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LIVme année. Vol. V. N° 53

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31 décembre 1902.

Message du

Conseil fédéral à l'Assemblée fédérale concernant les sociétés de secours volontaires aux malades et blessés en temps de guerre.

(Du 4 décembre 1902.)

Monsieur le président et messieurs, L'Assemblée fédérale a adopté, le 9 octobre 1902, lors de la discussion du rapport de gestion de 1901, les deux postulats suivants : 1. « Le Conseil fédéral est invité à faire rapport sur la question de savoir si la loi ne devrait pas rattacher plus étroitement aux troupes sanitaires les services de secours sanitaires volontaires organisés en vue de la guerre et notamment leur allouer des subventions plus fortes que par le passé, pour ïeur permettre de former un plus grand nombre d'infirmiers.

(Dr Muller.)

2. Le Conseil fédéral est invité à faire un rapport et des propositions sur les voies et moyens propres à rattacher aux troupes sanitaires le service de secours volontaires en cas de guerre et sur la pétition adressée aux Chambres fédérales par la société centrale suisse de la Croix-Rouge le 17 avril 1902 touchant l'allocation d'une subvention à la Croix-Rouge pour lui permettre d'organiser les secours volontaires en cas de guerre. » (Commission de gestion.)

Feuille fédérale suisse. Année UV. Vol. V.

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Malgré la différence des textes et quoique, dans l'un des postulats, il soit attaché une importance particulière à, l'instruction du personnel sanitaire, les deux postulats traitent une seule et même question principale : compléter le service de santé de l'armée par des secours volontaires régulièrement organisés. L'augmentation du personnel sanitaire est une question secondaire, qui, à la vérité, mérite l'attention à un point de vue non seulement militaire, mais encore1 économique, et demande en conséquence un examen approfondi. H ne nous paraît pas cependant qu'il y ait une raison de séparer véritablement deux questions qui vont ensemble pour la forme et pour le fond ; nous estimons au contraire que les deux postulats doivent faire l'objet d'un même message et d'un seul arrêté fédéral. Toutefois, pour plus de clarté, nous divisons la matière e:.i deux chapitres : I. Secours volontaires et service de santé militaire.

II. Instrustion du personnel sanitaire.

I. Secours volontaires et service de santé militaire.

Depuis la célèbre brochure d'Henry Dunant, « Un souvenir de Solferino », point de départ de la convention de Genève, on a pu remarquer de constants progrès dans la création et le développement des institutions volontaires destinées à venir en aide, en cas de guerre, au service sanitaire de l'armée. Ces institutions sont indispensables, même dans les Etats qui ont une armée permanente. Il suffit, pour s'en convaincre, de penser aux effectifs énormes d'armées renfermant toutes les forces juvéniles des peuples belligérants, aux effets terribles des armes actuelles, aux solutions violentes et rapides recherchées par la tactique moderne. Les secours volontaires ?_u:; malades et aux blessés sont ainsi un facteur dont tout cheif d'armée doit tenir compte officiellement.

En Allemagne, le règlement sanitaire militaire de Prusse, du 10 janvier 1878, contient déjà des dispositions sur les secours volontaires aux malades. Le règlement allemand de 1887 sur le service en campagne les considérait comme faisant partie de l'organisation militaire et leur assignait leur tâche. Le nouveau règlement sur le service en campagne, de 1900, prescrit au § 478:

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« L'assistance volontaire des malades est rattachée aux institutions de l'Etat, au plus tard lors de la mobilisation ; elle est mise en premier lieu à réquisition pour le service de santé dans la zone des étapes et dans les lazarets de réserve restant au pays, pour le transfert dans leurs foyers des malades et des blessés, pour les soins à donner à domicile aux convalescents, pour la réception et la distribution des dons charitables, etc.

« La coopération de l'assistance volontaire auprès des troupes peut être ordonnée spécialement.» Notre instruction sur le service en campagne ne dit pas un mot de l'assistance volontaire des malades.

S'il y a cependant une armée qui doive pouvoir, lorsque l'heure des combats sanglants sera venue, compter sur les secours volontaires, c'est bien la nôtre, car dans aucun autre Etat une guerre ne mettra à contribution un aussi fort pourcent de la population. Toute guerre dans laquelle nous serons engagés sera pour nous une guerre nationale.

Il serait funeste, en présence de cette situation, de se reposer sur des improvisations quelconques de la dernière heure ; on doit pouvoir compter sur quelque chose de mieux.

Au dernier moment, ce ne seraient pas seulement les hommes qui nous manqueraient, mais le temps nécessaire ; l'assistance des malades ne peut ni s'organiser ni s'apprendre du jour au lendemain.

« L'état de guerre, s'il se prolonge quelque peu, dit le général von der Goltz dans son livre récent sur la conduite de la guerre, constitue déjà par lui-même, grâce à la sensibilité de la vie intense de notre époque, une force destructrice, une cause de ruine qui, dans certains cas, exercera une influence décisive. Il est clair dès lors que dans la guerre, telle qu'elle se fera actuellement, les événements se succéderont coup sur coup jusqu'à la fin. 11 ne se produira un temps d'arrêt, et cela exceptionnellement, que lorsque par exemple l'un des belligérants aura repoussé l'attaque de l'adversaire mais ne sera pas assez fort pour l'attaquer à son tour. Ce fait s'est présenté dans la dernière guerre russo-turque, après la seconde bataille de Plewna, où le temps d'arrêt dura jusqu'à la chute de cette place et fut de plus de quatre mois. Mais dans cette guerre la disproportion des forcos en présence était, de prime abord, anormale. Les Turcs étaient numériquement trop faibles pour qu'ils pussent, après avoir réussi à repousser l'ennemi, son-

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ger à prendre l'offensive, et comme la Turquie ne pouvait pas compter sur le secours d'armées alliées, èlle n'aurait pas dû recourir aux armes. Si donc il y a eu exception dans ce cas, c'est que dès le début, au moment même où l'on prenait la résolution de faire la guerre, on avait commis une erreur. Or,' cette exception ne fait que confirmer la règle. Il en a été de même clans la guerre sud-africaine. Il faut cependant tenir compte, ici également, de circonstances particulières. D'après la composition de leurs troupes, les alliés n'étaient pas en état de prendre de force les places fortifiées dans lesquelles, au premier choc, ils avaient rejeté les divisions avancées des Anglais.

Et ceux-ci s'y maintinrent opiniâtrement. L'offensive subit ainsi un temps d'arrêt. Les essais de débloquement, tentés par les Anglais, se heurtèrent à la bravoure, inébranlable de leurs adversaires, pourtant bien plus faibles. Et pour arriver à un résultat décisif, il fallut faire venir de bien loin des renforts et un général. Cela produisit également un temps d'arrêt. Ce sont des circonstances qui ne se présenteront pas dans une guerre entre deux grandes puissances voisines.

« Quant aux longs temps d'arrêt dans les opérations que nous constatons clans le cours des guerres des siècles passés, ils ne se reproduiront plus. Ils se produisaient parce que, de part ou d'auire, on répugnait à l'action, qu'on ne savait pas nettement fixer un but aux opérations ; ou bien encore ils avaient pour cause l'habitude de faire prendre aux troupes leurs quartiers d'hiver. Actuellement, les frais d'entretien des armées une fois entrées en campagne sont tellement considérables que les gouvernements, uniquement pour en finir avec ces dépenses écrasantes, devront insister auprès de leurs généralissimes pour que ceux-ci fassent agir sans interruption les forces dont ils disposent. » Cette insistance à vouloir que les guerres soient courtes augmente le danger d'une invasion pour un pays neutre de l'importance stratégique de la Suisse. Dans une guerre entre deux de nos voisins, chaque parti sera tenté de faire pénétrer en pays neutre l'excédent de forces qu'il a momentanément sur la frontière, pour obtenir, en-agissant rapidement et énergiquement, un avantage stratégique ou tout au moins un allégement pour son propre pays.

Nous.nous trouvons
ici en présence d'un dilemme dont la grave importance ne peut nous échapper. Si une guerre venait à éclater, ou bien nous devrions être entièrement prêts à combattre pour notre indépendance, ou bien chaque défectuosité

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dans nos préparatifs de guerre serait pour nous une faiblesse dont il n'y aurait plus moyen de nous relever. La révélation de l'inr suffisance des ressources nécessaires aux transports et aux soins des blessés et des malades ferait notamment une profonde impression sur l'armée et sur le peuple et l'armée soufrirait énormément de l'insuffisance du service de santé.

Le projet du nouveau règlement suisse sur le service en campagne s'exprime comme suit (§ 321) : « Les services des secours volontaires ne peuvent être pris en considération que si ces institutions se sont organisées elles-mêmes et sont soumises en tous points à la surveillance du service de santé militaire. On les emploiera surtout dans la zone du service territorial et des étapes, où elles pourront coopérer à l'évacuation des blessés, au service des hôpitaux, à la réception et à la distribution des dons charitables, etc.

« On ne peut s'attendre à ce que les secours soient efficaces que lorsque les préparatifs et les acquisitions nécessaires auront été faits en temps de paix. » II est nécessaire d'expliquer ici avec quelques détails les conditions dans lesquelles on se trouve.

Le service de santé de l'armée comprend, en cas de guerre, trois vastes domaines bien délimités, savoir : 1. le service de santé de l'armée de campagne, 2.

» » des lignes d'étapes, 3.

» » dans les hôpitaux d'armée.

L'armée de campagne est dotée d'institutions sanitaires, si ce n'est en grande quantité, du moins en quantité suffisante.

Ce n'est qu'exceptionnellement qu'elle aura besoin d'assistance.

Il en est autrement du service des étapes et du service territorial. Les institutions sanitaires y îsont tellement insuffisantes, soit en personnel, soit en matériel,' que la plus grande partie du service de santé de ces franches si importantes incombera dès le début aux secours volontaires.

Le service de santé des étapes a actuellement a sa dispo- Serrioo d< ·anté sition pour les transports par chemin de fer : des itttpe Trois trains sanitaires, qui sont formés, lors de la mobilisation, avec des wagons de IIIe classe dans lesquels les bancs sont remplacés par des brancards suspendus. Chaque train est

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calculé de manière à pouvoir transporter 200 hommes couchés.

L'escorte est formée de troupes sanitaires de landwehr.

Ces trois trains sanitaires, avec un total de 600 couches, suffiront peut-être à l'évacuation normale de l'armée mobilisée.

