05.061 Message concernant le Protocole du 28 novembre 2003 relatif aux restes explosifs de guerre (Protocole V) annexé à la Convention du 10 octobre 1980 sur l'interdiction ou la limitation de l'emploi de certaines armes classiques qui peuvent être considérées comme produisant des effets traumatiques excessifs ou comme frappant sans discrimination du 17 août 2005

Madame la Présidente, Monsieur le Président, Mesdames et Messieurs, Nous vous soumettons, en vous proposant de l'adopter, un projet d'arrêté fédéral concernant le Protocole du 28 novembre 2003 relatif aux restes explosifs de guerre (Protocole V) annexé à la Convention du 10 octobre 1980 sur l'interdiction ou la limitation de l'emploi de certaines armes classiques qui peuvent être considérées comme produisant des effets traumatiques excessifs ou comme frappant sans discrimination.

Nous vous prions d'agréer, Madame la Présidente, Monsieur le Président, Mesdames et Messieurs, l'assurance de notre haute considération.

17 août 2005

Au nom du Conseil fédéral suisse: Le président de la Confédération, Samuel Schmid La chancelière de la Confédération, Annemarie Huber-Hotz

2005-0135

5251

Condensé Par le présent message, le Conseil fédéral soumet à l'approbation des Chambres fédérales le Protocole du 28 novembre 2003 relatif aux restes explosifs de guerre annexé à la Convention du 10 octobre 1980 sur l'interdiction ou la limitation de certaines armes classiques qui peuvent être considérées comme produisant des effets traumatiques excessifs ou comme frappant sans discrimination (ci-après Convention sur les armes classiques). La Convention sur les armes classiques se compose d'un traité-cadre et de 4 protocoles limitant ou interdisant l'emploi de certaines armes classiques (Protocole I relatif les éclats non localisables, Protocole II et Protocole II révisé les mines, les pièges et autres dispositifs; Protocole III les armes incendiaires; Protocole IV les armes à laser aveuglantes).

Adopté le 28 novembre 2003 lors de la réunion des Etats parties à la Convention sur les armes classiques, le Protocole relatif aux restes explosifs de guerre (Protocole V) procède du constat qu'après la cessation des conflits armés, les restes explosifs de guerre causent de graves problèmes humanitaires. Ce nouveau protocole entend réduire autant que faire se peut les dangers et les effets des restes explosifs de guerre pour les populations civiles, par le biais surtout de mesures correctives post-conflictuelles. Il prévoit l'obligation pour les Etats, d'enlever les restes explosifs de guerre qui se trouvent sur leur sol ainsi que l'obligation, pour ceux qui ont utilisé ces munitions explosives, de contribuer à leur enlèvement en fournissant une aide technique, des moyens financiers ou du personnel. Il stipule, en outre, l'obligation d'enregistrer et d'archiver les renseignements concernant les munitions explosives utilisées et d'échanger des informations en vue de faciliter l'enlèvement.

Il prévoit enfin des mesures pour avertir et sensibiliser les populations civiles du potentiel de risques des restes explosifs de guerre ainsi qu'une aide et une coopération internationales. Une annexe technique précise les diverses obligations à respecter en formulant des recommandations qui ne sont toutefois pas juridiquement contraignantes et fournit des directives générales sur la fabrication, la manipulation et le stockage des munitions explosives.

Le Protocole V est compatible avec l'ordre juridique suisse. Sa
ratification n'aura pas de conséquences financières prévisibles pour la Confédération et les cantons.

Dans le cadre de la Convention sur les armes classiques, la Suisse a toujours oeuvré en faveur des intérêts humanitaires et a soutenu l'élaboration du Protocole V. Tant les considérations humanitaires qui, en accord avec la tradition humanitaire de la Suisse, visent à réduire autant que possible les effets délétères des conflits armés pour les populations civiles même après leur cessation, que l'absence jusqu'ici dans le droit international humanitaire de règles pertinentes au sujet des restes explosifs de guerre parlent en faveur d'une ratification. La politique suisse en matière de déminage à but humanitaire quant à elle englobe aujourd'hui déjà les restes explosifs de guerre. Notre pays soutient en effet financièrement les opérations de déminage et forme des spécialistes du déminage et de l'enlèvement des munitions. Il traite en outre sur un pied d'égalité les victimes de mines terrestres et celles de

5252

restes explosifs de guerre au niveau des soins et de la réadaptation. Dans l'optique suisse, le Protocole V vient compléter de façon bienvenue le droit international humanitaire.

5253

Table des matières Condensé

5252

1 Le point sur la situation 1.1 La Convention sur les armes classiques 1.2 Dispositions de la Convention sur les armes classiques relatives à l'approbation de protocoles additionnels

5256 5256

2 Genèse du Protocole V 2.1 Travaux préparatoires et Conférences des Etats parties des 27 et 28 novembre 2003 2.2 Position de la Suisse

5257

3 Le Protocole V relatif aux restes explosifs de guerre 3.1 Généralités 3.2 Contenu du Protocole V 3.2.1 Dispositions générales et champ d'application (art. 1) 3.2.2 Définitions (art. 2) 3.2.3 Obligation d'enlèvement et communication de renseignements (art. 3 et 4) 3.2.4 Protection de la population civile ainsi que des organisations et missions humanitaires (art. 5 et 6) 3.2.5 Restes explosifs de guerre existants (art. 7) 3.2.6 Coopération internationale (art. 8) 3.2.7 Mesures préventives générales (art. 9) 3.2.8 Consultations des Hautes Parties contractantes et respect des dispositions (art. 10 et 11) 3.3 Entrée en vigueur du Protocole V sur les restes explosifs de guerre 3.4 Evaluation

5257

5257 5259 5260 5260 5260 5260 5262 5262 5264 5264 5265 5265 5266 5267 5267

4 Compatibilité avec l'ordre juridique suisse

5268

5 Répercussions financières

5268

6 Programme de la législature

5268

7 Constitutionnalité

5268

Arrêté fédéral concernant le Protocole du 28 novembre 2003 relatif aux restes explosifs de guerre (Protocole V) annexé à la Convention du 10 octobre 1980 sur l'interdiction ou la limitation de l'emploi de certaines armes classiques qui peuvent être considérées comme produisant des effets traumatiques excessifs ou comme frappant sans discrimination (Projet)

