99.450 Initiative parlementaire Prestataires de services postaux, ferroviaires ou de télécommunications.

Obligation de proposer des formations professionnelles Rapport de la Commission des transports et des télécommunications du Conseil national (CTT-N) du 13 août 2001

Monsieur le Président, Mesdames et Messieurs, Conformément à l'art. 21quater, al. 3, de la loi sur les rapports entre les conseils (LREC), nous vous soumettons le présent rapport, que nous transmettons simultanément au Conseil fédéral pour avis.

La Commission propose d'approuver le projet d'acte ci-joint.

Une minorité de la commission (Binder, Engelberger, Estermann, Polla, Schenk, Theiler, Vaudroz René, Weigelt) propose de ne pas entrer en matière sur ledit projet d'acte.

13 août 2001

Au nom de la commission: Le président, Duri Bezzola

2001-2072

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Condensé L'initiative parlementaire (99.450) vise à modifier la loi fédérale sur la poste, la loi sur les télécommunications et la loi sur le transport de voyageurs, de façon que les entreprises concessionnaires dans ces trois domaines soient tenues d'offrir la possibilité d'effectuer une formation professionnelle initiale et de suivre une formation continue à des fins professionnelles. Les entreprises concernées bénéficieront d'un délai transitoire de trois ans à compter de l'entrée en vigueur de la nouvelle loi pour entamer la formation du premier apprenti.

Le 24 mars 2000, par 107 voix contre 60, le Conseil national donnait suite à l'initiative. Lors de la session d'été 2000, l'objet a de nouveau été confié à la Commission des transports et des télécommunications du Conseil national. Cette dernière s'est réunie à cinq reprises afin d'élaborer un projet de décision et a lancé une procédure de consultation auprès des entreprises directement concernées. Au vu des résultats de cette procédure, la commission a approuvé, le 13 août 2001, par 13 voix contre 8 et 2 abstentions, le présent projet d'acte. Une minorité de la commission (Binder, Engelberger, Estermann, Polla, Schenk, Theiler, Vaudroz René, Weigelt) propose de ne pas entrer en matière sur ce projet.

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Rapport 1

Genèse

1.1

Contenu de l'initiative et développement de l'auteur

Le 30 septembre 1999, le conseiller national Rudolf Strahm déposait une initiative parlementaire visant à n'accorder une concession d'exploitation dans les domaines relevant de l'infrastructure publique (télécommunications, services postaux, chemins de fer) qu'à la condition que les prestataires de services concessionnaires, ceux de l'industrie privée inclus, offrent la possibilité d'effectuer une formation professionnelle.

Cette nouvelle condition doit obliger les prestataires de services ayant déjà obtenu une concession ou désireux d'en obtenir une dans les domaines des télécommunications, des transports ferroviaires et des services postaux, à offrir un nombre suffisant de places de formation.

Dans son développement, l'auteur de l'initiative souligne que, en Suisse, la formation professionnelle est l'une des obligations dont l'économie doit s'acquitter à l'égard de la nation. L'offre de places de formation doit en quelque sorte être considérée comme inhérente au service public.

La déréglementation qui a eu lieu dans le domaine des télécommunications a fait apparaître une lacune dans les conditions à remplir pour obtenir une concession: alors que Swisscom offre encore 800 places d'apprentissage, dont plus de la moitié dans les domaines de l'informatique et de l'électronique, les nouveaux concessionnaires Diax, Sunrise et Orange ne font presque rien en faveur de la formation.

Ils font ainsi des économies au détriment des autres entreprises et prestataires de services. Pourtant, en Suisse, il manque environ 20 000 informaticiens de tous niveaux et l'association professionnelle Pro Telecom affirme que le manque de spécialistes est le principal obstacle au développement de ce domaine.

Pour ce qui est des autres prestataires de services concessionnaires de l'économie privée, c'est-à-dire dans les domaines de la poste (distribution des colis et des lettres) et des chemins de fer (bénéficiaires de la réforme des chemins de fer), la réduction de l'offre n'est pas encore sensible. Toutefois, un déséquilibre entre concessionnaire de droit public et concessionnaire de l'économie privée se dessine déjà.