Mais sitôt que les combats et les épidémies auront fait croître le nombre des malades (peut-être de 10 °/0 ou 12 °/0 comme à Wörth, du 18 °/n comme à Gravelotte ou même du 22 °/n comme à Mars-la-Tour), ces trains seront dans l'impossibilité complète de suffire à la prompte évacuation, sur l'intérieur du pays, de ceux qui ne peuvent plus combattre. Il faudra alors former avec des wagons de marchandises un grand nombre de trains sanitaires auxiliaires. Comme il n'existe, à côté des wagons de chemins de fer, ni matériel ni personnel de quelque espèce que ce soit, ce sera aux secours volontaires à compléter à cet égard le service de l'évacuation des blessés. Nous trouvons donc ici la première grande tâche des secours volontaires en temps de guerre, celle de fournir le personnel et le matériel aux trains sanitaires auxiliaires.

Le service de santé des étapes a en outre à sa disposition, sur les lignes d'étapes de marche : Cinq colonnes de transport, chacune avec 32 voitures de réquisition à deux chevaux, et le personnel sanitaire de landwehr nécessaire.

Si l'on songe que chacune de ces voitures ne peut contenir que deux hommes couchés ou un nombre correspondant d'hommes assis, et si l'on se représente la lenteur avec laquelle se meuvent ces colonnes, il devient évident que, dès qu'il y a beaucoup de monde à transporter ou beaucoup de chemin à faire, o:.i doit également recourir aux secours volontaires.

Il en résulte que la seconde tâche des secours volontaires en cas de guerre sera de fournir du matériel et du personnel pour les transports sur les lignes d'étape de marche.

Le service de santé dispose enfin de cinq ambulances dû landwehr pour L'organisation et Vexploitation des hôpitaux d'étape. Dès qu'il y aura beaucoup de malades et beaucoup de blessés, ces modestes forces ne seront plus en état de fairo leur service, d'une façon satisfaisante, dans un rayon probablement très étendu. La troisième tacile des secours volontaires sera donc de venir en aide aux hôpitaux d'étape en leur fournissant du personnel et du matériel.

1000 que nous possédons; ce personnel ne suffit en effet que pour 1600 lits.

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Hôpitaux Il va sans dire qu'on utiliserait avant tout pour les besoins civils.

de l'armée les nombreux hôpitaux civils de notre pays.

Les hôpitaux suisses ont ensemble, en nombre rond, 7500 lits, avec le personnel nécessaire, en ne comptant que les hôpitaux qu'on peut utiliser pour les besoins de l'armée, c'est-à-dire en déduisant les hôpitaux ou asiles spéciaux, tels qu'asiles d'aliénés, etc. Comme il n'est guère possible, même en temps de guerre, de déloger tout l'élément civil des hôpitaux ordinaires, on peut compter tout au plus sur 4000 lits à l'usage des militaires, c'est-à-dire sur un peu plus de la moitié.

Exigences Les huit sections d'hôpital ont le personnel nécessaire à lu service d'hôpital. 1600 lits; dans les hôpitaux civils on trouverait en cas de besoin 4000 lits ; cela porte le total disponible en cas de guerre à 5600 lits, chiffre maximum. Il manque encore le personnel nécessaire à 3400 autres lits déjà en dépôt.

On ne peut dire qu'approximativement ce que l'armée mobilisée demanderait en fait de service d'hôpital. Les expériences d'autres Etats qui mobilisent dans les mêmes conditions que la Suisse ont démontré que la diminution en hommes, à la suite de maladie ou de blessure, comporte au bout de deux semaines 10 à 15 °/0 de l'effectif, sans qu'il y ait eu 3e combats particulièrement sanglants. .

D'après les contrôles, l'armée de campagne comptait au 1er janvier 1905! (sans la landwehr IIe ban): Elite .

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153,649 hommes Landwehr, Ier ban .

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64,456 » Total 218,105 hommes Une diminution du 10°/0 produite par la maladie ou les blessures exigerait en peu de temps 21,800 lits dans les hôpitaux. En déduisant un tiers comme maladies passagères et qui n'exigent pas la tranquillité de l'hôpital, on a toujours besoin de 14,000 lits, en nombre rond; or, même en prenant aux hôpitaux civils tout ce qu'on peut y prendre, nous n'arrivons qu'à 5600 lits. Nous nous trouvons donc en présence d'un déficit de 8 à 9000 lits et, pour le combler, on s'en remet aux secours volontaires, auxquels, à côté de tout ce qu'ils ont déjà à faire pour le service des étapes (voir plus haut), on confie la mission d'installer et d'entretenir dans l'ultérieur du pays ces 8000 à 9000 lits.

1001 En d'autres termes, on demande aux secours volontaires qu'en quelques semaines ils aménagent des hôpitaux pour beaucoup plus de malades qu'il n'en est admis^en temps de"paoc dans tous les hôpitaux de la Suisse.

On peut apprécier approximativement [de la manière suivante ce que l'on demande ainsi en fait de matériel aux secours volontaires : Le matériel sanitaire d'un lit d'hôpital coûte environ 300 francs, d'après les dispositions du règlement du service d'hôpital.

On ne tient du reste pas compte de l'achat de lits, de literie, de linges, dont la Confédération possède, e/i partie du moins, les provisions nécessaires.

Il résulte donc de ces estimations et des explications données plus haut que les secours volontaires ont à fournir, pour l'exploitation de 9000 lits d'hôpitaux, un matériel (l'une valeur de 2,700,000 francs environ.

Quant au personnel, nous admettons que pour 100 malades il faut pouvoir disposer de 2 médecins, de 12 personnes pour le service des malades et de 6 personnes pour le service du ménage (cuisine, blanchissage, etc.). Ces chiffres correspondent aux exigences ordinaires d'un hôpital civil ; ils ne sont donc pastrop élevés pour les circonstances difficiles que la guerre produit.

Il résulte de ces données que les secours volontaires devraient, pour 9000 lits d'hôpitaux, disposer en tout de 180 médecins, de 1080 personnes pour le service des malades et de 540 pour le ménage, soit au total de 1800 personnes. Il faudrait ensuite que le personnel de l'assistance des malades fût instruit dans son service, ce qui rend le recrutement encore plus difficile. Nous reviendrons en détail sur cette importante question dans la II" partie du présent message.

Nous avons pris pour base, jusqu'ici, un chiffre relativement faible de malades et de blessés. Une bataille sanglante, une épidémie, ou même l'arrivée d'un grand nombre d'ennemis blessés élèveront considérablement ce chiffre moyen, et chargeront d'autant plus les secours volontaires. Comme le chiffre des malades à soigner dans les sections d'hôpital et dans les hôpitaux civils est fixe et que nous ne possédons pas d'autres établissements, toute augmentation de malades ou de blessés ne se fera sentir que pour les secours volontaires et il est donc bien possible qu'en fait ils aient à pourvoir non pas seulement à 9000 lits, mais
au double et même à plus du double.

En réfumé, on aura besoin, en temps de guerre, de l'assistance des secours volontaires, et l'on compte absolument sur cette assistance :

1002 1° Dans le service des étapes, pour fournir: a. du personnel et du matériel pour les traind sanitairos auxiliaires ; 6. du personnel et du matériel pour les transports et pour la subsistance aux étapes de marche ; c. du personnel et du matériel pour l'établissement et l'exploitation des hôpitaux d'étapes.

2° Dans le service d'hôpital à l'intérieur du pays, pour fournir du personnel et, en partie, du matériel, pour au moins 9000 lits.

jes secours olontairîs,

Les secours volontaires ou, suivant notre désignation officielle, les sociétés de secours volontaires, ont pour base los principes de la convention de Genève de 1884 et se sont plus ou moins développés et organisés diversement dans prasque tous les Etats qui ont adhéré à cette convention. Dans la plupart de ces pays, l'organisation des secours volontaires s'est déjà faite pendant la paix. On supposait, en effet, qu'il n'y avait moyen d'obtenir une rapide intervention du dévouement volontaire, comme une guerre l'exige aujourd'hui, qu'en fixant d'abord les bases de la production des ressources et leur emploi, c'est-à-dire que si la mobilisation des secours volontaires était préparée de la même manière que c'est déjà le cas aujourd'hui pour les besoins, militaires d'une nature générale. Ces institutions de secours volontaires ont adopté la plupart comme emblème le symbole choisi par la convention de Genève, la croix rougo jes sociétés sur fond blanc;; elles se nomment sociétés nationales de la de la roix-Bouge. Croix-Bouge. Elles sont en rapport plus ou moins intime avec l'organisation de l'armée et sont assistées d'autres institutions ayant un but analogue : les ordres de chevalerie, les sociétés des femmes patriotes, les sociétés de samaritains, etc. Nous donnons ci-dessous un aperçu sommaira de la situation dans les principaux Etats européens, en reproduisant, dans ses parties essentielles, un article de la «Revue internationale des armées de terre et de mer ».

iUlemagne.

Si nous jetons d'abord les yeux sur les secours volontaires an Allemagne, nous voyons qu'ils sont dirigés par un comité central des sociétés allemandes de la Croix-Rouge, fonctionnant dans la capitale de l'empire, et sous les ordres duquel les sociétés nationales des différents Etats ou groupes d'Etats (Etats thuringiens) allemands dirigent à leur tour l'activité des sociétés affiliées ou

1003 Locales qui dépendent d'elles. La société nationale prussienne, la plus grande, comprend 12 sociétés provinciales, dont dépendent 462 sociétés affiliées. Les sociétés nationales, comme les sociétés provinciales prussiennes, surveillent, stimulent, encouragent, soutiennent les travaux de leurs sociétés locales ; celles-ci ont pour mission de recueillir de l'argent, de préparer des dépôts d'articles de pansements, d'habillement et de linge, de former des infirmiers, de tenir prêts des médecins et de procurer déjà en temps de paix ce qu'il faut pour un lazaret, afin de pouvoir, en cas de besoin, installer de suite des lazarets de sociétés pour y recevoir les malades et les blessés. Les sociétés affiliées doivent encore préparer, d'accord avec les autorités des chemins de fer, les stations haltes-repas et les stations de pansement avec tous leurs accessoires, aux points de jonctions de voies ferrées très fréquentées. Les sociétés d'hommes trouvent un champ utile à leur activité dans ce domaine à la fois économique, technique et médical. C'est à l'instance supérieure, aux sociétés nationales ou provinciales, qu'il appartient de les diriger sans cesse dans ce sens et de les maintenir en -activité.

