18.401 Initiative parlementaire Renouvellement du Fonds suisse pour le paysage 2021 à 2031 Projet et rapport de la Commission de l'environnement, de l'aménagement du territoire et de l'énergie du Conseil des Etats du 13 août 2018

Madame la Présidente, Mesdames et Messieurs, Par le présent rapport, nous vous soumettons le projet de loi fédérale portant modification de l'arrêté fédéral accordant une aide financière en faveur de la sauvegarde et de la gestion de paysages ruraux traditionnels ainsi que le projet d'arrêté fédéral sur le financement du Fonds pour la sauvegarde et de la gestion de paysages ruraux traditionnels, que nous transmettons simultanément au Conseil fédéral pour avis.

La commission propose d'adopter les projets d'actes ci-joints.

13 août 2018

Pour la commission: Le président, Roland Eberle

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Condensé Le Fonds suisse pour le paysage (FSP) a été créé en 1991 à l'occasion du 700e anniversaire de la Confédération pour une durée de 10 ans. Depuis, il a été prolongé de 10 ans à deux reprises. En soutenant des projets locaux et régionaux visant à la sauvegarde et à la gestion de paysages ruraux traditionnels, le FSP offre une plus-value sur les plans culturel et identitaire, mais aussi économique et écologique.

Conçu comme un instrument indépendant de l'administration fédérale, le FSP promeut des actions locales et concrètes au moyen d'aides initiales et de mesures incitatives. Les projets sont cofinancés par les cantons, les communes et des tiers afin que les aides financières accordées par le FSP aient un réel effet multiplicateur.

Ce projet prévoit que le FSP soit prolongé pour la période de 2021 à 2031 et que la Confédération lui alloue 50 millions de francs.

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Rapport 1

Genèse du projet

La Commission de l'environnement, de l'aménagement du territoire et de l'énergie du Conseil des Etats (CEATE-E) a décidé le 12 janvier 2018 par 9 voix contre 0 et 1 abstention d'élaborer une initiative parlementaire portant sur le renouvellement du Fonds suisse pour le paysage 2021­2031 (18.401). Ce texte prévoit de prolonger de dix ans, soit jusqu'au 31 juillet 2031, l'arrêté fédéral accordant une aide financière en faveur de la sauvegarde et de la gestion de paysages ruraux traditionnels (RS 451.51) et d'allouer une contribution fédérale supplémentaire de 50 millions de francs au Fonds suisse pour le paysage (FSP) pour cette nouvelle période. La commission homologue du Conseil national (CEATE-N) s'est ralliée à cette décision le 10 avril 2018 par 18 voix contre 7.

Organe indépendant de l'administration fédérale créé à l'occasion du 700e anniversaire de la Confédération en 1991 pour une période de 10 ans et prolongé de deux fois 10 ans, le FSP a soutenu à ce jour environ 2500 projets locaux et régionaux dédiés à la sauvegarde et à l'entretien de paysages ruraux traditionnels. Ces projets sont cofinancés par les cantons, les communes ainsi que des tiers. Constatant que le FSP fournit un travail de qualité, efficace et sans excès bureaucratique et que les enjeux sont non seulement culturels et émotionnels, mais aussi économiques et environnementaux, la CEATE-E propose de prolonger le financement du fonds d'une nouvelle période de dix ans. Ce faisant, la commission se prononce contre une compensation des montants dans les postes budgétaires apparentés, car ce serait contraire à sa volonté claire de renforcer, grâce au FSP, le maintien et la protection de la nature et du paysage. C'est à l'unanimité que la commission a approuvé le 13 août 2018 ses projets visant à prolonger le FSP et à en assurer le financement.

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Fonds suisse pour le paysage

2.1

Rôle dans la politique du paysage

En Suisse, la diversité des rapports culturels avec la nature a donné naissance, au fil des siècles, à un patrimoine naturel et culturel exceptionnel, constitué d'une grande diversité de paysages uniques et typiques associés à des espèces animales et végétales spécifiques, des monuments historiques et des modes d'exploitation traditionnels. La Suisse tire profit de la beauté de ses paysages, qui augmentent l'attrait du cadre de vie et la qualité de vie, forgent la diversité culturelle et l'identité de sa population et présentent un atout économique et touristique.

