn et du Spöl. La société peut aussi établir des installations pour le transport de l'énergie électrique et sa distribution, créer d'autres usines ou s'intéresser à leur exploitation, acheter et vendre de l'énergie, participer à d'autres sociétés poursuivant des buts analogues. Les actionnaires des «Usines électriques de l'Engadine S.A. » sont exclusivement des personnes morales de droit suisse. En voici la liste : Motor-Columbus S.A., Baden; société de banque suisse, Baie; Crédit suisse, Zurich; Electro-Watt, entreprises électriques et industrielles S.A., Zurich; Société suisse d'électricité et de traction (Suiselectra), Baie.

Du côté italien, c'est une entreprise de droit public qui veut acquérir des concessions: l'Azienda elettrica municipale di Milano (A.E.M.). Il s'agit-là d'une entreprise communale assurant tous les services publics de

6

la ville de Milan : tramways et trolleybus municipaux, eau, éclairage public, administration communale, et fournissant en outre du courant à 300000 abonnés privés.

Cette Azienda elettrica municipale a commencé l'exploitation de sa première usine électrique en 1910 sur l'Adda, dans la Valteline, Depuis lors, elle a développé sans cesse les ressources hydroélectriques de cette région et les lignes de transport de courant à destination de la capitale lombarde. Sa dernière réalisation est la première phase, achevée l'an dernier, de la nouvelle usine hydroélectrique de Premadio, près de Bormio, dont le bassin d'accumulation de Cancano II, sur le haut cours de l'Adda, est proche du bassin versant supérieur du Spöl.

Les deux requérants ont tenu compte de leurs intérêts respectifs en établissant les plans qu'elles entendent réaliser. Seules les «Usines électriques de l'Engadine S.A.» s'intéressent à la création du bassin d'accumulation de Liyigno, tandis que l'entreprise italienne ne s'intéresse qu'à la dérivation d'une partie de l'eau du bassin versant supérieur du SpOl, en territoire italien, vers son système d'utilisation de l'Adda. La séparation des sphères d'intérêts italienne et suisse est donc parfaitement claire.

3. Que prévoit le plan d'ensemble?

Le plan d'ensemble actuel comprend trois groupes de projets et d'usines. On en verra le détail dans le rapport technique et le plan de situation joints à ce message. (Cf. annexe 1, chiffres 1 à 4, 6, et figure 1).

Nous pouvons donc nous borner ici à quelques indications.

a. Les projets des Usines électriques de l'Engadine. S.A. pour l'aménagement cantonal de, l'Inn et de ses affluents. Quatre usines sont prévues, soit: --- l'usine à accumulation de S-chanf, avec lac artificiel à Chamuera ; ·-- l'usine de Pradella, avec bassin d'accumulation à Praspöl (palier supérieur de l'Inn); --· l'usine de Martina (palier inférieur de l'Inn) ; -- l'usine de Tasna, sur le versant gauche de la vallée, près d'Ardez.

C'est le palier supérieur de l'Inn, avec son bassin d'accumulation de Praspöl, qui nous intéresse plus particulièrement ici. Cette unité réalise, sous ime forme modernisée, le projet de l'ingénieur A. von Sah's, du 1er mars 1919, rappelé au début de ce message. Comme dans le projet primitif, le bassin d'accumulation prévu actuellement se trouverait pour la plus grande partie sur le territoire du parc national, conformément à la clause contractuelle à laquelle la Confédération a souscrit en 1920 en faveur de la commune de Zeriiez (cf. plus bas p. 19/20), Le palier supérieur de l'Inn est un projet qui, du point de vue technique comme du point de vue économique, est susceptible d'être réalisé

isolément. Dans la concession obtenue des communes, les Usines électriques de l'Engadine S.A. se sont engagées à exécuter ce projet même sans que la section internationale Livigno-Punt dal Gali soit aménagée. Elles ont pris le même engagement pour le palier inférieur, avec centrale à Martina.

Conformément au droit fédéral, qui exige que les forces hydrauliques soient utilisées rationnellement (art. 5, 3e al., de la loi sur l'utilisation des forces hydrauliques), les paliers supérieur et inférieur de PInn sont tous deux disposés et dimensionnés de telle sorte qu'ils puissent absorber les quantités d'eau affluant de l'usine à accumulation de S-chanf comme de celle de Livigno. Mais la grandeur des ouvrages est déjà dictée dans une large mesure par le débit naturel moyen de l'Inn et du Spöl. Joue également un rôle la puissance requise pour couvrir les besoins au moment des pointes d'utilisation de l'énergie électrique.

Quant aux usines de S-chanf et de Tasna, elles constituent des étapes subséquentes de l'aménagement cantonal de l'Inn et de ses affluents.

Les «Usines électriques de rEngadine S.A.» commenceront leur construction dans les délais fixés par les concessions, après la mise en service des paliers de l'Inn.

6. Le projet d'aménagement international du Spöl se caractérise par le grand bassin d'accumulation de Livigno, d'un volume utile de 180 millions de mètres cubes. Ce qui donne à cet ouvrage un caractère international, c'est qu'il met en valeur dans une seule et même usine plusieurs sections de cours d'eau qui relèvent à la fois de la souveraineté de la Suisse et de l'Italie : le Spöl et son affluent de droite, l'Ova dal Gali, à partir des deux extrémités du bassin d'accumulation (le Val de Livigno, Val del Gallo) jusqu'à la restitution des eaux dans le bassin situé plus bas, celui de Praspöl. Le caractère international résulte aussi du fait que la cuvette du bassin d'accumulation se trouve pour la plus grande partie en territoire italien, tandis que le barrage de retenue chevauche la frontière et que la centrale est en Suisse, à Punt dal Gali. Ces trois ouvrages sont à l'extérieur du parc national, bien que dans son voisinage immédiat.

Des débits naturels du Spöl provenant d'Italie, il faut soustraire, pour l'alimentation de l'usine de Livigno, ceux qu'il s'agit de détourner vers le
bassin versant de l'Adda selon le projet italien (cf. lettre c ci-après). L'apport naturel du Spöl ne suffisant ainsi plus à remplir le bassin de Livigno, le complément devra être assuré par pompage, à partir du lac artificiel de Praspöl, situé à l'aval.

A la différence du palier supérieur de l'Inn et de son bassin de Praspöl, ouvrages cantonaux, l'usine de Livigno ne pourrait être réalisée isolément, à cause du coût élevé du barrage et de la petite chute disponible. Sa création n'est aujourd'hui rentable que si, comme par exemple dans le cas du bassin de Valle di Lei, on fait succéder, à l'aval, des ouvrages (ou paliers) cantonaux. En l'espèce, il faut donc que le palier supérieur de l'Inn, avec

aa centrale de Pradella soit réalisé pour qu'on retire un profit de l'accumulation de Livigno. Cette condition est remplie du fait que les Usines électriques de l'Engadine S.A. veulent aménager et exploiter les deux paliers de l'Inn.

Le profit se traduira dans les deux centrales de Pradella et de Martina par la transformation d'une quantité notable d'énergie d'été en énergie d'hiver, de plus haute valeur, ce qui est désirable dans l'intérêt général de l'alimentation du pays en courant électrique.

c. L'Italie ne se prête cependant à la construction du bassin d'accumulation de Livigno que si la Suisse souscrit au projet italien d'aménagement du Spöl. Cet aménagement constitue une partie du plan d'ensemble établi par l'Azienda elettrica municipale, di Milano pour tirer parti des forces hydrauliques encore disponibles dans le bassin versant de l'Adda. La première phase de la construction de l'usine de Premadio a été achevée l'année dernière; elle doit être suivie d'une seconde phase consistant à élever le nouveau barrage, à accroître par conséquent le volume utilisable du bassin d'accumulation de Cancano II, situé sur le cours supérieur de l'Adda, à l'est du Val de Livigno. Ce projet comprend la création d'un système de collecteurs s'étendant jusque dans la région dite alto Spol, De cette façon, 97 millions de mètres cubes d'eau seraient détournés annuellement du cours .naturel du Spöl et utilisé avec l'eau en provenance du bassin versant de l'Adda, dans la centrale de Premadio, déjà préparée pour recevoir les agrandissements nécessaires.

Le prélèvement de cette quantité d'eau ne se ferait pas seulement sentir jusqu'à Punt dal Gali, où le Spöl entre en territoire suisse, mais encore au-delà de son confluent avec l'Inn à Zernez, et de façon très sensible. L'importance de cette altération des débits s'atténuerait ensuite peu à peu, jusqu'à Martina. Une influence aussi grande ne pourrait pas être acceptée sans une compensation de la part de l'Italie, A ce titre, l'Italie est prête aujourd'hui à admettre que le bassin d'accumulation de Livigno soit utilisé exclusivement en faveur de la Suisse. A cette condition, et en tenant compte des droits et devoirs corrélatifs de la Suisse et de l'Italie, tels que les prévoit la convention internationale, on peut, semble-t-il, admettre qu'une dérivation de l'importance
envisagée est encore supportable.

3. Qui est compétent pour octroyer les concessions î Nous venons de constater que le plan d'ensemble pour l'aménagement des usines projetées prévoit trois groupes d'ouvrages nettement distincts.

A cette situation correspond une nette séparation du pouvoir d'accorder les concessions de droits d'eau.

a. L'aménagement cantonal de l'Inn et de ses affluents affecte des sections de cours d'eau publics relevant exclusivement de la souveraineté suisse. La compétence est donc réglée par les articles 2 et 38 de la loi fède-

9

raie. Aux termes de l'article 2, 1er alinéa, c'est la législation cantonale qui détermine la communauté (canton, district, commune ou corporation) à laquelle appartient le droit de disposer de la force des cours d'eau publics.

L'article 38,1er alinéa, dispose que les concessions de droits d'eau sont accordées par l'autorité compétente du canton dans le territoire duquel se trouve la section de cours d'eau à utiliser. D'après la loi grisonne du 18 mars 1906 sur l'utilisation des cours d'eau publics, ce sont les communes politiques qui sont compétentes (art. 4, 1er al.). Mais les concessions ne sont valables qu'après leur approbation par le Petit conseil (art. 4, 3e al.), ce qui est conforme à l'article 4 de la loi fédérale. Une condition sine qua non de validité de la concession est cependant que les projets d'usines cantonales assurent dans leur plan d'ensemble, l'utilisation rationnelle des forces hydrauliques dans le sens de l'article 5, 3e alinéa, de la loi fédérale. L'examen officiel du projet a démontré que cette condition est remplie.

Il en résulte que quinze communes politiques, de La Punt-Chamues-ch jusqu'à Tschlin près de Martina, sont compétentes pour l'octroi des concessions et qu'il appartient au Petit conseil d'approuver ces dernières. Onze communes ont déjà accordé les concessions concernant leur territoire, par exemple Zernez, qui a une position-clé sur le Spol. La procédure cantonale d'approbation est déjà en cours; elle conduira à la mise à l'enquête publique avec délai d'opposition, conformément à la loi.

6. Dans le cas de l'aménagement international de l'usine à accumulation de Livigno et du bassin du même nom, ainsi que de la centrale de Punt dal Gali, c'est en revanche, du côté suisse, l'affaire du Conseil fédéral d'accorder la concession, le canton ayant été entendu. Cela ressort de façon précise de l'article 24 ois, 4e alinéa, de la constitution, en liaison avec les articles 7 et 38, 3e alinéa, de la loi sur l'utilisation des forces hydrauliques. Il appartient dans ce cas au Conseil fédéral, après avoir entendu le canton et en tenant compte équitablement de sa législation, de fixer les prestations qui lui sont dues, comme d'ailleurs de déterminer la procédure pour la concession des droits d'eau (art. 52 et 62 de la loi).

L'aménagement international présuppose que les
«Usines électriques de l'Engadine S.A. » obtiennent également en Italie une concession de l'autorité compétente dans ce pays. Dans le cas de l'usine d'accumulation de Valle di Lei, la concession revêt la forme d'un décret du président de la République italienne.

c. L'octroi d'une concession pour l'aménagement italien, avec ses collecteurs dérivant les eaux vers le bassin de l'Adda, est en premier lieu de la compétence de l'Italie. Mais nous avons vu sous chiffre 2, lettre c, de ce chapitre que ce prélèvement d'eau dans la région dite alto Spöl a des conséquences notables pour le débit des sections de cours d'eau situées en aval, et bien au-delà du point où le Spöl franchit la frontière italo-suisse.

10

Quand bien même toutes les installations relatives à cette dérivation sont en Italie et situées à une distance de 10 à 20 km de la frontière suisse à Punt dal Gali, un tel prélèvement d'eau constitue un mode d'utiliser des sections de cours d'eau qui, après s'être jetés dans le Spöl, puis dans l'Inn, relèvent aussi de la souveraineté territoriale de la Suisse. Etant donné que ces sections touchent à la frontière suisse près de Punt dal Gali, il appartient au Conseil fédéral d'octroyer à l'Azienda elettrica communale di Milano une concession suisse en complément de sa concession italienne.

III. L'ENTENTE AVEC L'ITALIE 1. Le déroulement dos pourparlers a. En automne 1955, lorsqu'il fut répondu à l'interpellation DietschiSoleure, les perspectives d'une entente avec l'Italie étaient encore incertaines. L'obstacle principal restait, après sept ans de pourparlers, la question fondamentale de la dérivation, vers des bassins fluviaux tournés vers l'Italie, de quantités d'eau empruntées au bassin supérieur du Spöl et de l'Inn. L'examen du problème et son évolution sur le plan interne suisse avaient fait apparaître l'impossibilité, aussi bien pour la Confédération que pour le canton des Grisons et les communes intéressées, de consentir à plus d'une dérivation de l'ordre de grandeur de 100 millions de mètres cubes en année moyenne. C'est à peu près ce qui, par des captages au-dessus de la cote 1960 et sans l'intervention de stations de pompage, peut être conduit naturellement dans le lac artificiel de Cancano II, sur le cours supérieur de l'Adda. Cette attitude des autorités suisses était dictée exclusivement par des considérations d'intérêt public et par la nécessité d'assurer l'utilisation rationnelle de l'Inn et de ses affluents, compte tenu des études qui avaient fait apparaître la possibilité de créer des bassins d'accumulation sur notre propre territoire. C'était en particulier.les intérêts du parc national qui jouaient un grand rôle, puis aussi le souci de protéger la beauté des sites en Basse-Engadine ; il fallait tenir compte des sources thérapeutiques de Schuls-Tarasp et des intérêts qui s'y rattachent; il y avait en outre le problème de l'irrigation, celui des eaux usées, etc., et toutes les questions qui sont liées à l'exigence du maintien dans l'Inn d'un débit minimum suffisant. Il s'agissait
aussi -- chose importante -- de prendre en considération nos rapports avec l'Autriche, notre voisine en aval, avec qui nous sommes en pourparlers pour l'installation d'une usine hydroélectrique frontière, entre Martina et Prutz.

b. En 1956, les choses évoluèrent plus rapidement que ne l'avait fait prévoir le déroulement antérieur des pourparlers. Au début de l'année, l'Azienda elettrica municipale di Milano ouvrait à l'exploitation sa nouvelle usine de Premadio. Puis la construction du nouveau barrage de Cancano II

11 avançait rapidement. Le moment allait donc venir où il faudrait se décider quant à la mise en chantier des constructions de la seconde phase, comprenant la dérivation des eaux du haut bassin versant du Spöl. Au printemps de 1956, une conférence des experts de la commission officielle italosuisse fut donc réunie à Milan. Les délégués suisses insistèrent ·-- et en se référant à la réponse du Conseil fédéral à l'interpellation Dietschi-Soleure --· sur les raisons qui, de l'avis de la Suisse, empêchent une dérivation plus considérable que celle qui a été mentionnée plus haut. Sous réserve des avis que les deux parties pourraient encore exprimer, les experts suisses se déclarèrent prêts, à la demande de l'Italie, à rédiger dans les grands traits l'avant-projet d'une convention italo-suisse.

