02.065 Message relatif à la loi fédérale sur l'analyse génétique humaine du 11 septembre 2002

Madame la Présidente, Monsieur le Président, Mesdames et Messieurs, Nous avons l'honneur, par le présent message, de soumettre à votre approbation un projet de loi fédérale sur l'analyse génétique humaine.

Nous vous demandons en outre de classer l'intervention parlementaire suivante: 1996 M 96.3263

Contrats d'assurance. Interdiction des tests génétiques préalables (M 13.6.96, Günter)

Nous vous prions d'agréer, Madame la Présidente, Monsieur le Président, Mesdames et Messieurs, l'assurance de notre haute considération.

11 septembre 2002

Au nom du Conseil fédéral suisse: Le président de la Confédération, Kaspar Villiger La chancelière de la Confédération, Annemarie Huber-Hotz

2001-1086

6841

Condensé Ces dernières décennies, les connaissances sur le patrimoine génétique humain ont progressé de façon spectaculaire et conduit au développement de nouvelles méthodes d'analyse en vue notamment de déterminer les gènes responsables de maladies et d'anomalies. L'analyse du patrimoine génétique contribue au diagnostic, à la prévention et à la thérapie de maladies incurables jusqu'ici. Elle permet aussi ­ ce qui est révolutionnaire ­ de déterminer des prédispositions à des maladies avant que des symptômes cliniques ne se manifestent. Enfin, elle permet d'établir la filiation ou l'identité d'une personne grâce à l'établissement d'un profil d'ADN. Ces différentes applications soulèvent toutefois des questions éthiques, psychiques et sociales particulièrement délicates.

Le présent projet de loi fixe les conditions auxquelles les analyses génétiques humaines peuvent être réalisées, en particulier dans les domaines de la médecine, du travail, de l'assurance et de la responsabilité civile. En outre, il règle l'établissement de profils d'ADN permettant de déterminer la filiation ou l'identité d'une personne dans une procédure civile ou administrative, ainsi qu'en dehors d'une procédure, sous réserve de l'application de la loi fédérale sur les profils d'ADN, qui est actuellement examinée par le Parlement. L'autorisation d'effectuer des analyses génétiques dans le domaine de la recherche sera réglée dans la future loi fédérale sur la recherche sur l'être humain.

L'analyse génétique constitue un domaine d'application de la biologie, qui évolue très rapidement. C'est pourquoi la loi doit être formulée de la manière la plus souple possible de sorte que les développements futurs soient également pris en compte.

Pour cette raison, le projet de loi entend par analyses génétiques non seulement les analyses cytogénétiques et moléculaires, mais également toutes les autres analyses de laboratoire qui visent à obtenir de manière directe des informations sur le patrimoine génétique. Ce qui est déterminant ce n'est dès lors pas la méthode d'analyse elle-même, mais le but de celle-ci, à savoir la détermination par une analyse de laboratoire des caractéristiques du patrimoine génétique héréditaires ou acquises pendant la phase embryonnaire. En outre, le projet prévoit l'institution d'une Commission d'experts pour
l'analyse génétique humaine, qui devra, entre autres, émettre des recommandations pour les praticiens et signaler les lacunes de la législation.

En raison de la complexité des analyses génétiques et de la difficulté d'interpréter leurs résultats, le projet met l'accent sur la garantie de la qualité. Ainsi, une analyse génétique ne peut en principe être prescrite que par un médecin. La remise des trousses de diagnostic génétique in vitro est soumise à des conditions strictes. Les laboratoires qui effectuent des analyses cytogénétiques ou moléculaires devront obtenir une autorisation de l'autorité fédérale compétente. Il en va de même pour les dépistages.

Les analyses génétiques présymptomatiques, les analyses génétiques prénatales et les analyses visant à établir un planning familial requièrent une protection spéciale des personnes qui s'y soumettent. Elles devront, en particulier, être précédées et

6842

suivies d'un conseil génétique non directif et ne pourront être prescrites que par un médecin ayant une formation postgrade adéquate. La loi interdira par ailleurs d'effectuer des analyses prénatales en vue de rechercher des caractéristiques de l'embryon ou du foetus qui n'influencent pas de manière directe sa santé. Au surplus, le projet prévoit la mise sur pied d'offices d'information indépendants en matière d'analyse prénatale; sur demande des parents, ils serviront également d'intermédiaire avec les associations de parents d'enfants handicapés.

Toute discrimination d'une personne en raison de son patrimoine génétique est interdite. C'est pourquoi le projet interdit d'exiger une analyse génétique présymptomatique ou de demander les résultats d'une telle analyse dans les domaines du travail et de la responsabilité civile. Des exceptions sont admises dans le domaine de la médecine du travail, mais elles sont soumises à des conditions et à des contrôles stricts.

Dans le domaine des assurances privées ­ à l'inverse de celui des assurances sociales ­ l'évaluation du risque lié à la santé du preneur d'assurance est un élément fondamental. Le projet interdit à une institution d'assurance d'exiger une analyse génétique présymptomatique ou une analyse génétique prénatale; il protège ainsi le droit d'une personne de ne pas connaître des informations relatives à son patrimoine génétique. Il lui interdit également de demander ou d'utiliser les résultats d'une analyse génétique présymptomatique, d'une analyse génétique prénatale ou d'une analyse visant à établir un planning familial déjà effectuée si le rapport d'assurance porte sur une assurance sociale, une assurance prévoyance professionnelle, une assurance contractée au titre de l'obligation de verser le salaire en cas de maladie ou de maternité ou sur une assurance sur la vie dont la somme d'assurance est de 400 000 francs au maximum ou une assurance-invalidité privée dont la rente annuelle est de 40 000 francs au maximum.

6843

Message 1

Partie générale

1.1

Introduction

Les premières découvertes sur la transmission des caractères d'une génération à une autre ont été faites au milieu du 19e siècle par Gregor Mendel, un moine morave, au moyen d'expériences sur des petits pois. Cette découverte a marqué le début de la science de la génétique. Mais les résultats de ces recherches furent ignorés pendant plus de 40 ans.

Ce n'est qu'en 1900 que naît véritablement la génétique moderne avec la redécouverte des travaux de Mendel. Elle n'est cependant encore qu'une science d'observation et pas une science explicative. Des chercheurs parviennent à localiser des gènes sur les chromosomes, mais on ne sait rien sur leur nature ou sur leur mode d'action. Cependant, on suppose déjà que l'ADN (acide désoxyribonucléique) est le support de l'information génétique.

En 1953, la biologie moléculaire franchit une étape déterminante avec la découverte, par les chercheurs James Watson1 et Francis Crick, de la structure biochimique de l'ADN2 humain. Cette découverte va permettre de comprendre le transfert des informations chez les êtres vivants.

Enfin, depuis les années 1970, on assiste à une explosion de la génétique moléculaire. En 1988, 42 scientifiques ont créé la Human Genome Organisation (HUGO ou projet «Génome humain»). Cette organisation internationale a pour but de mettre sur pied le projet de séquençage du génome humain «Human Genome Project», d'assurer son financement, d'encourager la coopération internationale dans le domaine de la recherche relative au séquençage3 du génome humain ainsi que de coordonner la recherche. Elle a cependant aussi pour tâche d'analyser les implications éthiques, sociales, juridiques et économiques du projet et de mener le débat public.

Elle regroupe des centres de recherches universitaires de 18 pays, en particulier des Etats-Unis, de Grande-Bretagne, d'Allemagne, de France et du Japon. Le séquençage complet des quelque 3 milliards de nucléotides était prévu pour la fin de l'année 2005. La Suisse, par l'intermédiaire de l'Université de Genève, a participé au décodage des gènes du chromosome 21.

Un projet similaire de décodage du génome humain a été mené par la société privée américaine Celera Genomics, sous la direction de J.C. Venter. D'abord rivaux, le Projet du génome humain et Celera Genomics se sont unis pour rendre public leurs

1 2

3

James D. Watson, Die Doppel-Helix. Ein persönlicher Bericht über die Entdeckung der DNS-Struktur, Reinbeck bei Hamburg 1969.

L'ADN est constitué ­ outre de glucose et de phosphate ­ de quatre sortes de molécules chimiques de base, appelées adénine (A), cytosine (C), guanine (G) et thymine (T). Pour plus d'explications scientifiques, voir ch. 1.2.1.

Le séquençage consiste à identifier et à localiser les gènes sur les chromosomes, ainsi qu'à déterminer l'ordre de la succession des bases le long de l'ADN.

6844

résultats en 20014. Entre autres et multiples apports, ces travaux ont permis de faire la surprenante découverte que l'être humain ne compte probablement que 35 000 à 45 000 gènes. Cependant, tant le Projet du génome humain que Celera Genomics ont essuyé un certain nombre de critiques5.

Le décryptage du 99,9 % du génome humain devrait être terminé dans un proche avenir, donc plus tôt que prévu. Toutefois, le déchiffrage du patrimoine génétique humain ne constitue qu'un début. En effet, le séquençage complet de l'ADN ne fournit en lui-même aucune information sur le fonctionnement de celui-ci6. Le code génétique établit la relation entre séquences d'ADN et séquences d'acides aminés, par conséquent avec des protéines, mais la séquence d'un gène ne permet pas de déterminer de manière exacte la structure et la fonction d'une protéine. Le déchiffrage du génome d'autres espèces et l'analyse comparée des données devraient permettre de mieux comprendre la fonction des gènes, leur régulation et leurs interactions, entre eux et avec les protéines. A l'avenir, de nouvelles méthodes seront développées pour analyser la totalité des ARN messagers (transcriptomics), des protéines (proteomics) ou des métabolites (metabolomics) d'une cellule, d'un tissu ou d'un organe (voir tableau sous ch. 1.2.1). La Human Proteomics Organisation (HUPO) s'est créée suite à HUGO. «Proteomics» est un projet qui étudie la synthèse des protéines, leur structure tridimensionnelle, leurs constantes modifications ainsi que leurs interactions. Il permettra de mieux comprendre le rôle de la génétique dans la santé et la maladie. Le proteome humain devrait comprendre entre 300 000 et 400 000 protéines différentes; chaque protéine peut avoir une interaction avec 5 à 10 autres protéines.

La compréhension toujours plus grande des mécanismes cellulaires complexes et des interactions biologiques devrait contribuer à l'amélioration du diagnostic, de la thérapie et de la prévention des maladies génétiques. Selon les estimations du responsable du Projet du génome humain, les retombées pratiques de ce projet sur le développement de la biomédecine devraient se produire en trois étapes dans les vingtcinq ans à venir. Dans une première étape, on devrait pouvoir disposer des premiers dépistages des risques de cancer, de diabète et d'attaques cérébrales,
et procéder aux premiers essais cliniques de traitements par thérapie génique de l'hémophilie, des maladies cardiaques et de certains cancers. Dans une deuxième étape, les traitements devraient pouvoir être individualisés et un plus grand nombre de maladies devraient pouvoir être traitées. D'ici 2025 enfin, des défauts génétiques devraient pouvoir être corrigés.

Les découvertes sur l'ADN ont amené la science à développer les moyens de l'analyser directement, donnant naissance à une nouvelle discipline qui est l'analyse génétique. Cette analyse peut être utilisée à des fins diverses. L'objectif principal est de découvrir quels sont les gènes impliqués dans les maladies ou les handicaps, avec l'espoir de pouvoir les guérir dans le futur. Mais elle sert aussi, par exemple, à

4

5 6

International Human Genome Sequencing Consortium. Initial sequencing and analysis of the human genome, Nature 2001; 409: 860-921; J.C. Venter et al., The sequence of the human genome. Science 2001; 291: 1304­1351.

Cf. NZZ du 13 juin 2001, p. 69.

Conférence du Professeur Hubert E. Blum, Freiburg i. Br., intitulée «Genomics und Fortschriftt der Medizin», tenue lors des premières journées d'information nationales «Genomics im ärztlichen Praxis- und Klinikalltag», qui ont eu lieu les 26 et 27 avril 2001 à Schwyz.

6845

déterminer une filiation, à identifier une personne ou un cadavre, ou encore à élucider une affaire criminelle.

Le déchiffrage du génome humain et le développement de l'analyse génétique soulèvent d'immenses espoirs. Ils sont non seulement susceptibles d'apporter des progrès notables dans le diagnostic, la prévention et la thérapie de maladies jusqu'ici incurables causées par la déficience d'un gène, mais aussi ­ ce qui est révolutionnaire ­ de détecter une prédisposition à ces maladies avant que des signes cliniques n'apparaissent. Cette possibilité ouvre une ère nouvelle dans le domaine de la médecine, celle de la médecine prédictive. En effet, la détection d'une prédisposition à une maladie génétique peut permettre de prendre des mesures préventives (par exemple modifier le mode de vie ou du régime alimentaire) pour diminuer les risques de déclenchement de la maladie, voire en empêcher l'apparition. Même la détection, avant l'apparition des symptômes, d'une maladie génétique actuellement incurable peut présenter des aspects positifs en permettant d'entreprendre un traitement précoce ou de prendre des décisions pour la vie future.

Mais si l'analyse génétique constitue un progrès incontestable, elle n'en soulève pas moins d'importantes questions éthiques, psychiques et sociales. Ainsi, le fait de connaître son état de santé futur peut constituer une lourde charge pour un être humain. L'analyse génétique peut aussi ouvrir la voie à des pratiques discriminatoires, telles que l'élimination systématique des foetus souffrant d'anomalies génétiques décelées par diagnostic prénatal, la sélection discriminatoire par les assureurs des candidats à l'assurance, la sélection discriminatoire par les employeurs des demandeurs d'emploi et des travailleurs. De telles pratiques auraient pour conséquence de marginaliser les personnes porteuses de «mauvais» gènes, ce qui irait à l'encontre du but de la médecine, qui est d'être au service de l'homme.

C'est le rôle du législateur de prendre des mesures pour garantir une utilisation de l'analyse génétique respectueuse des intérêts de l'individu et pour empêcher d'éventuels abus.

1.2

Fondements médicaux des analyses génétiques

1.2.1

Notions de génétique

Le noyau de chaque cellule diploïde du corps humain contient 23 paires de chromosomes; chaque paire consiste en un élément provenant du père et un élément provenant de la mère. De ces 23 paires, 22 sont identiques chez la femme et chez l'homme; la 23e paire diffère d'un sexe à l'autre (chromosomes sexuels). Les chromosomes sexuels consistent en deux chromosomes X chez la femme, un chromosome X et un chromosome Y chez l'homme.

Les chromosomes consistent essentiellement en ADN, qui est la substance-clé de l'hérédité. C'est l'ADN en effet qui détermine les caractéristiques héréditaires propres à chaque individu (couleur des yeux, des cheveux, la forme du visage, mais également maladies génétiques, prédispositions à des maladies etc.) et qui en assure la transmission à une génération suivante. L'ADN est une molécule composée de deux brins enroulés l'un autour de l'autre en une double hélice. S'il était entièrement déroulé, l'ADN d'une cellule humaine mesurerait plus de 2 mètres. L'ADN ressemble à une échelle torsadée, dont les échelons sont formés par deux des quatre 6846

bases qui constituent l'ADN: l'adénine (A), la thymine (T), la guanine (G) et la cytosine (C). Chaque base est couplée à un désoxyribose, lui-même associé à un phosphate, formant un nucléotide. Les nucléotides ­ au nombre d'environ 3 milliards pour chacune des deux garnitures de chromosomes ­ se succèdent dans un ordre précis, formant une séquence. La détermination de l'ordre de la succession des nucléotides s'appelle le séquençage, qui a fait l'objet des études menées par le Projet du génome humain et la société Celera Genomics (ch. 1.1).

L'ADN se trouve non seulement dans le noyau de la cellule, mais aussi dans les mitochondries (organelles se situant dans le cytoplasme et responsables de la production d'énergie de la cellule, sorte de centrales énergétiques). Celles-ci contiennent un nombre variable de molécules d'ADN circulaires qui sont constituées de 16 569 paires de base dont la séquence a été entièrement déterminée. Les mitochondries, et par conséquent leur ADN, proviennent presque exclusivement de la mère.

Un gène est un segment d'ADN, qui constitue une unité fonctionnelle. Alors que le nombre de gènes chez l'homme était estimé jusqu'à récemment entre 50 000 et 100 000, les données du Projet du génome humain et de la société Celera Genomics montrent que ce nombre se situerait entre 35 000 et 45 000. Chaque gène remplit une fonction précise dans le corps à un moment donné. Il contient l'information (la recette) nécessaire à la synthèse d'une protéine particulière. Ainsi, ce qui est déterminant dans un organisme, ce n'est pas seulement la présence de gènes déterminés, mais le fait qu'ils sont influencés dans leur expression par d'autres gènes ou par des facteurs environnementaux.

L'ADN qui code pour des protéines (exons) ne représente qu'une petite partie de l'ADN total du noyau cellulaire. Ceci signifie qu'une partie importante de l'ADN ne code pas pour des protéines (ADN non-codant), mais sert entre autres de séquences régulatrices ou de point de départ pour la duplication de l'ADN (synthèse) qui précède une division cellulaire. Il est donc faux de désigner l'ADN non-codant simplement comme «junk» ADN (ADN-poubelle). La recherche n'a pas encore pu clarifier la fonction de grandes parties de l'ADN. En particulier, on connaît mal la signification biologique des ADN mini- et microsatellites,
qui sont utilisées à des fins d'identification. Ces ADN consistent en la répétition, un grand nombre de fois, de courtes séquences qui occupent des positions bien définies sur les chromosomes et dont le nombre peut varier d'un chromosome homologue à l'autre.

De plus, les gènes humains ont une structure plus complexe que ceux des microorganismes. Ils ne se composent pas uniquement d'éléments de régulation (les promoteurs), de portions codantes (les exons) et d'éléments de terminaison (les terminateurs). Ils contiennent en plus ce qu'on appelle des introns, éléments qui, bien que ne codant pas des protéines sont aussi transcrits en ARN (abréviation pour acide ribonucléique). Avant que l'ARN ne quitte le noyau, il subit un traitement qui enlève toutes les séquences introniques (épissage), produisant une molécule plus courte (l'ARN messager). Celle-ci passe dans le cytoplasme où elle va diriger la synthèse d'une protéine particulière. Une fois synthétisée, celle-ci subit encore de nombreuses transformations pour pouvoir remplir sa fonction.

6847

Figure 1

Ainsi, par exemple l'insuline (l'hormone nécessaire au maintien d'une concentration normale de sucre dans le sang) se forme à partir du produit original du gène en passant par un produit intermédiaire appelé propréinsuline, puis par un autre appelé proinsuline, en découpant, à chaque étape, différentes parties du produit original du gène.

1.2.2

Mutations chromosomiques et mutations géniques

Le terme de mutation a été introduit, en 1901, par le botaniste néerlandais de Vries et désigne un changement intervenant dans le matériel génétique. Les mutations peuvent survenir au niveau des chromosomes, dont le nombre ou la structure peuvent s'écarter de la norme (anomalies chromosomiques). Un exemple bien connu de maladie liée à une anomalie chromosomique est le syndrome de Down (communément et maladroitement appelé mongolisme), dû à la présence de trois chromosomes 21 au lieu de deux (trisomie 21 au lieu de disomie 21).

Les mutations peuvent affecter l'ADN sans qu'aucun changement dans le nombre ou dans la morphologie chromosomique ne soit décelable au microscope selon les techniques d'analyse conventionnelles. Elles peuvent survenir dans l'ADN codant et affecter un ou plusieurs gènes. Un gène défectueux peut avoir pour conséquence que la protéine ne soit pas produite ou qu'elle se trouve altérée d'une façon qui affecte son fonctionnement, ce qui peut provoquer des maladies comme la mucoviscidose, le diabète ou le cancer. Si un seul gène est défectueux, on aura une maladie dite monogénique; si plusieurs gènes concourent simultanément à la production d'un état 6848

pathologique, il s'agit d'une maladie polygénique. Toutefois, chaque mutation ne conduit pas forcément à la manifestation d'une maladie génétique. Seuls des changements spécifiques d'un gène provoquent les symptômes de maladies définies.

Lorsqu'elles surviennent dans les domaines non-codants, les mutations n'ont apparemment aucune conséquence pour l'individu. Elles peuvent être transmises d'une génération à l'autre et génèrent un polymorphisme qui sert de base à l'établissement des profils d'ADN.

L'ADN mitochondrial, et donc les gènes qui le constituent, font l'objet de fréquentes mutations. Beaucoup de maladies mitochondriales révèlent la présence simultanée d'ADN normal et d'ADN muté dans la même cellule, ce qui peut entraîner, selon les proportions respectives, des effets variables d'un individu à l'autre, au sein d'une même famille, pour la même mutation. A ce jour, on connaît plus de 50 maladies provenant de la mutation d'un gène mitochondrial. Ce sont surtout le système nerveux central, les muscles du coeur et du squelette, les reins ainsi que les glandes endoctrines qui sont affectés.

1.2.3

Contribution de la génétique moléculaire à la compréhension actuelle des mutations géniques

L'ADN peut subir une grande variété de lésions. Les mutations consistent généralement en une modification de la composition en bases, un réarrangement du matériel génétique, la perte ou le gain de séquences d'ADN. Dans l'anémie falciforme, par exemple, qui sert généralement de modèle pour les mutations de ce type, la modification d'une paire de bases dans le gène codant pour la JORELQH SURWéine entrant dans la composition de l'hémoglobine, conduit à l'incorporation d'un acide aminé erroné en position 6 de la protéine (la valine au lieu de l'acide glutamique) et, par conséquent, à la synthèse d'une JORELQH DQRUPDOH /D SUésence de l'hémoglobine anormale qui en résulte a des conséquences cliniques complexes, telles qu'anémie, troubles du développement, sensibilité aux infections, fatigue, foie hypertrophié, petits infarctus.

La perte d'une ou de plusieurs paires de bases, voire d'une partie importante du gène concerné (délétions), a été décrite dans plusieurs affections. Les délétions représentent les mutations les plus fréquentes dans le gène de la dystrophine. Le gain de matériel génétique peut résulter de la multiplication d'un nombre variable de fois d'une séquence répétitive de trois paires de bases (triplet). Jusqu'à un certain nombre, ces triplets n'ont pas d'influence sur la santé de la personne. Mais si leur nombre s'accroît et dépasse une certaine limite, il peut en résulter de graves maladies affectant principalement le système nerveux, telles la maladie de Huntington ou la dystrophie myotonique.

Si l'on veut apprécier l'effet des mutations géniques, et donc aussi celui des possibilités de leur détection, on ne doit pas perdre de vue tous les troubles possibles de la biosynthèse de la protéine (voir tableau «Troubles possibles de la biosynthèse des protéines», annexe 1). Il serait trop restrictif de ne comprendre par analyse génétique moléculaire que les analyses d'ADN.

6849

1.2.4

Maladies génétiques, maladies multifactorielles et médecine prédictive

Chez les êtres humains, les maladies ont plusieurs origines (voir tableau «Causes de maladies humaines», annexe 2). Elles peuvent être dues à la vieillesse, au mode de vie (carence alimentaire, manque d'exercice), à des médicament, à des événements de la vie, à des facteurs personnels ou sociodémographiques, à des infections microbiennes ou à des facteurs d'environnement (par exemple des effets toxiques).

Elles peuvent également avoir pour cause une anomalie (une mutation) dans le patrimoine génétique. Ce sont des maladies dites génétiques. De telles mutations surviennent au niveau des chromosomes ou des gènes. Si l'anomalie est apportée par un ovule ou un spermatozoïde, elle sera présente dans toutes les cellules de l'individu, y compris dans les cellules germinales, et elle pourra être transmise à la génération suivante. La maladie est dite alors héréditaire ou constitutionnelle. L'hémophilie, la mucoviscidose et la dystrophie musculaire en sont les exemples les plus connus.

La plus grande partie des maladies humaines a cependant pour origine la combinaison de facteurs génétiques et de facteurs d'environnement. Ces maladies sont dites multifactorielles. A cette catégorie appartiennent, par exemple, la plupart des diabètes, des maladies cardio-vasculaires et des cancers.

Dans presque tous les cas de maladies multifactorielles, des patients présentent des prédispositions prépondérantes à la maladie, dues à des mutations affectant certains gènes-clés. De telles dispositions s'observent chez environ 5 % des patients atteints du cancer du sein, du cancer des ovaires ou du cancer du côlon. Il existe des prédispositions analogues à certaines formes de diabète, de maladies cardiovasculaires, de pathologies nerveuses ou de troubles mentaux précoces, ainsi que de maladies psychiques. Mais des causes génétiques n'entrent de loin pas en ligne de compte chez tous les patients souffrant de la même maladie. Derrière des maladies aux manifestations similaires, il y a des systèmes biologiques complexes, qui peuvent se dérégler pour des raisons différentes. L'identification de l'ensemble des paramètres causant ou favorisant une maladie représente le grand défi de la recherche médicale actuelle.

Les maladies pour lesquelles il existe une prédisposition génétique présentent la particularité qu'on peut évaluer, dès la naissance ou même avant, les facteurs de risque pour une personne déterminée. C'est le rôle de la médecine prédictive.

1.2.5

Avènement des analyses génétiques médicales

Jusqu'à récemment, le diagnostic d'une maladie héréditaire ou d'une prédisposition reposait sur l'anamnèse familiale, l'examen histopathologique et pathophysiologique de prélèvements tissulaires, ainsi que sur des analyses de laboratoire conventionnelles (voir tableau «Maladies héréditaires, caractéristiques et diagnostic», annexe 3).

En effet, le taux de cholestérol, le taux de sucre, la tension artérielle, les composants de l'urine et le taux de sel dans la sueur représentent des indicateurs hautement spécifiques et fiables pour certaines affections. Avec l'avènement du diagnostic génétique moléculaire basé sur l'analyse de l'ADN et de ses produits directs, il est possible d'accéder directement au patrimoine génétique d'un individu et de déterminer

6850

ses caractéristiques biologiques réelles. La médecine moléculaire devrait considérablement se développer grâce aux programmes de séquençage du génome humain.

La notion d'analyse génétique donne lieu à plusieurs définitions, suivant le domaine d'application concerné. Celles-ci dépendent essentiellement du sens que l'on attribue au mot génétique. Premièrement, on peut adopter une définition basée sur les méthodes utilisées pour l'analyse du matériel génétique (chromosomes et ADN), que ce soit celui des cellules ou celui des microbes pathogènes. Sous cet angle, on peut considérer que les analyses de micro-organismes dans les organes humains ou des liquides corporels sont également des analyses génétiques. Deuxièmement, les analyses génétiques peuvent être comprises comme portant uniquement sur la substance-clé du patrimoine génétique, c'est-à-dire l'ADN, dans le but de détecter des mutations chromosomiques ou géniques. Troisièmement, il est possible de se baser sur les objectifs visés par les analyses. Dans ce cas, on englobe sous la notion d'analyse génétique toutes les approches analytiques permettant d'obtenir des informations sur le génome d'une personne.

Au vu de cette situation, il est donc primordial que la loi définisse clairement ce que l'on entend par analyse génétique (ch. 2.1.3 relatif à l'art. 3, let. a).

Toute réalisation d'une analyse génétique doit s'effectuer en trois étapes. Premièrement, on définit l'indication. Deuxièmement, on réalise l'analyse de laboratoire proprement dite. Troisièmement, on interprète les résultats qui en découlent. Sans ce cadre, l'analyse de laboratoire peut conduire à des conclusions erronées et dangereuses.

L'indication joue un rôle capital en médecine et en droit. Le dictionnaire clinique «Pschyrembel» (1997) la définit comme étant le fondement à l'utilisation d'un procédé diagnostique ou thérapeutique précis dont l'utilisation se justifie dans un cas de maladie de façon suffisante, et à propos duquel il y a fondamentalement un devoir d'information vis-à-vis du patient. Selon le «Lexique Médical Roche» (1993), il s'agit du motif ou de la circonstance conduisant à prendre une mesure médicale donnée qui se révèle judicieuse (pour les patients) après l'évaluation de l'utilité et des risques possibles, sous réserve d'éventuelles contre-indications.
La nécessité d'effectuer une analyse génétique doit être établie au cas par cas. Très souvent, une telle analyse est réalisée alors que la personne est déjà malade. Elle a dès lors pour but de confirmer le diagnostic ou de choisir la thérapie adéquate. Mais une analyse génétique peut aussi être réalisée pour vérifier l'existence de prédispositions pathologiques, de façon à entreprendre une prophylaxie, un traitement suffisamment précoce, un planning familial ou, pendant la grossesse, pour déterminer l'état de santé de l'embryon ou du foetus.

1.2.6

Valeur diagnostique et fiabilité des analyses génétiques

Toute analyse génétique a une valeur diagnostique limitée, qui doit être connue des médecins qui la prescrivent. Les résultats des analyses cytogénétiques et moléculaires (pour les définitions, cf. ch. 2.1.3, relatif à l'art. 3, let. b et c) ne sont fiables et d'une valeur diagnostique élevée que si ces analyses ont été réalisées correctement et sur la base d'indications adéquates. Grâce aux expériences accumulées dans le 6851

monde entier et mentionnées dans la littérature médicale, on a acquis une bonne connaissance de la signification des mutations chromosomiques et géniques. Toutefois, lorsqu'une personne semble souffrir d'une maladie héréditaire, les analyses moléculaires ne permettent pas toujours de trouver une mutation dans le gène présumé. Il peut y avoir plusieurs raisons à cela. D'une part, chaque test génétique a ses limites techniques. D'autre part, le défaut génétique peut être localisé dans une partie ou un élément de contrôle du gène qui n'ont pas été analysés ou même dans un autre gène (hétérogénéité génétique) que l'on ne connaît pas encore en détail et qui, s'il subit une mutation, produit un effet similaire à celui du gène muté déjà connu.

Enfin, des tests moléculaires peuvent être très efficaces dans une famille donnée et avoir une sensibilité nettement moins bonne lorsqu'ils sont effectués au niveau d'une population. De telles différences peuvent tenir au fait que d'autres gènes peuvent produire les mêmes pathologies que le gène analysé ou que d'autres gènes ont une influence sur les manifestations du gène principal. Ces incertitudes devraient être réduites avec la connaissance de la carte génomique humaine.

Dans les mucoviscidoses les plus fréquentes, environ 90 % des mutations se situent à des endroits connus du gène correspondant. Si aucune mutation n'est mise en évidence à ces endroits et si la suspicion de muscoviscidose subsiste, la recherche de mutations doit être effectuée sur le gène entier. Dans les gènes du cancer du sein BRCA1 ou BRCA2, sauf chez certains groupes de la population, il n'y a guère de sites de prédilection pour les mutations et la recherche de mutations dans ces deux gènes est complexe. Cependant, lorsqu'une mutation est identifiée dans une famille, sa présence chez les membres de cette famille se détecte ou s'exclut aisément.

Les analyses de génétique moléculaire permettent d'identifier les porteurs de gènes mutés indépendamment de leur état de santé. On parle alors de diagnostic médicogénétique présymptomatique ou préclinique. La médecine préclinique ou présymptomatique consiste à établir le diagnostic d'une maladie avant que les symptômes cliniques traditionnels apparaissent. Ces analyses «anticipatives» permettent de reconnaître les personnes qui ne sont pas encore
malades au sens propre du terme, mais qui, dans certaines circonstances, ont besoin d'un suivi médical et souvent même déjà d'un traitement médical. Elles ont pour but de diagnostiquer des mutations avant les premières manifestations de celles-ci ou avant l'apparition des symptômes graves.

Le problème principal du diagnostic présymptomatique est que, même en présence d'une mutation d'un gène bien définie et associée de façon établie avec une maladie précise, on ne peut généralement pas dire avec certitude si une personne, ne présentant pas ou peu de manifestations cliniques, tombera malade un jour, le cas échéant, quand et avec quel degré de gravité. En outre, il existe souvent différents gènes, en partie non encore identifiés, qui conduisent aux mêmes manifestations pathologiques.

En résumé, on constate que la valeur et la qualité du diagnostic médico-génétique dépendent de l'établissement d'une indication juste, de la réalisation correcte de l'analyse de laboratoire et de l'interprétation appropriée des résultats. Les médecins qui prescrivent des analyses cytogénétiques ou moléculaires doivent bien connaître les subtilités de la génétique, afin que l'analyse ne soit effectuée que lorsqu'elle a vraiment un sens.

6852

1.2.7

Nouveaux procédés de diagnostic médico-génétiques

Les procédés actuels d'analyse cytogénétique et moléculaire demandent beaucoup de travail de laboratoire et sont donc coûteux. Dans le domaine de la génétique moléculaire, ils ne peuvent être utilisés que pour répondre à une question diagnostique ciblée. Différentes analyses moléculaires sont réalisées actuellement en Suisse, avant tout dans les hôpitaux universitaires, mais aussi dans quelques laboratoires privés.

Selon les types d'analyse, les coûts s'échelonnent entre quelques centaines et quelques milliers de francs.

Actuellement, la réalisation des analyses génétiques moléculaires tend à se simplifier avec l'introduction sur le marché de trousses de diagnostic in vitro spécifiques à des gènes déterminés et simples à l'emploi. A l'avenir, il est prévu d'automatiser les analyses génétiques de manière à ce qu'elles puissent être réalisées dans des délais très courts et à une grande échelle pour de nombreux gènes et de nombreuses personnes. On développe dans ce but des «microchips», avec leurs avantages et leurs inconvénients. Ils se présentent sous la forme de petites plaques de quelques centimètres carrés sur lesquelles on applique du sang, de l'urine ou de la salive et qui permettent théoriquement d'analyser plusieurs milliers de caractéristiques génétiques différentes. Les grandes quantités de données ainsi obtenues devront être gérées et exploitées de façon automatique par des moyens électroniques. Les logiciels responsables de l'exploitation et de l'interprétation des données sont donc essentiels pour le développement de cette technologie. Les analyses génétiques effectuées au moyen de chips ne pourront selon toute vraisemblance jamais être faites dans un cabinet médical ordinaire, mais uniquement dans un laboratoire hautement spécialisé.

La technique des analyses génétiques sur chips s'applique essentiellement à l'étude de l'expression des gènes et à l'analyse des polymorphismes des gènes ou des mutations au niveau génomique. Ainsi, il est possible de détecter des modifications dans le schéma d'expression des gènes lors de la transformation cellulaire, après stimulation avec des facteurs de croissance ou dans le cadre d'une infection virale. Les chips peuvent également être utilisés en vue d'obtenir des informations importantes pour le pronostic et le choix de la thérapie chez les patients cancéreux, sur les éventuelles particularités pharmacogénétiques ou sur la sensibilité d'une personne à l'encontre de certains médicaments.

1.2.8

Développements de la médecine moléculaire

La médecine moléculaire, issue de la génétique moléculaire, ouvre des perspectives importantes. A terme, elle permettra de comprendre les mécanismes des maladies génétiques, mais aussi des cancers, des maladies cardiovasculaires, neurodégénératives et infectieuses. La médecine deviendra plus prédictive et préventive. En outre, la prévention, le diagnostic et le traitement seront plus spécifiques et plus efficaces.

Les espoirs placés dans des mesures de prévention individuelles sont d'autant plus grands que l'expérience a démontré que de telles mesures appliquées à l'ensemble de la population donnent peu de résultats.

Toutefois, il faut avoir conscience que de nombreux aspects de la médecine moléculaire ne sont pas encore résolus. Ainsi, on distingue, à ce jour, environ 4 000 pathologies et les 35 000 à 45 000 gènes différents présents dans notre génome sont 6853

susceptibles de porter atteinte à notre santé ou à notre aptitude à la reproduction s'ils subissent une mutation. Actuellement, on est parvenu à établir de manière plus précise le rapport entre les mutations et leurs effets sur la santé pour environ 1 000 gènes. Il existe donc un fossé important entre les connaissances acquises sur le génome ou le génotype (ensemble des informations génétiques propres à un individu) et le phénotype (apparence d'un individu correspondant à l'expression de son patrimoine génétique). Il est clair cependant que la médecine ne doit pas simplement réduire l'être humain à ses gènes. Ce dernier doit plutôt être vu et compris dans son contexte et sa complexité psycho-socio-biologique. Il est indispensable de considérer et d'étudier les influences non génétiques externes et internes sur notre santé. Les nouvelles possibilités de diagnostic médico-génétique suscitent de nombreuses questions éthiques, psychosociales et juridiques. La médecine moléculaire ne pourra satisfaire les attentes placées en elle que si l'on met la personne humaine, avec ses besoins et ses souffrances individuels, au centre des préoccupations, sans se focaliser unilatéralement sur son problème médical, même si celui-ci est plus facile à appréhender grâce au développement des méthodes d'investigation.

1.3

Directives de l'Académie Suisse des Sciences Médicales (ASSM) concernant les examens génétiques sur l'homme

1.3.1

Portée

Vu l'importance croissante des examens génétiques et la demande des médecins à être mieux informés sur les conditions auxquelles ils doivent être réalisés, l'Académie Suisse des Sciences Médicales a adopté, le 3 juin 1993, des directives médico-éthiques concernant les examens génétiques sur l'homme7. Celles-ci définissent les conditions-cadres pour la réalisation de ces examens et ont assuré jusqu'à ce jour une pratique conforme à l'éthique médicale. Cependant, elles ne peuvent pas apporter une solution à tous les problèmes posés par les analyses génétiques et, selon l'Académie, il appartient à l'Etat de prendre des mesures pour garantir l'accès aux examens génétiques reconnus, tout en sauvegardant les droits de la personnalité des personnes concernées et en empêchant que les résultats des analyses ne soient utilisés de manière abusive.

Les directives de l'Académie ont un caractère obligatoire limité. En tant que règles de la profession, elles ne s'appliquent en principe qu'au milieu médical. Toutefois, leur portée a dépassé le milieu médical, car elles ont largement contribué à la discussion juridique et politique de l'analyse génétique humaine.

1.3.2

Contenu

Les examens génétiques sont éthiquement justifiés lorsqu'ils ont pour but: ­

7

de diagnostiquer ou de classifier une maladie ou un handicap héréditaire;

Bulletin des médecins suisses, 1994, no 124, p. 912 à 917.

6854

­

d'identifier une prédisposition héréditaire afin d'établir des choix de vie ou un planning familial;

­

de découvrir des prédispositions pathologiques héréditaires lorsque les symptômes ne sont pas encore apparus, à la condition toutefois qu'il existe des moyens efficaces pour atténuer ou empêcher les conséquences graves d'une maladie ou que le résultat a une importance immédiate pour établir des choix de vie ou un planning familial ou, enfin,

­

de conseiller des personnes et des couples en ce qui concerne les risques encourus par leur descendance en raison d'affections héréditaires.

Par contre, les examens génétiques ne doivent pas être utilisés pour déterminer le sexe ou des caractéristiques sans importance pour la santé de l'embryon ou du foetus.

Chez les personnes majeures, les examens ne peuvent être réalisés qu'avec leur consentement. Chez les mineurs et les personnes sous tutelle, ils ne doivent être exécutés que s'ils peuvent avoir des conséquences directes sur la santé de la personne concernée ou sur celle de ses proches parents.

Les examens prénataux invasifs ne sont admis que s'il existe des indices fondés pour l'existence d'un risque génétique.

Seule la personne qui subit un examen génétique a le droit de décider de l'exécution, de la poursuite ou de l'interruption de l'examen. Il lui appartient également de décider si elle veut prendre connaissance des résultats et quelles conséquences elle veut en tirer.

Les personnes atteintes d'une affection héréditaire doivent être informées, à temps et selon les règles, des possibilités existantes d'examens génétiques. Si le résultat des examens génétiques concerne également des proches parents, le médecin devra s'assurer que l'information parvienne aux personnes concernées avec le consentement du sujet examiné ou de son représentant légal.

Les personnes soumises à un examen génétique doivent obligatoirement bénéficier d'une consultation génétique avant, pendant et après l'examen. Celle-ci doit fournir à la personne concernée toutes les informations nécessaires pour comprendre la portée des décisions éventuelles à prendre et pour lui donner les éléments d'appréciation. Elle ne doit pas être directive.

Une assistance médicale, psychologique et sociale doit être assurée à long terme.

Dans le domaine du travail, le médecin doit s'abstenir de pratiquer des examens génétiques demandés pour apprécier l'aptitude d'une personne à exercer certaines activités, sauf s'il s'agit de détecter des caractéristiques susceptibles de mettre en danger la santé de la personne examinée ou de tiers. De tels examens ne peuvent être entrepris qu'à la demande de la personne examinée ou dans le cadre des dispositions légales. Les résultats de tels examens ne doivent être divulgués qu'à la personne examinée.

Si les examens génétiques demandés peuvent servir à étayer ou à modifier un contrat d'assurance, le médecin doit faire preuve d'une réserve particulière. Les résultats des tests sont communiqués exclusivement à la personne examinée ou à son représentant légal.

6855

Ne peuvent procéder à des examens génétiques que les institutions pouvant apporter la preuve d'un travail impeccable et qui se soumettent à un contrôle de qualité interne et externe.

1.4

Genèse du projet de loi

1.4.1

Art. 119, al. 2, let. f, de la Constitution

Le projet de loi sur l'analyse génétique humaine est une loi d'exécution de l'art. 119 de la Constitution (Cst.) sur la protection de l'homme et de son environnement contre les abus en matière de techniques de procréation et de génie génétique. Cet article correspond à l'art. 24novies de l'ancienne Constitution, adopté en 1992, sous réserve des modifications rédactionnelles apportées par la révision.

En ce qui concerne l'analyse génétique humaine, l'art. 119 Cst., dispose ce qui suit: 1 L'être humain doit être protégé contre les abus en matière de techniques de procréation médicalement assistée et de génie génétique.

2

La Confédération légifère sur l'utilisation du patrimoine germinal et génétique humain. Ce faisant, elle veille à assurer la protection de la dignité humaine, de la personnalité et de la famille et respecte notamment les principes suivants: f.

le patrimoine génétique d'une personne ne peut être analysé, enregistré et communiqué qu'avec le consentement de celle-ci ou en vertu d'une loi.

L'art. 119 Cst. contient une clause protégeant l'être humain des abus. Cela signifie qu'une société pluraliste laisse en principe à ses citoyens et citoyennes la possibilité de faire un usage responsable de leur liberté. Dans le domaine humain, les potentialités de la technologie génétique doivent en principe être utilisées lorsqu'elles sont bénéfiques pour les personnes concernées. Toutefois, les abus doivent être combattus. L'Etat doit notamment veiller à ce que l'application de la technologie humaine se fasse dans le respect de la dignité humaine, de la personnalité et de la famille.

