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FEUILLE FÉDÉRALE SUISSE

XXVI. Année, Volume IL

N° 30.

Jeudi 9 juillet 1874.

Abonnement par année, (franco dans tonte la Suisse) 1 francs.

Prix d'Insertion : 15 cent la ligne. Lei insertions doivent être transmises franco a l'expédition. -- Imprimerie et expédition de O. J. Wyss a Berne.

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Loi fédérale sur

l'organisation judiciaire fédérale.

(Du 27 juin 1874.)|

L'ASSEMBLÉE FÉDÉRALE de la

CONFÉDÉRATION SUISSE, en exécution des articles 106 à 114 de la Constitution fédérale du 29 mai 1874 et en modification de la loi fédérale du 5 juin 1849 sur la, matière ; vu le message du Conseil fédéral du 23 mai 1874, arrête:

I. Dispositions générales.

Art. 1er. Le Tribunal fédéral se compose de neuf membres et d'autant de suppléants.

Art. 2. Les membres et les suppléants du Tribunal fédéral sont nommés par l'Assemblée fédérale, qui aura égard à ce que les trois langues nationales y soient représentées (art. 107 de la Constitution fédérale).

Art. 3. Peut être nommé au Tribunal fédéral tout citoyen suisse éligible au Conseil national.

Feuille fédérale suisse. Année X.V VI. Vol. 11

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Les membres de l'Assemblée fédérale et du Conseil fédéral ef les fonctionnaires nommés par ces autorités ne peuvent en môme temps faire partie du Tribunal fédéral (art. 108 de la Constitution fédérale).

Art. 4. Les membres du Tribunal fédéral ne peuvent, pendant la durée de leurs fonctions , revêtir aucun autre emploi, soit au service de la Confédération, soit dans un Canton, ni suivre d'autre carrière ou exercer de profession (art. 108 de la Constitution fédérale).

En conséquence ils ne peuvent remplir les fonctions de directeur ou de membre du conseil d'administration d'une société qui a pour but un bénéfice.

Art. 5. Les parents ou alliés en ligne ascendante ou descendante à l'infini, ou en ligne collatérale jusqu'au degré de cousin germain inclusivement, ainsi que les maris de soeurs, ne peuvent être ensemble membres ou suppléants du Tribunal fédéral.

Deux personnes qui se trouvent dans l'un des cas d'incompatibilité prévus dans le présent article ne peuvent non plus fonctionner ensemble près le Tribunal fédéral ou l'une de ses sections, soit comme juge, soit comme greffier, soit comme juge d'instruction ou comme officier du ministère public.

Le fonctionnaire judiciaire qui, en contractant mariage, donne lieu à un cas d'incompatibilité avec un autre fonctionnaire judiciaire, se démet, par ce fait, de ses fonctions.

Art. 6. La durée des fonctions des membres et des suppléants du Tribunal fédéral est fixée à six ans.

La première nomination aura lieu immédiatement après l'entrée en vigueur de la présente loi et de l'arrêté fédéral prévu à l'art. 11.

Les membres qui font vacance dans l'intervalle des six ans sont remplacés à la première session de l'Assemblée fédérale pour le rebte de la durée- de leurs fonctions.

Art. 7. Le Président et le Vice- Président du Tribunal fédéral sont nommés par l'Assemblée fédérale, pour deux ans, parmi les membres du corps.

Lorsque le Président et le Vice-Président sont empec-hés de siéger, ils sont remplacés par le membre du Tribunal fédéral premier élu.

Art. 8. Le Tribunal fédéral nomme deux greffiers, dont l'un de la Suisse allemande et l'autre de la Suisse romande. Tous deux;

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doivent savoir Falleinand et ]e français. L'un des deux au inoins doit connaître la langue italienne. Ces nominations se ion t au scrutin secret, pour la durée de six ans.

Les greffiers tiennent le protocole du Tribunal fédéral et de ses sections. Le Tribunal fédéral désigne d'ailleurs à chacun des greffiers ses attributions. Lorsqu'un greffier est empoché do fonctionner, le Président lui désigne un remplaçant.

