Annexe

Evaluation de l'Inventaire fédéral des paysages, sites et monuments naturels d'importance nationale (IFP) Rapport de l'Organe parlementaire de contrôle de l'administration à l'attention de la Commission de gestion du Conseil national du 14 mai 2003

2003-2187

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L'essentiel en bref L'inventaire fédéral des paysages, sites et monuments naturels d'importance nationale (IFP), entré en vigueur en 1977, est un élément essentiel de la protection du paysage suisse. L'objectif général de l'IFP consiste à conserver intacts ou en tous cas à ménager le plus possible les 162 objets qui y sont inscrits. L'IFP ne prévoit pas d'interdiction absolue de toute intervention. Il permet un développement respectant les buts de protection spécifiques à chaque objet.

Contrôle des effets Le contrôle des effets (chapitre 1) montre que l'objectif de protection générale de l'IFP formulé à l'art. 6 de la loi fédérale sur la protection de la nature et du paysage (LPN) n'a jusqu'ici pas été atteint. A noter toutefois, que le bilan des effets de l'IFP varie selon l'objet et le type d'intervention considéré. Dans l'ensemble entre 1979/85 et 1992/97, la croissance relative des surfaces d'habitation et d'infrastructure est pratiquement égale à l'intérieur et à l'extérieur de l'IFP. La croissance des surfaces d'habitation et d'infrastructure a été aussi constatée sur certains des objets dont les structures traditionnelles d'habitation appartiennent explicitement aux éléments centraux à protéger.

Les études réalisées sur 40 objets de l'IFP par la société Hintermann & Weber montrent qu'au cours des années 80, dans ¾ des cas examinés l'objectif de protection selon l'art. 6 LPN n'a pas été atteint. Les qualités du paysage déterminantes pour leur inscription à l'inventaire fédéral ont été en partie gravement détériorées.

Les auteurs ont aussi constaté une amélioration de la situation dans certains cas isolés. Une actualisation des études de cas a vérifié si les tendances problématiques constatées à l'époque ont continué dans les années 90. Il s'est avéré que pendant cette période, dans des cas l'objectif de protection selon l'art. 6 LPN n'a pas non plus été atteint. Pour certains types d'intervention la tendance à la détérioration s'est affaiblie et dans quelques cas des améliorations ont pu être constatées. Cependant, les modifications de paysage par des constructions en dehors d'agglomérations fermées et la diminution de la culture des arbres fruitiers de haute tige ont continué au même rythme que dans les années 80. Le développement du paysage dans des objets de l'IFP ayant subis une perte
de valeur, dans les années 90, ne diffère pas de manière significative de la tendance observée pour les paysages références hors IFP.

Analyse du programme IFP Du point de vue conceptuel, l'Organe parlementaire de contrôle de l'administration (OPCA) a constaté, au chap. 2, une très nette inadéquation entre l'ampleur des objectifs poursuivis et la faiblesse des moyens prévus pour les réaliser.

L'incohérence majeure du programme IFP réside dans le fait que, pour des raisons relatives au fédéralisme (art. 78 CST), la force contraignante de l'IFP sur les tâches des cantons et des communes est très incertaine, alors que c'est surtout à ce niveau que les altérations ont lieu. De plus, souvent les autorités locales perçoivent l'IFP

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comme mesure imposée par la Confédération de façon non coordonnée. L'acceptation de l'IFP par les cantons, les communes et les particuliers en souffre.

Un problème non moins essentiel se situe dans le fait que les objectifs de préservation des objets de l'IFP sont peu claires et obligent les autorités d'application à un travail de concrétisation coûteux et difficile.

La prise de décision relative à l'admissibilité d'une intervention se fait au cas par cas. Les intérêts en jeu étant le plus souvent multiples et contradictoires, cette tâche s'avère très exigeante. Malgré l'aide à la décision fournie par les autorités spécialisées (OFEFP, CFNP ou le service cantonal spécialisé), certaines autorités de décision sont parfois dépassées par la pesée des intérêts.

Des atteintes minimes à un objet IFP peuvent être recevables même si aucun intérêt national n'est en jeu; il suffit que l'intérêt de l'intervention soit supérieur à l'intérêt de la préservation. Le danger est alors que la somme des interventions minimes dans un objet de l'IFP constitue finalement une altération importante de ce dernier.

L'intégration de l'IFP dans les politiques sectorielles à incidence spatiale n'est pas optimale. En effet, dans la législation fédérale, une large majorité des politiques sectorielles à incidence spatiale ne fait guère référence à l'IFP. Des instruments incitatifs pour encourager une utilisation du paysage en conformité avec les buts de l'inventaire font défaut. En outre, la mise en application de l'IFP est fractionnée.

Les décisions qui ont un impact sur l'IFP sont prises, sans qu'aucune coordination institutionnalisée ne soit prévue, par différentes autorités défendant des intérêts divers et parfois contradictoires.

Connexion de l'IFP avec l'aménagement du territoire Considérés comme objets d'importance nationale, les objets de l'IFP entrent implicitement dans le champ d'application de la LAT et jouissent d'une certaine protection des instruments qui y sont prévus. Cette protection reste cependant inconsistante. Elle dépend largement de la volonté politique des cantons ou communes, qui disposent d'une marge de manoeuvre relativement grande lorsqu'il s'agit de tenir compte de l'IFP dans l'exécution de la LAT. Ainsi, le niveau de protection varie d'un canton à l'autre, voire d'une commune à l'autre. En plus,
les cantons et les communes ne sont pas tenus d'affecter la totalité de la surface des objets de l'IFP à une zone protégée, ils ont la possibilité de n'y attribuer que les éléments principaux.

Le degré de protection peut, de ce fait, être très différent au sein d'un même objet de l'IFP. Ces facteurs, auxquels s'ajoutent certaines incohérences internes à la LAT, empêchent que le potentiel de la législation sur l'aménagement du territoire soit complètement exploité afin de mettre en pratique les objectifs de protection de l'IFP.

La mise en oeuvre de l'IFP dans l'accomplissement de tâches de la Confédération Pour terminer le présent examen, l'OPCA a également analysé le bilan négatif de l'IFP sous l'angle de sa mise en oeuvre dans le cadre de l'accomplissement de tâches de la Confédération (chap. 3). Les procédures analysées se sont déroulées dans les années 2000 à 2002. L'analyse montre que 90 % des procédures ont été

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conduites intégralement et d'une manière formellement correcte. Les expertises de la Commission fédérale pour la protection de la nature et du paysage (CFNP) qui, dans les années 90 comportaient des lacunes importantes, respectent maintenant le mandat légal. Elles sont complètes et leurs conclusions et exigences sont claires et logiques. Par rapport aux années 90, l'influence des expertises de la CFNP et des avis des autorités cantonales spécialisées sur les décisions des autorités directrices a également augmentée. Dans la majorité des cas, la qualité des décisions des autorités de décision est satisfaisante. Toutefois, dans 40 % des cas examinés, les décisions ne semblent pas garantir la conservation intacte de la valeur du paysage des objets inscrits à l'IFP en cas de réalisation des projets autorisés. Le résultat n'est donc pas satisfaisant sur ce point.

Les améliorations intervenues dans la mise en oeuvre de l'IFP dans le cadre de tâches fédérales sont certes réjouissantes. Toutefois, elles ne remettent pas en question les résultats dans l'ensemble négatifs du contrôle des effets. Une grande partie des altérations d'objets de l'IFP interviennent, en effet, à un échelon décentralisé et se situent en dehors de la sphère de contrôle des autorités fédérales.

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Rapport 0

Introduction

0.1

Mandat

Le 24 juin 2002, la sous-commission DFI/DETEC de la Commission de gestion du Conseil national a chargé l'OPCA d'effectuer une évaluation de l'inventaire fédéral des paysages, sites et monuments naturels d'importance nationale (IFP). Les objectifs principaux de ce travail sont de tirer un bilan des résultats de l'IFP, d'examiner le concept sur lequel il se base et de donner une appréciation de sa mise en oeuvre en particulier au niveau fédéral.

0.2

L'inventaire fédéral des paysages, sites et monuments naturels d'importance nationale

L'IFP répertorie 162 objets d'importance nationale. De manière générale, les objets inscrits dans l'IFP sont des paysages peu modifiés ou exploités de manière proche de leur état naturel. Ils sont situés dans les Alpes et le Jura, mais aussi sur le Plateau suisse. Ainsi, par exemple la rive gauche du lac de Bienne, le paysage lacustre de la Haute Engadine et le massif de la Bernina, les chutes du Rhin, la région du glacier de l'Aletsch sont inscrits à l'IFP.

L'objectif de l'IFP consiste à maintenir intact ces paysages, sites et monuments naturels sans pour autant y interdire toute intervention humaine. L'IFP constitue le premier inventaire fédéral édicté par le Conseil fédéral sur la base de l'art. 5 de la loi fédérale du 1er juillet 1966 sur la protection de la nature et du paysage (LPN). Son entrée en vigueur s'est déroulée en 4 étapes. Le 21 novembre 1977 entre en vigueur l'ordonnance du 10 août 1977 concernant l'inventaire fédéral des paysages, sites et monuments naturels (OIFP). A cette époque, 65 objets sont placés sous la protection de l'IFP. En 1983, 55 objets ont suivit. En 1996, 33 objets supplémentaires ont été répertoriés et enfin en 1998, 9 objets ont été ajoutés à la liste. L'IFP est publié par le DFI sous forme de classeur. Chaque objet y est représenté sur une carte géographique. Les cantons et communes sur le territoire desquels l'objet est situé y sont également précisés. En outre, un bref texte décrit les éléments qui caractérisent l'objet et justifient son inscription1.

1

Voir carte représentant les objets de l'IFP à la page suivante et la liste des objets à l'annexe 1.

735

Les objets de l'IFP Illustration 1

736

Entre-temps, d'autres inventaires fédéraux ont été mis en place2 sur la base de la LPN, mais l'IFP reste le seul à inventorier des objets couvrant des surfaces étendues.

Les objets de l'IFP représentent une superficie d'environ 19 % du territoire suisse.

L'IFP constitue donc un programme essentiel de la politique de protection du paysage. Son rôle est d'autant plus important que les paysages suisses sont menacés.

Selon une étude récente de l'Office fédéral du développement territorial (ODT) et de l'Office fédéral de l'environnement, des forêts et du paysage (OFEFP)3, 3,75 mètres carrés de paysage sont transformés chaque seconde sur le territoire suisse. La moitié de ces transformations sont considérées comme des altérations irréversibles. Selon la même étude, un mètre carré de terrain est, chaque seconde, englouti rien que par l'urbanisation. Par ailleurs, l'Organisation de coopération et de développement économique (OCDE), dans son examen des performances environnementales de la Suisse paru 19984, a estimé que la Suisse n'a pas pu enrayer la dégradation des paysages, les moyens alloués à la protection de ses paysages n'étant pas à la hauteur des problèmes. C'est dans ce contexte que l'OPCA situe son évaluation de l'IFP.

0.3

Questions de recherche

Le présent rapport final de l'évaluation s'articulera autour de trois questions principales: 1.

Quels sont les résultats de l'IFP? Ses objectifs ont-ils été atteints?

2.

Le concept sur lequel se base l'IFP est-il cohérent?

3.

La mise en oeuvre de l'IFP est-elle effectuée de façon correcte et effective au niveau de la Confédération?

Sur demande de la sous-commission, l'OPCA abordera également l'aspect interpolitique de l'IFP. La question étant de savoir comment l'IFP est intégrée dans les politiques à incidence spatiale et en particulier dans l'aménagement du territoire.

2

3 4

Il s'agit notamment: ­ de l'Inventaire fédéral des sites construits à protéger en Suisse (ISOS) basé, comme l'IFP, sur l'art. 5 LPN; ­ des inventaires de protection des biotopes basés sur l'art. 18 LPN, à savoir de l'Inventaire fédéral des zones alluviales d'importance national et de l'Inventaire fédéral des site de reproduction des batraciens d'importance nationale, ­ des inventaires de protection des marais basés sur l'art. 23 LPN, à savoir de l'Inventaire fédéral des haut marais et marais de transition d'importance nationale, de l'Inventaire fédéral des bas marais d'importance nationale et de l'Inventaire fédéral des sites marécageux d'une beauté particulière et d'importance nationale.

Voir graphique «L'IFP dans la législation sur la protection de la nature et du paysage» annexe 2.

ODT et OFEFP: 2001.

OCDE: 1998.

737

0.4

Structure du rapport

Le chap. 1 dresse un bilan des résultats de l'IFP. A cette fin, l'OPCA procède, avec la collaboration de l'Office fédéral de la statistique (OFS), à l'interprétation de la statistique de la superficie. Figure également dans ce chapitre, des études de cas et la mise à jour du contrôle d'efficacité de l'IFP qui avait été entrepris au début des années 90 par l'entreprise Hintermann et Weber.

Les chapitres suivants expliquent les causes à l'origine des résultats obtenus par l'IFP. Les deux axes de recherche sont le programme politique et la mise en oeuvre de la politique.

Le chap. 2 examinera l'IFP sous un angle conceptuel. Il vérifiera la congruence des éléments qui composent le programme IFP dans le contexte de la LPN. L'aspect transversal de l'IFP sera traité dans cette partie dans une analyse de la prise en compte de l'IFP dans des politiques sectorielles à incidence spatiale. Enfin, l'OPCA s'intéressera au rôle que joue l'aménagement du territoire qui représente une politique fédérale particulièrement importante dans l'application de l'IFP dans le domaine de compétence des cantons et des communes.

Le chapitre 3 examinera la mise en oeuvre de l'IFP dans les procédures administratives ayant trait à l'IFP dans le cadre de l'accomplissement de tâches de la Confédération. Alors que les chap. 1 et 2 traitent l'IFP à l'échelle de la Confédération, des cantons et des communes, le chap. 3 n'aborde la mise en oeuvre de l'IFP que dans le cadre de l'accomplissement de tâches de la Confédération. Ce choix a été prédéterminé par le fait que l'OPCA a dû se baser, pour des raisons de ressources limitées, sur une étude préexistante.

1

Contrôle des effets de l'IFP

1.1

Problématique

Le présent chapitre doit permettre de répondre à la question de savoir si l'objectif de protection générale de l'IFP formulé par la LPN a été atteint ou non. En vertu de l'art. 6, al. 1, LPN, l'objectif de protection générale de l'IFP réside dans la conservation intacte (ou en tout cas dans le plus grand ménagement possible)5 des objets inventoriés, eu égard aux éléments spécifiques à protéger pour un objet donné. Selon le commentaire de l'administration au sujet de l'IFP (DFI 1977) les objets de l'inventaire sont les paysages les plus précieux de la Suisse. En raison des pressions importantes qui s'exercent sur les paysages authentiques, la Confédération veut apporter, au moyen de l'IFP, une contribution importante à la protection et à l'entretien de la diversité et de la particularité des paysages suisses. Selon le commentaire de l'administration, le choix des objets inscrits à l'IFP constitue un pas 5

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La dérogation par rapport à la conservation intacte d'un objet de l'IFP n'est possible qu'en invoquant un besoin de même importance ou plus important, également de portée nationale. Le cas échéant, il convient de procéder à une pesée d'intérêts. Il faut cependant rappeler que la loi accorde la priorité aux objets de l'inventaire et que le fardeau de la preuve incombe à toute autre forme d'exploitation. En tout état de cause, il doit s'agir d'une importante tâche d'intérêt national. Cela étant, le fait qu'un motif invoqué soit d'une manière générale considéré comme étant d'intérêt national (tel un approvisionnement en énergie suffisant) ne signifie pas pour autant qu'il est d'importance nationale (Leimbacher in Keller et al: 1997, p. 214 et s.).

important de la mise en place d'une protection globale des paysages dont l'objectif est de garantir la pérennité des objets dignes de protection.

1.2

Approche méthodique

Un contrôle des effets de l'IFP est confronté à divers défis de nature méthodologique6. L'inventaire comporte 162 objets qui varient fortement en ce qui concerne leur nature que leur taille. L'objectif de protection générale, soit la conservation intacte des objets inventoriés, ne revient pas automatiquement à une interdiction absolue de toute modification, mais signifie que toute intervention éventuelle ne doit pas constituer un danger du point de vue des contenus de la protection spécifique à chaque objet. Ceux-ci sont souvent définis de manière vague, ce qui rend la définition d'indicateurs de performance difficile. Il n'y a en outre pas de relation causale simple entre la «mesure» IFP et l'aménagement du paysage des objets protégés. En effet, au-delà de son «statut d'objet IFP», l'aménagement est, entre autres facteurs, influencé par la pression géographique et économique qui s'exerce sur la région qui l'entoure.

L'approche de l'examen choisi au vu de cette problématique est d'une part constituée par une analyse longitudinale: l'évolution des objets de l'IFP est examinée sur une longue période et l'analyse cherche à établir comment certains de leurs aspects importants ont évolué depuis l'entrée en vigueur de l'IFP à la fin des années 70.

D'autre part, pour pouvoir tirer des conclusions, cette analyse «avant/après» est complétée par une analyse transversale. Il s'agit de comparer l'évolution des paysages inscrits à l'IFP à celle des paysages non inscrits situés dans des régions dites de référence.

L'état et l'évolution de la valeur des sites inscrits à l'IFP sont enregistrés au moyen de divers modèles. Le présent examen se base notamment sur l'analyse de cartes géographiques, de prises de vues aériennes et de statistiques spécifiques à l'exploitation du sol. Etant donné que les analyses cartographiques ne permettent pas dans tous les cas de mettre en évidence les effets de protection de l'IFP, ceux-ci sont complétés par des appréciations effectuées par des experts. Cette «triangulation» faisant appel à plusieurs méthodes a pour but de compenser les faiblesses des différentes approches et de combiner leurs points forts. Naturellement, la présente étude tient également compte des résultats des travaux préparatoires, en partie importants, effectués dans la perspective de l'IFP.

Dans cette étude,
l'évaluation des modifications du paysage des objets inscrits à l'IFP est effectuée au moyen de trois critères. La comparaison entre l'état visé et l'état effectif constitue cependant le coeur de l'examen, l'état visé correspondant à l'objectif de protection générale et aux objectifs concrets de l'IFP tels qu'ils ont notamment présentés dans les explications l'administration relatif à l'inventaire. En se basant sur d'autres sources, certains objectifs de protection spécifiques ont été opérationnalisés pour un certain nombre d'objets choisis pour les études de cas7. Ces 6 7

Certains de ces problèmes trouvent déjà leur origine dans la conception de la politique de mise en oeuvre de l'IFP. Nous aborderons ces questions plus en détail aux chap. 2 et 3.

Cette opérationnalisation a été accompagnée par une commission d'experts indépendante qui avait déjà accompagné la première étude de cas de Hintermann et Weber (à ce sujet, voir par. 1.4.1 ainsi que Hintermann et Weber 1993, p. 18).

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objectifs constituent le critère permettant d'évaluer l'état actuel et les changements intervenus au niveau des objets de protection. En complément à la comparaison entre état visé et état effectif, les modifications subies par les objets inscrits à l'IFP sont évaluées par rapport aux formes de menaces considérées comme problématiques par les explications relatives à l'inventaire et par rapport aux tendances de l'évolution des régions de référence.

Le présent contrôle des effets de l'IFP ne distingue pas si les modifications constatées sont dues à l'exécution de tâches fédérales ou si elles ont eu lieu dans le cadre d'activités cantonales ou communales. Une telle différenciation générerait des charges disproportionnées et ne serait à notre avis pas objectivement justifié étant donné que, renvoyant au fédéralisme en la matière, le commentaire de l'administration relève explicitement que les cantons et les communes partagent avec la Confédération la responsabilité de la protection de la nature et des paysages des objets inscrits à l'IFP8. La question de savoir si le caractère juridiquement contraignant de l'IFP est suffisant pour influencer les cantons et les communes à respecter ses objectifs est un point que nous aborderons dans le cadre de l'analyse du programme du chap. 2 ci-dessous.

Le présent chapitre est conçu de la manière suivante: Nous commencerons par comparer, en «vision aérienne», l'utilisation du sol des objets de l'IFP avec celle des régions de référence sur la base de la statistique suisse de la superficie. Il s'agit principalement de répondre à la question de savoir si, et le cas échéant comment le mode d'utilisation de la portion du territoire soumis à la protection de l'IFP se distingue du reste du territoire (voir section 1.3). Dans une deuxième étape, nous nous pencherons plus en détail sur certains objets étant donné que la statistique suisse de la superficie ne donne qu'une vue d'ensemble relativement peu détaillée; nous résumerons les résultats des études de cas déjà effectués sur certains objets de l'IFP. A cet égard, il convient en particulier de mentionner les importants travaux effectués par Hintermann et Weber pour le compte de l'OFEFP9 (voir par. 1.4.1).