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Protocole du 28 novembre 2003 relatif aux restes explosifs de guerre (Protocole V) annexé à la Convention du 10 octobre 1980 sur l'interdiction ou la limitation de l'emploi de certaines armes classiques qui peuvent être considérées comme produisant des effets traumatiques excessifs ou comme frappant sans discrimination 5273

5255

Message 1

Le point sur la situation

1.1

La Convention sur les armes classiques

La Convention sur l'interdiction ou la limitation de l'emploi de certaines armes classiques qui peuvent être considérées comme produisant des effets traumatiques excessifs ou comme frappant sans discrimination1 (Convention sur les armes classiques) a été conclue le 10 octobre 1980 à Genève, sous les auspices des Nations Unies. Les Etats ont voulu à l'époque faire en sorte que le droit d'infliger des dommages à l'adversaire ne soit pas illimité et que les populations civiles soient épargnées en toutes circonstances. La Convention sur les armes classiques se compose d'un traité-cadre et de protocoles. Les Etats parties ne sont pas nécessairement liés à chaque protocole ou à la dernière version de chaque protocole. Les protocoles règlent l'emploi de certaines armes classiques: ­

Le Protocole I2 interdit l'usage d'armes dont l'effet principal est de blesser par des éclats qui ne sont pas localisables par rayons X dans le corps humain.

­

Le Protocole II3 régit l'emploi des mines et interdit de placer des explosifs dans des objets en apparence inoffensifs. Ce Protocole a été révisé lors de la première Conférence d'examen de la Convention sur les armes classiques qui s'est déroulée à Genève en 19964 (Protocole II révisé).

­

Le Protocole III5 limite l'emploi des armes incendiaires, comme le napalm, aux objectifs militaires et l'interdit lorsque des populations civiles risquent d'être également touchées.

­

Le Protocole IV6 interdit d'employer des armes à laser aveuglantes lorsqu'elles sont spécifiquement conçues pour provoquer une cécité permanente.

Le traité-cadre sert de fondement juridique aux protocoles précités et énonce les règles générales qui leur sont applicables. Il s'agit d'un instrument dynamique puisque l'une de ses dispositions prévoit que les Etats parties peuvent demander à compléter la Convention de façon à interdire ou limiter d'autres systèmes d'armes classiques conventionnelles ou à étendre des interdictions ou des restrictions existantes.

La Suisse a ratifié la Convention et ses trois premiers protocoles le 20 août 1982, puis le Protocole II révisé et le Protocole IV le 24 mars 1998. La deuxième Conférence d'examen a adopté, le 21 décembre 2001, une modification de l'art. 1 du 1 2 3 4 5 6

RS 0.515.091 Protocole sur les éclats non localisables (annexé à la Convention sur les armes classiques), RS 0.515.091 Protocole sur l'interdiction ou la limitation de l'emploi des mines, pièges et autres dispositifs (annexé à la Convention sur les armes classiques), RS 0.515.091 Protocole sur l'interdiction ou la limitation de l'emploi des mines, pièges et autres dispositifs dans sa version modifiée du 3 mai 1996, RS 0.515.091.2 Protocole sur l'interdiction ou la limitation de l'emploi des armes incendiaires (annexé à la Convention sur les armes classiques), RS 0.515.091 Protocole sur les armes à laser aveuglantes, RS 0.515.091.1

5256

traité-cadre, qui étend le champ d'application de la Convention et de ses protocoles alors en vigueur aux conflits armés non internationaux. La Suisse a ratifié cet amendement le 19 janvier 20047.

1.2

Dispositions de la Convention sur les armes classiques relatives à l'approbation de protocoles additionnels

L'art. 8, par. 2, de la Convention sur les armes classiques régit l'approbation de protocoles additionnels concernant d'autres catégories d'armes classiques sur lesquelles les protocoles annexés existants ne portent pas. Il prévoit une procédure qui peut être déclenchée par chacun des Etats parties avec l'approbation d'une majorité réunissant au moins 18 Etats parties. L'art. 8, par. 2, let. a, dispose en outre que lorsque cette condition est remplie, le Dépositaire convoque dans les meilleurs délais une conférence à laquelle tous les Etats sont invités8.

Selon l'art. 8, par. 2, let. b, une telle conférence peut, avec la pleine participation de tous les Etats représentés, approuver des protocoles additionnels qui sont adoptés de la même manière que la Convention sur les armes classiques, y sont annexés et entrent en vigueur conformément aux par. 3 et 4 de l'art. 5.

2

Genèse du Protocole V

2.1

Travaux préparatoires et Conférences des Etats parties des 27 et 28 novembre 2003

En l'an 2000, le Comité international de la Croix-Rouge (CICR) a proposé de lancer, dans le cadre de la Convention sur les armes classiques, un processus de négociations visant à régler, de façon juridiquement contraignante, le problème des restes explosifs de guerre. Il a signalé que les munitions qui ont été tirées, mais qui, contrairement à leur but explosif initial, n'ont pas explosé, représentent une menace considérable, souvent insidieuse, pour les populations civiles. Elles mettent en danger, blessent ou tuent des civils encore longtemps après la fin d'un conflit armé.

Les débris de guerre explosifs entravent gravement les efforts de reconstruction et rendent plus difficiles l'acheminement de l'aide humanitaire ainsi que l'exploitation ou la remise en état de surfaces agricoles et forestières. De nombreux anciens conflits ont démontré que les débris de guerre explosifs empêchent le retour de la population civile qui a dû fuir9. La menace permanente qui pèse sur la population civile en raison de l'emploi de bombes explosives pendant le conflit du Kosovo en 1999 a suscité de nombreux appels politiques en faveur d'une réglementation internationale. Largement diffusées, les informations sur les conséquences des ratés enregistrés pendant les conflits en Afghanistan en 2001 et 2002 et en Irak en 2003 ont donné encore plus de poids à ces appels.

7 8 9

RS 0.515.091.3 Voir à ce sujet chap. 3.3.

