02.017 Message sur l'arrêté fédéral concernant l'engagement de l'armée pour la protection de représentations étrangères du 13 février 2002

Madame la Présidente, Monsieur le Président, Mesdames et Messieurs, Par le présent message, nous vous soumettons un projet d'arrêté fédéral simple concernant l'engagement de l'armée pour la protection de représentations étrangères, en vous proposant de l'adopter.

Nous vous prions d'agréer, Madame la Présidente, Monsieur le Président, Mesdames et Messieurs, les assurances de notre haute considération.

13 février 2002

Au nom du Conseil fédéral suisse: Le président de la Confédération, Kaspar Villiger La chancelière de la Confédération, Annemarie Huber-Hotz

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Condensé Depuis les événements du 11 septembre 2001 et l'intervention américaine en Afghanistan, les représentations diplomatiques et installations des Etats-Unis et des pays impliqués sont exposés à une menace croissante. C'est pourquoi la Confédération a ordonné des mesures de protection préventives. Entre-temps, il est apparu que ces mesures de sécurité devront être maintenues durant une période prolongée.

A la fin d'octobre 2001, le Conseil fédéral a décidé d'approuver les demandes du canton de Genève et de la ville de Berne visant un appui subsidiaire des membres du Corps des gardes-fortifications (CGF) à leurs forces de police dans leurs tâches de surveillance. Le 21 novembre, le canton de Berne a formulé une nouvellle demande pour obtenir un appui supplémentaire du CGF à ses formations de police en ville de Berne ou un service d'appui.

Comme les capacités du CGF à long terme n'auraient pu être garanties et que la Confédération n'aurait plus disposé de la réserve d'engagement garantissant la liberté d'action, le Conseil fédéral a décidé, le 7 décembre 2001, d'engager des formations de l'armée en service d'appui à partir du 17 décembre 2001. Le 13 février 2002, le Conseil fédéral a décidé que l'engagement de l'armée durerait jusqu'à la fin de juin 2003 au plus tard. L'engagement se fonde sur l'art. 67 de la loi fédérale sur l'armée et l'administration militaire (LAAM; RS 510.10).

Des militaires en service long ont également été engagés. Par rapport aux troupes des cours de répétition, ils présentent l'avantage de ne pas devoir être relevés toutes les deux à trois semaines.

Conformément à l'art. 70, al. 2, LAAM, les engagements qui durent plus de trois semaines doivent être approuvés par l'Assemblée fédérale lors de la session suivante. Le présent arrêté fédéral doit permettre l'approbation ultérieure par l'Assemblée fédérale de l'engagement de troupes ordonné par le Conseil fédéral pour la protection de représentations étrangères.

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Message 1

Partie générale

1.1

Contexte

En relation avec les événements du 11 septembre 2001 et l'intervention américaine en Afghanistan, les représentations diplomatiques et installations des Etats-Unis, d'Israël et d'autres Etats concernés sont exposées à une menace croissante, et risquent d'être prises pour cibles d'actions terroristes ou d'autres actions violentes.

Par arrêté du 24 octobre 2001, le Conseil fédéral a répondu à la demande du Conseil d'Etat du canton de Genève du 12 octobre 2001 sollicitant l'appui de 50 gardesfortifications (GF). Simultanément et en accord avec l'Office fédéral de la police (OFP), il a habilité le chef de l'Etat-major général (CEMG) à appuyer la police civile en engageant 150 GF au plus, au cas où la Confédération recevrait d'autres demandes des cantons en relation avec les événements et les conséquences du 11 septembre 2001.

Le 25 octobre 2001, la ville de Berne a adressé au Conseil fédéral une demande d'appui de GF, qui a été approuvée par le CEMG le 30 octobre 2001. Quarante GF ont été attribués à la police municipale de Berne jusqu'au 10 décembre 2001 pour protéger les représentations étrangères.