Comme règle de base, il est possible d'admettre que pour assurer le maintien du système à deux piliers de la formation professionnelle, il est nécessaire de disposer de 6 places de formation pour 100
emplois à plein temps. Le Conseil fédéral devrait par conséquent avoir la possibilité de prescrire aux prestataires de services concessionnaires d'offrir un nombre minimal de places d'apprentissage dans le sens de conditions élargies d'octroi de concessions. Il devrait tenir compte de la situation sur le marché de l'emploi et des besoins en spécialistes formés. L'auteur de l'initiative estime qu'il est concevable que le simple fait de conférer une telle compétence au Conseil fédéral puisse déjà inciter les prestataires d'une branche à s'entendre pour fixer des normes minimales en matière de formation professionnelle.

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Il s'agissait en particulier d'examiner et de compléter les conditions d'octroi d'une concession dans les lois suivantes: ­

loi sur les télécommunications; RS 784.10, les art. 6, 15 et 23, (indispensable);

­

loi sur les chemins de fer; RS 742.101, l'art. 9, (souhaitable);

­

loi sur la poste; RS 783.0, l'art. 5 (le cas échéant).

De plus, l'auteur de l'initiative soulignait le fait que, lorsqu'il a fixé les conditions d'octroi des concessions, le législateur n'a pas renoncé à l'obligation d'assurer la formation professionnelle, mais qu'il a simplement oublié de le faire. L'initiative parlementaire veut combler cette lacune. Il va de soi qu'il faudrait également accorder une compétence équivalente aux cantons dans le cadre de la nouvelle loi sur le marché de l'électricité.

1.2

Examen préalable

Le 14 février 2000, la Commission des transports et des télécommunications a entendu l'auteur de l'initiative et a entamé l'examen préalable. A cette même date, elle a décidé par 13 voix contre 4 et 5 abstentions, de donner suite à l'initiative.

La majorité de la commission a motivé sa position en soulignant que la mutation structurelle qui a marqué le domaine de l'information, domaine qui a connu une multiplication des capacités de traitement de l'information par 10 000 en l'espace de 25 ans, appelle des mesures de soutien. La dérégulation des trois entreprises de la Confédération et les suppressions de postes qu'elle a engendrées ont par ailleurs considérablement ébranlé la confiance des employés et des régions concernés. Seule une compensation adaptée des répercussions négatives peut aujourd'hui rétablir la confiance de la population. Cette confiance est une condition nécessaire en vue des prochaines étapes de la libéralisation. Dans le cas contraire, tous les autres processus de dérégulation, notamment sur le marché de l'électricité, vont susciter une forte opposition.

Dans le domaine de l'informatique, la majorité de la commission est d'avis que même en créant un nombre élevé de places d'apprentissage au cours des prochaines années, la demande, qui ne cesse de croître, ne pourra être satisfaite assez rapidement. Il est donc justifié de prendre des mesures législatives pour assurer un nombre suffisant de places de formation. Par ailleurs, l'intervention pousse les nouvelles entreprises à créer des places d'apprentissage et à contribuer ainsi au maintien du système à deux piliers de la formation professionnelle. Un collaborateur qui a fait un apprentissage professionnel est capable de se perfectionner et de s'adapter à de nouvelles conditions professionnelles. Le marché des places d'apprentissage est un bon exemple des marchés qui ne parviennent pas à s'autoréguler: dans le secteur secondaire, trop de personnes qui ont accompli une formation ne trouvent pas d'emploi alors que, dans le secteur tertiaire, la formation de professionnels est insuffisante. L'expérience montre que les établissements de formation et les branches ne sont pas en mesure de planifier eux-mêmes l'offre de places d'apprentissage à long terme. En outre, l'initiative ne pose pas de problème du point de vue de la politique économique. Au contraire, en soumettant tous les concurrents aux mêmes conditions en matière de formation en les obligeant à assumer les mêmes

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responsabilités, elle favorise une vraie concurrence. Il est nécessaire de légiférer ponctuellement dans ce domaine où il s'agit justement de combler une lacune réglementaire et de placer tous les concurrents sur un pied d'égalité.

La majorité de la commission est toutefois de l'avis qu'il est nécessaire d'accorder un délai transitoire aux nouvelles entreprises pour leur permettre de mettre en place l'infrastructure indispensable à une formation professionnelle de qualité. Par ailleurs, la réglementation ne doit pas se limiter aux seules places d'apprentissage.