La let. f de l'art. 119 Cst. renforce la protection de la personnalité dans le domaine de l'analyse génétique humaine, en exigeant que l'analyse du patrimoine génétique d'une personne ainsi que l'enregistrement et la révélation de ses données génétiques soient soumis à son consentement ou à une autorisation légale. Cette disposition constitue la première garantie écrite de la Constitution du droit fondamental à la protection des données, c'est-à-dire du droit d'autodétermination de chaque personne sur les informations la concernant.

Le principe à la base de l'analyse génétique et du traitement des données est le consentement de la personne concernée, qui est en général la personne qui subit le test génétique ou au sujet de laquelle des données génétiques sont traitées. Exceptionnellement, la loi peut déterminer les cas où une personne peut, sans son consentement, être tenue de subir une analyse génétique et de devoir accepter l'enregistrement et la révélation de données génétiques.

6856

1.4.2

Programme relatif à la législation d'exécution

Après l'adoption de l'art. 24novies Cst., le Conseil fédéral a constitué un groupe de travail interdépartemental en matière de génie génétique (IDAGEN) pour coordonner les projets de législation qui devaient être élaborés à la suite de l'acceptation de l'art. 119 Cst. par le peuple et les cantons. Ce groupe devait en particulier prévoir un programme de mesures législatives nécessaires dans les domaines de la médecine de la procréation médicalement assistée et du génie génétique. Il a fourni son rapport en janvier 1993, lequel fut accepté par le Conseil fédéral le 7 juin 1993.

S'agissant de la procréation médicalement assistée et de l'application du génie génétique dans le domaine humain, le groupe a proposé une procédure en trois étapes: 1re étape:

L'élaboration d'une loi sur les méthodes médicales de procréation assistée, l'interdiction pénale des interventions thérapeutiques sur la lignée germinale et l'institution d'un comité d'éthique national. Le message du Conseil fédéral8 a été adopté le 26 juin 1996. La loi sur la procréation médicalement assistée9 [LPMA] est entrée en vigueur le 1er janvier 2001. La Commission nationale d'éthique pour la médecine humaine a été instituée par le Conseil fédéral le 3 juillet 2001.

2e étape:

L'élaboration d'une loi sur l'analyse du génome.

3e

L'examen des questions ouvertes dans le domaine de la recherche sur l'homme par un groupe d'étude. Par la suite, deux rapports ont été élaborés: le premier sur «La recherche biomédicale sur l'être humain et l'art. 24novies de la Constitution fédérale» (février 1995), le second sur «La recherche sur l'être humain: diagnostic génétique et thérapie génique» (octobre 1997). Une loi réglant l'ensemble des questions relatives à la recherche est en cours d'élaboration. En mai 2002, le Conseil fédéral a mis en consultation un avant-projet de loi fédérale spéciale relative à la recherche sur les embryons surnuméraires et sur les cellules souches embryonnaires, qui sera, par la suite, intégrée dans la loi fédérale relative à la recherche sur l'être humain.

étape:

1.4.3

Avant-projet de loi de 1998

1.4.3.1

Travaux de la commission d'experts

Afin d'exécuter le mandat législatif conféré par l'art. 119 Cst., al. 2, let. f (art. 24novies, al. 2, let. f, aCst.), le Département fédéral de justice et police a institué, le 13 octobre 1995, une commission d'experts pluridisciplinaire chargée d'élaborer un avant-projet de loi sur l'analyse génétique humaine, sur la base des travaux du Professeur Olivier Guillod de Neuchâtel, docteur en droit, directeur de l'Institut de droit de la santé de l'Université de Neuchâtel, et de son assistant, Monsieur Dominique Sprumont, docteur en droit, directeur-suppléant de ce même institut.

Présidée par le Professeur Heinz Hausheer de Berne, la commission d'experts était composée de 16 autres membres, représentant les différents milieux concernés par 8 9

FF 1996 III 197 ss RO 2000 3055; RS 814.90

6857

l'avant-projet de loi. Les membres de cette commission étaient Mesdames et Messieurs Andrea Arz de Falco (docteur en théologie et biologiste), André Chuffart (mathématicien, Suisse de Réassurances), remplacé à partir de mars 1997 par Josef Kreienbühl (PAX, Société suisse d'assurance sur la vie), Raphaël Coquoz (professeur, biochimiste, Institut de médecine légale de Lausanne), Carmen Grand (licenciée en droit, secrétariat du Préposé à la protection des données), Olivier Guillod (professeur de droit à l'Université de Neuchâtel), Christian Kind (PD, docteur en médecine, néonatologue, Fédération suisse des associations de parents de handicapés mentaux), Christine Luchsinger (docteur en philologie I, Union syndicale suisse), Elisabeth Möhr (docteur en médecine, gynécologue), Ruth Mascarin (docteur en médecine; s'est retirée en mars 1997), Heidy Moser (présidente de l'Association Huntington Suisse), Hansjakob Müller (généticien, Université de Bâle), Alexandre Plassard (licencié en sciences économiques, Union patronale suisse), Ruth Reusser (docteur en droit, directrice-suppléante de l'Office fédéral de la justice), Rudolf Rüedi (docteur en droit, juge au Tribunal fédéral des assurances), PaulHenri Steinauer (professeur de droit à l'Université de Fribourg) et Wolfgang Wiegand (professeur de droit à l'Université de Berne).

Elle s'est appuyée sur des travaux d'experts extérieurs à la commission pour les questions relatives à l'assurance et au travail. Elle a également tiré profit du colloque international sur l'analyse génétique humaine et la protection de la personnalité, organisé à Lausanne, en avril 1994, par l'Institut suisse de droit comparé, ainsi que du colloque international sur les aspects actuels du diagnostic génétique, mis sur pied, en avril 1997, par le Programme Technology Assessment du Conseil Suisse de la Science.

La commission a déposé un avant-projet accompagné d'un rapport explicatif en 1998.

1.4.3.2

Propositions de réglementation

Conformément au mandat fixé par la Constitution fédérale, le but de l'avant-projet de loi était d'interdire les analyses génétiques abusives et de protéger la dignité et la personnalité de l'être humain. En conséquence, l'avant-projet était construit sur le principe d'une autorisation de principe des analyses génétiques à certaines conditions, et non d'une interdiction avec des exceptions.

L'avant-projet devait régler de manière exhaustive l'exécution des analyses génétiques dans les domaines de la médecine ­ y compris l'analyse prénatale et le dépistage ­, du travail, de l'assurance, de la responsabilité civile et de l'identification. Il réglait également la conservation et l'utilisation des échantillons ainsi que la communication et l'utilisation des données génétiques.

Bien que l'avant-projet réglât des domaines sans rapport les uns avec les autres si ce n'est le recours à l'analyse génétique, il a été décidé de ne pas intégrer les normes dans les lois se rapportant aux domaines en question et d'adopter une loi spéciale.

Cette solution présentait les avantages de pouvoir faire une recherche juridique en matière d'analyse génétique en consultant un seul texte, de garantir que tous les domaines soient soumis aux mêmes principes généraux et de faciliter des révisions ultérieures.

6858

L'avant-projet prévoyait dans les dispositions générales le principe fondamental de l'interdiction de toute forme de discrimination à l'encontre d'une personne en raison de son patrimoine génétique. Il prévoyait en outre qu'une analyse génétique ne pouvait être effectuée qu'avec le consentement de la personne concernée et que par un laboratoire ou un médecin autorisé. Il interdisait la mise sur le marché des tests génétiques à l'usage du public.

Il était prévu que les analyses génétiques à des fins médicales devaient être effectuées dans un but prophylactique ou thérapeutique ou pour établir des choix de vie ou un planning familial. Seul un médecin autorisé à exercer était habilité à prescrire une analyse génétique à des fins médicales. Dans le cas d'une analyse présymptomatique, d'une analyse visant à établir un planning familial ou d'une analyse prénatale, le médecin devait être au bénéfice d'une formation spéciale adéquate. L'analyse prénatale ne pouvait pas avoir pour but de rechercher des caractéristiques sans importance pour la santé de l'embryon ou du foetus ou de déterminer le sexe pour des motifs autres que médicaux. Les cantons devaient veiller à la mise sur pied d'offices d'information indépendants en matière d'analyse prénatale. Un conseil génétique non directif devait accompagner toute analyse présymptomatique, prénatale ou visant à établir un planning familial.

S'agissant du domaine du travail, l'avant-projet interdisait en principe à l'employeur de demander une analyse présymptomatique ou d'utiliser les résultats d'une telle analyse qui aurait déjà été effectuée. Il autorisait par contre, à des conditions très restrictives, une analyse présymptomatique visant à prévenir une maladie professionnelle, des risques d'une grave atteinte à l'environnement ou des risques exceptionnels d'accident ou d'atteinte à la santé de tiers.

En matière d'assurance, il était interdit en principe à un assureur de demander préalablement à la conclusion d'un contrat une analyse présymptomatique ou prénatale ni d'exiger ou d'utiliser les résultats d'une telle analyse déjà effectuée. Toutefois, des exceptions pouvaient être prévues dans le domaine des assurances privées. Il était également interdit à une personne qui voulait conclure une assurance de communiquer les résultats d'une analyse présymptomatique
ou prénatale déjà effectuée, sauf si elle voulait prouver qu'elle avait été classée à tort dans un groupe à risque élevé.

Dans le domaine de la responsabilité civile, l'avant-projet interdisait d'effectuer une analyse présymptomatique ainsi que de demander ou d'utiliser les résultats d'analyses présymptomatiques ou prénatales déjà effectuées dans le but de calculer un dommage ou des dommages-intérêts.

L'avant-projet autorisait les analyses génétiques à des fins d'identification dans le cadre de procédures pénales (recherche d'auteurs d'actes délictueux) et de procédures civiles ou administratives (recherche en filiation, identification de personnes inconnues). Il admettait également ces analyses en dehors d'une procédure officielle si les personnes concernées avaient donné leur consentement exprès et si elles pouvaient faire valoir un intérêt digne de protection.

En considération du développement scientifique rapide de la génétique, l'avantprojet instituait une commission fédérale pour l'analyse génétique humaine, chargée en particulier de suivre l'évolution de la science et de signaler les problèmes et les lacunes de la législation.

Enfin, l'avant-projet prévoyait des mesures pénales pour assurer le respect de la loi.

6859

1.4.4

Résultats de la procédure de consultation

1.4.4.1

En général

Le 28 septembre 1998, le Département fédéral de justice et police a soumis l'avantprojet élaboré par la commission d'experts à l'avis des Tribunaux fédéraux, des gouvernements cantonaux, des partis politiques et des organisations intéressées. La procédure de consultation s'est achevée le 31 mars 1999.

Ont répondu le Tribunal fédéral suisse et le Tribunal fédéral des assurances, 24 cantons, 3 partis politiques et 47 organisations. 16 prises de position ont été envoyées par des participants non-officiels.

Les résultats de la procédure de consultation ont été publiés en décembre 1999.

1.4.4.2

Appréciation générale de l'avant-projet

Dans son ensemble, l'avant-projet a reçu une large approbation, car il garantit une pratique unifiée des analyses génétiques dans toute la Suisse. Plusieurs participants ont en outre souligné qu'il était urgent d'adopter une réglementation dans un domaine aussi complexe. Les principes proposés ont été approuvés à une large majorité. Les solutions ont été jugées appropriées, claires, efficaces et éthiquement correctes. Il a également été relevé que l'avant-projet prenait en considération les différents intérêts en jeu. Enfin, la structure de l'avant-projet a été considérée comme bonne.

Quelques participants ont en revanche estimé que l'avant-projet n'assurait pas une protection suffisamment efficace contre les effets de l'analyse génétique, car il ne prenait en compte que les intérêts de la recherche, de l'industrie et des assurances et prévoyait trop d'exceptions permettant à des tiers d'avoir accès aux résultats d'analyses génétiques.

1.4.4.3

Propositions particulières dans les différents domaines

Dispositions générales L'énumération exhaustive des domaines tombant sous le coup de l'avant-projet a été critiquée par un certain nombre de participants, qui font valoir que l'analyse génétique pourrait s'appliquer encore à d'autres domaines; ils proposent dès lors d'adopter une formulation non exhaustive. L'énonciation de l'interdiction de toute forme de discrimination à l'encontre d'une personne en raison de son patrimoine génétique a été unanimement approuvée. Plusieurs ont demandé de définir certains termes de l'avant-projet et de préciser quelques définitions. Afin de souligner l'importance d'une analyse, certains ont demandé de prévoir un consentement écrit ou exprès.

S'agissant de la base légale de l'autorisation pour les laboratoires qui effectuent des analyses génétiques, quelques participants ont souligné qu'il convenait d'utiliser celles existant dans la loi fédérale et l'ordonnance sur l'assurance-maladie, afin d'éviter de créer des doublons. La proposition d'exempter de l'autorisation les 6860

analyses génétiques qui ne requièrent pas d'exigences particulières n'a pas été très bien accueillie. Elle a été jugée trop large, imprécise et supprimant une protection; les uns ont proposé de la concrétiser, les autres ont estimé qu'elle devrait être supprimée. L'interdiction de mettre sur le marché des tests génétiques est approuvée à une exception près. Par contre, un certain nombre de participants ont demandé de préciser les critères prévus pour l'obtention d'une autorisation d'importer ou de mettre en circulation des tests génétiques destinés à des laboratoires ou à des médecins.

Analyses génétiques à des fins médicales Si la fixation d'indications est largement approuvée, l'indication relative à l'établissement des choix de vie est, par contre, controversée. Elle est jugée imprécise et de nature à ouvrir la porte à toutes les interprétations. L'analyse génétique prénatale en tant que telle est approuvée par une large majorité, mais certains ont souhaité que la loi précise la notion de caractéristiques sans importance pour la santé de l'embryon ou du foetus. Par ailleurs, il a été demandé d'examiner la possibilité d'englober certaines analyses ultrasonographiques dans la notion d'analyses génétiques prénatales.

L'institution du conseil génétique en général a été approuvée, mais il a été jugé nécessaire de poser des exigences élevées quant aux compétences des personnes qui assurent le conseil. Si la proposition de créer des offices d'information en matière d'analyse prénatale a été en général bien accueillie, quelques participants ont, en revanche, contesté la nécessité de tels offices. Il a enfin été souhaité qu'une analyse génétique à des fins de recherche ne soit effectuée qu'avec le consentement écrit ou exprès de la personne concernée.

Analyses génétiques dans le domaine des rapports de travail Un certain nombre de participants ont demandé d'interdire les analyses présymptomatiques visant à prévenir les maladies professionnelles et les accidents, par crainte d'ouvrir la porte à des abus. En revanche, une toute petite minorité s'est prononcée en faveur de solutions plus libérales.

Analyses génétiques dans le domaine de l'assurance Si le principe de l'interdiction faite aux assureurs d'exiger une analyse présymptomatique ou prénatale avant la conclusion d'un contrat d'assurance a été
unanimement approuvé, les exceptions ont, par contre, été critiquées. Plusieurs participants ont demandé de supprimer la possibilité pour le preneur d'assurance de communiquer à l'institution d'assurance les résultats d'analyses présymptomatiques ou prénatales déjà effectuées s'il veut prouver qu'il a été classé à tort dans un groupe à risque élevé, afin d'empêcher un classement systématique des preneurs dans une classe à risque élevé. La proposition d'accorder aux assureurs, dans certaines branches d'assurances non obligatoires, le droit de demander les résultats d'analyses présymptomatiques déjà effectuées a soulevé nombre de critiques. Par ailleurs, certains ont proposé un libre accès aux résultats d'analyses déjà effectuées, par souci de parité des informations, alors que d'autres ont préconisé une interdiction totale d'accès à ces résultats afin d'empêcher tout risque de discrimination.

6861

Analyses génétiques dans le domaine de la responsabilité civile Un tout petit nombre de participants ont demandé de ne pas accorder au juge le droit d'ordonner une analyse génétique visant à diagnostiquer une maladie existante dans le but de calculer un dommage ou des dommages-intérêts.

Analyses génétiques à des fins d'identification En matière d'analyses effectuées dans le cadre d'une enquête pénale, plusieurs participants ont demandé de réexaminer la terminologie relative aux autorités et aux actes punissables. Quelques-uns, très rares, ont souhaité que seul un juge puisse ordonner une analyse sans le consentement de la personne concernée.

S'agissant des analyses effectuées en dehors d'une procédure, quelques prises de position ont demandé de revoir l'obligation faite au laboratoire de s'assurer que les personnes concernées peuvent se prévaloir d'un intérêt digne de protection et qu'elles sont informées des éventuelles conséquences psychosociales et juridiques, car une telle obligation dépasserait les compétences du personnel.

Commission fédérale pour l'analyse génétique humaine Il a été proposé d'examiner s'il était possible d'octroyer les compétences attribuées à la Commission fédérale pour l'analyse génétique humaine à une commission déjà existante ou à un office fédéral.

Dispositions pénales Certains participants ont demandé de prévoir des peines plus légères, alors que d'autres ont souhaité qu'elles soient aggravées.

1.4.5

Remaniement de l'avant-projet par le Département fédéral de justice et police

L'avant-projet a été remanié au regard des propositions faites lors de la procédure de consultation. Pour ce faire, il a été fait appel, pour chaque domaine, aux connaissances des spécialistes.

Il a également été tenu compte des résultats du colloque10 organisé en septembre et octobre 1998 par le Conseiller aux Etats Gian-Reto Plattner sur le dialogue sur le diagnostic génétique. Ce nouveau mode de communication avait pour particularité de réunir 26 citoyens non-professionnels, 16 experts nommés par les nonprofessionnels et des représentants de 17 organisations, afin de débattre les problèmes posés par le diagnostic génétique. En résumé, les non-professionnels ont porté un grand intérêt aux questions relatives à la protection des données. Ils ont estimé que le conseil génétique était nécessaire dans le domaine de la médecine et ont relevé que les tests génétiques sont souvent effectués sans le consentement du patient et sans que celui-ci reçoive une information adéquate; l'une des raisons de ce manque d'information est due au fait que le conseil génétique est mal pris en charge par les assurances-maladies. Les non-professionnels ont également clairement exprimé leur inquiétude pour la protection des assurés; ils craignent en particulier une discrimi10

Dialogue sur le diagnostic génétique, Bâle 1999, disponible chez Locher, Brauchbar et Partner à Bâle.

6862

nation de la part des assurances privées. Ils proposent que les analyses génétiques soient soumises à une autorisation et à un contrôle de l'Etat. Enfin, ils estiment que des tests ayant des conséquences aussi importantes pour l'être humain et la société ne peuvent être mis en vente que s'ils ont été soumis à un contrôle de qualité.

L'avant-projet n'a pas dû être fondamentalement remanié, étant donné la large approbation qu'il a rencontrée. La modification la plus frappante est que le projet ne règle plus l'utilisation des analyses génétiques dans le cadre d'une procédure pénale et à des fins d'identification d'une personne inconnue ou disparue. Ce domaine est régi exclusivement par la loi fédérale sur les profils d'ADN11 qui est actuellement débattue devant le Parlement. Par ailleurs, certaines dispositions, en particulier l'art. 3 relatif aux définitions, ont été modifiées de manière importante au regard des critiques faites lors de la procédure de consultation. Les modifications sont mentionnées dans le commentaire relatif à chaque article du présent message.

1.5

Aperçu de droit comparé

1.5.1

Remarques préliminaires

En Europe, seules l'Autriche et la Norvège ont adopté une loi générale sur l'utilisation des analyses génétiques. Quelques pays (Belgique, Danemark, Espagne, France, Pays-Bas, Suède) n'ont réglementé que certains domaines.

Le présent aperçu ne prend en considération que les lois entrées en vigueur et se limite à l'examen des domaines les plus importants. Il porte ainsi sur les pays et les lois suivants: Autriche: loi du 12 juillet 1994 relative aux techniques génétiques, modifiée le 22 mai 1998.

Belgique: loi du 25 juin 1992 sur l'assurance terrestre.

Danemark: loi no 286 du 24 avril 1996 sur le traitement de données relatives à la santé dans le cadre de l'emploi. Art. 3a, introduit en 1997, dans la loi sur le contrat d'assurances de 1986.

Espagne: loi no 35/1988 du 22 novembre 1988 relative à la procréation médicalement assistée. Loi no 42/1988 du 28 décembre 1988 relative au don et à l'utilisation d'embryons et de foetus humains ou de leurs cellules, tissus ou organes.

France: loi no 94-653 du 29 juillet 1994 relative au respect du corps humain. Loi no 94-654 du 29 juillet 1994 relative au don et à l'utilisation des éléments et produits du corps humain, à l'assistance médicale à la procréation et au diagnostic prénatal. Ces lois prévoient qu'elles feront l'objet d'un nouvel examen par le Parlement dans un délai maximum de cinq ans après leur entrée en vigueur. Elles sont actuellement en cours de réexamen. Loi no 92-1446 du 31 décembre 1992 relative à l'emploi, au développement du travail à temps partiel et à l'assurance chômage.

Norvège: loi no 56 du 5 août 1994 relative à l'utilisation médicale des biotechnologies, modifiée par les lois du 30 juin 1995 modifiant l'art. 2­13, du 16 mai 1997 modifiant les art. 6­1, 6­5 à 6­7, et du 27 mars 1998 introduisant un art. 3a­l.

11

Message du 8 nov. 2000; FF 2001 19 ss.

6863

Pays-Bas: «Wet op de Medische Keuringen» («loi sur les analyses médicales dans les domaines de l'assurance et du travail»), entrée en vigueur le 1er janvier 1998 (Staatsblad 1997, 770). Décret du 23 novembre 2001 réglant l'utilisation des analyses médicales lors d'une embauche. Décret du 23 novembre 2001 réglant la procédure en matière de recours dans le domaine de l'utilisation des analyses médicales lors d'une embauche.

Suède: loi no 114 du 14 mars 1991 relative à l'utilisation de certaines techniques génétiques dans le cadre d'examens généraux de santé.

1.5.2

Domaines particuliers

Définition de l'analyse génétique L'Autriche définit l'analyse génétique comme étant l'analyse moléculaire réalisée sur des chromosomes, des gènes et des séquences ADN d'un être humain dans le but de rechercher des mutations. La Norvège entend par analyse génétique postnatale les analyses diagnostiques d'une maladie, les analyses présymptomatiques et prédictives, les analyses aux fins de dépister ou d'exclure l'éventuelle présence chez le patient d'une maladie héréditaire grave susceptible de ne se manifester que dans les générations ultérieures ainsi que les analyses tendant à déterminer le sexe. Les autres pays ne définissent pas l'analyse génétique. La comparaison des différentes lois doit donc être relativisée par le fait que les notions de l'analyse génétique ne sont pas les mêmes dans tous les pays.

Utilisation des analyses génétiques Selon la loi autrichienne, les analyses génétiques doivent être effectuées à des fins médicales, scientifiques ou de formation. En France, l'examen des caractéristiques génétiques d'une personne ou son identification par empreintes génétiques, lorsqu'il n'est pas réalisé dans le cadre d'une procédure judiciaire, ne peut être entrepris qu'à des fins médicales ou de recherche scientifique. La Norvège prévoit que les analyses ne peuvent être effectuées qu'à des fins médicales diagnostiques et/ou thérapeutiques.

Consentement de la personne concernée En Autriche, une analyse génétique à des fins médicales et un diagnostic prénatal ne peuvent être réalisés qu'avec le consentement écrit de la personne concernée; une analyse réalisée à des fins scientifiques ou de formation requièrent également le consentement écrit des personnes qui ont fourni l'échantillon; à défaut, elle doit être réalisée avec un échantillon anonymisé. La France prévoit que si l'analyse ou l'identification est effectuée à des fins médicales, le consentement doit être recueilli par écrit. La Norvège exige le consentement écrit de l'intéressé pour la réalisation des examens génétiques présymptomatiques, prédictifs et pour ceux destinés à dépister ou exclure une maladie héréditaire grave. La réalisation d'un examen génétique sur un enfant de moins de 16 ans est soumis au consentement des parents ou du tuteur.

6864

Conseil génétique En Autriche, une analyse génétique à des fins médicales ou une analyse prénatale doit être accompagnée d'un conseil génétique portant sur la nature, la portée et les conséquences de l'analyse.

Personnes autorisées à prescrire une analyse génétique En Autriche, une analyse génétique à des fins médicales peut être prescrite, selon les cas, par un généticien, un spécialiste, le médecin traitant ou le médecin qui pose le diagnostic.

Laboratoires ou personnes habilitées à procéder à des analyses génétiques La loi autrichienne prescrit qu'une analyse génétique à des fins médicales destinée à constater une prédisposition à une maladie doit être réalisée dans un laboratoire autorisé.

Transmission d'informations génétiques à des membres de la famille En Autriche, le médecin doit, à certaines conditions, recommander à la personne testée de conseiller à des membres de la famille concernés d'effectuer une analyse génétique.

Diagnostic prénatal L'Autriche n'admet une analyse génétique prénatale que pour des raisons médicales.

La femme enceinte doit certifier par écrit qu'elle consent à cette analyse et qu'elle a reçu un conseil génétique de la part d'un médecin. L'Espagne autorise une analyse prénatale génétique, in vitro ou in vivo, à des fins diagnostiques de maladies génétiques ou héréditaires, pour éviter leur transmission, pour les traiter ou pour y remédier. Le gouvernement établit une liste des anomalies génétiques ou héréditaires qui peuvent faire l'objet d'un diagnostic prénatal. En France, le diagnostic prénatal doit avoir pour but de détecter une affection d'une particulière gravité et il doit être précédé d'une consultation médicale de conseil génétique. Les analyses de cytogénétique et de biologie ne peuvent être pratiquées que dans des établissements publics de santé et des laboratoires d'analyses de biologie médicale autorisés. Selon la loi norvégienne, le diagnostic prénatal du foetus ou de la femme enceinte peut être réalisé aux fins de détection ou d'exclusion d'une éventuelle maladie génétique. Il doit être précédé d'un conseil génétique. Ce type d'examen est assujetti à l'autorisation du Ministère. L'information relative au sexe du foetus ne peut être communiquée que si la femme est porteuse d'une maladie grave liée au sexe.

Dépistage génétique systématique (screening)
La loi autrichienne prescrit que les analyses génétiques à des fins scientifiques ou de formation ne peuvent être effectuées qu'avec le consentement écrit des personnes qui ont fourni les échantillons ou avec des échantillons anonymisés. La Suède soumet le dépistage à autorisation, laquelle est octroyée à trois conditions. Premièrement, l'analyse doit avoir pour objet d'augmenter grandement les connaissances d'ordre pathologiques ou avoir une importance particulière en matière de soins médicaux ou de santé. Deuxièmement, les personnes qui entreprennent le dépistage doivent disposer des compétences scientifiques à cet effet. Troisièmement, les données obtenues doivent être protégées de manière adéquate. Au surplus, la personne concernée doit donner son consentement par écrit.

6865

Assurances La loi autrichienne interdit aux assureurs d'exiger, de recevoir ou d'utiliser les résultats d'une analyse génétique. La loi belge interdit au preneur d'assurance de communiquer à l'assurance les données génétiques lors de l'établissement du contrat; elle stipule également que les examens médicaux nécessaires à la conclusion et à l'exécution du contrat ne peuvent pas être fondés sur des techniques d'analyses génétique propres à déterminer son état de santé futur. Au Danemark, il est interdit aux assureurs de faire procéder à des tests présymptomatiques, d'en demander les résultats ou d'en tirer parti d'une quelconque manière. Ce principe ne s'applique toutefois qu'à la prévision des risques de pathologies; les données sur des pathologies actuelles ou passées ne sont pas protégées. La France interdit aux assureurs de demander une analyse génétique à titre préalable. Par contre, ils peuvent utiliser les résultats des analyses déjà effectuées; ils ont toutefois adopté un moratoire, valable jusqu'en 2004, en vertu duquel ils renoncent à utiliser les résultats des analyses déjà effectuées. La Norvège interdit aux assureurs de solliciter, de recevoir, de détenir ou d'utiliser les résultats d'une analyse génétique. Il est également interdit d'essayer de savoir si un examen génétique a été effectué. Les Pays-Bas interdisent également aux assureurs de demander une analyse génétique comme condition préalable à la conclusion d'un contrat. En outre, il est interdit de demander les résultats d'une analyse génétique déjà effectuée pour des assurances sur la vie dont la somme d'assurance est inférieure à environ 220 000 francs suisses12 et pour des assurances perte de gain avec une rente inférieure à environ 40 000 francs suisses à partir de la première année d'incapacité et inférieure à environ 28 500 francs suisses à partir de la deuxième année d'incapacité.

Travail L'Autriche interdit aux employeurs d'exiger, de recevoir ou d'utiliser les résultats d'une analyse génétique. Le Danemark interdit les analyses présymptomatiques, sauf dans les cas où, du point de vue des conditions de travail, il y a lieu de protéger le travailleur ou les autres employés. Les analyses doivent conduire soit à améliorer les conditions de travail, soit à prévenir les pathologies liées à l'exécution des tâches confiées. L'employeur
doit informer l'agence pour la surveillance du travail de la conduite des analyses au plus tard quatre semaines avant leur mise en oeuvre. Si les conditions fixées par la loi ne sont pas réalisées, le directeur de l'agence peut interdire ou suspendre les analyses. La France prohibe toute analyse de type génétique lors d'une embauche. La Norvège interdit également aux employeurs de solliciter, de recevoir, de détenir ou d'utiliser des résultats d'une analyse génétique ainsi que d'essayer de savoir si un examen génétique a été effectué. Les Pays-Bas interdisent en principe les analyses médicales lors d'une embauche; ils ne les autorisent que si les tâches prévues par le contrat de travail imposent des exigences particulières pour protéger la santé ou garantir la sécurité du travailleur ou de tiers et que des mesures sur la place de travail ne suffisent pas.

12

En 2000, ce montant correspondait à 145 799 euros.

6866

2

Partie spéciale: Commentaire du projet

2.1

Champ d'application, but et définitions

2.1.1

Champ d'application (art. 113)

Le présent projet fixe à l'al. 1 les conditions d'exécution des analyses génétiques humaines dans les domaines de la médecine, du travail, de l'assurance et de la responsabilité civile. La notion d'«analyse» doit être comprise comme un processus.

Elle ne recouvre pas seulement l'analyse en tant que telle du matériel biologique (échantillon), mais également le prélèvement de l'échantillon, le conseil génétique précédant l'analyse, l'obtention du consentement requis, la communication des résultats ainsi que la réutilisation et la conservation des échantillons. L'analyse porte sur les caractéristiques du patrimoine génétique héréditaires ou acquises pendant la phase embryonnaire chez l'être humain (art. 3, let. a). Ne sont pas concernées les anomalies du patrimoine génétique qui peuvent survenir durant la vie. Les cancers, en particulier, dérivent d'un dérèglement du programme génétique lié à des mutations pathologiques acquises. Les analyses cytogénétiques et moléculaires permettent de détecter des anomalies d'importance diagnostique et pronostique, de suivre l'évolution de la maladie et d'évaluer la réponse au traitement. Les analyses génétiques moléculaires sont également susceptibles de déterminer l'agent pathogène dans des maladies infectieuses chez l'être humain. Ces cas ne nécessitent pas une réglementation spéciale.

L'avant-projet de loi soumis en consultation réglait également de manière exhaustive les analyses génétiques effectuées à des fins d'identification, c'est-à-dire l'établissement de profils d'ADN. Il se limitait à réserver les dispositions légales fédérales et cantonales sur une banque de profils d'ADN. Toutefois, on a constaté lors de l'élaboration du projet de loi sur un système d'information fédéral fondé sur les profils d'ADN qu'il est plus rationnel qu'une même loi règle la banque de profils d'ADN et l'établissement d'un profil d'ADN en matière pénale et d'identification des personnes inconnues ou disparues. C'est pourquoi l'al. 2 réserve la loi fédérale sur l'utilisation de profils d'ADN dans le cadre d'une procédure pénale et sur l'identification de personnes inconnues ou disparues14 (loi sur les profils d'ADN), qui est actuellement débattue devant le Parlement. Le présent projet ne règle plus que l'établissement de profils d'ADN visant à établir la filiation ou l'identité
d'une personne dans le cadre d'une procédure civile ou administrative ainsi que l'établissement de la filiation en dehors d'une procédure (art. 31 à 34). Les profils établis dans ces domaines ne sont pas saisis dans le système d'information fédéral fondé sur les profils d'ADN.

Les analyses génétiques effectuées sur l'être humain dans le domaine de la recherche ne tombent en principe pas sous le coup du présent projet de loi (al. 3). Par là il faut entendre non seulement les projets de recherche, mais également les études génétiques effectuées sur toute une population. L'Office fédéral de la santé publique élabore actuellement un projet de loi sur la recherche sur l'être humain dont le but est de protéger la dignité humaine et la personnalité (ch. 1.4.2). Le présent projet ne 13 14

Le renvoi à des articles sans mention d'un titre de loi se réfère toujours au projet de loi fédérale sur l'analyse génétique humaine.

Message du 8 nov. 2000, FF 2001 19 ss.

6867

saurait anticiper sur cette loi. Toutefois, pour ne pas empêcher la réalisation d'études épidémiologiques, il complète les normes légales existantes sur la recherche au moyen d'une disposition transitoire (art. 20, al. 2), qui prend pour exemple l'art. 321bis du code pénal (CP)15 (ch. 2.3.12). L'al. 3 réserve donc cette disposition du projet.

Les données génétiques constituent des données particulièrement sensibles et exigent une protection particulière; elles peuvent en effet être utilisées de manière discriminatoire ou abusive. C'est pourquoi les domaines dans lesquels les analyses génétiques sont autorisées doivent être énumérés exhaustivement. Cette solution répond également à une exigence posée par la protection des données.

Les analyses d'ADN effectuées dans le cadre d'études archéologiques ne tombent pas sous le coup du présent projet, étant donné qu'elles ne sont pas réalisées sur des êtres humains vivants.

2.1.2

But (art. 2)

Le but de la réglementation, selon la let. a, est d'assurer la protection de la dignité humaine et de la personnalité. Ce faisant, le projet exécute le mandat fixé par l'art. 119, al. 2, de la Constitution fédérale. Le principe n'est pas celui d'une interdiction avec des exceptions, mais d'une autorisation de principe des analyses génétiques, qui sont considérées comme étant une sorte d'examens médicaux. Toutefois, des limites précises doivent être posées, en particulier dans les domaines du travail, de l'assurance et de la responsabilité civile. C'est pourquoi il est important que le projet ait également pour but de prévenir des analyses génétiques abusives et une utilisation abusive des données génétiques (let. b). D'autre part, la garantie de la qualité des analyses génétiques et de l'interprétation de leurs résultats revêt une importance primordiale. C'est pourquoi le projet en fait une finalité (let. c), bien qu'il s'agisse d'un aspect de la protection de la personnalité.

2.1.3

Définitions (art. 3)

Le projet prévoit les définitions suivantes: a.

Analyses génétiques Par analyses génétiques (pour les différentes définitions possibles, se référer au ch. 1.2.5), il faut comprendre les analyses cytogénétiques (let. b) et moléculaires (let. c) effectuées sur l'être humain dans le but de déterminer des caractéristiques du patrimoine génétique héréditaires ou acquises pendant la phase embryonnaire et toutes les autres analyses de laboratoire qui visent à obtenir de manière directe ces mêmes informations. Ces caractéristiques sont liées plus particulièrement à des maladies humaines. Il s'agit en l'occurence de modifications (mutations) dans le patrimoine génétique, c'est-à-dire de

15

RS 311.0

6868

changements dans le nombre et la structure des chromosomes et de mutations dans l'ADN. Si la portion d'ADN concernée implique un gène, il s'agit alors d'une mutation génique.

Pour qu'il s'agisse d'une analyse génétique au sens du présent projet, il est déterminant qu'il s'agisse d'une méthode qui donne des informations directes sur un changement du patrimoine génétique. Le diagnostic traditionnel d'une maladie héréditaire ou d'une prédisposition au travers de symptômes ou d'une anamnèse familiale n'est pas une analyse génétique au sens du projet. La notion de laboratoire doit être comprise au sens large; la réalisation d'un test au chevet d'un malade, par exemple par une analyse de sang ou de sueur, peut constituer une analyse selon le projet. La définition a été voulue large, en particulier pour que les développements futurs puissent aussi y être inclus. Actuellement, les analyses cytogénétiques et moléculaires ont la primauté. Les autres analyses de laboratoire qui visent à obtenir de manière directe des informations sur le patrimoine génétique comprennent également certaines analyses effectuées sur des enzymes ou sur des protéines. La méthode choisie pour détecter une modification du patrimoine génétique n'est pas déterminante dès lors qu'il s'agit d'une analyse directe du patrimoine génétique.

Ne tombent pas dans le champ d'application du projet les modifications génétiques pathologiques acquises par certaines cellules au cours de la vie et dues à des facteurs intrinsèques ou extrinsèques (effets de l'environnement).

La loi vise uniquement les caractéristiques génétiques d'une personne, par quoi il faut entendre non seulement les prédispositions transmises par les parents, donc héréditaires, mais également les caractéristiques du patrimoine génétique acquises durant la phase embryonnaire.

Les étapes essentielles d'une analyse génétique sont l'établissement de l'indication, l'analyse de laboratoire proprement dite et l'interprétation des résultats qui en découlent. Le conseil génétique en constitue obligatoirement une autre dans le cas d'une analyse génétique présymptomatique ou d'une analyse génétique prénatale ou d'une analyse visant à établir un planning familial (ch. 2.3.6 et 2.3.7).

b.

Analyses cytogénétiques La cytogénétique s'occupe de la description des chromosomes, des anomalies de leur nombre et de leur forme (les aberrations chromosomiques) ainsi que des relations entre ces anomalies et leurs conséquences phénotypiques.

Il s'agit d'un domaine de la génétique médicale qui s'est développé dans les années 60. Les chromosomes sont les éléments principaux du noyau cellulaire et les porteurs du matériel héréditaire. Lors de la division cellulaire, ils se condensent de telle sorte, qu'après une préparation adéquate, ils peuvent être observés au microscope optique à un grossissement d'environ mille fois.

L'analyse microscopique permet de détecter des anomalies du nombre et de la structure des chromosomes; par contre, elle ne permet pas de voir des mutations géniques.

L'homme possède 46 chromosomes répartis en 23 paires. Les chromosomes sont identifiés selon des critères de taille et de morphologie reconnus internationalement (International System for Human Cytogenetic Nomenclature), 6869

puis classés sous forme d'un caryotype (carte chromosomique). Les anomalies chromosomiques sont fréquentes. Elles conduisent à des avortements, à des malformations, à des troubles du développement sexuel et à la stérilité.

Elles sont rarement transmises de façon héréditaire au sens strict du terme.

En général, elles apparaissent pendant la formation des gamètes chez l'un ou l'autre des parents. Cependant, des anomalies chromosomiques peuvent également se produire au cours de la vie, suite en particulier à l'exposition à des substances mutagènes, comme, par exemple, de l'arsenic ou du benzène ou à des doses importantes de radiation. Toute anomalie chromosomique n'a pas des conséquences phénotypiques. De plus, une incertitude peut être liée au fait que la formule chromosomique des tissus analysés n'est pas représentative de l'ensemble des cellules du corps de l'individu (mosaïque chromosomique).

Pendant longtemps, il n'a pas existé de lien étroit entre les diagnostics génétiques et cytogénétiques chez l'être humain. Ainsi, les maladies héréditaires ont été réparties selon qu'une aberration chromosomique ou une mutation génique en est la cause. Avec l'introduction de la technique dite FISH (hybridation in situ fluorescente) et l'avancement des projets de séquençage qui ont pour but de localiser (cartographier) les gènes sur les chromosomes humains, cette situation est en train de changer. Un nouveau domaine intermédiaire s'est développé, qui est la cytogénétique moléculaire. La notion de «cytogénétique» est utilisée de manière uniforme dans la littérature mondiale.

c.

Analyses moléculaires La génétique moléculaire a trait à l'analyse de l'ADN et de l'ARN, plus particulièrement à l'analyse de la structure moléculaire des gènes et leurs produits directs, à savoir les ARN et les protéines. Les tests de génétique moléculaire sont utilisés pour établir ou exclure la présence d'un gène muté qui pourrait conduire à une maladie héréditaire. De telles analyses à but diagnostic prennent une importance pratique croissante en médecine et remplacent de plus en plus les autres procédures d'analyse moins fiables et plus laborieuses. Elles sont effectuées non seulement par des généticiens, mais également par des spécialistes de toutes les disciplines médicales. Les tests de génétique moléculaire sont aussi utilisés à des fins non médicales, notamment dans le cadre d'études génétiques sur des populations.

Si l'on connaît la structure moléculaire d'un gène et les conséquences phénotypiques de ses mutations, on peut alors effectuer un test génétique direct sur une seule personne: on analyse le gène pour y détecter une mutation. Si l'on ne connaît ni le produit du gène ni la structure moléculaire du gène, mais que la position du gène sur le chromosome est connue, on peut entreprendre un test génétique indirect; ceci implique une analyse familiale. Pour cela, on profite du fait que le génome humain est parsemé de segments d'ADN qui permettent de distinguer les chromosomes homologues d'un individu. Ces segments d'ADN, qui sont distincts entre deux chromosomes homologues, ne causent eux-mêmes aucune maladie. Il s'agit de polymorphismes qui sont transmis avec leurs caractéristiques de génération en génération. Lorsqu'un polymorphisme est localisé à proximité ou à l'intérieur d'un gène donnant lieu à une maladie, il peut être utilisé comme marqueur

6870

de cette maladie. Le gène responsable de la maladie et le marqueur sont transmis héréditairement, couplés l'un à l'autre. On effectue ce qu'on appelle une analyse de liaison. Mais celle-ci n'indique qu'une probabilité, dont le degré de précision dépend des relations génétiques entre le gène responsable de la maladie et le marqueur.

d.

