15.072 Message relatif à l'article constitutionnel concernant un système incitatif en matière climatique et énergétique du 28 octobre 2015

Messieurs les Présidents, Mesdames, Messieurs, Par le présent message, nous vous soumettons un projet d'article constitutionnel concernant un système incitatif en matière climatique et énergétique, en vous priant de l'adopter.

Nous vous prions d'agréer, Messieurs les Présidents, Mesdames, Messieurs, l'assurance de notre haute considération.

28 octobre 2015

Au nom du Conseil fédéral suisse: La présidente de la Confédération, Simonetta Sommaruga La chancelière de la Confédération, Corina Casanova

2015-0405

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Condensé Dans le cadre de la politique climatique et énergétique, la transition d'un système d'encouragement fondé sur les subventions vers un système d'incitation fondé sur la fiscalité doit être opérée rigoureusement à partir de 2021. Le Conseil fédéral propose d'inscrire dans la Constitution cette décision de principe afin de conférer à celle-ci la nécessaire légitimité démocratique. La législation concernant le climat et l'énergie précisera dans un second temps les modalités du système d'incitation. Reposant sur des taxes et sur leur effet incitatif, ce système permettra d'atteindre les objectifs climatiques et énergétiques de manière plus efficace et plus avantageuse qu'avec des mesures d'encouragement basées sur des subventions et des dispositions réglementaires.

Contexte Suite à la catastrophe nucléaire de Fukushima en 2011, le Conseil fédéral et le Parlement ont décidé d'abandonner graduellement l'énergie nucléaire. Afin de créer le cadre approprié pour cette refonte de la politique énergétique suisse, le Conseil fédéral a soumis en septembre 2013 le message sur la Stratégie énergétique 2050 au Parlement. La Stratégie énergétique 2050 vise à réduire la consommation d'électricité et d'autres énergies finales, à accroître la part des énergies renouvelables et à diminuer les émissions de CO2 dues à la consommation d'énergie.

L'approvisionnement énergétique de la Suisse sera transformé progressivement. La première étape comprend un projet législatif global, dont le message a été adopté par le Conseil fédéral en septembre 2013 et est examiné par le Parlement. Celui-ci comprend un train de mesures visant à développer les instruments existants afin d'augmenter l'efficacité énergétique et de promouvoir les énergies renouvelables.

Ce train de mesures permettra de renforcer, entre autres, les mesures d'encouragement dans le domaine des bâtiments et un système amélioré de rétribution à prix coûtant du courant injecté dont le but est de stimuler la production nationale de courant à partir d'énergies renouvelables. Au cours d'une prochaine étape débutant en 2021, le Conseil fédéral envisage de remplacer l'actuel système d'encouragement fondé notamment sur les subventions par un système d'incitation fondé principalement sur une taxe climatique et une taxe sur l'électricité. En mars 2015, il a donc
chargé le Département fédéral des finances (DFF) et le Département fédéral de l'environnement, des transports, de l'énergie et de la communication (DETEC) d'organiser une consultation relative à un système d'incitation fiscale en matière climatique et énergétique, et de lui soumettre au quatrième trimestre 2015 un rapport sur les résultats avec un projet de message.

Contenu du projet: inscription du système d'incitation dans la Constitution L'article constitutionnel énonce que la Confédération peut percevoir une taxe climatique sur les combustibles et les carburants ainsi qu'une taxe sur l'électricité. Ces taxes fourniront une contribution essentielle à la réduction de la consommation d'énergie fossile et donc des émissions de gaz à effet de serre, et plus généralement à une utilisation économe et efficiente de l'énergie. Associées à d'autres mesures,

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elles permettront d'atteindre les objectifs climatiques et énergétiques de la Confédération, en particulier une sortie du nucléaire visant à ménager l'environnement.

Lors de la conception du système d'incitation fiscale, il faudra en outre tenir compte des évolutions intervenues au niveau international, et notamment au sein de l'Union européenne. La taxe climatique et la taxe sur l'électricité remplaceront l'actuelle taxe sur le CO2 grevant les combustibles (ainsi que les affectations partielles de cette taxe) et le supplément sur les coûts de transport des réseaux à haute tension, qui finance la promotion des énergies renouvelables. Des allégements sont prévus pour les entreprises dont l'exploitation ou la production impliquent une très forte intensité énergétique ou d'émissions de gaz à effet de serre. Après une période transitoire, le produit de la taxe climatique et de la taxe sur l'électricité sera intégralement redistribué aux ménages et aux entreprises, dont les charges n'augmenteront pas dans l'ensemble. Les acteurs consommant peu d'énergie seront récompensés, car ils recevront davantage que ce qu'ils paient pour ces taxes.

Pendant une période transitoire, il sera possible d'affecter pour une durée limitée une partie du produit de la taxe climatique et de la taxe sur l'électricité aux mesures d'encouragement actuelles. Les subventions financées par les affectations partielles de l'actuelle taxe sur le CO2 seront progressivement réduites, jusqu'à leur suppression complète dans les cinq ans suivant l'introduction de la taxe climatique. Cela concerne principalement le Programme Bâtiments et les versements au fonds de technologie. Les mesures d'encouragement financées par le supplément actuellement perçu sur le réseau (notamment la rétribution à prix coûtant du courant injecté) seront également réduites progressivement jusqu'à leur suppression complète dans les dix ans suivant l'introduction de la taxe sur l'électricité. En inscrivant dans la Constitution la redistribution intégrale des produits des taxes incitatives, on s'assure qu'aucune nouvelle affectation partielle ne sera possible sans révision de la Constitution.

Perspectives: possibilités de mise en oeuvre L'article constitutionnel fixe le cadre du système d'incitation. Le présent rapport expose à des fins d'illustration plusieurs
exemples de mise en oeuvre de ce système.

Les modalités de la taxe climatique et de la taxe sur l'électricité seront définies ultérieurement, dans le cadre de la législation correspondante. Selon ces modalités ­ notamment en ce qui concerne le montant des taxes ­, d'autres instruments plus ou moins directifs seront nécessaires pour atteindre les objectifs visés. Toutefois, les incitations financières de telles taxes sont généralement plus efficientes que des réglementations ou des mesures d'encouragement. Dans tous les cas, les taxes incitatives et les mesures complémentaires devront être soigneusement coordonnées, afin d'éviter autant que possible tout chevauchement et toute interaction qui occasionneraient des coûts supplémentaires pour l'économie.

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En principe, il serait possible de percevoir des taxes climatiques comme l'actuelle taxe sur le CO2 grevant les combustibles en s'appuyant sur l'art. 74 de la Constitution, ainsi que de reconduire le supplément sur les coûts de transport sans nouvelle base constitutionnelle. La question de savoir si les produits de ces taxes relevant de la compétence de la Confédération peuvent être partiellement affectés a toutefois fait l'objet de nombreux débats. La révision proposée de la Constitution vise donc à fixer un cadre clair pour passer d'un système d'encouragement à un système d'incitation fiscale, dans un souci de sécurité du droit, et à conférer la nécessaire légitimité démocratique à ce nouveau système. A cet égard, elle limite dans le temps les affectations partielles existantes et exclut d'en créer de nouvelles.

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Table des matières Condensé

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Grandes lignes du projet 1.1 Contexte 1.1.1 Stratégie énergétique 2050 1.1.2 Politique climatique 1.1.3 Politique climatique et énergétique après 2020: passage d'un système d'encouragement fondé sur les subventions à un système d'incitation fondé sur la fiscalité 1.2 Nouvelle réglementation proposée 1.2.1 Nouvel article constitutionnel 1.2.2 Nécessité de légiférer au niveau constitutionnel 1.3 Appréciation de la solution retenue 1.3.1 Pourquoi modifier le système dans le domaine de l'énergie et du climat?

1.3.2 Avant-projet 1.3.3 Résultats de la consultation 1.3.4 Refonte de l'avant-projet 1.4 Comparaison avec le droit étranger, notamment européen 1.5 Possibilités de mise en oeuvre 2021 à 2030 1.5.1 Principaux éléments 1.5.2 Base de calcul et montant des taxes 1.5.3 Conception ouverte de la taxe sur l'électricité 1.5.4 Suppression progressive des mesures d'encouragement 1.5.5 Entreprises à forte intensité énergétique et à fortes émissions de gaz à effet de serre 1.5.6 Utilisation du produit de la taxe climatique et de la taxe sur l'électricité

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Commentaire des dispositions

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Conséquences 3.1 Conséquences économiques 3.2 Conséquences pour la Confédération 3.2.1 Impacts indirects sur d'autres impôts 3.2.2 Conséquences sur le personnel 3.2.3 Coûts liés aux risques nucléaire et climatique 3.3 Conséquences pour les cantons et les communes, ainsi que pour les villes, les agglomérations et les régions de montagne 3.3.1 Economie des cantons 3.3.2 Impacts indirects sur les finances publiques des cantons 3.4 Conséquences environnementales 3.5 Conséquences sanitaires et sociales

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Relations avec le programme de la législature et les stratégies nationales du Conseil fédéral 4.1 Relation avec le programme de la législature 4.2 Relation avec la stratégie pour le développement durable 4.3 Relation avec Economie verte

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Aspects juridiques 5.1 Constitutionnalité 5.2 Compatibilité avec les engagements internationaux de la Suisse 5.3 Forme de l'acte à adopter 5.4 Frein aux dépenses 5.5 Respect des principes de la loi sur les subventions

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Liste des abréviations

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Bibliographie

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Arrêté fédéral sur un article constitutionnel concernant la taxe climatique et la taxe sur l'électricité (Projet)

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Message 1

Grandes lignes du projet

1.1

Contexte

1.1.1

Stratégie énergétique 2050

Le Conseil fédéral poursuit depuis un certain temps l'objectif d'améliorer l'efficacité énergétique, d'accroître la part des énergies renouvelables et de réduire les émissions de gaz à effet de serre. La catastrophe nucléaire de Fukushima en 2011 a renforcé cette orientation. La même année, le Conseil fédéral et le Parlement ont adopté une décision de principe en vue d'une sortie progressive de l'énergie nucléaire. Cette décision nécessite une transformation progressive du système énergétique suisse. Dans ce cadre, il faut tenir compte du fait qu'actuellement, 80 % des ressources énergétiques consommées en Suisse proviennent de l'étranger (pétrole, gaz naturel, charbon et combustible nucléaire). La combustion et l'utilisation d'énergies et de carburants fossiles occasionnent des nuisances environnementales considérables, dont les coûts pour la collectivité ne sont que partiellement couverts.

Cela envoie des signaux de prix erronés et engendre une consommation énergétique trop élevée. En raison des profonds changements internationaux et de la décision d'abandonner graduellement l'énergie nucléaire, le Conseil fédéral a élaboré la Stratégie énergétique 2050 (SE 2050), qui prévoit une réorganisation de ce système par étapes.

La première étape de la SE 2050 comprend un paquet de mesures présenté dans un projet législatif global élaboré par le Conseil fédéral et actuellement examiné par le Parlement (message du 4 septembre 2013 relatif au premier paquet de mesures de la SE 20501).

Avec ce paquet de mesures, le Conseil fédéral veut réduire la consommation moyenne d'énergie finale par personne et par année de 43 % d'ici à 2035 (et de 16 % d'ici à 2020) par rapport à l'année de référence 2000. Pour la consommation d'électricité, une réduction de 13 % est visée d'ici à 2035 (et de 3 % d'ici à 2020).

De plus, la production d'électricité à partir d'énergies renouvelables devra progresser. Selon la proposition du Conseil fédéral, la production annuelle moyenne d'électricité issue de nouvelles énergies renouvelables devra s'inscrire à 4,4 térawattheures (TWh) en 2020 et, si possible, à 14,5 TWh en 2035, ce qui représentera près de 26 % de la consommation électrique estimée en 2035.

Les mesures de la SE 2050 englobent notamment l'exploitation des potentiels d'efficacité énergétique que la Suisse peut d'ores
et déjà réaliser avec les technologies existantes ou en développement ou avec des instruments éprouvés (par ex.

conventions d'objectifs avec l'industrie, labels et prescriptions). De plus, les mesures d'encouragement en vigueur pour développer de nouvelles énergies renouvelables et pour assainir le parc immobilier sur le plan énergétique seront renforcées: développement de la rétribution du courant injecté et de son orientation sur le marché grâce à une commercialisation directe, aides à l'investissement (contributions

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FF 2013 6771

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uniques pour les petites installations photovoltaïques et contributions à d'autres installations), réglementation de la consommation propre et appels d'offres publics.

Dans une deuxième phase de la Stratégie énergétique, une transition d'un système de subventions à un système d'incitation doit cependant s'opérer. La disposition constitutionnelle présentée dans ce message constitue les fondements de cette phase.

1.1.2

Politique climatique

Le changement climatique a un impact sur tous les écosystèmes, tels que le cycle de l'eau, les sols, l'air et la biodiversité. Depuis les premières mesures réalisées en 1864, la température annuelle moyenne a augmenté d'environ 1,7 °C en Suisse.

Certains effets y sont déjà visibles: fonte des glaciers, dégel du pergélisol et modification de la végétation. De même, la fréquence des précipitations abondantes, provoquant des inondations et des glissements de terrain, risque d'augmenter à long terme. Des efforts sont réalisés au niveau national et international pour réduire les émissions des gaz à effet de serre, pour limiter l'impact du changement climatique et s'y adapter.

Dans le cadre du protocole de Kyoto, la Suisse s'est engagée sur la scène internationale à baisser ses émissions de gaz à effet de serre de 8 % en moyenne entre 2008 et 2012 par rapport à 1990. Cet engagement s'est traduit au niveau national par un objectif de réduction des émissions de CO2 dues à l'énergie de 10 % par rapport à 1990, qui est inscrit dans la loi du 23 décembre 2011 sur le CO22. Sur le plan international, la Suisse a atteint l'objectif qu'elle s'était fixé dans le cadre du protocole de Kyoto en tenant compte des diminutions réalisées dans le pays, des certificats de réduction des émissions réalisées à l'étranger et de l'effet de puits de CO2 des forêts suisses, conformément aux règles de comptabilisation convenues par la communauté internationale.

Bien que l'objectif de la loi sur le CO2 ait également été réalisé, les émissions n'ont pas reculé de la valeur souhaitée dans tous les secteurs. En particulier, l'objectif partiel concernant les carburants qui est inscrit dans cette loi est loin d'avoir été atteint: une réduction d'au moins 8 % des émissions correspondantes était visée; dans les faits, celles-ci ont progressé de 13 % entre 1990 et 2012.

La réalisation de l'objectif de Kyoto marque une première étape pour la Suisse.

D'autres réductions significatives des émissions sont toutefois encore nécessaires au niveau tant national qu'international pour pouvoir limiter la hausse de la température mondiale à une moyenne de 2 °C d'ici à la fin du siècle. Un certain nombre de pays industrialisés ­ dont la Suisse et les États de l'Union européenne ­ se sont engagés à poursuivre le Protocole de Kyoto avec des objectifs
quantitatifs de réduction pour 2020. Les Chambres fédérales ont approuvé la ratification le 20 mars 20153, et le délai référendaire a expiré le 9 juillet 2015 sans être utilisé. Avec cette ratification, l'objectif suisse de réduire les gaz à effet de serre d'ici 2020 d'au moins 20 % par rapport à 1990 est devenu contraignant en regard du droit international.

Au niveau national, la loi sur le CO2 depuis le 1er janvier 2013 exige d'ici à 2020 une réduction d'au moins 20 % par rapport à 1990 des gaz à effet de serre émis en 2 3

RS 641.71 FF 2015 2571

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Suisse. Ainsi, cette loi met l'accent sur la mise en oeuvre de mesures en Suisse ­ les certificats de réduction des émissions à l'étranger sont toutefois pris en compte ponctuellement et de manière limitée pour certains acteurs. La réalisation de cet objectif passe d'abord par des mesures réglementaires et des instruments axés sur le marché, tels que la taxe sur le CO2 prélevée sur les combustibles et ses affectations spécifiques (Programme Bâtiments et fonds de technologie), le système d'échange de quotas d'émission et les engagements de réduction pris par les entreprises exemptées de la taxe sur le CO2. Les mesures réglementaires englobent par exemple des prescriptions concernant les émissions de CO2 des nouvelles voitures de tourisme ou une obligation de compensation pour les importateurs de carburants fossiles.

Aperçu de la politique climatique après 2020 Lors de la conférence internationale sur le climat à Paris à fin 2015, un accord sur le climat, nouveau et complet, sera adopté. Il est prévu qu'à partir de 2020 tous les pays devraient contribuer à réduire les émissions de gaz à effet de serre.

A l'avenir également, la politique climatique suisse sera fortement marquée par les objectifs de la politique climatique internationale et par les connaissances scientifiques les plus récentes. Le Conseil fédéral a annoncé au niveau international qu'il entendait réduire d'ici à 2030 les émissions de gaz à effet de serre d'au moins 50 % par rapport à 19904. Cet objectif global devrait être atteint par une réduction d'au moins 30 % des émissions de gaz à effet de serre en Suisse, le reste pouvant être réalisé grâce à des mesures prises à l'étranger.

