12.039 Message concernant la loi fédérale portant modification des mesures d'accompagnement à la libre circulation des personnes du 2 mars 2012

Messieurs les Présidents, Mesdames, Messieurs, Par le présent message, nous vous soumettons le projet de la loi fédérale portant modification des mesures d'accompagnement à la libre circulation des personnes, en vous proposant de l'adopter.

Nous vous prions d'agréer, Messieurs les Présidents, Mesdames, Messieurs, l'assurance de notre haute considération.

2 mars 2012

Au nom du Conseil fédéral suisse: La présidente de la Confédération, Eveline Widmer-Schlumpf La chancelière de la Confédération, Corina Casanova

2011-2952

3161

Condensé Les lacunes de l'actuelle législation sur les mesures d'accompagnement à la libre circulation des personnes doivent être comblées. L'introduction de mesures visant à lutter contre l'indépendance fictive de prestataires de services étrangers, l'introduction de possibilités de sanction à l'encontre d'employeurs qui emploient des travailleurs engagés en Suisse et qui enfreignent les salaires minimaux impératifs prévus par les contrats-types de travail et l'introduction de possibilités de sanction en cas d'infractions aux conventions collectives de travail étendues selon une procédure facilitée permettront de mettre en oeuvre encore plus efficacement les mesures d'accompagnement.

Contexte Les mesures d'accompagnement à la libre circulation des personnes sont entrées en vigueur le 1er juin 2004. Depuis lors, elles ont été renforcées et leur exécution a été optimisée à plusieurs reprises par diverses mesures. Dans le cadre des mesures d'accompagnement, le marché du travail est observé et les conditions de travail contrôlées, afin de pouvoir prendre des mesures en cas d'abus éventuels.

L'expérience acquise pendant sept ans en matière d'exécution des mesures d'accompagnement montre que celles-ci garantissent une protection efficace des travailleurs indigènes et étrangers contre la sous-enchère salariale abusive et les violations des conditions de travail. Ces mesures contribuent en outre à ce que les prestataires de services indigènes et étrangers soient soumis aux mêmes conditions de concurrence et que la population accepte l'accord sur la libre circulation des personnes conclu entre la Suisse et l'Union européenne.

On a cependant constaté des lacunes dans la législation actuelle.

Contenu du projet de loi Le Conseil fédéral propose les mesures suivantes: ­

lutte contre l'indépendance fictive des prestataires de services étrangers par l'introduction d'une obligation de fournir certains documents et par la création de nouvelles dispositions concernant les sanctions;

­

création de la possibilité de sanctionner les employeurs qui emploient des travailleurs engagés en Suisse en cas de non-respect des salaires minimaux impératifs prévus par les contrats-types de travail au sens de l'art. 360a du code des obligations;

­

introduction d'une possibilité de sanctionner les entreprises qui contreviennent à une interdiction exécutoire d'offrir leurs services en Suisse;

­

création d'une base légale permettant la communication des sanctions cantonales exécutoires aux commissions paritaires compétentes;

3162

­

introduction d'une possibilité de sanctionner les infractions aux conventions collectives de travail étendues selon la procédure d'extension facilitée au sens de l'art. 1a de la loi fédérale permettant d'étendre le champ d'application de la convention collective de travail, ce au moyen d'une disposition permettant d'étendre, selon la procédure facilitée, des dispositions sur les sanctions et sur l'imputation de frais de contrôle contenues dans les conventions collectives de travail.

3163

Table des matières Condensé

3162

1 Présentation de l'objet 1.1 Contexte 1.1.1 L'accord sur la libre circulation des personnes 1.1.2 Les mesures d'accompagnement à la libre circulation des personnes 1.1.3 Récents développements dans le domaine des mesures d'accompagnement 1.1.3.1 Problématique de l'indépendance fictive 1.1.3.2 Absence de possibilités de sanction en cas d'infractions aux contrats-types de travail prévoyant des salaires minimaux impératifs 1.1.3.3 Absence de possibilités de sanction en cas d'infractions aux conventions collectives de travail étendues selon une procédure facilitée 1.2 Les changements proposés 1.2.1 Mesures de lutte contre l'indépendance fictive de prestataires de services étrangers 1.2.2 Sanctions en cas d'infractions aux contrats-types de travail contenant des salaires minimaux impératifs 1.2.3 Sanction des entreprises qui passent outre à une interdiction exécutoire d'offrir leurs services en Suisse 1.2.4 Création d'une base légale pour la communication des sanctions cantonales exécutoires aux commissions paritaires compétentes 1.2.5 Sanctions en cas d'infractions aux conventions collectives de travail étendues selon la procédure d'extension facilitée 1.3 Justification et appréciation de la solution proposée 1.3.1 Mesures de lutte contre l'indépendance fictive 1.3.2 Sanctions en cas d'infractions aux contrats-types de travail contenant des salaires minimaux impératifs 1.3.3 Possibilité de sanction des entreprises qui passent outre à une interdiction exécutoire d'offrir leurs services en Suisse 1.3.4 Création d'une base légale permettant la communication des sanctions cantonales exécutoires aux commissions paritaires compétentes 1.3.5 Sanction en cas d'infractions aux conventions collectives de travail étendues selon la procédure facilité 1.3.6 Résultats de la procédure de consultation 1.3.6.1 Mesures de lutte contre l'indépendance fictive 1.3.6.2 Sanctions en cas d'infraction aux salaires minimaux impératifs prévus par les contrats-types de travail 1.3.6.3 Sanctions en cas d'infraction aux conventions collectives de travail étendues selon une procédure facilitée 1.3.6.4 Autres résultats

3166 3166 3166

3164

3166 3168 3169 3170 3171 3172 3172 3174 3175 3175 3175 3177 3177 3179 3180 3180 3180 3181 3181 3181 3181 3182

1.4 Application

3183

2 Commentaire 2.1 Loi fédérale permettant d'étendre le champ d'application de la convention collective de travail 2.2 Loi fédérale sur les travailleurs détachés

3183

3 Conséquences 3.1 Conséquences pour la Confédération 3.2 Conséquences pour les cantons et les communes 3.3 Conséquences économiques

3188 3188 3189 3190

4 Liens avec le programme de la législature et la planification financière

3190

5 Aspects juridiques 5.1 Constitutionnalité et conformité aux lois 5.2 Compatibilité avec les obligations internationales de la Suisse 5.3 Forme de l'acte à adopter

3190 3190 3190 3191

Loi fédérale portant modification des mesures d'accompagnement à la libre circulation des personnes (Projet)

3193

3183 3183

3165

Message 1

Présentation de l'objet

1.1

Contexte

Le 21 juin 1999, la Suisse et l'Union européenne (UE) et ses Etats membres ont signé sept accords sectoriels, dont l'Accord entre la Confédération suisse d'une part, et la Communauté européenne et ses Etats membres, d'autre part, sur la libre circulation des personnes (ALCP)1. L'ALCP a été approuvé par le peuple en 2000 et est entré en vigueur le 1er juin 2002. Le peuple a approuvé en 2005 l'extension de l'accord aux dix pays qui sont devenus membres de l'UE en 20042, et cette extension est entrée en vigueur le 1er avril 2006. En 2009, le peuple a approuvé l'extension de l'accord à la Roumanie et à la Bulgarie, qui ont rejoint l'UE en 2007; cette extension est entrée en vigueur le 1er juin 2009.

1.1.1

L'accord sur la libre circulation des personnes

L'ALCP a introduit progressivement entre la Suisse et l'UE les règles de base de la libre circulation des personnes qui ont cours au sein de l'UE. Les ressortissants de la Suisse et des Etats membres de l'UE ont le droit de choisir librement leur lieu de travail et de résidence sur le territoire des parties contractantes. La condition requise est qu'ils possèdent un contrat de travail valable, qu'ils soient indépendants ou ­ s'ils sont sans activité lucrative ­ qu'ils puissent établir qu'ils disposent de moyens financiers suffisants et qu'ils ont une assurance-maladie. La libre circulation des personnes est complétée par la reconnaissance mutuelle des diplômes professionnels ainsi que par la coordination des systèmes nationaux de sécurité sociale.

L'ALCP prévoit aussi une libéralisation limitée de la prestation de services transfrontalière aux personnes. Les travailleurs détachés et les prestataires de services indépendants ont le droit de se rendre dans un des pays couverts par l'accord et d'y fournir des prestations de services pour une durée pouvant aller jusqu'à 90 jours de travail par année civile. L'ALCP accorde à ces personnes, ainsi qu'à celles qui sont habilitées à fournir des prestations en application d'un accord de services particulier entre la Suisse et l'UE (p. ex. mandats publics), le droit d'entrer sur le territoire suisse et d'y séjourner pendant toute la durée de l'activité.

1.1.2

Les mesures d'accompagnement à la libre circulation des personnes

Dans le cadre de l'introduction progressive de la libre circulation des personnes entre la Suisse et l'UE, le contrôle du respect des conditions usuelles de travail et de salaire préalable à l'octroi d'une autorisation a disparu le 1er juin 2004. Comme la Suisse est en comparaison avec l'UE un pays à hauts salaires, il y a un risque que les 1 2

RS 0.142.112.681 Chypre, Estonie, Hongrie, Lettonie, Lituanie, Malte, Pologne, République tchèque, Slovaquie et Slovénie

3166

salaires subissent des pressions à la baisse en conséquence de la libre circulation des personnes. Les mesures d'accompagnement ont été introduites pour compenser l'abandon du contrôle préalable et systématique du marché du travail, afin de lutter contre la sous-enchère abusive par rapport aux conditions de travail et de salaire usuelles en Suisse. Lorsque des cas de sous-enchère salariale abusive sont constatés, des mesures sont prises au plan individuel et au plan collectif. Il s'agit, au plan individuel, de mesures telles que les sanctions contre les employeurs étrangers fautifs et, au plan collectif, de mesures comme l'extension facilitée de conventions collectives de travail et l'édiction de contrats-types de travail comportant des salaires minimaux impératifs.

Les mesures d'accompagnement sont entrées en vigueur le 1er juin 2004, en parallèle à la deuxième phase transitoire de la libre circulation des personnes.

Elles comportent pour l'essentiel les règles suivantes: ­

La loi fédérale du 8 octobre 1999 sur les travailleurs détachés (Ldét)3 impose à un employeur étranger qui détache des travailleurs dans le cadre d'une prestation de services transfrontalière de respecter les conditions minimales de travail et de salaire prescrites par les lois fédérales, les conventions collectives de travail étendues et les contrats-types de travail au sens de l'art. 360a du code des obligations (CO)4.