Voir UNDOC CCW/CONF.II/PC.1/WP.1; UNDOC CCW/GGE/I/WP.5; John Borrie: Explosive Remnants of War. A Global Survey. London: Landmine Action, 2003.

ISBN 0-9536717-5-5; p. 10­12.

5257

La deuxième Conférence d'examen de la Convention sur les armes classiques a décidé, le 21 décembre 2001, d'instituer un groupe d'experts gouvernementaux chargé d'examiner le problème des restes explosifs de guerre sous l'angle juridique, militaire et technique. Le groupe a oeuvré pendant une année avant que les Etats parties à la Convention sur les armes classiques, réunis à Genève le 13 décembre 2002, décident de lancer des négociations sur un nouvel instrument international relatif aux restes explosifs de guerre10. Selon le mandat donné11, les négociations devaient définir les mesures permettant de réduire au maximum les risques humanitaires découlant des restes explosifs de guerre après un conflit.

Au cours de trois séances tenues en 2003, le groupe d'experts gouvernementaux a élaboré le projet de Protocole. Les Etats parties réunis à Genève les 27 et 28 novembre 2003 l'ont adopté, permettant ainsi de régler, sur le plan du droit international public, la question des restes explosifs de guerre. Ils ont, en outre, chargé le groupe d'experts gouvernementaux de poursuivre, en 2004, l'examen des mesures préventives. En novembre 2004, ce mandat a été prolongé d'une année.12

10

11

12

Par. 21 du rapport (CCW/MSP/2002/2) de la Réunion des Etats parties à la Convention sur l'interdiction ou la limitation de l'emploi de certaines armes classiques qui peuvent être considérées comme produisant des effets traumatiques excessifs ou comme frappant sans discrimination, Genève, 13 décembre 2002.

L'élément essentiel du mandat était le suivant (par. 21 du Rapport [UNDOC.

CCW/MSP/2002/2]): «La Réunion des Etats parties a décidé de reconduire le Groupe de travail sur les restes explosifs des guerres dans ses fonctions en 2003, avec le mandat ci-après: (a) (i) Négocier un instrument sur les mesures correctives générales à prendre après les conflits pour réduire les risques découlant des restes explosifs de guerre. Ces mesures seraient fondées sur une définition large couvrant la plupart des types de munitions, à l'exception des mines. Les munitions abandonnées devraient être couvertes. Lors de ces négociations, il faudra examiner certaines questions concernant notamment la responsabilité pour le déblaiement, les restes explosifs existants, la communication des renseignements nécessaires pour faciliter le déblaiement et l'éducation relative aux risques, l'avertissement des populations civiles, l'assistance et la coopération et le cadre à utiliser pour la tenue de consultations régulières entre les Hautes Parties contractantes. En outre, le champ d'application de cet instrument devrait y être défini conformément à l'article premier de la Convention, tel qu'il a été modifié lors de la deuxième Conférence d'examen.

(ii) Déterminer dans quelle mesure ces négociations permettraient de définir des mesures préventives générales propres à améliorer la fiabilité des munitions couvertes par la définition large convenue, au moyen de pratiques optimales adoptées de plein gré pour fabriquer ces munitions, en contrôler la qualité, les manipuler et les stocker. Les échanges d'informations, l'assistance et la coopération seraient des aspects importants de ces pratiques optimales.» Les Etats parties ont décidé de confier au groupe de travail sur les restes explosifs de guerre le mandat suivant pour l'année 2005: «Continuer d'examiner, y compris avec la participation de juristes, l'application des principes existants du droit international humanitaire et, en privilégiant tout particulièrement les réunions
d'experts militaires et techniques, poursuivre des travaux complémentaires, ouverts à tous, sur les mesures préventives qu'il serait possible de prendre pour améliorer la conception de certains types particuliers de munitions, y compris les sous-munitions, afin de réduire autant que faire se peut les risques de voir de telles munitions devenir des restes explosifs de guerre et poser ainsi des problèmes humanitaires. Les échanges d'informations, l'assistance et la coopération feraient partie intégrante de ces travaux. Le Groupe fera rapport aux Etats parties à leur prochaine réunion sur les travaux qu'il aura effectués.»

5258

2.2

Position de la Suisse

Dans le cadre de la Convention sur les armes classiques, la Suisse a toujours oeuvré pour faire progresser la cause humanitaire ainsi que pour renforcer et promouvoir le droit international humanitaire dans le but d'atténuer les conséquences de la guerre pour les populations civiles avant tout, mais aussi pour protéger les combattants contre les armes et les méthodes de guerre qui dépassent le but légitime des conflits armés, à savoir la mise hors combat de l'adversaire. Dans cette action, la Suisse a également tenu compte des intérêts de la défense nationale et des nécessités militaires.

Dans l'optique suisse, les préjudices humains, sociaux et économiques dus aux restes explosifs de guerre justifient une réglementation internationale. Selon une estimation des organisations expertes en la matière, plus de 80 pays sont touchés par les débris de guerre explosifs13. En 2002, des accidents provoqués par des munitions non explosées ou des munitions explosives abandonnées ont été enregistrés dans plus de 40 pays. Dans plusieurs Etats comme le Laos, le Cambodge et le Vietnam, les restes explosifs de guerre constituent un problème plus grave que les mines terrestres. Le besoin qu'ont certains pays de bénéficier d'un soutien international pour enlever les restes explosifs de guerre et pour assister et réadapter les victimes est considérable.

Durant les négociations du Protocole V, la délégation suisse s'est donc engagée en faveur d'un instrument solide, efficace et contraignant qui réduise les effets négatifs des restes explosifs de guerre, y compris les munitions à fragmentation, sur la population civile et la reconstruction du pays14. La Suisse a estimé que des mesures postconflictuelles, comme une obligation d'enlever les restes directement après la cessation des hostilités actives, étaient susceptibles de diminuer les risques découlant des débris de guerre explosifs. Mais elle a aussi insisté sur le fait que des mesures techniques préventives visant à accroître la qualité et la fiabilité des systèmes d'armes et des munitions explosives, en particulier les munitions à fragmentation, constituaient, à côté de l'obligation d'enlèvement, un élément essentiel d'une réglementation globale des munitions explosives permettant d'améliorer durablement la protection des populations civiles15. Dans le Protocole V,
les mesures préventives générales figurent uniquement dans l'annexe technique qui n'est pas juridiquement contraignante. Lors des réunions de 2003 et 2004des Etats parties à la Convention sur les armes classiques, il a été décidé de poursuivre les efforts de prévention concernant 13 14

15

John Borrie: Explosive Remnants of War (voir n.b.p. 9), p. 10­12.