Elle doit s'appliquer d'une manière générale à toutes les obligations en matière de formation, notamment aussi aux reconversions.

Quant à la minorité de la commission, elle a motivé sa position en soulignant que l'intervention est inopportune et prématurée. Elle a rappelé l'existence de deux arrêtés sur les places d'apprentissage qui permettent de promouvoir la création de places d'apprentissage au moyen de subventions, d'une amélioration de l'infor-mation et de campagnes de promotion. La minorité est d'avis que, jusque-là, la politique en matière d'apprentissage s'est révélée judicieuse, intelligente et performante et qu'il n'y a pas lieu de légiférer pour l'instant.

La minorité est d'avis qu'il faut attendre de pouvoir consulter les statistiques sur la formation. Ces chiffres montreront les domaines qui pourraient souffrir d'un manque de spécialistes formés, ils permettront de comprendre les raisons de cette situation et de déterminer les mesures permettant d'y remédier. Ce n'est qu'après ces examens préliminaires qu'il sera possible de répondre à la question de savoir si la création de places d'apprentissage est le meilleur moyen de résoudre le problème ou s'il faut intervenir à d'autres niveaux, notamment au niveau de la formation universitaire. Pour certains, les prestataires visés ne disposent en outre que d'un petit nombre de collaborateurs en Suisse. Ils n'ont ni la taille ni la structure adéquate pour former correctement des apprentis. La minorité de la commission pense que d'autres entreprises, notamment celles qui développent et celles qui utilisent des logiciels, auraient également tout intérêt à offrir des places d'apprentissage dans le domaine informatique et qu'elles pourraient tout aussi bien être soumises à l'obligation
en matière de postes de formation.

La minorité de la commission est d'avis que l'Etat ne devrait pas intervenir sur l'offre de places de formation. D'une manière générale, la Suisse ne manque pas de places d'apprentissage. Toutes les branches en pleine croissance doivent lutter contre le manque de main-d'oeuvre. La hausse de la demande entraîne de meilleurs salaires, ce qui a automatiquement pour conséquence d'attirer plus de candidats à une formation dans les branches concernées. L'économie a prouvé qu'elle est intéressée à offrir des places d'apprentissage. Toutefois, en ce qui concerne les nouvelles branches économiques, le processus de formation doit se mettre en mouvement.

Il y a peu, des entreprises comme Sunrise et Diax n'auraient pas été en mesure d'offrir des places d'apprentissage étant donné que cela ne fait que deux ans qu'elles sont présentes en Suisse. Le fait qu'une société qui ne sait pas si elle va survivre sur un nouveau marché ne propose pas tout de suite des places de formation témoigne plutôt d'un certain sens des responsabilités. Il n'est pas bon de vouloir obliger les entreprises à offrir des places d'apprentissage par la contrainte. Une telle obligation discriminerait certaines entreprises et pourrait décourager des sociétés qui voudraient s'établir en Suisse. Les places d'apprentissages créées au cours de ces dernières années dans le cadre de programmes d'impulsion montrent qu'un système incitatif est beaucoup plus de souple et au moins aussi efficace qu'une obligation.

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Par ailleurs, la commission a également décidé, par 19 voix contre 3 et une abstention, de proposer au conseil d'adopter la motion «Campagne de réorientation professionnelle en informatique» (00.3005) qui demande que la Confédération lance une offensive de reconversion, limitée dans le temps, dont le but serait de créer des compétences supplémentaires dans les domaines clé de l'informatique et qui permettrait de combler le manque important de spécialistes en la matière. Il s'agit de former des spécialistes notamment dans les domaines dans lesquels une plus-value est produite par la conception, la réalisation, l'intégration, l'examen et l'exploitation de matériel et de logiciels. Il s'agit en particulier de faire plus d'efforts pour augmenter la proportion des femmes dans la branche informatique: en Suisse elle n'est actuellement que de 4 %, alors qu'elle peut atteindre 50 % à l'étranger. A la différence de l'initiative parlementaire Strahm, la motion ne vise pas la création de postes de formation, mais la reconversion de spécialistes de branches peu prometteuses pour pouvoir les engager le plus rapidement possible dans le domaine de l'informatique.