Par décision du 21 mai 2014, le Conseil fédéral a défini les axes de sa future politique climatique: il mise sur la continuité des mesures en place, tout en renforçant de façon ciblée les instruments ayant fait leurs preuves. Ainsi, aussi après 2020, la taxe sur le CO2 grevant les combustibles restera l'instrument-clé de la politique climatique. Elle sera maintenue avec son mécanisme bien rodé: le montant de la taxe augmente ou diminue en fonction de l'évolution des émissions de CO2 dues aux combustibles. Les entreprises à fortes émissions de gaz à effet de serre, qui subiraient donc de très lourdes charges, pourront continuer d'être exemptées de la taxe
si elles s'engagent vis-à-vis de la Confédération à réduire leurs émissions de CO2.

La loi sur le CO2 exige que le Conseil fédéral soumette en temps voulu à l'Assemblée fédérale des propositions pour les objectifs postérieurs à 2020. Afin de garantir une poursuite ininterrompue de la politique climatique, les travaux sur la législation climatique post-2020 seront poursuivis indépendamment du processus politique en vue de l'adoption du système d'incitation. La conception de la politique climatique post-2020 devra toutefois être compatible avec les travaux pour le système d'incitation.

Les autres instruments de la loi sur le CO2 en vigueur seront également maintenus après 2020. A commencer par le système d'échange de quotas d'émission eurocompatible, par l'obligation de compensation faite aux importateurs de carburants fossiles, ainsi que par les prescriptions visant à réduire les émissions de gaz à effet de serre des véhicules et des mesures techniques dans les bâtiments notamment.

L'actuel Programme Bâtiments de la Confédération et des cantons, financé par une 4

«Switzerland's intended nationally determined contribution (INDC) and clarifying information», communication soumise le 27.2.2015 au Secrétariat de la Convention des Nations Unies sur le changement climatique. Disponible à l'adresse: www.news.admin.ch/NSBSubscriber/message/attachments/38517.pdf

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affectation partielle de la taxe sur le CO2, ainsi que le fonds de technologie destiné à promouvoir l'innovation dans le domaine des technologies à faible taux d'émission seront repris dans la législation sur le climat post 2020. Ces affectations partielles seraient toutefois expressément limitées (dans le cadre du projet d'article constitutionnel sur un système incitatif en matière climatique et énergétique). En outre, le Conseil fédéral entend affiner sa stratégie afin de l'adapter au changement climatique.

Les résultats de la conférence internationale de Paris sur le climat à fin 2015 seront évalués et intégrés à la documentation pour la consultation relative à une loi sur le climat pour la période 2021 à 2030. Le Conseil fédéral ouvrira probablement cette consultation au deuxième semestre 2016. L'adoption du message correspondant à l'attention du Parlement est prévue pour le deuxième semestre 2017.

1.1.3

Politique climatique et énergétique après 2020: passage d'un système d'encouragement fondé sur les subventions à un système d'incitation fondé sur la fiscalité

Le système énergétique étant en pleine mutation, le nombre d'interventions parlementaires et d'initiatives populaires sur ce sujet a sensiblement augmenté. Ces dernières années, les demandes visant à mettre en place des taxes ou impôts incitatifs pour atteindre les objectifs de la politique climatique et énergétique ont de nouveau progressé. A cet égard, on peut notamment citer la motion Studer (06.3190) «Réforme fiscale écologique» de 2006, l'initiative populaire «Pour une économie durable et fondée sur une gestion efficiente des ressources (économie verte)» du 6 septembre 2012 et l'initiative populaire du parti vert'libéral (PVL) «Remplacer la taxe sur la valeur ajoutée par une taxe sur l'énergie», qui a été balayée aux urnes en mars 2015. Selon l'analyse VOX (gfs.Bern et Université de Zurich 2015), le rejet net de l'initiative populaire «Remplacer la taxe sur la valeur ajoutée par une taxe sur l'énergie» tient davantage au changement fondamental de système d'imposition préconisé, notamment à l'abandon de la TVA, source de revenus essentielle et bien acceptée de la Confédération, qu'à des doutes sur l'efficacité d'une taxe sur l'énergie.

Le Conseil fédéral tient compte dans ses travaux des requêtes formulées lors du processus politique. En septembre 2013, il a décidé de concevoir un système d'incitation fiscale en matière climatique et énergétique en tant que prochaine étape de la SE 2050. Introduit progressivement, celui-ci reposera sur une taxe climatique et une taxe sur l'électricité. Il remplacera à compter de 2021 le système d'encouragement actuel qui comprend surtout, d'une part, le Programme Bâtiments financé par la Confédération et les cantons grâce à une affectation partielle de la taxe sur le CO2 grevant les combustibles et, d'autre part, la rétribution à prix coûtant du courant injecté (RPC) financée par le supplément sur les coûts de transport des réseaux à haute tension (ci-après le supplément perçu sur le réseau5).

Le principe du système d'incitation fiscale doit être inscrit dans la Constitution, la taxe climatique et la taxe sur l'électricité reposant sur les objectifs énergétiques et 5

Art. 15b de la loi sur l'énergie, RS 730.0; terminologie utilisée dans la SE 2050: supplément perçu sur le réseau.

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climatiques de la Confédération. Cette inscription dans la Constitution instaure la nécessaire transformation vers un système incitatif.

A l'automne 2012, le Conseil fédéral a chargé le DFF de préparer plusieurs variantes d'un système d'incitation fiscale en matière climatique et énergétique. Une procédure en deux étapes comprenant une consultation préliminaire publique fin 2013 a permis d'engager précocement la discussion sur les fondements du futur système d'incitation en faisant appel aux milieux intéressés. Sur la base des résultats de cette consultation préliminaire, le Conseil fédéral a demandé le 21 mai 2014 au DFF et au DETEC d'élaborer un projet, destiné à la consultation, d'article constitutionnel concernant la mise en place d'un système d'incitation fiscale en matière climatique et énergétique. Le 13 mars 2015, le Conseil fédéral a ouvert à ce sujet une consultation qui s'est achevée le 12 juin 2015. Il a en outre chargé le DFF et le DETEC de lui soumettre, au quatrième trimestre 2015, le rapport sur les résultats de la consultation ainsi que son projet de message. Après l'adoption de la base constitutionnelle du système d'incitation par le peuple et les cantons, les détails des taxes incitatives seront réglés dans la législation sur le climat et sur l'énergie.

1.2

Nouvelle réglementation proposée

1.2.1

Nouvel article constitutionnel

L'article constitutionnel proposé constitue le fondement pour passer d'un système d'encouragement fondé sur les subventions à un système incitatif fondé sur la fiscalité dans le cadre de la politique climatique et énergétique. Ce système incitatif fournira une contribution essentielle à l'atteinte des objectifs climatiques et énergétiques du Conseil fédéral pour l'après-2020. La taxe climatique pourra être perçue sur les combustibles et les carburants, et la taxe sur l'électricité sur l'énergie électrique. L'objectif de ces taxes est de contribuer à réduire les émissions de gaz à effet de serre, et d'utiliser l'énergie de manière économe et efficiente. La taxe climatique remplacera l'actuelle taxe sur le CO2 grevant les combustibles et les affectations partielles de celle-ci, tandis que la taxe sur l'électricité se substituera au supplément perçu sur le réseau, qui finance notamment la RPC. Dans un premier temps, le Conseil fédéral recommande toutefois de ne pas introduire une taxe incitative sur les carburants. Des allégements ou des exemptions seront comme aujourd'hui prévus pour les entreprises dont l'exploitation ou la production impliquent une très forte intensité énergétique ou d'émissions de gaz à effet de serre.

A long terme, le système d'incitation ne devra avoir aucune incidence sur le budget; en clair, les pouvoirs publics bénéficieront des mêmes ressources financières qu'en l'absence de taxe climatique et de taxe sur l'électricité. De même, la charge financière supportée par les ménages et les entreprises ne devrait pas augmenter dans l'ensemble, car le produit des taxes incitatives leur sera intégralement redistribué.

Pendant une période transitoire, il sera possible d'affecter pour une durée limitée les recettes de la taxe climatique et de la taxe sur l'électricité aux mesures d'encouragement. Les subventions financées par les affectations partielles de l'actuelle taxe sur le CO2 seront réduites progressivement sous le nouveau droit, jusqu'à leur suppression complète dans les cinq ans suivant l'introduction de la taxe climatique. Cela concerne principalement le Programme Bâtiments et les versements au fonds de technologie. Les mesures d'encouragement soutenues en vertu de l'ancien droit par 7175

le supplément perçu sur le réseau et reconduites en vertu du nouveau droit (RPC, contributions uniques pour les petites installations photovoltaïques, appels d'offres publics, garanties destinées à couvrir les risques des projets de géothermie et mesures d'assainissement des eaux) seront également progressivement réduites jusqu'à leur suppression complète dans les dix ans suivant l'introduction de la taxe sur l'électricité. Les engagements pris durant ce délai transitoire doivent expirer 25 ans au plus tard après l'introduction de la taxe sur l'électricité. Les mesures d'encouragement de plus longue durée ou d'autres mesures de ce type ne devront pas être financées par les recettes de la taxe climatique et de la taxe sur l'électricité. On s'assurera ainsi qu'aucune nouvelle affectation partielle des recettes de ces taxes ne sera possible sans une nouvelle révision de la Constitution.

1.2.2

Nécessité de légiférer au niveau constitutionnel

Le passage d'un système de subventions à un système d'incitation avec une taxe climatique et sur l'énergie électrique représente un changement important dans l'ordre institutionnel et fiscal. L'ancrage du principe des taxes incitatives dans la Constitution lui donne une légitimité démocratique élevée.

La disposition constitutionnelle prévue laisse au législateur une assez grande marge de manoeuvre pour la concrétisation de la taxe climatique et sur l'énergie électrique.

Elle garantit une phase de transition flexible entre le système de subventions et le système d'incitation.

Situation actuelle Il existe actuellement en Suisse deux types de taxes d'incitation: la taxe sur le CO2 prélevée sur les combustibles fossiles, qui découle du chapitre 5 de la loi sur le CO26, et les taxes d'incitation visées au chapitre 6 de la loi du 7 octobre 1983 sur la protection de l'environnement7. Ces dernières sont prélevées sur les composés organiques volatils (art. 35a).

Les taxes d'incitation existantes se fondent sur l'article 74 de la Constitution (Cst.)8, qui porte sur la protection de l'environnement. Le deuxième alinéa de cet article prévoit que la Confédération veille à prévenir les atteintes à l'environnement et que les frais de prévention et de réparation sont à la charge de ceux qui les causent (principes de précaution et du pollueur-payeur). Cet article autorise la Confédération à introduire des taxes d'incitation propres à encourager les entreprises et les ménages à adopter un comportement favorable à l'environnement (Aubert et Mahon 2003: 594).

Le projet d'article constitutionnel permettra de remplacer la taxe CO2 sur les combustibles et ses affectations partielles par la taxe climatique sur les combustibles.

Cependant, s'il n'est pas accepté, ni la taxe CO2 sur les combustibles ni les autres taxes incitatives existantes ne seraient remises en question, en raison des bases légales existantes. Cela vaut aussi pour l'actuel supplément perçu sur le réseau.

6 7 8

RS 641.71 RS 814.01 RS 101

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Pourquoi un nouvel article constitutionnel?

Sans le nouvel article 131a Cst., le système incitatif en matière climatique et énergétique ne sera pas pleinement réalisé. Seule cette disposition fixe des conditions claires et précises pour la transition entre le système de subventions et le système incitatif, c'est-à-dire une limitation explicite des affectations partielles actuelles et l'impossibilité de créer de nouvelles affectations pour de nouvelles subventions en utilisant les produits de la taxe climatique et de la taxe sur l'électricité.

Le système incitatif mis en place par le nouvel art. 131a consiste en des taxes incitatives dont les bases sont potentiellement larges et concernent à la fois la politique climatique et la politique énergétique. A terme, elles ne viseront aucunement à générer des recettes fiscales. Elles seront alors purement incitatives et remplaceront des taxes actuelles qui, à cause de diverses affectations partielles, s'écartent de l'idéal d'une taxe incitative. Il est dès lors préférable d'inscrire un tel changement dans la Constitution, afin de lui conférer une légitimité suffisamment élevée par le biais d'une acceptation par la majorité du peuple et des cantons. La disposition constitutionnelle proposée laisse en outre au législateur la souplesse nécessaire pour la mise en oeuvre du système incitatif (choix des bases, niveau des taux, redistribution des produits, transition flexible entre le système de subventionnement et le système d'incitation).

Lors de la consultation préliminaire au sujet du rapport de base (DFF 2013) sur le passage d'un système de subventions à un système de taxes incitatives, plusieurs participants ont souligné l'importance d'ancrer le futur système d'incitation dans la Constitution. Leur principal argument est qu'un tel système nécessite d'être accepté par la majorité du peuple et des cantons. Ce système doit être légitimé, même s'il est prioritairement incitatif, car les produits des taxes seront à terme complètement redistribués. Cela est d'autant plus important que la base d'imposition est potentiellement large et que les taux des taxes sont amenés à augmenter progressivement.

Selon certains participants à la consultation préliminaire, si des taxes d'incitation sont justifiées du point de vue de l'internalisation des effets externes et du
principe du pollueur-payeur qui figurent déjà à l'art. 74 Cst., la question d'une taxation incitative qui a pour but de diminuer la consommation d'électricité est différente.

Elle devrait donc faire l'objet d'une légitimité politique et démocratique large.

D'autres participants ont souhaité un article constitutionnel afin de garantir le principe de redistribution complète des produits à la population et à l'économie et donc afin d'éviter de futures affectations partielles. Une taxe incitative doit en effet poursuivre uniquement un but incitatif et non un but fiscal.

Place dans la Constitution fédérale L'art. 131a se situe sous le chapitre 3 (Régime des finances), après l'art. 131 sur les impôts à la consommation spéciaux (tabac, alcool, pétrole, etc.).

Relations avec d'autres articles constitutionnels L'art. 131a proposé a des liens avec quatre autres articles constitutionnels: l'art. 74 (Protection de l'environnement), l'art. 85 (Redevance sur la circulation des poids lourds), l'art. 89 (Politique énergétique) et l'art. 134 (Exclusion d'impôts cantonaux et communaux). L'art. 74 sur la protection de l'environnement est mentionné plus haut dans ce chapitre, et l'art. 85 sur la RPLP sera abordé dans les chapitres suivants (voir ch. 2 et ch. 3.2).

7177

L'art. 89 établit les principes de la politique énergétique et définit des règles relatives aux compétences et à la collaboration entre la Confédération et les cantons. Il promeut notamment une consommation économe et rationnelle de l'énergie. L'al. 4 stipule que les mesures concernant la consommation d'énergie dans les bâtiments sont au premier chef du ressort des cantons. Il reste cependant à la Confédération une compétence dite subsidiaire.

L'art. 134 règle l'exclusion d'impôts cantonaux et communaux. Il s'agit de la TVA, des impôts sur la consommation spéciaux (alcool, tabac, combustibles fossiles et carburants [art. 131, al. 1, let. e, et al. 2], etc.), du droit de timbre et de l'impôt anticipé. L'énumération selon l'art. 134 n'est volontairement pas complétée par les nouvelles taxes fédérales climatique et sur l'électricité proposées (art. 131a). De cette façon, les cantons et les communes sont autorisés à introduire des taxes sur l'électricité ou à poursuivre leur perception. Par contre, ils ne peuvent pas introduire leurs propres taxes sur les combustibles fossiles et les carburants.

1.3

Appréciation de la solution retenue

1.3.1

Pourquoi modifier le système dans le domaine de l'énergie et du climat?

Les mesures d'encouragement et les mesures réglementaires prévues dans le cadre du premier paquet de mesures de la SE 2050 peuvent déployer leurs effets à court terme, car elles sont applicables assez rapidement. Ceci, notamment pour atteindre les objectifs de développement des énergies renouvelables en Suisse. A moyen et à long termes, des taxes incitatives présentent cependant des avantages par rapport à ces mesures, car elles sont fondées sur le marché: premièrement, des taxes incitatives permettent généralement d'atteindre les objectifs de la politique climatique et énergétique à un moindre coût économique qu'avec des mesures d'encouragement ou des prescriptions. L'envoi de signaux de prix adéquats grâce à ces taxes tient compte du principe du pollueur-payeur. Dès lors, les ménages et les entreprises supportent les coûts effectifs de leurs actes et de leurs décisions en matière de consommation et de production. Les taxes incitatives renchérissent les activités qui nuisent directement ou indirectement à l'environnement à travers la consommation d'énergie et de ressources. Deuxièmement, la modification des prix relatifs induite par les taxes incitatives laisse aux ménages et aux entreprises la plus grande liberté de choix possible afin qu'ils changent leur comportement à moindre coût. Troisièmement, les incitations par les prix permettent de rechercher constamment le meilleur moyen de réduire les émissions et la consommation énergétique. Elles stimulent également l'innovation, car il est rentable d'investir dans des technologies qui économisent l'énergie et réduisent les émissions.

Par ailleurs, les taxes incitatives ont également l'avantage de n'engendrer aucun effet d'aubaine. Les mesures d'encouragement présentent toujours le risque que des aides soient demandées alors que le comportement souhaité ­ par exemple, l'assainissement énergétique de l'enveloppe des bâtiments ­ aurait également pu être obtenu sans le soutien de l'Etat («effet d'aubaine»). En outre, la promotion de l'efficacité énergétique peut avoir un effet pervers et inciter à consommer davantage.