Pour la Suisse, il était important que les munitions à fragmentation qui présentent un fort potentiel de risque pour les populations civiles tombent sous la notion de «munitions explosives». Les munitions à fragmentation (appelées aussi munitions à dispersion) sont des engins dont l'enveloppe extérieure s'ouvre pour libérer de très nombreuses petites bombes hautement explosives («bomblets», sous-munitions). Elles sont soit larguées depuis un avion (bombes à fragmentation), soit lancées par des batteries d'artillerie. A une certaine altitude au-dessus de la région-cible, les sous-munitions sont libérées et explosent soit à l'approche de la cible, soit en touchant la cible, soit avec un certain retard. Tout dépend du type ou du réglage du détonateur. En raison de leur effet de dispersion, ces munitions sont utilisées contre des objectifs sur zone. Lorsque que les sousminutions n'explosent pas en touchant le sol, elles ont, pour les populations civiles, le même effet que les mines antipersonnel.

L'idée fondamentale des mesures préventives techniques est de réduire autant que possible le nombre de ratés grâce à des dispositifs techniques, tels que les mécanismes d'autodestruction ou d'autodésactivation.

5259

les munitions explosives. La Suisse envisage de continuer à soutenir ces travaux avec force et d'exploiter toutes les possibilités qui s'offrent pour améliorer la protection de la population civile en cas d'emploi de munitions explosives.

3

Le Protocole V relatif aux restes explosifs de guerre

3.1

Généralités

Le Protocole V (ci-après le Protocole) se compose de onze articles qui, comme son préambule le met en évidence, définissent les règles juridiquement contraignantes, et d'une annexe, dite technique.

Les dispositions juridiquement obligatoires régissent les mesures correctives à prendre après des conflits armés en vue de réduire autant que faire se peut les risques inhérents aux restes explosifs de guerre. Ces mesures consistent essentiellement à marquer les zones à risques et à enlever les restes explosifs de guerre. Elles servent aussi à protéger les populations civiles, les civils isolés ainsi que les missions et les organisations humanitaires. Le Protocole concerne principalement les futurs restes explosifs de guerre et invite les Etats parties à collaborer en vue de les éliminer. Le Protocole n'a aucun effet juridique rétroactif et ne fonde aucune obligation de l'utilisateur d'enlever des restes explosifs de guerre existants ou à venir.

L'annexe dite technique contient des recommandations, dépourvues de caractère juridiquement contraignant, sur les mesures préventives à prendre et les pratiques optimales à mettre en oeuvre. Elle porte sur l'enregistrement, l'archivage et la communication des renseignements, les avertissements, la sensibilisation aux risques, le marquage et la surveillance ainsi que sur la fabrication, le maniement et le stockage des munitions explosives.

La langue de négociation du Protocole V adopté par la réunion des Etats parties du 28 novembre 2003 était l'anglais. Seule la version anglaise du Protocole a fait l'objet de la décision d'adoption de la conférence des Etats parties. Les versions du Protocole dans les autres langues officielles des Nations Unies sont des traductions.

3.2

Contenu du Protocole V

3.2.1

Dispositions générales et champ d'application (art. 1)

Le préambule met en évidence le fait que le Protocole propose une solution combinée de règles juridiquement contraignantes et de recommandations, de nature juridiquement non contraignantes, quant aux meilleures pratiques à observer16. Les mesures détaillées qui figurent dans l'annexe technique et doivent permettre d'atteindre les objectifs énoncés aux art. 4, 5 et 9 sont, de par leur nature, de simples directives dont l'application est laissée au bon gré des Etats parties.

16

Le Protocole V est le seul protocole annexé à la Convention sur les armes classiques qui contient un préambule. Celui-ci était nécessaire pour expliquer la méthode de réglementation qui diffère de celle utilisée pour le traité-cadre et les Protocoles adoptés jusqu'ici.

5260

L'art. 1 contient des prescriptions générales et définit le champ d'application du Protocole. Dans la mesure où le par. 1 renvoie au droit international applicable aux conflits armés, il inclut aussi bien le droit international conventionnel que le droit coutumier ­ et ainsi la possibilité d'appliquer les principes essentiels du droit international humanitaire dans les rapports avec tous les Etats. Par conséquent, il ne restreint ni n'amoindrit les obligations découlant, pour les Etats parties, du droit international coutumier.

Selon le par. 2, le Protocole s'applique aux restes explosifs de guerre qui se trouvent sur le sol des Etats parties, y compris dans leurs eaux intérieures. Le problème des débris de guerre explosifs résulte essentiellement de conflits armés qui se déroulent sur terre. Mais il fallait prendre en compte du fait que les eaux intérieures jouxtant la terre, comme les entrées de ports, les fleuves ou les lacs intérieurs, peuvent également être touchées suite, par exemple, au largage de munitions en vol. Les Etats parties ont décidé d'un commun accord de se rallier à la notion d'eaux intérieures utilisée à l'art. 8, al. 1, de la Convention des Nations Unies sur le droit de la mer du 10 décembre 198217. Le Protocole s'applique donc aux eaux d'un Etat qui sont situées en deçà de la ligne de base de la mer territoriale.

Lors des débats sur la modification de l'art. 1 de la Convention sur les armes classiques, qui a été adoptée le 21 décembre 2001 et étend le champ d'application de la Convention aux conflits armés non internationaux, les Etats n'ont pu se rallier à la proposition selon laquelle l'extension du champ d'application aux conflits internes devait s'appliquer automatiquement à tout nouveau protocole18. Chaque nouveau protocole doit donc comporter une disposition indiquant explicitement qu'il est applicable aux conflits armés non internationaux. C'est ce que précise le par. 3 qui se réfère aux par. 1 à 6 de l'article premier de la Convention, tel qu'il a été modifié le 21 décembre 2001.

