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Message du

Conseil fédéral à l'Assemblée fédérale concernant

la révision partielle de la loi fédérale sur les spiritueux.

(Du 6 juin 1898.)

Monsieur le président et messieurs, Le Conseil national a adopté en décembre 1895, sur la proposition de MM. Hochstrasser et Häberlin, le postulat ciaprès : « Le Conseil fédéral est invité à présenter, après étude, un rapport sur la question de savoir si des modifications ne devraient pas être apportées à la loi fédérale du 23 décembre 1886 sur les spiritueux dans le sens d'une réduction ou d'une suppression totale de la production indigène d'alcool soumis au monopole. » A la suite de ce postulat, l'Assemblée fédérale a pris au mois de mars 1897 la décision ci-après : « Le conseil prend acte de la déclaration du Conseil fédéral annonçant son intention d'examiner à fond, avant l'expiration des traités avec les distillateurs, la question, soulevée par

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le postulat Hochstrasser-Häberlin, concernant la production indigène, et de présenter aux chambres, en temps utile, un rapport et des propositions sur l'opportunité et le but d'une révision de la loi sur les spiritueux, sur ce point et sur d'autres encore, s'il y avait lieu (article 8).

« Le postulat Hochstrasser-Häberlin est liquidé par cette déclaration. » Le présent message a pour but de remplir l'engagement pris par le Conseil fédéral.

Comme l'indique déjà la teneur de sa déclaration, le Conseil fédéral n'a pas l'intention de vous proposer une révision générale de la loi sur l'alcool. Les expériences faites les dix dernières années permettraient bien d'apporter à presque tous les articles de la loi des modifications de forme ou de fond.

L'importance et la nécessité de la plupart de ces modifications ne nous paraît toutefois pas suffisamment démontrée pour qu'il y ait lieu de remettre en question tout le travail de législation si péniblement mené à point en 1886. Nous considérons une certaine stabilité de la législation comme une telle nécessité de la vie publique, que nous ne pouvons nous résoudre à faire renaître dans toute sa force la lutte d'opinions qui a trouvé son issue dans le compromis heureux, on peut le dire, de la législation de 1886.

En conséquence, nos considérations porteront en première ligne sur les deux articles de loi visés plus spécialement par la décision des chambres fédérales rapportée plus haut, soit l'article 2 (production indigène) et l'article 8 (commerce en détail).

Partant du même point de vue, nous ne vous ferons de propositions proprement dites de révision que relativement aux articles 2 et 14 de la loi, et encore nous bornerons-nous, pour ces deux articles, à vous indiquer les modifications qui nous paraissent nécessaires dans l'état actuel des choses. A part cela, nous nous contenterons d'indiquer une série d'autres points susceptibles de modification, pour le cas éventuel où l'Assemblée fédérale, par une manière de voir différente de la nôtre, voudrait pousser plus loin ce travail de révision.

1. Contingent réservé à la production indigène (art. 2).

Notre message du 8 octobre 1886 évaluait à 65,000 hectolitres (environ 56,000 quintaux métriques) la production totale de la Suisse en eau-de-vie de pommes de terre et de.

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céréales de provenance indigène et étrangère pendant l'année 1885, c'est-à-dire pendant l'année qui a précédé immédiatement l'émission de la loi sur l'alcool. Cette production était probablement plus importante encore.

Comme le projet de loi présenté alors aux chambres fédérales favorisait dans une mesure considérable, au moyen de droits d'entrée et de dégrèvements fiscaux, le produit indigène vis-à-vis du produit étranger, et qu'il laissait en outre aux distillateurs toute liberté dans le choix des matières premières, nous estimions que le chiffre de la production indigène se maintiendrait, en cas d'adoption de ce projet de loi, au chiffre de 55,000 hectolitres ou 46,800 quintaux métriques, malgré la diminution probable de la consommation.

La commission du Conseil national chargée d'examiner notre projet de loi se plaça à un tout autre point de vue. Au lieu d'une loi fiscale, elle proposa l'adoption du monopole.

C'est, comme on le sait, son projet du 16 octobre 1886 qui, sauf quelques changements accessoires, a été adopté comme loi définitive, au moins dans ses lignes principales. Les modifications introduites par le législateur au point de vue de la production indigène ne sont cependant pas sans importance.

En opposition avec le Conseil fédéral, dont le système économique eût difficilement permis de favoriser spécialement les produits de l'agriculture indigène, la commission partait de l'idée que l'emploi des matières premières de provenance étrangère, tel que le pratiquaient surtout les grandes exploitations d'alors, n'était pas conforme aux conditions économiques du pays. Elle limitait en conséquence à 500 hectolitres le maximum de production de chaque distillerie concessionnaire travaillant pour le compte de la Confédération et soumettait ces distilleries affermées, aussi bien que les exploitations en régie, à l'obligation de faire emploi en premier lieu de matières premières indigènes.

La production indigène devait subvenir au moins au quart de la consommation du pays. Un budget sommaire annexé au projet de la commission évaluait le chiffre de cette consommation à 120,000 hectolitres et la production indigène au tiers de ce chiffre, soit à 40,000 hectolitres (34,000 quintaux métriques).

L'Assemblée fédérale adopta en général les idées de la commission, en abandonnant toutefois l'institution projetée de la distillation en régie et en élevant de 500 à 1000 hectolitres

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la production maximum annuelle des distilleries concessionnaires.

