00.034 Message relatif à l'initiative populaire ,,pour plus de sécurité à l'intérieur des localités grâce à une vitesse maximale de 30 km/h assortie d'exceptions (Rues pour tous)" du 13 mars 2000

Messieurs les Présidents, Mesdames et Messieurs, Nous vous présentons le message relatif à l'initiative populaire ,,pour plus de sécurité à l'intérieur des localités grâce à une vitesse maximale de 30 km/h assortie d'exceptions (Rues pour tous)" et vous proposons de la soumettre au vote du peuple et des cantons, en leur recommandant de la rejeter.

Ce message est accompagné d'un projet d'arrêté fédéral.

Nous vous prions d'agréer, Messieurs les Présidents, Mesdames et Messieurs, l'assurance de notre haute considération.

13 mars 2000

Au nom du Conseil fédéral suisse: Le président de la Confédération, Adolf Ogi La chancelière de la Confédération, Annemarie Huber-Hotz

2000-0717

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Condensé L'initiative populaire fédérale ,,pour plus de sécurité à l'intérieur des localités grâce à une vitesse maximale de 30 km/h assortie d'exceptions (Rue pour tous)", présentée sous la forme d'un projet rédigé de toutes pièces, a été déposée le 16 mars 1999 à la Chancellerie fédérale, munie de 112 395 signatures. Elle demande que la vitesse maximale générale autorisée dans les localités soit de 30 km/h, réserve faite de dérogations dûment justifiées (en particulier pour les routes principales, pour autant que la sécurité des usagers et que la protection des riverains, notamment contre le bruit, soient respectées). La nouvelle réglementation envisagée devrait entrer en vigueur dans l'année qui suit l'acceptation de l'initiative par le peuple et les cantons.

En voulant limiter la vitesse, les auteurs de l'initiative cherchent à renforcer la sécurité routière dans les localités, à réduire les atteintes à l'environnement et à améliorer la qualité de vie des riverains. S'il faut saluer l'objectif visé, on ne saurait cependant retenir l'option choisie ni y donner suite, et ce, pour les raisons suivantes: Il est incontestable que tout ralentissement de la vitesse entraîne une réduction du nombre et de la gravité des accidents et que ­ dans la mesure où il permet de modérer le trafic et donc de le rendre plus homogène ­ il contribue à faire baisser les émissions polluantes et la consommation de carburant. De telles améliorations ne sont toutefois réelles que si les conducteurs respectent la limitation de vitesse imposée. Il est en effet de notoriété publique qu'à elle seule l'instauration d'une règle de circulation ou d'une signalisation ­ comme ce serait le cas si l'initiative était acceptée ­ ne permet pas d'abaisser comme on le souhaiterait la vitesse effectivement pratiquée. En renonçant aux mesures d'accompagnement qui s'imposent pour modérer le trafic par des moyens techniques ou des constructions, l'on ne saurait obtenir les améliorations escomptées. L'initiative part du principe que la limitation de vitesse à 30 km/h sera instaurée de manière générale sur tout le périmètre des localités et elle ne tient pas suffisamment compte du degré d'aménagement ni des caractéristiques optiques des routes. Elle prévoit certes que l'autorité cantonale compétente pourra accorder des dérogations dans certains
cas justifiés; cependant, l'exemple du ,,cas justifié" mentionné dans le texte de l'initiative, selon lequel on ne pourrait relever la vitesse maximale sur les routes principales que pour autant que la sécurité des usagers de la route et la protection des riverains, notamment contre le bruit, soient respectées, montre à l'évidence qu'il serait quasiment impossible de relever la vitesse à 50 km/h, même sur une route principale très bien aménagée, parce qu'il est prouvé que toute augmentation de la vitesse a des incidences négatives sur le nombre et sur les caractéristiques des accidents, ainsi que sur la sécurité des usagers de la route. Il semblerait toutefois exagéré d'imposer la limite de 30 km/h sur l'ensemble du réseau routier des localités de notre pays, les normes de construction et les caractéristiques optiques y étant très hétérogènes. On sait par expérience qu'à eux seuls les contrôles de vitesse effectués par la police ne permettent pas, ou alors que très peu, d'améliorer le faible taux d'observation d'une limitation de vitesse imposée sur des routes dont l'aménagement et les caractéristiques optiques ne sont pas conformes avec cette restriction; en définitive, celle-ci ne

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permettrait pas d'atteindre l'objectif visé, à savoir obtenir une meilleure protection de la vie et de l'intégrité corporelle des gens. L'instauration d'une limitation générale de la vitesse à 30 km/h ne donnerait plus autant qu'aujourd'hui aux autorités cantonales et communales chargées du financement la possibilité de fixer les priorités en vue de réduire le profil de certaines routes ou de les réaménager ou encore d'ordonner des mesures d'accompagnement, avec le concours de la population, afin de pouvoir tenir compte de façon optimale des impératifs de la sécurité routière, de la protection de l'environnement et du bien-être des riverains. Au surplus, il n'y a aucune raison de vouloir casser la responsabilité unique, instaurée en 1975, et donc de transférer au peuple et aux cantons la compétence de fixer la vitesse maximale dans les localités, compétence dont a été investi le Conseil féd éral.

Le Conseil fédéral vous demande donc de recommander le rejet de l'initiative ,,Rues pour tous", sans lui opposer de contre-projet .

2727

Message 1

Partie générale

1.1

Considérations sur la forme

1.1.1

Libellé de l'initiative

L'initiative populaire fédérale ,,pour plus de sécurité à l'intérieur des localités grâce à une vitesse maximale de 30 km/h assortie d'exceptions (Rues pour tous)" a été déposée le 16 mars 1999 à la Chancellerie fédérale, munie de 112 395 signatures valables. Présentée sous la forme d'un projet rédigé de toutes pièces, elle a la teneur suivante: I La constitution fédérale est complétée comme suit: Art. 37bis, al. 3 (nouveau) 3 La vitesse maximale générale autorisée à l'intérieur des localités est de 30 km/h.

L'autorité compétente peut accorder des dérogations dans les cas justifiés. Elle peut en particulier relever la vitesse maximale sur les routes principales pour autant que la sécurité des usagers de la route et la protection des riverains, notamment contre le bruit, soient respectées.

II Les dispositions transitoires de la constitution fédérale sont complétées comme suit: Art. 24 (nouveau) Dans l'année qui suit l'acceptation par le peuple et par les cantons de l'art. 37bis, al. 3, les autorités compétentes édictent les dispositions d'application nécessaires et ordonnent l'introduction des vitesses maximales à l'intérieur des localités.

1.1.2

Aboutissement

Dans une décision datée du 1er avril 1999, la Chancellerie fédérale a constaté que l'initiative populaire ,,pour plus de sécurité à l'intérieur des localités grâce à une vitesse maximale de 30 km/h assortie d'exceptions (Rues pour tous)" avait abouti sur le plan formel (FF 1999 2765).

1.1.3

Délais du traitement de l'initiative

En vertu de l'art. 29, al. 1, de la loi sur les rapports entre les conseils (LREC; RS 171.11) et de l'art. 2, al. 2, de l'ordonnance du 26 février 1997 sur l'entrée en vigueur de la modification de la loi fédérale sur les droits politiques (RS 661.0), le délai dont dispose le Conseil fédéral allait jusqu'au 15 mars 2000 pour présenter aux Chambres le message relatif à cette initiative.

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Les Chambres auront alors jusqu'au 15 septembre 2001 pour se prononcer (art. 27, al. 1, LREC et art. 2, al. 2, de l'ordonnance du 26 février 1997 sur l'entrée en vigueur de la modification de la loi fédérale sur les droits politiques).

1.1.4

Adaptation à la nouvelle Constitution fédérale

Suite à l'acceptation par le peuple de la nouvelle Constitution fédérale (Cst.), le 18 avril 1999, l'initiative populaire ,,pour plus de sécurité à l'intérieur des localités grâce à une vitesse maximale de 30 km/h assortie d'exceptions (Rues pour tous)" ne mentionnera plus la modification de l'art. 37bis, al. 3, ni celle de l'art. 24 des dispositions transitoires, mais celle de l'art. 82, al. 4, et celle de l'art. 197, ch. I, des dispositions transitoires, conformément à la systématique de la nouvelle Constitution.