­

En cas de sous-enchère salariale abusive et répétée, les dispositions d'une convention collective de travail sur les salaires minimaux, la durée du travail et l'exécution paritaire peuvent faire l'objet d'une extension facilitée au sens de l'art. 1a de la loi fédérale du 28 septembre 1956 permettant d'étendre le champ d'application de la convention collective de travail (LECCT)5. Cette mesure s'applique tant aux entreprises indigènes qu'aux entreprises détachant des travailleurs.

­

Dans les branches ne possédant pas de convention collective de travail, des contrats-types de travail au sens de l'art. 360a CO, comportant des salaires minimaux impératifs, peuvent être édictés en cas de sous-enchère salariale abusive et répétée. Cette mesure s'applique à toutes les entreprises de la branche concernée.

Avec l'extension de l'ALCP aux dix Etats ayant adhéré à l'UE en 2004, l'efficacité des mesures d'accompagnement a été renforcée et leur exécution, optimisée. On a encore optimisé l'exécution des mesures d'accompagnement au 1er janvier 2010 suite à l'extension de l'ALCP à la Roumanie et à la Bulgarie. Le renforcement et l'optimisation des mesures d'accompagnement comprenaient en particulier l'obligation faite aux cantons d'engager des inspecteurs du travail en nombre suffisant, des sanctions plus sévères, l'obligation des prestataires de services indépendants de prouver leur indépendance, l'applicabilité de dispositions de conventions collectives de travail étendues aux prestataires de services étrangers (notamment le dépôt obligatoire d'une caution et l'obligation de verser des contributions aux frais d'exécution) et la détermination par voie d'ordonnance d'un nombre contraignant de contrôles annuels (27 000).

3 4 5

RS 823.20 RS 220 RS 221.215.311

3167

La mise en oeuvre des mesures d'accompagnement a été confiée à différents acteurs.

Il existe un dualisme de l'exécution, reposant sur la distinction entre branches couvertes par une convention collective de travail dont le champ d'application a été étendu et branches non couvertes par une telle convention.

Les commissions tripartites au niveau cantonal et fédéral observent l'évolution du marché du travail en général, examinent les cas suspects de sous-enchère salariale et proposent à l'autorité cantonale compétente des mesures lorsqu'elles constatent une sous-enchère salariale abusive et répétée au sens de l'art. 360a, al. 1, CO. Elles tentent en règle générale au préalable de trouver un accord avec les employeurs concernés (procédure de conciliation, art. 360b, al. 3, CO). Il revient à la commission tripartite d'évaluer s'il y a une sous-enchère salariale abusive et répétée. Les commissions tripartites sont en outre chargées de contrôler le respect des dispositions des contrats-types de travail sur les salaires minimaux au sens de l'art. 360a CO. Les commissions tripartites n'ont, en cas de sous-enchères aux salaires usuels dans la localité ou dans la branche, pas de compétence en matière de sanctions à l'encontre des employeurs étrangers fautifs. Elles sont toutefois tenues de signaler les infractions à la loi constatées à l'autorité cantonale compétente pour prononcer des sanctions.

Dans les branches couvertes par une convention collective de travail étendue, le contrôle du respect des dispositions de la convention collective de travail incombe aux commissions paritaires chargées de son exécution. La LDét leur confie en outre le contrôle du respect de la convention collective de travail par les entreprises étrangères qui détachent des travailleurs. Si ces organes de contrôle constatent des infractions à la LDét, ils doivent les signaler à l'autorité cantonale compétente pour prononcer des sanctions.

1.1.3

Récents développements dans le domaine des mesures d'accompagnement

En sa qualité d'autorité fédérale compétente, le Secrétariat d'Etat à l'économie (SECO) publie chaque année un rapport sur la mise en oeuvre des instruments des mesures d'accompagnement et entretient activement des échanges avec les partenaires sociaux, auxquels est dévolu un rôle important dans l'exécution des mesures d'accompagnement.

Les résultats du récent rapport du SECO, du 3 mai 20116, fournissent un aperçu détaillé de l'ampleur de l'activité de contrôle effectuée par les organes d'exécution, des infractions et des sous-enchères salariales supposées et des sanctions qui en ont résulté pendant l'exercice 2010 sous rapport. Les résultats du rapport indiquent que l'activité de contrôle s'est intensifiée auprès des travailleurs détachés et des indépendants soumis à l'obligation d'annonce et parmi les employés des entreprises suisses. Les organes de contrôle ont même dépassé l'objectif fixé de contrôler 50 pour cent de tous les travailleurs détachés. Les infractions et sous-enchères salariales constatées montrent que les contrôles seront également encore nécessaires à l'avenir. Les commissions tripartites cantonales ont relevé des sous-enchères salariales dans 12 pour cent des entreprises étrangères contrôlées qui détachent du per6

www.seco.admin.ch > Thèmes > Travail > Libre circulation des personnes CH ­ UE et mesures d'accompagnement > Mesures d'accompagnement

3168

sonnel et dans 6 pour cent des entreprises suisses contrôlées. Les commissions paritaires chargées de contrôler le respect des conventions collectives de travail étendues ont fait état d'infractions aux salaires impératifs dans environ un tiers des contrôles.

Le rapport du SECO du 3 mai 2011 et les expériences faites à ce stade dans la mise en oeuvre des instruments des mesures d'accompagnement indiquent que celles-ci garantissent un contrôle efficace du marché du travail. Mais il est également apparu que la législation actuelle comporte des lacunes. L'Union suisse des arts et métiers, les syndicats, certains cantons et de nombreuses interventions parlementaires ont notamment fait état de ces lacunes.

Par décision du 6 juillet 2011, le Conseil fédéral a, après discussion, chargé le Département fédéral de l'économie (DFE) d'élaborer des dispositions permettant de combler les lacunes de la législation sur les mesures d'accompagnement. Le 23 septembre 2011, le Conseil fédéral a lancé la procédure de consultation concernant la loi fédérale portant modification des mesures d'accompagnement à la libre circulation des personnes. La consultation a duré jusqu'au 31 décembre 2011.

1.1.3.1

Problématique de l'indépendance fictive

S'agissant des prestataires de services indépendants provenant de l'étranger, qui fournissent une prestation de services en Suisse, les conditions minimales de salaire et de travail prévues en Suisse par la LDét ne s'appliquent pas, puisque ce ne sont pas des travailleurs salariés. Toutefois, la LDét prévoit que les prestataires de services indépendants doivent prouver leur indépendance aux organes de contrôle de la LDét (art. 1, al. 2, LDét). S'ils ne sont pas en mesure d'apporter la preuve de leur statut d'indépendant, ils sont réputés «indépendants fictifs».

En faisant réaliser une prestation de services par un indépendant fictif, on veut éviter que la personne ne soit soumise aux normes de protection du droit du travail et du droit des assurances sociales. L'indépendance fictive entraîne en outre des distorsions de la concurrence, puisque les employeurs qui occupent des travailleurs doivent supporter des coûts plus élevés.

Aujourd'hui déjà, en vertu de la LDét, les commissions tripartites (dans les branches sans convention collective de travail étendue) et les commissions paritaires (dans les branches avec convention collective de travail étendue) contrôlent si le prestataire de services qui prétend être indépendant l'est effectivement. En raison de la multiplication des constats, par les organes d'exécution, de cas d'indépendance fictive, le SECO a mis en vigueur au 1er janvier 2011 une directive7 «Marche à suivre pour vérifier le statut d'indépendance de prestataires de services étrangers», édictée à l'intention des organes d'exécution. Cette directive facilite aux organes d'exécution l'identification de l'indépendance fictive. Le contrôle du statut d'indépendant des prestataires de services étrangers constitue toutefois un grand défi pour les organes d'exécution. Ce contrôle est en particulier entravé par le fait que les prestataires de services indépendants n'emportent souvent pas de documents permettant d'attester leur statut d'indépendant.

7

www.seco.admin.ch > Thèmes > Travail > Libre circulation des personnes CH ­ UE et mesures d'accompagnement > Détachement de travailleurs en Suisse

3169

La coopération des prestataires de services indépendants lors d'un contrôle, respectivement la fourniture de renseignements constitue la base permettant d'accomplir les contrôles et de constater d'éventuelles infractions aux dispositions en vigueur.

Selon la législation en vigueur, les prestataires de services indépendants ne sont pas tenus d'avoir avec eux les documents attestant leur statut d'indépendant et ils ne peuvent pas être efficacement sanctionnés en cas de violation de leur obligation de renseigner. Lors de l'élaboration de la directive du SECO, il est également apparu que les possibilités de sanction existantes à l'encontre des indépendants fictifs sont incomplètes et que la disposition légale actuelle de la LDét (art. 1, al. 2) manque de clarté.

Outre la directive du SECO, l'Union suisse des arts et métiers, les syndicats et diverses interventions parlementaires ont demandé des possibilités de sanction permettant de lutter efficacement contre l'indépendance fictive. C'est pourquoi la Direction du travail du SECO a institué en décembre 2010 un groupe de travail composé de représentants des partenaires sociaux et des cantons (groupe de travail «indépendance fictive»). Ce groupe de travail a analysé l'ampleur de la problématique de l'indépendance fictive, il a examiné comment on pourrait mettre en oeuvre les possibilités de sanction et les mesures demandées à l'encontre des indépendants fictifs et s'il serait nécessaire de créer à cet effet de nouvelles bases légales au niveau de la loi ou de l'ordonnance.

Diverses interventions parlementaires ont également soulevé la problématique de l'indépendance fictive et ont réclamé que les lacunes légales existantes soient comblées (motion Carobbio Guscetti, 11.3364; motion du groupe parlementaire PBD, 11.3525; motion Estermann, 11.3604; motion Lustenberger, 11.3703; motion Hiltpold, 11.3704; motion Moret, 11.3707).

1.1.3.2

Absence de possibilités de sanction en cas d'infractions aux contrats-types de travail prévoyant des salaires minimaux impératifs

Lorsque les salaires usuels dans une branche ou une profession font l'objet d'une sous-enchère abusive et répétée et qu'il n'existe pas de convention collective de travail contenant des dispositions relatives aux salaires minimaux pouvant être étendue, l'autorité compétente a la possibilité d'édicter un contrat-type de travail prescrivant des salaires minimaux impératifs au sens de l'art. 360a CO.