Art. 9. Dans les limites du crédit qui lui est assigné pour cela, le Tribunal fédéral nomme le personnel Je chancellent) dout il a besoin et les huissiers nécessaires pour bon service.

Art. 10. Four procéder à uue élection, ainsi que pour prendre toute décision dans les causes de droit civil et de droit public placées dans la compétence du Tribunal fédéral, la présence de sept membres au moins est nécessaire.

Pour toutes ces décisions, le nombre des membres, y compris le Président, doit être impair. Le Président prend part à la délibération et à la votation.

Art. 11. Le siège du Tribunal fédéral et de sa chancellerie sera désigné par un arrêté fédéral spécial.

La ville qui aura été désignée pour le siège du Tribunal fournira gratuitement, eu quelque temps que ce soit, meublera et entretiendra les locaux nécessaires pour les audiences du Tribunal fédéral et de ses sections, pour sa chancellerie et pour ses archives.

Les dispositions qui auront été prises dans ce but seront soumises à l'approbation du Conseil fédéral.

Art. 12. Les membres du Tribunal fédéral et les greffiers sont tenus de demeurer au siège du Tribunal.

Les dispositions de la loi fédérale du 23 décembre 1851 (III. 33) sur les garanties politiques et de police (art. 1 et 6), concernant les rapports personnels des membres du Conseil fédéral et du chancelier , sont applicables aux membres
Art. 13. Les dispositions des art. 3 (alinéa 2), 4 et 12 ne sont pas applicables aux suppléants du Tribunal fédéral.

Art. 14. Les membres du Tribunal fédéral reçoivent un traitement de fr. 10,000, le Président un traitement de fr. 11,000 et les greffiers un traitement de fr. 6--8000. Les suppléants et les autres fonctionnaires judiciaires recevront des jetons de présence dont le montant sera fixé par un arrêté spécial.

Art. 15. Pour autant que les affaires le permettent, le Tribunal fédéral peut une ou deux fois par an ordonner des vacances,

M8 pendant lesquelles tous ses membres, sauf le Président ou le VicePrésident, pourront quitter le siège du tribunal. La durée de ces vacances ne pourra cependant dépasser quatre semaines par année.

En outre, et lorsqu'il existe des motifs suffisants, le Tribunal fédéral peut accorder un congé à l'un de ses membre? ou aux greffiers.

Art. 16. Il est interdit à un membre ou suppléant du Tribunal fédéral de fonctionner comme juge: 1° dans touto cause où lui-même, sa femme, sa fiancée, ses parents ou alliés en ligne directe à l'infini et en ligne collatérale jusqu'au degré de cousin germain inclusivement, ou limari de la soeur de sa femme, a un intérêt direct ou indirect ; 2° dans la cause d'une personne dont il est le tuteur ou curateur ; 3° dans les affaires où il a déjà procédé étant dans l'exercice d'autres fonctions, soit comme membre d'une autorité administrative ou judiciaire de la Confédération ou d'un Canton, soit comme fonctionnaire judiciaire, soit comme arbitre, soit comme fondé de pouvoir ou agent d'une partie, soit comme expert ou comme témoin ; 4° dans la cause d'une personne morale à laquelle il appartient, dans celle où son Canton d'origine ou sa commune apparaît comme partie au procès et dans les recours qui sont formés contre les autorités législatives ou contre le Gouvernement de son Canton.

Si un juge ou suppléant du Tribunal fédéral se' trouve dans l'un des cas prévus par le présent article, il doit en avertir en temps utile le Président du Tribunal fédéral ou de la section compétente.

Art. 17. Tout juge ou suppléant du Tribunal fédéral peut être récusé par les parties, ou petit demander lui-même sa récusation : 1° s'il se trouve avec l'une des parties dans un rapport qui donne naissance à une inimitié ou à une dépendance particulière ; 2° s'il a exprimé , depuis que le procès est pendant devant le Tribunal fédéral, son opinion sur le cas soumis au Tribunal.

Les demandes en récusation, qu'elles soient présentées par un juge ou par les parties, doivent être remises en temps utile au

149 Président du Tribunal fédéral ou à son remplaçant. Si la demande émane d'une des parties, le Président la communique au membre que cela concerne, ainsi qu'à la partie adverse, en les invitant à y répondre. Dans les cas contestés, le Tribunal prononce sur la demande en récusation.