Après de longs débats, elle décida également que le contingent total de la production annuelle serait à peu près du quart et non au moins du quart de la consommation. L'article 2 de la loi fut donc rédigé comme suit : « Le quart à peu près de la consommation de spiritueux est fourni au moyen de contrats de livraison que la Confédération doit conclure avec des producteurs indigènes.

« Les livraisons sont mises au concours, aux conditions établies par un cahier des charges, par lots de 150 hectolitres au moins et de 1000 hectolitres au plus d'alcool absolu ; chaque lot est adjugé à l'entrepreneur qui, tout en présentant des garanties suffisantes, fait les offres les plus favorables pour le lot respectif.

« On donnera la préférence, lors de l'adjudication, à la mise en oeuvre de matières indigènes et aux distilleries exploitées par des associations agricoles.

« Une distillerie ne peut obtenir qu'un seul lot. » Lors de la discussion de cet article, le budget qu'on avait établi évaluait la production indigène totale à 30,000 hectolitres (25,500 quintaux métriques). Elle a atteint en réalité, après les années de transition 1887/88 et 1889, les chiffres suivants : Années.

1890

1891 1892 1893 1894 1895 1896 1897

Quintaux métriques.

21,350

19,327 22,773 23,466 19,936 25,825 21,227 25,740 Total 179,644 Moyenne annuelle 22,455 soit 22 °/0 de la consommation totale du pays qui, pendant cette période de 8 ans, a été de 815,432 q. (alcool potable 505,680 q., alcool dénaturé 309,752 q.)

Nous renonçons, pour les causes de nature générale indiquées plus haut, à proposer à l'Assemblée fédérale de modifier la loi en vigueur en ce qui concerne l'organisation de la distillerie, ainsi que la protection des matières premières indigènes

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et des associations agricoles. Nous ne saurions également recommander la réduction, bien moins encore la suppression totale de la production indigène.

Les chiffres que nous venons de donner permettent de constater deux choses : 1. La production indigène a déjà subi une réduction très considérable par suite de l'institution du monopole (de 56,000 à 22,500 quintaux métriques environ).

2. La production moyenne réelle (22,500 q.) est restée jusqu'ici sensiblement inférieure au chiffre prévu lors de l'élaboration de la loi (25,500 q.).

Ces deux faits plaident déjà, selon nous, contre toute nouvelle réduction de la distillation indigène. Il est vrai que l'énorme diminution qui s'est produite depuis l'établissement du monopole a porté surtout, conformément aux intentions du législateur, sur la distillation des matières premières de provenance étrangère (maïs). Mais cette lésion d'une industrie reliée à tant d'intérêts divers n'est pas encore assez cicatrisée, pour qu'il soit de bonne politique de modifier en son point le plus important le compromis conclu en 1886 ; ce serait d'autant moins fondé que la production effective n'a pas même atteint jusqu'à présent, comme nous l'avons vu, le chiffre fixé dans ce compromis.

Il y a du reste encore d'autres raisons majeures qui militent en faveur du maintien d'une fabrication indigène raisonnablement limitée. Ici viennent en première ligne les intérêts agricoles qui se rattachent à cette industrie.

Nous pouvons nous dispenser d'examiner ici les rapports entre la distillerie et l'agriculture, puisque nous avons approfondi ces conditions dans plusieurs rapports précédents, spécialement dans le rapport de gestion de la régie des alcools pour l'année 1892. Nous maintenons dans toute son étendue la conclusion à laquelle nous avait alors conduit notre exposé, savoir que certaines contrées de notre pays produisent dans les bonnes années un excédent de pommes de terre qui trouve pour le moment son emploi le plus rationnel dans la distillation.

Mais s'il n'y a généralement pas lieu, selon nous, de proposer des modifications à l'état actuel des choses, il nous paraît néanmoins nécessaire d'éclaircir davantage un certain point et de veiller par là à ce que la production indigène ne dépasse pas à l'avenir, contrairement à ce que l'on avait voulu dès l'abord, les bornes d'une juste mesure.

265L'article 2 que nous avons cité plus haut fixe le chiffre de la production indigène au quart à peu près de la consommation de spiritueux.

Déjà pendant le premier exercice annuel du monopole, il s'est élevé des doutes sur la question de savoir si, par les mots de « consommation des spiritueux », le législateur avait.

voulu parler uniquement des spiritueux destinés à la boisson ou, en même temps, de l'alcool destiné à l'usage industriel ou domestique. En présence du texte non équivoque de la loi, nous avions déjà pris parti alors pour l'opinion qui comprend sous le terme de «consommation» la «consommation totale » (rapport de gestion de la régie des alcools pour l'exercice de 1887/88, page 27).

Les discussions postérieures qui eurent lieu à ce sujet occasionnèrent en décembre 1890 le vote d'un postulat invitant le Conseil fédéral à présenter un rapport sur cette question.

C'est ce que nous avons fait dans le rapport de gestion de la régie des alcools pour l'année 1890 (pages 10 et suivantes).

Nous y sommes arrivés, fidèles à la manière de voir que nous avions adoptée dès le principe, aux conclusions ci-après : « a. Dans le calcul du quart de la consommation en spiritueux qui est réservé, par l'article 2 de la loi sur les spiritueux, à la production indigène, on prendra pour base la quantité de trois-six et d'alcool brut destinée à être consommée comme boisson, plus la quantité d'alcool dénaturé destinée à l'usage industriel ou domestique.

