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79.086

Message concernant une loi sur la responsabilité civile en matière nucléaire (LRCN) du 10 décembre 1979

Messieurs les Présidents, Mesdames et Messieurs, Par le présent message, nous vous soumettons une loi sur la responsabilité civile en matière nucléaire, que nous vous proposons d'adopter.

Simultanément, nous vous proposons de classer les interventions parlementaires suivantes : 1976 M 76.388 Accidents atomiques - somme de couverture (N 29. 9. 76, Morf; E 30. 11. 76) 1978 P ad 77.053 Loi sur l'énergie atomique, révision (N 20. 4, 78, commission du Conseil national) Nous vous prions d'agréer, Messieurs les Présidents, Mesdames et Messieurs, les assurances de notre haute considération.

10 décembre 1979

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Au nom du Conseil fédéral suisse: Le président de la Confédération, Hürlimann Le chancelier de la Confédération, Huber

1979-888

Vue d'ensemble La loi fédérale du 23 décembre 1959 sur l'utilisation pacifique de l'énergie atomique et la protection contre les radiations (loi sur l'énergie atomique, RS 132.0) doit être revisée. L'arrêté fédéral du 6 octobre 1978 concernant la loi sur l'énergie atomique (RO 1979 816) a déjà permis de procéder aux revisions urgentes qui s'imposaient sur certains points.

L'un des principaux objectifs de la loi de 1959 sur l'énergie atomique était de régler la responsabilité civile (RC) des exploitants d'installations atomiques. A défaut d'une législation spécifique, la responsabilité d'un tel exploitant en cas d'accident n'aurait été engagée qu'en vertu des principes du code des obligations.

Or celui-ci n'oblige personne à constituer des réserves pour satisfaire aux demandes de dédommagements de tiers. Rien n'aurait donc garanti que les exploitants d'installations atomiques auraient pu remplir les obligations découlant de leur responsabilité civile en cas d'accident grave. Tout en visant à améliorer la protection du lésé, la loi sur l'énergie atomique veillait également à ne pas entraver le développement de l'énergie nucléaire en Suisse par des dispositions trop sévères sur la responsabilité civile. A peu près en même temps que cette loi, fut élaborée la convention sur la responsabilité civile dans le domaine de l'énergie nucléaire (convention de Paris), du 29 juillet 1960. Il était naturel que la réglementation suisse de la responsabilité civile s'inspirât largement de la convention de Paris, à l'élaboration de laquelle la Suisse participait ; notre pays a signé cette convention, mais ne l'a pas ratifiée. Autant la convention de Paris que les dispositions de la loi de 1959 concernant la responsabilité civile se fondent sur les principes suivants: 1. Concentration de la responsabilité sur l'exploitant de l'installation atomique.

Lui seul est civilement responsable; la responsabilité civile d'autres personnes est exclue.

2. Responsabilité causale de l'exploitant de l'installation atomique.

3. Limitation de la responsabilité civile sur le plan financier, les Etats devant cependant s'assurer que la personne civilement responsable dispose d'une sécurité financière (assurance, garantie bancaire ou autre) égale au montant maximal pour lequel sa responsabilité est engagée. La convention de Paris
prévoyait un montant maximal d'environ 60 millions de francs suisses. En Suisse, la limite fut d'abord fixée à 40 millions de francs puis portée à 200 millions en 1977.

Au niveau international, les limites fixées dans la convention de Paris ayant paru trop basses, elles furent portées à quelque 520 millions de francs suisses par la convention complémentaire de Bruxelles.

A l'heure qu'il est, la Suisse n'a pas encore ratifié les conventions de Paris et de Bruxelles, Une analyse approfondie de la question montre qu'actuellement, leur ratification ne s'impose pas, car elle comporterait des inconvénients non négligeables, que les avantages de la ratification ne suffiraient pas à compenser.

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Comme la réglementation suisse de la responsabilité civile est, elle aussi, tout à à fait insuffisante, on l'a entièrement remaniée. En raison de som ampleur, elle doit faire maintenant l'objet'd'une loi spécifique, dont nous vous soumettons le projet.

Le projet s'en tient aux deux principes essentiels qu'établit le droit en vigueur, à savoir celui de la responsabilité causale et celui de la concentration de la responsabilité sur l'exploitant de la centrale nucléaire. En revanche, nous avons renoncé, dans l'intérêt d'une protection plus complète des lésés éventuels, au principe d'une responsabilité civile d'un montant limité et proposons que la personne civilement responsable doive s'engager pour un montant illimité. Cette responsabilité serait couverte comme il suit: J . Par une assurance privée jusqu'à 200 millions de francs,' 2. Par la Confédération jusqu'à concurrence de 1 milliard de francs, au-delà du montant couvert par l'assurance privée ; 3. Par tous les avoirs de la personne civilement responsable; 4. Selon la loi actuelle sur l'énergie atomique pour les sinistres.

En outre, nous proposons d'étendre par rapport à la législation actuelle les droits de recours de la personne civilement responsable, afin que le recours soit possible non seulement contre celui qui a causé le dommage intentionnellement, mais aussi contre celui qui l'a fait par négligence grave. En revanche, la possibilité d'exonérer ta personne civilement responsable doit Être limitée en ce sens que sa responsabilité civile sera également engagée en cas d'accident causé par une force majeure ou par des actes de guerre.

Enfin, nous vous proposons de porter de 2 à 3 ans le délai de prescription relative pour faire valoir un dommage et de remplacer l'actuel délai de prescription absolue de 10 ans par un délai de péremption de 30 ans.

174

Message I

Partie générale

II

Situation initiale

III

Historique et situation actuelle

111.1

Législation atomique

Le 24 novembre 1957, le peuple et les cantons ont accepté l'article 24iuifl|iuie3 de la constitution fédérale, dont la teneur est la suivante: 1

La législation sur l'énergie atomique est du domaine de la Confédération.

La Confédération édicté des prescriptions sur la protection contre les dangers des rayons ionisants.

2

Le 23 décembre 1959, les Chambres fédérales ont adopté la loi fédérale sur l'utilisation pacifique de l'énergie atomique et la protection contre les radiations (Loi sur l'énergie atomique). Le délai référendaire étant échu, le Conseil fédéral a fixé l'entrée en vigueur de la loi au 1er juillet 1960. L'un des principaux objectifs de cette loi était de réglementer la responsabilité civile des exploitants d'installations nucléaires. A défaut d'une législation spécifique, la responsabilité de l'exploitant n'aurait été engagée qu'en vertu des principes du code des obligations. Or celui-ci n'oblige personne à constituer des réserves pour satisfaire aux demandes de dédommagements de tiers. Rien n'aurait donc garanti que les exploitants d'installations atomiques auraient pu remplir les obligations découlant de leur responsabilité civile en cas d'accident nucléaire grave. Tout en visant à améliorer la protection du lésé, la loi sur l'énergie atomique veillait également à ne pas entraver le développement de l'énergie nucléaire en Suisse par des dispositions trop rigoureuses sur la responsabilité civile.

La loi actuelle prévoit donc ce qu'on appelle la concentration de la responsabilité sur l'exploitant de l'installation atomique (art. 12 et suivants). Lui seul est responsable lorsqu'au cours de l'exploitation d'une telle installation, «les propriétés radioactives, toxiques, détonantes ou autres propriétés dangereuses de substances nucléaires entraînent le décès ou une atteinte à la santé de personnes ou des dommages matériels». Un recours contre des tiers est cependant possible dans certains cas. La responsabilité civile prévue à l'article 12 tombe lorsque l'accident est causé par des phénomènes naturels extraordinaires, par des actes de guerre ou par une faute grave du lésé, sans qu'une faute soit imputable à la personne civilement responsable en vertu de l'article 12 ou à une personne dont elle répond. La responsabilité est limitée au montant maximal de l'assurance responsabilité civile obligatoire, soit 40 millions de francs par installation atomique (art. 21, 2e al., de la loi). Par l'ordonnance du 6 juillet 1977, nous avons porté le montant de la couverture pour les centrales nucléaires à 200 millions de francs afin de tenir compte, notamment, de la dépréciation de la monnaie et de la puissance plus élevée des centrales en construction.

175 '

En cas de grand sinistre, la loi actuelle sur l'énergie atomique prévoit une réglementation spéciale (art. 27 et 28). Il en résulte que l'Assemblée fédérale établit un règlement d'indemnisation et que la Confédération verse des prestations pour les dommages non couverts.

Les actions en dommages-intérêts et en réparation du tort moral se prescrivent, à certaines exceptions près, par deux ans à compter du jour où le lésé a eu connaissance du dommage et de la personne qui en est civilement responsable, mais en tout cas par dix ans dès le jour où s'est produite l'influence nocive (art.

17 de la loi). Un fonds spécial est institué pour les «dommages différés» (art. 18 et 19).

111.2

Conventions internationales

Tandis qu'on élaborait la loi suisse sur l'énergie atomique, des pourparlers étaient menés sur le plan international aux fins d'établir une convention multilatérale qui harmoniserait les règles de la responsabilité civile et de l'assurance. Ces efforts, entrepris en premier lieu par l'Agence de l'énergie atomique de l'OCDE (alors l'Agence européenne de l'énergie nucléaire de l'OECE), aboutirent à la convention du 29 juillet 1960 sur la responsabilité civile dans le domaine de l'énergie nucléaire (convention de Paris) et à la convention complémentaire du 31 janvier 1963 sur la responsabilité civile dans le domaine de l'énergie nucléaire (convention de Bruxelles). Ces conventions sont entrées en vigueur en 1968 et 1974. Après avoir pris une part active à leur élaboration, la Suisse a signé ces conventions mais ne les a pas ratifiées. La République fédérale d'Allemagne, la France et l'Italie, parmi d'autres pays, ont ratifié les conventions de Paris et de Bruxelles.

En sus des conventions de Paris et de Bruxelles, il existe une convention du 21 mai 1963 de l'Agence internationale de l'énergie atomique (AIEA) à Vienne, qui correspond dans ses grandes lignes à la convention de Paris. Cette convention n'a cependant aucune signification réelle en Europe. De tous les Etats européens, seule la Yougoslavie y a adhéré. La convention est entrée en vigueur en 1977.

111.21

Grandes lignes de la convention de Paris

En cas d'accident nucléaire, seule est engagée la responsabilité causale de l'exploitant de l'installation nucléaire qui en est l'origine. L'exploitant est, de même, civilement responsable des dommages survenant lors du transport de substances nucléaires en relation avec son installation. La responsabilité civile est limitée à 15 millions d'unités de compte (UC) de la convention monétaire européenne1' par accident nucléaire. La législation nationale peut élever cette limite ou l'abaisser au plus jusqu'à 5 millions'd'UC. Les Etats doivent veiller à ce que l'exploitant dispose d'une sécurité financière (assurance, garantie bancaire ou autre) égale au montant maximal de sa responsabilité civile.

« En 1960/61, l'unité de compte valait 4 fr. 31. Son cours actuel est sujet à controverse.

176

Les actions en dommages-intérêts se prescrivent par 10 ans à compter de l'accident nucléaire. En principe, toutes les actions sont de la compétence des tribunaux du pays sur le territoire duquel s'est produit l'accident. Les jugements des tribunaux compétents sont exécutoires dans tous les Etats contractants et la faculté de 'transférer les dédommagements est garantie. La convention de Paris, elle, est applicable lorsque l'installation nucléaire où se produit l'accident vise des objectifs pacifiques et qu'elle figure dans une liste correspondante.

111.22

Grandes lignes de la convention complémentaire de Bruxelles

Cette convention porte le montant des dédommagements à 120 millions UC, soit 520 millions de francs suisses environ. La nouvelle convention se fonde sur celle de Paris, qui règle la procédure de dédommagement dans les nouvelles limites (définitions, compétences, prescription etc.). Un Etat ne peut devenir partie contractante de la convention complémentaire que s'il a adhéré à celle de Paris.

Le dédommagement jusqu'à concurrence de 120 millions UC se fait en trois tranches : 1. Jusqu'à concurrence d'un montant d'au moins 5 millions UC, à fixer par la législation des Etats contractants, par des moyens provenant d'une assurance ou d'autres sécurités financières (ce qui correspond pratiquement aux dispositions de la convention de Paris) ; 2. Au-delà de cette somme et jusqu'à concurrence de 70 millions UC, par des fonds publics mis à disposition par l'Etat contractant sur le territoire duquel est située l'installation nucléaire de l'exploitant civilement responsable; 3. De 70 à 120 millions UC par des fonds publics fournis par les Etats contractants selon la clef de répartition suivante: 50 pour cent de la contribution financière de chaque partie contractante est donné par le rapport entre son produit national brut (= PNB) et la somme des PNB et toutes les parties contractantes, le solde par le rapport entre la capacité thermique des réacteurs érigés à des fins pacifiques sur son territoire et la capacité thermique totale des réacteurs situés sur le territoire de toutes les parties contractantes.

Le fait que des fonds publics doivent être libérés pour la deuxième et la troisième tranche ne signifie pas que l'Etat doive assumer un risque sans contre-partie. Chaque Etat est libre de réclamer à l'exploitant d'une centrale nucléaire des contributions, par exemple sous forme de taxes.

112

Loi sur l'énergie atomique: Principales modifications demandées

Ce sont surtout les modifications suivantes qui ont été demandées des interventions parlementaires, par des initiatives populaires ou de cantons, par des pétitions etc. : 13 Feuille fédérale. 132= année. Vol. I

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- Donner au Conseil fédéral ou à l'Assemblée fédérale la compétence d'accorder des autorisations; - Renoncer au système de l'autorisation de police au profit de la concession; - Exiger la preuve du besoin pour les centrales nucléaires; - Améliorer les possibilités d'intervention de la population; - Résoudre le problème de l'élimination et du stockage des déchets nucléaires; - Revoir la réglementation de la responsabilité civile et de l'assurance; - Délimiter clairement la compétence de la Confédération et celle des cantons, en concentrant éventuellement auprès de la Confédération toutes les attributions d'autorisation; - Planifier les emplacements de centrales nucléaires, s'entendre à ce sujet avec les pays voisins.

12 121

Appréciation de la situation initiale Révision des dispositions de la loi sur l'énergie atomique concernant la responsabilité civile et l'obligation de s'assurer

En automne 1975, le chef du Département des transports, des communications et de l'énergie a, après s'être entendu avec le Conseil fédéral, chargé une commission d'experts juristes d'élaborer un projet de revision totale de la loi sur l'énergie atomique. La commission se compose de M. W. Dubach, ancien juge au Tribunal fédéral, président, des professeurs Charles-A. Morand, Université de Genève, Jörg-Paul Müller, Université de Berne, Peter Saladin, précédemment à l'Université de Baie, maintenant à celle de Berne, ainsi que de MM. Max Rudolf, avocat, sous-directeur de l'Office fédéral de la justice et Hans-Rudolf Siegrist, ancien directeur de l'Office fédéral de l'énergie. Des hauts-fonctionnaires de l'Office fédéral de l'énergie prennent part aux séances avec voix consultative.

La commission avait pour tâche la plus urgente d'élaborer le projet d'arrêté fédéral concernant la loi sur l'énergie atomique, arrêté entré en vigueur le 1er juillet 1979.

En outre, le Département fédéral des transports, des communications et de l'energie a chargé en 1977 la commission d'experts d'entreprendre sans tarder la révision des dispositions de la loi sur l'énergie atomique qui concernent la responsabilité civile et l'assurance et de soumettre au plus tôt au département un projet de loi y relatif. Le Conseil fédéral a adjoint à la commission, comme conseillers, MM. Alexandre Berenstein, juge au Tribunal fédéral, Pierre Tercier, professeur à l'Université de Fribourg, Christian Hauswirth, avocat, Département fédéral des affaires étrangères, Paul Volken et Pierre Widmer, avocat, tous deux de l'Office fédéral de la justice.

La commission élargie a longuement examiné si, dans les circonstances actuelles, il serait judicieux de ratifier les conventions de Paris et de Bruxelles ou s'il conviendrait de s'en abstenir.

178

121.1

Les conventions internationales

La convention de Paris est analysée dans ses grandes lignes sous chiffre 111.21.

Le texte complet de la convention figure en appendice du présent message.

La convention de Paris règle la responsabilité civile à l'égard de tiers pour des dommages résultant des propriétés radioactives de substances nucléaires. II s'agit dans cette convention de la responsabilité civile de droit privé.

Le détenteur de substances nucléaires est tenu d'avoir et de maintenir une assurance ou une autre garantie financière égale au montant de la responsabilité civile : la couverture maximale doit correspondre au montant le plus élevé de la responsabilité civile. Ces principes ne s'appliquent pas seulement à des accidents dont les suites s'étendent au-delà des frontières du pays concerné, mais très généralement à la responsabilité civile en cas d'accidents nucléaires sur le territoire des Etats contractants.

Divers motifs ont amené les Etats contractants à ne pas laisser à la législation de chacun d'eux le soin de régler la responsabilité civile en cas d'accident nucléaire, mais à le faire au niveau international. La convention vise tout d'abord à unifier le droit. Etant donné la forte probabilité que des accidents nucléaires d'une certaine importance aient des effets au-delà dès frontières nationales, il est incontestablement judicieux de régler uniformément la question de savoir où et comment les prétentions des lésés à des réparations seront jugées, plutôt que de laisser le soin de le faire aux dispositions nationales sur la responsabilité civile, passablement disparates, et que de s'exposer aux incertitudes multiples que crée un droit international privé, qui diffère d'un pays à l'autre.

Il en va de même des dommages pouvant survenir lors du transport de substances nucléaires à l'étranger.

Lorsque la convention fut élaborée, l'intérêt que les sociétés d'assurance avaient à une harmonisation du droit joua un rôle important.

D'autre part, la convention devait obliger les Etats à limiter financièrement et dans le temps la responsabilité civile dans leur législation. Cette limitation était souhaitée avant tout par les fournisseurs étrangers de substances et d'installations nucléaires.

Enfin, il s'agissait d'obtenir qu'en vertu de la réglementation internationale de la responsabilité civile en matière nucléaire,
le développement de l'utilisation pacifique de l'énergie atomique ne fût pas entravé mais favorisé par la législation nationale de chaque Etat contractant.

Nous avons exposé sous chiffre 111.2 les grands traits de la convention complémentaire de Bruxelles, dont le texte intégral est joint au présent message (appendice 2).

La convention complémentaire de Bruxelles oblige les Etats contractants à veiller à ce qu'un montant de 120 millions UC soit disponible au titre de réparation pour chaque accident nucléaire. Cette convention vise donc à accroître les montants des réparations prévus dans la convention de Paris. Elle crée à cet effet un système de solidarité internationale pour les réparations dont le montant ne sera couvert par aucune société d'assurance.

179

121.2

Relation entre les conventions et le droit suisse

121.21

Généralités

Si notre pays ratifiait les conventions de Paris et de Bruxelles signées par la Suisse, qui ressortissent au droit des gens, elles seraient, selon un principe tacitement admis de notre droit constitutionnel, considérées sans plus comme du droit national. Ces conventions auraient automatiquement force dérogatoire par rapport à tout droit cantonal contraire, à toute ordonnance fédérale et à toute loi fédérale antérieure et même, en principe, postérieure à elles.

121.22

Les conventions sont-elles directement applicables?

Les conventions créent-elles ou non des droits et des obligations directs pour les particuliers? Cette question appelle une réponse nuancée. En pratique, on considère comme directement applicable une disposition contractuelle suffisamment concrète pour qu'elle puisse s'appliquer directement à un cas concret et servir simultanément de base d'appréciation aux organes judiciaires dans un cas d'espèce. Une disposition établissant des directives à l'adresse du législateur de l'Etat contractant ou se bornant à poser des exigences à cet égard n'est pas directement applicable.

La convention de Paris est en partie directement applicable, alors que, pour être appliquées, d'autres dispositions de cette convention requièrent l'activité du législateur national. Point n'est besoin d'examiner ici la question de l'applicabilité directe de chaque article de la convention; quelques exemples suffisent: - Les définitions de l'article 1er de la convention de Paris sont directement applicables par le juge.

- L'obligation faite à la personne civilement responsable de conclure une assurance conformément à l'article 10 de la convention de Paris n'est pas directement applicable, la nature de l'obligation et les conditions correspondantes devant être précisées par l'autorité compétente.

La convention complémentaire de Bruxelles n'est pas directement applicable pour sa plus grande partie. L'obligation de rendre disponible des fonds publics (convention complémentaire de Bruxelles, art. 3) s'adresse à l'Etat contractant et non à des particuliers! Plusieurs autres articles constituent des mandats donnés au législateur (les art. 5, 8, 13 p, ex,). D'autres dispositions, qui règlent la relation entre Etats, ne sont en conséquence pas directement applicables en droit interne (les art. 10, 11, 12 p, ex.). Il n'est pas exclu que le juge considère comme directement applicable la limite de 120 millions d'unités de compte fixée pour le dédommagement prévu à l'article 3, lettre a de la convention. En effet, dès que les Etats ont libéré les moyens de la deuxième et de la troisième tranche, tout lésé a en principe droit au dédommagement jusqu'à concurrence de ce montant pour chaque sinistre.

180

121.23

Possibilités de légiférer hors du domaine d'application des conventions

Les conventions donnent expressément aux Etats la possibilité d'élaborer dans certains secteurs une législation dérogatoire ou complémentaire (ex: la convention de Paris aux art. 7, 8, 9, etc.). Pour le reste, c'est le principe énoncé à l'article 4 du préambule de la convention de Paris qui s'applique généralement, principe selon lequel la convention vise à l'unification du droit tout en désirant laisser aux Etats la possibilité de prendre des mesures supplémentaires. Les Etats contractants ne sont donc pas liés dans leur activité législative en dehors du domaine d'application de la convention et peuvent même en appliquer les dispositions à des accidents par irradiation non visés par la convention. Dans tous les cas de ce genre, les demandes en dommages et intérêts qui seraient présentées devront cependant être satisfaites au moyen d'autres fonds que ceux que la convention exige de tenir à disposition.

L'interprétation des conventions de Paris et de Bruxelles dans leur esprit et dans leurs objectifs montre que ces conventions ne règlent pas exclusivement des cas d'accidents affectant plusieurs Etats. Elles visent plutôt à englober aussi des accidents nucléaires dont les effets sont strictement limités à un seul pays.

Cela ressort non seulement des raisons qui, à l'époque, ont motivé l'adoption des conventions, mais aussi du texte de la convention de Paris,

121.3

Limitation du montant de la responsabilité civile

121.31

Loi actuelle sur l'énergie atomique

La loi actuelle sur l'énergie prévoit une limitation du montant de la responsabilité civile de l'exploitant. Si une telle limitation avait été insérée dans la loi, c'est parce qu'à l'époque, la commission d'experts de l'OECE pour l'harmonisation de la législation atomique avait recommandé à l'unanimité de la prévoir et que l'une des tâches premières de la loi était alors de favoriser l'utilisation pacifique de l'énergie nucléaire. On ne peut cependant nier qu'à cette époque déjà, des juristes de renom aient proposé, dans l'intérêt des lésés, que la Suisse s'en tienne (contrairement à la tendance qui prévalait alors dans la plupart des autres pays) à la responsabilité civile illimitée des exploitants d'installations atomiques. On relevait que la législation suisse ne connaissait, si ce n'est la loi sur la navigation maritime, aucune limitation de la responsabilité civile non contractuelle et qu'au surplus, notre pays avait maintenu dans sa loi sur la navigation aérienne (RS 748.0, art. 64 et s.), en dérogation aux principes de la convention de Rome de 1933 sur la responsabilité civile dans la navigation aérienne, la responsabilité civile illimitée des compagnies aériennes à l'égard des tiers lésés au sol en cas de chutes d'aéronefs, etc.

Ces constatations nous paraissent avoir le pas sur l'argument voulant qu'une limitation du montant de la responsabilité civile ne puisse être envisagée lorsque les risques d'une activité - telle que la production d'énergie nucléaire autorisée par l'Etat malgré ses risques élevés, ne peuvent être délimités. Il reste maintenant à déterminer si d'autres aspects ne parlent pas en faveur du

181

maintien d'une responsabilité limitée, telles des obligations contractuelles internationales, la réglementation concrète sur la responsabilité civile ou des difficultés s'opposent à la livraison d'équipements nucléaires.

121.32

Conventions de Paris et de Bruxelles

Une expertise demandée au professeur J.P. Müller devait notamment préciser si, en cas de ratification des conventions de Paris et de Bruxelles, la Suisse pourrait prévoir dans sa législation la responsabilité civile illimitée de l'exploitant d'une installation atomique. L'expert consulté est parvenu aux conclusions suivantes: 121.321 Convention de Paris Aux termes de l'article 7, lettre b de la convention de Paris, le montant maximal de la responsabilité civile de l'exploitant par accident nucléaire est de 15 millions d'unités de compte de la convention européenne. Cette limitation n'est cependant pas absolue: toute partie contractante peut prévoir dans sa législation un montant moins élevé ou plus élevé, à condition de tenir compte des possibilités de couverture par une assurance ou par d'autres réserves financières.