En juin 1956, à Vienne, la cinquième conférence mondiale de l'énergie fournit aux participants italiens l'occasion d'ouvrir un débat sur le projet intitulé: «L'utilisation internationale du haut bassin de l'Inn pour la production d'énergie électrique.» La discussion fit apparaître que des dérivations, aussi considérables que celles qui étaient envisagées du côté italien ne seraient pas non plus acceptables pour l'Autriche et la Bavière, riveraines de l'Inn. Dans un esprit de coopération économique sur le plan de l'énergie, on releva en revanche la possibilité de réaliser un projet comportant la dérivation de 90 à 100 millions de mètres cubes, empruntés à la région de l'alto Spöl, et conduits au bassin d'accumulation de Cancano IL Le 12 juillet 1956, l'Aziènda elettrica municipale di Milano remit une demande de concession aux autorités italiennes compétentes, en vue de réaliser la seconde phase de construction de l'usine de Premadio, c'est-à-dire de doubler la capacité utile du Cancano II en élevant pour cela le nouveau barrage et en amenant de l'eau de la partie de la région du Spöl située au-dessus de la cote 1960 m, en Italie.

A la fin de septembre 1956, une rencontre eut lieu à Berne entre les experts des autorités suisses et italiennes. Il en résulta un projet commun de convention italo-suisse reposant sur l'hypothèse de la dérivation vers Cancano II de 97 millions de mètres cubes d'eau captés dans la région dite alto Spöl et sur celle de la création d'un bassin d'accumulation à Livigno, comme ouvrage
principal de l'usine internationale de Livigno.

Après une interruption de deux: ans, la voie était ainsi ouverte à la reprise des pourparlers entre les deux pays, à l'échelon de la commission officielle italo-suisse.

c. L'ambassade d'Italie à Berne se fit alors l'interprète du voeu des autorités italiennes de voir le Conseil fédéral prendre bientôt une décision concrète en cette aSaire. Elle exposait que l'Italie avait un intérêt particulier à un rapide aboutissement, vu que la première phase de construction de l'ouvrage de Premadio et du nouveau barrage de Cancano II était

12

pour ainsi dire achevée et que l'Italie devait pouvoir prendre les décisions exigées pour la mise en chantier de la seconde phase. On nous signalait aussi la vive préoccupation que causait la perspective de devoir fermer les chantiers, licencier les ouvriers, immobiliser, puis démonter et rétablir plus tard, de grandes installations qui dès le début étaient prévues pour servir aux: deux phases sans interruption. De grands dommages économiques se produiraient si le début de la seconde phase était renvoyé à une date indéterminée et n'était pas entrepris dans un délai rapproché. On faisait valoir en outre que le gouvernement italien avait toujours tenu compte des efforts suisses pour accroître la production d'énergie électrique et qu'il avait fait à la Suisse des concessions importantes, dans un esprit de collaboration amicale et féconde, notamment pour l'utilisation du Reno di Lei.

Les 22 et 23 octobre 1956, la commission italo-suisse se réunissait à Ilome pour délibérer sur le projet de convention préparé par les experts des deux pays. La mise au net du texte une fois achevée, les présidents des deux délégations paraphèrent le projet, attestant ainsi l'entente réalisée.

La délégation italienne ne s'y prêta néanmoins qu'après que la délégation suisse eut refusé de nouveau de négocier au sujet de la dérivation d'une quantité d'eau supérieure à celle qui était prévue dans le projet de convention.

Au vu de ce résultat, nous nous occupâmes de l'ensemble du problème et décidâmes de poursuivre l'affaire jusqu'à ce que la convention avec l'Italie fût conclue en bonne et due forme. Une note fut donc adressée à fin décembre 1956 à l'ambassade d'Italie à Berne, pour exprimer que le Conseil fédéral était prêt à signer, sous réserve de ratification, une convention dont la teneur serait conforme au projet paraphé à Borne. La note faisait mention des difficultés d'ordre intérieur qui devront encore être surmontées en Suisse; elle précisait une fois de plus, avec toute la netteté désirable, que la quantité d'eau qui pourra être dérivée dans les conditions fixées par la convention représente en tout cas le maximum de ce que les autorités suisses sont en mesure de concéder.

La signature de la convention s'est fait attendre jusqu'au 27 mai 1957, car les autorités italiennes compétentes en matière d'impôts avaient
proposé de modifier légèrement les clauses du projet de convention relatives à la double imposition et à l'utilisation en territoire italien de la part d'énergie électrique revenant à la Suisse. Ce point fut liquidé vers la mi-avril, au cours d'une conférence des experts des deux parties. Le gouvernement italien souleva en outre une fois de plus le problème d'une utilisation des eaux du Spöl dans un cadre plus étendu que celui qui est prévu aujourd'hui.

Du côté suisse, on refusa cependant de prendre un engagement quelconque à cet égard, considérant que seules les expériences faites à la suite de la construction et de l'exploitation des installations prévues par la présente convention permettront de juger si la question pourra faire l'objet d'un, nouvel examen.

13

Les pourparlers qui viennent d'aboutir à la convention italo-suisse comptent sans nul doute parmi les plus durs que la Suisse ait menés jusqu'ici, dans le domaine de l'utilisation de la force hydraulique de sections de cours d'eau internationaux. La difficulté tenait essentieUement au fait que le Spöl est un cours d'eau dit successif, dont le cours supérieur se trouve en Italie et le cours inférieur en Suisse. La délégation suisse devait prendre en considération que le Spöl constitue pour l'Italie une de ses dernières ressources hydroélectriques et que ce pays entend en tirer le meilleur profit possible. Pays situé dans la partie amont de la rivière, l'Italie est partie du «principe de la territorialité» suivant lequel chaque Etat, en vertu de sa souveraineté, a le droit sur son territoire de disposer de ses cours d'eau de la façon qui lui paraît économiquement la plue rationnelle, la seule restriction à cet égard étant constituée par des conventions existantes (cf. E. Hartig, Internationale Wasserwirtschaft und internationales Recht, Vienne 1955, p. 11 s.). Sans reconnaître ce principe, la Suisse, qui se trouve en général dans la situation du pays situé à l'amont, ne pouvait pas non plus, dans le cas exceptionnel du Spöl, se faire le défenseur du point de vue opposé, à savoir qu'un pays situé à l'amont doit s'abstenir de modifier le cours d'eau si l'influence est nuisible au pays situé à l'aval («principe de l'intégrité», cf. Hartig, ibid.). Etant donné qu'il n'est pas possible de dégager du droit international public des règles précises en matière de rapports entre pays situés sur un cours d'eau successif et que, d'autre part, l'Italie est disposée à compenser les conséquences nuisibles de la dérivation envisagée en mettant à disposition le bassin d'accumulation de Livigno, la solution pratique de se prêter à la conclusion d'une convention réglant la dérivation était certainement la bonne pour notre pays.

2. le contenu de la convention La convention au sujet de l'utilisation de la force hydraulique du Spöl comprend, outre le préambule, trois chapitres avec un total de 20 articles, et un protocole additionnel.

Le préambule constate que la dérivation d'une partie des eaux du Spöl sur le versant italien vers l'Adda, selon la proposition italienne, d'une part, et la création du bassin de Livigno,
selon la proposition suisse, d'autre part, constituent deux modes d'utilisation de la force hydraulique de sections de cours d'eau situées, dans leur partie à l'amont, en Italie, et dans leur partie à l'aval, en Suisse. Il est reconnu que, par conséquent, chacun des deux Etats a droit à une partie de la force hydraulique et que son utilisation dans deux systèmes distincts doit faire l'objet de décisions concertées tenant compte des intérêts en présence et des différences de législation entre les deux Etats. Ceux-ci sont donc convenus qu'il y avait lieu de concéder aux requérants italiens et suisses les droits d'eau nécessaires à l'utilisation de la force hydraulique, de fixer les parts de puissance hydrau-

14

lique auxquelles chacun, des deux Etats a droit sur les deux systèmes d'utilisation et de procéder ensuite, sur cette base, à un échange des parts correspondantes de puissance et d'énergie électrique, de telle sorte que les usiniers puissent chacun en disposer autant que possible, comme si la force hydraulique mise en valeur relevait de la souveraineté d'un seni et même Etat.

Les principes énoncés dans le préambule trouvent leur développement dans les trois chapitres de la convention et dans le protocole additionnel.

Chapitre premier (art. 1 à 4). Ce chapitre s'occupe plus spécialement de la dérivation des eaux du Spöl et de ses affluents italiens sur le bassin versant de l'Adda.

D'après l'article premier, le Conseil fédéral donne son accord à l'octroi, par le gouvernement italien, de la concession de dériver les eaux de leur cours naturel, aux conditions fixées dans la convention et sous la réserve d'une concession suisse s'ajoutant à la concession italienne. La concession complémentaire suisse aura pour objet la force hydraulique de la partie suisse des sections de cours d'eau soumises à l'influence de la dérivation italienne.

Cet article met donc en relief en faveur de l'Italie le point de vue de l'Etat situé à l'amont. Néanmoins, l'Italie tient compte équitablement des intérêts de la Suisse, Etat situé à l'aval, sans pour autant que la formule choisie crée un précédent qui puisse nous gêner par trop lorsque c'est nous qui sommes en amont. Le fait que l'Italie admet contractuellement qu'en plus de la concession italienne pour la dérivation, une concession suisse complémentaire doit être délivrée, signifie pour la Suisse que, proportionnellement à sa part de la force hydraulique, elle peut percevoir une taxe de concession, une redevance annuelle et, dans les limites fixées par la législation fédérale, l'impôt cantonal spécial sur les usines hydrauliques.

L'article 2 statue que c'est le gouvernement italien qui désigne le concessionnaire de la dérivation, auquel le Conseil fédéral accorde ensuite la concession complémentaire suisse ou la transfère. Pratiquement, il ne peut s'agir que du propriétaire des usines actuelles de Fraele-Cancano-Premadio : l'Azienda elettrica municipale dì Milano, autrement dit le service public de l'électricité de la ville de Milan, car la dérivation prévue est
expressément destinée à l'agrandissement des installations de ce propriétaire.

"L'article 3 décrit les installations à établir pour la dérivation, délimite le bassin versant affecté par cette dérivation, et fixe la quantité d'eau dérivée vers Fraele-Cancano pour être utilisée dans l'usine de Premadio. Cette quantité ne devra pas dépasser sensiblement la moyenne de 97 millions de mètres cubes par année, ce qui représente le tiers environ des débits du Spöl à Punt dal Gali.

15

'L'article 4 fixe à 26 850 chevaux théoriques en moyenne la part de force hydraulique revenant à la Suisse, La quantité correspondante d'énergie électrique produite à l'usine de Premadio est de 128 millions de kilowattsheure annuellement, la puissance étant de 64 000 kilowatts. Pour le reste, l'article 4 contient des dispositions analogues à celles de l'accord italosuisse concernant l'usine frontière de Val di Lei-Innerferrera et à celles des accords antérieurs avec la France à propos de Kembs et du Châtelot, La seule particularité réside dans là possibilité d'échanger une partie de l'énergie dont dispose la Suisse à Premadio contre la part italienne de l'usine de Livigno. Les modalités de cet échange sont réglées dans le protocole additionnel.

Chapitre II (art. 5 à 10). Ce chapitre s'occupe de l'accumulation de Livigno et constitue le pendant du chapitre premier.

Comme l'ouvrage de Livigno, à la différence du système d'utilisation de la dérivation vers le bassin de l'Adda, se trouve à la fois dans le territoire des deux pays, l'article 5 dispose que le droit d'utiliser la force hydraulique sera concédé par les autorités compétentes des deux pays. Du côté suisse, c'est le Conseil fédéral qui est compétent (voir plus haut, chiffre II/2, lettre 6 et 3, lettre &). La compétence du canton des Grisons pour l'octroi des concessions nécessitées par l'aménagement cantonal de l'Inn et de ses affluents, y compris la retenue du Spöl en territoire suisse (au sens du projet von Salis) n'en est point affectée. En particulier, l'usine de Livigno, avec la centrale au pied du barrage à Punt dal Gali, ne s'oppose point à cette utilisation cantonale (voir plus haut pages 6/7 ainsi que la réponse à l'interpellation Dietschi-Soleure, Bulletin sténographique, Conseil national, session d'automne 1955, p. 425 s,).

D'après l'article 6, c'est au Conseil fédéral qu'il incombe de désigner le bénéficiaire de la concession de l'usine dite de Livigno, L'Italie s'engage à accorder sa concession à ce même bénéficiaire. Comme concessionnaire à envisager, il n'entre pratiquement en considération que les «Usines électriques de l'Engadine S.A. », avec siège à Zernez. Seules des maisons suisses participent à cette entreprise (voir plus haut, chiffre II/l). Il est entendu que, dans l'avenir non plus, aucune entreprise italienne de
la branche hydroélectrique ne pourra participer aux «Usines électriques de l'Engadine S.A.»; cette exclusive concerne en particulier le service de l'électricité de la ville de Milan. Les intéressés ont passé entre eux des arrangements propres à en assurer le respect.

"L'article 7 spécifie que le barrage de Livigno sera voisin du confluent du Spöl et de l'Ova dal Gali, en dehors de la limite du parc national suisse, et qu'il devra permettre d'accumuler 180 millions de mètres cubes d'eau environ (Val di Lei = 200 millions de mètres cubes).

D'après l'article 8, le barrage doit offrir le maximum de sécurité, conformément à la législation en vigueur dans notre pays. L'Italie laisse donc

16

à la Suisse les mains tout à fait libres en ce qui concerne les questions de sécurité.

Afin de réserver la liberté de décision qu'exigent les intérêts du parc national, la convention prévoit que l'emplacement de la centrale de l'usine de Livigno sera fixé soit dans l'acte de concession suisse, soit lors de l'approbation des plans de construction. La décision à cet égard appartient donc au Conseil fédéral. Ce point joue donc un rôle décisif pour la solution constructive. Nous y reviendrons plus loin (voir eh. V/2).

"L'article 9 crée la base juridique pour l'acquisition de la propriété foncière située en Italie pour les nécessités de la construction et de l'exploitation de l'usine à accumulation. Le concessionnaire sera tenu de remplacer le bâtiment des douanes italien de Ponte del Gallo suivant les idées des autorités italiennes. Il sera, en outre, tenu de rétablir les voies de communication interceptées.

Le troisième alinéa de l'article 9 réserve le pouvoir du Conseil fédéral d'imposer au concessionnaire les obligations nécessaires pour protéger le parc national suisse. Par conséquent, bien que l'usine de Livigno ait un caractère international, l'Italie abandonne à la Suisse le pouvoir autonome d'imposer au concessionnaire commun les conditions et charges jugées nécessaires pour sauvegarder les intérêts du parc national aussi bien au moment de la construction de l'ouvrage que pendant l'exploitation et les travaux d'entretien.

'L'article, 10 fixe à 9750 chevaux théoriques la part de l'Italie à la force hydraulique mise en valeur dans l'usine de Livigno. La quantité correspondante d'énergie électrique pouvant être produite est de 36,5 millions de kilowatts-heure, à la puissance de 18 250 kilowatts. Pour le reste, cet article est tout à fait analogue à l'article 4 de la convention.

