10.019 Message relatif à une révision partielle de la loi sur l'aménagement du territoire du 20 janvier 2010

Mesdames les Présidentes, Mesdames et Messieurs, Par le présent message, nous soumettons à votre approbation un projet de révision partielle de la loi sur l'aménagement du territoire.

Nous vous proposons également de classer l'intervention parlementaire suivante: 2009

P

09.3054

Contre-projet direct à l'initiative pour le paysage.

Pour un développement durable du territoire suisse (CE 11.06.09, Werner Luginbühl)

Nous vous prions d'agréer, Mesdames les Présidentes, Mesdames et Messieurs, l'assurance de notre haute considération.

20 janvier 2010

Au nom du Conseil fédéral suisse: La présidente de la Confédération, Doris Leuthard La chancelière de la Confédération, Corina Casanova

2009-2762

959

Condensé L'initiative populaire «De l'espace pour l'homme et la nature (initiative pour le paysage)» a été déposée le 14 août 2008. Elle a pour but de lutter contre le mitage du territoire et d'améliorer la protection du paysage. Le Conseil fédéral a décidé de lui opposer un contre-projet indirect sous la forme d'une révision partielle de la loi sur l'aménagement du territoire.

Le Conseil fédéral juge que l'objectif poursuivi par l'initiative est justifié sur le fond. En lui opposant un contre-projet, il montre qu'il le prend au sérieux, mais qu'une autre solution lui semble plus appropriée pour l'atteindre: de son point de vue, les objectifs poursuivis par l'initiative peuvent être atteints sans modifier la Constitution; c'est pourquoi il ne lui oppose aucun contre-projet direct.

La présente révision partielle de la loi sur l'aménagement du territoire est axée sur les thèmes qui ont un rapport direct avec l'initiative pour le paysage. Les problèmes les plus urgents de l'aménagement du territoire, à savoir le mitage et la perte de terres cultivables, peuvent ainsi être combattus de manière ciblée.

Le projet de révision se limite à la maîtrise de l'urbanisation. Le Conseil fédéral n'ignore pas que d'autres domaines nécessitent une révision, mais comme ils impliquent un examen plus approfondi, notamment en raison des résultats de la consultation organisée au début 2009 au sujet d'une nouvelle loi sur le développement territorial, ils seront traités dans une révision ultérieure, après le traitement du contre-projet indirect.

Le présent projet de révision précise les buts et les principes de l'aménagement du territoire aux fins de mieux protéger les terres cultivables.

Il contient des indications claires pour les plans directeurs en vue d'une meilleure maîtrise de l'urbanisation et prévoit l'obligation expresse d'y intégrer les projets qui ont un impact important sur le territoire et l'environnement. Les plans directeurs devront être adaptés aux nouvelles exigences de droit fédéral dans un certain délai. Les cantons qui contreviennent à cette obligation s'exposeront à des sanctions.

Les zones à bâtir étant surdimensionnées dans de nombreux endroits, le classement en zone à bâtir sera par ailleurs soumis à des conditions plus strictes.

Enfin, les cantons devront prendre les mesures nécessaires pour que les terrains à bâtir soient bel et bien construits.

960

Table des matières Condensé

960

1 Présentation de l'objet 1.1 Contexte 1.2 Solutions étudiées 1.2.1 Contre-projet direct 1.2.2 Révision partielle touchant davantage de domaines 1.3 Les changements proposés 1.3.1 Définition des objectifs et mesures 1.3.2 Effets escomptés 1.4 Justification et appréciation de la solution proposée 1.4.1 Appréciation de la solution proposée lors de l'audition 1.4.2 Points contestés 1.4.3 Thèmes sans lien direct avec l'initiative 1.5 Application 1.6 Résultats de la procédure de consultation 1.7 Classement d'interventions parlementaires

962 962 964 964 964 966 966 967 967 968 970 971 971 972 973

2 Commentaire 2.1 Buts (art. 1) 2.2 Principes régissant l'aménagement (art. 3) 2.3 Planification directrice 2.3.1 Remarques générales 2.3.2 Etudes de base (art. 6) 2.3.3 Contenu minimum des plans directeurs (art. 8) 2.3.4 Contenu du plan directeur dans le domaine de l'urbanisation (art. 8a) 2.4 Zones à bâtir (art. 15) 2.5 Disponibilité des terrains constructibles (art. 15a) 2.6 Dispositions transitoires (art. 37b)

973 973 974 975 975 975 976 979 981 984 987

3 Conséquences 3.1 Conséquences pour la Confédération 3.2 Conséquences pour les cantons et les communes 3.3 Conséquences économiques 3.4 Autres conséquences

988 988 988 989 990

4 Rapport avec le programme de législature

990

5 Aspects juridiques 5.1 Constitutionnalité 5.2 Rapport avec le droit européen

990 990 991

Loi fédérale sur l'aménagement du territoire (Projet)

993

961

Message 1

Présentation de l'objet

1.1

Contexte

La loi du 22 juin 1979 sur l'aménagement du territoire (LAT)1 date d'une trentaine d'années. Même si elle a pu déployer au cours des ans des effets positifs sur le territoire, ses défauts et ses lacunes se sont révélés au fil du temps. La LAT présente en effet la réalité territoriale de manière lacunaire: bien que les espaces métropolitains, les agglomérations et les villes deviennent de plus en plus importants pour le développement territorial et économique de la Suisse, elle ne les mentionne même pas. La LAT a certes permis d'atténuer le mitage du territoire et la perte de terres cultivables, mais sans pouvoir les maîtriser. A cela s'ajoute que l'urbanisation et les transports souffrent d'une coordination insuffisante. Dans son ensemble, le développement territorial ne peut donc pas encore être considéré en Suisse comme durable.

Au vu de cette situation, le Conseil fédéral a jugé nécessaire d'examiner de manière approfondie si la législation sur l'aménagement du territoire permettait d'apporter des réponses adéquates aux problèmes. C'est pourquoi il a inscrit le principe d'une révision de la LAT aussi bien dans le programme de législature 2003 à 20072 que dans celui allant de 2007 à 20113. Le Conseil fédéral y a clairement indiqué que, dans l'intérêt d'une utilisation mesurée du sol, la dispersion des constructions devait être contenue et que les besoins territoriaux devaient être mieux coordonnés entre eux. Les travaux de révision ont commencé en 2006.

L'initiative populaire «De l'espace pour l'homme et la nature (initiative pour le paysage)» a été déposée le 14 août 2008. Elle a pour but de lutter contre la dispersion des constructions et de mieux protéger le paysage en modifiant l'art. 75 de la Constitution4.

L'objectif poursuivi par l'initiative est justifié sur le fond. La sensibilité à l'égard des problèmes soulevés a d'ailleurs fortement augmenté auprès du public, en particulier depuis les discussions relatives au classement de 55 ha de terres agricoles en zone à bâtir en vue de l'implantation d'une entreprise du secteur biopharmaceutique dans la commune fribourgeoise de Charmey (Galmiz). C'est pourquoi le Conseil fédéral a décidé, le 19 septembre 2008, d'opposer un contre-projet indirect à l'initiative. Il montre ainsi qu'il prend au sérieux les préoccupations des auteurs de l'initiative,
mais qu'une autre solution lui semble plus appropriée pour y répondre.

Lors du lancement de l'initiative populaire, le projet de nouvelle loi sur le développement territorial (P-LDTer) ­ qui aurait dû remplacer la LAT ­ était déjà bien avancé. Cette révision complète englobait également les domaines qui sont expressément mentionnés dans l'initiative pour le paysage. Au lieu d'élaborer un projet de loi spécifique consacré aux domaines traités par l'initiative, le Conseil fédéral a 1 2 3 4

962

RS 700 Cf. rapport du Conseil fédéral du 25 février 2004 sur le Programme de la législature 2003 à 2007 (FF 2004 1035) Cf. message du 23 janvier 2008 sur le programme de la législature 2007 à 2011 (FF 2008 639) Cf. message du 20 janvier 2010 relatif à l'initiative populaire «De l'espace pour l'homme et la nature (initiative pour le paysage)», FF 2010 945

estimé judicieux de soumettre à consultation le P-LDTer à titre de contre-projet indirect. Cette consultation a été menée du 12 décembre 2008 au 17 avril 2009, voire dans certains cas jusqu'à fin avril 2009. Le Tribunal fédéral, l'ensemble des cantons, les partis politiques représentés au Parlement, les associations faîtières sur le plan national représentant les communes, les villes, les régions de montagne et l'économie et 51 autres organisations intéressées ont été invités à donner leur avis sur ce projet.

Le P-LDTer a été rejeté par une nette majorité de participants. De plus, nombre d'entre eux estimaient que présenter ce projet à titre de contre-projet indirect à l'initiative pour le paysage était discutable, car il allait bien au-delà de ce qui était traité par l'initiative. Le projet d'une révision complète de la LAT a donc été abandonné.

Tout en rejetant l'idée d'une révision complète, un grand nombre de participants a toutefois reconnu qu'il fallait agir. La consultation a donc confirmé la nécessité de procéder à une révision, mais elle a en même temps clairement indiqué que seule une révision partielle était actuellement susceptible de réunir une majorité.

Seuls les thèmes ayant un lien direct avec l'initiative pour le paysage ont donc été repris du P-LDTer. Ce redimensionnement apporte certes une réponse à l'initiative pour le paysage, mais il permet surtout de se concentrer sur les problèmes les plus aigus de l'aménagement du territoire, à savoir la dispersion des constructions et la perte de terres cultivables. Le principe d'endiguer l'expansion de l'urbanisation a d'ailleurs été largement soutenu lors de la consultation.

Le droit de l'aménagement du territoire charge expressément la Confédération, les cantons et les communes de veiller à une utilisation mesurée du sol (art. 1, al. 1, LAT). S'agissant de l'urbanisation, la concrétisation de cette obligation se retrouve au niveau des buts et des principes régissant l'aménagement (art. 1 et 3, al. 3, LAT).

La problématique du développement de l'urbanisation n'est cependant traitée expressément qu'en relation avec les études de base auxquelles les cantons doivent procéder pour l'élaboration de leurs plans directeurs: le droit en vigueur n'impose pas au plan directeur cantonal de prescriptions spécifiques dans le domaine de
l'urbanisation. Ce sont là des lacunes évidentes. Le fait que, dans de nombreux endroits, les zones à bâtir sont encore surdimensionnées montre la nécessité d'établir de manière précise les conditions permettant de classer des nouveaux terrains en zone à bâtir et de prendre des directives claires pour évaluer les besoins, afin de mieux dimensionner ces zones. Contenir la dispersion des constructions et enrayer la perte de terres cultivables passe enfin par l'établissement de règles plus claires visant à améliorer la disponibilité des terrains situés en zone à bâtir. Le droit en vigueur est également lacunaire à cet égard.

Il est donc nécessaire de modifier la législation pour mieux maîtriser l'expansion de l'urbanisation. C'est pourquoi le Conseil fédéral propose d'opposer à l'initiative pour le paysage, à titre de contre-projet indirect, une révision partielle de la loi sur l'aménagement du territoire qui se concentre sur les problèmes précités.

963

1.2

Solutions étudiées

1.2.1

Contre-projet direct

Le conseiller aux Etats Werner Luginbühl a déposé le 4 mars 2009 un postulat (no 09.3054), chargeant le Conseil fédéral «d'étudier la possibilité d'opposer un contre-projet direct à l'initiative fédérale populaire , sous la forme d'une révision de l'art. 75 de la Constitution fédérale». Suivant la proposition du 6 mai 2009 du Conseil fédéral, le Conseil des Etats a adopté ce postulat le 11 mai 2009. Quelques participants à la consultation ont également plaidé en faveur de l'élaboration d'un contre-projet direct plutôt qu'indirect.

L'initiative pour le paysage prévoit que l'aménagement du territoire constitue une tâche commune de la Confédération et des cantons. La consultation relative au P-LDTer a cependant clairement indiqué qu'un transfert de compétences des cantons à la Confédération n'aurait pour l'heure aucune chance politiquement. Toute tâche commune est en outre problématique, parce qu'elle pose inévitablement la question délicate du partage des compétences. Le Conseil de l'organisation du territoire, (commission extraparlementaire permanente qui conseille le Conseil fédéral sur les questions fondamentales relevant de la politique d'organisation du territoire5) l'a également relevé.

La séparation que l'initiative propose d'inscrire dans la Constitution entre territoires constructibles et territoires non constructibles a sans conteste déjà valeur de droit constitutionnel non écrit. La mention expresse de ce principe dans la Constitution contribue certes à la transparence, mais elle n'apporte rien de nouveau.