Le second membre de l'organisme de l'assistance volontaire des malades, ce sont les colonnes de brancardiers, appelées ·colonnes sanitaires, qui sont désignées et instruites pour le transport et la conduite des malades et des blessés du champ de bataille aux places de pansement et de là aux lazarets de campagne, aux stations de chemin de fer et aux hôpitaux du pays. Ces colonnes sanitaires, qui, d'après de nouvelles prescriptions, sont en rapport organique intime avec les détachements sanitaires militaires et qui leur sont adjointes comme réserve, dépendent également des sociétés provinciales ou nationales, qui surveillent et vérifient leur instruction. Il y a actuellement en Prusse 503 de ces colonnes, avec environ 5800 membres disponibles, en Bavière à peu près 60, dans les grandsduchés, dans les duchés, dans les principautés, dans les villes hanséatiques libres allemandes et en Alsace-Lorraine, près de 200. Ces colonnes sanitaires, qui doivent être fortes de 15 hommes au minimum, n'ont, par principe, pas à participer au travail dans les premières lignes, directement dans les troupes combattantes. C'est
ici la place des médecins de troupe et de leur personnel sanitaire militaire. Dans des cas particulièrement pressants, il est cependant permis aux chefs supérieurs d'autoriser la réunion d'une colonne de transport à un détachement sanitaire dans le but de l'employer sur le champ de bataille. A cet effet, la colonne des volontaires passe sous le

1004 commandement militaire du chef intéressé et forme le complément des brancardiers militaires, formés dans la troupe et réunis en subdivisions en guerre dans chaque division. Ces colonnes, qui ne peuvent se composer que d'hommes exempts du service militaire, reçoivent leur matériel d'instruction du comité central des sociétés allemandes de la Croix-Rouge. L'instruction comprend l'application de pansements et d'hémostatiques, l'assistance à prêter aux médecins, le chargement et déchargement de blessés, ainsi que la fabrication, avec du matériel de circonstance, de véhicules de toutes sortes pour le transport dèsmalades.

L'ordonna,nce impériale de 1898 sur l'incorporation, l'habillement, l'équipement du personnel masculin de l'assistance volontaire dea malades a rendu les colonnes sanitaires plus uniformes et plus homogènes. On a d'abord désigné dans la zone des sociétés prussiennes un grand nombre d'hommes qui suivent en campagne les troupes sans revêtir l'uniforme.

Même en paix, les colonnes sanitaires ont rendu de précieux services dans des calamités de toutes sortes, telles qu'inondations, incendies, accidents de chemin de fer, épidémies. Elles sont donc un organe efficace et très utilisable du bien public qui, « comme Croix-Rouge en temps de paix », a mérité la reconnaissance surtout des contrées industrielles, où les fabrique» sont nombreuses et les accidents inévitables.

Le troisième organe des secours volontaires, c'est l'association des infirmiers volontaires, corporation qui s'est formée à l'origine dans les cercles des jeunes étudia.nts des universités allemandes et dont les membres sont pris actuellement dans tous les cercles bourgeois. D'après les dernières données de l'association, environ 2500 infirmiers ont déjà été instruit» et sont prêts à servir dans les lazarets de guerre. Le mélange de toutes les conditions sociales dans cette association d'infirmiers volontaires, où prédomine cependant le monde académique, ainsi que la réunion de personnes d'âges très différents, ont donné jusqu'à présent d'excellents résultats et justifient l'espérance que cette institution rendra de bons services aux lazarets de guerre du pays.

La manière dont l'assistance volontaire des malades s'est organisée da:ns les autres Etats allemands est à peu près la même qu' en Prusse ; c'est en Bavière que
le service des secours est le mieux organisé et le mieux partagé en fait de ressources.

En cas de mobilisation, on y formera, d'une manière qu'on peut qualifier d'opulente, deux détachements de lazaret, qui

1005 suivront les lazarets de guerre des corps bavarois et pour lesquels sont déjà prêts 50 infirmiers et 250 infirmières. Il faut encore dire deux mots des ordres dé chevalerie qui tendent ·également au même but humanitaire que l'assistance volontaire des malades de la guerre, mais qui sont en dehors du cadre de leur organisation, et qui se sont réservé le champ d'activité qu'ils ont eux-mêmes choisi. Ce sont les chevaliers de St.-Jean, les chevaliers de Malte, les chevaliers bavarois de St.-Georges, dont 'l'enseignement dans les hôpitaux s'adresse aussi bien aux hommes qu'aux femmes. L'activité des ordres de chevalerie, comme le travail des corporations dont il vient d'être question, sont subordonnés au commissaire impérial et inspecteur de l'assistance volontaire des malades, et les forces utilisables doivent être mises à la disposition du service des étapes et des lazarets de réserve ; dans ce but, les ordres entretiennent eux-mêmes et à, leurs frais, pendant la guerre, des lazarets qui sont dirigés et administrés par de leurs délégués.

Les femmes prennent aussi leur part à l'oeuvre des .secours volontaires et forment une partie respectable de l'organisme de l'assistance volontaire des malades de la guerre.

Leur activité extérieure trouve également son expression dans une grande société, la société nationale des femmes. Si l'on jette un coup d'oeil sur l'aspect extérieur de l'organisation actuelle
Ces associations comprennent environ 900 sociétés affiliées, <|ui se répartissent entre les Etats du nord de l'Allemagne et l'Alsace-Lorraine. Les associations et sociétés du sud de l'Allemagne ne sont pas comprises dans ce chiffre. L'assistance pratique que prêtent ces sociétés se manifeste de différentes manières.

Elles préparent pendant la paix, en commun avec les sociétés d'hommes de la Croix-Rouge ou bien seules et avec leurs propres ressources, .l'installation de lazarets de société (lazarets privés) et de lazarets de réserve, en se procurant de l'argent, du linge, du matériel de pansement, et en prenant la direction du ménage de ces établissements. Le domaine dans lequel toutes les femmes allemandes de l'association nationale mettent le
plus d'émulation, c'est celui de la formation d'infirmières de profession. Les associations et sociétés riches en membres songent à fonder et à /entretenir des instituts d'infirmières, qui soient eu même temps maisons principales et établissements d'instruction pour les infirmières déjà formées et maisons de santé pour les ma-

1006 Jades. Ces infirmières de la Croix-Rouge rendront aux lazarets du pays d'excellents services dans une guerre a venir, tandis que leis infirmières de profession seraient probablement employées de préférence dans les établissements du service des étapes, où le travail est le plus difficile.

On engage en outre aujourd'hui le plus possible de sociétés à faire instruire des aides en mie de la guerre. Celles-ci ne seraient pas employées au service proprement dit d'infirmières, mais fonctionneraient comme aides sous la direction d'infirmières de profession. On peut voir d'après ce tableau, esquissé à grands traits, l'influence bienfaisante du concours de l'assistance féminine dans la grande oeuvre des samaritains et la nécessité pour celle-ci d'être aidée par la main de la femme.

Dans l'empire allemand, c'est le commissaire impérial et inspecteur militaire de l'assistance volontaire des malades, un fonctionnaire de l'armée, qui dispose de tout le personnel masculin et féminin du .«ervice volontaire des malades. Afin de rendre aussi profitable et aussi efficace que possible l'utilisation de ces forces, où sont représentés tous les cercles de la société bourgeoise, il a été adjoint au commissaire impérial un certain nombre de délégués territoriaux, qui réunissent les éléments de leur territoire tels qu'ils ont été dépeints plus haut, et sont continuellement au courant de leur état de préparation et de leur capacité productrice. Ces délégués territoriaux sont en général les chefs administratifs (Oborprasidenten) des territoires à eux attribués et se trouvent en conséquence dans une situation influente.

Angleterre.

On compte dans le royaume uni de Grande-Bretagne, sous la direction d'un comité central, trois corporations, avec administration particulière, qui ont pour but de prêter assistance au service de santé de l'armée. Ce sont : 1. La société nationale de secours aux militaires blessés ou malades.

2. L'ambalance de l'ordre de St-Jean (St-John's Ambulance Association).

3. La réserve des hôpitaux.

Des comités de district fonctionnent sous la direction du comité central dans les 17 districts militaires du royaume ; chacun de ces comités se compose de trois membres de la société nation aie, de trois représentants de l'ordre de St-Jean, d'un délégué des réserves d'hôpitaux, d'un officier de l'étatmajor général et d'un médecin militaire d'un grade supérieur.

1007 Ces commissions de district de 9 membres sont chargées de toutes les dispositions relatives aux préparatifs, au rassemblement, à la mise à la disposition de ce qui est nécessaire à l'assistance volontaire. Les représentants de la société nationale procurent les fonds et les ressources nécessaires ; les chevaliers de St-Jean s'occupent du personnel médical et sanitaire et préparent l'installation de lazarets auxiliaires avec les lits, les ustensiles de buanderie, les autres ustensiles et objets nécessaires, etc. Les commissaires de la réserve des hôpitaux recherchent dans leurs districts les personnes qui seraient en cas sérieux aptes au service de guerre. Les comités de district renseignent le comité central tous les trois mois sur le nombre et la qualité du personnel qu'on pourrait employer en guerre pour l'assistance volontaire et sur ce dont on peut disposer dans leur district en fait de matériel pour ambulances, lazarets de campagne et autres institutions analogues.

En Angleterre également, l'organisme de l'assistance volontaire est rigoureusement subordonné à l'administration militaire et représente un mécanisme complémentaire du rouage du département médical de l'armée.

En France, le service des secours ' découle de trois grandes sociétés, qu'on nomme pour abréger les sociétés principales ; ce sont : 1. La société de secours aux blessés.

2. L'union des femmes de France.

3. L'association des dames françaises.

Elles se partagent toutes trois la solution de la tâche d'installer aux Jieux à désigner par les généraux commandants, dans chaque district de corps d'armée et dans chaque forteresse, des hôpitaux auxiliaires pour venir en aide au service de santé de l'armée. A cet effet, dans chaque corps d'armée, chacune des trois sociétés principales est représentée par un délégué choisi par son comité et qui est accrédité, par le ministre de la guerre, auprès du général de corps d'armée. Les 290 sociétés principales et les 238 sociétés affiliées d'hommes et de femmes qui existent dans les 18 districts de corps d'armée de la France, sont soumises à ces délégués ; elles fournissent avec leurs propres moyens le personnel qui veut se vouer au service volontaire, ainsi que les fonds pour le personnel et le matériel ; lorsque cela ne suffit pas, l'Etat intervient. Ce personnel et ce matériel formeront le noyau du personnel et du matériel des 26 hôpitaux auxiliaires à 100 lits

France.

1008

Huuie.

chacun et des 70 stations haltes-repas des gares avec 500 lits en tout. Douze de ces hôpitaux auxiliaires peuvent suivre l'armée dès le début d'une guerre ; les 14 autres doivent être prêts au bout de 4 jours.

A côté des 26 hôpitaux auxiliaires et des 70 stations haltes-repas, off dispose des fonds nécessaires pour installer dans le pays des hôpitaux fixes où il y a place pour 18,000 lits. Il n'y a pour ces lits en temps de paix rien en fait de personnel et en fait de matériel qui puisse servir de noyau pour les nécessités de la guerre. Un certain cadre de personnes capables a été désigné pour accompagner les trains sanitaires, à peu près autant qu'il en faut pour un hôpital auxiliaire.

C'est l'autorité militaire qui répartit les deux sortes d'hôpitaux.

