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Message concernant l'initiative populaire «pour le développement des chemins et sentiers» Du 16 février 1977

Messieurs les Présidents, Mesdames et Messieurs, Nous avons l'honneur de vous proposer, par le présent message, de soumettre au peuple et aux cantons, sans contre-projet, en leur recommandant de la rejeter, l'initiative populaire «pour le développement des chemins et sentiers».

Nous y joignons un projet d'arrêté fédéral y relatif.

En outre, nous vous proposons de classer le postulat suivant : 1973 P 11517 Tourisme pédestre (N 20. 6. 73, Keller) Nous vous prions d'agréer, Messieurs les Présidents, Mesdames et Messieurs, les assurances de notre haute considération.

Berne, le 16 février 1977 Au nom du Conseil fédéral suisse: Le président de la Confédération, Furgler Le chancelier de la Confédération, Huber

1977 -- 82

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Vue d'ensemble Pour l'essentiel, l'initiative populaire «pour le développement des chemins et sentiers», déposée le 21 février 1974, demande de créer au. niveau constitutionnel et à l'échelon de la loi, une base juridique permettant l'établissement d'un réseau national de chemins pédestres.

Le développement des chemins et sentiers pour piétons incombe en premier lieu aux cantons et aux communes. Dans l'intérêt d'une nette répartition des tâches entre la Confédération et les cantons, il n'est pas justifié de créer une nouvelle compétence fédérale, qui entraînerait de surcroît des dépenses considérables. A l'heure actuelle, des travaux importants sont exécutés aux fins de délimiter clairement les compétences respectives de la Confédération et des cantons, travaux qui vont à ['encontre du but visé par l'initiative. Ce conflit d'objectifs ne saurait être supprimé par une contreproposition; aussi faut-il soumettre l'initiative au vote du peuple et des cantons, sans contre-projet, en leur recommandant de la rejeter.

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Message I

L'initiative

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Genèse

Le 21 février 1974, le Groupe de travail pour le développement des chemins et sentiers, Zurich, a déposé, sous forme d'un projet rédigé de toutes pièces, le texte d'une initiative populaire «pour le développement des chemins et sentiers». Par décision du 13 mars 1974 (FF 19741799), la Chancellerie fédérale a constaté que l'initiative avait abouti, 123 749 signatures valables ayant été recueillies.

Le texte allemand fait foi. L'initiative est assortie d'une clause de retrait.

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Texte

L'initiative a la teneur suivante : 1 La Confédération assurera par voie législative l'aménagement, la construction et l'entretien d'un réseau pédestre national ainsi que la coordination, la construction et l'entretien des réseaux régionaux de chemins et sentiers dans toute la Suisse.

a Elle encourage la construction et le développement des réseaux locaux de chemins pour piétons, 3 Les chemins destinés aux piétons doivent être à l'écart des routes destinées au trafic motorisé.

Dans notre rapport du 19 novembre 1975 (FF 7975 II 2073), nous vous avions proposé, en application de l'article 29, 3e alinéa, de la loi sur les rapports entre les conseils du 23 mars 1962 (RS 171.11), de prolonger d'une année, à savoir jusqu'au 20 février 1977, le délai expirant le 20 février 1976, qui nous est imparti pour élaborer un message et vous soumettre une proposition. Par vos arrêtés du 16 décembre 1975 (Conseil des Etats) et du 17 décembre 1975 (Conseil national), vous avez donné suite à notre proposition.

Cette demande de prolongation était motivée par la similitude qui existe, en certains points, entre les exigences des auteurs de l'initiative et celles des défenseurs de l'aménagement dû territoire. Lors des débats parlementaires sur la loi sur l'aménagement du territoire, l'article 17 du projet fut complété en ce sens que les plans directeurs des transports devaient aussi contenir des indications sur le réseau de tourisme pédestre (cf. BO 1973, p. 105 s.).