Le par. 4 opère une distinction entre d'une part les restes explosifs de guerre qui apparaissent après l'entrée en vigueur du Protocole à l'égard d'un Etat partie et, d'autre part, les restes explosifs existants, soit les débris de guerre explosifs qui se trouvaient déjà sur le territoire
d'un Etat au moment de l'entrée en vigueur du Protocole à l'égard de cet Etat19. Les dispositions des par. 6, 7, 9, 10 et 11 ainsi que de la partie 3 de l'annexe technique s'appliquent aussi bien aux restes explosifs de guerre anciens qu'aux nouveaux. En revanche, les obligations relatives à l'enlèvement, au retrait ou à la destruction, celles concernant l'enregistrement et la communication de renseignements, les mesures de protection en faveur de la population civile, la coopération internationale ainsi que les parties 1 et 2 de l'annexe technique ne s'étendent pas aux restes explosifs de guerre existants.

17

18

19

La Suisse a signé la Convention des Nations Unies sur le droit de la mer le 17 octobre 1984, mais ne l'a pas encore ratifiée. Le Parlement doit toutefois débattre de la question de la ratification durant cette législature encore.

Voir le Message du 16 avril 2003 concernant l'amendement du 21 décembre 2001 de l'art. 1 de la Convention du 10 octobre 1980 sur l'interdiction ou la limitation de l'emploi de certaines armes classiques qui peuvent être considérées comme produisant des effets traumatiques excessifs ou comme frappant sans discrimination, FF 2003 3153; pour ce point précis, pp. 3161 s.

Voir à ce sujet les définitions à l'art. 2, par. 5.

5261

3.2.2

Définitions (art. 2)

L'art. 2 définit la munition explosive comme une munition classique contenant un explosif. Pour éviter toute difficulté d'interprétation, il précise que la notion de munition explosive ne comprend pas les mines, pièges et autres dispositifs tels qu'ils sont définis aux par. 1 à 5 et 14 de l'art. 2 du Protocole II révisé annexé à la Convention sur les armes classiques20. La définition, qui se veut très large, inclut tant les munitions non explosées que les munitions explosives abandonnées (art. 2, al.4).

Pour déterminer les conséquences juridiques du Protocole, il s'est avéré nécessaire de faire une distinction claire entre d'une part les restes explosifs de guerre qui existent déjà au moment de l'entrée en vigueur du Protocole et, d'autre part, les restes explosifs apparus seulement à la suite de nouveaux conflits armés. Pour de nombreux Etats, cette distinction a joué un rôle capital au cours des négociations.

Certains ne pouvaient admettre la possibilité d'une renaissance du droit à des dommages intérêts, à une réparation ou à d'autres exigences comparables résultant des effets de restes explosifs de guerre existants datant d'anciens conflits armés. Le Protocole stipule donc que les restes explosifs de guerre existants sont les munitions non explosées et les munitions explosives abandonnées qui préexistent à l'entrée en vigueur du Protocole à l'égard de l'Etat contractant sur le territoire de laquelle elles se trouvent (art. 2, al. 5).

3.2.3

Obligation d'enlèvement et communication de renseignements (art. 3 et 4)

L'art. 3 relatif à l'enlèvement, au retrait ou à la destruction des restes explosifs de guerre et l'art. 4 sur l'enregistrement, la conservation et la communication de renseignements constituent les éléments essentiels du Protocole.

En vertu de l'art. 3, par. 1, chaque Etat contractant, de même que chaque partie à un conflit armé assume la responsabilité de tous les restes explosifs de guerre se trouvant sur un territoire qu'elle contrôle. Une partie qui ne contrôle plus le territoire sur lequel elle a employé des munitions explosives devenues des restes explosifs de guerre doit, après la cessation des hostilités actives, fournir une assistance pour faciliter le marquage et l'enlèvement, le retrait ou la destruction de ces restes explosifs. Cette obligation n'existe que dans la mesure où il est possible, pratiquement, d'y satisfaire. Sans cette réserve restrictive, aucun consensus n'aurait pu être trouvé au cours des négociations portant sur cette disposition. Celle-ci ne fonde donc pas une responsabilité de l'utilisateur en matière d'enlèvement. Il est toutefois tenu, dans la mesure de ses possibilités, de prêter assistance à l'Etat sur le territoire duquel se trouvent les restes explosifs de guerre provenant des munitions qu'il a employées.

Comme une aide directe entre anciens adversaires pourrait être problématique, le par. 5 prévoit que l'aide peut être fournie par un tiers, comme, par exemple les Nations Unies ou d'autres organisations. Cette règle correspond à celle du par. 3 de 20

Art. 2, par.1; voir Protocole sur l'interdiction ou la limitation de l'emploi des mines, pièges et autres dispositifs dans sa version modifiée du 3 mai 1996 (Protocole II dans sa version modifiée du 3 mai 1996) annexé à la Convention du 10 octobre 1980 sur l'interdiction ou la limitation de l'emploi de certaines armes classiques qui peuvent être considérées comme produisant des effets traumatiques excessifs ou comme frappant sans discrimination, RS 0.515.091.2.

5262

l'art. 10 du Protocole II révisé de la Convention sur les armes classiques. Elle va plus loin que la prescription comparable de l'art. 5, par. 1, de la Convention du 18 septembre 1997 sur l'interdiction de l'emploi, du stockage, de la production et du transfert des mines antipersonnel et sur leur destruction21, qui ne prévoit aucune obligation spécifique de l'utilisateur de mines antipersonnel quant à l'aide à accorder à l'Etat concerné22.

L'art. 3, par. 2, contient la règle importante selon laquelle après la cessation des hostilités actives et dès que possible, chaque Partie contractante, de même que chaque partie à un conflit armé, marque et enlève, retire ou détruit les restes explosifs de guerre dans les territoires affectés par ces restes et sous son contrôle. Les opérations d'enlèvement, de retrait ou de destruction doivent être menées en priorité dans les zones affectées par des restes explosifs de guerre dont on estime qu'ils présentent des risques humanitaires graves. Une attention particulière est ainsi accordée à l'objectif humanitaire du Protocole.