Le médecin de corps fait part de son côté au délégué intéressé des voeux et des besoins de l'administration, et il veille à ce qu'on en tienne compte. L'activité volontaire rentre, ainsi qu'on le voit d'après ces dispositions, complètement dans les mains de l'administration militaire, qui s'est réservée le droit de disposer largement des ressources des particuliers. Cette liaison intime entre l'organisation publique et l'organisation volontaire donne au ministère français de la guerre la possibilité de pouvoir agir absolument comme il l'entend. Toute l'actvité auxiliaire devient ainsi une partie de l'organisation de l'armée et doit se soumettre entièrement aux règles et aux ordres du commandant et des autorités administratives.

L'organisation de la Croix-Rouge de Russie s'écarte de celle des autres pays par le fait qu'il n'y a en temps de paix aucun preparati!' réglementaire pour la guerre. Ce r'est que lorsque la guei.-re est imminente que se prennent les premières mesures pour créer un service de secours, qui se rattache entièrement au service de santé de l'armée, d'après les instructions des autorités militaires.

Le cadre :îxe du temps de paix dans lequel vient s'emboîter le service de l'assistance volontaire en temps de guerre, ne consiste que dans un seul office central, dont dépendent cinq comités de distict. Ces districts se divisent en 75 districts locaux (dont 15 en Sibérie), qui ont derrière eux un réseau d'environ 220 sociétés affiliées. Mais ces districts et sociétés ne sont que des offices destinés à recueillir des fonds en vue de
la guerre. Dès que l'armée est mobilisée, 9 délégués généraux, désignés à l'avance par le ministre de la guerre, prennent la direction de l'assistance volontaire dans les différents rayons du territoire qui se trouve derrière l'armée d'opérations. Les

1009 .fonds nécessaires et les objets dont Us ont besoin sont remis .aux délégués généraux de ces rayons par l'office central de .St-Pétersbourg ; ils servent à installer, sur les lignes de chemins de fer conduisant au théâtre de la guerre, des lazarets, des dépôts, des stations haltes-repas et des stations de pansement, ainsi qu'à pourvoir ceux-ci de médecins et d'infirmiers.

On reçoit dans ces lazarets, d'après les prescriptions des autorités militaires, les hommes blessés grièvement qui viennent du champ de bataille. L'instruction d'infirmières en vue de la guerre est faite en Russie pendant la paix sur un grand pied, et par l'administration de l'armée elle-même.

On part du principe que la main de la femme est plus .habile et plus agréable au malade que les soins que lui donne un homme. Il existe environ trente établissements qui forment des soeurs de charité, et en outre un petit nombre d'écoles d'infirmières. Les premières suivent un cours théorique de .2 ans dans des hôpitaux militaires, sous la direction de méde,cins; ce cours est combiné avec des exercices pratiques.

On estime qu'il y a actuellement en Russie plus de 3000
Ce grand nombre d'infirmières instruites et prêtes à servir offre à la Russie un élément précieux pour les soins à donner aux malades de la guerre. En Russie également, on peut tout particulièrement constater combien le service de santé volontaire s'appuie fortement sur l'organisme de l'armée et comme 11 est subordonné à l'autorité militaire.

Dans le cours des temps, on a pu recueillir en Russie, .grâce à l'activité de l'esprit de bienfaisance, un capital considérable (plus de 12 millions de roubles) de contributions volontaires ; cela permet de donner l'attention qu'il convient à toutes les améliorations et à tous les perfectionnements introduits dans le domaine de la chirurgie militaire, et partout où ils se sont présentés, les trains de secours de la Russie ont été les mieux équipés.

La Croix-Bouge italienne, qui a également pris part aux derniers événements militaires, se rattache entièrement, déjà en temps de paix, à la division territoriale et tactique de l'armée et de la marine,
et s'organise en étroit contact avec celles-ci.

12 districts de corps d'armée ont chacun une société régionale, dont le président se trouve en relations étroites avec Feuille fédérale suisse. Année LIV. Vol. V.

67

Italia.

1010 le chef militaire du district. Il y a lieu de remarquer que chaque district de côtes relevant de la marine de guerre a son délégué particulier. Au-dessous des sociétés régionales fonctionnent les sociétés de sections, qui dirigent les sociétés locale se trouvant dans un district de division et maintiennent le contact avec le commandant de division. L'Italie comptait récemmement environ 400 sociétés. De ce réseau de sociétés aux nombreux rameaux, dérivent un nombre relativement grand d'organisations sanitaires, qui seraient appelées en cas de guerre à prêter leur secours. Ce réseau fournira en guerre un certain nombre de lazarets de campagne (50 avec 100 ou 50 lits), 30 ambulances de montagne, 15 trains de chemin de fer de lazaret, plusieurs ambulances de rivières et vaisseaux-lazarets (les ambulances de rivières pouvant transporter 214 blessés chacune et les vaisseaux-lazarets ayant chacun 125 lits). A côté des sociétés masculines mentionnées tout à l'heure se trouvent, comme complément, 98 sociétés féminines, dont la principale activité se borne généralement à recueillir des secours en argent, du matériel dr, pansement, du linge, des habits et d'autre matériel de même genre. L'Italie ne connaît pas cette véritable activité créatrice qu'on trouve chez les femmes allemandes et dans les institutions allemandes.

Il est maintenant d'un usage constant en Italie d'examiner chaque année, lors des manoeuvres, l'état de préparation et d'utilisation des organes de l'assistance volontaire des malades et d'éprouver leur capacité productrice. C'est ainsi que le comité central de Rome a envoyé un de ces lazarets auxiliaires sur le terrain des manoeuvres d'automne dans les Abruzzes.

Ce lazaret a fonctionné pendant 16 jours et les observations qui furent faites alors ont été mises à profit par l'administration militaire de divers côtés, dans l'intérêt du service de santé des troupes. Même en temps de paix, en luttant contre la malaria dans la campagna romaine, la Croix-Rouge a rendu d'utiles services à la santé publique et a arrêté la propagation de la maladie. La Croix-Rouge italienne a inscrit en lettres impérissables dans les annales de la campagne abyssine de 1895 les services qu'elle a rendus^ alors à l'armée. Toute la nation a montré, à chaque occasion et patriotiquement, les sacrifices et los dépenses qu'elle était prête à faire dans l'intérêt de l'arméo nationale sous la forme de secours volontaires.

Autriche.

L'Autriche:-Hongrie a organisé son service de secours volontaires de la, manière suivante :

ion A la tête du service des secours autrichiens se trouve la société autrichienne de la Croix-Rouge, sous l'égide de laquelle les 134 délégués des sociétés nationales de secours forment une assemblée fédérale avec un président. En Galicie, en Styrie, dans le Tyrol,. ces sociétés nationales de secours sont des sociétés doubles, c'est-à-dire des sociétés d'hommes et de femmes, qui se réunissent pour travailler en commun. En Bohème, en Bukovine, en Dalmatie, à Görtz, à Gradiska, dans la Carinthie, dans la Carniole, en Moravie, dans la basse et dans la haute Autriche, à Salzbourg, en Silésie, à Trieste, en Istrie, dans le Vorarlberg, on rencontre des sociétés d'hommes et des sociétés de femmes, mais indépendantes de part et d'autre et séparées les unes des autres.

Au-dessous de ces 18 sociétés principales fonctionnent en tout 450 sociétés affiliées, qui ont pour tâche en temps de paix de tenir à disposition de l'argent, du matériel de pansement, du linge, des habits, des utensiles, etc., de former des infirmiers, de préparer ce qu'il faut pour les lazarets. Puis, dès qu'une guerre éclate, elles mettent à la disposition du commissaire impérial et inspecteur général du service de santé un certain nombre de personnes qui sont aptes et prêtes, en tant que délégués de la Croix-Rouge, à assurer l'exploitation convenable du travail des sociétés, chaque fois suivant les besoins, aussi bien auprès de l'armée de campagne qu'auprès de l'armée en garnison dans le pays.

Le travail se fait suivant les exigences que le commissaire impérial impose aux secours volontaires au début d'une guerre, d'après les besoins survenant. Les demandes de ce fonctionnaire sont facilitées par le fait que chacune de ces sociétés nationales de secours adresse déjà en temps de paix des offres très précises à l'administration de l'armée. Ainsi la société de secours de la basse Autriche prend à sa charge de soigner 25 officiers et 1100 hommes; la société double de Galicie: 10Q officiers et 1900 hommes; la société nationale de secours et de femmes de Styrie : 6 officiers et 460 soldats ; les sociétés nationales de secours de Bohème: 85 soldats; la Bukovine: 25 officiers et 600 hommes ; Görtz et Gradiska : 200 hommes ; la Carinthie: 100 hommes; la Moravie: 600 hommes; la haute Autriche: 400 hommes; Salzbourg: 450 hommes; la Silésie:
50 hommes ; le Vorarlberg : 60 hommes.

L'addition de ces chiffres démontre que l'assistance volontaire peut se chai-ger. de soigner 156 officiers et 6000 hommes, et que le service de santé de l'Etat est déchargé de

1012

Hongrie,

tout autant. -- Pour soigner ces malades, on dispose d'environ 600 médecins daus les hôpitaux et hospices établis dans l'intérieur du pays par le service volontaire. 50 stations de pansement et de haltes-repas de la Croix-Rouge (dont 14 avec repos pour la nuit) peuvent être installées par lesdites sociétés sur les-chemins de fer autrichiens.

Il n'existe pas en Autriche de colonnes sanitaires comme en Allemagne pour le transport et pour la conduite des blessés.

On dispose pour ce service de 31 colonnes de transport do blessés entièrement équipées, qui sont incorporées à 31 hôpitaux de campagne de l'armée, puis d'une de ces colonnes également entièrement équipée pour le service de son propre hôpital de campagne.

Les institutions hongroises sont analogues à celles de l'Autriche. L'office central est représenté par la société hongroise de la Croix-Rouge, de laquelle dépendent les sociétés provinciales, celles des comitats et les sociétés locales, qui ont une activité toute pareille à celle des sociétés autrichiennes. Chaque société locale est représentée par quelques délégués auprès de la société des comitats dont elle dépend; elle reçoit par l'intermédiaire de celle-ci les instructions nécessaires et lui fait rapport de son côté sur sa capacité productrice et sur les ressources et moyens de secours dont elle dispose.

La Croix-Rouge hongroise fournit en cas de guerre un lazaret auxiliaire de POO lite à Budapest, cinq autres de 200 lits et deux dt- 100 lits qu'elle met à la disposition de l'administration militaire aux lieux où ils sont nécessaires; en d'autres termes, elle se charge de soigner 2000 malades, qu'elle entretient à ses frais. Elle se montre très généreuse à l'égard des stations de pansement et des stations haltes-repas. On prévoit l'installation de 15 de ces stations avec 200 lits chacune, d'une station de 100 lits et de 44 stations à 10, 11 ou 12 lits. La société hongroise dispose de 11 colonnes sanitaires avec 16 voitures de malades par colonne.