« b. Pour la fixation du prix de vente de l'alcool dénaturé destiné à l'usage industriel ou domestique, on ne tiendra compte du coût de la marchandise indigène qu'en tant qu'il s'agit des produits secondaires de la rectification de l'alcool brut indigène. » Ces conclusions ont été admises sans modification par l'Assemblée fédérale en décembre 1893, après une longue controverse. On renonça à la révision de la loi pour des motifs analogues à ceux que nous avons exposés au commencement de ce message, et aucune interprétation divergente ne put l'emporter en présence du texte parfaitement clair de la loi.

Par ce vote, la question a été réglée, selon nous, d'une manière définitive et parfaitement correcte.

Or les conditions de vente de la régie des alcools se sont modifiées depuis lors de telle sorte qu'une révision est devenue urgente, si l'on ne veut pas aboutir à un résultat contraire aux intentions primitives du législateur.

·266 On sait que la régie paie pour l'alcool indigène un prix beaucoup plus élevé que pour l'alcool étranger. L'achat dans le pays, prévu à la lettre a ci-dessus, du quart de l'alcool à dénaturer nécessaire à la consommation, n'entraînerait de ce fait aucun dommage pour le fisc, si la disposition de la lettre b n'empêchait l'administration de tenir compte du coût de la marchandise indigène dans la fixation du prix de vente de l'alcool dénaturé. La fabrication de chaque hectolitre d'alcool indigène livré ensuite à la dénaturation représente ainsi pour le fisc une perte assez considérable. Cette perte sera supportable aussi longtemps que la consommation d'alcool dénaturé restera modérée. Mais en Suisse, comme dans tous les pays qui réduisent les charges fiscales sur cette denrée, la consommation de l'alcool dénaturé a augmenté, pendant les dernières années, dans une mesure considérable et inattendue. Loin de s'arrêter, cet accrois.sement suivra à l'avenir, selon toute probabilité, une marche accélérée, lorsque l'alcool dénaturé, ainsi que cela paraît devoir arriver, fera concurrence au pétrole comme moyen d'éclairage.

Les chiffres suivants donnent un tableau de l'augmentation dans notre pays depuis 1890 : · Consommation indigène d'alcool dénaturé.

Années.

Quintaux métriques.

1890 1891 1892 1893 1894 1895 1896 1897

26,729 33,080 35,496 37,021 41,425 44,443 42,630 48,928

309,752 Moyenne annuelle 38,719 D'après l'exposé qui précède, cette augmentation rapide de la consommation de l'alcool dénaturé constitue pour les recettes ·dû monopole un dommage qui ne pouvait être prévu lors de la promulgation de la loi ; il en résulte qu'on ne saurait voir dans les mesures tendant à éviter ce dommage une atteinte au respect de dispositions légales en vigueur.

Il y a, selon nous, deux manières de remédier à cette diminution de recettes sans modifier l'organisation générale du monopole. La première consisterait dans une révision de la loi

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permettant à la régie d'élever le prix de vente de l'alcool dénaturé proportionnellement aux sacrifices pécuniaires occasionnés par la production indigène. Nous estimons toutefois, en restant d'accord avec les propositions que nous avons faites dans le rapport de gestion de la régie pour l'année 1890 et qui ont été admises trois ans après par l'Assemblée fédérale, ne pas devoir recommander ce moyen. L'intention du législateur était évidemment de rendre le meilleur marché possible l'alcool destiné à l'usage industriel et domestique. Manquer à ce principe léserait des intérêts qui, eux aussi, se trouvaient au premier plan lors du compromis de 1886, et ont par là droit aux mêmes ménagements que les intérêts agricoles qui ont eu part à ce compromis.

Le second mode de remédier aux inconvénients résultant de la situation actuelle ou pouvant se produire à l'avenir nous paraît être moins sujet à critique. Il consisterait, en conservant les principes en vigueur pour la production indigène, à fixer pour cette dernière un maximum représenté soit par un chiffre déterminé, soit par une fraction de la consommation d'alcool potable. Il est vrai que ce moyen ne permet de tenir compte des intérêts agricoles et des promesses faites il y a dix ans en faveur de ces intérêts, que si ce chiffre maximum est fixé assez haut pour que ces engagements puissent être tenus. .Dans cet ordre d'idées, nous proposons de fixer le maximum de la production indigène à 30,000 hectolitres (25,500 quintaux métriques) par an, c'est-à-dire au chiffre qui avait été prévu lors de l'élaboration de la loi. Le chiffre effectif de la production variant cependant selon les conditions de la récolte, il est opportun et nécessaire de considérer ce maximum comme une moyenne. Nous vous proposons donc en définitive l'émission d'un arrêté législatif statuant que la part de la consommation totale du pays réservée à la production indigène par l'article 2 de la loi de 1886, ne doit pas dépasser en moyenne annuelle, pour une période de deux années, 30,000 hectolitres d'alcool absolu. Cette solution de la question nous paraît sauvegarder suffisamment les intérêts du fisc et ceux de l'agriculture; elle décide en même temps d'une manière définitive que l'on doit tenir compte, dans le calcul du contingent indigène, de la consommation d'alcool potable et
d'alcool dénaturé.

La conférence de délégués des gouvernements cantonaux qui a eu lieu à Berne, sur l'invitation de notre Département des Finances et avec notre assentiment, les 16 et 17 février écoulé, s'est rangée en principe, après avoir pris connaissance

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de nos propositions de révision, à notre manière de voir ; elle s'est toutefois prononcée, à la majorité des voix, pour la réduction du contingent maximum à un chiffre inférieur à 30,000 hectolitres, ainsi que pour la mise en compte de la production indigène dans la fixation du prix de vente de l'alcool dénaturé.