Conformément à l'art. 2 LDét, les employeurs étrangers qui détachent des travailleurs en Suisse sont tenus de respecter les salaires minimaux prévus par les contratstypes de travail au sens de l'art. 360a CO. S'ils ne le font pas, ils peuvent être frappés, sur la base de la LDét, de sanctions administratives comprenant une amende de 5000 francs au plus ou d'une interdiction d'offrir leurs services en Suisse pour une période d'un à cinq ans. S'ils violent leur obligation de renseigner, c'est-à-dire s'ils donnent des renseignements sciemment inexacts, s'ils refusent de renseigner, s'ils s'opposent à un contrôle ou le rendent impossible, les employeurs se rendent passibles d'une amende de 40 000 francs au plus. Si, de façon systématique et dans un esprit de lucre, les conditions minimales prévues à l'art. 2 LDét ne sont pas garanties, l'employeur s'expose à une amende d'un million de francs au plus.

3170

S'agissant des employeurs suisses, par contre, seuls les bailleurs de services peuvent pour l'heure faire l'objet de sanctions en cas d'infractions aux dispositions concernant les salaires minimaux contenues dans les contrats-type de travail. En effet, selon l'art. 360d, al. 1, CO, un contrat-type de travail prescrivant des salaires minimaux impératifs s'applique également aux travailleurs dont les services ont été loués. Si le bailleur de services ne respecte pas les dispositions impératives d'un contrat-type de travail et qu'il contrevient ce faisant de manière grave ou répétée aux prescriptions impératives de la protection des travailleurs, l'autorisation de pratiquer lui est retirée en vertu de l'art. 16, al. 1, let. b, de la loi fédérale du 6 octobre 1989 sur le service de l'emploi et la location de services8.

S'agissant des autres employeurs qui emploient des travailleurs engagés en Suisse dans des branches soumises à des contrats-types de travail contraignants et qui n'en respectent pas les salaires minimaux impératifs, aucune base légale ne permet de les sanctionner. Ceci remet en question l'efficacité de la mesure que représente le contrat-type de travail comportant des salaires minimaux impératifs. Le législateur a seulement introduit à l'art. 360e CO la possibilité, pour les associations représentant les employeurs ou les travailleurs, d'ouvrir une action tendant à faire constater le respect ou le non-respect du contrat-type de travail au sens de l'art. 360a CO.

Depuis assez longtemps, divers parlementaires (motion Rechsteiner, 08.3611; interpellation Pedrina, 09.4090; question Robbiani, 11.5225; motion Pedrina, 11.3363; motion Pelli, 11.3629), les syndicats ainsi que les cantons de Genève, du Tessin et du Valais ont attiré l'attention sur la problématique de l'impossibilité d'une exécution étatique des salaires minimaux impératifs prévus par les contrats-types de travail et ont réclamé des mesures.

1.1.3.3

Absence de possibilités de sanction en cas d'infractions aux conventions collectives de travail étendues selon une procédure facilitée

La loi fédérale du 28 septembre 1956 permettant d'étendre le champ d'application de la convention collective de travail (LECCT)9 réglemente les compétences et la procédure permettant, à la requête de toutes les parties contractantes, d'étendre le champ d'application d'une convention collective de travail aux employeurs et aux travailleurs qui appartiennent à la branche économique ou à la profession visée et qui ne sont pas liés par cette convention. La commission paritaire prévue par la convention collective de travail est compétente pour assurer le contrôle et l'exécution.

Les commissions tripartites sont, avec d'autres autorités et organes, notamment compétentes pour contrôler le respect de la LDét (art. 7, al. 1 et 2 LDét; cf. aussi art. 360b CO). Si les commissions tripartites constatent des sous-enchères abusives et répétées par rapport aux salaires et à la durée de travail usuels dans la branche, la profession ou la localité, elles peuvent, avec l'accord des parties signataires, déposer une demande d'extension facilitée d'une convention collective de travail dans le cadre des mesures d'accompagnement. Le contenu de l'extension peut comprendre, selon le droit en vigueur, les dispositions contractuelles sur la rémunération mini8 9

RS 823.11 RS 221.215.311

3171

male, les dispositions sur la durée du travail lui correspondant et les dispositions relatives aux contrôles paritaires (art. 1a LECCT).

Les possibilités de sanction prévues dans la convention collective de travail (p. ex.

les peines conventionnelles) ne peuvent pas être étendues de manière facilitée. Il manque donc aux partenaires sociaux une partie des possibilités d'exécution. Ceci remet en question l'efficacité de la mesure consistant à étendre une convention collective de travail de manière facilitée.

1.2

Les changements proposés

Les changements proposés doivent être mis en oeuvre dans le cadre d'une révision de divers actes législatifs et de l'apport de compléments à ces derniers, et concernent les domaines suivants: ­

lutte contre l'indépendance fictive des prestataires de services étrangers;

­

possibilité de sanctionner les employeurs qui emploient des travailleurs engagés en Suisse en cas de non-respect des salaires minimaux impératifs prévus par les contrats-types de travail;

­

possibilité de sanctionner les entreprises qui ne respectent pas une interdiction exécutoire d'offrir leurs services en Suisse;

­

création d'une base légale permettant la communication des sanctions cantonales exécutoires aux commissions paritaires compétentes;

­

possibilité de sanctionner les infractions aux conventions collectives de travail étendues selon la procédure d'extension facilitée.

1.2.1

Mesures de lutte contre l'indépendance fictive de prestataires de services étrangers

Le projet de loi confirme le droit en vigueur, selon lequel la notion de travailleur est régie par le droit suisse10 et la preuve du statut d'indépendant doit être fournie sur demande aux organes de contrôle. Par souci de clarté, le projet de loi précise que la notion d'activité indépendante est également régie par le droit suisse. Désormais, les prestataires de services indépendants seront soumis à l'obligation d'établir une documentation, de manière à ce qu'ils présentent les justificatifs de leur statut d'indépendant lors des contrôles sur place. Les expériences faites par les organes d'exécution de la LDét ont montré que le contrôle du statut d'indépendant est entravé quand certains documents servant à prouver l'indépendance ne peuvent pas être vérifiés directement lors du contrôle sur place. Le fait de prévoir, au niveau de la loi déjà, quels documents servent à apporter la preuve de l'indépendance simplifie l'exécution.

10

Cf. explications sous ch. 276.134, lettre B du message du 23 juin 1999 relatif à l'approbation des accords sectoriels entre la Suisse et la CE, FF 1999 5440.

3172

Outre l'obligation de fournir de la documentation pour les indépendants, le projet de loi prévoit les mesures susceptibles d'être prises en cas de non-respect de ladite obligation. Ce non-respect doit donner lieu à une sanction administrative. En outre, les organes d'exécution se voient octroyer la possibilité d'empêcher une personne qui ne satisfait pas à son obligation de fournir de la documentation passé le délai imparti et qui empêche ainsi l'organe de contrôle de vérifier si elle exerce effectivement une activité indépendante, de poursuivre son travail. Le prestataire de services étranger doit fournir à l'organe de contrôle compétent dans le délai imparti les documents cités dans la loi ou des documents équivalents. S'il n'obéit pas à cette injonction dans le délai imparti, l'autorité cantonale compétente peut ordonner une suspension de travail. Cette dernière doit durer jusqu'à ce que la personne qui allègue exercer une activité indépendante ait fourni les documents demandés. Si elle ne peut pas le faire, tous les indices d'une indépendance fictive sont réunis. La mesure de la suspension de travail est jugée efficace et utile, justement dans la pratique, pour faire appliquer l'obligation de fournir de la documentation et, finalement, pour garantir le contrôle du statut d'une personne. S'agissant de brefs engagements en Suisse, en particulier, on peut ainsi empêcher qu'une personne ne retourne dans son pays d'origine au terme de ses travaux sans avoir apporté la preuve de son indépendance. Les expériences faites par les organes d'exécution ont montré que les prestataires de services indépendants, contrairement aux entreprises détachant des travailleurs, ne réagissent que rarement à une demande a posteriori de transmettre les documents prouvant leur statut d'indépendant.

Il faut en outre qu'une suspension de travail puisse être ordonnée si un cas d'indépendance fictive est constaté et que l'employeur de l'indépendant fictif n'a pu être identifié. Cette mesure doit amener l'employeur à se faire connaître, de manière à ce qu'il doive répondre d'une éventuelle sous-enchère par rapport aux conditions salariales et de travail minimales.

Vérifier le statut d'indépendant constitue une tâche complexe. Compte tenu du grand nombre d'éléments que comporte la vie économique, il est nécessaire d'évaluer
le statut d'indépendant d'une personne en appréciant toutes les circonstances du cas d'espèce. L'indépendance fictive combinant des caractéristiques de l'activité professionnelle indépendante et de l'activité professionnelle dépendante, la détermination du statut d'une personne implique donc d'apprécier quelles caractéristiques sont prépondérantes dans le cas d'espèce. Il peut par conséquent arriver que les organes d'exécution ne soient pas en mesure de juger définitivement s'il s'agit réellement d'une indépendance, alors même que le prestataire de services indépendant s'est acquitté de son obligation de fournir de la documentation et que les organes d'exécution ont effectué des clarifications sur place. Pour tenir compte de cet aspect, le projet de loi mentionne les conditions dans lesquelles les organes d'exécution peuvent demander des documents supplémentaires servant à établir la preuve du statut d'indépendant. Les conditions permettant de procéder à des clarifications supplémentaires sont réunies lorsque les organes de contrôle doutent du statut d'indépendant d'une personne sur la base des documents soumis visés à l'art. 1a, al. 2, du projet de loi ou de documents équivalents ou encore d'éventuelles observations sur place. En pareil cas, les organes de contrôle doivent pouvoir entrer en contact avec la personne contrôlée, mais également, dans une seconde étape, avec son mandant ou le maître d'ouvrage, afin d'obtenir des informations supplémentaires concernant le statut de la personne contrôlée et le rapport contractuel. Par conséquent, l'obligation de renseigner sera désormais explicitement inscrite dans la loi 3173

pour les mandants et les maîtres d'ouvrage. La pratique a montré que souvent, en cas de doute, seuls des renseignements complémentaires obtenus auprès du partenaire contractuel permettent de clarifier le statut de la personne contrôlée. Quant aux documents supplémentaires susceptibles d'être demandés, il s'agit notamment de ceux mentionnés dans la directive du SECO sur la marche à suivre pour vérifier le statut d'indépendant de prestataires de services (cf. ch. 1.1.3.1). En demandant des documents supplémentaires, les organes de contrôle doivent veiller à ce que la personne contrôlée puisse les leur fournir moyennant des démarches d'une ampleur raisonnable.