L'article 10, lettre a de la convention de Paris établit le principe selon lequel tout exploitant d'une centrale nucléaire doit, pour couvrir sa responsabilité civile, disposer d'une assurance ou d'une autre garantie financière jusqu'à concurrence de la limite maximale'fixée à l'article 7 de cette convention.

En conséquence - il ressort clairement du texte de la convention que tout Etat peut fixer un montant de la responsabilité civile supérieure à celui que prévoit la convention de Paris; - un Etat contractant ne peut fixer la limite supérieure de la responsabilité civile au-delà de la couverture offerte; on s'en tiendra au principe «aucune responsabilité civile sans couverture».

Bien que cela ne ressorte pas expressément du libellé, le contexte indique clairement que la convention de Paris avait notamment pour objectif essentiel d'instituer une responsabilité civile limitée des exploitants d'installations nucléaires, cela en vue d'imposer des charges moins lourdes aux exploitants (et à leurs fournisseurs) et par conséquent de promouvoir l'utilisation pacifique de l'énergie atomique. Dans l'exposé des motifs, on mentionne sous chiffre 2 que, parmi les raisons ayant motivé l'adoption de la convention, le fait qu'en vertu des dispositions légales en vigueur à l'époque, les exploitants d'installations nucléaires étaient civilement responsables de manière illimitée, mais que cette responsabilité juridique n'était pas entièrement assumable parce que la charge financière qui en serait
résultée aurait sérieusement compromis le développement de l'industrie nucléaire. L'intention de favoriser l'utilisation pacifique de l'énergie nucléaire en limitant la responsabilité civile ressort également du texte du préambule et des commentaires (p. ex. N 6, 43, 46).

182

Au surplus, toutes les publications à ce sujet s'accordent à considérer l'adoption d'une responsabilité civile limitée comme l'un des principaux objectifs de la convention de Paris.

Que l'on se réfère au texte de la convention, aux commentaires de ce texte ou à la volonté historique des parties contractantes telle qu'elle s'y exprime, on constate que la convention vise à limiter la responsabilité civile de l'exploitant en cas d'accident nucléaire. Adopter la responsabilité civile illimitée irait à rencontre d'un principe de la convention de Paris, principe fondamental et exclusif de tout autre. Une telle responsabilité est dès lors incompatible avec cette convention.

Tous les Etats parties à la convention de Paris s'en tiennent dans leur législation au principe de la responsabilité civile limitée pour l'exploitant, la RFA ayant fixé la limite la plus élevée (1 milliard DM de couverture maximale) en la considérant manifestement comme compatible avec la convention.

Dès lors, la pratique unanime des Etats signataires de la convention de Paris est un indice supplémentaire de l'obligaton de limiter la responsabilité civile dans le cadre de cet accord.

121.322 Convention complémentaire de Bruxelles Le préambule à la convention de Bruxelles dit que les parties ont rédigé cette convention complémentaire afin d'accroître le. montant des réparations pour dommages résultant de l'utilisation de l'énergie nucléaire. Selon l'article 3, lettre a, de la convention complémentaire de Bruxelles, les Etats contractants doivent s'engager à faire en sorte qu'en cas d'accident nucléaire, des indemnités d'un montant de 120 millions d'unités de compte par accident puissent être mises à disposition.

Tant le préambule que le texte de la convention de Bruxelles indiquent clairement que cet accord ne vise pas à régir la responsabilité civile de l'exploitant d'une centrale nucléaire, mais la mise à disposition et la répartition du montant à prévoir comme indemnité. Le principe «Aucune responsabilité civile sans couverture» s'applique donc également dans le cas de la convention de Bruxelles.

Dans sa lettre et dans son esprit, la convention de Bruxelles interdit aux Etats contractants non seulement d'adopter une responsabilité civile illimitée, mais aussi de fixer un montant-limite de la responsabilité civile dépassant 120
millions d'unités de compte.

121.323 Avis de l'Agence de l'énergie atomique de l'OCDE La commission d'experts a notamment consulté un représentant de l'Agence de l'énergie atomique de l'OCDE sur diverses questions en rapport avec les conventions de Paris et de Bruxelles. Selon les renseignements obtenus, il ne fait aucun doute que ces deux conventions partent du principe de la responsabilité civile limitée. Une responsabilité civile illimitée serait contraire à leurs dispositions.

183

Une étude de l'Agence publiée en décembre 1977 souligne également sans équivoque que l'institution d'une responsabilité civile limitée compte au nombre des principes fondamentaux sur lesquels se fonde le droit régissant la responsabilité civile en matière nucléaire (La réparation des dommages nucléaires dans les pays membres de l'OCDE, in; Droit nucléaire, 1977, p. 55, 57/58, 68).

121.33

La responsabilité civile limitée constitue-t-elle un principe général du droit des gens?

Tous les pays industrialisés du monde occidental ayant une législation spécifique en matière de responsabilité civile ont limité le montant de celle-ci dans le domaine de l'utilisation de l'énergie nucléaire. L'application de ce principe dans tous les pays industrialisés du monde libre ne suffit pas à en faire un principe général du droit des gens ni une règle coutumière de droit international à laquelle devraient souscrire tous les pays - en dehors de leur participation à des conventions internationales. Le régime de la responsabilité civile des particuliers dans chaque pays relève en règle générale primairement du droit national. En principe cela s'applique également à des installations présentant des risques d'une ampleur inconnue jusqu'ici. Le fait que les législateurs nationaux aient adopté des principes semblables en matière de responsabilité civile ne suffit pas à établir une règle générale du droit des gens ou une norme du droit coutumier qui interdirait à un pays d'adopter toute disposition dérogatoire.

Rien n'indique que les Etats en question aient agi en vertu d'une obligation internationale. Dans un domaine qui relève en priorité - comme nous avons dit - de la compétence de chaque Etat, la pratique adoptée devrait, pour satisfaire à un principe général du droit des gens ou du droit coutumier, s'être imposée de manière particulièrement marquée au cours d'une longue période et avoir un caractère éminemment représentatif.

121.34

Conséquences

La ratification des conventions de Paris et de Bruxelles n'est possible à l'heure actuelle que si la législation suisse en la matière prévoit une limitation du montant de la responsabilité civile et sa couverture par des moyens privés et publics. Les montants-limites prévus dans les conventions peuvent être aisément dépassés, mais la responsabilité civile illimitée étant exclue, même si une couverture correspondante était assurée.

121.4 121.41

Concentration de la responsabilité Concept

Le principe de la concentration de la responsabilité civile sur l'exploitant se borne pour l'essentiel à établir qu'aucune autre personne ne peut être rendue responsable civilement en cas d'accident. Ainsi, des personnes ayant fourni des services, des matériels ou des appareils nécessaires au développement, à la 184

construction, à la modification, à la remise en état ou à l'exploitation de l'installation nucléaire ne sauraient être déclarées civilement responsables, même si leur activité ou leurs matériels ont contribué à causer le dommage.

En revanche, selon le droit général régissant la responsabilité civile, une personne lésée pourrait intenter une action en dommages et intérêts au fournisseur, si un accident était dû à une insuffisance des plans ou du matériel fourni et si la personne responsable devait répondre d'une faute qu'elle même ou ses auxiliaires ont commise.

De plus, en concentrant la responsabilité civile sur l'exploitant, on exclut tout recours de celui-ci (ou de l'assureur ou de toute autre personne ayant garanti une couverture financière et bénéficiant du droit de recours de l'exploitant) contre des employés, des fournisseurs, des ingénieurs ou des entrepreneurs à raison des dédommagements versés.

121.42

Loi actuelle sur l'énergie atomique

La loi de 1959 sur l'énergie atomique a déjà institué le principe de la concentration de la responsabilité civile. Cependant, craignant de ne pas pouvoir couvrir Ja responsabilité presque illimitée qui en découlait, et par conséquent d'entraver le progrès technique, on limita cette très stricte responsabilité causale au montant assuré prescrit par la loi. La réglementation adoptée visait donc d'une part à favoriser l'essor de la technique en déliant d'une responsabilité excessivement lourde les fournisseurs d'installations nucléaires et leurs sous-traitants, et, d'autre part à harmoniser la loi suisse avec la réglementation adoptée à l'étranger en ce qui concerne la responsabilité civile à l'égard de tiers dans le domaine de l'énergie nucléaire.

L'article 12 de la loi sur l'énergie atomique devait régler dans le détail cette concentration de la responsabilité civile sur l'exploitant de centrale nucléaire ou le détenteur d'une autorisation de transport. Il fut précisé que d'autres personnes n'encouraient aucune responsabilité et que si d'autres personnes devraient être déclarées civilement responsables en vertu d'accords internationaux, ces personnes pourraient recourir contre ledit exploitant.

121.43

Conventions de Paris et de Bruxelles

La convention de Paris du 29 juillet 1960 s'en tient également au principe de la concentration de la responsabilité. On a cependant fait une entorse à ce principe en ce sens que la convention prévoit la responsabilité civile de la personne physique qui cause intentionnellement l'accident.

Cette réglementation ne touche ni l'application des conventions internationales dans le domaine des transports, ni les principes du droit public international s'appliquant à la responsabilité civile des Etats les uns vis-à-vis des autres en cas de comportement fautif.

La convention complémentaire de Bruxelles ne change rien au principe de la concentration introduit dans la convention de Paris.

185

121.44

Concentration de la responsabilité civile dans l'optique actuelle

A l'heure actuelle, on se préoccupe avant tout d'assurer la protection du lésé.

On vise à le mettre en présence d'une personne civilement responsable, identifiable sans difficultés. II ne faut pas que le lésé doive se lancer lui-même dans une recherche longue et peut-être onéreuse pour savoir qui répond du dommage. Il ne faut pas non plus que, pressé par le temps, le lésé soit obligé de déposer plainte contre un grand nombre de personnes en risquant très souvent d'être débouté, uniquement pour ne pas omettre la personne civilement responsable en dernier lieu.

121.5 121.51

Recours des personnes civilement responsables contre des tiers Loi actuelle sur l'énergie atomique

En vertu de la loi actuelle (loi sur l'énergie atomique, art. 13), la personne responsable a un droit de recours contre les personnes physiques ou morales qui ont intentionnellement causé le dommage. Elle a également droit de recours contre ceux qui ont intentionnellement dérobé ou recelé des combustibles nucléaires ou des déchets radioactifs, ainsi que contre ceux qui ont expressément accepté qu'un recours soit exercé contre eux. Enfin, la loi réserve également le droit de recours contre l'exploitant, à l'étranger, de l'installation atomique, d'où proviennent les combustibles nucléaires et déchets radioactifs.

Cette réglementation correspond dans les grandes lignes à celle qu'établit la convention de Paris. Celle-ci ne prévoit en effet un droit de recours de l'exploitant que contre les personnes ayant intentionnellement causé le dommage ou dérobé les combustibles nucléaires ou substances radioactives. Ce recours ne peut s'exercer que contre des personnes physiques, et non contre des personnes morales. Lors des pourparlers qui ont précédé l'adoption de la convention de Paris, il fut abondamment question de savoir s'il ne conviendrait pas de prévoir un droit de recours en cas d'accident causé par négligence grave. On y renonça en se prévalant du fait que la négligence grave est très difficilement définissable. Au surplus, une telle clause aurait obligé les fournisseurs et autres coresponsables à s'assurer contre le risque qui en aurait découlé, entraînant une assurance multiple que l'on voulait éviter dans son principe. II paraissait très important pour le développement de l'industrie nucléaire que les risques peu fréquents mais élevés qu'elle comportait fussent assurés auprès d'un seul preneur d'assurance. Cette considération de caractère conduisit à restreindre fortement le droit de recours.

121.52

Conséquences

II est sans aucun doute parfois difficile de dire si quelqu'un a agi par négligence ou par négligence grave. Mais les tribunaux suisses ont dû si souvent déjà s'occuper de cette question qu'il paraît parfaitement possible de décider dans un cas d'espèce.

186

Nous estimons que les arguments qui ont conduit le législateur à limiter le droit de recours aux cas de dommages causés intentionnellement ne sont pas défendables, du point de vue suisse du moins. La négligence grave est - de même que l'intention - de nature à interrompre le rapport de causalité adéquat pour autant qu'elle réside dans la faute propre du lésé ou la faute de tiers. La négligence simple n'a pas cet effet.

La concentration de la responsabilité civile fait que l'exploitant répond des dommages, même s'ils résultent de fautes de tiers (négligence simple, négligence grave, intention). Comme le droit ordinaire de la responsabilité civile délie de la responsabilité lorsqu'il y a dommage intentionnel ou par négligence grave, l'intention et la négligence grave doivent aussi être mis sur le même pied en ce qui concerne Je droit de recours de la personne civilement responsable.

De même, l'argument de la multiplicité d'assurances que l'on voudrait éviter ne convainc plus. Les divers fournisseurs disposent certainement d'ores et déjà d'une couverture d'assurance. Il n'est cependant guère probable que cette couverture puisse suffire en cas de grave sinistre nucléaire. Il faut cependant considérer deux choses: 1. L'octroi d'un droit de recours ne signifie pas qu'un recours doive être obligatoirement et intégralement formé.

2. Selon le droit suisse, «l'assureur est autorisé à réduire ses prestations dans une proportion correspondante au degré de la faute» lorsque l'assuré ou l'ayant-droit a causé le dommage par négligence grave (loi sur le contrat d'assurance, art. 14, 2e al.).

Dès lors, même si le tiers qui a agi par négligence grave était au bénéfice d'une assurance couvrant en principe la totalité des dégâts causés, il ne pourrait probablement pas compter sur cette couverture intégrale en cas d'accident.

121.6

Exonération de la personne civilement responsable

121.61

Loi actuelle sur l'énergie atomique

Le droit actuel prévoit (art. 14 de la loi sur l'énergie atomique) trois cas où la responsabilité civile n'est pas encourue: des cataclysmes naturels de caractère exceptionnel, des faits de guerre et une faute grave du lésé. L'exonération totale de la personne civilement responsable n'est cependant possible que si aucune faute n'est imputable à elle-même ou à une personne dont elle répond.

Ainsi, la loi de 1959 constitue un compromis: d'une part, la faute grave commise par un tiers n'est pas considérée comme un motif d'exonérer l'exploitant de la responsabilité civile. Celui-ci engage donc sa pleine responsabilité en cas d'acte de sabotage non lié à un fait de guerre. D'autre part, la «force majeure» et la faute grave du lésé restent des causes d'exonération. Quant aux faits de guerre, ils devraient aussi constituer une cause d'exonération.

121.62

Conventions de Paris et de Bruxelles

Aux termes de l'article 9 de la convention de Paris, l'exploitant d'une installais?

tion nucléaire n'est pas civilement responsable des dégâts causés par un accident nucléaire si cet accident résulte d'actes commis lors d'un conflit armé, d'une guerre civile ou d'émeutes. Un autre motif d'exonération mentionné par la convention de Paris, est «un cataclysme naturel de caractère exceptionnel», II ressort du commentaire qu'une telle catastrophe doit être destructrice et entièrement imprévisible. En ce qui concerne l'exonération par suite de «cataclysme naturel de caractère exceptionnel», la convention admet une dérogation: la législation du pays de l'exploitant civilement responsable peut éliminer ce motif d'exonération et déclarer l'exploitant responsable même en cas de grave catastrophe de caractère exceptionnel.

121.63

Coup d'oeil au-delà des frontières

Les gouvernements de la République fédérale d'Allemagne et de la République d'Autriche ont signé la convention de Paris en se réservant de déclarer dans leur législation que l'exploitant d'une installation nucléaire serait civilement responsable même pour les dommages directement imputables à des actes de guerre ou à de graves cataclysmes naturels de caractère exceptionnel (art. 9 de la convention de Paris, cf. ch. 121.62 ci-dessus).

En vertu de cette réserve, la RFA a précisé dans sa loi sur l'énergie atomique que l'article 9 de la convention de Paris ne serait pas applicable (art. 25, 4e al., de la loi allemande sur l'énergie atomique).

121.64

Conséquences

Les motifs d'exonération «force majeure» et «actes de guerre» ne sont suffisamment bien définis ni dans le texte de la convention de Paris ni dans celui de la loi actuelle sur l'énergie atomique (de 1959). Il paraît extrêmement difficile, sinon impossible de leur trouver une définition satisfaisante excluant les conflits entre l'exploitant responsable et le lésé. C'est pourquoi il est indiqué de ne pas considérer comme des motifs d'exonération la «faute grave commise par un tiers» ni la «force majeure». Dès lors, l'exploitant est civilement responsable même des dommages résultant d'actes de guerre de quelque nature que ce soit. L'éventail des possibilités allant de l'acte de sabotage à la guerre mondiale est alors intégralement visé, en ce sens que l'exploitant est civilement responsable des dommages même s'ils se produisent par suite d'actes de ce genre.

Nul n'a jamais contesté que la faute grave du lésé doit constituer un motif d'exonération. Il serait en effet choquant qu'il faille par exemple indemniser un saboteur du dommage qu'il a subi en perpétrant son acte. C'est pourquoi nous estimons qu'il faut maintenir ce seul motif d'exonération. Le terme de «faute grave du lésé» englobe aussi bien l'intention frauduleuse que la négligence grave. Ce motif d'exonération de la personne civilement responsable correspond donc à son droit de recours.

188

121.7

Prescription

121.71

Loi actuelle sur l'énergie atomique

Le droit actuel (art. 17 de la loi sur l'énergie atomique) s'inspire des dispositions sur la prescription de la loi sur la circulation routière. Le délai de prescription relative est de 2 ans (à compter du jour où le lésé a eu connaissance du dommage et de la personne qui en est responsable), le délai de prescription absolue de 10 ans (dès le jour où l'influence nocive s'est produite).

En 1959 déjà, le législateur a reconnu qu'à elle seule, cette disposition ne pouvait donner satisfaction.

On envisagea de la modifier en portant de 10 à 30 ans le délai de prescription absolue. Les assureurs déclarèrent cependant ne pas pouvoir accepter un tel risque. On créa donc le Fonds pour dommages différés. Les prétentions des lésés contre la personne civilement responsable se prescrivent toujours après 10 ans. A l'expiration de ce délai, les lésés peuvent cependant faire valoir leurs prétentions contre le Fonds pour dommages atomiques différés. Ils ont à cet égard les mêmes droits qu'à l'égard de la personne responsable avant l'expiration du délai. Seule la capacité d'être actionné change. Le lésé doit cependant également s'en tenir, en l'occurrence, au délai de prescription de 2 ans (à compter du jour où il a eu connaissance du dommage et de la personne qui en est responsable).

121.72

Conventions de Paris et de Bruxelles

Aux termes de la convention de Paris, le droit au dédommagement s'éteint si une action n'est pas intentée dans les 10 ans qui suivent l'accident nucléaire.

Les Etats contractants peuvent cependant fixer un délai plus court, mais d'au moins 2 ans à compter du jour où le lésé a eu (ou aurait dû avoir) connaissance du dommage et de l'exploitant responsable. La limite de 10 ans ne doit en aucun cas être dépassée; ce délai peut, dans certaines conditions, être passagèrement suspendu, voire interrompu. De telles interventions ne doivent cependant pas entraîner la prolongation du délai au-delà de 10 ans. Au contraire, l'Etat peut considérer le délai le plus court comme mettant fin à la possibilité d'intenter une action en dommages-intérêts, II existe deux cas où l'action peut être intentée au-delà du délai de 10 ans: 1. Lorsqu'on vertu de la législation nationale, la responsabilité civile de l'exploitant est couverte au-delà de ce délai, on peut prévoir la possibilité d'intenter des actions durant la prolongation du délai.

2. En cas d'amplification du dommage à la suite duquel une action en dommages et intérêts a été intentée en temps voulu, on peut faire valoir des prétentions supplémentaires après l'expiration de ce délai, pour autant que le tribunal compétent n'ait pas encore tranché.

121.73

Conséquences

II n'est pas facile de savoir si, fixant un délai de prescription «absolue» de 10 ans, le législateur suisse a pensé à un délai de prescription interruptible ou à

189

un délai de péremption. En revanche, selon la convention de Paris, il s'agit sans aucun doute de la péremption des prétentions.

L'insécurité du droit actuel ne joue pratiquement aucun rôle pour le lésé. Pour l'avenir, il conviendrait cependant de choisir une formulation qui précise sans équivoque jusqu'à quel moment les revendications doivent être adressées à l'exploitant civilement responsable (ou à son assureur) et à partir de quel moment il faut appliquer les dispositions éventuelles régissant les dommages différés. Nous pensons donc qu'on ne peut se contenter d'une simple norme de prescription. Il conviendrait d'adopter un délai de péremption, qui créerait une véritable césure par rapport à la période de réparation des dommages différés.

La question est de savoir quel doit être ce délai de péremption.

A notre avis, le plus grand nombre possible de dommages devrait être mis à la charge de la personne civilement responsable et de son assurance. Les cas de règlement des dommages différés devraient être très limités. Selon le droit actuel, un dommage est considéré comme différé s'il commence de se manifester plus de 10 ans après l'événement qui en est la cause. Les données disponibles à l'heure actuelle montrent que ce délai de 10 ans est incontestablement trop court. Il n'existe pas encore d'indications définitives sur la durée du risque de cancer résultant d'une irradiation. Ainsi, la leucémie par irradiation apparaît après une période de latence de 0 à 2 ans et ne disparaît qu'après 25 ans environ (cf. à ce sujet «The effects on populations of exposure of low levels of ionizing radiations», Report of thé Committee on thé biological effects of ionizing radiations, lettre du 21 septembre).

Pour toutes les autres formes de cancer, le rapport Rasmussen (Reactor safety study, WASH-1400, appendix VI et les ouvrages qui y sont cités) donne une période de latence de 10 à 15 ans, suivie d'une période de risque de 30 ans. Les organes compétents fondent donc leurs évaluations du risque sur une durée de 40 à 45 ans pendant laquelle le risque de cancer est plus élevé par suite de l'irradiation. Le comité UNSCEAR (United Nations Sdentine Committee on thé Effects of Atomic Radiations) admet que 25 ans après l'irradiation, 50 pour cent des cas de cancer induits sont apparus. En conséquence, un délai de
péremption de 30 ans, par exemple ferait mettre à la charge de la personne civilement responsable et de son assurance 50 pour cent des cas de cancer et pratiquement 100 pour cent des cas de leucémie.

Les prescriptions actuelles des organes compétents des Communautés européennes concernant la protection contre les radiations imposent la conservation pendant 30 ans, par les organes de contrôle, des données dosimétriques des personnes professionnellement exposées aux radiations.

Le seuil de 30 ans paraît donc être reconnu aujourd'hui. Il conviendrait par conséquent de ne libérer de sa responsabilité financière la personne civilement responsable qu'après un délai de 30 ans. Comme les assureurs ne sont pas en mesure d'accorder une couverture allant au-delà des 10 années actuellement convenues, la Confédération se verra obligée, pour les 20 années subséquentes, de jouer le rôle d'assureur en garantissant une couverture pour laquelle des primes devront être versées.

190

Du moment que le délai de prescription de 10 ans devient un délai de péremption de 30 ans, nous pensons qu'il est indiqué de porter de 2 à 3 ans le délai de prescription relative.

Il faut remarquer ici qu'aux termes de notre projet, la Confédération devra couvrir, jusqu'à concurrence d'un milliard de francs, les dommages nucléaires pour lesquels aucune action ne pourra plus être intentée contre la personne civilement responsable, après l'expiration du délai de 30 ans dont il vient d'être question. Cette disposition remplace la réparation des dommages différés telle qu'elle est prévue aux articles 18 et 19 de la loi actuelle sur l'énergie atomique.

122

Ratification des conventions de Paris et de Bruxelles?

Comme nous l'avons dit plus haut (ch. 121.3), l'adoption de la responsabilité civile limitée de l'exploitant d'une installation nucléaire constitue actuellement un obstacle insurmontable à la ratification des conventions de Paris et de Bruxelles. Nous estimons qu'il n'existe pas d'argument juridique en faveur du maintien d'une responsabilité civile financièrement limitée. Il s'agit donc de savoir si des arguments d'un autre ordre, parlant en faveur de la ratification des deux conventions, auraient plus de poids.

122.1

Considérations politiques

La Suisse a signé aussi bien la convention de Bruxelles que celle de Paris. Ce faisant, notre pays a donné son accord de principe à la réglementation prévue dans ces conventions. Juridiquement, la signature de ces accords multilatéraux laisse toute latitude quant à leur ratification. Il est cependant une coutume qui veut que notre pays ratifie les accords signés à moins que des éléments décisifs, intervenus après la signature, ne s'y opposent.

On avait à l'époque ajourné la ratification en faisant valoir qu'il fallait attendre de connaître le comportement d'autres Etats européens en cette affaire ainsi que le résultat des pourparlers qui se poursuivaient dans le cadre de l'OIEA en vue d'un accord mondial sur la responsabilité civile.