1.3

Délibérations du Conseil national

Le 24 mars 2000, le Conseil national a décidé par 107 voix contre 60 de donner suite à l'initiative. Les députés favorables à l'initiative ont relevé l'excédent de la demande en matière de place d'apprentissage dans le domaine informatique et le fait que le manque de spécialistes constitue un frein à la croissance pour l'industrie d'avenir. La plus grande partie de la main-d'oeuvre informatique est issue du système à deux piliers de la formation professionnelle raison pour laquelle il est indispensable de prendre des mesures immédiates pour au moins pouvoir atteindre l'équilibre entre l'offre et la demande d'informaticiens qualifiés.

Pour ce qui est de la motion de la commission, le Conseil national l'a transmise par 126 voix contre 41. Le 28 septembre 2000, le Conseil des Etats l'a quant à elle transmise à l'unanimité sous la forme d'un postulat des deux conseils. Le Conseil des Etats a choisi la forme moins contraignante du postulat étant donné qu'il considérait qu'une offensive de reconversion n'était déjà plus d'actualité sur un marché aussi dynamique.

1.4

Elaboration d'un projet

Au cours de la session d'été 2000, l'initiative parlementaire a été à nouveau attribuée à la Commission des transports et des télécommunications du Conseil national. A sa séance du 14 août 2000, la commission a institué une sous-commission composée de cinq membres (Simoneschi, Fehr H.-J., Föhn, Theiler, Vollmer), qui a été chargée d'élaborer un projet et de le soumettre aux entreprises concernées. Cette sous-commission, qui s'est réunie à cinq reprises, a mis sur pied avec le soutien de l'administration un projet de modification de la loi fédérale sur la poste, de la loi sur les télécommunications et de la loi sur le transport de voyageurs, en veillant à coordonner nouvelles dispositions avec nouvelle loi sur la formation professionnelle. La commission a à son tour soumis ce projet à certains intéressés triés sur le volet, dans le cadre d'une brève consultation.

5452

1.5

Considérations de la commission

La majorité de la commission se rallie au projet élaboré par la sous-commission, soulignant l'importance du maintien d'un système de formation dual pour la Suisse.

Si aucune mesure n'est prise aujourd'hui, il est clair que les futurs spécialistes en informatique seront formés uniquement dans les écoles, ce qui marquera la fin du système dual. C'est pourquoi les entreprises étrangères doivent elles aussi contribuer à la formation des apprentis, d'autant que cela permettra à ces derniers de vivre une expérience nouvelle. De plus, la période transitoire de trois ans permet aux PME ou aux entreprises récemment créées d'avoir le temps de se préparer à cette réforme. La majorité de la commission estime en outre que la formulation choisie, potestative, est parfaitement adaptée dans la mesure où, en habilitant le Conseil fédéral à intervenir en cas de dysfonctionnement avéré, elle permet de faire l'économie d'un dispositif réglementaire lourd. Cette compétence nouvelle attribuée au Gouvernement doit surtout inciter les entreprises concernées à former plus d'apprentis. Par ailleurs, la majorité de la commission est d'avis qu'une obligation généralisée de formation ne peut que jouer en faveur d'une concurrence loyale, puisque les conditions sont les mêmes pour tous les acteurs du marché. Elle souligne enfin que le dispositif proposé a été mis sur pied en concertation avec la Commission de la science, de l'éducation et de la culture.

Une minorité de la commission refuse, quant à elle, d'entrer en matière sur ce projet, au motif que ce dossier ne nécessite aucune intervention de la Confédération. Elle estime qu'au lieu d'introduire une réglementation inutile, il vaudrait mieux accorder plus de temps aux entreprises de ce secteur à forte croissance pour leur permettre de poursuivre leurs efforts en matière de formation des apprentis. En effet, dans la mesure où les entreprises ont elles-mêmes intérêt à former des apprentis, il est évident qu'elles seront disposées à prendre les mesures qui s'imposent. Par contre, il serait aussi malvenu qu'injuste de faire dépendre l'octroi d'une concession de l'obligation d'assurer une formation, puisque la réglementation ne s'appliquerait pas à toutes les entreprises du domaine ­ par exemple, aux fournisseurs d'accès Internet ­, ce qui risquerait de provoquer des distorsions
de concurrence. En outre, il serait étrange d'inscrire une obligation de former des apprentis dans les textes qu'il est proposé de modifier, alors que la Confédération elle-même a justement renoncé à faire figurer une telle obligation dans la nouvelle loi sur la formation professionnelle; il est même choquant de voir la Confédération imposer aux entreprises privées une obligation dont elle s'exonère elle-même.