Dans une troisième étape, nous présenterons les résultats de la réactualisation partielle des études de cas que l'OPCA à commandée à leurs auteurs pour la période recouvrant les années 9010 (voir par. 1.4.2 et 1.4.3).

1.3

Evaluation de la statistique suisse de la superficie

1.3.1

Situation initiale et approche

Exprimé de façon plus pragmatique, le but de l'IFP est de faire en sorte que l'évolution des objets qui y sont répertoriés diverge positivement de celle de régions de référence du point de vue des utilisations du sol potentiellement problématiques tels que la construction de nouveaux bâtiments, résidentiels ou industriels, ou de surfaces de transport. Par conséquent, nous nous basons ci-après sur la statistique suisse de la superficie pour procéder à une comparaison statistique entre l'utilisation de toutes les surfaces placées sous la protection de l'IFP et le mode d'utilisation du sol de toutes les autres surfaces qui ne bénéficient pas de la protection de l'IFP 8 9 10

740

DFI,1977: p. 8; Leimbacher: 2001, p. 19 et ss.; Leimbacher in Keller et al, 1997: p. 218 et ss.

Hintermann et Weber, 1993.

Hintermann et Weber, 2003a.

(surfaces de référence ou de contrôle)11. La question est de savoir si les surfaces au bénéfice de la protection de l'IFP se distinguent des autres surfaces et, le cas échéant, comment les éventuelles différences ont évolué au cours des deux dernières décennies.

La statistique suisse de la superficie constitue un vaste système statistique d'observation du territoire qui se base sur une analyse détaillée de l'occupation et de l'utilisation du sol à l'aide de photographies aériennes12. L'utilisation du sol sur l'ensemble du territoire national est déterminée au moyen de plus de quatre millions de poins d'échantillonnage. Ceux-ci sont ensuite répartis selon 74 catégories d'utilisation du sol. Le premier relevé a été effectué au cours des années 1979 à 1985 et le deuxième de 1992 à 199713. La statistique de la superficie permet de comparer les catégories d'utilisation du sol de n'importe quel périmètre et de constater les changements d'utilisation au cours de l'intervalle d'environ douze ans qui sépare les deux relevés. Pour des motifs liés à la clarté, nous nous en tenons aux catégories d'utilisation suivantes: ­

Forêts et surfaces boisées: surfaces couvertes d'arbres, d'arbustes et de broussailles;

­

surfaces agricoles utiles: terres cultivables exploitées par l'agriculture, comprenant les surfaces occupées en permanence («région de plaine») ainsi que les régions dont l'altitude est plus élevée que sont les pâturages alpestres et du Jura, les mayens et les prés alpestres («alpages»);

­

lacs et cours d'eau: lacs, étangs, fleuves, rivières, ruisseaux, canaux;

­

autres surfaces improductives: végétation improductive, surfaces sans végétation telles que rochers, sable, éboulis, glaciers et névé;

­

surfaces d'habitat et d'infrastructure: toutes les surfaces qui se caractérisent par un usage principalement dédié au travail, à l'habitat, au transport et à la détente.

Etant donné qu'elle revêt une importance particulière dans la perspective de notre problématique, nous affinons la grande catégorie «surfaces d'habitat et d'infrastructure» en sous-catégories:

11

12 13

Par la suite, nous comparerons donc exclusivement des surfaces bénéficiant du statut IFP à des surfaces qui n'en bénéficient pas. Ainsi, le second groupe de surfaces comporte également des surfaces qui, bien que ne possédant pas le statut IFP, sont tout de même au bénéfice d'un autre statut de protection tel que celui de biotope d'importance nationale selon l'art. 18a de la LPN ou d'objet au bénéfice d'une protection cantonale. Nous sommes d'avis que la distorsion qui en découle est acceptable étant donné que, d'une part, une bonne partie de ces autres statuts de protection se superposent de toute manière au statut de protection de l'IFP et que, d'autre part, les objets concernés qui ne sont pas situés dans des périmètres sous protection de l'IFP représentent une surface négligeable par rapport à l'ensemble du territoire.

Pour plus d'informations sur la statistique suisse de la superficie, voir: www.statistik.admin.ch/stat_ch/ber02/asch/fframe1.htm et OFS, 2001.

Le fait que les relevés s'étalent sur plusieurs années s'explique par l'intervalle séparant les diverses prises de vue aériennes effectuées par l'Office fédéral de la topographie. Ces prises de vues sont effectuées d'ouest en est. Ainsi, les données du deuxième relevé relatives à la région genevoise reflètent la situation en 1992 alors que celles relatives au canton des Grisons reflètent l'utilisation du sol en 1997.

741

­

Aires de bâtiments: habitations, bâtiments agricoles, bâtiments officiels y compris bâtiments à usage mixte et terrains attenants;

­

espaces verts et lieux de détente: espaces verts et lieux de détente, installations sportives, parcours de golf, campings, cimetières, parcs publics;

­

aires industrielles: bâtiments à usage industriel et artisanal, y compris surfaces attenantes tels que surfaces d'entreposage;

­

surfaces de transport: infrastructures routières, ferroviaires et aériennes;

­

surfaces d'infrastructure spéciale: infrastructures d'approvisionnement et de traitement, décharges, chantiers et ruines.

Sur demande de l'OPCA, la section de l'utilisation du territoire de l'OFS a comparé les données agrégées relatives à l'utilisation du territoire de tous les objets inscrits à l'IFP avec ceux de toutes les régions de référence à l'époque du relevé 1992/97. De plus, l'OFS a analysé les transformations de catégories d'utilisation importantes faisant ou non partie de l'IFP depuis le premier relevé de la statistique de la superficie de 1979/85.

1.3.2

Analyse de la statistique de la superficie

Actuellement, les objets inscrits à l'IFP occupent 780 679 ha, ce qui correspond à environ 19 % de l'ensemble du territoire national. Les objets inscrits à l'IFP situés dans l'espace alpin représentent 22,9 %. Cette proportion passe à 19,8 % pour le Jura et à 9,3 % pour le Plateau14. Etant donné que l'IFP a été progressivement élargi depuis 1977, les objets qui n'ont été portés à l'inventaire qu'en 1996 et en 1998 ne peuvent donc pas être soumis à l'analyse statistique puisque, pour ceux-ci, l'IFP n'a pas pu développer d'effet de protection. Les évaluations ci-dessous se limitent donc aux objets portés à l'inventaire en 1977 et en 1983.

L'illustration 2 montre la structure de l'utilisation du sol au sein et à l'extérieur des régions IFP en 1992/97. En comparaison des régions de référence, les régions IFP se caractérisent par une proportion nettement plus importante de surfaces improductives et par une proportion légèrement plus importante de lacs et de cours d'eau. En revanche, la part des surfaces agricoles utiles (alpages compris), des surfaces habitées et d'infrastructure ainsi que des forêts est plus faible dans les régions IFP qu'en dehors15.

14 15

742

Source: OFS, 2003, calculs commandés par l'OPCA.

Seulement 5 % des surfaces habitées et d'infrastructure en Suisse se trouvent à l'intérieur d'objets de l'IFP.

Structure de l'utilisation du sol Illustration 2 Structure de l'utilisation du sol 1992/97, en dehors et à l'intérieur des objets IFP hors IFP : 3'570'745 ha au total 17.8%

à l'int. de l'IFP : 557'731 ha au total 1.9%

7.5%

4.1%

10.8%

26.0%

11.1%

43.5%

31.3%

27.5%

13.3% 5.2%

Surfaces d'habitat et d'infrastructure Economie alpestre Lacs/cours d'eau

Agriculture (plaine) Forèts et surfaces boisées Falaises, sable, éboulis, végétaion improductive Source : OFS GEOSTAT/OFEFP ; OFS, Statistiques de la superficie 1979/85, 1992/98

© OFS, Neuchâtel 2002

L'illustration 3 montre la répartition des surfaces d'habitat et d'infrastructure à l'intérieur et à l'extérieur des régions IFP.

Structure des surfaces d'habitat et d'infrastructure Illustration 3 Structure des surfaces d'habitat et d'infrastructure 1992/97, en dehors et à l'intérieur des objets IFP hors IFP : 268'280 ha au total

à l'intérieur de l'IFP : 10'810 ha au total

31.6% 41.5%

41.6%

49.6%

5.7% 5.7% 7.4%

Aire de bâtiments Surf. d'infrastructure spéciale Surfaces de transports © OFS, Neuchâtel 2002

6.3%

8.0%

2.5%

Aires industrielles Espaces verts et leux de détente

Structure de l'utilisation des sols 1992/97, en dehors et à l'intérieur des objets IFP

En comparaison avec les régions de référence, les surfaces d'habitat et d'infrastructure des régions IFP se caractérisent d'une manière générale par une plus faible proportion d'aires de bâtiments et d'aires industrielles et par une plus forte proportion de surfaces de transport, d'espaces verts, de lieux de détente et de surfaces d'infrastructure spéciales.

Par rapport aux objets des régions de références, les instantanés de la situation des années 90 des illustrations 2 et 3 font certes apparaître des différences nettes entre la 743

structure d'utilisation des objets inscrits à l'IFP. Toutefois, dans la perspective de notre étude, ces différences ne peuvent pas être interprétées de manière univoque, dans la mesure où elles découlent pour une bonne partie de facteurs relevant de la topographie et de la géographie économique. Ainsi, la part relativement plus importante de surfaces improductives ou moins importante de surfaces agricoles et habitées des objets IFP s'explique avant tout par le fait que ces objets sont pour la plupart situés dans l'espace alpin qui, par sa nature, limite fortement les usages à des fins agricoles et d'habitation et non pas par le fait qu'ils bénéficient du statut IFP16.

La part nettement plus importante des surfaces de transport dans les objets IFP s'explique par le fait que ces objets se situent dans des terrains accidentés caractérisés par des petites zones habitées décentralisées, ce qui augmente la proportion d'infrastructures d'accès. Les instantanés de la situation des années 90 des illustrations 1 et 2 ne tiennent en outre pas compte du fait qu'un nombre important d'objets était déjà altéré, pour certains de manière considérable, au moment de leur inscription à l'IFP. Cette situation initiale peu favorable de certains objets ne devrait toutefois pas interférer avec la comparaison entre les régions IFP et les régions de référence.

Pour pouvoir éviter que ces cas de figure particuliers gênent la comparaison et pour mieux pouvoir comprendre l'évolution au cours de la période d'examen (années 80 et 90) des paysages IFP et de ceux qui ne le ont pas, nous ne comparerons à l'étape suivante que les modifications de certaines formes d'utilisation à l'intérieur et à l'extérieur des régions IFP au cours de l'intervalle entre 1979/85 et 1992/97.

Evolution de l'utilisation du sol Illustration 4 Evolution de l'utilisation du sol 1979/85-1992/97, en dehors et à l'intérieur des objets IFP Taux de variation en % hors IFP: à l'intérieur de l'IFP: 15%

+13.4% +10.8%

10%

5% +1.6%

+1.3% +0.1%

-0.0%

0% -0.2%

-0.1%

1 -1.8%

-5%

-3.1%

744

-3.2%

Surfaces d'habitat et d'infrastructure

Agriculture (zones prmanentes d'habitaion)

Economie alpestre

Forèts et surfaces boisées

Lacs/cours d'eau

Falaises, sable, éboulis, végétaion improductive

© OFS, Neuchâtel 2002

16

-3.2%

Structure de l'utilisation des sols 1992/97, en dehors et à l'intérieur des objets IFP

Les objets situés dans l'espace alpin représentent 76 % de la surface de tous les objets inscrits à l'IFP et 43,1 % pour ce qui est de ceux situés aux altitudes, peu propices à la production, allant de 2601 à 4634 mètres au-dessus du niveau de la mer. En revanche, la superficie des objets situés dans la zone d'utilisation subissant les pressions les plus fortes, c'est-à-dire ceux qui se situent entre 193 et 600 mètres au-dessus du niveau de la mer, ne représente que le 10,7 % de la surface de tous les objets inscrits à l'IFP. (Source: OFS, 2003, calculs commandés par l'OPCA).

L'illustration 4 montre le taux de modification en pour cent de l'utilisation du sol entre les deux relevés de 1979/85 et 1992/97 de la statistique suisse de la superficie.

Dans la région d'habitation permanente, l'agriculture a moins reculé dans les régions IFP que dans les régions de référence alors que l'économie alpestre a reculé de plus de 3 % pour les deux catégories d'objet. En ce qui concerne la forêt, une légère augmentation a été enregistrée dans les deux catégories. En revanche, durant la période d'examen, aucune modification significative n'est intervenue en ce qui concerne les lacs et cours d'eau et les autres surfaces improductives, ni dans les régions IFP, ni dans les régions de référence. Dans les deux cas, la tendance la plus marquée est la croissance des zones d'habitat et d'infrastructure. L'augmentation de la population de quelque 9 % durant la période d'examen ne suffit pas à expliquer cette tendance; force est de constater que, malgré plusieurs années de récession, les besoins de surface par habitant ont fortement augmenté (OFS 2001, p. 14). Il est frappant de constater que le taux de croissance de 10,8 % des surfaces d'habitat et d'infrastructure des régions IFP n'est inférieure que de quelques points de ce qui est le cas des autres régions.

La dynamique de l'extension des surfaces d'habitat et d'infrastructure varie toutefois fortement d'une région à l'autre. L'illustration 5 montre les taux de croissance des surfaces d'habitat et d'infrastructures de plus de 20 hectares entre 1979/85 et 1992/9717.

17

En raison de la distorsion statistique affectant les taux de modification des très petits objets, ce graphique ne tient pas compte des surfaces d'habitat et d'infrastructures inférieures à 20 hectares. L'analyse d'objets isolés de plus de 20 hectares peut également souffrir de cette distorsion statistique étant donné qu'il n'y a qu'un seul point d'échantillonnage par hectare.

745

Evolution des surfaces d'habitat et d'infrastructure (> 20 ha) 1979/85­1992/97 Illustration 5

746

Alors que les surfaces d'habitat et d'infrastructure des objets IFP n° 1004 (Creux du Van et gorges de L'Areuse), n° 1203 (grèves vaudoises de la rive gauche du lac de Neuchâtel) ou 1410 (Irchel) n'ont pas connu de croissance, celles des objets n° 1005 (Vallée de la Brévine) et n° 1804 (Monte San Giorgio) se sont étendues de respectivement 26,8 % (+11 hectares) et 21,5 % (+39 hectares).

L'illustration 6 décompose l'évolution nationale des surfaces d'habitat et d'infrastructure selon les cinq sous-catégories retenues.

Evolution des surfaces d'habitat et d'infrastructure Illustration 6 Evolution des surfaces d'habitat et d'infrastructure 1979/97, en dehors et à l'intérieur des objets IFP Taux de variation en % hors IFP:

à l'intérieur de l'IFP:

+40%

+37.6%

+30% +20%

+24.2% +20.1%

+16.7%

+16.5%

+15.5% +9.7%

+10%

+8.6%

+0% 1

-4.7%

-10%

-9.7%

-20%

Aire de bâtiments

Aires industrielles

Espaces verts et leux de détente

Surfaces de transports

© OFS, Neuchâtel 2002

Surf. d'infrastructure spéciale Structure de l'utilisation des sols 1992/97, en dehors et à l'intérieur des objets IFP

Les surfaces d'infrastructure spéciale se sont réduites, tant à l'intérieur qu'à l'extérieur des objets IFP, avec cependant une tendance nettement plus importante en ce qui concerne les objets inscrits à l'IFP. Les quatre autres sous-catégories ont toutes été marquées par une augmentation, parfois importante, et cela dans les régions IFP comme dans les autres. La croissance en pour cent des aires de bâtiments et des surfaces de transport au sein des objets IFP n'est que très légèrement inférieure à celle des autres objets. Les surfaces d'espaces verts et des lieux de détente ont quant à elles connu une plus forte croissance dans les objets IFP que dans les autres. L'objet n° 1911 (Tomalandschaft près de Domat/Ems) illustre très bien cette constatation; lors de l'entrée en vigueur de l'IFP, cette région était largement inexploitée. Entre-temps, un parcours de golf de 38 hectares y a été aménagé, ce qui représente plus d'un tiers de la superficie de cet objet inscrit à l'IFP. Dans la perspective de notre étude, il est également intéressant de remarquer le fait que l'extension au cours de la période examinée des aires industrielles au sein des objets IFP a atteint 37,6 %, soit une augmentation 1,5 fois plus importante que celle connue dans les régions de référence qui ne bénéficient pas du statut IFP.

747

L'évolution caractérisant les diverses catégories d'utilisation du sol au sein des objets IFP varie aussi considérablement d'une région à l'autre comme l'illustration 7 le montre au sujet des surfaces de transport18. Ainsi, les objets IFP n° 1811 (Arbòstora-Morcote), n° 1902 (Ruinaulta) ou n° 1713 (Diablerets ­ Vallon de Nant ­ Derborance) n'ont pas connu de développement dans ce domaine alors que les objets n° 1302 (Alte Aare / Alte Zihl) et n° 1809 (Campolungo ­ Campo Tencia ­ Piumogna) ont vu leurs surfaces de transport augmenter de respectivement 34,6 % (+ 9 hectares) et 69,2 % (+ 9 hectares).

18

748

Pour des raisons statistiques, cette illustration ne porte que sur des objets dont la surface dépasse 5 hectares.

IFP, évolution des surfaces de transport (> 5 ha 1979/85­1992/97) Illustration 7

749

L'extension des aires industrielles au sein des objets IFP montre également des disparités régionales: alors qu'elles n'ont pas augmenté durant la période sous revue pour les objets n° 1412 (Rheinfall) ou n° 1306 (Albiskette-Reppischtal), elles se sont étendues de 39,3 % (+ 11 hectares) dans la région de l'objet n° 1305 (Reusslandschaft) et de 28,1 % (+ 9 hectares) dans celle de l'objet n° 1411 (UnterseeHochrhein).

La dynamique de la croissance des surfaces d'habitat et d'infrastructure au sein des objets IFP présente donc des variations importantes d'un objet à l'autre. Il n'y a en outre pas de structure régionale apparente qui serait nettement reconnaissable au premier coup d'oeil19. Il faut retenir que le phénomène de forte croissance des aires industrielles, des surfaces de transport et des lieux de détente ne se limite pas aux objets IFP des régions structurellement faibles de la périphérie qui ont un besoin de rattrapage en matière d'infrastructures. Il touche également des objets urbains du Plateau qui disposaient déjà de bonnes infrastructures avant l'entrée en vigueur de l'inventaire et dans lesquelles il était question, selon le commentaire de l'administration relatif à l'inventaire fédéral, de réparer les dommages existants, ou tout du moins en limiter les effets négatifs (DFI 1977, p. 19).

1.3.3

Résultats de l'analyse de la statistique de la superficie

Les catégories d'utilisation relativement grossières de la statistique de la superficie ne permettent certes pas de contrôler la mise en oeuvre des objectifs de protection spécifiques à chaque objet de l'IFP. Toutefois, il est possible de formuler les résultats intermédiaires suivants: Comme nous l'avons mentionné en introduction, l'IFP ne constitue certes pas une interdiction absolue de toute modification, mais signifie qu'il faut s'efforcer de maintenir l'objet dans l'état qui le rend digne de protection, soit l'état actuel, et de poursuivre l'exploitation adaptée à cet état (DFI 1977, p. 28).