Entre-temps, la majorité des Etats de l'OCDE a ratifié les deux conventions. Il s'agit des Etats suivants: RFA, Danemark, Finlande, France, Grande-Bretagne, Italie, Norvège, Espagne et Suède. De tous les Etats limitrophes de la Suisse, seule l'Autriche ne l'a pas fait. La ratification a été favorisée par l'accroissement du nombre des centrales nucléaires de forte puissance construites ou en construction, souvent dans le voisinage des frontières. En effet : - les effets d'accidents nucléaires pourraient s'étendre au-delà des frontières, et par ailleurs, - les sociétés d'assurance européennes doivent collaborer aux fins d'offrir des garanties permettant de couvrir les dommages. Une réglementation uniforme facilite une telle collaboration.

191

122.2

Protection des lésés

On constate donc que la Suisse ne peut plus justifier sa réserve par les arguments avancés jadis. Une autre raison s'est cependant opposée jusqu'ici à la ratification, comme nous l'avons dit dans notre message du 24 août 1977 concernant le complément à la loi sur l'énergie atomique (FF 1977 III 351).

Les négociations sont actuellement axées sur une redéfinition des unités de compte (droits de tirage spéciaux au lieu des unités de la convention monétaire européenne), éventuellement liée à un accroissement de la couverture. Des projets ont été présentés à cet effet.

Le passage des unités de compte actuellement utilisées à des droits de tirage spéciaux entraînerait pour la Suisse une réduction de la couverture prescrite par les conventions. En 1960/61, 120 millions d'unités de compte (UC) (maximum prévu dans la convention de Bruxelles représentaient quelque 520 millions de fr. suisses). L'adoption des droits de tirage spéciaux ramènerait ce montant à environ 260 millions de francs. La RFA, l'Autriche, la Belgique, le Luxembourg et les Pays-Bas bénéficieraient d'une réduction analogue, quoique moins prononcé. En revanche, d'autres Etats devraient s'attendre à de fortes augmentations (150% environ pour l'Espagne et la Grèce, près du double pour l'Italie, plus du double pour le Portugal et la Grande-Bretagne, plus du triple pour la Turquie), Dès lors, il est extrêmement douteux que les experts ayant mandat de revoir les deux conventions puissent se mettre d'accord sur un remplacement des unités de compte. Quant au second objectif de cette revision, à savoir doubler le montant de la couverture prescrit par les conventions, il nous semble que les chances de l'atteindre sont encore plus faibles. En conséquence, l'une des raisons d'être de ces deux conventions, est de garantir aux lésés une couverture suffisante des dommages subis, semble bien compromise.

Comme le montre l'exemple de la République fédérale d'Allemagne, la protection financière que les conventions garantissent aux lésés n'est pas partout considérée comme suffisante. Avec sa couverture d'un milliard de DM, la RFA va fort au-delà du maximum prévu par la convention de Bruxelles, qui équivaut à environ 480 millions DM. Cependant, cette somme ne saurait profiter également à tous les lésés. En effet, si l'accident survient dans un Etat contractant
de la convention complémentaire de Bruxelles, la couverture de la responsabilité civile se monte à 120 millions d'UC. Si l'accident se produit dans un autre Etat, cette somme se réduit à 15 millions d'UC. Les personnes lésées hors des frontières de l'Allemagne ne bénéficient de la couverture du milliard que si l'Etat en question assure un traitement équivalent à celui de la RFA par sa nature et son ampleur (selon le § 31 de la loi allemande sur l'énergie atomique).

Les autres Etats limitrophes de la Suisse ayant des centrales nucléaires en service (la France et l'Italie) se contentent du régime proposé dans les conventions de Paris et de Bruxelles. Si la Suisse ratifiait les deux conventions, adoptant ainsi le principe de la responsabilité civile limitée, les personnes lésées dans notre pays seraient mises sur le même pied que si elles résidaient en France ou en Italie. Si la Suisse ne ratifie pas les conventions, il dépendra du 192

droit privé international de l'Etat entrant en considération que le tribunal appelé à trancher le fasse selon le droit suisse ou non. Si c'est le droit de l'autre pays qui est applicable, il est possible que les dispositions en question exigent des réparations inférieures non seulement à celles du droit suisse, mais aussi aux limites fixées dans les conventions. Quelle que soit la décision prise par notre pays en ce qui concerne la ratification, nous estimons qu'il conviendrait de veiller à ce que les personnes lésées en Suisse bénéficient de la protection financière prévue dans la loi suisse, même si l'accident se produit à l'étranger, II ne serait pas équitable que des personnes lésées en Suisse soient dédommagées de manière aussi inégale pour la simple raison que l'Etat voisin prescrit une couverture de la responsabilité civile que nous considérons comme trop faible.

Si la Suisse ratifiait les deux conventions, les personnes lésées dans notre pays ne seraient donc pas, de ce fait, avantagées vis-à-vis de la personne responsable en France ou en Italie, Inversement, pour que des personnes lésées en Suisse bénéficient, vis-à-vis de la personne responsable en RFA, de la même protection financière que les personnes lésées en Allemagne, la Suisse doit s'imposer une couverture d'un milliard, même si elle ratifie les conventions de Paris et de Bruxelles.

En conséquence, nous estimons que la seule ratification des conventions de Paris et de Bruxelles n'assure pas à ceux qui pourraient être lésés une protection financière suffisante. La Suisse doit de toute manière prévoir dans sa loi des réparations qui vont plus loin. C'est pourquoi la ratification ne s'impose pas, de ce point de vue.

122.3

Unification du droit

L'unification du droit est un objectif essentiel que visent les conventions de Paris et de Bruxelles. A ce sujet, l'exposé des motifs de la convention de Paris précise ce qui suit: 3. Le régime spécial de la responsabilité civile devrait, autant que possible, reposer sur des principes uniformes pour tous les pays d'Europe occidentale. Les effets et les répercussions d'un accident nucléaire ne s'arrêteront pas aux frontières politiques ou géohraphiques et il est vivement souhaitable que les personnes soient protégées aussi bien d'un côté que de l'autre de la frontière.

4. En outre, l'ampleur que peut prendre un accident nucléaire impose une coopération internationale entre les pools nationaux d'assurances.

Seul un regroupement efficace des ressources du marché européen des assurances, notamment par la co-assurance et la réassurance, permettra la constitution d'une garantie financière suffisante pour faire face aux demandes de réparation qui pourraient être présentées. L'établissement des règles uniformes de responsabilité civile dans toute l'Europe est essentiel pour que cette collaboration se réalise.

Dans son avis d'expertise, le professeur J.-P. Müller s'est exprimé sur la question de l'unification du droit : II convient de ne pas surestimer la contribution de la convention de Paris à l'unification du droit dans le domaine de la RC nucléaire. D'une part, cette convention n'aborde pas la question, importante, de la RC des Etats 14 Feuille fédérale. 112* année. Vol. r

193

considérés sous l'angle du droit des gens (...); le principe de la stricte responsabilité causale, par exemple, était appliqué, du moins théoriquement, dans la plupart des pays industrialisés de l'Ouest, avant l'élaboration de la convention de Paris déjà. D'autre part, la convention laisse les Etats contractants très libres de fixer les limites financières et dans le temps de la RC, qui revêtent pour les lésés une importance primordiale. C'est du reste sur ce point que les différentes législations nationales diffèrent fortement : Si le régime allemand, qui prévoit un milliard de DM et 30 ans de délai de prescription, est relativement favorable aux lésés, l'Italie, de son côté, a choisi une solution minimale (cf. «La réparation des dommages nucléaires dans les pays membres de l'OCDE», p. 82).

En ratifiant les conventions, la Suisse n'apporterait qu'une contribution relativement modeste à l'unification du droit. On peut admettre que les principes de la stricte responsabilité causale et de la responsabilité exclusive de l'exploitant (concentration) sont suffisamment ancrés dans notre pays pour rester valables à l'avenir même sans engagement contractuel. Quant à la limitation, financière et dans le temps, de la RC, la Suisse devrait formuler des réserves si importantes (...) que sa décision de ratifier ne contribuerait guère à l'harmonisation du droit.

Tout bien considéré, l'unification du droit n'est pas un argument qui parle en faveur de la ratification des deux conventions.

Il faut cependant remarquer que les conventions de Paris et de Bruxelles ne constituent pas un tout achevé, mais que les efforts entrepris en vue d'unifier le droit se poursuivent. Il appartiendra donc au Conseil fédéral de prêter attention à l'évolution qui se dessine à cet égard.

122.4

Considérations économiques

On entend dire quelquefois que la Suisse devrait ratifier les deux conventions parce que sans cela, notre industrie nucléaire pourrait être entravée dans son activité. On craint que notre industrie nucléaire n'éprouve des difficultés à placer ses produits à l'étranger et à se faire approvisionner par l'étranger. Nous ne partageons pas ces craintes. Bien que notre pays n'ait pas ratité les conventions, l'industrie nucléaire suisse n'a pas éprouvé, jusqu'à ce jour, de difficultés découlant de leur non-ratification. Manifestement, les difficultés auxquelles il faut s'attendre n'ont rien à voir avec la ratification proprement dite des deux conventions. Elles sont plutôt liées au régime helvétique de la responsabilité civile. C'est surtout le droit de recours de l'exploitant responsable à rencontre d'ingénieurs, de fournisseurs, d'entrepreneurs, etc., qui est en cause.

Si ce droit n'est pas modifié par rapport à ce qu'il est dans la loi actuelle sur l'énergie nucléaire (art. 13), qui correspond dans une large mesure aux dispositions de la convention de Paris, il n'y a certainement pas lieu de s'attendre à des difficultés économiques. Il en va de même si l'on prévoit un droit de recours de la personne civilement responsable à l'encontre de celui qui a contribué, par négligence grave, à causer le dommage. Sur ce point encore, la ratification des conventions de Paris et de Bruxelles ne s'impose donc pas.

122.5

Obligations financières de la Confédération

Comme nous l'avons exposé sous chiffre 111.22, la convention complémentaire de Bruxelles prévoit que le dédommagement interviendra à raison de trois 194

tranches, le financement de la troisième étant assuré par tous les Etats signataires selon une clef de répartition. Selon cette clef, la Suisse devrait contribuer pour environ 11 millions de francs suisses à la couverture d'un accident nucléaire de 520 millions de francs ou davantage dont serait civilement responsable une personne résidant dans un autre Etat contractant de la convention complémentaire de Bruxelles. Inversement, en cas d'accident causé par une personne civilement responsable résidant en Suisse, notre pays recevrait des autres Etats contractants de la convention complémentaire de Bruxelles, au plus, 209 millions de francs environ (les deux montants indiqués résultent d'évaluations fondées sur les données disponibles fin 1978 avec inclusion de la centrale de Gosgen-Daniken).

Ces montants ne pourraient cependant être obtenus que dans la mesure où la Confédération aurait libéré des fonds publics au titre de réparations. Aussi longtemps qu'elle se contenterait de fournir des prestations d'assurance, il est douteux que les conditions soient remplies pour le versement de contributions de l'étranger.

Il n'est pas facile de déterminer si, à cet égard, les avantages de la ratification l'emportent sur les inconvénients, ou inversement. Nous croyons cependant que la réponse donnée à cette question n'a pas un caractère décisif; en effet, la charge financière incombant à la Confédération du fait de la convention complémentaire de Bruxelles ne joue incontestablement qu'un rôle secondaire par rapport à toutes les autres charges financières qu'elle est disposée à assumer dans le domaine de la responsabilité civile en matière nucléaire.

122.6

Conclusion

En définitive, ce sont surtout des raisons politiques qui parlent en faveur de la ratification des conventions de Paris et de Bruxelles. Il se pourrait que les Etats contractants aient probablement de la peine à comprendre qu'après avoir signé ces conventions, la Suisse renonce expressément à les ratifier, faisant une fois de plus cavalier seul en Europe de l'Ouest. Toutefois, il convient de rappeler que la non-ratification d'accords internationaux n'a rien d'exceptionnel. Si nous examinons objectivement les avantages et les inconvénients de la ratification, nous ne pouvons nous empêcher de constater que ni la protection des lésés, ni l'unification souhaitée du droit, ni des considérations économiques ne parlent en faveur de la ratification des conventions de Paris et de Bruxelles, au contraire : la ratification aurait l'inconvénient majeur d'obliger la Suisse à s'en tenir au principe de la responsabilité civile limitée. Nous estimons donc qu'il conviendrait de nous abstenir de ratifier ces deux conventions, à tout le moins aussi longtemps qu'un tel acte nous interdit d'adopter la responsabilité civile illimitée pour les exploitants d'installations atomiques helvétiques. La question de la ratification pourrait du reste être réétudiée si un jour les Etats contractants étaient disposés à interpréter désormais les deux conventions de telle manière que la responsabilité civile illimitée puisse être admise dans la législation nationale lorsque la réparation des dommages selon les conventions de Paris et de Bruxelles est garantie, 195

13

Procédure de consultation

131

Généralités

Le 31 janvier 1979, le Département fédéral des transports, des communications et de l'énergie a soumis aux gouvernements des cantons, aux partis politiques et aux associations faîtières de l'économie ainsi qu'à d'autres organisations intéressées le projet d'une loi sur la responsabilité civile en matière nucléaire élaboré par la Commission pour la revision de la loi atomique, projet accompagné d'un rapport explicatif.

La consultation a montré qu'à de rares exceptions près, on approuve le principe d'une loi spécifique sur la responsabilité civile en matière nucléaire.

Les auteurs de certains avis ont cependant relevé qu'il est aussi possible de régler ces questions dans le cadre de la révision totale de la loi atomique, qui est en cours (Baie-Ville, Vorort).

Tous les organes consultés considèrent comme opportune la nouvelle réglementation de la responsabilité civile en matière nucléaire, estimant qu'elle répond à une nécessité, politique notamment.

On comprend aussi le souci de faire concorder dans toute la mesure du possible la législation sur l'énergie nucléaire avec les principes généraux du droit suisse en matière de responsabilité civile. Mais des références générales au code des obligations ne suffisent pas à assurer cette concordance.

Le principe de la responsabilité causale et de la responsabilité exclusive de l'exploitant d'une centrale nucléaire (concentration de la responsabilité) est également approuvé sans réserve.

132

Résultats de la consultation

132.1

Responsabilité civile illimitée

Des opinions différentes ont été exprimées quant à la responsabilité civile illimitée de l'exploitant d'une installation nucléaire. Plusieurs avis ont relevé qu'une responsabilité civile d'un montant limité ne saurait se justifier sérieusement ni sur le plan politique, ni sur celui du droit. On ne voit pas pourquoi on ferait à cet égard une exception pour l'énergie nucléaire. En dehors de la Loi sur la navigation maritime, (art, 49), la Suisse ne connaît aucune limitation de la responsabilité non contractuelle. La Loi sur la navigation aérienne, par exemple, maintient la responsabilité illimitée des compagnies de navigation aérienne à l'égard de tiers en cas de chutes d'aéronefs, contrairement aux principes de la Convention de Rome de 1933 sur la responsabilité civile dans la navigation aérienne, sans que le développement de la navigation aérienne suisse en ait été sérieusement entravé. Les cantons de Baie-Ville et BaieCampagne estiment qu'il convient de prévoir la responsabilité illimitée de la Confédération. Le canton de Neuchâtel pense que les dommages immédiats devraient donner lieu au versement d'un capital, les dommages différés au paiement d'une rente. Tous les partis consultés se prononcent en faveur de la responsabilité civile illimitée. Selon le Vorort, le projet de loi constitue une

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base intéressante pour l'analyse du problème. La Vorort évoque notamment les effets que cette législation pourrait exercer sur d'autres secteurs du droit de la responsabilité civile, notamment sur la responsabilité civile du fait des produits en général. Il tient à ce qu'on évite de créer un précédent (p. ex. une responsabilité civile du fait des produits sans limitation de la somme dans le CO). L'Association des banquiers estime que des motifs politiques parlent en faveur d'une responsabilité illimitée. De même, l'Association pour l'énergie nucléaire considère la responsabilité civile illimitée comme étant nécessaire sur le plan de la politique intérieure et objectivement défendable. Sont préoccupés par l'introduction de la responsabilité civile illimitée: l'Union des centrales suisses d'électricité, le Groupe des projetants et exploitants de centrales nucléaires, le Pool suisse d'assurance des risques nucléaires et l'Association suisse d'assurances. Aucun pays occidental ne connaît la responsabilité civile illimitée et aucune branche industrielle ni aucun autre agent énergétique ne dispose d'une couverture d'assurance obligatoire aussi développée. Cependant, de manière générale, on admet le principe d'une responsabilité élargie pour les exploitants de centrales. Si les nouvelles aggravations prévues dans le projet devaient être admises, il semble par ailleurs que la limitation de la responsabilité civile à un montant élevé (1 milliard p. ex.) se justifierait.

132.2

Couverture de la responsabilité civile

Une large majorité des réponses approuvent la couverture prévue des dommages par un assureur privé jusqu'à concurrence de 200 millions de francs et par la Confédération jusqu'à un total d'un milliard. Toutefois, on relève aussi que la réglementation prévue en matière de responsabilité civile et d'assurancej qui va plus loin, semble-t-il, que dans n'importe quel autre Etat, entraînera nécessairement des conséquences économiques sous forme de renchérissement de l'électricité. Aussi préconise-t-on une obligation de s'assurer qui, compte tenu des risques possibles, reste raisonnablement proportionnée aux coûts qui en résultent. Selon le canton des Grisons, la Confédération ne devrait avoir à supporter les dommages non couverts qu'en cas de grand sinistre. Il conviendrait en tout cas d'augmenter l'assurance minimale des exploitants de centrales. Considèrent comme insuffisants les 200 millions de francs de l'assurance privée: les cantons de Baie-Ville, Baie-Campagne, Grisons, le PS, le PDC, l'Union syndicale, l'Union suisse des syndicats autonomes, les organisations de protection de l'environnement. Le PS est provisoirement disposé à accepter une limitation de l'obligation d'assurance à 500 millions de francs pour les installations existantes. Pour les nouvelles installations, on a demandé qu'une obligation illimitée de s'assurer corresponde à la responsabilité civile illimitée.

Le Vorort, l'UCS, le Groupe des exploitants de centrales nucléaires et de ceux qui projettent d'en construire, ainsi que l'Association des banquiers estiment qu'il faudrait avoir des données sur l'importance des contributions qui devront être versées à la Confédération pour se faire une juste idée de la couverture automatique qu'elle assurera. L'USS propose de relever de 100 millions de francs par année la couverture assurée par la Confédération, jusqu'à concurrence d'un total de 3 milliards de francs.

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Bàie-Ville, Bàie-Campagne et les organisations de protection de l'environnement demandent que la Confédération assume une responsabilité civile subsidiaire illimitée. Au cas où le montant de la couverture assurée par la Confédération devrait malgré tout être limité, les organisations de protection de l'environnement se prononcent en faveur d'un montant de 10 milliards de francs. L'Association suisse des salariés évangéliques demande une assurance obligatoire d'au moins 500 millions de francs. Les organisations de protection de l'environnement réclament une couverture minimale d'un milliard. Une couverture supérieure à 50 millions de francs est quelquefois demandée pour les réacteurs de recherche et les transports.

La compétence accordée au Conseil fédéral de définir par voie d'ordonnance d'autres termes utilisés dans la loi sans être lié aux définitions de la loi sur l'énergie atomique est parfois considérée comme discutable, voire inadmissible.

De même, la compétence du Conseil fédéral de prévoir pour des combustibles nucléaires et des déchets de faible radioactivité des exceptions aux dispositions de la loi qui touchent la responsabilité civile et l'obligation de s'assurer a été maintes fois qualifiée d'inacceptable. Par ailleurs, certains avis approuvent cette compétence en faisant état de la souplesse nécessaire.

En ce qui concerne l'exclusion de la responsabilité civile, ce sont surtout les raisons d'une telle exclusion qui soulèvent des questions. Faute d'une énumération, on ne voit pas quelles raisons pourrait invoquer la personne civilement responsable.

Tant pour les transporteurs que pour les exploitants et les assureurs, le problèmes de la responsabilité civile durant les transports n'est pas réglé de manière suffisamment claire. La formulation de la loi atomique en vigueur paraît meilleure.

Les auteurs de nombreux avis estiment que le droit de recours ne devrait pas s'exercer seulement à l'encontre de personnes physiques, mais aussi, en vertu de la loi, à rencontre de personnes morales. L'industrie nucléaire fait valoir qu'il n'y a pas de raison de prévoir un recours, même en cas de négligence grave. Un tel droit porterait gravement atteinte au principe de la concentration de la responsabilité sur l'exploitant de la centrale.

Quant aux délais de prescription et de péremption,
les avis sont très partagés.

Ce sont en particulier les milieux de l'économie énergétique qui hésitent à accorder aux lésés un délai de péremption de 30 ans pour faire valoir leurs droits. Ce délai paraît se situer à l'extrême limite admissible. Le PS en revanche estime qu'il serait plus sensé de fixer le délai de péremption à 50 ans, ajoutant que l'exploitant d'une installation devrait conserver sa personnalité juridique jusqu'à l'expiration de ce délai (après désaffectation d'une centrale, p.

ex.). Dès lors, la dissolution d'une société exploitante devrait être soumise à l'octroi d'une autorisation. Le canton d'Argovie et l'USS se prononcent également en faveur d'un délai de péremption prolongé.

Selon les assurances privées, une couverture responsabilité civile par accident ne peut être obtenue actuellement, en principe, que si l'on fixe en même temps un maximum par installation, y compris les intérêts et les frais.

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On considère quelquefois comme inopportun ou superflu que le Conseil fédéral puisse dispenser de l'obligation de s'assurer.

Le PS estime que l'obligation d'annoncer aux autorités la suspension ou la cessation de l'assurance ne suffit pas : l'autorisation d'exploiter devrait s'éteindre au moment où cesse l'assurance. En revanche, les milieux de l'économie énergétique et les assureurs trouvent injustifiée l'extension de 6 mois à trois ans du délai d'annonce.

Nombre d'avis exprimés ont critiqué le fait qu'on n'a pas donné de précisions sur le calcul et le montant des contributions à fournir à la Confédération pour le prix de ses engagements.

La constitution d'un fonds auquel seraient versées les contributions des personnes responsables est unanimement approuvée. De même, les réponses ont généralement approuvé les dispositions relatives à la procédure probatoire, au for et aux grands sinistres.

Quant aux dispositions transitoires, nombre d'avis ont demandé qu'elles soient revues.

133

Conventions de Paris et de Bruxelles

Le fait que les conventions de Paris et de Bruxelles n'ont pas été ratifiées a suscité certaines appréhensions. Il conviendrait d'étudier la possibilité de procéder à cette ratification, éventuellement en faisant des réserves, cela pour des raisons non seulement juridiques, mais aussi économiques et par prévoyance. On pourrait également envisager de conclure des accords bilatéraux avec les Etats entrant en ligne. de compte. De manière générale, les avis exprimés demandaient que l'on fasse une "analyse plus poussée des avantages et des inconvénients que la non-ratification présenterait pour la Suisse.

14

Classement d'interventions parlementaires et d'initiatives des cantons

Outre les interventions parlementaires et les initiatives des cantons dont le classement est recommandé (lettre introductive), le projet de loi donne en partie suite à deux postulats. Il s'agit du postulat 75.408 du Parti socialiste du 17 juin 1975 concernant la révision de la loi sur l'énergie atomique et du postulat 75.430 du groupe de l'Alliance des indépendants du 20 juin 1975. En cas d'adoption du projet de loi, il ne serait pas possible de réaliser les exigences posées par l'initiative du canton d'Argovie (n° 11 671) du 27 mars 1973, du canton de Baie-Campagne (n° 11 877) du 21 janvier 1974 et du canton de BaieVille (n° 12 018) du 29 mars 1974, en tant qu'elles demandent la ratification des conventions de Paris et de Bruxelles. A l'exception des deux interventions que nous proposons de classer, toutes les interventions et initiatives devront être traitées dans le cadre de la revision totale de la loi, qui est en cours; en conséquence, nous ne pouvons pas encore vous proposer de les classer.

199

2

Projet de loi sur la responsabilité civile en matière nucléaire

21

Généralités

Pour les raisons indiqués plus haut, le projet vise, indépendamment de toute convention internationale, à établir une réglementation qui corresponde aux principes largement éprouvés de notre code des obligations, en assurant au lésé la meilleur protection possible contre les conséquences financières d'un dommage d'origine nucléaire.

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Principes de la responsabilité civile

La loi sur la responsabilité nucléaire obéit au principe de la concentration de la responsabilité civile: au lieu d'une multiplicité de personnes pouvant être rendues responsables pour diverses raisons, on en désigne une seule, tenue d'indemniser le lésé du dommage subi (cf. ch. 121.4). Ce principe est établi par le droit suisse depuis 1959.

H n'est pas question de s'en écarter, même si les conventions de Paris et de Bruxelles ne sont pas ratifiées. Généralement, c'est l'exploitant d'une installation nucléaire qui doit se porter garant des dommages ayant leur origine dans l'installation, et le bénéficiaire de l'autorisation de transport si l'accident survient à ce moment-là. Après un délai de 30 ans, la Confédération se substitue à ces personnes, afin que la réparation soit assurée même en cas de dommage différé.