2

Grandes lignes du projet

L'initiative parlementaire demande que les effets négatifs de la libéralisation dans le domaine de la formation professionnelle soient atténués. Le Conseil fédéral et le Parlement ont largement reconnu ce besoin. De plus, diverses interventions parlementaires ont été déposées et approuvées dans ce même domaine. Lors de sa séance du 23 août 2000, le Conseil fédéral a d'ailleurs lui-même décidé de proposer aux Chambres un crédit de 80 millions de francs destiné à financer des mesures de politique régionale en faveur des cantons qui sont particulièrement touchés par les restructurations de Swisscom, des CFF et de la Poste.

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Depuis le dépôt de l'initiative, une disposition concernant l'offre de places d'apprentissage a été introduite à l'art. 7, al. 3, de la loi sur le marché de l'électricité (LME; RS 731.1). Cette disposition stipule que «le Conseil fédéral peut obliger les entreprises visées à l'al. 1 à prendre des mesures en matière de reconversion et de formation professionnelle (offre de places d'apprentissage) afin de faciliter leur restructuration et d'assurer durablement la qualité des prestations.» En outre, le 7 mars 2001, le Conseil national a ajouté la disposition suivante (art. 3, al. 1, let. b) au programme d'action du Conseil fédéral «Zones économiques en redéploiement. Prorogation (00.075)» mentionné précédemment: «Des cautionnements et des allégements fiscaux peuvent être accordés pour des projets d'entreprises industrielles ou d'entreprises de services proches de la production si ces projets sont novateurs et créateurs d'une forte valeur ajoutée et qu'ils permettent: [a. ...] [b.] aux entreprises bénéficiaires de garantir à moyen terme une formation professionnelle de base (offre de places d'apprentissage).» Au cours de la même session de printemps, le Conseil des Etats s'est opposé à une telle prescription. Il était d'avis que le principe de subordonner le soutien d'entreprises désirant s'implanter à l'offre de places d'apprentissage était juste, mais qu'il n'avait pas à sa place dans la loi en question qui, elle, traite de l'implantation d'entreprises dans des régions structurellement faibles. Lors de la procédure d'élimination des divergences, le Conseil national a renoncé à cette prescription.

2.1

Résultats de la procédure de consultation

Entre le 18 avril et le 15 mai 2001, la sous-commission a consulté un certain nombre d'associations et d'entreprises concernées des Télécom, des postes et des chemins de fer sur l'obligation prévue de proposer une offre de formation. Invitées à s'exprimer sur le contenu du projet, lesdites associations et entreprises avaient également à répondre à trois questions précises. On trouvera résumées ci-dessous les réponses fournies.

En général La réglementation proposée ne fait pas l'unanimité: grosso modo, elle est approuvée au moins sur le principe par les syndicats, les CFF et La Poste, et condamnée sans appel par les organisations patronales et les groupements interprofessionnels des télécommunications, cependant que Swisscom et l'UTP adoptent une voie médiane, saluant l'idée de développer l'offre de formation, mais rejetant la solution d'un dispositif réglementaire contraignant.

L'USS (Union syndicale suisse) compte que le projet se traduira à la fois par une augmentation du nombre des emplois qualifiés et par une meilleure égalité entre hommes et femmes.

Les CFF (Chemins de fer fédéraux) et La Poste (La Poste Suisse) voient dans le projet la confirmation des efforts qu'ils consentent sur le plan de la formation, dans la mesure où ceux-ci sont conformes aux objectifs affichés par le Conseil fédéral. Au reste, soumettre à la même obligation les entreprises du secteur privé permettrait de faire jouer pleinement la concurrence.

L'UPS (Union patronale suisse), la SICTA (Swiss Information and Communications Technology Association) et le VIT (Verband Inside Telecom) s'opposent absolu-

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ment à une telle intervention d'un Etat qui à leurs yeux sortirait ainsi de son rôle.

Considérant que la liberté laissée aux entreprises a fait ses preuves, ils craignent que des mesures contraignantes ne finissent par avoir un effet contraire à celui recherché.