Analyses génétiques présymptomatiques Les analyses génétiques présymptomatiques sont des analyses génétiques au sens de la let. a, effectuées dans le but de détecter une prédisposition à une maladie avant l'apparition des symptômes cliniques. Ces analyses permettent de détecter des prédispositions avant qu'elles ne se manifestent pleinement au niveau clinique et qui, dans la plupart des cas, sont présumées sur la base d'une anamnèse familiale. Elles suscitent des interrogations complexes sur les plans génétique, médical, éthique, psychique et social. Des définitions précises et unifiées sont donc nécessaires. Celles-ci font cependant encore défaut dans la littérature spécialisée. Les notions d'analyses «présymptomatiques», «précliniques» ou «prédictives» sont utilisées d'une façon interchangeable. Le présent projet utilise le mot «présymptomatique», qui est le terme usuel lorsque le lien entre les prédispositions et les manifestations ultérieures probables d'une maladie est scientifiquement bien établi. Le terme «prédictif» est déjà très chargé dans la sphère culturelle allemande et il est également utilisé dans de nombreux autres domaines que le domaine médical décrit ci-dessus.

Il importe de souligner que la signification des analyses génétiques présymptomatiques est limitée (ch. 1.2.6).

Depuis quelque temps, de grands espoirs sont nés de la recherche sur le génome dans le cadre de la pharmacologie (pharmacogénomique) et de la toxicologie (toxicogénomique). On sait que certains médicaments agissent de manière bénéfique sur un grand nombre de patients, alors qu'ils n'ont pas les effets attendus ou des effets nocifs, sur un petit nombre d'entre eux. Les chercheurs veulent comprendre les différences d'origine génétique dans le métabolisme lors de la prise de médicaments ou de contacts avec des substances toxiques, afin d'améliorer la thérapie. Le but est de produire des médicaments pour des groupes déterminés de patients ou de pouvoir prescrire pour chaque patient, parmi les médicaments existants, celui qui sera le mieux adapté et qui aura le moins d'effets secondaires.

Les analyses qui permettent uniquement de déterminer les effets positifs ou négatifs d'un traitement envisagé ne sont pas des analyses génétiques présymptomatiques. La personne concernée ne peut consentir à une telle analyse que
lorsqu'elle aura reçu toutes les informations importantes, en particulier sur les motifs de l'analyse, son but, ses répercussions, ses risques et sur son coût (informed consent). Une telle analyse ne nécessite ni un conseil génétique complet (art. 14) ni le consentement par écrit (art. 18, al. 3). Par contre, si elle révèle une prédisposition à une maladie future qui se déclarerait indépendamment du traitement envisagé, elle tombe sous la définition de l'analyse génétique présymptomatique.

6871

e.

Analyses prénatales Dans le langage médical courant, on entend par analyse prénatale toute mesure diagnostique qui permet, pendant la grossesse, de déceler ou d'exclure des troubles de la santé de l'embryon ou du foetus. Les troubles peuvent être d'origine génétique, comme les maladies héréditaires monogéniques, les aberrations chromosomiques ou les malformations héréditaires multifactorielles; ils peuvent aussi ne pas être d'origine génétique, comme les infections ou les maladies foetales dues à des facteurs maternels ou à des troubles de croissance.

Le projet utilise la notion d'analyses prénatales dans un sens étroit, étant donné que les anomalies non génétiques n'entrent pas dans le champ d'application du projet de loi. La notion est néanmoins utilisée comme un concept général. Elle ne recouvre pas seulement les analyses génétiques prénatales proprement dites (let. f), mais également les analyses prénatales effectuées dans le but d'évaluer un risque (let. g), c'est-à-dire les analyses de laboratoire qui donnent une indication quant au risque d'une anomalie génétique chez l'embryon ou le foetus et les analyses ultrasonographiques de l'embryon ou du foetus. Dans les trois cas, les analyses sont effectuées dans le but spécifique de déterminer une anomalie du patrimoine génétique ou du moins elles comprennent cette possibilité. La notion vaut quelle que soit la méthode utilisée (analyse moléculaire, cytogénétique, biochimique ou ultrasonographique), qu'elle soit invasive (intervention dans la matrice et risque de fausse couche) ou non invasive (analyse du sang maternel ou analyse ultrasonographique), ou qu'il s'agisse d'une analyse effectuée dans le but de savoir s'il existe un risque élevé d'existence d'anomalies génétiques déterminées ou dans celui de confirmer un diagnostic prénatal. Les analyses ultrasonographiques de routine qu'il est recommandé d'effectuer vers la fin du premier trimestre et à la moitié de la grossesse, ont pour but de déterminer la date de l'accouchement, de dépister une grossesse multiple, d'étudier la position du placenta etc., mais aussi inévitablement de déceler des anomalies génétiques définies qui devront être confirmées ensuite par une analyse génétique proprement dite. Ainsi, par exemple, une nuque anormalement épaisse chez un foetus peut faire craindre une aberration
chromosomique (par exemple, trisomie 21 ou 45 ou encore syndrome de Turner). Actuellement, il faut entendre par «une analyse de laboratoire effectuée dans le but d'évaluer un risque» principalement les analyses du sang maternel. Le triple test, notamment, permet par l'analyse du sang de la mère d'obtenir une indication quant au risque de la présence d'anomalies génétiques déterminées (certaines aberrations chromosomiques ou défaut de fermeture du tube neural) chez l'embryon ou le foetus. Si le résultat de l'analyse est positif, on effectuera alors une analyse génétique proprement dite. Le syndrome de Down («mongolisme») pourrait déjà être détecté au cours du premier trimestre de la grossesse, soit entre la 10e et la 13e semaine de grossesse, par l'examen de GHX[ PDUTXHXUV ELRFKLPLTXHV 3$33$ HW +&* SUésents dans le sang maternel et de la transparence de la nuque. Le sang maternel contient en effet, en petit nombre, des cellules de l'embryon ou du foetus. Au cas où ces cellules peuvent être prélevées et analysées, il s'agit d'analyses génétiques prénatales et non pas d'une analyse prénatale effectuée dans le but d'évaluer un risque.

6872

L'avant-projet de loi mis en consultation ne faisait pas de distinction entre les analyses génétiques prénatales et les analyses prénatales effectuées dans le but d'évaluer un risque. Il englobait dans les analyses génétiques prénatales également les analyses ultrasonographiques, à la condition qu'elles aient clairement pour but de détecter une anomalie génétique. Cette solution a été jugée, à juste titre, comme manquant de transparence, peu praticable et pas adaptée à la réalité. Ces deux catégories d'analyses ultrasonographiques ne peuvent pas être distinguées dans la pratique. Dans sa prise de position, la Fédération des médecins suisses (FMH) a fait valoir qu'une analyse ultrasonographique ne permet pas de faire une distinction entre ce qui est d'origine génétique et ce qui n'est pas d'origine génétique. La solution adoptée par le présent projet a pour effet que les limites fixées par l'art. 11 et les tâches dévolues aux offices d'information en matière d'analyse prénatale selon l'art. 17 s'appliquent à toutes les analyses prénatales au sens du présent projet. Par contre, l'obligation de se soumettre au conseil génétique avant d'effectuer une analyse (art. 14 et 15) et celle du consentement écrit (art. 18, al. 3) sont limitées aux analyses génétiques prénatales. Pour les analyses prénatales visant à évaluer un risque, le projet prévoit une obligation d'informations spécifique (art. 16).

f.

Analyses génétiques prénatales Les analyses génétiques prénatales sont des analyses génétiques au sens de la let. a, effectuées durant la grossesse dans le but de déterminer des caractéristiques du patrimoine génétique de l'embryon ou du foetus. Il s'agit en particulier de la chorioncentèse (analyse des villosités choriales) et de l'amniocentèse (analyse du liquide amniotique) effectuées, comme dans la plupart des cas, dans le but d'analyser le caryotype, de rechercher une maladie héréditaire monogénique ou d'analyser le liquide amniotique pour déceler un éventuel défaut de fermeture du tube neural et d'autres anomalies.

Cela vaut par analogie à la ponction du sang du cordon ombilical, méthode invasive plus rarement utilisée, qui consiste à prélever du sang ou du tissu foetal. Par contre, ne sont pas comprises dans cette définition les analyses du liquide amniotique qui visent uniquement à déterminer, par exemple, la maturité des poumons ou la compatibilité des groupes sanguins. Actuellement, on travaille sur des méthodes permettant d'analyser des cellules embryonnaires prélevées à partir du sang maternel.

Le diagnostic préimplantatoire, c'est-à-dire l'analyse du patrimoine génétique d'un embryon conçu in vitro avant son transfert dans la matrice, est réglé par la loi du 18 décembre 1998 sur la procréation médicalement assistée16, entrée en vigueur le 1er janvier 2001 (art. 5, al. 3, et art. 37, let. e, LPMA). Cette loi est une loi spéciale par rapport au présent projet.

g.

Analyses prénatales visant à évaluer un risque Sont des analyses prénatales visant à évaluer un risque non seulement les analyses de laboratoire effectuées dans le but d'évaluer un risque d'anomalie génétique de l'embryon ou du foetus, mais également toutes les analyses

16

RS 814.90; message du 26 juin 1996: FF 1996 III 197 ss; ch. 322.135.

6873

ultrasonographiques effectuées sur l'embryon ou le foetus (pour plus d'explications, voir commentaire sous let. e).

h.

Analyses visant à établir un planning familial Les analyses visant à établir un planning familial sont effectuées dans le but d'évaluer un risque génétique pour les générations suivantes; elles sont donc réalisées avant de concevoir un enfant. Il s'agit essentiellement de savoir si les parents sont porteurs d'un gène responsable d'une maladie (gène récessif dont la présence ne déclenche pas la maladie chez le porteur). Par contre, si l'on constate la présence d'une prédisposition à une maladie déterminée, il ne s'agit plus d'une analyse visant à établir un planning familial, mais d'une analyse génétique présymptomatique au sens de la let. d, même si l'analyse permet également d'établir un planning familial.

i.

Dépistage Un dépistage peut être réalisé sur l'ensemble de la population ou sur un groupe déterminé de personnes au sein de celle-ci, sans qu'il existe des raisons de présumer, chez la personne qui subit l'analyse, la présence d'un gène muté responsable d'une prédisposition à une maladie, que ce soit sur la base de symptômes ou de l'anamnèse familiale. La caractéristique d'un dépistage est qu'il est effectué de manière systématique, pour autant que la personne concernée ne le refuse pas.

Le terme de «screening» est utilisé dans différents sens. Il est souvent employé pour désigner les analyses effectuées au sein d'une famille dans le but de déterminer les membres atteints d'une anomalie génétique déterminée.

Au sens du présent projet, de telles analyses ne constituent pas des dépistages, mais un diagnostic de génétique médicale dans un cas de risque génétique élevé en raison d'une anomalie manifestement d'origine familiale.

j.

Trousse de diagnostic génétique in vitro Les trousses de diagnostic génétique in vitro sont des produits prêts à l'usage permettant de déterminer des caractéristiques du patrimoine génétique. Par produit il faut entendre tous moyens, tels que réactif, substance ou appareil de calibrage, matériel de contrôle, instrument, appareil ou système, utilisés seuls ou ensemble pour effectuer une analyse génétique d'échantillons.

La notion de «diagnostic in vitro» est utilisée dans la législation relative aux produits thérapeutiques (art. 4, al. 1, let. b, de la loi sur les produits thérapeutiques [LPT]17 et à l'art. 1 de l'ordonnance sur les dispositifs médicaux18). Les diagnostics in vitro sont considérés comme des produits thérapeutiques lorsqu'il s'agit de tests destinés à un usage médical ou présentés comme tels. Une grande partie des produits définis comme diagnostics génétiques in vitro au sens du présent projet tombent donc également sous le coup de la législation relative aux produits thérapeutiques. Il existe toutefois également des trousses de diagnostic génétique in vitro qui ne servent pas à des fins médicales, comme les tests en paternité, et qui entrent par consé-

17 18

RS 812.21; message FF 1999 3151.

RS 812.213

6874

quent exclusivement dans le champ d'application du présent projet de loi. Il convient encore de souligner que seules les trousses de diagnostic génétique in vitro visant à déterminer de manière directe des caractéristiques génétiques tombent sous le coup du présent projet. Ces distinctions sont importantes, en particulier par rapport à l'interdiction posée par l'art. 9 de remettre une trousse de diagnostic génétique in vitro à tout un chacun. Lors de l'élaboration des dispositions d'exécution du présent projet, les autorités fédérales compétentes devront assurer la coordination avec la législation relative aux produits thérapeutiques en ce qui concerne la procédure d'octroi de l'autorisation et la surveillance.

k.

Profils d'ADN Le profil d'ADN est le code propre à chaque individu, qui est établi à partir des séquences non-codantes de l'ADN, à l'aide de techniques de la génétique moléculaire. L'établissement d'un profil d'ADN entre également dans la définition de l'analyse génétique. La définition est reprise de l'art. 2, al. 1, du projet de loi sur les profils d'ADN. Pour les analyses visant à établir la filiation ou l'identité d'une personne, on utilisait auparavant des tests génétiques au niveau des protéines. On analysait des caractéristiques des groupes sanguins, des polymorphismes d'enzymes ou encore le système «human leucocyte antigen system» (ci-après: HLA). Ils sont remplacés de plus en plus souvent par les analyses au niveau de l'ADN. On y analyse des polymorphismes situés dans l'ADN non-codant. Il s'agit de séquences répétitives d'ADN (les minisatellites et les microsatellites) qui sont distribuées dans le patrimoine génétique entier, mais qui n'appartiennent pas aux parties de l'ADN qui codent pour une protéine. Le profil ADN apparaissant sur le gel d'analyse est pour chaque individu hautement spécifique. On parle d'empreinte génétique, car la partie non-codante de l'ADN humain possède une structure unique chez chaque personne, comme pour les empreintes digitales. Grâce aux profils d'ADN, les analyses visant à établir la filiation ou l'identité d'une personne ont beaucoup gagné en précision.

l.

Données génétiques Les données génétiques sont les résultats d'une analyse génétique. Elles consistent en toutes les informations relatives au patrimoine génétique d'une personne, d'un embryon ou d'un foetus, y compris le profil d'ADN, obtenues au moyen d'une analyse génétique.

m.

Echantillon Théoriquement, une analyse génétique peut être effectuée, selon la méthode, sur n'importe quelle cellule humaine contenant un noyau. Dans la pratique, on utilise surtout les cellules sanguines (sang) ou, pour les analyses génétiques à des fins d'identification, les cellules de la muqueuse buccale (salive).

L'échantillon au sens du présent projet consiste en tout matériel biologique recueilli pour les besoins d'une analyse génétique.

n.

Personne concernée Par personne concernée, il faut entendre la personne dont proviennent les échantillons utilisés en vue de l'analyse de son patrimoine génétique ou de l'établissement de son profil d'ADN et dont on obtient ainsi des données 6875

génétiques. Dans le cas de l'analyse prénatale ou de l'établissement prénatal d'un profil d'ADN, la personne concernée est la femme enceinte.

2.2

Dispositions générales applicables aux analyses génétiques

2.2.1

Interdiction de discriminer (art. 4 )

La plus grande crainte liée aux analyses génétiques est qu'elles soient utilisées comme un moyen de discrimination. C'est pourquoi l'art. 4 du projet pose comme premier principe que «nul ne doit subir de discrimination en raison de son patrimoine génétique». En fait, cette norme concrétise, dans le domaine de l'analyse génétique, le principe général de non-discrimination déjà garanti par l'art. 8 de la Constitution fédérale, même s'il n'énonce pas expressément le patrimoine génétique.

Toutefois, vu l'importance du principe dans un domaine aussi sensible que celui de la génétique, il a paru justifié de réaffirmer ce principe dans le projet. Il convient cependant de souligner que l'interdiction de discriminer n'exige pas une égalité de traitement absolue. Une différence de traitement peut être admise si elle repose sur des motifs pertinents et sérieux19.

L'interdiction de toute discrimination fondée sur le patrimoine génétique d'une personne s'adresse aussi bien aux organes de l'Etat qu'aux particuliers. Le projet ne prévoit cependant pas de sanction spéciale ­ civile ou pénale ­ pour celui qui s'estime victime d'une discrimination en raison de son patrimoine génétique. Ce n'est qu'en relation avec d'autres dispositions légales que l'art. 4 du projet acquiert une véritable portée pratique. Ainsi, un contrat qui écarterait les porteurs d'anomalies génétiques de l'accès à certains services ou prestations, sans que cette différence de traitement puisse se justifier de manière objective, serait contraire à l'art. 4 et, partant, à l'art. 20 du code des obligations (CO); il serait dès lors nul ou partiellement nul. D'autre part, une décision d'une assurance sociale, jugée discriminatoire, pourrait également être attaquée par un recours de droit administratif ou de droit public, fondé notamment sur l'art. 4 du projet et de l'art. 8 de la Constitution fédérale. En outre, l'art. 4 peut avoir une portée également pour l'interprétation des dispositions de droit civil sur la protection de la personnalité (art. 27 et 28 ss CC).

Enfin, la communication à un tiers de données génétiques relatives à une personne dans le seul but de nuire à celle-ci pourrait tomber sous le coup des dispositions du code pénal sur l'honneur et sur le domaine secret ou le domaine privé (art. 173 ss CP).

Sur le plan international,
le principe de non-discrimination est consacré par la Convention européenne des droits de l'homme (art. 14), le Pacte international relatif aux droits civils et politiques (art. 2, 3 et 26), la Convention du Conseil de l'Europe du 4 avril 1997 sur les droits de l'Homme et la biomédecine (art. 11) et par la Déclaration universelle de l'UNESCO du 11 novembre 1997 sur le génome humain et les droits de l'homme (art. 6).

19

ATF 121 I 100

6876

2.2.2

Consentement (art. 5)

L'art. 5 reprend le principe posé par l'art. 119, al. 2, let. f, Cst., selon lequel «le patrimoine génétique d'une personne ne peut être analysé, enregistré et révélé qu'avec le consentement de celle-ci ou en vertu d'une loi».

Ainsi, une analyse génétique ou prénatale, y compris un dépistage, nécessite le consentement libre et éclairé de la personne concernée (al. 1, 1e phrase). Le consentement est un principe déjà appliqué dans tout le domaine médical. Il est déduit de la liberté personnelle en droit public et de la protection de la personnalité en droit privé. Le consentement doit être libre et éclairé. Il est libre lorsqu'il n'est pas entaché de tromperie ou ne résulte pas de pressions illicites. Le médecin doit donc exposer avec objectivité, véracité et impartialité la situation sur le plan médical, sans imposer une solution, même en cas de risques importants. Le consentement doit en outre être éclairé. Cela signifie que la personne concernée doit donner son consentement en toute connaissance de cause, après avoir reçu toute l'information pertinente.

Le consentement doit être donné par la personne concernée si elle est capable de discernement. Est capable de discernement, selon l'art. 16 du code civil (CC), «toute personne qui n'est pas dépourvue de la faculté d'agir raisonnablement à cause de son jeune âge, ou qui n'en est pas privée par suite de maladie mentale, de faiblesse d'esprit, d'ivresse ou d'autres causes semblables». Un mineur ou un interdit capable de discernement peut donc décider personnellement de se soumettre ou non à une analyse génétique.

Lorsque la personne concernée est incapable de discernement, le consentement doit être donné par son représentant légal, conformément aux règles du droit de la personne, de la famille et de la tutelle ou des lois cantonales sur la santé (al. 2). Les dispositions sur la gestion d'affaires sans mandat demeurent réservées.

L'exigence du consentement de la personne concernée vaut pour toute analyse génétique effectuée dans l'un des domaines réglés par le projet, y compris les analyses prénatales effectuées dans le but d'évaluer un risque et le dépistage. Le projet est ainsi conforme à la Recommandation R (92) 3 du Conseil de l'Europe sur les tests et le dépistage génétique à des fins médicales, qui prévoit, sur la base du principe 5, que
«tout test génétique, même s'il est offert de façon systématique» doit se fonder sur le consentement éclairé. Le projet ne crée donc pas de base légale qui permettrait d'effectuer un dépistage génétique sans le consentement des personnes concernées.

Le consentement doit être donné par écrit pour une analyse génétique présymptomatique, une analyse génétique prénatale ou une analyse visant à établir un planning familial (art. 18, al. 3). Il en va de même pour les analyses génétiques effectuées dans les domaines du travail (art. 22, let. e) et de la responsabilité civile (art. 30) ainsi que pour les profils d'ADN visant à établir la filiation ou l'identité d'une personne (art. 32 à 34). Le consentement à toute autre analyse génétique, y compris à celle effectuée dans le cadre d'un dépistage, peut être donné par écrit, par oral ou même de manière tacite. Toutefois, le consentement tacite ne peut être admis que si la personne concernée est informée de manière adéquate. C'est à cette seule condition que son absence d'opposition peut être considérée comme un consentement tacite.

6877

La liberté du consentement a pour corollaire celle de le révoquer en tout temps (al. 3). Ce retrait n'est pas soumis à une exigence de forme, même si le consentement à l'analyse doit être donné en une forme déterminée.

Le principe du consentement connaît toutefois des exceptions. Il est possible en effet, dans certains cas, d'effectuer une analyse génétique sans le consentement de la personne concernée ou, si elle est incapable de discernement, de son représentant légal. Mais ceci n'est faisable que s'il existe une disposition légale qui l'autorise expressément. A cet effet, le projet réserve les exceptions au consentement prévues dans les lois fédérales (al. 1, 2e phrase). Une base légale cantonale est ainsi exclue.

Cette solution garantit une réglementation unique pour toute la Suisse. Le présent projet lui-même prévoit une exception en autorisant le juge à ordonner un profil d'ADN visant à établir la filiation ou l'identité d'une personne (art. 32, al. 1).

D'autres exceptions sont prévues dans le projet de loi fédérale sur les profils d'ADN, qui fixe les conditions pour établir un profil d'ADN dans le cadre d'une procédure pénale.

2.2.3

Droit de ne pas être informé (art. 6)

La personne dont le patrimoine génétique est analysé a le droit de connaître les résultats de l'analyse, conformément aux règles sur le contrat de mandat qui la lie au médecin, au droit de décider qui découle du principe fondamental de la liberté personnel, et au principe du respect de la vie privée. Cependant, il découle du droit de décider que cette personne a, pour des raisons qui ne regardent qu'elle, également le droit de ne plus vouloir être informée des résultats de l'analyse qui a été effectuée.

Le refus de connaître des informations relatives à son patrimoine génétique doit être respecté et il ne doit pas entraîner de désavantages pour la personne concernée, hormis le paiement des frais liés à l'analyse. La mention expresse du droit de ne pas être informé a été demandée lors de la procédure de consultation. Il vaut pour toutes les analyses génétiques au sens du présent projet, sous réserve de celles ordonnées par un juge ou une autorité administrative (art. 32 et 33).

Toutefois, les informations obtenues sur le patrimoine génétique de la personne qui a subi une analyse génétique peuvent concerner également des membres de sa famille (les parents par le sang). Par exemple les enfants d'une personne qui a effectué une analyse génétique révélant qu'elle est atteinte de la maladie de Huntington sont susceptibles d'être porteurs du gène de cette maladie. C'est pourquoi l'art. 6 donne le droit à toute personne de ne pas connaître des informations concernant son patrimoine génétique et non seulement à la personne qui a subi l'analyse.

Le droit de ne pas savoir peut toutefois subir une restriction dans l'intérêt de la personne concernée elle-même ou, dans le cas d'une femme enceinte, de celui de l'embryon ou du foetus. Ainsi, si la personne concernée ou si l'embryon ou le foetus sont menacés par un danger imminent, le médecin a l'obligation de communiquer immédiatement les résultats de l'analyse à la personne concernée, même si celle-ci n'a pas souhaité les connaître (art. 18, al. 2).

6878

2.2.4

Protection des données génétiques (art. 7)

L'art. 7 rappelle l'applicabilité des normes générales relatives à la confidentialité des informations médicales. En soi, il n'ajoute rien au droit existant; sa fonction est essentiellement déclarative et explicative. Le projet ne règle la protection des données génétiques que dans les cas où il convient de prévoir une réglementation spéciale par rapport aux autres données relatives à la santé d'une personne.

Le traitement des données génétiques d'une personne est en premier lieu soumis au secret professionnel selon l'art. 321 du CP20, qui punit sur plainte de l'emprisonnement ou de l'amende les médecins et leurs auxiliaires qui auront révélé un secret dont ils ont eu connaissance dans l'exercice de leur profession. Sont considérées comme auxiliaires les personnes qui assistent le détenteur du secret dans son activité professionnelle; leur statut est sans importance; ils peuvent être employés ou mandataires. Partant, l'employé de laboratoire qui exécutera une analyse génétique sur l'ordre du médecin agira comme l'auxiliaire de ce dernier21 et sera puni en application de l'art. 321 CP s'il révèle un secret en relation avec une analyse génétique.

Les données génétiques tombent également sous le coup de l'art. 321bis CP, qui réprime la violation du secret professionnel en matière de recherche médicale. En principe, toute recherche dans les domaines de la médecine ou de la santé publique qui utilise des données médicales de patients doit se fonder sur le consentement de chaque patient à une telle utilisation de ses données. L'art. 321bis CP prévoit une dérogation à ce principe, compte tenu de la difficulté pratique de recueillir le consentement de chaque personne. Ainsi, en l'absence du consentement de la personne intéressée, une recherche utilisant des données de celle-ci, en l'occurence des données génétiques, est malgré tout licite si deux conditions sont remplies. Premièrement, les personnes concernées ne doivent pas avoir expressément refusé l'utilisation de leurs données à des fins de recherche après avoir dûment été informées sur leurs droits.

Deuxièmement, une commission d'experts doit avoir autorisé la recherche, après qu'elle s'est assurée que la recherche ne pouvait pas être menée avec des données anonymes ou qu'il était impossible ou très difficile d'obtenir le consentement des intéressés
et que l'intérêt de la recherche primait l'intérêt des personnes concernées au maintien de la confidentialité de leurs données.

Le traitement des données génétiques tombe également sous le coup de la loi fédérale du 19 juin 1992 sur la protection des données22 (LPD). Cette loi s'applique aux personnes privées et aux organes fédéraux (art. 2, al. 1, LPD), à l'exclusion des organes communaux et cantonaux (par exemple les hôpitaux universitaires). Elle définit les données protégées, notamment les données sensibles ­ dont font partie les données sur la santé et la sphère intime ­ qui jouissent d'une protection accrue (art. 3, let. c, LPD). Elle contient des règles générales sur la licéité du traitement de données personnelles ainsi que sur le droit d'accès et sur la communication des 20 21

22

RS 311.0 Stefan Trechsel, Schweizerisches Strafgesetzbuch, Kurzkommentar, 2e éd., Zurich 1997, n. 13 ad art. 321; Bernard Corboz, Les principales infractions, vol. II, Berne 1999, p. 381; Jörg Rehberg, Strafrecht IV, Delikte gegen die Allgemeinheit, 2e éd., Zurich 1996, p. 431.

RS 235.1

6879

données à des tiers. Le traitement doit être effectué conformément aux principes de la bonne foi et de la proportionnalité (art. 4, al. 2, LPD). Sur le plan du droit pénal, elle punit, sur plainte, des arrêts ou de l'amende la personne qui, intentionnellement, aura révélé d'une manière illicite des données personnelles secrètes et sensibles portés à sa connaissance dans l'exercice d'une profession (art. 35 LPD). Ainsi, les employés des laboratoires qui, sans mandat d'un médecin, établissent des profils d'ADN selon les art. 32 à 34 ­ l'art. 321 CP n'est dès lors pas applicable dans ce cas ­ sont punissables en vertu de la loi sur la protection des données. Une norme pénale spéciale pour les personnes travaillant dans les laboratoires, comme le prévoyait l'avant-projet à l'art. 39, ne se justifie donc pas.

Les données génétiques collectées dans des hôpitaux publics cantonaux tombent sous le coup des lois cantonales sur la protection des données. Ces lois reposent sur des principes analogues à ceux ancrés dans la loi fédérale sur la protection des données. Dans la mesure où il n'existe pas de dispositions cantonales sur la protection des données, le traitement des données personnelles par des organes cantonaux en exécution du droit fédéral se fait conformément à la loi fédérale sur la protection des données (art. 37 LPD).

Le domaine qui nécessite une meilleure protection des données est celui de l'assurance-maladie, en particulier dans les rapports entre les différentes branches de l'assurance. Il s'agit toutefois d'un problème général et non d'un problème spécifique aux analyses génétiques. C'est pourquoi le Département fédéral de l'intérieur et le Département fédéral de justice et police ont institué au début de l'année 1998 une commission d'experts chargée de préparer des propositions en vue de futures modifications législatives et d'améliorations dans la pratique. Le rapport23 a été publié en mars 2001.

2.2.5

Autorisation d'effectuer des analyses génétiques (art. 8)

La personne qui veut effectuer des analyses cytogénétiques ou moléculaires devra requérir une autorisation de l'autorité fédérale compétente (al. 1). Ces analyses sont en général d'une grande complexité et peuvent avoir pour la personne concernée d'importantes répercussions. Il est dès lors justifié de les soumettre à un régime d'autorisation et de surveillance propre à garantir la qualité de l'exécution des analyses, la formation et les compétences des personnes qui effectuent ces analyses, ainsi que le respect des prescriptions légales, en particulier celles relatives à la protection des données, que ce soit au sein d'un laboratoire privé, d'un laboratoire d'hôpital public ou d'un institut de médecine légale.

Le Conseil fédéral désignera dans une ordonnance l'autorité fédérale compétente pour délivrer l'autorisation, il fixera les conditions à remplir pour l'obtenir et arrêtera la procédure pour son octroi. Il définira les obligations incombant aux titulaires d'une autorisation. Il réglera la surveillance des laboratoires et prévoira notamment

23

Rapport sur la Protection de la personnalité dans l'assurance-maladie et accidents sociale et privée. Diffusion par l'Office fédéral des constructions et de la logistique, OFCL, 3003 Berne, www.bbl.admin.ch/bundespublikationen. Numéro de commande: 318.010.7/01.

6880

la possibilité d'effectuer des inspections non annoncées. Enfin, il fixera le montant des émoluments (al. 2, let. a à e).

La décision de l'autorité fédérale compétente peut faire l'objet d'un recours auprès du Département fédéral compétent (art. 47, al. 1, let. c, de la loi fédérale sur la procédure administrative24). Selon la loi fédérale d'organisation judiciaire25 actuelle, un recours peut être interjeté contre la décision de ce Département auprès du Tribunal fédéral. Il est à noter que le projet de révision de la loi d'organisation judiciaire26 prévoit un recours tout d'abord devant le Tribunal fédéral administratif ­ qui devra être créé ­, avec la possibilité de recourir ensuite auprès du Tribunal fédéral. Il n'est dès lors pas nécessaire de prévoir des règles de procédure particulières dans une loi spéciale.

L'art. 8, al. 1 et 2, s'inspire de la réglementation actuelle relative aux laboratoires qui effectuent des analyses de sang, de produits sanguins ou de transplants en vue d'une transfusion, d'une transplantation ou d'un traitement. Ces laboratoires sont contrôlés par l'Office fédéral de la santé publique (OFSP) en vertu de la loi fédérale du 18 décembre 1970 sur les épidémies27 (art. 5, al. 1bis) et de l'ordonnance du 26 juin 1996 sur les laboratoires de microbiologie et de sérologie28. L'ordonnance impose des exigences strictes quant à la formation du directeur et du personnel et quant au fonctionnement des laboratoires et oblige ceux-ci à se soumettre à un contrôle de qualité externe. Le respect de ces normes est garanti par des inspections régulières.

Des critères analogues devront être développés à l'intention des laboratoires effectuant des analyses cytogénétiques et moléculaires, afin d'assurer la qualité des analyses et de protéger la population. A cet effet, il conviendra de s'inspirer des directives émises par la Société suisse de génétique médicale pour le contrôle de qualité des analyses en génétique médicale. Ces directives, en vigueur depuis le 1er juillet 1997, s'appliquent aux examens génétiques cités nominalement dans la Liste des Analyses publiée par le Département fédéral de l'intérieur dans le cadre de la législation sur l'assurance-maladie sociale.

Selon l'art. 35, let. a, la Commission d'experts pour l'analyse génétique humaine doit apporter son soutien à l'autorité
qui délivre les autorisations, en élaborant des normes pour le contrôle de la qualité des analyses génétiques effectuées par les laboratoires. Pour ce faire, la Commission peut faire appel aux spécialistes du Service d'accréditation suisse de l'Office fédéral de métrologie.

Il ne serait pas justifié de renoncer au système de l'autorisation, dans la mesure où, pour des raisons de police sanitaire, les laboratoires qui effectuent des analyses de sang, de produits sanguins ou de transplants afin de diagnostiquer des maladies transmissibles avant une transfusion, une transplantation ou un traitement doivent être au bénéfice d'une autorisation au niveau fédéral. L'admission des laboratoires en tant que fournisseurs de prestations dans l'assurance-maladie sociale, au sens des art. 53 ss de l'ordonnance sur l'assurance-maladie29, ne permet pas de renoncer au 24 25 26 27 28 29

RS 172.021 RS 173.110 FF 2001 4000 RS 818.101 RS 818.123.1 RS 832.102

6881

contrôle de leur activité et de la qualité de leurs prestations. L'admission est accordée à tous les laboratoires reconnus par l'assurance-maladie sociale; elle n'est pas accordée par un office fédéral. L'admission est réglée par les assureurs-maladie et les laboratoires, conformément aux conditions fixées par le droit fédéral. En outre, on ne peut pas admettre de prime abord que tous les laboratoires de la Suisse sont admis comme fournisseurs de services par l'assurance-maladie. Dans la mesure où les analyses visées à l'art. 8 constituent un domaine particulièrement sensible, la garantie d'un standard de qualité élevé s'impose. Afin d'éviter des doublons, l'ordonnance d'exécution du Conseil fédéral devra régler la coordination du présent projet avec les règles sur l'octroi des autorisations pour les laboratoires qui effectuent des analyses visant à détecter des maladies transmissibles et sur l'admission des laboratoires comme fournisseurs de prestations selon l'assurance-maladie sociale. Il faudra également prendre en compte la situation des laboratoires qui ont demandé de leur plein gré l'accréditation30.

Après avoir entendu la Commission d'experts pour l'analyse génétique humaine (art. 35, let. a), le Conseil fédéral a, selon l'al. 3, la compétence de soumettre à une autorisation d'autres analyses génétiques ou des analyses prénatales effectuées dans le but d'évaluer un risque, si celles-ci doivent satisfaire aux mêmes exigences que les analyses cytogénétiques et moléculaires quant à la qualité des analyses et à l'interprétation des résultats (let. a). La disposition vise d'une part les analyses de laboratoire qui ne sont pas des analyses cytogénétiques ou moléculaires, mais qui permettent toutefois d'obtenir les mêmes informations que celles-ci (art. 3, let. a).

Elle concerne d'autre part les analyses prénatales visant à évaluer un risque, c'est-àdire les analyses de laboratoire effectuées dans le but d'évaluer un risque d'anomalie génétique de l'embryon ou du foetus (art. 3, let. g). Le Conseil fédéral peut également exempter du régime de l'autorisation des analyses qui ne requièrent pas d'exigences particulières quant à la qualité des analyses et à l'interprétation des résultats (let. b). Ces analyses peuvent dès lors être effectuées librement par les laboratoires et les médecins.
L'objectif de l'al. 3 est double. D'une part, il doit permettre d'octroyer les autorisations de manière différenciée. Les analyses de laboratoire au sens de l'art. 3, let. a, diffèrent sensiblement les unes des autres, en particulier en ce qui concerne la difficulté de leur réalisation; il ne serait dès lors pas justifié de les soumettre globalement à une autorisation. D'autre part, il doit permettre de suivre l'évolution rapide des connaissances scientifiques et de la probable diversité des méthodes d'analyse qui permettront à l'avenir d'obtenir de manière directe des informations sur le patrimoine génétique d'une personne. Il est également possible que la technique pour réaliser des analyses cytogénétiques et moléculaires se simplifie, de sorte qu'il ne sera plus nécessaire de les soumettre à autorisation. Une ordonnance permet d'atteindre ces buts plus rapidement que la loi.

Enfin, l'al. 4 prévoit que les profils d'ADN visant à établir la filiation ou l'identité d'une personne dans une procédure civile (art. 32) ou une procédure administrative (art. 33) ou visant à déterminer la filiation hors procédure (art. 34) ne peuvent l'être que par des laboratoires agréés par le projet de loi fédérale sur les profils d'ADN.

Cette disposition tient compte de la situation créée par le transfert des dispositions relatives à l'identification dans le cadre d'une enquête pénale dans le projet de loi 30

Ordonnance sur l'accréditation et la désignation, RS 946.512.

6882

fédérale sur les profils d'ADN (ch. 2.1.1). Celui-ci donne la compétence au Conseil fédéral de fixer les conditions requises pour la reconnaissance des laboratoires habilités à établir des profils d'ADN et pour la procédure à suivre. Pour garantir le standard de qualité uniforme, donc une valeur probante des profils d'ADN, le projet de loi sur les profils d'ADN prévoit que ceux-ci ne pourront être établis que par des laboratoires agréés par le Département fédéral de justice et police. La condition essentielle, mais pas unique, de l'agrément est l'accréditation par le Service d'accréditation suisse de l'Office fédéral de métrologie et d'accréditation31.

Les profils d'ADN visés par le présent projet (art. 32 à 34) sont établis selon les mêmes principes que les profils d'ADN effectués pour les besoins d'une enquête pénale et, tout comme ceux-ci, ils sont établis à partir de l'ADN non-codant et ne donnent pas d'informations sur la santé ou sur d'autres caractéristiques personnelles (art. 31, al. 1). Il paraît dès lors évident que tous les profils d'ADN, quelle que soit la procédure dans laquelle ils sont établis, doivent satisfaire à un même niveau s'agissant des exigences de qualité. Ces raisons justifient donc le renvoi à la loi sur les profils d'ADN, lequel, par ailleurs, évite la multiplication de dispositions analogues et garantit la cohérence et l'harmonisation de la législation.

2.2.6

Trousse de diagnostic génétique in vitro (art. 9)

Compte tenu du caractère très sensible des résultats d'une analyse génétique, le présent projet prévoit qu'une telle analyse ne peut être prescrite que par un médecin (art. 13). Cette position rejoint celle de nombreuses législations étrangères et de déclarations internationales. Ainsi, la Recommandation N° R (92) 3 du Conseil de l'Europe prévoit qu'une analyse génétique ne peut être entreprise «que sous la responsabilité d'un médecin». Les directives de l'ASSM se prononcent dans le même sens.

Pour que ce principe prenne tout son sens, il faut, en parallèle, empêcher que tout un chacun puisse analyser son patrimoine génétique ou celui d'autres personnes. Les méthodes utilisées actuellement pour les analyses cytogénétiques et moléculaires font que celles-ci ne peuvent pas être réalisées par des non-professionnels. Ceci n'est toutefois pas le cas pour les trousses de diagnostic génétique in vitro, qui sont des produits prêts à l'usage. Ces produits ne doivent dès lors pas être en vente libre.

C'est pourquoi l'al. 1 interdit en principe la remise ­ rémunérée ou gratuite ­ par un producteur, un distributeur, un pharmacien, un médecin ou toute autre personne, de trousses de diagnostic génétique in vitro à une personne pour une utilisation pouvant être considérée comme étrangère à son activité professionnelle ou commerciale. En conséquence, ne tombe pas sous le coup de cette disposition la remise de trousses de diagnostic génétique in vitro à des grossistes, des laboratoires, des pharmaciens, des médecins, ou encore à d'autres personnes du milieu médical. La solution prévue par l'art. 9 est la plus apte à éviter des abus dans la réalisation d'analyses génétiques.

L'art. 38 sanctionne la violation de cette interdiction des arrêts ou de l'amende, et de

31

Cf. message du 8 nov. 2000 relatif à la loi fédérale sur l'utilisation de profils d'ADN dans le cadre d'une procédure pénale et sur l'identification de personnes inconnues ou disparues, ch. 223.1, FF 2001 19 ss.

6883

l'emprisonnement ou de l'amende jusqu'à 100 000 francs si l'auteur a agi par métier.

Comme mentionné dans le commentaire relatif à l'art. 3, let. j (ch. 2.1.3), les trousses de diagnostic génétique in vitro visées par le présent projet de loi peuvent également tomber sous le coup de la loi sur les produits thérapeutiques si elles sont utilisées à des fins médicales. Les dispositions d'exécution du présent projet régleront la coordination avec la loi sur les produits thérapeutiques pour éviter des contradictions. Les producteurs et les distributeurs de trousses de diagnostic génétique in vitro devront être informés sur les normes qui leur sont applicables.

Pour le reste, la réglementation de l'art. 9, al. 1, est conforme au droit européen. La directive 98/79/CE relative aux dispositifs médicaux de diagnostic in vitro interdit uniquement de faire obstacle à la mise sur le marché ou à la mise en service de dispositifs médicaux de diagnostic in vitro. Elle ne contient aucune disposition sur la remise de ces dispositifs après leur mise sur le marché ou leur mise en service. Les Etats membres peuvent toutefois prévoir des restrictions dans le but de protéger la vie humaine et la santé publique (art. 30 Traité CE).

Le projet a pour but de protéger les personnes contre les risques que peut présenter l'usage sans contrôle de trousses de diagnostic génétique in vitro. Mais il convient de ne pas empêcher des personnes de pouvoir profiter des progrès futurs réalisés dans ce domaine. Tenant compte de ces éléments, le projet donne la compétence au Conseil fédéral de prévoir, à des conditions strictes, des exceptions au principe de l'interdiction prévu par l'art. 9, al. 1. Les exceptions seront déterminées après consultation de la Commission d'experts pour l'analyse génétique humaine. Elles ne pourront être admises que si l'utilisation de la trousse est prescrite par un médecin, qui devra assurer le suivi de l'analyse. En outre, l'analyse ne devra donner lieu à aucun risque d'erreur d'interprétation des résultats (al. 2).