Chapitre III (art. 11 à 20). Ce chapitre de la convention contient les dispositions communes, rédigées sur le modèle de l'accord concernant le Val di Lei. Elles règlent en particulier la procédure d'approbation des plans, d'octroi des concessions de part et d'autre, les mesures à prendre en cas de déchéance ou à l'expiration de la durée de la concession, l'exercice de la surveillance, par les deux Etats, pendant la construction et l'exploitation, la soumission des litiges à un tribunal arbitral. Pour le droit de retour,
c'est le principe de la territorialité qui est applicable. Dans le sens des recommandations faites ces dernières années par l'OECE et par le comité de l'énergie électrique de l'ONU à Genève, il est statué à l'article 13 que les deux Etats contractants s'engagent à faciliter de leur mieux, dans le cadre de leur législation, la construction et l'exploitation des ouvrages projetés et à prendre les dispositions nécessaires à cet effet, notamment sous les rapports des douanes, de l'importation et de l'exportation des matériaux de construction, du financement et du service des payements.

17 II s'agit ici d'une clause de bienveillance. Les deux systèmes d'utilisation étant réalisés et exploités par des entreprises distinctes et autonomes, dont aucune n'a de participations chez l'autre, les difficultés du genre de celles qui se sont produites par exemple à l'usine frontière du Châtelot ne sont pas à craindre.

Le 'protocole additionnel a pour but d'assurer la bonne exécution des articles 4 et 10 de la convention. Au chiffre, I, il est dit que la part italienne à l'énergie produite par l'usine de Livigno est échangée contre une partie correspondante de l'énergie et de la puissance revenant à la Suisse à l'usine de Premadio. Il est statué que, dans le cadre de cet échange, les deux Etats renoncent à percevoir des taxes ou redevances d'importation ou d'exploitation, quelles qu'elles soient.

Au chiffre. II, il est constaté qu'après l'échange prévu sous chiffre I, il reste à l'usine de Premadio un solde annuel de 91,5 millions de kilowattsheure, la puissance étant de 45 750 kilowatts. Au cas où le concessionnaire de l'usine de Livigno n'aurait pas fait usage, dans le délai d'une année, du droit de prendre ce solde d'énergie et de puissance, le Conseil fédéral s'engage à accorder au concessionnaire de l'usine de Premadio l'autorisation de l'utiliser en Italie. Pour cette autorisation, qui sera accordée la première fois pour une durée de vingt ans, la Suisse pourra exiger le paiement d'une somme qui ne devra pas dépasser celle qui serait due en cas d'exportation d'énergie électrique.

Le chiffre. III contient une disposition analogue à l'article 13, 2e alinéa, de la convention; il dispose que les clauses du protocole additionnel ne concernent pas les impôts directs. Il s'agit d'une précision désirée par l'administration italienne des contributions. Les intérêts suisses, en particulier ceux de la Confédération et du canton des Grisons en matière fiscale, demeurent sauvegardés.

Le chiffre IV a un caractère préventif et veut exclure une fausse interprétation de la convention et de son protocole additionnel en ce qui concerne les charges fiscales grevant les parts d'énergie électrique revenant à chacun des deux Etats.

3. Que penser do la convention?

La convention peut, à bon droit, être qualifiée de solution de compromis et d'entente mûrement pesée, avantageuse pour les deux parties. Le
point de vue de l'Etat riverain situé en amont n'a pas été imposé avec exagération ; les intérêts de l'Etat riverain situé en aval ont été pris en considération avec équité et avec le souci des relations de bon voisinage. A cet égard, on peut dire que la convention innove très heureusement dans le domaine du droit international. D'un côté, l'Italie peut agrandir ses installations hydroélectriques du cours supérieur de l'Adda et les exploiter comme si toute l'eau dérivée relevait exclusivement de sa souveraineté, Feuille fédérale. 109e année. Vol. II.

2

18

Le service de l'électricité de la ville de Milan peut non seulement utiliser à son usine de Premadio l'eau dérivée du Spol et faire passer de 320 à 540 millions de kilowatts-heure la capacité de production de cette usine en énergie d'hiver, II peut aussi produire des quantités importantes d'énergie supplémentaire dans ses usines situées plus bas sur l'Adda jusqu'au lac de Corne; de cette façon, les prix de revient relativement élevés de l'usine de Premadio sont notablement abaissés. L'eau dérivée peut servir aussi, plus bas que le lac de Còme, aux besoins de l'irrigation. Tels sont les avantages majeurs de la convention pour l'Italie.

De l'autre côté, la Suisse peut également réaliser l'usine internationale de Livigno de la même manière que si elle était exclusivement suisse.

L'avantage pour la Suisse réside surtout dans la compensation qui s'établit pour la soustraction d'eau provenant de la dérivation italienne vers le versant de l'Adda, soustraction dont les effets se feront sentir en territoire suisse jusqu'à Martina à la frontière autrichienne. Cette compensation consiste dans l'avantage que les usines cantonales de Pradella et de Martina tireront de l'eau accumulée à Livigno. Ces usines pourront accroître en hiver notablement leur production d'énergie de haute valeur sans devoir réduire sensiblement la production annuelle totale. L'accumulation pratiquée à Livigno apportera aussi un profit à la future usine frontière austrosuisse de Martina-Prutz et aux ouvrages existants ou projetés plus bas encore sur le cours de l'Inn. Ainsi, l'Autriche aussi reçoit une compensation équitable pour l'eau dont la privent les dérivations italiennes.

Toutefois, il n'a plus été possible d'atteindre le but initial que poursuivait la Suisse lorsque les pourparlers italo-suisses s'ouvrirent au printemps de 1948: nous envisagions à l'origine l'utilisation du Spöl sans que des eaux en fussent détournées au bénéfice d'autres bassins fluviaux. Après de longues années de laborieux pourparlers internationaux, on a pourtant réussi à conclure -- au prix d'un sacrifice supportable pour la Suisse, causé par les dérivations -- une convention qui assure une utilisation rationnelle des forces hydrauliques au bénéfice des deux Etats et qui mérite aussi d'être accueillie favorablement à cause de la garantie qu'elle offre pour
le parc national. La convention exclut une fois pour toutes l'éventualité d'un bassin d'accumulation purement italien dans le val de Livigno, immédiatement en amont de Punt dal Gali. Elle offre encore un point de départ ferme pour l'aménagement, sur le plan cantonal, de l'Inn et de ses affluents, en respectant le mieux possible le territoire du parc national et tous les intérêts qui s'y rattachent. Nous y reviendrons sous chiffre V.

D'une manière générale, on peut dire de la convention qu'elle se place sur le plan de la collaboration traditionnelle qui caractérise les relations de notre pays avec les Etats voisins, dans le domaine de l'économie des eaux. Les cours d'eau qui servent de frontière entre notre pays et ses voisins ou qui les traversent successivement forment, par la nature, une unité qui s'affirme dans la solidarité des intérêts de tous les Etats riverains.

19 «Le cours d'eau est un tout, dont chaque partie est très sensible à ce qui arrive aux autres et dont les usagers peuvent facilement se nuire, facilement aussi s'entraider, de sorte qu'ils constituent une communauté d'intérêts». C'est ce qu'écrivait dès 1928 un grand connaisseur du droit public et du droit des eaux, le professeur W. Burckhardt, qui publia alors dans la revue Weltchronik un court article sur le droit à l'usage des eaux courantes (Vom Recht am fliessenden Wasser). Signalant les difficultés qui peuvent se présenter de ce fait dans les rapports entre Etats, il poursuivait: «De son propre chef, chacun doit donc tenir compte d'autrui dans la mesure qui s'impose, mais chacun peut d'autre part prétendre à ce que, dans cette mesure, la faculté de disposer de son territoire lui soit laissée. Mais il n'existe pas de notions inébranlables sur ce que chacun doit concéder ou peut, au contraire, défendre avec intransigeance. On ne peut démontrer jusqu'où va le droit de chacun en le déduisant de principes fixes. On en est réduit à chercher une compensation empirique.» Burckhardt recommande donc aux parties de s'entendre librement. Vu les particularités du droit international et l'absence de normes fixes dans le domaine de l'économie hydraulique, il n'y a pas autre chose à faire.

Des atteintes notables au régime fluvial de l'Inn en faveur d'autres régions, tournées vers l'Italie, entrent en conflit sérieux avec les intérêts publics et privés des riverains de cette rivière. Tenir dûment compte de ces intérêts, laisser pour le reste à l'Italie, maîtresse du cours supérieur du Spöl, l'exercice de sa souveraineté territoriale, telle était la tâche de la délégation suisse; tel est aussi le but atteint par la présente convention.

IV. LA SITUATION JURIDIQUE EN CE QUI CONCERNE LE PARC NATIONAL Le fondement juridique du parc national est constitué par l'arrêté fédéral du 3 avril 1914 concernant la création d'un parc national suisse dans la Basse-Engadine (RS 4, 269), et par divers contrats et avenants instituant des servitudes, conclus par la Confédération avec la commune de Zernez et d'autres propriétaires fonciers du territoire réservé. Parmi ces dispositions, seul l'avenant des 13 juin/17 août 1920 au contrat de servitude des 29 novembre/30 décembre 1913 et 21 juillet 1914 avec la commune de Zernez
s'occupe expressément de l'utilisation des forces hydrauliques.

Cet avenant, prévoyant l'extension du parc national par l'adjonction de la région dite de Falcun située entre le Val Cluozza et celui du Spöl, avait été conclu en vue du repeuplement du parc national en bouquetins.

La Confédération donnait, dans cet avenant, son consentement à l'utilisation des forces hydrauliques du Spöl sous la forme suivante: 4. La Confédération suisse déclare qu'elle ne fera pas d'opposition à la création d'une retenue sur le Spöl, dans le territoire du parc, par le moyen de barrages nécessaires à 1» réalisation d'une usine électrique ou d'autres établissements industriels.

Elle fait cotte déclaration en renonçant à toute prétention à dee indemnités.

20 Si ce projet était exécuté, la commune de Zeraez devrait veiller à ce que des passerelles soient créées et maintenues en bon état à Punt Praspöl et Punt Perif ou dans leur voisinage, permettant de franchir le Spöl.

5. L'indemnité annuelle à la commune de Zernez est augmentée de 400 francs pour 1920 et les années suivantes, jusqu'à ce que les forces hydrauliques du Spöl puissent être aménagées.

Ce consentement était une conséquence du projet de l'ingénieur A. von Salis pour l'utilisation des forces hydrauliques de î'Inn et du Spöl (projet de 1919, voir plus haut chiffre 1/1); la commune de Zernez en avait fait une condition sine qua non de la conclusion du contrat. Le Conseil fédéral fut appelé à s'en expliquer devant le Conseil national en 1926. A cette époque, la perspective de l'utilisation des forces hydrauliques du Spöl avait fait naître de l'inquiétude dans les milieux préoccupés de la protection de la nature. Le rapport annuel de la ligue suisse pour la protection de la nature et divers articles parus dans la presse contenaient de vives protestations contre le projet d'un bassin d'accumulation sur le Spöl en vue d'alimenter une usine électrique. Mais la commission du parc national déclara, le 29 août 1926, ce qui suit à la commune de Zernez: «La commission du parc national est tout à fait étrangère à ces protestations, et il est de son devoir de vous déclarer qu'elle est tenue de respecter le contrat des 13 juin/ 17 août 1920 passé entre la Confédération et votre commune.» D'autre part, le conseiller national Gelpke posa le 27 septembre 1926 une. question écrite au Conseil fédéral pour lui demander s'il avait connaissance des efforts faits en vue d'exploiter l'énergie hydroélectrique du Spöl en créant un bassin d'accumulation en plein parc national, près de Zernez, et s'il ne pensait pas que l'exécution des travaux projetés serait contraire au sens et à l'esprit de l'arrêté fédéral du 3 avril 1914. Le Conseil fédéral répondit comme suit le 4 octobre 1926: II n'a été soumis jusqu'à présent à l'examen et à l'approbation des autorités fédérales aucun projet d'utilisation des forces hydrauliques du Spöl avec usine près de Zernez. Le Conseil fédéral n'a donc pas eu jusqu'ici l'occasion d'examiner le projet dans son ensemble. Dans le contrat des 13 juin et 17 août 1920 concernant l'adjonction du territoire de Falcun au parc national, il a été déclaré uniquement, sur la proposition unanime de la commission du parc national, qu'aucune opposition n'était faite à l'établissement d'un bassin de retenue sur le Spöl. On était parti de l'idée qu'il n'y avait là rien qui portât atteinte à l'arrêté fédéral du 3 avril 1914, d'autant moins que l'accumulation des eaux du torrent de Cluoza n'était
pas envisagée. Il convient de rappeler que le contrat de servitude passé avec la commune de Zernez, le 29 novembre 1913, et sanctionné par l'arrêté fédéral en question prévoit la construction d'un chemin de fer franchissant le col du Fuorn et traversant le territoire du parc national.

La législation donne aux autorités fédérales des moyens suffisants pour déterminer et apprécier à leur juste valeur, lors des mesures qu'elles sont appelées à prendre, la totalité et non seulement une partie des intérêts en jeu. En tenant compte de tous les facteurs et de la déclaration mentionnée plus haut, elles seront donc à même de prendre une décision conforme aux intérêts généraux.

Après 1940, le projet du KEK pour une usine internationale du Spöl fit rebondir la question de la compatibilité d'une concession qui serait

21

accordée pour exploiter les forces hydrauliques du Spöl avec l'arrêté fédéral du 3 avril 1914. De 1947 à 1951, un grand nombre d'expertises contradictoires furent rédigées sur ce sujet. En 1955 (cf. plus haut chiffre II/2) l'apparition du projet d'ensemble des «Usines électriques de l'Engadine S.A.», pour l'utilisation des forces hydrauliques de l'Inn et de ses affluents, créa une fois de plus une nouvelle situation. Le Conseil fédéral décida alors, dans sa séance du 19 mars 1956, d'examiner de nouveau tout le problème et chargea le département de justice et police de lui présenter un rapport sur l'avenant de 1920 et l'arrêté fédéral de 1914.

Dans un avis de droit du 16 octobre 1956 adressé au Conseil fédéral, le département de justice et police a résumé en ces termes le résultat de son étude: Nous pouvons donc répondre, à la question qui nous a été posée sur le rapport entre l'avenant et l'arrêté fédéral, en ce sens que l'arrêté fédéral donne simplement au Conseil fédéral la faculté et la charge de créer, de conserver et de gérer le parc national, selon les arrangements pris avec la commune. L'arrêté fédéral met à la, disposition du Conseil fédéral les moyens nécessaires à cette fin. Le contenu et l'étendue dos droits de la Confédération résultent donc exclusivement des arrangements contractuels pris avec la commune. L'arrêté fédéral ne donne au Conseil fédéral, à l'égard de la commune, aucun droit dépassant ce cadre et il ne contient aucune prescription de portée générale. Dans ce sens, il n'a aucune signification autonome. Les arrangements avec la commune ont constitué une servitude de droit privé, éventuellement une obligation au sens du code des obligations. Mais s'il existe un engagement de la commune à ne pas utiliser les eaux du Spöl, il constitue une obligation de droit public de la commune, et cette obligation doit être considérée comme valable. L'octroi de la concession doit donc être refusé pour autant qu'elle est incompatible avec ces arrangements.

