00.030 Message relatif à la loi fédérale qui modifie l'arrêté fédéral concernant la loi sur l'énergie atomique du 1er mars 2000

Messieurs les Présidents, Mesdames et Messieurs, Nous vous soumettons avec ce message le projet d'une loi fédérale qui modifie l'arrêté fédéral concernant la loi sur l'énergie atomique, et vous proposons de l'adopter.

Nous vous prions d'agréer, Messieurs les Présidents, Mesdames et Messieurs, l'assurance de notre haute considération.

1er mars 2000

Au nom du Conseil fédéral suisse: Le président de la Confédération, Adolf Ogi La chancelière de la Confédération, Annemarie Huber-Hotz

2000-0464

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Condensé La validité de l'arrêté fédéral du 6 octobre 1978 concernant la loi sur l'énergie atomique (RS 732.01) est fixée jusqu'à l'entrée en vigueur d'une nouvelle loi sur l'énergie atomique, mais au plus tard jusqu'au 31 décembre 2000. Initialement, la loi sur l'énergie nucléaire aurait dû être mise en vigueur avant cette échéance. Mais diverses circonstances (en particulier des initiatives populaires, Tchernobyl) ont causé des retards répétés dans son élaboration. En mars 2000, le Conseil fédéral a ouvert la consultation sur l'avant-projet de loi sur l'énergie nucléaire. Il entend soumettre son message y relatif au Parlement au plus tard en mars 2001, en même temps que le message sur les deux initiatives populaires «Sortir du nucléaire» et «Moratoire-plus». Ainsi le calendrier prévu ne peut pas être tenu.

L'intention est de proroger l'arrêté de dix ans, c'est-à-dire jusqu'au 31 décembre 2010, sans en modifier la teneur. Selon la nouvelle constitution fédérale, une loi est nécessaire pour cela (art. 163 s.).

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Message 1

Partie générale

1.1

Point de la situation

L'actuelle loi fédérale du 23 décembre 1959 sur l'utilisation pacifique de l'énergie atomique (loi sur l'énergie atomique, LEA; RS 732.0) nécessite une révision. Dès le milieu des années 1970, celui qui se nommait alors Département fédéral des transports, des communications et de l'énergie (DFTCE)1 a chargé une commission d'experts ne faisant pas partie de l'administration de s'atteler à la tâche. Plusieurs points ont toutefois été considérés comme trop urgents pour attendre. Ils ont fait l'objet de l'arrêté fédéral du 6 octobre 1978 concernant la loi sur l'énergie atomique (AF/LEA, RS 732.01). Approuvée en votation populaire, cette révision partielle, d'une durée de validité limitée, est entrée en vigueur le 1er juillet 1979. Elle innovait notamment en introduisant, pour les nouvelles installations nucléaires, l'autorisation générale avec les procédures y relatives, la preuve du besoin ainsi que des dispositions concernant l'évacuation des déchets radioactifs et le fonds de désaffectation.

La durée de validité de l'arrêté était fixée jusqu'à l'entrée en vigueur d'une nouvelle loi sur l'énergie atomique, mais au plus tard jusqu'au 31 décembre 1983. Il a été prorogé le 18 mars 1983 jusqu'à la fin de 1990 et le 22 juin 1990 jusqu'à la fin de 2000.

Après l'entrée en vigueur de l'AF/LEA, la commission d'experts a poursuivi ses travaux; son avant-projet de loi sur la radioprotection et l'énergie nucléaire, soumis à la consultation en 1981, a ensuite été abandonné. Certaines de ses dispositions ont été intégrées à la loi du 22 mars 1991 sur la radioprotection (RS 814.50). En 1979 et 1984, des initiatives populaires réclamant des droits de codécision accrus dans la construction et l'exploitation d'installations nucléaires, l'abandon de l'énergie nucléaire et une politique différente dans le domaine de l'énergie ont été rejetées. Un nouvel avant-projet de loi sur l'énergie nucléaire (LENu), élaboré au sein de l'administration, a été soumis à la consultation au cours du premier semestre 1986.