2.3

Analyses génétiques dans le domaine médical

2.3.1

Introduction

Dans la pratique clinique actuelle, une analyse de l'ADN permet de diagnostiquer principalement des maladies monogéniques rares; une analyse cytogénétique permet de détecter des troubles de la santé rares liés à des anomalies des chromosomes. La plupart des maladies, comme le cancer, les maladies cardio-vasculaires, les troubles du métabolisme (par exemple le diabète) et les affections neurodégénératives (en particulier la maladie d'Alzheimer) sont causées par plusieurs facteurs (maladies multifactorielles). Les recherches effectuées sur le génome humain font espérer une meilleure compréhension de l'interaction entre les gènes et les facteurs de l'environnement dans la survenance de ces maladies, ainsi qu'un développement des possibilités diagnostiques qui sont encore relativement limitées. Actuellement, il est possible de détecter des mutations géniques à l'origine de certains cancers héréditaires (par exemple le cancer du sein ou du colon), de maladies cardio-vasculaires et de maladies neurodégénératives. Les possibilités d'analyse génétique devraient toutefois se développer toujours davantage, avec pour conséquence que l'écart entre les possibilités de diagnostic et les moyens de traitement se creuse toujours plus. Mais le développement de traitements efficaces et de mesures prophylactiques adéquates

6884

présuppose de connaître les origines d'une maladie. La médecine est néanmoins confrontée à de nouveaux problèmes. La question essentielle est de savoir dans quelle mesure il se justifie de déterminer des prédispositons à des maladies en l'absence de symptômes. A ce sujet, il convient d'opérer des distinctions. Si l'analyse génétique présymptomatique permet de changer de mode de vie, d'entreprendre un traitement à temps ou d'entreprendre un traitement prophylactique pouvant empêcher une maladie de se déclarer, elle entre dans l'«arsenal» des mesures médicales admises. La demande de la personne confrontée dans sa famille à une grave maladie héréditaire et qui, dans le cadre d'un planning familial, doit «rendre des comptes» sur ses prédispositions génétiques susceptibles d'être transmises à ses descendants doit également être prise en considération. Dans les autres cas, le présent projet a procédé à une pesée des intérêts entre la solution du droit à l'autodétermination individuelle en matière d'information et celle de l'attribution à l'Etat du mandat de protéger les personnes contre des informations qui peuvent leur être préjudiciables, mais qui, dans certaines circonstances, peuvent aussi leur être bénéfiques. Le projet prévoit le droit de décider d'une personne capable de discernement, mais il exige que l'analyse génétique présymptomatique soit effectuée au moins dans le but d'établir un choix de vie (art. 10, ch. 2.3.2). Il faut veiller en outre à ce que la personne qui se soumet à une analyse génétique présymptomatique soit informée non seulement sur les aspects médicaux d'une telle analyse, mais également sur ses aspects psychiques et sociaux. C'est pourquoi le projet accorde une grande importance à un conseil génétique non directif (art. 14, ch. 2.3.6). En outre, la complexité des analyses génétiques et les difficultés d'interprétation de leurs résultats exigent que soit garanti un standard de qualité de haut niveau. C'est à cet effet que le projet soumet à autorisation l'activité des laboratoires qui effectuent des analyses cytogénétiques et moléculaires (art. 8, ch. 2.2.5), l'institution d'une commission d'experts pour les analyses génétiques (art. 35, ch. 2.8) et l'interdiction de la remise de trousses de diagnostic génétique in vitro à une personne pour une utilisation pouvant être considérée
comme étrangère à son activité professionnelle ou commerciale (art. 9, al. 1, ch. 2.2.6). Le projet exige, au surplus, que les analyses génétiques présymptomatiques, les analyses génétiques prénatales et les analyses visant à établir un planning familial soient prescrites par un médecin ayant une formation postgrade adéquate (art. 13, al. 2).

Le choix entre une méthode traditionnelle et une analyse génétique pour diagnostiquer une maladie qui se manifeste par des symptômes cliniques doit être laissé au pouvoir d'appréciation du médecin traitant. Déjà actuellement, on peut, pour plusieurs maladies, poser un diagnostic plus rapide et plus sûr par une analyse génétique que par une méthode traditionnelle. L'un des buts de la médecine est de détecter les causes d'une maladie de la manière la plus précise possible afin de pouvoir entreprendre un traitement ciblé. Une analyse génétique effectuée à temps permet certaines fois de renoncer à des analyses coûteuses et quelquefois pénibles.

Il faut protéger non seulement le droit de prendre connaissance d'informations relatives à son patrimoine génétique, mais aussi celui de refuser ces informations. C'est pourquoi les analyses génétiques effectuées sur des personnes incapables de discernement mineures ou interdites doivent être soumises à des limites précises (art. 10, al. 2; ch. 2.3.2).

Les analyses génétiques prénatales (art. 3, let. f) posent des problèmes particulièrement difficiles. Le projet autorise les analyses génétiques prénatales (art. 11), mais 6885

interdit clairement toute forme d'eugénisme (ch. 2.3.6) et les enfants à la carte (ch. 2.3.3). Le conseil génétique (art. 14 et 15) revêt dès lors une importance particulière pour ces analyses. Pour les analyses prénatales effectuées dans le but d'évaluer un risque (art. 3, let. g), qui peuvent être suivies d'une analyse génétique prénatale en cas de résultat positif, le projet prévoit une information spéciale (art. 16). En outre, les cantons devront veiller à la mise sur pied d'offices d'information indépendants en matière d'analyse prénatale (art. 17).

L'avant-projet soumettait à autorisation l'importation ou la mise en circulation des tests génétiques destinés à des laboratoires ou à des médecins (art. 7, al. 2, AP). Le présent projet renonce à régler cette question. Une grande partie des trousses de diagnostic génétique in vitro tombent ­ comme les autres trousses de diagnostic in vitro ­ sous le coup de la loi fédérale du 15 décembre 2000 sur les produits thérapeutiques32 ­ entrée en vigueur le 1er janvier 2002 ­ et de l'ordonnance du 17 octobre 2001 sur les dispositifs médicaux33 (cf. commentaire relatif à art. 3, let. j, ch. 2.1.3).

Cette loi fixe selon des critères unifiés les conditions d'autorisation des trousses de diagnostic in vitro.

2.3.2

Analyses génétiques effectuées sur des personnes (art. 10)

Le principe selon lequel les analyses génétique doivent avoir une finalité médicale est généralement reconnu. Il est affirmé notamment dans les directives de l'Académie Suisse des Sciences Médicales, dans la Convention sur les droits de l'homme et la biomédecine (art. 12) et la Recommandation R(92)3 du Conseil de l'Europe sur les tests et le dépistage génétiques à des fins médicales.

L'al. 1 énumère les indications médicales. En effet, les médecins (art. 13) ne peuvent prescrire une analyse du patrimoine génétique d'une personne que si elle répond à un intérêt légitime de celle-ci, c'est-à-dire si l'analyse a un but prophylactique ou thérapeutique ou si elle permet d'établir un choix de vie ou un planning familial.

Ces quatre indications peuvent se recouper.

La prophylaxie (prévention) et la thérapie (traitement) sont des tâches classiques de la médecine, y compris de la médecine du sport. Les deux domaines doivent être compris dans un sens large. Une analyse génétique effectuée à des fins prophylactiques peut permettre de diagnostiquer précocement une maladie, parfois avant même les premiers symptômes. La personne concernée peut ensuite prendre des mesures de prévention ou adopter un comportement propre à diminuer les risques. Ainsi, une jeune femme ou un jeune homme pourrait être amené, en raison d'une prédisposition génétique, à renoncer à une carrière sportive de haut niveau pour éviter des dommages corporels. Une analyse génétique peut également avoir un but prophylactique lorsqu'elle est effectuée dans le domaine de la pharmacogénétique pour savoir si une thérapie médicamenteuse a des chances de succès vu la constitution génétique du patient et, le cas échéant, déterminer la dose adéquate afin de garantir un traitement optimal; elle peut aussi permettre de déterminer les éventuels effets dommageables du médicament.

32 33

RS 812.21; Message FF 1999 3151.

RS 812.213

6886

Une analyse génétique peut aussi permettre d'effectuer un traitement mieux ciblé d'une maladie déclarée, une fois le diagnostic posé ou confirmé. Il existe en effet pour un certain nombre de maladies génétiques des possibilités de traitement efficace (p. ex. le traitement de substitution hormonale pour une hypothyréose) ou du moins de soulagement et de prolongation de l'espérance de vie (diabète, thalassémie). Pour d'autres maladies (p. ex. les myopathies), la médecine ne dispose pas encore de possibilités thérapeutiques vraiment efficaces, mais elle peut néanmoins apporter une aide précieuse au moyen de traitements symptomatiques, de fournitures d'appareils, d'instructions et de conseils spéciaux.

Comme l'avant-projet mis en consultation, le présent projet englobe dans les finalités médicales les choix de vie, bien que plusieurs participants à la consultation aient jugé cette indication trop imprécise et de nature à ouvrir la porte à toutes sortes d'interprétation. Cependant, il est justifié d'inclure cette finalité dans la notion générale de médecine, dans la mesure où la santé se définit aujourd'hui comme un état de bien-être plus seulement physique, mais également psychique et social (Organisation Mondiale de la Santé). Le projet reconnaît ainsi qu'une personne a le droit de savoir ou pas si elle est porteuse d'un gène défectueux qui sera probablement à l'origine d'une maladie dans le futur, même s'il n'existe pas de mesure prophylactique. Ce droit découle du droit fondamental à l'autodétermination, qui fait partie de la liberté personnelle au sens de l'art. 10 de la Constitution fédérale et qui selon l'art. 36 de ladite Constitution ne peut être restreint que si un intérêt public ou la protection d'un droit fondamental d'autrui le justifient. Selon la position adoptée par l'Académie Suisse des Sciences Médicales dans ses directives de 1993, la connaissance de ses prédispositions héréditaires peut être importante pour la personne concernée, même si aucune mesure de prévention n'existe pour le moment. En effet, l'analyse peut dissiper des craintes en cas de résultats négatifs. En outre, la connaissance d'une prédisposition à une maladie, qui peut être très lourde suivant les circonstances, peut se révéler très importante pour établir un choix de vie. Ce pourrait être le cas, par exemple, pour
le choix d'une profession.

L'un des exemples les plus frappants de ce que peut signifier la réalisation d'une analyse génétique est celui de la Chorée de Huntington. Il s'agit d'une maladie génétique actuellement incurable, dont les symptômes ­ troubles de la motricité, troubles du comportement, altération psychique ­ se manifestent en général vers 50 ans; cette maladie entraîne la mort. Il n'existe aucune mesure prophylactive. Cette maladie fait naître de grandes craintes dans une famille lorsque l'un de ses membres en est atteint. Une analyse génétique qui se révèle négative peut alors dissiper de grandes angoisses. Si l'analyse est positive, elle peut, par contre, permettre d'établir des choix de vie (mariage, enfants, profession) et d'atteindre une maturité pour vivre au mieux les années durant lesquelles la maladie ne se sera pas manifestée. Mais savoir que l'on sera atteint de cette maladie peut aussi engendrer une grave dépression et enlever tout sens à la vie. C'est pourquoi il est important que l'analyse génétique soit précédée et suivie d'un conseil génétique au sens de l'art. 14, qui prenne en compte tous ces aspects et qui sonde le désir de la personne de connaître ses caractéristiques héréditaires. Il est important que, comme pour la maladie de Huntington par exemple, il s'écoule un temps de réflexion de plusieurs mois entre le conseil génétique et l'analyse (art. 14, al. 4). Mais de l'avis du Conseil fédéral, cela ne met pas en question le principe de laisser à la personne concernée de décider si elle veut effectuer ou pas l'analyse. Cette solution est approuvée par la fondation pour la Chorée de Huntington, qui protège les intérêts des personnes concernées.

6887

Le planning familial constitue l'un des aspects de l'indication relative à l'établissement du choix de vie. Le projet le mentionne expressément, car il ne doit pas être compris uniquement dans le sens qu'il permet de détecter une prédisposition à une maladie de la personne concernée, mais également dans celui de déterminer le porteur d'un gène responsable d'une maladie, c'est-à-dire d'une mutation génétique récessive, qui ne générera pas une maladie chez le porteur lui-même, mais éventuellement chez les descendants. Personne ne conteste que c'est à la personne membre d'une famille atteinte d'une maladie héréditaire de décider librement si, dans la perspective d'avoir des enfants, elle veut savoir si elle est porteuse d'un gène déterminé. Il est toutefois indispensable, dans ce cas également, que les raisons d'effectuer ou pas l'analyse soient discutées dans le cadre d'un conseil génétique.

L'al. 2 protège le droit à l'autodétermination individuelle en matière d'information des personnes incapables de discernement. La norme s'adresse tant au médecin (art. 13) qu'au représentant légal (art. 5, al. 2). Un médecin ne peut prescrire une analyse génétique sur une personne incapable de consentir elle-même et le représentant légal ne peut donner son autorisation que si l'analyse est effectuée pour protéger la santé de cette personne. En considération du concept de santé au sens large, adopté par l'Organisation Mondiale de la Santé, qui recouvre non seulement la santé physique, mais également le bien-être psychique et social, une analyse génétique sur une personne incapable de discernement est autorisée non seulement si elle peut avoir un effet positif sur son état de santé, c'est-à-dire si elle permet de prendre des mesures thérapeutiques ou prophylactiques, mais également pour permettre d'améliorer ses conditions de vie, en particulier lorsqu'il s'agit d'un enfant, par exemple en prenant des mesures spécifiques pour sa formation. Par contre, il est interdit d'effectuer une analyse à la demande des parents sur un enfant incapable de discernement pour savoir s'il est porteur d'un gène responsable d'une maladie, comme celui de la Chorée de Huntington, étant donné que cette maladie ne se déclare qu'à l'âge adulte et qu'il n'existe aucune mesure préventive.

Il n'est pas exclu que dans le futur l'on puisse
déterminer une aptitude spéciale pour certains sports au moyen d'analyses génétiques, par exemple des spécificités métaboliques des muscles prédisposant à des sports d'endurance ou de performance.

Cette prédisposition génétique peut être détectée très tôt, soit vers 4, 6 ou 8 ans.

Ainsi, en effectuant des analyses systématiques dans les premières années de scolarité on pourrait théoriquement entreprendre un «dépistage génétique de talents sportifs». Toutefois, l'al. 2, 1e phrase, l'exclut, car il n'y a pas, dans ce cas, de bénéfice direct au sens médical pour la personne mineure incapable de discernement.

A titre exceptionnel, le représentant légal peut consentir à une analyse génétique si cette analyse est l'unique moyen de déterminer une grave maladie héréditaire ou le porteur d'un gène responsable d'une telle maladie au sein de la famille (al. 2, 2e phrase). Cette solution tient compte de l'intérêt des membres de la famille et se base sur l'aide que les membres d'une famille se doivent mutuellement (art. 272 CC). Une analyse génétique dans l'intérêt de tiers est toutefois interdite si elle représente pour la personne concernée une contrainte qui n'est pas minime, c'est-à-dire qu'elle ne consiste pas simplement en un prélèvement de salive ou de sang.

6888

2.3.3

Analyses prénatales (art. 11)

Le projet utilise la notion d'analyses prénatales dans le sens d'un concept général.

Cette notion ne recouvre pas seulement les analyses génétiques prénatales, mais également les analyses prénatales effectuées dans le but d'évaluer un risque, soit les analyses de laboratoire qui évaluent le risque d'anomalie génétique de l'embryon ou du foetus, ainsi que l'examen de l'embryon ou du foetus par des analyses ultrasonographiques (art. 3, let. e à g; ch. 2.1.3). L'art. 11 s'applique à toutes les analyses prénatales au sens du concept général tel qu'il est défini dans le présent projet.

Les analyses prénatales peuvent permettre de prendre à temps des mesures préventives ou thérapeutiques en faveur de l'enfant à naître afin de le protéger contre des problèmes de santé. Elles peuvent également permettre à des femmes enceintes de savoir si, suite à une maladie ou à la prise d'un médicament, l'embryon est atteint d'une anomalie et empêcher ainsi qu'elles avortent faute de connaître l'état de santé de l'embryon. Toutefois, le nombre d'anomalies pouvant être soignées ou au moins atténuées est toujours petit par rapport aux maladies décelables. C'est pourquoi les analyses prénatales posent d'importants problèmes éthiques et juridiques. Il est toutefois impossible de tous les résoudre dans le cadre du présent projet. Il appartient notamment au droit pénal d'autoriser ou pas l'avortement et, le cas échéant, à quelles conditions, en présence d'une anomalie très grave et incurable. Selon les estimations des spécialistes, le nombre d'avortements en raison d'une anomalie de l'embryon ne représente qu'un petit pourcentage de tous les avortements.

Le projet fixe uniquement les conditions-cadres d'exécution des analyses prénatales.

Il appartient à la Commission nationale d'éthique dans le domaine de la médecine humaine, instituée par le Conseil fédéral le 3 juillet 200134, d'émettre au besoin des recommandations pour la pratique. L'art. 11 du projet se limite à fixer les conditions auxquelles une analyse prénatale peut être effectuée. La décision de l'effectuer ou pas appartient uniquement à la femme (art. 18), après qu'elle a reçu une information au sens de l'art. 16 s'il s'agit d'effectuer une analyse prénatale visant à évaluer un risque ou après avoir discuté de manière approfondie, dans le cadre du conseil
génétique au sens des art. 14 et 15, les aspects médicaux, juridiques, sociaux, psychiques et éthiques ainsi que les risques liés à l'analyse pour l'embryon ou le foetus s'il s'agit d'une analyse génétique prénatale. Le conseil génétique ne peut porter que sur la situation individuelle et familiale de la personne concernée et ne peut pas être directif. En conséquence, le médecin ne peut en aucun cas proposer une analyse prénatale génétique par routine. En outre, le projet interdit à l'art. 12 le dépistage lorsqu'il n'existe pas de mesure prophylactique ou thérapeutique. Cette interdiction revêt une importance particulière en matière d'analyses génétiques prénatales.

Selon l'art. 11, une analyse prénatale ne peut en aucun cas avoir pour but de rechercher des caractéristiques de l'embryon ou du foetus qui n'influencent pas de manière directe sa santé ou de déterminer le sexe, sauf en vue de diagnostiquer une maladie.

Une sélection des embryons ou des foetus selon le désir des parents est interdit. Le projet interdit ainsi les «bébés à la carte». L'adjectif «directe» a été introduit dans le texte de loi pour répondre à des demandes exprimées lors de la procédure de 34

Art. 28 de la loi fédérale du 18 déc. 1998 sur la procréation médicalement assistée (RS 814.90) et l'ordonnance du 4 déc. 2000 sur la Commission nationale d'éthique pour la médecine humaine (RS 814.903).

6889

consultation, dans le but d'empêcher la recherche chez l'embryon ou le foetus de caractéristiques psychiques ou sociales, ce qui aurait pu être possible en définissant la santé dans un sens large, comme le fait l'Organisation Mondiale de la Santé.

Il est interdit d'effectuer des analyses prénatales dans les buts mentionnés par l'art. 11. Lors d'une analyse ultrasonographique, un médecin expérimenté peut souvent connaître le sexe de l'enfant sans vraiment le vouloir. C'est pourquoi l'art. 11 ne s'applique pas dans ce cas. Mais conformément à l'esprit et au but de la disposition, le médecin ne doit pas communiquer le sexe à la femme s'il existe le risque que cette information pourrait inciter celle-ci à avorter.

L'art. 11 est formulé de manière négative, c'est-à-dire qu'il indique ce qui ne doit pas être recherché. Une formulation positive, qui aurait fixé les indications admissibles pour une analyse prénatale, a été rejetée pour deux raisons. La première tient à la difficulté de formuler de manière positive des indications de nature médicale au diagnostic prénatal. Une formulation générale, comme par exemple un «risque sérieux pour l'enfant», laisse une telle marge d'appréciation que ses contours deviennent indéfinissables. L'élaboration d'une liste d'indications suscite, elle, des réticences importantes d'ordre éthique, dans la mesure où cela revient à décréter sur le plan normatif ce qui est suffisamment pathologique pour qu'une interruption de grossesse puisse être envisagée. Au surplus, une telle liste provoquerait des inégalités et des contraintes sociales indésirables et compromettrait la liberté de décision des parents. Le concept du projet a été largement approuvé lors de la procédure de consultation. Quelques participants ont néanmoins demandé de définir dans la loi la notion de «caractéristiques qui n'influencent pas de manière directe la santé» (art. 9 AP). A l'exception de l'introduction du mot «directe», qui a pour but d'exclure les indications psychosociales, le Conseil fédéral ne souhaite pas définir cette notion.

Au besoin, la Commission nationale d'éthique examinera cette proposition et émettra, le cas échéant, des recommandations concrètes.

Le diagnostic préimplantatoire, c'est-à-dire l'analyse du patrimoine génétique d'un embryon conçu in vitro avant son transfert dans la
matrice de la mère, est interdit par la loi fédérale sur la procréation médicalement assistée (art. 5, al. 3, LPMA) et n'est dès lors pas discuté dans le cadre du présent projet.

2.3.4

Dépistages (art. 12)

Un dépistage au sens du présent projet est une analyse génétique proposée de manière systématique à l'ensemble de la population ou à un groupe déterminé de personnes au sein de celle-ci, sans qu'il existe des raisons de présumer que les caractéristiques recherchées existent chez ces personnes (art. 3, let. i; ch. 2.1.3). Un dépistage équivaut dès lors soit à une analyse génétique présymptomatique soit à une analyse visant à diagnostiquer une maladie à un stade précoce.

Un dépistage ne peut être effectué que si la méthode d'analyse est économique, efficace et fiable. Les analyses cytogénétiques et moléculaires actuelles ­ à quelques exceptions près (p. ex. l'hémochromatose) ne répondent pas à ces critères. En Suisse, depuis l'introduction en 1965 d'un dépistage chez les nouveaux-nés, on décèle peu de jours après la naissance toute une série de maladies génétiques du métabolisme, dont on peut empêcher l'apparition par une diète adéquate. Pour ce faire, on recourt 6890

à des analyses bactériologiques et biochimiques. Depuis 1966, les frais du dépistage sont remboursés par les caisses-maladies, conformément à la Liste des analyses.

Actuellement, il n'existe pas en Suisse de dépistage effectué au moyen d'analyses génétiques.

Il est difficile de savoir aujourd'hui si, dans le futur, il faudra autoriser des dépistages effectués avec des «microchips», en cours de développement, et, le cas échéant, à quelles conditions. Les possibilités d'application sont larges. L'effet d'un médicament, mais également sa transformation et son élimination sont déterminés par les caractéristiques génétiques du patient. On peut donc envisager que le choix et la posologie d'un médicament pourront se faire toujours plus en fonction des caractéristiques génétiques d'un patient. Mais pour ce faire, il sera nécessaire d'effectuer des dépistages génétiques avant le début d'un traitement ou avant une hospitalisation.

En Allemagne, on évalue actuellement un dépistage pour l'hémochromatose, qui est une anomalie héréditaire fréquente du métabolisme du fer. Cette anomalie présente des symptômes cliniques (p. ex., fatigue, douleurs à l'estomac et aux articulations, impuissance, chute des poils) qui sont également ceux d'autres maladies. Pour cette raison, il est difficile de la diagnostiquer cliniquement; par contre, elle peut être facilement décelée au moyen d'une analyse génétique moléculaire. Non traitée, l'hémochromatose cause des dommages irréversibles à de nombreux organes.

Dans la mesure où un dépistage recourant à des analyses génétiques est effectué sur l'ensemble de la population ou sur un groupe déterminé de personnes au sein de celle-ci, il nécessite une préparation particulièrement soignée, afin qu'ils ne causent pas plus de préjudices que de bienfaits. C'est pourquoi le projet ne permet d'effectuer un dépistage que si le programme d'exécution a été autorisé par l'autorité fédérale compétente (al. 1). Il est prévu d'attribuer cette compétence à l'Office fédéral de la santé publique. La mise sur pied d'un programme peut être le fait d'une Société médicale spécialisée. Mais il est aussi envisageable qu'une autorité cantonale responsable du domaine de la santé ou qu'un hôpital universitaire recommande un dépistage et élabore un programme.

Le programme de dépistage peut être autorisé
aux trois conditions fixées par l'al. 2.

Le Conseil fédéral peut toutefois prévoir des conditions supplémentaires dans l'ordonnance d'exécution (al. 4, 1e phrase). Les trois conditions sont les suivantes.

Premièrement, il doit exister un traitement précoce ou des mesures prophylactiques (let. a). Cette condition est unanimement reconnue et depuis longtemps par la communauté scientifique. Le dépistage qui ne débouche pas sur des possibilités concrètes d'influencer positivement la survenue ou le cours de la maladie n'est pas justifiable. Deuxièmement, il doit être prouvé que la méthode d'analyse fournit des résultats fiables (let. b). Il s'agit également d'une condition classique du dépistage.

Troisièmement, le conseil génétique adéquat doit être garanti (let. c); cela signifie que le concept du conseil génétique pour les analyses génétiques présymptomatiques doit être établi et que les moyens nécessaires pour le réaliser sont garantis. Vu la multitude des analyses prévues et l'exigence de l'existence d'un traitement thérapeutique ou de mesures prophylactiques, il n'est pas envisageable ni judicieux de prévoir l'obligation d'un conseil génétique individuel au sens de l'art. 14, al. 1 à 4, avant chaque analyse. C'est pourquoi l'al. 5 de cet article permet que dans les cas de dépistage le conseil génétique soit adapté aux circonstances. Le programme de dépistage doit toutefois prévoir les questions qui doivent être abordées dans le conseil génétique et la forme que doit revêtir ce dernier. Suivant les cas, il est possible de ne 6891

remettre qu'une information écrite avant l'analyse et de ne procéder à un entretien personnel que si le résultat est positif. C'est pourquoi l'autorité qui délivre l'autorisation ne peut pas se contenter de n'approuver que le concept du conseil génétique. Elle doit également examiner si les moyens pour réaliser le conseil génétiques sont garantis. On peut en effet fortement craindre de faire des expériences négatives avec les dépistages si on ne garantit pas à la personne concernée un conseil soigné et adapté aux circonstances.

En outre, il ressort de l'art. 5 qu'une analyse génétique effectuée dans le cadre d'un dépistage nécessite également le consentement de la personne concernée ou, si elle est incapable de discernement, celui de son représentant légal. Ce consentement ne devra toutefois pas être donné en la forme écrite (art. 18, al. 3).

Selon l'al. 3, l'autorité fédérale compétente entend la Commission d'experts pour l'analyse génétique et, si nécessaire, la Commission nationale d'éthique dans le domaine de la médecine humaine avant d'octroyer une autorisation (art. 35). Il est en effet important qu'une évaluation scientifique et éthique approfondie ­ en cas de problèmes éthiques spéciaux ­ soit faite préalablement au lancement d'un programme de dépistage.

Le Conseil fédéral désigne l'autorité fédérale compétente, règle la procédure d'octroi de l'autorisation, la surveillance et fixe le montant des émoluments (al. 4, 2e phrase). Ce faisant, il importera d'éviter des procédures qui fassent double emploi avec d'autres procédures et de garantir la coordination avec le domaine de l'assurance-maladie. Les décisions de l'autorité fédérale compétente peuvent faire l'objet d'un recours selon la procédure applicable aux décisions au sens de l'art. 8 (ch. 2.2.5).

2.3.5

Droit de prescrire une analyse génétique (art. 13)

Les analyses génétiques sont des actes médicaux et à ce titre elles ne peuvent être prescrites que par un médecin autorisé à exercer à titre indépendant ou par un médecin qui, dans le cadre d'une formation postgrade, exerce sous la surveillance d'un médecin autorisé à pratiquer à titre indépendant (al. 1). Ce principe vaut pour toutes les analyses génétiques. Le terme «prescrire» s'applique aux personnes responsables de l'établissement du diagnostic, du prélèvement de l'échantillon, de l'interprétation des résultats des analyses génétiques dans le cadre clinique et qui doivent s'assurer que la personne concernée reçoive un conseil génétique (al. 3). Par contre, la «réalisation de l'analyse», dans un sens étroit, incombe en principe à un laboratoire (art. 8). Le fait pour un médecin de famille d'envoyer un patient à un spécialiste ne revient pas à «prescrire» une analyse génétique.

Les analyses génétiques présymptomatiques et les analyses génétiques prénatales (art. 3, let. d et f) ainsi que les analyses visant à établir un planning familial (art. 3, let. h) sont soumises à une condition supplémentaire (al. 2). Elles ne peuvent être prescrites que par un médecin ayant une formation postgrade adéquate ou par un médecin en formation postgrade, sous la surveillance d'un médecin au bénéfice de cette formation. L'exigence d'une formation spéciale est rendue nécessaire par le fait que ces analyses se caractérisent par des implications particulièrement lourdes de conséquences, non seulement pour la personne qui subit l'analyse, mais aussi pour 6892

des proches ou pour l'enfant à naître. Il est donc indispensable que le médecin qui décide de telles analyses possède des connaissances en génétique qui lui permettent d'évaluer les indications médicales ainsi que toutes les implications des résultats. La formation postgrade devrait également inclure le conseil génétique, car la qualité de celui-ci dépend en grande partie de la capacité de communiquer de la personne qui le donne. Le projet ne limite pas le droit de prescrire une analyse génétique prénatale ou une analyse visant à établir un planning familial à des médecins spécialistes en génétique médicale. Selon toutes probabilités, les analyses génétiques joueront un rôle croissant dans toutes les disciplines médicales pour le diagnostic et le traitement des maladies. Il importe, par conséquent, que presque tous les médecins acquièrent, dans le cadre d'une formation postgrade, les compétences nécessaires en vue d'une juste utilisation de ces nouvelles possibilités. Il incombe tout d'abord à la Fédération des médecins suisses (FMH) de définir le contenu de la formation postgrade dans les différentes disciplines de la médecine. Selon l'art. 35, let. e, la Commission d'experts pour l'analyse génétique humaine peut émettre, si nécessaire, des recommandations sur la formation postgrade.

Le médecin qui prescrit une analyse génétique au sens de l'al. 2 doit veiller à ce que la personne concernée reçoive un conseil génétique approprié (al. 3). Cela ne signifie pas qu'il doit le donner lui-même. Le conseil génétique doit souvent être réalisé par un groupe interdisciplinaire. Mais il est aussi possible de confier cette tâche à un spécialiste. Le médecin qui prescrit l'analyse est toutefois responsable de la réalisation du conseil conformément aux dispositions légales et il doit s'assurer que la personne qui donne le conseil ait les capacités requises pour le faire.

2.3.6

Conseil génétique en général (art. 14)

En raison des multiples implications et des répercussions sur la santé que peuvent entraîner les analyses génétiques présymptomatiques, les analyses génétiques prénatales et les analyses visant à établir un planning familial, il existe un consensus international sur le fait que ces analyses doivent être précédées et suivies d'un conseil génétique. Ce principe a été largement admis dans la procédure de consultation. Néanmoins, tenant compte de certaines prises de position, l'avant-projet a été précisé et complété sur plusieurs points.

Le conseil génétique va au-delà du devoir normal d'informer du médecin lors de toute intervention médicale. Selon un comité de l'Organisation mondiale de la santé (OMS), le conseil génétique est un processus de communication qui prend en compte les problèmes humains liés à la survenance ou au risque de la survenance d'une maladie génétique dans une famille. Lors de ce processus, qui doit considérer l'être humain dans un contexte biologique, psychique et social, on essaie d'aider la personne ou la famille: ­

à comprendre les données médicales, à savoir le diagnostic, l'incertitude dans l'interprétation de certains résultats, l'évolution présumée d'une maladie et le traitement à disposition,

­

à déterminer la part héréditaire de la maladie et le risque de transmission pour certains membres de la famille,

6893

­

à définir les différents moyens pour prévenir un risque de transmission,

­

à prendre une décision prenant en compte les risques, les buts familiaux ainsi que les convictions éthiques et religieuses et à assumer cette décision,

­

à gérer une situation de crise,

­

à envisager des solutions pour le futur, et

­

à se préparer de la meilleure manière possible à l'handicap d'un membre de la famille.

Le but du conseil génétique est d'aider une personne à décider librement si elle veut effectuer ou pas une analyse. La personne doit recevoir toutes les informations qui lui sont nécessaires pour prendre une décision rationnelle, indépendante et sans pression extérieure. Le conseil génétique est la plupart du temps un processus qui doit se dérouler sur une certaine durée, en particulier lorsqu'il s'agit d'envisager des solutions pour le futur. Vu la diversité des questions qui doivent être abordées, il est nécessaire que dans certaines situations le conseil génétique soit donné par une équipe pluridisciplinaire. Il appartient au médecin qui prescrit l'analyse de veiller à ce que la personne concernée reçoive un conseil génétique approprié (art. 13, al. 3).

En raison de la grande importance du conseil génétique, le projet exige qu'il soit non directif, qu'il soit garanti avant et après l'analyse (al. 1, 1e phrase). Il en fixe également le cadre et les éléments les plus importants. La personne qui donne le conseil doit consigner l'entretien dans le dossier du patient (al. 1, 2e phrase). En outre, la Commission d'experts pour l'analyse génétique humaine a pour tâche d'émettre des recommandations sur le conseil génétique (art. 35, let. f). Il va de soi que la personne qui donne le conseil est tenue de répondre aux éventuelles questions de la personne concernée également pendant le délai d'attente des résultats de l'analyse.

Selon l'al. 2, le conseil génétique ne doit porter que sur la situation individuelle et familiale de la personne concernée et tenir compte des répercussions psychiques et sociales des résultats de l'analyse dont elle et sa famille pourraient souffrir. Le conseil doit respecter ces limites. Il ne peut pas prendre en considération des intérêts collectifs, comme des buts de politique sociale. Il s'agit ainsi d'empêcher des tendances eugéniques cachées, comme il est possible d'en rencontrer en particulier en matière de diagnostic génétique prénatal. Les tentatives eugéniques d'améliorer les caractéristiques génétiques de toute une population sont fortement combattues. Premièrement, le risque, par une pression ouverte ou dissimulée, d'une atteinte à la liberté personnelle de procréer est important. Deuxièmement, les personnes porteuses de «mauvaises» prédispositions héréditaires sont
presque inévitablement stigmatisées et discriminées. Troisièmement, des interventions importantes dans le génome humain pourraient avoir des effets négatifs imprévisibles. Quatrièmement, l'admissibilité de telles interventions est douteuse sur les plans religieux et philosophique.

La possibilité de poursuivre des buts eugéniques dans le cadre du conseil génétique au moyen d'une pression directe ou d'une influence explicite est empêchée notamment par les dispositions sur le droit de décider (art. 18) et l'obligation d'un conseil non directif. On veut ainsi éviter de créer un contexte social dans lequel la réalisation de certaines analyses génétiques, en particulier des analyses prénatales, apparaît comme un standard normal dans une pratique responsable en matière de santé et de

6894

procréation. La création de ce contexte ne peut être imputée à aucune autorité particulière. Elle résulte du jeu entre l'offre des moyens diagnostiques mis à disposition sous la responsabilité vraie ou présumée des médecins et l'intégration de la personne concernée dans une relation médecin-patient, dans laquelle une offre du médecin est considérée en principe comme un conseil à suivre. Pour éviter un tel automatisme, la personne qui réalise le conseil génétique ne doit pas exercer une influence directe.

La personne concernée doit être consciente qu'elle décide selon sa propre échelle des valeurs si une analyse peut lui être bénéfique ou préjudiciable. Pour les analyses génétiques présymptomatiques qui ne peuvent être suivies de mesures prophylactiques et pour les analyses génétiques prénatales il doit être expressément signalé qu'elles ne font pas partie du standard médical usuel et qu'elles dépendent exclusivement des circonstances individuelles et familiales (cf. à ce sujet également art. 15, al. 1).

L'al. 3 énumère les points importants qui doivent être discutés avec la personne concernée ou son représentant légal si elle est incapable de discernement. Ce sont tout d'abord le but, le type et la signification de l'analyse envisagée ainsi que les mesures complémentaires, les éventuels risques liés à l'analyse, la fréquence et le type des anomalies à détecter et la possibilité d'obtenir des résultats inattendus. En outre, une analyse génétique présymptomatique, une analyse génétique prénatale ou une analyse visant à établir un planning familial peut représenter une charge psychique et physique. C'est pourquoi le pour et le contre de l'analyse doivent être soigneusement pesés. La connaissance peut éveiller des craintes, mais aussi ouvrir des perspectives et amener à des décisions; l'ignorance peut aussi engendrer d'importantes craintes et des réactions psychiques peuvent se produire en cas de résultats positifs comme en cas de résultats négatifs. Le conseil génétique doit également aborder les possibilités de prise en charge des coûts de l'analyse et des mesures complémentaires. Si l'analyse a été effectuée et qu'une anomalie a été constatée, des informations devront être données sur sa signification et les mesures thérapeutiques et prophylactiques envisageables. En outre, il conviendra d'examiner
les différentes mesures de soutien possibles de la personne concernée en fonction des résultats de l'analyse. Il faudra aborder non seulement les résultats de l'analyse, mais également les solutions pour l'avenir. Une aide peut être apportée par la famille ou les amis, par des offices de conseils spécialisés ou par des groupes d'entraide. Selon les circonstances, une assistance psychologique ou une psychothérapie peut se révéler nécessaire.

Un temps de réflexion adéquat devra s'écouler entre le conseil et l'exécution de l'analyse (al. 4). La durée de ce temps de réflexion dépendra des circonstances propres à chaque cas. Elle pourra ainsi être d'un ou plusieurs jours, de plusieurs semaines, voire même de plusieurs mois. Lorsqu'un trouble de la santé peut être écarté par des mesures prophylactiques, il n'est pas nécessaire que le délai de réflexion soit long; il peut même être urgent de procéder à l'analyse afin de pouvoir intervenir rapidement. Par contre, si l'analyse vise à rechercher par exemple la mutation responsable de la chorée de Huntington (ch. 2.3.2), le délai de réflexion peut être de plusieurs mois, étant donné qu'il n'existe actuellement aucune mesure prophylactique ou de moyens permettant de retarder l'apparition de la maladie.

Un dépistage au sens du présent projet (art. 3, let. i) est souvent une analyse génétique présymptomatique. La condition pour sa réalisation est qu'il existe un traitement précoce ou des mesures prophylactiques en cas de résultat positif (art. 12, al. 2, 6895

let. a). Compte tenu de ce qui précède et du vaste champ d'application, il n'est pas possible d'exiger un conseil génétique intégral et individuel au sens de l'art. 14, al. 2 à 4. Le conseil génétique doit être adapté aux circonstances (al. 5). Par exemple, la personne concernée pourrait être informée par écrit avant l'analyse et avoir un conseil personnalisé en cas de résultat positif. Il est toutefois indispensable qu'un conseil génétique soit réalisé. C'est pourquoi il faut, lors de l'octroi de l'autorisation d'un programme de dépistage, fixer la manière de réaliser le conseil génétique, en particulier en déterminant les questions à aborder et en démontrant l'existence des moyens pour le réaliser (art. 12, al. 2, let. c). L'autorité compétente pour délivrer l'autorisation doit examiner le programme également sous ces aspects.

2.3.7

Conseil génétique en matière d'analyses génétiques prénatales (art. 15)

Les analyses prénatales posent des questions spécifiques qu'il faut prendre en considération dans le cadre du conseil génétique, en plus des questions prévues dans le cadre du conseil génétique en général (art. 14).

C'est la femme qui subit physiquement l'analyse et c'est elle seule, sous réserve de la réglementation pénale sur l'avortement, qui décide si elle veut se soumettre ou pas à une analyse et de la suite qu'elle veut donner à un éventuel résultat pathologique (art. 18). La femme enceinte doit être expressément informée sur ce droit, non seulement avant l'analyse, mais aussi lorsque les résultats de l'analyse sont connus (al. 1). On désavoue ainsi clairement les médecins qui estiment que la découverte d'une anomalie très grave et incurable doit automatiquement entraîner un avortement. Un consentement donné pour la réalisation d'une analyse ne peut pas être valable pour toutes les mesures complémentaires. Le consentement de la femme doit être recueilli pour chaque nouvelle intervention. Par contre, la femme doit être informée, avant la réalisation de toute analyse, sur les répercussions possibles de l'analyse et sur les éventuelles mesures complémentaires (art. 14, al. 3, let. a). Lorsque l'analyse proposée ne peut selon toute probabilité être suivie d'aucun traitement thérapeutique ou prophylactique, la femme doit en être avertie (al. 2). En particulier, il faut lui signaler que la découverte d'une anomalie peut soulever, immédiatement ou après des analyses complémentaires, la question d'un éventuel avortement. La femme doit aussi savoir que la méthode d'avortement dépend du stade de la grossesse. Elle doit en outre être avertie, de même que son mari ou son partenaire, que ces analyses ne sont pas effectuées pour venir en aide à l'enfant.

En cas de découverte d'une grave anomalie incurable, la femme doit être informée sur les solutions autres que l'avortement; elle doit en outre être rendue attentive à l'existence d'associations de parents d'enfants handicapés et de groupes d'entraide (al. 3). Le contact avec des familles ayant un ou des enfants souffrant du même handicap peut être d'un grand secours et peut permettre de se préparer à la naissance d'un enfant handicapé. Il existe de nombreuses associations de parents et de groupes d'entraide. Les offices d'information indépendants en
matière d'analyse prénatale (art. 17) mettront à disposition les adresses utiles. Ils donneront également des informations générales sur les analyses prénatales (ch. 2.3.9). Leur rôle n'est pas de

6896

donner un conseil génétique au sens des art. 14 et 15, mais de fournir des explications complémentaires à celles données par le médecin.

Un projet parental est en principe le projet d'un couple. C'est pourquoi le conjoint ou le partenaire de la femme enceinte devrait, dans la mesure du possible, être inclus dans le conseil génétique, ce qui suppose toutefois une bonne entente entre les partenaires. Le projet prévoit dès lors que le partenaire peut participer au conseil à la condition que la femme y consente (al. 4). En prenant part au conseil génétique, le partenaire doit aider la femme enceinte à prendre une décision. Il ne sera pas accepté que toute la responsabilité soit reportée sur la femme ou que celle-ci soit pressée de prendre une décision déterminée. La décision devrait être le fruit d'une réflexion du couple.

2.3.8

Information en matière d'analyses prénatales visant à évaluer un risque (art. 16)

L'art. 16 prend en compte la critique émise par un certain nombre de femmes selon lesquelles elles ne sont pas suffisamment informées par le médecin sur le but des analyses effectuées pendant la grossesse. C'est pourquoi il oblige le médecin à informer la femme, avant toute analyse prénatale visant à évaluer le risque d'une anomalie génétique, sur le but et la signification de l'analyse, sur la possibilité d'obtenir des résultats inattendus et sur les éventuelles analyses complémentaires et interventions qui peuvent en découler. Les analyses prénatales visant à évaluer un risque ne sont pas des analyses génétiques; elles constituent une étape préliminaire. Il s'agit d'analyses de laboratoire au moyen desquelles on veut détecter le risque d'une anomalie génétique de l'embryon ou du foetus. Sont également des analyses prénatales visant à évaluer un risque au sens du projet les analyses ultrasonographiques de l'embryon ou du foetus, c'est-à-dire les ultrasons (pour les définitions, cf. ch. 2.1.3 relatif à art. 3, let. e et g). Si ces analyses laissent entrevoir la possibilité d'une anomalie génétique, elles doivent alors être suivies d'une analyse génétique proprement dite. Un conseil génétique complet au sens des art. 14 et 15 ne se justifie pas matériellement; il entraînerait des coûts injustifiés. Mais il est néanmoins nécessaire de garantir une information standard uniforme. Cette information n'entraîne pas de coûts supplémentaires, car elle est donnée lors des consultations par le médecin.