A l'heure de la mondialisation, les prestations du paysage sont de plus en plus demandées. Or le paysage subit des pressions. Les qualités paysagères se détériorent sous l'effet de la croissance démographique, de la consommation accrue de ressources, ainsi que des constructions, des installations et des utilisations du sol qui en découlent. Afin que le paysage puisse, malgré tout, continuer de fournir ses nom-

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breuses prestations en faveur du bien-être et de la prospérité de la société, il s'agit d'accompagner son évolution en tenant compte de ses qualités naturelles et culturelles. Pour ce faire, les acteurs concernés à tous les échelons de l'Etat sont tenus de mettre en oeuvre les instruments de la politique du paysage de sorte que celui-ci se développe tout en conservant son caractère et que ses prestations soient assurées.

Dans ce contexte, le FSP joue un rôle de premier ordre. Conçu comme un instrument indépendant de l'administration fédérale, il promeut des actions locales et concrètes au moyen d'aides initiales et de mesures incitatives. Ses investissements dans des projets de valorisation amènent une grande plus-value. En effet, ceux-ci permettent d'accroître la beauté, la particularité et la diversité des paysages suisses, dont la qualité accrue forge l'identité régionale, renforce le sentiment d'appartenance au lieu de résidence, favorise la détente et profite au tourisme. De nombreux projets ont en outre valeur de modèle et stimulent la réalisation d'autres idées.

Etant donné que les porteurs de projet de valorisation ainsi que les communes, les cantons et des tiers contribuent au financement, les aides financières du FSP ont un effet multiplicateur. Elles font boule de neige et stimulent des investissements qui, de manière coordonnée et en toute cohérence, permettent d'accroître la qualité du paysage.

2.2

Missions et activités

Le FSP soutient des projets centrés sur la conservation de la diversité biologique, culturelle et structurelle du paysage, qui prévoient la mise en oeuvre des mesures suivantes: ­

une gestion et un entretien adéquats des paysages ruraux traditionnels et proches de l'état naturel;

­

la restauration de milieux naturels;

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le renouvellement par des méthodes douces et le rétablissement d'éléments caractéristiques du paysage tels que des murs de pierres sèches, des toits en tavillons, etc.;

­

la revitalisation de vergers, de haies, d'allées et de lisières de forêts;

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la renaturation de cours d'eau canalisés ou mis sous terre;

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la diffusion de l'information sur la nécessité de sauvegarder et d'entretenir les paysages ruraux traditionnels.

En vertu de la loi, le FSP a une mission d'information et de conseil, mais aussi de financement de projets liés à la sauvegarde des paysages. Ce fonds est apolitique et ne dispose pas du droit de recours réservé aux associations.

Depuis sa création il y a 27 ans, le FSP a évalué 3911 demandes et soutenu 2435 projets (état au 31 décembre 2017). Les cantons dans lesquels le plus de projets ayant obtenu un financement sont le Tessin, les Grisons et le Valais, ce qui montre bien l'importance que revêt ce fonds pour la préservation des richesses naturelles des régions alpines. Toutefois, proportionnellement à leur superficie, les cantons 7054

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situés dans les régions du Jura et du Plateau ont également beaucoup bénéficié des contributions du FSP (en particulier les cantons de Saint-Gall, du Jura, de Thurgovie, de Bâle-Campagne, de Schaffhouse et de Genève).

Le FSP poursuit une politique qui vise à inciter les organisations locales et régionales à prendre elles-mêmes des initiatives. De plus, les projets sont générateurs d'emplois et contribuent très directement à la création de valeur dans des régions économiquement défavorisées. L'artisanat local et traditionnel, la construction et l'horticulture ainsi que l'économie forestière et l'agriculture en sont bénéficiaires.

Le FSP octroie uniquement des contributions à des projets suisses qui déploient des mesures sur le territoire national.

2.3

Effets de synergie

Les activités du FSP dégagent de nombreuses synergies dans les domaines de l'agriculture, du tourisme, de l'économie régionale et de la biodiversité. Conformément aux bases légales sur lesquelles il repose, le fonds a pour but de soutenir financièrement des projets de sauvegarde et de valorisation des paysages ruraux traditionnels. Les projets bénéficiaires prévoient tous la mise en oeuvre de mesures volontaires; très souvent, les porteurs des projets et, de ce fait, les auteurs de demandes de soutien, sont les propriétaires fonciers ou les exploitants eux-mêmes. Les projets déposés se situent en majorité sur des terres agricoles (surface agricole utile) et en région d'estivage. Il en résulte qu'une très grande part des aides financières octroyées par le FSP profitent directement ou indirectement à l'agriculture. Le fonds complète ainsi les instruments de droit agraire en finançant des investissements visant à valoriser le paysage tels que la construction de murs en pierres sèches ou la plantation de haies. L'entretien ultérieur des paysages valorisés est souvent indemnisé dans le cadre des paiements directs versés dans l'agriculture, ce qui assure aux mesures de valorisation un effet durable. Le FSP garantit que les aides financières qu'il octroie ne donnent pas lieu à un double subventionnement.