En revanche, le Conseil fédéral ne peut s'opposer à la concession en se référant au contrat de servitude ou à l'arrêté fédéral si les conditions auxquelles le Conseil fédéral a fait sa promesse du chiffre 4 de l'avenant sont réalisées. Le critère pour décider si ces conditions sont remplies ou non nous paraît résider en ceci que le projet
à considérer ne doit pas nuire aux buts du parc plus fortement que ne l'aurait fait le projet von Salis.

Du point de vue juridique, les lignes directrices d'une décision se trouvent ainsi données.

Nous empruntons à un rapport de l'ingénieur von Salis, daté du 1er juillet 1947 et consacré à son projet de 1919, les détails suivants : On prévoyait un bassin d'accumulation dans le cours de la rivière, sur une longueur de 7,25 km, avec une largeur maximum de 330 m à Praspol et une contenance utile de 28 millions de mètres cubes. La limite de retenue se serait trouvée à 1,1 km de la frontière italo-suisse. Quand le bassin aurait été totalement rempli, il aurait recouvert dans la vallée du Spöl une superficie de 1,22 kms, dont 1,04 km2 sur le territoire du parc national. Pour remplacer les ponts sur le Spöl qui auraient été ainsi submergés, il aurait fallu en construire de nouveaux à Praspol et à Punt Perif, à environ 800 m en amont des actuels, le premier mesurant 85 m et le second 60 m.

Comme nous l'avons déjà constaté dans ce message (chiffres 1/2 et II/2, lettre a) et dans la description des ouvrages (annexe 1, chiffre 2), le

22

projet actuel des «Usines électriques de l'Engadine S.A.» pour le palier supérieur de l'Inn coïncide, en ce qui concerne la retenue du Spöl, avec l'ancien projet von Salis, Sa réalisation nuirait même moins au parc national que ne l'eût fait celle du projet de 1919. Ainsi, le projet actuel ne prévoit pas, comme celui de 1919, une accumulation du torrent de Cluozza, et renonce même complètement à le capter. Ajoutons que les méthodes actuelles de construction permettraient d'exécuter l'ouvrage en moins de temps et avec de moindres atteintes à l'intégrité du parc national que ce n'eût été le cas lors de la conclusion du contrat.

A la question que pose le département fédéral de justice et police à la fin de son exposé, on peut donc répondre que les conditions posées par l'avenant de 1920 au contrat de servitude passé en 1913/1914 avec la commune de Zernez sont remplies.

Après ce nouvel examen du problème, nous n'avons pas cru possible de nous opposer, en invoquant le statut du parc national, à l'octroi d'une concession pour l'accumulation du Spöl sur le territoire du parc, telle qu'elle est prévue aujourd'hui. Nous avons dû cependant nous demander si cette accumulation du Spöl violerait peut-être l'article 22 de la loi sur l'utilisation des forces hydrauliques, qui réserve la protection des sites.

A cet égard, il faut bien admettre que l'utilisation de la force hydraulique du Spöl portera une certaine atteinte à la beauté des sites. Il est néanmoins possible de ménager cette dernière et d'imposer au concessionnaire les obligations appropriées. En conséquence, l'atteinte en question ne pèse pas assez pour jouer un rôle prépondérant. La majeure partie du parc national n'est d'ailleurs aucunement touchée et peut être conservée intacte pour continuer à faire l'objet d'observations scientifiques.

V. LA NÉCESSITÉ D'UNE SOLUTION CONSTRUCTIVE 1. Les pourparlers en vue d'une entente Lorsque nous chargeâmes le département de justice et police de nous présenter un rapport au sujet de l'avenant de 1920 et de l'arrêté fédéral de 1914 concernant le parc national, nous autorisâmes le département de l'intérieur à provoquer un échange de vues entre le Petit conseil du canton des Grisons et une délégation du Conseil fédéral sur la question de savoir si le parc national peut être conservé malgré l'utilisation envisagée
des forces hydrauliques, et comment il peut l'être.

Un premier entretien eut lieu à Berne, le 15 juin 1956, entre les représentants du Petit conseil et des communes de Zernez, Scuol/Schuls et S-chanf et une délégation de la commission du parc national. Les délégués de la commission du parc national tentèrent avec insistance d'amener le canton et les communes à renoncer, moyennant indemnité, à l'exploitation

23 de la force hydraulique. Mais la discussion montra qu'on ne trouverait pas de solution dans cette direction. Les représentants du canton et des communes restèrent résolument attachés à l'intention d'exploiter la force hydraulique et rappelèrent la garantie que la Confédération leur avait donnée dans ce sens en 1920. ÜB se déclarèrent cependant à plusieurs reprises, tout disposés à se prêter à l'agrandissement du parc national par la cession de superficies bien supérieures à celles que l'exploitation des forces motrices mettra à contribution. D'autre part, la question fut posée de savoir si le lac artificiel de Praspöl ne deviendrait pas superflu par la construction de l'usine internationale de Livigno et s'il y avait possibilité d'en discuter encore avec l'Italie. Il fut constaté que si l'ouvrage d'accumulation de Livigno était construit on pourrait sans doute renoncer au bassin d'accumulation de Praspöl et se contenter d'un bassin de compensation à Ova Spin. Il fut relevé que l'Italie n'avait pas abandonné l'idée d'utiliser le Spöl et que les pourparlers italo-suisses étaient encore en cours. Bref, ce premier contact montra qu'il devait exister une possibilité de s'entendre. Pour étudier les détails de plus près, il fut convenu qu'une commission paritaire composée d'un représentant de chacune des communes intéressées au parc national (Zernez, S-chanf, Scuol/Schuls) et de trois membres de la commission du parc national poursuivrait les négociations.

2. La solution de conciliation Les délibérations de la commission de conciliation et les pourparlers entre des représentants des autorités fédérales et cantonales, de la commission du parc national et des «Usines électriques de l'Engadine S.A.» permirent d'entrevoir la possibilité d'une solution - tenant compte, delà meilleure manière possible, du but du parc national.

a. Renonciation au bassin d'accumulation de Praspöl Ainsi qu'il a été dit, il est possible de renoncer au lac artificiel de Praspöl si le bassin d'accumulation de Livigno est établi. On pourrait alors se contenter, en aval, d'une accumulation beaucoup plus réduite que le lac prévu à Praspöl ; au lieu de retenir 28 millions de mètres cubes, on se contenterait d'un bassin de compensation de 6,5 millions de mètres cubes à Ova Spin. Le bassin de Livigno devrait être relié à celui de
l'Ova Spin de telle sorte que de l'eau puisse être refoulée par pompage du dernier dans le premier, car le débit des cours d'eau qui alimenteront encore le bassin de Livigno après les dérivations prévues dans le projet d'aménagement italien ne suffiront plus au remplissage de ce bassin.

En conséquence, la centrale de l'ouvrage de Livigno devrait être reportée de Punt dal Gali jusqu'au voisinage du barrage de l'Ova Spin (cf. la description du projet, annexe 1, chiffre 6).

24 Comme le montre la confrontation des plans de situation correspondant aux solutions de PraspÖl et d'Ova Spin (annexe 1, figure 2), le parc national serait beaucoup moins affecté par la seconde de ces solutions.

De grandes étendues du parc national dans la vallée du Spöl, destinées à être submergées dans le cas du bassin d'accumulation de Praspöl, seraient épargnées si la retenue était créée à Ova Spin, Le barrage serait en outre plus petit. La conduite forcée allant du bassin de Livigno jusqu'à la centrale souterraine à l'extérieur du parc national, à droite du barrage, près d'Ova Spin, ne serait pas visible sur le sol dans le parc national. Un débit minimum serait maintenu dans le Spöl, à partir du pied du barrage de Punt dal Gali. Ce débit augmenterait successivement par les apports provenant des affluents situés à l'aval et auxquels il n'est pas question de toucber. Ainsi le Spöl aurait encore suffisamment d'eau pour satisfaire aux exigences du parc national.

Portant une moindre atteinte au parc national que celle de Praspöl, la solution d'Ova Spin est ouverte par l'avenant conclu en 1920 entre la Confédération et la commune de Zernez (voir plus haut, chiffre IV). Elle crée d'autre part la situation de fait qui permet à la Confédération d'exercer sa compétence d'accorder une concession sur toute la partie suisse du Spöl, comprise entre Punt dal Gali et Ova Spin, qui est mise en valeur dans l'usine internationale de Livigno. La position de la Confédération est ainsi renforcée par rapport à ce qu'elle serait si l'on était en présence d'une usine internationale de Livigno-Punt dal Gali et, en aval, d'un bassin de Praspöl faisant partie du palier cantonal supérieur de l'Inn.

La compétence d'imposer par la voie de concession des conditions et prestations, dans l'intérêt du parc national, se trouve ainsi en une seule main, celle du Conseil fédéral, pour toute la région qui s'étend de la frontière italo-suisse à Ova Spin. Nous avons déjà relevé que le Conseil fédéral, dans la convention avec l'Italie, s'est expressément réservé de pouvoir imposer au concessionnaire de l'usine de Livigno les obligations nécessaires pour protéger le parc national suisse (cf. plus haut chiffre III/2 convention, art. 9, 3e al.).

Dans une lettre du 8 mai 1957, reproduite comme annexe 2 à ce message, les «Usines
électriques de l'Engadine S. A.» déclarent expressément renoncer à créer l'accumulation de Praspöl, Sous la réserve que la présente convention avec l'Italie entre en vigueur et que les autres conditions juridiques de l'utilisation du Spöl soient réalisées, elles se sont engagées à se ranger à la solution qui prévoit le bassin de compensation à Ova Spin.

Nous la considérons comme liée par cette déclaration.

b. Agrandissement du parc national La renonciation au lac artificiel de Praspöl, jointe à l'engagement de l'entreprise hydroélectrique de réaliser les projets qui portent le moins atteinte au parc national (solution d'Ova Spin), apporte déjà une contri-

25

bution notable à l'oeuvre de conciliation entre les divers points de vue.

Il s'y ajoute la bonne volonté avec laquelle diverses communes de l'Engadine ont offert de mettre à la disposition du parc national d'autres biens fonciers dont elles sont propriétaires. Il est question en particulier du versant gauche du Val Trupchun sur le territoire de la commune de S-chanf, des régions de Buffalora ou d'Ivraina, sur le territoire de la commune de Zernez, et de la réserve de S-cari, sur le territoire de la commune de Scuol/ Schuls.

A propos de la réserve du Val S-carl, il y a tout particulièrement lieu de relever qu'elle ne fait actuellement l'objet que d'un bail de 25 ans entre la commune de Scuol/Schuls et la ligue suisse pour la protection de la nature. Ce bail peut être résilié pour 1962. La base juridique de cette réserve n'est donc pas la même que celle des autres réserves, quand bien même il s'est toujours agi d'une des régions les plus précieuses pour les buts du parc national. Le voeu de voir cette région faire l'objet d'un contrat de servitude correspondant à l'arrêté fédéral de 1914 pourrait enfin être réalisé.

Certaines communes se sont déjà engagées par écrit à se prêter à cet agrandissement notable et précieux du parc national (cf. les annexes 3 à 6), Cet agrandissement est recommandé par le canton (cf. annexe 7) de même que par la commission fédérale du parc national. Mais pour que ces promesses soient réalisées, il faudra qu'aucune opposition ne soit faite à l'utilisation prévue de l'Inn et du Spol, y compris le bassin d'accumulation de Livigno. C'est également à cette condition que les communes se sont déclarées prêtes à laisser remplacer par un bassin de compensation à Ova Spin la retenue de Praspol.

L'agrandissement prévu du parc national ne peut cependant plus être financé en application de l'arrêté fédéral du 3 avril 1914, car les crédits mis à la disposition du Conseil fédéral par l'article 3, 3e alinéa, de cet arrêté pour indemniser les propriétaires sont déjà pleinement utilisés.

Aussitôt que des contrats de servitude auront été passés avec les communes au sujet de l'incorporation des nouvelles régions au territoire du parc national, nous adresserons un nouveau message aux chambres pour leur demander, en leur présentant les textes de ces contrats, d'approuver le projet d'un
nouvel arrêté fédéral concernant le parc national. Cet arrêté autoriserait le Conseil fédéral à ratifier ces contrats de servitude et accorderait les crédits nécessaires pour l'indemnité annuelle à verser aux propriétaires fonciers des nouvelles parties du parc national. Pour le reste, les dispositions de l'arrêté fédéral du 3 avril 1914 seraient confirmées.

3. Utilisation des forces hydrauliques et parc national Lorsque la question d'utiliser en commun avec l'Italie la force hydraulique du Spöl fut mise en discussion, U y a une dizaine d'années, et que le Conseil fédéral dut décider si des pourparlers seraient engagés entre les

26 deux pays, certains milieux intéressés au parc national et à la protection de la nature déclarèrent qu'il y avait incompatibilité entre le parc national et cette utilisation des eaux. C'était l'un ou l'autre. Une décision dans ce sens ne répondrait cependant pas à la véritable situation juridique, car il ne s'agit pas d'observer seulement l'arrêté de 1914 concernant la création d'un parc national suisse. II y a aussi les nombreux contrats conclus à propos du parc, de même que la loi sur l'utilisation des forces hydrauliques, fondée sur l'article 24&is de la constitution.

Compte tenu de la situation juridique, on sert mieux les intérêts du parc national en s'engageant dans la voie d'une libre entente entre tous les intéressés. Au moment où l'idée d'une telle entente prend forme, il ne serait vraiment pas raisonnable de rejeter la solution constructive.

Le parc national fut dès le début une oeuvre d'entente entre la Confédération, le canton et les communes, la société suisse des sciences naturelles et là ligue suisse pour la protection de la nature. C'est ainsi que l'ont conçu, créé, agrandi et entretenu ses fondateurs. C'est donc être fidèle à là tradition que de vouloir le conserver, l'étendre et le consolider en concluant une nouvelle entente.

L'utilisation de la force hydraulique dans le cadre de cette solution de conciliation reste en deçà de ce que permet l'avenant auquel la Confédération, a souscrit en 1920. La situation devient même plus favorable pour le parc national. L'utilisation prévue n'affecterait qu'une très petite partie du parc. Si l'on considère que la législation fédérale prescrit l'utilisation rationnelle des forces hydrauliques on doit constater que la renonciation au bassin de Praspöl représente une perte de capacité d'accumulation. Or, un telle perte est loin de pouvoir être prise à la légère, étant donné que les possibilités d'accumulation dont nous disposons encore se font toujours plus rares. Les circonstances spéciales du cas permettent cependant de faire ce sacrifice.

L'aménagement des forces hydrauliques de l'Engadine représente une mesure durable, propre à aider efficacement la population montagnarde de ce coin de pays sis à l'écart. La construction, l'exploitation et l'entretien des usinés apporteront de l'animation dans la vie économique locale, sans pour autant
s'accompagner d'une immigration autre que passagère d'éléments du dehors.

Pour l'économie publique du canton des Grisons et toute l'économie suisse, l'aménagement de l'Inn et de ses affluents est un facteur important, puisqu'il se traduit par un apport annuel de 1,5 milliard de kilowatts-heure.

Comme nous l'avons exposé dans notre message du 26 avril 1957 concernant un article constitutionnel sur l'énergie atomique, de grands efforts sont nécessaires pour développer nos forces hydrauliques, et ces efforts doivent être soutenus par tous les moyens (cf. FF 1957, I, 1180). L'amé-

27 nagement des forces hydrauliques de l'Inn et de ses affluents peut apporter une contribution importante à l'approvisionnement suffisant de notre pays en énergie. L'importance des forces hydrauliques demeurera, et celle des bassins d'accumulation est même destinée à grandir encore.