La Commission d'experts pour l'analyse génétique humaine a pour tâche d'émettre des recommandations sur l'information en matière d'analyses prénatales visant à évaluer un risque (art. 35, let. f).

2.3.9

Offices d'information en matière d'analyse prénatale (art. 17)

Le diagnostic prénatal pose des problèmes médicaux, éthiques et sociaux particulièrement difficiles. C'est pourquoi le projet prévoit que les cantons doivent veiller à mettre sur pied des offices d'information indépendants en matière d'analyse prénatale (art. 3, let. e à g), dont le personnel dispose des connaissances nécessaires pour donner des informations en la matière. En effet, les médecins peuvent se trouver 6897

devant un dilemme, en ce sens que d'une part ils doivent garantir un bon déroulement de la grossesse par des mesures préventives, telles que des analyses et des conseils, et que d'autre part ils doivent donner des informations en matière de diagnostic prénatal afin de permettre aux parents de prendre une décision en connaissance de cause, laquelle peut toutefois aller à l'encontre de leurs convictions. Il est donc important que les parents puissent s'adresser à un office d'information indépendant. Ces offices permettent également aux parents de pouvoir s'informer sur le diagnostic prénatal avant de concevoir un enfant. Le conseil génétique peut porter ainsi plus sur des questions ciblées de la femme ou de son partenaire que sur des informations générales.

Les offices d'information ne sont pas compétents pour effectuer le conseil génétique au sens des art. 14 et 15 du présent projet. Ils doivent informer sur le diagnostic prénatal en général et non par rapport à un cas particulier (p. ex. présenter les anomalies généralement recherchées, leur fréquence, les différentes méthodes d'analyses existantes, leurs risques, leur signification, les coûts et la prise en charge par les caissesmaladie) et répondre aux questions. Malgré l'aspect général que devrait avoir l'information transmise par les offices susmentionnés, on ne peut exclure des demandes de précision plus individuelles et des questions détaillées de la part des personnes qui s'adresseront à eux en proie au désarroi, voire à l'angoisse. Dans ce contexte, les offices d'information ne pourront pas toujours renvoyer au médecin et ils doivent donc être aptes à gérer quelque peu de telles situations. Par conséquent, les collaborateurs des dits offices devront disposer de connaissances suffisantes dans les domaines de l'analyse génétique et du diagnostic prénatal (al. 1).

On ne peut pas attendre d'un gynécologue qu'il discute des possibilités de contacter des associations de parents d'enfants handicapés ou des groupes d'entraide. Cette tâche doit revenir aux offices d'information en matière d'analyse prénatale (al. 3).

Le conseil génétique doit rendre attentif à cette possibilité (art. 15, al. 2 et 3).

La formulation de l'al. 1 s'inspire de l'art. 171 CC sur les offices de consultation conjugale. Le terme «veillent à» signifie que les cantons
jouissent d'une relativement grande liberté dans l'exécution de leur mandat. Si un canton dispose déjà de plusieurs offices d'information privés, ils ne doivent pas en créer de nouveaux. Dans un souci d'économie, ils peuvent, selon l'al. 2, confier les tâches dévolues aux offices d'information aux centres de consultation en matière de grossesse. Les cantons peuvent aussi créer un office en commun.

La mise sur pied d'offices de consultation a été largement approuvée lors de la procédure de consultation. Quelques participants ont toutefois soulevé la question de la charge financière que ces centres représenteront pour les cantons (ch. 3.1.2 et 3.1.4).

Quelques rares autres ont jugé que ces offices étaient superflus.

2.3.10

Droit de décider de la personne concernée (art. 18)

L'art. 18 développe le principe général de la liberté de décision de la personne concernée ou de son représentant légal prévu aux art. 5 et 6 pour toutes les analyses génétiques.

6898

L'al. 1 précise que le droit de décider vaut à toutes les étapes d'une analyse génétique effectuée dans le domaine de la médecine. Cette analyse doit être envisagée comme un processus s'étalant dans le temps. Le consentement est lui aussi un processus étalé dans le temps, dans la mesure où, une fois donné, il peut être retiré en tout temps (art. 5, al. 3) et ne légitime plus les actes subséquents. Il appartient donc à la personne concernée de décider en toute liberté, après avoir reçu une information détaillée, du déroulement de l'analyse génétique. Ainsi, c'est elle qui décidera d'effectuer ou pas une analyse génétique ou une analyse prénatale, c'est-à-dire une analyse génétique prénatale ou une analyse prénatale visant à évaluer un risque (art. 3, let. e à f) et, le cas échéant, une analyse complémentaire (let. a). C'est l'application du principe général du consentement à tout acte diagnostique. La personne concernée décide également librement si elle veut prendre connaissance ou pas des résultats de l'analyse (let. b). L'al. 2 apporte toutefois une restriction au droit de ne pas savoir. En effet, le médecin doit communiquer immédiatement les résultats de l'analyse à la personne concernée s'il a constaté un danger physique imminent pour celle-ci, pour l'embryon ou pour le foetus, qui pourrait être écarté. Cela ne signifie toutefois pas que les mesures nécessaires puissent être imposées à la personne concernée. Celle-ci doit ­ comme pour toute mesure médicale ­ donner son consentement. Ce n'est que l'information, en tant que préalable nécessaire à la liberté de choix, qui peut être imposée à la personne concernée et non la thérapie ultérieure.

La personne concernée décide également librement ­ sous réserve de la réglementation pénale sur l'avortement ­ de la suite qu'elle veut donner aux résultats de l'analyse génétique (al. 1, let. c). Cette disposition est particulièrement importante en ce qui concerne les analyses génétiques prénatales. La découverte d'une anomalie chez l'embryon ou le foetus ne doit pas automatiquement conduire à une interruption de grossesse. La femme reste libre de décider, malgré une telle découverte, de mener sa grossesse à son terme. L'analyse prénatale peut lui permettre de se préparer éventuellement à l'accueil d'un enfant atteint d'une anomalie génétique. Il est
important à cet égard qu'aucune pression ne soit exercée sur la femme enceinte, que ce soit par les médecins, les assureurs ou l'Etat (cf. aussi art. 14, al. 1, qui impose un conseil génétique non directif).

Une analyse génétique présymptomatique, une analyse génétique prénatale ou une analyse visant à établir un planning familial peuvent avoir pour la personne concernée des répercussions très importantes et amener éventuellement à une décision irréversible, en particulier dans le cas d'une analyse génétique prénatale. Il est donc essentiel que la personne qui prend la décision d'effectuer une analyse de ce type ait pleinement conscience de son acte. C'est pourquoi, selon l'al. 3 et pour répondre à une demande exprimée lors de la procédure de consultation, le consentement à une telle analyse doit être donné par écrit et non de manière expresse, comme le prévoyait l'avant-projet. Cette exigence de forme ne vaut toutefois pas pour le dépistage, qui est sous le contrôle d'une autorité fédérale et qui n'est autorisé que s'il existe un traitement précoce ou des mesures prophylactiques (art. 12). La révocation du consentement ne doit pas être donnée en une forme spéciale.

L'al. 4 réaffirme pour les analyses effectuées à des fins médicales le principe prévu à l'art. 5, selon lequel lorsque la personne concernée est incapable de discernement il appartient à son représentant légal de prendre les décisions. Ce faisant, il doit garantir au maximum le bien de la personne incapable de discernement. Il ne jouit pas de la même liberté de décision que la personne concernée.

6899

2.3.11

Communication de données génétiques (art. 19)

L'art. 119, al. 2, let. f, Cst. précise que le patrimoine génétique d'une personne ne peut être «analysé, enregistré et communiqué qu'avec le consentement de celle-ci ou en vertu d'une loi». Les art. 7 et 19 concrétisent ce principe de base, dans la mesure où il s'agit de la communication de données génétiques.

Les données génétiques font partie des données médicales qui sont des données personnelles protégées. De ce fait, le projet renonce à l'adoption d'un régime juridique spécial pour leur protection et leur communication et les traite comme les autres données médicales, bien qu'elles se distinguent par leur sensibilité parfois accrue et les conséquences qu'elles peuvent avoir pour des parents de sang et pour le projet parental d'un couple. L'art. 19 fixe ainsi dans le domaine de l'analyse génétique les principes importants prévus par les dispositions légales actuelles sur le secret médical et sur la protection des données en matière de communication des données médicales.

Selon l'al. 1, les résultats d'une analyse génétique ne peuvent être transmis qu'à la personne concernée ou, si elle est incapable de discernement, à son représentant légal. La personne concernée a le droit de ne pas vouloir prendre connaissance des résultats (art. 18, al. 1, let. b). Par conséquent, il est en principe interdit au médecin de transmettre les résultats de l'analyse à des tiers, qu'il s'agisse de membres de la famille, du conjoint ou du partenaire de la personne concernée. Le principe du secret médical (art. 321 CP) s'applique aux données génétiques comme aux autres données personnelles qu'il est destiné à protéger (art. 7).

Selon l'al. 2, le médecin peut, avec le consentement exprès de la personne concernée, ou si elle est incapable de discernement de son représentant légal, communiquer les résultats aux membres de sa famille, à son conjoint ou à son partenaire. Il s'agit, d'une part, de cas où la communication des résultats doit permettre aux personnes de pouvoir prendre des mesures thérapeutiques; cela suppose que ces personnes soient des parents de sang et que l'analyse donne des informations également sur leur patrimoine génétique. Il s'agit, d'autre part, de cas où le médecin traitant désire informer lui-même des membres de la famille ou le partenaire sur l'état de santé de la personne concernée, afin
de pouvoir apporter le meilleur soutien possible à la famille. Il peut encore s'agir de questions relatives à un planning familial. La personne concernée doit donner son consentement exprès au médecin. Elle est libre de délier le médecin de son secret professionnel envers d'autres personnes.

Lorsque la communication des résultats est nécessaire pour garantir la protection d'intérêts prépondérants des membres de la famille, du conjoint ou du partenaire et que la personne concernée s'y oppose, le médecin peut demander à l'autorité cantonale compétente d'être délié du secret professionnel, conformément à l'art. 321, ch. 2, CP. Si cette autorité juge que l'intérêt des membres de la famille ou du partenaire à être informé est supérieur à l'intérêt de la personne concernée à garder le secret, elle déliera le médecin du secret professionnel (al. 3, 1e phrase). Les termes de «intérêts prépondérants» sont repris de l'art. 13 LPD35. Le code pénal ne prévoit pas d'autres critères pour délier du secret professionnel. Mais selon la doctrine et la 35

RS 235.1

6900

pratique, la décision doit être prise après une pesée des intérêts. Il est en principe justifié d'informer les parents lorsque, en raison de leur constitution génétique, ils encourent un risque important pour leur santé s'ils ne prennent pas des mesures thérapeutiques ou prophylactiques. Il appartient à la Commission d'experts pour l'analyse génétique humaine, sur demande de l'autorité compétente, de se prononcer sur la question de savoir dans quelle mesure les résultats de l'analyse de la personne qui l'a subie valent de manière pertinente pour des membres de sa famille (al. 3, 2e phrase).

La disposition fixe uniquement les conditions auxquelles le médecin peut informer des membres de la famille. Ceux-ci décident librement s'ils veulent prendre connaissance des informations (art. 6).

2.3.12

Réutilisation du matériel biologique (art. 20)

L'al. 1 prévoit que le matériel biologique prélevé en vue d'une analyse génétique (échantillon; art. 3, let. m) ne peut être réutilisé que pour les buts auxquels la personne concernée ou, si elle est incapable de discernement son représentant légal, a consenti. L'art. 5 prévoit déjà que toute analyse génétique nécessite le consentement de la personne concernée. La portée de l'al. 1 est plus large, en ce sens que le consentement de la personne n'est pas seulement exigé pour une analyse génétique, mais pour toute réutilisation d'un échantillon.

Une analyse génétique peut être théoriquement effectuée à partir de n'importe quel tissu ou substance d'origine humaine. Ce matériel biologique peut avoir été prélevé pour diverses raisons dans le cadre de soins médicaux, par exemple à l'occasion d'une opération ou d'une prise de sang à des fins diagnostiques traditionnelles. Il peut aussi s'agir d'un échantillon recueilli pour les besoins d'une autre analyse génétique. Une personne est libre de consentir à ce que du matériel biologique prélevé sur elle soit réutilisé pour une analyse génétique à des fins de recherche, dans la mesure où la recherche envisagée n'est pas contraire à des dispositions légales ou aux directives de l'Académie Suisse des Sciences Médicales. Il n'est cependant pas toujours possible de recueillir le consentement de chaque personne concernée pour un projet de recherche spécifique. C'est le cas notamment pour les recherches épidémiologiques qui impliquent l'analyse d'un grand nombre d'échantillons. Quelques rares prises de position lors de la procédure de consultation ont demandé de biffer l'al. 2. Il est toutefois fondamental de permettre de telles recherches. Elles représentent en effet le seul espoir pour les personnes qui souffrent d'affections pour lesquelles il n'existe jusqu'à présent que des traitements inadaptés, voire aucun traitement. Les projets de recherche qui contribuent à la lutte contre les maladies s'avèrent d'une importance primordiale dans le domaine de la santé publique36 et sont d'intérêt public37, dans la mesure où ils contribuent à lutter contre l'explosion des coûts de la santé. C'est pourquoi le législateur fédéral a déjà prévu la possibilité de mener certaines recherches sur dossier médical sans le consentement des personnes concernées dans le domaine médical ou de la santé publique. L'art. 321bis CP

36 37

FF 1988 II 430 ATF 118 Ia 427

6901

prévoit une procédure spéciale à cet effet. Les conditions sont fixées dans l'ordonnance du Conseil fédéral concernant les autorisations de lever le secret professionnel en matière de recherche médical (OALSP)38. Cette ordonnance ne réglemente pas la recherche en tant que telle, mais la communication de données médicales à des fins de recherche. Une disposition analogue à l'art. 321bis CP s'avère indispensable dans la loi fédérale sur l'analyse génétique humaine afin de permettre la recherche avec du matériel biologique prélevé dans le cadre d'un traitement médical.

Une telle disposition n'a toutefois qu'un caractère transitoire. L'art. 20, al. 2, devrait être, en principe, biffé lors de l'adoption d'une loi fédérale relative à la recherche sur l'être humain, qui uniformisera la situation juridique. Il se justifie en effet de régler les recherches épidémiologiques effectuées à une grande échelle dans une loi sur la recherche.

Selon l'al. 2, du matériel biologique prélevé à d'autres fins ne peut servir à une analyse génétique à des fins de recherche que si les trois conditions suivantes sont remplies. Premièrement, comme le prévoit également l'art. 321bis CP, la personne concernée ou son représentant légal, doit être informée de ses droits. L'information peut être donnée de manière générale. Elle ne doit pas porter sur un projet en particulier. Deuxièmement, la personne concernée ne doit pas avoir expressément refusé que le matériel biologique prélevé sur elle soit soumis à une analyse génétique à des fins de recherche. Troisièmement, l'anonymat de la personne dont provient le matériel biologique doit être garanti. Cela signifie en particulier que le matériel doit être marqué de manière qu'il n'est pas possible de remonter à la personne concernée. Les chercheurs qui effectuent l'analyse ne doivent pas pouvoir identifier la personne.

C'est pourquoi ils n'ont pas le droit non plus de comparer les résultats de leurs analyses avec les résultats d'autres analyses génétiques dont on connaît les personnes concernées.

L'al. 3 réserve les dispositions spéciales du droit fédéral et du droit cantonal qui régissent la recherche. Il s'agit en particulier des règles générales à respecter en matière de recherche sur l'être humain. Le projet de recherche doit être jugé notamment sur les plans éthique et scientifique.
Le présent projet ne règle pas la question de la recherche épidémiologique sur du matériel biologique prélevé sur des personnes décédées. Cette question doit être réglée dans la future loi sur la recherche. Toutefois, jusqu'à l'entrée en vigueur de celle-ci, les dispositions cantonales en la matière restent applicables.

2.4

Analyses génétiques dans le domaine des rapports de travail

2.4.1

Situation initiale sur le plan législatif

L'art. 328b a été introduit dans le code des obligations39 à l'occasion de l'adoption de la loi fédérale sur la protection des données40, en vigueur depuis le 1er juillet 1993. Selon cette disposition impérative, l'employeur ne peut traiter des données concernant le travailleur que dans la mesure où elles portent sur ses aptitudes à 38 39 40

RS 235.154 RS 220 RS 235.1

6902

remplir son emploi ou sont nécessaires à l'exécution du contrat de travail. Selon le message41, il s'agit d'une concrétisation du principe de la proportionnalité au sens de l'art. 4, al. 1, LPD. Comme ce principe s'applique à l'ensemble du droit public, l'art. 328b CO vaut également pour un rapport de travail de droit public, indépendamment de l'applicabilité de la loi fédérale sur la protection des données.

Ainsi, des données relatives à la santé du travailleur ne peuvent être demandées lors de l'engagement ou durant les rapports de travail que si elles portent sur l'aptitude à remplir l'emploi. Par conséquent, il est permis de demander à un magasinier s'il souffre du dos, à un chauffeur s'il est daltonien, à une secrétaire si elle a une ténosynovite, à un employé d'un jardin zoologique s'il souffre d'allergies aux poils d'animaux42. Si l'employeur pose une question inacceptable, le travailleur n'est pas tenu d'y répondre.

L'art. 328b CO prévoit expressément que l'employeur doit respecter la loi fédérale sur la protection des données. Toute atteinte aux droits de la personnalité doit dès lors être évitée. Cela signifie que l'employeur n'a pas le droit de se renseigner luimême sur l'état de santé des personnes qui se présentent pour un emploi ou qui travaillent chez lui. Il a cependant le droit d'obtenir des informations sur leur aptitude à remplir l'emploi ainsi que sur la capacité ou l'incapacité de travail par l'intermédiaire d'un médecin. Au cas où une analyse est effectuée, le médecin est lié par le secret médical. L'employeur ne peut être informé que sur l'aptitude de la personne concernée à exercer l'activité, c'est-à-dire sur la capacité de celle-ci à travailler ou pas. Il ne doit recevoir aucune information sur le diagnostic ou sur l'état de santé général. Ce principe est valable également dans le cas où l'examen médical est effectué par le médecin de l'entreprise.

Alors que l'art. 328b CO a pour but de protéger la personnalité du travailleur et interdit à l'employeur d'obtenir des informations injustifiées sur son état de santé, l'art. 6 de la loi fédérale sur le travail dans l'industrie, l'artisanat et le commerce43 (loi sur le travail) ainsi que l'art. 82 de la loi fédérale sur l'assurance-accidents44 (LAA) obligent l'employeur à prendre toutes les mesures dont l'expérience a démontré
la nécessité, que l'état de la technique permet d'appliquer et qui sont adaptées aux conditions d'exploitation de l'entreprise pour protéger la santé des travailleurs, c'est-à-dire pour prévenir les maladies professionnelles ou les accidents professionnels. L'employeur a le devoir de faire aménager les installations de l'entreprise et d'organiser le travail de manière à éviter autant que possible de mettre en danger la santé des travailleurs. L'ordonnance de 1983 sur la prévention des accidents et des maladies professionnelles45 fixe les mesures qui doivent être prises dans les entreprises pour garantir la sécurité des travailleurs. Elle prévoit essentiellement des prescriptions sur la sécurité et l'organisation dans les entreprises. Selon l'art. 70 de cette ordonnance, la CNA peut, afin de prévenir des maladies professionnelles propres à des catégories d'entreprises ou à des genres de travaux déterminés ainsi que pour prévenir certains risques d'accidents inhérents à la personne du travailleur, soumettre, en vertu d'une décision, une entreprise, une partie d'entreprise ou un travailleur aux prescriptions sur la prévention dans le domaine de la médecine du 41 42 43 44 45

FF 1988 II 421 Roger Rudolph, Stellenbewerbung und Datenschutz, thèse, Berne 1997, p. 60.

RS 822.11 RS 832.20 RS 832.30

6903

travail. Il s'agit des places de travail qui, malgré une sécurité optimale, sont actuellement inévitablement exposées au risque d'une maladie professionnelle ou d'une atteinte à la santé reconnues par la loi, provoquées notamment par des produits chimiques dangereux, de la poussière, des gaz ou des rayons. Les employeurs qui offrent une place de travail soumise à la prévoyance en matière de médecine du travail sont tenus de faire passer à leurs employés un examen d'aptitude spécifique. Les travailleurs qui veulent exercer une telle activité doivent accepter de subir un tel examen avant de commencer à travailler ou pendant les rapports de travail. Dans la mesure où la Suisse, contrairement à d'autres pays européens, n'a pas beaucoup de médecins possédant une formation en médecine du travail, cet examen peut être effectué par un autre médecin, par exemple par le médecin de famille.

Outre la loi sur l'assurance-accidents, il existe des prescriptions légales spéciales qui soumettent certaines activités à un examen d'aptitude. Il s'agit en particulier de l'art. 13 de la loi sur la radioprotection46 et de l'art. 77 du règlement concernant les licences du personnel navigant de l'aéronautique47. Ces prescriptions ne visent pas seulement la protection des travailleurs. Sont également soumises à la prévoyance les places de travail où, dans la mesure du possible, il faut garantir la protection de tiers ou empêcher la survenance de catastrophes écologiques en raison d'une fausse manipulation.

2.4.2

Médecine du travail en tant que spécialité

La médecine du travail est une spécialité de la médecine qui étudie les interactions entre le travail et la santé. Les directives élaborées par l'Organisation Mondiale du Travail (OIT) et l'Organisation Mondiale de la Santé (OMS) ont été reprises tant par les Etats-Unis que par différents pays européens; elles ont été harmonisées au droit européen. Selon ces directives, la médecine du travail doit assurer le bien-être physique, psychique et social des travailleurs. Selon une récente interprétation, elle doit contribuer à empêcher que les travailleurs ne soient atteints dans leur santé ou ne subissent des préjudices en raison de méthodes de travail inappropriées, de moyens techniques inadéquats ou de substances dangereuses pour la santé. La médecine du travail doit en outre contribuer à empêcher qu'une personne exerce une activité qui, vu son état de santé établi par un examen préventif de la médecine du travail, peut mettre en danger sa santé ou celle d'un tiers ou causer un dommage à l'environnement.

Pour remplir ces tâches, la médecine du travail doit épuiser toutes les possibilités diagnostiques aptes à constater au plus tôt les effets nocifs pour la santé. A cet effet, il est nécessaire de connaître les paramètres de la personne, tels que sa constitution, ses prédispositions, ses maladies et, le cas échéant, les médicaments utilisés, afin de pouvoir dresser un bilan médical et donner des conseils, des informations ou une orientation sur les mesures de prévoyance et de protection. Pour éviter qu'une personne ne développe dans le futur une maladie à laquelle elle est prédisposée, il est nécessaire de procéder à une analyse des paramètres présymptomatiques, lesquels sont spécifiques à chaque place de travail. Si le travailleur présente des problèmes

46 47

RS 814.50 RS 748.222.1

6904

de santé, cet examen démontre en premier lieu que les mesures de prévoyance techniques et personnelles sont insuffisantes pour la personne concernée. La capacité de la personne à exercer l'activité déterminée ne sera prise en considération qu'en dernier lieu, à moins qu'il ne s'agisse de prévenir un danger pour des tiers ou une atteinte à l'environnement au moyen d'un examen d'aptitude visant à analyser les prédispositions d'une personne.

2.4.3

Analyses génétiques présymptomatiques dans le domaine du travail

Actuellement, on ne recourt pas dans le domaine du travail aux analyses génétiques moléculaires ou cytogénétiques dans le cadre de l'examen médical d'embauche. La raison en est qu'elles n'offrent pas plus d'avantages et de sécurité que les autres méthodes d'analyse. En outre, beaucoup d'entreprises renoncent actuellement à un examen médical d'embauche, car l'aptitude actuelle du candidat peut, dans la plupart des cas, être évaluée de manière satisfaisante lors de l'entretien d'embauche.

Pour éviter des atteintes à la santé, des maladies professionnelles ou des accidents dans le cadre de la médecine préventive du travail, la plupart des prédispositions pouvant être plus ou moins d'origine génétique sont établies actuellement par un diagnostic clinique traditionnel posé sur la base du phénotype ou d'une analyse chimique. Mais depuis 1976, on recourt également à des analyses génétiques, qui permettent de détecter une capacité réduite de résister à des substances nocives. Le test de la G-6-PD (glucose-6-phosphate-déhydrogénase) permet, par exemple, de détecter un manque de l'enzyme qui engendre chez les porteurs une sensibilité accrue à des substances chimiques, comme la quinine, les sulfonamides, l'acétanilide, le monoxyde de carbone, l'ozone, le plomb, les nitrites et les nitrates, qui se manifeste par la destruction des globules rouges. Les personnes qui réagissent positivement au test présentent un risque augmenté de développer un cancer. Toutefois, on ne recourt pas encore à des analyses génétiques présymptomatiques au niveau de l'ADN dans le but de détecter un risque individuel de maladie ou de sensibilité. La situation est différente s'il s'agit de diagnostiquer un dommage ou une modification du patrimoine héréditaire provoqué par une activité professionnelle. Dans ce cas, une analyse moléculaire peut entrer en question, dans le but de déterminer pour une activité professionnelle l'étendue du dommage sur le plan génétique.

Le progrès continu des méthodes diagnostiques génétiques pourrait amener une modification relativement rapide de la situation. Le législateur doit donc, pour le futur, peser soigneusement les intérêts en présence et influencer le développement dans la bonne direction. L'on sait qu'une révision de loi prend du temps; il serait dès lors faux de légiférer uniquement en
considération de la situation actuelle.

En outre, le présent projet définit la notion d'analyse génétique de manière large, de sorte que des analyses ­ autres que des analyses moléculaires ou cytogénétiques ­ tombent également dans son champ d'application.

Les craintes sont inspirées en particulier par les analyses présymptomatiques, dans la mesure où elles permettent de détecter des prédispositions génétiques de la personne concernée qui ne se concrétiseront en une maladie que dans le futur, voire jamais, et qui n'ont aucun rapport avec un danger concret sur la place de travail, au sens de la prévoyance dans le domaine de la médecine du travail. Ces analyses peuvent, dans 6905

une mesure encore jamais atteinte, donner des informations sur la sphère personnelle, en particulier sur le domaine intime, de la personne concernée.

Pour une personne apte au travail, l'exercice d'une activité professionnelle a une importance existentielle, malgré la protection offerte par l'assurance-chômage et l'aide sociale. Une personne qui se voit refuser une activité professionnelle en raison d'une prédisposition à une maladie subit une profonde atteinte dans son développement personnel et économique et dans son droit à l'autodétermination. L'ordre juridique actuel ne protège en principe pas les intérêts de l'employeur à connaître les prédispositions de ses travailleurs, en particulier lorsque le but est de diminuer les frais sur la place de travail ou les frais d'assurance. Il est interdit, selon l'art. 328b CO, d'exiger des analyses présymptomatiques ou de demander des résultats d'analyses présymptomatiques déjà effectuées à des fins médicales, dans la mesure où il ne s'agit pas d'une place de travail soumise à la prévoyance dans le domaine de la médecine du travail. En effet, ces analyses ne détecteraient pas des maladies existantes ou imminentes mettant en question l'aptitude actuelle du travailleur, mais elles livreraient des informations sur la sphère intime de la personne concernée. Cette solution doit être ancrée et explicitée sur le plan législatif dans le cadre du présent projet.

La situation se présente différemment pour les places de travail qui sont soumises à des mesures spéciales de prévoyance dans le domaine de la médecine du travail. Le but d'une analyse génétique présymptomatique est alors de détecter le risque potentiel d'une activité professionnelle pour les tiers ou pour l'environnement ou d'éviter un danger pour la santé du travailleur. C'est pourquoi, dans le cadre de l'examen d'aptitude dans le domaine de la médecine du travail, l'espérance de vie de la personne concernée n'est en soi pas pertinente. Il ne s'agit pas non plus d'obtenir le plus d'informations possibles sur les prédispositions aux maladies. Pour estimer l'aptitude il suffit de savoir si les effets nocifs prévisibles de l'activité peuvent avoir des conséquences préjudiciables inacceptables pour le travailleur ou si une prédisposition génétique peut être à l'origine d'un risque pour les tiers et pour
l'environnement. S'il existe un risque, peu importe la méthode pour le détecter. Dans les examens d'aptitude visant à éviter des accidents, outre les handicaps physiques, ce sont avant tout les prédispositions à un comportement à risque ­ qu'elles soient de naissance ou acquises ­ qui jouent de plus en plus un rôle important. Il s'agit non seulement de problèmes de toxicomanie, mais aussi de troubles de la concentration ou affectifs et de prédispositions à l'épilepsie ou à de graves dépressions. Les 80 à 90 pour cent des accidents professionnels ne sont pas dus à des problèmes techniques, mais à des facteurs humains. C'est une réalité bien connue, en particulier dans les entreprises soumises à l'ordonnance sur les accidents majeurs48.

L'interdiction de principe des analyses génétiques présymptomatiques et leur admission à titre exceptionnel ont été largement approuvées dans la procédure de consultation. Plusieurs participants ont toutefois proposé une réglementation plus restrictive, demandant de supprimer les exceptions. Celles-ci ouvriraient la porte à tous les abus possibles et empêcheraient certaines personnes d'accéder à des emplois dans des domaines importants. Les analyses génétiques présymptomatiques ne doivent pas permettre aux employeurs de renoncer à prendre des mesures sur la place de travail. En effet, de telles exceptions comportent le risque que l'on privilégie la protec48

RS 814.012

6906

tion individuelle du travailleur, en excluant d'une place de travail les personnes présentant une certaine prédisposition génétique, au détriment de la protection collective, consistant à prendre des mesures de sécurité sur la place de travail. Il a aussi été proposé de prévoir des solutions moins restrictives que celles prévues par l'avantprojet ou de se limiter aux analyses de l'ADN uniquement pour empêcher que des analyses effectuées actuellement ne tombent sous le coup de la loi.

Le présent projet reprend le concept de l'avant-projet, en le précisant sur certains points au regard des résultats de la procédure de consultation. Lorsqu'il s'agit de protéger la santé ou la vie d'un grand nombre de personnes ou d'éviter une grave atteinte à l'environnement, l'intérêt du travailleur à ne pas effectuer une analyse génétique dans le but de détecter une prédisposition déterminée doit s'effacer devant l'intérêt public. L'opinion publique ne comprendrait pas qu'une personne présentant une prédisposition certaine à un trouble de la concentration puisse occuper une place de travail qui requiert, humainement parlant, une attention sans faille. Il faut en outre prendre en considération le fait que les troubles de la concentration ne sont pas nécessairement perçus par les autres personnes, parce que, par exemple, la personne concernée garde les yeux ouverts et n'est pas appelée à changer de position.

Une analyse génétique présymptomatique ne peut toutefois entrer en ligne de compte (art. 22, let. b) que si les mesures techniques et organisationnelles sur la place de travail ne suffisent pas à garantir la sécurité des tiers ou de l'environnement. En outre, l'analyse doit être effectuée de manière à ce que les droits de la personnalité de la personne concernée soient protégés au maximum (art. 23 et 24, al.1). L'analyse doit en particulier se limiter à la prédisposition pertinente pour la place de travail en question.

Lorsqu'il s'agit d'éviter des troubles de la santé liés à une activité professionnelle ou à des maladies professionnelles, il existe un point de vue selon lequel il suffit de rendre le travailleur attentif à la possibilité d'effectuer une analyse génétique présymptomatique et qu'il lui appartient de décider librement s'il veut effectuer une telle analyse et, le cas échéant, de décider si, en cas
de résultats positifs, il veut continuer à exercer l'activité qui peut le rendre malade. Toutefois, c'est à juste titre que notre ordre juridique admet un devoir de protection de l'employeur et autorise des examens médicaux pour savoir si des personnes, en raison de leur prédisposition à une maladie, encourent un danger particulier sur une place de travail déterminée et doivent donc bénéficier d'une protection et permettre ainsi de prévenir les conséquences sociales de graves maladies. Il n'y a donc pas de raisons d'interdire à priori une analyse génétique présymptomatique, laquelle peut constituer une source d'informations particulièrement précieuse. Il est vrai que des analyses génétiques peuvent permettre d'obtenir plus d'informations sur l'état de santé futur d'un employé que les habituelles analyses effectuées sur le phénotype. Mais, en fait, ces analyses ne sont que de nouvelles méthodes diagnostiques qui ont uniquement pour but de rechercher une prédisposition génétique. En outre, on effectue déjà aujourd'hui certaines analyses génétiques sans que cela ait soulevé des problèmes.

Toutefois, si le but de l'analyse est de déterminer une prédisposition, peu importe qu'il s'agisse d'une méthode qui permet d'analyser de manière directe le patrimoine génétique au moyen d'une analyse de l'ADN ou d'une méthode indirecte au moyen d'analyses chimiques des protéines. Il est toutefois unanimement admis qu'il faut prioritairement prendre les mesures techniques et organisationnelles permettant d'écarter les risques liés à une place de travail dangereuse. Ce n'est que si la sécurité

6907

ne peut être assurée par de telles mesures qu'une personne peut être soumise à un examen de ses prédispositions génétiques.

2.4.4

Diagnostic de maladies existantes par des analyses génétiques

Le projet définit les analyses génétiques de manière large (art. 3, let. a, ch. 2.1.3).

Pour cette raison, il n'interdit pas d'effectuer à certaines conditions, dans le cadre d'un examen d'aptitude habituel, une analyse génétique, en particulier une analyse chimique des protéines, dans le but de détecter une maladie existante qui se manifeste déjà par des symptômes. Il s'agit essentiellement d'analyses portant sur les produits des gènes ou sur certains enzymes. La responsabilité de choisir les méthodes les plus appropriées pour établir l'état de santé d'une personne peut être octroyée au corps médical, étant donné que le développement des analyses génétiques sera suivi par une commission d'experts (art. 35), même si, lors de la procédure de consultation, quelques prises de position ont demandé d'interdire toutes les analyses génétiques dans le domaine du travail. Un diagnostic ne peut jamais être communiqué à l'employeur; celui-ci ne peut être informé que sur l'aptitude ou la non-aptitude du travailleur, suite à une maladie. Enfin, la personne concernée doit consentir librement à effectuer une analyse génétique visant à détecter une maladie existante (art. 5). Le médecin qui ne respecte pas ces conditions peut, selon les cas, être puni pour avoir effectué une analyse génétique sans le consentement selon l'art. 36, pour abus dans le domaine du travail selon l'art. 39 et pour violation du secret professionnel selon l'art. 321 CP.

2.4.5

Commentaire des articles

2.4.5.1

Principe (art. 21)

Lors de l'engagement ou durant les rapports de travail, un employeur ou son médecin-conseil ne peuvent pas exiger une analyse génétique présymptomatique (al. 1, let. a; pour la définition, cf. art. 3, let. d, et ch. 2.1.3). Ils ne peuvent pas non plus exiger les résultats d'analyses génétiques présymptomatiques déjà effectuées ni utiliser les résultats de telles analyses (al. 1, let. b). Enfin, il leur est interdit d'exiger une analyse génétique ayant pour but de déterminer des caractéristiques personnelles du travailleur qui n'ont pas de rapport avec sa santé (al. 1, let. c). La loi fixe ainsi dans le domaine du travail une interdiction impérative d'obtenir ou de révéler des informations génétiques. Lors d'un examen d'embauche «habituel», le médecinconseil ne peut ni rechercher des prédispositions génétiques par une analyse génétique présymptomatique ni poser des questions sur les résultats d'une telle analyse déjà effectuée. Il n'a pas non plus le droit d'utiliser les résultats d'analyses génétiques présymptomatiques fournis par le candidat ou le travailleur lui-même. Le médecin doit refuser de répondre aux questions de l'employeur en rapport avec de telles analyses.

6908

L'employeur ou le médecin qui, intentionnellement, en violation de l'art. 21, lors de l'engagement ou durant les rapports de travail, exige une analyse génétique présymptomatique ou une analyse génétique ayant pour but de déterminer des caractéristiques personnelles qui n'ont pas de rapport avec la santé, ou qui utilise les résultats de telles analyses qui ont déjà été effectuées sur la personne concernée ou sur un membre de sa famille est, selon l'art. 39, punissable d'office de l'emprisonnement ou de l'amende (ch. 2.9.5). Au surplus, la personne concernée peut demander des dommages-intérêts et une indemnité à titre de réparation morale soit en vertu du contrat de travail soit sur la base des dispositions du droit civil relatives à la protection de la personnalité. Les rapports de travail soumis au droit public relèvent de la responsabilité de l'Etat.

Le projet utilise la notion de médecin-conseil dans un sens non technique. Il entend ainsi par médecin-conseil le médecin qui établit à l'intention de l'employeur l'aptitude ou la capacité de travail d'une personne. Il peut s'agir du médecin de famille.

2.4.5.2

Exceptions autorisées pour les analyses génétiques présymptomatiques visant à prévenir les maladies professionnelles et les accidents (art. 22)

Les analyses génétiques présymptomatiques ne peuvent pas purement et simplement être interdites dans le domaine de la prévoyance en matière de médecine du travail.

Elles ne doivent cependant être effectuées que dans les cas où la preuve de leur utilité peut être apportée sur le plan scientifique et que celle-ci a été confirmée pour des places de travail déterminées par la Commission d'experts pour l'analyse génétique humaine. En outre, elles doivent être effectuées selon le principe de la proportionnalité et en prenant en considération des effets éventuels de l'analyse sur la santé psychique.

Une analyse présymptomatique ne peut être effectuée lors de l'engagement ou durant les rapports de travail que si les cinq conditions suivantes sont cumulativement remplies: a.

49 50

La place de travail doit être assujettie, par une décision de la CNA, aux prescriptions sur la prévention dans le domaine de la médecine du travail sur la base de l'art. 70 de l'ordonnance sur la prévention des accidents et des maladies professionnelles49 (OPA) ou à d'autres dispositions fédérales qui exigent un examen médical pour exercer l'activité en question en raison des risques susceptibles de provoquer une maladie professionnelle (pour la définition, cf. art. 9 de la loi fédérale sur l'assurance-accidents50), une grave atteinte à l'environnement ou des risques d'accident grave ou d'atteinte grave à la santé de tiers. Sont ainsi concernées non seulement les places de travail pouvant engendrer des maladies professionnelles que l'on ne peut pas prévenir par des mesures de sécurité, mais aussi les activités exigeant, humainement parlant, une attention sans faille du travailleur. Ces places de travail RS 832.30 RS 832.20

6909

seront déterminées par des normes juridiques et non par l'employeur ou un médecin.

b.

Toutes les mesures nécessaires selon l'expérience et l'état actuel de la technique, conformément à l'art. 82 de la loi sur l'assurance-accidents51 ou d'autres dispositions légales, ne suffisent pas à écarter ces risques. Le premier objectif de la sécurité au travail doit être de rendre la place de travail sûre et d'améliorer de manière objective les conditions de travail.

c.

Il est établi selon l'état des connaissances scientifiques qu'il existe un rapport de cause à effet entre une prédisposition génétique déterminée et une maladie professionnelle, un risque d'atteinte à l'environnement ou un risque d'accident ou d'atteinte à la santé de tiers.

d.

Le rapport de cause à effet entre une prédisposition et un risque est confirmé par la Commission pour l'analyse génétique humaine. Celle-ci a en outre reconnu la fiabilité de la méthode d'analyse pour détecter la prédisposition. Il importe que l'analyse ne puisse, dans la mesure du possible, pas livrer des informations autres que les analyses pertinentes. La Commission a dès lors également pour tâche d'établir une liste des analyses génétiques présymptomatiques pour les différentes catégories de places de travail et, si besoin est, de mettre à disposition des informations relatives à l'interprétation des résultats.

e.

Enfin, la personne concernée doit avoir donné son consentement par écrit à l'analyse génétique présymptomatique, après avoir bénéficié d'un conseil génétique au sens de l'art. 14 (art. 23, al. 2). Il est toutefois important de noter que dans le domaine du travail il ne peut pas y avoir une décision réellement libre. En effet, si une place de travail est assujettie à un examen préventif et que, dans le cas d'espèce, il est recommandé d'effectuer une analyse génétique présymptomatique, la personne qui refuse cette analyse se verra refuser l'emploi. Elle doit être rendue attentive à ce fait.

Contrairement à l'avant-projet, le présent projet ne soumet plus la réalisation d'une analyse génétique présymptomatique à la condition qu'il n'existe pas d'autres méthodes diagnostiques appropriées. S'il est établi qu'il existe un rapport de cause à effet entre une prédisposition génétique déterminée et une place de travail, il importe peu selon quelle méthode d'analyse on détecte cette prédisposition génétique. Il faut laisser, dans chaque cas, au médecin la possibilité de choisir la méthode la plus adéquate et la moins coûteuse. Toutefois, si le choix porte sur une analyse génétique présymptomatique, celle-ci aura dû être reconnue par la Commission d'experts pour l'analyse génétique humaine comme étant fiable pour détecter la prédisposition (art. 22, let. d).

L'art. 22 n'empêche pas le médecin-conseil de l'employeur de recommander à des travailleurs d'effectuer, dans leur intérêt, une analyse génétique présymptomatique déterminée chez un médecin indépendant de l'employeur. La personne concernée décide librement de suivre ou pas la recommandation du médecin. Les résultats de cette analyse, qui tomberait sous le coup de l'art. 10, ne pourraient toutefois être communiqués qu'à la personne concernée. Ni l'employeur ni son médecin-conseil

51

RS 832.20

6910

n'auraient le droit de se renseigner pour savoir si l'analyse a été effectuée; ils n'auraient pas non plus le droit d'utiliser les résultats d'une telle analyse.