De même, les autres domaines traités expressément par l'initiative pour le paysage (développement d'une urbanisation de qualité à l'intérieur du milieu bâti, limitation des constructions dans les territoires non constructibles et, par conséquent, protection des terres cultivables) constituent déjà les points forts de l'aménagement du territoire. L'art. 75 Cst. permet en effet à la Confédération d'édicter des dispositions détaillées6 dans ces domaines.

Le Conseil fédéral estime donc qu'il serait inopérant d'opposer un contre-projet direct à l'initiative pour le paysage. Ses buts peuvent en outre être atteints plus rapidement au moyen d'un contre-projet ciblé au niveau législatif plutôt que par un vote aléatoire, sans compter que l'initiative devrait ensuite être encore mise en oeuvre dans la loi.

1.2.2

Révision partielle touchant davantage de domaines

Dans le cadre des travaux préparatoires, on s'est notamment demandé s'il fallait élargir le champ de la révision. Cette question s'est posée en particulier au sujet des domaines que les cantons doivent traiter dans leurs plans directeurs, ceux-ci pouvant 5 6

964

Cf. art. 5 de l'ordonnance du 22 octobre 1997 sur la coordination des tâches de la Confédération relevant de la politique d'organisation du territoire (RS 709.17) Cf. Martin Lendi, St. Galler Kommentar zur Bundesverfassung, 2008, ch. marg. 25 ad art. 75 Cst. et Riccardo Jagmetti in: Aubert et al. (éd.), Kommentar zur Bundesverfassung der Schweizerischen Eidgenossenschaft vom 29. Mai 1874, Bâle/Berne/Zurich, 1991, ch. marg. 106 ad art. 22quater

notamment être complétés par des indications concrètes dans le domaine de la protection du paysage, voire dans celui de l'approvisionnement et celui de l'élimination des déchets en mettant l'accent sur le domaine de l'énergie. Les travaux préparatoires ont cependant montré la nécessité d'approfondir la question. Les résultats de la consultation ont également fait ressortir que les propositions faites à ce sujet n'étaient pas jugées suffisamment mûres. Il faut donc écarter pour le moment l'idée de légiférer dans ce domaine, dans l'intérêt même de la cause (cf.

cependant ch. 1.4).

Une intégration dans le contre-projet de la problématique des constructions hors de la zone à bâtir ne s'est pas non plus révélée judicieuse, même si l'initiative mentionne expressément des dispositions destinées à limiter les constructions dans les territoires non constructibles. La consultation a montré une fois de plus à quel point cette question était controversée, empêchant de trouver rapidement des solutions satisfaisantes et susceptibles de réunir une majorité politique. Le Conseil fédéral a donc jugé que ce domaine devait encore faire l'objet d'une large discussion avec les milieux intéressés, ce qui n'était pas réalisable dans le délai imparti pour élaborer un contre-projet indirect (en vertu de l'art. 97, al. 2, de la loi sur le Parlement7, le Conseil fédéral doit soumettre le message relatif à un contre-projet indirect dans un délai de 18 mois à compter du dépôt de l'initiative, soit en l'occurrence d'ici au 14 février 2010). Les améliorations à apporter dans le domaine des constructions hors de la zone à bâtir seront donc recherchées en marge du contre-projet (cf.

ch. 1.4).

Il est incontestable que les résidences secondaires ont une influence non négligeable sur le développement de l'urbanisation. Cette influence est particulièrement forte dans les régions touristiques. Le Conseil fédéral a cependant déjà soumis au Parlement un projet de loi visant à maîtriser la construction de résidences secondaires au moyen de mesures d'aménagement du territoire, dans son message concernant la modification de la loi fédérale sur l'aménagement du territoire (mesures d'accompagnement liées à l'abrogation de la loi fédérale sur l'acquisition d'immeubles par des personnes à l'étranger8)9. Etant donné que la construction de
résidences secondaires présente un enjeu particulier pour l'aménagement du territoire, ce projet restera d'actualité, quel que soit le sort réservé au projet d'abrogation de la loi fédérale sur l'acquisition d'immeubles par des personnes à l'étranger10 après son renvoi au Conseil fédéral11. Dans ces conditions, intégrer la problématique des résidences secondaires dans le contre-projet à l'initiative pour le paysage n'aurait aucun sens aux yeux du Conseil fédéral. Le projet relatif à la construction de résidences secondaires est pendant devant le Parlement et son traitement peut être poursuivi indépendamment de la présente révision partielle.

Pour toutes ces raisons, le Conseil fédéral est d'avis que le contre-projet indirect à l'initiative pour le paysage doit se cantonner au domaine du développement de l'urbanisation.

7 8 9 10 11

RS 171.10 Loi fédérale du 16 décembre 1983 sur l'acquisition d'immeubles par des personnes à l'étranger (LFAIE; RS 211.412.41).

FF 2007 5477 Message du 4 juillet 2007 concernant l'abrogation de la loi fédérale sur l'acquisition d'immeubles par des personnes à l'étranger (FF 2007 5455) BO 2008 N 249 260; BO 2008 E 421 507 511

965

1.3

Les changements proposés

Le projet ne traite que les thèmes qui apportent une réponse directe aux objectifs de l'initiative. L'identification de ces domaines résulte de l'analyse du texte de l'initiative12.

1.3.1

Définition des objectifs et mesures

Le projet vise à contenir la dispersion des constructions et ­ comme corollaire à un renforcement du développement de l'urbanisation à l'intérieur du milieu bâti ­ à mieux protéger les terres cultivables. Il prévoit à cet effet d'apporter diverses modifications à la LAT.

Les buts de l'aménagement du territoire (art. 1) doivent être complétés de façon que le principe de la séparation entre les territoires constructibles et les territoires non constructibles, le développement de l'urbanisation à l'intérieur du milieu bâti et la nécessité de créer un milieu bâti compact soient désormais expressément mentionnés. En outre, les principes régissant l'aménagement (art. 3) doivent être complétés de façon à assurer une meilleure utilisation des friches et à doter les zones d'habitations et les zones d'activités d'un «bon» réseau de transports publics, et non plus simplement d'un réseau «suffisant».

Le projet met l'accent sur le plan directeur cantonal en tant qu'instrument central de coordination et de pilotage aux mains des cantons. Le développement de l'urbanisation devra donc être maîtrisé au moyen d'un recours accru aux plans directeurs cantonaux, ce que des normes fédérales prescrivent de manière claire (art. 6, 8, 8a et 37b, al. 1). Ainsi, les plans directeurs devront notamment définir la dimension totale des surfaces affectées à l'urbanisation, leur répartition dans le canton et la manière de coordonner leur expansion au niveau régional. Les questions relatives à la dimension et à la réduction éventuelle des zones à bâtir ayant une taille excessive, de même que les stratégies visant à un développement d'une urbanisation de qualité à l'intérieur du milieu bâti, devront impérativement être traitées par le plan directeur cantonal, soumis à l'approbation du Conseil fédéral. Ces nouveautés permettront aux cantons et à la Confédération d'influer plus efficacement sur un développement de l'urbanisation respectant les objectifs constitutionnels d'une utilisation mesurée du sol et d'une occupation rationnelle du territoire.

Les conditions permettant de classer des terrains dans une zone à bâtir doivent être renforcées. Le projet n'admet de tels classements qu'à de strictes conditions: les réserves d'utilisation à l'intérieur des zones constructibles doivent avoir été utilisées, la disponibilité du terrain
à bâtir doit être garantie et ce classement doit permettre de mettre en oeuvre les prescriptions du plan directeur cantonal dans le plan d'affectation (art. 15). Les cantons auront cinq ans pour adapter leur plan cantonal aux prescriptions fédérales (art. 37b, al. 1). Dans l'intervalle, seuls les classements compensés par des déclassements de même surface sont autorisés (art. 37b, al. 2). A l'expiration du délai, aucune nouvelle zone à bâtir ne pourra être créée dans un

12

966

Cf. message relatif à l'initiative populaire «De l'espace pour l'homme et la nature (initiative pour le paysage)», FF 2010 945

canton tant que l'adaptation de son plan directeur n'aura pas été approuvée par le Conseil fédéral (art. 37b, al. 3).

Enfin, les cantons seront tenus de prendre les mesures nécessaires pour mettre les terrains à bâtir sur le marché et pour assurer une utilisation conforme à leur affectation, à savoir la construction (art. 15a). Des terrains à bâtir non disponibles augmentent en effet le risque de voir de nouvelles zones à bâtir déborder sur des zones de verdure. Ce phénomène doit être mieux maîtrisé.

1.3.2

Effets escomptés

Les mesures proposées doivent conduire à déclasser davantage de zones à bâtir inadéquates du point de vue de l'aménagement du territoire (dans des zones de verdure) et à ne classer en zone à bâtir que les terrains adéquats (avant tout dans les centres et dans des sites bien équipés). La dispersion des constructions en sera freinée. Par ailleurs, les surfaces devraient être mieux utilisées: si les zones à bâtir sont adéquates, elles pourront en règle générale être davantage exploitées que des surfaces inappropriées; conjuguée à la réduction du grand nombre de zones à bâtir inadéquates, cette mesure devrait conduire à une plus grande densité de l'urbanisation13. Sauf augmentation de la surface brute de plancher par habitant, l'extension de l'urbanisation serait ainsi freinée et la consommation du sol par habitant diminuerait.

Le potentiel de zones à bâtir non construites est considérable. Les mesures prévues créeront les conditions permettant d'intensifier la construction sur les terrains à bâtir.

On pourra aussi, au moyen de remembrements ou autres mesures foncières améliorer la constructibilité de biens-fonds. Au surplus, le droit fédéral créera un nouvel instrument sous la forme d'une obligation de construire (art. 15a, al. 2): celle-ci prévoira que les propriétaires de biens-fonds sis en zone à bâtir peuvent être tenus de construire dans un délai donné sur des terrains à bâtir laissés en friche. Ces zones à bâtir seront ainsi effectivement utilisées à des fins d'urbanisation et l'urbanisation pourra être développée à l'intérieur du milieu bâti. Le risque de voir de nouveaux territoires être classés en zone à bâtir est par ailleurs réduit, ce qui freinera la dispersion des constructions. Certes, les mesures prévues n'entraîneront pas une limitation définitive de l'urbanisation, mais elles ralentiront son extension et favoriseront une utilisation plus efficace du territoire.

1.4

Justification et appréciation de la solution proposée

Pour les motifs énoncés au ch. 1.2.2, le projet se limite au domaine du développement de l'urbanisation. Le temps imparti pour élaborer un contre-projet à l'initiative conduit inévitablement à se concentrer sur les seuls points pouvant répondre aux préoccupations qu'elle exprime.

Le présent projet de loi a été élaboré en étroite collaboration avec les cantons, au niveau tant technique que politique, ainsi qu'avec les villes et les communes. Cette procédure a permis d'examiner à un stade précoce si les propositions pouvaient être 13

Cf. Office fédéral du développement territorial, Rapport 2005 sur le développement territorial, pp. 33 à 39

967

mises en oeuvre par les différentes autorités chargées de l'exécution de la législation sur l'aménagement du territoire.

Malgré le temps très court qui s'est écoulé entre la fin de la procédure de consultation sur le P-LDTer et la mise au point du contre-projet, les cantons, les partis politiques et les milieux intéressés ont eu l'occasion, dans le cadre d'une audition librement organisée, de donner leur avis sur les dispositions relatives au domaine de l'urbanisation, qui avaient été retravaillées sur la base des résultats de la consultation.

1.4.1

Appréciation de la solution proposée lors de l'audition

Neuf cantons, trois partis politiques représentés aux Chambres fédérales et 53 associations et organisations intéressées ont participé à l'audition du 6 octobre 2009, organisée sous forme de conférence. Par ailleurs, 39 avis écrits ont été adressés à l'administration en marge de l'audition.

La plupart des participants à l'audition ont salué la révision partielle de la LAT, élaborée à titre de contre-projet indirect à l'initiative pour le paysage. Seuls six d'entre eux, parmi lesquels l'UDC, ont estimé qu'il était inutile de présenter un contre-projet indirect. Quelques participants ont demandé que la révision partielle de la LAT aborde l'ensemble des problèmes et défis actuels.

Buts et principes Les propositions relatives aux buts et aux principes régissant l'aménagement (art. 1 et 3) ont été soutenues par la grande majorité des participants. Toutefois, certains d'entre eux, en particulier les milieux agricoles, ont craint que l'inscription formelle dans la loi du principe de séparation entre territoires constructibles et territoires non constructibles puisse avoir des effets négatifs pour l'agriculture si elle devait limiter les constructions et installations nécessaires à l'exploitation agricole. Cette crainte n'est pas fondée. Le principe en question a toujours fait partie des buts fondamentaux de l'aménagement du territoire. En outre, le projet ne modifie pas les dispositions relatives à la construction hors de la zone à bâtir: les constructions et les installations qui peuvent être érigées sur la base du droit en vigueur continueront d'être admissibles. La proposition de doter les zones d'habitations et d'activités d'un bon réseau de transports publics a fait l'objet de diverses critiques, au motif qu'un tel objectif ne serait pas réalisable ou pas adéquat dans toutes les régions. Etant donné que les principes régissant l'aménagement du territoire doivent être considérés comme des instructions à l'adresse des collectivités agissant dans le domaine et qu'elles indiquent ce que ces collectivités «devraient» faire, la disposition en question offre suffisamment de flexibilité pour tenir compte de la diversité des conditions régionales. Fixer de plus grandes exigences en matière de transports publics contribuera en outre à rendre plus durable l'aménagement du territoire.