Contrairement à ce préavis, nous avons néanmoins résolu, après un nouvel examen de la question, de ne vous proposer aucune modification du mode usité jusqu'ici pour le calcul du prix de vente de l'alcool dénaturé et de maintenir notre proposition d'un maximum de 30,000 hectolitres. Le motif essentiel de notre résolution est qu'il ne nous paraît pas opportun de traiter cette question à un point de vue trop exclusivement fiscal, point de vue qui a évidemment prévalu dans la décision des délégués cantonaux.

2. Suppression du minimum actuel des amendes ; prescriptions relatives aux complices et fauteurs du contrevenant (art. 14).

Le minimum d'amende fixé par l'article 14 à cinq fois la somme soustraite à l'Etat a été reconnu dans bien des cas comme une peine trop sévère. Nous considérerions comme une amélioration des prescriptions actuelles de fixer seulement le maximum de l'amende, comme c'est le cas dans la loi sur les douanes. Par analogie avec cette même loi, les complices et fauteurs du contrevenant devraient être menacés expressément de l'amende.

3. Autres points susceptibles de révision.

Nous n'avons pas l'intention de spécifier ici toutes les modifications de forme ou de fond que nous proposerions en cas de révision totale de la loi. Nous nous contenterons d'indiquer les desiderata qui revêtent une certaine importance, soit par suite des demandes réitérées des cercles intéressés, soit à raison des expériences faites par l'administration.

a. Distillation en régie (art. 2).

Art. 2. Nous avons déjà rappelé que le projet de loi présenté en octobre 1886 par la commission du Conseil national prévoyait, indépendamment des distilleries concessionnaires, la distillation en régie. Cette idée, abandonnée lors de l'élaboration de la loi, a été reprise plus d'une fois depuis. Nous ne pouvons reconnaître tous les avantages que les partisans de

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l'exploitation en régie pure attribuent à ce système et nous croyons que sa réalisation se heurterait à une série de difficultés assez sérieuses. Nous combattrions donc une révision tendant à rendre la distillation en régie obligatoire, mais nous ne nous opposerions pas à ce que l'on attribuât à la Confédération le droit de pratiquer la distillation en régie, dans le sens du projet sus-mentionné de la commission.

Une disposition législative de ce genre permettrait de procéder à des essais qui ne sont pas exécutables dans l'état actuel de la législation et laisserait en même temps à l'administration la faculté de revenir au système purement concessionnaire, en cas de non réussite de ces essais.

b. Finance de monopole sur les spiritueux de bas titre ; imposition des produits alcooliques ne servant pas à la boisson et des matières propres à la distillation, etc.

(art. 3).

La fixation de la finance de monopole à 80 francs par quintal métrique, sans égard à la contenance en alcool, est un peu dure en ce qui concerne les spiritueux de bas titre. Il y aurait lieu, dans le cas d'une révision plus complète que celle que nous proposons, d'accorder au Conseil fédéral le droit de réduire cette finance à l'égard des liqueurs ou eaux-de-vie d'un titre inférieur à 25°.

La loi fédérale sur les spiritueux ne prescrit absolument rien au sujet de l'imposition des produits étrangers contenant de l'alcool ou dans la fabrication desquels il est fait emploi d'alcool et qui, tels que le savon, les articles de parfumerie, etc., ne servent pas à la boisson. Cette question a été réglée jusqu'à maintenant par la législation douanière et les traités de commerce ; il nous semble toutefois plus correct de la faire résoudre par la loi elle-même, en cas de révision de celle-ci sur ce point.

On pourrait à cette occasion introduire également dans la loi des dispositions fixant le traitement à appliquer aux matières étrangères propres à la distillation, aux vins alcoolisés, vermouth, jus de baies ou de fruits préparés avec de l'alcool, etc., matière réglée également jusqu'ici par la législation douanière et les traités de commerce.

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c. Elévation des prix de vente de l'alcool monopolisé et réduction du minimum de vente (art. 4).

On a proposé de divers côtés d'augmenter successivement ou d'un seul coup les prix de vente de l'alcool monopolisé.

L'objection principale que nous ferons à cette proposition est qu'une élévation des prix actuels aurait pour conséquence un développement encore plus considerale de la fabrication constitutionnellement non soumise au monopole, et nuirait probablement ainsi aux intérêts du fisc sans aucun avantage pour les buts hygiéniques visés par la législation. Si l'impôt du monopole était augmenté, l'existence des distilleries non soumises au monopole constituerait un danger permanent et considérable pour le fisc. La constitution ne fournirait par exemple aucun moyen d'empêcher un agriculteur de livrer à la distillation toute sa récolte de fruits et de la remplacer, pour la consommation alimentaire, par des fruits de provenance étrangère.

A part quelques modifications, l'article 4 de la loi est dans sa teneur essentielle la reproduction de l'article 10 d'un projet de loi publié en 1886, par notre Département de l'Intérieur, sur l'institution d'un monopole. L'une des modifications apportées à ce premier projet consiste dans l'élévation à 150 litres du minimum de vente fixé primitivement à 100 litres seulement.

Cette élévation a eu pour motif le fait que la futaille la plus petite employée dans le commerce de l'alcool a une contenance de 150 litres au moins.