Dans les temps qui viennent, jusqu'à ce que l'énergie produite par les usines atomiques soit disponible en suffisance pour pouvoir couvrir les besoins futurs, la Suisse ne pourra se passer d'une étroite collaboration avec d'autres Etats européens, quoique la possibilité d'en obtenir de l'énergie soit limitée par les besoins propres de ces pays et le prix relativement élevé de cette énergie d'importation. Au vu d'un rapport présenté en mai 1956 par un groupe d'experts de l'OECE sous le titre L'Europe face à ses besoins croissants en énergie, la cinquième conférence mondiale de l'énergie a exprimé nettement l'avis que l'intensification indispensable des efforts pour l'utilisation des forces hydrauliques exigeait le travail en commun et l'aide réciproque de tous les intéressés. Les conclusions du rapport ont été adoptées en principe, le 18 juillet 1956, par le conseil des ministres de l'OECE, comme base des tâches futures de l'OECE dans le domarne de l'énergie. La mise en valeur des forces hydrauliques, telle qu'elle est prévue, représente donc aussi, surtout à l'égard des Etats en aval (l'Autriche et l'Allemagne) un acte de solidarité. La Suisse a d'ailleurs encore d'autres tâches communes à mener à bien avec l'Italie dans le domaine de l'économie hydraulique ; nous pensons par exemple à la construction et à l'exploitation de l'usine frontière Val di Lei-Innerferrera et aux problèmes de régularisation du lac de Lugano et du lac Majeur.

Dans les circonstances données, la solution constructive que nous avons prévue représente à tous égards le maximum de ce qui peut être obtenu.

Les communes de l'Engadine intéressées au parc national ainsi que le canton des Grisons auraient la satisfaction de voir l'aménagement de leurs forces hydrauliques résulter d'un arrangement à l'amiable. La bonne entente sans laquelle l'avenir du parc national ne peut être assuré serait rétablie. Les savants intéressés au parc national pourraient de nouveau se vouer exclusivement à ses buts. La condition primordiale pour qu'il en soit ainsi,
c'est que l'oeuvre de conciliation aboutisse. Pour qu'elle aboutisse, il faut que la convention italo-suisse au sujet de l'utilisation de la force hydraulique du Spöl soit ratifiée. Nous avons par conséquent l'honneur de recommander à votre acceptation le projet d'arrêté fédéral ci-joint approuvant la convention.

Veuillez agréer, Monsieur le Président et Messieurs, les assurances de notre haute considération.

Berne, le 28 juin 1957.

Au nom du Conseil fédéral suisse: Le vice-président, Holenstein Le chancelier de la Confédération, Ch. Oser

28

(Projet)

ARRÊTÉ FÉDÉRAL concernant

l'approbation de la convention conclue entre la Confédération suisse et la République italienne au sujet de l'utilisation de la force hydraulique du Spöl

L'Assemblée fédérale de la Confédération suisse,

vu l'article 85, chiffre 5, de la constitution; vu le message du Conseil fédéral du 28 juin 1957, arrête:

Article premier La convention conclue le 27 mai 1957 entre la Suisse et l'Italie au sujet de l'utilisation de la force hydraulique du Spol est approuvée.

Le Conseil fédéral est autorisé à la ratifier.

Article 2 Le présent arrêté est soumis aux dispositions de l'article 89, 3e alinéa, de la constitution, concernant le referendum en matière de traités internationaux.

11657

29

CONVENTION entre

la Confédération suisse et la République italienne au sujet de l'utilisation de la force hydraulique du Spöl

LA CONFÉDÉRATION SUISSE ET LA EËPUBLIQUE ITALIENNE estimant que l'utilisation des eaux du Spöl présente un intérêt majeur pour le développement des ressources électriques des deux pays et la satisfaction des besoins de leurs économies, considérant que la dérivation d'une partie de ces eaux sur le versant italien de l'Adda, selon la proposition italienne d'une part, et la création du bassin d'accumulation de Livigno, selon la proposition suisse d'autre part, constituent deux modes d'utilisation de la force hydraulique de sections de cours d'eau situées, dans leur partie à l'amont, sur le territoire de l'Italie et, dans leur partie à l'aval, sur celui de la Suisse, ont reconnu que chacun des deux Etats avait droit à une partie de la force hydraulique, proportionnelle à la chute et aux débits naturels qui lui appartiennent dans ces sections, et que leur utilisation, réalisable dans deux systèmes distincts, devait faire l'objet de décisions concertées, tenant compte des intérêts en présence et des différences de législation des deux Etats.

Elles ont, en conséquence, convenu qu'il y avait lieu pour les deux Etats de concéder d'un commun accord, aux requérants italiens et suisses, le droit d'établir les ouvrages nécessaires à l'aménagement de la force hydraulique, de fixer les parts de puissance hydraulique auxquelles chacun des deux Etats a droit dans les deux systèmes d'utilisation et de procéder ensuite, sur cette base, à un échange des parts correspondantes de puissance et d'énergie électrique, de telle sorte que les usiniers puissent chacun en disposer autant que possible dans la même situation que si la force hydraulique mise en valeur relevait de la souveraineté d'un seul et même Etat.

30

A cet effet, elles ont résolu de conclure une convention internationale et ont désigné leurs plénipotentiaires, savoir Le Conseil fédéral suisse:

Monsieur Max Petitpierre, Conseiller fédéral, chef du département politique fédéral, Le Président de la République italienne: Son Excellence Monsieur Maurilio Coppini, Ambassadeur extraordinaire et plénipotentiaire d'Italie en Suisse, lesquels, après s'être communiqué leurs pleins pouvoirs, reconnus en bonne et due forme, sont convenus des dispositions suivantes: I. DÉRIVATION SUE LE BASSIN VERSANT DE L'ADDA Article premier Le Gouvernement suisse donne son accord à l'octroi, par le Gouvernement italien, de la concession de dériver de leur cours naturel une partie des eaux du Spöl qui s'écoulent successivement du territoire de l'Italie dans celui de la Suisse et d'utiliser la force hydraulique correspondante sur le versant italien de l'Adda, sur la base des clauses de la présente convention et moyennant l'octroi, par le Gouvernement suisse, d'une concession complémentaire dont l'objet sera la partie de la force hydraulique qui relève du territoire suisse.

Art. 2 La concession complémentaire suisse sera accordée et, s'il y a lieu, transférée au bénéficiaire désigné par le Gouvernement italien.

Art. 3 Le concessionnaire établira, dans le bassin versant supérieur du Spöl, un collecteur situé au-dessus de la cote 1960 (I.G.M, [s.m.m.]) et qui permettra de rassembler les apports naturels d'une surface de 105 km2 au maximum, puis de les conduire par gravité dans les bassins d'accumulation de San Giacomo et de Cancano, dans la vallée de Fraele, en HauteValteline. La quantité d'eau ainsi dérivée ne devra pas dépasser sensiblement 97 millions de ms par année, en moyenne.

Les eaux ainsi dérivées de leur cours naturel seront utilisées dans l'usine de Premadio, près de Bormio sur l'Adda,

31 II est entendu que la Confédération suisse n'assume à l'égard de la République italienne aucune obligation de compenser les pertes d'eau et d'énergie électrique qui pourraient se produire en cas de mauvais fonctionnement des ouvrages de prise et de dérivation ou pour toute autre cause.

Art. 4 Compte tenu de la dérivation de 97 millions de m 3 d'eau vers l'Adda et de la chute disponible en Suisse à l'aval du lieu dit «Punt dal Gali», il est convenu que la force hydraulique revenant à la Suisse est de 26 850 chevaux théoriques, en moyenne.

En représentation de cette part, la Suisse aura droit à une quantité correspondante d'énergie électrique susceptible d'être produite dans l'usine de Premadio, ainsi qu'à une partie de la puissance disponible dans cette usine. L'énergie et la puissance revenant ainsi à la Suisse sont fixées respectivement à 128 millions de kilowattheures par année et à 64 000 kilowatts. La Confédération suisse pourra en disposer dans telles formes et sous telles conditions qu'elle jugera utile.

L'énergie et la puissance électriques revenant à la Suisse et livrées dans ce pays seront exemptées par la République italienne de toutes taxes, redevances ou restrictions de droit public quelconques, de telle sorte que cette énergie puisse être librement transportée en Suisse et soit, à tous égards, dans la même situation que si elle était produite sur territoire suisse. L'établissement, l'exploitation et l'entretien des installations électriques qui servent au transport de cette énergie à destination de la Suisse demeurent cependant soumis, en Italie, à la législation de ce pays en la matière.

L'énergie et la puissance électriques attribuées à la Suisse ne pourront être utilisées hors de son territoire que conformément aux dispositions légales suisses sur l'exportation de l'énergie électrique. Il est entendu que le Gouvernement suisse ne mettra pas obstacle à l'emploi en Italie de la partie de cette énergie correspondant à la quantité revenant à l'Italie, conformément à l'article 10 de la présente convention, ceci pour autant que le Gouvernement italien accorde, en échange, l'autorisation d'utiliser en Suisse cette quantité.

II. ACCUMULATION DE LIVIGNO

Art. 5 Le droit d'utiliser la force hydraulique du Spöl en créant un bassin d'accumulation dans les vallées de Livigno et de l'Ova dal Gali sera concédé pour le territoire de chacun des deux Etats contractants par leurs autorités compétentes.

32

Art. 6 La concession italienne sera accordée au bénéficiaire désigné par le Gouvernement suisse. Elle s'étendra à la partie italienne des sections de cours d'eau dont la chute et les débits seront mis en valeur dans l'usine dite de Livigno.

En cas de changement du bénéficiaire de la concession suisse, le Gouvernement italien transférera la concession italienne au nouveau bénéficiaire désigné par le Gouvernement suisse.

Art. 7 Le concessionnaire des deux Etats contractants établira, près du confluent du Spöl et de l'Ova dal Gali, en dehors de la limite du Parc national suisse, un barrage susceptible de créer une retenue à la cote 1808 au maximum (I.G.M, [s,m.m.]), dont la capacité utile séra de 180 millions de m3 environ.

Le bassin d'accumulation sera alimenté par les eaux qui s'y écouleront naturellement et qui n'auront pas été dérivées conformément au chapitre I de la présente convention ainsi que par celles qui y seront refoulées au moyen d'installations de pompage.

Art. 8 Le barrage sera d'une construction offrant le maximum de sécurité pour la Suisse, conformément à la législation en vigueur dans ce pays.

Il sera disposé de manière à offrir aux eaux un débouché libre suffisant, pour que les crues puissent s'écouler à tout moment sans produire aucune surélévation au-dessus de la cote fixée à l'article précédent.

L'emplacement de la centrale hydro-électrique sera fixé soit dans l'acte de concession suisse, soit lors de l'approbation des plans de construction.

Art. 9 II appartiendra au concessionnaire désigné par le Gouvernement suisse d'acquérir en territoire italien, selon la législation de ce pays, les biensfonds et droits des tiers nécessaires à la construction et à l'exploitation du bassin d'accumulation de Livigno. Le Gouvernement italien mettra à cet effet le concessionnaire au bénéfice du droit d'expropriation.

Il est entendu que le concessionnaire sera tenu de remplacer le bâtiment des douanes italien de Ponte del Gallo et de rétablir les voies de communication interceptées soit par le barrage, soit par le bassin d'accumulation.

Le Gouvernement suisse se réserve d'imposer au concessionnaire les obligations nécessaires pour protéger le Parc national suisse.

33

Art. 10 Compte tenu des eaux et de la chute utilisables sur les territoires respectifs des deux Etats, il est convenu que la force hydraulique qui sera mise en valeur dans l'usine à accumulation de Livigno et qui revient à l'Italie est de 8750 chevaux théoriques, en moyenne.

En représentation de cette part, l'Italie aura droit à une quantité correspondante d'énergie électrique susceptible d'être produite dans l'usine à accumulation de Livigno ainsi qu'à une partie de la puissance disponible dans cette usine. L'énergie et la puissance revenant ainsi à l'Italie sont fixées respectivement à 36,5 millions de kilowattheures par année et à 18 250 kilowatts. Le République italienne pourra en disposer dans telles formes et sous telles conditions qu'elle jugera utile.

L'énergie et la puissance électriques revenant à l'Italie et livrées dans ce pays seront exemptées par la Confédération suisse de toutes taxes, redevances ou restrictions de droit public quelconques, de telle sorte que cette énergie puisse être librement transportée en Italie et soit, à tous égards, dans la même situation que si elle était produite sur territoire italien. L'établissement, l'exploitation et l'entretien des installations électriques qui servent au transport de cette énergie à destination de l'Italie demeurent cependant soumis, en Suisse, à la législation de ce pays en la matière.

L'énergie et la puissance électriques attribuées à l'Italie ne pourront être utilisées hors de son territoire que conformément aux dispositions légales italiennes sur l'exportation de l'énergie électrique. Il est entendu que le Gouvernement italien ne mettra pas obstacle à l'emploi en Suisse de cette énergie, en échange d'une autorisation du Gouvernement suisse d'utiliser en Italie une partie correspondante de l'énergie revenant à la Suisse, conformément à l'article 4 de la présente convention.

III. DISPOSITIONS COMMUNES

Art. 11 Les plans d'ensemble, de même que les projets de construction des ouvrages, seront dressés par les soins des concessionnaires.

Us seront soumis, avec toutes justifications utiles, aux Gouvernements des deux Etats contractants et ils ne pourront être exécutés qu'après que les autorités compétentes des deux Etats se seront déclarées d'accord pour leur approbation.

Tous les ouvrages seront exploités et entretenus par les concessionnaires.

feuille fédérale. 109« année. Vol. II.

3

34

Art. 12 Les Gouvernements dee deux Etats contractants se communiqueront leurs décisions au sujet des actes de concession; ceux-ci n'auront leur effet que lorsque les deux Gouvernements se seront déclarée d'accord sur les conditions imposées. Ces dernières devront concorder sur tous les points où cela est nécessaire. Elles pourront s'écarter des normes de la législation nationale dont l'application ferait obstacle à l'harmonisation des actes de concession.

Les concessions prendront fin le 31 décembre de la quatre-vingtième année, comptée à partir de la date qui sera fixée par les actes de concession pour la mise en service des ouvrages. Les bénéficiaires des concessions auront pendant toute la durée des concessions un for dans chacun des deux Etats contractants, La limitation ultérieure ou le retrait de l'une des concessions ne pourront être décidés qu'à la suite d'une entente entre les deux Gouvernements.

Art. 13 Les deux Etats contractante s'engagent à faciliter de leur mieux, dans le cadre de leurs législations, la construction et l'exploitation des ouvrages projetés et à prendre les dispositions nécessaires à cet effet, notamment sous les rapports des douanes, de l'importation et de l'exportation des matériaux de construction, du financement et du service de paiements.

Les dispositions de la présente convention ne s'appliquent pas aux impôts directs de l'Etat et des communautés locales.

En cas de double imposition les autorités italiennes et suisses se consulteront pour conclure un accord évitant la double imposition.

Art. 14 En cas de non-achèvement des ouvrages, d'interruption de l'exploitation ou de toute autre cause de déchéance, prévue aux actes de concession, les Gouvernements des deux Etats contractants prendront, d'un commun accord, les mesures qu'ils jugeront les mieux appropriées à la situation et, éventuellement, à l'octroi de nouvelles concessions.