Outre la possibilité d'infliger une amende administrative à quiconque se soustrait à son obligation de fournir de la documentation et d'ordonner une suspension de travail pour faire exécuter ladite obligation, le projet de loi prévoit de rendre applicable les possibilités de sanction déjà prévues par la LDét (art. 9 et 12 LDét). Ces sanctions se sont avérées judicieuses et efficaces dans l'exécution de la loi.

1.2.2

Sanctions en cas d'infractions aux contrats-types de travail contenant des salaires minimaux impératifs

L'actuelle LDét prévoit, pour les entreprises étrangères qui détachent des travailleurs en Suisse, l'obligation de respecter les salaires minimaux prévus par les contratstypes de travail au sens de l'art. 360a CO et établit des possibilités de contrôle et de sanction. Les employeurs qui emploient des travailleurs engagés en Suisse sont tenus, en vertu du CO, de respecter ces salaires minimaux, mais il n'existe aucune possibilité de sanction de droit public. Aussi la modification de la LDét doit-elle permettre de régler le contrôle et la sanction des employeurs qui emploient des travailleurs en Suisse et qui enfreignent les dispositions relatives aux salaires minimaux contenues dans un contrat-type de travail au sens de l'art. 360a CO. Les dispositions de la LDét concernant le contrôle et les sanctions doivent par conséquent être étendues aux employeurs suisses et le titre de la loi doit être adapté.

Afin d'inscrire une possibilité de sanction dans la loi, l'actuel art. 9, al. 2, LDét doit être complété par une nouvelle lettre permettant à l'autorité compétente d'infliger une amende de 5000 francs au plus à l'employeur fautif. On comble ainsi le vide légal en raison duquel l'autorité cantonale ne peut pas prononcer de sanction à l'encontre d'un employeur qui emploie des travailleurs engagés en Suisse sans respecter les salaires minimaux prévus par un contrat-type de travail au sens de l'art. 360a CO. L'introduction de cette possibilité de sanction permettra d'instaurer une égalité de traitement entre les travailleurs indigènes et les travailleurs étrangers, puisqu'à ce jour, seuls les employeurs étrangers qui ne respectent pas le salaire minimal impératif prévu par un contrat-type de travail peuvent être sanctionnés, en vertu de la LDét, tandis que les employeurs suisses ne sont passibles d'aucune sanction étatique. De nouveaux éléments d'infraction doivent être créés pour permettre de poursuivre pénalement les employeurs qui emploient des travailleurs engagés en Suisse et qui dérogent, de manière systématique et dans un esprit de lucre, aux salaires minimaux prévus par les contrats-types de travail impératifs.

3174

1.2.3

Sanction des entreprises qui passent outre à une interdiction exécutoire d'offrir leurs services en Suisse

Dans le cadre de la procédure de consultation, un canton a relevé une autre lacune de la législation sur les mesures d'accompagnement. La législation actuelle ne prévoit pas de possibilité de sanctionner un prestataire de services qui enfreint une interdiction exécutoire d'offrir ses services en Suisse ordonnée en vertu de la LDét.

La LDét prévoit que les infractions d'une certaine gravité contre les conditions minimales de travail et de salaire commises par des employeurs étrangers qui détachent des travailleurs en Suisse, le non-paiement d'amendes exécutoires ainsi que les violations de l'obligation de renseigner peuvent être réprimées par une interdiction aux entreprises fautives d'offrir leurs services en Suisse pour une période d'un à cinq ans. Les organes de contrôle de la LDét rencontrent toutefois de manière réitérée des entreprises qui effectuent des travaux en Suisse en dépit de l'existence d'une telle interdiction exécutoire.

Le Conseil fédéral propose de répondre à cette problématique en créant une nouvelle disposition pénale, selon laquelle quiconque contrevient à une interdiction exécutoire d'offrir ses services en Suisse est passible d'une amende pouvant aller jusqu'à 40 000 francs.

1.2.4

Création d'une base légale pour la communication des sanctions cantonales exécutoires aux commissions paritaires compétentes

La LDét connaît un dualisme de l'exécution. On distingue les branches qui sont régies par une convention collective de travail étendue de celles qui en sont dépourvues. Dans les premières, ce sont les commissions paritaires qui contrôlent le respect des conditions minimales de salaire et de travail par les employeurs qui détachent des travailleurs en Suisse.

Si les commissions paritaires constatent une infraction dans le cadre de leurs contrôles, elles sont tenues, en vertu de l'art. 9, al. 1, LDét, de l'annoncer à l'autorité cantonale compétente. Cette dernière peut alors prononcer une sanction en vertu de la LDét. Jusqu'ici, il n'était pas prévu que les autorités cantonales informent les commissions paritaires concernées des sanctions qu'elles prononçaient sur la base des constats d'infractions effectués par les commissions paritaires en question. Le projet de loi prévoit de changer cela en obligeant l'autorité cantonale qui prononce une sanction à transmettre une copie de sa décision à la commission paritaire compétente.

1.2.5

Sanctions en cas d'infractions aux conventions collectives de travail étendues selon la procédure d'extension facilitée

La disposition visant l'extension facilitée doit être complétée de manière à ce qu'il soit désormais explicitement prévu d'étendre les possibilités de sanction prévues dans les conventions collectives de travail selon la procédure facilitée. En cas 3175

d'infractions, les commissions paritaires peuvent prononcer des peines conventionnelles tant à l'encontre des entreprises dont le siège est en Suisse qu'à l'encontre des entreprises étrangères qui détachent des travailleurs en Suisse. Selon l'art. 2, al. 2quater, LDét, la possibilité d'infliger une peine conventionnelle prévue par une convention collective de travail étendue s'applique également aux employeurs étrangers qui détachent des travailleurs en Suisse. Des peines conventionnelles peuvent aussi être prononcées à l'encontre des travailleurs fautifs. D'autres sanctions, comme un avertissement, sont également envisageables, mais pas la fermeture d'un chantier ou l'interdiction de travail. De telles mesures ne sont également pas admissibles dans une extension «traditionnelle» au sens de l'art. 1 LECCT.

Si la convention collective de travail prévoit la possibilité de facturer les frais de contrôle à l'encontre des entreprises fautives et des travailleurs fautifs, il doit être désormais possible d'étendre ces dispositions également. En principe, on peut admettre que les frais de contrôle sont déjà compris implicitement dans les dispositions sur les contrôles paritaires, mais cela doit être expressément indiqué par souci d'une meilleure clarté et de la sécurité du droit. Du fait que les employeurs et les travailleurs soumis à une convention collective de travail paient des contributions d'exécution, il n'est en principe pas possible de prélever des frais de contrôle et de procédure si aucune infraction aux dispositions de la convention collective de travail n'a été constatée. En présence de circonstances particulières (par exemple le refus de se soumettre à un contrôle ou l'empêchement de celui-ci), les frais de contrôle et de procédure pourraient également être infligés en l'absence d'une violation de la convention ou si une telle violation ne pouvait pas être prouvée, pour autant que la convention collective de travail le prévoie explicitement. Outre les frais de contrôle, les frais de procédure peuvent également être mis à la charge des employeurs et des travailleurs fautifs, également sous réserve que la convention collective de travail le prévoie.

Le contrôle du respect et de l'application des conventions collectives de travail étendues signifie des coûts importants pour les commissions
paritaires. C'est pourquoi les employeurs et les travailleurs soumis à une convention collective de travail étendue peuvent être contraints de payer des contributions aux frais d'exécution, afin de participer au financement de l'activité de contrôle. Cette possibilité manque dans la procédure d'extension facilitée. Aucune raison valable ne justifie cette différence de traitement entre l'extension «traditionnelle» et l'extension facilitée. C'est pourquoi le prélèvement de contributions aux frais d'exécution auprès des employeurs et des travailleurs soumis à une convention collective de travail doit être possible et admis également en cas d'extension facilitée. Les contributions aux frais de formation continue des conventions collectives de travail ne sont toutefois par concernées.

A l'avenir également, de telles contributions ne pourront pas être déclarées de force obligatoire en vertu d'une extension facilitée, parce que les frais en question sont sans lien avec la lutte contre la sous-enchère salariale (cf. art. 1a LECCT). Dans les conventions collectives de travail, il est donc nécessaire de distinguer les frais d'exécution des frais de formation continue. Si une convention collective de travail ne permet pas cette distinction, parce qu'un montant unique est prévu pour l'exécution et la formation continue, les partenaires à la convention collective de travail doivent changer la convention en répartissant ce montant. Au demeurant, la nécessité de procéder à une telle répartition découle déjà de l'art. 2 LDét, car les conditions du prélèvement de contributions aux frais de formation continue auprès des entreprises détachant des travailleurs sont différentes de celles qui prévalent pour 3176

prélever des contributions aux frais d'exécution. En effet, les contributions aux frais de formation continue sont dues à partir du 91ème jour en cas de détachement, alors que les contributions aux frais d'exécution sont dues dès le premier jour (art. 2, al. 2bis et 2quater, LDét).

L'introduction de cette mesure établit en outre une équivalence de traitement entre les employeurs indigènes et les employeurs étrangers: à ce jour, seuls les employeurs étrangers qui avaient enfreint une convention collective de travail étendue selon la procédure facilitée pouvaient être sanctionnés en vertu de la LDét, tandis que les employeurs suisse n'étaient pas passibles de sanction. Désormais, il sera également possible d'infliger une peine conventionnelle aux employeurs suisses qui auront enfreint une convention collective de travail étendue selon la procédure facilitée.