2.4.5.3

Exécution de l'analyse (art. 23)

L'art. 23 et l'art. 24, al. 1, protègent les droits de la personnalité de celui qui doit effectuer une analyse génétique présymptomatique dans le cadre de la prévoyance dans le domaine de la médecine du travail.

Il est tout d'abord nécessaire de limiter l'objet de l'analyse. Ainsi, ne peuvent être recherchées que les prédispositions génétiques spécifiques qui, sur la place de travail envisagée, exposent la personne concernée à contracter des troubles de la santé ou une maladie professionnelle ou qui peuvent l'amener à commettre des erreurs pouvant mettre gravement en danger d'autres personnes ou l'environnement. D'autres données génétiques ne peuvent pas être recherchées (al. 1). La personne concernée est ainsi protégée contre le risque que des tiers recherchent des caractéristiques personnelles, qu'elle-même ne souhaite peut-être pas connaître.

L'analyse ne peut être effectuée qu'avec le consentement écrit de la personne concernée (art. 22, let. e). Il est en outre indispensable que la personne reçoive une information et un conseil portant sur tous les aspects d'une analyse génétique présymptomatique. Elle doit savoir, en particulier, qu'il s'agit d'une analyse génétique, comment l'analyse sera effectuée, ce qui est recherché, quels résultats pourraient être obtenus et quels sont leur signification, ce que l'analyse pourrait impliquer pour elle et qu'elle est libre d'effectuer ou pas l'analyse. Après l'exécution de l'analyse, la personne concernée doit être informée sur les résultats et les conséquences qui en résultent pour elle. C'est pourquoi l'al. 2 prévoit que l'analyse doit être précédée et suivie du conseil génétique au sens de l'art. 14 (ch. 2.3.6). Au surplus, il est prévu de manière impérative que l'échantillon doit être détruit une fois l'analyse effectuée (al. 3). Le danger d'une utilisation de l'échantillon à des fins non autorisées est ainsi écarté.

2.4.5.4

Communication des résultats de l'analyse et imputation des frais (art. 24)

Le médecin ne peut communiquer le résultat de l'analyse qu'à la personne concernée. Celle-ci décide librement si elle veut prendre connaissance du diagnostic (art. 6). Le diagnostic ne peut en aucun cas être communiqué à l'employeur. Pour ce dernier, il importe uniquement de savoir si la personne concernée entre en considération pour l'activité envisagée. Le médecin ne peut répondre que par oui ou par non à cette question.

Les frais d'un examen préventif de la médecine du travail, y compris ceux d'un éventuel conseil génétique, sont à la charge de l'employeur. Par contre, si l'examen est ordonné par la CNA, les frais sont à la charge de celle-ci (al. 2).

6911

2.4.5.5

Mesures d'office (art. 25)

Comme les analyses génétiques présymptomatiques constituent un domaine particulièrement sensible, l'art. 25 donne aux organes chargés de l'application de la loi sur le travail et de la loi sur l'assurance-accidents la compétence de prendre des mesures d'office s'ils constatent, dans le cadre de leur fonction, des violations des art. 21 à 24 de la loi.

2.5

Analyses génétiques dans le domaine des assurances

2.5.1

Situation initiale

2.5.1.1

Les assurances en tant que communautés de risque

Les assurances reposent sur le concept de la communauté de risque. Le paiement collectif des primes ou des cotisations rend socialement supportable pour l'individu le risque ­ même minime ­ d'être victime d'un événement déterminé qui, selon les cas, peut engendrer des charges financières extrêmement élevées. En effet, en pareille occurrence, ces charges seraient couvertes grâce aux primes payées par l'ensemble des affiliés. Ainsi, le risque en question devient commun à toutes les personnes qui, en payant soit des primes soit des cotisations (selon l'organisation propre à chaque branche d'assurance), se sont constituées en une communauté de destin.

Cependant, les risques assurés peuvent revêtir une importance variable selon les personnes. C'est d'ailleurs l'une des raisons majeures pour lesquelles les assurances sont structurées diversement. Aujourd'hui, la couverture d'un risque contre lequel l'ensemble de la population est tenue de se prémunir (assurance de base) est généralement le fait d'une assurance régie par le droit public, relevant, en d'autres termes, du secteur des assurances sociales. Alors que les différentes branches des assurances sociales couvrent dans leur ensemble les besoins de base de la population, il est loisible à chacun de se prémunir des risques supplémentaires en contractant des assurances complémentaires (assurance facultative). Ces assurances sont généralement régies par les dispositions de droit privé de la loi fédérale sur le contrat d'assurance (LCA)52.

Cette politique législative s'est traduite, en Suisse, par la mise en place d'un système d'assurances sociales fortement diversifiées, système qui est complété par des assurances privées.

Les besoins individuels de base en soins médicaux lors de maladies sont en principe amplement couverts pour l'ensemble de la population par l'assurance-maladie obligatoire, qui est régie par le droit public (loi fédérale sur l'assurance-maladie, LAMal)53. En revanche, dans le domaine de la maladie, les assurances complémentaires contractées à titre facultatif sont soumises à la LCA, qui relève du droit privé, quand bien même la plupart des assurés le sont à titre obligatoire et à titre facultatif auprès de la même institution (caisse-maladie).

52 53

RS 221.229.1 RS 832.10

6912

L'assurance-chômage obligatoire (loi sur l'assurance-chômage, LACI)54 offre aux assurés une protection en cas de perte de leur emploi. Quant à l'assurance-accidents (loi fédérale sur l'assurance-accidents, LAA)55, elle couvre les assurés contre les conséquences économiques d'un accident professionnel ou d'une maladie professionnelle, la couverture des autres catégories d'accidents devant faire l'objet d'une assurance privée.

L'assurance-vieillesse et survivants obligatoire (loi fédérale sur l'assurance-vieillesse et survivants, LAVS)56 couvre toutes les personnes physiques de Suisse. Combinée avec la prévoyance professionnelle (loi fédérale sur la prévoyance professionnelle vieillesse, survivants et invalidité, LPP)57, elle permet aux personnes retraitées ou qui deviennent invalides de conserver, dans une mesure appropriée, leur niveau de vie antérieur et garantit la couverture des besoins des survivants en cas de décès précoce de la personne qui pourvoyait à leur entretien. Dans cette branche, les besoins supplémentaires sont couverts par l'épargne personnelle au titre du troisième pilier de la prévoyance professionnelle ou encore par des assurances privées.

Dans le droit actuel, la répartition de la protection entre le droit privé et le droit public, due notamment à des raisons historiques, est d'une grande importance. Toutefois, cette répartition ne fournit pas une indication absolue à la lumière de laquelle on puisse estimer l'importance politico-sociale de la protection offerte par les assurances. Ainsi, le contrat d'assurance sur la vie, régi par le droit privé fédéral, sert souvent à couvrir un besoin supplémentaire au titre de la prévoyance professionnelle («3e pilier»). Dans cette mesure, il n'est pas là pour garantir une couverture de base à l'ensemble de la population. Toutefois, cette affirmation doit être relativisée. Pour des personnes exerçant une activité lucrative à titre d'indépendant, par exemple, une assurance sur la vie est de nature à constituer une couverture indispensable en cas de maladie ou d'invalidité, garantissant ainsi à ces personnes une «protection de base» appropriée. Cependant, les indépendants ont aussi la possibilité de s'assurer, jusqu'à concurrence d'un certain montant, dans le cadre de la prévoyance professionnelle.

L'art. 44 LPP leur permet, en effet,
de se faire assurer auprès de l'institution de prévoyance qui assure leurs salariés ou dont ils relèvent à raison de leur profession. En outre, l'indépendant qui n'a pas accès à une institution de prévoyance a le droit de se faire assurer auprès de l'institution supplétive. La couverture des risques de décès et d'invalidité peut faire l'objet d'une réserve pour raison de santé durant trois ans au plus (art. 45, al. 1, LPP).

De surcroît et contrairement à leur vocation initiale, les assurances sur la vie sont devenues un moyen très prisé et très répandu d'obtenir des crédits, étant entendu que la somme assurée est fonction du montant emprunté. Les établissements bancaires exigent parfois de leurs clients qu'ils contractent une assurance-vie préalablement à l'obtention d'un crédit visant à financer l'installation d'une personne à son compte, l'acquisition d'un logement ou encore la construction d'une maison. A noter toutefois que ce type de garantie n'est pas usuel en matière de crédit à la consommation. La valeur de rachat de l'assurance constitue indirectement la garantie du prêteur, puisqu'il fait constituer un gage en sa faveur sur cette valeur de même que sur les prestations auxquelles a droit l'assuré en cas de réalisation du risque 54 55 56 57

RS 837.0 RS 832.2 RS 831.10 RS 831.40

6913

couvert. Le risque assumé par le prêteur est notablement réduit par ce biais puisqu'en cas de décès de l'emprunteur, le capital assuré devient exigible, ce qui garantit le remboursement du prêt. Lorsqu'elles sont utilisées aux fins d'obtenir des fonds, les assurances-vie relèvent-elles de la couverture de base ou de la couverture facultative? Sur ce point les avis sont partagés. Cependant, en tout état de cause, force est de considérer que l'achat d'un logement ou la construction d'une maison d'habitation ne répond pas à une nécessité aussi vitale que la prévoyance visant à financer une retraite ou à couvrir les besoins des survivants.

2.5.1.2

Evaluation du risque à la lumière des résultats d'examens médicaux et partage solidaire des risques par la communauté des personnes qui paient des primes ou des cotisations

Le montant des primes à payer par les assurés se détermine, notamment, en fonction du montant assuré et de la probabilité avec laquelle l'événement assuré risque de se produire durant la période d'assurance, ainsi qu'en fonction de la prestation à fournir en cas de survenance de l'événement assuré. A cette fin, les institutions d'assurance se fondent sur des données statistiques. Le principe qui vaut en l'occurrence est que plus la communauté des assurés est importante, mieux les risques peuvent être répartis. Plus l'effectif des assurés est petit, plus ceux-ci auront intérêt à ce que les preneurs d'assurance fassent l'objet d'une analyse de risque. Sous l'angle médical, une telle analyse vise au premier chef à déceler les personnes susceptibles de présenter un risque imminent plus élevé.

Le fait que la couverture d'assurance revêt une importance variable selon les assurés influe en dernière analyse sur la question de savoir jusqu'à quel point notre ordre juridique doit prendre en compte l'intérêt aussi évident que compréhensible qu'a la communauté des assurés à ce que l'on décèle, grâce à des examens médicaux, les risques plus élevés que la normale (appelés aussi «mauvais risques»). En effet, dans la mesure où ils ne doivent pas être supportés par l'ensemble des assurés, ces risques peuvent donner lieu à une prime plus élevée ou à un supplément de cotisation pour un niveau de protection analogue, voire entraîner une impossibilité de conclure un contrat d'assurance déterminé.

Un rapport d'assurance sociale soit est fondé directement sur la loi, soit résulte de la volonté concordante des deux parties. En tout état de cause, une institution d'assurance n'a pas le droit de refuser de couvrir un proposant lorsqu'elle est légalement compétente pour l'assurer. En outre, il est typique d'une assurance sociale qu'elle ne perçoive pas des primes proportionnées aux risques que présente chaque assuré.

Dans le domaine des assurances sociales, il est, au contraire, de règle que l'on pratique une certaine peréquation entre personnes à faible risque et assurés à risque élevé, cela en faveur de ces derniers. Souvent le montant des cotisations est fixé en fonction de la situation financière de l'assuré. En outre, certaines assurances sociales sont subventionnées par les pouvoirs publics. Cela étant, en matière
d'assurances sociales ­ prévoyance professionnelle comprise ­ l'examen de l'état de santé du preneur d'assurance n'a qu'une importance mineure, pour ne pas dire aucune importance.

6914

Il en va autrement dans le domaine des assurances privées. En effet, en vertu de l'art. 4, al. 1, LCA le proposant est tenu de déclarer par écrit à l'assureur tous les faits qui sont importants pour l'appréciation du risque tels qu'ils lui sont ou doivent lui être connus lors de la conclusion du contrat. Sont «importants» tous les faits de nature à influer sur la détermination de l'assureur de conclure le contrat ou de le conclure aux conditions convenues (art. 4, al. 2, LCA). Sont réputés importants les faits au sujet desquels l'assureur a posé par écrit des questions précises, non équivoques (art. 4, al. 3, LCA)58. L'art. 6 accorde à l'assureur le droit de se départir du contrat si celui qui devait faire la déclaration exigée a, lors de la conclusion du contrat, «omis de déclarer ou inexactement déclaré un fait important qu'il connaissait ou devait connaître».

L'évaluation du risque est donc un élément caractéristique des assurances privées puisqu'elles sont conclues à titre individuel et n'impliquent pas une obligation de contracter. Cette évaluation vise à garantir un rapport équilibré entre prestation et contreprestation. Les institutions d'assurance peuvent toutefois renoncer d'ellesmêmes à procéder à une évaluation détaillée du risque, lorsque cela leur paraît tolérable. L'évaluation détaillée vise à permettre de calculer le risque que l'assurance est censée couvrir et de le rendre compatible avec le plan d'exploitation de l'entreprise, de telle sorte qu'elle ait une capacité financière adéquate et qu'elle puisse, sur une base à long terme, assumer les obligations qu'elle a contractées à l'égard de ses assurés. L'objectif est également de parer à une «antisélection» ou, en d'autres termes, à l'éventualité que les personnes présentant un risque élevé bénéficient, moyennant le paiement de primes modiques, d'une couverture dont l'étendue est injustifiée, cela au détriment du collectif des assurés. Enfin, l'évaluation du risque est aussi un moyen de faire face à la concurrence de plus en plus marquée sur le plan international. Plus cette évaluation est rigoureuse, plus il est possible de fixer les primes à un niveau intéressant pour le preneur d'assurance, celui-ci ayant, par principe, tout intérêt à bénéficier d'une couverture moyennant le paiement de primes aussi basses que possible.

Si l'évaluation du risque fait ressortir que le proposant présente un risque élevé, l'institution d'assurance a le choix:

58

­

d'admettre le proposant dans la catégorie normale de primes, en dépit du risque aggravé qu'il présente;

­

de grever les primes d'un supplément;

­

d'admettre le proposant en excluant toutefois la couverture d'un risque bien déterminé, ce qui revient à convenir avec le proposant que l'assurance n'aura aucune prestation à lui verser si ce risque se réalise;

­

de limiter la durée de validité du contrat de telle sorte qu'il y ait une faible probabilité que l'événement redouté se produise durant cette période;

­

ou de renoncer à conclure le contrat avec le proposant.

Une formule de demande d'assurance contient, par exemple, les questions suivantes: «Etes-vous actuellement en bonne santé et apte au travail? Prenez-vous régulièrement des médicaments? Avez-vous effectué ces cinq dernières années des examens médicaux particuliers, comme des radiographies, des IRM, des analyses de tissus, d'urine ou de sang? Avez-vous une maladie cardiaque ou circulatoire, le diabète, une maladie rénale, un cancer ou une maladie psychique? Etes-vous séropositif?»

6915

2.5.2

Nouvelles possibilités d'évaluer le risque sur la base d'analyses génétiques présymptomatiques et d'analyses génétiques prénatales

A l'heure actuelle, les assurances privées considèrent également comme des risques importants des états qui ne sont pas encore symptomatiques d'une maladie, comme l'hypertension artérielle, un taux de cholestérol trop élevé ou encore une contamination par le HIV. Les analyses génétiques présymptomatiques et les analyses génétiques prénatales ­ à la différence de l'anamnèse familiale ­ ne jouent actuellement presque aucun rôle pour la conclusion d'un contrat d'assurance. Toutefois, dans le cadre législatif qui nous occupe, elles pourraient prendre, d'un point de vue tant qualitatif que quantitatif, une importance croissante, dans le domaine des assurances privées. En effet, elles pourraient permettre de diagnostiquer certaines prédispositions à des maladies à un stade où, sans le recours à des analyses génétiques, il ne serait pas possible de déceler les symptômes d'une maladie qui présente une forte probabilité de se développer.

Compte tenu de l'importance éminente que revêtent ces analyses pour le proposant ou l'assuré, le législateur est appelé à procéder à une pesée entre les intérêts importants qu'ont les proposants ou les assurés à pouvoir user de leur droit à l'autodétermination individuelle en matière d'information et à contracter une assurance suffisante, d'une part, et l'intérêt non négligeable qu'ont l'assureur et la communauté des assurés à pouvoir déceler certains risques supérieurs à la moyenne afin d'en tenir compte de manière appropriée, d'autre part.

En partant du fait que le but de l'assurance est précisément de couvrir des risques inconnus et non de les exclure, le projet ­ à l'instar de l'avant-projet mis en consultation et en conformité avec la Convention européenne sur les droits de l'Homme et la biomédecine (art. 12) ­ statue une interdiction absolue d'exiger une analyse présymptomatique ou prénatale génétiques préalablement à la conclusion d'un contrat d'assurance (art. 26). Le droit du proposant à l'autodétermination individuelle en matière d'information et le droit de rester dans l'ignorance de certains faits doit primer les intérêts de l'assurance ou de la communauté des assurés, et ce que l'assurance soit sociale ou privée.

2.5.3

Exigence et utilisation des résultats d'analyses déjà effectuées

Dans le domaine des assurances sociales, qui englobe la prévoyance professionnelle au sens large, il paraît évident d'interdire également à une institution d'assurance d'exiger les résultats d'analyses génétiques présymptomatiques, d'analyses génétiques prénatales ou d'analyses visant à établir un planning familial qui ont déjà été effectuées. Relevons que l'avant-projet prévoyait d'appliquer la même réglementation aux assurances contractées au titre de l'obligation de verser le salaire en cas de maladie ou de maternité, étant donné l'importance vitale de ces assurances.

En revanche, la pesée des intérêts est nettement plus difficile à réaliser lorsqu'il s'agit de savoir si, en matière d'assurance privée, il ne faudrait pas mettre les deux parties sur le même pied dans les cas où il existe déjà des résultats d'analyses géné-

6916

tiques présymptomatiques ou d'analyses génétiques prénatales ou encore d'analyses visant à établir un planning familial59.

L'avant-projet soumis à la consultation prévoyait, là encore, une interdiction de principe d'exiger les résultats de ces analyses, tout en admettant des exceptions à des conditions bien déterminées et sous le contrôle de l'autorité. Se fondant sur une proposition motivée des associations d'assurances ou d'une institution d'assurance, l'office fédéral compétent pouvait ­ selon l'avant-projet ­ déterminer, pour certaines branches d'assurances non obligatoires, les analyses génétiques présymptomatiques dont les résultats pouvaient être demandés au preneur d'assurance par l'institution d'assurance. L'office pouvait prévoir l'obligation de répondre aux questions d'un médecin-conseil lorsque la Commission fédérale pour l'analyse génétique avait reconnu la fiabilité de l'analyse et que la valeur scientifique des résultats de l'analyse pour le calcul des primes avait été prouvée. L'avant-projet prévoyait également l'obligation pour les institutions d'assurance de soumettre à l'approbation de l'office fédéral compétent les questions qu'elles entendaient poser aux proposants sur leurs prédispositions génétiques. Celui-ci ne devait autoriser les questions que si elles étaient utiles à l'évaluation du risque à assurer.

Cette proposition de réglementation a reçu un accueil mitigé de la part des participants à la consultation. Un grand nombre de participants ont approuvé la réglementation proposée. Toutefois, les milieux de l'économie ont exigé un régime plus libéral, voire la liberté d'accès aux données génétiques résultant d'analyses déjà effectuées, ne voyant pas en quoi une telle politique pourrait conduire à des abus. Les milieux en question ont également fait valoir qu'il était de notoriété publique que les procédures d'autorisation prennent passablement de temps, ce qui empêcherait le secteur des assurances de réagir assez tôt aux situations nouvelles. Par ailleurs, ils ont estimé que la symétrie des informations, prescrite par la loi sur le contrat d'assurance, relève de la liberté d'entreprendre et permet d'être concurrentiel dans un marché globalisé. Force est donc de se demander pour quelle raison il y aurait lieu de traiter les dispositions génétiques à certaines maladies
différemment des prédispositions acquises en cours d'existence (p. ex. séropositivité ou risque de cirrhose du foie provoqué par une hépatite d'un type déterminé). En outre, les mêmes milieux ont relevé qu'un accès restrictif aux données génétiques pourrait se traduire par une antisélection en ce sens que les premières personnes à s'assurer seraient celles qui, sur la base des informations qu'elles possèdent sur leurs prédispositions génétiques, savent qu'elles profiteront probablement des prestations de l'assurance dans une mesure supérieure à la moyenne. Au risque de l'antisélection s'ajouterait celui de l'instauration d'un marché secondaire, tel qu'il existe déjà pour les assurés atteints par le SIDA. Il s'agit, en d'autres termes, de contracter une assurance-vie et 59

A ce sujet, cf. notamment Isabel Wachendorf Eichenberger und Andrea Gerber, Genetische Untersuchungen im Arbeits- und Privatversicherungsrecht, in: Cottier/ Rüetschi/Sahlfeld (éditeur), Information & Recht, Basel/Genf/München 2002, p. 331 s.; Heinz Hausheer, Genetik und Versicherung aus juristischer Sicht: Rechtsvergleichende Überlegungen zur genetischen Untersuchung im Versicherungsbereich, in: Zeitschrift für die gesamte Versicherungswissenschaft, 2001, Heft 2/3, p. 255 s.; Jochen Taupitz, Die Biomedizin-Konvention und das Verbot der Verwendung genetischer Informationen für Versicherungszwecke, Jahrbuch für Wissenschaft und Ethik, volume 6, 2001, p. 123 s.; Franz Thiele (éditeur), Genetische Diagnostik und Versicherungsschutz. Die Situation in Deutschland, Europäische Akademie zur Erforschung von Folgen wissenschaftlichtechnischer Entwicklungen, Graue Reihe n° 20, 2e éd., fév. 2001.

6917

d'en revendre la police à un tiers intéressé en échange d'une partie de la prestation due par l'assureur en cas de décès.

De l'autre côté, une proportion importante de participants a préconisé une interdiction totale d'accès aux données génétiques ou, pour le moins, un régime encore plus restrictif que celui que prévoyait l'avant-projet. Pour ces participants, nul n'est responsable des gènes qui sont les siens. Donner aux assurances la possibilité d'exiger les résultats de certaines analyses génétiques entraînerait inévitablement la discrimination de certaines personnes (création d'une «société de classes déterminées par la génétique»). Dans ces conditions et à la différence des examens classiques, les analyses génétiques prendraient une grande ampleur, en permettant du même coup une intrusion de plus en plus marquée dans la sphère privée des personnes. Aussi la pratique actuelle ne pourrait-elle plus servir de référence. Les discriminations que les personnes concernées devraient s'attendre à subir en matière d'assurance si les données génétiques étaient librement accessibles, pourraient inciter ces personnes à renoncer à se soumettre à des analyses génétiques présymptomatiques, quand bien même elles seraient indiquées d'un point de vue médical. Enfin, ont estimé les partisans d'une interdiction absolue, l'accès aux données génétiques ouvrirait la porte à toutes sortes d'abus, notamment en matière de protection des données.

Le Conseil fédéral propose la solution suivante. Dans le domaine de l'assurance privée, l'interdiction pour les institutions pratiquant l'assurance-vie d'exiger du preneur d'assurance les résultats d'une analyse génétique présymptomatique, d'une analyse génétique prénatale ou d'une analyse visant à établir un planning familial qui ont déjà été effectuées ne doit pas être limitée ­ comme le prévoyait l'avantprojet ­ aux assurances fixant l'obligation de verser le salaire en cas de maladie ou de maternité, mais, à l'instar de la réglementation en vigueur aux Pays-Bas (ch. 1.5.2), également aux assurances sur la vie portant sur une somme d'assurance de 400 000 francs au maximum et aux assurances-invalidité privées allouant une rente annuelle de 40 000 francs au maximum (art. 27, al. 1, let. d et e). En revanche, s'agissant de contrats d'assurance qui ne tombent pas sous le coup
de l'art. 27, le projet renonce à soumettre l'utilisation des résultats d'analyses génétiques à une procédure d'autorisation officielle. Préalablement à la conclusion de tels contrats, les institutions d'assurance pourront, selon le projet, demander, au seul proposant, par l'intermédiaire de leur médecin-conseil, les résultats d'analyses génétiques présymptomatiques déjà effectuées, à condition que les résultats de ces analyses soient fiables et que leur valeur scientifique pour le calcul des primes ait été prouvée. En revanche, l'utilisation des résultats d'analyses génétiques prénatales et de ceux d'une analyse visant à établir un planning familial reste soumise à une interdiction générale (ch. 2.5.5).

Cette réglementation permet ainsi notamment de demander les résultats d'analyses déjà effectuées pour des assurances complémentaires dans le domaine de l'assurance-maladie ainsi que pour un très petit nombre d'assurance-vie et d'assuranceinvalidité portant sur des sommes d'assurance très élevées. D'après une enquête à laquelle l'Office fédéral des assurances privées a procédé auprès de cinq institutions d'assurance qui, prises ensemble, ont comptabilisé en Suisse 66,2 % du total des primes encaissées en l'an 2000, 93,4 % (soit en chiffres absolus: 1 757 621) des contrats d'assurance en capital portent sur des sommes de 200 000 francs au maximum. Seuls 6,6 % de ces contrats (soit en chiffres absolus: 123 285) portent sur des montants supérieurs à 200 000 francs. En ce qui concerne les assurances-invalidité 6918

privées, dans quatre institutions d'assurance qui, prises ensemble, ont comptabilisé en Suisse 68 % du total des primes encaissées en l'an 2000, le montant représenté par dix rentes annuelles ne dépasse pas 200 000 francs dans 89,8 % des cas (soit: 83 624 cas en chiffres absolus). Ce n'est donc que dans 10,2 % des cas (soit: 9 545 cas en chiffres absolus) que ledit montant est supérieur à 200 000 francs. La solution du Conseil fédéral de fixer la somme maximale à 400 000 francs et à 40 000 francs a pour effet qu'un très petit nombre seulement d'assurés pourront être questionnés sur les résultats d'une analyse déjà effectuée.

2.5.4

Diagnostic de maladies existantes par des analyses génétiques

Les considérations émises au ch. 2.4.4 valent également pour le domaine des assurances. Si l'analyse génétique est un moyen parmi d'autres de diagnostiquer une maladie existante ou une maladie imminente dont les symptômes sont déjà manifestes, il doit être possible d'y recourir préalablement à la conclusion d'un contrat d'assurance, plus précisément dans le but d'exclure la couverture du risque mis en évidence par ladite analyse. La méthode d'analyse en tant que telle ne nécessite pas une protection ni ne doit être considérée comme un danger particulier lorsqu'elle permet d'obtenir des résultats qui peuvent l'être également par d'autres moyens conformes à la loi. On doit, par contre, protéger le proposant qui ne veut pas être confronté à des perspectives d'avenir que seules des analyses génétiques présymptomatiques ou des analyses génétiques prénatales permettent de connaître.

2.5.5

Commentaire du projet de loi

2.5.5.1

Interdiction d'exiger une analyse (art. 26)

Aux termes de l'art. 26, une institution d'assurance ne peut exiger préalablement à l'établissement d'un rapport d'assurance une analyse génétique présymptomatique ou une analyse génétique prénatale. Eu égard au droit qu'a le preneur d'assurance à l'autodétermination individuelle en matière d'information, cette interdiction ne souffre aucune exception. Quant à l'analyse génétique prénatale, elle se rapporte aux cas où l'on veut conclure un contrat d'assurance pour un enfant qui n'est pas encore né. L'interdiction d'exiger une analyse vaut tant pour les assurances privées que pour les assurances sociales.

Actuellement déjà, les institutions d'assurance considèrent comme risques importants les risques héréditaires déterminés sur la base d'une anamnèse familiale. Ainsi, les maladies circulatoires et le diabète sont des éléments pris en compte dans l'évaluation du risque. Il y a donc longtemps que les assurances obtiennent des informations génétiques relatives aux proposants et les utilisent dans le but de refuser des prestations ou de calculer une surprime à raison d'un risque. Mais si, de surcroît, un preneur d'assurance potentiel se voit obligé, dans ce but, de subir une analyse génétique, en particulier une analyse de l'ADN, il y a alors atteinte au principe fondamental de la protection de la vie privée. Il est, dès lors, du devoir du législateur de garantir la liberté de décision de la personne concernée de connaître ou non ses 6919

prédispositions génétiques. La liberté d'accepter ou de refuser une analyse génétique présymptomatique ou une analyse génétique prénatale comme condition préalable à la conclusion d'un contrat d'assurance constitue une pure illusion si le proposant doit craindre le refus du contrat au cas où il n'accepte pas de subir l'analyse en question.

2.5.5.2

Interdiction d'exiger les résultats d'une analyse déjà effectuée (art. 27)

L'art. 27 énumère les assurances auxquelles il est interdit non seulement d'exiger une analyse, mais encore d'exiger les résultats d'une analyse génétique présymptomatique, d'une analyse génétique prénatale ou d'une analyse visant à établir un planning familial, qui a déjà été effectuée. En d'autres termes, ni les institutions d'assurance visées ni leur médecin-conseil ne peuvent requérir de telles données, pas plus qu'ils ne peuvent les utiliser s'ils viennent à en prendre forfuitement connaissance.

Toute sélection à raison du risque est d'emblée prohibée ­ et ce de manière générale ­ aux assurances régies entièrement ou partiellement par la loi fédérale sur la partie générale du droit des assurances sociales (LPGA)60 (al. 1, let. a). Il s'agit de l'assurance-vieillesse, survivants et invalidité (AVS/AI), de l'assurance-chômage, de l'assurance-maladie obligatoire, de l'assurance-accidents, de l'assurance militaire, du régime des allocations pour perte de gains et des allocations familiales dans le domaine de l'agriculture et des prestations complémentaires. Cette disposition qui exprime une évidence a, toutefois, été établie par souci d'exhaustivité.

Comme l'avant-projet (art. 23, al. 4), le présent projet inclut également la prévoyance professionnelle dans les domaines obligatoire et surobligatoire parmi les assurances soumises à l'interdiction d'exiger les résultats d'analyses déjà effectuées (al. 1, let. b). A l'instar de ce que prévoyait l'avant-projet, cette interdiction s'applique également dans le cas où un indépendant entend se faire assurer au sens de l'art. 44 LPP. Par l'interdiction stricte de communiquer les résultats d'analyse, il s'agit non seulement de tenir compte du fait que le 2e pilier est particulièrement nécessaire à l'existence, mais encore de garantir qu'aucune information ne parvienne à la connaissance de l'employeur, sans quoi la réglementation prévue dans le domaine des rapports de travail (art. 21) ne serait que pure illusion.

Pour les mêmes raisons que celles qui valent pour la prévoyance professionnelle, le projet ­ là encore à l'instar de l'avant-projet (art. 23, al. 4) ­ étend l'interdiction d'exiger les résultats d'une analyse déjà effectuée aux assurances contractées au titre de l'obligation de verser le salaire en cas de maladie ou de maternité (al. 1, let. c).
Sont également soumises à ladite interdiction les assurances sur la vie portant sur une somme d'assurance de 400 000 francs au maximum (al. 1, let. d) de même que les assurances-invalidité privées allouant une rente annuelle de 40 000 francs au maximum (al. 1, let. e). Les raisons de cette réglementation sont exposées au ch. 2.5.3.

60

FF 2000 4657 s.

6920

L'al. 2 contient une norme importante pour les institutions d'assurance. Il prévoit, en effet, que si une personne conclut plusieurs assurances sur la vie ou plusieurs assurances-invalidité privées, les sommes maximales susmentionnées s'appliquent à la totalité des contrats. Le preneur d'assurance est tenu d'informer l'institution d'assurances de l'existence de contrats conclus antérieurement. Cette réglementation vise à empêcher que la couverture d'assurance soit parcellisée par la conclusion de plusieurs contrats portant sur une somme inférieure au plafond fixé par la loi, ainsi qu'à restreindre le risque d'antisélection, celle-ci entraînant l'apparition d'un marché secondaire des polices d'assurance.

2.5.5.3

Utilisation autorisée des résultats d'analyses (art. 28)

Lorsqu'un contrat d'assurance ne tombe pas sous le coup de l'art. 27, l'assureur privé a accès aux résultats d'une analyse génétique présymptomatique déjà effectuée pour autant que les conditions fixées à l'art. 28 soient remplies. Le proposant n'est cependant tenu de répondre aux questions du médecin-conseil de l'institution d'assurance que si deux conditions cumulatives sont réunies: ­

les résultats de l'analyse génétique présymptomatique sont fiables (al. 1, let. a), et

­

la valeur scientifique des résultats de l'analyse pour le calcul des primes a été prouvée (al. 1, let. b).

En posant ces deux conditions, le législateur vise à garantir que le médecin-conseil ne pose que les questions qui sont réellement pertinentes pour le calcul des primes.

Dans l'état actuel des connaissances scientifiques, la grande majorité des maladies ont une origine multifactorielle de sorte que, dans nombre de cas, une prédisposition à telle ou telle maladie n'est pas suffisante pour permettre de conclure avec certitude que le proposant présente un risque aggravé. Si l'analyse suscite de sérieux doutes, il y a lieu de ne pas tenir compte des résultats de celle-ci lors de la conclusion d'un contrat d'assurance. Il est loisible à l'institution d'assurance de demander à la Commission d'experts pour l'analyse génétique humaine de se prononcer sur la fiabilité des résultats d'une analyse génétique présymptomatique. La réglementation prévue par le projet souligne, par ailleurs, qu'il n'appartient pas aux proposants de communiquer spontanément aux assureurs les résultats d'analyses génétiques présymptomatiques effectuées antérieurement. Il leur incombe simplement de répondre aux questions du médecin-conseil.

Si le proposant n'a pas respecté l'obligation de déclarer des faits importants, l'assureur a le droit de se départir du contrat conformément à l'art. 6 LCA. Cette disposition fait actuellement l'objet d'une révision.

Les institutions d'assurance doivent passer par l'intermédiaire d'un médecin-conseil pour s'informer des résultats d'analyses génétiques présymptomatiques effectuées à des fins médicales. Cette réglementation vise à sauvegarder les droits attachés à la personnalité des proposants concernés et à garantir une protection stricte des données. Le médecin-conseil doit se borner à informer l'institution d'assurance du fait que le preneur doit être classé dans un groupe à risque spécial (al. 2, 1e phrase). Le dossier en possession de l'institution d'assurance ne doit contenir aucune informa6921

tion sur le diagnostic ni a fortiori des données médicales concernant le preneur d'assurance. De même, le médecin conseil ne peut conserver les résultats, dans des archives distinctes de celles de l'institution d'assurance, que s'ils sont pertinents pour la conclusion du contrat (al. 3).

Les résultats de l'analyse communiqués par le proposant ne peuvent être utilisés qu'aux fins pour lesquelles ils ont été demandés au preneur d'assurance avant la conclusion du contrat (al. 4). Cette disposition vise à empêcher que le médecinconseil prenne en compte ces résultats en vue de la conclusion d'autres contrats d'assurance. En outre, elle exclut l'utilisation des résultats aux fins d'évaluer le risque présenté par des proches du preneur d'assurance. Le médecin-conseil qui viole le secret professionnel est punissable en vertu de l'art. 321 CP. Il l'est également s'il utilise ces informations en vue de la conclusion d'un autre contrat d'assurance.

Contrairement à la loi sur l'assurance-maladie obligatoire (LAMal), la loi sur l'assurance privée n'institue pas les médecins-conseils. Cependant, afin de garantir une réglementation uniforme en cette matière, en prévision d'une révision totale de la loi sur le contrat d'assurance, il convient d'appliquer par analogie les dispositions sur les médecins-conseils prévue par la loi sur l'assurance-maladie. Les données génétiques constituant des données personnelles très sensibles, les médecins-conseils doivent avoir des connaissances particulières. D'autre part, ils ont pour fonction d'empêcher que des données sur la santé ne parviennent aux administrations des assurances (fonction de filtrage). Les conditions d'admission pour les médecinsconseils fixées par l'art. 57, al. 1, LAMal peuvent être appliquées directement. Est applicable par analogie la disposition sur la récusation d'un médecin-conseil par une société médicale cantonale pour de justes motifs et sur le tribunal arbitral (art. 57, al. 3, LAMal). L'exigence pour le médecin-conseil d'évaluer les cas en toute indépendance et de ne pas tenir compte des directives données par l'assureur (art. 57, al. 5, LAMal) vaut également par analogie pour les sociétés d'assurances privées.

Les règles sur la transmission des données par le médecin-conseil (art. 57, al. 7 et 8, LAMal) s'appliquent par analogie aux sociétés
d'assurances privées. Enfin, la formation continue des médecins-conseils et leur statut sont réglés par les associations fédérales de médecins et les sociétés d'assurances privées (art. 57, al. 8, LAMal par analogie).

2.6

Analyses génétiques dans le domaine de la responsabilité civile

2.6.1

Interdiction d'effectuer des analyses génétiques présymptomatiques (art. 29)

Dans le domaine de la responsabilité civile contractuelle et extracontractuelle, le recours à des données génétiques ne présente un intérêt que pour calculer un dommage ou des dommages-intérêts, c'est-à-dire lorsque cela permet, par exemple, de déterminer la durée d'une rente en dommages-intérêts suite à une incapacité de travail. L'art. 29, al. 1 et 2, du projet prévoit une interdiction stricte de demander, de communiquer ou d'utiliser les résultats d'analyses génétiques présymptomatiques ou d'analyses génétiques prénatales ainsi que d'analyses visant à établir un planning familial. Cette solution a été approuvée lors de la procédure de consultation. En 6922

principe, il ne se justifie pas de prévoir des exceptions, comme dans le domaine des assurances, car il ne s'agit pas d'estimer par avance des risques d'assurance plus élevés à la charge d'une communauté de primes ni d'empêcher des abus consistant à conclure des contrats de «dernière minute». En outre, le principe qui prévaut est que l'auteur du dommage ne peut pas choisir la prédisposition génétique de sa victime61 et que, dès lors, le calcul du dommage doit être effectué toujours de la même manière.

La définition des analyses génétiques appelle toutefois une exception au principe de l'interdiction d'effectuer des analyses génétiques présymptomatiques. En effet, l'art. 3, let. a, entend par analyses génétiques les analyses effectuées dans le but de déterminer non seulement des caractéristiques du patrimoine génétique héréditaires, c'est-à-dire transmises par les parents, mais également des caractéristiques du patrimoine génétique acquises pendant la phase embryonnaire. Le patrimoine génétique de l'embryon ou du foetus peut présenter une anomalie suite à la prise d'un médicament par la mère ou suite à un facteur environnemental, sans nécessairement qu'une maladie soit déclarée au moment de la naissance. La personne victime d'une telle anomalie doit pouvoir effectuer une analyse génétique afin de pouvoir calculer les dommages-intérêts ou le tort moral en rapport avec l'anomalie (art. 29, al. 1, 2e partie de la phrase).

2.6.2

Diagnostic de maladies existantes (art. 30)

Le projet n'exclut pas à priori, dans un cas de dommage concret, le recours à une analyse génétique non présymptomatique, en particulier une analyse du produit des gènes ou d'autres analyses de laboratoire au sens de l'art. 3, let. a, visant à déterminer si la personne ayant subi un dommage souffrait déjà d'une maladie dans le but de calculer un dommage ou des dommages-intérêts. Dans la mesure où les principes actuels de la responsabilité civile permettent de détecter une maladie existante, la méthode choisie pour ce faire importe peu. Il est vrai que quelques rares participants à la procédure de consultation ont demandé d'interdire totalement les analyses génétiques dans le domaine de la responsabilité civile, notamment en raison du droit de ne pas être informé. Une telle solution ne prendrait toutefois pas en considération le fait que le but de l'analyse génétique n'est pas d'établir un profil génétique, mais de confirmer ou d'infirmer l'existence d'une maladie déterminée dans le but de calculer un dommage ou des dommages-intérêts. Le laboratoire ne pourra ainsi rechercher qu'une maladie précise. Si l'on admettait que le diagnostic d'une maladie déjà déclarée est inconciliable avec le droit de ne pas être informé, on devrait étendre ce principe à toutes les analyses médicales et pas le limiter aux seules analyses génétiques.

Il incombe au médecin de choisir la méthode d'analyse appropriée et conforme au principe de la proportionnalité. Au surplus, on ne saurait déduire du fait que la personne concernée décide librement d'effectuer une analyse dans le but de régler un cas de dommage qu'elle consent également à une analyse génétique. Une telle analyse ne peut être réalisée que lorsque la personne concernée y a expressément 61

Cf. ATF 113 II 86, en particulier p. 93 s.

6923

consenti, après avoir été informée en particulier sur le but, le type, la signification et les risques de l'analyse. Donnant suite à une proposition faite dans le cadre de la procédure de consultation, le projet exige que le consentement soit donné par écrit.

Est réservée l'analyse génétique ordonnée par un juge lorsque la personne concernée refuse de se soumettre volontairement à l'analyse et que celle-ci apparaît comme une mesure proportionnée. L'art. 30 constitue en cela une base légale spéciale au sens de l'art. 5, al. 1, 2e phrase.

2.7

Profils d'ADN visant à établir la filiation ou l'identité d'une personne

2.7.1

Champ d'application et exposé du problème

Depuis plusieurs années déjà, dans le cadre de procédures pénales, civiles et administratives, des profils d'ADN (pour la définition, cf. art. 3, let. k et ch. 2.1.3) sont effectués pour établir des rapports de parenté ou pour identifier une personne. Mais les personnes confrontées à un problème de détermination de la filiation peuvent le régler également en dehors d'une procédure civile, en faisant effectuer de leur propre initiative des analyses génétiques qui permettront de régler les questions juridiques. Depuis que les expertises visant à établir la filiation ont, en comparaison à celles établies sur la base d'examens sérologiques traditionnels, considérablement gagné en valeur probante grâce aux profils d'ADN, les actions en paternité ont été largement abandonnées au profit de reconnaissances volontaires de paternité selon l'art. 260 CC62. D'autre part, une analyse d'ADN volontaire, qui exclut le père présumé de manière indubitable, permet d'éviter des actions en paternité coûteuses qui n'ont pas de chance d'aboutir. Le recours au profil d'ADN en vue d'établir ou de contester la filiation a eu pour effet un sensible gain de temps, en occasionnant des frais plus ou moins identiques à ceux engendrés par les analyses traditionnelles. Du point de vue du droit de la famille, ce gain de temps permet d'éviter une longue et indésirable incertitude juridique. L'élucidation de la question de la filiation au moyen d'un profil d'ADN peut être effectuée à tout âge de l'enfant, voire même pendant la grossesse. Cela prend environ 14 jours.