Dispositions relatives
au plan directeur Les dispositions relatives au plan directeur cantonal (art. 6, 8, 8a et 37b, al. 1), qui visent à renforcer cet instrument de planification, reçoivent un large soutien. Certains participants ont demandé que le plan directeur cantonal contienne également des indications concrètes pour la protection du paysage. Quelques propositions 968

visaient à y introduire des indications plus précises sur les zones à bâtir, notamment en ce qui concerne les étapes liées à l'équipement et à la construction sur des biensfonds. De telles précisions iraient toutefois trop loin: le plan directeur doit rester un instrument de planification de niveau supérieur y compris dans le domaine de l'urbanisation et ne pas anticiper l'établissement des plans d'affectation en allant dans les détails. Enfin, quelques participants jugent trop court le délai de cinq ans prévu pour adapter les plans directeurs cantonaux aux nouvelles exigences de droit fédéral.

Dispositions relatives aux zones à bâtir Une majorité de participants soutient les dispositions relatives aux zones à bâtir (art. 15 et 37b, al. 2 et 3). Certaines réserves ont néanmoins été formulées concernant l'obligation de garantir la disponibilité des nouveaux terrains sur le plan juridique avant de pouvoir les classer (art. 15, al. 3, let. c). Cette obligation est toutefois importante, car elle vise à empêcher que le classement en zone à bâtir puisse entraîner la thésaurisation du terrain. Les al. 2 et 3 de l'art. 37b, qui précisent comment les zones à bâtir existantes seront traitées durant le délai fixé aux cantons pour adapter leur plan directeur aux nouvelles exigences de droit fédéral ou ce qu'il advient si un canton ne dispose pas dans les délais d'un plan directeur adapté et approuvé par le Conseil fédéral, sont sujets à controverse. Quelques participants rejettent ces dispositions, d'autres en revanche réclament des sanctions claires en cas d'inobservation du délai transitoire et la définition d'un délai précis pour adapter les plans d'affectation. La solution proposée se situe à mi-chemin. Le Conseil fédéral est d'avis qu'un délai transitoire doit préciser ce qui doit être entrepris dans l'intervalle ou à son expiration. Il estime toutefois qu'il revient aux cantons de fixer un délai aux communes pour que celles-ci adaptent leurs plans d'affectation aux modifications du plan directeur cantonal.

Ce sont avant tout les organisations soutenant l'initiative pour le paysage qui proposent une disposition complémentaire fixant les étapes à respecter pour équiper les zones à bâtir et les construire. Le Conseil fédéral est d'avis que ces questions relèvent de la gestion des zones à bâtir et qu'il
revient le cas échéant aux cantons de les régler. Il ne juge donc pas nécessaire de légiférer au niveau fédéral.

Mesures contre la thésaurisation de terrains à bâtir La nécessité de lutter contre la thésaurisation de terrains à bâtir n'est guère contestée. La manière de résoudre ce problème donne cependant lieu à des avis divergents.

Certains demandent de laisser aux cantons le choix de prendre les mesures appropriées, sans mentionner d'instrument dans le droit fédéral. Quelques participants rejettent globalement les mesures contraignantes de droit foncier, les considérant comme une atteinte inacceptable à la garantie de la propriété. D'autres s'opposent à toute obligation de construire, tout au moins pour les biens-fonds situés dans des zones à bâtir existantes.

969

1.4.2

Points contestés

Lors de l'élaboration du projet de loi, deux thèmes essentiellement ont donné lieu à controverse; ils ont été également abordés lors de l'audition. Il s'agit d'une part du prélèvement sur la plus-value et d'autre part de la question de savoir si le projet devrait comporter une obligation explicite de procéder à des déclassements de zone.

Prélèvement sur la plus-value Un grand nombre de participants ont souligné lors de la consultation relative au P-LDTer l'importance et l'utilité du prélèvement sur la plus-value résultant de mesures d'aménagement. Quelques-uns avaient également demandé qu'une réglementation fédérale subsidiaire s'applique si les cantons n'introduisent pas dans un certain délai le régime de compensation prévu à l'art. 5, al. 1, LAT (droit en vigueur) «permettant de tenir compte équitablement des avantages et des inconvénients majeurs qui résultent de mesures d'aménagement». Lors de la préparation de la présente révision, une large discussion a été menée, y compris avec les cantons, sur la manière de traiter la question de ce prélèvement. En effet, d'une part, le prélèvement d'une partie de la plus-value qui découle du classement d'un terrain dans une zone à bâtir pourrait conduire à une augmentation de l'utilisation des réserves de zones à bâtir aux fins d'éviter la taxe. D'autre part, les moyens financiers résultant de classements en zone à bâtir qui apparaissent fondés et nécessaires permettront de couvrir une partie des indemnités qui sont dues pour des déclassements. Le présent projet donne par conséquent davantage d'importance au prélèvement sur la plusvalue. C'est pourquoi le Conseil fédéral, considérant aussi la discussion menée le 17 septembre 2009 dans le cadre de l'assemblée générale de la Conférence suisse des directeurs des travaux publics, de l'aménagement du territoire et de la protection de l'environnement, estime qu'il ne faut pas affaiblir l'art. 5, al. 1, et que, inversement, le renforcement des dispositions sur le prélèvement sur la plus-value ne serait pas susceptible de recueillir un consensus.

Obligation de déclassement Lors de la préparation du projet, la discussion a également porté sur la question de savoir si l'art. 15 ne devrait pas, à certaines conditions, obliger explicitement les cantons à classer dans une zone non constructible des terrains qui
appartiennent actuellement à une zone à bâtir. Des propositions identiques ont été présentées lors de l'audition.

Le projet donne au plan directeur cantonal un rôle central dans la maîtrise du développement de l'urbanisation. Les cantons doivent notamment y définir comment assurer la conformité des zones à bâtir aux nouvelles exigences de l'art. 15 LAT.

Les zones à bâtir étant surdimensionnées dans de nombreux endroits, on ne pourra pas faire l'impasse sur la manière de réduire les zones à bâtir qui ne seront vraisemblablement pas nécessaires dans les quinze prochaines années compte tenu des réserves d'utilisation existant à l'intérieur du milieu bâti, et sur la manière de les équiper et d'assurer leur construction. Les autorités seront donc forcées de procéder à des déclassements sur la base des indications du plan directeur. C'est pourquoi il n'est pas nécessaire d'inscrire une obligation explicite dans la loi.

970

1.4.3

Thèmes sans lien direct avec l'initiative

Le Conseil fédéral a conscience que le développement de l'urbanisation n'est pas le seul domaine à réviser. Les résultats de la consultation sur le P-LDTer ont montré que des domaines non concernés par l'initiative nécessitaient également une révision, sans compter les lacunes du droit en vigueur.

Comme la consultation l'a montré, ces thèmes nécessitent toutefois une discussion plus approfondie et, le cas échéant, des modifications substantielles par rapport au P-LDTer. C'est pourquoi le Conseil fédéral a décidé, le 21 octobre 2009, de s'occuper de ces domaines lors d'une étape ultérieure de la révision, après le contreprojet indirect à l'initiative pour le paysage.

Cette prochaine révision visera essentiellement à préciser la planification fédérale (notamment en lien avec les plans directeurs cantonaux), à mieux prendre en compte les espaces fonctionnels (par ex. intégration dans la loi des projets d'agglomération), à mieux protéger les meilleurs sols agricoles (en particulier les surfaces d'assolement), à renforcer les plans directeurs cantonaux (études de base plus précises, prescriptions fédérales plus claires dans les domaines des transports, de l'approvisionnement, de l'élimination des déchets, de l'agriculture, de la nature et du paysage) et à optimiser et simplifier la réglementation applicable aux constructions hors des zones à bâtir (sans la refondre). La consultation sur le P-LDTer et les discussions menées récemment ont en outre montré que la question de l'utilisation future du sous-sol et de sa prise en considération dans la planification doit également être traitée.

Les travaux relatifs à ces thèmes seront entrepris dans le courant de l'année. Afin d'élaborer un projet susceptible de réunir une majorité, il sera de la plus grande importance d'y associer les milieux intéressés.

1.5

Application

L'exécution du droit fédéral de l'aménagement du territoire est du ressort des cantons. L'application de la nouvelle réglementation reposera essentiellement sur les directives qui, aux termes de l'art. 15, al. 4, porteront sur le classement de terrains en zone à bâtir, notamment sur la manière de calculer le besoin de telles zones. La Confédération et les cantons doivent élaborer ensemble ces directives. Cette collaboration permettra de garantir la recherche de solutions qui, d'une part, respectent les buts, les principes et les nouvelles exigences de la LAT et, d'autre part, puissent être considérées comme réalisables par ceux qui sont chargés de les mettre en oeuvre.

Comme l'établissement des plans d'affectation relève en règle générale des communes, on veillera à les associer suffisamment tôt au processus. En outre, parallèlement aux nouvelles directives prévues par l'art. 15, al. 4, les directives concernant l'établissement des plans directeurs cantonaux devront être complétées sur la base de l'art. 8 de l'ordonnance sur l'aménagement du territoire14. La collaboration avec les cantons et, au besoin, avec les communes devra également être étroite. Toutes les

14

Ordonnance du 28 juin 2000 sur l'aménagement du territoire (OAT; RS 700.1)

971

directives (les nouvelles comme celles qui doivent être complétées) devront être disponibles au plus tard à l'entrée en vigueur de la nouvelle législation.

Dans une première étape, les cantons devront adapter leurs plans directeurs aux nouvelles exigences du droit fédéral. Aussitôt que les adaptations des plans directeurs auront été approuvées par le Conseil fédéral, les communes devront à leur tour adapter leurs plans d'affectation. Au cas où des plans d'affectation communaux ne devraient pas satisfaire aux exigences du plan directeur, l'autorité cantonale compétente (art. 26, al. 2, LAT) devra refuser de les approuver ou, dans la mesure du possible, leur apporter les corrections nécessaires. Au besoin, l'Office fédéral du développement territorial pourra soumettre les plans d'affectation communaux à un contrôle judiciaire15. Cela serait le cas lorsqu'un plan d'affectation communal aurait été approuvé par l'autorité cantonale compétente bien qu'il ne satisfasse pas à l'art. 15 ni aux modifications du plan directeur approuvées par le Conseil fédéral.

1.6

Résultats de la procédure de consultation

Les résultats de la procédure de consultation sur le P-LDTer sur les points qui ne font pas l'objet de la présente révision seront pris en considération dans le cadre d'une autre révision partielle de la LAT (cf. ch. 1.4.3). Le présent chiffre rappelle brièvement les principaux résultats de cette procédure.

Le Tribunal fédéral, tous les cantons (sauf Appenzell Rhodes-Intérieures), sept partis politiques, les trois associations faîtières des communes, des villes et des régions de montagne, cinq associations faîtières de l'économie et 44 organisations qui y avaient été invitées ont donné leur avis sur le P-LDTer. En plus des destinataires officiels de la consultation, 173 organisations et sociétés, huit villes et communes et neuf particuliers ont donné leur avis. Au total, 275 prises de positions, dont certaines étaient très longues, sont parvenues à l'administration.

Les participants ont donné des avis parfois très circonstanciés sur les modifications proposées. Pour les détails, on pourra se référer au rapport rendant compte des résultats de la consultation16.

Une large majorité des participants s'est opposée à une révision totale de la LAT, tout en reconnaissant parfois la nécessité d'agir dans certains domaines.

Le projet soumis à consultation a été jugé trop centralisateur. De nombreux participants ont estimé qu'il portait atteinte aux compétences que la Constitution réserve aux cantons. Les associations économiques, mais aussi des cantons et d'autres participants, ont même dénoncé une violation de la garantie constitutionnelle de la propriété.

La procédure de consultation a également montré que les modifications apportées à la LAT auraient de plus grandes chances d'être acceptées si les cantons, auxquels il incombe d'aménager le territoire dans le cadre des principes fixés par la Confédération (art. 75, al. 1, Cst.), étaient pleinement et rapidement associés aux travaux.