Art. 18. Le Tribunal fédéral ne peut être récusé en corps.

Si, dans un cas spécial, le nombre des membres et des suppléants dont la récusation est proposée est tel qu'aucune opération valide ne puisse avoir lieu , le Président du Tribunal fédéral tirera au sort , parmi les Présidents des Tribunaux suprômes des Cantons, le nombre nécessaire de suppléants extraordinaires pour prononcer sur la demande en récusation et môme, le cas échéant, sur l'affaire au fond.

Art. 19. Avant d'entrer en fonctions, les fonctionnaires judiciaires fédéraux doivent prêter serment de remplir fidèlement leur devoir.

Le Tribunal fédéral est assermenté par l'Assemblée fédérale; les membres et les suppléants qui ne sont pas présents à cette solennité prêtent serment à la première audience à laquelle ils assistent.

Les greffiers et leur substitut, les juges d'instruction et leurs greffiers sont assermentés par le Président du Tribunal fédéral ou par l'un des membres commis par lui à cet effet. Les officiers du ministère public fédéral prêtent serment entre les mains du Conseil fédéral.

Il est chaque fois dressé procès-verbal de l'assermentation.

Pour les fonctionnaires judiciaires auxquels leurs convictions défendent de prêter ce serment, une promesse solennelle peut en tenir lieu.

Art. 20. Les délibérations et les votations du Tribunal fédéral et de ses sections sont publiques.

Cette disposition n'est pas applicable aux délibération.- des jurés et de la chambre d'accusation.

Art. 21. Les Présidents du Tribunal fédéral et de ses diverses sections reçoivent les pièces adressées à ces autorités ef- tiennent un protocole de leur entrée et des dispositions prises par eux.

Art. 22. Le Président organise les audiences du Tribunal suivant que les affaires l'exigent et prend dans ce but les mesures nécessaires. Il dirige les débats et veille au maintien de la tranquillité et de l'ordre. Il peut faire sortir de la salle des séances

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et, au besoin, l'aire détenir pendant 24 heures au plus les personnes qui résistent à ses ordres.

Art. 23. Le Président surveille dans l'accomplissement de leur devoir les juges d'instruction, les greffiers et les employés inférieurs.

Art. 24. Chaque année le Tribunal fédéral adresse à l'Assemblée fédérale un rapport circonstancié sur toutes les branches de l'administration de la justice fédérale.

Art. 25. Les autorités ot les fonctionnaires établis pour l'administration de la justice fédérale accomplissent tous les actes de leur compétence dans toute l'étenduu de la Confédération, sans avoir besoin du consentement préalable des autorités du Canton où ils procèdent.

Les autorités cantonales doivent, chacune dans leur ressort, faire droit aux réquisitions que les fonctionnaires judiciaires fédéraux leur adressent dans l'intérêt de l'administration de la justice.

Art. 26. Le Conseil fédéral fait les avances nécessaires à la caisse du Tribunal. La chancellerie du Tribunal tient un compte exact des recettes et des dépenses.

II. Administration de la justice civile.

Art. 27. Le Tribunal fédéral connaît des différends do droit civil : 1° entre la Confédération et un ou plusieurs Cantons ; 2° entre des corporations ou des particuliers comme demandeurs et la Confédération comme défenderesse, pour autant que h> litige atteint une valeur en capital de 3000 francs au moins; 3° entre Cantons; 4° entre des Cantons d'une part et des corporations ou des particuliers d'autre part, quand le litige atteint une valeur eu capital de 3000 francs au moins, et que l'une des parties le requiert.

Il connaît de plus des différends concernant 'le Jicimatlilosat, d'après la loi du 3 décembre 1850 (II. 130), ainsi que des contestations qui surgissent entre communes de différents Cantons, touchant le droit de cité (art. 110 de la Constitution fédérale).

Art. 28. Le Tribunal fédéral connaît en outre de toutes les causes que la législation fédérale place dans la compétence du Tribunal fédéral par des lois spéciales (art. 114 de lu Constitution fédérale).