1.3

Justification et appréciation de la solution proposée

1.3.1

Mesures de lutte contre l'indépendance fictive

Globalement, le nombre d'indépendants soumis à l'obligation d'annonce a quasiment triplé entre 2005 et 2011. Sont soumis à l'obligation d'annonce les prestataires de services provenant des Etats de l'AELE et de l'UE-17 (Allemagne, Autriche, Belgique, Chypre, Danemark, Espagne, Finlande, France, Grande-Bretagne, Grèce, Irlande, Italie, Luxembourg, Malte, Pays-Bas, Portugal et Suède). Depuis le 1er mai 2011, les prestataires de services indépendants provenant des Etats de l'UE-8 (Estonie, Lettonie, Lituanie, Pologne, République tchèque, Slovaquie, Slovénie et Hongrie) sont soumis à l'obligation d'annonce dans les branches de la construction, du nettoyage industriel et des services de surveillance et de sécurité également. Jusqu'au 30 avril 2011, les prestataires de services indépendants originaires de ces pays étaient encore soumis au régime de l'autorisation pour les branches citées.

Les indépendants soumis à l'obligation d'annonce ne passent que peu de temps en Suisse. Ils ont fourni en 2011 un volume de travail correspondant à celui d'environ 1900 travailleurs à l'année, soit 0,09 pour cent de l'activité déployée en équivalents plein-temps. La plupart des indépendants soumis à l'obligation d'annonce sont engagés dans le second oeuvre de la construction. Leur part à l'emploi avoisine 0,6 pour cent dans cette branche.

L'activité des organes de contrôle des mesures d'accompagnement a montré ce qui suit en 2010: quelque 11 000 prestataires de services indépendants se sont annoncés en Suisse pour y travailler (à titre de comparaison: en 2011, ils ont été quelque 14 500). Ces chiffres ne comprennent pas les personnes qui se sont annoncées dans le domaine des services à la personne, car il s'agit principalement de services de l'industrie du sexe. Certains cantons utilisent la procédure d'annonce pour saisir ces personnes, si bien que les personnes recensées dans la statistique des indépendants soumis à l'obligation d'annonce dans le domaine des services à la personne ne sont en majeure partie pas directement liées à l'objectif des mesures d'accompagnement (protection des conditions salariales et de travail). Sous l'angle de l'observation du marché du travail, la problématique de l'indépendance fictive ne se pose pas dans cette branche. Les personnes concernées ne sont pas contrôlées par l'autorité du marché du travail.

3177

En 2010, les commissions paritaires ont contrôlé 3524 indépendants soumis à l'obligation d'annonce et les cantons 348611. Selon les indications des commissions paritaires, la proportion de cas supposés d'indépendance fictive était d'environ 23 pour cent en 2010 (15 pour cent selon les cantons). Si l'on met ces taux d'infractions en regard du nombre de prestataires de services indépendants qui ont annoncé une intervention en 2010, on aboutit au nombre d'environ 2500 cas d'indépendance fictive supposée. Dans certaines régions (p. ex. les régions frontalières) et dans certaines branches (p. ex. le second oeuvre de la construction), le phénomène de l'indépendance fictive est plus marqué et toujours plus perceptible.

Selon les indications fournies par les organes de contrôle des mesures d'accompagnement, certaines branches du second oeuvre de la construction sont de plus en plus concernées par l'indépendance fictive (p. ex. carrelage, peinture et plâtrerie, menuiserie). Les indépendants fictifs se situent souvent au bout des chaines de soustraitants.

Selon le groupe de travail «indépendance fictive», les chiffres disponibles12 ne permettent pas de se prononcer sur l'ampleur de l'indépendance fictive parmi les prestataires de services étrangers en Suisse et dans les diverses branches. Plusieurs raisons l'expliquent: ­

Les chiffres disponibles ne permettent pas de ventiler le nombre d'indépendants soumis à l'obligation d'annonce entre les différentes branches du second oeuvre de la construction.

­

Les contrôles sur place couvrent également des prestataires de services indépendants non annoncés et qui, de ce fait, n'apparaissent pas dans la statistique. Il n'est donc pas possible de conduire des contrôles ciblés.

­

Certains organes d'exécution n'étaient pas encore sensibilisés à la problématique de l'indépendance fictive. De plus, les conceptions divergeaient quant à la définition de l'activité indépendante, et les organes de contrôle manquaient pour certains des instruments permettant de détecter l'indépendance fictive. La directive du SECO concernant la marche à suivre pour vérifier le statut d'indépendant de prestataires de services étrangers (cf. ch. 1.1.3.1) a clarifié la situation à cet égard. Elle fournit aux organes de contrôle une procédure uniforme dans leur activité de contrôle. Pour les raisons mentionnées, la prudence est donc de mise au moment d'apprécier les cas supposés d'indépendance fictive relevés en 2010 et les années précédentes.

Le groupe de travail «indépendance fictive» ajoute que le phénomène de l'indépendance fictive s'accentue plus nettement dans les branches comportant des salaires minimaux impératifs, c'est-à-dire que l'incitation à éluder les salaires minimaux impératifs en simulant l'indépendance y est plus forte que dans les branches exemptes de tels salaires minimaux impératifs (où la sous-enchère par rapport aux salaires usuels n'entraîne pas une sanction pour l'employeur concerné, mais une procédure

11 12

Les résultats des contrôles effectués en 2011 seront publiés au printemps 2012 dans le rapport annuel du SECO sur la mise en oeuvre des mesures d'accompagnement.

Cf. rapport FlaM du SECO (3 mai 2011), Mise en oeuvre des mesures d'accompagnement à la libre circulation des personnes Suisse ­ Union européenne.

3178

de conciliation visant le paiement rétroactif du salaire).13 Les branches du second oeuvre de la construction, très touchées par le phénomène de l'indépendance fictive, comptent de nombreuses CCT qui prévoient des salaires minimaux impératifs.

Certes, le phénomène de l'indépendance fictive n'est pas important compte tenu de la part à l'emploi des prestataires de services indépendants soumis à l'obligation d'annonce. Mais dans certaines branches du second oeuvre de la construction et dans certaines régions de la Suisse, les indépendants fictifs déjouent les mesures d'accompagnement et menacent le maintien du niveau des salaires. Des mesures pour lutter contre le phénomène, notamment celles qui sont à même de faciliter l'activité de contrôle des organes d'exécution, sont donc indiquées.

La majorité des mesures proposées sont soutenues par le groupe de travail «indépendance fictive». Les résultats de la procédure de consultation figurent au ch. 1.3.6.1.

1.3.2

Sanctions en cas d'infractions aux contrats-types de travail contenant des salaires minimaux impératifs

Actuellement, six contrats-types de travail au sens de l'art. 360a CO ont été édictés au niveau cantonal: dans le canton de Genève dans la branche de l'esthétique et de l'économie domestique, dans le canton du Tessin pour les salons de beauté, les centres d'appel et les entreprises de remplacement et de réparation de pneus («gommisti»), en Valais dans la maintenance et le nettoyage industriel. Au niveau fédéral, un contrat-type de travail a été édicté dans la branche de l'économie domestique. Dans certaines branches où des contrats-types de travail cantonaux au sens de l'art. 360a CO ont été édictés, on a constaté des violations de salaires minimaux par des employeurs suisses. Dans quelques-unes de ces branches, les taux d'infraction sont très élevés.

La qualité pour agir des associations, que le législateur a introduite à l'art. 360e CO, renforce certes la protection du travailleur dans le cadre de la procédure civile, puisqu'elle l'encourage à intenter une action en justice individuelle pour faire valoir ses droits, dès lors qu'il est établi qu'un contrat-type de travail n'est pas respecté. En effet, le travailleur est alors assuré d'obtenir gain de cause devant le juge civil. Mais de nombreux travailleurs renoncent à faire valoir leur droit devant un tribunal par crainte d'être licenciés: si la résiliation du contrat de travail est jugée abusive, le travailleur reçoit une indemnisation équivalant au plus à six mois de salaire.

La protection fournie dans le cadre de la procédure civile est insuffisante, car elle ne couvre que les prétentions civiles auxquelles la partie concernée a droit. Même si celle-ci peut faire valoir ses droits, même si des arriérés de salaire sont effectivement versés, le respect des salaires minimaux constitue un intérêt de droit public. C'est pourquoi il faut créer une base légale permettant de sanctionner les employeurs fautifs qui emploient des travailleurs engagés en Suisse. Il en va de la crédibilité de 13

Le salaire usuel n'est pas indiqué par un montant de salaire unique, mais en général par une fourchette de salaires embrassant une large majorité des travailleurs d'une branche, d'un domaine professionnel ou d'une région déterminée. Une sous-enchère par rapport au salaire usuel survient lorsqu'une personne gagne moins que le salaire défini ou la fourchette des salaires versés par une large majorité des entreprises d'une branche et d'une région aux travailleurs correspondants.

3179

la mesure que représente le contrat-type de travail comportant des salaires minimaux impératifs et de l'égalité de traitement entre employeurs suisses et étrangers. En outre, cette possibilité de sanction vise au respect des salaires minimaux et au versement des arriérés de salaire.

Les résultats de la procédure de consultation figurent au ch. 1.3.6.2.

1.3.3

Possibilité de sanction des entreprises qui passent outre à une interdiction exécutoire d'offrir leurs services en Suisse

La création d'une disposition pénale permettant de sanctionner le non-respect d'une interdiction exécutoire d'offrir des services en Suisse comble une autre lacune des mesures d'accompagnement. L'absence d'une telle possibilité fondée sur la LDét jusqu'à l'heure actuelle est un problème dont le SECO est conscient et qui a été thématisé récemment par plusieurs cantons et organes d'exécution paritaires. En outre, lors de la consultation, de nombreux participants ont réclamé un durcissement des sanctions prévues par la LDét. Aussi, le Conseil fédéral considère l'introduction d'une nouvelle disposition pénale dans la LDét comme judicieuse et estime qu'il s'agit d'un renforcement de l'efficacité des mesures d'accompagnement.

1.3.4

Création d'une base légale permettant la communication des sanctions cantonales exécutoires aux commissions paritaires compétentes

Le groupe de travail mis en place pendant l'été 2011 pour réfléchir à une amélioration de l'exécution des mesures d'accompagnement et composé de représentants des partenaires sociaux, des cantons et de la Confédération a réclamé notamment un suivi plus conséquent des sous-enchères salariales. L'analyse de cette problématique par le groupe de travail a révélé que la communication des sanctions cantonales aux commissions paritaires compétentes leur permettrait d'avoir une meilleure vue d'ensemble de leur activité de contrôle et que cela rendrait l'exécution plus efficace.

C'est pourquoi le Conseil fédéral propose d'intégrer cette question, qui n'a été abordée qu'après la procédure de consultation, au projet de loi et d'imposer, par une base légale, aux autorités cantonales de communiquer les sanctions exécutoires aux commissions paritaires compétentes.