15 16

972

Art. 111 de la loi fédérale du 17 juin 2005 sur le Tribunal fédéral (LTF; RS 173.110), en relation avec les art. 89, al. 2, let. a, LTF et 48, al. 4, OAT Le rapport est publié sur le site Internet de l'Office fédéral du développement territorial à l'adresse suivante: www.are.admin.ch/dokumentation/00121/00224/index.html?lang=fr&msg-id=29104

Enfin, on trouvera ci-dessous un aperçu des résultats de la consultation en ce qui concerne les différents domaines abordés par le présent projet.

­

S'agissant des planifications fédérales, la force obligatoire attribuée au Projet de territoire Suisse vis-à-vis des cantons et des communes n'est pas apparue propre à recueillir un large consensus. En revanche, la nécessité de mettre davantage l'accent dans la LAT sur la planification dans les territoires fonctionnels (par ex. au moyen des projets d'agglomération) a été reconnue par une large majorité des participants.

­

Le principe d'un renforcement des plans directeurs cantonaux au moyen de prescriptions fédérales plus claires fixant leur contenu minimum a été accueilli favorablement.

­

Les efforts à entreprendre pour maîtriser l'extension de l'urbanisation (développement de l'urbanisation à l'intérieur du milieu bâti, dimension des zones à bâtir, voire mesures de lutte contre la thésaurisation des terrains à bâtir) sont globalement soutenus. Toutefois, les avis relatifs à la réglementation concrète à mettre en place divergent, parfois fortement. De nombreux participants émettent en particulier des doutes sur la constitution de réserves de zones à bâtir en tant qu'instrument destiné au redimensionnement des zones à bâtir.

­

Le nouveau régime proposé pour la construction hors de la zone à bâtir, qui devait laisser aux cantons davantage de marge d'appréciation, a été fortement remis en question, voire rejeté. Ce sont avant tout les milieux agricoles, de nombreux cantons et les organisations à but non lucratif qui se sont montrés les plus critiques.

­

Enfin, les nouvelles taxes que le projet prévoyait d'introduire en dehors de la zone à bâtir (taxe d'imperméabilisation et taxe sur les surfaces habitables) ont été rejetées par une majorité de participants.

1.7

Classement d'interventions parlementaires

Dans son postulat du 4 mars 2009 (09.3054), le conseiller aux Etats Werner Luginbühl a demandé au Conseil fédéral d'examiner si un contre-projet direct ne devrait pas être opposé à l'initiative pour le paysage. Son objectif principal était de séparer la révision totale de la LAT du traitement de l'initiative. Le projet d'une révision totale ayant été abandonné, cet objectif est atteint. Le Conseil fédéral propose donc de classer le postulat.

2

Commentaire

2.1

Buts (art. 1)

Le principe de la séparation entre territoires constructibles et territoires non constructibles est fondamental pour l'aménagement du territoire. Faisant partie intégrante de la notion d'utilisation mesurée du sol, il a déjà valeur de droit constitutionnel non écrit. Le projet l'inscrit désormais expressément dans la loi (art. 1, al. 1) à titre de but de l'aménagement du territoire. Par territoires non constructibles, on entend les 973

territoires situés en dehors de la zone à bâtir. Etant donné que la présente révision partielle ne modifie pas les dispositions existant à ce sujet, les constructions et installations qui sont admissibles en vertu du droit en vigueur (art. 16a et 24 ss LAT) le demeureront (cf. ch. 1.4.1 [Buts et principes]).

L'al. 2, let. abis, mentionne expressément le développement de l'urbanisation à l'intérieur du milieu bâti parmi les buts de l'aménagement du territoire. Cette meilleure utilisation des réserves existant à l'intérieur du territoire urbanisé déjà largement bâti, accompagnée du maintien et de l'encouragement d'une urbanisation de la meilleure qualité possible, constitue un des piliers de la politique suisse de l'aménagement du territoire. De telles réserves se trouvent par exemple dans les friches industrielles. Diverses enquêtes ont montré que non seulement les villes, mais aussi de plus petites communes disposent souvent d'un potentiel de développement de l'urbanisation à l'intérieur du milieu bâti plus important que ce qui est admis communément.

Le développement compact de l'urbanisation doit lui aussi figurer parmi les buts de l'aménagement du territoire (al. 2, let. b), afin de juguler la dispersion insidieuse des constructions. Il est largement reconnu qu'une urbanisation compacte ­ à l'opposé de structures urbaines dispersées ­ est la plus forte contribution à une utilisation mesurée du sol. Une urbanisation compacte (notion également répandue en Allemagne et en Autriche) constitue la condition nécessaire pour la mise en place d'une mobilité durable et permet d'utiliser plus efficacement les infrastructures existantes, ce qui favorise à son tour le développement économique de la Suisse et sa compétitivité (cf. ch. 3.3). On ne doit pas ignorer à ce propos que la Suisse compte un certain nombre de territoires à habitat traditionnellement dispersé, dans lesquels la structure urbaine s'est développée de manière organique. Pour de tels territoires, l'ordonnance du 28 juin 2000 sur l'aménagement du territoire17 prévoit déjà une réglementation spéciale (cf. art. 39), qui n'est pas concernée par la let. b.

La let. bbis reprend la let. b actuelle.

2.2

Principes régissant l'aménagement (art. 3)

Même si le transport individuel motorisé continuera à jouer un grand rôle pour l'équipement en transport des zones urbanisées, l'accent doit être mis plus nettement sur les transports publics. Les autorités chargées de l'aménagement du territoire doivent donc contribuer en particulier à ce que les territoires réservés à l'habitat et aux activités économiques ne soient pas simplement dotés d'un réseau de transports publics suffisant mais d'un bon réseau (al. 3, let. a). Cette exigence vaut en particulier pour les nouvelles zones à bâtir, celles-ci devant être délimitées, en toute logique, là où les équipements présentent d'ores et déjà la qualité requise. Si, malgré tout, une amélioration du réseau (horaires de desserte et/ou infrastructure) se révélait nécessaire, les besoins et l'offre doivent aussi être coordonnés afin d'optimiser les coûts.

La mise en oeuvre de cette exigence de bons équipements ne pourra bien sûr pas être évaluée partout selon les mêmes critères. Il faudra prendre en considération les particularités régionales pour définir la qualité du réseau.

17

974

RS 700.1

Dans l'intérêt de la densification du milieu bâti, et donc de l'utilisation plus mesurée du sol, l'al. 3, let. abis, met l'accent sur l'exploitation des friches ou des surfaces sous-utilisées.

2.3

Planification directrice

2.3.1

Remarques générales

Le droit de l'aménagement du territoire ne contient aucune disposition fixant concrètement le contenu des plans directeurs cantonaux. L'art. 8 LAT prévoit simplement que les plans directeurs cantonaux définissent au moins la façon de coordonner les activités qui ont des effets sur l'organisation du territoire, compte tenu du développement souhaité, l'ordre dans lequel il est envisagé d'exercer ces activités et les moyens à mettre en oeuvre. On ne peut que déduire de l'art. 6 LAT la liste des thèmes que le droit fédéral impose de traiter dans le plan directeur cantonal. Il faut remédier à cette lacune, mais en dehors de la présente révision, conçue comme un contre-projet indirect à l'initiative pour le paysage. Dans une première étape, les prescriptions fédérales doivent préciser le contenu du domaine de l'urbanisation.

Cette thématique est en effet au coeur de l'initiative et c'est dans ce domaine que les besoins sont le plus pressants, comme le montrent l'utilisation effrénée du sol et le fait que le découpage et le mitage du paysage continuent de progresser. Dans le cadre d'une enquête qui a servi de base au rapport de travail sur les plans directeurs de troisième génération de l'Office fédéral du développement territorial, des experts des horizons les plus divers ont eux aussi affirmé à l'unanimité que le plus grand défi posé à la planification directrice dans les prochaines années résidait dans le domaine du développement de l'urbanisation. Le pilotage ciblé du développement de l'urbanisation a aussi des effets positifs sur le paysage et contribue, comme voulu par les auteurs de l'initiative pour le paysage, à éviter au maximum de nouvelles constructions sur le territoire agricole. Soulignons cependant que l'économie a aussi un intérêt à régler le problème, puisqu'une utilisation du sol efficace et adaptée aux besoins renforce le développement économique et la compétitivité du pays.

Dans une deuxième étape, la LAT devra fixer le contenu minimum des plans directeurs dans les autres domaines (transports; agriculture, nature et paysage, dangers naturels; approvisionnement et élimination des déchets). Le présent projet est certes focalisé sur l'urbanisation, mais ce n'est que temporaire. Tous les domaines conserveront le même poids lors de l'examen des plans directeurs cantonaux par la Confédération.

2.3.2

Etudes de base (art. 6)

Les cantons ne doivent pas seulement être tenus de déterminer le cours qu'ils entendent donner à leur développement territorial en vue de l'établissement de leur plan directeur, autrement dit dans des études de base: ils doivent intégrer ces orientations directement dans le plan directeur pour les rendre contraignantes à l'égard des autorités. C'est pourquoi l'art. 6, al. 1, doit être abrogé et l'art. 8 LAT complété en conséquence (cf. art. 8, let. a). Le plan directeur voit ainsi se renforcer sa fonction d'instrument stratégique des autorités politiques du canton. Des adaptations de

975

nature rédactionnelle doivent pour cela être apportées à la phrase introductive de l'al. 2.

Les études de base servent à l'élaboration du plan directeur et sont à prendre comme un état des lieux. Elles doivent donc fournir des informations sur l'état actuel et sur le développement qui y a conduit (al. 3, phrase introductive). Il est indispensable de disposer d'études de base de qualité, complètes et actuelles, pour déterminer les stratégies et les mesures appropriées dans le plan directeur.

La modification proposée à l'al. 3, let. a, vise à placer expressément l'accent sur les territoires urbanisés. Dans leurs études de base, les cantons doivent en présenter l'état et le développement, en indiquant l'emplacement et la dimension de leurs zones à bâtir. De même, il leur faut fournir des renseignements sur les réserves d'utilisation à l'intérieur de la zone à bâtir. Ces données sont nécessaires pour que les dispositions de l'art. 8a puissent être mises en oeuvre de manière fondée dans le plan directeur.

2.3.3

Contenu minimum des plans directeurs (art. 8)

Le droit en vigueur implique que chaque canton établisse un plan directeur cantonal, mais il ne le dit jamais expressément. Une correction de nature rédactionnelle attirera l'attention sur ce point, y compris pour ceux qui ne sont pas familiers de l'aménagement du territoire.

Les cantons ont désormais l'obligation de définir dans leurs plans directeurs le cours que doit suivre l'aménagement du territoire du canton (al. 1, let. a). Le contenu des études de base fixé par le droit en vigueur (cf. art. 6, al. 1, LAT) fera désormais partie du plan directeur cantonal, comme c'est déjà expressément le cas dans plusieurs cantons. Il ne peut d'ailleurs pas en être autrement.

Avant de pouvoir fixer dans le plan directeur les résultats de la planification concernant les domaines sectoriels, il faut disposer d'une vue d'ensemble du territoire, qui indique au canton la ligne à suivre pour son développement territorial à moyen et à long terme, tout en assurant la coordination avec les cantons voisins et la Confédération. C'est là une condition essentielle pour garantir la cohérence des actions entreprises par tous les acteurs. De telles représentations du développement, qui peuvent par exemple trouver leur expression dans un projet de territoire du canton, constituent le cadre de référence commun permettant de garantir la meilleure coordination possible des actions menées tant par le secteur public que par les particuliers. Le projet de développement territorial du canton inclura également une réflexion au niveau cantonal sur l'emplacement des pôles de développement qu'il entend constituer et sur la manière de protéger les surfaces agricoles utiles.

Pour le reste, la définition générale du contenu minimum des plans directeurs cantonaux figurant à l'art. 8, al. 1, n'est pas modifiée. En particulier, il était déjà impératif que les plans directeurs cantonaux indiquent comment les activités ayant une incidence sur le territoire sont coordonnées pour atteindre le développement recherché. Le plan directeur, en tant qu'instrument de coordination et de pilotage de l'ensemble du développement territorial, ne peut remplir son rôle de façon optimale que si ces activités sont mieux coordonnées dans le cadre de la planification et harmonisées avec des projets de développement clairs du canton. La gamme des projets entrant dans le contenu minimum du plan directeur aux termes de l'art. 8, 976

al. 1, let. b, doit dès lors être plus vaste que ce que la Confédération demandait jusqu'ici aux cantons. Cette évolution est d'ailleurs aussi exprimée par le nouvel art. 8a (cf. ch. 2.3.4).

L'art. 8, al. 2, vise le même objectif. Toutefois, il n'indique pas seulement que les projets d'une certaine importance doivent être traités dans le plan directeur: il garantit également que l'on ne puisse ignorer les prescriptions relatives au contenu minimum des plans directeurs. Ainsi, les projets ayant des incidences importantes sur le territoire et l'environnement ne seront admissibles que s'ils reposent sur une base figurant dans le plan directeur cantonal.