Le texte de l'initiative doit aussi être adapté comme suit (conformément au ch. III de la nouvelle Constitution fédérale): ,,Dans l'année qui suit l'acceptation par le peuple et par les cantons de l'art. 82, al. 4, les autorités compétentes édictent les dispositions d'application nécessaires et ordonnent l'introduction des vitesses maximales à l'intérieur des localités."

1.2

Validité

1.2.1

Unité de la forme

En vertu des art. 139, al. 2 et 3, et 194, al. 3, Cst., une initiative portant sur une révision partielle de la Constitution fédérale n'est recevable que si elle est présentée sous la forme d'une proposition conçue en termes généraux ou sous celle d'un projet rédigé de toutes pièces. Les formes mixtes ne sont donc pas admises. La présente initiative revêt exclusivement la forme d'un projet rédigé de toutes pièces. L'unité de la forme est donc respectée.

1.2.2

Unité de la matière

L'unité de la matière (art. 139, al. 3, et art. 194, al. 2, Cst.) permet d'éviter qu'une initiative ne porte sur plusieurs objets, sans lien aucun entre eux sur le plan matériel.

Ce principe sert à garantir l'expression libre et authentique de la volonté populaire.

Dans ce cas-ci, l'objectif de l'initiative est précis: la vitesse maximale autorisée à l'intérieur des localités doit être limitée à 30 km/h, réserve faite des dérogations accordées par l'autorité compétente et dûment justifiées (en particulier pour les routes principales, pour autant que la sécurité des usagers et la protection des riverains, notamment contre le bruit, soient respectées). Le principe de l'unité de la matière est donc respecté.

1.2.3

Conformité avec le droit international public

Déjà sous l'ancienne Constitution, la compatibilité d'une initiative avec les règles impératives du droit international public (ius cogens) était, en vertu de la doctrine prédominante et de la pratique la plus récente de l'Assemblée fédérale, une condi2729

tion sine qua non de sa validité1. La nouvelle Constitution reconnaît désormais, à l'art. 193, al. 4, de la révision totale et à l'art. 194, al. 2, de la révision partielle, que des dispositions contraignantes des règles impératives du droit international public ne peuvent être touchées par une révision constitutionnelle (cf. aussi l'art. 139, al. 3, Cst.). S'agissant de la présente initiative, les règles impératives du droit international public ne seront manifestement pas touchées par l'introduction de la limitation générale de la vitesse à 30 km/h à l'intérieur des localités. Partant, à la lumière du droit international public, elle est aussi conforme.

1.2.4

Praticabilité

Chaque initiative est examinée sous l'angle de sa praticabilité de fait (FF 1997 I 453, 1998 210). Quand bien même cette initiative pourrait entraîner certaines difficultés, cela ne change rien à sa praticabilité de fait.

2

Contenu et interprétation de l'initiative

L'initiative exige l'introduction d'un nouvel article constitutionnel, en vertu duquel la vitesse maximale générale autorisée à l'intérieur des localités serait limitée à 30 km/h. L'autorité compétente pourrait accorder des dérogations dans les cas justifiés; elle pourrait en particulier relever la vitesse maximale sur les routes principales pour autant que la sécurité des usagers et la protection des riverains, notamment contre le bruit, soient respectées. Selon la disposition transitoire proposée dans l'initiative, les autorités compétentes devraient édicter les clauses d'application nécessaires dans l'année qui suivrait l'acceptation par le peuple et les cantons du nouvel article; simultanément, elles ordonneraient l'introduction des vitesses maximales à l'intérieur des localités.

Selon la première phrase du texte de l'initiative, qui prévoit l'inscription dans la Constitution d'une vitesse maximale générale de 30 km/h à l'intérieur des localités, il n'appartiendrait plus au Conseil fédéral mais au souverain (peuple et cantons) de fixer la vitesse maximale générale.

Les deuxième et troisième phrases donnent les bases constitutionnelles autorisant des dérogations, plus particulièrement le relèvement de la vitesse maximale sur les routes principales à certaines conditions. Il s'agit ici d'une compétence, permettant non pas de légiférer, mais de prendre des décisions, cas par cas. On en trouve la confirmation dans l'énoncé des dérogations; celles-ci ne pourraient être accordées que par l',,autorité compétente" et dans des ,,cas justifiés". Des dérogations à la vitesse maximale (telle la possibilité de relever cette vitesse sur les routes principales sous certaines conditions) ne pourraient être introduites de manière générale au niveau du droit fédéral, mais seulement à titre spécifique au plan cantonal, par les autorités cantonales habilitées à ordonner des restrictions locales du trafic. La nature juridique même de cette clause ­ même lorsqu'il s'agit de relever la vitesse sur les routes principales ­ fait qu'elle recoupe les normes de compétence définies aux art.

3, al. 2 et 4, et 32, al. 3, LCR, stipulant que les cantons, le cas échéant les communes, sont compétents pour édicter des réglementations locales du trafic.

1

FF 1994 II 1493 ss

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Les dérogations prévues à la deuxième phrase de l'initiative par rapport à la limitation maximale de la vitesse à 30 km/h ne devraient être possibles que dans des ,,cas justifiés". L'initiative ne règle pas de manière explicite ce qu'il faut comprendre par ce terme juridique imprécis. Par contre dans la troisième phrase, elle concrétise la chose sur la base d'un exemple qui donne clairement à penser qu'il s'agit en l'espèce d'exigences minimales: pour autant que la sécurité des usagers de la route et la protection des riverains, notamment contre le bruit, soient respectées, il serait possible de relever la vitesse maximale sur les routes principales. Selon les termes de l'initiative, la possibilité de relever la vitesse ne se limite pas exclusivement aux routes principales; cependant, si dans l'esprit et la finalité de l'initiative les exigences en matière de sécurité des usagers de la route et de protection des riverains devaient être cumulées notamment pour lutter contre le bruit, les exigences minimales sur une route d'intérêt local ne pouvant être parcourue qu'à vitesse réduite en raison de ses caractéristiques optiques et de son niveau d'aménagement (cf. ch. 4.3) ne pourraient jamais être satisfaites ou très rarement. Les mêmes considérations s'appliquent aux relèvements de la vitesse maximale sur les routes principales: ces routes répondant aux exigences du trafic motorisé ne représentent certes qu'une petite partie (10 à 20 % environ) de l'ensemble du réseau routier à l'intérieur des localités, mais elles accueillent la majeure partie du volume du trafic (env. 75 %); un niveau d'aménagement et un volume de trafic importants sont spécialement responsables du nombre de blessés et de tués que l'on déplore dans les localités (env.

55 %) et ils exposent les riverains à une forte atteinte sonore. Etant donné que le relèvement de la vitesse maximale de 30 à 50 km/h serait pratiquement toujours lié à une péjoration de la sécurité routière (cf. ch. 4.1, dernier alinéa) et de la situation acoustique (cf. ch. 4.2, al. 2), il n'existerait pas de ,,cas justifiés" au sens de l'initiative qui prévoit une telle mesure. Un ,,cas justifié" au sens de l'initiative pourrait se présenter uniquement sur les routes où à une vitesse de 50 km/h ni la sécurité routière ni les atteintes sonores n'ont posé de
problème. Dans ce cas-là, l'autorité cantonale pourrait être autorisée à relever la vitesse de 30 à 50 km/h.

L'initiative se fonde sur l'introduction généralisée du 30 km/h et ne tient pas suffisamment compte du niveau d'aménagement ni des caractéristiques optiques des routes. Attendu que l'exemple donné dans l'initiative d'un ,,cas justifié" doit être considéré comme une condition minimale pour relever la vitesse générale autorisée, il serait impossible, dans les localités, de relever la vitesse ce qui serait souvent utile sur la plupart des routes d'intérêt local, alors même qu'elles s'y prêteraient parfaitement au vu de leur niveau d'aménagement et de leurs caractéristiques optiques.