Pour pouvoir effectivement repérer et enlever les restes explosifs de guerre, les données relatives à leur composition et à la manière de les détecter sont d'une importance capitale. Elles sont en effet indispensables pour mener les opérations d'enlèvement, de retrait ou de destruction et pour sensibiliser aux risques. L'art. 4 qui s'inspire étroitement de l'art. 9 du Protocole II révisé de la Convention sur les armes classiques23, contient des prescriptions détaillées sur la communication des renseignements. Au moment de négocier la formulation de cette disposition, il a fallu tenir compte de l'importance, en termes de politique de défense et de sécurité, des données susceptibles d'être transmises. L'orientation humanitaire de cette disposition a toutefois pu être préservée et les efforts d'enlèvement et de retrait déployés par les parties sont soutenus par les organisations internationales. Les meilleures pratiques pour enregistrer, archiver et communiquer des renseignements sur les restes explosifs de guerre sont suggérées dans la partie I de l'annexe technique.

Cette annexe précise que l'enregistrement des renseignements devrait être, en ce qui concerne son type et à son ampleur, adapté aux besoins des organisations chargées de
l'enlèvement. Les renseignements doivent être enregistrés de manière à pouvoir être consultés et transmis de manière simple. Enfin, les renseignements doivent être communiqués aussi rapidement que possible en tenant compte toutefois de la situation militaire et humanitaire, de la disponibilité et de la fiabilité des renseignements ainsi que des intérêts en matière de sécurité. Ces recommandations ne concerne pas les restes explosifs de guerre existants.

21 22

23

RS 0.515.092 Voir aussi Stuart Maslen: Commentary on Arms Control Treaties. Vol. I: The Convention on the Prohibition of the Use, Stockpiling, Production, and Transfer of Anti-Personnel Mines and on their Destruction. Oxford: Oxford University Press, 2004.

ISBN 0-19-926977-7; p. 166 s. (No. 5.22­5.24).

RS 0.515.091.2

5263

3.2.4

Protection de la population civile ainsi que des organisations et missions humanitaires (art. 5 et 6)

Les Etats contractants et les parties à un conflit armé sont tenus, en vertu de l'art. 5, de prendre toutes les précautions possibles sur le territoire touché qu'elles contrôlent pour protéger la population civile, les civils isolés et les biens de caractère civil contre les risques inhérents aux restes explosifs de guerre24 et les effets de ces restes.

Sont considérées comme «précautions possibles», les précautions qui sont praticables ou qu'il est pratiquement possible de prendre eu égard à toutes les conditions du moment, notamment aux considérations d'ordre humanitaire et d'ordre militaire. Il s'agit notamment des avertissements, des actions de sensibilisation des populations civiles aux risques inhérents aux restes explosifs de guerre, du marquage, de l'installation de clôtures et de la surveillance du territoire où se trouvent de tels restes. Outre des obligations juridiquement contraignantes, l'art. 5 comporte un renvoi à la deuxième partie de l'annexe technique qui suggère les meilleures pratiques à observer en ce qui concerne les avertissements, la sensibilisation aux risques, le marquage, l'installation de clôtures et la surveillance.

En vertu de l'art. 6, les parties doivent, autant que faire se peut, protéger les organisations et missions humanitaires contre les effets des restes explosifs de guerre. La disposition vise les organisations et missions humanitaires qui opèrent ou vont opérer, avec le consentement de l'Etat partie, dans la zone que celui-ci contrôle. A la demande d'une organisation ou d'une mission humanitaire, la partie concernée doit ­ toujours dans la mesure du possible ­ fournir des renseignements sur l'emplacement de tous les restes explosifs de guerre. L'art. 6 s'applique sans préjudice du droit international humanitaire en vigueur, d'autres instruments internationaux applicables ou encore de décisions du Conseil de sécurité pour autant qu'elles assurent une meilleure protection.

3.2.5

Restes explosifs de guerre existants (art. 7)

L'art. 7 concerne les restes explosifs de guerre existants ­ soit les munitions non explosées et les munitions explosives abandonnées qui existaient à l'entrée en vigueur du Protocole à l'égard de l'Etat partie ­ et donne à chaque Etat partie le droit de solliciter auprès d'autres Etats contractants, d'Etats qui ne sont pas liés par le Protocole, ainsi que d'institutions et organisations internationales compétentes, et de recevoir de ces parties, Etats ou institutions et organisations une assistance pour le règlement des problèmes posés par ces restes explosifs de guerre. Chaque Etat partie qui est en mesure de le faire fournit une assistance pour régler les problèmes posés par les restes explosifs de guerre existants, selon les besoins et les possibilités.

La démarcation entre restes explosifs de guerre et restes explosifs de guerre existants a été l'une des questions les plus difficiles à résoudre au cours des négociations.

Certains Etats souhaitaient une réglementation limitée. D'autres, en revanche, se référant à des institutions du droit international de l'environnement, se sont prononcés en faveur d'une responsabilité en matière d'enlèvement qui soit indépendante de 24

L'art. 5 et la partie 2 de l'annexe technique ne concernent pas les restes explosifs de guerre existants.

5264

la faute, dans le sens d'une responsabilité causale qui s'étendrait aux restes explosifs de guerre existants. Comme nous l'avons mentionné au chiffre 1.2, une large majorité des Etats parties a estimé que le Protocole ne déployait pas d'effet rétroactif. Mais il était évident que le Protocole ne pouvait pas tout simplement éluder les problèmes occasionnés par les restes explosifs de guerre existants. L'art. 7 constitue un compromis qui, d'une part, donne le droit de solliciter de l'aide et appelle les Etats parties qui sont en mesure de le faire, à fournir une aide, mais, d'autre part, laisse aux Etats parties sollicités la liberté de décider s'ils disposent des possibilités nécessaires pour accorder une assistance.