1.3.5

Sanction en cas d'infractions aux conventions collectives de travail étendues selon la procédure facilité

En complétant la disposition relative à l'extension facilitée des conventions collectives de travail, de manière à ce qu'il soit désormais explicitement possible d'étendre les possibilités de sanction prévues par lesdites conventions, par exemple les peines conventionnelles et les dispositions visant les frais de contrôle, on renforce l'efficacité de la mesure visant à faciliter l'extension des conventions collectives de travail.

Jusqu'à présent, les organes d'exécution paritaires institués par les conventions 3180

collectives de travail étendues selon la procédure facilitée ne disposaient pas de la possibilité de sanctionner les infractions constatées.

Les résultats de la procédure de consultation figurent au ch. 1.3.6.3.

1.3.6

Résultats de la procédure de consultation

1.3.6.1

Mesures de lutte contre l'indépendance fictive

Il est ressorti de la consultation que la grande majorité des participants sont favorables à l'introduction de mesures permettant la vérification et la prise de sanctions en cas d'indépendance fictive. Ils approuvent également la conception et la formulation des dispositions proposée.

Les divergences entre les participants à la consultation concernent surtout l'entité qui a compétence pour ordonner une suspension de travail ainsi que la durée du délai à octroyer avant que cette mesure ne soit prise. Différents participants réclament que la loi octroie non seulement aux autorités cantonales mais également aux organes d'exécution paritaires la compétence d'ordonner une suspension des travaux.

D'autres cercles refusent le transfert de cette compétence. Les représentants des travailleurs, principalement, réclament la suppression du délai supplémentaire pour fournir les documents, prévu par le projet de loi, au motif que ce délai empêche d'agir rapidement, ce qui est nécessaire dans ce genre de situations.

Des cantons ont soulevé des questions sur les modalités concrètes de la procédure consistant à ordonner une suspension de travail et sur une éventuelle responsabilité.

Ils ont également fait valoir que la procédure prévue engendre un surcoût et nécessite un surcroît de personnel.

1.3.6.2

Sanctions en cas d'infraction aux salaires minimaux impératifs prévus par les contrats-types de travail

La grande majorité des participants à la consultation sont favorables à l'introduction d'une possibilité de sanction proposée par le Conseil fédéral ainsi qu'aux modalités qu'il prévoit. Cette mesure est jugée bonne, car à même d'assurer une égalité de traitement entre employeurs indigènes et étrangers. Des représentants des travailleurs considèrent toutefois le montant de l'amende comme trop peu dissuasif et réclament de manière générale une augmentation des amendes prévues en cas d'infraction à la LDét.

1.3.6.3

Sanctions en cas d'infraction aux conventions collectives de travail étendues selon une procédure facilitée

La grande majorité des participants à la consultation sont favorables à la proposition de permettre d'étendre les dispositions d'une convention collective de travail relatives aux sanctions et à l'imputation des frais de contrôle selon la procédure facilitée.

Certaines associations de branche se sont exprimées contre l'élargissement des dispositions susceptibles d'être étendues selon la procédure facilitée. Elles ont fait 3181

valoir qu'un tel élargissement remettrait en question l'égalité de traitement juridique de toutes les personnes concernées, car la procédure d'extension n'est pas une procédure législative ordinaire, et que ce sont des associations et non des organes étatiques qui assurent l'exécution d'une convention collective de travail.

1.3.6.4

Autres résultats

Les participants à la procédure de consultation ont unanimement souligné que l'adaptation des mesures d'accompagnement devait se faire dans le respect du cadre légal de l'ALCP. La grande majorité d'entre eux est d'avis que les mesures proposées satisfont à cette exigence.

De nombreux participants à la consultation se sont exprimés non seulement sur les mesures prévues au niveau législatif mais également sur l'exécution des mesures d'accompagnement. Des représentants d'employeurs comme de travailleurs ainsi que plusieurs cantons ont fait valoir qu'il est nécessaire de procéder à de rapides améliorations de l'exécution et à une mise en oeuvre conséquente des mesures d'accompagnement existantes.

Le projet de loi intègre déjà partiellement cette préoccupation puisque les nouvelles mesures de lutte contre l'indépendance fictive renforcent l'efficacité de l'exécution dans ce domaine. En outre, des mesures d'amélioration de l'efficacité de l'exécution ont été introduites parallèlement aux travaux législatifs.

Ainsi un groupe de travail composé de représentants des partenaires sociaux, des cantons et de la Confédération a-t-il soumis fin janvier 2012 au chef du DFE des propositions ciblant le problème des sous-enchères salariales lors de l'engagement de nouveaux collaborateurs, celui du suivi des sous-enchères salariales et celui de l'application des sanctions prononcées à l'encontre d'entreprises de détachement étrangères. Le SECO mettra en oeuvre ces propositions en tant qu'autorité de surveillance des mesures d'accompagnement.

En outre, le Conseil fédéral s'est déclaré prêt, dans son avis du 18 janvier 2012 sur le rapport de la Commission de gestion du Conseil national (CdG-N) du 21 octobre 2011 concernant «L'évaluation de la surveillance et des effets des mesures d'accompagnement à la libre circulation des personnes»14, à reprendre les recommandations proposées par la CdG-N. Il a chargé le DFE de mettre en oeuvre lesdites recommandations.

Le même jour, il a proposé d'accepter un postulat de la CdG-N (11.4055) qui l'invite à clarifier de manière approfondie le besoin d'agir dans le domaine des contrats-types de travail ainsi qu'en ce qui concerne la problématique des chaînes de sous-contractants. Dans le cadre de la consultation, des syndicats et plusieurs cantons ont réclamé l'examen de l'introduction d'une responsabilité solidaire. Le Conseil fédéral est d'avis qu'il a pris ce voeu en compte en recommandant d'accepter le postulat susmentionné.

14

FF 2012 1075

3182

1.4

Application

Les nouvelles dispositions proposées n'entraînent aucune modification des compétences des organes d'exécution. Ceux-ci sont au demeurant d'ores et déjà chargés de contrôler l'indépendance et le respect des contrats-types de travail au sens de l'art. 360a CO.

Lors de la consultation, de nombreux cantons ont réclamé la clarification de diverses questions qui se posent en lien avec l'exécution des mesures de lutte contre l'indépendance fictive, notamment des questions sur la responsabilité au cas où une suspension de travail serait ordonnée de manière disproportionnée. Ces questions sont justifiées. La mise en oeuvre des dispositions prévues ne sera pas facile, en particulier en ce qui concerne l'octroi du droit d'être entendu ainsi que la remise de la décision ordonnant la suspension de travail. Les lois cantonales sur la responsabilité régissent une éventuelle responsabilité des autorités cantonales. L'autorité de surveillance compétente de la Confédération, le SECO, clarifiera les questions qui se posent avec les autorités cantonales dans le cadre des différents comités d'échange existants.

2

Commentaire

2.1

Loi fédérale permettant d'étendre le champ d'application de la convention collective de travail

Art. 1a En cas d'infractions, les commissions paritaires peuvent prononcer des peines conventionnelles tant à l'encontre des entreprises dont le siège est en Suisse qu'à l'encontre des entreprises étrangères qui détachent des travailleurs en Suisse. Les travailleurs peuvent également être visés par une peine conventionnelle. Si la convention collective de travail prévoit en outre la possibilité de facturer les frais de contrôle aux entreprises ou aux travailleurs fautifs, il faut donc également pouvoir procéder à l'extension de telles dispositions. De plus, la perception des contributions aux coûts d'exécution auprès des employeurs et des travailleurs assujettis doit désormais être possible et autorisée également dans le cadre d'une extension par la procédure facilitée. Cependant, les contributions de formation couvertes par les conventions collectives de travail ne sont pas concernées par cette disposition.

2.2

Loi fédérale sur les travailleurs détachés

Titre L'extension des dispositions de la loi sur le contrôle et les sanctions aux employeurs qui emploient des travailleurs engagés en Suisse, auxquels s'appliquent un salaire minimal impératif fixé dans un contrat-type de travail au sens de l'art. 360a CO, rend nécessaire d'adapter le titre de la loi. On tiendra ainsi compte du fait que la loi ne s'applique plus seulement aux travailleurs détachés.

3183

Le titre abrégé de la version allemande de la loi utilisé à ce stade n'est pas employé en pratique. On recourt plutôt au titre abrégé non officiel de «Entsendegesetz» et à l'abréviation «EntsG». La modification du titre abrégé tient compte de cette situation, ce d'autant que la loi s'adresse en premier lieu aux travailleurs détachés et à leurs employeurs. Ainsi, le titre en allemand est également adapté aux versions française et italienne. Dans la version française, le titre abrégé («Loi sur les travailleurs détachés») sera complété par «LDét», tandis que «LDist» apparaîtra dans la version italienne.

Art. 1, al. 2 et 3 Les employeurs qui emploient des travailleurs engagés en Suisse doivent respecter les dispositions du CO. Le projet de loi prévoit de leur étendre les dispositions de la LDét sur le contrôle et les sanctions afin de pouvoir sanctionner ceux de ces employeurs qui ne respectent pas les salaires minimaux impératifs des contrats-types de travail au sens de l'art. 360a CO. Les dispositions concernées sur le contrôle et les sanctions sont l'art. 7, al. 1, let. b, al. 2 et 4, l'art. 9, al. 2, let. d et e, et l'art. 12.

L'al. 2 précise que les salaires minimaux impératifs prévus par les contrats-types de travail au sens de l'art. 360a CO doivent être respectés. On les délimite ainsi clairement des salaires minimaux prévus par les contrats-types de travail visés à l'art. 359 CO, auxquels un accord permet de déroger.