Selon les dispositions transitoires, il faudrait que dans l'année qui suivrait l'acceptation de l'initiative par le peuple et les cantons, les autorités compétentes édictent les dispositions d'application nécessaires et ordonnent l'introduction des vitesses maximales. Il appartiendrait au Conseil fédéral d'adapter au droit constitutionnel prépondérant les ordonnances suivantes: l'art. 4a, al. 1, let. a (limitation de la vitesse maximale générale à l'intérieur des localités) de l'ordonnance du 13 novembre 1962 sur les règles de la circulation routière (OCR; RS 741.11) et l'art. 108, al. 3 et 5, let.

d (motifs concernant de possibles relèvements et délimitations des gradations applicables pour les dérogations aux vitesses maximales générales) de l'ordonnance du 5 septembre 1979 sur la signalisation routière (OSR; RS 741.21).

2731

3

Partie spéciale

3.1

Droit en vigueur

En vertu de l'art. 82, al. 1, Cst., la Confédération légifère sur la circulation routière.

En exécution de l'art. 37bis de l'ancienne constitution, le Parlement avait adopté, le 15 mars 1932, la loi sur la circulation des véhicules automobiles et des cycles (LA; RS 7 595), puis le 19 décembre 1958 la loi sur la circulation routière (LCR; RS 741.01).

Si l'art. 25 LA ne fixait alors aucune vitesse maximale générale, il n'en autorisait pas moins le Conseil fédéral à édicter par voie d'ordonnance des prescriptions en la matière. Dans sa première version (RO 1959 679), l'art. 32 LCR fixait la vitesse maximale à 60 km/h dans les localités; il confiait aussi au Conseil fédéral la compétence d'édicter des prescriptions supplémentaires, notamment pour les routes réservées aux véhicules à moteur.

Par la suite, l'art. 32 LCR a été modifié à trois reprises: ­

le 20 mars 1975 (RO 1975 1257): Le Parlement a renoncé à inscrire luimême des limitations concrètes de la vitesse dans la loi; en revanche, il a obligé le Conseil fédéral à limiter la vitesse des véhicules motorisés sur toutes les routes. Sur la base d'une expertise, les cantons ont pu abaisser ou relever ces vitesses maximales sur certains tronçons, cette compétence étant réservée au Département fédéral de justice et police (DFJP) pour les routes nationales;

­

le 6 octobre 1989 (RO 1991 71): Le Conseil fédéral a été autorisé à prévoir des exceptions au principe selon lequel une expertise était nécessaire pour limiter la vitesse. Jusqu'à présent, il n'en a jamais fait usage;

­

le 22 mars 1991 (RO 1992 534): La compétence de définir des limitations locales de vitesse sur les routes nationales a été transférée aux cantons, sous réserve de l'approbation du département fédéral compétent.

Dans son message du 31 mars 1999 concernant la modification de la loi sur la circulation routière (FF 1999 4462), le Conseil fédéral a proposé de rétablir la situation légale prévalant avant le 22 mars 1991, c'est-à-dire de confier à nouveau à la Confédération la compétence d'ordonner des réglementations du trafic sur les routes nationales de première et deuxième classes. Suite à la réorganisation de l'administration fédérale et à la nouvelle répartition des tâches liées au trafic routier depuis le 1er janvier 1998, cette compétence incomberait toutefois, non plus au DFJP, mais au Département fédéral de l'environnement, des transports, de l'énergie et de la communication (DETEC).

3.2

Attribution des compétences pour fixer les limitations générales de vitesse

Lors des délibérations sur la révision partielle de la LCR en 1974 et 1975, le législateur avait décidé lui-même de modifier l'art. 32 LCR, abordant ainsi la question de savoir s'il fallait ou non inscrire des vitesses maximales générales dans la loi. Il avait alors décidé d'obliger le Conseil fédéral, par le biais de l'art. 32, al. 2, LCR, à limiter la vitesse des véhicules automobiles sur toutes les routes et à en fixer la limite.

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Mais pourquoi un tel règlement des compétences? D'emblée, il y avait eu un consensus de principe des Chambres fédérales sur le fait que plus rien ne justifiait des vitesses illimitées, ne serait-ce que sur les autoroutes. A l'époque, il fut donc convenu de prescrire, dans un premier temps et à titre d'essai, la vitesse maximale de 100 km/h sur les tronçons en dehors des localités et de 130 km/h sur les autoroutes.

Certes, on estimait alors que cette façon de faire était une solution trop rigide, vu que les limitations générales de vitesse dépendent de plusieurs facteurs qu'il s'agit de réexaminer continuellement. Pour des raisons similaires, tant le Conseil national que le Conseil des États avaient refusé quelques années plus tard des interventions qui exigeaient toutes que soient inscrites dans la loi sur la circulation routière les vitesses maximales générales (BO 1984 M 84.560, E 28.11.84; 1986 M 84.546, N 5.6.86; 1991 Ip. 89.250, N 21.3.91; 1992 I. P. 91.417, N 20.3.92; 1992 Ip. 91.422, N 20.3.92).

Du point de vue juridique, il faut surtout s'interroger sur la nécessité d'inscrire dans la Constitution, en les chiffrant, des limitations de vitesse. Rappelons d'emblée qu'en Suisse le droit constitutionnel fédéral réserve des droits de codécision au peuple, notamment au moyen du référendum et de l'initiative constitutionnelle; en revanche, l'initiative législative n'existe pas. L'initiative populaire permet donc de faire voter les citoyens sur des questions qui les interpellent. Cette remarque vaut aussi bien pour cette initiative que pour celle qui, en relation avec l'introduction de la vitesse 80/120, avait été déposée en 1985 sur le 100/130 km/h (FF 1985 I 787).

Car, les vitesses maximales générales concernent pratiquement toute la population.

A l'heure actuelle, on estime que la Constitution doit se limiter à fixer des objectifs, à attribuer des mandats et à présenter des programmes. L'art. 82 Cst. répond largement à cette conception, puisqu'il résume en une seule phrase, à l'al. 1, la compétence de la Confédération à légiférer sur la circulation routière. En demandant d'inscrire dans la Constitution une seule règle de circulation, à savoir la vitesse maximale générale à 30 km/h à l'intérieur des localités, la présente initiative viole donc ce principe. Par ailleurs, elle dissocierait à
nouveau la compétence de décider des vitesses maximales générales qui avait été unifiée lors de la révision de la LCR en 1975.

L'attribution des compétences en vigueur autorise le Conseil fédéral à fixer les vitesses maximales générales sur toutes les routes; globalement, il présente plus d'avantages que l'inscription, dans la Constitution, de limitations de vitesse quelconques. Même dans le message du 31 mars 1999 concernant la modification de la loi fédérale sur la circulation routière (cf. ch. 3.1), ce principe n'a pas a être fondamentalement remis en cause: seule la compétence d'ordonner des réglementations du trafic sur les routes nationales de 1re et 2e classes a été transférée des cantons à la Confédération (au DETEC).

3.3

Vitesses maximales générales à l'intérieur des localités et restrictions ponctuelles: bref historique

Jusqu'en 1959, la Suisse ne connaissait aucune vitesse maximale générale. Mais depuis, le Conseil fédéral a ordonné les restrictions suivantes à l'intérieur des localités:

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­

60 km/h: introduit le 1er juin 1959 par un arrêté du Conseil fédéral se référant à la LA (ACF du 8 mai 1959, RO 1959 463); en revanche, l'art. 32, al.

2, LCR ­ dans lequel les 60 km/h figurent depuis fin 1958 ­ n'est entré en vigueur que le 1er janvier 1963.

­

50 km/h: introduit dans un premier temps à titre d'essai et dans des localités sélectionnées le 1er juillet 1980 (ACF du 8 novembre 1978, RO 1978 1700; décision du Département fédéral de justice et police du 21 avril 1980, RO 1980 431); suite aux résultats concluants, introduit définitivement le 1er janvier 1984 (ordonnance du 19 octobre 1983, RO 1983 1651). Simultanément, on a décidé d'introduire les signaux ,,Vitesse maximale 50, Limite générale" (2.30.1) et ,,Fin de la vitesse maximale 50, Limite générale" (2.53.1).

Outre la vitesse maximale générale de 50 km/h, il existe d'autres limitations, basées sur l'art. 32, al. 3, LCR, sur certains tronçons, limitations ordonnées par les autorités cantonales compétentes, aussi bien sur des axes principaux que sur des routes secondaires, et signalées par le panneau ,,Vitesse maximale" (2.30).