Même si le développement spécifique diffère autant d'un objet à l'autre, le résultat d'ensemble auquel la statistique de la superficie aboutit est qu'il y a eu une forte croissance des aires de bâtiments, des industrielles, des infrastructures au cours de l'intervalle relativement bref entre les deux relevés de 1979/85 et de 1992/97 alors même que cette période a été marquée par la récession. Les taux de croissance de ces catégories d'utilisation sont à peu près les mêmes que ceux enregistrés dans les régions de référence qui n'ont pas le statut IFP; dans certains cas, ils les dépassent même. Il faut bien sûr apprécier les modifications concrètement subies par chaque objet IFP à la lumière de ses objectifs de protection spécifiques (à ce sujet, voir section 1.4). Cela étant, il convient de relever que le commentaire de l'administration relatif à l'IFP considère les aires industrielles, les surfaces de transport, l'extension de plans de zone pour l'habitat et les installations pour la pratique intensive des activités de loisirs, comme des dangers qui pourraient menacer les sites répertoriés

19

750

Le présent examen n'avait pas pour but de procéder à une évaluation statistique des rapports entre la dynamique des surfaces d'habitat et d'infrastructure et la situation régionale des objets IFP.

par l'IFP au sens de l'art. 5, al. 1, let. c, LPN (DFI 1977, p. 24 à 26)20. La statistique de la superficie permet en outre de constater que les surfaces d'habitat et d'infrastructure ont parfois connu un essor important dans certains objets IFP dont les contenus protégés étaient justement constitués d'une surface d'habitat et d'infrastructure réduite ou d'un paysage rural21 caractérisé par un habitat dispersé, ce que les exemples suivant, représentatifs de nombreux autres cas, illustrent parfaitement: ­

Ce sont avant tout les paysages naturels et les caractéristiques villages tessinois qui constituent les motifs explicites de la protection de l'objet n° 1804 (Monte San Giorgio). Au cours de la période examinée, l'aire de bâtiments a augmenté de 16,1 % (+ 20 hectares). Les analyses cartographiques de l'OFS montrent que cette augmentation est principalement due à la construction de nouvelles maisons individuelles. Dans cet objet, les surfaces d'infrastructure spéciales ont augmenté de 143 % (+ 10 hectares).

­

La rive gauche du lac de Zoug (objet n° 1309), paysage inaltéré selon le commentaire relatif à l'IFP, a vu son aire bâtie augmenter de 23,6 % (+ 17 hectares) soit nettement plus que la moyenne nationale qui se situe à 16,5 %.

Les analyses complémentaires de l'OFS ont montré que, dans ce cas également, cette augmentation est due pour plus de trois quarts à la construction de nouvelles maisons familiales individuelles ou mitoyennes.

­

En ce qui concerne l'objet 1311 (Napfbergland), le commentaire relatif à l'IFP souligne que le motif de protection réside notamment dans le fait qu'il s'agit d'un «Paysage de caractère agraire [...] pauvre en voies de communication». La statistique de la superficie révèle cependant que, au cours de la période examinée, l'aire de bâtiments de cet objet a augmenté de 14,4 % (+ 15 hectares), les surfaces de transport de 33,1 % (+ 39 hectares) et les surfaces d'infrastructure spéciale de 233,3 % (+ 14 hectares)22.

­

Au cours de la période examinée, l'objet n° 1008 (Franches-Montagnes) ­ un haut plateau du Jura unique en Suisse, composé de pâturages boisés, de forêts, de prairies et de tourbières a vu son aire de bâtiments s'étendre de 25 % (+ 8 hectares) et ses surfaces de transport de 15,1 % (+ 8 hectares).

Globalement, les résultats de l'analyse de la statistique de la superficie indiquent que l'effet protecteur de l'IFP est lacunaire. Bien qu'il y ait d'importantes différences d'un objet à l'autre, la vue d'ensemble montre qu'il n'a pas été possible de préserver les paysages précieux de la pression exercée par notre société industrielle et de loisirs aussi bien que le prévoit l'objectif de protection générale de l'IFP qui vise une conservation intacte des objets inventoriés.

20 21

22

Hintermann & Weber: 1993 mentionnent des menaces potentielles semblables pour les objets IFP.

Les paysages naturels sont des objets dont l'importance nationale réside dans dans la morphologie du terrain, l'hydrographie et le type de végétation ou sa virginité. A l'inverse par paysage rural, on entend un paysage formé par l'activité humaine au cours du temps.

Selon les données de l'OFS, la construction de nouveaux accès à des fermes, des alpages et des forêts ainsi que l'extension de l'aire de bâtiments agricoles et les chantiers correspondants sont à l'origine de cette croissance de la surface d'habitat et d'infrastructure.

751

1.4

Etudes de cas portant sur des objets choisis

1.4.1

Résultats du premier relevé de Hintermann & Weber et autres études de cas

Les résultats de l'analyse de la statistique de la superficie sont plutôt globaux et ne tiennent pas compte des contenus spécifiquement protégés de chaque objet inscrit à l'IFP. Pour pouvoir procéder à une analyse plus précise de la protection des objets répertoriés par l'inventaire fédéral, les modifications que chaque objet a concrètement subies doivent être évaluées dans la perspective de l'objectif de protection spécifique à chaque objet. Les études de cas sont une approche méthodique qui permettent de répondre à ces questions. Nous résumons ici les résultats des études de cas qui ont déjà été effectués. Il s'agit principalement des résultats des travaux de Hintermann & Weber (1993).

En 1990, l'OFEFP a chargé la société Hintermann & Weber SA de procéder à un contrôle des effets de l'IFP («premier relevé» par la suite). Etant donné que les divers résultats indiquent que l'effet protecteur de l'IFP n'est pas suffisant, il devient nécessaire de répondre notamment aux questions de savoir quelles modifications indésirables des objets inscrits à l'IFP n'ont pas pu être empêchées et quelles sont les raisons des dépréciations ainsi subies par ces objets.

Hintermann & Weber ont répondu à ces questions au moyen d'une études de cas portant sur 40 objets choisis inscrits à l'IFP23. Etant donné que les objectifs de protection spécifiques mentionnés sur les feuilles d'inventaire de l'IFP sont rédigées en termes très généraux, une commission d'experts accompagnant l'étude à défini les objectifs de protection spécifiques pour chaque objet sélectionné. Les modifications du paysage ont été enregistrées au moyen de comparaison de cartes, de relevés sur le terrain et en interrogeant des experts. Les modifications constatées ont ensuite été évaluées au regard des objectifs de protection spécifiques.

Lors de leur premier relevé, Hintermann & Weber sont arrivés à la conclusion que les 40 objets des études de cas ont subi des interventions indésirables au cours de la période de 1977 à 1992. En d'autres termes, les qualités des paysages qui ont conduit à leur inscription à l'inventaire fédéral ont été altérées, du moins en partie.

En tenant également compte des quelques cas dans lesquels certains contenus protégés spécifiques ont été revalorisés, force est de constater que la valeur globale n'a été maintenue que
pour trois objets des 40 soumis aux études de cas. Cette valeur a été presque maintenue pour six autres objets. En revanche, l'objectif visant un maintien intact de ces paysages, sites et monuments naturels n'a clairement pas été atteint pour trois quarts des objets examinés. Dans quelques cas isolés, les auteurs on même constaté que les contenus spécifiques protégés avaient subi des déprédations systématiques. Selon les auteurs, les paysages ruraux ont globalement subi nettement plus d'altérations que les sites naturels purs. Ils ont en outre constaté que la tendance aux déprédations est plus élevée pour les paysages ruraux étendus que pour les objets de taille restreinte.

23

752

Le choix de ces objets a été effectué de manière à obtenir un échantillon représentatif de leur diversité du point de vue géographique, de la pression à laquelle ils sont soumis et des motifs de protection (Hintermann & Weber 1993, p.11).

La construction de bâtiments isolés, les zones bâties et l'exploitation de gravières sont à l'origine des atteintes les plus problématiques subies par les objets inscrits à l'IFP24. Elles ont entraîné des déprédations irréversibles et cela pour un nombre important d'objets. De plus, ces interventions n'ont jamais permis de revaloriser quelque contenu spécifique que ce soit. L'apport d'engrais, la disparition de surfaces plantées d'arbres fruitiers de haute tige, la modification des modes d'exploitation agricole et la construction d'ouvrages de protection contre les eaux ont eu des conséquences semblables. Pour quelques objets, l'exploitation sylvicole a également entraîné des pertes de valeur importantes.

Pour pouvoir évaluer l'effet de protection déployé par l'IFP, Hintermann & Weber ont comparé les modifications du paysage intervenues dans les 40 objets de l'IFP analysés avec celles intervenues dans des paysages de référence non protégés. Ils ont en particulier comparé la fréquence et l'intensité des interventions modifiant le paysage. Les auteurs ont déduit du statut d'objet protégé tel qu'il est défini par l'art. 6 LPN, l'hypothèse selon laquelle l'inscription d'un paysage à l'inventaire fédéral a pour effet de faire diverger positivement son évolution par rapport à la tendance régionale, c'est-à-dire par rapport au développement général. La comparaison avec des paysages de référence qui ne bénéficient pas du statut IFP effectuée dans le cadre du premier relevé n'a cependant permis de constater que l'effet de protection de l'IFP se limitait aux haies et surfaces boisées, à la construction des routes forestières, à la mise en jachère de terres en région de montagne et au développement du réseau de chemins ruraux. Pour toutes les autres catégories d'intervention, les études de cas effectuées par Hintermann & Weber ont permis de constater que la protection de l'IFP était insuffisante à inexistante selon les objets.

De l'avis des représentants du groupe d'experts qui a accompagné le projet, ces résultats ne permettent toutefois pas de conclure que les paysages inscrits à l'IFP sont demeurés sans protection contre de telles interventions. En effet, grâce à cette protection, les autorités et les tribunaux compétents sont parvenus à empêcher de nombreuses interventions problématiques au cours des
années 8025.

D'autres études de cas individuels, réalisés dans le but de constater si l'IFP a ou non atteint son objectif, parviennent à des résultats semblables à ceux d'Hintermann & Weber. Un examen effectué par Suter (1997) sur l'objet n° 1104 (Tafeljura nördlich Gelterkinden) a mis en évidence la perte de précieux arbres fruitiers dispersés et de petites structures agricoles. L'auteur parvient à la conclusion que l'évolution de l'objet en question ne diverge guère de l'évolution régionale à l'extérieur du périmètre sous protection de l'IFP. Une autre étude de cas réalisée par Stocker (2000) et portant sur les objets n° 1102 (Randen) et 1602 (Murgtal-Mürtschental) a révélé que si le statut IFP a eu un effet positif pour les deux objets et a permis de protéger leur paysage, il n'en demeurait pas moins que l'objectif de protection générale de l'IFP n'a pas été atteint.

24

25

Les interventions et l'utilisation ont été considérées comme problématiques lorsqu'elles ont altéré la qualité d'un nombre important d'objets ou lorsqu'elles sont à l'origine de destructions du paysage particulièrement importantes ou lorsque les dommages provoqués sont particulièrement difficiles à réparer.

Cette opinion rejoint celle des experts entendus par l'OPCA (voir introduction au chap. 2). Ainsi, l'un des experts entendus estime en substance que la première force de l'IFP est d'exister et que la situation serait bien pire sans inventaire fédéral.

753

1.4.2

Deuxième relevé de Hintermann & Weber

Les résultats du premier relevé de Hintermann & Weber pour la période entre 1977 et 1992 constituent une base importante pour la présente évaluation des effets déployés par l'IFP. Ils ne sont toutefois plus à jour. Ils reflètent essentiellement la situation des années 70 et 80. Depuis lors, d'importants textes de loi concernant l'IFP ont été révisés, notamment dans les domaines de l'aménagement du territoire, de l'agriculture ou de la forêt. En outre, les procédures d'autorisation internes à l'administration ont été modifiées (voir chap. 3). Pour ces raisons, l'OPCA a chargé la société Hintermann & Weber SA d'actualiser leur premier relevé de manière à répondre à deux questions: ­

En ce qui concerne les modifications du paysage, quelles sont les tendances auxquelles les objets de l'IFP ont été exposés au cours des années 90?

­

Les développements problématiques des années 80 ont-ils pu être inversés?

Ci-dessous, nous résumons la procédure et les principaux résultats du deuxième relevé de Hintermann & Weber26.

L'actualisation partielle du contrôle des effets de l'IFP par Hintermann & Weber a été effectuée pour les objets des études de cas du premier relevé. En raison d'un calendrier serré et de ressources financières limitées, quelques restrictions se sont toutefois avérées nécessaires. L'actualisation a donc été limitée au suivi des cinq formes d'intervention qui se sont révélées particulièrement problématiques lors du premier relevé. Il s'agit des modifications du paysage dues ­

à la construction de bâtiments et de zones bâties importantes

­

à l'exploitation de gravières et de carrières

­

à la correction et stabilisation de cours d'eau

­

à l'exploitation agricole

­

à l'exploitation forestière.

L'approche méthodique choisie pour l'actualisation partielle s'appuie fortement sur celle qui avait été choisie pour le premier relevé. L'examen des types d'intervention mentionnés n'a toutefois pas été effectué de la même manière pour tous les objets étudiés. Un type d'intervention problématique ne sera retenu en tant que tel que s'il constitue une menace pour l'un des objectifs de protection prioritaire de l'objet en question. La période d'examen va de l'état final du premier relevé à un moment qui est le plus proche possible de 2002. Pour l'actualisation, l'état initial du paysage est constitué par l'état final du premier relevé et l'état actuel est également déterminé par diverses méthodes dont l'analyse cartographique, l'analyse de données d'aménagement numériques, la visite des objets et des auditions d'experts. L'évaluation des modifications du paysage constatées a été effectuée selon la même méthode que celle utilisée lors du premier relevé. Sur la base des objectifs de protection spécifiques à chaque objet, les modifications constatées ont été évaluées en fonction d'une échelle à sept niveaux. La mesure de la valeur est effectuée grâce à la modification d'éléments spécifiques centraux du paysage d'un objet figurant à l'IFP par rapport à son état initial. Pour pouvoir évaluer l'effet de protection déployé par l'IFP, les

26

754

Hintermann & Weber: 2003a, la version détaillée est jointe en annexe.

modifications du paysage subies par les objets IFP ont également été comparées avec celles intervenues dans les paysages de référence non protégés.

1.4.3

Résultats du deuxième relevé de Hintermann & Weber

Pour quatorze des objets soumis à l'étude de cas (37 %), le deuxième relevé n'a permis de constater aucune modification du paysage, ou du moins aucune modification importante du paysage en raison de l'une des formes d'intervention prises en compte. Les qualités spécifiques de chacun de ces paysages ont été maintenues, voire améliorées dans quelques cas. Pour ces objets, l'objectif de protection de l'art. 6 LPN peut être considéré comme atteint au cours des années 90 pour les cinq formes d'intervention prises en compte. Pour 24 des objets soumis à l'étude de cas (63 %), l'objectif de protection de l'art. 6 LPN n'a pas pu être atteint au cours des années 90 et pour les cinq formes d'intervention prises en compte. Des éléments du paysage qui avaient conduit à leur inscription à l'inventaire fédéral en 1977 ont été altérés.

Selon les auteurs, au cours des années 90, ce sont les modifications du paysage dues aux constructions hors des aires de bâtiments homogènes et aux grandes zones bâties ainsi qu'à la disparition marquée d'arbres fruitiers de haute tige qui constituent les problèmes les plus importants. Les nouvelles constructions sont à l'origine de réductions de la valeur du paysage pour 65 % des objets étudiés. En outre, les cinq paysages dont la valeur réside en bonne partie dans la culture d'arbres fruitiers de haute tige ont perdu de leur valeur. Les modifications des modes d'exploitation agricole caractéristiques se sont avérés moins problématiques. Certes, quatre des six objets étudiés ont été touchés par des évolutions négatives dans ce domaine. Il s'agissait cependant dans chaque cas d'atteintes de peu d'importance et dans les deux autres cas, l'évolution a permis d'atteindre des améliorations en partie importantes. Les atteintes découlant de nouvelles gravières et carrières ou de l'extension de gravières et de carrières concernent environ un tiers des objets étudiés. La situation globale relative à la correction et stabilisation de cours d'eau est à peu près identique. Cette forme d'intervention a entraîné une baisse de la qualité du paysage pour 33 % des objets dont la valeur réside en bonne partie dans les cours d'eau et leurs berges proches de l'état naturel. Ce sont les modifications du paysage dus à l'exploitation forestière qui sont les moins nombreuses. Seul un cas examiné sur les
dix concernés a permis de constater des atteintes. En revanche, sept objets sur les dix concernés ont même été revolorisés de ce point de vue.

En comparaison avec le premier relevé, Hintermann & Weber parviennent à la conclusion que les objets de l'IFP examinés ont également perdu une partie de leur valeur au cours des années 90. Cela étant, d'une manière générale, ces pertes de valeur et l'évolution négative durant ces années ont été moins importantes qu'au cours des années 80. Les pertes de valeur dues aux formes d'intervention «exploitation de gravières et de carrières », « correction et stabilisation de cours d'eau» et «exploitation agricole» ont été moins importantes. Il y a même eu renversement de la tendance par rapport au premier relevé en ce qui concerne l'exploitation forestière. En effet, au cours des années 90, le nombre de revalorisations a été plus important que les déprédations. Cela étant, force est de constater que, en comparaison avec

755

le premier relevé, les atteintes dues à la construction de bâtiments et aux zones bâties importantes n'ont que très peu, voire pas du tout diminué.

En comparant l'évolution des objets étudiés avec celle qui a marqué l'évolution des autres paysages régionaux, il apparaît, d'une part, que dans plus de la moitié des cas, les modifications non souhaitées des paysages sous protection de l'IFP ont été égales ou plus importantes que celles subies par les paysages régionaux sans statut de protection particulier. D'autre part, le deuxième relevé a montré que les objets étudiés qui ont maintenu leur valeur au cours des années 90 ont un taux de modification inférieur à celui des paysages régionaux de référence.

1.5

Conclusions relatives au contrôle des effets de l'IFP

En comparant les superficies de tous les objets inscrits à l'IFP avec celles des surfaces de références qui ne bénéficient pas du statut IFP sur la base de la statistique suisse de la superficie, il apparaît que les modes d'utilisation du sol des premières se distinguent de ceux des secondes. Toutefois, ces différences semblent s'expliquer par la situation périphérique de nombreux objets plutôt que par les prescriptions de l'inventaire fédéral. Globalement, durant la relativement courte période entre 1979/85 et 1992/97, la croissance des surfaces d'habitat et d'infrastructure des régions IFP a été très marquée et proche de la moyenne nationale. Toutefois, il y a de grandes différences d'un objet à l'autre. En répartissant les surfaces d'habitat en fonction des sous-catégories définies, il apparaît que les taux de croissance moyens des aires de bâtiment et des surfaces de transport des objets IFP ne sont que très légèrement inférieurs à ceux des paysages de référence ne bénéficiant pas de la protection de l'IFP. Durant la même période, les aires industrielles et les lieux de détente ont même connu une croissance nettement plus importante à l'intérieur des objets de l'IFP qu'à l'extérieur. L'IFP ne constitue pas une interdiction absolue de toute croissance des surfaces d'habitat et d'infrastructure. Les interventions doivent donc être évaluées de manière différenciée en tenant compte des contenus protégés spécifiques à chaque objet. Il convient toutefois de remarquer que les catégories d'utilisation des surfaces d'habitat et d'infrastructure qui ont globalement connu une forte croissance au cours de la période examinée avaient déjà été qualifiées de facteurs de risque pour les objets de l'IFP par le commentaire de l'administration. En outre, les données de la statistique de la superficie ont également permis de constater que les surfaces d'habitat et d'infrastructure de certains objets pour lesquels les structures d'habitat traditionnelles font partie des contenus protégés spécifiques de l'inventaire ont également connu une forte croissance. Ces résultats intermédiaires doivent être évalués de manière critique dans le cadre du contrôle des effets de l'IFP.

Les études de cas réalisées par Hintermann & Weber sur commande de l'OFEFP montrent que, au cours des années 80, les 40 objets examinés ont subi
des interventions indésirables du point de vue des objectifs de protection. Les qualités du paysage déterminantes pour leur inscription à l'inventaire fédéral ont été en partie gravement détériorées, l'objectif de protection selon l'art. 6 LPN n'a pas été atteint dans trois quarts des cas examinés. Les auteurs ont cependant aussi constaté que les contenus de protection spécifiques de quelques paysages ont également été réévalués. La comparaison entre objets IFP et objets de référence n'a montré que peut d'écarts positifs en faveur des premiers en ce qui concerne l'évolution du paysage.

756

L'actualisation partielle du premier relevé exécuté par Hintermann & Weber, sur commande de l'OPCA, a permis de mettre à jour un certain nombre de cas choisis par rapport aux cinq formes d'intervention qui se sont révélées particulièrement problématiques lors du premier relevé. Ce deuxième relevé a permis d'établir l'état des objets choisis à un moment le plus proche possible de 2002. Les auteurs sont parvenus à la conclusion que, durant cette deuxième période d'examen, les objets retenus pour les études de cas ont également perdu de leur valeur à cause de ces cinq formes d'intervention. Dans près de deux tiers des cas, l'objectif de protection selon l'art. 6 LPN n'a pas été atteint en ce qui concerne ces cinq formes d'intervention.