On parle alors d'«effet de rebond». A l'inverse, les taxes incitatives augmentent le prix de l'énergie et encouragent ainsi l'usage économe des agents énergétiques fossiles et de l'électricité.

7178

Les taxes incitatives présentent un autre avantage: les effets régressifs de la répartition peuvent être compensés en redistribuant les recettes de façon adéquate.

La charge liée à la perception des taxes et à la redistribution des recettes est relativement faible; le système est très transparent pour l'économie et pour la population.

1.3.2

Avant-projet

Le projet du 25 février 2015 mis en consultation avait la teneur suivante: Art. 131a

Taxe climatique et taxe sur l'électricité

La Confédération peut percevoir une taxe sur les combustibles et les carburants (taxe climatique) ainsi qu'une taxe sur l'électricité, afin de réduire les émissions de gaz à effet de serre et de promouvoir une consommation économe et rationnelle de l'énergie.

1

Les taxes sont déterminées de manière à fournir une contribution essentielle à l'atteinte des objectifs climatiques et énergétiques de la Confédération.

2

La Confédération tient compte des entreprises pour lesquelles la perception des taxes entraînerait des charges déraisonnables.

3

Le produit des taxes est redistribué à la population et à l'économie. Il peut être déduit d'autres taxes fédérales ou des cotisations aux assurances sociales.

4

Si la perception de la taxe climatique sur les carburants entraîne une baisse du produit de la redevance sur la circulation des poids lourds visée à l'art. 85, une part correspondante du produit de la taxe climatique doit être utilisée pour servir les objectifs mentionnés à l'art. 85, al. 2 et 3.

5

Art. 197, ch. 6 6. Dispositions transitoires ad art. 131a (Taxe climatique et taxe sur l'électricité) La taxe sur le CO2 prévue par l'ancien droit est remplacée par la taxe climatique.

Le supplément sur les coûts de transport des réseaux à haute tension prévu par l'ancien droit est remplacé par la taxe sur l'électricité.

1

2 La taxe climatique et la taxe sur l'électricité sont augmentées progressivement dans la mesure où l'effet incitatif visé le requiert.

Les mesures d'encouragement qui sont financées conformément à l'ancien droit par le produit de la taxe sur le CO2 et qui se poursuivront sous le nouveau droit sont progressivement réduites à partir du 1er janvier 2021 jusqu'à leur suppression complète au plus tard le 31 décembre 2025.

3

Les mesures d'encouragement qui sont financées conformément à l'ancien droit par le supplément mentionné à l'al. 1 et qui se poursuivront sous le nouveau droit sont progressivement réduites jusqu'à leur suppression complète au plus tard le 31 décembre 2030. Avant leur levée, les mesures ne peuvent pas comporter d'engagements allant au-delà du 31 décembre 2045.

4

La redistribution prévue à l'art. 131a, al. 4, est effectuée uniquement dans la mesure où le produit de la taxe climatique n'est pas utilisé pour financer les mesures

5

7179

d'encouragement visées à l'al. 3 et le produit de la taxe sur l'électricité n'est pas utilisé pour financer les mesures d'encouragement visées à l'al. 4.

1.3.3

Résultats de la consultation

La consultation s'est déroulée du 13 mars 2015 au 12 juin 2015 et a recueilli 157 prises de position9. Son dépouillement n'a pas permis de dégager une opinion majoritaire, mais trois tendances distinctes ressortent néanmoins. Un premier groupe est favorable au projet présenté. Il estime que les taxes incitatives sont le moyen le plus efficace et efficient pour atteindre les objectifs climatiques et énergétiques. Un deuxième groupe, le plus important en nombre de réponses, n'approuve le projet qu'à certaines conditions, par exemple le traitement simultané des deux étapes de la SE 2050, une coordination internationale, une taxation immédiate des carburants, une exonération des carburants, la taxation différenciée de l'électricité, l'exonération ou la prise en compte des régions de montagne et périphériques, le maintien des subventions ou la suppression plus rapide des subventions. Enfin, un troisième groupe s'oppose aux dispositions constitutionnelles proposées, parfois avec véhémence. La défense de la compétitivité des entreprises est leur principal argument.

Concernant l'agencement du système d'incitation, la taxe sur les combustibles n'est pas contestée. La majorité des répondants souhaite que les carburants soient également taxés, en raison de l'important potentiel de réduction d'émissions de CO2 du domaine du trafic et du principe d'égalité de traitement des bases de taxation. Les opposants à la taxation incitative des carburants relèvent la charge fiscale déjà élevée qui les grève, et la pénalisation des régions périphériques et de montagne qui en résulterait. La majorité approuve la taxation de l'électricité, mais plutôt de façon différenciée selon les coûts externes des modes de production. Certains exigent au préalable l'amélioration des conditions cadres du marché de l'électricité. Les mesures d'allégement sont majoritairement acceptées, certains acteurs demandant toutefois l'obligation de contrepartie sous la forme de conventions d'objectifs. Il a plusieurs fois été souligné que la formulation de l'article constitutionnel 131a, al. 3, («... des charges déraisonnables») n'était pas assez concrète et permettait une trop grande marge d'interprétation. Au sujet de l'utilisation des produits des taxes, c'est la redistribution complète aux ménages et aux entreprises qui rassemble le plus d'avis
positifs. Par contre, la possibilité de déductions d'autres impôts ou taxes est refusée.

La suppression des subventions au Programme Bâtiments est soutenue par une majorité de participants, de même que la suppression des demandes RPC, bien que cette dernière majorité soit plus fragile. En effet, plusieurs acteurs estiment que le développement des énergies renouvelables indigènes ne sera plus assuré. Enfin, la proposition d'étendre de façon modérée les compétences de la Confédération dans le domaine de l'énergie a été refusée par la majorité des répondants.

9

Le rapport peut être consulté sous www.admin.ch > Droit fédéral > Procédures de consultation > Procédures de consultation terminées > 2015 > DFF.

7180

1.3.4

Refonte de l'avant-projet

La structure de l'article constitutionnel et son principe n'ont guère changé lors de la refonte de l'avant-projet. Les résultats de la consultation ont débouché sur les adaptations matérielles suivantes: Entreprises à forte intensité énergétique et à fortes émissions de gaz à effet de serre Quelques participants ont jugé trop ouverte la formulation de l'art. 131a, al. 3: «La Confédération tient compte des entreprises pour lesquelles la perception des taxes entraînerait des charges déraisonnables». Sa nouvelle version apporte la clarification souhaitée: «La Confédération tient compte des entreprises dont l'exploitation ou la production impliquent une très forte intensité énergétique ou d'émissions de gaz à effet de serre».

Redistribution du produit de la taxe La proposition de redistribuer le produit de la taxe en le déduisant d'autres taxes fédérales ou des cotisations aux assurances sociales ayant déplu à une majorité de participants, elle a été biffée. Dans la version remaniée, le produit des taxes est redistribué à la population et à l'économie.

Suppression des mesures d'encouragement La majorité des participants approuvent la proposition d'abandonner les mesures d'encouragement qui sont financées, conformément à l'ancien droit, par le produit de la taxe sur le CO2 ainsi que par le supplément perçu sur le réseau. Une minorité a toutefois jugé l'avant-projet déséquilibré. Car tout en fixant une date contraignante pour l'abandon des mesures d'encouragement, il se contentait d'une disposition potestative sur l'introduction des taxes incitatives. En réponse à cette objection, la nouvelle formulation fait dépendre la date de la suppression des mesures d'encouragement de celle de l'introduction des taxes incitatives.

Ajouts non retenus Dans le cadre de l'avant-projet, les participants étaient invités à donner leur avis sur l'affectation partielle du produit des nouvelles taxes et sur un transfert de compétences législative à la Confédération dans le secteur de l'énergie (art. 89 Cst.). Or une majorité de participants ont refusé les deux projets. Les thèmes n'ont par conséquent pas été développés dans le présent projet.

Souhaits non pris en compte Certains points mentionnés lors de la consultation n'ont pas été pris en compte dans les modifications de l'article constitutionnel. Par exemple, certains
participants à la consultation ont fait remarquer que les objectifs de la SE 2050 n'étaient pas encore formellement fixés. Ces objectifs font partie intégrante du premier paquet de la SE 2050. Même si ce premier paquet devait faire l'objet d'un référendum, la décision serait connue avant que les décisions définitives quant aux taux des taxes incitatives proposées soient prises, puisque la détermination des taux n'interviendra qu'au niveau de la mise en oeuvre de l'article constitutionnel présenté au niveau des lois.

D'autres participants ont relevé l'absence des informations suivantes dans le rapport explicatif: mesures d'accompagnement pour les locataires, amélioration du système 7181

de redistribution des produits aux ménages et aux entreprises, concrétisation du remboursement aux entreprises exemptées et différenciation de la taxe sur l'électricité. Tous ces thèmes seront abordés lors de la mise en oeuvre de l'article constitutionnel au niveau légal. Ils sont trop détaillés pour être traités à l'échelon constitutionnel, mais il en sera tenu compte lors de l'élaboration des lois d'application.

Enfin, certaines demandes n'ont pas pu être prises en compte. Plusieurs participants souhaitaient une amélioration des conditions régissant le marché de l'électricité ou l'introduction d'un modèle de quotas. Cette demande n'entre pas dans le cadre du présent projet, mais plus généralement dans celui de la première étape de la SE 2050. Elle concerne également les négociations avec l'UE. Plusieurs participants ont souhaité comme système d'exemption des mesures de compensation aux frontières. Il n'est pas possible d'introduire de telles mesures, notamment en raison d'accords internationaux et également de leurs coûts administratifs (DFF 2013, pp. 57 ss). Des demandes contradictoires ont été faites au sujet des subventions, certains voulant les maintenir, d'autres les supprimer plus rapidement encore. A ce sujet, le Conseil fédéral estime que la période transitoire présentée dans son projet est adéquate, d'autant plus qu'elle est différenciée selon le domaine, climat et électricité. Enfin, des acteurs ont souhaité que les taux des taxes incitatives soient déterminés selon les coûts externes et non selon la réalisation des objectifs. Si la théorie demande effectivement une taxation au niveau des coûts externes, la pratique a montré que leur détermination est délicate. De plus la fixation des taux selon des objectifs à atteindre est également recommandée dans la théorie économique. Cette question est abordée dans le rapport de base sur le système incitatif (DFF 2013, pp. 53 ss).

1.4

Comparaison avec le droit étranger, notamment européen

Dans l'optique de l'introduction de la taxe climatique, la base constitutionnelle se limite à un élément central de l'actuelle législation sur le CO2, à savoir la taxe.

Comme le signale le message relatif à la politique climatique suisse après 201210, l'actuelle législation sur le CO2 s'appuie en grande partie sur le droit européen. Il en ira probablement de même pour l'introduction de la taxe climatique proposée. Cette dernière présenterait, à l'instar de la taxe sur le CO2 figurant dans le droit en vigueur, une étroite connexité matérielle avec les prescriptions relatives au système d'échange de quotas d'émission, qui lui-même est largement compatible avec les dispositions correspondantes de l'UE. Pour la taxe sur l'électricité également, la mise en oeuvre législative pourrait s'inspirer des prescriptions de l'UE qui, dans la directive 2003/96/CE11, impose aux Etats membres de taxer l'électricité sous certaines réserves.

10 11

FF 2009 6723 Directive 2003/96/CE du Conseil, du 27 octobre 2003, restructurant le cadre communautaire de taxation des produits énergétiques et de l'électricité, version du JO L 283 du 31.10.2003, p. 51.

7182

1.5

Possibilités de mise en oeuvre 2021 à 2030

1.5.1

Principaux éléments

L'article constitutionnel proposé, et dûment remanié en fonction des résultats de la consultation, jette les bases permettant de passer d'un système d'encouragement fondé sur les subventions à un système d'incitation fondé sur la fiscalité. Ce dernier sera défini en détail dans la législation concernant le climat et l'énergie au cours d'une deuxième étape. Pour la période allant de 2021 à 2030, le Conseil fédéral prévoit les principaux éléments exposés dans les prochains paragraphes. Les possibilités de mise en oeuvre exposées au ch. 1.5.2 représentent l'état actuel des travaux.

Les calculs seront actualisés durant la procédure législative.

A partir de 2021, la taxe climatique et la taxe sur l'électricité s'appuieront sur les objectifs climatiques et énergétiques de la Confédération et permettront de fournir une contribution essentielle à la réalisation de ces objectifs ­ tout en tenant compte des développements et des objectifs au niveau international, en particulier au sein de l'UE. La taxe climatique sur les combustibles reposera sur l'objectif de réduction des émissions de gaz à effet de serre à atteindre entre 2021 et 2030, qui sera inscrit dans la législation correspondante. Le Conseil fédéral a décidé fin 2014 que, d'ici à 2030, les émissions de gaz à effet de serre devront être réduites d'au moins 50 % par rapport à 1990. Pour la même période, il vise une réduction d'au moins 30 % des émissions de gaz à effet de serre en Suisse, les 20 % restants pouvant provenir de mesures réalisées à l'étranger.

Comme jusqu'ici, la taxe sur le CO2 grevant les combustibles sera fixée en fonction de la teneur en carbone du combustible et régulièrement adaptée aux objectifs à atteindre. A cet égard, les prescriptions existantes et d'autres mesures complémentaires de réduction des émissions de gaz à effet de serre seront prises en considération. Le Programme Bâtiments, qui est financé par l'affectation partielle de l'actuelle taxe sur le CO2, sera démantelé progressivement et prendra fin cinq ans après l'introduction de la taxe climatique. En ce qui concerne la taxe sur le CO2 grevant les carburants, dont les principes figurent dans la nouvelle base constitutionnelle, le Conseil fédéral préconise de ne pas l'introduire pour l'instant.

Dans le domaine de l'électricité, les objectifs de développement et de
consommation découlant du projet de loi sur l'énergie sont déterminants pour l'année 2030. Pour accroître encore la part d'électricité produite à partir d'énergies renouvelables, la taxe sur l'électricité sera complétée pendant une période transitoire par la RPC (selon les décisions du Parlement au sujet du premier paquet de mesures de la SE 2050). Les mesures d'encouragement à durée limitée seront progressivement réduites jusqu'à leur suppression complète dans les dix ans suivant l'introduction de la taxe sur l'électricité. Les engagements pris durant ce délai transitoire doivent expirer 25 ans au plus tard après l'introduction de la taxe sur l'électricité.

Des mesures d'allégement sont par ailleurs prévues pour les entreprises dont l'exploitation ou la production impliquent une très forte intensité énergétique ou d'émissions de gaz à effet de serre. Le nouvel article constitutionnel se limite à en énoncer le principe, les modalités détaillées restant à préciser dans la loi ou par voie d'ordonnance.

Durant la période 2021 à 2030, le produit de la taxe climatique et de la taxe sur l'électricité sera redistribué comme suit. Le produit de la taxe climatique sera partiellement redistribué à l'économie et à la population pendant une phase transitoire, 7183

avant de l'être intégralement à l'expiration des affectations partielles de durée limitée au Programme Bâtiments et au fonds de technologie. Si par la suite une taxe climatique sur les carburants est mise en place et que la redevance poids lourds liée aux prestations (RPLP) doit dès lors être baissée, les éventuelles pertes de recettes de la RPLP devront être compensées par le produit de cette taxe (voir ch. 3.2.1). Le produit de la taxe sur l'électricité sera également reversé à l'économie et à la population, mais après déduction des promesses de soutien limitées dans le temps pour la production d'électricité à partir d'énergies renouvelables (RPC) et des engagements en résultant. La redistribution à la population sera réalisée par habitant, tandis que celle aux entreprises s'appuiera soit sur la masse salariale soumise à l'AVS, soit selon un critère analogue, comme le montant maximum du gain assuré selon la loi fédérale sur l'assurance-accidents (LAA). L'intégration des travailleurs indépendants parmi les bénéficiaires est encore à l'étude.

1.5.2

Base de calcul et montant des taxes

En tenant compte des principaux éléments, les exemples ci-après montrent comment l'article constitutionnel proposé pourrait être mis en oeuvre pour la période allant de 2021 à 2030. Les combinaisons retenues sont équivalentes en ce qui concerne les objectifs sous-jacents, le type de redistribution des recettes, la suppression des mesures d'encouragement (Programme Bâtiments, RPC) et les mesures d'allégement pour les entreprises à forte intensité énergétique. Elles diffèrent cependant au niveau de l'assiette et du montant des taxes ainsi que sur le plan du degré de réalisation des objectifs qui en découle. Celui-ci indique dans quelle mesure un objectif peut être atteint avec les seuls taux de taxation suggérés. Il peut exister un écart entre l'objectif et ce qui peut être atteint avec ces taux de taxation. Cet écart dépend de différents facteurs, tels que le progrès technique. Pour combler cet écart, d'autres mesures et instruments complémentaires doivent être mis en oeuvre, par exemple des prescriptions.

Le degré de réalisation des objectifs des scénarios de taxation a été évalué à l'aide d'analyses reposant sur des modèles (Ecoplan 2015). Eu égard au grand nombre d'hypothèses requises (par ex. concernant l'évolution du prix de l'énergie, l'évolution démographique, les changements de comportement induits par les variations de prix et le scénario de référence sous-jacent), les évaluations comportent des incertitudes. De plus, le recours à des modèles ne permet pas d'illustrer en détail les mesures supplémentaires nécessaires en tenant compte des différentes possibilités.