A la faveur de la révision de l'OSR, le Conseil fédéral a introduit le 1er mai 1989 (ordonnance du 25 janvier 1989; RO 1989 438) à l'art. 2a OSR la signalisation par zones qui permettait d'imposer des prescriptions de comportement (30 ou 40 km/h) sur plusieurs routes secondaires à caractère homogène et situées dans un périmètre bien délimité, sans devoir recourir à un grand nombre de signaux comme auparavant (cf. ch. 3.4).

3.4

Expériences faites avec des zones 30 km/h en Suisse et à l'étranger

Pour l'instant, la vitesse maximale générale limitée à 30 km/h n'a été expérimentée dans aucune localité, car aucun pays européen ne connaît pareille réglementation (cf.

ch. 3.6). Quoiqu'en principe positives, les expériences faites ici ou à l'étranger, en dehors des localités, avec des zones 30 km/h correctement aménagées ne sauraient être simplement extrapolées à l'ensemble du réseau routier à l'intérieur des localités.

Suite à une recommandation émise en 1983 par la Conférence européenne des Ministres des transports (CEMT), la Suisse a introduit en 1989 ­ à l'instar de nombreux autres pays européens ­ la signalisation par zones (art. 2a OSR). On a répondu ainsi à un besoin en offrant la possibilité aux autorités compétentes de définir, sous certaines conditions, des réglementations du trafic (telles que des limitations de vitesse) à l'intérieur des localités sans devoir recourir à une multitude de signaux.

En lieu et place d'un système de signalisation complexe (répétition des signaux après chaque intersection), on disposait dorénavant d'une solution simple et avantageuse, créant pour ainsi dire les conditions de la création de zones de limitation des vitesses. La genèse de cette signalisation dans la CEMT, les nombreux essais allemands et néerlandais de zones 30 km/h, enfin les expériences faites dans les zones à vitesse limitée, créées ces dernières années tant en Suisse qu'à l'étranger, montrent que la signalisation par zones ne développe pleinement ses effets que sur des routes d'intérêt local présentant des caractéristiques similaires, mais qu'en revanche, elle est sans effet sur les routes affectées à la circulation générale, comme les routes principales signalisées comme telles, qui ont une autre fonction et qui doivent donc

2734

être aménagées en conséquence. Afin de mieux en saisir les subtilités, intéressonsnous brièvement à ces termes: ­

Routes affectées à la circulation générale (la fonction de circulation prime): elles forment le réseau principal et permettent des déplacements en respectant les critères de sécurité, de capacité et de rentabilité. Conçues pour répondre aux exigences du trafic motorisé, elles servent d'abord à maîtriser et faire transiter un volume de circulation important tout en reliant différents endroits. Elles comprennent toutes les routes principales ou secondaires ouvertes au transit. Pour les planifier, on recourt à des valeurs d'aménagement classiques et on conserve les profils géométriques (type, largeur, profil en travers et gabarit d'espace libre) sur le plus long tronçon possible.

­

Routes d'intérêt local (la fonction sociale prime): elles forment les réseaux annexes servant de raccordement à tous les usagers; elles peuvent aussi avoir une fonction collectrice. La densité du trafic y est plus faible (inférieure à 100­150 véhicules aux heures de pointe). De par leur apparence et leur aménagement, ces routes imposent des vitesses moindres. Pour les planifier, on peut utiliser des valeurs d'aménagement réduites. Le cas échéant, on recourt à des mesures d'accompagnement pour modérer le trafic. En raison de leur aménagement, l'usager devrait en reconnaître le caractère local.

Personne, ni en Suisse ni à l'étranger ne conteste le fait qu'on a limité la signalisation par zones aux routes d'intérêt local. En effet, vu que les routes principales ou secondaires ouvertes au trafic ont une autre fonction que les routes d'intérêt local et qu'elles sont donc aménagées en conséquence, le conducteur serait désorienté si les mesures propres à la signalisation par zones portaient sur tout le réseau routier d'une localité, donc sur des routes de catégories différentes. Certes, il faut parfois réduire la vitesse sur des routes principales ou secondaires, pour des questions de sécurité, mais de telles mesures ponctuelles sont alors signalées au moyen du panneau ,,Vitesse maximale" (2.30), dont la validité s'étend jusqu'à la prochaine intersection, à moins qu'il ne soit répété.

En vertu de l'art. 2a OSR et des instructions départementales du 3 avril 1989 sur la signalisation par zones, quelque 700 zones 30 km/h ont été réalisées ou planifiées dans notre pays. Selon deux études effectuées en 1992 et 1997 par l'Institut de planification, de technique des transports et construction de routes et chemins de fer (IVT) de l'EPFZ, les autorités chargées de la mise en application estiment que les mesures d'accompagnement prévues par les instructions (construction et technique du trafic) sont pertinentes. On ne peut toutefois nier que les six normes publiées en 1985 par l'Union des professionnels suisses de la route (VSS) ­ et aujourd'hui encore utilisables ­ et qui fixent la géométrie de plusieurs mesures de modération du trafic (rétrécissements, décrochements horizontaux ou verticaux) pour aider notamment à faire respecter les limitations indiquées sont en partie coûteuses. Pour l'heure, la VSS élabore de nouvelles normes de modération du trafic: cette version comprenant trois normes ne préconisera le recours à des éléments de modération supplémentaires (et généralement coûteux) que là où des aménagements plus simples n'ont pas suffi. Quant au rapport de l'Office fédéral de l'environnement, des forêts et du paysage (OFEFP) paru en 1998 et intitulé ,,Limitation à 30 km/h dans la pratique. Expériences et recommandations" (Documents environnement No 99), il arrive aux mêmes conclusions. Ces instructions de 1989 seront prochainement analysées et développées par le DETEC. En outre, un examen général du régime des zones à l'intérieur des localités s'avère nécessaire.

2735

En résumé, on constatera que la seule façon d'assurer suffisamment la sécurité dans les zones à 30 km/ sur un réseau routier d'intérêt local est de prendre des mesures d'accompagnement. Autrement, il devient difficile voire impossible d'atteindre l'objectif de toute modération du trafic, à savoir augmenter la sécurité routière et le bien-être des riverains. Tout comme il est illusoire de vouloir abaisser la vitesse en se bornant à introduire une règle de circulation.

3.5

Interventions parlementaires en faveur de la vitesse à 30 km/h

Jusqu'à présent, il n'y a eu aucune intervention visant à limiter globalement la vitesse à l'intérieur des localités, exception faite de la pétition déposée le 21 avril 1988 par le Groupe écologiste et qui demandait l'introduction du 30 km/h de manière générale.

Certes, dans une motion du 18 juin 1986, le groupe AdI/PEP avait chargé le Conseil fédéral de limiter la vitesse maximale des véhicules motorisés à 30 km/h dans les quartiers d'habitation, ceci pour plus de commodité et de sécurité. Toutefois, cette motion n'avait pas eu le succès escompté. Dans un postulat daté du 9 octobre 1987, ce même groupe avait demandé au Conseil fédéral d'introduire et de fixer de manière définitive des limitations de vitesse: 100 km/h sur les autoroutes, 80 km/h en dehors des localités, 50 km/h dans ces dernières et 30 km/h pour les rues desservant des quartiers d'habitation. Le Conseil fédéral avait proposé le rejet de ce postulat; ce dernier n'ayant pas été traité, il a été classé en octobre 1989.

Dans un postulat daté du 9 mars 1988, le conseiller national Lanz avait prié le Conseil fédéral d'introduire la signalisation par zones, de manière à réaliser des essais d'envergure avec le 30 km/h dans des quartiers d'habitation. De même, dans une question ordinaire du 29 février 1988, la conseillère nationale LeuteneggerOberholzer avait posé plusieurs questions au Conseil fédéral en relation avec les essais de zone 30 km/h prévus dans certaines localités; l'interpellation du conseiller national Wiederkehr, déposée le 7 octobre 1988 abondait dans ce sens, s'interrogeant sur la réalisation d'essais généralisés à 30 km/h dans les quartiers d'habitation. A chaque fois, le Conseil fédéral avait fait part de son intention de créer les bases légales de la signalisation par zones tout en évitant une abondance de signaux, lorsqu'il modifierait l'ordonnance sur la signalisation routière, ce qu'il fit en 1989.