Toutefois, l'ampleur de ces pertes de valeur était moins importante par rapport à celles constatées lors du premier relevé. Par rapport aux années 80, la tendance à la perte de valeur des paysages a été freinée par rapport aux formes d'intervention constituées par l'exploitation de gravières et de carrières, la correction et la stabilisation de cours d'eau et l'exploitation agricole (à l'exclusion des arbres fruitiers de haute tige). Dans certains cas, des réévaluations ont même été constatées. Au cours des années 90, l'exploitation forestière a évolué de manière positive dans la majorité des cas étudiés, l'aspect naturel des forêts ayant redonné de la valeur à ces objets.

Les modifications du paysage dues aux constructions hors des aires de bâtiments homogènes, aux grandes zones bâties ainsi qu'à la disparition marquée d'arbres fruitiers de haute sont demeurées problématiques au cours des années 90 et il n'a pas été possible de constater de réduction de tendance par rapport aux années 80. La comparaison avec des régions de référence révèle que l'évolution des paysages des objets examinés qui ont subi une réduction de valeur ne diffère pas de manière significative de la tendance observée pour les paysages normaux.

Sur la base des données et indicateurs disponibles, force est de constater que, globalement, l'objectif de protection générale de l'IFP formulé à l'art. 6 LPN n'a jusqu'à présent pas été atteint.

2

Analyse du programme IFP

Une fois ce constat négatif tiré, il s'agit d'en rechercher les causes. Elles peuvent résider soit dans la conception du programme politique, soit dans la mise en oeuvre de la politique. Le chap. 2 abordera l'aspect conceptuel du programme l'IFP. Par programme IFP, l'OPCA entend l'ensemble des mesures prises par l'Etat et orientées vers l'objectif poursuivi par l'IFP. Le programme IFP est composé de l'ensemble des objectifs l'inventaire IFP ainsi que des instruments, des procédures, de l'organisation et des ressources prévus pour la réalisation de ces objectifs. Les buts et les éléments de mise en oeuvre du programme sont décrits dans le classeur IFP, l'ordonnance sur l'IFP, la LPN, la LAT et de tous les textes explicatifs du officiels accompagnant cette législation. Le programme se distingue de la mise en oeuvre qui comprend l'ensemble des pratiques permettant l'exécution de la politique.

Cet aspect sera d'ailleurs examiné au chap. 3 «Examen de la mise en oeuvre de l'IFP» en ce qui concerne l'application des tâches de la Confédération.

Basé sur la LPN, l'IFP est sensé influencer les autres politiques sectorielles fédérales à incidence spatiale de sorte que leurs interventions prévus dans les objets IFP soient empêchés ou du moins rendus le moins dommageable possible. L'IFP a implicitement trouvé son entrée dans la loi fédérale sur l'aménagement du territoire (LAT), puisque, considérés comme objets d'importance nationale, les objets de l'IFP tom757

bent dans le champ d'application de la LAT27. L'OPCA analysera donc la congruence du programme IFP premièrement sous l'aspect de la cohérence interne à la LPN et de sa prise en compte dans différentes politiques à incidence spatiale (section 2.1) et, par la suite, dans l'optique de son adéquation avec une politique à incidence spatiale très particulière, à savoir l'aménagement du territoire(section 2.2).

Pour son analyse, l'OPCA s'est fondé sur les bases légales et les explications du Conseil fédéral concernant l'IFP, des arrêts du Tribunal fédéral, la documentation administrative, la littérature spécialisée et les études scientifiques disponibles à ce sujet. Pour compléter ces informations, l'OPCA a mené huit entretiens avec des experts de l'IFP; ces personnes sont actives à l'OFEFP, à l'ODT, à la CFNP, dans la recherche scientifique, dans les associations de protection du paysage et dans les services spécialisés des cantons. Les entretiens ont eu lieu notamment sur la base d'un questionnaire standardisé28.

2.1

Analyse du programme dans l'optique de la LPN

Conformément au mandat de la sous-commission les questions suivantes seront abordées dans l'analyse de la congruence du programme IFP dans l'optique de la LPN: ­

Quelle est la force contraignante de l'IFP, quelles sont les compétences de la Confédération dans la mise en application des objectifs de protection poursuivis par l'IFP?

­

Les objectifs de protection sont-ils formulés de façon claire et congruente?

­

La Confédération est-elle à même de surveiller l'exécution de l'IFP?

­

Quels sont les instruments prévus pour la mise en oeuvre de l'IFP?

­

Comment l'IFP, en tant qu'élément de la LPN, s'affirme-t-il dans les autres politiques à incidence spatiale?

­

L'agencement des organes administratifs intervenant dans l'application de l'IFP est-il cohérent?

Pour répondre à ces questions, l'OPCA décrira les aspects conceptuels qui soustendent l'IFP et dans un second temps, les passera au crible de la critique. Dans l'approche des points 2.1.2 à 2.1.5 l'OPCA s'est inspirée du «Schalenmodel» de la politique de Knoepfel et Weidner29 et l'a adapté aux besoins de la présente recherche.

27

28 29

758

Les objets de l'IFP ne sont pas spécifiquement mentionnés par la LAT. Néanmoins, dans l'optique des buts et des principes inscrits dans la LAT, les objets de l'IFP doivent être pris en considération en ce qui concerne le développement territorial et la détermination de l'utilisation du sol. L'aménagement du territoire peut ainsi contribuer de manière considérable à la protection des objets de l'IFP.

Pour la liste des interlocuteurs voir annexe 3.

Knoepfel et Weidner: 1982

2.1.1

Force contraignante de l'IFP

Selon l'art. 78, al. 1, de la Constitution fédérale, la protection de la nature et du patrimoine est du ressort des cantons. Toutefois, selon l'al. 2, la Confédération, dans l'accomplissement de ses tâches, prend en considération les objectifs de la protection de la nature et du paysage. Elle ménage les paysages, la physionomie des localités, les sites historiques et les monuments naturels et culturels; elle les conserve dans leur intégralité, si l'intérêt public l'exige. Ces dispositions constitutionnelles n'octroient donc à la Confédération, dans le domaine de la protection de la nature et du paysage, qu'une compétence limitée et exercent une influence déterminante sur le concept de l'IFP.

La compétence limitée de Confédération est concrétisée par la LPN. L'art. 3, al. 1, LPN oblige la Confédération, dans l'accomplissement de ses tâches, à prendre soin de ménager l'aspect caractéristique du paysage et des localités, les sites évocateurs du passé, les curiosités naturelles et les monuments historiques et, lorsque l'intérêt général prévaut, d'en préserver l'intégrité. A cet effet, le Conseil fédéral établit, après avoir pris l'avis des cantons, des inventaires d'objets d'importance nationale (art. 5, al. 1, LPN). C'est donc sur cette base légale que se fonde l'IFP.

Dans la doctrine, il est établi que l'IFP est contraignant pour la Confédération dans l'accomplissement de ses tâches30 (art. 2, 3, et 6 LPN). Il n'est pas contesté que les cantons, lorsqu'ils accomplissent des tâches de la Confédération, soient également tenus de respecter l'IFP31. En revanche, la force contraignante que revêt l'IFP pour les cantons et les communes en dehors de l'accomplissement d'une tâche de la Confédération (dans l'accomplissement de leurs propres tâches) est sujette à controverse. Si l'on se réfère au message du Conseil fédéral concernant la LPN, on lit: «Il 30

31

Selon l'art. 2 LPN, par «accomplissement d'une tâche de la Confédération» au sens de l'art. 78, al. 2, de la Constitution fédérale, il faut entendre notamment: a. l'élaboration de projets, la construction et la modification d'ouvrages et d'installations par la Confédération, ses instituts et ses établissements, par exemple les bâtiments et les installations de l'administration fédérale, les routes nationales, les bâtiments et installations des Chemins de fer fédéraux; b. l'octroi de concessions et d'autorisations, par exemple pour la construction et l'exploitation d'installations de transport et de communications (y compris l'approbation des plans), d'ouvrages et d'installations servant au transport d'énergie, de liquides ou de gaz, ou à la transmission de messages, ainsi que l'octroi d'autorisations de défrichement; c. l'allocation de subventions pour des mesures de planification, pour des installations et des ouvrages, tels que les améliorations foncières, l'assainissement de bâtiments agricoles, les corrections de cours d'eau, les installations de protection des eaux et les installations de communications.

En outre, les décisions des autorités cantonales concernant les projets qui, selon toute vraisemblance, ne seront réalisés qu'avec les subventions évoquées ci-dessus à la let. c, sont assimilées à l'accomplissement de tâches de la Confédération.

L'art. 2 LPN ne détermine pas de façon exhaustive le cadre exact dans lequel s'accomplissent les tâches de la Confédération. Selon la jurisprudence du Tribunal fédéral, les autorisations suivantes sont notamment considérées comme des tâches fédérales: les autorisations de défrichage, les autorisations en matière de droit de la pêche, les autorisations en matière de droit de protection des eaux, les autorisations d'élimination de la végétation côtière, les autorisations exceptionnelles prévues à l'art. 24 de la loi fédérale sur l'aménagement du territoire (LAT) pour autant qu'il en retourne de la question de la compatibilité de l'autorisation avec les intérêts de la protection de la nature et du patrimoine, et les autorisations relatives à la construction ou à l'exploitation de téléphériques et de téléskis.

Cf. Favre in Keller et al.: 1997, p. 171. Leimbacher in Keller et al.: 1997, p. 206.

759

ne saurait être question de dispositions d'exécution pour le premier alinéa constitutionnel (art. 78, al. 1, Cst). Ledit alinéa et la présente loi pourraient en revanche inciter les cantons à revoir leur législation sur la protection de la nature et à la développer dans la mesure du possible»32. Concernant l'IFP, la LPN s'adresserait donc de façon incitative aux cantons et non de façon contraignante. Dans ce contexte, la question qui se pose est de savoir si un projet qui porte atteinte à un objet inventorié est inadmissible lorsqu'il s'agit d'une tâche fédérale, mais pourrait être réalisé selon le bon vouloir du canton, lorsqu'il s'agit d'une tâche cantonale33.

La position selon laquelle l'IFP n'aurait aucun effet contraignant, ou tout au plus un caractère incitatif, pour les cantons semble avoir prévalu jusqu'au début des années nonante. Le peu d'égard accordé à l'IFP par les cantons et les communes jusqu'à cette époque34 montre bien qu'ils ne s'y sentaient pas liés. Actuellement cette position semble de moins en moins tenable, en particulier dans l'optique de la LAT.

Selon Leimbacher, qui vit son argumentation confirmée par un arrêt du Tribunal de dernière instance de Schaffhouse35, l'IFP a matériellement le caractère d'une conception au sens de l'art. 13 LAT, si bien que les cantons doivent en tenir compte dans le cadre de l'aménagement du territoire (art. 6, al. 4, LAT). Il faudrait donc partir du principe que l'inventaire IFP est également contraignant pour les autorités cantonales et communales en vertu de l'application et de la concrétisation du plan directeur.

Schmid36 relève qu'il est difficilement concevable que les inventaires n'aient pas ou peu d'effet protecteur dans le cadre d'accomplissement de tâches cantonales, alors que les objets inventoriés ont été approuvés par les cantons. En effet, poussée à l'extrême, cette position permettrait aux cantons de détruire des objets inventoriés dans l'accomplissement de leur propre tâche, bien qu'à leur avis, ils soient d'importance nationale et doivent donc être conservés intacts par la Confédération et les cantons dans l'accomplissement des tâches de la Confédération. En d'autres termes, l'effet de la protection de l'IFP est manifestement remis en question si son aspect contraignant n'est pas le même pour les cantons et pour la Confédération.
Schmid voit dans l'art. 6, al. 4 LAT une logique qui vise à éviter les contradictions dans l'ordre juridique et une concrétisation légale de la prescription générale de la fidélité du droit cantonal au droit fédéral.

Grâce à la LAT, l'IFP trouverait donc une certaine force contraignante pour les cantons. Ce point de vu est partagé par les experts interrogés, mais ne correspond pas à la doctrine et à la pratique dominantes. Pour la majorité de nos interlocuteurs, la force contraignante de l'IFP, telle qu'elle est perçue dans le domaine de compétence des cantons et des communes demeure très faible. Certes, les objets de l'IFP sont représentés dans la majorité des plans directeurs. Mais, leur protection ne devient réellement efficace que lorsqu'elles sont affectées en zones protégées ou lorsqu'elles sont protégées par d'autre moyen, notamment par la législation cantonale ou des contrats de droit privé. Ces mesures dépendent dans une large mesure de la bonne volonté des cantons et des communes (voir à ce sujet section 2.2). Par conséquent, en dehors de l'accomplissement de tâches de la Confédération, la pro32 33 34 35 36

760

FF 1965, Volume III, p. 96.

Leimbacher: 2001, p. 69.

Voir Hintermann & Weber: 1993.

Arrêt du 30 mars 1998 cité in Leimbacher: 2001, p. 69­70 et reproduit partiellement in URP/DEP: 1998, p. 546 ss, RJP ASPAN n° 1737.

Schmid: 1997, p. 26 ss.

tection déployée par l'IFP reste inconsistante. Or, une grande partie des altérations du paysage au sein d'objets de l'IFP est due à des développements qui tombent dans le domaine de compétence des cantons et des communes.

Les inventaires fédéraux plus récents qui ne sont pas fondés sur l'art. 5 LPN, mais sur les art. 18a, 23b et 23c LPN37, ne sont pas liés à l'accomplissement d'une tâche de la Confédération. Ils comportent surtout un aspect contraignant pour les cantons et les communes. En effet, c'est à ces derniers qu'il incombe de veiller à la protection des zones ainsi protégées. En outre, ces nouveaux inventaires contiennent plus d'informations sur leurs objets et attribuent des tâches claires aux cantons.

Ce rapport reviendra sur la problématique de l'aspect contraignant de l'IFP, au niveau des cantons et les communes, dans la section 2.2 qui traitera du lien entre l'IFP et l'aménagement du territoire. Les sections suivantes examinent les autres éléments conceptuels de l'IFP.

2.1.2

Les objectifs de préservation

2.1.2.1

La formulation des objectifs

Les objectifs définissent le résultat à atteindre par une politique. Il s'agit du noyau autour duquel les autres éléments, sensés réaliser la politique, s'articulent. Les buts visés par l'IFP sont décris à l'art. 6, al. 1, LPN: «L'inscription d'un objet d'importance nationale dans un inventaire fédéral indique que l'objet mérite spécialement d'être conservé intact ou en tout cas d'être ménagé le plus possible, y compris au moyen de mesures de reconstitution ou de remplacement adéquates».

Cette disposition ne permet pas de déterminer ce qui dans un objet de l'IFP doit être concrètement conservé intact ou du moins ménagé le plus possible. Selon le message du Conseil fédéral relatif à la LPN: «par les mots il faut entendre que la protection à assurer selon l'inventaire doit l'être dans toute son étendue et que les dangers éventuels doivent être prévenus. L'inscription d'un objet ne signifie cependant pas que rien ne puisse être changé à son état. Ce qui ne doit pas être altéré, c'est l'état d'un objet, considéré d'un point de vue général de la protection de la nature et du paysage»38. Le commentaire accompagnant l'IFP, particulièrement le point n° 3 contenu de l'inventaire ainsi que le point n° 4 importance et portée de l'inventaire, n'est guère plus précis concernant l'objectif concrètement visé. Le DFI a en outre publié pour chaque objet de l'IFP une feuille d'inventaire qui décrit notamment «les raisons de son importance nationale». Ainsi, par exemple pour l'objet IFP n° 1702 «Lac de Tannay», on lit: «Importance: Lac de montagne situé au centre d'un paysage alpin impressionnant. Riche flore alpine comprenant des raretés.». Ces explications sont trop laconiques pour permettre de dégager des éléments spécifiques qui ne devraient pas êtres altérés. En résumé, les informations contenues dans les textes juridiques ne sont pas suffisamment explicites et spécifiques pour savoir quels éléments de l'objet de l'IFP doivent concrètement être conservés intacts. En se basant sur ces descriptions, il s'avère donc difficile de juger si une intervention porte atteinte au principe de maintenir intact l'objet de l'IFP.

37 38

Voir Annexe 2: Graphique: L'IFP dans la législation sur la protection de la nature et du paysage.

FF 1965, volume III, p. 93 à 117.

761

Les autorités chargées de prendre des décisions dans le cadre de procédures administratives sont alors tenues de concrétiser et de différencier les objets protégés, afin d'en dégager les objectifs de la protection. Sur cette base, elles peuvent ensuite déterminer si et dans quelle mesure la protection (à savoir de conserver intact ou du moins de ménager le plus possible) s'applique. En effet, selon le Tribunal fédéral «sind die möglichen Beeinträchtigungen an den verschiedenen Schutzzielen zu messen, die in den gesondert veröffentlichten Beschreibungen zu den Gebieten des Inventars umschrieben sind»39. Pour concrétiser les objectifs de protection, les autorités doivent se procurer elles-mêmes les informations et les analyser. Même si elles doivent faire appel à des services spécialisés, il s'agit souvent d'une tâche ardue. D'ailleurs, selon un de nos interlocuteurs, certaines autorités (surtout au niveau cantonal) qui sont confrontés de façon ponctuelle avec l'application des dispositions relatives à l'IFP, manqueraient de ressources et d'expérience pour définir correctement ce qui doit être protégé. Sans une concrétisation correcte des buts, il n'est pas possible de tenir convenablement compte de l'IFP dans la pesée des intérêts. La qualité et le bien-fondé des décisions des autorités compétentes en matière d'IFP dépendent donc dans une large mesure des informations disponibles et de la compétence de leurs analyses. Par ailleurs, comme le note un de nos interlocuteurs, les autorités cantonales et communales qui seraient prêtes à mettre en oeuvre l'IFP, indépendamment de la question de la force contraignante, n'y trouvent pas d'objectifs de protection suffisamment claires pour conduire leur démarche. De ce point de vue, l'IFP n'encourage pas sa mise en application par les autorités locales dans leur politique de protection du paysage.

Certes, les arrêts du Tribunal fédéral, les décisions des tribunaux administratifs, les avis de la CFNP et certaines études ont contribué à la concrétisation des buts de protection. Toutefois, ce travail a été effectué au cas par cas et non de façon systématique pour tous les objets de l'IFP. Selon nos interlocuteurs le manque de définition des buts de protection constitue la plus grande entrave à la bonne mise en application de l'IFP. A noter que les inventaires
fédéraux plus récents, notamment l'ISOS (également basé sur l'art. 5 LPN), définissent les objectifs de protection de manière beaucoup plus concrète et sont donc plus immédiatement applicables.

Les autorités fédérales semblent conscientes du problème. En effet, les objets les plus récemment inventoriés, à savoir en 1998, bénéficient d'une description plus précise et plus différenciée dans la feuille d'inventaire que la première génération d'objets inventoriés en 1977. Loin d'être parfaites, ces descriptions plus récentes facilitent tout de même la concrétisation des buts de protection. D'ailleurs, un de nos interlocuteurs rend attentif au fait qu'un paysage serait trop complexe pour être défini de façon précise et une fois pour toute.

39

762

ATF 127 II 273, ATF 123 II 263.

En outre, dans la Conception «Paysage suisse»40 (CPS) une mesure intitulée «examen des stratégies et des objectifs de protection dans les objets IFP»41 prévoit de mieux formuler les objectifs de protection et d'élaborer des stratégies de protection claires pour les différents objets. L'OFEFP s'est ainsi engagé, en collaboration avec certains cantons et certaines régions, dans la concrétisation des objectifs de protection de certains objets de l'IFP. La spécification des buts de protection aura lieu, dans une première phase, dans le cadre de la planification directrice des cantons du Jura et Bâle-Campagne, du projet «IFP ­ pays Suisse»42 ou encore en relation avec des tâches de la Confédération à accomplir dans le canton de Saint-Gall. Sur la base de ces travaux, l'OFEFP prépare une révision des descriptions des objets inventoriés dans l'IFP.

2.1.2.2

Recoupement d'objectifs de protection

Il arrive qu'une zone donnée soit couverte par plusieurs inventaires fédéraux dont les objectifs de protection et l'effet contraignant diffèrent (comme le cas d'un bas marais inventorié dans un objet IFP). En cas de recoupement, Leimbacher estime en substance que, dans la mesure où la protection ne s'en trouve pas automatiquement renforcée, il faut au moins appliquer les dispositions de protection les plus strictes.