En vertu de l'article 8 de la loi sur l'aménagement du territoire, l'inclusion des réseaux de chemins et sentiers d'importance régionale dans les plans directeurs des transports avait pour but de garantir le maintien de cette classification, Etant donné que la votation populaire relative à la loi sur l'aménagement du territoire avait été fixée au 13 juin 1976, nous avions demandé la prolongation

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du délai car nous estimions que le résultat de ce scrutin aurait une influence déterminante sur la rédaction de notre rapport ainsi que sur son traitement par vos conseils. Bien que la loi sur l'aménagement du territoire ait été rejetée lors de cette votation, notre mandat constitutionnel n'en est pas éteint pour autant. Les travaux relatifs à l'élaboration d'une nouvelle loi sont en cours. A l'heure actuelle, aucune précision ne peut encore être donnée à leur sujet.

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Généralités

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Situation initiale

Les années 1930 avaient déjà fait apparaître les nombreux dangers d'une circulation routière de plus en plus marquée par les innovations techniques.

L'intensité croissante du trafic motorisé a contraint l'homme à abandonner la route, non seulement dans les agglomérations, mais aussi en dehors des localités; il ne se sentait même plus en sécurité sur les chemins vicinaux et forestiers, autrefois tranquilles. C'est pourquoi des associations dont les membres se recrutaient parmi les promeneurs se sont constituées un peu partout en Suisse, pour procéder tout d'abord au balisage des chemins et des sentiers pédestres, puis pour s'occuper du tourisme pédestre en général. En décembre 1934, ces groupements isolés se sont rencontrés pour un premier échange de vues, qui aboutit à la constitution de l'Association suisse de tourisme pédestre (ASTP). Le but de ce mouvement était «de sortir les hommes de la trépidation du travail et de la circulation, des murs de pierre et de l'asphalte des villes, pour les amener à se reposer et se détendre dans la nature».

Ensuite, l'ASTP se développa très rapidement et put se présenter au grand public en 1939 déjà, lors de l'exposition nationale. Les randonnées organisées par elle ou ses sections eurent un écho très favorable. L'activité de l'ASTP subit malheureusement d'importantes restrictions à la suite de l'occupation de nos frontières entre 1939 et 1945, puisque les balisages en particulier durent être supprimés. Pour compenser cette accalmie dans ses activités extérieures, elle s'occupa activement de préparer l'avenir et d'établir des cartes de tourisme pédestre.

Grâce à ces travaux préparatoires, il fut possible de disposer, dès 1947, d'un réseau de chemins et sentiers de 1800 km (aujourd'hui, il y en a 40 000 km). Sitôt après la guerre, l'ASTP prit contact avec des organisations d'autres pays qui avaient un but semblable. Les guides pédestres bernois et suisses se succédèrent rapidement; la vente annuelle du «chocolat du randonneur» commença. On organisa des concours de photographie et des randonnées annoncées par la radio, puis des promenades à ski et de longues marches à travers l'Europe.

L'octroi de la première subvention fédérale et la remise du doctorat honoris causa de la Faculté de médecine de l'Université de Zurich à son fondateur, M. J. J. Ess, furent un encouragement mérité pour l'ASTP.

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C'est en 1953 que l'ASTP eut à s'occuper pour la première fois du problème soulevé par les véhicules à moteur, qui empiétaient de plus en plus sur les chemins ruraux et forestiers. Des contacts fréquents eurent lieu entre l'ASTP et les associations d'automobilistes ainsi qu'avec les représentants des directeurs cantonaux de justice et de police. - Les résultats obtenus se révélèrent cependant décevants à la longue. Surtout, l'asphaltage de sentiers à vocation typiquement pédestre ne put que rarement être évité. L'ASTP ne pouvait pas se référer à des dispositions légales qui auraient permis de prescrire que les chemins et sentiers pédestres reconnus comme tels fussent réservés aux seuls piétons. Aussi l'exigence d'une action énergique se fit de plus en plus pressante. Un «Groupe de travail pour le développement des chemins et sentiers» fut créé en 1972; par la suite, il changea son nom en «Association en faveur de bases légales pour les sentiers et les chemins pédestres». Son but principal était d'oeuvrer pour l'établissement de bases légales s'appliquant aux chemins et sentiers pédestres, analogues à celles qui existent depuis longtemps pour les routes et les autres voies de circulation. Ces bases devraient conférer un caractère obligatoire à la planification des réseaux pédestres, sauvegarder leur maintien, les maintenir libres de la circulation de tout véhicule, garantir leur entretien et permettre l'aménagement de nouveaux chemins et sentiers réservés aux piétons. De l'avis de cette association, ces objectifs ne peuvent être atteints qu'en vertu d'une législation fédérale dont l'établissement exige l'adoption d'une disposition constitutionnelle. Ce sont ces considérations qui ont conduit à lancer une initiative pour le développement des chemins et sentiers.