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Le Tribunal fédéral connaît notamment, en vertu des lois fédérales existantes : " a. des contestations en matière d'expropriations pour la construction des chemins de fer ou d'autres travaux d'utilité publique, auxquels l'Assemblée fédérale déclare que la loi fédérale du 1er mai 1850, (I. 319) est applicable, ot d'après les dispositions de cette loi, ainsi que de celle du 18 juillet 1857 ; o. des divorces de mariages mixtes, en application do la loi fédérale du 3 février 1862 (VIL 129) ;
Art. 29. Dans les causes où il s'agira de l'application des lois fédérales par les tribunaux cantonaux, et lorsque l'objet du litige sera d'une, valeur d'au moins fr. 3000, ou non susceptible d'estimation, chaque partie a le droit de recourir au Tribunal fédéral pour obtenir la réforme du jugement au fond rendu par la dernière instance judiciaire cantonale.

La valeur en capital est déterminée par la somme en litige ·devant la dernière instance cantonale.

Les parties peuvent convenir que dans ces causes le jugement au fond d'une première instance cantonale sera soumis directement au Tribunal fédéral sans recourir à la seconde instance cantonale.

Art. 30. Pour ce recours, il est accordé un délai péremptoive de 20 jours dès la communication du jugement contre lequel il est dirigé. La partie qui voudra en faire usage doit le déclarer dans le môme délai au siège du tribunal cantonal qui a rendu le jugement dont est recours. Dans ce cas, le tribunal cantonal en question dovrà adresser au Président du Tribunal fédéral, dans un délai de 14 jours

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à, partir de celui où cette déclaration est intervenue, le jugement et les actes des parties.

Après avoir reçu les actes, le Président du Tribunal fédéral fixe le jour où l'affaire sera portée devant le Tribunal fédéral et en informe les parties.

Les parties ont le droit de comparaître au jour fixé devant le Tribunal fédéral et de plaider leur cause oralement on de la faire plaider par dos fondés de pouvoirs.

Le Tribunal fédéral devra baser son jugement sur l'état dos faits tel qu'il aura été établi par les tribunaux cantonaux. Cependant lorsque devant les instances cantonales la preuve de faits contestés de nature à exercer une influence prépondérante sur le jugement à rendre n'aurait pas été admise, le Tribunal fédéral pourra faire compléter les actes du dossier par l'instance qui a rendu ce jugement et statuer ensuite, définitivement, sans une nouvelle audition des parties.

Art. 31. Le Tribunal fédéral est tenu de juger, outre les causes prévues aux articles 27 à 29: 1° celles que la Constitution ou la législation d'un Canton placent d'avance dans la compétence du Tribunal fédéral. De pareillesdispositions ne sont valables que moyennant la ratification de l'Assemblée fédérale ; 2° celles qui sont portées devant lui par convention des parties et dont l'objet atteint une valeur en capital de 3000 francs au moins (art. 111 de la Constitution fédérale).

III. Administration de la justice pénale.

Art.. 32. Le Tribunal assisté du Jury, lequel statue sur les faits, connaît en matière pénale: 1° des cas de haute trahison envers la Confédération, de révolte ou de violence, contre les autorités fédérales; 2° des crimes et des délits contre le droit des gens; 3° des crimes et des délits politiques qui sont la cause on la suite de troubles par lesquels une intervention fédérale arméeest occasionnée ; 4° des faits relevés à la charge <3e fonctionnaires nommés par une autorité fédérale, quand cette autorité en saisit le Tribunal fédéral (art. 112 de la Constitution fédérale).

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Les dispositions ultérieures concernant la compétence des assises fédérales sont renfermées aux articles 73 à 77 du Code pénal fédéral du 4 février 1853 (III. 335).

Art. 33. Le Tribunal fédéral est obligé de statuer aussi sur d'autres cas que ceux mentionnés à l'art. 32, si la Constitution ou la législation d'un Canton les fait rentrer dans la compétence do ce tribunal et si l'Assemblée fédérale y a consenti.