Une application absolument conséquente du principe de la concentration voudrait que l'on refuse tout droit de recours à l'exploitant d'une installation.

Cependant, même la convention de Paris ne va pas si loin (art. 6, let. f).

Nous avons aussi considéré qu'il convient d'accorder à l'exploitant un droit de recours dans certains cas: ainsi, il doit pouvoir se retourner contre la personne qui a causé le dommage de manière préméditée ou par négligence grave, contre le voleur et le receleur et de manière générale contre les personnes qui lui ont expressément reconnu ce droit.

Au surplus, il ne faut pas oublier que les disponibilités propres de l'exploitant, qui peuvent servir à la couverture du dommage, sont accrues par son droit de recours. Selon la règle, l'assureur est subrogé à ce droit. Pour éviter qu'il ne s'indemnise lui-même, aux frais des lésés, il est prévu que l'assureur ne peut exercer son droit que dans la mesure où les lésés ne s'en trouvent pas désavantagés.

Il s'agit en l'occurrence d'une responsabilité causale, c'est-à-dire que l'exploitant est civilement responsable en vertu de la relation de cause à effet entre l'exploitant d'une installation nucléaire (ou le transport de matières radioactives) et le dommage, indépendamment du fait qu'une faute peut (ou ne peut pas) lui être imputée dans la survenance ou quant à l'ampleur du dommage. Il est civilement responsable parce qu'il a créé un risque, cela même lorsque l'accident est imputable finalement à des phénomènes naturels exceptionnels ou à des faits de guerre. Il ne peut se décharger de sa responsabilité que 200

lorsque et dans la mesure où il prouve que le dommage résulte de la faute grave du lésé lui-même; cela ne le décharge du reste que vis-à-vis du lésé ayant causé le dommage, mais non vis-à-vis de tiers lésés.

Il va de soi qu'aucun dommage ne peut être indéfiniment imputé à l'exploitant.

C'est la raison pour laquelle le lésé doit faire connaître ses prétentions dans les trois ans à compter du jour où il a eu connaissance du dommage et de la personne responsable. C'est une propriété du rayonnement nucléaire que de pouvoir causer des dommages n'apparaissant que des années après l'irradiation. Bien qu'il devienne difficile, en pareil cas, d'établir encore une relation de cause à effet entre l'exploitation d'une installation nucléaire ou un transport de matières et le dommage en question, le législateur ne peut se contenter de cette limitation «naturelle» aux prétentions découlant de la loi. Ne serait-ce que pour des raisons de sécurité du droit, mais aussi en vertu de la notion communément admise de ce qui est juste, le législateur doit fixer un délai à l'expiration duquel la personne civilement responsable et son assureur privé ne doivent plus s'attendre à de nouvelles revendications. C'est pourquoi le projet prévoit un délai de péremption de 30 ans (art. 9), à l'expiration duquel des actions en dommages et intérêts ne doivent plus être intentées contre l'exploitant, mais contre la Confédération (art. 12, Dommages différés).

212

Obligation de s'assurer

La concentration de la responsabilité civile réduit le nombre des personnes pouvant être rendues responsables; c'est pourquoi il convient d'accroître, pour l'unique personne civilement responsable, les moyens propres à assurer la couverture de dommages éventuels. C'est ce qui justifie - à part l'institution de la responsabilité civile illimitée - l'obligation de s'assurer, que prescrit déjà la loi actuelle sur l'énergie atomique. L'assurance avec une couverture illimitée n'a pas été envisagée: il ne faut pas que l'exploitant puisse se libérer de tout risque en concluant une assurance, mais bien qu'il ait intérêt à faire ce qui est en son pouvoir pour éviter tout accident.

Le présent projet prévoit trois catégories de gravité des accidents. Si le dommage atteint moins de 1 milliard de francs, seul l'assureur et la personne qui fait l'objet d'un recours devraient des prestations. Au-celà de la limite du milliard, il serait fait usage de la responsabilité civile illimitée de l'exploitant.

Enfin, en cas de grand sinistre pouvant toucher toute une région, la Confédération pourrait fournir, dans le cadre d'une réglementation spéciale, des contributions à l'indemnisation des dommages non couverts, qui s'ajouteraient aux autres moyens de dédommagement.

La loi atomique de 1959 fixe l'obligation de couverture à 40 millions de francs par installation atomique. L'ordonnance du 6 juillet 1977 concernant la couverture de la responsabilité civile résultant de l'exploitation de centrales nucléaires (RS 732.44) (p. 13) a porté cette somme à 200 millions de francs. Il est question maintenant de procéder à une nouvelle augmentation de la couverture par l'assurance responsabilité civile, portant cette couverture à un milliard par installation.

201

Le montant qui peut être couvert par l'assurance privée est cependant limité.

Les sociétés suisses d'assurance réunies au sein du «Pool suisse d'assurance des risques nucléaires» ne peuvent accorder la couverture illimitée lorsqu'on cas d'accident nucléaire, leurs obligations à l'égard d'autres assurés seraient maintenues. Elles ne sont pas en mesure d'assurer une couverture excédant 200 millions de francs suisses. Fixé par l'ordonnance du 6 juillet 1977 (RS 732.44), ce montant lui-même n'a pu être placé qu'au prix de très grandes difficultés sur le marché internatio'nal de l'assurance. Les assureurs suisses en responsabilité civile s'efforcent cependant d'offrir la couverture maximale disponible sur le marché de l'assurance. Ils se sont donc engagés à informer sans délai les autorités lorsqu'il sera possible de disposer d'une couverture plus étendue.

Aux montants mentionnés pour la couverture et l'assurance des transports viennent s'ajouter les frais de procédure et les intérêts. Les assureurs tendent à juste titre à déterminer le montant global à leur charge afin d'être en mesure de calculer les primes selon le principe de la couverture des coûts. Il semble qu'un montant atteignant au maximum 10 pour cent de la couverture se justifie pour les intérêts et frais de procédure.

L'évocation fréquente de la couverture illimitée offerte par l'assurance des véhicules à moteur est injustifiée. La Suisse possédait en 1978 un parc de plus de 2 millions de véhicules à moteur, contre 4 centrales nucléaires en service. La différence de répartition du risque saute aux yeux. De plus, il est évident qu'un véhicule à moteur ne causera jamais un dommage aussi grave que le pourrait une centrale nucléaire.

213

Assurance de la Confédération

A cela s'ajoute que les sociétés d'assurance privées ne sont pas en mesure de couvrir tous les accidents possibles. Elles ne peuvent notamment pas couvrir les dommages causés par des phénomènes naturels extraordinaires ou des actes de guerre ainsi que les dommages dont la couverture est demandée plus de 10 ans après l'accident ou plus de 20 ans après la perte, le vol, le passage pardessus bord ou l'abandon de substances nucléaires.

Incontestablement, la Confédération, en créant une loi sur l'énergie atomique et en prenant les mesures qui s'y rapportent (autorisations, obligations, etc.), est devenue co-responsable de l'existence et de la réalisation des installations nucléaires. Au reste, il est impensable qu'en cas de grand sinistre pouvant toucher toute une région et sa population, la Confédération ne supplée pas par ses moyens propres aux possibilités de couverture insuffisantes de l'assurance privée.

Ainsi, la Confédération devra désormais jouer le rôle d'assureur: contre le paiement de primes, elle offrira une assurance jusqu'à un montant global d'un milliard de francs, assurance à laquelle l'exploitant d'une installation nucléaire devra souscrire s'il n'obtient pas l'équivalent auprès des sociétés privées. La Confédération devra garantir en principe une couverture de 800 millions de francs, et la prime de cette assurance devrait être calculée selon des principes actuariels, c'est-à-dire sur la même base que celle de l'assurance privée. Ainsi, 202

la Confédération ne fera pas concurrence à l'économie privée, mais elle en prendra la relève lorsque celle-ci ne sera plus en mesure de fournir des prestations.

Il en va autrement en cas de dommages différés, c'est-à-dire de dommages se produisant plus de 30 ans après l'événement qui est à leur origine. Le délai à respecter pour l'ouverture d'une action contre l'exploitant étant alors expiré, il n'est plus possible de faire valoir des prétentions à son égard, de sorte que la Confédération doit se substituer à lui. De tels dommages pouvant cependant être attribués à une installation bien déterminée, la perception de primes se justifie aussi.

La situation est encore différente lorsque la personne civilement responsable ne peut être déterminée, que l'assurance fait défaut ou que l'assurance et la personne responsable ne sont pas en mesure, collectivement, de couvrir le dommage ou encore que le dommage résulte en Suisse d'un événement survenu à l'étranger. Dans tous les cas, la Confédération couvrira les dommages en lieu et place d'une personne civilement responsable.

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Grands sinistres

En dépit des prescriptions de sécurité et de tous les efforts des exploitants, uo ne saurait exclure la possibilité d'un accident d'origine nucléaire dont les conséquences dépasseraient la couverture assurée d'un milliard de francs. Si un tel sinistre se produisait, c'est d'abord la responsabilité civile illimitée de l'exploitant qui serait en cause, c'est-à-dire qu'il pourrait être déclaré en faillite si les autres moyens dont il dispose ne suffisaient pas. L'exploitant étant en faillite, tous ses avoirs serviraient à couvrir le dommage, y compris ses prétentions vis-à-vis de l'assurance contre les dommages, le produit de la vente des composants intacts de l'installation, etc. Si ces moyens ne suffisaient toujours pas, il faudrait recourir à la procédure de règlement des grands sinistres. Tous les moyens disponibles, y compris des contributions que l'Assemblée fédérale pourrait allouer, seraient alors catalogués comme dans une .

procédure de collocation et comparés aux demandes en dommages et intérêts.

Il appartiendrait alors à l'Assemblée fédérale d'assurer, cas échéant, la répartition équitable de ces sommes. Il serait difficile et peu judicieux de vouloir définir aujourd'hui déjà dans tous ses détails la procédure à suivre pour un tel dédommagement, celle-ci pouvant varier très fortement selon les circonstances.

Il faut cependant remarquer que même en cas d'adoption de la responsabilité civile illimitée de l'exploitant, les moyens disponibles resteront toujours limités.

Même si l'Assemblée fédérale libère des montants supplémentaires dans le cadre des réparations dues à la suite d'un grand sinistre, la couverture totale sera limitée.

Il faut également relever que l'extension de la responsabilité civile proposée dans ce projet devra d'une manière ou d'une autre être prise en charge par la collectivité, que ce soit parce que les collectivités publiques sont largement majoritaires dans la propriété des installations nucléaires existantes, ou parce que l'augmentation des primes d'assurance sera transférée au consommateur 203

sous forme d'augmentation de prix du courant électrique, ou enfin parce qu'en cas de dommage excédant 200 millions de francs, la caisse fédérale devra fournir les montants nécessaires à sa réparation.

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Réciprocité

La loi actuelle sur l'énergie atomique traite sur le même pied tous les lésés, qu'ils se soient trouvés à l'intérieur des frontières suisses ou en-dehors d'elles au moment de l'accident. Cela correspond à nos usages.

Or une évolution très particulière s'est dessinée, notamment à la suite de la signature des conventions de Paris et de Bruxelles et à cause de la responsabilité civile d'un montant illimité qui y est liée. En principe, les couvertures fixées dans les deux conventions constituent des minima. Chaque Etat est libre de prescrire dans sa législation, comme l'a fait par exemple la République fédérale d'allemagne, des montants plus élevés. Douze Etats ont ratifié la convention de Paris; toutefois, cela ne signifie pas que ces Etats aient adopté une couverture uniforme. On peut discerner trois catégories : 1. Les Etats ayant ratifié la convention de Paris mais non celle de Bruxelles (les couvertures, converties en francs suisses, vont de 27 millions à 424 millions de francs) ; 2. Les Etats ayant ratifié la convention de Paris et celle de Bruxelles (la couverture est de 120 millions UC); 3. Les Etats qui ont ratifié les deux conventions, mais prescrivent une couverture supérieure à celle qui est fixée dans la convention de Bruxelles.

En conséquence, le lésé peut s'attendre, en cas de dommage grave, à des réparations d'inégale importance selon le pays où s'est produit l'accident.

Même si la Suisse ratifiait les deux conventions, un lésé ne sera pas traité, en Suisse, de la même manière selon que l'exploitant responsable se trouve en Italie, en France ou en Allemagne.

Or, on ne voit pas pourquoi la Suisse, entourée de trois Etats contractants qui usent de la possibilité d'établir une discrimination devrait continuer de se montrer particulièrement généreuse après que selon notre projet, nous disposons d'un régime de la responsabilité civile qui va beaucoup plus loin que celui de nos voisins. C'est pourquoi nous vous proposons d'inclure dans la nouvelle loi sur la responsabilité civile en matière nucléaire une disposition relative à la réciprocité, malgré les réserves d'ordre juridique et politique que cela peut susciter. Nous nous inspirons de la solution adoptée par la République fédérale d'Allemagne, qui nous paraît objectivement fondée. Pour des dommages nucléaires se produisant à l'étranger,
qui touchent des personnes domiciliées à l'étranger et pour lesquels l'exploitant d'une installation nucléaire située en Suisse est civilement responsable, des réparations en vertu du droit suisse ne seront dues que dans la mesure où l'Etat intéressé prévoit un traitement équivalent à l'égard de la Suisse. Par ailleurs, nous tenons à ce que des personnes se trouvant en Suisse et qui sont victimes d'un accident nucléaire survenant à l'étranger ne souffrent pas d'éventuelles mesures discriminatoires de l'Etat étranger. Nous vous proposons donc que la Confédération soit 204

chargée de couvrir les dommages nucléaires causés à l'étranger, pour lesquels la personne qui serait lésée en Suisse ne pourrait obtenir réparation selon le droit suisse.

216

Dispositions transitoires

La question suivante se pose: la nouvelle loi ne doit-elle s'appliquer qu'aux dommages causés sous son régime ou devrait-elle s'étendre aux dommages qui se sont produits sous son empire mais ont été causés avant son entrée en vigueur. On peut de bonne foi défendre l'une et l'autre solution. La commission d'experts a cependant été unanime à reconnaître ce qui suit: puisque la nouvelle loi apportera des améliorations fondamentales, elle protégera efficacement les besoins et les intérêts justifiés de ceux qui pourraient être les victimes de ces dommages, il serait inadmissible que l'on s'expose à devoir distinguer deux catégories de victimes, soumises à un régime différent. C'est pourquoi la commission propose d'appliquer la nouvelle réglementation à tous les dommages survenant sous son régime.

Si une nouvelle loi est appliquée à des faits survenus ou déclenchés avant sa mise en vigueur, mais qui perdurent ensuite, selon l'avis du Tribunal fédéral, il n'y a pas rétroactivité (Saladin : « Das Verfassungsprinzip der Fairness», publication des facultés de droit suisses pour le centenaire du TF, 7975, p. 62/63). Une telle forme de rétroactivité, appelée pseudo-rétroactivité, est admissible dans son principe pour autant que des droits acquis ne s'y opposent pas. Il n'existe pas de droits acquis dans le domaine de la responsabilité civile en matière nucléaire.

Il y a rétroactivité (réelle) lorsque la loi s'applique à des faits survenus avant sa mise en vigueur et entièrement réalisés à ce moment-là. De tels faits ne se présentent pas à l'heure actuelle. Nous estimons néanmoins qu'une rétroactivité réelle de la loi serait admissible selon la juridiction du Tribunal fédéral.

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Analyse des dispositions du projet

Les dispositions du projet ne font ci-après l'objet d'un commentaire que dans la mesure où elles ne l'ont pas été auparavant.

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Titre

Le titre du projet constitue un abrégé; en effet, le texte soumis à la consulta tion des départements, des cantons, des partis politiques et organisations intéressées s'intitulait «loi fédérale sur la responsabilité civile et la couverture en cas d'accident nucléaire». Le titre actuel est nettement plus court, ce qui en facilite la citation, mais pourrait donner lieu à malentendu, puisque la présente loi ne porte pas uniquement sur la responsabilité civile en cas d'accident lié à l'utilisation de l'énergie nucléaire, mais s'applique en principe à toute installation nucléaire, notamment aux installations de recherche. De plus, le projet ne règle pas seulement la responsabilité civile, mais aussi la couverture des dommages et l'obligation de s'assurer.

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Chapitre premier: Dispositions générales

Article 1 (Définitions) Le terme «atomique» est généralement éliminé au profit du terme «nucléaire» (énergie, combustible nucléaire), dont le sens habituel est le même. Le nouveau terme répond mieux aux données de la physique, les phénomènes de transformation touchant au premier chef les noyaux des isotopes.

Les «combustibles nucléaires» sont maintenant définis dans la loi. Leur définition suit de près la terminologie utilisée sur le plan international, notamment dans la convention de Paris.

Le terme «installation nucléaire» englobe comme par le passé toutes les installations nécessaires à l'exploitation ou en rapport fonctionnel avec elle.

Cela signifie, par exemple, qu'un bassin de désactivation des éléments combustibles ou un dépôt de produits et déchets radioactifs ne constituent pas en euxmêmes des installations nucléaires qui doivent être assurées séparément, à condition qu'ils soient situés au même emplacement que la centrale et liés à son exploitation.

C'est au premier chef la responsabilité civile de Vexploitant de l'installation nucléaire qui est engagée. Peuvent être considérés comme exploitants, outre le maître de l'ouvrage ou le propriétaire, le locataire ou le fermier, voire d'autres détenteurs au sens le plus large; le plus souvent, il s'agira du bénéficiaire d'une autorisation d'exploiter ou de la personne considérée comme telle par les autorités. Enfin, un exploitant ne doit pas pouvoir se décharger de sa responsabilité civile - notamment à l'échéance de l'autorisation d'exploiter - en abandonnant l'installation à son sort.

Le projet de loi contient un terme nouveau, celui de «dommage d'origine nucléaire-». On définit ainsi d'emblée l'événement qui détermine la responsabilité civile. Dans l'optique de la protection du lésé, il importe peu de savoir dans quelles conditions le dommage est survenu; c'est pourquoi un dommage d'origine nucléaire peut résulter aussi bien de phénomènes naturels extraordinaires ou d'événements de guerre que d'un acte délibéré ou de négligence.

Point n'est besoin de relever expressément dans la loi que le terme de dommage d'origine nucléaire s'applique également à l'atteinte à la santé d'un enfant avant la naissance; la responsabilité civile est reconnue pour toute atteinte avant la naissance.

Article 2 (Compétence du Conseil fédéral) II n'était pas
indispensable d'établir expressément la compétence qu'a le Conseil fédéral de définir d'autres termes utilisés dans cette loi. D a pourtant paru indiqué de le faire pour bien montrer que l'énumération des termes définis à l'article 1 n'est pas exhaustive. Une telle compétence n'a rien d'extraordinaire; le comité directeur de l'Agence internationale de l'énergie atomique peut même élargir des définitions contenues dans des conventions.

Aux termes de l'alinéa 2, le Conseil fédéral peut déclarer que les batteries d'isotopes de stimulateurs cardiaques, l'uranium naturel, la roche radioactive d'origine suisse, en particulier ne sont pas soumises aux dispositions de la loi,

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sans cependant pouvoir adopter en l'occurrence une autre réglementation. Les dispositions générales du code des obligations sont donc applicables.

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Chapitre deuxième: Responsabilité civile

Article 3 (Principe) L'alinéa 1 établit le principe de la responsabilité causale illimitée de l'exploitant. L'exploitant reste civilement responsable jusqu'à ce qu'un autre exploitant prenne sa place. Lors de l'importation de substances nucléaires, le destinataire suisse est civilement responsable dès la frontière suisse. En cas de transit de substances nucléaires, seul le détenteur de l'autorisation de transport est civilement responsable.

Il est concevable qu'une installation nucléaire soit exploitée par une société constituée à cet effet, agissant en lieu et place du propriétaire. Pour éviter que la couverture financière dont dispose l'exploitant et, partant, la garantie offerte par la responsabilité civile, ne soient limitées du fait que l'installation est exploitée par une personne physique ou morale n'ayant que des moyens financiers restreints, le propriétaire de l'installation est déclaré solidairement responsable, avec toute sa fortune en sus de l'exploitant. A ce titre, une entorse est faite au principe de la concentration de la responsabilité.

En principe, il n'existe aucun motif d'être exonéré de la responsabilité civile.

L'exploitant doit donc répondre du risque qu'il a créé, même si ce risque se manifeste à la suite d'actes de guerre ou de phénomènes naturels extraordinaires. Nous renvoyons à ce qui est dit sous chiffre 121.6.

Article 4 (Exonération) L'exploitant ne peut être exonéré de sa responsabilité civile que vis-à-vis du lésé coupable d'avoir causé lui-même, par négligence grave ou de manière préméditée, le dommage qu'il a subi. Cette disposition correspond à un principe général du droit suisse de la responsabilité civile et doit être interprétée comme l'article 44, 1cr alinéa, du code des obligations. L'exploitant ne doit donc pas pouvoir se libérer de toute responsabilité civile, mais uniquement de sa responsabilité civile à l'égard du lésé coupable, dont il a été question plus haut.

Cependant, si une charge supplémentaire pèse sur la personne civilement responsable, celle-ci ne peut être entièrement exonérée, même vis-à-vis de celui qui a commis une négligence grave.

Article S (Recours de la personne civilement responsable) Les dispositions relatives au recours n'affaiblissent pas le principe de la concentration de la responsabilité: l'exploitant reste civilement responsable.
Pour éviter des rigueurs et selon les règles générales de la responsabilité civile, l'exploitant doit avoir la possibilité de se retourner, dans la mesure où il fournit des prestations, contre les personnes qui ont contribué à provoquer le dommage. Afin d'éviter une interprétation exagérément extensive de ce droit, les possibilités en sont énumérées de façon exhaustive. Entrent en ligne de

207

compte comme objets d'un recours: celui qui endommage une installation nucléaire de manière préméditée (sabotage, terrorisme) ou par négligence grave, ainsi que celui qui vole ou recèle des substances nucléaires: un tiers peut également accorder à l'exploitant un droit de recours dans les limites de sa liberté de contracter; en principe, la loi ne doit pas restreindre cette liberté.

Elle n'est limitée qu'à l'égard de l'employé, un contrat de travail ne devant pas autoriser des recours allant au-delà des droits extracontractuels.

Article 6 (Dommages-intérêts, réparation morale) Le montant des dommages-intérêts ne donne lieu à aucune remarque dans la mesure où l'on se réfère au code des obligations. Le 2e alinéa de l'article 44 CO est déclaré non applicable; une telle restriction pour des considérations d'équité n'est en effet pas compatible avec l'objectif de Ja loi sur la responsabilité civile, qui est d'assurer une protection. En revanche, aux termes du 3e alinéa, il peut être tenu compte de la situation économique exceptionnellement favorable du lésé.

Le 2e alinéa de l'article 6 résulte de la procédure de consultation: l'indemnisation doit se faire largement au moyen de rentes pour qu'il soit mieux possible, à prestations égales, de tirer parti de la capacité financière de la personne responsable et de ses assureurs.

Article 7 (Conventions) En vertu de cet article, la concentration de la responsabilité civile sur l'exploitant est contraignante. Cette disposition correspond à l'actuel article 16 de la loi sur l'énergie atomique et à l'article 87 de la loi sur la circulation routière.

Article 8 (Assurance contre les accidents) Cet article correspond pour l'essentiel au contenu de l'article 20 de la loi actuelle sur l'énergie atomique. Le droit de recours dont dispose la CNA en vertu de l'article 100 de la loi fédérale sur l'assurance maladie et accidents est réservé, alors même que cela n'est pas dit expressément dans la présente loi.

Article 9 (Prescription et péremption) Nous nous référons à ce qui est dit sous chiffre 121.7.

224

Chapitre troisième: Couverture

224.1

Titre premier: Assurance privée

Article 10 L'article 10 distingue deux cas d'obligation d'assurance: L'exploitant d'une centrale nucléaire doit conclure une assurance responsabilité civile privée de 200 millions de francs. Cette somme constitue un minimum, car on souhaite que la couverture convenue soit la plus élevée possible.

Le transport de substances nucléaires comporte des risques nettement moins élevés: des éléments combustibles non irradiés ont par eux-mêmes un rayon-

208

nement si faible qu'il serait possible sans précaution particulière de les maintenir à l'air libre. De même, les autres substances nucléaires sont transportées en quantités très inférieures au seuil critique et conditionnées de telle manière que la mise en danger de la population peut être très largement exclue. Dans ces conditions, une couverture d'assurance de 50 millions de francs paraît suffisante dans tous les cas.

Selon le 3e alinéa, une ordonnance doit définir les risques non assurables, c'està-dire les risques ne devant pas forcément être couverts par l'assurance responsabilité civile privée. Cette réglementation est proposée parce que d'une part, les établissements d'assurance privés ne peuvent pas couvrir tous les risques et que, d'autre part, l'assurance fédérale proposée devra tout de même les prendre à sa charge en cas d'accident (art. 11). C'est pourquoi le choix des risques non couverts ne peut être laissé à la libre appréciation des assureurs.