Le profil d'ADN peut en principe être établi sur la base de n'importe matériel biologique qui contient des cellules nucléées. Dans la pratique, outre une prise de sang, on procède prioritairement à un frottis de la muqueuse buccale (cellules et salive), qui est une intervention non invasive puisqu'elle ne lèse pas la peau. Le prélèvement est réalisé au moyen de bâtonnets de ouate, qui sont passés environ 25 fois sur l'intérieur de la joue. Si le prélèvement n'est pas effectué par le laboratoire qui établit le profil, le prélèvement est séché et envoyé au laboratoire.

L'utilisation de profils d'ADN dans le cadre d'une procédure pénale et pour l'identification de personnes inconnues ou disparues étant réglée dans la loi sur les profils d'ADN (art. 1, al. 2 et ch. 2.1.1),
la section 7 du présent projet ne réglemente plus que les profils d'ADN visant à établir la filiation ou l'identité d'une personne dans le cadre d'une procédure civile ou administrative ou en dehors d'une procédure.

62

En 2000, 8389 enfants sont nés hors mariage. Cette même année, 7930 enfants ont été reconnus volontairement. Cf. l'Annuaire statistique de la Suisse 2002, p. 88 et 91.

6924

Comme dans le domaine pénal, il faut veiller à ce que l'établissement d'un profil d'ADN ne soit pas utilisé pour recueillir des données qui ne sont pas justifiées par les besoins de l'identification. En outre, il est nécessaire de régler la question de savoir si un tel profil peut être établi contre la volonté de la personne concernée, c'està-dire sans son consentement. Enfin, le législateur doit également régler la question de la conservation et de la destruction des échantillons.

2.7.2

Principe (art. 31)

Les laboratoires qui établissent des profils d'ADN doivent être reconnus selon l'art. 8, al. 4. Cette exigence prend en compte l'importance de ces analyses. Seuls les laboratoires qui disposent des moyens techniques nécessaires et qui garantissent un haut niveau de qualité peuvent effectuer des profils d'ADN.

L'établissement de profils d'ADN visant à établir la filiation ou l'identité d'une personne se limite, comme dans le domaine pénal, aux caractéristiques génétiques uniques de la partie non-codante de l'ADN. On n'intervient pas dans la partie codante de l'ADN ­ où se trouvent les gènes ­ qui, dans la mesure où elle contient le secret de la vie et ouvre des perspectives pour la santé, présente un intérêt surtout dans les domaines de la médecine, du travail, de l'assurance et de la responsabilité civile.

Une influence réciproque des deux parties de l'ADN n'est pas prouvée à ce jour et elle paraît peu probable. C'est pourquoi l'établissement de profils d'ADN pose sensiblement moins de problèmes que les autres analyses génétiques. Des informations sur la santé, y compris d'éventuelles prédispositions à certaines maladies, ainsi que d'autres caractéristiques personnelles n'entrent dès lors pas dans le champ de l'analyse à des fins d'identification. L'al. 1 est ainsi conforme à l'art. 2, al. 2, du projet de loi fédérale sur l'utilisation de profils d'ADN dans le cadre d'une procédure pénale et sur l'identification de personnes inconnues ou disparues, qui prévoit expressément qu'il est interdit de chercher à déterminer l'état de santé ou d'autres caractéristiques personnelles de la personne en cause, à l'exception de son sexe. La détermination du sexe de la personne concernée ne joue en principe pas de rôle dans le présent projet. Il ne faut toutefois pas exclure cette possibilité pour les rares cas où cela pourrait être nécessaire.

L'al. 2 prévoit en outre que l'échantillon doit être prélevé par le laboratoire qui établit le profil d'ADN ou par un médecin mandaté par celui-ci. Cette règle a pour but de garantir, d'une part, la qualité de l'analyse et, d'autre part, que l'échantillon provient bien de la personne qui a consenti à l'analyse. Il pourrait en effet être facile de donner à analyser à n'importe quelle fin un échantillon d'un tiers. Le laboratoire ou le médecin doit donc contrôler l'identité
de la personne sur laquelle on prélève un échantillon, notamment au moyen d'un passeport ou d'une carte d'identité avec photo.

Selon l'al. 3, l'échantillon ne peut pas être utilisé à d'autres fins que celles pour lesquelles il a été prélevé. La protection de la personnalité de la personne concernée est ainsi garantie, en particulier dans les cas où l'échantillon a été prélevé sur ordre d'une autorité.

6925

2.7.3

Dans le cadre d'une procédure civile (art. 32)

Comme déjà mentionné, l'analyse génétique dans le cadre d'une procédure civile a essentiellement pour but d'établir ou d'exclure une filiation. Cela ne signifie pas qu'il est nécessairement question de rapports relevant du droit de la famille. La filiation recouvre, par exemple, également les cas de demandes d'héritage légales où il est nécessaire d'éclaircir, comme condition à l'héritage et à titre préliminaire, une situation relevant du droit de la famille.

La preuve de l'existence ou de l'inexistence de la filiation au moyen d'une analyse génétique implique obligatoirement plusieurs personnes. Une telle analyse ne peut être effectuée qu'avec le consentement écrit de la personne concernée; si la personne refuse son consentement, l'analyse ne peut être réalisée que s'il existe une base légale spéciale et sur ordre d'un tribunal civil, comme le prévoit l'art. 5, al. 1, 2e phrase. Pour le domaine de la procédure civile, la base légale est prévue par l'al. 1, qui reprend le contenu de l'art. 254, ch. 2, CC. Ainsi, une analyse génétique sur ordre du juge n'est pas limitée aux personnes parties à la procédure, par exemple la demanderesse et le défendeur dans un procès en paternité; elle peut être étendue à des tiers si elle est indispensable à la résolution du cas.

Le juge qui a ordonné l'analyse doit veiller à ce que les échantillons analysés, qui sont conservés dans un laboratoire, soient détruits immédiatement après l'entrée en force du jugement final. Si des analyses complémentaires s'avéraient nécessaires pour une révision de procès ou une procédure en responsabilité civile, il faudrait prélever de nouveaux échantillons, ce qui nécessiterait un renouvellement du consentement, à moins que l'analyse puisse être ordonnée sur la base d'une prescription légale spéciale. Reprenant une proposition faite lors de la procédure de consultation, le présent projet prévoit que la personne concernée peut demander par écrit la prolongation de la conservation de l'échantillon. La mère et l'enfant pourraient, par exemple, avoir un intérêt à une telle prolongation si l'homme auquel ils ont intenté un procès en paternité a été écarté et que de nouvelles analyses s'avéraient nécessaires. La prolongation de la conservation des échantillons éviterait de devoir prélever de nouveaux échantillons et permettrait d'économiser de l'argent et du temps.

2.7.4

Dans le cadre d'une procédure administrative (art. 33)

L'al. 1 autorise une autorité administrative à faire dépendre l'octroi d'une autorisation ou de prestations des résultats de l'établissement d'un profil d'ADN lorsqu'il existe des doutes fondés sur la filiation ou sur l'identité d'une personne, qui ne peuvent pas être éliminés d'une autre manière. Il s'agit toutefois de cas exceptionnels.

Cela pourrait se produire en particulier lorsque la descendance établie par les documents présentés paraît très douteuse ­ c'est le cas en particulier pour des pays qui dispose d'un système d'état civil peu développé et pas toujours fiable ­ et que l'établissement de la filiation au moyen d'un profil d'ADN apparaît admissible au regard du principe de la proportionnalité. Plusieurs pays ont déjà adopté cette pratique. Il est ainsi possible de s'assurer, par exemple, que la mère biologique vivant à l'étranger a bien donné son consentement à l'adoption de son enfant en Suisse. Cela 6926

peut être important dans le domaine de l'état civil, afin d'empêcher le mariage entre deux personnes qui sont des proches parents. L'établissement d'un profil d'ADN peut également être nécessaire dans le cadre d'un regroupement familial63. Lorsqu'une demande de regroupement familial est faite par le père et la mère, l'analyse peut être limitée à la mère et à l'enfant. On sait en effet qu'un nombre non négligeable d'enfants nés durant un mariage ­ et qui ont par conséquent comme père juridique le mari de la mère ­, sont en réalité les enfants d'un autre homme64. S'il apparaît par l'analyse que le mari n'est pas le père de l'enfant, il pourrait en résulter un drame. L'une des tâches de la Commission d'experts pour l'analyse génétique humaine sera donc de prendre en considération ces éléments lors de l'élaboration des recommandations sur l'établissement de profils d'ADN (art. 35, let. i).

L'analyse ne peut être effectuée, selon l'al. 2, qu'avec le consentement écrit des personnes concernées ou de leur représentant légal (art. 5, al. 2). Selon l'al. 3, les échantillons doivent être conservés par les laboratoires et être immédiatement détruits après que la décision est entrée en force. Il appartient à l'autorité compétente de communiquer sans tarder au laboratoire l'entrée en force de la décision.

2.7.5

Etablissement de la filiation en dehors d'une procédure officielle (art. 34, al. 1 à 3)

L'établissement de la filiation peut se faire sans recourir à une procédure judiciaire (ch. 2.7.1); il est en effet possible de s'adresser directement à un laboratoire, donc sans mandat d'une autorité. La connaissance de son ascendance est un droit garanti par la Constitution fédérale65; ce droit ne peut pas être restreint inutilement.

Un profil d'ADN reposant sur une base volontaire ne peut être établi, conformément à l'art. 5, qu'avec le consentement des personnes concernées. L'art. 34, al. 1, 1e phrase, ajoute comme condition que le consentement doit être donné par écrit.

L'avant-projet de loi soumis à la procédure de consultation prévoyait que le consentement devait être donné de manière «expresse».

Le mineur capable de discernement peut donner son consentement seul, étant donné qu'il s'agit d'un droit personnel au sens de l'art. 19, al. 2, CC. Toutefois, il y a lieu d'être très exigeant en ce qui concerne la capacité de discernement66. On admet en principe qu'un enfant de moins de 15 ans n'a pas la capacité de discernement suffisante. Le présent projet renonce dès lors à fixer une limite d'âge comme le code civil l'a fait pour le droit de choisir la confession (art. 303, al. 3, CC). La capacité de discernement doit être déterminée au cas par cas. Le laboratoire doit examiner cette

63 64

65

66

Cf. message concernant la loi fédérale sur les étrangers, commentaire ad art. 97, FF 2002 3469.

Les spécialistes estiment le nombre de ces enfants en Suisse à environ 5 %; voir J. Martin, Das Wohl des Kindes und seine Kenntnis der Daten über seine Abstammung, Bulletin des médecins suisses 1996, p. 189.

Art. 119, al. 2, let. g, Cst.; pour des informations supplémentaires, voir R.J. Schweizer, Commentaire de la Consitution fédérale de la Confédération suisse du 29 mai 1874, Bâle 1987, art. 24novies Cst, n. 97 ss.

Cf. message sur la filiation, FF 1974 II 30, concernant l'action en désaveu de l'enfant selon l'art. 256 CC.

6927

question avec soin. En cas de doute, il doit requérir également le consentement du représentant légal.

Le consentement de la personne concernée n'est pas un droit strictement personnel, lequel aurait pour conséquence une interdiction de représentation en cas d'incapacité de discernement, mais un simple droit relativement personnel (art. 19, al. 2, CC). En conséquence, le consentement nécessaire de la personne concernée qui est incapable de discernement sera donné par son représentant légal (art. 5, al. 2). Lorsque les père et mère sont tous deux détenteurs de l'autorité parentale, le consentement doit être donné par chacun d'eux. En cas de conflit d'intérêts, le droit de représenter tombe (art. 392, ch. 2, CC). Cet important principe est expressément prévu à l'art. 34, al. 1, 2e phrase. Ainsi, le mari de la mère ne peut pas représenter l'enfant s'il s'agit de déterminer sa propre paternité. Par contre, un conflit d'intérêts avec la mère ne pourrait survenir que dans des cas très particuliers. C'est pourquoi elle peut en principe représenter l'enfant. Sinon l'autorité tutélaire doit nommer un curateur.

Selon l'avant-projet mis en consultation, la personne mineure ou interdite capable de discernement pouvait donner son consentement seule; si elle était incapable de discernement, le consentement devait être donné par son représentant légal (les parents ou le tuteur); mais dans un cas comme dans l'autre, l'analyse devait être encore approuvée par l'autorité tutélaire. Cette condition supplémentaire a été critiquée lors de la procédure de consultation. Si la personne est capable de discernement, il est effectivement difficile d'envisager que l'autorité tutélaire puisse prendre une décision différente de celle de la personne concernée. D'autant plus que, selon le droit actuel, une personne mineure ou interdite capable de discernement décide elle-même si elle veut intenter une action en désaveu de paternité ou une action en paternité selon les dispositions du code civil67. Au surplus, le père juridique ou le père présumé doit consentir également à l'analyse; celle-ci ne peut pas être entreprise à la demande d'une seule partie.

S'agissant d'une personne mineure ou interdite incapable de discernement, on peut se demander s'il est opportun de laisser au représentant légal le soin de procéder à une pesée
des intérêts. Mais compte tenu du fait qu'un grand nombre des demandes visant à déterminer la paternité concerne des enfants nés hors mariage ­ qui n'ont donc pas de père juridique ­ et que la détermination du père biologique vise à créer un lien de filiation, qui est un droit accordé par les dispositions relatives à l'établissement de la filiation du code civil (art. 252 ss CC), on ne voit pas les raisons pour lesquelles l'autorité tutélaire pourrait refuser son consentement. Il convient par conséquent de renoncer à cette condition. La question peut se poser de manière différente dans les cas où il s'agit de la paternité d'un homme résultant de son mariage avec la mère (art. 255 CC). Mais, dans ce cas, on peut supposer que la représentante légale ­ en général la mère, qui sait en principe qui est le père ­ est en mesure de défendre les intérêts de son enfant. Le présent projet renonce dès lors à prévoir le consentement de l'autorité tutélaire pour un tel cas. Toutefois, le laboratoire ou le médecin qui effectue l'analyse et qui doit donc obtenir le consentement des personnes concernées est tenu de requérir le consentement de l'autorité tutélaire selon l'art. 392, al. 2, CC lorsqu'il semble y avoir des conflits d'intérêts.

Selon l'al. 2 du présent projet, le laboratoire qui établit le profil d'ADN doit avant de procéder à l'analyse informer par écrit les personnes concernées sur les prescrip67

C. Hegnauer, Commentaire bernois, n. 69 ad art. 256 CC et n. 50 ad art. 261 CC.

6928

tions du code civil relatives à l'établissement de la filiation et les rendre attentives de manière générale et non par rapport au cas concret ­ aux éventuelles répercussions psychiques et sociales. Il leur remettra une feuille d'information mentionnant entre autres que la détermination de la filiation au moyen d'un profil d'ADN n'a en tant que telle pas d'effet sur la situation familiale, que celle-ci ne peut être modifiée que par une procédure spéciale susceptible de bouleverser les relations familiales et enfin que l'analyse peut avoir des répercussions psychiques. Par contre, les personnes concernées qui voudront avoir des informations juridiques sur leur cas particulier devront s'adresser à un spécialiste.

L'avant-projet de loi prévoyait que le laboratoire devait s'assurer que les personnes concernées puissent se prévaloir d'un intérêt digne de protection, notamment selon le droit de la filiation et qu'elles étaient informées des éventuelles conséquences psychosociales et juridiques de l'analyse. Cette solution a été critiquée, à juste titre, lors de la procédure de consultation, car elle exigerait des laboratoires des connaissances qui vont au-delà de leur compétence. C'est pourquoi le présent projet se limite à la remise d'une feuille d'information que les laboratoires peuvent faire établir en commun par des spécialistes.

Le laboratoire ne doit pas remettre lui-même la feuille d'information. Le médecin chargé de prélever l'échantillon peut également le faire. Mais le laboratoire est responsable du respect de cette obligation.

La décision de la conservation ou de la destruction des échantillons appartient à la personne concernée ou, si elle est incapable de discernement, à son représentant légal (al. 3).

2.7.6

Etablissement prénatal de la paternité (art. 34, al. 4)

A l'instar des analyses génétiques prénatales, les analyses prénatales visant à établir la paternité soulèvent des questions éthiques et sociales délicates. Des raisons très diverses peuvent amener une femme enceinte à vouloir savoir avant la naissance de l'enfant qui est le père de l'enfant. Ainsi, l'art. 263 CC autorise le père à reconnaître l'enfant avant la naissance68; l'enfant a dès lors, dès sa naissance, un lien juridique tant avec sa mère qu'avec son père. Dans ce cas, l'analyse permet à un homme d'écarter des doutes quant à sa paternité et à la femme qui ne veut pas avorter de prendre des décisions quant à sa vie future. Elle peut aussi être décisive dans la décision de se marier. L'établissement prénatal de la paternité permet, par ailleurs, à une femme victime d'un viol ou d'un inceste d'éviter un avortement s'il se révèle que l'enfant est celui de son partenaire et non de l'auteur du viol ou de l'inceste.

Plus délicate est le cas de la femme qui a eu des relations avec plusieurs hommes ­ que ce soit dans le cadre d'une rencontre de hasard ou d'une relation durable ­ et qui ne veut poursuivre la grossesse que si l'enfant est celui d'un homme déterminé.

Pour les uns, il s'agit là d'une sélection interdite au sens de l'art. 11 du présent 68

La reconnaissance crée un lien juridique entre l'enfant et l'homme qui le reconnaît.

Ils deviennent héritiers l'un de l'autre et ont un droit de visite réciproque. Le père a une obligation d'entretien. Il peut également, à certaines conditions, se voir attribuer l'autorité parentale.

6929

projet, étant donné qu'il n'existe aucune indication médicale. Ceux-ci font valoir au surplus qu'il existe depuis toujours des familles avec des enfants dont le père social et juridique n'est pas le père biologique et qu'elles ont généralement pu surmonter les difficultés que peut créer une telle situation. Par ailleurs, le prélèvement de l'échantillon sur l'enfant à naître, même réalisé par des mains expertes, présente quelques risques, de sorte que l'on peut se demander si un établissement prénatal de la paternité est justifié. Il faut toutefois aussi prendre en considération le fait que dans le cas d'une femme mariée, le mari de celle-ci est considéré de plein droit comme le père de l'enfant (art. 255 CC). La femme est ainsi confrontée au choix de vivre dans le mensonge en faisant croire à son mari que l'enfant est le sien ou de lui dire la vérité en prenant le risque de briser la famille. Dans le cas d'une femme non mariée, celle-ci peut ne pas vouloir qu'un enfant la lie toute sa vie à un homme qui lui rappelle des souvenirs douloureux. En refusant à la femme la possibilité d'établir la paternité avant la naissance de l'enfant, c'est prendre le risque qu'elle se décide à avorter.

Au vu des multiples et complexes problèmes posés par l'établissement prénatal de la paternité, le projet ­ comme l'avant-projet ­ renonce à l'interdire; il appartient finalement à la femme de décider, dans le respect des conditions légales. Ainsi, la femme doit être conseillée par un médecin (art. 34, al. 4). Le prélèvement de l'échantillon par le médecin et l'établissement du profil d'ADN par le laboratoire ne peuvent être réalisés que s'ils ont été précédés d'un entretien circonstancié, comme dans le cas d'une analyse génétique prénatale (art. 14 et 15). Les circonstances détermineront si le médecin procède lui-même à l'entretien ou s'il dirige la femme sur un centre de consultation en matière de grossesse. Il importe dans ce cas que l'entretien porte, de manière approfondie, en particulier sur les raisons pour lesquelles la femme veut établir la paternité de l'enfant avant la naissance, sur les risques liés au prélèvement de l'échantillon sur l'enfant à naître, sur les questions psychiques, sociales et juridiques liées à la grossesse et sur la possibilité d'obtenir une aide. L'entretien doit être consigné (art. 14,
al. 1, 2e phrase). Un éventuel avortement ne peut être effectué que dans le respect des conditions posées par les art. 119 ss CP69; la femme doit notamment invoquer qu'elle se trouve en situation de détresse.

2.8

Commission d'experts pour l'analyse génétique humaine (art. 35)

2.8.1

Institution et composition

La recherche systématique sur le patrimoine génétique en est encore à ses débuts (ch. 1.1). La concurrence qui règne dans ce domaine conduit les chercheurs à publier le plus rapidement possible les résultats intermédiaires. En outre, il faut s'attendre à ce que le séquençage complet du génome humain, qui est presque terminé, et le projet Human Proteomics livrent de nouvelles connaissances qui élargiront les possibilités de déterminer les caractéristiques génétiques qui, souvent en combinaison avec d'autres facteurs, sont à l'origine de maladies. C'est pourquoi il 69

RS 311.0; RO 2001 1338

6930

est important de charger des spécialistes de suivre de près le développement scientifique et pratique, d'émettre des recommandations et de signaler à temps les problèmes et les lacunes de la législation. La complexité des analyses génétiques actuelles (ch. 1.2.6) veut que l'on exige un standard de qualité élevé qui devra constamment être adapté aux nouvelles connaissances.

C'est pourquoi le projet prévoit à l'art. 35 l'institution par le Conseil fédéral d'une Commission d'experts pour l'analyse génétique humaine, en la forme d'une commission consultative (al. 1). Il s'agit d'une commission de spécialistes (al. 2) dont les membres seront choisis en fonction de leur compétence professionnelle dans le domaine de la génétique. Pour le surplus, il est renvoyé à l'ordonnance sur les commissions du 3 juin 199670.

Les questions d'éthique en rapport avec les analyses génétiques relèvent en principe de la compétence de la Commission nationale d'éthique dans le domaine de la médecine humaine71. Il va de soi que les deux commissions devront collaborer de manière étroite, car toute évaluation éthique suppose, au préalable, une évaluation scientifique approfondie72.

La commission s'acquittera de ses tâches de manière indépendante. En raison de son importance, ce principe figure expressément dans le projet (al. 3).

2.8.2

Tâches

La commission devra notamment s'acquitter des tâches suivantes:

70 71 72

­

Elaborer des normes pour le contrôle de la qualité des analyses génétiques en vue de l'octroi des autorisations et émettre des recommandations à l'intention du Conseil fédéral sur la nécessité de soumettre à autorisation ou d'exempter de l'obligation d'obtenir une autorisation certaines analyses génétiques (let. a; ch. 2.2.5). Ce faisant, la commission facilitera non seulement l'élaboration de l'ordonnance d'exécution du Conseil fédéral selon l'art. 8, al. 2, mais également l'octroi de l'autorisation et la surveillance dans chaque cas. La Commission d'experts pourra tenir compte des expériences faites par le Service d'accréditation suisse de l'Office fédéral de métrologie dans la fixation des standards de qualité. Elle devra, en outre, prendre en considération les travaux du «steering group» pour la «quality assurance and proficiency testing schemes for molecular genetic testing in OECD countries», auxquels la Suisse participe.

­

Donner son avis, à la demande de l'autorité fédérale compétente, sur les demandes d'autorisation des laboratoires et participer à des inspections selon l'art. 8, al. 1 et 2 (let. b). Cependant, la responsabilité pour l'octroi de l'autorisation et pour les inspections restera du ressort de l'autorité qui délivre l'autorisation. La Commission d'experts ou ses membres pourront toutefois, en cas de besoin, fournir des conseils.

RS 172.31 Ordonnance du 4 déc. 2000 sur la Commission nationale d'éthique dans le domaine de la médecine humaine; RS 814.903.

L'art. 2, al. 2, de l'ordonnance sur la Commission nationale d'éthique dans le domaine de la médecine humaine sera modifié en conséquence.

6931

­

Emettre des recommandations sur la possibilité de soustraire certaines trousses de diagnostic génétique in vitro à l'interdiction de les remettre à des fins autres que professionnelles ou commerciales selon l'art. 9 (let. c).

L'administration, qui doit faire les propositions au Conseil fédéral, n'a pas les compétences suffisantes pour se prononcer sur de telles questions. Il est dès lors indispensable qu'elle soit assistée par des experts hautement spécialisés.

­

Donner son avis sur des programmes de dépistage au sens de l'art. 12 (let. d). L'octroi d'une autorisation suppose un examen du programme de dépistage. Pour ce faire, l'autorité qui délivre l'autorisation pourra se baser sur l'avis de la Commission d'experts.

­

Emettre, si nécessaire, des recommandations sur la formation postgrade des médecins qui prescrivent des analyses génétiques présymptomatiques, des analyses génétiques prénatales ou des analyses visant à établir un planning familial selon l'art. 13, al. 2 (let. e). La formation postgrade des médecins est en principe du ressort de la FMH. Le rôle de la Commission n'est donc que subsidiaire. La FMH pourra toutefois demander à la Commission d'experts de collaborer au programme de formation. Si la Commission d'experts constate des lacunes, elle pourra agir indépendamment de la FMH.

­

Emettre des recommandations sur le conseil génétique selon les art. 14 et 15 et sur l'information en matière d'analyses prénatales effectuées dans le but d'évaluer un risque selon l'art. 16 (let. f). Ces recommandations n'ont pas seulement pour but de préciser les termes de la loi, mais également de fixer les exigences quant aux personnes chargées du conseil génétique ou de l'information en matière d'analyses prénatales effectuées dans le but d'évaluer un risque.

­

Donner, sur demande de l'autorité cantonale compétente, son avis en cas de requête de levée du secret professionnel selon l'art. 19, al. 3 (let. g). Cet avis sera l'un des éléments pris en compte lors de la pesée des intérêts selon l'art. 321, ch. 2, CP. La commission examinera dans quelle mesure les résultats d'une analyse ont des incidences sur la santé des parents de la personne concernée et si le fait de donner connaissance des résultats à ces parents permet de protéger leur santé.

­

Donner les attestations prévues pour les analyses génétiques effectuées dans le domaine du travail selon l'art. 22, let. d (let. h).

­

Emettre des recommandations sur l'établissement de profils d'ADN (let. i).

Cette tâche consiste aussi bien à établir un standard de qualité que des recommandations sur la manière de traiter les cas difficiles. La commission devra prendre en considération le fait que, selon les estimations de spécialistes, environ 5 % des enfants nés pendant un mariage ne sont pas les enfants du mari de la mère. Un profil d'ADN établi dans le cadre d'une procédure administrative selon l'art. 33 devrait se limiter à la comparaison des profils de la mère et de l'enfant.

6932

­

Suivre l'évolution scientifique et pratique dans le domaine des analyses génétiques, émettre des recommandations dans ce domaine et signaler les lacunes de la législation (let. j). Ce sont là des tâches de conseil politique. Les scientifiques auront ainsi la responsabilité de faire en sorte que des débats politiques sur des développements à venir puissent avoir lieu en temps voulu.

2.9

Dispositions pénales

2.9.1

En général

Un des principes essentiels régissant les analyses génétiques est le droit à l'autodétermination individuelle en matière d'information, c'est-à-dire le droit de décider en principe soi-même quand et dans quelles limites des caractéristiques génétiques peuvent être recherchées et communiquées. Sur le plan pénal, ce bien juridique est protégé d'une manière générale (art. 36) et en rapport avec des infractions déterminées; les domaines les plus sensibles dans ce contexte sont ceux du travail et de l'assurance (art. 39 et 40).

L'interdiction de toute discrimination à l'encontre d'une personne en raison de son patrimoine génétique constitue un des principes fondamentaux du projet. Toutefois, il serait inopportun de prévoir une sanction pénale, étant donné le manque de précision quant au comportement visé en tant qu'acte punissable. En outre, des mesures pénales ne constituent qu'une ultima ratio. En effet, les mesures civiles et administratives ainsi que les moyens de recours et les sanctions disciplinaires, par leur fonction de contrôle, peuvent assurer la protection des personnes concernées.

2.9.2

Analyses génétiques effectuées sans consentement (art. 36)

L'art. 5 dispose que, sous réserve d'exceptions prévues par des lois fédérales, une analyse génétique ne peut être effectuée qu'avec le consentement de la personne concernée ou, si elle est incapable de discernement, celui de son représentant légal.

Il exprime ainsi le droit à l'autodétermination individuelle en matière d'information de toute personne. L'art. 36 le garantit sur le plan pénal. Il est en effet important de protéger les personnes contre une analyse non consentie de leur patrimoine génétique. C'est pourquoi l'art. 36 punit de l'emprisonnement ou de l'amende quiconque, intentionnellement, prescrit ou effectue une analyse génétique sans que la personne concernée ait donné le consentement requis par le présent projet. Tombe également sous le coup de cette disposition le fait, par exemple, d'effectuer une analyse génétique présymptomatique aux fins de prévenir les maladies professionnelles et les accidents au sens de l'art. 22, sans respecter les limites fixées à l'art. 23, lequel dispose que l'analyse ne peut porter que sur la prédisposition génétique ayant un rapport avec la place de travail envisagée et qu'il est interdit de rechercher d'autres données génétiques. Une analyse effectuée dans le non-respect de cette règle est une analyse faite sans le consentement de la personne concernée et celui qui l'a effectuée est punissable en vertu de l'art. 36. Il en va de même si, lors de l'établissement d'un profil

6933

d'ADN, on recherche des informations sur la santé ou sur d'autres caractéristiques personnelles de la personne concernée, en violation de l'art. 31, al. 1.

2.9.3

Analyses génétiques non autorisées (art. 37)

Quiconque effectue intentionnellement une analyse génétique sur une tierce personne sans l'autorisation requise à l'art. 8 (ch. 2.2.5) sera puni, selon l'art. 37, des arrêts ou de l'amende. Une menace de la peine conformément à l'art. 292 CP pour insoumission à une décision de l'autorité n'est pas nécessaire.

Ne sont soumises à autorisation en vertu de l'art. 8, al. 1, en principe que les analyses cytogénétiques et moléculaires au sens de l'art. 3, let. b et c, qui sont des analyses particulièrement complexes. Mais la disposition s'applique également aux autres analyses génétiques ou aux analyses prénatales visant à évaluer un risque qui sont soumises à autorisation par le Conseil fédéral dans une ordonnance basée sur l'art. 8, al. 3, let. a, parce qu'elles doivent satisfaire aux mêmes exigences que les analyses cytogénétiques et moléculaires quant à la qualité et à l'interprétation des résultats.

Si un laboratoire effectue une analyse sans autorisation, les auteurs de l'infraction sont les personnes physiques et non le laboratoire. La personne qui sera traduite en justice est celle qui assume la responsabilité de l'analyse incriminée. Toutefois, la personne qui dirige le laboratoire est passible d'une peine non seulement si elle agit elle-même, mais également si elle a manqué à l'une de ses obligations, par exemple en ne vouant pas toute l'attention nécessaire au choix de ses auxiliaires ou en ne donnant pas à ceux-ci toutes les instructions nécessaires à l'accomplissement de leurs tâches.

2.9.4

Remise de trousses de diagnostic génétique in vitro (art. 38)

L'art. 38 renforce l'art. 9, al. 1 (ch. 2.1.6), au niveau pénal. Les trousses de diagnostic génétique in vitro ne devraient en principe pas être remises à tout un chacun, en raison des risques très importants d'une fausse interprétation des résultats, qui peut amener à des conclusions erronées et à une intervention dans la sphère privée de tiers. Il n'est toutefois pas exclu que ces risques soient éliminés dans le futur pour certaines analyses. C'est pourquoi l'art. 9, al. 2, autorise le Conseil fédéral à prévoir des exceptions si la trousse est utilisée sous contrôle médical, c'est-à-dire sous la surveillance d'un médecin, et si tout risque d'interprétation erronée des résultats est exclu. Cela pourrait, par exemple, être le cas d'un test destiné à évaluer la tolérance à un traitement. Il est à noter que si la remise d'une trousse a été autorisée à des fins d'usage personnel au sens de l'art. 9, al. 2 ­ remise licite ­, l'art. 38 ne s'applique pas à la personne qui l'utilise à cette fin, même si elle le fait sans contrôle médical.

On peut se demander toutefois dans quelle mesure c'est le rôle du droit pénal de protéger une personne contre ses propres actes. Une analyse génétique livre des informations importantes sur un individu et peut constituer pour celui-ci une aide, mais aussi une lourde charge. C'est pourquoi l'ordre juridique doit interdire le libre 6934

accès aux trousses de diagnostic génétique in vitro et garantir qu'elles soient utilisées uniquement par des médecins ou des laboratoires, le cas échéant, avec un conseil génétique (art. 14 et 15). Au surplus, la remise à tout un chacun de telles trousses permettrait à n'importe qui d'effectuer des analyses du patrimoine génétique de tiers, sans leur consentement ou contre leur gré. Ce risque en particulier exige une interdiction assortie d'une sanction pénale.

L'élément constitutif de l'art. 38 est la remise intentionnelle d'une trousse de diagnostic génétique in vitro à une personne pour une utilisation étrangère à son activité professionnelle ou commerciale. Par conséquent, la norme interdit la remise d'une telle trousse à une personne pour un usage personnel; cet usage peut consister dans l'analyse par la personne de son propre patrimoine génétique ou de celui d'un tiers. N'est dès lors pas visée par cette disposition la remise de trousses de diagnostic génétique in vitro à des intermédiaires, soit les personnes qui les revendent aux médecins et aux laboratoires.

Les peines prévues sont les arrêts ou l'amende. Lorsque l'activité punissable est exercée par métier elle constitue un délit (art. 38, al. 2). Il y a métier lorsque le temps consacré à l'activité délictueuse, les moyens utilisés, la fréquence des actes dans un laps de temps déterminé ainsi que les ressources visées et obtenues font de l'activité délictueuse une sorte de métier73.

2.9.5

Abus dans le domaine des rapports de travail (art. 39)

2.9.5.1

Protection dans le domaine des analyses présymptomatiques

L'art. 39 a pour but de protéger pénalement les candidats à un emploi ou les travailleurs contre une discrimination génétique dans le domaine des rapports de travail, c'est-à-dire dans les cas prévus par les art. 21 et 22. La personne concernée a un intérêt important à ne pas connaître ou à ne pas communiquer des caractéristiques personnelles qu'elle désire garder secrètes. En conséquence, le candidat à un emploi ou le travailleur doit en principe être protégé dans le domaine des analyses présymptomatiques. Ne sont pas concernées les anamnèses familiales et les analyses du phénotype. Ces dernières se limitent à l'examen des caractéristiques extérieures du candidat ou du travailleur et se basent uniquement sur la perception optique. N'est pas non plus concerné le diagnostic d'une maladie existante.

L'art. 39 a pour but de protéger le candidat ou le travailleur contre la pression du marché du travail qui pourrait l'amener à effectuer «de son propre chef» une analyse génétique présymptomatique ou à communiquer les résultats d'une telle analyse déjà effectuée à des fins médicales. On ne peut en effet pas exclure qu'un candidat se montre conciliant par crainte d'être défavorisé dans la sélection. La pression sociale exercée sur la personne concernée, qui peut avoir des répercussions sur d'autres personnes, doit être combattue par des moyens juridiques. C'est pourquoi le projet n'interdit pas seulement d'exiger une analyse génétique présymptomatique ou une analyse génétique ayant pour but de déterminer des caractéristiques personnelles qui 73

ATF 119 IV 132 (nouvelle jurisprudence).

6935

n'ont pas de rapport avec la santé, mais également d'exiger les résultats d'une analyse génétique présymptomatique déjà effectuée ou d'exiger ou d'utiliser les résultats d'une telle analyse dans le cadre d'un examen effectué par le médecin-conseil.

2.9.5.2

Interdiction d'exiger une analyse (let. a)

Dans le domaine du travail, l'ordre juridique a pour fonction d'empêcher des états de contrainte. Ce but devrait pouvoir être atteint en interdisant à l'employeur d'«exiger» une analyse génétique présymptomatique du candidat, du travailleur, ou du médecin-conseil. Pour lutter efficacement contre les abus, le médecin-conseil est punissable s'il «prescrit» intentionnellement une analyse en violation des art. 21 et 22, qu'il l'effectue lui-même ou qu'il charge un laboratoire de la réaliser. Les analyses génétiques présymptomatiques visant à prévenir les maladies professionnelles et les accidents professionnels ne peuvent être prescrites comme condition à un engagement ou au maintien à des rapports de travail qu'à de strictes conditions et par un médecin (art. 22). Ces analyses ne tombent pas sous le coup de l'interdiction pénale.

Il faut distinguer entre les prédispositions génétiques, sur lesquelles il est interdit d'exiger des informations, et le diagnostic de maladies existantes, qui est autorisé, que les maladies soient d'origine génétique ou qu'elles soient détectées par des analyses génétiques (cf. la définition large des analyses génétiques à l'art. 3, let. a).

Le diagnostic d'une anomalie du matériel génétique qui ne sert qu'à constater un état actuel anormal engendré par des causes externes est également permis; il ne révèle pas d'informations sur les dispositions génétiques. Il serait en effet absurde de ne pas pouvoir procéder à une analyse génétique dans le cas, par exemple, d'un travailleur qui a été en contact avec une matière cancérigène et qui a de ce fait subi un dommage de son patrimoine génétique.

2.9.5.3

Interdiction d'exiger ou d'utiliser des résultats (let. b)

Ni l'employeur ni son médecin-conseil ne peuvent exiger les résultats d'une analyse génétique présymptomatique déjà effectuée ou exiger ou utiliser les résultats d'une telle analyse dans le cadre d'un examen effectué par le médecin-conseil. Tombent également sous le coup de cette interdiction le cas où de telles données viennent, en violation de la loi, mais par hasard, à la connaissance de l'employeur ou de son médecin-conseil ainsi que le cas où la personne concernée communique d'elle-même les résultats. Dans les deux cas, il est interdit d'utiliser les données obtenues. Il est nécessaire d'interdire l'utilisation des résultats, sans quoi l'interdiction de les exiger pourrait être détournée par une communication «volontaire» des données génétiques.

Le candidat ou le travailleur n'est pas punissable en tant qu'auteur mais en tant qu'incitateur; dans ce cas, la tentative reste impunie, car l'acte principal ne constitue pas un crime (art. 24, al. 2, en rapport avec l'art. 9, al. 1, CP).

6936

2.9.6

Abus dans le domaine des assurances (art. 40)

2.9.6.1

En général

La connaissance des prédispositions génétiques d'un preneur d'assurance potentiel pose des problèmes avant tout au moment de la discussion du contrat. Une fois le contrat conclu, l'assureur ne peut exiger ni une analyse génétique ni la communication de données génétiques.

2.9.6.2

Interdiction d'exiger une analyse (let. a)

Selon l'art. 26, une institution d'assurance ne peut exiger préalablement à l'établissement d'un rapport d'assurance une analyse génétique présymptomatique (art. 3, let. d) ou une analyse génétique prénatale (art. 3, let. e). Ce principe n'exclut pas l'utilisation, dans le domaine du diagnostic postnatal, de méthodes génétiques ayant pour but de détecter des maladies existantes. Le preneur d'assurance ne doit cependant pas être forcé indirectement à communiquer, donc à connaître, ses prédispositions génétiques, qui constituent un domaine essentiel de sa personnalité, afin de pouvoir conclure un contrat.

L'art. 40, let. a, protège sur le plan pénal le preneur d'assurance, en prévoyant qu'il est interdit d'exiger comme condition préalable à l'établissement d'un rapport d'assurance une analyse génétique présymptomatique ou une analyse génétique prénatale. Sur le plan pénal, cette interdiction signifie qu'une institution d'assurance n'a pas le droit d'«exiger» de telles analyses et qu'un médecin-conseil ne peut pas les «prescrire» dans le cadre d'une évaluation médicale d'un risque. Ce dernier cas ne couvre pas seulement le mandat à un laboratoire, mais aussi, conformément au but de protection de la norme, la réalisation de ces analyses par le médecin-conseil lui-même.

2.9.6.3

Interdiction d'utiliser des résultats (let. b)

Les résultats d'analyses génétiques présymptomatiques, d'analyses génétiques prénatales ou d'analyses visant à établir un planning familial qui ont déjà été effectuées peuvent, sans aucun doute, constituer des éléments déterminants au sens de la LCA.

L'art. 27, al. 1, énumère limitativement les assurances (let. a à e) pour lesquelles une institution d'assurance ne peut exiger, en vue de l'établissement d'un rapport d'assurance, les résultats de telles analyses. Il est également interdit d'utiliser de telles données génétiques. Le respect de cette interdiction doit être garantie pénalement.

S'agissant de l'institution d'assurance, l'infraction consiste à «exiger» les résultats d'une analyse génétique présymptomatique ou d'une analyse génétique prénatale réalisées à des fins médicales, ou d'une analyse visant à établir un planning familial qui ont déjà été effectuées. Cependant, la protection contre les abus n'est totale que si l'interdiction d'«exiger» ou d'utiliser de tels résultats est étendue au médecin6937

conseil, dans le cadre d'une évaluation médicale d'un risque. En effet, en interdisant à une institution d'assurance ou à un médecin-conseil de prendre connaissance des résultats d'analyses déjà effectuées, on empêche une pression sociale consistant à amener des proposants à effectuer une analyse génétique dans le but d'obtenir des primes plus basses en cas de résultats négatifs.

Indépendamment de la protection pénale, le proposant est tenu de communiquer les atteintes à sa santé qui sont importantes pour la conclusion du contrat d'assurance, lorsqu'il se sait malade ou atteint des symptômes d'une maladie qui va se déclarer sous peu.

2.9.7

Autorités compétentes et droit pénal administratif (art. 41)

L'art. 41 rappelle, dans un souci de clarté, que la poursuite et le jugement des infractions à la présente loi sont du ressort des cantons (al. 1). Il prévoit, en outre, que les autorités de poursuite en matière pénale appliquent les art. 6, 7 et 15 de la loi fédérale sur le droit pénal administratif74.

2.10

Dispositions finales

2.10.1

Autorisation d'effectuer des analyses génétiques (art. 42)

Quiconque, au moment de l'entrée en vigueur de la présente loi, effectue déjà des analyses génétiques soumises à autorisation en vertu de celle-ci (art. 8; ch. 2.2.5) doit faire une demande d'autorisation à l'office fédéral compétent dans les trois mois qui suivent l'entrée en vigueur de la loi (al. 1). En attendant, elle peut continuer son activité. Par contre, la personne qui omet de demander l'autorisation devra suspendre son activité (al. 2).