Plusieurs intéressés ont sévèrement critiqué le dispositif prévoyant de subordonner la délivrance de la concession à l'acceptation des dispositions relatives à l'obligation de formation. Orange, la SICTA, le VIT et Swisscable (association des opérateurs de réseaux de communication) ont regretté que ne soient concernées que les entreprises privées titulaires d'une concession, compte tenu des distorsions de concurrence qu'induisait cette inégalité, alors que lesdites entreprises ne constituent qu'une petite partie de celles qui sont actives sur le marché de l'information et de la communication.

La Poste indique que l'obliger à respecter certaines contraintes sous peine de ne pas lui délivrer de concession la place dans une position difficile, compte tenu de la concurrence que lui font les transporteurs privés.

L'UTP (Union des transports publics) regrette elle aussi que la délivrance de la concession soit liée à l'acceptation des dispositions relatives à l'obligation de formation. En lieu et place de cette obligation générale de formation applicable indistinctement à toutes les entreprises privées concessionnaires, il propose de donner au Conseil fédéral la compétence d'imposer une obligation de formation aux branches qui ne remplissent pas leurs engagements dans ce domaine.

Orange, la SICTA, le VIT et l'UPS estiment non seulement que le texte proposé ne va pas dans le bon sens, parce que de nombreuses entreprises du secteur visé n'ont été créées que récemment (et sont actives dans un environnement en pleine mutation), mais qu'il est inutile, parce que ces mêmes entreprises font déjà d'elles-mêmes un effort considérable sur le plan de la formation.

Le VIT et Orange craignent que d'une façon générale, la réglementation prévue ne rende la Suisse moins attrayante pour les entreprises actives dans le secteur des télécommunications.

Pour Swisscable, le texte se trompe de destinataire, puisque les opérateurs de réseaux câblés, par exemple, et qu'ils soient ou non titulaires ou non d'une concession, travaillent avant tout dans le domaine
non informatique.

Selon l'UTP, les objectifs visés par l'initiative ont de facto été atteints pour le secteur des transports publics dans son ensemble. Non seulement il est inutile de réglementer plus en détail le domaine concerné, mais c'est en contradiction avec la réalité du marché de l'emploi.

En particulier: Question 1: A votre avis, quelles seront les conséquences pratiques du projet pour les entreprises concernées d'une part, pour les salariés d'autre part ?

Le VIT, Swisscable et le SICTA y voient un fardeau imposé sans contrepartie aucune aux entreprises privées concessionnaires, donc générateur de distorsions de concurrence, et s'interrogent du reste sur la constitutionnalité d'une telle réglementation.

La CFF et La Poste estiment que la réglementation proposée permettrait de répartir d'une manière plus équitable les dépenses de formation sur les différents acteurs du marché. En outre, elle se traduirait par un élargissement de l'offre en matière de formation et de formation continue, dont ne pourraient que bénéficier les salariés.

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Swisscom considère que la réglementation proposée présente un risque pour les salariés, dans la mesure où elle pourrait contraindre les entreprises à investir l'essentiel des moyens ­ forcément limités ­ dont elles disposent pour la formation dans la formation des apprentis, au détriment de la formation continue, et donc des autres employés.

Pour l'USS, cet effort supplémentaire fourni en matière de formation constitue un atout sur le plan de la promotion des femmes, actuellement insuffisante. Autre élément positif: la réglementation prévue permettra de proposer des formations complètes et dignes de ce nom, au lieu de simples stages intensifs de reconversion rapide.

Le SEV (Schweizerische Eisenbahn- und Verkehrspersonal [Syndicat du personnel des transports]) considère pour sa part que c'est notamment dans les entreprises petites ou moyennes que pourrait être développée l'offre de places d'apprentissage, et que les PME devraient s'allier à cet effet.

Question 2: Que pensez-vous du nombre de places d'apprentissage qu'il est prévu de créer par entreprise (soit 6 places d'apprentissage pour 100 postes à plein temps) ?

Orange estime que ce pourcentage est beaucoup trop élevé.

Si le SEV ne conteste pas le principe d'un tel «quota», il estime que ce pourcentage est assez élevé pour le secteur des transports.

Swisscom, le VIT, Swisscable et l'UPS s'opposent à la fixation d'un pourcentage fixe, considérant qu'une disposition aussi rigide ne tient pas compte des fluctuations liées à un marché en pleine évolution.