Afin de recruter le personnel nécessaire aux 8 grands lazarets auxiliaires et aux 60 stations de pansement, la société entretient en temps de paix un hôpital de 120 lits, qui sert d'école aux infirmières. 21 infirmières y suivent à tour de rôle des cours de 6 mois, déjà depuis 12 ans, si bien qu'il y en a déjà un grand nombre dans le pays.

Il faut enlin mentionner le lazaret auxiliaire mobile de 20 lits, qui peut être amené où le chef intéressé l'estime néces-

1013 saire. Les 10 colonnes sanitaires de montagne représentent une institution spéciale, dont le personnel conduit des attelages à mulets avec selles et cacolets de montagne. Il y a encore en Hongrie des maisons de santé et des maisons de rétablissement pour convalescents, où peuvent être reçus 160 officiers et 9000 hommes, en partie entièrement gratis, en partie contre une petite indemnité.

Suisse.

En Suisse, les secours volontaires, stimulés par la misère qu'avait produite les guerres d'alors, se sont organisés pour la première fois en 1866 sous le nom de «société de secours pour militaires suisses». Lors de la guerre franco-allemande de 1870-71, cette société a déployé, dans le pays et à l'étranger, une vive et bienfaisante activité ; elle s'est cependant dissoute en 1876, parce qu'on pensait alors qu'après une si grande guerre, l'occasion d'agir ne se représenterait pas avant longtemps. Les années de paix ne furent pas favorables au développement de la Croix-Rouge et ce ne fut qu'en 1882 que l'on organisa de nouveau les secours volontaires en vue de la guerre, sous la dénomination de société centrale suisse de la Croix-Rouge. Dès lors la Croix-Rouge suisse s'est développée lentement et péniblement, luttant inutilement contre l'indifférence du public, qui avait vite oublié les terreurs de la guerre et qui, ne pensant plus à la possibilité de leur retour, ne voulait pas qu'on les lui rappelât.

A côté de cette indifférence du public, qui provenait surtout de l'ignorance du but et de l'utilité de la Croix-Bouge, la société souffrit avant tout du manque d'un plan de travail clair et conforme à ses fins, plan qui n'aurait pu être établi qu'en travaillant constamment avec les organes dirigeants de notre armée qu'elle a pour but principal d'assister. Nous avons été dépassés de beaucoup par les institutions de ce genre des pays voisins, ainsi qu'on peut le voir facilement par ce qui a été dit plus haut.

En 1901/1902, la société centrale suisse de la Croix-Rouge Croix-Boni comprenait 24 sections avec 14,876 membres payants. La fortune de la caisse centrale se monte à fr. 92,052.51 et celle des sections à fr. 145,880. 50. La caisse centrale reçoit des sections environ 7500 francs de cotisations par an, ce qui fait que la somme disponible chaque année re dépasse guère 10,000 «francs, intérêts du
capital y compris. Quelques sections disposent d'un certain matériel p Dur soigner les malades, matériel en général peu important, sauf celui de la section de Baieville.

1014

xriété dea mari tain 3.

La société suisse de la Croix-Rouge s'est occupée depuis quelques années de l'instruction du personnel do l'assistance des malades. A cet effet, elle envoya pour quelques mois, dans les hôpitaux suisses, des personnes propres à ce service. Dès 1899, elle a ouvert à Berne une école d'infirmières où l'on instruit pour le momenc chaque année 12 à 16 infirmières; le cours dure une année et demie. En outre, la Croix-Rouge soutient financièrement les cours de samaritains et leur procure du matériel d'instruction.

Il faut dire, en résumé, que jusqu'à présent la Croix-Rouge n'est pas arrivée à occuper la place qui convient à ses fins patriotiques et utilitaires; mais on peut voir, d'après certains signes, que la glace de l'indifférence commence à fondre, parmi le peuple suisse, sous l'influence des événements militaires de ces dernières années, et l'on ose espérer qu'avant qu'il soit longtemps la société suisse de la Croix-Rouge sera à la hauteur des sociétés de secours des pays voisins.

Une seconde institution, qui à la vérité n'a pas été comme la Croix-Rouge fondée spécialement pour donner des secours en cas de guerre, mais qui s'y prête pourtant, grâce à son organisation particulière, c'est la société suisse des samaritains.

Ce n'est autre chose que la réunion d'un grand nombre de sociétés de samaritains, principalement de la Suisse centrale et orientale. Cette société comprenait, en 1901/1902, 147 sections avec 6162 membres actifs et 8735 membres passifs ou payants.

Les membres actifs se composent de 3482 femmes et de 2680 hommes. Tous les membres actifs doivent avoir suivi au moins un cours de samaritains, soit un cours dans lequel des médecins enseignent, d'après un programme uniforme, les premiers soins à donner en cas d'accident. Ils sont tenus de donner toujours leurs soins gratis et seulement jusqu'à l'arrivée du médecin.

Grâce à leur activité bien définie et souvent très bienfaisante, les samaritains sont en rapport constant avec le public; ils ont éveillé en.lui une grande sympathie, qui s'est manifestée par l'extension forte et régulière que les sociétés de samaritains ont prise dans une grande partie de la Suisse.

Le développement de cette oeuvre, qui chercha d'abord quelque appui dans la Croix-Rouge, malheureusement sans y trouver l'accueil qu'elle désirait, s'est fait dans la suite
d'une manière' tout à fait indépendante. Ce n'est que vers 1890 qu'un rapprochement s'est opéré. Ce rapprochement a conduit à une convention d'après laquelle la société suisse des samaritains

1016 II y a donc; jusqu'à présent quatre institutions différentes qui ont pour but principal ou accessoire l'assistance du service sanitaire pendant la guerre, et qui seraient sans doute renforcées, en cas sérieux, par un nombre infini d'autres sociétés et et de particuliers. Il faut s'attendre à ce qu'ici le dévouement de notre peuples ne reste pas en arrière de celui des autres nations, et que, si une guerre venait à éclater, notre pays ne formerait, de l'est à l'ouest et du sud au nord, qu'une seule société de secours. Mais si nous nous demandons comment, et jusqu'à quel point, tous ces gens seraient en état d'exécuter en temps de guerre leur grande tâche, nous devons malheureusement avouer sans détour qu'il leur serait difficile de le faire d'une manière satisfaisante.

feofrnosités [ de bat actuel.

L'activité de ces institutions est aujourd'hui presque partout entravée par le fait qu'elles ne connaissent pas la tâche qui leur incombe, ou qu'elles ne la connaissent que vaguement; le travail pratique devient ainsi impossible. La vie de la société est donc sourent peu active et l'intérêt qu'on y prend diminue; on paie sa cotisation annuelle, et l'on se soucie ensuite faiblement de l'oeuvre même et de sa mission.

S'il en est ainsi' pour des gens qui, déjà en temps de paix, se sont laissés enthousiasmer par l'idée des secours volontaires, il est à craindre que ceux qui ne s'offrent que lorsque la guerre éclate, et qui ne possèdent que beaucoup de dévotement mais aucune connaissance de leur tâche, ne portent en eux le danger que toute cette activité secourable ne détienne un chaos, ce qui procurerait à l'armée plus de difficultés que d'avantages. C'est pour cela qu'il est indispensable de veiller, déjà pendant les heures tranquilles de la paix, à ce que la mission principale des secours volontaires soit plus généralement connue que jusqu'à présent, et à ce que les préparatifs s'exécutent à temps et à fond. Il faut pour cela remplir une condition préalable: la prépavaiion des secours* volontaires en vue de la guerre ne doit pas se faire à l'avenir sans être en contact avec l'organisation de l'armée, non pas au hasard, tantôt dans une direction, tantôt dans une autre; mais elle doit dès le premier jour être étroitement liée aux prescriptions de service de l'armée auxquelles elle sera soumise en temps de guerre. Elle doit également se diriger systématiquement et d'après un plan suivi, en harmonie avec les principes qui dirigeront notre armée en temps de guerre.

Il résulte malheureusement du manque de relations suiviesentre la direction supérieure des secours volontaires et celle de

1017 l'armée, que les sections sont généralement peu au clair sur la tâche qui leur incombe et que, jusqu'à présent, il n'y a pas eu moyen d'établir pour les secours volontaires un plan de travail et de mobilisation suivi et approfondi. Il s'ensuit, pour la direction du service de santé militaire, une situation incertaine, source jusqu'à présent de difficultés insurmontables pour la réglementation du service de santé des lignes d'arrière. Ce n'est que lorsqu'on aura remédié à cet inconvénient que l'on pourra voir les secours volontaires sortir de la période des actions intermittentes et incertaines, pour entrer dans une période de travail méthodique et tranquillement progressif.

Ce n'est qu'alors que pourra peu à peu se produire ce que l'on attend déjà d'eux, le réel perfectionnement du service de santé militaire, sur lequel on doit pouvoir m;ssi sûrement compter que sur toute autre branche de service de notre armée.

Et ce n'est que lorsqu'on sera arrivé à mettre à cette hauteur les secours volontaires qu'on pourra dire avec confiance que le service de santé de l'armée suisse, assisté sérieusement par urie organisation capable des secours volontaires, est en état de suffire à sa tâche.

On ne peut arriver à ce résultat que si les autorités fédé- Nécessité di rales prêtent à cette question intérêt et appui. Pour combattre dela l'appui Confédération.

l'indifférence du peuple, il faut d'abord une active propagande, puis de sérieuses prestations. Cela n'est possible qu'avec l'aide de l'Etat.

En Allemagne, par exemple, la Croix-Rouge obtient chaque année l'autorisation d'organiser une loterie spéciale, an montant de 500,000 marcs, qui sert à fournir aux diverses sociétés nationales les moyens de se procurer de grandes provisions de matériel de transport et de matériel d'hôpital, ainsi que les ressources nécessaires à l'instruction et à l'équipement du personnel auxiliaire. Les princes et les gouvernements font eux-mêmes une active propagande, en distribuant des décorations et des distinctions de tout genre. Ceci nous est inconnu. Mais si nous songeons que l'activité des sociétés de secours en vue de la guerre s'exerce uniquement dans l'intérêt de l'armée et de l'humanité et qu'elle représente, pour le budget de la guerre, un dégrèvement d'autant plus sensible qu'elle est plus énergique, et si nous
nous rappelons en outre que l'organisation des secours volontaires fait partie des préparatifs de guerre nécessaires aussi bien que toutes les autres dépenses pour le service de santé, nous devons reconnaître que le devoir de la Confédération est de soutenir directement par des subsides financiers le développement rationnel de l'institution.