Un nivellement vers le bas, c'est-à-dire vers l'application des dispositions de protection les moins contraignantes n'est pas autorisée43. La situation juridique semble donc claire. Selon un de nos experts, le résultat des ces recoupements est que dans certaines zones, il règne des restrictions plus sévères que dans les zones adjacentes, alors qu'il s'agit en fait du même espace paysager. Le recoupement de plusieurs inventaires fédéraux avec des degrés de protection différents pose également un 40

41 42

43

OFEFP et al, (éd): 1998, Conception «Paysage suisse» (CPS), partie «rapport», mesure 7.12. Ce document a été approuvé par le Conseil fédéral le 19 décembre 1997 en tant que conception au sens de l'art. 13 de la LAT. La conception «Paysage suisse» est composée de deux parties: conception et rapport. La première défini les objectifs généraux «Nature et paysage», qui constituent une orientation générale à long terme pour les activités de la Confédération ayant une incidence sur le territoire et déterminent les objectifs sectoriels pour treize politiques de la Confédération. La Conception est contraignante pour les services fédéraux compétents. La prise en compte des objectifs de la conception par les cantons dans leur planification directrice est laissée à leur appréciation. La seconde partie, intitulée rapport, détermine les mesures à prendre pour la réalisation et la mise en oeuvre de la conception. Les services fédéraux compétant sont invités à concrétiser, à mettre à jours et à réaliser les mesures prévues dans le cadre de leurs priorités, de leurs effectifs et des crédits à disposition.

CPS, 1998, p. 71.

La mesure 3.02 de la CPS charge en substance l'OFEFP de trouver des synergies entre tourisme et protection de la nature et du paysage. Le maintien et l'exploitation durable des paysages ruraux revêtent une importance particulière pour le tourisme suisse. Les objets des inventaires fédéraux (IFP, ISOS, IVS), en particulier, constituent des attractions touristiques importantes. Des projets pilotes ont permis de montrer comment l'exploitation touristique de tels objets peut être améliorée sans remettre les objectifs de protection en atteinte. Les charges existantes peuvent même être réduites et de nouvelles qualités du paysage peuvent même être mises en valeur. Le projet «IFP ­ pays Suisse» entend créer, dans un premier temps, des nouveaux produits touristiques dans certains objets inscrits à l'IFP tout en respectant les objectifs de protection, en minimisant les atteintes existantes et en mettant de nouvelles qualités du paysage en valeur. Il est apparu que quatre régions de l'IFP répondaient aux attentes et se prêtaient à une mise en valeur touristique. Des demandes de soutien financier correspondantes ont été présentées à Regio Plus.

Leimbacher in Keller et al.: 1997, p. 208.

763

problème de communication: les autorités locales sont parfois irritées par la multiplicité inventaires dont l'effet contraignant n'est pas clair et qui se chevauchent géographiquement tout en poursuivant des buts différents. Parfois, ils les perçoivent comme cause de coûts et de restrictions de leur activité et comme imposés par la Confédération de façon non coordonnée et confuse. Il va sans dire que la propension des autorités locales à mettre en application certains ces inventaires en souffre.

2.1.3

Eléments évaluatifs

Les éléments évaluatifs d'une politique constituent des indications sur les données et méthodes à utiliser pour déterminer le degré de réalisation des objectifs. Ils peuvent être complétés par des informations pour l'interprétation de ces données. Les éléments évaluatifs sont nécessaires pour contrôler si les effets visés sont intervenus et, le cas échéant, de prendre les mesures correctives nécessaires.

Selon la plupart des experts interrogés, des éléments évaluatifs substantiels font cruellement défaut dans la législation relative à l'IFP. Ce fait est lié au manque de précision dans la formulation des buts de protection. En effet, il est difficile d'établir des indicateurs pour mesurer la réalisation d'un objectif si ce dernier n'est pas clairement énoncé.

L'IFP par l'intermédiaire de la LPN, ne vise pas à empêcher toute influence humaine dans un objet de l'IFP, mais à ce que d'éventuelles interventions soient examinées avec un soin particulier. Il ne vise pas un certain résultat final sur le terrain, mais cherche à influencer ou à modérer l'impact des politiques ayant une incidence sur les objets de l'IFP. L'efficacité de l'IFP ne se mesure donc pas seulement en observant les atteintes portées au paysage, mais également en tenant compte des interventions qui ont été atténuées, voire empêchées par l'IFP. Cet effet préventif, dont plusieurs experts ont fait mention, est extrêmement difficile à mesurer, car il laisse peu de trace.

Une autre raison pour laquelle le programme IFP ne contient que peu d'éléments évaluatifs réside dans le caractère propre de chaque objet de l'IFP et dans la spécificité des pressions auxquelles il est soumis. Par exemple, si la forêt constitue un élément central déterminant l'unicité d'un certain objet de l'IFP, dans un autre la forêt peu s'avérer être un élément secondaire et ne pas être l'objectif principal de la protection. Un objet de l'IFP proche d'une agglomération est plus exposé à des interventions qu'un objet dans une zone inaccessible. Pour déterminer précisément le degré de réalisation des objectifs de l'IFP, il est donc nécessaire de prendre en compte de façon différentiée la spécificité de l'objet.

Le contrôle institutionnel souffre du manque d'éléments évaluatifs substantiels pouvant mesurer les effets de l'IFP et de la difficulté de les développer. Pour
l'instant, l'OFEFP a fait procéder de façon ponctuelle à l'évaluation de différents aspects de l'IFP. Il s'agit, en 1993, d'une évaluation des effets de l'IFP44 et, en 1997, d'une évaluation de la mise en oeuvre45. Bien que ces deux travaux ne furent pas publiés, certaines améliorations dans le bilan des effets de l'IFP et la mise en oeuvre de l'IFP ont pu être constatées (voir chap. 1, section 1.4 et chap. 3). De plus, 44 45

764

Hintermann & Weber AG: 1993. Voir également chap. 1.

Hintermann & Weber AG: 1997. Voir également chap. 3.

une étude intitulée «Monitoring der Antennenstandorte in der Schweiz» mandatée par l'OFCOM, l'OFEFP et l'ODT aborde la question de l'édification d'antennes de téléphonie mobile notamment sur des zones de l'IFP46.

Un monitoring ou une surveillance à long terme de l'IFP, même si certaines données statistiques ou cartographiques existent, s'avère éminemment plus difficile et plus coûteux, que par exemple, un monitoring de la biodiversité ou encore un monitoring d'une politique spécifique (comme la construction d'antennes pour la télécommunication mobile). D'ailleurs, le BUWAL ne prévoit pas d'observations limitées au périmètre des objets de l'IFP.

La mesure 7.10 de la CPS prévoit pourtant la mise en place d'un système de surveillance de la diversité biologique et des paysages. A cet effet, l'OFEFP a lancé le programme «Monitoring de la biodiversité en Suisse» (BD) qui doit permettre de dresser des constats précis sur l'état et l'évolution de la biodiversité en Suisse47. La biodiversité constitue qu'un facteur parmi une large palette de facteurs qui entre en ligne de compte dans la préservation d'un objet de l'IFP. De plus, les surfaces de références, utilisées comme échantillons pour le BD, sont trop espacées les unes des autres pour permettre de mesurer efficacement la biodiversité dans les objets de l'IFP. A noter que cette surveillance à long terme s'étend sur toute la surface du territoire suisse et pas spécifiquement sur l'IFP. Les études portant sur les modifications d'éléments du paysage (haies, bosquets, routes, bâtiments etc.) qui ont jusqu'ici été publiées à trois reprises par l'OFEFP et l'Office fédéral du développement territorial (ODT) sous le titre «Paysages sous pression» (1991: premier relevé, 1994: première suite, 2001: deuxième suite) s'étendent également à l'ensemble du territoire suisse48. Pour d'autres inventaires, une surveillance spécifique à long terme existe. Il s'agit par exemple du suivi des zones alluviales et de la protection des marais effectué par l'OFEFP. Ces observations ont notamment mené à un programme de revitalisation de certaines zones. Les mesures nécessaires sont entreprises par les cantons qui touchent alors des subsides fédéraux à cette fin.

L'absence d'objectifs concrets, une protection qui n'est pas absolue, des objets de l'IFP géographiquement très
différents, un effet préventif difficilement mesurable et une mise en oeuvre impliquant une chaîne de causalité complexe constituent les raisons principales pour lesquelles les éléments évaluatifs substantiels manquent dans le programme. Jusqu'à présent, le suivi du programme IFP s'est fait de façon ponctuelle, aucun monitoring ou surveillance à long terme du paysage n'existe spécifiquement pour les zones de l'IFP. Une optimisation des effets de l'IFP ne se fait donc pas de façon continue, mais par intermittence au gré de contrôles occasionnels.

46 47

48

OFCOM, OFEFP, ODT: 2003.

La tâche de surveillance de l'évolution de la diversité biologique découle également de la Convention sur la diversité biologique (RS 0.451.43) et des lois fédérales sur la protection de l'environnement et sur la protection de la nature et du paysage qui prescrivent un tel contrôle. La tâche essentielle est de révéler l'évolution de la diversité du monde vivant (plantes, animaux, habitats) en Suisse. La Suisse est l'un des premiers pays au monde à dresser un inventaire systématique de sa diversité biologique.

Le projet «Paysage sous pression» comprend la surface de la Suisse et se base sur un échantillonnage du territoire, l'échantillon couvre chaque fois un seizième par carte à l'échelle 1:25 000.

765

2.1.4

Aspect interpolitique et agencement des autorités

Les sections suivantes sont consacrées aux mesures prévues par la LPN pour atteindre les buts visés par l'IFP, à la coordination de l'IFP avec d'autres politiques et à l'agencement des différents acteurs chargés de la mise en oeuvre.

2.1.4.1

Coordination de la politique de l'IFP avec les politiques à incidence spatiale de la Confédération

L'analyse du programme de l'IFP doit tenir compte du fait que la politique en matière de paysage interagit avec un grand nombre de politiques à incidence spatiale dont les objectifs sont parfois contradictoires (spécialement dans des domaines comme l'énergie ou les infrastructures de transport). Pour pouvoir atteindre ses objectifs, l'IFP doit donc s'affirmer face à ces politiques. Le succès de l'IFP en tant qu'inventaire d'objets à protéger dépend donc pour une bonne part de son intégration dans le contexte des autres politiques fédérales à incidence spatiale et de la coordination entre les divers secteurs concernés. Avant de décrire l'agencement des autorités de mise en oeuvre de l'IFP, nous commençons par examiner si et le cas échéant comment les bases légales des plus importantes politiques fédérales à incidence spatiale tiennent compte de l'inventaire fédéral. Le fait qu'elles en tiennent compte et la manière dont elles en tiennent compte constitue une échelle permettant de mesurer la coordination ­ prévue par la loi ­ des politiques à incidence spatiale avec les objectifs de l'IFP.

En se fondant sur la CPS, l'OPCA a identifié un certain nombre de domaines politiques dans le contexte de la LPN dont l'exécution peut avoir des effets sur les objets inscrits à l'IFP: ­

constructions et installations fédérales

­

énergie

­

sport, loisirs et tourisme

­

défense nationale

­

agriculture

­

navigation aérienne

­

aménagement du territoire

­

politique régionale

­

transports

­

forêts

­

ouvrages hydrauliques

­

utilisation de la force hydraulique

Dans ces secteurs, l'OPCA a identifié 62 textes légaux (lois, ordonnances et arrêtés fédéraux) importants du point de vue de l'exécution de l'IFP. Six de ces textes (10 %) contiennent des renvois explicites à l'IFP, quatre (6 %) renvoient aux inventaires de protection nationaux sans plus de précision, 43 (69 %) se réfèrent en termes généraux aux intérêts en matière de protection des paysages, de protection de la 766

nature et du paysage ou d'aménagement du territoire. Neuf textes légaux ayant des effets sur l'organisation du territoire (15 %) ne se réfèrent ni à l'IFP, ni à la protection des paysages, à la protection de la nature et du paysage ou à l'aménagement du territoire. Ainsi, la loi sur l'aide aux investissements dans les régions de montagne et l'ordonnance concernant l'aide aux investissements dans les régions de montagne (respectivement RS 901.1 et RS 901.11) ou l'ordonnance concernant la gestion de l'immobilier et la logistique de la Confédération (RS 172.010.21) et ne contiennent aucun renvoi correspondant. L'absence de référence à l'IFP dans les textes examinés ne prouve certes pas que la politique concrète ne tient pas compte des intérêts de l'inventaire des objets protégés. Cela étant, l'analyse montre tout de même que les bases légales des politiques mentionnées ne prévoient pas de prise en compte systématique de l'IFP et de la protection des paysages, ce qui est plutôt de nature à réduire la coordination intersectorielle à l'échelon de l'exécution de ces politiques.

En majorité, les experts entendus par l'OPCA confirment l'impression que l'IFP n'est pas intégré de manière optimale dans les bases légales des autres politiques de la Confédération qui exercent aussi une influence sur les paysages. A leur avis, les divers domaines de la politique fédérale sont fortement imprégnés par une vision sectorielle, ce qui a pour conséquence que les intérêts de l'IFP sont par trop négligés par de nombreuses politiques sectorielles. Les experts estiment que les conditions et les incitations financières donnant plus de poids à l'IFP font défaut dans les domaines de l'agriculture et de la politique régionale. Selon l'avis d'autres experts, la plupart des politiques fédérales à incidence spatiale se réfèrent d'une manière générale aux intérêts de protection supérieurs de l'IFP, mais comme les objectifs de l'inventaire fédéral ne sont pas clairs, les renvois correspondants restent souvent sans effet en pratique. Lors de la pesée d'intérêts par l'administration, les intérêts en matière d'exploitation sont souvent beaucoup plus concrets et plus nombreux que les objectifs de l'IFP, raison pour laquelle les intérêts en matière de protection des paysages ne parviennent souvent pas à s'imposer. Plusieurs experts
ont également souligné que la loi fédérale du 18 juin 1999 sur la coordination et la simplification des procédures de décision ainsi que l'ordonnance du 22 octobre 1997 sur la coordination des tâches de la Confédération relevant de la politique d'organisation du territoire (RS 709.17) améliorent la coordination entre les services fédéraux concernés lors de l'évaluation de projets importants ayant une incidence sur les objets inscrits à l'IFP, ce qui lui donne un poids plus important.

2.1.4.2

L'autorité de décision

Concrètement, l'exécution de l'IFP dans le domaine de compétences de la Confédération s'accomplit à travers les procédures d'autorisation, d'attribution de subventions ou d'octroi de concessions. Pour ce faire, les services fédéraux dont les activités ont une incidence spatiale doivent intégrer les dispositions relatives à l'IFP dans leur procédure de décision. L'autorité de décision (ou autorité directrice) mène la procédure. Toutefois, elle est tenue de consulter l'OFEFP notamment quant pour savoir si leur décision pourrait affecter l'intégrité d'un objet figurant à l'IFP et si elle nécessite une expertise de la CFNP. Le cas échéant, après avoir pris en considération la position de la commission, l'autorité directrice procède à la pesée des intérêts en jeu et rend une décision. La décision peut être contestée auprès d'une instance de recours. En première instance, il s'agit en général la Commission de recours

767

DETEC, dont la décision peut être contesté au moyen d'un recours de droit administratif devant le Tribunal fédéral (TF).

Comme vu précédemment, l'OPCA a dénombré pas moins de treize politiques sectorielles de la Confédération49 et une vingtaine de services fédéraux50 ayant une incidence spatiale. Les décisions qui ont un impact sur l'IFP sont donc éparpillées dans différents offices et départements, dans lesquels l'IFP n'est qu'un aspect parmi une multitude d'autres. Selon plusieurs de nos experts, une approche interdépartementale et globale des questions ayant trait à l'IFP fait défaut. Il n'existe pas, par exemple, de plate-forme institutionnelle réunissant les offices concernés par l'IFP; les contacts entre les autorités s'établissent au cas par cas. La coordination entre les autorités directrices dépend ainsi plus de personnes que d'un processus institutionnalisé.

Pour garantir une prise de décision fondée et ainsi renforcer la protection conférée par l'IFP, la LPN prévoit une obligation pour l'autorité de décision de recourir à l'avis des services spécialisés, notamment l'OFEFP et la CFNP.

2.1.4.3

L'Office fédéral de l'environnement, des forêts et du paysage

Si une loi prévoit, pour des projets concernant par exemple des constructions ou des installations, la concentration de plusieurs décisions entre les mains d'une seule autorité, cette dernière consulte, selon l'art. 3, al. 4, LPN et l'art. 62a LOGA51, les autorités fédérales concernées avant de rentre sa décision. Dans le cas de la LPN, il s'agit de l'OFEFP, de l'OFC et de l'Office fédéral des routes (OFROU).

L'OFEFP dispose donc désormais d'un droit d'être consulté pour toutes les affaires touchant l'IFP dans l'accomplissement de tâches fédérales. En effet, dans le cadre de sa prise de position, la division paysage de l'OFEFP détermine si l'accomplissement d'une tâche de la Confédération pourrait altérer un objet de l'IFP et, le cas échéant, indique si une expertise doit être demandée à la CFNP.

49

50

51

768

Selon la CPS: Constructions fédérales/énergie/sport, loisir et tourisme/défense nationale/ agriculture/aviation civile/protection de la nature, du paysage et du patrimoine culturel/ aménagement du territoire/développement régional/transports / forêts / aménagement des cours d'eau/utilisation des cours d'eau/utilisation de la force hydraulique.

Selon la CPS: Ecole fédérale de sport de Macolin (EFSM)/Inspection fédérale des installations à courant fort (IFICP)/Office fédéral de l'agriculture (OFAG)/Office fédéral de l'aviation civile (OFAC)/Office fédéral de l'énergie (OFEN)/Office fédéral de l'environnement, des forêts et du paysage (OFEFP), Direction fédérale des forêts, Divisions nature et paysage, Divisions substances, sol et biotechnologies, Division protection des eaux et pêche, Division déchets, Division lutte contre le bruit/Office fédéral de la culture (OFC)/Office fédéral des constructions et de la logistique (OFCL)/Office fédéral des eaux et de la géologie (OFEG), Service géologique national, Service hydrologique national, Économie des eaux, Utilisation des ressources hydrauliques, Protection contre les dangers naturels./Office fédéral des routes (OFROU)/Office fédéral des transports (OFT)/Office fédéral du développement territorial (ODT)/Secrétariat général du Département fédéral de la défense, de la protection de la population et des sports (DDPS)/Sercrétariat d'Etat à l'économie (seco).

Ces dispositions sont introduite par la nouvelle la loi fédérale sur la coordination et la simplification des procédures de décision.

L'OFEFP défend les intérêts de protection de l'IFP, mais n'a pas de pouvoir décisionnel. En cas de désaccord avec l'OFEFP, l'autorité directrice mène un entretien en vue d'éliminer les divergences. Si l'élimination des divergences réussit, le résultat des discussions est contraignant pour l'autorité directrice. Si le désaccord subsiste, la décision finale incombe à l'autorité directrice qui, en cas de décision contraire à l'avis de l'OFEFP, doit justifier son choix. Les possibilités d'intervention de l'OFEFP sont donc limitées. Souvent, dans cette procédure administrative, il est le seul représentant des intérêts de protection face à un grand nombre d'offices représentant les intérêts des exploitants.

2.1.4.4

La Commission fédérale pour la protection de la nature et du patrimoine

La CFNP est une commission extraparlementaire dont la tâche principale consiste à expertiser des projets découlant d'une tâche de la Confédération au sens de l'art. 2 LPN et qui pourraient porter atteinte à un objet figurant dans un inventaire fédéral selon l'art. 5 LPN. La CFNP est un organe indépendant composé de 15 membres représentant diverses branches de la protection de la nature, du paysage et du patrimoine, notamment la biologie, la géographie, l'aménagement du territoire et le droit.

L'expertise de la CFNP est d'autant plus importante que les objets de l'IFP et les objectifs de protection sont décrits de façon très sommaire et permettent une grande marge d'interprétation. D'ailleurs, l'art. 7 LPN stipule qu'une expertise de la commission est requise exclusivement pour les inventaires selon art. 5 LPN, c'est-à-dire qu'une expertise n'est donc pas nécessaire pour les inventaires selon les art. 18a ou 23a­c LPN, dont les objets sont décrit plus précisément et qui interdisent toute intervention ou qui limitent strictement la marge de manoeuvre de l'autorité de décision.