Art. 34. Pour l'administration de la justice pénale, le Tribunal fédéral se divise : en Chambre d'accusation, en Chambre criminelle et en Tribunal de cassation. Ces trois Chambres sont nommées au commencement de chaque année pour la durée d'un an.

Aucun juge ne peut connaître de la même affaire dans plus d'une section du Tribunal fédéral.

Art. 35. La Chambre d'accusation se compose de trois membres et d'un nombre égal de suppléants qui sont appelés à siéger en cas d'empêchement des premiers. Le membre premier élu est Président.

Art. 36. La Chambre d'accusation a sous sa direction et sa surveillance deux juges d'instruction, que le Tribunal fédéral nomme pour six ans. Ils désignent eux-mêmes leurs greffiers, sous réserve de la ratification de ces nominations par le Président de la Chambre d'accusation.

En cas d'empêchement des juges d'instruction ordinaires, le Tribunal fédéral ou, s'il n'est pas réuni. le Président peut nommer et appeler des juges d'instruction extraordinaires.

Art. 37. Le Conseil fédéral nomme dans chaque cas spécial le Procureur général de la Confédération.

Art. 38. La Chambre criminelle, qui prend part à toutes les sessions des assises fédérales, se compose de trois membres et de trois suppléants pour les cas d'empêchement. Les trois langues nationales doivent être représentées au sein de ce corps. Le Président d« la Chambre criminelle est nommé par le Tribunal fédéral pour chaque session.

Lorsqu'un membre ou un suppléant de la Chambre criminelle est empêché par des circonstances imprévues d'assister à une session des assises , le Président de celles-ci peut nommer et appeler, pour le remplacer, un suppléant extraordinaire, qu'il choisit parmi les membres d'une autorité judiciaire cantonale.

Art.. 39. Les assises fédérales se composent de la Chambre criminelle et de douze jurés, élus dans les Cantons par le peuple et tirés au sort dans la list^ de l'arrondissement.

154 Art. 40. Le territoire de la Confédération est divisé en cinq arrondissements d'assises.

Le premier comprend les Cantons de Genève, de Vaud, de Fribourg (à l'exception des communes où prédomine la langue allemande) , de Neuchâtel et les communes des Cantons dp Berne et du Valais où la langue française est prédominante.

Le second comprend les Cantons de Berne (à l'exception des localités comprises dans le premier arrondissement), de Soleure, de Bâle, de Lucerne, ainsi que les communes des Cantons de Fribourg et du Valais où l'on parle allemand.

Le troisième comprend les Cantons d'Argovie , de Zurich, de Schaffhouse, de Thurgovie, de Zoug, de Schwyz et d'Unterwalden.

Le quatrième comprend les Cantons d'Uri, de Glaris, d'Appenzell, de Saint-Gall et des Grisons (à l'exception des communes où la langue italienne prédomine).

Le cinquième comprend le Canton du Tessin et les communes italiennes du Canton des Grisons.

Seront nommés et portés sur la liste de l'arrondissement dans, les quatre premiers arrondissements un juré sur 1000 habitants, et, dans le cinquième arrondissement, un juré sur 500 habitants.

Art. 41. Peut être nomme juré tout Suisse ayant lu droit de voter d'après l'art. 74 de la Constitution fédérale. Sont toutefois exceptés: 1° les membres des autorités judiciaires cantonales supérieures, tous les présidents de tribunaux, juges d'instruction et officiers du ministore public, ainsi que tous les fonctionnaires fédéraux et cantonaux de l'ordre administratif, non compris les employés communaux; 2° les ecclésiastiques ; 3° les employés dans les maisons d'arrêt et de détention ; 4° les employés de police.

Art. 42. Tout citoyen appelé aux fonctions d& jure est tenu cf'accepter. Sont exceptés: 1° tous ceux qui ont atteint l'âge de 60 ans révolus; 2° ceux dont le nom a été porté sur la dernière liste des jurés; 8° ceux qui sont empêchés de remplir les fonctions de juré pour cause de maladie ou d'infirmité.

Art. 43. Les questions relatives à l'éligibilité aux fonctions de juré et à- l'obligation de les accepter sont du ressort des Gouvernements cantonaux.

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Ils transmettent les listes de jurés des Cantons au Tribunal fédéral, qui en forme les listes d'arrondissement et les publie (art. 40).