Le 14 novembre 1988, le Conseil fédéral décidait de suspendre les travaux concernant ce projet en attendant de connaître les résultats du scrutin sur les deux initiatives populaires «Pour l'abandon de l'énergie atomique» et «Halte à la construction de centrales nucléaires (moratoire)». Sa décision était partiellement
motivée par l'accident de Tchernobyl. Le 23 septembre 1990, la première de ces deux initiatives était rejetée, l'autre acceptée. Dans son message du 19 janvier 1994, le Conseil fédéral demandait deux choses: des dispositions plus strictes sur la non-prolifération des armes nucléaires et une révision partielle de l'AF/LEA. Cette révision partielle a cependant été rejetée par le Conseil des Etats le 13 décembre 1995 et par le Conseil national le 4 mars 1996, notamment par suite de la décision négative du peuple du canton de Nidwald au sujet du projet de Wellenberg.

A l'automne 1996, le chef du DETEC a invité des représentants des différents groupes d'intérêts à un dialogue sur la politique énergétique, afin de débloquer la situation. Mi-1997, le département a tiré un bilan provisoire de leurs discussions. Les milieux concernés ont alors confié à des groupes de travail l'étude des questions 1

Depuis le 1er janvier 1998 le Département fédéral de l'environnement, des transports, de l'énergie et de la communication, DETEC

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restées sans réponse. Un groupe «Gestion des déchets radioactifs» était chargé de proposer dans ce domaine des solutions consensuelles en prévision de la LENu. Il s'agissait en particulier d'analyser les avantages et les inconvénients respectifs du stockage final des déchets radioactifs et de leur stockage contrôlé à long terme, ainsi que du retraitement de ces déchets et de leur stockage final direct. Le groupe de travail n'étant parvenu à aucun consensus sur les questions essentielles, son président a adressé au DETEC un rapport final où il formulait ses propres conclusions.

Au mois d'octobre 1998, le Conseil fédéral prenait plusieurs décisions touchant la politique de l'énergie; elles concernaient notamment l'énergie nucléaire, la réforme fiscale à but écologique et une taxe sur l'énergie. Dans le même temps, les chefs du DETEC et du DFE étaient chargés de trouver avec les exploitants de centrales nucléaires, les opposants et les cantons concernés, les réponses à deux questions: celle de la limitation, dans le temps, du fonctionnement des centrales, et celle du mode d'évacuation des déchets radioactifs. Ces entretiens n'ayant à leur tour abouti à aucun consensus, le Conseil fédéral a pris, au début de juin 1999, de nouvelles décisions de principe en prévision du projet de LENu qui devrait être soumis à la consultation. Il a aussi approuvé le message concernant la loi sur le marché de l'électricité et mis en consultation l'ordonnance sur le fonds de gestion des déchets radioactifs.

Au mois de juin 1999, le DETEC a institué un nouveau groupe d'experts devant étudier la question du modèle de gestion des déchets radioactifs. Au début de l'an 2000, ce groupe a remis son rapport final, où il compare le stockage final souterrain, le stockage final avec possibilité durable de récupération, le stockage sous contrôle, de longue durée et récupérable, et enfin l'entreposage intermédiaire. Il parvient à la conclusion que, dans l'état actuel des connaissances, le stockage final souterrain est la seule méthode permettant d'évacuer les déchets radioactifs en respectant les exigences actuelles de sécurité à long terme (soit pour une durée pouvant atteindre plus de 100 000 ans.) Afin de répondre aux exigences en matière de surveillance, de contrôle et de facilité de récupération, il propose le modèle du stockage
souterrain contrôlé de longue durée. Cette option répond à la fois aux exigences de la sécurité à long terme et à celles de la réversibilité. Au cas où les déchets ne seraient pas récupérés, on s'acheminerait ainsi peu à peu vers un stockage souterrain final.

L'administration a élaboré un avant-projet de LENu s'inspirant de ces décisions et conclusions. Le Conseil fédéral a simultanément adopté ce message et ouvert la consultation relative à l'avant-projet d'une LENu; il a de plus adopté l'ordonnance sur le fonds de gestion des déchets radioactifs.