L'art. 7 LPN prévoit que si l'accomplissement d'une tâche fédérale incombe à la Confédération, alors l'OFEFP, l'OFC, ou l'OFROU, selon le domaine de compétence, détermine s'il est nécessaire qu'une expertise soit établie par la commission visée à l'art. 25, al. 1, LPN. En matière, d'IFP il s'agit de la CFNP. En revanche, si la tâche fédérale incombe au canton, c'est le service cantonal visé à l'art. 25, al. 2, LPN (service cantonal chargé de la protection de la nature et de la protection du paysage) qui détermine la nécessité d'une expertise (art. 7, al. 1, LPN). Ces dispositions sont en vigueur depuis le 1er janvier 2000 et relèvent de la nouvelle loi fédérale sur la coordination et la simplification des procédures de décision.

Selon les renseignements obtenus auprès de la CFNP et de l'OFEFP, cette nouvelle procédure s'est avérée concluante en ce qui concerne l'accomplissement de tâches fédérales par la Confédération. Le tri des cas se fait donc par la division paysage de l'OFEFP, qui ne consulte la CFNP qu'en cas de doute. Selon la CFNP, la pratique de triage de la division paysage est la même que celle qu'effectuait la CFNP précédemment lorsqu'elle était encore compétente pour cette question. Par conséquent, le nombre de
cas finalement examinés par la CFNP est resté constant.

Concernant l'accomplissement de tâches de la Confédération par les cantons, dont la décision quant à l'expertise de la CFNP incombe au service spécialisé cantonal, la CFNP remarque une baisse du nombre de cas qui lui sont soumis. Cette tendance est surtout due au fait que les cas sur lesquels elle devait se prononcer pour des raisons formelles (respect de l'obligation de consulter la commission selon l'ancien droit) et 769

qui n'avait pas de répercussion sur l'IFP ne lui sont plus soumis. La CFNP précise toutefois que le nombre de projets importants sur lesquels, elle doit se prononcer a plutôt augmenté. La commission n'a cependant aucune vue d'ensemble, que ce soit du point vue qualitatif ou quantitatif, sur les décisions prises au niveau cantonal en ce qui concerne l'accomplissement de tâche de la Confédération. Elle n'est donc pas à même de déterminer si tous les cas pouvant porter atteinte à un objet IFP lui sont soumis, ou en encore si la marge de manoeuvre dont dispose l'autorité cantonale pour le triage des cas joue en faveur ou de défaveur de la préservation d'un objet de l'IFP. La CFNP constate cependant que certains cantons lui présentent régulièrement des projets pour examen, alors que d'autres n'en présentent jamais.

Si l'accomplissement d'une tâche de la Confédération risque d'altérer sensiblement un objet inscrit dans un inventaire fédéral en vertu de l'art. 5 LPN ou soulève des questions de fond, la commission établit automatiquement une expertise à l'intention de l'autorité de décision (art. 7, al. 2, LPN).

L'expertise de la CFNP indique alors, si l'objet doit être conservé intact ou de quelle manière il doit être ménagé. Le cas échéant, elle indique également quelles mesures de reconstitution ou de remplacement sont à envisager. Elle n'a pas force contraignante, mais si l'autorité de décision ne suit pas l'avis de la commission, elle doit apporter une raison fondée52.

2.1.4.5

Conclusion sur l'aspect interpolitique et agencement des autorités

Pour Leimbacher ce système de prise de décision est satisfaisant, lorsqu'il s'agit d'évaluer de grands projets par exemple, des antennes radios, des décharges ou des carrières. Par contre, pour de petites interventions sur un objet de l'IFP, à savoir des interventions sur des éléments périphériques et qui ne menacent pas les aspects centraux de l'objet de l'IFP, la pratique a montré que les autorités compétentes nient parfois indûment la possibilité d'une atteinte et ne demandent pas l'avis de la commission53. L'étude de Hintermann et Weber54 confirme partiellement cette constatation: la qualité des prises de position du service spécialisé de certains cantons laisserait encore à désirer. L'OFEFP affirme demander l'avis de la CFNP au moindre doute quant à l'atteinte portée à l'objet de l'IFP. A noter que le dépôt d'un recours au sens de l'art. 12 LPN est possible au cas où, de façon indue, l'avis de la CFNP n'aurait pas été demandé.

Le plus souvent, l'autorité de décision est également l'autorité spécialisée dans la politique sectorielle concernée et représente les intérêts relatifs à l'exploitation du sol. Les autorités spécialisées défendant le point de vue de la protection du paysage (OFEFP et CFNP) n'ont pas de compétence décisionnelle; elles n'ont qu'un droit d'être entendues et de faire des propositions. Elles ne fournissent donc qu'une aide à la décision. Alors que, comme vu précédemment, la décision finale incombe à l'autorité directrice. Cette répartition des compétences en faveur des autorités représentant les intérêts de l'utilisation du sol et en défaveur celles défendant sa protection peut influencer la pesée des intérêts.

52 53 54

770

Voir à ce sujet l «contrôle de la mise en oeuvre» au chap. 3 du présent travail.

Leimbacher in Keller et al.: 1997, p. 223­224.

Hintermann & Weber: 2003b. Voir également à ce chap. 3 du présent travail.

Du point de vue de la protection du paysage, le fait que les autorités de protection n'ont pas la compétence de prendre la décision finale pourrait être considéré comme un désavantage. Dans une perspective plus pragmatique, la prise de décision par l'autorité responsable de la politique sectorielle peut constituer un avantage, en raison de la plus grande acceptation qu'elle génère dans les milieux impliqués.

2.1.5

Mécanismes déterminant l'admissibilité d'une intervention

2.1.5.1

Etapes de la décision

Afin d'établir l'admissibilité d'une intervention et de préserver l'objet le plus possible sans pour autant y empêcher tout développement, l'autorité de décision, appuyée par l'OFEFP et le cas échéant la CFNP, franchit les étapes suivantes dans son processus de décision: 1.

Elle spécifie l'objet de l'IFP concerné et définit ses buts de protection, avec les problèmes que cette opération comporte.

2.

Elle détermine si le comportement ou l'exploitation envisagée porte atteinte au domaine protégé.

3.

Le cas échéant, elle examine les atteintes probables que subira l'objet protégé seront examinées.

4.

Si ces atteintes ne dépassent pas une intensité minime (à définir de cas en cas) et conservent l'objet intact malgré l'intervention, celle-ci pourrait s'avérer admissible. Dans certains cas, des atteintes minimes à un objet IFP sont admissibles, sans qu'aucun intérêt national ne justifie l'intervention.

Toutefois, l'intérêt de l'intervention doit être supérieur à l'intérêt de la préservation. Dans ce cas, l'intervention doit respecter le précepte de ménager le plus possible l'objet de l'IFP.

5.

Par contre, si l'intervention devait être plus conséquente et entraîner des atteintes graves (atteintes à des domaines essentiels de la protection) ne permettant pas que l'objet puisse être conservé intact, l'intervention est en principe inadmissible.

6.

Elle peut exceptionnellement être tolérée si un intérêt national au moins équivalent à l'intérêt de la préservation existe. L'intervention doit toutefois toujours respecter le précepte de ménager le plus possible l'objet de l'IFP.

7.

Le principe selon lequel l'objet doit être préservé le plus possible signifie que l'autorité délivrant l'autorisation doit se limiter en ampleur et en aménagement au minimum absolument nécessaire. Ainsi, les éléments tels que la recherche d'emplacements alternatifs et l'évaluation leurs avantages et inconvénients, ainsi que les intérêts de l'aménagement du territoire et de la protection de la nature et du paysage, etc. doivent être pris en compte dans la pesée des intérêts.

771

2.1.5.2

Pesée des intérêts

Pour établir si une exception à la règle de conserver intact un objet de l'IFP est admissible, l'autorité compétente aura recours à une pesée des intérêts. Le but de cette procédure de droit est de «déterminer, dans un cas concret, quels sont les intérêts prédominants, c'est-à-dire, par exemple, si l'intérêt général à conserver intact paysage est plus grand que l'intérêt également général à un approvisionnement sûr un énergie, ou si l'on peut déroger à la conservation (et construire la ligne à haute tension).»55 La pondération des intérêts en présence a donc une importance primordiale dans la mise en application de l'IFP. Pour déterminer l'admissibilité d'une atteinte minime, l'art. 3 LPN fait implicitement appel à une pesée des intérêts libre: l'intérêt de l'intervention doit être supérieur à l'intérêt de préservation. Pour déterminer l'admissibilité d'une atteinte grave, l'art. 6, al. 2, LPN prévoit une pesée des intérêts restrictive, à savoir un intérêt national au moins équivalent à l'intérêt à la préservation doit exister.

2.1.5.3

Conclusion sur la procédure déterminant l'admissiblité

Le fait que certaines interventions minimes soient plus facilement admissibles, c'està-dire recevable sans la présence d'un intérêt national, n'est pas sans risque. La somme des interventions minimes dans un objet de l'IFP pourrait finalement aboutir à une altération importante de ce dernier. Les décisions relatives à l'admissibilité d'une intervention se prennent dans une vingtaine de services fédéraux différents.

Aussi, n'y a-t-il pas de base de données répertoriant chacune des interventions précédemment admises dans l'objet de l'IFP. Ainsi, les autorités de décision ne disposent pas de vue d'ensemble des atteintes, pas plus d'ailleurs que la CFNP ou que l'OFEFP pour leur fonction de conseil. Les altérations précédentes ne sont pas systématiquement prises en considération dans l'appréciation de l'admissibilité d'une intervention.

Cette procédure est lourde. Les projets à examiner sont souvent vastes et compliqués. Les intérêts en présence multiples et contradictoires. Le poids à attribuer à un intérêt particulier n'est pas défini précisément. La description des objectifs de protection est floue. La pondération des intérêts est donc très complexe et très exigeante. Le risque que certaines autorités manquent d'expérience et de compétence pour effectuer correctement ce travail existe. Il s'agit toutefois prix à payer pour une protection des objets de l'IFP qui n'est pas absolue, mais appréciée au cas par cas.

Ces problèmes ne se posent pas pour les marais d'une beauté particulière et d'importance nationale inscrits dans les inventaires sur les marais. Ces derniers bénéficient de la protection de l'art. 78, al. 5, de la Constitution (article Rotenthurm) et profitent d'une interdiction absolue de toute modification: «Les marais et les sites marécageux d'une beauté particulière qui présentent un intérêt national sont protégés. Il est interdit d'y aménager des installations ou d'en modifier le terrain. Font exception les installations qui servent à la protection de ces espaces ou à la poursuite de leur exploitation à des fins agricoles.». A noter en passant que cette interdiction constitutionnelle a été atténuée par le législateur. En effet, l'art. 23d, al. 1, LPN, 55

772

Leimbacher: 1993, p. 18.

contient une formulation moins stricte dans laquelle il n'est plus question d'interdiction: «L'aménagement et l'exploitation des sites marécageux sont admissibles, dans la mesure où ils ne portent pas atteinte aux éléments caractéristiques des sites marécageux». Cette incohérence a pu s'immiscer dans la législation, a défaut d'un contrôle de constitutionalité des lois en Suisse.

2.1.6

Voies de droit

Selon l'art. 12, al. 1, LPN, les communes et les organisations de protection de l'environnement d'importance nationale à but non lucratif ont qualité pour recourir contre les décisions du canton ou des autorités fédérales si ces décisions peuvent, en dernière instance, faire l'objet d'un recours au Conseil fédéral ou d'un recours de droit administratif au Tribunal fédéral. Ces voies de droit peuvent donc être utilisées contre des décisions au sens de l'art. 5 de la Procédure administrative (PA). Toutefois, toutes les décisions selon art. 5 PA ne constituent pas un objet de recours.

Seules les décisions prises dans le cadre de l'accomplissement d'une tâche de la Confédération sont soumises au droit de recours selon art. 12, al. 1, LPN. Selon Keller56 cette restriction du droit de recours n'a pas de portée notoire et, pour des raisons de cohérence, devrait être remise en question.

Le droit de recours des organisations de protection de l'environnement a été évalué dans une étude réalisée en 2000 par une équipe d'éminents juristes de l'Université de Genève sur mandat de l'OFEFP57. La principale conclusion à laquelle aboutit cette étude est: ce droit de recours est un instrument facilitant l'exécution du droit de l'environnement. Dans la majorité des cas, les organisations de protection de l'environnement font usage de leur droit de recours pour être impliqués dès que possible dans la phase de projet et de prise de décision, et obtenir ainsi des améliorations du projet. Rares sont les cas dans lesquels le droit de recours est utilisé pour exprimer une opposition de principe. D'ailleurs, seuls 1,4 % de tous les recours qui aboutissent devant le TF sont déposés par les associations de protection de l'environnement. Le taux de succès de leurs recours de droit administratif est largement supérieur à la moyenne. C'est ainsi que durant la période observée, le Tribunal fédéral a admis 18,5 % des recours en général et 63 % des recours présentés par des organisations de protection de l'environnement.

En ce qui concerne l'IFP, de 1998 à mars 2003, 12 recours de droit administratif et 2 recours de droit public ont abouti devant le Tribunal fédéral. Parmi ces recours 2 ont été déposés par des organisations de protection de l'environnement. Dans les deux cas, le TF a admis partiellement le recours. Ces chiffres
corroborent donc l'étude de Flückiger et al.

Les organisations de protection du paysage interrogées précisent cependant que, concernant l'IFP, il faut différencier les conclusions de Flückiger et al. Etant donné la protection inconsistante que confère l'IFP, il est très difficile de remporter un recours sur la seule base de l'IFP. En général, en cas de dépôt de recours, d'autres griefs doivent également êtres invoqués, en plus d'une atteinte à l'IFP. Souvent, il incombe au recourant de démontrer l'atteinte portée par un projet aux buts de préservation de l'IFP, exercice est d'autant plus difficile que les buts de protection ne 56 57

Keller in Keller et al.: 1997, p. 257.

Flückiger, Morand et Tanquerel: 2000.

773

sont pas clairement définis. La procédure est donc relativement coûteuse par rapport aux chances de succès. En outre, les promoteurs essaient de rendre des grands projets (comme cela est le cas de Rail 2000, à Roggwil, objet de l'IFP n° 1312 Wässermatten) compatibles avec l'IFP, en prévoyant des mesures de compensation. Par un recours, les organisations de protection du paysage risquent de remettre en cause ces mesures de compensation. Pour toutes ces raisons structurelles, les recours pour atteinte à l'IFP sont rares58.

Concernant l'effet préventif que déploierait l'ouverture des voies de droit aux associations de défense de l'environnement, les avis des experts consultés sont nuancés.

Pour certains, il y aurait un effet préventif surtout pour les grands projets prévoyant une altération évidente de l'objet. Il serait suscité par le taux de succès élevé parmi les recours déposés. Pour éviter des oppositions et des recours, les promoteurs d'un projet tenteraient de tenir compte dès que possible des aspects environnementaux.

Pour d'autres spécialistes interrogés, il apparaîtrait que pour des atteintes mineures à un objet de l'IFP, le peu de recours déposés inciterait les autorités à passer outre les dispositions de l'IFP, le risque d'un recours étant minime en raison du rapport coût/bénéfice défavorable d'un recours. Force est de constater que le droit de recours prévu à l'art. 12 LPN est entravé par certains facteurs structurels et que sa fonction de soutenir une application conséquente de l'IFP en souffre.

2.1.7

Soutien accordé par la Confédération

Selon l'art. 13 LPN, la Confédération peut soutenir la protection de la nature et du paysage et la conservation des monuments historiques en allouant des subventions.

Elle soutient principalement des mesures d'entretien. Les subventions accordées en faveur de projets concernant les objets figurant à l'IFP sont nettement moins importantes que celles en faveur des biotopes et des sites marécageux.

A ce propos, la loi sur les aides financières et les indemnités (loi sur les subventions, LSu) fait la distinction entre aides financières59 et indemnités60. Les subventions accordées en vertu de la LPN pour la protection et l'entretien des biotopes (art. 18d) et des sites marécageux (art. 23c) sont des indemnités au sens indiqué ci-dessus. Les indemnités pour les biotopes et pour les sites marécageux d'importance nationale vont de 60 à 90 % des frais, selon la capacité financière du canton concerné et la charge globale que lui occasionne la protection des sites marécageux et des biotopes.

58

59

60

774

A noter également que bon nombre d'atteintes à l'IFP trouvent leur justification dans la planification fédérale (plan sectoriel ou conception) ou dans la planification cantonale ou communale (plan directeur ou plan d'affectation) contre lesquels les associations de protection de l'environnement ne disposent pas de droit de recours.

Selon l'art. 3, al. 1 LSu: Sont des aides financières (aides) les avantages monnayables accordés à des bénéficiaires étrangers à l'administration fédérale aux fins d'assurer ou de promouvoir la réalisation d'une tâche que l'allocataire a décidé d'assumer. Les avantages monnayables peuvent prendre notamment les formes suivantes: prestations pécuniaires à fonds perdu, conditions préférentielles consenties lors de prêts, cautionnements ainsi que prestations en nature et services accordés à titre gracieux ou à des conditions avantageuses.

Selon art. 3, al. 2 LSu: Sont des indemnités les prestations accordées à des bénéficiaires étrangers à l'administration fédérale et destinées à atténuer ou à compenser les charges financières découlant de l'accomplissement: a. De tâches prescrites par le droit fédéral; b. De tâches de droit public déléguées par la Confédération.

A quelques exceptions près, les objets incrits à l'IFP ne sont ni des biotopes, ni des sites marécageux.

Les indemnités importantes qui vont de 60 à 90 % des frais ne s'appliquent pas à ces objets. En effet, en vertu de l'art. 13 LPN, les subventions de la Confédération pour la conservation, l'acquisition et l'entretien des objets IFP atteignent en règle générale au maximum 35 % des frais imputables61. A noter que contrairement aux aides financières, il y a un droit aux indemnités. En ce qui concerne l'IFP, les taux de subventions fédérales moins élevés en comparaison de ceux des biotopes et des sites marécageux vont de pair avec la faible acceptation des dispositions en matière de protection de la part des cantons, des communes et des propriétaires fonciers. Etant donné que les demandes d'aides financières des cantons, présentées dans le cadre du subventionnement global, sont déposées conjointement pour différentes mesures de protection à la fois, l'OFEFP n'est pas en mesure d'indiquer le montant des aides financières accordées à ce jour en vertu de l'art. 13 LPN et spécifiquement pour la protection des objets inscrits à l'IFP.

Une étude effectuée sur commande du fonds suisse pour le paysage a mis en lumière l'impact des subventions fédérales en vertu de l'art. 13 LPN sur le paysage (SL 2001). Selon cette étude, il apparaît que les subventions fédérales ayant un effet direct ou indirect sur le paysage représentent un volume financier de 8,9 milliards de francs par an62. Selon les auteurs, il n'y a que 9 % de ce montant qui développent des effets positifs pour le paysage, les 91 % restants, des subventions fédérales dans le domaine de l'aménagement du territoire, ayant au contraire des effets potentiellement dommageables pour la nature et les paysages. Au vu de ce manque évident de coordination des politiques et dans la perspective des pertes de sol et d'espaces naturels qui s'accélèrent en Suisse, les auteurs exigent que les subventions que la Confédération octroie dans le domaine de l'aménagement du territoire respectent mieux les objectifs constitutionnels que sont le développement durable, l'utilisation judicieuse et mesurée du sol et le ménagement du paysage (idem, p. 139).

2.1.8

Conclusion de l'analyse du programme dans l'optique de la LPN

A la fin de cette section 2.1, force est de constater que le concept qui sous-tend le programme IFP dans le contexte de la LPN manque de consistance et de clarté. Son défaut principal s'avère être une inadéquation entre les objectifs visés et les moyens dont notamment de la Confédération, entre autres acteurs, dispose pour les réaliser.

Ce manque de cohérence du programme IFP contribue certainement au faible degré de réalisation des objectifs constatés au chapitre 1. Il est dû à des facteurs structurels qui se résument comme suit: Selon toute logique, pour que les objets de l'IFP puissent être maintenus intacts ou du moins ménagés le plus possible, ils devraient être protégés des interventions de la Confédération, des cantons, des communes et des particuliers. Toutefois, étant donné les compétences restreintes de la Confédération en matière de protection de la nature et du patrimoine, l'IFP se concentre surtout sur les atteintes portées à ses objets dans le cadre de l'accomplissement des tâches de la Confédération. Selon les 61 62

Ces subventions peuvent exceptionnellement aller jusqu'à 45 %.