3.2.6

Coopération internationale (art. 8)

L'art. 8 invite les Etats parties qui sont en mesure de le faire à fournir une aide pour le marquage et l'enlèvement, le retrait ou la destruction des restes explosifs de guerre. Il contient, en outre, des prescriptions sur les soins à donner aux victimes des restes explosifs de guerre et leur réadaptation ainsi que sur leur réinsertion sociale et économique. Il laisse à chaque Etat le soin de juger, dans une situation concrète, s'il dispose des moyens techniques, financiers et en personnel nécessaires pour fournir une aide. Une telle aide peut être accordée par le truchement d'organismes des Nations Unies, du CICR, des sociétés nationales de la Croix-Rouge et du CroissantRouge et de leur fédération internationale, mais aussi par des organisations non gouvernementales ou par la voie bilatérale. De plus, chaque Etat partie a le droit de participer à un échange aussi large que possible d'équipements, matières et renseignements scientifiques et techniques. Une exception est toutefois faite en ce qui concerne les technologies liées à l'armement.

Les Etats parties s'engagent par ailleurs à fournir aux bases de données sur l'action anti-mines des informations concernant les différents moyens et techniques d'enlèvement des restes explosifs de guerre ainsi que des listes d'experts, d'organismes spécialisés ou de centres nationaux pour l'enlèvement. Les demandes d'assistance peuvent être déposées par le biais du système des Nations Unies qui peut apporter aussi son soutien pour évaluer la situation et recommander l'assistance qu'il convient de fournir. Dans les cas de demandes adressées aux Nations Unies, le Secrétaire général de l'organisation peut procéder à une évaluation des besoins.

3.2.7

Mesures préventives générales (art. 9)

L'art. 9 et la partie 3 de l'annexe technique qui lui est liée traitent des mesures préventives générales et encouragent les Etats parties à prendre de telles mesures afin de réduire autant que faire se peut l'apparition de restes explosifs de guerre. La partie 3 de l'annexe technique, qui concerne tant les restes explosifs de guerre existants que les «nouveaux», recommande aux Etats qui produisent ou acquièrent des munitions explosives de veiller, dans la mesure du possible et de façon appropriée, à ce que les mesures ci-après soient appliquées et respectées durant le cycle de vie de ces munitions: ­

Lors de la fabrication des munitions explosives, il faudrait appliquer des normes d'assurance-qualité, introduire des mesures de contrôle de la qualité des processus de production, des essais de réception des munitions ainsi que 5265

des normes contraignantes de fiabilité dans les contrats entre acheteurs et vendeurs de munitions explosives.

­

S'agissant de la gestion des munitions, une attention particulière doit être accordée à l'entreposage correct, au transport, à l'enregistrement, au suivi et aux essais. Il faut en outre soumettre périodiquement les munitions explosives à des essais en conditions réelles et en laboratoire pour s'assurer de la durée de vie escomptée et, éventuellement, ajuster cette durée.

­

Le personnel qui manipule, transporte ou emploie des munitions explosives devrait bénéficier d'une formation spécifique.

­

Tout Etat qui transfère des munitions explosives doit veiller à ce que l'Etat qui les reçoit soit en mesure de les stocker, de les maintenir en état et de les employer correctement.

­

Pour la production future de munitions explosives, il faut examiner les moyens d'en améliorer la fiabilité.

A l'occasion de la Réunion des Etats parties des 27 et 28 novembre 2003, la Suisse a fait valoir qu'à son avis l'art. 9 et la partie 3 de l'annexe technique n'excluait pas une nouvelle réglementation relative aux mesures techniques préventives, en particulier pour les munitions à fragmentation.

3.2.8

Consultations des Hautes Parties contractantes et respect des dispositions (art. 10 et 11)

Selon l'art. 10, une conférence des Etats parties peut être convoquée pour débattre de toutes questions concernant le fonctionnement du Protocole. Il faut toutefois qu'une majorité d'au moins 18 Hautes Parties contractantes en conviennent. Une conférence des Hautes Parties contractantes est habilitée à examiner l'état et le fonctionnement du Protocole, les questions concernant l'application nationale du Protocole, y compris la présentation ou la mise à jour de rapports nationaux annuels, et à préparer les conférences d'examen.

Contrairement au Protocole II révisé qui prévoit, à l'art. 13, par. 4, qu'un échange d'informations doit avoir lieu chaque année, le Protocole V réserve cet échange à la décision ultérieure d'une conférence des Etats parties. Cette différence s'explique par le fait que de nombreux Etats parties ­ spécialement les plus petits ­ ont exprimé leur réticence pendant les négociations à approuver l'introduction d'un autre échange d'informations qui mettrait encore à plus lourde épreuve leurs capacités nationales limitées.

En vertu de l'art. 11, chaque Etat partie est tenu de requérir de ses forces armées ainsi que des autorités ou services concernés qu'ils établissent les instructions et modes opératoires appropriés et veillent à ce que leur personnel reçoive une formation conforme aux dispositions pertinentes du Protocole. Les Etats parties s'engagent en outre à se consulter et à coopérer entre eux à l'échelon bilatéral, par l'intermédiaire du Secrétaire général des Nations Unies, ou suivant d'autres procédures internationales appropriées, en vue de régler les problèmes qui peuvent se poser concernant l'interprétation et l'application du Protocole.

5266

Les dispositions relatives aux consultations des Etats parties et au respect du Protocole correspondent dans une large mesure à celles prévues aux art. 13 et 14 du Protocole II révisé sans toutefois reprendre l'institution d'une conférence annuelle des Etats. S'agissant du Protocole V, les parties ont sciemment renoncé à donner aux conférences des Etats parties une périodicité régulière.

3.3

Entrée en vigueur du Protocole V sur les restes explosifs de guerre

Conformément à l'art. 5, par. 3, de la Convention sur les armes classiques, tout nouveau Protocole entre en vigueur six mois après la date à laquelle 20 Etats ont notifié leur consentement à être liés par ce Protocole. Pour tout Etat qui a notifié son consentement alors que 20 Etats l'ont déjà fait, le Protocole entre en vigueur six mois après la date de sa notification25.

3.4

Evaluation

Si, dans le Protocole, les dispositions, qui ne visent en principe pas un type d'armes déterminé comme dans les autres protocoles, sont juridiquement contraignantes, les suggestions formulées dans l'annexe technique n'ont pas de caractère obligatoire.