Art. 1a

Apport d'une preuve du statut d'indépendant par des prestataires de services étrangers

Un prestataire de services provenant de l'étranger qui allègue exercer une activité lucrative indépendante doit en apporter la preuve sur demande. La preuve ne peut être considérée comme apportée que si les critères suisses de définition de l'activité indépendante sont remplis (al. 1). L'examen de l'activité lucrative indépendante implique la présentation de trois documents lors du contrôle effectué sur place (al. 2). Il s'agit de documents que tout prestataire de services indépendant peut facilement se procurer et emporter. S'agissant des trois documents énumérés, il y a lieu de penser que leur titulaire les emporte de toute manière lors d'un engagement à l'étranger comme un permis de conduire par exemple. La confirmation de l'annonce renseigne sur la propre estimation du prestataire de services étranger quant à son statut; le document des assurances sociales E 10115 renseigne sur le statut, en droit des assurances sociales, de la personne contrôlée dans son pays d'origine; la copie du mandat ou du contrat d'entreprise ou, en l'absence d'un tel document écrit, la confirmation écrite du mandant ou du maître d'ouvrage concernant le mandat ou le contrat d'entreprise à réaliser en Suisse fournit des indications sur la conception du rapport contractuel et sur la personne qui, en cas d'indépendance fictive, serait obligée, en tant qu'employeur, de respecter les conditions suisses en matière de salaire et de travail.

Dans le cadre de la procédure d'annonce en ligne, l'Office fédéral des migrations (ODM), compétent pour l'exploitation du système d'information central sur la migration (SYMIC) et pour la gestion de la procédure mentionnée, informe les personnes concernées de leur obligation de fournir de la documentation.

15

A l'entrée en vigueur de la modification de l'annexe II de l'ALCP, le formulaire A 1 remplacera le formulaire E 101.

3184

Si les documents cités à l'al. 2 ne sont pas présentés, l'organe de contrôle compétent fixe un délai pour la transmission des documents cités dans la loi ou de documents équivalents (al. 3). En principe, les documents visés à l'al. 2 sont ceux le plus à même de prouver le statut d'indépendant. Ces documents devraient permettre, dans la plupart des cas, de vérifier le statut d'une personne. Eu égard au principe de proportionnalité, le prestataire de services indépendant doit toutefois conserver la possibilité de prouver son statut au moyen d'autres documents équivalents à ceux mentionnés à l'al. 2. Les documents suivants sont en particulier réputés équivalents: preuve de l'existence d'un cercle de clients; décomptes prouvant le propre établissement des factures; décomptes de nuitées sur les lieux d'intervention avec l'indication de la personne qui a réglé les factures.

L'organe de contrôle fixe le délai dans lequel les documents doivent être impérativement transmis sous peine d'une interruption de travail en fonction de la situation.

Lors d'engagements de courte durée, on peut envisager un délai de deux à trois jours dans lequel les documents doivent être remis personnellement, par fax ou par courriel à l'organe de contrôle compétent. Le délai imparti peut être court, car les trois documents énumérés, respectivement les documents qui leur seraient équivalents peuvent être obtenus dans un bref laps de temps. Les organes de contrôle arrêtent la durée du délai au cas par cas, en fonction de la situation et en observant le principe de proportionnalité. Lors d'engagements de plus longue durée en Suisse, le délai peut être plus long. Si les documents sont transmis, l'organe de contrôle vérifie le statut de la personne.

Comme les trois documents ne permettent pas dans chaque cas de clarifier sans ambiguïté le statut d'une personne, les organes de contrôle doivent requérir d'autres renseignements ou documents servant à prouver le statut d'indépendant (al. 4). Les conditions pour requérir d'autres renseignements sont remplies, lorsqu'un doute subsiste quant au statut d'une personne ou s'il existe un soupçon d'indépendance fictive malgré la présentation des documents visés à l'al. 2 ou de documents réputés équivalents ou encore d'observations faites sur place. Il peut y avoir soupçon d'indépendance fictive
parce que les observations sur place contredisent le contenu des documents transmis, que l'on a des doutes quant à l'authenticité des documents en question ou que peu d'observations sur le statut de la personne ont pu être établies sur place. Les personnes tenues de renseigner les organes de contrôle sont la personne contrôlée et son mandant ou son maître d'ouvrage. L'organe de contrôle peut réclamer tous les documents à même d'établir le statut de la personne et de renseigner sur le rapport contractuel existant entre les parties contractuelles. En ce qui concerne les autres documents susceptibles d'être demandés, il s'agit en particulier des pièces suivantes: patente, preuve du statut de membre d'une association professionnelle (p. ex. d'une chambre artisanale), le numéro de TVA ou d'impôt sur le chiffres d'affaires (ICHA), des décomptes prouvant le propre établissement de factures, des décomptes de nuitées au lieu d'intervention avec l'indication de la personne qui a payé les factures, quittances d'achat de matériel de travail et d'appareils, liste de clients en Suisse, assurance des véhicules automobiles (si la personne contrôlée dispose de son propre véhicule), assurance RC d'entreprise ou baux à loyer pour les locaux commerciaux. Si ces documents ne suffisent pas non plus à apporter la preuve de l'activité indépendante, l'organe de contrôle peut s'adresser dans un second temps au mandant ou au maître d'ouvrage pour se procurer des informations. L'al. 5 fixe en outre judicieusement une obligation de renseigner pour le mandant de la personne contrôlée ou pour le maître d'ouvrage, puisque 3185

l'expérience pratique a montré que, dans nombre de cas, ces personnes sont en mesure de fournir des informations supplémentaires utiles pour déterminer le statut d'une personne en cas de doute.

Art. 1b

Mesures en cas de violation de l'obligation de fournir la documentation ou d'incapacité à apporter la preuve du statut d'indépendant

Si le délai supplémentaire fixé par l'organe de contrôle expire sans avoir été utilisé, autrement dit si la personne concernée ne remet pas les documents mentionnés à l'art. 1a, al. 2, l'autorité cantonale compétente peut décider d'ordonner la suspension du travail (al. 2). En leur qualité d'organes de droit civil, les commissions paritaires ne sont pas habilitées à ordonner elles-mêmes la suspension du travail. Elles s'adressent donc à l'autorité cantonale (al. 1).

La suspension de travail ne saurait intervenir qu'en dernier recours, à savoir si aucun document n'est présenté lors d'un contrôle et que l'examen de l'activité lucrative indépendante n'est pas possible par d'autres moyens.

Un recours contre la décision n'a pas d'effet suspensif. Il est envisageable qu'une suspension du travail soit ordonnée en particulier en cas de non-respect répété de l'obligation de fournir de la documentation ou si les travaux effectués en Suisse sont sur le point de s'achever. L'ordre de suspendre le travail doit être proportionné.

Cependant, par exemple, si d'autres documents que ceux mentionnés à l'art. 1a, al. 2, sont transmis, qu'ils concourent à prouver l'indépendance et permettent de clarifier le statut de la personne concernée, la proportionnalité de la mesure n'est pas donnée. La mesure n'est pas proportionnée en particulier lorsque les documents listés dans l'art. 1a, al. 2, ne sont pas disponibles dans leur totalité, mais que la preuve de l'indépendance a pu être apportée par un autre moyen.

Au cas où une suspension du travail est ordonnée, elle doit être levée si la personne soumise à l'obligation de fournir de la documentation y satisfait et fournit les documents cités à l'art. 1a, al. 2, ou des documents équivalents.

Les autorités peuvent aussi ordonner une suspension du travail si un cas d'indépendance fictive est constaté, mais que l'employeur de l'indépendant fictif n'est pas trouvable (al. 1, let. b). La mesure est alors judicieuse, car pour que soient appliquées les conditions suisses en matière de salaire et de travail, il faut trouver un employeur tenu de les respecter en vertu de la législation suisse. Dans ce cas, une suspension des travaux prend fin dès qu'il est établi qui est l'employeur. La suspension de travail prend également fin lorsque la personne dont on a établi le statut
d'indépendant fictif reprend son activité dans des conditions de travail réglementaires (al. 3). Cette mesure permet d'empêcher que des indépendants fictifs ne travaillent en Suisse, sans interdire toutefois une activité d'indépendant ni une activité de salarié.

Le droit cantonal réglemente pour le reste la procédure consistant à ordonner une interruption de travail.

Art. 7, al. 2 Pour que l'organe de contrôle compétent puisse effectivement contrôler les employeurs qui emploient des travailleurs engagés en Suisse, il doit pouvoir accéder aux documents nécessaires à cet effet. L'actuelle obligation faite aux employeurs 3186

étrangers de remettre les documents nécessaires au contrôle doit être étendue à tous les employeurs auxquels les dispositions de la LDét sur les contrôles sont applicables. La référence aux «travailleurs détachés» est par conséquent supprimée.

Cette obligation supplémentaire n'entraîne aucune obligation nouvelle en ce qui concerne le contrat de travail.

Art. 9, al. 2 L'art. 9 contient désormais la possibilité, pour les autorités cantonales compétentes, d'infliger des sanctions administratives en cas de violation de la LDét également à l'encontre des prestataires de services indépendants et des employeurs qui emploient des travailleurs engagés en Suisse.

S'agissant de la lutte contre l'indépendance fictive, les deux possibilités de sanction décrites ci-après revêtent en particulier de l'importance. A l'art. 9, al. 2, let. a, la violation de l'obligation de fournir de la documentation visée à l'art. 1bis, al. 2, vient s'ajouter aux faits constitutifs actuels susceptibles d'entraîner une sanction administrative. Si les documents visés à l'art. 1a, al. 2, ne peuvent être présentés lors d'un contrôle, une peine maximale de 5000 francs peut être prononcée. S'il s'avère que la personne contrôlée est un indépendant fictif, les autorités cantonales compétentes peuvent s'abstenir de lui infliger une amende si la personne s'est déclarée comme indépendant sur l'instance de l'employeur. Dans un tel cas, comme l'indépendant fictif se trouve dans une situation de dépendance et donc dans une position de faiblesse, il ne devrait pas être sanctionné. Les violations de l'obligation de fournir de la documentation sont annoncées par les organes d'exécution à l'autorité cantonale compétente du lieu de mission. Celle-ci est seule compétente pour prononcer des sanctions administratives.