C'est pourquoi il n'est pas possible de calculer l'impact macroéconomique des différentes combinaisons. Malgré ces limitations, les calculs constituent une base et révèlent les principales différences entre les combinaisons de mise en oeuvre, en particulier au niveau des interventions encore nécessaires. Les modèles de calcul partent de l'hypothèse que le Programme Bâtiments sera réduit jusqu'à sa suppression complète en 2025. Les nouveaux engagements au titre de la RPC pourront encore être pris jusqu'en 2030. Les subventions découlant des contrats existants expireront quant à elles en 2045 au plus tard.

Objectifs sous-jacents Les objectifs énergétiques et climatiques pour l'après-2020 n'ont pas encore été fixés définitivement. Le Parlement discute actuellement des objectifs énergétiques 7184

pour 2035 dans le cadre de la première étape de la SE 2050. Dans le message concernant celle-ci, le Conseil fédéral propose des objectifs de consommation d'énergie et d'électricité par personne et des objectifs de développement pour la production d'électricité à partir de nouvelles énergies renouvelables (voir ch. 1.1.1). Sur cette base et par extrapolation, l'objectif de réduction de la consommation d'électricité s'inscrit à environ 10 % en 2030 par rapport à la consommation individuelle en 2000. Si tous les objectifs de consommation d'énergie et les objectifs de développement fixés dans la SE 2050 sont atteints, les émissions de CO2 dues à l'énergie devraient, en 2030, être inférieures de près de 40 % à leur niveau de 1990, d'après les projections actuelles.

La fixation des objectifs de réduction des gaz à effet de serre pour l'après-2020 est en cours en Suisse et sur le plan international. Selon la décision prise le 19 novembre 2014 par le Conseil fédéral, la Suisse entend s'engager au niveau international à réduire au total d'ici à 2030 les émissions de gaz à effet de serre (dues à l'utilisation énergétique et non énergétique) d'au moins 50 % par rapport à 1990. Pour la même période, elle vise une réduction des émissions de gaz à effet de serre en Suisse d'au moins 30 %, les 20 % restants pouvant provenir de mesures réalisées à l'étranger.

Pour des raisons de techniques de modélisation, seules les émissions de CO2 liées à l'énergie peuvent être considérées pour la modélisation des exemples de mise en oeuvre du système d'incitation en matière climatique et énergétique. Un objectif de réduction de 30 % pour tous les gaz à effet de serre correspond en termes de volume (en millions de tonnes de CO2eq) à un objectif de réduction d'environ 40 % des émissions de CO2 liées à l'énergie. Une réduction de 40 % des émissions de CO2 liées à l'énergie est donc compatible à la fois avec les objectifs pour 2030 de la politique climatique et avec les objectifs de la SE 2050.

Par conséquent, conformément aux objectifs de la SE 2050, les possibilités de mise en oeuvre exposées ci-après à titre d'exemple ne portent que sur une diminution de 40 % des émissions de CO2 dues à l'énergie (par rapport à 1990).

Tableau 1 Hypothèses relatives aux objectifs Objectif de réduction

Consommation d'électricité

Emissions de CO2 dues à l'énergie

2030

­10 % par habitant par rapport à 2000

­40 % par rapport à 1990

Source: Ecoplan 2015: 22; tableau réalisé par l'AFF

Exemples de combinaisons Les combinaisons présentées dans le tableau 2 indiquent, à titre d'exemple, comment la taxe climatique et la taxe sur l'électricité pourraient être fixées pour la période comprise entre 2021 et 2030. La taxe climatique grevant les combustibles et les carburants repose sur la teneur en carbone, tandis que la taxe sur l'électricité s'appuie sur la consommation d'énergie (en kWh). Pour les entreprises à forte intensité énergétique et à fortes émissions de gaz à effet de serre, le modèle comprend des allégements et des exemptions de taxes d'une ampleur similaire à la réglementation en vigueur.

7185

Pour des raisons liées à la modélisation, les calculs dans le domaine de l'électricité supposent une perception uniforme de la taxe, c'est-à-dire indépendante du mode de production de l'électricité. L'assiette de cette taxe est expliquée au ch. 1.5.3. Le modèle fixe le montant de la taxe sur l'électricité de telle sorte que les objectifs de consommation correspondants puissent être atteints sans autres mesures réglementaires. Les quatre combinaisons intègrent une taxe sur l'électricité d'une ampleur similaire (env. 4,5 centimes par kWh) qui permet d'atteindre l'objectif fixé pour 2030.

Tableau 2 Exemples de mise en oeuvre Combinaison

C1

C2

C3

C4

2021

2030

2021

2030

2021

2030

2021

2030

11

20

11

20

11

20

11

20

2,3

4,5 100

2,3

4,5 100

2,3

4,5 100

2,3

4,5 100

Combustibles** Taxe en CHF/tCO2 Par ex. taxe mazout en c./l

96 25

168 44

120 32

240 63

120 32

240 63

120 32

336 89

Carburants Taxe en CHF/tCO2 Par ex. taxe essence en c./l

0 0

0 0

0 0

0 0

5,6 1,3

56 13

11,2 2,6

112 26

Electricité (uniforme)* Taxe en % sur le prix du courant pour les ménages Taxe en c./kWh Degré de réalisation des objectifs en 2030, en % par rapport à la PPA

Réalisation des objectifs (secteurs hors SEQE) en 2030 par rapport à la PPA (objectif de réduction CO2 = 40 %) Emissions de CO2 en millions 23,4 22,7 21,6 de tonnes Réduction du CO2 en millions 1,1 1,8 2,9 de tonnes Degré de réalisation des 18 28 46 objectifs en 2030, en % par rapport à la PPA Effet incitatif de la taxe climatique et de la taxe sur l'électricité Ampleur des mesures supplémentaires Remarques:

4,4 71

Incitation très faible

Incitation faible

Incitation moyenne

Incitation forte

très élevée

élevée

moyenne

faible

* remplace l'actuel supplément sur le réseau ** remplace l'actuelle taxe CO2 sur les combustibles

Source: Ecoplan 2015: 25, 43, 50; tableau réalisé par l'AFF

7186

20,1

Le degré de réalisation des objectifs est indiqué par rapport au scénario de référence «Poursuite de la politique actuelle» (PPA; Ecoplan 2015: 20 s., 37, 41). Celui-ci part du principe que les instruments, mesures, lois, etc. de politique énergétique actuellement en vigueur seront pratiquement tous maintenus ou étendus, qu'aucune nouvelle centrale nucléaire ne sera construite et que les habitudes de consommation demeureront largement inchangées par rapport à aujourd'hui. Le modèle qui en découle intègre le progrès technologique exogène.

Les combinaisons 1 et 2 ne comportant que peu d'éléments incitatifs, des mesures supplémentaires s'imposent d'autant plus pour les compléter. Le système d'incitation se contente, dans les deux premières combinaisons, d'imposer les combustibles et l'électricité, aucune taxe n'étant perçue dans un premier temps sur les carburants.

Par ailleurs, le montant de la taxe sur les combustibles est relativement faible. La taxe climatique sur les combustibles sera relevée progressivement entre 2021 et 2030. Des augmentations tous les deux ans sont envisageables, par analogie avec l'ordonnance sur le CO2 en vigueur. L'effet incitatif devrait être complété par des mesures supplémentaires pour deux raisons: l'absence de taxe sur les carburants et une modeste taxe climatique sur les combustibles. Dans les deux combinaisons, les mesures et instruments complémentaires doivent contribuer respectivement à hauteur de 82 % (C1) et de 72 % (C2) à la réduction requise en plus du scénario PPA.

Dès lors, ces mesures devraient être de grande ampleur. Dans le domaine des transports en particulier, le manque d'effet incitatif de la taxe climatique sur les carburants devrait être pallié par des mesures complémentaires.

Les combinaisons 3 et 4 modélisées s'appuient davantage sur l'instrument économique que constitue l'incitation, puisque leur système d'incitation englobe tous les agents énergétiques, c'est-à-dire même les carburants. Eu égard à la charge induite par l'impôt sur les huiles minérales ainsi que la redevance poids lourds liée aux prestations, aux possibilités de contournement grâce au «tourisme à la pompe» et aux prescriptions actuelles dans le domaine de la mobilité, la taxe climatique grevant les carburants est inférieure à celle prélevée sur les combustibles.

La combinaison
3 prévoit à partir de 2021 une taxe de 1,3 centime par litre d'essence, qui, selon le modèle, passera à environ 13 centimes par litre en l'espace de dix ans. La taxe climatique sur les combustibles reste au même niveau que dans la combinaison 2. La perception d'une taxe sur les carburants engendre également un effet incitatif en la matière. Toutefois, les taux de taxation demeurent relativement bas, tant pour les combustibles que pour les carburants. Des mesures complémentaires seraient par conséquent nécessaires dans ces deux domaines pour atteindre les objectifs. Comme l'effet incitatif serait cependant supérieur à celui des combinaisons 1 et 2, la combinaison 3 nécessiterait des mesures complémentaires de moindre envergure.

La combinaison 4 mise en premier lieu sur les effets incitatifs et répond ainsi le mieux à la philosophie du système d'incitation fiscale en matière climatique et énergétique. La taxe climatique sur les carburants est deux fois plus élevée que dans la combinaison 3 et la taxe climatique sur les combustibles croît pour atteindre 336 francs par tonne de CO2 en 2030 (soit près de 90 centimes par litre d'huile de chauffage). Les taxes incitatives permettent de réaliser environ 70 % de l'objectif de réduction des émissions de CO2 dues à l'énergie. Des mesures et instruments complémentaires seraient uniquement nécessaires à titre de soutien. Seule la combinaison 4 concrétise à moyen terme le passage effectif à un système d'incitation fiscale.

Tant la taxe climatique sur les combustibles et les carburants que la taxe sur 7187

l'électricité atteindraient en l'espace de dix ans le niveau requis pour obtenir un effet incitatif substantiel. Le Conseil fédéral veut toutefois provisoirement renoncer, dans le contexte actuel, à l'introduction d'une taxe climatique sur les carburants.

Besoin de mesures supplémentaires Les exemples des quatre combinaisons de mise en oeuvre se différencient par le montant des taxes sur les combustibles fossiles et les carburants et, partant, par les réductions possibles des émissions. En fonction du montant de ces taxes, le Parlement devra prendre des mesures législatives complémentaires pour pouvoir atteindre les objectifs fixés en matière de réduction des émissions de CO2. Une grande part des diminutions requises devrait être réalisable dans les secteurs des bâtiments et des transports. Dans son rapport rédigé en réponse au postulat 11.3523 du conseiller national Bastien Girod, le Conseil fédéral a montré que ces deux secteurs présentaient encore un potentiel de réduction relativement important (OFEV 2013). On pourrait, par exemple, mettre en place des normes techniques pour les bâtiments, abaisser les valeurs cibles pour les émissions de CO2 des voitures de tourisme et des véhicules utilitaires légers, introduire une telle valeur pour les poids lourds, perfectionner et renforcer le système d'échange de quotas d'émission ou accroître le taux et développer l'obligation de compensation pour les importateurs de carburants fossiles. Il est actuellement impossible de quantifier de manière fiable le volume d'émissions qui pourrait être réduit avec chacune de ces mesures.

La forme que prendra la politique climatique et énergétique s'appuiera sur les principaux éléments cités dans ce chapitre. La réalisation des objectifs climatiques et énergétiques dépendra de l'association des différents instruments et mesures et de leurs interactions. Si par exemple les taxes incitatives sont fixées à un niveau trop bas, l'effet voulu devrait être obtenu en renforçant ou en introduisant d'autres mesures. Il convient de noter à cet égard que des incitations par les prix telles que la taxe climatique et la taxe sur l'électricité sont généralement plus souples et plus efficaces que des dispositions réglementaires ou des mesures d'encouragement.

1.5.3

Conception ouverte de la taxe sur l'électricité

L'article constitutionnel proposé offre une certaine souplesse dans la conception de la taxe sur l'électricité. D'où la possibilité de prévoir soit un montant uniforme pour tous les agents énergétiques, soit une taxe différenciée par agent énergétique. Les exemples de mise en oeuvre pour la période allant de 2021 à 2030 reposent tous sur une taxe uniforme, qui permettrait d'atteindre de façon efficiente l'objectif de consommation d'électricité.

La production de courant occasionne parfois des coûts qui ne sont pas supportés par le producteur, mais par la collectivité ou par l'environnement proche. Une taxe sur l'électricité qui dépendrait du mode de production aurait l'avantage que son taux serait fixé en tenant au moins partiellement compte des coûts externes de la production d'électricité qui ne sont pas internalisés par d'autres mesures. La production d'électricité à partir d'énergies renouvelables bénéficierait ainsi d'un taux d'imposition plus faible, tandis que le courant provenant de centrales nucléaires ou d'une énergie fossile serait taxé plus fortement. Dans le débat public, la différenciation de la taxe sur l'électricité suscite actuellement l'espoir que la production issue d'énergies renouvelables, notamment la force hydraulique, puisse ainsi être encou7188

ragée en Suisse. La «taxe sur l'électricité sale» réclamée par certains milieux politiques ou la taxe sur les importations de «courant sale» (voir postulat 14.3038 «L'électricité importée doit-elle également être soumise à la taxe sur le CO2?») répondent à ce principe de différenciation. L'électricité est traitée différemment en fonction de son mode de production.

Les flux physiques d'électricité ne permettent pas de démontrer de quelle installation provient l'électricité et comment elle est produite. Les garanties d'origine servent donc de preuve pour le marquage de l'électricité. Elles donnent des informations sur la source d'énergie utilisée pour produire l'électricité ainsi que sur la date et le lieu de production. Ces garanties peuvent être négociées indépendamment du transport physique de l'électricité. Le fait que l'électricité et les garanties d'origine soient négociées sur des marchés séparés peut par exemple conduire à ce que du courant nucléaire importé de France doive être considéré comme du courant renouvelable s'il est accompagné d'une garantie d'origine renouvelable suédoise.

Du point de vue juridique (OMC, accords de libre-échange entre la Suisse et l'UE ou des Etats tiers), une différenciation entre production nationale et étrangère de l'électricité n'est pas admissible12. Ce principe de non-discrimination vaut également pour les garanties d'origine qui permettent de marquer l'électricité comme étant d'origine renouvelable. L'électricité provenant d'installations étrangères est admise même en cas de système national de certification. WTI & Heuking (2014a et 2014b) et WTI (2015) estiment qu'une différenciation selon le mode de production (par exemple renouvelable versus non renouvelable) est par contre juridiquement acceptable. Ce point de vue est contesté par certains qui estiment une telle différenciation contraire aux accords de l'OMC. Mais même en admettant qu'une différenciation selon le mode de production est autorisée, il ne peut pas en découler de droits pour la politique industrielle. Par conséquent, une taxe différenciée sur l'électricité en Suisse ne doit pas être justifiée par l'encouragement, le renforcement ou le soutien des énergies renouvelables indigènes ou de la force hydraulique suisse. Ce principe s'applique même si l'on peut faire valoir une distorsion de la
concurrence résultant de tarifs d'injection élevés dans les pays voisins, comme par exemple en Allemagne.

Au cas où une taxe différenciée sur l'électricité serait malgré tout introduite, elle n'aurait dans des conditions données aucun effet, car, en pratique, la part des énergies non renouvelables en Suisse (près de 20 TWh) pourrait être couverte sans difficulté avec des garanties d'origine étrangères répondant ­ à un bien moindre coût ­ aux mêmes conditions que les garanties d'origine suisses et ne pouvant être discriminées. Ces garanties d'origine permettraient de certifier l'ensemble de l'électricité consommée en Suisse comme «renouvelable». Quant à la taxe sur le CO2 perçue sur le courant importé, sa mise en oeuvre se heurterait aux mêmes difficultés, la différenciation reposant également sur des garanties d'origine. Dès lors, l'effet d'encouragement d'une taxe différenciée sur l'électricité devrait être plutôt faible au niveau de la production nationale d'électricité. L'incitation induite par la différenciation ne semble guère suffisante pour développer les énergies renouvelables et la production de celles-ci en Suisse. Au vu de ce qui précède, une différenciation n'offre pas d'avantage majeur par rapport à une taxe uniforme. Mais si à l'avenir de nouvelles possibilités conciliables tant avec le droit de l'UE et le droit bilatéral 12

Trois expertises juridiques ont été commandées sur cette question: WTI, Heuking (2014a), WTI, Heuking (2014b) et WTI (2015).

7189

(Suisse/UE) qu'avec le droit de l'OMC, et ayant un effet d'encouragement avéré sur les énergies renouvelables en Suisse, devaient voir le jour et leur mise en oeuvre apparaître raisonnablement possible, une différenciation serait préférable à la taxe uniforme sur l'électricité, parce qu'elle refléterait mieux les coûts externes et constituerait un instrument de promotion de la production d'électricité renouvelable en Suisse. Le DETEC ou, plus précisément, l'OFEN élaborera un rapport à ce sujet d'ici fin 2016.