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Relations entre la Confédération et l'Association suisse de tourisme pédestre

La Confédération est tout à fait favorable aux objectifs de l'ASTP qui viennent d'être exposés. Pour encourager la féconde activité que l'ASTP déploie en servant les intérêts de la santé publique et en rapprochant l'homme de la nature, la Confédération lui a accordé chaque année, depuis 1958, un montant inscrit au budget qui a passé graduellement de 8000 à 60 000 francs. Cette subvention permet à l'ASTP d'améliorer l'entretien et la construction de chemins et de sentiers pédestres, surtout dans les régions montagneuses où les sections bien organisées font défaut et où les cantons et les communes ne disposent que de modiques moyens financiers.

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Appréciation de l'initiative

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Critique du texte

Selon le texte proposé par les auteurs de l'initiative demandant l'insertion d'un nouvel article dans la constitution, la Confédération se verrait confier une nouvelle tâche. Elle serait contrainte d'assurer l'aménagement, la construction

1088 et l'entretien d'un réseau pédestre national, ainsi que la construction et l'entretien des réseaux régionaux. Fait frappant, seule la Confédération assumerait ce mandat, les cantons n'étant pas mentionnés en tant que partenaires. A vrai dire, les auteurs de l'initiative n'ont cessé de préciser, dans de nombreuses déclarations, que les dispositions fédérales (constitution et loi) ne devaient contenir que des prescriptions générales s'adressant aux pouvoirs législatifs des cantons. Les efforts pour la réalisation des chemins et sentiers pédestres incomberaient principalement aux cantons, aux communes, et aux corporations de droit public et de droit privé. La tâche de la Confédération consisterait pour l'essentiel à confier aux cantons l'aménagement, la construction et l'entretien des réseaux pédestres; elle n'aurait à s'occuper elle-même que de la coordination des problèmes techniques et de planification. Or ces objectifs et cette répartition des tâches dont font état les auteurs de l'initiative dans leurs déclarations, n'apparaissent pas dans le texte de l'article constitutionnel qu'ils proposent. Les divergences entre le texte et l'objectif appellent de sérieuses réserves. Si les cantons doivent effectivement assumer la responsabilité des chemins et sentiers pédestres, il faut que cela soit dit clairement. Une loi fédérale qui contraindrait les cantons à décréter des dispositions légales sans que cette obligation soit expressément prévue par la constitution aurait fort peu de chances d'être respectée. En tout état de cause, pareille délégation du mandat de légiférer paraît fort discutable du point de vue juridique.

Toutefois, il faut apprécier l'initiative non pas d'après les déclarations de ses auteurs sur l'article constitutionnel qu'ils proposent, mais uniquement d'après le texte. Or, en vertu de celui-ci, la Confédération ne pourrait guère se décharger sur les cantons de la tâche qui lui serait confiée, ni totalement, ni en partie.

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Conséquences financières

II n'est pas possible d'estimer les frais que la Confédération aurait à supporter si l'initiative était acceptée, mais il est probable qu'ils seraient considérables, sans compter que tout un appareil administratif devrait être mis en place.

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Nouveau mandat constitutionnel

Ne fût-ce qu'en raison de la situation financière extrêmement difficile où elle se trouve, la Confédération doit observer la plus grande prudence lorsqu'il s'agit d'assumer de nouvelles tâches. Même dans le cas d'une nette délimitation des compétences entre Confédération et cantons, qui est exigée à juste titre, l'Etat fédéral ne saurait endosser des responsabilités nouvelles que si celles-ci ont un caractère d'urgence et que si elles ne peuvent être assumées uniquement par les cantons, ou s'il s'agit d'un ensemble cohérent et indissociable de tâches.