Art. 15 Dix ans avant l'expiration de la durée des concessions, des pourparlers seront engagés entre les deux Gouvernements en vue de s'entendre sur la question de savoir: a. Si les concessions doivent être renouvelées et à quelles conditions;

35

b. Si et à quelles conditions les deux Etats doivent chacun faire usage de leur droit de retour; c. Si l'exploitation des ouvrages doit cesser.

Dans les cas visés sous a et b du premier alinéa de cet article, les parts des forces hydrauliques revenant à la Suisse et à l'Italie seront maintenues aux chiffres indiqués aux articles 4 et 10 de la présente convention et les conditions du nouveau régime seront déterminées de manière à en assurer aux deux Etats les avantages dans la même mesure.

Le droit de retour de chaque Etat s'applique aux installations situées sur son propre territoire.

Art. 16 Pour la période de construction, les deux Gouvernements se réservent de constituer une commission de surveillance de quatre membres, dont deux membres seront désignés par le Gouvernement suisse et deux membres par le Gouvernement italien.

Cette commission contrôlera l'exécution des travaux et présentera ses observations sous forme de rapport aux autorités compétentes suisses et italiennes.

Art. 17 Pendant la période d'exploitation, le contrôle sera exercé dans les conditions prévues aux actes de concession. Chaque Gouvernement donnera toutes facilités afin que les fonctionnaires de l'autre Etat chargés de ce contrôle ainsi que le personnel du concessionnaire puissent accomplir leur mission. Les noms des fonctionnaires seront réciproquement communiqués.

Art. 18 Si un litige vient à s'élever entre les deux Gouvernements au sujet de l'application ou de l'interprétation de la présente convention ou de l'une des concessions visées par cette convention, il sera soumis, au cas où il n'aurait pas été réglé dans un délai raisonnable par la voie diplomatique ou par d'autres voies amiables, à un tribunal arbitral dont la sentence sera obligatoire.

Ce tribunal arbitral sera composé de deux membres et d'un surarbitre.

Chacun des deux Gouvernements nommera un membre. Le surarbitre, qui ne devra pas être ressortissant de l'un des deux pays, sera désigné d'un commun accord entre les deux Gouvernements.

Si la désignation commune du surarbitre n'a pas lieu dans un délai de six mois à partir du moment où l'un des deux Gouvernements a proposé le règlement arbitral du litige, il sera procédé à cette désignation en appliquant par analogie l'article 45, 4e alinéa et suivants, de la convention de La Haye du 18 octobre 1907 pour le règlement pacifique des conflits internationaux.

36

Tout différend qui pourrait surgir entre les deux Gouvernements concernant l'interprétation et l'exécution de la sentence arbitrale sera soumis au jugement du tribunal qui a rendu la sentence.

Il est entendu que le présent article demeurera applicable à tout litige qui, de l'avis de l'un des deux Gouvernements, concernerait soit l'application ou l'interprétation de la convention ou de l'une des concessions visées par cette convention, soit l'interprétation ou l'exécution de la sentence arbitrale.

Art. 19 Les stipulations de la présente convention seront maintenues en temps de guerre.

Art. 20 La présente convention sera ratifiée et les instruments de ratification seront échangés à Rome. Elle entrera en vigueur le jour de l'échange des instruments de ratification.

En foi de quoi, les plénipotentiaires des deux Etats ont signé la présente convention et y ont apposé leurs sceaux.

l'ait à Berne le 27 mai 1957, en deux exemplaires originaux, en langues française et italienne, les deux textes faisant également foi.

Pour la Confédération suisse: (signé) Max Petitpierre

Pour la République italienne: (signé) Maurilio Coppini

37

Protocole additionnel à la

Convention entre la Confédération suisse et la République italienne au sujet de l'utilisation de la force hydraulique du Spöl

Pour assurer la bonne exécution des dispositions contenues aux articles 4 et 10 de la Convention, conclue en date de ce jour, entre la Confédération suisse et la République italienne au sujet de l'utilisation de la force hydraulique du Spöl, les Hautes Parties contractantes ont déclaré ce qui suit : Le Gouvernement italien accorde au bénéficiaire de la concession de l'usine à accumulation de Livigno l'autorisation d'utiliser en Suisse, pendant toute la durée de la concession, l'énergie électrique et la puissance revenant à l'Italie, conformément à l'article 10, 2e alinéa, de ladite convention.

En échange, le Gouvernement suisse accorde au bénéficiaire de la concession de la dérivation vers l'Adda (usine de Premadio) l'autorisation d'utiliser en Italie, pendant toute la durée de la concession, une partie correspondante de l'énergie électrique et de la puissance revenant à la Suisse, conformément à l'article 4, 2e alinéa, de ladite convention.

Dans le cadre de cet échange, les deux Etats renoncent à percevoir des taxes ou redevances d'importation ou d'exportation quelconques.

II Compte tenu de l'échange prévu au chiffre I et sous réserve d'un ajustement sur la base des ouvrages exécutés, il reste, dans l'usine de Premadio, un solde en faveur de la Suisse qui s'élève à 91,5 millions de kWh par année et à 45 750 kW. Le concessionnaire de cette usine aéra tenu de mettre cette quantité d'énergie et cette puissance à la disposition du concessionnaire de l'usine de Livigno moyennant paiement du prix de revient du kWh produit dans la centrale de Premadio.

Au cas où, dans un délai d'une année, compté à partir de l'entrée en vigueur de la concession suisse de la dérivation sur le bassin versant de l'Adda, le concessionnaire de l'usine de Livigno n'aurait pas fait usage du

38

droit de prendre tout ou partie de cette énergie et de cette puissance, le Gouvernement suisse accordera au concessionnaire de l'usine de Premadio, sur sa demande, une autorisation d'utiliser en Italie le solde indiqué cidessus.

L'autorisation susdite ne sera pas soumise par la Confédération suisse au paiement d'une somme supérieure à celle perçue en cas d'exportation d'énergie électrique.

Une première autorisation sera accordée, le cas échéant, pour une durée de vingt ans.

III Les dispositions du présent protocole additionnel ne concernent pas les impôts directs.

IV Les dispositions de la convention et du présent protocole additionnel ne pourront être interprêtées dans le sens : -- Que le Gouvernement suisse aura le droit de prélever des impôts, taxes et contributions de nature fiscale sur l'énergie électrique et la puissance revenant à la Suisse, produites et utilisées en Italie, exception faite des prestations qui seront fixées dans l'acte de concession; -- Que le Gouvernement italien aura le droit de prélever des impôts, taxes et contributions de nature fiscale sur l'énergie électrique et la puissance revenant à l'Italie, produites et utilisées en Suisse, exception faites des prestations qui seront fixées dans l'acte de concession.

Fait à Berne, le 27 mai 1957, en deux exemplaires originaux, en langues française et italienne, les deux testes faisant également foi.

Pour la Confédération suisse: (signé) Max Petitpierre

Pour la République italienne: (signé) Maurilio Coppini

39 ANNEXE 1

Aménagement des forces hydrauliques de l'Inn et de ses affluents

DESCRIPTION DES PROJETS (Voir aussi les figures 1 et 2) .

1. Introduction Le plan général d'aménagement actuel comprend trois groupes de projets ou d'usines, à savoir: a. Les projeta de la société anonyme des usines électriques de l'Engadine (EKW) pour l'aménagement cantonal de l'Inn et de ses affluents. Ces projets comprennent; -- l'usine de S-chanf, avec le bassin d'accumulation de Chamuera, -- l'usine de Pradella, avec le bassin d'accumulation de Praspöl (palier supérieur de l'Inn), -- l'usine de Martina (palier inférieur de l'Inn), --- l'usine de Tasna sur le versant gauche de la vallée, près d'Ardez ; b. Le projet des EKW pour l'aménagement international du Spöl (usine de Livigno) comprenant principalement le bassin d'accumulation de Livigno et la centrale de Punt dal Gall; c. Le projet du service de l'électricité de la ville de Milan (AEM) pour l'aménagement italien du Spöl, comprenant les installations nécessaires pour la dérivation des eaux de la région du Spöl supérieur («alto Spöl») vers le bassin versant de l'Adda, ainsi que pour l'accumulation et l'utilisation de ces eaux dans la vallée supérieure de l'Adda.

2. L'aménagement cantonal a. L'usine de S-chanf, avec le bassin d'accumulation de Chamuera, utilisera les eaux du torrent de Chamuera et de son affluent descendant du Val Burdun. Il est possible de créer une retenue en construisant dans le Val Chamuera, à 400 m environ en aval de l'embouchure du torrent de Lavirun, un barrage-voûte d'une hauteur de 120 m environ au-dessus du thalweg actuel. Le volume utile du bassin sera de 55 millions de m3, ce qui, en année moyenne, permettra d'accumuler tous les apports d'été. Le niveau maximum de la retenue sera à la cote 2093 (1). De la prise d'eau, (1) Toutes les cotes données dans ce texte, de même que toutes celles qui sont indiquées sur les figures sont rapportées au nouvel horizon suisse R. P.N. 373,60.

40

située légèrement en amont du barrage, une galerie sous pression dont les dimensions ont été calculées pour 11,5 ms/sec, conduira à la chambre d'équilibre. Cette dernière sera reliée à la centrale, située en plein air à l'est de S-chanf, par un puits sous pression. L'eau sera restituée à la cote 1690 directement dans la galerie à écoulement libre S-chanf-Praspol de l'usine de Pradella.

Les principales caractéristiques de cet aménagement, en particulier les données concernant la production d'énergie, figurent sous chiffre 6 ci-dessous.

b. L'usine de Pradella, avec le bassin d'accumulation de Praspol (palier supérieur de l'Inn), utilisera les eaux d'un bassin versant dont la superficie totale atteint 1171,6 km2 au total (après déduction de 104,8 km2 du fait des dérivations dans la région du Spöl supérieur). Les cours d'eau suivants seront captés: les torrents de Barlas-ch, de Puntota et de Vallember (Val Susauna) sur le versant gauche de la vallée de l'Inn, puis l'Inn lui-même près de S-chanf et les eaux restituées par la centrale de S-chanf; enfin, sur le versant droit de la vallée : l'Ova da Varusch, qui descend du Val Trupchun, le torrent de Tantermozza, le Spöl, puis les torrents de Sampuoir, de Plavna, les eaux descendant du Val S-charl et du Val Mingèr, ainsi que le torrent d'Uina. Aucune des prises d'eau sur le versant droit de la vallée de l'Inn ne se trouvera dans le parc national proprement dit. En revanche, l'une d'elles, celle du Val Mingèr, sera construite à l'intérieur de la réserve de S-charl. Eu égard au parc national, le projet ne prévoit pas de prise d'eau dans le Val Cluozza.

L'Inn sera captée à la cote 1652 au moyen d'un barrage érigé 500 m environ en aval du pont de pierre franchissant la rivière près de S-chanf.

Des essais sur modèle seront exécutés pour déterminer l'emplacement précis de ce barrage. Le débit maximum pouvant être dérivé sera de 32 ms/sec. Près de la prise d'eau, un petit bassin de compensation sera aménagé, d'où l'eau sera élevée jusqu'à la cote 1688 au moyen d'une installation de pompage, de manière que, réunie à celle restituée par la centrale de S-chanf et aux eaux captées en cours de route, elle puisse s'écouler par gravité jusqu'au bassin d'accumulation de Praspöl. La galerie à écoulement libre reliant S-chanf à ce dernier bassin aura une capacité de
44 ms/sec.

En ce qui concerne les quantités d'eau qui continueront de s'écouler dans l'Inn en aval de la prise d'eau de S-chanf, on peut dire ce qui suit: durant les mois d'été, un débit assez élevé, correspondant aux fractions de débit supérieures à celui qui peut être dérivé, s'écoulera par-dessus le barrage dans le lit de l'Inn. En hiver, où presque toute l'eau pourra être captée, un certain débit minimum, dont la valeur devra être encore fixée par les autorités compétentes, sera maintenu dans la rivière.

Dans l'étroite gorge du Spöl, 1400 m environ à l'aval de l'embouchure de l'Ova Spin (voir la figure 2), sera construit un barrage-voûte d'environ

41

100 m de hauteur et 160 m de longueur au couronnement. Ce barrage, dont seule la partie située à gauche du Spöl se trouvera dans le parc national, ne sera guère visible de la route de l'Ofen. Le niveau maximum du bassin d'accumulation ainsi créé -- bassin de Praspöl -- sera à la cote 1668 et le volume utile atteindra 28 millions de m3. Le bassin s'étendra jusqu'à 1,1 km en aval de la frontière italo-suisse ; au niveau maximum, il aura une superficie de 1,2 km2 dont 83 pour cent à l'intérieur du parc national.

Après l'aménagement des bassins d'accumulation de Livigno et de Chamuera, ou de l'un d'eux seulement, le bassin de Praspöl sera plein durant dix à onze mois de l'année. Avant cet aménagement, il sera vidé chaque année en hiver, de janvier à mars, puis rempli à nouveau en mai. Les deux passages sur le Spöl, dans la région qui serait inondée, seront conservés grâce à la construction de nouveaux ponts. Les installations pour le percement de la galerie amenant les eaux depuis S-chanf, de même que, comme il a déjà été dit, la partie du barrage située sur la rive gauche du Spöl se trouveront à l'intérieur du parc national, tandis que la partie droite du barrage, ainsi que l'entrée de la galerie sous pression en direction de Pradella seront à l'extérieur de ce parc. Les installations de chantier sont en majeure partie prévues en dehors du parc. Les matériaux provenant de l'excavation des culées du barrage et des tronçons adjacents des galeries seront déposés en partie dans la gorge du Spöl, à un endroit où ils seront constamment immergés dans le bassin de retenue, et en partie dans une dépression du terrain située en dehors du parc, sur la rive droite du Spöl, à environ 1 km en aval du barrage.

Les remarques ci-dessus concernant le débit réservé à l'aval de la prise d'eau de S-chanf s'appliquent également au débit devant être maintenu en été et en hiver dans le lit du Spöl en aval du barrage.

La galerie sous pression, dont le point de départ se trouvera un peu en amont du barrage, aura les dimensions voulues pour un débit de 70 ms/see.

Elle conduira les eaux recueillies dans le bassin de Praspöl et celles qui seront captées en cours de route jusqu'à la chambre d'équilibre. Une conduite forcée à l'air libre reliera cette chambre à la centrale, en plein air également, de Pradella, sise au sud du
village de Sent, sur le versant droit de la vallée de l'Inn. Après leur passage dans les turbines, les eaux seront restituées à la cote 11.43 dans le bassin de compensation de l'usine de Martina.

Les principales caractéristiques de l'aménagement de Pradella, en particulier les données concernant la production d'énergie figurent également sous chiffre 6 ci-dessous.

c. L'usine de, Martina (palier inférieur de l'Inn) utilisera les eaux provenant d'un bassin versant d'une superficie de 1673,8 km2 au total, compte tenu de la déduction de 104,8 km2 correspondant à la dérivation des eaux du Spöl supérieur vers le bassin de l'Adda. Seront captés : l'Inn, les

42

eaux restituées par l'usine de Pradella et, sur le versant droit de la vallée de Finn, les torrents du Val d'Uina et du Val d'Assa. L'Inn sera captée à la cote 1143 au moyen d'un barrage érigé à 700 m environ en aval du hameau de Pradella. 20 ms/sec au maximum seront dérivés. Les remarques faites plus haut au sujet de la prise d'eau de S-chanf concernant les débits déversés et la dotation de l'Inn s'appliquent également à la prise de Pradella.