Citons encore la question ordinaire du conseiller national Bircher datant du 31 janvier 1989 et portant sur la campagne d'information précédant l'introduction de la signalisation par zones et sur le contenu des instructions en la matière.

Enfin, dans un postulat daté du 7 juin 1990, la conseillère nationale Haering Binder avait invité le Conseil fédéral à réviser les dispositions concernant l'étendue maximale des zones
30 km/h, compte tenu des exigences spécifiques des villes. Ce postulat avait été partiellement accepté; toutefois nous avions fait remarquer qu'il n'était pas exclu que nous devions adapter ultérieurement les instructions, en fonction des expériences faites.

2736

3.6

Relation avec le droit européen et comparaison avec les Etats-Unis

Dans la législation de l'Union européenne, il n'existe aucune prescription régissant les limitations de vitesse.

Lorsqu'on examine les vitesses maximales générales autorisées dans les localités de 38 pays européens, on obtient une image plutôt hétérogène: 13 pays on fixé la limite à 60 km/h, 22 à 50 km/h, l'Irlande et la Grande-Bretagne à 48 km/h (30 M/h), l'Albanie enfin à 40 km/h. Seule l'Autriche dispose depuis 1994 de bases juridiques (par. 20, al. 2a de la ,,Strassenverkehrsordnung") lui permettant d'imposer une vitesse maximale plus basse que la normale à tout le périmètre d'une localité. Ainsi, depuis septembre 1992, la ville de Graz fait un essai avec le 30 km/h dans toutes ses rues, à l'exception de celles qui sont signalisées comme des routes principales (cf.

ch. 4.3). En revanche, ni dans les pays européens ni au niveau communautaire, il n'existe de tentatives d'imposer le 30 km/h de manière généralisée dans les localités.

Quant à l'introduction du 30 km/h demandée depuis 1988 par la Conférence permanente des municipalités allemandes, elle se limite aux routes autres que les routes principales. Enfin, à la faveur d'un programme cadre lancé en 1997, les Pays-Bas ont fait part de leur volonté de réduire nettement le nombre des victimes de la route.

Ils prévoient notamment d'étendre les zones 30; celles-ci comprenant actuellement 15 % du réseau routier à l'intérieur des localités, l'idéal serait qu'elles atteignent 50 % dudit réseau, tandis qu'on pourrait rouler plus vite sur les routes ouvertes au transit.

Les Etats-Unis ne connaissent pas de vitesse maximale générale; certains Etats de l'Union exigent simplement des conducteurs qu'ils adaptent leur conduite aux conditions, d'autres ont fixé des vitesses maximales à 25 ou 30 miles/h (soit 40 km/h ou 48 km/h). A proximité des centres commerciaux, des quartiers d'habitation, des écoles et des places de jeux, la vitesse peut être limitée entre 15 et 25 miles/h (soit entre 24 km/h et 40 km/h). Certes, dans ce paradis de la voiture qu'est l'Amérique, les limitations de vitesse sont généralement très bien respectées, du fait notamment qu'il y existe une ,,culture de la conduite" depuis des décennies, culture qu'il serait difficile d'introduire rapidement sur le Vieux Continent, ne serait-ce qu'en raison des différences bien marquées en matière de comportement sur la route des usagers européens.

4

Appréciation quant au fond

4.1

Sécurité routière

Malgré le fort accroissement du parc des véhicules automobiles, qui a augmenté de 250 % entre 1970 et 1998, (pour se fixer à 4 349 173 unités), et tandis que le trafic a presque doublé, le nombre des accidents a lui évolué positivement sur les routes de Suisse: ­

Nombre d'accidents: + 4,3 % environ,

­

Nombre de blessés: - 25 % environ,

­

Nombre de tués: - 65 % environ.

2737

Cette évolution réjouissante est due à plusieurs facteurs: aux aménagements (p. ex. à l'assainissement des points noirs, ä la création de zones à trafic modéré), aux améliorations apportées dans la construction des véhicules (tenue de route, airbags, zones de déformation, pneus) et aux services de secours, enfin aux mesures ayant une influence favorable sur le comportement et la sécurité des usagers de la route (éducation routière, formation des conducteurs, ceinture et casque obligatoires, limitations générales ou locales de la vitesse), sans oublier le comportement de chacun.

En 1959, alors qu'il n'y avait aucune limitation générale des vitesses, on avait recensé 21 500 personnes blessées et 588 autres, tuées à l'intérieur des localités. Lancés à titre expérimental en 1978, les 50 km/h ont été introduits à titre définitif le 1er juillet 1984, avec une nette différenciation des routes permettant les 60 km/h. En 1983 le nombre des blessés à l'intérieur des localités s'était élevé à 20 417, tandis que celui des tués avait été de 513. En 1984, ces chiffres étaient passés à 19 100 blessés et à 446 tués, tandis qu'en 1989, ils s'étaient établis à 18 419 blessés et à 357 tués; en 1998, on avait encore déploré 16 848 blessés et 222 tués à l'intérieur des localités, alors que 55 % des accidents avaient lieu sur les routes principales et 45 % sur le réseau secondaire (cf. graphiques des pages suivantes).

Ces graphiques montrent qu'il faut poursuivre les efforts entrepris pour améliorer la sécurité routière, de manière à répondre aux objectifs définis à long terme par la Confédération.

Parc des véhicules à moteur Source: OFS

5.0 Mio 4.5 Mio 4.0 Mio 3.5 Mio 3.0 Mio 2.5 Mio 2.0 Mio 1.5 Mio 1.0 Mio .5 Mio .0 Mio

2738

Accidents à l'intérieur des localités Sources: OFS et bpa

Total sur rtes principales

70'000 60'000 50'000 40'000 30'000 20'000 10'000 -

Avant 1975, on ne faisait pas la distinction entre les accidents survenus sur les routes principales et les accidents survenus sur les routes secondaires.

Personnes blessées à l'intérieur des localités Sources: OFS et bpa

Total sur rtes principales piétons cyclistes

30'000 25'000 20'000 15'000 10'000 5'000 -

2739

Total

Personnes tuées à l'intérieur des localités Sources: OFS et bpa

sur les rtes principales piétons cyclistes

800 700 600 500 400 300 200 100 -

Les études menées en Suisse et à l'étranger montrent que, couplées à d'autres facteurs, les limitations générales de vitesse diminuent sensiblement le nombre d'accidents. D'une part, elles réduisent les écarts entre les vitesses et engendrent une homogénéisation du flux du trafic; de l'autre, elles abaissent le niveau de la vitesse, raccourcissant aussi les distances de freinage et les vitesses de collision. Ainsi, dans des conditions moyennes, la distance de freinage diminue de moitié entre 50 km/h et 30 km/h, tandis que la gravité des dommages causés tant aux personnes qu'aux objets baisse considérablement. Selon des études, un piéton, renversé à 50 km/h, a 85 % de risque de décéder, ce risque tombant à 10 % s'il est renversé par un véhicule roulant à 30 km/h.

4.2

Atteintes à l'environnement

On ne peut répondre d'une manière généralisée à la question de savoir s'il est possible de réduire les polluants atmosphériques en roulant à 30 km/h, car les effets dépendent de façon déterminante des conditions locales. C'est la raison pour laquelle les résultats des études de cas réalisées en Suisse et à l'étranger divergent les uns des autres: certaines études indiquent une nette diminution des émissions, alors que d'autres arrivent à des conclusions inverses. La seule certitude, selon les conclusions basées sur l'état actuel de la technique, est que la vitesse à 30 km/h atténue les émissions de substances nocives et qu'elle calme le conducteur, ce qui permet d'obtenir une fluidité du trafic plus homogène. Telles sont en substance également les conclusions des mesures effectuées par le Touring Club Suisse (TCS) entre 1993 et 1995, lors d'essais de type de conduite défensive.

S'agissant du bruit, on remarquera que le ralentissement du trafic permet, pour autant qu'il soit lié à un mode de conduite plus régulier, de diminuer le niveau du bruit ambiant.