Cette disposition fixant une limite à partir de laquelle les projets doivent figurer dans le plan directeur cantonal vise à garantir le respect de la hiérarchie des plans, telle qu'exposée par le Tribunal fédéral: L'art. 22quater, al. 1, Cst. fait obligation aux cantons de créer un aménagement du territoire qui serve une utilisation judicieuse et mesurée du sol et une occupation rationnelle du territoire. A cette fin, des plans directeurs et des plans d'affectation sont édictés et des procédures d'autorisation de construire sont menées. Ces instruments sont hiérarchiquement subordonnés les uns aux autres et doivent constituer un ensemble cohérent dans lequel chaque élément exerce une fonction spécifique.

(...) Aucune dérogation ne peut être accordée pour les constructions et les installations que seule une procédure de planification permet de recenser de manière appropriée du fait de leur spécificité18.

Une telle limite doit aussi être fixée au niveau supérieur, c'est-à-dire dans les prescriptions fédérales. L'art. 8, al. 2, la prévoit désormais explicitement. Des dispositions analogues relatives aux plans sectoriels donnent satisfaction dans le domaine des planifications fédérales (par ex. art. 126, al. 4, LAAM, art. 16, al. 5, LIE, et art. 18, al. 5, LCdF).

Le seuil est indiqué à l'al. 2 par «les projets qui ont des incidences importantes sur le territoire et l'environnement». Vu le niveau hiérarchique de planification, ce seuil doit être placé nettement plus haut que la limite de l'obligation de planification (audelà de laquelle un projet ne peut pas être évalué uniquement dans le cadre de la procédure d'autorisation de construire mais requiert
une base dans la planification des affectations). Selon la jurisprudence du Tribunal fédéral, on pouvait présumer, du moins avant la révision du 19 septembre 2008 de l'ordonnance du 19 octobre 1988 relative à l'étude de l'impact sur l'environnement19, qu'un projet était soumis à la planification s'il était soumis à l'étude de l'impact sur l'environnement (EIE). On peut toutefois affirmer que le seuil au-delà duquel un projet doit être traité dans le plan directeur ne sera jamais en dessous de la limite de soumission à l'EIE et qu'il sera le plus souvent plus élevé. Les incidences importantes au sens de l'art. 8, al. 2, sont en particulier l'occupation de vastes surfaces, une influence significative sur la structure des affectations et de l'approvisionnement du canton, de gros flux de trafic ou des atteintes élevées à l'environnement ou au paysage. Typiquement, de tels projets sont en général aussi fortement tributaires d'une collaboration et d'une coordination au niveau cantonal et avec les cantons voisins ou la Confédération. On peut donner comme exemple la détermination de pôles de développement ou de régions cantonales à forte concentration d'emplois, l'équipement de nouveaux 18 19

ATF 116 Ib 50, consid. 3a, p. 53 s. (traduction) RS 814.011

977

domaines skiables, de grands projets globaux d'aménagement de cours d'eau, de carrières ou de décharges, les installations générant un trafic intense comme les centres commerciaux, les marchés professionnels et les installations de loisirs à partir d'une certaine taille, les complexes touristiques ou encore les infrastructures de transport et d'énergie d'importance au moins régionale.

Concrètement, cette disposition pourrait être mise en oeuvre comme suit: lors de l'adaptation du plan directeur, le canton analyse, entre autres, les projets et les développements imminents susceptibles d'avoir des incidences importantes sur le territoire ou l'environnement. Il décide à quel endroit des pôles de développement doivent être instaurés pour certaines affectations, à quel endroit des transformations majeures doivent avoir lieu à l'intérieur de la zone à bâtir (par ex. nouvelles affectations de friches industrielles), à quel endroit des centres commerciaux, des marchés professionnels, des installations de loisirs ou des complexes touristiques doivent être créés. Si le canton prévoit par exemple, dans une région déterminée, des installations générant un trafic intense, la planification des affectations pourra être conçue en conséquence et l'autorisation de construire pourra être délivrée sans entreprendre une action au niveau de la planification directrice (le «projet» d'autoriser dans cette région des installations générant un trafic intense étant déjà inscrit dans le plan directeur). Si de nouveaux besoins surgissent, pour un grand centre commercial par exemple, sur un site qui n'est pas prévu pour cela, le canton devra examiner dans le cadre d'une procédure d'adaptation du plan directeur si ce développement est souhaitable et comment il peut être coordonné avec les autres exigences relatives au territoire et à l'environnement. Pour gagner du temps, il sera possible de préparer en parallèle la mise en oeuvre au niveau de la planification des affectations et de lancer la procédure. Si la planification directrice est suffisamment prospective, le niveau de sécurité des investissements s'élèvera considérablement. Le risque que le projet se heurte finalement à des obstacles insurmontables est en fait beaucoup plus grand aujourd'hui lorsqu'il ne s'appuie sur aucune base dans le plan directeur cantonal.
Les cantons seront en tout état de cause bien avisés de traiter aussi dans leur plan directeur les projets auxquels l'art. 8, al. 2, LAT est susceptible de s'appliquer, car ils réduisent ainsi au strict minimum le risque qu'une violation de cet article soit invoquée avec succès dans le cadre d'une procédure de recours contre des modifications de la planification des affectations.

Les projets figurant dans le plan directeur doivent être soigneusement harmonisés avec le développement territorial souhaité pour le canton et faire l'objet d'une coordination avec les autres utilisations et exigences relatives au territoire (art. 8, al. 1, let. b). A cet égard, les trois aspects du développement durable, à savoir l'économie, la société et l'environnement, doivent être pris en considération. Au-delà des critères pointus de sélection d'un site, il importe aussi d'identifier approximativement les sites envisageables ­ au sens d'espaces potentiels ­, sans entrer dans le détail des parcelles, pour élever le degré de sécurité de la planification et de la réalisation à l'égard des investisseurs. L'obligation d'avoir une base dans le plan directeur, fixée à l'art. 8, al. 2, a aussi pour but d'optimiser la coordination entre aménagement du territoire et protection de l'environnement à un stade précoce des travaux de planification (cf. rapport du Conseil fédéral répondant à la motion no 04.3664 du 15 novembre 2004 de la Commission des affaires juridiques du Conseil des Etats,

978

«Meilleure coordination entre la protection de l'environnement et l'aménagement du territoire», ch. 4.1.3, p. 11)20.

2.3.4

Contenu du plan directeur dans le domaine de l'urbanisation (art. 8a)

L'art. 8a concrétise les exigences auxquelles doit répondre le contenu du plan directeur dans le domaine de l'urbanisation. Les cantons se voient prescrire expressément, au sens d'un contenu minimum imposé par le droit fédéral, les thèmes que leurs plans directeurs doivent traiter dans ce domaine. Définir des thèmes ciblés facilitera l'évaluation par la Confédération des mesures concrètes prévues par les cantons pour atteindre l'objectif fixé par la Constitution au sujet de l'utilisation mesurée du sol. Conformément à la répartition des compétences fixées par la Constitution, le droit fédéral ne peut cependant entrer dans les détails des mesures que doivent prendre les cantons. Ceux-ci sont toutefois tenus d'indiquer dans leur plan directeur comment ils envisagent concrètement d'assumer leur responsabilité dans le domaine de l'urbanisation. Pour qu'ils aient une vision claire des attentes de la Confédération, les directives pour l'établissement des plans directeurs cantonaux prévues à l'art. 8 de l'ordonnance sur l'aménagement du territoire devront être complétées en conséquence (cf. ch. 1.5).

La let. a oblige les cantons à traiter concrètement le thème des surfaces urbanisées dans leur plan directeur. Celui-ci doit ainsi indiquer la taille maximale des surfaces affectées à l'urbanisation pour l'ensemble du canton. Les perspectives de développement à moyen et à long terme relatives aux surfaces disponibles pour l'urbanisation trouvent ainsi une expression concrète. Une limite maximale pourra déjà être fixée à l'extension des surfaces urbanisées. Le plan directeur doit aussi fournir des précisions sur leur répartition dans le canton. Cette prescription de droit fédéral sur le contenu du plan directeur cantonal semble plus appropriée que le texte soumis à consultation (P-LDTer), qui prévoyait que les cantons devaient indiquer la taille de la surface urbanisée de chaque commune. Si des extensions de l'urbanisation sont prévues, les cantons devront les coordonner à l'échelle régionale. Cette disposition souligne le fait que cette thématique doit être traitée dans un espace dépassant les frontières communales, en accordant une attention particulière aux espaces fonctionnels. La coordination à l'échelle régionale de l'extension de l'urbanisation ne requiert cependant pas la création d'un niveau régional
de planification. Dans les cantons où un tel niveau institutionnel existe, on pourra avoir recours aux instruments et aux organisations responsables qui ont déjà été mis en place, comme des plans directeurs régionaux, des plans sectoriels régionaux, des groupes de planification régionale ou des conférences régionales.

Le canton devra aussi indiquer comment il entend coordonner l'urbanisation et les transports (let. b), à quoi s'ajoutent ­ comme élément central du dispositif ­ les mesures encourageant le développement de l'urbanisation à l'intérieur du milieu bâti (let. c) et la requalification urbaine (let. e). La let. c parle expressément de développement de l'urbanisation «de qualité» à l'intérieur du milieu bâti: la notion de 20

Le rapport est publié sur le site Internet de l'Office fédéral de l'environnement à l'adresse suivante: www.bafu.admin.ch/dokumentation/medieninformation/00962/ index.html?lang=fr&msg-id=21099

979

qualité se rapporte aux aspects urbanistiques. Un développement «de qualité» de l'urbanisation à l'intérieur du milieu bâti met un accent particulier sur les aspects qualitatifs de l'urbanisation, qui peuvent créer une plus-value. L'agencement des espaces réservés au stationnement et aux routes, l'agencement des bâtiments, la proximité des équipements d'approvisionnement en biens et en services et des prestations de service public, les distances entre lieux de résidence, d'activité professionnelle et de loisirs, sans oublier les bâtiments répondant aux besoins actuels en termes de logement et de travail, constituent autant de critères importants de qualité.

Quoi qu'il en soit, les mesures que les cantons doivent prendre pour favoriser la densification ne doivent pas péjorer la qualité de l'habitat.

Il faut donc combiner les mesures visant la densification, parmi lesquelles l'exploitation accrue des friches revêt une grande importance (cf. art. 3, al. 3, let. abis), avec les mesures de promotion de la qualité de l'urbanisation. Certains aspects de la qualité de l'urbanisation sont en effet déjà traités dans les principes régissant l'aménagement (cf. art. 3, al. 3, let. e).

Conformément à la let. d, le canton devra en outre indiquer par quelles mesures il s'assurera que les zones à bâtir seront conformes aux exigences de l'art. 15. A cet effet, il devra édicter des prescriptions ou donner des mandats concrets aux communes. En de nombreux endroits, les zones à bâtir sont en effet surdimensionnées. Les cantons confrontés à une telle situation devront chercher à réduire celles qui sont trop grandes, autrement dit celles qui, compte tenu des réserves d'utilisation internes, ne seront probablement ni nécessaires, ni équipées, ni construites dans les quinze ans, et chercher à financer les déclassements qui en découleront, pour autant qu'ils donnent droit à une indemnisation. La taxation de la plus-value prévue à l'art. 5, al. 1, LAT est une des solutions envisageables à cet égard. La mise en oeuvre judicieuse de cette disposition fournit aux cantons la marge de manoeuvre financière pour s'assurer que les zones à bâtir répondent aux nouvelles exigences de la législation fédérale.

Enfin, la requalification urbaine soulèvera de plus en plus de questions, raison pour laquelle elle devra elle aussi figurer
en bonne place parmi les thèmes des plans directeurs cantonaux. L'environnement économique et social s'est profondément modifié ces dernières décennies, si bien que des espaces et des quartiers entiers ne répondent plus aux attentes. En conséquence, des territoires déjà bâtis ou équipés ne seront plus utilisés ou ne le sont qu'en partie. Dans les villes et les centres ruraux, et même dans les zones touristiques, ce phénomène entraîne une asymétrie entre l'utilisation souhaitée, la structure urbaine et le milieu bâti. Cela peut conduire à l'apparition d'espaces inoccupés, à la dégradation des immeubles, à la médiocrité de l'approvisionnement quotidien en biens et en services ou à une ségrégation sociale.