Dans sa lettre du 21 novembre 2001, le Conseil d'Etat du canton de Berne a adressé au Conseil fédéral la demande de la ville de Berne du 15 novembre 2001 sollicitant un appui supplémentaire du CGF ou un service d'appui à partir du 10 décembre 2001. La ville a justifié sa demande par le fait que les mesures de protection ordonnées par la Confédération en faveur de représentations étrangères devaient être maintenues quelque temps encore et que, malgré l'appui accordé par des membres de la police cantonale de Berne, du Concordat de police de la Suisse du Nord-Ouest et du CGF, elles avaient fortement mis à contribution le corps de police dont les activités usuelles ont été considérablement réduites, ce qui s'est sensiblement répercuté sur la sécurité publique à Berne. Par ailleurs, à partir du 10 décembre 2001, l'aide accordée par le Concordat a cessé. Un appui de la Confédération de l'ordre de 76 à 190 personnes environ devrait être garanti depuis lors.

Dans sa lettre du 29 novembre 2001, le CEMG n'a pu satisfaire la demande d'appui de la ville de Berne avec des moyens du CGF. D'une part, les capacités du CGF à long terme ne pouvaient être garanties et, d'autre part, la Confédération n'aurait plus disposé
de la réserve d'engagement nécessaire à garantir la liberté d'action. C'est pourquoi le DDPS a envisagé d'engager à Berne des troupes de milice en service d'appui. En revanche, il s'est déclaré prêt à maintenir l'engagement du CGF à Genève avec le même effectif (70 GF) conformément à l'arrêté du Conseil fédéral du 24 octobre 2001. Compte tenu de la menace, il fallait compter pour la ville de Berne sur un engagement de 200 militaires au plus. L'engagement de formations de l'armée (service d'appui) a été décidé par le Conseil fédéral le 7 décembre 2001 et il a commencé le 17 décembre 2001.

La formation de 6 mois des premiers militaires en service long s'est achevée le 15 décembre 2001. Au cours des deux derniers mois de l'instruction de base, ils ont

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été soigneusement préparés à des engagements possibles, principalement dans le domaine des engagements subsidiaires de sûreté. Par rapport aux troupes en cours de répétition, l'avantage principal réside dans le fait qu'un engagement à long terme peut être planifié, dans la mesure où les troupes ne doivent pas être relevées toutes les deux à trois semaines.

1.2

Situation et appréciation de l'évolution possible

Le 9 novembre 2001, en raison des combats en Afghanistan et de l'accord de plusieurs pays de participer à la guerre des Etats-Unis contre le terrorisme et ses adeptes, le Service de sécurité fédéral (SSF) a convié les cantons à planifier des mesures de sécurité pour les représentations d'autres pays.

Après la chute du régime des talibans, le Conseil de sécurité de l'ONU a décidé l'engagement d'une troupe internationale de protection en faveur de l'Afghanistan (ISAF). L'ISAF est chargée d'appuyer le gouvernement intérimaire pour une durée de 6 mois à Kaboul pour des tâches de sécurité à l'intérieur et à l'extérieur de la ville, au besoin par un mandat robuste, soit le recours des armes. Malgré le mandat de l'ONU, les Etats-Unis se réservent l'ultime droit de donner des instructions à l'ISAF. Ils souhaitent conserver l'initiative et la liberté d'action en Afghanistan. Des unités spéciales des Etats-Unis combattent les derniers nids de résistance des talibans et d'Al Qaïda, et la chasse aux chefs talibans de haut rang et principalement d'Oussama Ben Laden est en cours. L'engagement des forces armées des partenaires de l'alliance avec les Etats-Unis dans leur combat contre le régime des talibans et en faveur de l'ISAF est principalement une manifestation politique. C'est pourquoi les mesures de protection ordonnées pour les représentations en Suisse gardent toute leur actualité. En outre, il faut s'attendre à ce que les mesures de sécurité actuelles soient maintenues quelque temps encore et, pour partie, élevées au rang de normes, notamment à l'égard des Etats-Unis.