2740

4.3

Taux d'observation et applicabilité de la vitesse à 30 km/h

En 1993, le groupe d'experts ,,Sécurité routière" du DETEC a publié, à l'intention du Conseil fédéral, un rapport intitulé ,,Sécurité routière ­ Stratégies et mesures pour les années 90"; il y constate que l'abaissement de 120 à 80 km/h des vitesses maximales générales, voire à 50 km/h à l'intérieur des localités, a globalement atteint le seuil de ce qui était généralement considéré comme tolérable, que par conséquent des vitesses plus basses ne seraient guère acceptées et que leur efficacité potentielle serait donc très faible, voire nulle. Ces experts ont mis au point 20 stratégies et mesures en vue d'augmenter la sécurité routière. Concernant les infrastructures et la route, ils ont montré que souvent les caractéristiques optiques ne correspondaient pas à l'usage qui en était fait, qu'il fallait donc aménager les routes de manière à assurer la sécurité de chacun, compte tenu des prescriptions légales, mais surtout, qu'il s'agissait d'adapter ces caractéristiques au comportement des différents usagers. Le Conseil fédéral est, aujourd'hui encore, persuadé du bien-fondé de ces considérations.

Des études de l'EPF de Zurich et du Bureau suisse de prévention des accidents (bpa) montrent que, pour évaluer l'utilité d'une zone 30 km/h, analyser la quantité et le type de trafic ainsi que le niveau de vitesse existant est tout aussi important que d'analyser l'évolution du nombre des accidents. On déterminera ce niveau en se référant à la vitesse atteinte ou non par 85 % des véhicules (la fameuse valeur v85 %). Si cette valeur se situe à 35 km/h, une simple signalisation permettra d'amener les conducteurs à respecter la limitation. Si elle se situe entre 35 km/h et 43 km/h, on pourra intervenir par des mesures de modération du trafic (constructions ou technique du trafic) afin d'atteindre l'objectif souhaité. Enfin, si cette valeur est supérieure à 43 km/h, il ne faudra guère espérer voir les 30 km/h acceptés; dans pareil cas, une réflexion sur la planification du trafic ou le réaménagement complet de la route s'imposera.

Partout, les études menées sur les zones 30 montrent qu'en abaissant la vitesse maximale à 30 km/h, la vitesse moyenne effective ne baisse que de 1 à 2 km/h (effet normatif, c'est-à-dire dû à la seule signalisation) et de 4 à 5 km/h (avec des aménagements), ceci indépendamment des
vitesses autorisées auparavant. Des mesures de modération complémentaires (constructions ou technique du trafic) sont donc le moyen idéal d'atteindre l'effet souhaité, à savoir réduire la vitesse du trafic automobile, plus spécifiquement le nombre d'accidents. Certes, il faut veiller à ce que ces mesures ne se répercutent pas sur l'écoulement du trafic (plus de bruit et de pollution due aux gaz d'échappement), ni sur le confort des conducteurs et sur la sécurité des piétons et des cyclistes.

L'essai tenté à Graz depuis 1992, au cours duquel on a limité, sans mesure d'aménagement, la vitesse à 50 km/h sur les routes principales et à 30 km/h sur les autres routes, confirme sur le fond les considérations énoncées ci-dessus et montre à l'évidence que l'homogénéité de la vitesse s'est certes améliorée, mais que la valeur v-85 % n'est descendue dans la zone limitée à 30 km/h qu'à 45 km/h (contre 47 km/h précédemment) et qu'à 54 km/h (contre 55 km/h précédemment) dans la zone limitée à 50 km/h. Il montre encore que le nombre d'accidents où des personnes ont été blessées est à nouveau en augmentation depuis 1997, après une évolution favo-

2741

rable précédemment2. En Allemagne, l'Office fédéral de la circulation routière (bast) a réalisé durant l'année 1999 des études sur les effets résultant de diverses vitesses maximales à l'intérieur des localités, études qui ont clairement démontré que la diminution de la vitesse maximale de 50 à 30 km/h sur les routes principales, sans mesures d'aménagement supplémentaires, n'apportait pratiquement aucun effet positif sur la sécurité routière et l'environnement.

Du point de vue juridique, rien en principe ne s'oppose à l'introduction d'une limitation de la vitesse, même sans mesures d'accompagnement. Cependant, comme l'expérience nous l'enseigne, les limitations générales ou locales de vitesse sont inobservées lorsque l'aménagement ou les caractéristiques optiques de la route ne concordent pas avec la mesure introduite; et recourir aux seuls contrôles de police ne permet quasiment pas d'imposer la limitation de vitesse dans les localités. En outre, il ressort clairement des études réalisées que les limitations de vitesse basses sont plus souvent dépassées que les limitations élevées. Finalement, seule la conjonction des mesures mentionnées au ch. 3.4 permet d'atteindre un bon degré d'observation des mesures de limitation et une réelle amélioration de la sécurité.

L'argument fréquemment avancé selon lequel il avait été possible d'introduire les vitesses générales de 80 km/h à l'extérieur des localités et de 50 km/h à l'intérieur sans mesures d'accompagnement ne tient pas. En effet, alors que l'aspect et le niveau d'aménagement du réseau routier hors localités étaient plutôt uniformes, le passage de 60 à 50 km/h (soit une réduction de 17 %) concernait principalement les routes affectées à la circulation générale à l'intérieur des localités; il ne s'agissait nullement d'une mesure incisive, imposant aux usagers d'adopter un mode de conduite tout différent, comme cela aurait été le cas en passant du 50 au 30 km/h, passage qui représente une réduction de 40 %.

Il ressort de tout cela qu'à force de vouloir introduire une vitesse de 30 km/h sans mesures d'accompagnement ou avec des mesures inappropriées, il devient difficile voire impossible de répondre pleinement à l'objectif de la modération du trafic, à savoir augmenter la sécurité routière et le bien-être des riverains. Tout comme il est illusoire
de vouloir abaisser la vitesse en se bornant à introduire une règle de circulation.

L'expérience montre que la crédibilité de la mesure en particulier et de la signalisation en général est amoindrie lorsqu'on ne peut pas faire appliquer les règlements, ou alors de manière incomplète. Nous donnerons deux exemples: les conducteurs qui circulent en moyenne bien au-delà de 100 km/h sur des tronçons d'autoroutes limités à 80 contreviennent à la réglementation, amenés qu'ils sont à rouler ainsi par les caractéristiques optiques et le haut degré d'aménagement de la route; les rares contrôles de vitesse n'ont aucun effet dissuasif. De même, bon nombre de cyclistes et de piétons ne respectent pas les règles de circulation ni les signaux, car ils ne sont pratiquement jamais sanctionnés.

2

Rapport du bast ,,Auswirkungen unterschiedlicher zulässiger Höchstgeschwindigkeiten auf städtischen Verkehrsstrassen" (Sous-série ,,Verkehrstechnik", Cahier V65, Avril 1999).

2742

4.4

Conséquences sur le trafic routier

Compte tenu du fait que l'initiative vise à introduire à large échelle les 30 km/h et qu'elle ne tient pas assez compte du niveau d'aménagement ni des caractéristiques optiques des routes (cf. ch. 2), on peut craindre une baisse de l'effet de canalisation également sur les routes affectées à la circulation générale et qu'un certain déplacement ne se produise; pour des questions de rentabilité, le trafic professionnel emprunterait davantage des raccourcis à travers les quartiers, ce qui serait néfaste pour la sécurité routière, le bien-être des riverains et l'environnement.

Le 30 km/h sur des routes affectées à la circulation générale pourrait avoir de fâcheuses conséquences pour les transports publics qui les empruntent en priorité. Les mesures d'accompagnement pourraient ralentir le flux de circulation, portant simultanément atteinte au confort des passagers et à l'attractivité de tels moyens de transport. En outre, pour maîtriser le flot de voyageurs et promouvoir les transports publics, on autorise à l'heure actuelle la circulation de bus ou d'autobus articulés d'une longueur comprise entre 15 et 25 m; étant donné les aménagements conçus pour faire respecter les 30 km/h, il serait difficile d'utiliser ces véhicules qu'il faudrait alors remplacer par de plus petits. Ce qui finalement serait contre-productif, tant pour la protection de l'environnement que du point de vue économique.