La Poste, les CFF et l'UTP estiment eux aussi qu'un pourcentage unique ne tient pas compte des différences parfois considérables qui existent sur le terrain en termes de besoins de formation, selon le secteur considéré et la qualification visée. Ils seraient prêts néanmoins à se rallier à la disposition proposée, pour peu que, formulée de manière moins contraignante, elle tienne compte de cette diversité.

Question 3: Que pensez-vous du délai transitoire de trois ans que prévoit le projet ?

L'USS, le SEV, les CFF, La Poste et l'UTP considèrent que le délai transitoire prévu de trois ans est adéquat. L'USS demande même à cet égard l'abandon de la formulation potestative au profit d'une formulation impérative.

Swisscom souhaite que le délai soit porté à quatre ans: compte tenu en effet de
ce que c'est précisément la durée de l'apprentissage proposé par cette entreprise, cela lui faciliterait la transition.

Swisscable considère pour sa part qu'un délai de trois ans est envisageable, mais s'oppose en tout état de cause au projet tout entier.

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3

Commentaire des différentes dispositions

3.1

Loi fédérale sur la poste

Art. 4a Par un article spécifique sur la formation professionnelle, la Poste peut également être contrainte d'offrir une formation professionnelle initiale ainsi qu'une formation continue à des fins professionnelles. La Poste est ainsi soumise aux mêmes contraintes que les autres entreprises concessionnaires.

Art. 5 Il s'avère adéquat d'ancrer cette nouvelle obligation dans la concession, qui contient en règle générale les différents devoirs du concessionnaire. Ce faisant, on définit également l'autorité compétente pour l'exécution de cette prescription: l'autorité concédante.

3.2

Loi fédérale sur les télécommunications

Art. 6 Cf. explications relatives à l'art. 5 de la loi fédérale sur la poste. Il n'est pas nécessaire de prévoir une disposition légale formelle, en vertu de laquelle des places d'apprentissage doivent être offertes dans toute la Suisse (cf. première phrase de la let. c, selon laquelle les dispositions du droit du travail doivent être respectées; il va de soi qu'il s'agit en l'occurrence des dispositions du droit suisse). Le cas échéant, l'autorité concédante peut préciser une obligation allant dans ce sens au moment d'adapter la concession.

Art. 68a Le délai de trois ans court à partir de l'entrée en vigueur de la loi; c'est-à-dire que passé ce délai, les concessions existantes doivent être adaptées et l'obligation de mettre à disposition des places d'apprentissage doit devenir effective. Le délai a été fixé de manière à permettre d'une part l'adaptation de la concession et à laisser suffisamment de temps au concessionnaire pour construire et aménager l'infra-structure nécessaire à la formation.

3.3

Loi sur le transport de voyageurs

Art. 4 Cf. explications relatives à l'art. 5 de la loi sur la poste et à l'art. 6 de la loi sur les télécommunications.

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Art. 23a Cf. explications relatives à l'art. 68a de la loi sur les télécommunications.

4

Conséquences

4.1

Conséquences financières et effets sur l'état du personnel

Le projet n'a de conséquences financières directes ni pour la Confédération, ni pour les cantons.

Des conséquences indirectes sont possibles dans la mesure où la Confédération et les cantons, aux termes de la loi sur la formation professionnelle, doivent prendre en charge l'enseignement professionnel pour les jeunes qui effectuent une formation initiale dans les entreprises concernées. Ces dépenses supplémentaires seront cependant marginales au regard de l'ensemble des dépenses de la Confédération et des cantons pour la formation professionnelle initiale, et devraient se situer en deçà des fluctuations habituelles observées d'une année à l'autre.

4.2

Degré d'applicabilité

Il appartiendra aux autorités qui délivrent les concessions de vérifier que les entreprises concernées s'acquittent bien de l'obligation de former des apprentis. Cette vérification ne demandera pas de grands investissements, si elle est effectuée dans le cadre des contrôles réguliers auxquels sont soumis les prestataires de services concessionnaires.

L'exécution se maintiendra dans le cadre habituel de la formation professionnelle: les cantons seront chargés d'approuver les contrats d'apprentissage et de contrôler que les entreprises respectent leurs obligations en matière de formation telles qu'elles découlent de la loi sur la formation professionnelle; de même, les cantons assureront l'organisation de l'enseignement professionnel.

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