Le 24 octobre 2001, le Conseil fédéral a ordonné entre autres une augmentation de 30 unités de l'effectif du personnel de la police municipale de Berne pour la protection des ambassades. Cette décision a été prise dans le cadre des mesures d'urgence prévues lors du réexamen du système de sûreté intérieur de la Suisse (USIS) pour les obligations de protection de droit international public. La Conférence cantonale des chefs des départements cantonaux de justice et police a approuvé cette recommandation les 8 et 9 novembre 2001. Au terme de premiers contacts avec la ville de Berne, la protection supplémentaires des ambassades pourrait être opérationnelle au plus tôt à la fin de 2002. Dès lors, il faut s'attendre à ce que le service d'appui
soit maintenu jusque là. Le Conseil fédéral devra décider avant la fin de juin 2003, au plus tard, de l'éventuelle suppression de ce service ou de l'engagement d'autres unités de l'armée pour des tâches de surveillance à titre de service d'appui pour assurer la protection des ambassades.

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1.3

La décision du Conseil fédéral du 7 décembre 2001

Compte tenu de la situation et de la demande de la ville de Berne, le Conseil fédéral a décidé, le 7 décembre 2001, d'engager des militaires pour garantir la surveillance de représentations étrangères placées sous la responsabilité de la Confédération.

La décision du Conseil fédéral du 7 décembre 2001 (non traduite) a la teneur suivante: 1.

Le DDPS est habilité à engager des militaires de milice pour protéger des représentations étrangères et pour décharger la police de tâches de surveillance. L'engagement est fourni sous forme de service d'appui.

2.

Les formations de milice sont attribuées à la police municipale de Berne.

3.

Le divisionnaire Luc Fellay, commandant de la division territoriale 1, est nommé commandant de l'engagement subsidiaire de sûreté.

4.

L'effectif de la troupe engagée à Berne peut comprendre jusqu'à 200 personnes.

5.

Le chef de l'Etat-major général est habilité, en accord avec l'Office fédéral de la police et sur demande des gouvernements cantonaux, à engager au plus 500 militaires supplémentaires pour appuyer le corps de police civil, en cas de nouvelles demandes en relation avec les événements et les conséquences du 11 septembre 2001.

6.

L'Etat-major général est chargé d'établir l'ordre et les règles d'engagement en accord avec les corps de police concernés et après avoir consulté l'Office fédéral de la police.

7.

L'engagement de l'armée s'achève avec la disparition du risque en relation avec les événements et les conséquences du 11 septembre 2001.

8.

Le DFJP est habilité à informer le canton et la ville de Berne de cette décision.

En complément à la décision du Conseil fédéral du 7 décembre 2001, le Conseil fédéral a décidé, le 13 février 2002, que l'engagement de l'armée durerait, au plus tard, jusqu'au 30 juin 2003.

1.4

La nécessité d'un arrêté fédéral

Selon l'art. 67 de la LAAM, des troupes sont fournies aux autorités civiles qui le demandent afin de protéger notamment les personnes et les biens particulièrement dignes de protection (service d'appui). La tâche doit être d'intérêt public et les moyens des autorités publiques en matière de personnel, de matériel ou de temps doivent être épuisés.

L'expérience a montré que l'effectif actuel du corps de police de la ville de Berne est suffisant pour assurer une activité normale et faire face à de brefs temps forts. Il est cependant insuffisant pour un engagement de surveillance régulier et étendu.

C'est pourquoi, depuis le 11 septembre 2001, la ville de Berne a assumé des charges supplémentaires massives pour garantir la surveillance des ambassades. A partir du

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5 octobre 2001, des policiers supplémentaires de la police cantonale et à partir du 26 octobre 2001, des membres du Concordat de police de la Suisse du Nord-Ouest ont été engagés 24 heures sur 24. Après le 10 décembre 2001, les corps du Concordat n'ont plus été en mesure d'appuyer la police municipale de Berne dans la même proportion.

Compte tenu de ces circonstances, il convient d'admettre que les conditions pour un engagement de formations de l'armée en service d'appui pour la surveillance de représentations étrangères à Berne étaient satisfaites.

Le Conseil fédéral fonde sa décision sur l'art. 70 LAAM qui précise ce qui suit: 1

Sont compétents pour la mise sur pied et l'attribution aux autorités civiles: a. le Conseil fédéral; b. Le Département fédéral de la défense, de la protection de la population et des sports en cas de catastrophe en Suisse.