Chiffres repris du budget 2001.

775

explications accompagnant l'IFP, ce dispositif devait suffire à inciter les cantons et les communes à prendre les dispositions adéquates dans l'accomplissement de leurs propres tâches. Dans la pratique, ce n'est pas le cas. La raison principale en est que la force contraignante de l'IFP sur les cantons et les communes n'a pas été fixée définitivement. Alors qu'une grande partie des altérations du paysage au sein d'objets de l'IFP est précisément due à des développements qui tombent dans le domaine de compétence des cantons et des communes.

L'IFP, par l'intermédiaire de la LPN, ne vise pas à empêcher toute influence humaine dans un objet de l'IFP, mais à ce que d'éventuelles interventions soient examinées avec un soin particulier. Il ne cherche donc pas directement à atteindre un certain résultat final sur le terrain, mais à modérer l'impact des politiques ayant une incidence sur les objets de l'IFP. Cette conception fractionne la mise en application puisque celle-ci dépend d'une multitude de politiques et d'autorités défendant des intérêts divers et parfois contradictoires. Dans leur législation, une large majorité des politiques sectorielles à incidence spatiale se contentent de mentionner de façon générale la protection de la nature et du patrimoine, sans se référer directement à l'IFP. Des instruments incitatifs pour encourager une utilisation du paysage en conformité avec les buts de l'inventaire font défaut. La coordination entre l'IFP et les autres politiques ne paraît donc pas optimale.

Les activités d'une vingtaine de services fédéraux différents ont une incidence spatiale. Les décisions qui ont un impact sur l'IFP sont donc éparpillées dans différents offices et départements. L'IFP n'est qu'un aspect parmi une multitude d'autres qui entrent en ligne de compte dans la politique que gèrent ces services fédéraux. La législation concernant l'IFP ne prévoit pas une coordination institutionnalisée entre les autorités décisionnelles. Les contacts entre ces dernières s'établissent donc au cas par cas.

Les objectifs de protection de l'IFP ne sont pas clairs. Les autorités censées mettre en oeuvre l'IFP ne peuvent pas juger directement si une intervention porte atteinte au principe de maintenir intact un objet de l'IFP. Les informations disponibles dans les textes du programme IFP ne sont pas
suffisamment explicites et spécifiques pour déterminer quels éléments d'un objet IFP doivent être concrètement conservés intacts. Afin de dégager les objectifs de protection, les autorités concernées doivent en se basant sur les informations disponibles (des études de terrain, etc.), concrétiser et spécifier le contenu de l'objet de l'IFP. Cet exercice exigeant dépend de facteurs contingents tels que l'existence de travaux de recherche sur l'objet concerné et la perspicacité de l'autorité à analyser l'information.

L'absence d'objectifs concrets et une application de l'IFP impliquant une chaîne de causalité complexe constituent les raisons principales pour lesquelles les éléments évaluatifs susceptibles de mesurer le résultat, manquent et sont difficiles développer.

Jusqu'à présent, le suivi du programme IFP s'est fait de façon ponctuelle; aucun monitoring ni surveillance à long terme du paysage n'existe spécifiquement pour les zones de l'IFP.

L'OFEFP décide de la nécessité d'une expertise de la CFNP. Mais, en dehors de cette prérogative, l'OFEFP, qui en tant qu'office spécialisé est le seul à avoir une vue d'ensemble, n'exerce qu'une fonction de conseil. Les expertises de la CFNP ne doivent être demandées qu'en cas de risque d'une altération d'un objet de l'IFP.

Elles ne sont pas contraignantes pour l'autorité de décision. Les autorités défendant les intérêts de protection, même si elles doivent être consultées, n'ont donc pas de 776

compétence décisionnelle quant à la réalisation du projet. Le droit de recours prévu à l'art. 12 LPN constitue donc un instrument d'autant plus important pour une mise en application correcte des dispositions relatives à l'IFP. Pour des raisons structurelles (notamment des chances de succès faibles par rapport aux coûts de la procédure), la voie de recours est peu empruntée. Il n'est donc pas possible d'en déduire qu'elle garanti de façon conséquente une application correcte des dispositions de l'IFP. Pour des projets d'une certaine envergure, l'ouverture de la voie de recours déploie tout de même un certain effet préventif. Elle incite les promoteurs d'un projet à tenir compte le plus en amont possible dans la planification, des aspects environnementaux pour éviter les oppositions et les recours.

Afin de déterminer l'admissibilité d'une intervention dans un objet de l'IFP, la législation a prévu un mécanisme complexe, qui va de la spécification de l'objet concerné et de ses buts de protection à la pesée des intérêts en jeux. Les projets à examiner sont souvent vastes et compliqués. Les intérêts en présence multiples et contradictoires. Le poids à attribuer à un intérêt particulier n'est pas défini précisément et la description des objectifs de protection est floue. La marge de manoeuvre pour l'autorité de décision est grande. Malgré l'aide à la décision accomplie par les autorités spécialisées, la prise de décision est très exigeante. Il s'agit là du prix à payer pour une protection des objets de l'IFP qui n'est pas absolue, mais appréciée au cas par cas.

Une atteinte grave à un objet de l'IFP est en principe inadmissible, mais elle peut être exceptionnellement tolérée, si un intérêt national au moins équivalent à l'intérêt de la préservation existe. Des atteintes minimes à un objet IFP sont plus facilement admissibles. Elles peuvent en effet être recevables, sans qu'un intérêt national existe, lorsque l'intérêt de l'intervention est supérieur à l'intérêt de la préservation. Le danger en est que la somme des interventions minimes dans un objet de l'IFP peut finalement aboutir à une altération importante de ce dernier.

Par ailleurs, les autorités locales sont parfois irritées par la multiplicité des inventaires. Leur force contraignante n'est pas claire, ils se chevauchent géographiquement,
tout en poursuivant des buts différents. Souvent, les cantons et les communes les perçoivent comme imposés par la Confédération de façon non coordonnée et confuse. La propension des autorités locales à mettre en application les dispositions relatives aux inventaires en pâtit. C'est particulièrement le cas pour l'IFP qui, parmi les inventaires fédéraux, lie le moins les cantons et les communes. Les subventions en faveur de projets concernant les objets de l'IFP sont nettement inférieures et moins importantes que celles en faveur des biotopes et des sites marécageux. Avec un taux maximal de 35 %, l'aide financière en faveur des objets IFP n'est guère attractive en comparaison avec le taux de 60 à 90 % qui s'applique aux indemnités pour les biotopes et pour les sites marécageux d'importance nationale. Cela contribue au fait que l'acceptation, par les autorités locales, des inventaires de biotopes et de marais est nettement meilleure que celle de l'IFP.

2.2

Analyse du programme IFP par rapport à l'aménagement du territoire

La section suivante est consacrée à l'interaction de l'IFP avec une politique fédérale particulièrement importante pour la protection du paysage: l'aménagement du territoire. Les objectifs de ce derniers sont d'assurer une utilisation judicieuse du sol, un 777

certain ordre dans l'occupation du territoire et la séparation des zones bâties et non bâties. Ces buts visés se recoupent partiellement avec ceux poursuivis par l'IFP. La section 2.2 propose donc une analyse de la connexion de l'IFP avec la loi sur l'aménagement du territoire.

Au chap. 2.1, l'OPCA avait constaté que la force contraignante déployée par l'IFP, en vertu de la LPN, dans les cantons et les communes, était extrêmement ténue dans la pratique. Il apparaît cependant que la loi sur l'aménagement du territoire (LAT), entrée en vigueur le 1er janvier 1980, renforce l'effet contraignant de l'IFP dans les cantons et les communes. Dans cette perspective, les questions suivantes seront abordées.

­

Quelle est la connexion entre la LAT et l'IFP au niveau de la Confédération, des cantons et des communes?

­

Comment les cantons exécutent-ils les dispositions de la LAT en relation avec l'IFP dans leur planification?

­

Quelle protection est prodiguée par la LAT aux objets de l'IFP?

­

Comment les cantons ont-ils mis en application cette protection?

2.2.1

Notions clé de la LAT

Avant d'aborder la connexion de la LAT et l'IFP, l'OPCA se doit de décrire quelques notions clé de la LAT63. Selon l'art. 1 de la Loi sur l'aménagement du territoire (LAT), la Confédération, les cantons et les communes sont tenus de veiller ensemble à une utilisation mesurée du sol. Ils s'y emploient notamment en coordonnant les activités qui ont des effets sur l'organisation du territoire et en réalisant une occupation du territoire garantissant un développement harmonieux de l'ensemble du pays.

La législation sur l'aménagement du territoire comprend non seulement la loi fédérale sur l'aménagement du territoire et son ordonnance d'application, mais également un grand nombre d'autres lois, dont la loi sur la protection de la nature et du paysage.

2.2.1.1

Conceptions et plans sectoriels fédéraux

La Confédération doit assurer le mandat de coordination entre ses propres tâches et les plans d'aménagement des cantons. Les instruments dont elle dispose à cet effet sont notamment les plans d'aménagement fédéraux, c'est-à-dire les conceptions et plans sectoriels, au sens de l'art. 13 de la loi fédérale sur l'aménagement du territoire. Ils lui permettent non seulement de satisfaire à l'exigence légale de planifier et de coordonner ses activités à incidence spatiale, mais également de mieux maîtriser les problèmes de plus en plus complexes liés à la réalisation de tâches ou de projets d'intérêt national. Elaborés sur la base d'un partenariat entre les autorités fédérales et cantonales, ces instruments contribuent à une meilleure harmonisation des efforts de la Confédération et des cantons en matière d'aménagement du territoire.

63

778

Pour plus de détails, voir ASPAN: 2002, «Aménagement du territoire en Suisse: introduction» sur le site Internet: http://www.vlp-aspan.ch

Dans ses conceptions et plans sectoriel au sens de l'art. 13 LAT, la Confédération indique (art. 14 OAT): les objectifs qu'elle poursuit dans le domaine concerné, compte tenu des exigences de l'organisation du territoire; les conditions générales relatives à l'accomplissement de ses tâches (intérêts à prendre en considération, moyens à mettre en oeuvre, priorités etc.). Si le plan d'action s'en tient à ces deux aspects, on parle de conception au sens de l'art. 13 LAT. Selon les compétences qui lui sont dévolues dans le domaine en question, la Confédération peut être amenée, en outre à poser des exigences particulières quant aux activités prévues, en ce qui concerne notamment la localisation, les conditions de réalisation et le déroulement des travaux. On parle dans ce cas de plan sectoriel au sens de l'art. 13 LAT.

Les conceptions et plans sectoriels sont établis par les services fédéraux compétents, en collaboration notamment avec l'ODT, les autres services fédéraux concernés ainsi que les cantons (art. 17 OAT). L'OFEFP, par exemple, peut ainsi exprimer ses considérations par rapport à l'IFP et le plan sectoriel. Les conceptions et plans sectoriels doivent être acceptés par le Conseil fédéral (art. 21 OAT). La procédure est la suivante: Le service fédéral compétent envoie le projet pour consultation aux services concernés de la Confédération et des cantons. En cas d'accord, le service fédéral compétent transmet sa proposition au département concerné qui le soumet au Conseil fédéral pour la décision finale. Les autres départements peuvent rédiger un co-rapport. En cas de désaccord entre les offices fédéraux ou entre la Confédération et un canton, le service fédéral compétent mène une procédure en vue d'éliminer les divergences. Si cette procédure aboutit, le résultat des discussions est présenté au Conseil fédéral par l'entremise du département compétent. Si le désaccord subsiste, il incombe au Conseil fédéral de trancher le conflit. Il n'y a pas de recours possible contre les décisions du Conseil fédéral relatives à l'acceptation ou au refus de conceptions et plans sectoriels. Les modifications prévues dans des objets de l'IFP, indiquées dans ces plans d'action et entérinées par le Conseil fédéral ne peuvent ainsi plus êtres contestées devant une juridiction.

Les plans sectoriels et les conceptions
lient juridiquement la Confédération et les cantons. Dans les faits, les conceptions peuvent s'avérer moins contraignantes pour les cantons, car en général elles sont formulées en termes moins précis et promulguées dans des domaines où les compétences entre la Confédération et les cantons sont partagées. Les plans sectoriels, conçus en principe dans un domaine de compétence exclusive de la Confédération, sont donc de facto plus précis et plus contraignants pour les cantons.

Actuellement, cinq plans sectoriels64 et deux conceptions65 au sens de l'art. 13 LAT ont été adoptés. L'IFP apparaît ponctuellement et de façon accessoire dans ces documents. D'après les entretiens que nous avons mené avec les offices concernés (ODT et OFEFP), il apparaît que ces documents tiennent dûment compte de l'IFP.

Toutefois, ce dernier ne constitue qu'un élément parmi la multitude de facteurs qui influent sur le développement du territoire, de sorte que les considérations relatives à l'IFP ont tendance à se noyer dans les politiques sectorielles. Bien que certains

64

65

Plan sectoriel des surfaces d'assolement, Plan sectoriel des lignes de transport d'électricité, plan sectoriel AlpTransit, , plan sectoriel de l'infrastructure aéronautique (PSIA), plan sectoriel militaire. Le plan sectoriel Rail/Transports publics et plan sectoriel des routes n'ont à ce jour pas encore été adopté par le Conseil fédéral.

Conception «Paysage suisse», conception des installations sportives d'importance nationale.

779

tribunaux considèrent l'IFP matériellement comme conception ou plan sectoriel, l'IFP n'en a formellement pas le rang.

2.2.1.2

Le plan directeur

Pour établir leur plan directeur, les cantons déterminent au préalable le cours que doit suivre l'aménagement de leur territoire (grandes lignes du développement souhaité ou concept d'aménagement). Ils indiquent dans le plan directeur la façon de coordonner les activités ayant des effets sur l'organisation du territoire de la Confédération, du canton et des communes. Ils montrent également quand et comment seront accomplies les tâches publiques ayant des incidences sur l'organisation du territoire. Ce travail aboutit à un plan liant les autorités, coordonné avec la Confédération, les cantons voisins et les régions étrangères limitrophes et esquissant les orientations de l'aménagement cantonal compte tenu du développement souhaité.

Selon l'avancement de la planification, ces indications sont de simples informations préalables ou correspondent à des études en cours ou déjà terminées. Il peut s'agir, pour se limiter à quelques exemples, d'un réseau de transports publics, de zones protégées d'importance cantonale ou de la localisation d'installations de traitement des déchets. Le plan directeur cantonal contient également des indications de procédure: il peut, par exemple, déterminer la façon de procéder pour adapter les zones à bâtir au droit fédéral et en fixer les règles de dimensionnement.

Le plan directeur cantonal n'est pas un produit fini correspondant aux souhaits des autorités cantonales; c'est un plan d'action prévoyant la coordination et le pilotage des prochaines étapes de l'aménagement du territoire. Les plans directeurs sont adaptés en permanence aux nouvelles circonstances et réexaminés intégralement tous les dix ans.

Selon l'art. 11, al. 1, LAT, le Conseil fédéral doit approuver les plans directeurs cantonaux. Ce faisant la Confédération veille notamment à ce que l'IFP soit pris en compte. L'ODT mène la procédure d'approbation. L'OFEFP et la CFNP sont consultés et vérifient que l'IFP soit mentionné dans le texte et sur les cartes. Ils examinent également la manière dont le canton prévoit d'exécuter les dispositions du plan directeur relatif à l'IFP. Pour la CFNP l'examen des plans directeurs est devenu une de ses tâches principales. Elle examine les plans directeurs notamment pour déterminer si ils contiennent des projets pouvant affecter les objets de l'IFP et si une revalorisation
et une amélioration de ces derniers ont été envisagées. Elle adresse ses requêtes à l'ODT. Dans le cadre de la procédure d'acceptation , l'ODT en tant qu'autorité directrice de la politique du développement territorial, joue le rôle de médiateur entre les intérêts «usagers» (défendus par les offices responsables d'autres politiques sectorielles) et les intérêts de protection (défendus par le OFEFP et la CFNP). D'après les informations obtenues au cours des interviews avec les représentants des offices concernés, le processus d'acceptation des plans directeurs suscite d'intenses et parfois d'âpres discussions entre l'ODT et l'OFEFP, qui défendent des intérêts différents. Pour l'instant, ces négociations ont toujours abouti à une solution acceptable pour les deux offices. La collaboration est donc considérée comme bonne et constructive par les représentants des deux autorités.

780

2.2.1.3

La planification communale

Les cantons fixent dans leurs plans d'affectation, ayant force obligatoire pour le particulier, le mode d'utilisation du sol. Le plus souvent, les cantons délèguent cette tâche aux communes en arguant que celles-ci ont une très bonne connaissance de la situation réelle et sont en mesure de désigner l'affectation du sol parcelle par parcelle. Pour les projets ayant des incidences importantes sur la politique d'organisation du territoire, de nombreux cantons prévoient, en outre, des plans d'affectation cantonaux, par exemple pour désigner des zones industrielles ou des sites d'implantation de décharges d'importance régionale. Ces plans d'affectation cantonaux sont précis et remplacent les plans d'affectation communaux. Les plans d'affectation doivent respecter les règles générales énoncées dans la loi fédérale sur l'aménagement du territoire. Ces règles fédérales sont plus détaillées que pour les plans directeurs cantonaux car l'établissement des plans d'affectation doit permettre de faire une distinction claire entre les zones à bâtir et les autres zones (art. 14 LAT). Il est indispensable que les zones à bâtir soient conformes aux buts et principes de l'aménagement du territoire; elles ne doivent donc pas dépasser le dimensionnement prescrit dans la loi fédérale. A cela s'ajoutent désormais de nombreuses dispositions de la législation spéciale, en particulier du droit de l'environnement. Les plans d'affectation ne doivent pas seulement désigner les zones à bâtir; ils doivent également fixer l'affectation des autres zones (telles les zones d'extraction de matériaux, zones de hameaux ou les domaines skiables). La plupart du temps, il est également indispensable de délimiter des zones à protéger en se basant sur un plan de protection du paysage.

2.2.2

Les 4 piliers de la protection

Considérés comme objets d'importance nationale, les objets de l'IFP entrent dans le champ d'application de la législation sur l'aménagement du territoire. Comme nous l'avons vu plus haut, les dispositions de la LAT rendent à l'IFP un certain un effet juridique dans les cantons et les communes. Ils compensent partiellement le fait que, selon la LPN, ces derniers ne sont pas directement visés par l'IFP. La protection conférée à l'IFP repose sur quatre piliers.

a.

Premièrement, les cantons doivent, selon art. 6, al. 2, let. b, LAT, dans l'élaboration des plans directeurs désigner notamment les parties du territoire qui se distinguent par leur beauté ou leur valeur, ont une importance pour le délassement ou exercent une fonction écologique marquante. Les objets de l'IFP, en tant qu'objet d'importance nationale, doivent donc être pris en considération.

b.

Deuxièmement, même si formellement l'IFP n'a jamais été déclaré comme concept ou plan sectoriel de la Confédération (selon art. 13, al. 1, LAT), matériellement il en a le caractère. Ainsi, les cantons doivent en application de l'art. 6, al. 4, LAT en tenir compte dans la planification directrice et par voie de conséquence dans la planification communale.

781

c.

Troisièmement, pour voir leur plan directeur approuvé par le Conseil fédéral, les cantons doivent tenir compte de manière adéquate des tâches de la Confédération et des cantons voisins dont l'accomplissement a des effets sur l'organisation du territoire (art. 11 LAT).

d.

Quatrièmement, selon l'art. 17, al. 1, LAT les cantons sont tenus d'affecter les paysages d'une beauté particulière, d'un grand intérêt pour les sciences naturelles ou d'une grande valeur en tant qu'éléments du patrimoine culturel à une zone à protéger. Au lieu de délimiter des zones à protéger, le droit cantonal peut prescrire d'autres mesures adéquates.

2.2.3

Digression: l'exécution dans les cantons

Après l'avoir ignoré pendant des années, la plupart des plans directeurs des cantons, récemment accepté par le Conseil fédéral, mentionnent les objets de l'IFP. Une simple mention dans ce dernier ne suffit cependant pas pour que la protection de l'IFP devienne contraignante au niveau cantonal. A cet effet, le canton doit affecter les objets IFP à des zones de protection ou prévoir d'autres mesures de protection dans le cadre du droit cantonal. Les cantons ne sont pas tenus de mettre sous protection tout le périmètre d'un objet de l'IFP. En se référant aux objectifs de protection d'un objet de l'IFP, un canton peut n'accorder qu'une protection spéciale aux éléments centraux d'un paysage, site ou monument naturels inventoriés.