Cà et là, on a exprimé le voeu que la régie vende l'alcool en quantités inférieures à 150 litres. On prétend que par là un grand nombre d'acheteurs, obligés aujourd'hui de se servir du commerce intermédiaire, pourraient faire leurs achats directement auprès de la régie, mode qui non seulement réduirait les frais d'achat, mais fournirait en outre de meilleures garanties en ce qui concerne la qualité de la marchandise.

Nous ne ferions pas absolument opposition, en cas d'une révision de l'article 4, à la réduction du minimum actuel, mais sans nous dissimuler que la modification du système rationnel de vente usité aujourd'hui serait une source d'inconvénients autant pour le public que pour l'administration.

d. Rembotirsernent du bénéfice du monopole pour les petites exportations (art. 5).

En cas de révision générale, on pourrait abroger la disposition statuant que l'exportation de quantités inférieures à 20

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litres ne donne droit à aucun remboursement, d'autant plus quecette disposition n'est au fond pas compatible avec le textedé la constitution.

e. Livraison, en franchise de droits, d'alcool destiné aux usages scientifiques ou pharmaceutiques ; création de débits: d'alcool à brûler ; importation par les particuliers d'alcool relativement dénaturé (art. 6).

De nombreuses demandes ont été adressées à la régie' en vue d'obtenir en franchise de tous droits l'alcool pur destiné aux usages scientifiques et pharmaceutiques. Toutes ces demandes ont été écartées, parce que la loi exige expressément que tout alcool livré en franchise ait été soumis préalablement à la dénaturation, c'est-à-dire rendu impropre à la boisson.

Comme on ne peut contester à ces demandes un certain fondement et qu'il ne s'agit en somme que de quantités peu importantes, ne pouvant occasionner au fisc de bien lourds sacrifices, le Conseil fédéral ne s'opposerait pas à ce qu'on lui accordât, par une révision de l'article 6, le droit d'admettre à l'avenir des demandes de ce genre. Il est vrai que les franchises analogues accordées dans les Etats étrangers y ont parfois donné lieu à de fâcheuses expériences ; c'est sans doute cette considération qui a déterminé la conférence intercantonale déjà mentionnée à se prononcer contre une modification de la loi sur ce point. Le Conseil fédéral croit cependant qu'il serait possible à la régie, dans les conditions actuelles, de prévenir l'emploi abusif de cet alcool, et cela d'autant plus que les dispositions pénales de la loi et la possibilité de retirer en tout temps le privilège accordé constituent des moyens de répression suffisants. Nous admettrions donc une disposition autorisant le Conseil fédéral, dans tous les cas où il serait possible d'appliquer un mode de dénaturation conciliant les intérêts du fisc et ceux du consommateur, de livrer au prix de revient fixé d'après l'article 6, 1er alinéa, de la loi en vigueur et en quantités convenables, de l'alcool pur pour les usages scientifiques ou pharmaceutiques.

Dans une révision totale, on pourrait aussi examiner s'il n'y aurait pas lieu de créer des débits officiels pour la vente en détail de l'alcool à brûler. Une innovation aussi importante devrait toutefois être précédée, selon nous, d'une étude approfondie et d'une entente avec les cantons.

:272 II serait également désirable que la loi statuât elle-même ;sur le droit des particuliers d'importer directement l'alcool destiné à la dénaturation relative, droit qui ne leur a été concédé jusqu'à présent que par arrêté fédéral. En cas de révision totale, le règlement définitif de cette question serait d'autant plus désirable que la conférence des délégués cantonaux et des membres de la commission des alcools ont proposé, contrairement aux vues du Conseil fédéral, de revoir l'arrêté fédéral y relatif dans le sens de la monopolisation complète de l'alcool relativement dénaturé.

f. Commerce en détail (art. 8).

L'article 8 de la loi est conçu en ces termes: « La vente des spiritueux de toute espèce, en quantité de 40 litres au moins, est une industrie libre (commerce en .gros).

« Le commerce en quantités inférieures à ce chiffre (commerce en détail) se subdivise comme suit: 1. le débit; 2. la vente en détail à pot renversé.

« Les autorisations de débit ou de vente en détail sont accordées par les autorités cantonales et doivent être soumises par elles à un droit de vente proportionné à l'importance du commerce et à la valeur des marchandises vendues; jusqu'à l'entrée en vigueur d'une loi fédérale, ce droit de vente sera fixé par les cantons.

« Toutefois les distillateurs qui ne fabriquent pas, dans une seule et même année, plus de 40 litres de spiritueux non .soumis à l'impôt fédéral peuvent vendre librement la quantité produite, à condition de ne pas la livrer par parts inférieures à 5 litres.

« Les vases des débits d'eau-de-vie doivent être étalonnés. » Ces dispositions sont basées sur les articles 31 (lettre b) et 32Ws de la constitution fédérale.

La lettre b de l'article 31 crée, vis-à-vis du principe général de la liberté de commerce et d'industrie, une exception réservant la vente des boissons distillées, en conformité de l'article 32Ws.

L'article 32bis donne à la Confédération le droit de décréter par voie législative des prescriptions sur la vente des

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boissons distillées de toute sorte. La Confédération a fait usage de ce droit en édictant la loi sur l'alcool et plus spécialement l'article 8 de cette loi, tel qu'il est rapporté ci-dessus.