1018 II est vrai que la Confédération a déjà alloué des subsides à certaines branches du service des secours; ainsi elle donne chaque année 800 francs à la société suisse des samaritains, 1500 francs à la société militaire sanitaire suisse et depuis cinq ans 6400 francs, soit le 80 °/0 des ses frais, au secrétariat central du service sanitaire volontaire. Cela fait donc une dépense totale pour la Confédération de 8700 francs par an. On exprime ainsi l'idée qu'en principe il appartient à l'Etat de secourir ces efforts. Il faut dire cependant qu'au regard des très grandes dépenses que demande une préparation convenable du service des secours en vue de la guerre, cette somme, qui est plutôt destinée aux travaux des sociétés de secours en temps de paix, est complètement insuffisante, même si ces sociétés s'imposent elles-mêmes de grands sacrifices. Il faudrait donc qu'il fût possible de mettre à l'avenir, dans notre budget militaire, un article qui permît de subventionner les secours volontaires, afin de les rendre peu-à peu capables de préparer d'une façon convenable l'importante mission qu'ils auraient en cas de guerre.

La Le représantant de toutes les sociétés et institutions qui Îroix-Kouge.

peuvent prétendre à un subside serait tout naturellement la le «présentant société centrale de la Croix-Rouge. Il n'y a pas besoin de des secours volontaires. longues explications pour reconnaître que le chef de l'armée

doit pouvoir s'adresser à un seul organe central pour tout ce qui concerne le service des secours volontaires, et que, pour que le service: marche bien et sans complications, il ne faut pas traiter avec toutes les sociétés particulières qui surgiront nombreuses dès que la guerre éclatera. Choisissons donc un organe qui représente les sociétés volontaires de secours devant le pays, devant l'armée et éventuellement devant l'ennemi, et qui veuille et paisse concentrer tous les efforts secourables en faveur des malades et des blessés, pour les offrir ensuite à l'armée organisés et utilisables.

Quoique la société suisse do la Croix-Rouge ne soit pas encore en état, dans sa situation actuelle, de suffire à cette tâche, c'est pourtant la corporation qui convient le mieux, historiquement et matériellement, à la personnification des secours volontaires.

Son nom déjà la désigne pour cette tâche, ce nom connu dans tous les pays civilisés et qui sert partout a désigner les institutions de l'assistance volontaire dos malades et des blessés. Les bases mêmes de son organisation ont été établies en vue de cette mission. Peu à peu, à la

1020 En cas de guerre, cela changerait. Dans l'intérêt d'un bon emploi de tout le personnel et de tout le matériel de secours préparés par la Croix-Rouge, ces ressources devraient passer des mains de ses comités dans celles des organes de l'armée. Avec notre système de milices, une grande partie des meilleurs éléments des comités des sociétés s'en va sous les drapeaux en cas de mobilisation ; il y aurait donc de graves inconvénients à employer les secours volontaires sous la direction de comités réduits. Chaque jour se produiraient des conflits avec les organes militaires et la direction des secours volontaires manquerait de l'autorité indispensable dans tout organisme militaire.

Il faut donc que l'utilisation des moyens de secours dont les secours volontaires disposent, se fasse directement par les organes de l'armée.

Il reste en revanche à la Croix-Rouge, en cas de guerre, l'importante mission de fournir et de compléter les ressources de ses organes mobilisés, tâche pour laquelle elle a toutes les qualités requises et qui lui donnera encore plus que suffisamment de travail.

IL Instruction du personnel sanitaire.

Introduction.

Ce n'est pas la première fois que la question du développement de l'assistance des malades occupe les autorités fédérales. Le Conseil fédéral s'est déjà prononcé à ce sujet dans son rapport du 23 novembre 1894 sur la subvention à allouer par la Confédération aux cours de cuisine, d'économie domestique, de domestiques et de gardes-malades (postulat du 28 mars 1893).

Contrairement à la proposition du Département militaire, il fut alors reconnu que la question de la subvention à allouer aux cours de gardss-malades n'était pas suffisamment éclaircie et serait mieux résolue en même temps que celle de l'assurance contre les maladies et les accidents. Les Chambres fédérales se sont ralliées à cette opinion, et dans l'arrêté fédéral du 20 décembre 1895 sur l'enseignement de l'économie domestique et l'instruction professionnelle à donner à la femme, eues ont refusé toute subvention aux cours de gardes-malades. Ainsi cette question, très importante pour la santé publique comme pour l'armée, n'a reçu aucuns solution. Le Département de l'Intérieur (division sanitaire) a déjà élaboré en 1895 un préavis détaillé sur la question des subsides à allouer par la Confédération aux cours de gardes-malades, préavis qui a été remis aux commissions des conseils. Cela nous mènerait trop loin de

1021 reproduire dans toute sa teneur ce préavis très détaillé. En voici la conclusion: II faudrait profiter de l'assurance fédérale contre les maladies et les accidents pour prendre en main l'instruction d'infirmiers et d'infirmières, en créant des établissements qui veilleraient aux soins matériels de l'existence du personnel sanitaire et mettraient ce personnel à même de se vouer entièrement aux malades, surtout aux malades pauvres.

L'idée émise dans ce préavis a été, on le sait, introduite dans le projet de loi sur l'assurance contre les maladies et les accidents, sous la forme de diverses prescriptions en faveur de l'assistance des malades et des samaritains ; mais le peuple l'a rejetée avec la loi.

Cependant, malgré divers échecs, au parlement comme devant le peuple, il n'en est pas moins nécessaire d'améliorer et de développer le service de santé.

Le besoin d'un bon service d'assistance se fait de plus en plus sentir, depuis que toujours davantage de personnes se rendent compte qu'à côté des soins médicaux que donne le médecin il y a d'autres facteurs d'égale valeur qui concourent à la guérison des maladies, comme l'hygiène, les influences morales et les mesures diététiques, etc. Le public sent qu'à côté du médecin il doit y avoir encore une instance qui s'occupe, en connaissance de cause, de certains détails dont le médecin ne peut pas s'occuper lui-même. On se rend compte que la véritable assistance du malade ne consiste pas seulement dans les soins mécaniques qu'on lui donne, «mais aussi dans le traitement pendant les 23 heures et trois quarts de la journée où le médecin n'est pas présent ». L'opinion unanime des médecins, les hôpitaux toujours plus fréquentés et les bons résultats qu'ils obtiennent sont encore la preuve de la préférence que l'on donne à un bon service public d'assistance sur l'assistance privée.

C'est ce que reconnaissent également les quelques personnes qui se réunissent en sociétés afin de s'assurer des soins convenables pour les jours de maladie. Cette opinion s'est aussi répandue dans les nombreuses communes et autres institutions qui ont organisé un personnel sanitaire spécial pour leurs malades.

Le besoin d'un personnel sanitaire plus nombreux et bien instruit a trouvé son expression dans la création d'institutions et écoles spéciales pour l'instruction d'infirmières, dont nous parlerons plus tard . en détail. Ce sont des institutions de cette nature qui ont fait le premier pas dans ce domaine,

1022 savoir: 1°. L'école suisse d'infirmières et hôpital de femmes a Zurich (fondation de la société d'utilité publique des femmes suisses) ; 2° la maison des soeurs de la Croix-Rouge à FlunternZurich. Ces daux institutions demandèrent, par requêtes des 22 juin et 4 octobre 1900, une subvention fédérale, qui leur fut refusée par l'arrêté du Conseil fédéral du 10 janvier 1902, pour des raisons fiscales. En avril 1902, l'école d'infirmières de Zurich adressa aux Chambres fédérales une pétition tendante à obtenir une subvention ; on ne pourra cependant discuter cette pétition que lorsque le présent projet sera liquidé.

Par suite de toutes ces circonstances, la situation s'est tellement modifiée ces dix dernières années que la question de la subvention à allouer à des cours d'infirmiero, ou, en termes plus généraux, la question de l'instruction du personnel sanitaire, revenue sur le tapis ensuite du postulat relatif au rapport de gestion de 1901, est maintenant complètement éclaircie.

lie service . de santé en Suisse.

En Suisse, comme partout ailleurs, ce sont avant tout les sociétés d'infirmiers se tenant sur un terrain purement religieux, telles que les diaconesses, les soeurs de charité, etc., qui soignent les malades par profession. Il serait trop long d'expliquer ici les causes pour lesquelles ces infirmières de profession, dont les excellents services sont très appréciés, ne peuvent, malgré tout, pas satisfaire à toutes les exigences. Il est positif que depuis longtemps le besoin d'un personnel sanitaire uxercé se fait tellement sentir que ces associations ne peuvent y suffire et qu'elles soufi'rent elles-mêmes, sous certains rapports, de cette situation.

Les premiers essais d'uue organisation du service de santé ont été faits sur le terrairi religieux. Les maisons de soeurs protestantes et catholiques se sont donné pour but d'instruire un personnel sanitaire, pour le fournir aux hôpitaux et aux particuliers. Ces communautés religieuses ont eu une influence particulièrement féconde sur tout le domaine sanitaire, et ont montré le chemin qui, à beaucoup d'égards, conduit au but.

Elles ont ainsi mérité, et à juste titre, la plus grande reconnaissance et tout médecin ou particulier impartial sera d'accord pour dire que les maisons de soeurs ont rendu et rendent encore à l'organisation sanitaire les plus précieux services.

Nous estimons cependant qu'il est de toute nécessité qu'à côté des maisons de soeurs on voie ae former d'autres institutions de ce genre, qui vivront avec elles en bonne intelligence et en une concurrence produisant d'heureux fruits. Par suite de la centralisation des institutions, l'aptitude des maisons de soeurs à

1023 rendre des services est restreinte et il arrive très souvent que les administrations des hôpitaux, les communes et les particuliers ayant besoin d'infirmières apprennent que les maisons principales ne sont pas en état de suffire à la demande.

Les maisons de diaconesses connaissent également très bien ce besoin et, dans chaque rapport annuel, elles se plaignent de ne pas être en état de rendre tous les services qu'elles voudraient, le recrutement n'étant pas assez abondant.

L'établissement de diaconesses de Neumünster s'exprimait, par exemple, dans son rapport de 1898/189S, de la façon suivante : « Nous sommes heureux de constater que, devant des besoins sans cesse augmentant et toujours plus sensibles, on cherche aussi, d'autre part, à remédier au manque de bonnes infirmières. En effet, à côté des maisons de soeurs actue'les, la société d'utilité publique des femmes suisses, dans son nouvel hôpital de femmes, ainsi que la société centrale suisse de la Croix-Rouge, à Berne, organisent des écoles d'infirmières et participent ainsi au noble concours philanthropique de notre époque. » Mais à côté des maisons de soenrs protestantes et catholiques, il y a encore dans notre pays une autre catégorie de gens qui exercent librement et individuellement la profession d'infirmiers, et c'est surtout dans les grands centres qu'on les rencontre. Ils se vouent plus spécialement aux soins à donner aux malades à domicile ; il arrive aussi que bien des hôpitaux, grands et petits, ne recrutent pas leur personnel dans les maisons de soeurs, pour l'une ou l'autre raison, et qu'ils engagent plutôt des infirmiers privés. Ces infirmiers sont aussi demandés de plus en plus par les communes et les sociétés. On peut cependant dire qu'en général les infirmiers et infirmières privés exercent surtout leur activité en soignant les malades à domicile, tandis que les associations religieuses se vouent principalement au service des hôpitaux.