Ne serait-ce qu'en vue de la juste détermination des primes dues dans le cadre de l'assurance fédérale, les risques non couverts par l'assurance privée doivent faire l'objet d'une autorisation du Conseil fédéral. Comme il en a été convenu avec le Pool suisse d'assurance des risques nucléaires, cette autorisation devra porter sur les secteurs suivants: 1. Les dommages causés par des phénomènes naturels extraordinaires ou par des événements de guerre; 2. Les prétentions pour lesquelles il n'a pas été porté plainte dans les 10 ans qui suivent l'accident ou la fin d'une action prolongée ou dans les 20 ans qui suivent la perte, le vol, l'envoi par dessus bord des substances nucléaires ou leur abandon.

Nous, suivrons l'évolution des conditions sur le marché des assurances afin d'être en mesure de réagir si la situation se modifie et si la couverture de l'assurance responsabilité civile privée obligatoire peut être augmentée.

224.2

Titre deuxième: Couverture par la Confédération

Article 11 (Assurance) La couverture fédérale prévue dans cet article doit avoir le caractère d'une assurance, c'est-à-dire que la couverture par la Confédération entraîne le paiement d'une prime. La couverture accordée par la Confédération devrait se monter à 800 millions de francs au maximum, les premiers 200 millions de la couverture globale d'un milliard étant à la charge des assurances responsabilité civile privées.

Article 12 (Dommages différés) Sont réputés dommages différés ceux qui n'apparaissent et ne peuvent donner lieu à une plainte que lorsque les délais dans lesquels une action peut être intentée contre l'exploitant sont écoulés. La Confédération doit alors procurer protection au lésé. Cette disposition vise à assurer la couverture de tous les dommages apparaissant plus de 30 ans après l'accident et de ceux qui se font sentir plus de 27 ans après l'accident mais pour lesquels, pour une raison quelconque, il n'a pas été intenté d'action jusqu'à l'échéance de la trentième année.

15 Feuille fédérale. 132« année. Vol. I

209

La référence à l'article 9,1er alinéa, ne sert qu'à définir le dommage différé; le délai de trois ans pour faire valoir des prétentions vaut également en cas de dommages différés.

Article 13 (Autres cas) On peut également imaginer des dommages pour lesquels il est impossible de déterminer la personne qui est civilement responsable. Seuls sont visés ici les cas où il est établi qu'il y a dommage nucléaire; cela signifie que la provenance du rayonnement doit être prouvée. Il n'est, bien entendu, pas question d'instituer de la sorte une caisse-maladie fédérale gratuite pour les affections cancéreuses.

La lettre b vise à assurer également la couverture des dommages que provoquerait l'exploitant d'une centrale clandestine ou un transporteur non autorisé.

Pour ce qui est de la lettre c, nous nous référons à ce qui est dit sous chiffre 122.4.

Article 14 (Contributions des personnes civilement responsables) Aux termes du 1er alinéa, les primes de l'assurance fédérale doivent être calculées selon des principes actuariels, c'est-à-dire selon les mêmes critères qui servent à déterminer les contributions dues aux assureurs privés. Le montant exact de ces contributions ne peut être défini à l'heure actuelle, notamment du fait que, dans le monde entier, aucun accident nucléaire relativement grave ne s'est produit ni dans une centrale, ni pendant un transport. Il existe cependant des points de repère permettant de limiter au triple le montant de la prime d'assurance responsabilité civile privée: le relèvement, en 1977, du montant de l'assurance obligatoire de 40 à 200 millions de francs avait entraîné le doublement des primes. En portant de 200 millions à un milliard la couverture de la responsabilité civile, conformément à l'article 11, on provoquerait un accroissement de 100 pour cent des primes actuelles de responsabilité civile. L'assurance complémentaire des dommages différés prévue à l'article 12, paraît devoir exiger une augmentation supplémentaire des contributions à verser à la Confédération, qui les porterait à environ 200 pour cent des primes versées aux assureurs privés en responsabilité civile, de sorte que la loi autoriserait, à titre de réserve pour des risques futurs encore imprévisibles, une nouvelle augmentation de 100 pour cent des primes actuelles de responsabilité civile.

On ne prélèvera
pas de primes pour la couverture des cas prévus à l'article 13.

Il est licite que le Conseil fédéral règle, par voie d'ordonnance, le montant des contributions à l'assurance fédérale puisqu'il ne s'agit pas d'un impôt.

Article 15 (Fonds pour dommages nucléaires) Les contributions des assurés doivent être placées de manière sûre, en valeurs réalisables en tout temps. Cependant, il y aura lieu de régler les détails de ce placement au niveau de la loi.

210

224.3

Titre troisième: Autres dispositions concernant l'assurance

Article 16 (Dispenses de l'obligation de s'assurer) II est possible qu'une personne civilement responsable offre, sans recourir à une assurance privée, d'autres sûretés équivalentes. Dans ce cas, il ne sied pas qu'une loi fédérale la prive de cette possibilité, ce qui reviendrait à privilégier la branche de l'assurance.

Article 17 (Rétablissement de la couverture intégrale) Les sociétés d'assurance ne sont en mesure de fournir qu'une couverture limitée des accidents nucléaires (cf. ch. 212 et 213). Il serait plus aisé, en principe, de fixer la limite assurée par sinistre, comme cela se fait dans le domaine de la circulation routière; RS 741.31). Mais dans ce cas, les assurances ne pourraient couvrir qu'un montant nettement plus faible. C'est pourquoi on s'en est tenu au système actuel de la couverture par installation.

Après le règlement des indemnités versées à titre de réparation d'un dommage d'origine nucléaire, il importe de conclure une assurance supplémentaire, de sorte qu'en cas de nouvel accident nucléaire, les lésés disposent d'une couverture de même montant, comme si le premier accident nucléaire n'avait pas eu lieu.

Article 18 (Action directe, exceptions) La réglementation prévue dans cette disposition est conforme à l'interprétation actuelle du droit et n'a du reste donné lieu à aucune critique lors de la procédure de consultation. La formulation correspond largement à celle de la loi sur la circulation routière (art. 65).

Article 19 (Recours de l'assureur) En donnant à la personne civilement responsable le droit de recours contre des tiers (art. 5), on accroît les moyens disponibles au-delà du milliard pour la couverture des dommages. Cependant, en vertu des principes généraux du droit des assurances (art. 72 LCA), l'assureur est normalement subrogé aux droits de recours de l'assuré. Ainsi donc, l'accroissement des moyens disponibles pour la couverture des dommages pourrait éventuellement être entravé par un assureur qui s'indemniserait lui-même par voie de recours. C'est pour l'éviter que le projet prévoit que l'assureur ne peut se subroger aux droits de recours de l'assuré que dans la mesure où les lésés ne s'en trouvent pas désavantagés.

Article 20 (Suspension et cessation de l'assurance) Le moment où la suspension ou la cessation de l'assurance prend effet est retardée de 3 mois
(art. 23 de la Joi sur l'énergie atomique) à une année après réception de l'annonce. La Suisse ira ainsi au-delà des dispositions habituellement adoptées sur le plan international, qui prévoient 3 mois. Une nouvelle prolongation de ce délai d'une année n'entre guère en ligne de compte parce qu'elle rendrait plus difficile la réassurance de cette couverture et réduirait de ce fait la sûreté de l'assurance elle-même.

211

Quand l'assurance est suspendue ou cesse pour une raison quelconque, les conditions dont dépend la délivrance de l'autorisation d'exploiter ne sont plus remplies et l'autorité fédérale compétente doit refuser la poursuite de l'exploitation (art. 5 et 9 de la loi sur l'énergie atomique).

225

Chapitre quatrième: Procédure

Article 21 (Conservation des preuves) L'exécution d'une procédure de conservation des preuves ne doit pas être laissée à la libre appréciation du Conseil fédéral, mais prévue comme une obligation fixée dans la loi. Le Conseil fédéral devra définir lui-même le cercle des personnes tenues de s'annoncer car on ne peut demander à chacun de décider s'il a été exposé ou non aux radiations.

Article 22 (For) Dans sa définition du for, le projet s'en tient aux règles générales, et notamment à l'article 29 de la constitution fédérale.

Sur le plan cantonal, la compétence des tribunaux est réglée par la désignation d'une instance cantonale unique, comme le fait par exemple la loi sur la propriété intellectuelle. Pour tenir compte de la complexité de la matière, la loi déclare expressément compétente l'instance cantonale supérieure.

Le 4e alinéa témoigne de la volonté du législateur de s'intégrer le moins possible dans la souveraineté cantonale en matière de justice, voire d'offrir aux cantons des possibilités dont ils ne disposent pas dans des conditions normales.

Article 23 (Recours) Le recours au Tribunal fédéral est réglé de la même manière que pour le litige en matière de propriété intellectuelle.

Article 24 (Constatation des faits) L'alinéa 1er souligne que le juge n'est pas lié dans une procédure civile par les conclusions des parties. Ainsi, le lésé qui réclame moins que ce à quoi il a droit voit sa situation améliorée.

Article 25 (Avances) Le titre de cette disposition correspond à celui de l'article 283 du code civil auquel on pourrait se référer pour interpréter la disposition en cause.

226

Chapitre 5: Grand sinistre

Article 26 (Principes) Cet article règle deux états de fait différents.

Lorsque les prestations des assurances et de la Confédération agissant en qualité d'assureur, qui s'élèvent à un milliard de francs au total, ne permettent pas de couvrir le dommage, la responsabilité illimitée du détenteur intervient.

212

Cela peut impliquer qu'il soit mis en faillite lorsque ses moyens sont insuffisants. Ces moyens se composent de l'ensemble de son patrimoine, y compris les réserves et les créances, même celles dont il disposerait à l'égard de ses autres assureurs.

La réglementation en matière de grand sinistre ne s'applique que lorsque la couverture de l'assurance et les moyens propres de la personne civilement responsable ne suffisent pas. C'est alors qu'intervient la répartition entre les lésés des autres moyens disponibles, à savoir les prestations des assurances sociales, des assurances de choses et d'oeuvres de secours, les avoirs du fonds pour les dommages nucléaires dépassant la limite des 800 millions ainsi que des contributions supplémentaires de la Confédération, selon un règlement d'indemnisation établi par l'Assemblée fédérale, Article 27 (Modification des prestations d'assurance, primes de répartition) Les attributions très étendues que prévoit cet article doivent être comprises en relation avec l'état de détresse qui affecterait une partie de la population suisse en cas de grand sinistre. Les fixer dans la loi, c'est tracer approximativement le cadre des mesures qui, à défaut, devraient faire l'objet d'un arrêté fédéral urgent. Cette disposition a du reste été reprise de l'actuelle loi sur l'énergie atomique.

227

Chapitre sixième: Dispositions pénales

La menace d'une peine en cas de violation délibérée a en premier lieu le caractère d'une mesure dissuasive. En cas de violation délibérée, la cause est déférée au tribunal, conformément à l'article 21, 1er alinéa, de la loi fédérale sur le droit pénal administratif (DPA; RS 313.G) parce qu'une peine privative de liberté doit être prononcée. En cas de violation par négligence, le juge cantonal est compétent si le Département des transports, des communications et de l'énergie estime qu'une peine privative de liberté est indiquée. Le Conseil fédéral a, dans tous les cas, la possibilité d'en déférer à la cour pénale fédérale (art. 21, 3e al., DPA).

228

Chapitre septième: Réciprocité

Faute d'une règle du droit international, une clause de réciprocité semblable à celle qu'applique la République fédérale d'Allemagne est prévue pour ces faits.

La portée de cette clause est cependant atténuée, pour des raisons humanitaires, quand un responsable étranger devrait assurer à un lésé suisse une couverture inférieure à 50 millions de francs.

229

Chapitre huitième: Dispositions finales

II est prévu que cette loi entre en vigueur d'un coup, de sorte qu'à partir de ce moment-là, elle s'applique à tous, indépendamment du fait que quelques personnes ont été lésées sous l'empire de l'ancienne loi. Il serait très regrettable 213

que 10 ans après l'entrée en vigueur de la nouvelle loi, en règle générale meilleure, des dispositions moins favorables s'appliquent à une partie de la population. Au surplus, nous nous référons à ce qui est dit sous chiffre 216.

3 31 311

Conséquences financières et effets sur l'état du personnel Conséquences financières Conséquences financières pour la Confédération

Financièrement, la nouvelle loi pourra, selon les cas, avoir des effets négatifs ou positifs pour la Confédération. S'il ne se produit aucun accident pour lequel la Confédération doit assurer la couverture des dommages, elle n'en retirera vraisemblablement que des avantages financiers. Si en revanche il survenait un accident d'origine nucléaire qui causerait des dommages à la couverture desquels la Confédération devrait contribuer, il faudrait compter avec une charge financière dont l'importance ne peut pas être déterminée. Indépendamment de l'intervention des Chambres en cas de grand sinistre, il faut prévoir une charge pouvant atteindre 1100 millions de francs. En cas de grand sinistre, la charge financière de la Confédération s'accroîtrait des montants alloués par l'Assemblée fédérale.

312

Conséquences financières pour les cantons et les communes

De même, les cantons n'auraient à assumer aucune charge financière nouvelle aussi longtemps qu'aucun accident nucléaire ne se produirait. En cas d'accident, le canton défini à l'article 21 devra mettre à disposition son organisation judiciaire, tout en décidant s'il y a lieu de créer un tribunal d'exception.

La loi dont le projet vous est soumis n'aura pas d'effets financiers pour les communes.

32

Personnel

Tant qu'il ne se produit aucun accident nucléaire, il n'y a pas lieu de prévoir d'effets sur l'état du personnel des cantons et de la Confédération. Quant aux conséquences qu'aurait un accident, il est impossible de donner des précisions à l'heure actuelle.

33

Charge imposée aux cantons et aux communes pour l'exécution de la loi

L'exécution de la loi ne paraît pas devoir entraîner d'effets notables autres que ceux dont il a déjà été question ci-dessus.

34

Grandes lignes de la politique gouvernementale 1975-1979

La mise en chantier de la revision totale de la loi sur l'énergie atomique figure au nombre des objectifs fixés dans les Grandes lignes de la politique gouver-

214

nementale pour la législature 1975-1979 (FF 1976 I 413; ch. 372, p. 495). Le nouveau régime de la responsabilité civile en matière nucléaire constituera une partie de la nouvelle législation en la matière. Les travaux de revision concernant les autres domaines touchés par la loi (ch. 121) sont en voie d'élaboration.

4

ConstitutionnaUté

Selon l'article 244ulniuies de la constitution, la Confédération dispose de la compétence exclusive de légiférer dans le domaine de l'énergie atomique et de la protection contre les radiations ionisantes. L'article 64, 2e alinéa, de la constitution donne également à la Confédération la compétence de légiférer dans le domaine du droit de la responsabilité civile. L'article 64bls de la constitution accorde à la Confédération la compétence de légiférer en matière pénale. En conséquence, la constitutionnalité de la loi proposée est assurée.

25764

215

Loi

Projet

sur la responsabilité civile en matière nucléaire (LRCN)

L'Assemblée fédérale de la Confédération suisse, vu les articles 24iuinime3j 54 et ^Ws de la constitution; vu le message du Conseil fédéral du 10 décembre 19791», arrête: Chapitre premier: Dispositions générales Article premier Définitions 1 Par énergie nucléaire, on entend toute forme d'énergie libérée lors de processus nucléaires.

z Sont réputés combustibles nucléaires les matières fissiles comprenant l'uranium sous forme de métal, d'alliage ou de composé chimique, le plutonium sous forme de métal, d'alliage ou de composé chimique, ainsi que toute autre matière fissile désignée comme telle par le Conseil fédéral.

3 Sont réputés produits ou déchets radioactifs les matières radioactives produites ou les matières devenues radioactives par exposition aux radiations résultant de la production, de l'utilisation, du stockage ou du retraitement de combustibles nucléaires; font toutefois exception les radioisotopes qui, hors d'une installation nucléaire, sont utilisés ou destinés à être utilisés à des fins industrielles, commerciales, agricoles, médicales ou scientifiques.

4 Sont réputés substances nucléaires les combustibles nucléaires, les produits et déchets radioactifs.

5 Sont réputées installations nucléaires celles qui servent à produire de l'énergie nucléaire ou à produire, utiliser, entreposer ou retraiter des substances nucléaires.

6

Est réputé exploitant d'une installation nucléaire celui qui construit une telle installation pour son propre compte, l'exploite ou la détient à quelque titre que ce soit, ou celui qui, sans l'assentiment des autorités compétentes, a renoncé à la détenir.

7 II y a dommage d'origine nucléaire lorsque les propriétés radioactives, toxiques, détonantes ou autres propriétés dangereuses de substances nucléaires entraînent le décès ou une atteinte à la santé de personnes ou des dommages matériels.

« FF 19801172

216

Responsabilité civile en matière nucléaire Art. 2 Compétence du Conseil fédéral 1 Le Conseil fédéral peut définir d'autres termqs utilisés dans la présente loi.

2 Le Conseil fédéral peut déclarer que les dispositions de la présente loi ne s'appliquent pas à des substances nucléaires faiblement radioactives.

Chapitre deuxième: Responsabilité civile Art. 3 Principe 1 L'exploitant d'une installation nucléaire est civilement responsable de manière illimitée des dommages d'origine nucléaire causés par des substances nucléaires se trouvant dans son installation.

2 De même l'exploitant d'une installation nucléaire est civilement responsable des dommages d'origine nucléaire causés par des substances nucléaires provenant de son installation, qui, au moment où le dommage s'est produit, n'avaient pas encore été reprises par l'exploitant d'une autre installation nucléaire. Les substances nucléaires sont réputées reprises au moment où elles franchissent la limite de l'enceinte de l'autre installation nucléaire ou une limite fixée contractuellement hors du territoire suisse, 3 Lorsque l'exploitant d'une installation nucléaire reçoit des substances nucléaires de l'étranger, il est civilement responsable des dommages d'origine nucléaire se produisant en Suisse, qui sont causés par ces matières durant leur transport vers son installation. Son droit de recours contre l'expéditeur étranger est réservé.

4 Si l'installation n'appartient pas à l'exploitant, le propriétaire est civilement responsable, solidairement avec lui.

5 Lors du transport de substances nucléaires en transit par la Suisse, c'est le détenteur de l'autorisation de transport qui est civilement responsable en cas de dommage d'origine nucléaire causé par ces substances. S'il n'a pas de domicile en Suisse, il doit se soumettre par une déclaration écrite à la Juridiction suisse et élire domicile en Suisse pour les actions fondées sur la présente loi.

6 D'autres personnes que celles qui sont énumérées aux alinéas 1 à 5 ne sont pas civilement responsables des dommages d'origine nucléaire. Celui qui est civilement responsable en vertu des conventions internationales bénéficie d'un droit de recours contre la personne civilement responsable selon la présente loi.

Art. 4

Exonération

L'exploitant d'une installation nucléaire ou le détenteur d'une autorisation de transport, n'est délié de sa responsabilité civile que s'il prouve que le lésé a causé le dommage intentionnellement ou par négligence grave.

217

Responsabilité civile en matière nucléaire Art. 5

Recours de la personne civilement responsable

La personne civilement responsable selon l'article 3 ne dispose d'un droit de recours que contre celles des personnes : a. Qui ont causé l'accident de manière intentionnelle ou par négligence grave; b. Qui ont volé ou recelé les substances nucléaires ayant causé l'accident; c. Qui lui ont accordé par contrat un droit de recours, une telle clause ne pouvant cependant être invoquée à l'encontre de l'employé de la personne civilement responsable que si celui-ci cause le dommage de manière intentionnelle ou par négligence grave.

Art. 6 Dommages-intérêts, réparation pour tort moral 1 La nature et le montant des dommages-intérêts ainsi que l'allocation pour tort moral se déterminent selon les principes généraux du droit des obligations concernant les actes illicites, à moins que la présente loi n'en dispose autrement. L'article 44, 2e alinéa, du code des obligations1' n'est pas applicable.

2 L'indemnité sera, en règle générale, accordée sous forme de rentes.

3 Lorsque la victime du dommage jouissait d'un revenu exceptionnellement élevé, le juge peut, en tenant compte de toutes les circonstances, réduire équitablement l'indemnité.

Art. 7 Conventions 1 Sont réputées nulles les conventions qui excluent ou restreignent la responsabilité civile découlant de la présente loi.

2 Sont attaquables dans le délai de trois ans à compter de leur conclusion, les conventions stipulant des indemnités manifestement insuffisantes.

Art. 8 Assurance-accidents 1 Les droits découlant de la présente loi sont garantis aux lésés qui sont assurés auprès de la Caisse nationale d'assurance en cas d'accidents. L'article 129 de la loi fédérale sur l'assurance en cas de maladie et d'accidents2' est réservé.

2 Les prestations dont le lésé bénéficie en vertu d'une assurance-accidents non obligatoire, dont les primes ont été payées en tout ou partie par l'exploitant ou le détenteur d'une autorisation de transport tenu pour responsable, seront déduites du montant des réparations dues, au prorata de sa participation aux primes, à moins que le contrat d'assurance n'en dispose autrement.

« RS 220 2 > RS 832.01 218

Responsabilité civile en matière nucléaire Art. 9 Prescription et péremption 1 Les prétentions découlant de la présente loi se prescrivent par trois ans à compter du jour où le lésé a eu connaissance du dommage et de la personne qui en assume la responsabilité civile ou la couverture. Elles se périment, à l'exception de celles qui portent sur les dommages différés au sens de l'article 12, si aucune action n'est intentée dans les trente ans qui suivent l'accident. Lorsque le dommage est dû à des effets prolongés, ces délais courent à partir du moment où ces effets cessent.

2 En matière de droit de recours, le délai de trois ans commence à courir le jour où la personne au bénéfice de ce droit a connaissance du montant des prestations qu'elle doit fournir.

3 Si l'état de santé du lésé empire après le jugement ou la signature de l'accord, ou si de nouveaux faits ou moyens de preuve apparaissent, la révision du jugement ou la modification de la convention peut être demandée dans les trois ans à compter du jour où le lésé a eu connaissance de ces faits, mais au plus tard dans les trente ans qui suivent l'accident.

4 Lorsqu'il y a interruption de la prescription pour la personne tenue pour responsable, l'interruption vaut également pour l'assureur et la Confédération.

Chapitre troisième: Couverture Section 1 : Assurance privée Art. 10 1 La personne qui endosse une responsabilité aux termes des dispositions de la présente loi doit, pour couvrir les risques assurés de sa responsabilité civile, contracter auprès d'un établissement d'assurance autorisé à opérer en Suisse, une assurance d'au moins 200 millions de francs par installation nucléaire, plus 20 millions de francs au moins pour les intérêts et coûts de procédure afférant aux prestations. Pour le transit de matières nucléaires par la Suisse, le montant assuré pour chaque transport devra être d'au moins 50 millions de francs, plus 5 millions de francs au minimum pour les intérêts et coûts de procédure.

2 Lorsque le marché des assurances offre une couverture plus élevée à des conditions acceptables, le Conseil fédéral peut, par voie d'ordonnance, relever ces montants minimaux.

3 Le Conseil fédéral définit par voie d'ordonnance les risques que l'assuranceresponsabilité privée est habilitée à exclure de la couverture.

Section 2: Couverture par la Confédération Art. 11 Assurance La Confédération couvre la personne civilement responsable d'un accident nucléaire jusqu'à concurrence d'un milliard de francs par installation nucléaire

219

Responsabilité civile en matière nucléaire ou par transport, plus 100 millions de francs pour les intérêts et frais de procédure, dans la mesure où les dommages ne sont pas couverts par l'assurance privée au sens de l'article 10, 1er alinéa.

Art. 12 Dommages différés Jusqu'à concurrence du montant fixé par l'article 11, la Confédération couvre également les dommages nucléaires dont la réparation ne peut plus être réclamée à la personne civilement responsable parce que le délai de 30 ans (art.

9, 1er al.) est écoulé.

Art. 13 Autres cas 1 Jusqu'à concurrence du montant fixé par l'article 11, la Confédération couvre également les dommages nucléaires a. Lorsqu'il est impossible de déterminer la personne civilement responsable; b. Lorsque le dommage en question n'est pas couvert ou que l'assureur, par insolvabilité, n'est pas en mesure d'en assumer la couverture et que la personne civilement responsable en est également incapable; c. Lorsque l'accident est survenu à l'étranger et que la personne lésée en Suisse ne peut obtenir de réparation conforme à la présente loi.

2 Lorsque la Confédération fournit des prestations en vertu du 1er alinéa, elle bénéficie d'un droit de recours contre la personne civilement responsable. En outre, elle est subrogée aux droits de recours de la personne tenue pour responsable.

Art. 14 Contributions des personnes civilement responsables 1 Afin de s'acquitter des obligations que lui imposent les articles 11 et 12, la Confédération perçoit des exploitants de centrales nucléaires et des titulaires d'autorisations de transport des contributions dont le montant est calculé de manière à satisfaire le mieux au principe de la couverture des coûts, mais qui ne doit pas dépasser le triple de la prime de l'assurance responsabilité-civile privée, calculée aux fins d'assurer la couverture jusqu'à concurrence de 200 millions de francs.