Près de cette dernière sera aménagé un bassin, de compensation de 500 000m3 dans lequel s'écouleront également les eaux utilisées par la centrale de Pradella. Une galerie sous pression, capable d'un débit de 75 m3/sec, conduira à la chambre d'équilibre. Celle-ci sera reliée à la centrale souterraine de Martina, située vis-à-vis du village du même nom, par deux puits sous pression parallèles. L'eau sera restituée à l'Inn par une courte galerie de fuite à la cote 1030 environ, à proximité immédiate de la frontière autrichienne.

Les principales caractéristiques de cette usine, en particulier celles qui concernent la production d'énergie, figurent également sous chiure 6 ci-dessous.

d. L'usine au fil de l'eau de Tasna utilisera l'eau d'un bassin versant dont la superficie atteint au total 153,1 km2. Seront captés les cinq torrents affluents de la rive gauche de l'Inn dans la région comprise entre Susch et Ardez, du Val Susasca au Val Tasna. Une galerie à écoulement libre, dont les dimensions sont calculées pour un débit de 7,5 m3/sec, recueillera les eaux des torrents captés à la cote moyenne de 1745 m et les conduira au-dessus d'Ardez dans une chambre d'équilibre aménagée en bassin de compensation artificiel. Une conduite forcée à l'air libre reliera cette chambre à la centrale en plein air près de l'embouchure du Tasnàn dans l'Inn. L'eau sera restituée à la cote 1236 environ dans l'Inn ou dans le Tasnan. Pour que les eaux de ces torrents continuent de s'écouler dans l'Inn dans la région des sources thérapeutiques de Tarasp, on a renoncé à les utiliser plus rationnellement en les dérivant vers la galerie d'amenée de l'usine de Pradella.

Les principales caractéristiques de cette usine, en particulier celles qui concernent la production d'énergie, figurent sous chiffre 6 ci-dessous.

3. L'aménagement international: usine de Livigno Un barrage sera construit
sur le Spöl en amont du parc national, à 60 m environ en aval du confluent de cette rivière et de l'Acqua del Gallo, au lieu dit Punt dal Gali. Eu égard au parc national, on a renoncé à capter les affluents du Spöl traversant ce parc et à les dériver vers le bassin d'accumulation de Livigno, comme cela était prévu pour l'Ova dal Fuorn dans les projets antérieurs. Le bassin de réception naturel du Spöl, à l'endroit où sera érigé le barrage, a une superficie de 295 km2, dont 247 sur terri-

43

toire italien et 48 sur territoire suisse. De ce bassin versant, il faut toutefois soustraire 104,8 km a pour tenir compte de la dérivation d'eau du bassin supérieur du Spöl vers l'Italie, conformément à la convention italo-suisse concernant l'utilisation des forces hydrauliques du Spöl. Il restera donc, en définitive, une superficie de 190,2 km2 à la disposition de la centrale de Punt dal Gali.

Le barrage, appelé barrage de Livigno, sera du type voûte; il aura une hauteur de 124 m au-dessus du thalweg et une longueur de 490 m environ au couronnement. Sa partie gauche sera sur territoire italien, tandis que la partie droite se trouvera sur Suisse, mais en dehors du parc national.

Le bassin d'accumulation qui sera ainsi créé aura un volume utile de 180 millions de m3, le niveau maximum de retenue étant fixé à 1808 m d'altitude. H se divisera près du barrage en deux bras, dont l'un s'étendra, à lac plein, sur une distance de 10 km dans la vallée de Livigno et atteindra le village du même nom. L'autre bras s'étendra sur 4,5 km dans le Val del Gallo. Le bassin se trouvera en grande partie sur territoire italien.

De la prise d'eau, situé directement en amont du barrage, l'eau sera conduite par un puits sous pression très court à la centrale souterraine de Punt dal Gali construite dans le flanc droit de la vallée. De là, l'eau s'écoulera dans le bassin d'accumulation de Praspöl par une galerie de fuite dont le débouché se trouvera dans le parc national. Cependant, comme le radier de la galerie est, à cet endroit, à 8 m au-dessous de la cote maximum de retenue, l'orifice sera invisible pendant ri i T à onze mois par an. Des pompes seront également installées dans la centrale, car les apports du bassin de réception restant (190,2 kma) ne parviendront pas à remplir, pendant l'été, le bassin d'accumulation de Livigno. L'eau faisant défaut (environ 40 millions de m3 en année moyenne) devra donc être prélevée dans le bassin de Praspol et refoulée dans celui de Livigno. L'eau sera conduite aux pompes par l'intermédiaire de la galerie de fuite.

Pour augmenter le débit restant dans le lit du Spöl, une certaine quantité d'eau sera lâchée au pied du barrage. Le dispositif nécessaire à cet effet sera aménagé dans la centrale. Les chantiers seront installés en dehors du parc national. Les matériaux provenant de
l'excavation des fondations du barrage, de la centrale souterraine et de la galerie de fuite seront déchargés en amont du barrage -- donc également en dehors du parc -- et au-dessous de la limite d'abaissement du bassin. Le matériel nécessaire pour l'installation des chantiers de même que le ciment pour la construction du barrage seront transportés à travers le territoire italien, soit par le Val del Gallo, soit par la vallée de Livigno. La liaison actuelle entre la route du col de l'Ofen et la vallée de Livigno doit être maintenue. Le chemin passera probablement par-dessus le barrage et sera raccordé de manière appropriée aux tronçons conservés.

44

Les caractéristiques principales, en particulier les données concernant la production d'énergie, figurent sous chiffre 6 ci-dessous. Il faut noter ici que l'Italie a droit à une part de la force hydraulique mise en valeur dans cette usine. La convention italo-suisse prévoit que sur une production totale d'énergie de 47 millions de kWh, 36,5 millions reviennent à l'Italie, sous une puissance maximum de 18 250 kW correspondant à une durée annuelle minimum d'utilisation de 2000 heures.

4. L'aménagement italien Les trois quarts des 1000 millions de kWh produits au total par le service de l'électricité de la ville de Milan (AEM) en 1955, provenaient de ses six usines de la Valteline. Ces dernières peuvent être comparées avec le groupe des usines de l'Oherhasli ou avec celui de la Maggia. Grâce à deux bassins d'accumulation situés à haute altitude dans la vallée de Fraele, le bassin de San Giacomo, avec un volume utile de 64 millions de m3, et celui de Cancano, avec 24 millions de ms, il était déjà possible d'égaliser dans une certaine mesure la production d'énergie malgré le régime très irrégulier qui caractérise les cours d'eau alpins.

Comme les besoins en énergie de la région approvisionnée par l'Azienda elettrica municipale di Milano croissent fortement et sans interruption, ce service a mis au point un plan complémentaire d'utilisation des forces hydrauliques de la Haute-Valteline. La production annuelle totale atteindra 1500 millions de kWh, donc le double de la production actuelle. L'élément essentiel de ce plan d'aménagement est constitué par l'agrandissement du volume utile du bassin d'accumulation de Cancano de 24 à 240 millions de m3. Il est en effet possible de construire un nouveau barrage, très haut, dénommé Cancano II. L'ancien barrage sera appelé -- comme à la GrandeDixence -- à être noyé dans le futur bassin d'accumulation. Celui-ci sera rempli en captant les cours d'eau de la Haute-Valteline non encore utilisés et, vu que les apports de ces derniers ne suffiraient pas, en dérivant des eaux depuis la région du Spöl supérieur ·-- au maximum 97 millions de m* en année moyenne -- comme le prévoit la convention italo-suisse. L'eau accumulée dans les bassins de San Giacomo et de Cancano II sera utilisée dans une série d'usines disposées en cascade. Une partie de celles-ci existent déjà et
pourront utiliser les nouveaux apports sans subir de modifications; d'autres devront être agrandies; d'autres encore devront être construites.

L'ensemble de ces centrales, utilisant une chute totale de 1500 m environ, produira donc 1500 millions de kWh, en majeure partie de l'énergie d'hiver de haute valeur.

Une première partie de l'aménagement italien est déjà terminée; elle comprend les ouvrages suivants: a. Construction des nouvelles adductions au bassin d'accumulation de Cancano II depuis le bassin versant de l'Adda;

45

6. Première étape du barrage de Cancano IL, ce qui a permis de porter le volume utile de la retenue de 24 à 112 millions de m8; c. Première étape de l'aménagement de la nouvelle centrale de Premadio (puissance installée: 150 000 kW, chute brute: 670 m).

Il s'agit donc là de travaux qui étaient nécessaires pour le captage, l'adduction, l'accumulation et l'utilisation des eaux encore disponibles dans le bassin versant de l'Adda.

La seconde phase de l'aménagement général prévu comprendra les travaux suivants: a. Captage et dérivation vers les bassins d'accumulation de San Giacomo et Cancano II des eaux du bassin supérieur du Spöl. Les prises d'eau et galeries de dérivation se trouveront toutes sur territoire italien, à une distance de 10 à 20 km de la frontière suisse à Punt dal Gali; b. Dernière étape du barrage de Cancano II (nouvelle surélévation de 40 m). Le volume utile du lac atteindra alors la valeur définitive de 240 millions de ms; c. Aménagement définitif de la nouvelle centrale de Premadio, sa puissance installée étant portée à 375 000 kW.

Il s'agira donc avant tout, dans cette deuxième phase, de travaux rendus possibles par le captage, la dérivation, l'accumulation et l'utilisation des eaux du bassin supérieur du Spöl.

La troisième et dernière phase de l'aménagement général comprendra les travaux nécessaires pour l'utilisation, dans les paliers inférieurs, des volumes d'eau supplémentaires.

Une fois la deuxième étape réalisée, la production totale de l'usine de Premadio atteindra 540 millions de kWh en année moyenne. Une partie de cette énergie, correspondant à la force hydraulique qui pourrait être mise en valeur sur les secteurs suisses du Spöl et de l'Inn avec l'eau dérivée du bassin supérieur du Spöl vers le bassin versant de l'Adda, reviendra à notre pays.

Dans la convention italo-suisse, cette part suisse a été fixée à 128 millions de kWh, sous une puissance maximum de 64 000 kW, correspondant à une durée minimum d'utilisation de 2000 heures par an.

5. Solution d'entente d'Ova Spin (voir la figure 2) La solution d'entente prévoit que, dans la vallée du Spöl, l'utilisation des forces hydrauliques de cette rivière aura lieu non pas au moyen du bassin d'accumulation de Praspöl, d'un volume utile de 28 millions de m3 (solution de Praspöl), comme dans le projet d'aménagement décrit plus haut, mais au moyen d'un bassin de 6,5 millions de m3 seulement, dit bassin d'Ova Spin

46

(solution d'entente Ova Spin), Si cette solution est adoptée, l'influence de l'aménagement sur le parc national, le long de la vallée du Spöl, sera fortement réduite.

Le barrage, appelé barrage d'Ova Spin, est prévu au même endroit que dans la solution Praspöl. Il sera du type voûte ; sa hauteur atteindra environ 60 m et sa longueur au couronnement environ 100 m. Il ne sera pas visible depuis la route de l'Ofen. Le bassin de compensation d'Ova Spin ainsi créé aura donc un volume utile de 6,5 millions de m3, son niveau maximum de retenue étant fixé à la cote 1630 (38 m plus bas que dans la solution Praspöl) et sa limite d'abaissement à la cote 1600. Au niveau maximum, il aura une longueur de 4 km environ et 0,35 kma de superficie, dont 72 pour cent environ sur le territoire du parc national (superficie du bassin de Praspök environ 1,2 km2). Le bassin d'Ova Spin aura les fonctions d'un bassin de compensation; sa superficie étant beaucoup plus petite que celle du bassin d'accumulation de Praspöl, les variations journalières de son niveau seront un peu plus accentuées.

Du fait que le niveau maximum du bassin d'Ova Spin sera plus bas que celui du bassin de Praspöl, la station de pompage de S-chanf du palier supérieur de l'Inn ne sera plus nécessaire. L'eau captée dans l'Inn à la cote 1652 pourra s'écouler librement par un canal à flanc de coteau de 1,4 km puis par une galerie à écoulement libre de 12,8 km de longueur jusqu'au bassin d'Ova Spin (cote 1630), A l'exception d'un premier tronçon très court, la galerie sous pression Ova Spin-Pradella aura pratiquement le même tracé que dans la solution Praspöl. Comme le niveau maximum du bassin d'Ova Spin sera inférieur à celui du bassin de Praspöl, les torrents dont les eaux seront recueillies entre S-chanf et Pradella pourront être captés plus bas, de sorte que la superficie du bassin versant de l'usine de Pradella sera augmentée de 13,5 km2.

H est évident que si la solution d'entente se réalise, il sera également nécessaire de pomper de l'eau en provenance de l'Engadine pour remplir le bassin d'accumulation de Livigno. C'est la raison pour laquelle la centrale de l'aménagement international, y compris l'installation de pompage, sera construite non pas au pied du barrage de Livigno, mais dans la région de celui d'Ova Spin. Cela rendra nécessaire le
percement d'une galerie en charge de 7 km environ de longueur, ainsi que d'un puits sous pression pour relier le bassin de Livigno à cette centrale d'Ova Spin. La prise d'eau se trouvera sur territoire italien, tandis que la fenêtre pour la construction de la galerie (depuis Ova Spin) et de la chambre d'équilibre sera au bord du parc national, mais encore à l'intérieur de celui-ci. La centrale souterraine d'Ova Spin, prévue dans le flanc droit de la vallée, de même que la route et la galerie par lesquelles on y accédera, se trouveront à l'extérieur du parc. Les installations de chantier pourront être prévues en majeure partie également en dehors de ce dernier. En ce qui concerne les dépôts de matériaux, les indications

47

données sous chiffre 2b sont aussi valables pour la solution d'entente. Les dépôts visibles seront recouverts d'humus et de végétation.

Le secteur du Spöl sur lequel les débits seront influencés par l'aménagement prévu --- secteur compris entre le barrage de Livigno et le bassin situé à l'aval -- sera plus long dans la solution d'entente que dans la solution de Praspöl. Si la solution d'entente est réalisée, un certain débit réservé sera également maintenu dans le lit du Spöl depuis le pied du barrage de Livigno.

A l'aval de celui-ci, ce débit sera augmenté par les apports des torrents du Val de l'Acqua et du Val de la Foglia.

La production annuelle totale d'énergie de l'aménagement cantonal et de l'aménagement international sera pratiquement la même que dans la solution Praspöl. Cependant, vu que le volume d'eau total pouvant être accumulé sera un peu plus petit, la part d'énergie d'hiver, de plus grande valeur, sera un peu plus faible. Le volume total accumulé atteindra 263 millions de m3 dans la solution Praspöl (55 [Chamuera] +180 [Livigno] + 28 [Praspöl]) et 241,5 millions de m3 dans la solution d'entente (55 + 180 + 6,5 [Ova Spin]).