Cette structure reflète les efforts déployés par les Etats parties pour parvenir à un équilibre sur le modèle de la Convention sur les armes classiques. Le Protocole V est le résultat d'un compromis entre les exigences ambitieuses d'une série d'Etats motivés par l'idée de développer fortement le droit international humanitaire et la position contraire d'autres Etats pour lesquels, au début du processus de négociation, seules entraient en ligne de compte des dispositions qui ne seraient contraignantes que sous l'angle politique laissant suffisamment de marge pour des décisions, dictées par l'opportunité, n'ayant pas de caractère juridiquement contraignant.

Le Protocole résout de façon satisfaisante le conflit d'objectifs entre les préoccupations humanitaires d'une part, et les exigences militaires, d'autre part. Même si le Protocole ne parvient pas à régler tous les problèmes liés aux restes explosifs de guerre, il constitue une reconnaissance importante de la responsabilité des Etats quant à la réduction du risque potentiel que présentent les restes explosifs de guerre pour les populations civiles.

La politique suisse en matière de déminage à but humanitaire englobe aujourd'hui déjà les restes explosifs de guerre. Notre pays soutient en effet financièrement les opérations de déminage et forme des spécialistes du déminage et de l'enlèvement des munitions. Il traite, en outre, sur un pied d'égalité les victimes de mines terrestres et celles de restes explosifs de guerre au niveau des soins et de la réadaptation.

Dans l'optique suisse, le Protocole V vient compléter de façon bienvenue le droit international humanitaire.

25

Art. 8, par.1, let. b, en relation avec l'art. 5, par. 1 et 2, de la Convention sur les armes classiques.

5267

4

Compatibilité avec l'ordre juridique suisse

L'armée suisse dispose de munitions explosives qui tombent sous la définition donnée à l'art. 2, par. 1, du Protocole V. Le Règlement 51.30 (tirs avec munitions ou simulateurs) du 22 septembre 1998 basé sur l'ordre du chef de l'instruction du 21 septembre 1994 concernant l'ordre et la propreté sur les places de tir et d'exercice et la destruction des ratés fonde toutefois une obligation d'enlèvement en cas d'emploi de munitions explosives. De plus, une obligation d'enlever les résidus de munitions est prévue dans les règlements de chaque place de tir et d'exercice. A cet égard, aucune adaptation n'est donc nécessaire.

Concernant l'obligation d'enregistrer et de conserver les informations relatives à l'emploi de munitions explosives, le nombre de munitions utilisées est établi par le décompte des coups tirés (nécessaire pour le décompte avec le dépôt de munitions).

Cette information est conservée. La ratification du Protocole ne nécessite donc aucune adaptation de prescriptions. Le Protocole est compatible avec l'ordre juridique suisse tel qu'il existe aujourd'hui.

5

Répercussions financières

L'acceptation du Protocole V n'aura pas de répercussions financières pour la Suisse.

Comme nous l'avons déjà mentionné, la Suisse satisfait aujourd'hui déjà aux obligations prévues dans le Protocole, si bien que celui-ci n'entraînera aucune dépense supplémentaire pour la Confédération et les cantons et n'aura pas d'incidence sur l'effectif de leur personnel. Concernant le règlement de la coopération internationale, il convient de relever que, dans une situation concrète, chaque Etat évalue librement s'il dispose des moyens nécessaires pour prêter assistance. Compte tenu de la politique humanitaire active menée par la Suisse dans le domaine des mines, qui inclut le problème des restes de munitions de guerre non explosives, la Suisse satisfait aujourd'hui déjà aux exigences de cette disposition.

6

Programme de la législature

Le projet n'est pas annoncé dans le rapport 2003­200726. Au moment où ce programme a voir si le Protocole V serait adopté et, le cas C'est pourquoi la ratification du Protocole ne législature.

7

sur le programme de la législature été établi, il était impossible de prééchéant, à quel moment il le serait.

figure pas dans le programme de la

Constitutionnalité

La base constitutionnelle de l'arrêté fédéral relatif à l'acceptation du Protocole V est lancé par l'art. 54, al. 1, Cst., qui habilite la Confédération à conclure des traités avec les Etats étrangers. L'Assemblée fédérale est compétente pour approuver le Protocole V en vertu de l'art. 166, al. 2, Cst.

26

FF 2004 1035

5268

Selon l'art. 141, al. 1, let. d, ch. 1 à 3, Cst., les traités de droit international sont sujets au référendum s'ils sont d'une durée indéterminée et ne sont pas dénonçables (ch. 1), s'ils prévoient l'adhésion à une organisation internationale (ch. 2), s'ils contiennent des dispositions importantes fixant des règles de droit ou si leur mise en oeuvre exige l'adoption de lois fédérales (ch. 3). Le traité-cadre et ses Protocoles sont conclus pour une durée indéterminée, mais ils peuvent être dénoncés en tout temps. La dénonciation prend effet une année après réception de la notification de dénonciation par le Dépositaire sauf si, à l'expiration de ce délai, l'Etat dénonçant est impliqué dans un conflit armé ou se trouve dans une situation d'occupation. Dans ces cas, l'Etat dénonçant demeure lié par les engagements contractés jusqu'à la fin du conflit armé ou de l'occupation27. La Convention sur les armes classiques ne prévoit pas non plus l'adhésion à une organisation internationale.

Reste donc la question du ch. 3. L'appréciation des règles de droit au regard de la Constitution découle de l'art. 164, al. 1, let. a à g, Cst.: il faut considérer comme importantes en particulier toutes les dispositions fondamentales relatives aux droits et aux obligations des personnes ainsi qu'aux tâches et aux prestations de la Confédération. Ainsi, l'assujettissement des traités internationaux au référendum est soumis en principe aux mêmes critères d'appréciation que la question de savoir quelles dispositions fixant des règles de droit doivent être énoncées dans une loi formelle.

Le Protocole V ne prévoit ni nouveaux droits et obligations pour des personnes, ni nouvelles tâches ou prestations pour la Confédération. Il ne contient, en outre, aucune disposition fixant des règles de droit et pouvant être considérée comme importante au sens de l'art. 141, al. 1, let. d, ch. 3, Cst. L'arrêté fédéral qui vous est présenté pour approbation n'est donc pas sujet au référendum en matière de traités internationaux.

27

Voir art. 9 du traité-cadre.

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