La vente des spiritueux en quantités de 40 litres et audessus (commerce en gros) est ainsi déclarée une industrie libre, tandis que la vente en quantités inférieures (commerce en détail) est soumise à l'autorisation de l'autorité cantonale. * Sous quelle forme, loi, ordonnance ou arrêté, les cantons devront-ils accorder cette autorisation? A défaut d'une prescription fédérale, c'est la législation cantonale qui en décide. En ce qui concerne les conditions exigées pour obtenir cette autorisation, l'article 8 ne prévoit que le paiement d'un droit de vente proportionné à l'importance du commerce et à la valeur des marchandises vendues, droit dont la fixation est laissée aux cantons jusqu'à la mise en vigueur d'une loi fédérale.

A part ce qui précède, la loi ne contient sur le commerce en détail que deux dispositions, savoir que les distillateurs dont la fabrication ne dépasse pas dans une seule et même année plus de 40 litres de spiritueux non soumis à l'impôt fédéral, peuvent vendre librement leur produit à condition de le livrer en quantités de 5 litres au moins, et que les vases des débits d'eau-de-vie doivent être étalonnés. Abstraction faite de la perception d'un droit de vente, l'article 8 de la loi laisse donc pleine liberté aux cantons en ce qui concerne la réglementation du commerce en détail.

Il y a encore, il est vrai, certains principes généraux de droit fédéral que les cantons doivent respecter sur ce point comme dans toute leur législation, savoir: le principe de l'égalité de tous les citoyens devant la loi (article 4 de la constitution fédérale) et l'obligation des cantons de traiter les citoyens des autres Etats confédérés comme ceux de leur Etat en matière de législation (article 60 de la constitution fédérale).

L'égalité de traitement que chaque canton doit accorder, en vertu de cette disposition, aux citoyens d'un autre canton, peut être réclamée en outre par les ressortissants de tout Etat étranger auquel la Suisse aura garanti par voie de traité même traitement qu'aux citoyens suisses.

Déjà peu après la promulgation des prescriptions cantonales sur le commerce en détail, des plaintes se
sont fait entendre, au sein des cercles commerciaux intéressés, contre ces prescriptions et leur application. L'examen de ces plaintes a cependant démontré jusqu'ici sans exception que les cantons ont établi en toute compétence ces dispositions législatives et que celles-ci ne se trouvent en opposition ni avec Feuille fédérale suisse. Année L. Vol. III.

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la constitution fédérale, ni avec la loi sur l'alcool. Aux termes de la loi, il n'est donc pas possible de tenir compte même des réclamations que l'on serait enclin à considérer comme fondées.

Il n'y a pas d'autre remède que la révision de la loi. Nous renvoyons à ce sujet, pour tous détails, au rapport du 17 mars 1890 du Département fédéral de l'Intérieur, confirmé par nous le 28 mars suivant, d'autant plus que ce rapport contient déjà une étude critique de toute une série de propositions de révision.

L'examen de l'opportunité d'une révision et du sens dans lequel elle devrait avoir lieu doit être précédée de quelques considérations générales sur les conditions effectives du commerce en détail et d'une appréciation des défauts que l'on reproche au régime en vigueur.

Le commerce en détail des spiritueux revêt trois formes, essentielles : 1. Le commerçant ou son agent se présente personnellement, sans commande préalable, chez l'acheteur avec sa marchandise (colportage).

2. L'acheteur ou son agent se rend lui-même, pour prendre livraison de la marchandise, chez le commerçant ou son représentant. Dans ce cas, la marchandise est soit consommée sur place (débit), soit emportée par l'acheteur (vente à pot renversé).

3. Le commerçant ou son représentant fait parvenir, surcommande, la marchandise à l'acheteur ou à, son agent par un transporteur. Dans ce cas, le lieu d'où la marchandise commandée est expédiée à l'acheteur peut être situé dans la commune même de son domicile, ou dans une autre commune du même canton, ou dans un autre canton, ou à l'étranger.

En ce qui concerne l'interdiction du colportage, le débit dans les auberges, la vente à pot renversé ou autre vente en détail dans les limites d'un seul et même canton, les autorités fédérales n'ont pas reçu jusqu'ici de plaintes sérieuses.

Les réclamations adressées au Conseil fédéral concernent surtout le commerce qui se fait de canton à canton ou avec l'étranger.

L'article 8 de la loi fédérale sur les spiritueux parle dans, son 3me alinéa de la vente en détail tout court, dans son 2me alinéa de la vente en détail à pot renversé. L'emploi de cette dernière expression peut être la cause de ce que les cantons,,

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en fixant les conditions pour l'obtention des patentes de vente en détail, ont un peu trop perdu de vue les transactions entre différentes communes d'un même canton, ou de communes de différents cantons entre elles ou avec l'étranger, pour viser essentiellement la vente locale sur le territoire d'une seule et même commune. Quoiqu'il en soit, les pétitions adressées jusqu'ici au Conseil fédéral concernent exclusivement, nous l'avons déjà dit, les relations intercantonales ou internationales du commerce en détail. En conséquence, nous ne nous occuperons uniquement ici de cette classe d'intérêts.

Sur le terrain des transactions intercantonales, quelques cantons ont tenté de mettre fin par un concordat aux inconvénients du régime actuel dont se plaignent les commerçants en spiritueux. Il paraît cependant que les améliorations obtenues de cette manière ne satisfont qu'imparfaitement les intéressés.

En présence des éclaircissements détaillés donnés à ce sujet par le rapport du 17 mars 1890 de notre Département de l'Intérieur, nous ne croyons pas nécessaire de discuter ici une à. une les diverses propositions faites en vue de remédier aux défauts qu'on reproche à la loi sous le rapport du commerce intercantonal.