Dans le cas présent, nous estimons que ni l'une ni l'autre de ces conditions n'est remplie. Un développement adéquat des chemins et sentiers peut certainement

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être assuré par les cantons seuls. Il faut d'emblée accepter le fait qu'ils s'attaqueront à ce problème et le résoudront de manière différente : c'est là le prix du fédéralisme et de l'autonomie des cantons. Mais ce problème doit être résolu sur le plan cantonal car l'aménagement, la construction et l'entretien des réseaux de chemins et sentiers constituent une tâche typique des cantons.

Reste la coordination des réseaux: là non plus, l'intervention de la Confédération n'est pas indispensable. Si les cantons ne veulent pas s'en charger, elle pourra fort bien être confiée à l'une des associations de tourisme pédestre existantes (telles que l'ASTP). - La deuxième condition posée à l'acceptation d'un nouveau mandat donné à la Confédération n'est pas davantage remplie. Le développement des chemins et sentiers pédestres constitue non pas un ensemble cohérent et indissociable de tâches, mais un aspect du délassement à proximité des agglomérations. Il est tout .à fait possible qu'à l'avenir, la Confédération soit invitée à élaborer une conception globale en la matière et à établir une base constitutionnelle. Il va de soi qu'en l'occurrence, on ne manquerait pas de tenir compte de la nécessité d'assurer légalement le maintien du réseau de tourisme pédestre. Mais en raison des efforts actuellement entrepris aux fins de régler à nouveau les tâches de l'Etat, on ne voit guère l'utilité de créer, aujourd'hui, une base constitutionnelle pour le seul domaine du développement des chemins pédestres. Ce sont surtout ces considérations qui nous ont amenés à nous opposer à cette initiative.

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Décision de ne pas présenter de contre-projet

II ressort des raisons invoquées sous chiffre 33 que nous ne considérons pas comme opportun de vous proposer de soumettre un contre-projet au peuple et aux cantons. Bien que nous ayons examiné attentivement cette possibilité, nous sommes parvenus à la conclusion qu'une telle manière de procéder serait incompatible avec une répartition judicieuse des tâches entre la Confédération et les cantons. Les travaux préparatoires approfondis qu'un groupe de travail institué par le Département de l'intérieur a exécutés, ont montré que tout contre-projet entraînerait une imbrication des compétences de la Confédération et des cantons; cela serait contraire à la tendance actuelle, dictée par des considérations financières, qui exige une nette séparation des attributions. Une nouvelle répartition des tâches entre la Confédération et les cantons est d'ailleurs l'un des objectifs importants de la réforme de l'Etat.

Tout en rejetant l'initiative et en renonçant à proposer un contre-projet, nous ne voudrions nullement sous-estimer le rôle important que joue le mouvement pour le développement des chemins et sentiers. Les institutions qui se consacrent à cette tâche méritent notre reconnaissance. Aussi envisageons-nous de vous demander d'accorder, comme par le passé dans le cadre du budget, les crédits destinés à l'ASTP. Il s'agit là de l'une des tâches de la politique culturelle de la Confédération; or cette tâche peut se fonder sur le droit constitutionnel non écrit qui n'a jamais fait l'objet de critiques de la part de vos conseils.

1090 (Projet)

Arrêté fédéral concernant l'initiatire populaire pour le développement des chemins et sentiers

L'Assemblée fédérale de la Confédération suisse, vu l'initiative populaire «pour le développement des chemins et sentiers» soumise le 21 février 19741'; vu le message du Conseil fédéral du 16 février 19772>, arrête: Article premier 1

L'initiative populaire du 21 février 1974 «pour le développement des chemins et sentiers» est soumise à la votatiön du peuple et des cantons.

2 L'initiative populaire, qui demande l'insertion d'un nouvel article dans la constitution, a la teneur suivante: 1

La Confédération assurera par voie législative l'aménagement, la construction et l'entretien d'un réseau pédestre national ainsi que la coordination, la construction et l'entretien des réseaux régionaux de chemins et sentiers dans toute la Suisse.

2 Eue encourage la construction et le développement des réseaux locaux de chemins pour piétons.

3 Les chemins destinés aux piétons doivent être à l'écart des routes destinées au trafic motorisé.» Article 2 Le peuple et les cantons sont invités à rejeter l'initiative populaire.

» FF 1974 I 799 2) FF 19771 1083

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Message concernant l'initiative populaire «pour le développement des chemins et sentiers» Du 16 février 1977

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