La personne qui continuera d'effectuer, intentionnellement ou par négligence, des analyses sans autorisation sera passible des arrêts ou de l'amende en vertu de l'art. 37.

2.10.2

Dépistage (art. 43)

Un programme de dépistage en cours au moment de l'entrée en vigueur de la présente loi ne doit pas faire l'objet d'une demande d'autorisation. C'est le cas en particulier pour le screening des nouveaux-nés visant à détecter des maladies du métabolisme; il est pratiqué en Suisse depuis longtemps et il est au point.

74

FF 2002 180 et 181

6938

3

Effets de la loi

3.1

Effets sur l'état du personnel et conséquences financières

3.1.1

Effets sur l'état du personnel au niveau fédéral

Le projet de loi sur l'analyse génétique humaine aura une incidence sur l'effectif du personnel de la Confédération, laquelle ne pourra toutefois être clairement évaluée que dans la pratique.

L'autorité fédérale compétente devra délivrer les autorisations pour la pratique des analyses génétiques par un laboratoire ou un médecin (art. 8.) et pour les programmes de dépistage (art. 12). La charge supplémentaire de travail devrait nécessiter la création d'un poste pour un collaborateur scientifique à 100 % et augmenter les tâches de secrétariat de 50 %.

Le projet prévoit l'institution d'une Commission d'experts pour l'analyse génétique humaine (art. 35). Cette commission devra disposer d'un secrétariat.

Le Conseil fédéral pourra soumettre à autorisation, selon l'art. 8, al. 3, let. a, outre les analyses cytogénétiques et moléculaires, d'autres analyses génétiques ou des analyses prénatales visant à évaluer un risque. Il pourra également, selon l'art. 8, al. 3, let. b, décider quelles analyses génétiques peuvent être exceptées du régime d'autorisation. En outre, il devra édicter les dispositions d'exécution relatives à l'octroi à des laboratoires et des médecins de l'autorisation d'effectuer des analyses génétiques (art. 8, al. 2) et à l'octroi de l'autorisation d'effectuer des dépistages (art. 12, al. 4). Enfin, le Conseil fédéral peut prévoir des exceptions à l'interdiction prévue par l'art. 9, al. 1, de remettre des trousses de diagnostic génétique in vitro pour une utilisation pouvant être considérée comme étrangère à une activité professionnelle ou commerciale. Ces décisions devraient pouvoir être préparées par l'administration fédérale sans qu'il soit nécessaire d'augmenter le personnel.

3.1.2

Effets sur l'état du personnel au niveau cantonal

Selon l'art. 17, les cantons devront veiller à la mise sur pied d'offices d'information indépendants en matière d'analyses prénatales. Ils pourront créer ces offices en commun ou confier les tâches qui leur sont dévolues aux offices de consultation en matière de grossesse, ce qui leur évitera de devoir mettre en place de nouvelles structures. Le besoin en personnel est difficile à évaluer. Il dépend du nombre des demandes d'information et des demandes de servir d'intermédiaire avec les associations de parents d'enfants handicapés ou les groupes d'entraide. En outre, il convient de vérifier si les offices de consultation en matière de grossesse existants disposent des moyens et du personnel ayant des connaissances suffisantes en matière d'analyse prénatale pour assumer ces nouvelles tâches. Il convient toutefois de noter que les informations sur les analyses prénatales doivent être données uniquement de manière générale. Il est possible aussi de remettre des informations par écrit.

Enfin, les juges d'instruction et les tribunaux pénaux seront appelés à juger de nouveaux actes punissables (art. 36 à 40). Cela ne devrait toutefois pas avoir de grandes répercussions sur le personnel.

6939

3.1.3

Conséquences financières au niveau fédéral

Le projet a des conséquences financières pour la Confédération.

Il faut compter d'une part les indemnités des membres de la Commission d'experts pour l'analyse génétique humaine (art. 35) et d'autre part les frais de salaires pour le secrétariat, qui seront à la charge du département fédéral compétent. Bien que ces frais soient difficilement chiffrables, il conviendrait de prévoir, à l'instar d'autres commissions fédérales, un budget annuel de 150 000 francs, non compris les frais de salaires pour le secrétariat. Les moyens nécessaires seront accordés dans le cadre du budget et du plan financier du département fédéral compétent.

Enfin, l'autorité fédérale compétente qui délivrera les autorisations pour effectuer les analyses génétiques selon l'art. 8 ou les dépistages selon l'art. 12 doit prévoir un montant annuel d'environ 150 000 francs pour couvrir les frais des éventuels experts externes. Les autorisations seront toutefois délivrées contre émolument.

3.1.4

Conséquences financières au niveau cantonal

Les cantons devront assumer les frais engendrés par la mise sur pied d'offices d'information indépendants en matière d'analyse prénatale prévue par l'art. 17. Ils jouissent d'une grande liberté dans l'exécution de ce mandat. Les frais devraient rester dans des limites raisonnables, dans la mesure où il y a la possibilité de confier les nouvelles tâches aux offices de consultation en matière de grossesse.

3.2

Effets sur l'informatique

Le projet n'a pas de répercussions sur l'informatique.

3.3

Conséquences économiques

3.3.1

Effets sur l'assurance-maladie sociale

Le présent projet de loi fixe les exigences en matière de qualité des analyses, de conseil génétique et de protection de l'autonomie des personnes concernées. Pour l'instant, les effets financiers des nouvelles prescriptions sur l'assurance-maladie sociale devraient rester modestes.

Selon l'art. 10 du projet de loi, une analyse génétique dans le domaine médical peut être effectuée sur une personne uniquement: ­

à des fins prophylactiques ou thérapeutiques;

­

pour permettre d'établir un choix de vie, ou

­

pour permettre d'établir un planning familial.

S'agissant des analyses effectuées durant la grossesse, le projet de loi différencie entre les analyses génétiques prénatales (art. 3, let. f) et les analyses prénatales visant à évaluer un risque (art. 3, let. g). Ces dernières comprennent d'une part les analyses 6940

ultrasonographiques de routine et d'autre part les analyses biochimiques (le triple test effectué au cours du second trimestre de la grossesse; le nouveau test beta-hCG et PAPP-A [pregnancy associated plasma protein A], qui peut être effectué durant le premier trimestre de la grossesse et qui sera bientôt disponible).

Actuellement, l'assurance-maladie sociale rembourse les analyses génétiques et les analyses prénatales visant à évaluer un risque suivantes: Pendant la grossesse Les analyses génétiques effectuées durant une grossesse prises en charge par l'assurance-maladie sociale sont limitativement fixées à l'art. 13 de l'ordonnance du 2 novembre 1994 sur les prestations de l'assurance des soins75. Ce sont: ­

deux contrôles ultrasonographiques lors d'une grossesse normale et des contrôles supplémentaires selon l'évaluation clinique lors d'une grossesse à risque;

­

une amniocentèse ou un prélèvement des villosités choriales chez les femmes âgées de plus de 35 ans ou les femmes plus jeunes présentant un risque élevé d'avoir un enfant souffrant d'une anomalie chromosomique ou d'une malformation. En principe, ces analyses ­ invasives ­ sont précédées d'une analyse visant à évaluer un risque, à savoir une analyse biochimique.

Dans les deux sortes d'analyses, l'OPAS prévoit qu'elles doivent être précédées d'«un entretien approfondi qui doit être consigné». Ces entretiens sont en général pris en charge dans le cadre des tarifs cantonaux actuels. Ils le seront également dans le cadre des futurs tarifs médicaux applicables dans toute la Suisse (TARMED). Par contre, le triple test chez les femmes en-dessous de 35 ans dont l'enfant ne présente pas un risque accru d'anomalie chromosomique ou de malformation n'est pas remboursé. Le nouveau test à effectuer pendant le premier trimestre n'est pas pris en charge actuellement.

Une participation financière des assureurs-maladie pour les offices d'information en matière d'analyse prénatale (art. 17) est exclue selon l'actuelle loi fédérale sur l'assurance-maladie76 (LAMal). Ces offices ne fournissent pas des prestations au sens de l'OPAS.

Après la naissance, pendant l'enfance et à l'âge adulte Selon la LAMal et l'OPAS, l'assurance-maladie obligatoire prend en charge actuellement toutes les analyses génétiques nécessaires pour diagnostiquer ou traiter une maladie déclarée (présence de symptômes ou autres éléments concrets et fondés faisant soupçonner une maladie), qui sont prévues dans la liste des analyses. Ces analyses ne sont pas soumises au conseil génétique prévu par le présent projet de loi (art. 14). Les informations données à la personne concernée sont celles que doit fournir normalement le médecin.

Les analyses génétiques visant à établir un planning familial et les analyses génétiques présymptomatiques visant à établir un choix de vie ne constituent pas une prestation prise en charge par l'assurance-maladie obligatoire. Par contre, les analyses génétiques présymptomatiques qui permettent d'entreprendre un traitement pro75 76

RS 832.112.31 RS 832.10

6941

phylactique ou précoce peuvent tomber sous le coup de l'art. 26 LAMal relatif à la prise en charge des mesures de prévention par l'assurance-maladie obligatoire. Les mesures prises en charge par l'assurance-maladie sont énumérées de manière exhaustive à l'art. 12 de l'OPAS. La seule analyse du présent projet figurant dans cette liste est le screening portant sur des maladies du métabolisme chez les nouveauxnés. Mais ce dépistage est effectué de manière systématique depuis de nombreuses années. Le présent projet ne devrait dès lors pas engendrer des coûts supplémentaires pour cette analyse.

D'autres analyses génétiques présymptomatiques pourront être prises en charge selon l'OPAS lorsque la preuve aura été apportée qu'elles sont efficaces (le fait de détecter une prédisposition à une maladie permet de prendre des mesures préventives permettant d'empêcher sa survenance ou d'entreprendre un traitement précoce), appropriées (ses avantages sont plus importants que ses désavantages potentiels, p. ex. en cas de faux positifs) et économiques (les coûts relatifs à la détection précoce sont dans un rapport raisonnable avec des méthodes traditionnelles).

Ainsi, le présent projet ne devrait actuellement pas engendrer des coûts supplémentaires importants à la charge de l'assurance-maladie sociale. D'éventuelles modifications des coûts ou d'autres prises en charge des coûts dans le domaine des analyses génétiques devraient être décidées par l'autorité compétente à cet effet (le Département fédéral de l'intérieur après avoir entendu la commission pertinente). Mais il est probable que les coûts de l'assurance-maladie sociale grimperont fortement avec le développement des analyses génétiques et les conseils génétiques. La cause ne tient toutefois pas à la loi elle-même, mais à l'évolution technique qui permettra dans les années à venir de développer de nouvelles méthodes de diagnostic.

3.3.2

Conséquences économiques dans le domaine de l'assurance privée

En Suisse, les assureurs privés ont adopté, en 1995, un moratoire sur les analyses génétiques. Ils s'obligent ainsi à ne pas exiger des preneurs d'assurance des analyses génétiques ni à demander les résultats de telles analyses déjà effectuées. Le moratoire a d'abord été conclu pour trois ans; par la suite, il a été prolongé jusqu'à l'entrée en vigueur de la loi sur l'analyse génétique humaine.

Actuellement, il existe encore peu d'analyses génétiques présymptomatiques. En outre, leur signification est très limitée pour les assurances privées, qui sont basées sur l'évaluation d'un risque. Toutefois, les progrès de la génétique peuvent changer cette situation et permettre une meilleure évaluation des risques. Par ailleurs, il faut tenir compte du fait que la plus grande partie des maladies sont multifactorielles et que la prédisposition génétique ne constitue qu'un facteur parmi d'autres pouvant être à l'origine d'une maladie. Il est également possible que dans le futur d'autres facteurs que la prédisposition génétique joueront un rôle décisif dans l'évaluation des risques. En outre, les progrès réalisés dans les moyens de diagnostiquer une maladie font espérer la découverte de nouvelles thérapies pour des maladies incurables jusqu'ici ou l'amélioration de mesures préventives.

L'évaluation des conséquences économiques entraînées par le projet dans le domaine des assurances (art. 26 à 28) dépend également du développement du droit international et des législations d'autres Etats. La Convention européenne des droits 6942

de l'Homme et de la biomédecine interdit d'effectuer des analyses génétiques présymptomatiques dans l'intérêt des institutions d'assurance. Jusqu'à ce jour, 13 Etats ont ratifié la Convention, sans faire de réserve sur cette question. Prévoir cette même interdiction en droit suisse ne devrait dès lors pas avoir de conséquences économiques pour les assureurs privés, notamment pas dans le domaine de la concurrence.

Un preneur d'assurance qui ne connaît pas ses prédispositions génétiques peut difficilement abuser un assureur.

S'agissant de la possibilité de demander les résultats d'une analyse déjà effectuée, il convient de noter que les rares pays qui ont légiféré dans le domaine de la génétique ont interdit aux assureurs d'exiger de tels résultats, à l'exception des Pays-Bas (ch. 1.5.2). Le présent projet essaie de prendre en compte les divers intérêts en présence, en interdisant de demander les résultats d'une analyse déjà effectuée pour des assurances jouant un rôle important dans l'existence des personnes ainsi que pour une grande partie des assurances sur la vie et des assurances-invalidité privées.

S'agissant des autres assurances portant sur des sommes d'assurance très élevées, le projet se limite à des dispositions garantissant la protection des données et prévoit que seuls les résultats présentant une réelle signification pour le calcul des primes peuvent être pris en considération. A long terme, les limitations légales apportées à l'évaluation du risque peuvent entraîner une augmentation des primes.

3.3.3

Conséquences économiques dans le domaine du travail

Il est du devoir d'un Etat de veiller à ce que les travailleurs ne subissent pas de discrimination sur le marché du travail. L'interdiction de principe faite à un employeur et à son médecin-conseil d'obtenir des informations sur les prédispositions génétiques d'un candidat ou d'un travailleur à une maladie avant l'apparition de symptômes cliniques (art. 21) n'est, en général, que la concrétisation des principes juridiques généraux existants.

Les analyses génétiques présymptomatiques peuvent être utilisées dans le domaine de la médecine du travail. Toutefois, en soumettant leur utilisation à des conditions strictes (art. 22 à 25), le projet empêche d'y recourir sans véritable justification.

3.3.4

Conséquences économiques pour les laboratoires

Les laboratoires qui devront, à l'avenir, requérir une autorisation selon l'art. 8 du présent projet, vont devoir investir en temps et en argent. Toutefois, cet investissement se justifie, car il garantit la protection des personnes concernées. L'obligation d'une autorisation tient compte des mêmes considérations qui ont prévalu à l'obligation d'une autorisation pour les laboratoires qui effectuent des analyses en vue de diagnostiquer les maladies transmissibles au sens de l'art. 5, al. 1bis, de la loi sur les épidémies77. Les analyses cytogénétiques et moléculaires requièrent des exigences élevées et elles n'ont dès lors un sens que si elles sont effectuées conformément à un standard de qualité élevé. Aujourd'hui déjà, certains laboratoires se soumettent de 77

RS 818.101

6943

plein gré à l'accréditation octroyée par le Service d'accréditation suisse de l'Office fédéral de la métrologie, ce qui constitue un avantage concurrentiel (cf. également ch. 2.2.5, avant-dernier alinéa). Ces laboratoires devraient ainsi remplir une grande partie des conditions nécessaires pour obtenir une autorisation.

3.3.5

Conséquences sur la liberté économique

La liberté économique peut être restreinte si cette restriction est justifiée par un intérêt public ou par la protection d'un droit fondamental d'autrui. En interdisant de remettre une trousse de diagnostic génétique in vitro à toute personne pour une utilisation pouvant être considérée comme étrangère à son activité professionnelle ou commerciale, l'art. 9 du projet restreint la liberté économique des producteurs et des fournisseurs de ces trousses. Mais cette restriction est justifiée par le fait qu'elle vise à protéger les personnes contre les risques que peut représenter l'usage sans contrôle de trousses de diagnostic génétique in vitro.

3.4

Nécessité d'une intervention étatique

Le présent projet est élaboré en exécution du mandat donné par l'art. 119 Cst.

4

Programme de la législature

Le projet est mentionné dans le rapport du 1er mars 2000 du Conseil fédéral sur le programme de la législature 1999­2003 (Annexe 2, section 3.1 Sécurité sociale; santé publique, Objets des Grandes lignes)78.

5

Bases légales

5.1

Constitutionnalité

Le présent projet se fonde sur les bases constitutionnelles suivantes: art. 98, al. 3, Cst. sur les assurances privées, art. 110, al. 1, Cst. sur la protection des travailleurs, art. 113, al. 1, Cst. sur la prévoyance professionnelle, art. 117, al. 1, Cst. sur l'assurance-maladie et l'assurance-accidents, art. 119, al. 2, let. f, Cst. sur la protection de l'être humain l'être humain contre les abus en matière de procréation médicalement assistée et de génie génétique, l'art. 122, al. 1, Cst. sur le droit civil et l'art. 123, al. 1, Cst. sur le droit pénal.

78

FF 2000 III 2168 2229

6944

5.2

Délégation de compétences législatives

Le présent projet délègue au Conseil fédéral les compétences législatives suivantes: ­

désigner l'autorité fédérale compétente, régler les conditions et la procédure d'octroi de l'autorisation pour effectuer des analyses cytogénétiques ou moléculaires, définir les obligations incombant au titulaire de l'autorisation, régler la surveillance et prévoir notamment la possibilité d'effectuer des inspections non annoncées et fixer le montant des émoluments (art. 8, al. 2);

­

fixer les conditions supplémentaires pour l'octroi de l'autorisation d'effectuer des dépistages, désigner l'autorité fédérale compétente, régler la procédure d'octroi de l'autorisation et la surveillance, et fixer le montant des émoluments (art. 12, al. 4).

6

Relation avec le droit européen et travaux en vue d'une harmonisation internationale

6.1

Conseil de l'Europe

Le Comité des Ministres du Conseil de l'Europe a adopté plusieurs recommandations se rapportant au domaine de la génétique79.

Le 4 avril 1997, a été ouverte à la signature et à la ratification, à Oviedo (Espagne), la Convention pour la protection des droits de l'Homme et de la dignité de l'être humain à l'égard des applications de la biologie et de la médecine (Convention sur les droits de l'Homme et la biomédecine). Ratifiée par cinq Etats, la Convention est entrée en vigueur le 1er décembre 1999. La Suisse l'a signée le 7 mai 1999. Le message relatif à la ratification a été soumis au Parlement en 200180.

La Convention est une réglementation-cadre qui prévoit des principes obligatoires pour les Etats qui la ratifient. Les différents domaines traités seront réglés en détail dans des protocoles additionnels81. Celui qui s'appliquera à la génétique est en préparation.

La Convention contient un chapitre sur le génome humain (art. 11 à 14), qui fixe les principes suivants. Toute forme de discrimination à l'encontre d'une personne en raison de son patrimoine génétique est interdite sans exception. Des analyses pré79

80 81

Recommandation R (90) 13 du 21 juin 1990 sur le dépistage génétique anténatal, le diagnostic génétique anténatal et le conseil génétique y relatif; Recommandation R (92) 1 du 10 fév. 1992 sur l'utilisation des analyses de l'acide désoxyribonucléique (ADN) dans le cadre du système de justice pénale; Recommandation R (92) 3 du 10 fév. 1992 sur les tests et le dépistage génétiques à des fins médicales; Recommandation R (97) 5 du 13 fév. 1997 relative à la protection des données médicales.

FF 2002 271 ss Le Protocole additionnel du 12 janv. 1998 portant interdiction du clonage d'êtres humains est entré en vigueur le 1er mars 2001. La Suisse l'a signé le 7 mai 1999. Il a été proposé au Parlement de le ratifier en même temps que la Convention sur les droits de l'Homme et la biomédecine. Le protocole additionnel relatif à la transplantation d'organes et de tissus d'origine humaine a été ouvert à la signature le 24 janv. 2002.

La Suisse l'a signé le 11 juil. 2002.

6945

symptomatiques ne peuvent être effectuées qu'à des fins médicales ou de recherche médicale et à la condition qu'elles soient précédées d'un conseil génétique approprié. Il est en principe interdit d'exiger une analyse présymptomatique comme condition préalable à l'engagement d'un travailleur, même avec le consentement de celui-ci; par contre, une telle analyse est admissible lorsque les conditions de travail ­ malgré les mesures de sécurité à prendre prioritairement sur la place de travail ­ pourraient avoir des conséquences préjudiciables pour la santé d'une personne en raison de sa prédisposition génétique ou lorsqu'il s'agit de protéger une tierce personne ou l'environnement. L'art. 26 de la Convention permet de restreindre les dispositions prévues dès lors qu'il s'agit d'une mesure nécessaire, dans une société démocratique, à la sûreté publique, à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé publique ou à la protection des droits et libertés d'autrui. Un assureur n'est pas en droit de demander une analyse présymptomatique comme condition préalable à la conclusion ou à la modification d'un contrat d'assurance. Par contre, la Convention ne règle pas la communication des résultats d'une analyse génétique à des tiers. L'établissement de profils d'ADN visant à déterminer la filiation ou l'identité d'une personne est permis, même sans le consentement de la personne concernée (art. 5 ss et 26 de la Convention).

Le présent projet est en accord avec la Convention sur les droits de l'Homme et la biomédecine. On peut toutefois se demander si l'art. 10 est compatible avec l'art. 12 de la Convention. Selon l'al. 1 de l'art. 10, une analyse génétique peut être effectuée non seulement à des fins prophylactiques ou thérapeutiques ou pour permettre d'établir un planning familial, mais également pour permettre d'établir un choix de vie. La Convention, elle, n'autorise les analyses génétiques présymptomatiques qu'à des fins médicales, sans préciser toutefois ce que recouvre cette notion. Etant donné que selon l'Organisation Mondiale de la Santé (OMS), la santé doit être définie non seulement comme un bien-être physique, mais aussi psychique et social, on peut en conclure que l'indication relative au choix de vie est admise par la Convention. Une analyse présymptomatique effectuée pour
dissiper des craintes ou pour orienter le choix d'une profession en fonction d'une maladie qui se déclarera dans le futur peut également être considérée comme réalisée à des fins médicales.

En raison de la portée des analyses génétiques présymptomatiques, le législateur doit prévoir des mesures spéciales pour garantir le droit à une personne incapable de discernement à se déterminer de manière autonome. C'est pourquoi l'art. 10, al. 2, 1re phrase, du présent projet prévoit, en accord avec l'art. 6, al. 1, de la Convention que le représentant légal ne peut consentir à la réalisation d'une analyse génétique sur une personne incapable de discernement que si la protection de sa santé l'exige.

La notion de santé doit être comprise également dans un sens large, telle qu'elle est définie par l'organisation Mondiale de la Santé; elle n'englobe dès lors pas seulement le bien-être physique, mais également le bien-être psychique et social. Exceptionnellement, le représentant légal peut, selon l'art. 10, al. 2, 2e phrase, du présent projet consentir à une analyse s'il n'existe pas d'autre moyen de détecter une grave maladie héréditaire au sein de la famille. Il s'agit d'un état de nécessité qui, en vertu des devoirs réciproques découlant du droit de la famille (art. 272 CC), exige l'acceptation de la réalisation de l'analyse. Ce cas devrait être couvert par l'art. 26 de la Convention. La condition selon laquelle l'atteinte à la personne incapable de discernement doit être minime correspond à l'art. 17, al. 2, let. ii, de la Convention relatif à la recherche sur une personne incapable de discernement sans bénéfice réel et direct pour celle-ci.

6946

6.2

Union européenne

Le domaine de la santé relève en principe de la compétence des Etats membres de l'Union européenne. L'action de la Communauté porte sur l'amélioration de la santé publique, la prévention des maladies et des affections humaines et des causes de danger pour la santé humaine; la Communauté encourage en outre la coopération entre les Etats membres ainsi qu'avec les pays tiers et les organisations internationales dans ces domaines (art. 152 du Traité instituant la Communauté européenne, ci-après Traité CE). La Communauté encourage également l'action des Etats membres dans les domaines de la recherche et du développement technologique (art. 163 ss Traité CE).

La biomédecine en tant que telle n'est pas réglée dans le Traité CE. Mais plusieurs résolutions ont été adoptées dans ce domaine, dans le cadre du droit communautaire dérivé, comme la directive du 27 octobre 1998 relative aux dispositifs médicaux de diagnostic in vitro82. Cette directive contient des normes harmonisées dans les domaines de la sécurité, de la protection de la santé, des caractéristiques des prestations et de la procédure d'autorisation pour la mise sur le marché ou la mise en service de dispositifs médicaux de diagnostic in vitro. Il est ainsi interdit aux Etats membres de faire obstacle à la mise sur le marché ou à la mise en service de produits tombant sous le coup de cette directive. La directive ne prévoit cependant aucune disposition sur la remise des dispositifs après leur mise sur le marché ou leur mise en service. Les Etats membres peuvent toutefois prévoir des restrictions dans le but de protéger la vie humaine et la santé publique (art. 30 Traité CE). L'interdiction prévue à l'art. 9 du présent projet de remettre à une personne une trousse de diagnostic génétique in vitro pour une utilisation pouvant être considérée comme étrangère à son activité professionnelle ou commerciale est ainsi conforme au droit européen. Pour le surplus, la directive reprend les principes fixés par la Convention sur les droits de l'Homme et la biomédecine pour en faire un standard minimum pour les Etats de la Communauté en ce qui concerne le prélèvement, la collecte et l'utilisation de tissus d'origine humaine83.

En outre, une directive relative à la protection juridique des inventions biotechnologiques84 a été adoptée le 6 juillet 1998. Celle-ci
prescrit que le corps humain, aux différents stades de sa constitution et de son développement, ainsi que la simple découverte d'un de ses éléments, y compris la séquence ou la séquence partielle d'un gène, ne peuvent constituer des inventions brevetables et que les inventions dont l'exploitation commerciale serait contraire à l'ordre public ou aux bonnes moeurs, comme les procédés de clonage des êtres humains ou les procédés de modification de l'identité génétique germinale de l'être humain, sont également exclues de la brevetabilité85.

82

83 84

85

Directive 98/79/CE du Parlement européen et du Conseil du 27 oct. 1998 relative aux dispositifs médicaux de diagnostic in vitro, JO L 331 du 7 déc. 1998, p. 1 ss; cf. également la décision 2002/364/CE portant spécifications techniques communes des dispositifs médicaux de diagnostic in vitro, prise par la Commission le 7 mai 2002, JO L 131 du 16 mai 2002, p. 17 ss.

Art. 1, al. 4, de la directive 98/79/CE.

Directive 98/44/CE du Parlement européen et du Conseil du 6 juil. 1998 relative à la protection juridique des inventions biotechnologiques (JO L 213 du 30 juil. 1998, p. 13 ss).

Art. 5 s. de la directive 98/44 CE.

6947

Outre ces documents à caractère contraignant, le Parlement européen a adopté dans le domaine de la biomédecine encore plusieurs résolutions à caractère non contraignant86. Enfin, la Charte des droits fondamentaux de l'Union européenne proclamée le 9 décembre 2000 pose également divers principes dans le domaine de la médecine et de la biologie, tels que le principe du libre consentement à une intervention médicale, l'interdiction de pratiques eugéniques, l'interdiction d'une utilisation commerciale du corps humain ou d'une partie de celui-ci et l'interdiction du clonage reproductif d'êtres humains87. La Charte n'est pas contraignante, mais elle inspirera la jurisprudence et les décisions administratives des organes de l'Union européenne.

En résumé, l'Union européenne a fixé, dans le domaine de la biomédecine, des principes généraux; elle a également adopté plusieurs réglementations détaillées et contraignantes dans des domaines particuliers. Jusqu'à ce jour, elle n'a toutefois pas adopté de directive ou de résolution sur les analyses génétiques effectuées sur l'être humain.

Il convient encore de signaler qu'il existe depuis 1991 un European Group on Ethics in Science and New Technologies, EGE (auparavant intitulé Group of Advisers on the Ethical Implications of Biotechnology, GAEIB). La tâche principale de cette «commission d'éthique» est de conseiller la Commission européenne dans les questions éthiques touchant les domaines des sciences naturelles et des nouvelles technologies.

6.3

Nations Unies (ONU) et Organisation de coopération et de développement économique (OCDE)

L'Organisation des Nations Unies pour l'éducation, la science et la culture (UNESCO) a, elle aussi, publié un certain nombre de documents relatifs au génome humain. On mentionnera en particulier la Déclaration universelle sur le génome humain, adoptée le 11 novembre 1997, qui a pour but d'assurer la liberté de la recherche en génétique et de ses applications, dans le respect des droits et libertés fondamentaux. Ce document ne contient toutefois aucune norme internationale obligatoire.

L'Organisation de coopération et de développement économique (OCDE) finance un «steering group» pour la «quality assurance and proficiency schemes for molecular genetic testing in OECD countries». La Suisse est représentée au sein de ce groupe par l'intermédiaire de l'Office fédéral de l'éducation et de la science.

86

87

Par exemple la résolution du 16 mars 1989 sur les problèmes éthiques et juridiques de la manipulation génétique, JO no C 96 du 17 avril 1989, p. 165; la résolution du 16 mars 1989 sur la fécondation artificielle «in vivo» et «in vitro», JO no C 96 du 17 avril 1989, p. 171; la résolution du 28 oct. 1993 sur le clonage de l'embryon humain, JO no C 315 du 22 nov. 1993, p. 224; la résolution du 12 mars 1997 sur le clonage, JO no C 115 du 14 avril 1997, p. 92; la résolution du 15 janv. 1998 sur le clonage humain, JO no C 34 du 2 fév. 1998, p. 164.

Art. 3, al. 2, de la Charte des droits fondamentaux.

6948

Annexe 1

Troubles possibles de la biosynthèse des protéines Gène



Perte partielle ou complète (Délétion)

Transcription



Régulation erronée (mutation dans le promoteur)

Epissage de l'ARN



Epissage erroné

Stabilité de l'ARNm



Mutation de la queue Poly-A

Traduction



Codon stop prématuré

Produit protéique primaire



Changement dans la séquence d'acides aminés

Transformation en protéine fonctionnelle



Changement dans la séquence d'acides aminés

Transport de la protéine fonctionelle



Changement dans la séquence d'acides aminés

6949

Annexe 2 Fig. 2 Causes de maladies humaines

Prédispositions

C B

A Influences du milieu Influences internes supplémentaires: par ex. l'âge Exemples:

Hémophilie, Ostéogénèse imparfaite Dystrophie musculaire de Duchenne

Légende:

6950

Pied-bot, Sténose du pylore S S

Diabète, Ulcère gastrique

Tuberculose Scorbut

pina bifida, pondylarthrite ankylosante

A

Maladies héréditaires (Mutations géniques et chromosomiques)

B

Maladies à causes multifactorielles chromosomiques

C

Carences alimentaires, certaines maladies infectieuses, accident

Annexe 3

Maladies héréditaires, caractéristiques et diagnostic Catégories Caractéristiques [Les chiffres entre parenthèses indiquent le pourcent des nouveaux-nés concernés]

Diagnostic génétique

1. Maladies ­ Analyse familiale ­ Mutations spontanées chromosomiques (arbre généalogique) dans la plupart des cas (anomalies ­ Examens cliniques** (effet de l'âge maternel) chromosomiques) ­ En principe, pas d'aug­ Analyses cytogénétiques [~5 ]* mentation significative du risque pour les membres de la famille, par ex. frères et soeurs ­ Dans les formes familiales, pas de schéma de transmission héréditaire clair 2. Microaneu­ Analyse familiale ­ Symptômes cliniques ploidies: très spécifiques (en général: (arbre généalogique) ­ petites délétions retard mental, malforma­ Examens cliniques** ou duplications ­ Analyses cytogénétiques tions, dysmorphies) (> 4000 Kb) et moléculaires (y comdifficilement ou pris l' hybridation in situ pas détectables fluorescente [FISH]) au microscope optique et responsables de la perte ou du gain de plusieurs gènes [rare] 3. Maladies héréditaires monogéniques (= mutations affectant un seul gène) [> 1 %]*

­ Variées ­ Schéma de transmission héréditaire clair et risques génétiques pour les membres de la famille ­ Taux élevé de mutations spontanées dans les maladies autosomiques dominantes et dans les maladies récessives liées à l' X

­ Analyse familiale (arbre généalogique) ­ Examens cliniques** ­ Tests biochimiques/ enzymatiques ­ Analyses génétiques moléculaires

6951

Catégories Caractéristiques [Les chiffres entre parenthèses indiquent le pourcent des nouveaux-nés concernés]

Diagnostic génétique

4. Maladies multifactorielles (fréquence largement supérieure à 2 %)*

­ Affections fréquentes (maladies des sociétés d'abondance, malformations, tumeurs, maladies mentales endogènes) ­ Pas de schéma de transmission héréditaire clair, d'où valeurs de risque déterminées de manière empirique ­ En général, risque de récurrence faible (2­5 %) ou moyen

­ Analyse familiale (arbre généalogique) ­ Examens cliniques** ­ Tests biochimiques ­ Analyses génétiques moléculaires ­ Autres examens

5. Maladies mitochondriales

­ Analyse familiale ­ Centaines de mitochon(arbre généalogique) dries dans le cytoplasme ­ Examens cliniques** d'une cellule ­ Environ 10 copies d'ADN ­ Analyses génétiques moléculaires circulaire par mitochondrie ­ Transmission héréditaire par la mère ­ ADN mitochondrial (mt): taux de mutations élevé par rapport à l'ADN du noyau ­ Hétéroplasmie (ADNmt normal et muté dans la même cellule) ­ Effets des mutations de l'ADNmt dépendant du besoin d'énergie du tissu (système nerveux central, coeur, musculature du squelette, rein, glandes endocrines)

* **

Les pourcents varient légèrement d'une étude à l'autre selon l'ampleur et le lieu de la recherche et selon les critères d'évaluation appliqués.

Les examens cliniques comprennent l'anamnèse, le statut clinique et les examens complémentaires (radiographie et examens de laboratoire conventionnels par exemple).

6952

Table des matières Condensé

6842

1 Partie générale 1.1 Introduction 1.2 Fondements médicaux des analyses génétiques 1.2.1 Notions de génétique 1.2.2 Mutations chromosomiques et mutations géniques 1.2.3 Contribution de la génétique moléculaire à la compréhension actuelle des mutations géniques 1.2.4 Maladies génétiques, maladies multifactorielles et médecine prédictive 1.2.5 Avènement des analyses génétiques médicales 1.2.6 Valeur diagnostique et fiabilité des analyses génétiques 1.2.7 Nouveaux procédés de diagnostic médico-génétiques 1.2.8 Développements de la médecine moléculaire 1.3 Directives de l'Académie Suisse des Sciences Médicales (ASSM) concernant les examens génétiques sur l'homme 1.3.1 Portée 1.3.2 Contenu 1.4 Genèse du projet de loi 1.4.1 Art. 119, al. 2, let. f, de la Constitution fédérale 1.4.2 Programme relatif à la législation d'exécution 1.4.3 Avant-projet de loi de 1998 1.4.3.1 Travaux de la commission d'experts 1.4.3.2 Propositions de réglementation 1.4.4 Résultats de la procédure de consultation 1.4.4.1 En général 1.4.4.2 Appréciation générale de l'avant-projet 1.4.4.3 Propositions particulières dans les différents domaines 1.4.5 Remaniement de l'avant-projet par le Département fédéral de justice et police 1.5 Aperçu de droit comparé 1.5.1 Remarques préliminaires 1.5.2 Domaines particuliers

6844 6844 6846 6846 6848

2 Partie spéciale: Commentaire du projet 2.1 Champ d'application, but et définitions 2.1.1 Champ d'application (art. 1) 2.1.2 But (art. 2) 2.1.3 Définitions (art. 3) 2.2 Dispositions générales applicables aux analyses génétiques 2.2.1 Interdiction de discriminer (art. 4 ) 2.2.2 Consentement (art. 5) 2.2.3 Droit de ne pas être informé (art. 6) 2.2.4 Protection des données génétiques (art. 7)

6849 6850 6850 6851 6853 6853 6854 6854 6854 6856 6856 6857 6857 6857 6858 6860 6860 6860 6860 6862 6863 6863 6864 6867 6867 6867 6868 6868 6876 6876 6877 6878 6879 6953

2.2.5 Autorisation d'effectuer des analyses génétiques (art. 8) 6880 2.2.6 Trousse de diagnostic génétique in vitro (art. 9) 6883 2.3 Analyses génétiques dans le domaine médical 6884 2.3.1 Introduction 6884 2.3.2 Analyses génétiques effectuées sur des personnes (art. 10) 6886 2.3.3 Analyses prénatales (art. 11) 6889 2.3.4 Dépistages (art. 12) 6890 2.3.5 Droit de prescrire une analyse génétique (art. 13) 6892 2.3.6 Conseil génétique en général (art. 14) 6893 2.3.7 Conseil génétique en matière d'analyses génétiques prénatales (art. 15) 6896 2.3.8 Information en matière d'analyses prénatales visant à évaluer un risque (art. 16) 6897 2.3.9 Offices d'information en matière d'analyse prénatale (art. 17) 6897 2.3.10 Droit de décider de la personne concernée (art. 18) 6898 2.3.11 Communication de données génétiques (art. 19) 6900 2.3.12 Réutilisation du matériel biologique (art. 20) 6901 2.4 Analyses génétiques dans le domaine des rapports de travail 6902 2.4.1 Situation initiale sur le plan législatif 6902 2.4.2 Médecine du travail en tant que spécialité 6904 2.4.3 Analyses génétiques présymptomatiques dans le domaine du travail 6905 2.4.4 Diagnostic de maladies existantes par des analyses génétiques 6908 2.4.5 Commentaire des articles 6908 2.4.5.1 Principe (art. 21) 6908 2.4.5.2 Exceptions autorisées pour les analyses génétiques présymptomatiques visant à prévenir les maladies professionnelles et les accidents (art. 22) 6909 2.4.5.3 Exécution de l'analyse (art. 23) 6911 2.4.5.4 Communication des résultats de l'analyse et imputation des frais (art. 24) 6911 2.4.5.5 Mesures d'office (art. 25) 6912 2.5 Analyses génétiques dans le domaine des assurances 6912 2.5.1 Situation initiale 6912 2.5.1.1 Les assurances en tant que communautés de risque 6912 2.5.1.2 Evaluation du risque à la lumière des résultats d'examens médicaux et partage solidaire des risques par la communauté des personnes qui paient des primes ou des cotisations 6914 2.5.2 Nouvelles possibilités d'évaluer le risque sur la base d'analyses génétiques présymptomatiques et d'analyses génétiques prénatales 6916 2.5.3 Exigence et utilisation des résultats d'analyses déjà effectuées 6916 2.5.4 Diagnostic de maladies existantes par des analyses génétiques 6919 2.5.5 Commentaire du projet de loi 6919 2.5.5.1 Interdiction d'exiger une analyse (art. 26)
6919 2.5.5.2 Interdiction d'exiger les résultats d'une analyse déjà effectuée (art. 27) 6920 2.5.5.3 Utilisation autorisée des résultats d'analyses (art. 28) 6921 6954

2.6 Analyses génétiques dans le domaine de la responsabilité civile 6922 2.6.1 Interdiction d'effectuer des analyses génétiques présymptomatiques (art. 29) 6922 2.6.2 Diagnostic de maladies existantes (art. 30) 6923 2.7 Profils d'ADN visant à établir la filiation ou l'identité d'une personne 6924 2.7.1 Champ d'application et exposé du problème 6924 2.7.2 Principe (art. 31) 6925 2.7.3 Dans le cadre d'une procédure civile (art. 32) 6926 2.7.4 Dans le cadre d'une procédure administrative (art. 33) 6926 2.7.5 Etablissement de la filiation en dehors d'une procédure officielle (art. 34, al. 1 à 3) 6927 2.7.6 Etablissement prénatal de la paternité (art. 34, al. 4) 6929 2.8 Commission d'experts pour l'analyse génétique humaine (art. 35) 6930 2.8.1 Institution et composition 6930 2.8.2 Tâches 6931 2.9 Dispositions pénales 6933 2.9.1 En général 6933 2.9.2 Analyses génétiques effectuées sans consentement (art. 36) 6933 2.9.3 Analyses génétiques non autorisées (art. 37) 6934 2.9.4 Remise de trousses de diagnostic génétique in vitro (art. 38) 6934 2.9.5 Abus dans le domaine des rapports de travail (art. 39) 6935 2.9.5.1 Protection dans le domaine des analyses présymptomatiques 6935 2.9.5.2 Interdiction d'exiger une analyse (let. a) 6936 2.9.5.3 Interdiction d'exiger ou d'utiliser des résultats (let. b) 6936 2.9.6 Abus dans le domaine des assurances (art. 40) 6937 2.9.6.1 En général 6937 2.9.6.2 Interdiction d'exiger une analyse (let. a) 6937 2.9.6.3 Interdiction d'utiliser des résultats (let. b) 6937 2.9.7 Autorités compétentes et droit pénal administratif (art. 41) 6938 2.10 Dispositions finales 6938 2.10.1 Autorisation d'effectuer des analyses génétiques (art. 42) 6938 2.10.2 Dépistage (art. 43) 6938 3 Effets de la loi 3.1 Effets sur l'état du personnel et conséquences financières 3.1.1 Effets sur l'état du personnel au niveau fédéral 3.1.2 Effets sur l'état du personnel au niveau cantonal 3.1.3 Conséquences financières au niveau fédéral 3.1.4 Conséquences financières au niveau cantonal 3.2 Effets sur l'informatique 3.3 Conséquences économiques 3.3.1 Effets sur l'assurance-maladie sociale 3.3.2 Conséquences économiques dans le domaine de l'assurance privée 3.3.3 Conséquences économiques dans le domaine du travail

6939 6939 6939 6939 6940 6940 6940 6940 6940 6942 6943

6955

3.3.4 Conséquences économiques pour les laboratoires 3.3.5 Conséquences sur la liberté économique 3.4 Nécessité d'une intervention étatique

6943 6944 6944

4 Programme de la législature

6944

5 Bases légales 5.1 Constitutionnalité 5.2 Délégation de compétences législatives

6944 6944 6945

6 Relation avec le droit européen et travaux en vue d'une harmonisation internationale 6.1 Conseil de l'Europe 6.2 Union européenne 6.3 Nations Unies (ONU) et Organisation de coopération et de développement économique (OCDE)

6945 6945 6947 6948

Annexes

6949

Loi fédérale sur l'analyse génétique humaine (Projet)

6957

6956