Nous croyons pouvoir nous contenter de dire que le triage consciencieux des diverses propositions de révision a mis en évidence, comme remède le plus simple et le plus efficace, la fixation à un chiffre inférieur de la limite de 40 litres entre le commerce en gros et le commerce en détail. Or le Conseil fédéral a déjà donné son avis sur cette proposition, non seulement dans le rapport de mars 1890 que nous avons déjà mentionné plusieurs fois, mais encore dans le rapport de gestion de la régie des alcools pour l'année 1893 (p. 44 et suiv.) ; dans ce dernier cas spécialement à propos d'une pétition adressée à l'Assemblée fédérale par 113 membres de l'association suisse des liquoristes et marchands de spiritueux.

Nous n'avons pu nous décider à ce moment-là à vous proposer de faire droit aux pétitionnaires, pas même par une réduction de la limite entre le commerce en gros et le commerce en détail.

Ce qui déterminait notre attitude, c'était essentiellement que tout changement au système en vigueur nécessitait non seulement une modification de la loi fédérale sur les spiritueux, mais aussi une révision des législations cantonales basées sur cette loi, diminuait en outre les recettes actuelles des

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cantons provenant des patentes de vente en détail, et impliquait l'abandon d'une partie de la réforme morale poursuivie par la révision constitutionnelle de 1885 et la législation fédérale de 1886.

Par sa décision de décembre 1894, l'Assemblée fédérale s'est rangée expressément à cette manière de voir.

Nous pourrions néanmoins nous résoudre aujourd'hui, en principe, à abandonner le point de vue auquel nous nous sommes placés alors. Nous ne pouvons nous refuser plus longtemps à reconnaître un certain fondement aux plaintes sans cesse renaissantes des commerçants intéressés. Nous avons pu nous convaincre en outre que les droits et patentes qui grèvent actuellement la vente inférieure à 40 litres n'exercent réellement pas d'influence restrictive sur la consommation de l'eau-de-vie, de sorte qu'une modification du système en vigueur n'entraînerait pas nécessairement l'aggravation, au point de vue hygiénique, des conditions actuelles.

Si malgré cela nous nous abstenons de vous proposer une révision de l'article 8 dans le sens d'une réduction de la limite du commerce en gros, c'est parce que dans les conférences d'avril 1897 et février 1898, les délégués des autorités cantonales, spécialement intéressées dans la question, se sont prononcés à, une très forte majorité contre toute modification des prescriptions en vigueur.

Mais comme l'Assemblée fédérale pourrait peut-être particulièrement sur ce point, se prononcer dans un autre sens, nous croyons utile d'indiquer ici la rédaction qui, en cas de révision de l'article 8, nous paraîtrait devoir être adoptée en lieu et place de sa teneur actuelle. Nous proposerions de dire : « Le commerce des spiritueux de toute espèce comprend : 1. le commerce en gros; 2. le commerce en'détail.

« Le commerce en gros est une industrie libre. Il embrasse tout le trafic des spiritueux qui se fait en quantités d'au moins 20 litres d'une seule et même espèce.

« Le commerce en détail comprend : a. le débit ; b. tout autre trafic en quantités inférieures à 20 litres.

« Toutefois les agriculteurs qui ne fabriquent par année, au moyen de fruits de leur propre récolte, pas plus de 40 litres

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d'eau-de-vie non soumise au monopole, ont le droit de vendre librement cette eau-de-vie en quantités d'au moins 5 litres.

« Toute autre définition relative au commerce en détail est du ressort des autorités cantonales, qui fixent également toutes les prescriptions concernant les patentes. Celles-ci doivent être soumises par les cantons à un droit proportionnel à l'importance du trafic. Le produit de ces droits reste acquis aux cantons qui les perçoivent.

« Sont réservées les dispositions prohibitives de l'article 7. » Cette proposition éventuelle supprime l'obligation d'étalonner les vases des débits d'eau-de-vie, parce que cette disposition n'a pas pu être mise en pratique.

Quant aux relations commerciales avec l'étranger, les commerçants suisses se plaignent surtout de ce que les envois de détail des maisons étrangères ne sont pas ou ne sont qu'imparfaitement atteints par les prescriptions cantonales sur le commerce en détail.

Il faut reconnaître qu'il s'expédie effectivement de l'étranger, à l'adresse d'acheteurs suisses, des envois de spiritueux en quantités inférieures à 40 litres sans que ces envois soient soumis au payement des droits de vente cantonaux, et qu'il serait fort difficile, dans l'état actuel des choses, de remédier à l'inégalité de traitement des cantons vis-à-vis des commerçants indigènes ou étrangers. On peut répondre cependant que les renseignements obtenus à ce sujet établissent que cette importation de détail n'est après tout pas de grande importance, et que tous les envois de spiritueux provenant de l'étranger, que ces envois soient supérieurs ou inférieurs à 40 litres, sont soumis à leur entrée en Suisse à des droits de monopole bien plus élevés que ceux dont sont grevés les produits indigènes.

Le commerçant indigène qui achète son alcool de la régie est soumis, par le paiement du prix de vente conformément à l'article 4 de la loi, à un droit de monopole qui varie d'une année à l'autre de 80 à 85 francs par hectolitre d'alcool absolu.