Des mesures d'accompagnement qui seraient mal conçues pourraient en outre gêner les piétons et les cyclistes et les exposer à des dangers supplémentaires.

Quant aux transports exceptionnels dont les dimensions ne correspondent pas aux prescriptions sur les poids et les dimensions (servant p. ex. au transport d'éléments de construction préfabriqués), ils seraient aussi rendus difficiles, pour ne pas dire impossibles par les mesures prises sur le réseau des routes affectées à la circulation générale.

Enfin, ces mesures d'aménagement pourraient avoir des conséquences indésirables sur ces routes, en cas d'urgence, pour les services du feu, les services sanitaires et la police, tout comme elles limiteraient par trop l'accès à ces routes aux véhicules des services publics.

4.5

Conséquences économiques

Pour atteindre l'objectif voulu par l'initiative, il faudrait instaurer de manière systématique les 30 km/h. Cela nécessiterait notamment une série d'interventions en matière de construction et de technique de circulation sur le réseau des routes affectées à la circulation générale. Pour aménager l'espace routier public à l'intérieur des localités en vue d'améliorer la sécurité routière, il faudrait compter avec des coûts de l'ordre de 2 milliards de francs. Dès lors, les coûts des accidents, qui représentent quelque 1,7 milliard de francs par année, pourraient être réduits d'au moins 200 millions de francs. Les communes ne devraient guère être en mesure de financer ces infrastructures. Et sans mesures d'accompagnement, les transformations positives visant à améliorer la sécurité routière et à diminuer les atteintes à l'environnement seraient irréalisables.

Le respect strict de la vitesse à 30 km/h augmenterait le temps de parcours des véhicules motorisés, notamment sur les routes qui leur sont dévolues, avec indubitablement comme corollaire des pertes de temps, financièrement chiffrables. Lors du

2743

calcul des coûts relatifs au temps de parcours, lequel se compose des kilomètres effectués par le véhicule, de sa vitesse et des taux appliqués, soit 15 francs de l'heure pour une voiture automobile et environ 60 francs de l'heure pour un camion, force est de constater que le temps de parcours augmenterait proportionnellement à la diminution de la vitesse moyenne. Pour le simple citoyen, de tels coûts sont faibles, mais pour l'économie, ils sont loin d'être insignifiants (cf. les ,,Empfehlungen für Wirtschaftlichkeitsuntersuchungen an Strassen", recommandations édictées en Allemagne par la Société pour la recherche en matière de routes et de transports [Cologne 1997], le rapport de recherche ,,Coûts-efficacité des mesures environnementales dans le trafic routier" de l'Association suisse des ingénieurs en transports [Zurich 1998] ainsi que le rapport ,,Staukosten im Strassenverkehr" (avec résumé en français) de l'Office fédéral des routes [Berne 1998].

5

Appréciation de l'initiative

5.1

Généralités

Saluons les objectifs visés par l'initiative, à savoir renforcer la sécurité routière dans les localités et réduire les atteintes à l'environnement, de manière à améliorer la qualité de vie des habitants. Il ne fait aucun doute que des vitesses réduites exercent une influence positive sur le nombre et les caractéristiques des accidents ­ et si la personne au volant est plus calme et le flux du trafic plus homogène ­ qu'il en résulte une diminution du rejet des émanations de substances nocives, de la consommation de carburant et des nuisances sonores. De telles améliorations ne seront toutefois réalisables que si les mesures de limitation de vitesse sont respectées. Or, on sait de manière générale que la seule introduction d'une règle de circulation et d'une signalisation ­ comme cela serait le cas si l'initiative était acceptée ­ ne permettrait pas de réduire la vitesse en conséquence et que sans mesures de modération du trafic (constructions ou technique du trafic), les effets recherchés ne pourraient pas ou du moins pas entièrement être obtenus. L'initiative vise à introduire à large échelle les 30 km/h, mais elle ne tient pas assez compte du niveau d'aménagement, ni des caractéristiques optiques des routes; il est vrai qu'elle prévoit que l'autorité cantonale compétente puisse accorder des dérogations dans des cas justifiés; l'exemple d'un ,,cas justifié" cité dans le texte de l'initiative, selon lequel la vitesse maximale ne pourrait être augmentée sur les routes principales que si la sécurité des usagers de la route et la protection des riverains, notamment contre le bruit, était respectée, indique clairement que même sur une route principale largement aménagée il ne serait plus guère possible de relever la vitesse à 50 km/h, étant donné que cette augmentation, comme on le sait, aurait notamment des répercussions négatives sur le nombre des accidents et par conséquent sur la sécurité des usagers de la route.

Il serait excessif d'imposer les 30 km/h de manière généralisée sur l'ensemble du réseau des routes à l'intérieur des localités, étant donné la nature hétérogène de ce réseau, qui provient de l'aménagement et des caractéristiques optiques des routes.

L'expérience nous montre que la mesure visant à limiter la vitesse est mal observée sur les routes où l'aménagement et les caractéristiques
optiques ne correspondent pas à la restriction ordonnée; que par ailleurs, les contrôles de police à eux seuls n'ayant pas amélioré la situation ou alors accessoirement, il n'a finalement pas été possible de garantir aux citoyens une meilleure protection de leur vie et de leur intégrité corporelle. Avec l'introduction généralisée des 30 km/h, les autorités cantonales et communales chargées du financement n'auraient plus la même latitude de 2744

fixer, avec l'appui de la population, les priorités lors de la construction et du réaménagement, voire de définir l'agencement des mesures d'accompagnement afin de tenir compte de manière optimale de la sécurité routière, de la protection de l'environnement et du bien-être des riverains. En outre, il n'y a aucune raison de scinder en deux la compétence unique, instaurée en 1975, d'ordonner les vitesses maximales générales et de transférer au peuple et aux cantons la compétence du Conseil fédéral à qui il revient de fixer la vitesse maximale à l'intérieur des localités.

De son côté, le Conseil fédéral a examiné deux variantes tenant compte des exigences de l'initiative et lui permettant d'ordonner des limitations de vitesse ­ p. ex.

aussi l'introduction de la vitesse généralisée à 30 km/h: ­

En fixant la vitesse maximale à 50 km/h sur les routes affectées à la circulation générale et à 30 km/h sur celles d'intérêt local, on introduirait à l'intérieur des localités deux vitesses maximales générales, qui devraient être signalées au moyen d'une multitude de signaux. La faible amélioration en matière de sécurité routière que l'on pourrait en attendre par rapport à la réglementation actuelle risquerait d'entraîner des controverses quant au classement d'une route dans une catégorie ou dans l'autre; finalement la décision tomberait après de longues et coûteuses procédures de recours. En outre, étant donné que la limitation de la vitesse relève exclusivement de la compétence des cantons, la Confédération n'aurait pas la possibilité de s'imposer lorsqu'elle ordonnerait des mesures d'accompagnement qui, sur les routes d'intérêt local, sont souvent les seules à avoir un effet limitatif sur les vitesses.

­

En introduisant la vitesse maximale générale à 30 km/h accompagnée de dérogations sur les routes principales, on pourrait simplifier la signalisation par rapport à la première variante et éviter de longues et coûteuses procédures de recours quant au classement d'une route dans une catégorie ou dans l'autre.

En revanche, les routes non signalées comme des routes principales passeraient sous le régime des 30 km/h, alors que leurs caractéristiques optiques et leur niveau d'aménagement ne correspondraient nullement à cette mesure.

Tout comme pour la première variante, la Confédération n'aurait sur ces routes pas plus que sur celles d'intérêt local la possibilité de s'imposer lorsqu'elle ordonnerait des mesures d'accompagnement.

Dans les deux variantes, l'inobservation de la prescription par les usagers de la route motorisés (voir ch. 4.3) n'apporterait aucune amélioration réelle en matière de sécurité du trafic, mais donnerait aux piétons un faux sentiment de sécurité et ferait que la police aurait les plus grandes difficultés à faire appliquer des règles mal voire totalement inobservées.

Pour les raisons mentionnées, le Conseil fédéral a ­ bien que depuis des années il ait la possibilité sur la base de la LCR d'édicter des limitations générales de vitesse ­ renoncé à remplacer la vitesse maximale générale de 50 km/h par celle de 30 km/h, ainsi qu'à introduire une des variantes examinées en modifiant les ordonnances d'application de la LCR. Il envisage plutôt d'autres voies pour accroître la sécurité et le bien-être des citoyens (cf. ch. 5.3).