Il est désormais aussi possible d'interdire à un indépendant d'offrir ses services en Suisse (let. b). Une telle mesure peut en particulier s'appliquer pour sanctionner quiconque viole l'obligation de renseigner, fournit des renseignements sciemment inexacts, refuse de renseigner, s'oppose à un contrôle ou le rend impossible (violation de l'art. 12, al. 1, let. a et b). Dans les branches couvertes par une convention collective de travail étendue, il y a obligation de renseigner les commissions paritaires. Si cette obligation n'est pas
satisfaite, les commissions paritaires peuvent proposer à l'autorité chargée des sanctions de prononcer à l'encontre de l'indépendant visé une interdiction d'offrir ses services en Suisse. Une décision de sanction au sens de l'art. 12, al. 1, n'est pas nécessaire. Il suffit que les conditions de cette sanction soient réunies. Une sanction en vertu de l'art. 12, al. 1, peut être infligée parallèlement. L'interdiction d'offrir ses services en Suisse peut aussi être infligée à toute personne qui ne s'acquitte pas des amendes exécutoires prononcées contre elle. Il est indiqué de n'ordonner une interdiction d'offrir des services pour violation de l'obligation de renseigner que si la personne tenue de renseigner ne fournit aucun renseignement. Une telle interdiction ne doit pas être ordonnée si la personne concernée ne présente pas les documents cités à l'art. 1a, al. 2, mais qu'elle fournit des renseignements. Dans un tel cas, une sanction administrative peut être prononcée.

La nouvelle let. c donne à l'autorité cantonale compétente la possibilité de sanctionner un employeur qui emploie des travailleurs engagés en Suisse et qui ne respecte pas les salaires minimaux prévus par un contrat-type de travail au sens de l'art. 360a CO. L'amende infligée peut atteindre 5000 francs. La même sanction peut être 3187

prononcée à l'encontre d'employeurs étrangers dans des cas comparables. Il s'agit d'une sanction administrative. L'art. 7 de la loi fédérale du 22 mars 1974 sur le droit pénal administratif16 est expressément déclaré applicable.

En vertu de la let. d, il est possible d'imputer les frais de contrôle aux indépendants fautifs, c'est-à-dire à ceux qui violent leur obligation de fournir de la documentation ou qui contreviennent à l'art. 12. Il s'agit en l'occurrence des frais de contrôle des autorités cantonales. Les commissions paritaires ne peuvent pas imputer leurs frais de contrôle. Certes, l'art. 8a de l'ordonnance du 21 mai 2003 sur les travailleurs détachés en Suisse17 prévoit que les commissions paritaires peuvent percevoir le montant de leurs frais de contrôle. Mais cette disposition ne vaut que si une convention collective étendue s'applique. Les indépendants à l'encontre desquels une sanction est prononcée en vertu de l'art. 9 ne sont toutefois pas des employeurs soumis aux dispositions d'une convention collective étendue.

L'autorité cantonale compétente peut également, en vertu de la let. d, imputer tout ou partie des frais de contrôle aux employeurs qui emploient des travailleurs engagés en Suisse et qui sont sanctionnés en raison du non-respect des dispositions d'un contrat-type de travail au sens de l'art. 360a CO. Si les faits constitutifs visés à l'art. 12 sont avérés, une sanction pénale peut être envisagée.

Art. 12, al. 1 Si un prestataire de services indépendant travaille en Suisse ou qu'une entreprise détache des travailleurs en Suisse en dépit d'une interdiction exécutoire d'offrir des services en Suisse, il y a violation de la loi (let. c).

La let. d rend punissable quiconque occupe des travailleurs en Suisse et contrevient, systématiquement et dans un esprit de lucre, aux dispositions relatives au salaire minimal d'un contrat-type de travail au sens de l'art. 360a CO. Cette disposition pénale cible les employeurs suisses. Les employeurs étrangers qui détachent des travailleurs en Suisse sont visés par l'al. 3.

Ces éléments d'infraction complètent les dispositions pénales existantes de la loi. Le montant de l'amende dépend de la gravité du délit; il peut atteindre 40 000 francs au maximum.

S'agissant de la lutte contre l'indépendance fictive, il convient de mentionner que
les employeurs étrangers qui, de façon systématique et dans un esprit de lucre, occupent des indépendants fictifs et, ce faisant, ne respectent pas les salaires minimaux peuvent réaliser les faits constitutifs visés par l'art. 12, al. 3.

3

Conséquences

3.1

Conséquences pour la Confédération

Le projet de loi vise le renforcement de l'efficacité et l'amélioration de l'exécution des mesures d'accompagnement à la libre circulation des personnes. Il ne crée aucune tâche fondamentalement nouvelle qui ne serait comprise aujourd'hui déjà dans l'organisation d'exécution actuelle. La Confédération indemnise d'ores et déjà 16 17

RS 313.0 RS 823.201

3188

pour moitié les contrôles, effectués par les organes d'exécution des mesures d'accompagnement, visant les prestataires de services et les employeurs étrangers soumis aux dispositions d'un contrat-type de travail au sens de l'art. 360a CO. Le DFE conclut avec les cantons et les partenaires sociaux des accords de prestations couvrant le financement des activités de contrôle.

La possibilité d'ordonner une interruption de travail, prévue pour lutter contre l'indépendance fictive, devrait en principe entraîner un coût supplémentaire pour les autorités cantonales. Ce coût doit être indemnisé à hauteur de 50 pour cent par la Confédération. Le montant auquel s'élèvera ce surcoût apparaîtra lors des travaux préparatoires de l'exécution et lors de l'exécution elle-même. Il est difficile d'en procéder à une estimation au préalable car ce sont les cantons qui apprécieront l'opportunité d'ordonner les nouvelles mesures. Il n'est pas possible de déterminer pour le moment l'intensité de l'usage que les cantons en feront. D'après les estimations du SECO, qui reposent sur les expériences faites jusqu'à présent, le surcoût pour la Confédération et les cantons devrait s'élever à un montant d'un demi-million à un million de francs au total. La moitié du surcoût sera à indemniser par la Confédération. Selon les estimations du SECO, le surcoût pour la Confédération et les recettes des cantons par rapport aux nouvelles mesures ne conduiront pas un déplacement perceptible des coûts entre la Confédération et les cantons. Le DFE est néanmoins prêt à examiner périodiquement la relation entre les dépenses de la Confédération et les gains des cantons réalisés avec les amendes.

La modification prévue de la LECCT n'entraîne pas d'accroissement des procédures liées à l'extension des conventions, puisque les conditions requises pour une telle extension ne varient pas. En ce qui concerne l'examen des dispositions visant l'admissibilité de l'extension d'une convention collective, il n'y a pas non plus de charge supplémentaire.

Les mesures proposées n'ont pas de répercussion sur le personnel de la Confédération.

3.2

Conséquences pour les cantons et les communes

Comme pour la Confédération, le projet de loi, notamment les mesures de lutte contre l'indépendance fictive, entraîne une charge supplémentaire pour les cantons.

D'après les estimations du SECO, qui reposent sur les expériences faites jusqu'à présent, le surcoût pour la Confédération et les cantons devrait s'élever à un montant d'un demi-million à un million de francs au total. Ces derniers devront prendre en charge la moitié de ce surcoût.

L'extension des sanctions aux prestataires de services indépendants et aux employeurs qui emploient des travailleurs engagés en Suisse devrait avoir des effets positifs pour les cantons, puisqu'elle générera des recettes pour ces derniers. Les recettes en question devraient être inférieures au surcoût imputable aux cantons.

3189

3.3

Conséquences économiques

Les rapports publiés à ce jour par le SECO sur la mise en oeuvre des mesures d'accompagnement montrent que les contrôles effectués et les sanctions prononcées dans le cadre des mesures d'accompagnement sont appropriés.

Les modifications proposées comblent les lacunes ponctuelles existant dans l'exécution. Le renforcement des mesures, objectivement justifiable, peut être globalement qualifié de modéré. Les chances d'accès au marché restent donc intactes pour les entreprises et prestataires de services étrangers.

Le projet de loi ne constitue pas une réglementation excessive du marché du travail.

Il contribue à améliorer l'efficacité de la mise en oeuvre des instruments existants.

4

Liens avec le programme de la législature et la planification financière

Le projet est annoncé dans le message du 25 janvier 2012 sur le programme de la législature 2011 à 201518 sous la rubrique «autres objets».

Le projet n'est pas prévu dans la planification financière. Les raisons découlent des explications qui précèdent.

5

Aspects juridiques

5.1

Constitutionnalité et conformité aux lois

Les dispositions de cette loi se basent sur l'art. 110, al. 1, let. a et d, et sur l'art. 110, al. 2, de la Constitution fédérale (Cst.)19.

5.2

Compatibilité avec les obligations internationales de la Suisse

Comme le mentionne le message du 23 juin 1999 relatif à l'approbation des accords sectoriels entre la Suisse et la CE20, la LDét repose sur la directive de l'UE concernant le détachement de travailleurs21. L'annexe I de l'ALCP se réfère explicitement à cette directive à l'art. 22. Les mesures proposées dans le présent projet visent à étendre l'objet de la réglementation de la LDét aux prestataires de services indépendants et aux employeurs qui emploient des travailleurs engagés en Suisse. Il en découle une protection plus efficace contre les abus des normes de protection du droit du travail applicables aux travailleurs. Les mesures proposées reposent exclusivement sur le droit national. La directive de l'UE sur le détachement de travailleurs ne s'applique pas aux personnes exerçant une activité lucrative indépendante et 18 19 20 21

FF 2012 349, ici 480 RS 101 FF 1999 5440, ici 5737 Directive 96/71/CE du parlement européen et du conseil du 16 décembre 1996 concernant le détachement de travailleurs effectué dans le cadre d'une prestation de services; JO L 18 du 21.1.1997, p. 1.

3190

le droit européen ne connaît pas de règlementation spécifique sur la lutte contre l'indépendance fictive. Les dispositions générales du droit européen et de l'ALCP restent déterminantes, en particulier l'interdiction de la discrimination en raison de la nationalité. Comme cela a déjà été indiqué, l'un des buts des propositions prévues dans le projet de loi présenté ici est d'introduire des mesures compatibles avec l'ALCP et visant à éviter les questions de responsabilité. Ces questions ont été examinées de manière intensive pendant les travaux préliminaires. Certaines craintes ont été formulées quant à l'égalité de traitement des indépendants indigènes et des indépendants étrangers. Le Conseil fédéral est toutefois d'avis que le projet de loi ne prévoit aucune mesure allant à l'encontre de l'interdiction de discrimination inscrite dans l'ALCP. La LDét est une loi qui, de par son objet et son but, concerne avant tout les étrangers. Pour les indépendants indigènes, il existe suffisamment de possibilités de contrôle et de sanction dans le droit national.

Au demeurant, le projet ne contrevient à aucune obligation internationale de la Suisse.

5.3

Forme de l'acte à adopter

Le présent projet modifiant des lois fédérales en vigueur, il doit revêtir la forme d'une loi fédérale, conformément à l'art. 164 Cst.

3191

3192