Les paysages ruraux traditionnels et nombre de leurs éléments typiques abritent une grande diversité de milieux naturels, de plantes et d'animaux. De très nombreuses mesures soutenues par le FSP bénéficient ainsi à la biodiversité. L'évaluation des projets par le fonds vise également à éviter le double subventionnement avec la mise en oeuvre de la protection de la nature et des mesures du plan d'action Biodiversité.

Enfin, l'attrait touristique de la Suisse repose en grande partie sur la diversité de ses paysages et la qualité du bâti. En conséquence, les investissements du FSP dans des projets de valorisation du paysage bénéficient aussi au tourisme, notamment dans les régions de montagne et les espaces ruraux.

2.4

Participation financière des cantons et de tiers

Conformément aux bases légales sur lesquelles il repose, le FSP peut être également alimenté par des tiers. En plus des 150 millions de francs dont la Confédération l'a doté pour la période de 1991 à 2021, il a reçu 8 millions de francs de tiers, dont plus 7055

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de la moitié de fondations et environ 10 % de cantons (au total environ 750 000 francs).

Cependant, ce sont les contributions directes des cantons et des tiers qui pèsent le plus dans la balance. Le contrôle des résultats du FSP pour la période de 2001 à 2010 a montré que 68,2 % des projets analysés ont également reçu des contributions financières des cantons1. Une évaluation des projets auxquels le FSP a octroyé une contribution en 2017 révèle que l'engagement financier des cantons dépasse celui du fonds. Si celui-ci a accordé 4,3 millions de francs à 105 projets en 2017, les cantons leur avaient déjà garanti 6,6 millions de francs (sans compter les autres contributions cantonales prévues au moment où les décisions du fonds sont tombées).

De plus, durant la période analysée, les responsables de près de la moitié des projets ont fourni des contributions financières en plus de prestations propres. A cela s'ajoute la participation financière de tiers tels des communes (pour 58 % des projets), de fondations, d'organisations de protection de l'environnement, d'associations de protection de la nature, de bourgeoisies, de particuliers et d'entreprises. Outre le FSP, entre 3 et 4 bailleurs de fonds en moyenne ont contribué au financement des projets. On peut donc en déduire que l'effet multiplicateur du fonds se situe entre 3 et 3,5. Les contributions du FSP font donc boule de neige et stimulent de nombreux investissements dans les régions concernées.

La prorogation du fonds bénéficie d'ailleurs du soutien presque unanime des cantons. La consultation préalable menée durant le premier semestre 2015 sur le plan d'action relatif à la mise en oeuvre de la Stratégie Biodiversité Suisse a révélé que 20 des 21 cantons participant se sont prononcés en faveur d'une prolongation illimitée des bases légales du FSP. La proposition visant à inclure la conservation de la biodiversité dans les activités du fonds et à doubler les moyens à sa disposition a été soutenue par 17 cantons.

2.5

Organisation

Le FSP est une institution fédérale indépendante de l'administration. La Commission pour le Fonds suisse pour le paysage, composée de 9 à 13 membres nommés par le Conseil fédéral, décide de l'octroi des aides financières. Elle est placée sous la surveillance du Conseil fédéral, et ses décisions peuvent faire l'objet d'un recours devant le Tribunal administratif fédéral.

La commission actuelle compte 13 membres et est structurée en plusieurs comités spécialisés chargés respectivement du traitement des demandes de financement, de l'information et des relations publiques, de l'administration et des finances. Chacun des grands projets est suivi par un membre. Outre le temps nécessaire à l'examen et à la sélection des dossiers, les membres de la commission consacrent en moyenne environ 15 jours par an au suivi des projets, ce qui permet d'assurer leur bon déroulement et de fournir un conseil ciblé aux responsables de projets.

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Rapport final sur le contrôle des résultats du FSP, 14 juin 2018

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La commission soumet l'évaluation préalable des demandes d'aide financière à son secrétariat. Ce dernier contrôle l'état d'avancement du traitement des demandes et de la réalisation des projets ayant reçu des contributions. Il est actuellement doté de 4,65 postes.