On ne peut indiquer exactement le chiffre d'infirmiers et d'infirmières particuliers qui se trouvent en Suisse, mais il se monte en tout cas à 500, non compris le personnel des maisons d'aliénés et des maternités. Le recrutement se fait de façons très différentes; un certain nombre d'infirmiers et d'infirmières ont reçu une instruction sérieuse dans une école spéciale ou dans une maison de soeurs et volent maintenant ae leurs propres ailes ; d'autres viennent de l'étranger avec une instruction plus ou

1024 moins bonne, notamment de l'Allemagne, et beaucoup n'ont reçu aucune instruction professionnelle convenable et s'en sont passés lorsqu'il!? ont commencé à soigner les malades. Les connaissances professionnelles de ces 'gardes-malades particuliers, -- comme du reste celles des membres des associations religieuses, -- sont très inégales; à côté de gens très capables, on en rencontre qui ne savent pas grand' chose.

Il y a lieu de faire ressortir, à propos de l'instruction professionnelle, que le service sanitaire doit avant tout être appris pratiquement. Cela ne peut véritablement avoir lieu que dans les hôpitaux, où le grand nombre de malades et les fréquents changements de ceux-ci permettent d'apprendre à connaître en peu de temps toutes les différentes maladies et de faire ample moisson d'expériences et observations. Toute institution qui s'occupe de l'instruction du personnel sanitaire est donc tenue de se rattacher à un hôpital. D'autre part, il ne faut cependant pas méconnaître la valeur de l'enseignement théorique que donnent les médecins, car seul il permet à l'infirmier de comprendre ce qu'il a appris empiriquement et ce qu'il a observé au chevet du malade, ainsi que d'agir en connaissance de cause et avec réflexion. Dans ces conditions, ce ne sont que les personnes très intelligentes et très énergiques, et cela encore tout à fait exceptionnellement, qui peuvent apprendre à fond le service sanitaire par elles-mêmes, sans faire partie d'une corporation quelconque ; la grande majorité est obligée d'entrer dans une association qui dispose de ressources techniques (hôpitaux, médecins enseignants) comme en exige le développement continuel du service de santé.

Mais mémo une fois instruit, le personnel composé de particuliers manque de cohésion et n'a pas une organisation qui lui donne Tappai nécessaire, comme les associations religieuses le trouvent dans leurs maisons principales. Guidé par ces considérations, on a cherché, ces dernières années, à fonder une association fédérale des infirmiers et infirmières particuliers, dont le but général aurait été d'améliorer la situation de ce personnel, et la tâche spéciale d'organiser convenablement le placement et l'assurance.

EtablisseOn trouve actuellement en Suisse les associations et instents suisses titutions suivantes qui s'occupent de l'instruction du personnel pour 'instruction sanitaire : au persona 9l sanitaire.

1. L'établissement de diaconesses de Riehen, fondé en 1852, comptait, à la fin de 1897, 218 diaconesses, 66 novices et 17

1025 ·soeurs apprenties; il s'étend dans 14 cantons et dispose de 73 stations à l'étranger. Il possède à Riehen, près de Baie, un grand hôpital, où a lieu l'instruction du personnel.

2. L'établissement de diaconesses de St-Loup, près La Sarraz, comptait, en 1896, 93 soeurs, exerçant leur activité dans :28 stations de la Suisse française et dans 5 de l'étranger.

3. L'hôpital et maison de diaconesses de Neumünster, fondé en 1857, comptait, à la fin de 1899, 168 soeurs ordonnées, 39 novices et 20 soeurs apprenties. De ce nombre, 151 soeurs étaient occupées dans 63 stations exclusivement suisses; les autres se livraient au service de gardes-malades chez les particuliers.

4. Nous n'avons pas reçu de renseignements sur la mai·son des diaconesses de Berne, qui, de toutes les maisons principales protestantes suisses, doit disposer du personnel le plus nombreux.

5. Nous n'avons pas non plus de détails sur le seul établissement suisse qui instruise un personnel sanitaire masculin, la maison des infirmiers de Baie. Cette institution ne doit avoir qu'un petit nombre d'infirmiers, à cause des difficultés que l'on a à les former.

6. La congrégation des soeurs de la Sainte Croix, à Ingenbohl, dispose d'un grand nombre d'infirmières, tandis qu'à notre connaissance, les soeurs catholiques de Mensingen et d'Hans ne fournissent qu'un faible contingent au service des malades.

Nous n'avons pas non plus obtenu des données bien précises sur ces deux établissements.

7. La maison des soeurs de la Croix-Bouge, à FlunternZurich, existe depuis 1892. Cette institution, qui n'a aucune relation avec la société centrale suisse de la Croix-Rouge, disposait au nouvel-an de 93 soeurs, exerçant leur activité dans le canton de Zurich et dans les autres cantons ; l'établissement a été agrandi en 1899, par la construction d'une annexe pouvant contenir 50 lits.

A côté de ces associations basées sur le type des maisons principales, et qui exigent de leurs membres un renoncement plus ou moins complet à leur personnalité, on trouve encore les institutions ci-après, organisées comme une école ou comme un séminaire, et qui ne limitent en aucune manière la liberté Feuille fédérale suisse. Année LIV. Vol. V.

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1026 personnelle de leurs élèves, une fois leur intruction professionnelle reçue : 8. La Source, école normale évangélique de gardes-malades indépendantes, à Lausanne, a été fondée en 1059 sur l'initiative du comte et de la comtesse de Gasparin. L'établissement possède un bâtiment à Lausanne et reçoit chaque année 10 élèves internes et un certain nombre d'externes, qui suivent pendant 8 mois des cours théoriques à l'école et ont en même temps l'occasion de s'exercer dans la pratique, en donnant des soins aux malades pauvres de la ville, ainsi qu'à l'hôpital privé de Beaulieu. Après leur sortie, les gardes-malades de La Source sont entièrement indépendantes de l'établissement au point de vue financier.

9. L'école d'infirmières de la Croix-Bouge, à Berne, a été fondée en 1899 par la société de la Croix-Rouge et en reçoit annuellement des subsides. Elle se rattache à un grand hôpital privé et instruit chaque année 12 élèves régulières et un nombre restreint d'externes. Les cours théoriques et pratiques durent un an et demi. A la fin du cours les élèves s'en vont, reçoivent un diplôme, et il est laissé à leur libre choix de se vouer soit aux soins des malades dans les hôpitaux soit au service de gardes-malades dans les communes ou chez les particuliers.

10. L'école suisse d'infirmières et hôpital des femmes, à Zurich. (Fondation de la société d'utilité publique des femmes suisses.)

Elle a pour but : a. d'instruire des jeunes femmes et des°jeunes filles dans le service d'infirmières et de releveuses pour les particuliers, les hôpitaux et les communes; b. d'instituer des cours de répétition pour infirmières ; c. d'organiser une association suisse d'infirmières et de releveuses avec une assurance sur la rieillesse et la maladie.

Pour soigner les malades, on a ouvert un hôpital de femmes avec 50 lits pour le moment; on compte aller plus tard jusqu'à 100. L'inauguration a eu lieu en mars 1901.

Personnel Le 27 août 1900, le Département de l'Intérieur (section sanitaire et sanitaire) s'exprimait de la manière suivante sur la question salubrità publique. de savoir quel intérêt a le service de la salubrité publique au développement de l'instruction des infirmières, question formulée

1027 lors de la demande de subvention en faveu r de l'école suisse d'infirmières, à Zurich : « Un service sanitaire convenable est de toute importance pour combattre les épidémies dangereuses et les maladies contagieuses. Sans cela, toutes les autres mesures (isolement, désinfection) sont difficilement exécutables, pour ne pas dire impossibles ; tel serait le cas. par exemple, de la désinfection pendant la maladie, qui est des plus importantes. L'efficacité de l'isolement est même considérablement augmentée si l'on a affaire à une infirmière consciencieuse et connaissant son métier. En outre, les chances de guérison pour ceux qui sont gravement malades sont infiniment plus sérieuses quand les soins sont donnés par une infirmière parfaitement bien stylée. En temps d'épidémie, notre pays ne manquerait pas de médecins capables, mais il serait à craindre qu'on ne disposât pas d'hôpitaux d'isolement et d'installations de désinfection oi-ganisés comme il le faudrait. Malgré tous nos efforts dans ce domaine depuis onze à douze ans, il serait très difficile, si une grande épidémie venait à se déclarer, de se procurer le personnel sanitaire nécessaire.

Les établissements dont on dispose pour l'instruction des infirmières suffisent à, peine aux besoins des hôpitaux du pays.

Il reste donc aux communes et aux particuliers beaucoup trop 4 peu d'infirmières capables. Si ce défaut se fait déjà sentir en .temps ordinaire, il n'en sera que plus sensible en temps d'épidémie. Quels que soient les efforts que l'on fait (et la reconnaissance qu'ils méritent) pour répandre toujours davantage par l'instruction, par des cours et des conférences, les principes du service de santé, cela ne diminue en aucune manière le besoin d'infirmières bien instruites dans la théorie et la pratique ; cela l'augmente plutôt. Il en est résulté qu'une quantité de personnes du sexe ont embrassé cette profession sans posséder l'instruction nécessaire. Il est bien évident que seulement quelques-unes d'entre elles peuvent répondre de toutes façons aux exigences des médecins et du public, si bien que, dans les milieux féminins comme dans les milieux médicaux, on a fréquemment discuté le moyen de remédier à cet inconvénient. On est arrivé partout à cette conclusion qu'il fallait pourvoir d'un côté à une meilleure instruction des infirmières,
d'un autre côté une meilleure organisation.

U nous faut certainement approuver ces efforts et les appuyer. Ce faisant, on améliorera non seulement le service de santé dans les hôpitaux, les asiles et les maisons privées ; mais,

1028 avec le temps, en cas de dangereuses épidémies, contre lesquelles aucun pays n'est protégé, nous aurons un nombre suffisant1 d'infirmières sérieuses et. capables. Cela nous permettra de lutter avec suc ses contre toute épidémie, tout en profitant des avantages que nous procurent les ressources ordinaires (hôpitaux d'isolement, installations et colonnes de désinfection).