Les noms des jurés qui, pour une cause quelconque, ont perdu cette qualité, ou qui sont décédés, sont transmis par le Gouvernement cantonal au Tribunal fédéral pour qu'ils soient rayés de la liste.

Art. 44. Les listes de jurés sont renouvelées tous les six ans.

Le Conseil fédéral pourvoit à ce que les nouvelles listes soient formées en temps utile.

Art. 45. Avant l'ouverture de chaque session des assises, la Chambre criminelle fait déposer, en séance publique, dans une urne, les noms des jurés de l'arrondissement dans lequel los débats devront avoir lieu; elle en fait ensuite tirer au sort cinquante-quatre noms, qui sont lus ut enregistrés.

Des copies Je la liste spéciale ainsi formée sont immédiatemeut communiquées au Procureur général désigné par le Conseil fédéral, ainsi qu'à l'accusé ou à son défenseur.

Art. 46. Chaque fois qu'une affaire est renvoyée aux assises, le Procureur général de la Confédération et l'accusé peuvent récuser chacun vingt jurés.

Si, dans la même affaire, il y a plusieurs accusés, ils peuvent exercer conjointement leurs récusations, ou faire usage de leur droit séparément. Dans l'un et l'autre cas, ils ne peuvent, pris ensemble, dépasser le nombre de récusations accordé à un accusé seul. Si les accusés no se concertent pas pour exercer conjointement leurs récusations, le sort décide entre eux dans quel ordre chacun exerce ses récusations. Les jurés qui, de cette manière, sont récusés par l'un des accusés, le sont alors pour tous les autres accusés, jusqu'à ce que le nombre des récusations accordées soit épuisé.

Art. 47. Les récusations sont annoncées, verbalement ou par écrit, au Président de la Chambre criminelle, dans les quatorze jours dos la réception de la copie mentionnée à l'art. 45. Celui qui ne fait pas usage île son droit dans le délai prescrit est censé y avoir renoncé.

Art. 48. Lorsque quarante jurés ont été récusés, les quatorze restants sont convoqués aux assises.

Si le nombre des récusations ne s'élève pas à quai ante, la Chambre criminelle désigne par le sort, parmi les jurés non récusés, les quatorze qui devront être appelés aux assises.

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Dans les deux cas, le sort désigne pareillement les deux jurés qui, parmi les quatorze, doivent être adjoints au jury pour fonctionner en qualité de suppléants.

Art. 49. Toutefois, lorsque dans une session des assises il y a un grand nombre d'accusés à juger, ou pour tout autre motif grave, le Président de la Chambre criminelle peut appeler les cinquante-quatre jurés portés sur la liste spéciale et ne faire procéder aux récusations qu'à l'ouverture des débats.

Art. 50. L'invitation de se rendre aux assises est adressée aux jurés au moins six jours avant l'ouverture di' la session.

Art. 51. La Chambre criminelle désigne dans chaque cas le lieu où les assisses doivent se réunir.

Dans les cas ordinaires, un crime ou délit est jugé dans l'arrondissement d'assises où il a été commis. Cependant dans l'intérêt d'une justice impartiale ou de la sûreté publique il peut être fait exception à cette règle.

Art. 52. Pour chaque session des assises fédérales, le Gouvernement cantonal du lieu où elles sont appelées à siéger met à leur disposition un local convenable. Les frais causés par ces arrangements sont supportés par la caisse du Tribunal. Les loyers ne sont cependant pas portés eu compte.

Art. 53. Les gardes, les escortes et les geôliers sont fournis, sur réquisition du Président des assises ou du juge d'instruction, par les autorités cantonales du lieu de la poursuite de l'affaire.

Les frais en sont supportés par la caisse du Tribunal.

Art. 54. Les personnes mises en état d'arrestation sont écrouées dans les prisons cantonales. Leur entretien est bonifié par la caisse du Tribunal d'après les tarifs du Canton. Eu ce qui touche la surveillance ot le traitement des détenus, le geôlier se conforme aux ordres du juge d'instruction fédéral ou, le cas échéant, du Président des assises.