Afin de renforcer la requalification urbaine (let. e), il est possible, dans le cadre de la planification directrice, d'élaborer des stratégies qui contribuent à assurer ou à élever la valeur des immeubles. L'aménagement du territoire crée ainsi les conditions économiques offrant aux acteurs privés ou publics la possibilité de consentir les investissements nécessaires pour la requalification urbaine. Il peut s'agir, par exemple, de stratégies d'encouragement à la reconversion de friches industrielles et de revalorisation d'aires ferroviaires grâce à des mesures adaptées (densification ou changement d'affectation, amélioration de la qualité de la desserte, meilleure ouverture au marché, etc.). Les stratégies à élaborer peuvent cependant aussi viser la revalorisation de quartiers d'habitation par des mesures adéquates (identification rapide et observation permanente des failles du parc immobilier, valorisation des 980

espaces extérieurs, amélioration de la mixité des utilisations, etc.). Divers cantons, villes et communes ont déjà mis en place des stratégies et des mesures de requalification urbaine. Plusieurs cantons possèdent par exemple des instruments comme l'examen de l'état d'un immeuble et prévoient parfois des mesures d'assainissement en fonction du résultat.

2.4

Zones à bâtir (art. 15)

L'actuel art. 15 était surtout destiné à formuler à l'intention des cantons et des communes les prescriptions nécessaires pour la délimitation initiale de zones à bâtir. On peut considérer que cette première délimitation a en grande partie déjà eu lieu. Etant donné que l'art. 21 LAT prévoit que les plans d'affectation ont force obligatoire pour chacun, les zones à bâtir incluent tout territoire ayant été affecté à une zone à bâtir, en particulier le territoire déjà largement bâti. Il faut maintenant, d'une part, poser des principes à respecter pour qu'un terrain puisse faire partie de la zone à bâtir (al. 1 et 2) et, d'autre part, définir des conditions plus restrictives pour les nouvelles affectations à la zone à bâtir, afin de freiner la croissance de l'urbanisation (al. 3). S'il apparaît, durant la révision des plans d'affectation, que certaines zones à bâtir ne sont pas conformes aux exigences de base (par ex. surdimensionnement ou présence dans des territoires exposés à des risques), la délimitation des zones doit être corrigée (le droit en vigueur prévoit déjà cette obligation).

L'al. 1 prévoit que les zones à bâtir doivent être définies en fonction des besoins prévisibles pour les quinze années suivantes et qu'elles ne doivent pas excéder ces besoins, ce qui correspond au droit en vigueur (art. 15, let. b, LAT). La taille de la zone à bâtir continuera d'être planifiée pour une durée de quinze ans et seul pourra être affecté à une zone à bâtir le terrain qui sera probablement nécessaire dans ce laps de temps. Le P-LDTer prévoyait d'abandonner ce délai parce qu'il risquait de se voir étendu automatiquement. Cette proposition ayant été majoritairement rejetée, la période de planification de quinze ans doit être maintenue. Pour prévenir le risque d'une extension automatique, il faut éviter qu'une expansion antérieure de la zone à bâtir puisse justifier la délimitation de nouvelles zones à bâtir plus grandes encore.

La délimitation de nouvelles zones à bâtir répondra ainsi à des exigences plus élevées (cf. al. 3) et les prescriptions édictées par le canton dans son plan directeur limiteront les risques. En outre, les besoins ne pourront être satisfaits que s'ils sont en adéquation avec les buts et les principes de l'aménagement du territoire, en particulier avec les exigences d'une utilisation
mesurée du sol. Pour que le développement de l'urbanisation soit durable, le volume des surfaces urbanisées doit être stabilisé.

Le P-LDTer proposait que le besoin en terrains à bâtir doive être attesté à l'échelle régionale. Les réponses à la consultation ont toutefois montré que la notion de région était source d'incertitudes. Il faut tenir compte de ces craintes. Le P-LDTer ne visait pas en priorité à définir des régions déterminées, mais plutôt à signaler que l'appréciation sur la délimitation correcte des zones à bâtir ne devait pas s'arrêter aux frontières communales. Ce principe est désormais clairement posé à l'al. 2, 1re phrase. Aucun terrain ne pourra être affecté à une zone à bâtir s'il en résulte une zone à bâtir surdimensionnée, que ce soit à l'échelle communale, intercommunale ou cantonale.

981

Les planifications doivent également être coordonnées par delà les frontières cantonales et nationales. Les exigences posées par l'al. 2 en matière de coordination intercommunale ne doivent toutefois pas entraîner une commune à renoncer à l'extension de sa zone à bâtir parce qu'une commune voisine appartenant à un canton voisin n'a pas encore redimensionné la sienne.

Comme mentionné plus haut (cf. ch. 1.1), les zones à bâtir ne sont pas seulement surdimensionnées, elles sont souvent aussi mal situées. L'emplacement des zones à bâtir est donc tout aussi important que leur taille. C'est pourquoi la coordination ne doit pas uniquement porter sur la taille, mais inclure aussi la situation des zones à bâtir.

La délimitation de zones à bâtir doit suivre les buts et les principes de l'aménagement du territoire (1re phrase, deuxième partie). Il faut, en règle générale, délimiter des zones à bâtir compactes et limiter la surface de zone à bâtir au strict minimum.

Dans la délimitation appropriée des zones à bâtir, le nouvel instrument qu'est la planification agricole joue aussi un rôle important, puisqu'il vise à souligner le développement régional de l'agriculture. Enfin, conformément à la 2e phrase, la délimitation concrète des zones devra porter une attention particulière aux surfaces d'assolement, à la nature et au paysage. Aucune priorité absolue ne doit toutefois être accordée aux deux critères cités en exemple par rapport aux autres buts et principes de l'aménagement du territoire. Dans l'intérêt de la protection des terres agricoles expressément mentionnée dans l'initiative pour le paysage, il faut simplement veiller, lors de la délimitation de zones à bâtir, à maintenir le volume minimum de surfaces d'assolement déterminé dans le plan sectoriel des surfaces d'assolement.

Etant donné que les habitats intacts dignes de protection revêtent une grande importance pour la biodiversité par leur rôle de connexion aux abords et à l'intérieur des territoires bâtis, la délimitation des zones à bâtir doit expressément préserver la nature, en plus du paysage.

L'al. 3 règle les conditions auxquelles un terrain inclus dans une zone non constructible peut être classé en zone à bâtir. Le critère des propriétés du terrain (let. a) est repris de la phrase introductive de l'art. 15. Il n'a généré aucun problème
du point de vue de l'aménagement du territoire.

La let. b reprend l'horizon de quinze ans mentionné à l'al. 1. Dans le droit fil de la jurisprudence découlant du droit en vigueur, les terrains thésaurisés doivent être intégrés dans le calcul de la capacité de la zone à bâtir, au même titre que les biensfonds disponibles sur le marché des terrains à bâtir, pour attester les besoins visés à l'al. 121. En revanche, des critères plus stricts seront expressément appliqués aux mises en zone. Celles-ci ne seront en effet admissibles que s'il existe un besoin en terrain à bâtir après que toutes les possibilités d'utilisation des réserves intérieures (y compris les friches industrielles de la région) ont été épuisées.

Outre les surfaces non construites et les friches, les réserves d'utilisation incluent aussi des parties de territoire où une densité d'utilisation plus élevée serait admissible selon les plans d'affectation ou serait techniquement envisageable. Ces réserves n'incluent donc pas les surfaces non bâties auxquelles sont délibérément attribuées des fonctions clairement définies dans la perspective d'un développement de l'urbanisation de qualité (espaces verts, places de jeux, zones de plein air, etc.).

21

982

Flückiger/Grodecki, Commentaire de la loi fédérale sur l'aménagement du territoire, Schulthess, Zurich, 2009, ch. marg. 115 ad art. 15

Les réserves d'utilisation ne peuvent pas toutes être rendues disponibles dans les quinze ans. Observons par ailleurs que, pour une exploitation commerciale ou industrielle, se ménager une réserve de terrain constructible pour une extension de son activité peut fort bien se justifier et être compatible avec les intérêts de l'aménagement du territoire. Il faudra donc admettre que toutes les possibilités d'utilisation ont été épuisées lorsque un tiers à la moitié des réserves auront été utilisées pendant ces quinze ans. Les directives techniques prévues à l'al. 4 devront préciser ce point.

Les prescriptions sur la durée de la planification pour les mises en zone sont elles aussi légèrement précisées, puisque le terrain ne doit plus seulement être probablement nécessaire et équipé, mais doit désormais être construit.

Le droit en vigueur souhaite que des mesures soient prises pour encourager la disponibilité des terrains à bâtir, mais le plus souvent, ce critère n'est pas décisif pour la délimitation d'une zone. Cela doit changer. Ainsi, un terrain n'appartenant pas à la zone constructible et dont la disponibilité pour la construction dans les quinze ans à venir n'est pas garantie sur le plan juridique ne pourra plus être affecté à la zone à bâtir (art. 15, al. 3, let. c). Les propriétaires ne désirant pas construire leurs terrains ne doivent pas avoir la possibilité de créer des brèches durables dans la zone à bâtir à des emplacements centraux. Plus il semble important pour l'aménagement du territoire d'attribuer une affectation déterminée à un bien-fonds, plus il est impératif que la collectivité fasse usage des possibilités ménagées à l'art. 15a et se donne les instruments pour agir. A défaut, il peut arriver que des zones à bâtir comportent ­ provisoirement ­ des brèches qui paraissent peu pertinentes. Aussi longtemps qu'une utilisation conforme à l'affectation prévue ne peut être réalisée (parce que le propriétaire ne veut ni construire ni mettre son bien-fonds à disposition), un classement en zone à bâtir ne modifie pas la situation. En revanche, dès que le propriétaire veut construire et s'engage en conséquence, l'obstacle mentionné à l'al. 3, let. c, sera levé et le terrain pourra être classé en zone à bâtir.

Un propriétaire voulant réellement construire, intéressé à un classement en zone
à bâtir et désireux de remplir la condition posée à la let. c, pourra par exemple s'engager à construire par voie de contrat.

Conformément à la let. d, une nouvelle affectation à la zone à bâtir implique en outre qu'elle mette en oeuvre les prescriptions du plan directeur (cantonal). La relation avec l'art. 8a est ainsi établie. Il s'ensuit que toute nouvelle mise en zone doit reposer sur les indications du plan directeur relatives à la dimension et à la répartition des territoires urbanisés (art. 8a, let. a) et sur les prescriptions fixées pour les nouvelles affectations à la zone à bâtir. Il serait toutefois excessif d'exiger la mention systématique dans le plan directeur de tout nouveau classement en zone à bâtir.

C'est à l'autorité responsable de la planification qui entend procéder à une nouvelle affectation à la zone à bâtir qu'il reviendra d'apporter, dans le rapport de planification prévu par l'art. 47 de l'ordonnance sur l'aménagement du territoire, la preuve que les conditions sont remplies.

Les nouvelles règles fixées aux al. 1 à 3 offrent des avantages à l'économie en général (cf. ch. 3.3), parce qu'elles favorisent une utilisation du sol efficace et conforme aux besoins et contribuent à réduire les coûts d'équipement et d'infrastructure qui y sont liés.

983

La diversité des méthodes utilisées pour évaluer le besoin en terrains à bâtir a conduit à délimiter des zones à bâtir de taille différente d'un canton à l'autre. Pour y remédier, le P-LDTer prévoyait que le Conseil fédéral définisse les conditions permettant d'affecter un terrain en zone à bâtir, plus précisément le mode d'évaluation du besoin en terrains à bâtir. Pour tenir compte d'une critique exprimée par différents participants à la consultation, la concrétisation se fera sous la responsabilité conjointe de la Confédération et des cantons (al. 4). Cette solution implique de s'en tenir à des directives techniques, qui sont certes dépourvues de caractère normatif mais dont la force repose sur la compétence technique de leurs auteurs. La norme SIA 422 sur la capacité des zones à bâtir, parue récemment, contient une annexe sur le dimensionnement de la zone à bâtir qui pourrait fournir une base pour la suite des travaux22.

Il est évident qu'il faudra associer à l'élaboration de ces directives d'autres milieux importants, notamment les acteurs mentionnés à l'art. 50 Cst. Les milieux intéressés devront pouvoir s'exprimer au moins dans le cadre d'une consultation ou d'une audition.

L'al. 4 n'empêchera pas le Conseil fédéral de faire usage de ses compétences pour édicter des dispositions par voie d'ordonnance (art. 182, al. 1, Cst.), notamment si le besoin d'apporter des précisions se faisait sentir au moment d'élaborer des directives techniques.