1.2

Appréciation de la situation

L'AF/LEA n'est valable que jusqu'à la fin de l'an 2000. Le moratoire sur l'énergie nucléaire échoit en septembre de la même année. Deux nouvelles initiatives populaires ont été déposées le 28 septembre 1999 («Sortir du nucléaire» et «Moratoireplus»). La première préconise en particulier la désaffectation progressive des centrales nucléaires (Beznau I/II et Mühleberg deux ans, au plus, après l'acceptation de l'initiative, Gösgen et Leibstadt au terme de 30 années d'exploitation, au maximum), l'arrêt des opérations de retraitement du combustible usé et la conversion à des sources d'énergie non nucléaires pour produire l'électricité. Quant à l'initiative pour un nouveau moratoire, elle vise en particulier l'interdiction temporaire de nouvelles 1610

installations nucléaires et la limitation de la durée d'exploitation à 40 ans, avec possibilité de retarder l'échéance de dix ans, au maximum, au moyen d'un arrêté fédéral soumis au référendum obligatoire. La consultation relative à l'avant-projet de loi sur l'énergie nucléaire s'est ouverte en mars 2000. Le message devrait être adopté une année plus tard, en même temps que celui qui concernera les deux initiatives populaires susdites. Le débat parlementaire sur la LENu prendra sans doute du temps. C'est pourquoi nous vous proposons de prolonger une nouvelle fois de dix ans la validité de l'AF/LEA.

On pourrait certes imaginer ne pas proroger l'arrêté fédéral. Ce serait rendre à la loi de 1959 sur l'énergie atomique, dès le 1er janvier 2001, sa pleine validité en ce qui concerne l'énergie nucléaire. Le régime de l'autorisation générale deviendrait caduc.

De même, les dispositions légales concernant en particulier les actes préparatoires de la construction d'un dépôt pour les déchets radioactifs ou les fonds de désaffectation des centrales et de gestion des déchets tomberaient. Du coup, d'éventuels actes préparatoires nouveaux seraient bloqués jusqu'à l'entrée en vigueur de la nouvelle LENu; le financement des actes de désaffectation et de gestion serait au moins passagèrement mis en danger. Il ne faut donc pas laisser échoir l'arrêté, mais le proroger.

1.3

Pas de consultation

On le verra au ch. 2, il s'agit de proroger l'AF/LEA sans en modifier la teneur. C'est pourquoi nous renonçons à soumettre ce projet à la procédure de consultation.

2

Partie spéciale

Nous vous proposons de proroger la validité de l'AF/LEA de dix ans, soit jusqu'au 31 décembre 2010. Le message relatif à la LENu doit vous être présenté au printemps de 2001, en même temps que celui qui concernera les deux initiatives populaires («Sortir du nucléaire» et «Moratoire plus»). Conformément à notre décision du 27 octobre 1999, le projet de loi constituera un contre-projet indirect aux initiatives.

Etant donné les délais nécessaires à sa discussion et à un éventuel référendum, la prorogation de dix ans de l'AF/LEA se justifie.

Nous proposons en outre de reprendre l'arrêté sans changement. En effet, il était à l'époque le résultat d'un compromis laborieusement acquis entre partisans et adversaires de l'énergie nucléaire. Toute modification menacerait cet acquis et réclamerait d'autres adaptations. Ce serait remettre en cause le but du projet, qui est de maintenir le plus simplement possible la réglementation actuelle pour une durée limitée.

3

Conséquences financières et effets sur l'état du personnel

La prorogation de l'arrêté est sans conséquences pour la Confédération et pour les cantons.

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4

Programme de la législature

La refonte de la loi sur l'énergie atomique et de l'arrêté y relatif figurait dans le programme de législature 1995­1999 (FF 1996 II 322, R 33, et 351). Les travaux ayant été encore retardés pour les raisons indiquées, il faut proroger une nouvelle fois l'arrêté.

5

Bases juridiques

5.1

Constitutionnalité

Le projet se fonde sur l'art. 90 de la nouvelle Constitution fédérale.

5.2

Forme de l'acte

Aux termes des art. 163 et 164, al. 1, de la nouvelle Constitution fédérale, un acte contenant des dispositions importantes qui fixent des règles de droit doit revêtir la forme d'une loi fédérale. La forme de l'arrêté est réservée aux actes ne contenant pas de telles dispositions. Selon l'art. 164, al. 1, let. c, Cst., une disposition est importante en particulier lorsqu'elle se rapport aux droits et aux obligations des personnes. Le présent acte contient de telles dispositions et doit par conséquent prendre la forme d'une loi.

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