Art. 55. La Cour de cassation connaît soit des recours en cassation, des demandes de révision et de réhabilitation dans les causes criminelles (articles 135 --168, 175--182 du Code de procédure pénale fédérale, II. 735), soit des recours contre des jugements de tribunaux cantonaux qui portent sur des transgressions des lois fiscales fédérales (art. 18 de la loi fédérale du 30 juin 1849, 1. 87).

Le Tribunal de cassation se compose du Président dn Tribunal fédéral, qui en est d'office le Président, de quatre juges et de troia

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suppléants. Pour rendre des arrêts valables , la Cour de cassation doit toujours otre au complet, e'est-à-dire composée de cinq juges.

Cas échéant, elle pourra être complétée suivant leur tour de rôle au moyen des autres juges et suppléants ayant le droit de voter d'après l'art. 34. Si leur nombre ne suffit pas il sera procédé conformément à l'art. 18.

IY. Des contestations de droit public.

Art. 56. Le Tribunal fédéral connaît des conflits de, compétence entre les autorités fédérales d'une part et les autorités cantonales d'autre part. (Art. 113, § 1 de la Constitution fédérale.)

Lorsqu'une partie prétend qu'une contestation dont le Tribunal fédéral a été nanti est du ressort exclusif de l'autorité cantonale, ou doit être jugée par une autorité étrangère ou un tribunal arbitral, le Tribunal fédéral statue lui-même snr sa compétence.

L'Assemblée fédérale connaît des contestations entre le Conseil fédéral et le Tribunal fédéral, sur la question de savoir si un cas est du ressort de l'une ou de l'autre de ces autorités (art. 85, § 13 de la Constitution fédérale).

Art. 57. Le Tribunal fédéral connaît en outre des différends entre Cantons, lorsque ces différends sont da' domaine du droit public.

Sont compris spécialement dans cette catégorie : les rectifications de frontières intercantonales, les questions d'application de traités intercantonaux et les questions de compétence entre les autorités de Cantons différents, lorsque dans ces divers cas c'est un Gouvernement cantonal lui-môme qui nantit le Tribunal fédéral de l'affaire.

Art. 58. Le Tribunal fédéral statue sur les demandes d'extradition qui sont formulées en vertu des traités d'extradition existants, pour autant que l'application du traité en question est contestée. Les mesures préliminaires restent dans la compétence du Conseil fédéral.

Art. 59. Le Tribunal fédéral connaît enfin des recours présentés par les particuliers et les corporations, concernant: a. la violation des droits qui leur sont garantis soit par la Constitution soit par la législation fédérales, soit par la Constitution^e leurs Cantons ;

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6. la violation de conventions et de concordats intercantonaux, ainsi que des traités avec ^'étranger, lorsque ces recours sont dirigés contre des décisions d'autorités cantonales et qu'ils ont été déposés dans les soixante jours dès leur communication aux intéressés.

Sont réservées, à teneur de l'art. 113, alinéa 2me, de la Constitution fédérale, les contestations administratives ayant trait aux dispositions suivantes de la Constitution fédérale et dont la solution rentre, aux termes des art. 85, chiffre 12, et 102, chiffre 2, dans la compétence soit du Conseil fédéral, soit de l'Assemblée fédérale.

1° Art. 18, alinéa 8, concernant la gratuité de l'équipement du soldat.

2° Art. 27, alinéas 2 et 3, concernant les écoles primaires publiques des Cantons.

3 ° Art. 31, concernant la liberté de commerce et d'industrie.

4° Art. 31 et 32, concernant les droits de consommation et les droits d'entrée sur les vins et les autres boissons spiritueuses encore reconnus.

5° Art. 43, 45 et 47, concernant les droits des suisses établis.

6° Art. 49, 50 et 51, concernant la liberté de conscience et de croyance et le libre exercice des cultes, etc. Eestent néanmoins dans la compétence du Tribunal fédéral : les contestations relatives aux impôts (art. 49, alinéa 6) et les contestations de droit privé auxquelles donne lieu la création de conmmunautés religieuses nouvelles ou une scission de communautés religieuses existantes (art. 50, alinéa 3).