2.5

Disponibilité des terrains constructibles (art. 15a)

Une délimitation adéquate des zones à bâtir ne suffit pas: encore faut-il que les terrains qui leur sont affectés soient disponibles et réellement utilisés pour la construction. Tant s'en faut aujourd'hui. De nombreux terrains à bâtir demeurent non construits, parce qu'ils sont mal situés ou que le découpage des parcelles et leur état foncier sont peu favorables, mais aussi parce qu'ils sont thésaurisés, que ce soit pour conserver un patrimoine immobilier ou à des fins spéculatives. La thésaurisation des terrains à bâtir a pour effet d'accentuer la pression sur les terrains environnants et sur le territoire agricole; elle contribue ainsi à l'extension des surfaces urbanisées, ce qui va à l'encontre des objectifs de concentration de l'urbanisation et de densification du milieu bâti. De plus, il faut rappeler que, selon la jurisprudence relative à l'art. 15, let. b, LAT (ATF 116 Ia 333), ces terrains non disponibles doivent être pris en compte dans le calcul des réserves destinées à satisfaire aux besoins de la construction, ce qui restera la règle avec l'art. 15 du présent projet. Les mesures prévues à l'art. 15a sont à mettre en relation avec le principe énoncé à l'art. 15, al. 3, let. c, selon lequel un terrain ne peut être attribué à la zone à bâtir que si sa disponibilité est juridiquement garantie. Les cantons sont ainsi tenus de prendre les précautions nécessaires pour fluidifier le marché des terrains à bâtir s'ils entendent remplir les exigences de l'art. 15, al. 3.

22

984

La norme est publiée sur le site Internet de la Société suisse des ingénieurs et des architectes à l'adresse suivante: www.webnorm.ch/downloadAnhang.aspx?ID=cc634297-3e66-4ce6-b5b298ea41753e76&Sprache_ID=1

L'al. 1 prévoit une obligation pour les cantons de prendre les mesures nécessaires pour assurer la disponibilité des terrains à bâtir, autrement dit leur aptitude à être utilisés conformément à leur affectation. Pour répondre aux critiques faites durant la consultation, le choix des mesures est laissé aux cantons. De telles mesures existent déjà, sous des formes diverses, dans les législations cantonales sur les constructions ou sur l'aménagement. La gamme est variée: mesures foncières (VD), possibilité de conclure des contrats en droit administratif (GR: formulation libre, SO: engagement contractuel à construire), mise en zone conditionnée à l'obligation de construire dans un délai donné (AG: pour les projets de construction d'intérêt supérieur, AR, FR: pour les projets de grande ampleur), obligation de construire dans un délai donné assortie d'un droit d'emption (OW). Il existe aussi d'autres mesures connues, telles que taxes d'incitation, mesures fiscales équivalant à un prélèvement sur la plusvalue, obligations en matière d'équipement ou encore possibilité d'expropriation.

Toutes ces mesures demeureront possibles.

Le remembrement et les autres mesures d'améliorations foncières qui sont mentionnés à titre d'exemple à l'al. 1 présentent toutefois un intérêt particulier en ce qu'ils permettent d'assurer ou d'améliorer l'aptitude à la construction de terrains à bâtir.

C'est pour cette raison qu'ils sont mis en avant. La prise en considération à un stade précoce des contraintes foncières et la mise en oeuvre coordonnée de mesures d'améliorations foncières lors de l'élaboration de plans d'affectation permettent d'améliorer la mise en valeur des zones à bâtir. L'offre juridique de terrains à bâtir que fournit la planification se trouve ainsi complétée par leur mise en adéquation pour la construction, ce qui, selon le Tribunal fédéral, correspond à un intérêt public important23. Il est vrai que les cantons ont déjà la possibilité de recourir à de tels instruments. En particulier, le remembrement ­ plus usuellement appelé remaniement parcellaire dans les cantons romands ­ est déjà prévu par l'art. 20 LAT. Les explications données dans le message du 27 février 1978 à propos de cette mesure conservent toute leur pertinence et peuvent être reprises telles quelles: «Le remembrement permettra d'obtenir
une affectation conforme aux plans établis à cet effet. Il peut être nécessaire soit pour l'établissement des plans d'affectation, soit pour leur exécution. Lors de la délimitation des zones, il contribuera à mieux démêler les intérêts respectifs et facilitera ainsi une nouvelle délimitation des parcelles et une meilleure utilisation»24.

Cependant, force est de constater que l'importance et l'utilité de cet instrument ont été longtemps sous-estimées dans l'aménagement du territoire25. Seuls quelques cantons (AG, BE, GE, LU, SG, TG et VD) disposent d'une législation d'application développée et, parmi eux, peu nombreux sont ceux qui en font réellement usage. Le renvoi à l'art. 20 LAT signifie notamment que le remembrement peut être ordonné d'office et, au besoin, exécuté par l'autorité compétente lorsque la réalisation d'un plan d'affectation l'exige.

En lieu et place d'une procédure formelle de remembrement, d'autres mesures foncières, d'application plus simple, peuvent être mises en oeuvre, telles que les regroupements de terrains, les rectifications de limites ou la radiation de servitudes, souvent par voie contractuelle.

23 24 25

ATF du 9 janvier 2008, 1C.90/2007 FF 1978 I 1030 André Jomini, Commentaire de la loi fédérale sur l'aménagement du territoire, Zurich, 1999, n. 3 ad art. 20

985

Compte tenu des critiques exprimées lors de la consultation, l'al. 2 oblige désormais les cantons à prévoir dans leur législation que l'autorité compétente peut fixer un délai pour la réalisation d'une construction sur un bien-fonds et ordonner les mesures prévues par le droit cantonal si l'intérêt public le justifie. Il s'agit bien là d'une obligation de légiférer. Par contre, le droit fédéral n'exige pas qu'un délai doive effectivement être fixé dans chaque cas: cela reste du ressort de l'autorité compétente, si le droit cantonal ne va pas plus loin.

Une région qui présenterait une offre insuffisante de terrains à bâtir disponibles constitue l'exemple même d'un intérêt public justifiant l'imposition d'un délai. Il est aussi imaginable qu'un grand intérêt public réside dans la réalisation d'une construction à des emplacements cruciaux.

L'utilisation rationnelle du territoire et la lutte contre la thésaurisation de terrains constructibles visent un intérêt public. L'obligation de construire un terrain ne constitue donc pas une atteinte disproportionnée à la garantie de la propriété pour autant qu'elle soit soumise à des conditions26. L'obligation de construire devra donc être conçue comme un moyen subsidiaire, qui ne pourra être mis en oeuvre que là où l'offre de terrains équipés est insuffisante ou s'il existe un autre intérêt public prépondérant. Le délai pour réaliser la construction devrait être fixé en fonction des circonstances, en principe dans une fourchette de cinq à quinze ans. Il serait bon que le droit cantonal précise ce délai. En tout état de cause, l'intérêt public doit avoir une ampleur qui le rende prépondérant face aux inconvénients imposés aux particuliers (imposition d'un délai et menace de sanction).

La législation cantonale d'exécution devra donc distinguer les conséquences juridiques en fonction de l'ampleur de l'intérêt public que présente la construction. Face à une pénurie «ordinaire» de terrains à bâtir, par exemple, des mesures fiscales devraient suffire. Lorsque la construction de certaines réserves de terrains à bâtir présente un intérêt extraordinaire, le droit cantonal devra toutefois prévoir des conséquences juridiques appropriées pour que la construction puisse être imposée si nécessaire à l'échéance du délai. Il peut s'agir notamment d'un droit d'emption en
faveur de la commune, d'une obligation de cession pouvant être appliquée par voie de droit, d'un déclassement voire d'une expropriation.

La notion de construction ne désigne pas simplement la première utilisation à des fins de construction d'un terrain. Elle doit aussi recouvrir la densification obtenue par des ajouts complétant la construction. Le propriétaire d'une vaste surface utilisée comme parc de stationnement à un emplacement central ne doit pas pouvoir se soustraire à l'obligation de construire en arguant que la surface est déjà construite.

L'autorité compétente désignée par le droit cantonal peut être une autorité communale.

Quelques cantons (notamment AG, AR, FR et OW) prévoient déjà dans leur législation une telle obligation de construire (sous différentes formes). Sur le plan fédéral, l'art. 9 de la loi fédérale du 4 octobre 1974 encourageant la construction et l'accession à la propriété de logements (LCAP)27 prévoit une telle obligation pour les terrains qui ont fait l'objet d'un remembrement.

26 27

986

Cf. Georg Müller, Baupflicht und Eigentumsordnung, in Festschrift für Ulrich Häfelin, Zurich, 1989, p. 176 s; à propos de l'expropriation, cf. ATF 88 I 257 RS 843

2.6

Dispositions transitoires (art. 37b)

L'initiative pour le paysage vise en premier lieu à freiner la croissance des zones à bâtir. Elle aurait aussi comme importante conséquence d'imposer un moratoire de 20 ans à la surface totale des zones à bâtir en Suisse. Conçu comme un contre-projet indirect à cette initiative, le présent projet de révision se doit de mettre l'accent sur ce point. Il prévoit à cet effet un moratoire (al. 2) sur la surface totale des zones à bâtir de chaque canton. Selon cette disposition, aucun canton ne pourra augmenter la surface totale de ses zones à bâtir légalisées tant que le Conseil fédéral n'aura pas approuvé l'adaptation du plan directeur cantonal aux exigences des art. 8 et 8a. Cette adaptation doit avoir lieu dans les cinq ans (al. 1). Les cantons qui l'effectueront avant l'échéance de ce délai verront le moratoire prendre fin d'autant plus tôt. En revanche, si l'adaptation prend plus de temps, le moratoire s'allongera.

Les cantons dont les zones à bâtir sont surdimensionnées pourraient se satisfaire assez longtemps d'un régime qui autorise les nouvelles zones à bâtir lorsqu'elles sont compensées. Il est donc nécessaire qu'une certaine pression pousse les cantons à entreprendre réellement l'adaptation de leur plan directeur. L'al. 3 prévoit donc qu'un canton ne sera plus autorisé, après l'échéance du délai de cinq ans, à procéder à de nouveaux classements en zone à bâtir, même en les compensant par le déclassement de surfaces équivalentes, tant qu'il n'aura pas adapté son plan directeur aux nouvelles dispositions fédérales et que celui-ci n'aura pas été approuvé par le Conseil fédéral.

Outre la durée de la procédure au sein du canton, la procédure d'examen et d'approbation par la Confédération influencera elle aussi le respect des délais. Il faudra que des mesures en termes d'effectif et d'organisation soient prises au sein de l'administration fédérale pour que la procédure d'examen et d'approbation puisse se dérouler rapidement et efficacement. Le temps de traitement d'un dossier ne doit pas excéder six mois à compter de son dépôt à la Confédération, pour autant qu'il soit complet et qu'aucun problème considérable touchant le fond ne doive être discuté. Plus de tels problèmes seront nombreux, plus la procédure d'approbation sera longue. Un examen préalable de l'adaptation du plan directeur par la
Confédération pourra contribuer à une procédure d'approbation rapide avec un minimum de problèmes à régler.

La sanction prévue à l'al. 3 ne sera pas appliquée au moindre petit défaut reproché à l'adaptation du plan directeur. Pour des raisons de sécurité juridique, le Conseil fédéral devra, au cas où l'adaptation ne soit pas approuvée, préciser dans le dispositif de sa décision que l'al. 3 s'applique dans le canton concerné.

L'un des points cruciaux soulevés par l'adaptation du plan directeur cantonal aux nouvelles dispositions des art. 8 et 8a sera immanquablement la mise en oeuvre de l'art. 8a, let. d, puisque cette disposition met en corrélation le moratoire prévu à l'al. 2 des dispositions transitoires et l'art. 8a.

Que le plan directeur cantonal prévoie des mesures devant assurer que les zones à bâtir répondent aux exigences de l'art. 15 ne suffit pas à garantir que ces mesures sont effectivement mises en oeuvre. L'Office fédéral du développement territorial dispose néanmoins, avec le droit de recours ménagé par l'art. 111 de la loi du 17 juin 2005 sur le Tribunal fédéral28, d'un instrument lui permettant, si nécessaire, d'imposer la mise en oeuvre des mesures prévues par la planification des affectations.

28

RS 173.110

987

3

Conséquences29

3.1

Conséquences pour la Confédération

Le projet met l'accent sur les plans directeurs cantonaux, mais il va entraîner une charge de travail importante pour la Confédération en raison des activités de conseil et de soutien aux cantons et en raison de l'examen des plans directeurs cantonaux soumis pour approbation. Cette charge sera particulièrement élevée durant le délai fixé aux cantons pour adapter leurs plans directeurs aux nouvelles exigences du droit fédéral. Elle sera également nettement plus élevée qu'aujourd'hui après l'écoulement de ce délai. En outre, le contrôle de l'application des nouvelles conditions fixées par le droit fédéral pour les plans d'affectation représentera une charge d'autant plus grande que les voies de droit reconnues par la loi sur le Tribunal fédéral30 en faveur des autorités fédérales ayant qualité pour recourir ont été élargies. Il ne sera possible d'absorber complètement ce surcroît de travail ni en fixant des priorités, ni en procédant à une concentration des ressources. La création de deux emplois supplémentaires s'impose donc pour permettre à la Confédération de remplir de manière rapide et efficace ses tâches en rapport avec les plans directeurs et d'effectuer un contrôle sérieux dans le domaine des plans d'affectation.