2 L'Assemblée fédérale doit approuver l'engagement lors de la session suivante, pour autant que la mise sur pied comprenne plus de 2'000 militaires ou qu'elle dure plus de trois semaines. Si l'engagement s'achève avant la session, le Conseil fédéral adresse un rapport à l'Assemblée fédérale.

Dans le cas présent, l'engagement excède trois semaines. Par conséquent, l'Assemblée fédérale doit l'approuver lors de la session suivante.

1.5

Procédure préliminaire

Le projet contient l'approbation ultérieure des mesures ordonnées pour l'engagement de formations de l'armée en service d'appui conformément à la décision du Conseil fédéral du 7 décembre 2001. Cette décision répond à la demande d'assistance adressée au Conseil fédéral par les cantons de Berne et de Genève et a été prise avec l'accord de ces derniers. Comme le projet n'a pas de conséquences au sens de l'art. 1, al. 2, de l'ordonnance du 17 juin 1991 sur la procédure de consultation (RS 172.062), concerne principalement les deux cantons mentionnés, l'ouverture d'une procédure ordinaire de consultation ne s'impose pas.

2

Partie spéciale

Conformément au ch. 1.4, un engagement de troupes en service d'appui préalablement ordonné par le Conseil fédéral doit être ultérieurement approuvé. Il faut admettre qu'au moment de la décision des Chambres fédérales, environ 200 militaires seront chargés de tâches de surveillance. En raison de la situation et de son évolution, la décision du Conseil fédéral n'est pas temporaire. La troupe accomplit un service d'appui. Le Conseil fédéral a décidé de ne pas engager simultanément plus de 700 militaires.

Au sujet de l'appréciation de l'évolution pour les mois à venir, on se référera au ch. 1.2. Selon l'état des connaissances actuelles, il faut s'attendre à une menace qui planera plusieurs mois sur les représentations étrangères concernées. C'est pourquoi il a été décidé que l'engagement ne s'achèverait qu'après la disparition du risque sécuritaire en relation avec les événements et les conséquences du 11 septembre 2001.

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Les services concernés surveillent et évaluent la situation en permanence. Si celle-ci devait se calmer, le Conseil fédéral mettrait fin à l'engagement de l'armée.

3

Conséquences pour les finances et le personnel

L'engagement de sûreté subsidiaire prévu n'occasionnera vraisemblablement pas de dépenses supplémentaires. Il sera assuré par les troupes ou les militaires en service long figurant sur le tableau des cours et prévus pour le service d'instruction durant cette période. Les militaires nécessaires à la conduite, au commandement de la division territoriale 1, effectueront des jours de service isolés qui seront imputés à l'ensemble des obligations de service. La Confédération mettra à la disposition de la troupe le matériel supplémentaire. Comparativement aux dépenses ordinaires occasionnées par un cours de répétition, ces dépenses sont insignifiantes.

Des conséquences pour les finances et le personnel ne se manifesteraient qu'au moment d'une prolongation du service pour la troupe à l'engagement. Dans le contexte actuel, il ne faut cependant pas s'attendre à une telle situation. En effet, l'engagement avec les formations prévues et les militaires en service long peut être couvert sans faille. Dans le cas d'une augmentation des dépenses, des crédits additionnels devraient cependant être proposés.

4

Programme de la législature

Le projet n'a pas été annoncé dans le rapport du 1er mars 2000 sur le programme de la législature 1999-2003. Mais le présent arrêté concernant l'engagement de l'armée pour la protection de représentations étrangères est manifestement un objectif important de politique nationale.

5

Forme de l'acte

Le présent arrêté fédéral est un acte particulier de l'Assemblée fédérale expressément prévu par une loi fédérale (art. 173, al. 1, let. h, Cst.). Comme il ne contient pas de règles de droit et n'est pas sujet au référendum, il revêt la forme d'un arrêté fédéral simple (art. 163, al. 2, Cst., art. 4, al. 2, LREC).

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