Nous croyons qu'il y a lieu de répondre affirmativement à la question de savoir si les établissements qui enseignent la profession de garde-malades doivent être subventionnés par la Confédération. S'il y a une profession féminine qui mérite d'être appuyée de toute manière, c'est évidemment en première ligne celle de garde-malades, si importante pour la santé de tous, et qui, comme pas une autre, demande de celles qui l'exercent de l'abnégation et du renoncement, sans parler des fatigues physiques et morales qu'elle occasionne. » Personnel Déjà dans la première partie du présent message où il est lanitaire et service de question du service d'hôpital, nous avons prouvé que le service santé de de santé militaire officiel est loin de posséder un personnel l'armée.

suffisant pour le service de la troisième ligne de secours, et que spécialement pour le service de santé dans les hôpitaux d'armée à organiser en cas de guerre, il faudra plus de 1000 personnes en sus du personnel normal des hôpitaux civils. Le recrutement de ce personnel sanitaire pour les hôpitaux militaires sera d'autant plus facile que le service de ' santé à l'intérieur du pays sera bien organisé en temps de.

paix, et qu'il y aura plus de gens qui se voueront déjà alors au service des malades, soit pour leur propre compte, soit pour les communes. Ce recrutement sera, en outre, d'autant plus simplifié qu'il y aura plus d'établissements pourvus, en temps de paix déjà, du matériel technique nécessaire, pouvant enseigner le service de santé et obligeant leurs élèves à servir dans les hôpitaux d'armée en cas de guerre.

L'école d'infirmières de la Croix-Rouge, à Berne, est, jusqu'à maintenant, le seul établissement qui ait entrepris de former un personnel semitaire destiné spécialement à venir en aide à l'armée en cas de guerre. Les expériences faites jusqu'à aujourd'hui nous donnent le droit d'avoir les plus belles espérances pour l'avenir ; mais on tomberait cependant
complètement dans l'erreur si l'on s'imaginait que l'école d'infirmiers de la CroixRouge serait, maintenant ou bientôt, en état de subvenir aux besoins de l'armée en fait de personnel sanitaire. Les finances de la Croix-Rouge permettent à peine aujourd'hui d'instruire

1029 chaque année 12 à 15 élèves; chaque élève, abstraction faite de ce qu'elle paie, coûtant à la Croix-Rouge 500 francs, cela fait une dépense de 60 n 0 francs par an, soit les 3/5 du revenu annuel de la société. Malgré cette dépense relativement considérable, le nombre des personnes que l'on instruit ne croît que lentement. Dans ses 3 années d'existence, l'école a instruit 35 élèves ordinaires; 17 ont terminé leur instruction, c'est-àdire ont suivi le cours réglementaire de 18 mois et reçu le diplôme ; les 18 autres suivent encore les cours. Au bout de 10 ans on ne disposerait donc que de 1-0 infirmiers et, au bout de 20 ans, de 210, en admettant qu'il ne se produise pas d'autres lacunes par la mort ou d'autres circonstances. Mais comme ces lacunes sont inévitables, on peut dire que, d'après les expériences faites, la Croix-Rouge, avec ses ressources actuelles, pourra disposer dans 20 ans de tout au plus 200 infirmières convenablement instruites, chiffre bien faible pour assurer le service si important des hôpitaux en temps de guerre.

Il est donc des plus désirables, au point de vue militaire, d'augmenter le personnel sanitaire et son aptitude à rendre des services. On y arrivera si la-Confédération veut allouer une subvention à la Croix-Rouge et aux autres institutions qui s'engagent à venir en aide au service de santé militaire en temps de guerre ; cela leur permettrait d'instruire un plus grand nombre d'élèves.

Les démarches entreprises dans ce sens dont nous avons parlé pins liant, et spécialement les demandes de subvention des deux institutions zurichoises, prouvent suffisamment qu'une subvention de Ja part de la Confédération s'impose ; car il viendra bientôt d'autres demandes, dès qu'on pourra légalement leur donner satisfaction.

Nous avons prouvé par ce qui précède : 1° que le service de santé actuel de l'armée suisse ne pourrait en temps de guerre suffire qu'-aux besoins des premières lignes de secours, et qu'il ne disposerait pas d'un personnel et d'un matériel suffisants pour les lignes d'arrière, c'est-à-dire pour des services qui exercent une grande influence sur la mobilité de l'armée : le service des étapes et le service des hôpitaux ; 2° que cette sérieuse lacune ne peut être comblée qu'en ·faisant appel aux secours volontaires d'une façon toute particulière ;

.Résumé.

1030 3° que les secours volontaires, sous la direction de la société centrale de la Croix-Rouge, doivent être incorporés dans les organes du service de santé de l'armée; 4° que les secours volontaires ne peuvent, remplir les prestations qui devraient leur incomber déjà en temps de paix, daas l'intérêt de l'armée, que s'ils obtiennent de la Confédération un généreux appui moral et financier; 5° qu'il est très désirable que l'on instruise un personnel sanitaire toujours plus nombreux, dans l'intérêt de l'armée et de la salubrité publique.

Nous arrivons ainsi à la conclusion qu'il doit être donné suite aux propositions contenues dans les postulats cités au début du présent message, en adoptant un arrêté fédéral dont nous donnons ci-après un projet.

Montant dea »ubventiona.

Au vu des explications fournies plus haut, nous ne croyons pas qu'il soit nécessaire d'examiner encore en détail, article par article, le projet d'arrêté fédéral; nous voudrions seulement dire encore deux mots sur le montant des subventions prévues à l'article 3.

20,000 francs sont prévus à la lettre a pour l'instruction et la préparation du personnel sanitaire. Cette somme suffira probablement pour plusieurs années, car on rencontre tant de difficultés dans l'instruction de ce personnel qu'il ne faut pas s'attendre à un accroissement rapide des institutions subventionnées. A l'heure'qu'il est, deux demandes de subventions sont déjà déposées, et l'on en prévoit encore deux d'autres institutions. Il s'agira de voir si d'autres demandes encore ne seront pas prochainement formulées et il semble donc prudent de prévoir pour plus tard une augmentation du crédit; c'est ce qui est fait à la dernière phrase de l'article 3.

On prévoit aux lettres b, c et d un crédit de 25,000 francs, dont la répartition peut être faite comme suit : Pour la formation du service des transports fr. 10,000.

On comprend par là les « colonnes de secours » prévues pour seconder le service de santé des étapes. Les frais de l'équipement d'une de ces colonnes et l'instruction du personnel volontaire qui en fait partie sont estimés à 5000 francs. On pourrait donc former avec ce crédit chaque année deux nouvelles colonnes. Il serait désirable de pouvoir en créer 3 par arrondissement territorial, soit en tout 27.

1031

Pour les objets nécessaires aux soins des malades fr. 10,000.

Cette somme suffira à fournir le matériel pour 300 malades, sans tenir compte de ce qu'on peut obtenir dans les dépôts fédéraux ou par réquisition.

Pour l'instruction préparatoire du personnel sanitaire auxiliaire fr. 2,500.

Rentrent dans cet article les frais du matériel d'instruction et les frais des cours de samaritains, ainsi que l'enseignement des soins à domicile ; ces cours devront fournir une grande partie du personnel sanitaire auxiliaire pour les hôpitaux de campagne.

Pour la propagande

fr. 2,500.

Cette somme servirait avant tout à publier en allemand et en français, à prix modéré, un organe central pour le service des secours volontaires.

En regard de tout ce dont a besoin, ces chiffres sont très modestes et il faudra bien des années pour se procurer toutes les provisions nécessaires, même en admettant que la Croix-Rouge puisse bientôt faire chaque année des dépenses aussi fortes, ou même plus fortes encore, que celles que l'arrêté fédéral prévoit à la charge de la Confédération.

En adoptant le projet d'arrêté ci-dessous, on répondrait à la pétition de la société centrale suisse de la Croix-Rouge, du 17 avril 1902, et cette pétition serait ainsi liquidée.

Veuillez agréer, monsieur le président et messieurs, les assurances de notre haute considération.

Berne, le 4 décembre 1902.

Au nom du Conseil fédéral suisse; Le président de la Confédération, ZEMP.

Le chancelier de la Confédération, RlNGIER.

1032 (Projet.)

Arrêté fédéral concernant

les sociétés de secours volontaires aux malades et blessés en temps de guerre.

L'ASSEMBLÉE FÉDÉEALB]

de la C O N F É D É R A T I O N SUISSE, Vu le message du Conseil fédéral du 4 décembre 1902, arrête : Art. 1er. La Confédération, dans le but de perfectionner l'organisation de la défense nationale, subventionne dans la mesure prévue par les articles suivants les sociétés et établissements, existant déjà ou à fonder dans la suite isur le territoire de la Confédération, qui se vouent à l'oeuvre des secours volontaires aux malades ou blessés et forment un personnel d'ambulance conformément aux prescriptions fédérales qui seront publiées sur la matière.

Art. 2. La Confédération reconnaît la société centrale suisse de la Croix-Rouge comme unique représentant de toutes les sociétés et de tous les établissements à subventionner à teneur de l'article 1er.

Art. 3. Le Conseil fédéral est autorisé à allouer aux sociétés et établissements désignés à l'article 1er des subventions annuelles :

1033 a. pour instruire et tenir prêt un personnel d'ambulanciers et d'ambulancières de profession; 6. pour instruire le personnel et fournir et tenir prêt le matériel qu'il faudra pour les services des transports, hôpitaux, collectes et magasins; c. pour l'instruction préparatoire en temps de paix (cours de samaritains, cours de soins à domicile et d'hygiène, exercices en campagne) ; d. pour la propagande (journal spécial, conférences, prix de concours).

Une somme de 20,000 francs sera inscrite dans chaque budget annuel en faveur du but prévu à la lettre a et une autre de 25,000 francs pour les buts dont il est parlé aux lettres o, e et d. Ces deux crédits pourront être augmentés si le besoin s'en fait sentir.

Art. 4. Le Conseil fédéral fixera les conditions des subventions affectées aux buts indiqués à l'article 3, et il dressera chaque année le plan de répartition des sommes prévues au budget.

Art. 5. Le Conseil fédéral est chargé, conformément à la loi fédérale du 17 juin 1874 concernant les votations populaires sur les lois et arrêtés fédéraux, de publier le présent arrêté et de fixer l'époque où il entrera en vigueur.

Schweizerisches Bundesarchiv, Digitale Amtsdruckschriften Archives fédérales suisses, Publications officielles numérisées Archivio federale svizzero, Pubblicazioni ufficiali digitali

Message du Conseil fédéral à l'Assemblée fédérale concernant les sociétés de secours volontaires aux malades et blessés en temps de guerre. (Du 4 décembre 1902.)

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53

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