2 Dans ces limites, le Conseil fédéral fixe le montant des contributions.

3 Le service administratif désigné par le Conseil fédéral détermine et perçoit les contributions. Ses décisions peuvent être déférées au Tribunal fédéral par voie de recours de droit administratif.

Art. 15 Fonds pour dommages nucléaires La Confédération institue un fonds auquel sont versées les contributions perçues selon l'article 14 ainsi que les intérêts qu'elles portent.

220

Responsabilité civile en matière nucléaire Section 3: Autres dispositions concernant l'assurance Art. 16 Dispenses de l'obligation de s'assurer 1 Le Conseil fédéral peut dispenser de l'obligation de s'assurer auprès d'un établissement privé la personne civilement responsable lorsqu'elle fournit sous une autre forme pour les lésés, des sûretés équivalentes.

2 La Confédération n'est pas soumise à l'obligation de s'assurer pour les installations nucléaires qu'elle détient.

Art. 17 Rétablissement de la couverture intégrale 1 Si l'établissement d'assurance ou la Confédération agissant en qualité d'assureur fournit des prestations ou alimente des réserves à la suite d'un accident dommageable, la couverture se réduit d'autant. Lorsque les prestations ou les réserves atteignent le dixième de la couverture, l'assureur doit en informer le preneur d'assurance ainsi que le service administratif fédéral compétent.

2 Dans ce cas, le preneur d'assurance doit conclure une assurance supplémentaire, afin de rétablir la totalité de la couverture initiale. L'assurance supplémentaire ne couvre cependant que les accidents survenant après son entrée en vigueur. En cas de doute, l'autorité compétente statue sur l'obligation qu'a le preneur d'assurance d'augmenter sa couverture, compte tenu du montant des réserves constituées.

3 Lorsqu'un montant a été réservé pour la liquidation des cas survenant avant l'entrée en vigueur de l'assurance supplémentaire et n'a pas été mis à contribution, il ne peut servir à couvrir des dommages survenant après l'entrée en vigueur de l'assurance supplémentaire.

Art. 18 Action directe, exceptions, recours 1 Le lésé peut intenter une action directe contre l'assureur et contre la Confédération en sa qualité d'assureur dans les limites du montant couvert par l'assurance.

2 Les exceptions découlant du contrat d'assurance ou de la loi fédérale sur le contrat d'assurance ^ ne peuvent être opposées au lésé.

Art. 19 Droit de recours des assureurs 1 L'assureur et la Confédération ont un droit de recours contre le preneur d'assurance dans la mesure où ils sont habilités à refuser ou à réduire leurs prestations en vertu du contrat d'assurance ou de la loi fédérale sur le contrat d'assurance1'. Us ne peuvent faire valoir leur droit de recours que dans la mesure où ils ne portent pas ainsi préjudice aux lésés.

» RS 221.229.1

221

Responsabilité civile en matière nucléaire 2

L'établissement d'assurance ou la Confédération agissant en qualité d'assureur n'est subrogé au droit de recours de la personne civilement responsable que dans la mesure où cela ne porte pas préjudice aux lésés.

Art. 20 Suspension et cessation de l'assurance L'assureur annoncera à l'autorité compétente la suspension et la cessation de l'assurance. L'une et l'autre ne produiront leurs effets qu'une année après réception de l'annonce de l'assureur, à moins que l'assurance n'ait, au préalable, été remplacée par une autre.

Chapitre quatrième: Procédure Art. 21 Conservation des preuves 1 Après un sinistre d'une certaine gravité, le Conseil fédéral ordonne une enquête. Il invite par publication toutes les personnes pouvant avoir été exposées aux radiations ou avoir subi un dommage matériel à s'annoncer immédiatement, mais au plus tard dans les trois mois qui suivent la publication, à l'autorité qu'il désigne.

2 La publication doit indiquer que la violation de l'obligation de s'annoncer peut, par la suite, rendre plus difficile l'établissement de la preuve qu'il existe un lien entre un dommage éventuel et l'accident survenu.

Art. 22 For 1 Si l'accident est causé par une installation nucléaire, il appartient au tribunal civil suprême du canton où est sise l'installation nucléaire de connaître en instance unique des actions fondées sur la présente loi. Le tribunal statue comme instance cantonale unique.

3 Si l'accident est causé lors du transport de matières nucléaires, les actions doivent être intentées devant le tribunal civil suprême du canton où s'est produit l'événement dommageable. Lorsque le lieu de l'accident ne peut pas être déterminé, les actions seront intentées: a. Devant le tribunal civil du canton où est sise l'installation nucléaire, si l'exploitant d'une installation nucléaire est civilement responsable; b. Devant le tribunal civil suprême du canton où le titulaire de l'autorisation réside ou a élu domicile, si le titulaire d'une autorisation de transport est tenu pour responsable, s Une action fondée sur les articles 12 et 13 et intentée contre la Confédération doit être introduite auprès de la Cour suprême du canton de Berne, à moins que l'un des fors indiqués au 1er ou au 2e alinéa n'existe.

4 S'il faut s'attendre à un grand nombre d'actions, le Parlement cantonal peut instituer un tribunal spécial dont le nombre des membres est proportionné aux circonstances.

222

Responsabilité civile en matière nucléaire Art. 23 Recours Conformément aux dispositions de la loi fédérale d'organisation judiciaire1), le jugement du tribunal cantonal peut faire l'objet d'un recours au Tribunal fédéral.

Art. 24 Constatation des faits 1 Le tribunal cantonal doit établir d'office les faits déterminants. II recueille les preuves nécessaires et les apprécie librement. Il n'est pas lié par les conclusions des parties. S'il veut statuer au-delà des conclusions du plaignant, il donne préalablement aux parties l'occasion de s'exprimer à ce sujet.

2 Si une plainte est déposée contre la personne civilement responsable, le tribunal donne à l'assureur ou à la Confédération la possibilité de défendre leurs intérêts dans la procédure.

3 Le Tribunal fédéral n'est pas lié par les constatations de fait de l'instance inférieure.

Art. 25 Avances S'il y a lieu de prévoir que la procédure judiciaire durera un certain temps, le tribunal accorde des avances qui ne préjugeront en rien la décision finale.

Chapitre cinquième: Grands sinistres Art. 26 Principes 1 S'il y a lieu de prévoir que les moyens financiers dont disposent la personne civilement responsable, de l'assureur privé et la Confédération, en sa qualité d'assureur, ne suffisent pas à satisfaire toutes les demandes de réparation (grands sinistres), l'Assemblée fédérale établit un règlement d'indemnisation en adoptant un arrêté fédéral de portée générale, non soumis au référendum. Ce règlement peut supprimer le droit de recours de la Caisse nationale suisse d'assurance en cas d'accidents, ainsi que celui des assureurs privés à l'encontre de la personne tenue pour responsable. Au besoin, la Confédération peut verser des contributions supplémentaires pour les dommages non couverts.

2 Le règlement fixe les principes généraux en matière d'indemnisation des lésés, de manière à assurer la juste répartition de tous les moyens disponibles. Il peut, le cas échéant, déroger aux dispositions de la présente loi.

3 L'Assemblée fédérale peut charger une autorité spéciale, indépendante, d'assurer l'application du règlement d'indemnisation. Les décisions de cette autorité doivent pouvoir être attaquées devant le Tribunal fédéral.

4 Le Conseil fédéral prend les mesures provisoires qui s'imposent.

D RS 173.110 223

Responsabilité civile en .matière nucléaire Art. 27 Modification des prestations d'assurance, primes de répartition 1 Lorsqu'un grand sinistre entraîne un état de détresse, le Conseil fédéral est habilité à édicter, dans le domaine de l'assurance privée, des prescriptions : a. Sur la modification des prestations de l'assureur; b. Sur la perception de primes de répartition auprès des preneurs d'assurances ; c. Sur la déduction de telles primes des prestations.

2 Cette compétence ne s'étend pas aux assurances en matière de responsabilité civile, qui doivent être souscrites en vertu des articles 10, 11 et 17. Le Conseil fédéral est autorisé à prendre des mesures analogues dans le domaine des assurances sociales et des assurances de droit public.

Chapitre sixième: Dispositions pénales Art. 28 Violation d'une obligation de s'assurer ou de constituer des réserves 1 Celui qui, de manière délibérée, n'aura pas rempli ses obligations en matière d'assurance ou de constitution de réserves sera puni de l'emprisonnement et de l'amende. L'amende se monte au moins au double de la prime annuelle de l'assurance privée.

2 Si le coupable a agi par négligence, il sera puni de l'emprisonnement ou d'une amende pouvant atteindre 20 000 francs.

Art. 29 Contrevenants Celui qui, intentionnellement ou par négligence, aura contrevenu à la présente loi, à ses dispositions d'exécution ou à une décision de l'autorité se fondant sur ces textes, sera puni de l'emprisonnement ou d'une amende pouvant atteindre 20 000 francs.

Art. 30 Compétence La loi fédérale sur le droit pénal administratif1' est applicable. L'Office fédéral de l'énergie est l'autorité administrative compétente pour poursuivre et juger.

Chapitre septième: Réciprocité

Art. 31 Pour des dommages nucléaires survenant à l'étranger, touchant des personnes domiciliées à l'étranger et pour lesquels l'exploitant d'une installation nucléaire située en Suisse ou le titulaire d'une autorisation de transport accordée par la Suisse est civilement responsable, des réparations en vertu de la présente loi sont dues dans la mesure ou l'Etat intéressé prévoit un traitement au moins "RS 313.0

224-

Responsabilité civile en matière nucléaire équivalent à l'égard de la Suisse. La couverture maximum ne doit alors pas être inférieure à 50 millions de francs, même si l'Etat intéressé prévoit une limite moins élevée de la responsabilité civile.

Chapitre huitième : Dispositions finales Art. 32 Exécution Le Conseil fédéral est chargé de l'exécution de la loi. A cet effet, il édicté les dispositions nécessaires.

Art. 33 Modifications du droit en vigueur 1. La loi fédérale d'organisation judiciaire 1) est modifiée comme il suit: Art. 41, let. b Le Tribunal fédéral connaît en instance unique: b. Des actions de droit civil des particuliers ou des collectivités contre la Confédération, lorsque la valeur litigieuse est d'au moins 8000 francs; font exception, les actions intentées en vertu de la loi fédérale du 28 mars 19052' sur la responsabilité civile des entreprises de chemins de fer et de bateaux à vapeur et des postes de la loi sur la circulation routière 3>, et de la loi fédérale du ... 4> sur la responsabilité civile en matière nucléaire ainsi que toutes les actions dirigées contre les chemins de fer fédéraux;

Art. 45, let, c (nouveau) Le recours en réforme est recevable, sans égard à la valeur litigieuse, pour les affaires civiles portant sur un droit de nature pécuniaire: c. dans les contestations relatives à des accidents nucléaires (loi du ,.. 4> sur la responsabilité civile en matière nucléaire.

Art. 117, let. abis (nouveau) abis i a voie de i'action de droit civil en vertu de l'article 45, lettre c est ouverte;

» 2 > 3 > «>

RS 173.110 RS 221.112.742 RS 741.01 RO . . .

16 Feuille fédérale. 132' année. Vol. I

'

225

Responsabilité civile en matière nucléaire 2. La loi fédérale du 23 décembre 19591) sur l'utilisation pacifique de l'énergie atomique et la protection contre les radiations est modifiée comme il suit: Art. 12 à 28

Abrogés Art. 35, l°f al.

1 Celui qui accomplit, notamment sans autorisation, des actes nécessitant une autorisation, ou qui ne respecte pas les conditions et obligations liées à une autorisation, sera, à moins que les éléments constitutifs d'une infraction plus grave ne soient réunis, passible d'une amende de 20 000 francs au plus. La tentative et la complicité sont punissables.

Art. 34 Dispositions transitoires 1 Le nouveau droit est applicable aux dommages survenus avant l'entrée en vigueur de la présente loi et découverts après son entrée en vigueur: 2 Le fonds pour les dommages atomiques différés (art. 19 de la loi du 23 décembre 19591') est dissout. Son patrimoine est transmis au fonds pour dommages nucléaires créé en fonction de l'article 15 de la présente loi.

Art. 35 Référendum et entrée en vigueur 1 La présente loi est soumise au référendum facultatif.

3 Le Conseil fédéral fixe l'entrée en vigueur.

25764

« RS 732.0 226

Annexe I

Convention du 29 juillet 1960 sur la responsabilité civile dans le domaine de l'énergie nucléaire

Texte original

(Texte incluant les dispositions du Protocole additionnel à la Convention sur la Responsabilité civile dans le Domaine de l'Energie nucléaire signé à Paris le 28 janvier 1964)

Les Gouvernements de la République fédérale d'Allemagne, de la République d'Autriche, du Royaume de Belgique, du Royaume de Danemark, de l'Espagne, de la République française, du Royaume de Grèce, de la République italienne, du Grand-Duché du Luxembourg, du Royaume de Norvège, du Royaume des Pays-Bas, de la République portugaise, du Royaume-Uni de Grande-Bretagne et d'Irlande du Nord, du Royaume de Suède, de la Confédération suisse et de la République turque; Considérant que l'Agence Européenne pour l'Energie Nucléaire, créée dans le cadre de l'Organisation Européenne de Coopération Economique (appelée ciaprès ['«Organisation»), est chargée de promouvoir l'élaboration et l'harmonisation des législations intéressant l'énergie nucléaire dans les pays participants, en ce qui concerne notamment le régime de la responsabilité civile et de l'assurance des risques atomiques; Désireux d'assurer une réparation adéquate et équitable aux personnes victimes de dommages causés par des accidents nucléaires, tout en prenant les mesures nécessaires pour éviter d'entraver le développement de la production et des utilisations de l'énergie nucléaire à des fins pacifiques; Convaincus de la nécessité d'unifier les règles fondamentales applicables dans les différents pays à la responsabilité découlant de ces dommages, tout en laissant à ces pays la possiblité de prendre, sur le plan national, les mesures complémentaires qu'ils estimeraient nécessaires et éventuellement d'étendre les dispositions de la présente Convention aux dommages résultant d'accidents dus à des radiations ionisantes qu'elle ne couvre pas; Sont convenus de ce qui suit : Article 1

(a) Au sens de la présente Convention: i. «Un accident nucléaire» signifie tout fait ou succession de faits de même origine ayant causé des dommages, dès lors que ce fait ou ces faits ou certains des dommages causés proviennent ou résultent des propriétés radioactives, ou à la fois des propriétés radioactives et des propriétés toxiques, explosives ou autres propriétés dangereuses des combustibles nucléaires ou produits ou déchets radioactifs, u) «Installation nucléaire» signifie les réacteurs à l'exception de ceux qui font

227

Responsabilité civile dans le domaine de l'énergie nucléaire partie d'un moyen de transport; les usines de préparation ou de fabrication de substances nucléaires; les usines de séparation des isotopes de combustibles nucléaires; les usines de traitement de combustibles nucléaires irradiés, les installations de stockage de substances nucléaires à l'exclusion du stockage de ces substances en cours de transport, ainsi que toute autre installation dans laquelle des combustibles nucléaires ou des produits ou des déchets radioactifs sont détenus et qui serait désignée par le Comité de Direction de l'Agence Européenne pour l'Energie Nucléaire (appelée ci-après le «Comité de Direction»).

iii) «Combustibles nucléaires» signifie les matières fissiles comprenant l'uranium sous forme de métal, d'alliage ou de composé chimique (y compris l'uranium naturel), le plutonium sous forme de métal, d'alliage ou de composé chimique et toute autre matière fissible qui serait désignée par le Comité de Direction.

iv) «Produits ou déchets radioactifs» signifie les matières radioactives produites ou rendues radioactives par exposition aux radiations résultant des opérations de production ou d'utilisation de combustibles nucléaires, à l'exclusion, d'une part, des combustibles nucléaires et, d'autre part, des radioisotopes qui, hors d'une installation nucléaire, sont utilisés ou destinés à être utilisés à des fins industrielles, commerciales, agricoles, médicales ou scientifiques. · v) «Substances nucléaires» signifie les combustibles nucléaires (à l'exclusion de l'uranium naturel et de l'uranium appauvri) et les produits ou déchets radioactifs.

vi) «Exploitant» d'une installation nucléaire signifie la personne désignée ou reconnue par l'autorité publique compétente comme l'exploitant de cette installation nucléaire.

(b) Le Comité de Direction pourra décider qu'une catégorie d'installations nucléaires, de combustibles nucléaires ou de substances nucléaires sera, en raison des risques réduits qu'elle comporte, exclue du champ d'application de la présente Convention.

Article 2 La présente Convention ne s'applique ni aux accidents nucléaires survenus sur le territoire d'Etats non-Contractants ni aux dommages subis sur ces territoires, sauf si la législation de la Partie Contractante sur le territoire de laquelle est située
l'installation nucléaire dont l'exploitant est responsable en dispose autrement, sans préjudice toutefois des droits prévus à l'article 6(e).

Article 3 (a) L'exploitant d'une installation nucléaire est responsable conformément à la présente Convention: i) de tout dommage aux personnes; et ii) de tout dommage aux biens, à l'exclusion 228

Responsabilité civile dans le domaine de l'énergie nucléaire 1. de l'installation nucléaire elle-même et des biens qui se trouvent sur le site de cette installation et qui sont ou doivent être utilisés en rapport avec elle; 2. dans les cas prévus à l'article 4, du moyen de transport sur lequel les substances nucléaires en cause se trouvent au moment de l'accident nucléaire, . s'il est établi que ce dommage (appelé ci-après le «dommage») est causé par un accident nucléaire mettant en jeu soit des combustibles nucléaires, produits ou déchets radioactifs détenus dans cette installation, soit des substances nucléaires provenant de cette installation, sous réserve des dispositions de l'article 4.

(b) Lorsque des dommages sont causés conjointement par un accident nucléaire et un accident autre qu'un accident nucléaire, le dommage causé par ce second accident, dans la mesure où on ne peut le séparer avec certitude du dommage causé par l'accident nucléaire, est considéré comme un dommage causé par l'accident nucléaire. Lorsque le dommage est causé conjointement par un accident nucléaire et par une émission de radiations ionisantes qui n'est pas visée par la présente Convention, aucune disposition de la présente Convention ne limite ni n'affecte autrement la responsabilité de toute personne en ce qui concerne cette émission de radiations ionisantes.

(c) Une Partie Contractante peut prévoir dans sa législation que la responsabilité de l'exploitant d'une installation nucléaire située sur son territoire comprend tout dommage qui provient ou résulte du rayonnements ionisants émis par une source quelconque de rayonnements se trouvant dans cette installation nucléaire, autre que les sources dont il est fait mention au paragraphe (a) du présent article.

Article 4 Dans le cas de transport de substances nucléaires, y compris le stockage en cours de transport, et sans préjudice de l'article 2: (a) L'exploitant d'une installation nucléaire est responsable de tout dommage, conformément à la présente Convention, s'il est établi qu'il est causé par un accident nucléaire survenu hors de cette installation et mettant en jeu des substances nucléaires transportées en provenance de cette installation, à condition que l'accident survienne: i) avant que la responsabilité des accidents nucléaires causés par les substances
nucléaires n'ait été assumée, aux termes d'un contrat écrit, par l'exploitant d'une autre installation nucléaire; ii) à défaut de dispositions expresses d'un tel contrat, avant que l'exploitant d'une autre installation nucléaire n'ait pris en charge les substances nucléaires; iii) si les substances nucléaires sont destinées à un réacteur faisant partie d'un moyen de transport, avant que la personne dûment autorisée à exploiter ce réacteur n'ait pris en charge les substances nucléaires; 229

Responsabilité civile dans le domaine de l'énergie nucléaire iv) si les substances nucléaires ont été envoyées à une personne se trouvant sur le territoire d'un Etat non-Contractant, avant qu'elles n'aient été déchargées du moyen de transport par lequel elles sont parvenues sur le territoire de cet Etat non-Contractant.

(b) L'exploitant d'une installation est responsable de tout dommage, conformément à la présente Convention, s'il est établi qu'il est causé par un accident nucléaire survenu hors de cette installation et mettant en jeu des substances nucléaires au cours de transports à destination de cette installation, à condition que l'accident survienne: i) après que la responsabilité des accidents nucléaires causés par les substances nucléaires lui aura été transférée, aux termes d'un contrat écrit, par l'exploitant d'une autre installation nucléaire; ii) à défaut de dispositions expresses d'un contrat écrit, après qu'il aura pris en charge les substances nucléaires; iii) après qu'il aura pris en charge les substances nucléaires provenant de la personne exploitant un réacteur faisant partie d'un moyen de transport; iv) si les substances nucléaires ont été envoyées, avec le consentement par écrit de l'exploitant, par une personne se trouvant sur le territoire d'un Etat non-Contractant, après qu'elles auront été chargées sur Je moyen de transport par lequel elles doivent quitter le territoire de cet Etat nonContractant.

(c) L'exploitant responsable conformément à la présente Convention doit remettre au transporteur un certificat délivré par ou pour le compte de l'assureur ou de toute autre personne ayant accordé une garantie financière conformément à l'article 10. Le certificat doit énoncer le nom et l'adresse de cet exploitant ainsi que le montant, le type et la durée de la garantie. Les faits énoncés dans le certificat ne peuvent être contestés par la personne par laquelle ou pour le compte de laquelle il a été délivré. Le certificat doit également désigner les substances nucléaires et l'itinéraire couverts par la garantie et comporter une déclaration de l'autorité publique compétente que la personne visée est un exploitant au sens de la présente Convention.

(d) La législation d'une Partie Contractante peut prévoir qu'à des conditions qu'elle détermine, un transporteur peut être substitué,
en ce qui concerne la responsabilité prévue par la présente Convention, à un exploitant d'une installation nucléaire située sur le territoire de ladite Partie Contractante, par décision de l'autorité publique compétente, à la demande du transporteur et avec l'accord de l'exploitant, si les conditions requises à l'article 10 (a) sont remplies. Dans ce cas, le transporteur est considéré, aux fins de la présente Convention, pour les accidents nucléaires survenus en cours de transport de substances nucléaires, comme exploitant d'une installation nucléaire située sur le territoire de ladite Partie Contractante.

Article 5

(a) Si les combustibles nucléaires, produits ou déchets radioactifs mis en jeu 230

Responsabilité civile dans le domaine de l'énergie nucléaire dans un accident nucléaire ont été détenus successivement dans plusieurs installations nucléaires et sont détenus dans une installation nucléaire au moment où le dommage est causé, aucun exploitant d'une installation dans laquelle ils ont été détenus antérieurement n'est responsable du dommage.

(b) Toutefois, si un dommage est causé par un accident nucléaire survenu dans une installation nucléaire et ne mettant en cause que des substances nucléaires qui y sont stockées en cours de transport, l'exploitant de cette installation n'est pas responsable lorsqu'un autre exploitant ou une autre personne est responsable en vertu de l'article 4.

(c) Si les combustibles nucléaires, produits ou déchets radioactifs mis en jeu dans un accident nucléaire ont été détenus dans plusieurs installations nucléaires et ne sont pas détenus dans une installation nucléaire au moment où le dommage est causé, aucun exploitant autre que l'exploitant de la dernière installation nucléaire dans laquelle ils ont été détenus, avant que le dommage ait été causé, ou que l'exploitant qui les a pris en charge ultérieurement, n'est responsable du dommage.

(d) Si le dommage implique la responsabilité de plusieurs exploitants conformément à la présente Convention, leur responsabilité est solidaire et cumulative; toutefois, lorsqu'une telle responsabilité résulte du dommage causé par un accident nucléaire mettant en jeu des substances nucléaires en cours de transport, soit dans un seul et même moyen de transport, soit, en cas de stockage en cours de transport, dans une seule et même installation nucléaire, le montant total maximum de la responsabilité desdits exploitants est égal au montant le plus élevé fixé pour un des exploitants conformément à l'article 7.

En aucun cas, la responsabilité d'un exploitant résultant d'un accident nucléaire ne peut dépasser le montant fixé, en ce qui le concerne, à l'article 7.

Article 6 (a) Le droit à réparation pour un dommage causé par un accident nucléaire ne peut être exercé que contre un exploitant responsable de ce dommage conformément à la présente Convention; il peut également être exercé contre l'assureur ou contre toute autre personne ayant accordé une garantie financière à l'exploitant conformément à l'article 10, si un droit
d'action directe contre l'assureur ou toute personne ayant accordé une garantie financière est prévu par le droit national.

(b) Sous réserve des dispositions du présent article, aucune autre personne n'est tenue de réparer un dommage causé par un accident nucléaire; toutefois, cette disposition ne peut affecter l'application des accords internationaux dans le domaine des transports qui sont en vigueur ou ouverts à la signature, à la ratification ou à l'adhésion, à la date de la présente Convention.