1.5.4

Suppression progressive des mesures d'encouragement

Le passage d'un système d'encouragement fondé sur les subventions à un système d'incitation fondé sur la fiscalité devra s'effectuer sans heurts et dans un délai prévisible. En 2021, c'est-à-dire l'année de leur mise en place, la taxe climatique sur les combustibles et la taxe sur l'électricité remplaceront respectivement la taxe sur le CO2 introduite en 2008 (affectations partielles comprises) et le supplément perçu sur le réseau. Les mesures d'encouragement existantes ne seraient poursuivies que pour une durée limitée, avant d'être supprimées progressivement. Les aides financées par le produit de la taxe sur le CO2 (Programme Bâtiments par ex.) seraient réduites graduellement jusqu'à leur suppression complète dans les cinq ans suivant l'introduction de la taxe climatique.

En fixant judicieusement le montant de la taxe sur l'électricité, il serait possible de réduire de 10 % la consommation d'électricité d'ici à 2030, par rapport à 2000.

Toutefois, une perception uniforme de cette taxe ne contribuerait pas aux objectifs de développement national de la production d'électricité issue d'énergies renouvelables. Et, comme indiqué au ch. 1.5.3, une taxe différenciée sur l'électricité, qui pèserait moins fortement sur la production provenant d'énergies renouvelables que sur celle tirée des énergies non renouvelables, ne soutiendrait pas non plus ou pas suffisamment la production de courant renouvelable en Suisse.

Par conséquent, les mesures d'encouragement précédentes financées par le supplément perçu sur le réseau (par ex. RPC) restent nécessaires pour augmenter en Suisse la production de courant à partir de nouvelles énergies renouvelables. Elles devront cependant être abandonnées dans les dix ans suivant l'introduction de la taxe sur l'électricité. Par la suite, plus aucun nouvel engagement ne pourra être pris. Toutes les obligations de paiement s'éteindront au plus tard 25 ans après l'introduction de la taxe sur l'électricité.

Cette période de transition plus longue que pour le Programme Bâtiments devrait laisser le temps aux déséquilibres actuels entre l'offre et la demande d'électricité au niveau européen de se résorber. Le progrès technique et une meilleure commercialisation conduisent à une baisse des coûts de l'énergie renouvelable, qui dès lors devient plus rentable et nécessite toujours
moins de subventions. Une flexibilisation du marché, avec une meilleure adéquation entre l'offre et la demande, devrait permettre une meilleure valorisation de l'électricité d'origine renouvelable. Pour cela, il faut que l'organisation du marché de l'électricité (market design) soit modifiée afin d'inciter à déplacer la production vers les périodes de pénurie d'électricité et la demande vers les périodes de surplus d'électricité (smart grid). Le développement de technologies de stockage de l'électricité contribuera aussi à flexibiliser le marché.

7190

1.5.5

Entreprises à forte intensité énergétique et à fortes émissions de gaz à effet de serre

Dans la plupart des secteurs économiques, la taxe climatique et la taxe sur l'électricité n'occasionneront guère de hausses de coûts induisant une transformation structurelle. Lorsque le système d'incitation sera entièrement mis en oeuvre, le produit de ces taxes sera intégralement redistribué aux entreprises et aux ménages privés. Selon l'entreprise et la branche, cela pourra même se traduire au final par une diminution de charges. Des allégements de taxes s'imposent toutefois pour les entreprises dont l'exploitation ou la production impliquent une très forte intensité énergétique ou d'émissions de gaz à effet de serre. Des mesures appropriées permettront d'éviter la délocalisation de ces entreprises à l'étranger. Dans tous les cas, elles devront être adéquates et compatibles avec les engagements internationaux de la Suisse. L'article constitutionnel prévoit uniquement que la Confédération tiendra compte des entreprises dont l'exploitation ou la production impliquent une très forte intensité énergétique ou d'émissions de gaz à effet de serre. Sa mise en oeuvre concrète sera précisée ultérieurement au niveau légal. Il est prévu d'exiger dans chaque cas des contreparties à l'octroi d'allégements de taxes, par exemple sous la forme de conventions d'objectifs.

Il est usuel sur le plan international d'alléger les taxes sur l'énergie pour les entreprises à forte intensité énergétique et à forte intensité d'émissions de gaz à effet de serre (IEEP 2013, p. 13 s.). Ainsi, les lignes directrices de l'UE concernant les aides d'Etat à la protection de l'environnement et à l'énergie entre 2014 et 2020 fixent des critères qui permettent aux Etats membres de l'UE d'alléger les taxes destinées à promouvoir les énergies renouvelables pour les entreprises à forte intensité énergétique qui sont particulièrement exposées à la concurrence internationale.

La Suisse aussi accorde aujourd'hui des allégements ou des dérogations pour le supplément sur les coûts de transport des réseaux à haute tension en vertu de la loi du 26 juin 1998 sur l'énergie13 (art. 15bbis LEne) et pour la taxe sur le CO2 grevant les combustibles en vertu de la loi sur le CO214 (art. 17, 25 et 31, al. 1, let. b, de cette loi). Ces réglementations en vigueur seront prises en considération lors de la détermination des allégements concernant la taxe
climatique et la taxe sur l'électricité. La disposition suivante s'applique actuellement à la taxe sur le CO2 grevant les combustibles: les entreprises à fortes émissions de gaz à effet de serre qui proviennent de secteurs où la taxe représente une lourde charge par rapport à la valeur ajoutée et dont la compétitivité internationale risquerait dès lors d'être affaiblie peuvent être exemptées de la taxe sur le CO2. En contrepartie, elles s'engagent vis-à-vis de la Confédération à réduire leurs émissions de gaz à effet de serre (engagement de réduction). Selon la législation en vigueur, les grandes entreprises à fortes émissions de gaz à effet de serre qui participent au système d'échange de quotas d'émission (SEQE) et les centrales thermiques à combustibles fossiles soumises à une obligation de compensation sont également libérées de cette taxe. Concernant l'électricité, les entreprises bénéficient actuellement d'un allégement du supplément sur les coûts de transport en fonction de leur intensité électrique, c'est-à-dire de leurs frais d'électricité en pourcentage de leur valeur ajoutée brute. La libération est partielle à partir d'un seuil de 5 % et totale à partir de 10 %. En contrepartie, une convention 13 14

RS 730.0 RS 641.71

7191

d'objectifs contraignante prévoyant une obligation de réinvestissement à hauteur de 20 % du montant remboursé est exigée.

1.5.6

Utilisation du produit de la taxe climatique et de la taxe sur l'électricité

Après une phase transitoire, la perception de la taxe climatique et de la taxe sur l'électricité ne devra avoir aucune incidence sur le budget. Autrement dit, les pouvoirs publics ne devront pas disposer de ressources financières supérieures ou inférieures à celles qu'ils auraient eues en l'absence de ces taxes. En outre, la charge nette totale des ménages et des entreprises ne devra pas augmenter.

Les quatre combinaisons présentées à titre d'exemples prévoient une redistribution du produit de la taxe climatique et de la taxe sur l'électricité aux ménages et aux entreprises, après déduction des montants destinés aux mesures d'encouragement à durée limitée ainsi qu'aux charges administratives. La redistribution sera intégrale lorsque les engagements induits par les dernières mesures d'encouragement auront pris fin. Cette redistribution du produit des taxes récompensera les personnes et les entreprises qui consomment peu d'énergie: elles recevront davantage que ce qu'elles ont payé pour ces taxes. A l'inverse, une consommation énergétique élevée conduira à une charge nette, même après la redistribution.

La redistribution à la population sera calculée par habitant. Chaque personne résidant en Suisse percevra le même montant. Comme c'est le cas à présent avec la taxe sur le CO2 grevant les combustibles, le versement pourrait s'effectuer par l'intermédiaire des caisses-maladie, qui constituent un canal éprouvé et avantageux. D'autres canaux (par ex. chèques) seront toutefois évalués dans le cadre de la législation. La redistribution par habitant a tendance à favoriser les ménages avec des enfants et de faibles revenus. On compense ainsi la charge plus élevée qu'ils subissent en raison de la taxe climatique et de la taxe sur l'électricité. Le législateur définira les modalités concrètes de cette redistribution.

Le tableau 3 expose à titre d'exemple la redistribution du produit des taxes pour les quatre combinaisons retenues. Les deux dernières lignes du tableau indiquent le montant des taxes sur l'électricité et le CO2 en proportion des prix de l'énergie au niveau du consommateur final pour les différents types d'énergie. Les dépenses pour l'énergie au niveau du consommateur final (coût de l`énergie) a atteint environ 30 milliards de francs en 2014. Un produit de la taxe climatique et sur l'électricité
d'environ 5 milliards de francs en 2030 représenterait environ 17 % de ces 30 milliards de francs. Le produit des taxes ne sera pas entièrement redistribué en 2030, une partie devant encore servir à alimenter les mesures d'encouragement financées conformément à l'ancien droit par le supplément perçu sur le réseau. Par contre, plus rien ne sera affecté aux mesures d'encouragement financées selon le droit actuel par la taxe CO2 sur les combustibles, lesquelles auront disparu dès 2025, selon le modèle de calcul. Enfin, il faudra encore déduire les frais administratifs des montants à redistribuer indiqués ci-dessous à titre d'exemple.

7192

Tableau 3 Redistribution du produit des taxes en 2030 Combinaison

C1

C2

C3

C4

2030

2030

2030

2030

Produit de la taxe climatique et de la taxe sur l'électricité, en milliards de CHF Financement des mesures d'encouragement existantes via le supplément perçu sur le réseau, en milliards de CHF (montant non redistribué)

4,4

4,9

5,2

6,1

1,1

1,1

1,1

1,1

Redistribution à la population, en milliards de CHF représente par habitant, en francs

1,2

1,5

1,7

2,2

141

173

197

255

2,1

2,3

2,4

2,8

20 %

20 %

20 %

20 %

28% 21% 0%

36% 27% 0%

36% 27% 7%

44% 35% 13%

Redistribution à l'économie, en milliards de CHF Part de la taxe sur l'électricité dans le prix au niveau du consommateur final Part de la taxe climatique dans le prix au niveau du consommateur final ­ huile de chauffage ­ gaz naturel ­ essence 95

Source: Ecoplan 2015: 46; tableau et calculs réalisés par l'AFF

Le remboursement aux entreprises est actuellement proportionnel à la masse salariale soumise à l'AVS. Dans ce cas également, le canal existant des caisses de compensation pourrait continuer d'être utilisé. L'intégration des travailleurs indépendants parmi les bénéficiaires ainsi que d'autres critères de redistribution sont à l'étude. Une redistribution aux entreprises en fonction de la masse salariale soumise à l'AVS avantagera les sociétés qui ont des salaires moyens élevés par rapport à celles qui versent des salaires plus faibles. C'est la raison pour laquelle on examinera notamment le recours éventuel au montant maximum du gain assuré selon la LAA, qui est limité à 126 000 francs, au lieu de la masse salariale soumise à l'AVS.

Les calculs révèlent que des secteurs présentant des salaires élevés comme celui des services financiers seraient désavantagés par rapport à une redistribution basée sur la masse salariale soumise à l'AVS. En revanche, l'industrie manufacturière en bénéficierait particulièrement (Ecoplan 2015: 52 ss).

2

Commentaire des dispositions

Le projet d'art. 131a «Taxe climatique et taxe sur l'électricité» permettra d'inscrire dans la Constitution la compétence accordée à la Confédération de percevoir une taxe climatique et une taxe sur l'électricité. Il s'agit d'une disposition constitutionnelle ouverte, qui laisse au législateur une grande marge de manoeuvre pour préciser les modalités des taxes et la conception de la période transitoire.

7193

Art. 131a

Taxe climatique et taxe sur l'électricité

La nouvelle disposition sera insérée après la base constitutionnelle concernant les impôts à la consommation spéciaux (art. 131 Cst.). Son titre désigne les nouveaux types de taxes et reflète les principaux objectifs visés par leur introduction: la protection du climat, les économies d'énergie et l'efficience énergétique. L'inscription dans la Constitution du système d'incitation fiscale en matière climatique et énergétique vise à faire avancer la transformation indispensable de la Suisse en un pays qui génère peu d'émissions, qui gère les ressources de façon efficiente et qui dépend donc moins de l'énergie provenant de l'étranger.

L'al. 1 confère à la Confédération la compétence de percevoir une taxe climatique sur les combustibles et les carburants ainsi qu'une taxe sur l'électricité frappant l'énergie électrique, c'est-à-dire la possibilité de percevoir simultanément des taxes sur un ou plusieurs agents énergétiques. Le législateur pourra également concevoir des taxes différenciées pour ceux-ci (par ex. taxe sur l'électricité en fonction du mode de production). L'al. 1 fixe par ailleurs l'objectif de l'incitation: la réduction des émissions de gaz à effet de serre et la promotion d'une consommation économe et rationnelle de l'énergie. Ce faisant, il complète l'art. 74 Cst. en vigueur dans le domaine climatique (voir ch. 1.2.2 sur la mise en oeuvre actuelle). La taxe sur le CO2 grevant les combustibles (avec ses affectations partielles), prélevée sur la base de l'art.74 Cst., ainsi que le supplément perçu jusqu'à présent sur le réseau seront remplacés respectivement par la taxe climatique sur les combustibles et par la taxe sur l'électricité. En revanche, la nouvelle disposition ne supprimera pas la taxe sur les composés organiques volatils (taxe sur les COV). De même, la redevance poids lourds liée aux prestations et les impôts à la consommation spéciaux (impôt sur les huiles minérales et surtaxe correspondante) seront conservés.

L'al. 2 exprime le principe de l'incitation, en ce sens que les objectifs visés doivent être réalisés grâce à la perception de la taxe climatique et de la taxe sur l'électricité et non grâce à leur affectation (cela constitue la principale caractéristique d'un système incitatif). Pour ce faire, les taxes doivent atteindre un montant minimum.

L'al. 2 précise qu'elles
sont calculées de manière à fournir une contribution essentielle à l'atteinte des objectifs climatiques et énergétiques de la Confédération. Les taxes incitatives représentent dès lors le principal outil en la matière, mais elles devront être complétées par d'autres mesures concernant la politique énergétique et climatique (prescriptions d'efficacité des appareils, prescriptions sur les émissions des véhicules, par ex.). Les développements au niveau international, en particulier au sein de l'UE, seront également pris en compte lors de la fixation de ces objectifs. Il conviendra de s'appuyer sur les objectifs de réduction des émissions de gaz à effet de serre qui sont inscrits dans la législation sur le climat ainsi que sur les objectifs de développement et de consommation d'électricité qui sont définis dans la loi sur l'énergie.

L'al. 3 impose au législateur de tenir compte, lors de la perception de la taxe climatique et de la taxe sur l'électricité, des entreprises dont l'exploitation ou la production impliquent une très forte intensité énergétique ou d'émissions de gaz à effet de serre. Le législateur disposera en la matière d'une certaine marge de manoeuvre, qui va de la réduction des taxes à l'exemption de certaines taxes. Comme pour le remboursement actuel de la taxe sur le CO2 (voir art. 31, al. 1, let. b, de la loi sur le CO2), l'octroi de ces mesures d'allégement sera lié à l'obligation de fournir une compensation. Dans tous les cas, celles-ci devront être adéquates et compatibles avec les engagements internationaux de la Suisse.

7194

L'al. 4 énonce le principe d'une redistribution des produits des taxes à la population et à l'économie. La compensation des pertes de recettes spécifiques de la Confédération au niveau de la redevance sur le trafic des poids lourds liée aux prestations (RPLP) demeurera cependant réservée en cas d'introduction de la taxe climatique sur les carburants (al. 5). Le législateur définira les modalités de la redistribution.

Par exemple, celle-ci pourrait être réalisée par habitant par l'intermédiaire des caisses-maladie ou éventuellement par d'autres canaux (par ex. chèques). La redistribution aux entreprises pourrait s'effectuer par l'intermédiaire des caisses de compensation, sur la base de la masse salariale soumise à l'AVS ou du montant maximum du gain assuré selon la LAA. Conformément à l'effet incitatif recherché, une telle redistribution serait indépendante de la consommation et favoriserait donc les ménages et les entreprises qui utilisent peu de combustibles fossiles, de carburant ou d'électricité.

L'al. 5 garantit la compensation de pertes de revenus clairement définies de la Confédération et des cantons au niveau de la RPLP par les recettes issues de la taxe climatique sur les carburants. En vertu de l'art. 85 Cst., la Confédération prélève actuellement sur la circulation des poids lourds une redevance proportionnelle aux prestations, dont un tiers du produit net est reversé aux cantons. Le Conseil fédéral peut donc utiliser deux tiers au plus des recettes de la RPLP pour financer les grands projets ferroviaires (voir art. 196, ch. 3, al. 2, let. b, Cst.). La RPLP peut uniquement être perçue si la circulation des poids lourds entraîne pour la collectivité des coûts non couverts par d'autres prestations ou redevances (art. 85, al. 1, Cst.). On ne peut donc pas faire valoir plusieurs fois les mêmes coûts climatiques externes. Si une taxe climatique sur les carburants était mise en place, les coûts climatiques externes occasionnés par le trafic poids lourds seraient couverts au moins partiellement et ne pourraient dès lors plus être intégrés dans le calcul de la RPLP. Cela pourrait entraîner un abaissement des taux de taxation de la RPLP. Dans ce cas uniquement, les pertes de revenus en résultant seraient alors compensées par les recettes de la taxe climatique sur les carburants.