Pour toutes ces raisons, le Conseil fédéral est d'avis que l'initiative n'est pas l'instrument approprié pour atteindre un objectif en soi louable.

2745

5.2

Contre-projet

Le Conseil fédéral vient d'exposer les raisons qui lui font rejeter l'inscription dans la Constitution de la limitation de la vitesse à 30 km/h exigée par les auteurs de l'initiative, et ce, malgré les possibilités d'y déroger dans des cas justifiés, mais il a aussi fait part de sa volonté de soutenir l'instauration de nouvelles zones 30 km/h et d'autres zones à trafic modéré.

Selon l'art. 139, al. 5, Cst., l'Assemblée fédérale peut élaborer un contre-projet et le soumettre au vote du peuple et des cantons en même temps que l'initiative. Un tel contre-projet doit porter sur la même matière constitutionnelle que celle que l'initiative vise à régler (art. 27, al. 3, LREC). Si l'Assemblée fédérale n'oppose pas au texte de l'initiative son propre contre-projet constitutionnel, mais propose de modifier une loi en vigueur ou d'en élaborer une nouvelle, on parle de contre-projet indirect.

Le Conseil fédéral a examiné l'opportunité d'opposer un contre-projet à l'initiative.

La solution esquissée dans le présent message, solution qui vise à favoriser la création de zones à vitesse limitée et d'autres zones à trafic modéré, peut être obtenue au moyen des instructions; il est en effet prévu de réviser les instructions départementales concernant la signalisation de réglementations du trafic par zones pour adapter et simplifier la forme des mesures qui accompagnent la signalisation d'une vitesse peu élevée.

Une autre solution consiste à modifier l'art. 86, al. 3, let. g, Cst., et la loi fédérale concernant l'utilisation de l'impôt sur les huiles minérales à affectation obligatoire (LUMin; RS 725.116.2) et d'affecter également à l'aménagement de l'espace routier les contributions fédérales générales en faveur des routes, en vue d'accroître la sécurité routière. Le Conseil fédéral ne veut toutefois pas mettre cette proposition en discussion sous la forme d'un contre-projet, il entend plutôt la mentionner dans son message concernant la nouvelle péréquation financière (NPF). Les cantons pourront ainsi disposer d'un instrument qui leur permettra, grâce aux moyens dégagés, de financer leurs besoins prioritaires en fonction des tâches et des dépenses qui leur incombent dans le domaine de la circulation routière.

Vu ce qui précède, il y a donc lieu de renoncer à présenter un contre-projet.

5.3

Position du Conseil fédéral concernant l'évolution des limitations de vitesse et autres mesures de modération du trafic dans les localités

Se fondant sur les arguments développés au ch. 5.1, le Conseil fédéral estime qu'il est judicieux de poursuivre dans la voie dans laquelle il s'est maintenant engagé, à savoir: maintenir la limitation générale de la vitesse à 50 km/h tout en favorisant la création de zones 30 km/h et d'autres zones à trafic modéré sur le réseau routier situé à l'intérieur des localités. De cette manière, les autorités cantonales et communales chargées du financement conserveront la possibilité de fixer, avec le concours de la population, les priorités pour réduire le profil de certaines routes ou les réaménager, ou encore pour ordonner des mesures d'accompagnement afin de tenir compte de façon optimale des revendications touchant la sécurité routière et la protection de l'environnement, ainsi que le bien-être des riverains.

2746

De nos jours, la création de zones 30 km/h se heurte souvent aux capacités financières insuffisantes des communes. L'octroi de contributions permettant la création de zones 30 km/h est pourtant déjà largement possible, vu que les cantons peuvent en utilisant les contributions générales existantes sans affectation obligatoire qu'ils reçoivent conformément à l'art. 86, al. 3, let. e, Cst., participer au financement de l'aménagement de l'espace routier public en vue d'y accroître la sécurité routière.

Dans le message sur la NPF on a expressément prévu de compléter la réglementation en vigueur énoncée dans la LUMin, s'agissant de l'utilisation des contributions générales allouées aux cantons, de manière à pouvoir aussi couvrir les dépenses consenties pour réaménager l'espace routier dans les localités en vue d'y accroître la sécurité routière.

En outre, dans son message relatif à l'initiative pour la réduction du trafic (FF 1998 269), le Conseil fédéral a choisi de poursuivre dans la voie qu'il a suivie jusqu'à présent et s'est prononcé notamment en faveur des mesures suivantes pour améliorer la situation dans le domaine de la circulation routière: 1. Révision des instructions du 3 avril 1989 concernant la réglementation du trafic par zones Il a prévu de réviser les instructions départementales, en se fixant les objectifs suivants: ­

Accroître la sécurité routière

­

Simplifier la procédure sans porter atteinte à l'uniformité des caractéristiques optiques ni aux normes de construction du réseau routier

­

Instaurer des formes nouvelles de mesures d'accompagnement en matière de construction et de technique du trafic (p. ex. des seuils de ralentissement à moindre coût, des nouveaux éléments de marquage contribuant à la modération du trafic)

­

Adapter ces instructions aux nouvelles normes de l'Association des professionnels suisses de la route (VSS) intitulées ,,Conception de l'espace routier" (aménagement de l'espace routier et modération du trafic).

2. Révision générale de la répartition des zones sur le réseau routier situé à l'intérieur des localités et transformation des aires de circulation en vue d'y modérer le trafic Ayant accepté un postulat du conseiller national Weyeneth (98.3348), le Conseil fédéral entend créer les conditions légales nécessaires de l'aménagement, à un coût raisonnable, notamment dans certains quartiers commerçants, de zones à trafic modéré où les piétons auraient la priorité. Les résultats des essais menés actuellement à Berthoud et à Saint-Blaise permettront de vérifier, puis d'adapter les dispositions pertinentes du droit fédéral; en raison de l'évolution des connaissances en matière de sécurité routière, les instructions départementales de 1984 sur les rues résidentielles seront, elles aussi, mises au goût du jour.

A moyen terme, la répartition des zones du réseau routier situé à l'intérieur des localités ainsi que leurs régimes de circulation devraient faire l'objet d'un réexamen approfondi. Dès lors, il sera nécessaire de poursuivre les travaux de recherche, en les harmonisant aux développements réalisés au niveau européen, et de mettre sur pied quelques études pilote avec la collaboration des autorités cantonales et celles des communes concernées.

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3. Mesures en faveur du trafic non motorisé (déplacements lents) Par la création, au mois de janvier 2000, du nouveau Service des déplacements lents au sein du DETEC, la Confédération soutiendra activement l'instauration de mesures qui déploieront leurs effets notamment en faveur de la circulation des piétons et des cyclistes dans les localités. C'est pourquoi l'administration élabore actuellement un modèle de ,,déplacements lents", qui devrait proposer des plans de mesures concrètes visant à favoriser la circulation des piétons et des cyclistes. Le réaménagement de certaines aires de circulation en vue d'y modérer le trafic devrait permettre à la demande future de mobilité en milieu urbain d'évoluer selon les critères du développement durable, c'est-à-dire: l'amélioration de la qualité de vie et de l'habitat dans les régions à forte densité de population, la réduction des atteintes à l'environnement et la promotion de la sécurité routière et de la santé publique, tout en tenant compte des impératifs de la croissance économique.

Ces tâches nouvelles et multiples requièrent une dotation en personnel supplémentaire, raison pour laquelle il faudra augmenter de deux postes l'effectif du personnel affecté à ce secteur d'activité.

Le Conseil fédéral estime que, de la sorte, on pourra atteindre l'objectif proposé par le Groupe d'experts ,,Sécurité routière" et, tout compte fait, aussi par les auteurs de l'initiative, à savoir influencer notablement et efficacement les comportements en matière de circulation, accroître la sécurité routière et le bien-être général et réduire les atteintes à l'environnement.

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Proposition

Au vu des arguments précités, le Conseil fédéral demande donc aux Chambres fédérales de recommander au peuple et aux cantons de rejeter l'initiative ,,Rues pour tous", sans lui opposer de contre-projet.

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