7° Art. 53, concernant l'état civil et le droit de disposer des lieux de sépulture, dans la mesure où la loi déférera au Conseil fédéral la compétence sur ces matières.

Sont également soumis à la décision soit du Conseil fédéral, soit de l'Assemblée fédérale : 8° Les recours concernant l'application des lois fédérales prévues aux art. 25, 33, 34, 39, 40 et 69 de la Constitution fédérale.

9 ° Les recours contre la validité d'élections et votations cantonales.

10° Les contestations provenant des dispositions des traités avec l'étranger concernant le commerce et les péages, les patentes, l'établissement, l'affranchissement de la taxe militaire et la libre circulation.

Art. 60. Le Tribunal fédéral appliquera dans tous les cas mentionnés aux articles 56, 57, 58 et 59 les lois votées par l'As-

159 semblée fédérale et les arrêtés de cette Assemblée qui ont une portée générale. Il se conformera également aux traités que l'Assemblée fédérale aura ratifiés (art. 113 de la Constitution federalo).

Art. 61. Le Tribunal fédéral ne prononce dans la règle anr des contestations de droit public qu'à la suite d'une procédure écrite.

Les recours sont transmis pour rapport à la partie adverse ou, à son défaut, à l'autorité contre laquelle ils sont dirigés. Une ibis la réponse reçue, le juge d'instruction peut, s'il le juge convenable , prescrire une réplique et uno duplique. 11 ordonne en même temps la production des moyens de preuve nécessaires.

Exceptionnellement, sur la demande d'une des parties, et lorsqu'il existe des motifs particuliers- pour le faire, le Tribunal fédéral peut ordonner des débais oraux.

Art. 62. Dans les procès qui portent sur des contestations de droit public, il' ne peut, dans la règle, ni être demandé d'émoluments, ni être alloué d'indemnités aux parties.

Cependant le Tribunal peut faire des exceptions dans les cas où elles seraient justifiées par l'origine ou la cause de la contestation, ou par la manière dont le procès a été instruit par les parties.

Art. 63. Le Président du Tribunal peut, sur la demande d'une partie, ordonner les mesures nécessaires pour le maintien de l'état de fait.

Ces mesures doivent être ratifiées par le Tribunal dans sa première audience.

Dispositions finales.

Art. 64. Sont abrogées par la présente loi: 1° La loi fédérale sur l'organisation judiciaire fédérale, du 5 juin 1849 (I. 65);' 2° La loi fédérale sur les attributions et le traitement du procureur général, du 20 décembre 1850 (II. 163); 3° La loi fédérale concernant une modification à l'art. 30 de l'organisation judiciaire, du 16 juillet 1862 (VII. 295), ainsi que toutes les dispositions des autres lois fédérales qui pourraient se trouver en contradiction avec celles de la présente loi.

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Art. 65. La présente loi entrera en vigueur, sous réserve de l'exercice des droits populaires, conformément à l'art. 89 de la Constitution fédérale, après un délai de quatrevingt-dix jours dès celni de sa promulgation.

Le Conseil fédéral est chargé de la publication et de l'exécution de la présente loi.

Ainsi arrêté par le Conseil national, Berne, le 26 juin 1874.

Le Président: PEER-HERZOG.

Le Secrétaire: SOHIBSS.

Ainsi arrêté par le Conseil des Etats, Berne, le 27 juin 1874.

Le Président: KOECHLIN.

Le Secrétaire: J.-L. LÜTSOHER.

Le Conseil fédéral arrête : La loi fédérale ci-dessus sera publiée dans la Feuille fédérale.

Berne, le 1er juillet 1874.

Le Président de la Confédération : SCHENK.

Le Chancelier de la Confédération : SOHIKSS.

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Loi fédérale sur l'organisation judiciaire fédérale. (Du 27 juin 1874.)

In

Bundesblatt

Dans

Feuille fédérale

In

Foglio federale

Jahr

1874

Année Anno Band

2

Volume Volume Heft

30

Cahier Numero Geschäftsnummer

---

Numéro d'affaire Numero dell'oggetto Datum

09.07.1874

Date Data Seite

145-160

Page Pagina Ref. No

10 063 261

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