Art. 197,
ch. 12 Dispositions transitoires ad art. 131a (Taxe climatique et taxe sur l'électricité) Les dispositions transitoires prévoient que les mesures d'encouragement existant au moment de l'entrée en vigueur de la révision constitutionnelle que le législateur entend poursuivre pour une durée limitée et qui ont été financées par les recettes de la taxe sur le CO2 ou par le supplément perçu sur le réseau en vertu de l'ancien droit devront être supprimées progressivement. Le législateur pourra modifier ces mesures pour les optimiser pendant leur démantèlement graduel, à condition que cela soit judicieux au regard de leur suppression. De nouvelles mesures d'encouragement ne devront cependant pas être financées au moyen des recettes de la taxe climatique et de la taxe sur l'électricité.

Le système d'incitation repose sur le principe d'une redistribution des taxes (art. 131a, al. 4). Pendant une période transitoire, la taxe climatique et la taxe sur l'électricité pourront cependant être utilisées pour les objectifs précédents des mesures d'encouragement. L'art. 197, ch. 12, créera les bases nécessaires. Cette affectation partielle provisoire s'appliquera également si les mesures d'encouragement sont modifiées ou optimisées de la manière décrite précédemment.

7195

L'al. 1 prévoit que la taxe climatique et la taxe sur l'électricité remplaceront respectivement la taxe sur le CO2 et le supplément perçu sur le réseau au moment de leur introduction.

L'al. 2 veille à une transition en douceur entre le système d'encouragement fondé sur les subventions et le système d'incitation fondé sur la fiscalité: les nouvelles taxes seront relevées progressivement dans le cadre de l'art. 131a, al. 2, jusqu'à ce que l'effet incitatif visé soit atteint.

Conformément à l'al. 3, les montants prévus par les mesures d'encouragement qui sont financées par le produit de la taxe sur le CO2 conformément à l'ancien droit et qui sont poursuivies conformément au nouveau droit seront diminués progressivement. Actuellement, une partie de cette taxe est affectée à la promotion d'objectifs conformes au système incitatif: un tiers du produit de la taxe, mais au plus 300 millions de francs par an, sert à financer des mesures de réduction des émissions de CO2 des bâtiments (art. 34 de la loi sur le CO2). Par ailleurs, un montant annuel de 25 millions de francs au plus est versé au fonds de technologie pour le financement de cautionnements afin de promouvoir des technologies visant la réduction des gaz à effet de serre (art. 35 de la loi sur le CO2). En termes de calendrier, cette affectation partielle de la taxe sur le CO2 grevant les combustibles fossiles, qui sert à financer des mesures d'encouragement au niveau des bâtiments, sera supprimée progressivement. Le Programme Bâtiments sera démantelé dans les cinq ans suivant l'introduction de la taxe climatique. Quant au fonds de technologie, il cessera d'être alimenté par la taxe incitative au plus tard cinq ans après l'introduction de la taxe climatique.

L'al. 4 concerne le supplément perçu sur le réseau. La réglementation reprend pour l'essentiel les principes énoncés à l'al. 3. Par contre, le délai fixé pour la suppression totale des mesures d'encouragement y est réglé différemment. Celles-ci seront supprimées dans les dix ans suivant l'introduction de la taxe sur l'électricité, ce qui implique de ne plus octroyer de nouvelle aide après cette échéance (comme la RPC ou les appels d'offres publics). Les engagements pris durant ce délai transitoire doivent expirer 25 ans au plus tard après l'introduction de la taxe sur l'électricité.

Autrement dit,
si la taxe sur l'électricité est introduite en 2021, le financement de projets visant à stimuler la production de courant à partir d'énergies renouvelables se poursuivrait jusqu'à fin 2045 au plus tard.

Enfin, en vertu de l'al. 5, pendant le passage d'un système d'encouragement fondé sur les subventions à un système d'incitation fondé sur la fiscalité, le produit de la taxe climatique et de la taxe sur l'électricité ne peut être utilisé pour la redistribution prévue à l'art. 131a, al. 4, Cst. que dans la mesure où le financement des engagements issus des mesures d'encouragement le permet. Cette disposition jette les bases d'une affectation partielle du produit des nouvelles taxes (pour financer les mesures d'encouragement mentionnées) pendant la période transitoire sans affecter l'art. 131a, al. 5.

7196

3

Conséquences

Les diverses conséquences de la nouvelle disposition constitutionnelle dépendent de la manière dont le législateur mettra en oeuvre cette compétence. La gamme des possibilités d'application, par exemple pour les bases et les taux de taxation, est très large. L'évaluation des conséquences sera plus précise lors de l'élaboration des lois d'application.

3.1

Conséquences économiques

De manière générale, tant les taxes incitatives elles-mêmes que la redistribution de leurs produits ont des effets sur l'économie. Les taxes incitatives induisent un changement dans la structure de la consommation, ce qui est justement l'effet voulu.

Globalement, la population recevra à terme autant qu'elle paiera (aux coûts administratifs près). Une redistribution par habitant conduit à une réforme plutôt progressive. De même, les entreprises recevront globalement la somme qu'elles paieront (aux coûts administratifs près). L'effet redistributif des entreprises gourmandes en énergie vers les autres entreprises est voulu. Les taxes incitatives peuvent désavantager les entreprises intensives en énergie et en CO2 face à leurs concurrents étrangers. C'est pourquoi des mesures d'allégement sont prévues pour limiter ce phénomène. Dans ce cadre notamment, il faudra prendre en compte les risques de distorsions de la concurrence entre les grandes entreprises et les PME. Par ailleurs, les entreprises peu gourmandes en énergie deviendront plus compétitives puisqu'elles recevront davantage que ce qu'elles paieront.

Dans l'ensemble, il faut s'attendre à un léger impact négatif sur le PIB, qui serait toutefois atténué par le fait que les taxes incitent à innover et qui serait partiellement compensé par l'impact positif de la redistribution. En revanche, les taxes incitatives permettront d'atteindre à moindres coûts les objectifs, tels que la sortie du nucléaire.

La réforme contribuera également à réduire les coûts économiques liés au réchauffement climatique si les autres pays font aussi leur part. Toute évaluation des conséquences économiques est entachée d'incertitude. Les considérations purement qualitatives exposées ci-dessus sont toutefois relativement solides.

Les conséquences économiques du système incitatif en matière climatique et énergétique peuvent être évaluées plus précisément de deux manières: d'une part, en analysant les expériences faites par d'autres pays et, d'autre part, en développant des simulations de l'économie suisse à l'aide de modèles d'équilibre général.

Expériences internationales Une étude commandée par l'AFF et le SECO a effectué une analyse récente et systématique des modèles de taxes énergétique et climatique appliqués dans certains pays de l'OCDE (IEEP 2013). Le tableau 4
résume les types de taxes des différents pays examinés, leurs bases d'imposition et les années d'introduction correspondantes. Il montre que depuis le début des années 1990, beaucoup de pays ont introduit de tels instruments. La comparaison se limite aux taxes climatiques et énergétiques qui vont au-delà de la traditionnelle imposition des huiles minérales et visent à taxer plus lourdement la consommation d'énergie et la pollution de l'environnement selon une approche incitative. L'éventail des modèles mis en oeuvre est large, mais tous ont en commun l'adoption d'une taxe sur le CO2 ou d'une taxe 7197

énergétique, parfois en combinaison avec une taxe sur l'électricité. Les taux diffèrent d'un pays à l'autre et sont fixés sur la base de considérations tant techniques que politiques. Enfin, tous les pays analysés ont mis en place des régimes d'exception pour certains secteurs industriels et entreprises. Il est à noter que cette étude n'analyse que les systèmes de taxes incitatives et ne tient pas compte d'autres programmes de mesures comme des subventions. Soulignons également que l'impact des taxes incitatives peut dépendre de la situation géographique. Ainsi, une taxe sur les carburants n'aura pas le même impact sur le tourisme à la pompe si elle est introduite en Suisse que si elle l'est dans un grand pays ou sur une île.

Tableau 4 Exemples de taxes carbone et énergétiques Pays/Etat

Introduction

Type de taxe et base d'imposition

Allemagne

1999

Taxe énergétique sur les carburants et les combustibles Taxe sur l'électricité Taxe carbone (combustibles et carburants) Taxe énergétique sur les combustibles et les carburants fossiles, dont électricité Taxe sur le CO2 Taxe sur le CO2 (combustibles et carburants) Taxe énergétique sur l'électricité Taxe carbone (combustibles et carburants) Taxe carbone (huiles minérales et pétrole offshore) Taxe sur l'électricité Taxe énergétique (huiles minérales, charbon, gaz naturel, électricité) Taxe sur le changement climatique (pétrole, lignite, gaz naturel, électricité) Taxe CO2 et taxes énergétiques sur: combustibles, carburants, électricité, industrie

Colombie-Britannique 2008 Danemark 1977 Finlande

1992 1990

Irlande Norvège

2009 1991

Pays-Bas

1996

Royaume-Uni

2001

Suède

1991

Source: données IEEP (2013), tableau réalisé par l'AFF

L'étude a résumé les effets des systèmes de taxes incitatives sur l'environnement et l'économie, bien que cette analyse présente d'importantes difficultés et de nombreuses incertitudes. En ce qui concerne l'environnement, les études et analyses montrent que les taxes sur le CO2, combinées aux modèles de taxation de l'énergie, ont contribué à réduire les émissions de CO2 et la consommation de combustibles et carburants dans tous les pays examinés. Partout, un effet d'incitation s'est produit et les taxes se sont avérées être un instrument efficient. Cependant, les objectifs de réduction sont souvent manqués. Ces effets limités sont à mettre en relation avec la générosité des régimes d'exception et les faibles taux des taxes incitatives.

Les résultats des expériences internationales sont contrastés en ce qui concerne les conséquences économiques de ces taxes. L'effet sur la croissance économique est légèrement positif dans certains pays, et neutre ou légèrement négatif dans d'autres.

Quant à l'effet sur l'emploi, il est souvent jugé positif, mais il dépend des modalités de redistribution des taxes. L'impact négatif sur l'économie est limité par les régimes d'exception. Les expériences internationales montrent aussi qu'il est possible de mettre en place des incitations à l'innovation. Enfin, dans plusieurs pays, on

7198

part du principe que les taxes contribuent à long terme à découpler la croissance économique et les émissions de CO2.

En résumé, l'analyse des expériences faites à ce jour montre que les réformes mises en oeuvre dans les pays examinés ont permis d'y réduire les émissions de CO2 et d'y améliorer l'efficacité énergétique moyennant des coûts économiques peu élevés. De plus, des effets négatifs sur l'emploi n'ont pas été observés. Enfin, les systèmes incitatifs peuvent conduire à une incitation à l'innovation.

Etudes relatives au projet Dans le cas de la Suisse, les conséquences économiques d'un système incitatif ont été évaluées à l'aide de simulations en modèle équilibre général. La première simulation (Ecoplan 2012, 2013) analyse les conséquences économiques d'un système fondé uniquement sur des taxes incitatives selon plusieurs types de redistribution des produits des taxes. La deuxième simulation (Ecoplan 2015) étudie les combinaisons présentées au ch. 1.5.2. Ces deux études se basent sur des hypothèses de départ différentes (objectifs climatique et énergétique, instruments utilisés, horizons temporels, etc.) et ne peuvent donc pas être comparées directement.

Ces estimations ne prennent en compte qu'une partie, et de manière approximative, de la diminution des coûts externes (premier dividende): pollution de l'air, bruit et accidents. En effet, la réduction des coûts climatiques et des risques nucléaires n'est pas prise en considération. De plus, une autre limite de ces estimations concerne la non-prise en compte de l'innovation qui agit comme un élan de croissance induit par la taxe. Les simulations se calculent toujours par rapport à un scénario de référence «Poursuite de la politique actuelle» (PPA), qui part de l'hypothèse que tous les instruments, mesures et lois de politique énergétique en vigueur en 2012 continueront à s'appliquer et que le comportement énergétique demeurera sensiblement identique à celui d'aujourd'hui. Ce scénario suppose un progrès technologique exogène. Le scénario de référence PPA revêt une importance centrale, les modifications dans l'élaboration du scénario de référence exerçant une grande influence sur les résultats de la modélisation. En outre, il est très ardu de représenter de manière détaillée la réalisation des objectifs par des mesures supplémentaires de
type réglementaire.

L'étude de 2012­2013 aboutit à un impact macroéconomique faible quelles que soient les variantes de redistribution des revenus. Les résultats de l'étude montrent que dans l'ensemble, les conséquences macroéconomiques d'une réforme fiscale écologique s'avèrent relativement modérées.

L'étude de 2015 calcule l'écart par rapport aux objectifs qui subsiste après la mise en oeuvre des taxes correspondant aux combinaisons 1 à 4 (voir tableau 2). Elle n'a pas pu calculer de manière comparable et fiable les impacts macroéconomiques des différentes combinaisons, parce qu'il n'a pas été possible de modéliser de manière suffisamment précise les instruments réglementaires complémentaires qui sont nécessaires pour atteindre les objectifs. C'est pourquoi seules des évaluations qualitatives des effets économiques sont présentées ci-dessous.

En revanche, en plus des quatre combinaisons, l'étude de 2015 calcule également les conséquences macroéconomiques d'une variante dans laquelle le niveau des taxes serait fixé de manière à atteindre exactement l'objectif de réduction des émissions et celui de réduction de la consommation d'électricité. Ce cas hypothétique permet d'estimer les effets macroéconomiques minimaux pour atteindre ces objectifs. En 7199

effet, toutes les autres variantes avec des niveaux de taxes inférieurs doivent être complétées par des mesures réglementaires dont l'impact négatif est en général plus fort. Pour cette variante hypothétique, la réduction du bien-être pour 2030 sera de 0,35 % (ce chiffre ignore toutefois les effets positifs sur le bien-être causés par une réduction des risques nucléaires, des risques climatiques et des effets secondaires, tels que la pollution locale et ses effets néfastes sur la santé) et la réduction du PIB de 1,3 %. Les effets macroéconomiques des mesures nécessaires à atteindre l'objectif de développement de l'électricité issue d'énergies renouvelables n'ont pas été estimés.

Les combinaisons 1 et 2 prévoient des taux de taxation bas concernant les combustibles et aucune taxation des carburants. Ces combinaisons ne pourront pas, à elles seules, réaliser les objectifs des politiques climatique et énergétique. Des mesures supplémentaires seront nécessaires, des normes, mais aussi d'autres mesures (conventions d'objectifs, appels d'offres, campagne d'information, etc.). Les normes devront être élaborées prudemment afin de permettre la réalisation des objectifs sans causer des coûts économiques trop importants. Comme les taxes incitatives sont basses dans les combinaisons 1 et 2, une intervention étatique plus forte y sera nécessaire pour atteindre les objectifs. Les combinaisons 3 et 4 prévoient quant à elles une base de taxation large comprenant les carburants, et des taux équivalents ou plus élevés par rapport aux premières combinaisons pour la taxation des combustibles. Les combinaisons 3 et 4 sont mieux à même de réaliser les objectifs climatiques et énergétiques, avec des coûts macroéconomiques moindres.

Les mesures supplémentaires, comme les normes, sont plus difficiles à élaborer car elles ne peuvent pas s'adapter à la diversité des situations (Ecoplan 2015: 55­57). La difficulté consiste alors à coordonner les mesures supplémentaires de la manière la plus optimale possible pour avoir des conséquences économiques faibles. Une taxe incitative fixe un taux identique pour tout le monde. Ce taux incite chacun à économiser l'énergie (ou le CO2) jusqu'au point où le coût nécessaire pour réduire la consommation d'énergie d'une unité (le coût marginal de remédiation) est égal au coût de l'énergie
économisée. Non seulement la taxe laisse davantage de liberté, ce qui constitue un avantage en soi, mais cette liberté augmente l'efficience puisque chacun peut adapter ses choix en fonction de sa propre situation. L'effort est plus largement réparti entre les différents canaux permettant de réduire la consommation d'énergie. Les taxes incitatives récompensent par exemple des changements de comportement tels qu'une réduction de la température des pièces. Le Programme Bâtiments par contre ne promeut pas de tels changements de comportement. Comme les combinaisons 3 et 4 utilisent les taxes incitatives comme instruments principaux, elles permettent d'atteindre les objectifs à moindres coûts par rapport aux combinaisons 1 et 2.

L'efficacité des mesures dépend certes toujours du détail de leur mise en oeuvre.

Plusieurs points soutiennent toutefois ce changement de paradigme. (i) Le fait évoqué précédemment que les taxes incitatives permettent de s'adapter à la diversité des situations. (ii) Les taxes incitatives n'engendrent pas d'effet de rebond. (iii) La taxe s'applique à la consommation restante. On sera toujours incité à réduire l'énergie utilisée alors que rien n'incite à aller au-delà de ce qu'exige la norme. (iv) Les taxes incitatives engendrent généralement des effets d'innovation. (v) Les coûts des taxes incitatives (administratifs, de mise en oeuvre, de transaction) sont généralement moins importants que ceux des normes. Ces dernières peuvent toutefois s'avérer utiles à titre subsidiaire (Infras et al. 2013: 125). Tel est notamment le cas si les taux 7200

des taxes ne peuvent pas être fixés à un niveau suffisamment élevé pour atteindre les objectifs, ou si des défaillances de marché empêchent la taxe d'agir pleinement, par exemple dans le domaine des logements locatifs.