6. Tableau des principales caractéristiques dos aménagements cantonal et international Les chiffres contenus dans ce tableau se rapportent à l'aménagement intégral des usines prévues ; ils ont été déterminés compte tenu de la dérivation de 97 millions de m3 d'eau du bassin supérieur du Spöl vers celui de l'Adda.

a. Aménagement avec le bassin d'accumulation de Praspöl Volume accumulé en millions de m3: 55 (Chamuera) + 28 (Praspöl) + 180 (Livigno) = 263 millions de m3 Centrales

S-chanf

Débit équipé . . .m3/sec 11,5 Chute brute max. . . .m 403

Predella

Maitina

70 525

75 113

Tassa

7,5 495

280

60

28

Punt d.Galli

Total

33 140

Puissance installée 1000 kW 35

(18)

(moteurs des pompes)

35

438

(22)

(40)

Production d'énergie (1) millions de kWh été année

49 0 49

468

115

28

47

707

514 982

173

90

-- 17

760

288

118

30

1467

48 6. Aménagement avec le bassin de compensation d'Ova Spin (solution d'entente) Volume accumulé en millions de m s : 55 (Chamuera) + 6,5 (Ova Spin) + 180 (Livigno) = 241,5 millions de m3 Centrales

S-chanf

Pradella

Martinaa

Débit équipé . . . m 11,5 Chute brute max.. . . m 442

66 487

70 113

7,5 495

33 178

Puissance installée 1000 kW génératrices (moteurs des pompes)

240 (--)

56

28

43 (28)

404 (28)

433 560 993

105 161 266

28 90 118

60 --25 35(a)

682 786 1468

3/sec

37

Taana

Ova Spin

Total

Production d'énergie (*) millions de kWh Tiivf"* · · · · . , . . 56 0 été ... . . . .

année . . . . . . . . 56

(1) En année moyenne; énergie de pompage déduite. Pour le calcul des chiffres indiqués, certaines hypothèses ont dû être faites au sujet des débits devant être maintenus dans le lit de l'Inn et celui du Spöl immédiatement en aval des prises d'eau ou des barrages.

Comme les valeurs définitives de ces débits réservés devront encore être fixées d'entente avec les autorités, les chiffres se rapportant à la production d'énergie seront éventuellement encore légèrement modifiés.

(a) Y compris la production d'une petite centrale utilisant, au pied du barrage de Livigno, le débit devant être maintenu dans lo lit du Spöl.

La production annuelle totale d'énergie correspond dans le cas a comme dans le cas b à environ 10 pour cent de la capacité actuelle de production de l'ensemble des usines hydroélectriques suisses.

Utilisation des forces hydrauliques de l'Inn et de ses affluents

Figure 1

AMÉNAGEMENTS CANTONAL, INTERNATION AL ET ITALIEN Situation générale

Bassins d'accumulation:

Feuille fédérale. 109« année. Vol. II.

4

50

Détail concernant S i t u a t i o ns

UTILISATION AVEC BASSIN D'ACCUMULATION DE PRASPÖL

5l

la région du Spöl

Figure 2

Leg ende:

UTILISATION AVEC BASSIN DE COMPENSATION D'OVA SPIN

52

AMTEXE 2 Usines électriques de l'Engadine S.A.

Traduction du texte original attemand Baie, le 8 mai 1957.

Au Conseil fédéral suisse BERNE Utilisation de l'Inn et de ses affluents Palier international -- projet d'avril 1957 Monsieur le Président de la Confédération, Messieurs les Conseillers fédéraux, L'utilisation des eaux du Spöl, telle que nous l'avons prévue dans le cadre de notre plan général de juillet/décembre 1955 pour l'aménagement de la force hydraulique de l'Inn et de ses affluents, a donné lieu, comme on sait, à de vives discussions dans les milieux qui, pour des motifs tenant aux domaines des sciences naturelles et de la protection de la nature, soutiennent la thèse de l'inviolabilité du parc national.

Notre société est toujours persuadée que, compte tenu de la situation juridique actuelle et de la législation existante, rien ne s'oppose à l'octroi des concessions nécessaires pour mettre en valeur les eaux de l'Engadine, conformément au projet susindiqué. Elle a néanmoins accueilli favorablement la décision du Conseil fédéral d'ouvrir des pourparlers en vue d'amener une entente entre les milieux intéressés au parc national et à l'utilisation des forces hydrauliques. Dans ce sens, notre société est disposée à fournir la contribution notable que voici: A la condition -- que la convention italo-suisse au sujet de l'utilisation de la force hydraulique du Spol, convention dont le texte a été paraphé le 23 octobre 1956, ce qui permettrait de créer le bassin d'accumulation de Livigno d'une capacité utile de 180 millions de m3, et --- qu'au reste, sur le terrain du droit, la voie soit libre pour mettre en valeur les eaux du Spöl, les usines électriques de l'Engadine S.A, prennent l'engagement: a. De modifier leur projet de juillet 1955 pour l'aménagement cantonal du palier supérieur de l'Inn dans le sens qu'un bassin de compensation dit d'Ova Spin, de 6)4 millions de m 3 à la cote 1630 m

53

au-dessus de la mer, sera exécuté en lieu et place du bassin d'accumulation de Praspöl dont la capacité utile serait de 28 millions de m3 à la cote 1668 m au-dessus de la mer, et b. De substituer au projet de décembre 1955 pour l'aménagement international du Spöl, projet prévoyant d'établir la centrale à Punt dal Gall et pour lequel une demande de concession a déjà été présentée au Conseil fédéral, le projet d'avril 1957 qui propose d'implanter la centrale à Ova Spin, conformément aux données techniques contenues dans le dossier ci-annexé.

Nous vous prions, Monsieur le Président de la Confédération, Messieurs les Conseillers fédéraux, d'agréer l'assurance de notre considération la plus distinguée.

Usines électriques de l'Engadine S.A.: (signé) E. Blank B. Jobin Annexe : 1 dossier: Palier international.

Projet d'avril 1957.

54

ANNEXE 3 Commune de Zernez

Traduction du texte original allemand

Zernez, le 24 janvier 1957.

Monsieur A.J. Schlatterd président de la commission fédérale du parc national suisse,

PULLY (Vaud)

Parc national / forces hydrauliques Monsieur le Président, Nous avons le plaisir de vous faire savoir que l'assemblée communale de Zernez, qui s'est tenue le 23 janvier 1957 avec une forte participation, a pris à une majorité écrasante et sans avis contraire, la décision suivante: «L'assemblée communale de Zernez, voulant faire preuve de sa bonne volonté, est prête à mettre à la disposition de la Confédération, pour les buts du parc national, des parcelles communales nouvelles situées dans la région de l'Ofenberg, à condition cependant qu'il ne soit pas fait opposition à l'utilisation prévue des eaux de l'Inn et du Spöl en liaison avec le bassin d'accumulation de Livigno, A cette même condition, elle est d'accord pour que l'utilisation qui comprend l'accumulation de Praspöl soit remplacée par celle qui prévoit la création du bassin de compensation d'Ova Spin.» Veuillez agréer, Monsieur le Président, l'assurance de notre considération distinguée.

Commune de Zernez: Le président, Dr Tramer Le secrétaire, P. Calnder

55

ANNEXE 4 Commune de S-chant

Traduction du texte original allemand S-chanf, le 24 janvier 1957.

A la commission fédérale du parc national suisse BERNE

Monsieur le Président, Messieurs, L'assemblée communale s'est occupée hier de votre demande du 20 décembre écoulé et a pris, conformément à la proposition du Conseil communal, la décision suivante: La commune de S-chanf est prête à mettre à la disposition de la Confédération, pour les buts du parc national, des parcelles communales nouvelles (sur le versant gauche du Val Trupchun, y compris l'alpe Purcher), sous réserve d'une entente sur les conditions et en tant qu'il ne soit pas fait opposition à l'utilisation préyue des eaux de l'Inn et du Spöl en liaison avec le bassin d'accumulation de Livigno.

La commune est d'accord, à la même condition, pour que l'utilisation qui comprend le bassin d'accumulation de Praspöl soit remplacée par celle qui prévoit la création du bassin de compensation d'Ova Spin.

Avec parfaite considération: R, Bott Stoffel

56 ANNEXE 5 Commune de Scuol

Traduction du texte original allemand Scuol/Schuls, le 22 juin 1957.

Au service fédéral des eaux BERNE

Nous vous faisons savoir par la présente que l'assemblée communale de Scuol/Schuls a pris le 21 juin 1957 la décision suivante par 183 voix contre 52 et 5 abstentions: 1° Est accordée aux Usines électriques de l'Engadine S.A., Zernez, la concession pour l'utilisation de l'Inn et de ses affluents (aménagement cantonal), conformément au projet de juillet 1955 concernant les paliers supérieur et inférieur de l'Inn.

2° La commune, voulant faire preuve de sa bonne volonté, est d'accord pour que le bassin de compensation d'Ova Spin soit substitué au bassin d'accumulation de Praspöl, pourvu qu'il ne soit pas fait opposition à l'utilisation de l'Inn et du Spöl en liaison avec le bassin d'accumulation de Livigno.

3° II est déclaré à l'intention de la commission fédérale du parc national que la commune est en principe d'accord de continuer à mettre à disposition la réserve du Val S-charl pour pouvoir servir aux buts du parc, à condition: a. Qu'il ne soit pas fait opposition à l'utilisation prévue de l'Inn et du Spöl avec bassin d'accumulation de Livigno; b. Que le contrat de bail soit modifié, compte tenu du changement de la situation.

Le président de la commune: A. Fried Le secrétaire: 3. Klaas

57 ANNEXE 6 Commane bourgeoise de Scuol

Tradition du texte original allemand Scuol/Schuls, le 22 juin 1957.

Au service fédéral des eaux BERNE

Nous vous faisons savoir par la présente que l'assemblée de la bourgeoisie de Scuol/Schuls a pris le 21/22 juin 1957 la décision suivante par 63 voix contre 6.

1° La commune donne son assentiment à la concession octroyée aux Usines électriques de l'Engadine S.A., Zernez, pour l'utilisation de l'Inn et de ses affluents (aménagement cantonal), conformément au projet de juillet 1955 concernant les paliers supérieur et inférieur de l'Inn.

2° II est déclaré à l'intention de la commission fédérale du parc national que la commune est en principe d'accord de continuer à mettre à disposition la réserve du Val S-charl pour pouvoir servir aux buts du parc, à condition: a. Qu'il ne soit pas fait opposition à l'utilisation prévue de l'Inn du et Spöl avec bassin d'accumulation de Livigno; b. Que le contrat de bail soit modifié, compte tenu du changement de la situation.

Le président:

A. Tau Le secrétaire: Hartmann

58 te Petit conseil du canton des Grisous

Séance du 8 juin 1957 Communication du 13 juin 1957

AIWEXE 7

Traduction du texte original allemand

Au Conseil fédéral suisse

BERNE

Usine du Spöl et parc national Monsieur le Président de la Confédération, Messieurs les Conseillers fédéraux, Le Petit conseil s'est occupé de la question de l'utilisation du Spöl et d'une éventuelle extension du parc. Il a l'honneur de vous communiquer à ce propos: I. Le Petit conseil accepte que les eaux de l'Inn et du Spöl soient utilisées dans le palier supérieur de l'Inn non plus d'après le projet de juillet 1955, avec bassin d'accumulation à Praspöl (retenue à la coté 1668 m; contenance 28 hm3), mais dans l'intérêt du parc national, d'après le projet de mars 1957, avec bassin de compensation à Ova Spin (retenue à la cote 1630 m; contenance 6,5 hm3), pourvu que la commune de Zernez y consente, et sous la réserve expresse que la réalisation du palier international du Spol, avec bassin d'accumulation de Livigno et centrale d'Ova Spin, soit assurée à tous égards.

II. Le Petit conseil est, en principe, prêt à seconder les efforts visant à une extension du parc national, à interdire la pêche dans la mesure exigée par cette extension et à proposer au Grand conseil de décréter une interdiction de chasser, mais seulement à condition: 1° Que l'utilisation rationnelle de l'Inn et du Spöl avec bassin d'accumulation de Livigno soit assurée;

59

2° Que les communes sur lesquelles empiète le parc touchent des indemnités équitables et périodiquement révisables; 3° Que la totalité du dommage causé par le gibier dans le voisinage du parc, y compris l'arrondissement de la vallée de Müstair et le domaine de l'Ofenberg, soit couverte en application d'un arrangement satisfaisant, l'indemnité s'étendant aux mesures de défense; 4° Qu'il ne soit pas fait d'opposition à la suppression du district franc fédéral de Selva-Carolina-Val Torta.

En outre, pour le cas où le système de chasse devrait changer, une compensation équitable doit être réservée pour la perte des droits d'affermage subis par le canton et les communes par le fait de l'existence du parc.

Pour faire mieux comprendre certains détails, nous nous permettons les explications suivantes: Bien que plein de compréhension pour l'idée du parc, le Petit conseil n'accepte pas d'un coeur léger que le parc subisse une extension, qui dépend de la seule bonne volonté des communes. Le parc paraît déjà aujourd'hui suffisamment étendu. Vu l'accroissement constant de la population de la Suisse, l'idée de réserver de façon pratiquement irrévocable aux buts du parc d'autres alpages, pâturages, forêts, fait naître des inquiétudes pour l'avenir, même si, pour le moment, l'Engadine ne manque pas d'alpages.

Il est permis d'espérer que le dépeuplement des contrées de montagne ne se poursuivra pas indéfiniment. Pour cette raison ou pour une autre, les alpages et les forêts seront toujours plus recherchés.

Il y a aussi la question des dégâts causés par le gibier. Les cerfs se sont tellement multipliés dans le parc qu'ils sont devenus une plaie pour l'agriculture des régions environnantes et que beaucoup périssaient. H a fallu remédier à cet état de choses par des abattages extraordinaires. Comme les cerfs, faute de nourriture, quittent le parc en hiver pour chercher leur subsistance aux environs, les dégâts qu'ils causent aux forêts et aux cultures sont considérables dans l'Engadine et dans l'arrondissement de la vallée de Müstair, L'indemnité payée à ce titre par la Confédération et la ligue suisse pour la protection de la nature est aujourd'hui tout à fait insuffisante.

La nouvelle diminution du territoire réservé à la chasse dans l'Engadine centrale devra être compensée par la suppression du district franc
fédéral de Selva-Carolina-Val Torta, qui avance en dehors du parc. Cette suppression est inévitable de toute façon si l'on veut remédier au nombre excessif des cerfs. H y a, du reste, aux Grisons un plus grand nombre de districts francs fédéraux que la loi ne le prescrit.

60

La contribution du canton et des communes au parc est assez grande, du fait qu'on renonce à utiliser des affluents du Spöl qui, sans l'existence du parc, seraient également mis en valeur. Le canton doit donc insister pour être entièrement indemnisé à tous les autres égards.

Veuillez agréer, Monsieur le Président de la Confédération et Messieurs les Conseillers fédéraux, l'assurance de notre haute considération.

lies?

Au nom du Petit conseil: Le président, en r. Lardelli Le directeur de la chancellerie, Seiler

Schweizerisches Bundesarchiv, Digitale Amtsdruckschriften Archives fédérales suisses, Publications officielles numérisées Archivio federale svizzero, Pubblicazioni ufficiali digitali

MESSAGE du Conseil fédéral à l'Assemblée fédérale concernant l'approbation d'une convention entre la Confédération suisse et la République italienne au sujet de l'utilisation de la force hydraulique du Spöl (Du 28 juin 1957)

In

Bundesblatt

Dans

Feuille fédérale

In

Foglio federale

Jahr

1957

Année Anno Band

2

Volume Volume Heft

27

Cahier Numero Geschäftsnummer

7438

Numéro d'affaire Numero dell'oggetto Datum

04.07.1957

Date Data Seite

1-60

Page Pagina Ref. No

10 094 696

Das Dokument wurde durch das Schweizerische Bundesarchiv digitalisiert.

Le document a été digitalisé par les. Archives Fédérales Suisses.

Il documento è stato digitalizzato dell'Archivio federale svizzero.