La part de la charge administrative du FSP s'est élevée en moyenne durant les dernières années à 12,3 % du compte de résultats. Elle se situe ainsi nettement en dessous de la moyenne de 20 % observée ces dernières années pour les organisations certifiées par la fondation ZEWO. Si l'on exclut les charges de financement, étant donné que le FSP est en grande partie financé par la Confédération, la part des autres charges administratives reste, avec 11 %, encore nettement inférieure à celle des organisations certifiées par la fondation ZEWO (13,4 %). Or une grande partie de ces charges comprenait en réalité les opérations de sélection, de suivi et de contrôle des projets, soit des charges d'accompagnement de projet. En comparaison avec d'autres organisations d'utilité publique, le FSP peut donc être considéré comme particulièrement efficace.

2.6

Renonciation à une procédure de consultation

Si le présent projet a une portée politique, financière et écologique au sens de l'art. 3, al. 1, let. d, de la loi sur la consultation (LCo, RS 172.061), il a cependant été décidé de renoncer à lancer une procédure de consultation, conformément à l'art. 3a, al. 1, let. b, LCo. Une telle procédure n'apporterait en effet aucune information nouvelle permettant de déterminer si le projet est matériellement correct, exécutable et susceptible d'être bien accepté (art. 2, al. 2, LCo), les cantons s'étant déjà prononcés en 2015 en faveur du maintien du Fonds suisse pour le paysage (FSP) dans le cadre de la consultation préalable concernant le projet de plan d'action relatif à la «Stratégie Biodiversité Suisse». Enfin, les milieux politiques ont, eux aussi, affiché leur soutien au FSP lors des débats sur l'initiative parlementaire 18.401.

3

Grandes lignes du projet

3.1

Prorogation du fonds

L'arrêté fédéral de 1991 doit pour la troisième fois (la deuxième fois en 2010) être prorogé de 10 ans, soit jusqu'au 31 juillet 2031. Pour le reste, l'arrêté n'est pas modifié.

3.2

Financement du fonds

Le fonds sera à nouveau doté, pour la période de 2021 à 2031, d'un montant de 50 millions de francs pour financer ses activités.

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Explication de certaines dispositions de l'acte modificateur

Art. 11, al. 5 La validité du texte est prorogée une nouvelle fois de 10 ans, soit jusqu'en 2031.

La date de l'entrée en vigueur est fixée de manière à permettre une transition sans interruption (ch. II, al. 2).

5

Conséquences

5.1

Conséquences personnelles et financières

La Confédération versera 50 millions de francs au Fonds pour les années de 2021 à 2031. L'ensemble des investissements induits est estimé à environ 175 millions de francs.

Les charges administratives (commission, secrétariat, expertise, conseil et suivi, vérification et contrôle des projets, comptabilité, etc.) restent inchangées.

5.2

Applicabilité

Le fonds et ses contacts directs avec les requérants et les cantons ont prouvé l'applicabilité, la praticabilité et l'efficacité du système pendant près de 30 ans. Ce mode de fonctionnement, qui a fait ses preuves, sera maintenu.

5.3

Autres conséquences

Les aides financières pour des projets concrets sont une contribution positive à l'identité régionale et au renforcement des régions économiques situées en périphérie. Elles contribuent activement à la création de valeur régionale et soutiennent la vision du Conseil fédéral qui promeut le développement durable des espaces ruraux et des régions de montagne de manière à garantir en particulier leurs qualités naturelles et paysagères.

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Rapport avec le droit européen

Si le projet d'acte législatif n'a aucun lien particulier avec le droit de la Communauté européenne, il contribue néanmoins à la mise en oeuvre de la Convention européenne du paysage ratifiée par la Suisse2 (art. 6, al. E). Cet accord souligne que le paysage concourt à l'élaboration des cultures locales et qu'il représente une composante fondamentale du patrimoine culturel et naturel, contribuant à l'épanouissement des êtres humains et à la consolidation de l'identité.

7

Bases légales

7.1

Constitutionnalité et légalité

Conformément à l'art. 78, al. 3, Cst.3, la Confédération peut soutenir les efforts déployés afin de protéger la nature et le patrimoine. La sauvegarde et la gestion des paysages ruraux traditionnels font partie des efforts méritant soutien aux termes de cet article constitutionnel.

7.2

Délégation de compétences législatives

Le présent acte législatif ne contient aucune norme de délégation pour édicter une ordonnance.

7.3

Forme de l'acte à adopter

Conformément à l'art. 22, al. 1, LParl, l'Assemblée fédérale édicte sous la forme d'une loi fédérale toutes les dispositions importantes qui fixent des règles de droit.

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RS 0.451.3 RS 101

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