(c) i) Aucune disposition de la présente Convention n'affecte la responsabilité: 1. de toute personne physique qui, par un acte ou une omission procédant de l'intention de causer un dommage, a causé un dommage résultant d'un accident nucléaire dont l'exploitant, conformé231

Responsabilité civile dans le domaine de l'énergie nucléaire ment à l'article 3 (a) (ii) (1) et (2) ou à l'article 9, n'est pas responsable en vertu de la présente Convention; 2. de la personne dûment autorisée à exploiter un réacteur faisant partie d'un moyen de transport pour un dommage causé par un accident nucléaire, lorsqu'un exploitant n'est pas responsable de ce dommage en vertu de l'article 4 (a) (iii) ou (b) (iii).

ii) L'exploitant ne peut être rendu responsable, en dehors de la présente Convention, d'un dommage causé par un accident nucléaire, sauf lorsqu'il n'est pas fait usage de l'article 7 (c), et alors seulement dans la mesure où des dispositions particulières ont été prises en ce qui concerne le dommage au moyen de transport, soit dans la législation nationale, soit dans la législation de la Partie Contractante sur le territoire de laquelle est située l'installation nucléaire.

(d) Toute personne qui a réparé un dommage causé par un accident nucléaire en vertu d'un accord international visé au paragraphe (b) du présent article ou en vertu de la législation d'un Etat non-Contractant acquiert par subrogation, à concurrence de la somme versée, les droits dont la personne ainsi indemnisée aurait bénéficié en vertu de la présente Convention.

(e) Toute personne ayant son lieu principal d'exploitation sur le territoire d'une Partie Contractante, ou ses préposés, qui ont réparé un dommage nucléaire causé par un accident nucléaire survenu sur le territoire d'un Etat non-Contractant ou un dommage subi sur ce territoire, acquièrent, à concurrence de la somme versée, les droits dont la personne ainsi indemnisée aurait bénéficié en l'absence de l'article 2.

(f) L'exploitant n'a un droit de recours que i) si le dommage résulte d'un acte ou d'une omission procédant de l'intention de causer un dommage, contre la personne physique auteur de l'acte ou de l'omission intentionnelle; ii) si et dans la mesure où le recours est prévu expressément par contrat.

(g) Pour autant que l'exploitant ait un droit de recours contre une personne en vertu du paragraphe (0 du présent article, ladite personne ne peut avoir un droit contre l'exploitant en vertu des paragraphes (d) ou (e) du présent article.

(h) Si la réparation du dommage met en jeu un régime national ou public d'assurance médicale, de sécurité
sociale ou de réparation des accidents du travail et maladies professionnelles, les droits des bénéficiaires de ce régime et les recours éventuels pouvant être exercés contre l'exploitant sont réglés par la loi de la Partie Contractante ou les règlements de l'organisation intergouvernementale ayant établi ce régime.

Article 7 (a) Le total des indemnités payables pour un dommage causé par un accident nucléaire ne peut dépasser le montant maximum de la responsabilité, fixé conformément au présent article.

232

Responsabilité civile dans le domaine de l'énergie nucléaire (b) Le montant maximum de la responsabilité de l'exploitant pour les dommages causés par un accident nucléaire est fixé à 15 000 000 d'unités de compte de l'Accord Monétaire Européen, telles qu'elles sont définies à la date de la présente Convention (appelées ci-après «unités de compte»). Toutefois, un autre montant plus ou moins élevé peut être fixé par la législation d'une Partie Contractante, compte tenu de la possibilité pour l'exploitant d'obtenir l'assurance ou une autre garantie financière requise à l'article 10, sans toutefois que le montant ainsi fixé puisse être inférieur à 5 000 000 d'unités de compte. Les montants prévus au présent paragraphe peuvent être convertis en monnaie nationale en chiffres ronds.

(c) L'exception résultant de l'alinéa (a) (ii) (2) de l'article 3 peut être écartée par la législation d'une Partie Contractante, à condition qu'en aucun cas l'inclusion des dommages au moyen de transport n'ait pour effet de réduire la responsabilité de l'exploitant pour les autres dommages à un montant inférieur à 5 000 000 d'unités de compte.

(d) Le montant fixé en vertu du paragraphe (b) du présent article pour la responsabilité des exploitants d'installations nucléaires situées sur le territoire d'une Partie Contractante ainsi que les dispositions de la législation d'une Partie Contractante prises en vertu du paragraphe (c) du présent article, s'appliquent à la responsabilité desdits exploitants quel que soit le lieu de l'accident nucléaire.

(e) Une Partie Contractante peut subordonner le transit de substances nucléaires à travers son territoire, à la condition que le montant maximum de la responsabilité de l'exploitant étranger en cause soit augmenté, si elle estime que ledit montant ne couvre pas d'une manière adéquate les risques d'un accident nucléaire au cours de ce transit. Toutefois, le montant maximum ainsi augmenté ne peut excéder le montant maximum de la responsabilité des exploitants d'installations nucléaires, situées sur le territoire de cette Partie Contractante.

(f) Les dispositions du paragraphe (e) du présent article ne s'appliquent pas: i) au transport par mer lorsqu'il y à, en vertu du droit international, un droit de refuge dans les ports de ladite Partie Contractante, par suite d'un danger imminent,
ou un droit de passage inoffensif à travers son territoire; ii) au transport par air lorsqu'il y a, en vertu d'un accord ou du droit international, un droit de survol du territoire ou d'atterrissage sur le territoire de ladite Partie Contractante.

(g) Les intérêts et dépens liquidés par le tribunal saisi d'une action en réparation en vertu de la présente Convention ne sont pas considérés comme des indemnités au sens de la présente Convention et sont dus par l'exploitant en sus du montant des réparations qui peuvent être dues en vertu du présent article.

233

Responsabilité civile dans le domaine de l'énergie nucléaire Article 8 (a) Les actions en réparation, en vertu de la présente Convention, doivent être intentées sous peine de déchéance, dans le délai de dix ans à compter de l'accident nucléaire. Toutefois, la législation nationale peut fixer un délai de déchéance supérieur à dix ans, si la Partie Contractante sur le territoire de laquelle est située l'installation nucléaire dont l'exploitant est responsable prévoit des mesures pour couvrir la responsabilité de l'exploitant à l'égard des actions en réparation introduites après l'expiration du délai de dix ans et pendant la période de prolongation de ce délai. Toutefois, cette prolongation du délai de déchéance ne peut porter atteinte en aucun cas aux droits à réparation en vertu de la présente Convention des personnes ayant intenté contre l'exploitant une action du fait de décès ou de dommages aux personnes avant l'expiration dudit délai de dix ans.

(b) Dans le cas de dommage causé par un accident nucléaire mettant en jeu des combustibles nucléaires, produits ou déchets radioactifs qui étaient, au moment de l'accident, volés, perdus, jetés par-dessus bord ou abandonnés et n'avaient pas été récupérés, le délai visé au paragraphe (a) de cet article est calculé à partir de la date de cet accident nucléaire, mais il ne peut en aucun cas être supérieur à vingt ans à compter de la date du vol, de la perte, du jet par-dessus bord ou de l'abandon.

(c) La législation nationale peut fixer un délai de déchéance ou de prescription de deux ans au moins, soit à compter du moment où le lésé a eu connaissance du dommage et de l'exploitant responsable, soit à compter du moment où il a dû raisonnablement en avoir connaissance, sans que le délai établi en vertu des paragraphes (a) et (b) de cet article puisse être dépassé.

(d) Dans les cas prévus à l'article 13 (c) (ii), il n'y a pas de déchéance de l'action en réparation si, dans le délai prévu au paragraphe (a) du présent article, i) une action a été intentée, avant que le Tribunal visé à l'article 17 n'ait pris une décision, devant l'un des tribunaux entre lesquels ledit Tribunal peut choisir; si le Tribunal désigne comme tribunal compétent, un autre tribunal que celui devant lequel l'action a déjà été intentée, il peut fixer un délai dans lequel l'action doit
être intentée devant le tribunal compétent ainsi désigné; ii) une demande a été introduite auprès d'une Partie Contractante intéressée en vue de la désignation du tribunal compétent par le Tribunal conformément à l'article 13 (c) (ii), à condition qu'une action soit intentée après cette désignation dans le délai qui serait fixé par ledit Tribunal.

(e) Sauf disposition contraire du droit national, une personne ayant subi un dommage causé par un accident nucléaire qui a intenté une action en réparation dans le délai prévu au présent article peut présenter une demande complémentaire en cas d'aggravation du dommage après l'expiration de ce délai, tant qu'un jugement définitif n'est pas intervenu.

234

Responsabilité civile dans le domaine de l'énergie nucléaire

Article 9 L'exploitant n'est pas responsable des dommages causés par un accident nucléaire si cet accident est dû directement à des actes de conflit armé, d'hostilités, de guerre civile, d'insurrection ou, sauf disposition contraire de la législation de la Partie Contractante sur le territoire de laquelle est située son installation nucléaire, à des cataclysmes naturels de caractère exceptionnel.

Article 10 (a) Tout exploitant devra être tenu, pour faire face à la responsabilité prévue par la présente Convention, d'avoir et de maintenir, à concurrence du montant fixé conformément à l'article 7, une assurance ou une autre garantie financière correspondant au type et aux conditions déterminés par l'autorité publique compétente.

(b) L'assureur ou toute autre personne ayant accordé une garantie financière ne peut suspendre l'assurance ou la garantie financière prévue au paragraphe (a) du présent article, ou y mettre fin sans un préavis de deux mois au moins donné par écrit à l'autorité publique compétente, ou, dans la mesure où ladite assurance ou autre garantie financière concerne un transport de substances nucléaires, pendant la durée de ce transport.

(c) Les sommes provenant de l'assurance, de la réassurance ou d'une autre garantie financière ne peuvent servir qu'à la réparation des dommages causés par un accident nucléaire.

Article 11 La nature, la forme et l'étendue de la réparation, ainsi que la répartition équitable des indemnités sont régies, dans les limite? prévues par la présente Convention, par le droit national.

Article 12 Les indemnités payables conformément à la présente Convention, les primes d'assurance et de réassurance ainsi que les sommes provenant de l'assurance, de la réassurance ou d'une autre garantie financière en vertu de l'article 10 et les intérêts et dépens visés à l'article 7 (g), sont librement transférables entre les zones monétaires des Parties Contractantes.

Article 13 (a) Sauf dans les cas où le présent article en dispose autrement, les tribunaux de la Partie Contractante sur le territoire de laquelle l'accident nucléaire est survenu, sont seuls compétents pour statuer sur les actions introduites en vertu des articles 3, 4, 6 (a) et 6 (e).

235

Responsabilité civile dans le domaine de l'énergie nucléaire (b) Lorsqu'un accident nucléaire survient hors des territoires des Parties Contractantes, ou que le lieu de l'accident nucléaire ne peut être déterminé avec certitude, les tribunaux de la Partie Contractante sur le territoire de laquelle est située l'installation nucléaire dont l'exploitant est responsable sont seuls compétents, (c) Lorsqu'en vertu des paragraphes (a) ou (b) du présent article les tribunaux de plusieurs Parties Contractantes sont compétents, la compétence est attribuée, i) si l'accident nucléaire est survenu en partie en dehors du territoire de toute Partie Contractante et en partie sur le territoire d'une seule Partie Contractante, aux tribunaux de cette dernière; ii) dans tout autre cas, aux tribunaux de la Partie Contractante désignée, à la demande d'une Partie Contractante intéressée, par le tribunal visé à l'article 17, comme étant la plus directement liée à l'affaire.

(d) Lorsque les jugements prononcés contradictoirement ou par défaut par le tribunal compétent en vertu des dispositions du présent article sont exécutoires d'après les lois appliquées par ce tribunal, ils deviennent exécutoires sur le territoire de toute autre Partie Contractante dès l'accomplissement des formalités prescrites par la Partie Contractante intéressée. Aucun nouvel examen du fond de l'affaire n'est admis. Cette disposition ne s'applique pas aux jugements qui ne sont exécutoires que provisoirement.

(e) Si une action en réparation est intentée contre une Partie Contractante en vertu de la présente Convention, ladite Partie Contractante ne peut invoquer son immunité de juridiction devant le tribunal compétent en vertu du présent article, sauf en ce qui concerne les mesures d'exécution.

Article 14 (a) La présente Convention doit être appliquée sans aucune discrimination fondée sur la nationalité, le domicile ou la résidence.

(b) Le «droit national» et la «législation nationale» signifient le droit ou la législation nationale du tribunal compétent en vertu de la présente Convention pour statuer sur les actions résultant d'un accident nucléaire; le droit ou la législation nationale est applicable pour toutes les questions de fond et de procédure qui ne sont pas réglées spécialement par la présente Convention.

(c) Le droit et la législation
nationaux doivent être appliqués sans aucune discrimination fondée sur la nationalité, le domicile ou la résidence, Article 15 (a) II appartient à chaque Partie Contractante de prendre les mesures qu'elle estime nécessaires en vue d'accroître l'importance de la réparation prévue par la présente Convention.

236

Responsabilité civile dans le domaine de l'énergie nucléaire (b) Pour la part des dommages dont la réparation proviendrait d'une intervention financière mettant en jeu des fonds publics et qui excéderait le montant minimum de 5 000 000 d'unités de compte prévu à l'article 7, l'application de ces mesures, quelle que soit leur forme, pourrait être soumise à des conditions particulières dérogeant aux dispositions de la présente Convention.

Article 16 Les dispositions prises par le Comité de Direction en vertu de l'article 1 (a) (ii), 1 (a) (iii) et 1 (b), sont adoptées par accord mutuel des membres représentant les Parties Contractantes.

Article 17 Tout différend entre deux ou plusieurs Parties Contractantes relatif à l'interprétation ou à l'application de la présente Convention sera examiné par le Comité de Direction et à défaut de solution amiable soumis, à la demande d'une Partie Contractante intéressée, au Tribunal créé par la Convention en date du 20 décembre 1957 sur l'Etablissement d'un Contiôle de Sécurité dans le Domaine de l'Energie Nucléaire.

Article 18 (a) Des réserves portant sur une ou plusieurs dispositions de la présente Convention peuvent être formulées à tout moment avant la ratification ou l'adhésion à la présente Convention, ou avant la notification faite en vertu de l'article 23 en ce qui concerne le ou les territoires visés par cette notification; ces réserves ne sont recevables que si leurs termes ont été expressément acceptés par les Signataires.

(b) Toutefois, l'acceptation d'un Signataire n'est pas requise, si celui-ci n'a pas lui-même ratifié la Convention dans un délai de douze mois à partir de la date où la notification de la réserve lui a été communiquée par le Secrétaire général de l'Organisation, conformément à l'article 24.

(c) Toute réserve acceptée conformément au présent article peut être retirée à tout moment par notification adressée au Secrétaire général de l'Organisation.

Article 19 (a) La présente Convention sera ratifiée. Les instruments de ratification seront déposés auprès du Secrétaire général de l'Organisation.

(b) La présente Convention entrera en vigueur dès que cinq au moins des Signataires auront déposé leur instrument de ratification. Pour tout Signataire qui la ratifiera ultérieurement, la présente Convention entrera en vigueur dès qu'il aura déposé son instrument de ratification.

237

Responsabilité civile dans le domaine de l'énergie nucléaire Article 20

Les modifications à la présente Convention seront adoptées par accord mutuel de toutes les Parties Contractantes. Elles entreront en vigueur lorsqu'elles auront été ratifiées ou confirmées par les deux tiers des Parties Contractantes.

Pour toutes Parties Contractantes qui les ratifieront ou confirmeront ultérieurement, les modifications entreront en vigueur à la date de cette ratification ou confirmation.

Article 21

(a) Tout Gouvernement d'un pays membre ou associé de l'Organisation, non Signataire de la présente Convention, pourra y adhérer par notification adressée au Secrétaire général de l'Organisation.

(b) Tout Gouvernement d'un autre pays non Signataire de la présente Convention pourra y adhérer par notification adressée au Secrétaire général de l'Organisation et avec l'accord unanime des Parties Contractantes. L'adhésion prendra effet à la date de cet accord.

Article 22

(a) La présente Convention est conclue pour une durée de dix ans à compter de la date de son entrée en vigueur. Toute Partie Contractante pourra mettre fin en ce qui la concerne à l'application de la présente Convention au terme de ce délai en donnant un préavis d'un an à cet effet au Secrétaire général de l'Organisation.

(b) La présente Convention restera par la suite en vigueur pour une période de cinq ans, vis-à-vis des Parties Contractantes qui n'auront pas mis fin à son application conformément au paragraphe (a) du présent article et ultérieurement, par périodes successives de cinq ans, vis-à-vis des Parties Contractantes qui n'y auront pas mis fin au terme de l'une de ces périodes, en donnant un préavis d'un an à cet effet au Secrétaire général de l'Organisation.

(c) Une conférence sera convoquée par le Secrétaire général de l'Organisation pour examiner la révision de la présente Convention, au terme de la période de cinq ans qui suivra la date de son entrée en vigueur ou, à tout autre moment, à la demande d'une Partie Contractante, dans un délai de six mois à compter de cette demande.

Article 23 (a) La présente Convention s'applique aux territoires métropolitains des Parties Contractantes.

(b) Tout Signataire ou Partie Contractante peut, au moment de la signature ou de la ratification de la présente Convention ou de son adhésion à la présente Convention, ou ultérieurement à tout moment, indiquer par notifi238

Responsabilité civile dans le domaine de l'énergie nucléaire cation adressée au Secrétaire général de l'Organisation que la présente Convention s'applique à ceux de ses territoires, y compris les territoires pour lesquels la Partie Contractante est responsable dans les relations internationales, auxquels elle n'est pas applicable en vertu du paragraphe (a) du présent article et qui sont désignés dans la notification. Une telle notification peut, en ce qui concerne tout territoire qui y est désigné, être retirée en donnant un préavis d'un an à cet effet au Secrétaire général de l'Organisation.

(c) Les territoires d'une Partie Contractante, y compris ceux pour lesquels elle est responsable dans les relations internationales, auxquels la présente Convention ne s'applique pas, sont considérés aux fins de ladite Convention comme territoires d'un Etat non-Contractant.

Article 24

Le Secrétaire général de l'Organisation donnera communication à tous les Signataires et Gouvernements ayant adhéré à la Convention de la réception des instruments de ratification, d'adhésion et de retrait, ainsi que des notifications faites en vertu de l'article 23 et des décisions prises par le Comité de Direction en vertu de l'article 1 (a) (ii), 1 (a) (iii) et 1 (b). Il leur notifiera également la date de l'entrée en vigueur de la présente Convention, le texte des modifications adoptées et la date de l'entrée en vigueur desdites modifications, ainsi que les réserves faites conformément à l'article 18.

25764

239

Responsabilité civile dans le domaine de l'énergie nucléaire

Annexe I Les réserves suivantes ont été acceptées, soit à la date de la signature de la Convention, soit à la date de la signature du Protocole Additionnel : 1. Article 6 (a) et (c) (i) : Réserve du Gouvernement de la République fédérale d'Allemagne, du Gouvernement de la République d'Autriche et du Gouvernement du Royaume de Grèce.

Réserve du droit de laisser subsister, par une disposition de la législation nationale, la responsabilité d'une personne autre que l'exploitant, à condition que cette personne soit entièrement couverte, même en cas d'action mal fondée, soit par une assurance ou une autre garantie financière obtenue par l'exploitant, soit au moyen des fonds publics.

2. Article 6 (b) et (d) : Réserve du Gouvernement de la République d'Autriche, du Gouvernement du Royaume de Grèce, du Gouvernement du Royaume de Norvège et du Gouvernement du Royaume de Suède.

Réserve du droit de considérer leurs lois nationales comportant des dispositions équivalentes à celles des accords internationaux visés à l'article 6 (b) comme des accords internationaux aux fins de l'article 6 (b) et (d).

3. Article 8 (a) : Réserve du Gouvernement de la République fédérale d'Allemagne et du Gouvernement de la République d'Autriche.

Réserve du droit d'établir, en ce qui concerne les accidents nucléaires survenant respectivement dans la République fédérale d'Allemagne et dans la République d'Autriche, un délai de déchéance supérieur à dix ans, si des mesures ont été prévues pour couvrir la responsabilité de l'exploitant à l'égard des actions en réparation introduites après l'expiration du délai de dix ans et pendant la période de prolongation de ce délai.

4. Article 9: . Réserve du Gouvernement de la République fédérale d'Allemagne et du Gouvernement de la République d'Autriche.

Réserve du droit de prévoir, en ce qui concerne les accidents nucléaires survenant respectivement dans la République fédérale d'Allemagne et dans la République d'Autriche, que l'exploitant est responsable des dommages causés par un accident nucléaire si cet accident est dû directement à des actes de conflit armé, d'hostilités, de guerre civile, d'insurrection ou à des cataclysmes naturels de caractère exceptionnel.

240

Responsabilité civile dans le domaine de l'énergie nucléaire 5. Article 19: Réserve du Gouvernement de la République fédérale d'Allemagne, du Gouvernement de la République d'Autriche et du Gouvernement du Royaume de Grèce.

Réserve du droit de considérer la ratification de la présente Convention comme entraînant l'obligation, conformément au droit international, de prendre dans l'ordre interne des dispositions relatives à la responsabilité civile dans le domaine de l'énergie nucléaire conformes aux dispositions de la présente Convention.

17 Feuille fédérale. 132' année. Vol. I

241

Responsabilité civile dans le domaine de l'énergie nucléaire

Annexe II Cette Convention ne peut être interprétée comme privant une Partie Contractante sur le territoire de laquelle des dommages auront été causés par un accident nucléaire survenu sur le territoire d'une autre Partie Contractante, des recours qui pourraient lui être ouverts en application du droit international.

En foi de quoi les Plénipotentiaires soussignés, dûment habilités, ont apposé leurs signatures au bas de la présente Convention.

Fait à Paris, le 29 juillet 1960, en français, en anglais, en allemand, en espagnol, en italien et en néerlandais, en un seul exemplaire qui restera déposé auprès du Secrétaire général de l'Organisation Européenne de Coopération Economique qui en communiquera une copie certifiée conforme à tous les Signataires.

(Suivent les signatures)

242

Annexe II

Convention complémentaire du 31 janvier 1963 Texte original à la convention de Paris du 29 juillet 1960 sur la responsabilité civile dans le domaine de l'énergie nucléaire (Texte incluant les dispositions du Protocole Additionnel signé à Paris le 28 janvier 1964)

Les Gouvernements de la République fédérale d'Allemagne, de la République d'Autriche, du Royaume de Belgique, du Royaume de Danemark, de l'Espagne, de la République française, de la République italienne, du Grand-Duché de Luxembourg, du Royaume de Norvège, du Royaume des Pays-Bas, du Royaume-Uni de Grande-Bretagne et d'Irlande du Nord, du Royaume de Suède et de la Confédération Suisse; Parties à la Convention du 29 juillet 1960 sur la responsabilité civile dans le domaine de l'énergie nucléaire, conclue dans le cadre de l'Organisation Européenne de Coopération Economique devenue l'Organisation de Coopération et de Développement Economiques et telle qu'elle a été modifiée par le Protocole additionnel conclu à Paris, le 28 janvier 1964 (ci-après dénommée «Convention de Paris»).

Désireux d'apporter un complément aux mesures prévues dans cette Convention, en vue d'accroître l'importance de la réparation des dommages qui pourraient résulter de l'utilisation de l'énergie nucléaire à des fins pacifiques ; Sont convenus de ce qui suit : Article 1

Le régime complémentaire à celui de la Convention de Paris, institué par la présente Convention, est soumis aux dispositions de la Convention de Paris ainsi qu'aux dispositions fixées ci-après.

Article 2 (a) Le régime de la présente Convention s'applique aux dommages causés par des accidents nucléaires autres que ceux qui sont survenus entièrement sur le territoire d'un Etat non contractant à la présente Convention: (i) dont la responsabilité incombe, en vertu de la Convention de Paris, à l'exploitant d'une installation nucléaire à usage pacifique, située sur le territoire d'une Partie Contractante à la présente Convention (ci-après dénommée «Partie Contractante») et figurant sur la liste établie et mise à jour dans les conditions prévues à l'article 13.

(ii) subis (1) sur le territoire d'une Partie Contractante ou 243

Responsabilité civile dans le domaine de l'énergie nucléaire (2) en haute mer ou au-dessus, à bord d'un navire ou d'un aéronef immatriculé sur le territoire d'une Partie Contractante ou (3) en haute mer ou au-dessus, par un ressortissant d'une Partie Contractante à condition, s'il s'agit de dommages à un navire ou à un aéronef que celui-ci soit immatriculé sur le territoire d'une Partie Contractante, sous réserve que les tribunaux d'une Partie Contractante soient compétents conformément à la Convention de Paris.

(b) Tout Signataire ou Gouvernement adhérent à la Convention peut, au moment de la signature de la présente Convention ou de son adhésion à celleci ou au moment du dépôt de son instrument de ratification; déclarer qu'il assimile à ses propres ressortissants, aux fins de l'application du paragraphe (a) (ii) ci-dessus, les personnes physiques qui ont leur résidence habituelle sur son territoire au sens de sa législation, ou certaines catégories d'entre elles.