3.2

Conséquences pour les cantons et les communes

Les adaptations des plans directeurs et des plans d'affectation qui sont rendues nécessaires par la présente révision entraîneront pour les cantons et les communes un surcroît de travail. Celui-ci concernera en premier lieu les activités liées à l'adaptation aux nouvelles exigences du droit fédéral, mais il sera aussi occasionné par les tâches permanentes résultant de cette révision. Dans la mesure où les adaptations des plans d'affectation pourront être entreprises dans le cadre de l'examen périodique qu'impliquent les planifications importantes, la charge supplémentaire de travail devrait ­ du moins en ce qui concerne les procédures ­ pouvoir être maintenue à un bas niveau. Si des déclassements devaient s'avérer nécessaires à la suite de l'examen des zones à bâtir exigé par l'art. 15, les procédures d'expropriation pourraient entraîner le versement d'indemnités. Sur le plus long terme, l'application du nouveau droit aura tendance à augmenter les dépenses de personnel, par exemple pour promouvoir la disponibilité des terrains à bâtir ou pour lutter contre la thésaurisation.

Les collectivités publiques seront cependant aussi gagnantes: une urbanisation plus concentrée permettra une utilisation plus économique des infrastructures, ce qui améliorera le rapport entre le coût et l'utilité obtenu lors de leur réalisation et de leur exploitation. Dans l'ensemble, les conséquences pour les cantons et les communes devraient plus ou moins s'équilibrer.

29

30

988

Afin d'apprécier les conséquences du projet sur l'économie, l'environnement et la société, une évaluation de la durabilité et une analyse d'impact de la réglementation ont été effectuées. Le rapport complet (Ecoplan, Evaluation de la durabilité et analyse de l'impact de la réglementation concernant la révision de la loi sur l'aménagement du territoire, 2009) est publié sur le site Internet de l'Office fédéral du développement territorial à l'adresse suivante: www.are.admin.ch/ RS 173.110

Les nouvelles dispositions fédérales ne nécessitent en principe pas de législation cantonale d'exécution: elles sont directement applicables. La question ne se pose qu'au sujet de l'art. 15a. Les mesures prévues en vertu de cet article sont étroitement liées à la condition introduite à l'art. 15, al. 3, let. c, selon laquelle des nouveaux terrains ne peuvent être classés en zone à bâtir que si leur disponibilité est garantie sur le plan juridique. Les cantons qui n'ont pas encore prévu de règles à ce sujet seront contraints de prendre les mesures propres à favoriser la mise à disposition de terrains à bâtir s'ils veulent être en mesure de remplir les conditions de l'art. 15, al. 3. Cela vaut en particulier pour l'art. 15a, al. 1, qui prévoit dans sa première partie l'obligation pour les cantons de prendre les mesures nécessaires pour assurer une utilisation des terrains à bâtir conforme à leur affectation. Le droit fédéral n'impose pas les mesures à prendre. L'art. 15a, al. 2, est, en ce qui concerne l'obligation de construire, directement applicable, mais il laisse la liberté à l'autorité désignée par le droit cantonal d'ordonner une telle mesure. En revanche, des dispositions cantonales d'exécution devront régler les mesures applicables en cas d'inobservation du délai fixé pour construire.

3.3

Conséquences économiques

La présente révision renforce le développement de l'urbanisation à l'intérieur et autour des centres existants (quelle que soit leur taille), y compris les centres régionaux situés dans les espaces ruraux (cf. ch. 1.3.2). Cette évolution permettra aux entreprises de renforcer leur concentration géographique, d'obtenir de plus grandes économies d'échelle et de tirer profit de la proximité d'autres entreprises («effets d'agglomération»)31. L'attrait international de la place économique et la compétitivité de la Suisse seront renforcés. Il n'y a pas lieu d'attendre une baisse dans la construction: le développement de l'urbanisation ne sera pas bloqué, mais il se déplacera et s'intensifiera dans des secteurs judicieux sous l'angle de l'aménagement du territoire. Le résultat global sera donc positif, ou au moins neutre.

Un développement renforcé de l'urbanisation à l'intérieur et autour des centres a également des effets positifs sur l'utilisation des infrastructures: elles pourront être utilisées plus efficacement et l'extension des constructions devrait être contenue32.

Le frein mis à la dispersion des constructions (cf. ch. 1.3.2) déploie des effets identiques, en ce que les besoins d'infrastructures (moins efficaces) à l'extérieur des aires urbanisées seront en diminution. Des structures d'urbanisation plus compactes ont tendance à réduire également le trafic et les dépenses générées par les transports (santé et environnement).

Les incidences sur les prix des terrains seront vraisemblablement neutres. La quantité de zones à bâtir sera certes réduite, mais la pénurie dans des endroits où la demande est plus grande n'augmentera pas forcément, en raison précisément du déplacement de l'offre sur des sites appropriés sous l'angle de l'aménagement du territoire. En outre, les mesures prévues pour améliorer la disponibilité des terrains à bâtir empêcheront une augmentation marquée des prix des terrains.

31

32

Cf. Storper, The Regional World, 1997; Venables, Equilibrium locations of vertically linked industries, 1996; Krugman/Venables, Integration and the competitiveness of peripheral industry, 1990 Cf. Fondation suisse pour la protection et l'aménagement du territoire, Öffnung für das Bauen im Landwirtschaftsgebiet ­ ein Bumerang für alle?, p. 18

989

3.4

Autres conséquences

Etant donné que la dispersion des constructions pourra être ralentie, que le développement de l'urbanisation à l'intérieur du milieu bâti se renforcera et que l'utilisation des futures extensions des aires urbanisées deviendra plus intense (cf. ch. 1.3.2), les voies de communication devraient se raccourcir. Une modération globale du trafic devrait s'ensuivre. Des trajets plus courts pourraient de plus être davantage parcourus à pied ou à bicyclette33. Tout ceci aura également des effets positifs sur la consommation de carburants, la pollution et la santé. Dans les centres urbains, la présence de gaz nocifs pourrait toutefois augmenter, selon les circonstances, en raison d'une concentration accrue.

Les espaces ruraux y perdront à peine en fin de compte, parce que la présente révision tend à renforcer les centres régionaux, ce qui représente aussi un avantage économique. Un frein mis à la dispersion des constructions contribue également au maintien des structures de l'habitat dans l'espace rural, permettant ainsi de préserver les paysages et la culture rurale, qui constituent un capital important pour le tourisme.

La mise en oeuvre et l'interprétation de nouvelles dispositions comportent toujours des zones d'incertitude. Il faudra donc compter pendant une période transitoire avec une certaine insécurité juridique. Dès que les nouvelles dispositions seront bien établies, il ne devrait plus y avoir de problème.

4

Rapport avec le programme de législature

Le projet a été annoncé dans le message du 23 janvier 2008 sur le programme de la législature 2007 à 201134 et dans l'Arrêté fédéral du 18 septembre 2008 sur le programme de législature 2007 à 201135.

5

Aspects juridiques

5.1

Constitutionnalité

Le projet se fonde sur l'art. 75 de la Constitution, selon lequel la Confédération fixe les principes applicables à l'aménagement du territoire. Celui-ci incombe aux cantons et doit servir une utilisation judicieuse et mesurée du sol et une occupation rationnelle du territoire (art. 75, al. 1, Cst.). La compétence législative de la Confédération en matière d'aménagement du territoire n'est donc pas complète, mais limitée à l'édiction de principes. La Confédération peut, dans ce cadre, édicter des normes contraignantes qui indiquent aux cantons les buts, les instruments, les mesures et les procédures nécessaires à la mise en oeuvre de l'aménagement du territoire36.

33 34 35 36

990

Cf. Koll-Schretzenmayr, Gelungen ­ Misslungen?, 2008 pp. 155 et 160 FF 2008 639, ch. 1.4.2 FF 2008 7745 Riccardo Jagmetti in: Kommentar aBV, art. 24quater, ch. marg. 116

Les normes relatives aux buts et aux principes, telles que prévues aux art. 1 et 3 du présent projet, revêtent une importance fondamentale.

L'aménagement du territoire pose en outre une série de questions importantes qui ­ sans dépasser le cadre des principes ­ doivent faire l'objet de normes plus détaillées.

Cela est nécessaire par exemple pour les questions centrales37, comme la séparation entre territoires constructibles et territoires non constructibles (cf. art. 1, al. 1, du présent projet).

Enfin, il ne faut pas perdre de vue que la perception du caractère de principe attribué à des prescriptions évolue aussi avec le temps C'est pourquoi l'ajustement de certaines questions centrales s'impose sur la base des expériences accumulées depuis l'entrée en vigueur de la LAT. S'agissant précisément de l'endiguement de la dispersion des constructions, les objectifs n'ont pu être atteints. Un trop grand nombre de constructions accaparent le sol et la thésaurisation de terrains à bâtir demeure un problème. Aussi le projet de loi contient-il des indications plus claires au sujet de l'urbanisation (cf. art. 6, 8, 8a et 37b, al. 1) et des zones à bâtir (cf. art. 15, 15a, 37b, al. 2 et 3).

En ce qui concerne l'encouragement de la disponibilité des zones à bâtir (art. 15a), les mesures à prendre par les cantons devront, pour autant que la garantie de la propriété (art. 26 Cst.) soit touchée, respecter les conditions de l'art. 36 Cst., aux termes duquel les restrictions apportées aux droits fondamentaux nécessitent une base légale, celles qui sont graves devant être prévues par une loi. Les restrictions doivent de plus être justifiées par un intérêt public, être proportionnées au but visé et préserver le noyau du droit fondamental qu'elles affectent. Pour le respect des dispositions constitutionnelles touchées par l'obligation de construire qui est prévue dans quelques cantons et à l'art. 9 LCAP, on peut renvoyer aux commentaires relatifs à l'art. 15a (cf. ch. 2.5).

Au vu de ce qui précède, le présent projet demeure dans le cadre fixé par l'art. 75 Cst.

5.2

Rapport avec le droit européen

Le «Schéma de développement de l'espace communautaire» et l'Agenda territorial qui lui a fait suite, ainsi que le Livre vert sur la cohésion territoriale forment le cadre dans lequel s'inscrit la politique de l'Union européenne en matière d'aménagement du territoire. La Suisse participe activement au débat sur le développement territorial en Europe. A l'invitation de la Commission européenne, la Suisse participe en outre aux programmes suivants de la coopération territoriale européenne (CTE): INTERREG, ESPON, URBACT et INTERACT.

INTERREG est le fruit d'une initiative communautaire lancée au début des années 1990. La participation suisse à ces programmes de coopération est forte d'une longue tradition et il serait aujourd'hui impensable de s'en passer pour la coordination territoriale entre la Suisse et l'UE. Pour la période allant de 2007 à 2012, 66 programmes INTERREG transfrontaliers, transnationaux ou interrégionaux sont prévus, dont sept incluent une participation suisse. Les programmes transnationaux «Espace alpin» et «Europe du Nord-Ouest», en particulier, offrent un cadre permet37

Martin Lendi, St. Galler Kommentar BV, 2e éd., ch. marg. 25 ad art. 75

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tant à la Suisse de mettre des projets en oeuvre avec différents Etats membres, par exemple dans les domaines du changement climatique, de la démographie ou de l'approvisionnement de base.

Le programme ESPON vise l'observation du territoire européen. Son objectif à long terme est d'établir un système permanent d'observation du territoire. La Suisse y joue un rôle actif et participe à plusieurs projets.

URBACT est un programme européen de développement territorial destiné aux villes. Différents projets leur permettent de former des réseaux, d'échanger des expériences et de discuter de bons exemples de mise en oeuvre en lien avec les défis actuels, comme dans le domaine des relations ville-campagne ou de la rénovation urbaine.

INTERACT est le programme-cadre des programmes de soutien de la CTE. Il vise à encourager l'échange d'expériences entre les partenaires de la CTE pour renforcer la coopération territoriale.

La Déclaration de Lisbonne a conféré un poids supplémentaire au débat territorial en Europe. La nécessité d'une cohésion territoriale à l'intérieur de l'Europe y est explicitement soulignée pour la première fois. La politique européenne en matière de développement territorial ne s'arrête toutefois pas aux frontières de l'UE. On doit mentionner à ce sujet les «Principes directeurs pour le développement territorial durable du continent européen», que le Conseil de l'Europe a adoptés en 2000.

Les modifications proposées dans le présent projet visent des buts identiques à ceux poursuivis au niveau européen.

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