Les eaux-de-vie étrangères importées en fûts par les particuliers peuvent avoir une contenance alcoolique d'environ 60 degrés et à peu près 15 % de tare; cela fait par hectolitre un poids net de près de 90 et un poids brut de 100 kg.

en chiffre rond. La finance de monopole de 80 francs qui grève ces 100 kg. en vertu de l'article 3 de la loi, représente un droit de 135 francs par hectolitre d'alcool absolu; l'étranger

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paie donc, par hectolitre d'alcool absolu, 50 francs de plus que le fabricant indigène. Nous voyons là une compensation suffisante de l'infériorité des droits de vente en détail payés par les produits étrangers. Si cependant la manière de voir de l'Assemblée fédérale à ce sujet devait différer de la nôtre, nous ne nous opposerions pas à une proposition tendant à frapper d'un droit supérieur à 80 francs les envois de détail provenant de l'étranger (par exemple les importations au-dessous de 100 kg. poids, brut).

Il pourrait être fait droit à une proposition de ce genre par une modification de l'article 3 de la loi.

Nous ne pourrions cependant nous déclarer d'accord avec cette modification que si la limite actuelle du commerce en gros était maintenue.

g. Organisation de la régie (art. 10).

En exécution de cet article, il y aurait lieu d'émettre des dispositions législatives sur l'organisation de la régie. Nous croyons cependant préférable de régler ce point à part après liquidation de la révision de la loi.

h. Emploi de la dîme de l'alcool (art. 13).

La rédaction actuelle de l'article 13 permet de soutenir avec quelque apparence de raison que le Conseil fédéral n'a pas à faire de propositions à l'Assemblée fédérale touchant l'emploi de la dîme de l'alcool dans les divers cantons, et que la tâche de l'administration fédérale consiste uniquement à recueillir les rapports cantonaux et à les transmettre ä l'Assemblée fédérale.

Vu l'importance de la chose, une attitude aussi passive de l'autorité fédérale né nous paraît pas à sa place et nous ferions bon accueil, en cas de révision générale de la loi, à une augmentation des compétences du Conseil fédéral qui donnerait à celui-ci le droit de présenter à l'Assemblée fédérale, avec les rapports des cantons, les propositions lui paraissant nécessaires pour assurer l'emploi constitutionnel de la dîme de l'alcool.

i. Adjonction aux dispositions pénales (art. 14).

Les dispositions pénales de la loi sont défectueuses en ce qu'elles ne prévoient pas la prise de corps préventive à l'encontre des fraudeurs non domiciliés dans le pays. En outre, il nous paraît nécessaire d'accorder à la régie, en cas de révi-

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sion générale, le droit de confisquer les produits fabriqués illicitement. Il y aurait lieu en outre de mieux préciser le droit ·de grâce et d'améliorer la rédaction de quelques passages de cet article.

k. Parts d'amendes des employés de la régie (art. 16).

Il y aurait à déterminer, dans une révision générale, non seulement le droit des employés des douanes, mais aussi celui des employés de la régie aux amendes infligées.

On pourrait prendre pour modèle de la nouvelle disposition celle qui a été introduite par voie d'ordonnance, savoir que les parts de dénonciateur revenant aux employés de la régie doivent être versées au fonds d'amendes de la régie, fonds qui sert à allouer, à la fin de chaque année, des gratifications aux employés qui se sont distingués par leur zèle et leur intelligence dans la découverte et la poursuite des contraventions.

1. Procédure à suivre dans la poursuite pénale des contraventions (art. 17).

Une révision de cet article devrait faire mention de la nouvelle loi sur l'organisation judiciaire fédérale et éclaircir ·quelques incertitudes concernant la procédure à suivre pour le dépôt de la plainte, les motifs de cassation, etc.

En conclusion de ce qui précède, nous proposons à l'Assemblée fédérale : 1° de renvoyer encore pour le moment toute révision générale de la loi sur l'alcool ; 2° d'adopter le projet ci-après de modifications aux articles 2 et 14 de la loi.

Agréez, monsieur le président et messieurs, l'assurance de notre haute considération.

Berne, le 6 juin 1898.

Au nom du Conseil fédéral suisse, Le président de la Confédération :

R U F P Y.

Le chancelier de la Confédération : EINÖIBB.

280 Projet.

Loi fédérale concernant

la révision partielle de la loi fédérale du 23 décembre 1886 sur les spiritueux.

L'ASSEMBLÉE FÉDÉRALE de la C O N F É D É R A T I O N SUISSE, vu le message du Conseil fédéral du 6 juin 1898, décrète : Art. 1er. La part de la consommation totale du pays en trois-six et alcool, réservée à la production indigène par l'article 2 de la loi du 23 décembre 1886 sur les spiritueux, ne doit pas excéder 80,000 hectolitres d'alcool absolu par année. Cette quantité peut être dépassée, pour une année déterminée, du 25 °/0 au maximum, mais à compte du contingent de l'année suivante.

Art. 2. Les minimums d'amende fixés à l'article 14 de la loi fédérale du 23 décembre 1886 sur les spiritueux sont abrogés.

281' Les fauteurs et les complices du contrevenant sont également soumis aux dispositions pénales de la loi.

Art. 3. Le Conseil fédéral est chargé, conformément aux dispositions de la loi fédérale du 17 juin 1874 concernant la votation populaire sur les lois et arrêtés fédéraux,, de publier la présente loi et de fixer l'époque où elle entrera, en vigueur.

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Message du Conseil fédéral à l'Assemblée fédérale concernant la révision partielle de la loi fédérale sur les spiritueux. (Du 6 juin 1898.)

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1898

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26

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15.06.1898

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