Dans le domaine locatif, une taxe incitative peut ne pas fonctionner de manière idéale. Cependant, le droit du bail permet dans une large mesure de répercuter le coût des assainissements énergétiques sur les locataires. Des efforts pour améliorer la transparence sur les charges énergétiques sont en cours, de sorte que ceux qui cherchent à louer puissent prendre en compte non seulement le loyer, mais aussi les charges, y compris les coûts énergétiques. Toutefois, trois points limitent quand même l'impact de la taxe incitative dans le domaine locatif.

Premièrement, il n'y a pas d'impact sur les comportements des locataires en l'absence de décompte individuel des frais de chauffage et d'eau chaude. Cet inconvénient ne devrait par contre pas se manifester au niveau des assainissements énergétiques. En effet, même en l'absence d'un décompte individuel, le propriétaire peut avoir intérêt à procéder à un assainissement énergétique de son bâtiment dans la mesure où cela lui permet de réduire les charges et d'augmenter ainsi l'attrait de son bien malgré l'augmentation de loyer qu'implique la répercussion des coûts de l'investissement sur les locataires.

Deuxièmement, un locataire qui loue depuis longtemps le même logement bénéficie souvent d'un loyer nettement inférieur au prix du marché. Dans ces conditions, la taxe peut difficilement l'inciter à déménager dans un logement moins gourmand en énergie, et le propriétaire a moins d'incitations à procéder à un assainissement énergétique. Ce problème est réel, mais d'une ampleur qu'il convient de relativiser pour les raisons suivantes. Dans un immeuble, certains appartements peuvent être loués par d'anciens locataires et d'autres par de nouveaux locataires qui paient le prix du marché, sont donc plus mobiles que les anciens locataires et peuvent donc inciter les propriétaires à réaliser des assainissements énergétiques. Or, certains de ces assainissements, tels qu'une rénovation de façade, peuvent aussi bénéficier aux anciens locataires. Par ailleurs, à terme les logements finissent quand même par être occupés par de nouveaux locataires. La
réglementation peut aussi compléter l'impact de la taxe. Il serait de toute façon disproportionné de maintenir les subventions pour tous les bâtiments uniquement à cause de ce cas spécifique. Les subventions pourraient certes être limitées aux bâtiments locatifs dont le loyer se situe nettement audessous du prix du marché, mais il ne serait pas justifié de faire profiter de subventions uniquement ces locataires bénéficiant déjà de loyers avantageux.

Troisièmement, si le propriétaire renonce à des assainissements énergétiques pourtant rentables également pour lui-même (grâce à la répercussion des coûts sur les loyers) le locataire ne peut pas l'obliger à investir, et peut difficilement l'y inciter en cas de pénurie de logements. Reste à savoir dans quelle mesure ce cas de figure est réaliste. Ces questions sont importantes et seront examinées de manière plus approfondie lors de l'élaboration des lois.

3.2

Conséquences pour la Confédération

La réforme doit rester neutre pour les finances de la Confédération. Après une période transitoire où une partie des recettes servira encore à financer les dernières subventions (pour réduire les émissions de gaz à effet de serre et la consommation 7201

d'énergie, et en faveur de la production à partir d'énergies renouvelables), le produit des taxes incitatives sera intégralement redistribué à la population et à l'économie.

Fondamentalement, la réforme n'alimente donc pas le budget de la Confédération, et ne le pénalise pas non plus.

Il existe toutefois trois canaux par lesquels les taxes incitatives pourraient indirectement avoir un impact sur les finances de la Confédération: impacts indirects sur d'autres impôts (ch. 3.2.1), conséquences sur le personnel (ch. 3.2.2), réduction des coûts liés aux risques nucléaire et climatique (ch. 3.2.3). Sont ici négligés les impacts des taxes incitatives que la Confédération devra aussi payer, par exemple pour la consommation d'électricité et de chauffage dans ses bâtiments.

3.2.1

Impacts indirects sur d'autres impôts

Impôt sur les huiles minérales L'impôt sur les huiles minérales est un impôt de consommation levé sur les huiles minérales grevant l'huile de pétrole, les autres huiles minérales, le gaz de pétrole et les produits résultant de leur transformation, ainsi que les carburants. De plus, une surtaxe sur les huiles minérales grève les carburants. Les taux diffèrent selon les produits et leur utilisation (par ex. 73,12 centimes par litre pour l'essence sans plomb, 75,87 centimes pour l'huile de diesel et 0,3 centime pour l'huile de chauffage extra-légère). En 2014, l'impôt sur les huiles minérales représentait 7,8 % des recettes de la Confédération. La moitié des recettes de l'impôt grevant les carburants ainsi que la totalité de la surtaxe sont affectées à des tâches liées à la circulation routière et au trafic aérien. Au niveau fédéral, le financement des tâches et des dépenses liées à la circulation routière est assuré au moyen du financement spécial pour la circulation routière alimenté à environ 90 % par ces recettes. L'autre moitié des recettes de l'impôt grevant les carburants et l'impôt grevant les combustibles sont versés dans la Caisse fédérale. Quand le carburant est moins cher en Suisse que dans les pays voisins, des automobilistes étrangers sont incités à faire le plein en Suisse. Ce tourisme à la pompe contribue aux recettes de l'impôt sur les huiles minérales. Une augmentation des taxes sur les carburants, de même qu'une appréciation du franc suisse, peut réduire, voire inverser ce phénomène.

Si une taxe incitative sur les carburants est introduite, elle conduirait à une baisse de la consommation de carburants dont l'ampleur dépend de la réaction des automobilistes (baisse des trajets, achats de véhicules plus efficients). Cet effet, totalement voulu dans le cadre d'un système incitatif, pose un problème pour les recettes fiscales de l'impôt sur les huiles minérales. En effet, si ces dernières venaient à diminuer, les moyens affectés à la circulation routière et au budget général diminueraient d'autant. Pour pallier ce problème, les taux de l'impôt sur les huiles minérales applicable aux carburants pourront être relevés. Le principe est de conserver un total d'imposition suffisant pour provoquer l'effet incitatif voulu, tandis qu'à l'intérieur de ce total, les taux de la taxe incitative
applicable aux carburants et de l'impôt sur les huiles minérales applicable aux carburants pourront être modifiés afin de garantir les recettes de l'impôt sur les huiles minérales malgré la taxe incitative. Notons qu'actuellement de nouvelles dispositions constitutionnelles sont discutées au Parlement pour assurer le financement des routes15.

15

Message FORTA du 18 février 2015, FF 2015 1899.

7202

Il est possible qu'à terme l'impôt sur les huiles minérales soit remplacé par un système de mobility pricing, soit la tarification de la mobilité au moyen du prélèvement d'une redevance liée à l'utilisation des infrastructures. Or, l'interaction de la taxe incitative sur les carburants avec un tel système serait moins forte qu'avec l'impôt sur les huiles minérales. En effet, les recettes du mobility pricing ne dépendraient quasiment pas du tourisme à la pompe. Entre une taxe incitative sur les carburants et le mobility pricing existent différentes interactions qui doivent encore être étudiées plus en détail.

Taxe poids lourds La RPLP est prélevée en vertu de l'art. 85 Cst. qui dispose que la Confédération «peut prélever sur la circulation des poids lourds une redevance proportionnelle aux prestations ou à la consommation si ce trafic entraîne pour la collectivité des coûts non couverts par d'autres prestations ou redevances». La RPLP est perçue sur les véhicules lourds de plus de 3,5 tonnes immatriculés en Suisse ou à l'étranger, qui utilisent le réseau routier suisse. Elle dépend de trois facteurs: la longueur du parcours (km), le poids admissible total (tonnes) et les normes EURO des véhicules. La RPLP est restreinte de trois manières. (i) Ses taux, répartis en trois catégories, sont limités par l'accord bilatéral sur les transports terrestres16: la moyenne pondérée ne doit pas dépasser 325 francs suisses pour un 40 tonnes parcourant 300 km et la redevance de la catégorie la plus polluante ne doit pas dépasser 380 francs suisses.

(ii) L'art. 8 de la loi du 19 décembre 1997 relative à une redevance sur le trafic des poids lourds (LRPL)17 fixe un maximum de 3 centimes par tonne-kilomètre pour le taux moyen. (iii) L'art. 7 LRPL indique que le produit de la redevance ne doit pas excéder les coûts d'infrastructures non couverts et les coûts supportés par la collectivité. Les coûts d'infrastructures non couverts correspondent au solde du compte routier tandis que les coûts supportés par la collectivité correspondent aux coûts externes nets du trafic des poids lourds (pollution de l'air, accidents, bruit, impact climatique, etc.). Les deux tiers des produits de la RPLP sont utilisés pour financer les grands projets ferroviaires (NLFA), tandis que l'autre tiers est versé aux cantons au titre d'une
dépense liée pour la couverture des coûts non couverts du trafic routier.

Si une taxe incitative climatique sur les carburants est introduite, un potentiel conflit pourrait se produire entre cette taxe incitative et la RPLP, car les coûts externes climatiques des poids lourds seraient couverts deux fois. En cas de taxe incitative climatique sur les carburants, les coûts externes climatiques seraient donc déduits du total des coûts externes déterminants pour la RPLP de manière à éviter une double prise en compte. L'art. 131a, al. 5, Cst. permet de régler ce potentiel conflit: si la déduction des coûts externes climatiques devait conduire à une diminution des taux de la RPLP, et donc à une diminution des recettes, cette dernière devra être compensée par une partie correspondante des recettes de la taxe climatique. Cette compensation favorise toutefois les entreprises de transport routier étrangères face à leurs concurrents suisses, puisqu'ils pourront plus facilement faire le plein à l'étranger, bénéficiant ainsi de la baisse de la RPLP sans subir une augmentation de la taxe sur les carburants. Cet effet ne se produirait que si le taux de la RPLP est effectivement réduit et si le prix du carburant est meilleur marché à l'étranger.

16 17

Accord du 21 juin 1999 entre la Confédération suisse et la Communauté européenne sur le transport de marchandises et de voyageurs par rail et par route (RS 0.740.72).

RS 641.81

7203

Impôt fédéral direct et TVA Un impact des taxes incitatives sur l'activité économique aurait des répercussions sur la base fiscale de l'impôt fédéral direct, ainsi que de la TVA. Cet effet serait vraisemblablement minime parce que l'impact sur l'économie serait faible. De plus, l'impact sur ces bases fiscales serait, en tous cas partiellement, compensé par des effets contraires. Les produits des taxes incitatives redistribués aux entreprises sont en effet soumis à l'impôt fédéral direct et la taxe énergétique à la TVA.

3.2.2

Conséquences sur le personnel

Un système incitatif permet d'atteindre les objectifs climatiques et énergétiques à moindres coûts, aussi du point de vue administratif et donc en termes de personnel.

L'application des taxes incitatives utiliserait essentiellement des instruments existants (supplément réseau, taxe CO2) et n'engendrerait donc guère de nouveaux frais administratifs. La première étape de la SE 2050 prévoit un transfert de la perception du supplément réseau et de la RPC de Swissgrid vers la Confédération. L'introduction d'une taxe incitative sur l'électricité à la place du supplément réseau lors de la prochaine étape ne modifierait guère la situation. En contrepartie, la diminution des subventions permettrait une réduction des coûts administratifs correspondants.

Ces coûts administratifs sont actuellement financés par les recettes de la taxe CO2 et du supplément réseau. La réduction de ces coûts ne soulagerait donc pas le budget de la Confédération, mais permettrait une plus complète redistribution à la population et à l'économie.

Les coûts de personnel relatifs à la gestion des allégements de taxes pour les entreprises dépendent des modalités du système. Au cas où le cercle des entreprises bénéficiaires serait initialement identique au cercle actuel, alors les coûts correspondants seraient aussi initialement identiques, puis pourraient augmenter si ce cercle s'élargissait au fur et à mesure que les taxes croissent. L'impact du système incitatif sur les besoins en personnel sera précisé lors de l'élaboration des lois d'application.

3.2.3

Coûts liés aux risques nucléaire et climatique

La réforme vise à permettre la sortie du nucléaire et à atteindre les objectifs climatiques nationaux. Les centrales nucléaires sont situées sur le plateau suisse, soit la partie la plus densément peuplée de la Suisse. Une catastrophe nucléaire pourrait avoir des conséquences désastreuses pour la population et l'environnement, mais aussi sur les finances publiques. De plus, la production d'électricité par des centrales nucléaires engendre des déchets dont le stockage présente des risques de fuites radioactives qui pourraient impliquer des dépenses pour la Confédération.

En ce qui concerne les émissions de CO2, l'instauration d'un système incitatif contribuera à long terme aux efforts internationaux d'atténuation des changements climatiques. La Confédération éviterait alors de futures dépenses, par exemple les coûts de réparation des infrastructures. Comme indiqué au ch. 3.5, la réduction des émissions de CO2 entraîne aussi une réduction d'autres polluants, ce qui allégera les dépenses liées à la santé.

7204

3.3

Conséquences pour les cantons et les communes, ainsi que pour les villes, les agglomérations et les régions de montagne

L'introduction d'un système incitatif ne concerne pas directement le budget des cantons, puisque les taxes incitatives sont nationales et que leur redistribution se fera en principe par le biais des caisses-maladie et des caisses de compensation. Il peut toutefois y avoir un impact indirect sur l'économie des cantons (ch. 3.3.1), ainsi que d'autres impacts indirects sur les finances publiques cantonales (ch. 3.3.2).

3.3.1

Economie des cantons

Au niveau suisse, le produit des taxes incitatives sera à terme entièrement redistribué. Cependant, les cantons à forte intensité de consommation énergétique contribueront davantage que ce qu'ils recevront, au profit des cantons à plus faible consommation. En plus des montants perçus et reçus, il faut tenir compte de l'impact sur l'économie.

Différents facteurs influencent la consommation d'énergie: le revenu (cantons à faibles revenus favorisés), le climat (régions où l'hiver est moins rigoureux favorisées), les transports publics (agglomérations favorisées), la disponibilité des énergies alternatives (régions disposant de soleil, bois, vent, etc. favorisées), la structure de l'économie (régions où l'économie est spécialisée dans des branches peu gourmandes en énergie favorisées). L'impact cantonal peut être d'ampleur voire de direction, différentes selon que l'on considère l'économie ou les ménages (Ecoplan 2015). Les régions de montagne seraient pénalisées par le fait qu'il y est plus difficile de substituer les transports publics à l'automobile, et éventuellement par la rigueur du climat, mais seraient par exemple mieux placées pour utiliser le bois comme combustible. Selon Ecoplan (2015, ch. 5.2), les différences régionales seraient relativement faibles. Le projet d'article constitutionnel ne prévoit donc pas de compensation entre régions.

3.3.2

Impacts indirects sur les finances publiques des cantons

Le budget des cantons subirait des effets indirects. Un impact sur leur économie, qui devrait toutefois rester faible, se refléterait sur leurs finances, en particulier du côté des recettes. Par ailleurs, une réduction des recettes de l'impôt sur les huiles minérales aurait aussi un impact sur les cantons, qui pourrait être compensé par une augmentation du taux de cet impôt. De plus, les cantons touchent un tiers des recettes de la RPLP. Comme indiqué précédemment, l'éventuel impact sur ces recettes dû à l'évitement d'une double prise en compte serait compensé. Par contre une baisse des recettes de la RPLP due à une baisse du trafic ne serait pas compensée. Ceci est logique puisque la RPLP vise d'abord à faire assumer au trafic poids lourds les coûts qu'il engendre, et que ces coûts diminueraient si le trafic reculait. Il existe déjà actuellement dans le canton de Bâle-Ville une taxe sur l'électricité proche de celle envisagée au niveau fédéral. Dans le canton de Vaud et certaines de ses communes, il existe actuellement des taxes sur l'électricité ne visant pas à finan7205

cer la fourniture de l'électricité. Pour les cantons et les communes rien ne change: les taxes incitatives de la Confédération ne les empêchent nullement de continuer à lever de telles taxes, voire à en introduire de nouvelles.

Il est prévu que la redistribution forfaitaire à la population soit réalisée par le biais des caisses-maladie. Le risque que cela conduise à sous-estimer le coût de la santé peut être géré en indiquant clairement le montant total de la prime de l'assurancemaladie avant redistribution. Une autre option consisterait à effectuer cette redistribution forfaitaire sous forme de chèques, par exemple. Dans un tel cas, la tâche pourrait incomber aux autorités cantonales de taxation. Celles-ci devraient donc assumer des frais supplémentaires, notamment lors de la mise en place du système.

C'est surtout la détermination fiable des ayants droit au remboursement qui engendrerait des frais techniques et administratifs.

La production d'électricité est souvent propriété de collectivités publiques. L'impact sur les producteurs d'électricité dépend des modalités de la taxe sur l'électricité. Le projet d'article constitutionnel ne dit pas si la taxe sera uniforme ou si son taux dépendra du mode de production. L'impact sur les propriétaires de barrages sera différent selon que les barrages bénéficient ou non d'un taux réduit.

L'article constitutionnel prévoit non seulement de développer les taxes incitatives, mais aussi de réduire les subventions. Certes, les subventions sont actuellement financées dans une large mesure par une affectation des taxes incitatives existantes.