(c) Au sens du présent article, l'expression «ressortissant d'une Partie Contractante» couvre une Partie Contractante ou toute subdivision politique d'une telle Partie, ou toute personne morale de droit public ou de droit privé, ainsi que toute entité publique ou privée n'ayant pas la personnalité juridique établie sur le territoire d'une Partie Contractante.

Articles (a) Dans les conditions fixées par la présente Convention, les Parties Contractantes s'engagent à ce que la réparation des dommages visés à l'article 2 soit effectuée à concurrence d'un montant de 120 millions d'unités de compte par accident.

(b) Cette réparation est effectuée: (i) à concurrence d'un montant au moins égal à 5 millions d'unités de compte, fixé à cet effet en vertu de la législation de la Partie Contractante sur le territoire de laquelle est située l'installation nucléaire de l'exploitant responsable, au moyen de fonds provenant d'une assurance ou d'une autre garantie financière; (ii) entre ce montant et 70 millions d'unités de compte, au moyen de fonds publics à allouer par la Partie Contractante sur le territoire de laquelle est située l'installation nucléaire de l'exploitant responsable; (iii) entre 70 et 120 millions d'unités de compte, au moyen de fonds publics à allouer par les Parties Contractantes selon la clé de répartition prévue à l'article 12.
(c) A cet effet, chaque Partie Contractante doit : (i) soit fixer, conformément à l'article 7 de la Convention de Paris, le montant maximum de la responsabilité de l'exploitant à 120 millions d'unités de compte et disposer que cette responsabilité est couverte par l'ensemble des fonds visés au paragraphe (b) ci-dessus ; 244

Responsabilité civile dans le domaine de l'énergie nucléaire (ii) soit fixer le montant maximum de la responsabilité de l'exploitant à un niveau au moins égal à celui qui est fixé conformément au paragraphe (b) (i) ci-dessus et disposer qu'au-delà de ce montant et jusqu'à 120 millions d'unités de compte, les fonds publics visés au paragraphe (b) (ii) et (iii) cidessus sont alloués à un titre différent de celui d'une couverture de la responsabilité de l'exploitant; toutefois, elle ne doit pas porter atteinte aux règles de fond et de procédure fixées par la présente Convention.

(d) Les créances découlant de l'obligation pour l'exploitant de réparer des dommages ou de payer des intérêts et dépens au moyen des fonds alloués conformément aux paragraphes (b) (ii) et (iii) et (f) du présent article ne sont exigibles à son égard qu'au fur et à mesure de l'allocation effective de ces fonds.

(e) Les Parties Contractantes s'engagent à ne pas faire usage dans l'exécution de la Présente Convention de la faculté prévue à l'article 15 (b) de la Convention de Paris d'édicter des conditions particulières.

(i) pour la réparation des dommages effectués au moyen des fonds visés au paragraphe (b) (i) ci-dessus; (ii) en dehors de celles de la présente Convention, pour la réparation des dommages effectués au moyen des fonds publics visés au paragraphe (b) (ii) et (iii) ci-dessus.

(f) Les intérêts et dépens visés à l'article 7 (g) de la Convention de Paris sont payables au-delà des montants indiqués au paragraphe (b) ci-dessus. Dans la mesure où ils sont alloués au titre d'une réparation payable sur les fonds visés : (i) au paragraphe (b) (i) ci-dessus, ils sont à la charge de l'exploitant responsable; (ii) au paragraphe (b) (ii) ci-dessus, ils sont à la charge de la Partie Contractante sur le territoire de laquelle est située l'installation nucléaire de cet exploitant ; (iii) au paragraphe (b) (iii) ci-dessus, ils sont à la charge de l'ensemble des Parties Contractantes.

(g) Au sens de la présente Convention, «unité de compte» signifie l'unité de compte de l'Accord Monétaire Européen, telle qu'elle est définie à la date de la Convention de Paris.

Article 4 (a) Si un accident nucléaire entraîne un dommage qui implique la responsabilité de plusieurs exploitants, le cumul des responsabilités prévu à l'article 5(d)
de la Convention de Paris ne joue, dans la mesure où des fonds publics visés à l'article 3 (b) (ii) et (iii) doivent être alloués, qu'à concurrence d'un montant de 120 millions d'unités de compte.

(b) Le montant global des fonds publics alloués en vertu de l'article 3 (b) (ii) et (iii) ne peut dépasser, dans ce cas, la différence entre 120 millions d'unités de compte et le total des montants déterminés pour ces exploitants, conformé-

245

Responsabilité civile dans le domaine de l'énergie nucléaire ment à l'article 3 (b) (i) ou, dans le cas d'un exploitant dont l'installation nucléaire est situé sur le territoire d'un Etat non-Contractant à la présente Convention, conformément à l'article 7 de la Convention de Paris. Si plusieurs Parties Contractantes sont tenues d'allouer des fonds publics, conformément à l'article 3 (b) (ii), la charge de cette allocation est répartie entre elles au prorata du nombre des installations nucléaires situées sur le territoire de chacune d'elles qui sont impliquées dans l'accident nucléaire et dont les exploitants sont responsables.

Article 5 (a) Dans le cas où l'exploitant responsable a un droit de recours conformément à l'article 6 (f) de la Convention de Paris, la Partie Contractante sur le territoire de laquelle est située l'installation nucléaire de cet exploitant adopte dans sa législation les dispositions nécessaires pour permettre à cette Partie Contractante et aux autres Parties Contractantes, de bénéficier de ce recours dans la mesure où des fonds publics sont alloués au titre de l'article 3 (b) (ii), (ui) et (f).

(b) Cette législation peut prévoir à rencontre de cet exploitant des dispositions pour la récupération des fonds publics alloués au titre de l'article 3 (b) (ii), (iii) et (f) si le dommage résulte d'une faute qui lui soit imputable.

Article 6 Pour le calcul des fonds à allouer en vertu de la présente Convention, seuls sont pris en considération les droits à réparation exercés dans un délai de dix ans à compter de l'accident nucléaire. En cas de dommage causé par .un accident nucléaire mettant en jeu des combustibles nucléaires, produits ou déchets radioactifs qui étaient, au moment de l'accident, volés, perdus, jetés par-dessus bord ou abandonnés et n'avaient pas été récupérés, un tel délai ne peut, en aucun cas, être supérieur à vingt ans à compter de la date du vol, de la perte, du jet par-dessus bord ou de l'abandon. Il est en outre prolongé dans les cas et aux conditions fixés à l'article 8 (d) de la Convention de Paris. Les demandes complémentaires présentées après l'expiration de ce délai, dans les conditions prévues à l'article 8 (e) de la Convention de Paris, sont également prises en considération.

Article 7 Lorsqu'une Partie Contractante fait usage de la faculté prévue
à l'article 8 (c) de la Convention de Paris, le délai qu'elle fixe est un délai de prescription de trois ans à compter soit du moment où le lésé a eu connaissance du dommage et de l'exploitant responsable, soit du moment où il a dû raisonnablement en avoir connaissance.

246

Responsabilité civile dans le domaine de l'énergie nucléaire Article 8 Toute personne bénéficiant des dispositions de la présente Convention a droit à la réparation intégrale du dommage subi, conformément aux dispositions prévues par le droit national. Toutefois, chaque Partie Contractante peut fixer des critères de répartition équitables pour le cas où le montant des dommages dépasse ou risque de dépasser : (i) 120 millions d'unités de compte; ou (ii) la somme plus élevée qui résulterait d'un cumul de responsabilités en vertu de l'article 5 (d) de la Convention de Paris, sans qu'il en résulte, quelle que soit l'origine des fonds et sous réserve des dispositions de l'article 2, de discrimination en fonction de la nationalité, du domicile ou de la résidence de la personne ayant subi le dommage.

Article 9 (a) Le régime d'allocation des fonds publics visés à l'article 3 (b) (ii), (iii) et (f) est celui de la Partie Contractante dont les tribunaux sont compétents.

(b) Chaque Partie Contractante prend les dispositions nécessaires pour que les personnes ayant subi un dommage puissent faire valoir leurs droits à réparation sans avoir à entamer des procédures différentes selon l'origine des fonds destinés à cette réparation.

(c) Aucune Partie Contractante n'est tenue d'allouer les fonds publics visés à l'article 3 (b) (ii) et (iii) tant que des fonds visés à l'article 3 (b) (i) restent disponibles.

Article 10 (a) La Partie Contractante dont les tribunaux sont compétents est tenue d'informer les autres Parties Contractantes de la survenance et des circonstances d'un accident nucléaire dès qu'il apparaît que les dommages causés par cet accident dépassent ou risquent de dépasser le montant de 70 millions d'unités de compte. Les Parties Contractantes prennent sans délai toutes dispositions nécessaires pour régler les modalités de leurs rapports à ce sujet.

(b) Seule la Partie Contractante dont les tribunaux sont compétents peut demander aux autres Parties Contractantes l'allocation des fonds publics visés à l'article 3 (b) (iii) et (f) et a compétence pour attribuer ces fonds.

(c) Cette Partie Contractante exerce, le cas échéant, les recours visés à l'arficle 5 pour le compte des autres Parties Contractantes qui auraient alloué des tonds publics au titre de l'article 3 (b) (iii) et (f).

(d) Les transactions
intervenues conformément aux conditions fixées par la législation nationale au sujet de la réparation des dommages effectués au moyen des fonds publics visés à l'article 3 (b) (ii) et (iii) seront reconnues par les autres Parties Contractantes, et les jugements prononcés par les tribunaux

247

Responsabilité civile dans le domaine de l'énergie nucléaire compétents au sujet d'une telle réparation deviendront exécutoires sur le territoire des autres Parties Contractantes conformément aux dispositions de l'article 13 (d) de la Convention de Paris.

Article 11 (a) Si les tribunaux compétents relèvent d'une Partie Contractante autre que celle sur le territoire de laquelle est située l'installation nucléaire de l'exploitant responsable, les fonds publics visés à l'article 3 (b) (ii) et (f) sont alloués par la première de ces Parties. La Partie Contractante sur le territoire de laquelle est située l'installation nucléaire de l'exploitant responsable rembourse à l'autre les sommes versées. Ces deux Parties Contractantes déterminent d'un commun accord les modalités du remboursement, (b) Dans l'adoption de toutes dispositions législatives, réglementaires ou administratives postérieures au moment de l'accident nucléaire et relatives à la nature, à la forme et à l'étendue de la réparation, aux modalités d'allocation des fonds publics visés à l'article 3 (b) (ii) et, le cas échéant, aux critères de répartition de ces fonds, la Partie Contractante dont les tribunaux sont compétents consulte la Partie Contractante sur le territoire de laquelle est située l'installation nucléaire de l'exploitant responsable. En outre, elle prend toutes mesures nécessaires pour permettre à celle-ci d'intervenir dans les procès et de participer aux transactions concernant la réparation.

Article 12 (a) La clé de répartition selon laquelle les Parties Contractantes allouent les fonds publics visés à l'article 3 (b) (ai) est calculée : (i) à concurrence de 50 pour cent, sur la base du rapport existant entre, d'une part, le produit national brut aux prix courants de chaque Partie Contractante et, d'autre part, le total des produits nationaux bruts aux prix courants de toutes les Parties Contractantes, tels qu'ils résultent de la statistique officielle publiée par l'Organisation de Coopération et de Développement Economiques pour l'année précédant celle au cours de laquelle l'accident nucléaire sera survenu; (ii) à concurrence de 50 pour cent, sur la base du rapport existant entre, d'une part, la puissance thermique des réacteurs situés sur le territoire de chaque Partie Contractante et, d'autre part, la puissance thermique
totale des réacteurs situés sur l'ensemble des territoires des Parties Contractantes.

Ce calcul sera effectué sur la base de la puissance thermique dés réacteurs figurant, à la date de l'accident, sur la liste prévue à l'article 2 (a) (i).

Cependant, un réacteur n'est pris en considération pour ce calcul qu'à partir de la date à laquelle il a atteint, pour la première fois, la criticalité.

(b) Au sens de la présente Convention, «puissance thermique» signifie: (i) avant la délivrance de l'autorisation d'exploitation définitive, la puissance thermique prévue; 248

Responsabilité civile dans le domaine de l'énergie nucléaire (ii) après cette délivrance, la puissance thermique autorisée par les autorités nationales compétentes.

Article 13 (a) Chaque Partie Contractante doit faire figurer sur la liste prévue à l'article 2 (a) (i) toutes les installations nucléaires à usage pacifique situées sur son territoire, répondant aux définitions de l'article premier de la Convention de Paris.

(b) A cet effet, chaque Signataire ou Gouvernement adhérent à la présente Convention communique, au moment du dépôt de son instrument de ratification ou d'adhésion, le relevé complet de ces installations, au Gouvernement belge.

(c) Ce relevé contient : (i) pour toutes les installations non encore achevées, l'indication de la date prévue d'existence du risque d'accident nucléaire; (ii) et de plus, pour les réacteurs, l'indication de la date à laquelle il est prévu qu'ils atteindront pour la première fois la criticalité et l'indication de leur puissance thermique.

(d) Chaque Partie Contractante communique, en outre, au Gouvernement belge, la date exacte de l'existence du risque d'accident nucléaire et, pour les réacteurs, celle à laquelle ils ont atteint pour la première fois la criticalité.

(e) Chaque Partie Contractante communique au Gouvernement belge toute modification à apporter à la liste. Au cas où la modification comporte l'adjonction d'une installation nucléaire, la communication doit être faite au moins trois mois avant la date prévue d'existence du risque d'accident nucléaire.

(f) Si une Partie Contractante est d'avis que le relevé ou une modification à apporter à la liste communiquée par une autre Partie Contractante n'est pas conformé aux dispositions de l'article 2 (a) (i) et aux dispositions du présent article, elle ne peut soulever d'objections à cet égard qu'en les adressant au Gouvernement belge dans un délai de trois mois à compter de la date à laquelle elle a reçu une notification conformément au paragraphe (h) cidessous.

(g) Si une Partie Contractante est d'avis qu'une des communications requises conformément au présent article n'a pas été faite dans les délais prescrits, elle ne peut soulever d'objections qu'en les adressant au Gouvernement belge dans un délai de trois mois à compter du moment où elle a eu connaissance des faits qui auraient dû, selon elle,
être communiqués.

(h) Le Gouvernement belge notifiera dès que possible à chaque Partie Contractante les communications et objections qu'il aura reçues conformément au présent article.

249

Responsabilité civile dans le domaine de l'énergie nucléaire (i) L'ensemble des relevés et modifications visés aux paragraphes (b), (c), (d) et (e) ci-dessus constituée la liste prévue à l'article 2 (a) (i), étant précisé que les objections présentées aux termes des paragraphes (f) et (g) ci-dessus ont effet rétroactif au jour où elles ont été formulées, si elles sont admises.

(j) Le Gouvernement belge adresse aux Parties Contractantes, sur leur demande, un état à jour comprenant les installations nucléaires tombant sous la présente Convention et les indications fournies a leur sujet en vertu du présent article.

Article 14

(a) Dans la mesure où la présente Convention n'en dispose pas autrement, chaque Partie Contractante peut exercer les compétences qui lui sont dévolues par la Convention de Paris, et toutes les dispositions ainsi prises sont opposables aux autres Parties Contractantes pour l'allocation des fonds publics visés à l'article 3 (b) (ii) et (iii).

(b) Toutefois les dispositions prises par une Partie Contractante conformément aux articles 2, 7 (c) et 9 de la Convention de Paris ne sont opposables à une autre Partie Contractante pour l'allocation des fonds publics visés à l'article 3 (b) (ii) et (iii) que si elles ont reçu son consentement.

(c) La présente Convention ne s'oppose pas à ce qu'une Partie Contractante prenne des dispositions en dehors du cadre de la Convention de Paris et de la présente Convention, sous réserve toutefois que ces dispositions n'entraînent pas d'obligations supplémentaires pour les autres Parties Contractantes dans la mesure où des fonds publics de ces Parties sont en cause.

Article 15 (a) Toute Partie Contractante peut conclure avec un Etat non contractant à la présente Convention un accord portant sur la réparation, au moyen de fonds publics, de dommages causés par un accident nucléaire.

(b) Dans la mesure où les conditions de réparation résultant d'un tel accord ne sont pas plus favorables que celles résultant des dispositions prises pour l'application de la Convention de Paris et de la présente Convention par la Partie Contractante considérée, le montant des dommages indemnisables en vertu d'un tel accord et causés par un accident nucléaire couvert par la présente Convention peut être pris en considération, en vue de l'application de l'article 8, deuxième phrase pour le calcul du montant total des dommages causés par cet accident.

(c) En aucun cas, les dispositions des paragraphes (a) et (b) ci-dessus ne peuvent affecter les obligations incombant eu vertu de l'article 3 (b) (ii) et (iii) aux Parties Contractantes qui n'auraient pas donné leur consentement à un tel accord.

250

Responsabilité civile dans le domaine de l'énergie nucléaire (d) Toute Partie Contractante qui se propose de conclure un tel accord doit faire part de son intention aux autres Parties Contractantes. Les accords conclus doivent être notifiés au Gouvernement belge.

Article 16

(a) Les Parties Contractantes se consulteront à l'égard de tous les problèmes d'intérêt commun posés par l'application de la présente Convention et de la Convention de Paris, notamment des articles 20 et 22 (c) de cette dernière.

(b) Elles se consulteront sur l'opportunité de réviser la présente Convention au terme de la période de cinq ans qui suivra la date de son entrée en vigueur, et à tout autre moment à la demande d'une Partie Contractante.

Article 17 Tout différend entre deux ou plusieurs Parties Contractantes relatif à l'interprétation ou à l'application de la présente Convention sera soumis, à la demande d'une Partie Contractante intéressée, au Tribunal Européen pour l'Energie Nucléaire créé par la Convention en date du 20 décembre 1957 sur l'Etablissement d'un Contrôle de Sécurité dans le domaine de l'Energie Nucléaire.

Article 18 (a) Des réserves portant sur une ou plusieurs dispositions de la présente Convention peuvent être formulées à tout moment avant la ratification de la présente Convention, si leurs termes ont été expressément acceptés par tous les Signataires, ou lors, soit de l'adhésion, soit de l'utilisation des dispositions des articles 21 et 24, si leur termes ont été expressément acceptés par tous les Signataires et Gouvernements adhérents à la présente Convention.

(b) Toutefois, l'acceptation d'un Signataire n'est pas requise si celui-ci n'a pas lui-même ratifié la présente Convention dans un délai de douze mois à partir de la date où la notification de la réserve lui a été communiquée par le Gouvernement belge conformément à l'article 25.

(c) Toute réserve acceptée conformément aux dispositions du paragraphe (a) ci-dessus peut être retirée à tout moment par notification adressée au Gouvernement belge, Article 19 Un Etat ne peut devenir ou rester Partie Contractante à la présente Convention que s'il est Partie Contractante à la Convention de Paris.

Article 20 (a) L'Annexe à la présente Convention fait partie intégrante de cette dernière.

251

Responsabilité civile dans le domaine de l'énergie nucléaire (b) La présente Convention sera ratifiée. Les instruments de ratification seront déposés auprès du Gouvernement belge.

(c) La présente Convention entrera en vigueur trois mois après le dépôt du sixième instrument de ratification.

(d) Pour chaque Signataire ratifiant la présente Convention après le sixième dépôt, elle prendra effet trois mois après la date du dépôt de son instrument de ratification.

Article 21

Les modifications à la présente Convention sont adoptées du commun accord des Parties Contractantes. Elle entrent en vigueur à la date à laquelle toutes les Parties Contractantes les auront ratifiées ou confirmées.

Article 22

(a) Après l'entrée en vigueur de la présente Convention, toute Partie Contractante à la Convention de Paris qui n'a pas signé la présente Convention peut demander à y adhérer par notification adressée au Gouvernement belge.

(b) L'adhésion requiert l'accord unanime des Parties Contractantes.

(c) A la suite de cet accord, la Partie Contractante à la Convention de Paris ayant demandé l'adhésion dépose son instrument d'adhésion auprès du Gouvernement belge.

(d) L'adhésion prendra effet trois mois après la date du dépôt de l'instrument d'adhésion.

Article 23 (a) La présente Convention reste en vigueur jusqu'à l'expiration de la Convention de Paris.

(b) Toute Partie Contractante pourra mettre fin, en ce qui la concerne, à l'application de la présente Convention au terme du délai de dix ans fixé à l'article 22 (a) de la Convention de Paris, en donnant un préavis d'un an à cet effet notifié au Gouvernement belge. Dans le délai de six mois suivant la notification de ce préavis, chaque Partie Contractante pourra par une notification au Gouvernement belge mettre fin à la présente Convention, en ce qui la concerne, à la date où elle cessera d'avoir effet à l'égard de la Partie Contractante qui aura effectué la première notification.

(c) L'expiration de la présente Convention ou le retrait d'une des Parties Contractantes ne met pas fin aux obligations que chaque Partie Contractante assume en vertu de la présente Convention pour la réparation des dommages causés par un accident nucléaire survenant avant la date de cette expiration ou de ce retrait.

(d) Les Parties Contractantes se consulteront en temps opportun sur les mesures à prendre après l'expiration de la présente Convention ou le retrait d'une ou de plusieurs Parties Contractantes, afin que soient réparés, dans une 252

Responsabilité civile dans le domaine de l'énergie nucléaire mesure comparable à celle prévue par la présente Convention, les dommages causés par des accidents survenus après la date de cette expiration ou de ce retrait, et dont la responsabilité incombe à l'exploitant d'une installation nucléaire qui était en fonctionnement avant cette date sur les territoires des Parties Contractantes.

Article 24 (a) La présente Convention s'applique aux territoires métropolitains des Parties Contractantes.

(b) Toute Partie Contractante qui désire que la présente Convention soit rendue applicable à un ou plusieurs territoires pour lesquels, conformément à l'article 23 de la Convention de Paris, elle a indiqué que cette dernière Convention s'applique, adresse une demande au Gouvernement belge.

(c) L'application de la présente Convention à ces territoires requiert l'accord unanime des Parties Contractantes.

(d) A la suite de cet accord, la Partie Contractante intéressée adresse au Gouvernement belge une déclaration qui prend effet à compter du jour de sa réception.

(e) Une telle déclaration peut, en ce qui concerne tout territoire qui y est désigné, être retirée par la Partie Contractante qui l'a faite, en donnant un préavis d'un an à cet effet notifié au Gouvernement belge.

(f) Si la Convention de Paris cesse d'être applicable à un de ces territoires, la présente Convention cesse également de lui être applicable.

Article 25 Le Gouvernement belge donne communication à tous les Signataires et Gouvernements ayant adbéré à la Convention, de la réception des instruments de ratification, d'adhésion, de retrait et de toutes autres notifications qu'il aurait reçues. Il leur notifie également la date d'entrée en vigueur de la présente Convention, le texte des modifications adoptées et la date d'entrée en vigueur de ces modifications, ainsi que les réserves faites conformément à l'article 18.

EÌI foi de quoi les Plénipotentiaires soussignés, dûment habilités, ont apposé leurs signatures au bas de la présente Convention.

Fait à Bruxelles, le 31 janvier 1963, en français, en allemand, en anglais, en espagnol, en italien et en néerlandais, les six textes faisant également foi, en un seul exemplaire qui sera déposé auprès du Gouvernement belge qui en communiquera une copie certifiée conforme à tous les autres Signataires et aux Gouvernements ayant adhéré à la Convention.

(Suivent les signatures)

25764

253

Responsabilité civile dans le domaine de l'énergie nucléaire Annexe à la Convention complémentaire du 31 janvier 1963 à la Convention de Paris du 29 juillet 1960 sur la responsabilité civile dans le domaine de l'énergie nucléaire Les Gouvernements des Parties Contractantes déclarent que la réparation des dommages causés par un accident nucléaire qui n'est pas couvert par la Convention complémentaire du seul fait que l'installation nucléaire concernée, en raison de son utilisation, n'est pas incluse dans la liste visée à l'article 2 de la Convention complémentaire, (y compris le cas où cette installation, non incluse dans la liste, est considérée par un ou plusieurs, mais non par tous les Gouvernements comme non couverte par la Convention de Paris) : - est effectuée sans aucune discrimination entre les ressortissants des Parties Contractantes à la Convention complémentaire; - n'est pas limitée par un plafond qui serait inférieur à 120 millions d'unités de compte.

En outre, ces Gouvernements s'efforceront, si elles ne le sont déjà, de rendre les règles de dédommagement des victimes de tels accidents aussi voisines que possible de celle prévues pour les accidents nucléaires survenus en relation avec les installations nucléaires couvertes par la Convention complémentaire.

25764

254

Schweizerisches Bundesarchiv, Digitale Amtsdruckschriften Archives fédérales suisses, Publications officielles numérisées Archivio federale svizzero, Pubblicazioni ufficiali digitali

Message concernant une loi sur la responsabilité civile en matière nucléaire (LRCN) du 10 décembre 1979

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1980

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29.01.1980

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