Une part des subventions provient toutefois aussi des budgets publics, en particulier cantonaux. Ainsi, le Programme Bâtiments est financé par une part du produit de la taxe CO2, mais aussi par 60 à 100 millions de francs de subventions cantonales. Le remplacement progressif des subventions par des taxes incitatives allégera donc les budgets cantonaux.

3.4

Conséquences environnementales

Selon l'évaluation de la durabilité du projet des taxes incitatives en matière climatique et énergétique effectuée par l'AFF (AFF 2015), les conséquences de la nouvelle disposition constitutionnelle sur l'environnement sont très positives. Ce résultat n'est pas étonnant, puisque la préservation de l'environnement est un des objectifs principaux de ces taxes incitatives. La nouvelle disposition constitutionnelle a des impacts positifs sur tous les critères environnementaux de l'évaluation de la durabilité: ressources renouvelables et non renouvelables, environnement naturel, catastrophes naturelles, risques d'accident, espaces naturels et biodiversité.

A travers la taxe climatique, la nouvelle disposition constitutionnelle entraîne un renchérissement des énergies non renouvelables comme le mazout, le gaz naturel et le pétrole, et, normalement, une diminution de leur consommation et une réduction des externalités négatives qu'elles engendrent. De plus, cette taxation contribuera à augmenter la part des énergies renouvelables (pellets, carburants biogènes, etc.) dans le domaine des combustibles et dans celui des carburants si la taxe CO2 sur les carburants est introduite. La combustion des énergies renouvelables ne présentera toutefois un bilan positif pour la qualité de l'air qu'à la condition qu'elle se fasse dans des installations à faibles émissions de poussières fines. Concernant la taxation de l'électricité, une taxation uniforme permettrait de réduire de manière globale la consommation d'électricité. Quant à la taxation différenciée, elle permettrait de 7206

favoriser l'électricité produite par les énergies renouvelables par rapport à celle produite par des énergies non renouvelables.

L'impact sur l'environnement naturel est positif. En effet, les taxes incitatives ont pour but de diminuer les émissions de CO2 et d'atteindre les objectifs énergétiques, à savoir la diminution de la consommation d'énergie et d'électricité. Les mesures visant à réduire les atteintes au climat peuvent avoir des effets sur la qualité de l'air en permettant une diminution de la pollution. En effet, des polluants locaux (dioxyde d'azote, monoxyde de carbone, particules fines, ozone) émis en même temps que les émissions de gaz à effet de serre vont diminuer et avec eux les dommages qu'ils entraînent, principalement sur la santé (voir ch. 3.5), mais aussi sur les bâtiments, l'agriculture et les forêts.

A moyen et à long termes, on peut estimer que l'instauration des taxes incitatives permettra de diminuer les émissions de gaz à effet de serre, et concourra donc, avec la contribution d'autres pays, à diminuer les impacts des changements climatiques comme les événements extrêmes et autres catastrophes naturelles. Par ailleurs, la réforme proposée est un instrument pour sortir du nucléaire, et éviter ainsi les impacts environnementaux considérables que pourraient impliquer les risques liés à la radioactivité (risque d'accident nucléaire, problématique du transport et du stockage des déchets radioactifs).

Enfin, les changements climatiques sont connus pour entraîner des modifications parfois irréversibles sur la biodiversité, comme l'extinction d'espèces, la perturbation des prestations des écosystèmes ou des modifications des aires de distribution de certaines espèces ou populations. Les impacts directs ou indirects des changements climatiques peuvent contribuer à une diminution de la diversité des habitats naturels et à long terme à la modification des particularités d'un paysage. Toute mesure visant à réduire les impacts des changements climatiques contribue donc à réduire ces phénomènes.

3.5

Conséquences sanitaires et sociales

Ce chapitre reprend les critères sociaux les plus pertinents de l'évaluation de durabilité pour le projet des taxes incitatives en matière climatique et énergétique: santé et société et solidarité (AFF 2015).

Conséquences sur la santé Une stratégie qui vise à réduire les émissions de gaz à effet de serre peut avoir des impacts positifs sur la santé car elle permet en partie de diminuer les polluants de l'air locaux. Certains polluants (poussières fines PM 10 et PM 2,5, soufre, oxyde d'azote et ozone) pénètrent profondément dans les voies respiratoires (ERS 2010).

Les particules en suspension ont des effets directs sur les voies respiratoires et le système cardiovasculaire. L'ozone provoque chez l'être humain des troubles importants de la fonction pulmonaire. Le monoxyde de carbone intervient quant à lui sur le système cardio-vasculaire. Il interfère avec la capacité du sang à transporter l'oxygène, avec des effets néfastes principalement au cerveau et au coeur. Les dioxydes d'azote aggravent les problèmes des patients asthmatiques. Enfin, les particules de suie des véhicules diesel sont des polluants cancérigènes.

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On parle également de bénéfices supplémentaires lorsque la diminution des émissions de CO2 est accompagnée d'une réduction d'autres polluants atmosphériques et permet ainsi d'éviter un certain nombre de dommages pour la santé, le bâtiment, l'agriculture et la biodiversité. Des études (econcept 2008 et 2009) ont montré que ces bénéfices supplémentaires se situent principalement dans le domaine de la santé, par le biais de la diminution des émissions polluantes dans le domaine des transports. En plus de la diminution des émissions de CO2, on évite des jours d'hospitalisation en raison de maladies respiratoires ou en raison de maladies cardiovasculaires, des bronchites chroniques chez les adultes, des bronchites aiguës chez les enfants, des crises d'asthme chez les adultes de plus de 15 ans et des jours d'activité limités chez les adultes de plus de 20 ans. Les coûts externes du trafic routier dans le domaine de la santé ont été évalués à 1,5 milliard de francs suisses (Ecoplan & Infras 2014).

La production d'énergie nucléaire implique deux types de risques pour la santé: les fuites radioactives au niveau des centrales et au niveau du stockage des déchets. Ces risques seront à terme éliminés, respectivement réduits, grâce à la sortie du nucléaire que permettra la prochaine étape de la SE 2050.

Solidarité et effets redistributifs Le système incitatif en matière climatique et énergétique veut préserver les intérêts des générations futures et favoriser ainsi la solidarité intergénérationnelle, en contribuant à leur léguer une planète sur laquelle les changements climatiques seraient atténués, dotée d'une gestion rationnelle, économe et efficiente des ressources naturelles renouvelables et non renouvelables, et exempte de risque nucléaire à l'échelon local.

En outre, le système incitatif renforcerait la solidarité intragénérationnelle entre ménages à faible revenus et ménages à revenus élevés. Lorsque l'on parle de taxes, la question de la régressivité de ces taxes se pose souvent, les ménages à faibles revenus payant proportionnellement plus que les ménages à revenus élevés. Cependant, les autres instruments ont aussi des effets redistributifs qui ne sont pas souvent pris en compte. Par exemple, les subventions au photovoltaïque profitent surtout aux propriétaires. De plus, la manière dont sont
redistribués les produits des taxes incitatives peut contribuer à diminuer la régressivité, voire à rendre le système progressif, quoique cela ne soit pas son but premier. En effet, bien que les ménages à revenus faibles consacrent une part plus importante de leur budget à leur consommation d'énergie, ils tendent à consommer moins d'énergie en valeur absolue. Dès lors, lorsque les recettes des taxes sont redistribuées par habitant, ils tendent à recevoir davantage que ce qu'ils ont contribué. Cette progressivité a été démontrée par les études Ecoplan (2012 et 2015). Par exemple, la combinaison 4, dont les taxes sont élevées, présente un caractère progressif. Cela est dû au fait qu'un montant plus important est redistribué par habitant que dans les combinaisons où les taxes sont plus basses et où les normes jouent un rôle plus important.

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4

Relations avec le programme de la législature et les stratégies nationales du Conseil fédéral

4.1

Relation avec le programme de la législature

Le Programme de la législature 2011­201518 contient un objectif sur le renforcement de l'attractivité et la crédibilité du système fiscal suisse (objectif 6). En vue d'atteindre cet objectif, trois mesures sont proposées, dont la mesure 20 «adopter le message sur la réforme fiscale écologique». Bien qu'on ne parle plus actuellement de réforme fiscale écologique au sens strict, mais plutôt de système incitatif, le projet d'article constitutionnel 131a instaurant un système d'incitation en matière climatique et énergétique concrétise la mesure 20 du programme de la législature.

4.2

Relation avec la stratégie pour le développement durable

La Suisse a élevé le développement durable au rang d'objectif d'Etat à long terme.

Le développement durable est mentionné à plusieurs reprises dans la Constitution fédérale. C'est un des buts de la Confédération (art. 2). De plus, un article spécifique lui est consacré dans le domaine environnemental (art. 73). Afin de remplir le mandat constitutionnel, le Conseil fédéral formule régulièrement ses intentions depuis 1997 dans sa Stratégie pour le développement durable. La stratégie pour le développement durable 2012­201519 du Conseil fédéral est une stratégie partielle du programme de la législature. Elle vise à concilier le développement économique avec la protection de l'environnement et la cohésion sociale. Dans le plan d'action de cette stratégie figure une mesure intitulée «Réforme écologique de la fiscalité» (mesure 9-1), par laquelle le Conseil fédéral veut notamment réorienter le système fiscal en fonction de ses conséquences environnementales. Le projet d'article constitutionnel 131a correspond à une mise en oeuvre partielle de cette mesure.

4.3

Relation avec le plan d'action Economie verte

Le plan d'action Economie verte, approuvé par le Conseil fédéral le 8 mars 2013, constitue la base du projet de révision de la loi sur la protection de l'environnement.

Cette révision fait office de contre-projet à l'initiative «pour une économie verte», dont le message a été adopté le 12 février 201420. En internalisant les effets externes, les taxes d'incitation contribuent largement et de façon économiquement rationnelle à préserver les ressources naturelles. Les travaux liés à l'économie verte visent eux aussi à ménager les ressources naturelles et à renforcer l'économie.

18 19 20

Arrêté fédéral du 15 juin 2012 sur le programme de la législature 2011 à 2015, FF 2012 6667, ici 6669 Disponible sur le site www.are.admin.ch, > développement durable FF 2014 1751

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5

Aspects juridiques

5.1

Constitutionnalité

Le présent projet vise à compléter la Constitution par l'ajout d'un nouvel art. 131a, avec la disposition transitoire correspondante (art. 197, ch. 12). La mise en oeuvre au niveau légal n'est prévue que dans un deuxième temps.

5.2

Compatibilité avec les engagements internationaux de la Suisse

Le présent projet est compatible avec les engagements internationaux de la Suisse.

Les développements au niveau international et au sein de l'UE seront pris en considération lors de l'application légale de l'article constitutionnel proposé. En particulier, la compatibilité avec le droit bilatéral de l'UE (relations Suisse-UE) et le droit de l'OMC devra être garantie. On tiendra également compte des dispositions éventuelles liées à l'accord sur l'électricité prévu entre la Suisse et l'UE.

5.3

Forme de l'acte à adopter

L'arrêté fédéral relatif à un article constitutionnel concernant la taxe climatique et la taxe sur l'électricité complète la Constitution par un nouvel art. 131a, avec la disposition transitoire correspondante (art. 197, ch. 12). Il est dès lors soumis au vote du peuple et des cantons.

5.4

Frein aux dépenses

L'art. 159, al. 3, let. b, Cst. prévoit qu'au-delà d'un certain seuil, les dispositions relatives aux subventions doivent être adoptées à la majorité des membres de chaque conseil. Or le frein à l'endettement ne porte que sur les subventions inscrites dans des lois formelles. En outre, le présent projet vise précisément à réduire et supprimer complètement, à moyen ou long terme, certaines subventions octroyées dans le domaine de l'énergie, en passant à un système d'incitation fondé sur la fiscalité. Le frein à l'endettement n'est donc pas applicable dans ce contexte.

5.5

Respect des principes de la loi sur les subventions

Aux termes de l'art. 6, let. e, de la loi du 5 octobre 1990 sur les subventions (LSu)21, des dispositions prévoyant des aides peuvent être édictées lorsque la tâche ne peut être accomplie d'une manière plus simple, plus efficace ou plus rationnelle. Dans la mesure du possible, les aides de démarrage, de réaménagement ou de relais prévues seront limitées dans le temps (art. 7, let. f, LSu). Par conséquent, le passage à un système incitatif prévoyant la réduction progressive, puis la suppression définitive des subventions existantes, correspond aux principes de la loi sur les subventions.

21

RS 616.1

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Liste des abréviations AFF ARE AVS CO2 COV Cst.

DETEC DFF GATT GO kWh LAA LEne LRPL LSu NLFA OCDE OFS OMC PIB PM PME PPA RPC RPLP RS SE 2050 SECO SEQE SICE TVA TWh UE

Administration fédérale des finances Office fédéral du développement territorial Assurance-vieillesse et survivants Dioxyde de carbone Composés organiques volatils Constitution Département fédéral de l'environnement, des transports, de l'énergie et de la communication Département fédéral des finances Accord général sur les tarifs douaniers et le commerce Garanties d'origine Kilowattheure Loi fédérale sur l'assurance-accidents Loi sur l'énergie Loi fédérale concernant une redevance sur le trafic des poids lourds liée aux prestations Loi sur les subventions Nouvelle ligne ferroviaire à travers les Alpes Organisation de coopération et de développement économiques Office fédéral de la statistique Organisation mondiale du commerce Produit intérieur brut Particulate Matter (particules en suspension, poussières fines) Petites et moyennes entreprises Poursuite de la politique actuelle Rétribution à prix coûtant du courant injecté Redevance poids lourds liée aux prestations Recueil systématique Stratégie énergétique 2050 Secrétariat d'Etat à l'économie Système suisse d'échange de quotas d'émission Système incitatif en matière énergétique et climatique Taxe sur la valeur ajoutée térawattheure Union européenne

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Bibliographie AFF (2014), Rapport sur les résultats de la consultation préliminaire: variantes d'un système d'incitation en matière climatique et énergétique, avril 2014.

AFF (2015), Evaluation de la durabilité, Système incitatif en matière climatique et énergétique, février 2015.

Aubert J.-F. et Mahon P. (2003), Petit commentaire de la Constitution fédérale de la Confédération suisse du 18 avril 1999, Schulthess, Zurich, Bâle et Genève.

DFF (2013), Rapport. Passage d'un système d'encouragement (fondé notamment sur les subventions) à un système d'incitation (fondé sur la fiscalité): variantes d'un système d'incitation dans la politique énergétique, 2 septembre 2013, Berne.

econcept (2008), Reduktion Treibhausgasemissionen: Gutachten Sekundärnutzen, rapport final élaboré sur mandat de l'Office fédéral de l'environnement, Zurich.

econcept (2009), Reduktion von CO2-Emissionen: Gutachten zu Sekundärnutzen durch Luftschadstoffreduktion, rapport final élaboré sur mandat du WWF Suisse, Zurich.

Ecoplan & Infras (2014), Externe Effekte des Verkehrs 2010, rapport final, 18 juin 2014, Berne, Zurich et Altdorf.

Ecoplan (2012), Volkswirtschaftliche Auswirkungen einer ökologischen Steuerreform, Analyse mit einem berechenbaren Gleichgewichtsmodell für die Schweiz, rapport final, 12 septembre 2012, Berne.

Ecoplan (2013), Ökologische Steuerreform ­ Rückverteilung und Ausnahmeregelung, Analyse mit einem berechenbaren Gleichgewichtsmodell für die Schweiz, rapport final, 5 juillet 2013, Berne.

Ecoplan (2015), Auswirkungen eines Klima- und Energielenkungssystems für 2030.

Analyse mit einem berechenbaren Gleichgewichtsmodell für die Schweiz, Berne.

ERS European Respiratory Society (2010), Qualité de l'air et santé, annexe 2: polluants et leurs effets, Lausanne.

gfs.bern et Université de Zurich (2015), Analyse VOX de la votation fédérale du 8 mars 2015, Berne.

IEEP (2013), Evaluation of Environmental Tax Reforms: International Experiences, rapport élaboré par l'Institute for European Environmental Policy (IEEP) pour le SECO et l'AFF, rapport final, Bruxelles.

Infras, BSS Volkswirtschaftliche Beratung, WWZ Universität Basel und Interface (2013), Energiestrategie 2050, Konzeption des Übergangs von einem Förder- zu einem Lenkungssystem, Literaturanalyse und Varianten, rapport final, 5 juillet 2013, Bâle,
Lucerne et Zurich.

OFEV (2013), Coûts et potentiel de réduction des émissions de gaz à effet de serre en Suisse.

Rapport du Conseil fédéral répondant au postulat 11.3523 du conseiller national Bastien Girod du 15 juin 2011, 16 décembre 2013, Berne.

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World Trade Institute, Heuking Kühn Lüer Wojtek (2014a), Differential Taxation of Electricity: Assessing the Compatibility with WTO Law, EU Law and the SwissEEC Free Trade Agreement, 18 avril 2014, Berne.

World Trade Institute, Heuking Kühn Lüer Wojtek (2014b), CO2 Levies and Tariffs on Imported Electricity: Assessing the Compatibility of Options with WTO Law, EU Law and the Swiss-EEC Free Trade Agreement, 8 août 2014, Berne.

World Trade Institute, Heuking Kühn Lüer Wojtek (2015), Renewable Electricity Tax Exemptions and Trade Remedies under International Law, 2015, Berne.

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