Il arrive souvent que les cantons délèguent la tâche de tenir compte de l'IFP à la planification d'affectation des communes. Dans ce cas, si le canton ne le spécifie pas autrement dans sa législation, les communes disposent généralement d'une marge de manoeuvre assez large pour déterminer comment, dans la planification communale, elles souhaitent tenir compte d'un objet de l'IFP. Il est possible qu'elles n'attribuent que les parties sensibles de l'objet à une zone protégée et le reste de l'objet à la zone agricole, voir à la zone à bâtir. Elle peut aussi le protéger à l'aide d'un arrêté de protection. A noter que les secteurs habités se situent en droit de l'aménagement du territoire toujours hors de zones protégées (art. 15 LAT). Donc une partie habitée au sein d'un objet de l'IFP (p. ex. un village), ne sera pas affectée à une zone protégée et donc ne profitera pas d'une protection plus stricte de la part de la LAT. La définition de la zone à bâtir est l'affaire de la commune qui, sans prescription spécifique du canton, n'est pas obligée de tenir compte de l'IFP. C'est uniquement lorsque les parties d'un objet de l'IFP sont en zone protégée que la LAT permet à l'IFP déployer une force contraignante également pour les propriétaires privés66. En tout état de cause, pour bon nombre d'activités dont la réglementation est du ressort des communes (comme l'attribution de permis de construire ou l'utilisation du sol à des fins de loisir et de sport) l'effet protecteur de l'IFP est très réduit. D'ailleurs, ce pourrait être une des raisons pour lesquelles, on remarque peu de différence dans l'utilisation du sol à l'intérieur et à l'extérieur des objets de l'IFP (voir section 1.3 «statistique de la superficie»).

66

782

Pour que les objets IFP deviennent des surfaces protégées contraignantes pour les propriétaires terriens plusieurs moyens sont à disposition: ordonnance, plan directeur, plan d'affectation, inscription au cadastre ou contrat.

2.2.4

Incohérence au sein de la LAT

Plusieurs interlocuteurs ont souligné que la protection prodiguée par la LAT à certains éléments d'objets de l'IFP est remise en cause par des dispositions des art. 24 à 24d LAT, modifiés en mars 1998 et entrés en vigueur en septembre 2000 après un scrutin populaire67. Selon ces derniers, en dérogation à l'art. 22, al. 2, let. a, des autorisations peuvent être délivrées hors de la zone à bâtir pour de nouvelles constructions ou installations ou pour tout changement d'affectation68. Ainsi, les éléments d'objets IFP situés hors de zones à bâtir et donc protégés contre d'éventuelles constructions voient cette protection s'atténuer notablement. Les art. 24 à 24d LAT, ouvrent donc une brèche dans l'effet de protection prodigué par la planification d'affectation. Plusieurs de nos interlocuteurs craignent que la position déjà faible de l'IFP dans les cantons et les communes n'en soit encore affaiblie. Par ailleurs, depuis l'entrée en vigueur de ces dispositions les autorités cantonales recensent une recrudescence de demande de permis de construire hors zone. Par exemple, dans le canton d'Argovie, en deux ans, plus de cent demandes pour la construction ou l'agrandissement d'étables, de porcheries, de poulaillers etc. hors zone ont été déposées. D'après les art. 24 à 24d ces demandes sont aujourd'hui admissibles, alors qu'elles ne l'étaient pas avant l'entrée en vigueur de ces nouvelles dispositions.

Ainsi, un des buts essentiels de l'aménagement du territoire, à savoir la séparation du sol en zones à bâtir et en zones non bâtissables, pourrait être vidé de sa substance.

Il existe donc des incohérences à l'intérieur même de la LAT.

2.2.5

La protection de l'IFP au niveau cantonal et communal

Une étude effectuée en octobre 2002 par «Pro-Natura»69 fourni des chiffres sur la protection légale de l'IFP au niveau cantonal et communal. Cette enquête réalisée par téléphone et questionnaire écrit auprès des services nature et paysage des cantons détermine:

67

68

69

La formulation actuelle de l'art. 24 LAT « Exceptions prévues hors de la zone à bâtir » n'est pas nouvelle, elle correspond à celle de l'art. 24, al. 1, de l'ancienne LAT avant la révision de 1998. Les art. 24a à 24d sont nouveaux et règlent les domaines suivants: le changement d'affectation hors de la zone à bâtir ne nécessitant pas de travaux de transformation; les activités accessoires non agricoles hors de la zone à bâtir; les constructions et installations existantes sises hors de la zone à bâtir et non conformes à l'affectation de la zone; les exceptions de droit cantonal hors zone à bâtir. A relever, en outre, que la disposition d'éxécution relative à l'art. 24d, al. 1, LAT a été révisée par le Conseil fédéral: Dans l'ordonnance sur l'aménagement du territoire du 28 juin 2000 a été introduit l'art.

42a concernant la transformation de bâtiments d'habitation agricoles à des fins d'habitation sans rapport avec l'agriculture (art. 24d, al. 1, LAT). Cette modification entre en vigueur le 1er juillet 2003.

Les autorisations de construction en dehors de la zone à bâtir, en rapport avec les art. 24 à 24d LAT, sont octroyés par les cantons. Elles ne peuvent être octroyées que si aucun intérêt prépondérant ne s'y oppose. S'agissant de l'accomplissement d'une tâche de la Confédération, les considérations relatives à l'IFP devraient être respectées. Or selon un de nos experts, en règle général, les cantons ne prennent en considération que les zones d'affectations et pas l'IFP.

Rother, A., Pro Natura (éd.): 2002.

783

a.

si la surface totale des objets de l'IFP du canton est protégée

b.

si la protection lie seulement les autorités ou est contraignante pour les autorités et les particuliers70.

Les données fournies par les cantons proviennent des données informatisées (système d'information géographique GIS), de calculs effectués sur la base des plans directeurs ou sur des estimations. Malgré leur qualité parfois imparfaite, ces données permettent tout de même une appréciation générale de la situation actuelle. Elles ne permettent cependant pas de tirer des conclusions en ce qui concerne le passé, donc sur les résultats de l'IFP dans les années 80 et 90 décrits au chap. 1. A noter, que les résultats de l'étude que nous reflétons ici, se situent uniquement au niveau légal et sont muets quant à la mise en oeuvre et l'efficacité de la protection dans les objets de l'IFP.

Dans leur législation, sept cantons sur vingt-cinq protègent toute la surface de leurs objets répertoriés. Dix-huit cantons ne protègent pas l'ensemble de la surface des paysages, sites et monuments d'importance nationale répertoriés sur leur territoire.

Le niveau de protection conféré aux objets IFP par les cantons et communes est difficilement mesurable, car il est fixé au moyen de différents instruments de réglementation: p.ex. ordonnances et décrets cantonaux, dispositions cantonales d'aménagement du territoire, affectation en zone protégée, inscription spéciale au cadastre et de contrat de droit privé. Ainsi, le niveau de protection peut varier d'un canton à l'autre, d'une commune à l'autre et même d'un objet de l'IFP à l'autre.

L'étude mentionnée plus haut distingue deux statuts de protections dont peuvent profiter les objets de l'IFP au niveau cantonal et communal. Cette distinction permet de donner tout de même une indication quant au niveau de protection. Premièrement, la protection des surfaces de l'IFP peut lier les autorités cantonales et communales dans l'accomplissement de leurs tâches. Deuxièmement, elle peut être également contraignante pour les particuliers dans leurs activités qui affectent le paysage.

Dans ce cas, le niveau de protection va donc plus loin.

Selon le graphique n° 8 (ci-dessous), 20 % de la surface des objets de l'IFP ne sont absolument pas protégés au niveau cantonal ou communal, 34 % sont protégés de façon contraignante seulement pour les activités développées par les autorités, la rigueur de cette protection pouvant varier. Enfin, 46 % de la surface des objets répertoriés, sont non
seulement protégé de façon contraignante pour les autorités mais également pour les particuliers. Dans ce dernier cas également, le degré de protection contre des activités des particuliers n'est pas réglé de façon similaire que ce soit au niveau cantonal ou communal.

70

784

Par protection liant les autorités, on entend que la protection est contraignante pour les autorités cantonales et communales dans l'accomplissement de leurs tâches. La protection contraignante pour les particuliers lie en plus les propriétaires fonciers pour leurs activités qui ont une incidence sur l'espace. Elle constitue pour ainsi dire un statut de protection plus élevé par rapport aux surfaces protégées seulement de façon contraignante pour les autorités.

Illustration 8 Parts en % de la surface de l'IFP protégé de façon contraignante pour les autorités et les particuliers

Surface IFP non protégée 19.59%

45.76%

Surface IFP protégée de façon contraignante pour les autorités 34.65%

Surface IFP protégée de façon contraignante pour les autorités et pour les particuliers Source: Rother A., Pro Natura (éd.), 2002. Adaptation graphique: OPCA, 2003

En d'autres terme, sur environ 20 % de la surface de l'IFP, l'intervention du canton et des communes, dans le cadre de l'accomplissement de leur tâche, et des propriétaires privés est permise. Sur le 80 % restant de la surface de l'IFP la protection n'en est pas pour autant absolue, car les interventions, en dehors de l'application de tâche de la Confédération, sont appréciées avec une rigueur très variable quant à leur admissibilité.

2.2.6

Bref aperçu dans trois cantons

La partie suivante donne un aperçu de la manière dont trois cantons prennent en compte l'IFP dans leur planification. Pour ce faire, l'OPCA a choisi trois cantons selon leurs caractéristiques géographiques et linguistiques: Argovie, un canton de plaine; Zoug, un canton de la zone préalpine; et le Valais, un canton alpin. L'OPCA s'est entretenu avec les autorités de ces trois cantons et analysé leur plan directeur. Il s'agit d'un reflet de la situation actuelle au niveau juridique, qui ne permet pas de tirer de conclusion en ce qui concerne la mise en oeuvre de l'IFP dans les cantons et l'impact actuel de l'IFP sur le terrain. A noter également que ces trois exemples de sont pas représentatifs de ce qui ce passe dans les autres cantons.

2.2.6.1

Argovie

Le canton d'Argovie compte 12 objets de l'IFP, qui représentent une surface de 22 000 hectares, soit 15,7 % du territoire argovien. De cette surface, 12 311 hectares sont affectés à la zone agricole, dont 8224 hectares représentent des paysages d'importance cantonale. «Die Landschaften von kantonaler Bedeutung stellen die 785

Erhaltung der naturnahen Landschaften und weitgehend unverbauten Landschaftsräume sicher, ohne die Weiterentwicklung zu verhindern.»71 Les communes protègent les paysages d'importance cantonale, concrétisent les buts de protection, fixent leur effet juridique (Rechtswirkung) et déterminent le périmètre exact. Elles déterminent, en tenant compte des buts de protection, les zones de protection du paysage «Landschaftsschutzzonen», les zones agricoles (avec ou sans restriction de constructions) ou d'autres zones.

Cinq objets de l'IFP (Lägern, Wasserschloss, Klingnauer Stausee, Hallwilersee et Reusslandschaft), il existe des décrets de protection. Il s'agit, en fait, de plans d'affectation cantonaux. «An der ungeschmälerten Erhaltung der Dekretsgebiete besteht ein kantonales Interesse. Die Behörden dürfen von den Schutz- und Entwicklungszielen nur abweichen, wenn ein gleich- oder höherwertiges Interesse entgegensteht»72. Ainsi, le canton a réglé l'aménagement de certaines parties de ses zones de l'IFP jusqu'au niveau du plan d'affectation, qui est également contraignant pour les propriétaires fonciers. Selon l'étude de Pro-Natura, 86 % de la surface de l'IFP sur sol argovien sont protégées au moins de façon contraignante pour les autorités et 14 % ne bénéficient d'aucune protection.

2.2.6.2

Zoug

Le canton de Zoug compte cinq objets de l'IFP qui couvrent une surface de 8905,50 hectares et représentent 37 % de son territoire. Il reconnaît une certaine force contraignante à l'IFP. Son plan directeur établi des «Landschaftsschongebiete» (région de protection du paysage) qui comprennent presque intégralement les objets de l'IFP73: Die Landschaftschongebiete überlagern das Landwirtschaftsgebiet und den Wald.

Der Kanton und die Gemeinden fördern die ökologische Aufwertung, die Vernetzung und den besonderen Charakter des Gebietes mittels: a.

Erarbeiten und Finanzieren von Landschaftsentwicklungskonzepten (LEK)

b.

Erlassen von Landschaftsschutzonen für besonders zu schützende Landschaften

c.

Erhalten der Naturobjekte

d.

Abschliessen von freiwilligen Verträgen mit Bewirtschaftenden für ökologische Aufwertungen (Hochstammobstbäume. Hecken und Feldgehölze, Waldränder, weitere ökologische Ausgleichsflächen).

Ainsi, dans les plans d'affectation, que le canton doit approuver, le canton de Zoug a réussi à faire classer certaines parties des objets de l'IFP comme «Landschaftsschutzzonen» (zones de protection du paysage). Ces dernières sont protégée par des dispositions de protection plus strictes et sont non seulement contraignantes pour les autorités, mais également pour les propriétaires. Selon l'étude Pro-Natura, cette surface représente 5,4 % de la surface des objets IFP sur territoire zougois. La surface protégée de manière contraignante au moins pour les autorités se chiffre en 71 72 73

786

Kantonaler Richtplan Aargau: Richtplantext, Stand 31. März 2001.

Idem.

Kantonaler Richtplan Zug: Richtplantext, Stand Oktober 2002.

revanche à 92 % de la surface des objets de l'IFP sur territoire zougois. En plus des lignes de restrictions d'agglomération (Siedlungsbegrenzungslinien) ont été établie.

2.2.6.3

Valais

Le canton du Valais compte 18 objets de l'IFP couvrant environ 25 % de son territoire. Il a déterminé, notamment sur la base de l'IFP, les objets d'importance nationale et cantonale (paysage, sites et monuments naturels) dignes de protection. Dans le cadre de la concrétisation du plan directeur, les communes délimitent les zones à protéger dans le cadre de l'adaptation du plan d'affectation des zones. Pour ce faire, elles affectent les éléments naturels et paysagers dans quatre zones de protection: zone de protection de la nature, zone de protection du paysage, zone agricole protégée et objets à protéger. Mise à part quelques exceptions, toutes les communes valaisannes ont repris les objets de l'IFP dans leur plan d'affectation74, de sorte que presque l'ensemble des objets de l'IFP jouit en Valais d'une protection qui est contraignante non seulement pour les autorités, mais également pour les propriétaires privés. Selon les autorités cantonales, l'instrument clé pour la protection des objets de l'IFP est le plan de zone communal.

Ce résultat est surprenant. Toutefois, selon tous les experts interrogés la situation constatée en Valais n'est pas représentative pour les autres cantons. D'après nos interlocuteurs auprès du canton du Valais, ce dernier ne perçoit l'IFP pas comme contraignant, en dehors de l'accomplissement des tâches de la Confédération.

D'ailleurs, au premier abord l'IFP a été perçu comme instrument imposé par le pouvoir central de Bern et reçu très négativement en Valais. C'est seulement au milieu des années quatre-vingt que le canton, grâce la mise à disposition des instruments de la LAT, a commencé à délimiter les objets de l'IFP dans le plan directeur.

Par la suite, le canton a progressivement convaincu les communes de tenir compte de l'IFP dans leur plan de zone. Selon nos interlocuteurs, ce ne fut pas une tâche facile, les communes étaient souvent persuadées que si elles acceptaient un tel périmètre, le terrain était perdu pour tout développement futur. Aujourd'hui, la position des autorités locales par rapport à l'IFP a changé. De plus en plus, les communes voient l'inscription d'un objet sur l'IFP comme un label de qualité d'un paysage, qui ouvre de nouvelles perspectives dans le domaine du tourisme écologique et du développement économique de la région. Il n'est pas étonnant
donc que, dans la perspective de la révision partielle de la LPN (création de parcs naturels et paysagers d'importance nationale), la plupart des objets de l'IFP valaisans fassent l'objet d'un projet de parc.

74

Certains objets de l'IFP sont protégés par un décret de protection ou par un contrat (par exemple le Lac de Tanney est protégé par un contrat de droit privé entre la commune de Vouvry et la Ligue suisse pour la protection de la nature).

787

2.2.7

Conclusion sur la connexion entre l'IFP et l'aménagement du territoire

L'OPCA constate donc que la LAT fournit une certaine protection à l'IFP, lorsqu'il s'agit de l'accomplissement d'une tâche cantonale ou communale. Cette protection est cependant très inconsistante. Elle dépend largement de la volonté politique des cantons ou communes, qui disposent d'une marge de manoeuvre relativement grande lorsqu'il s'agit de tenir compte de l'IFP dans l'exécution de la LAT. Même si la plupart des plans directeurs cantonaux mentionnent l'inventaire, ce n'est que lorsque les objets de l'IFP sont affectés à des zones protégées que la protection devient effective, c'est-à-dire contraignante pour les autorités et les particuliers. C'est le cas pour seulement environ 46 % de la surface de l'IFP. Au niveau cantonal, les objets de l'IFP peuvent ainsi, dans certains cas, être des zones où toute intervention est quasiment taboue, et, dans d'autres, des zones sur lesquelles des interventions peuvent être admises à des conditions plus ou moins strictes75. Le niveau de protection peut donc varier d'un canton à l'autre, voire d'une commune à l'autre. Les cantons et les communes ne sont pas tenus d'affecter la totalité de la surface des objets de l'IFP à une zone protégée, ils peuvent n'y attribuer que les éléments principaux. Le degré de protection peut, de ce fait, être très différent au sein d'un même objet de l'IFP. Une construction inadmissible dans une partie d'un paysage inventorié peut tout à fait être admissible dans une autre partie du même objet de l'IFP.

En outre, l'IFP ne constitue formellement ni un concept ni un plan sectoriel au sens de l'art. 13 LAT. Par conséquent, son rôle dans la planification et la coordination des politiques à incidences spatiales n'est pas prépondérant. Par ailleurs, certaines atteintes à l'IFP sont prévues dans les conceptions, les plans sectoriels ou les plans directeurs. Ces plans d'action étant approuvés par le Conseil fédéral, ils ne peuvent pas être contestés devant une juridiction.

L'analyse révèle que quelques incohérences existent au sein même de la LAT.

Néanmoins, une très large majorité des experts interrogés est d'avis que la LAT dispose théoriquement des instruments nécessaires à la mise en oeuvre des objectifs poursuivis par l'IFP dans les cantons et les communes. Mais, il apparaît dans la pratique que l'utilisation par les autorités
de ces instruments est très variable et que le potentiel de la législation sur l'aménagement du territoire n'est pas complètement exploité, pour mettre en application les buts poursuivis par l'IFP.

3

Contrôle de la mise en oeuvre de l'IFP au niveau de la Confédération

3.1

Situation initiale

Après avoir mis en évidence les aspects conceptuels qui hypothèquent la réalisation des buts de l'IFP, l'OPCA consacre le chapitre suivant à l'examen de la mise en oeuvre de l'IFP dans le cadre de l'accomplissement de quelques tâches choisies de la Confédération.

75

788

Le degré de protection dépend également de facteurs inhérents à l'objet en question de la description des objectifs de protection et et de la grandeur de son périmètre. Par exemple un objet très vaste peut difficilement être déclaré comme zone où tout développement serait tabou.

Sur commande de l'OPCA, la société Hintermann & Weber SA a procédé à ce contrôle. Les résultats de cette recherche intitulée «Verfahrens und Unsetzungskontrolle, Teilaktualisierung der Ersterhebung» sont résumés dans le présent rapport76.

Il s'agit en fait d'une actualisation partielle de l'étude que la société Hintermann & Weber SA avait effectuée en 1996­1997 («rapport 1997» ci-après) sur commande de la Division principale nature et paysage de l'OFEFP. Ce rapport avait permis d'examiner, à partir de 95 procédures de concession et d'autorisation, si les dispositions relatives à la protection de l'IFP ont été exécutées intégralement et de manière adéquate. Le rapport 1997 porte sur les procédures qui ont eu lieu entre 1977 et 1992.

La réactualisation partielle de l'étude de 1997 avait pour but principal de donner une image mise à jour de l'étendue et de la qualité de la mise en oeuvre de l'IFP par les autorités dans le cadre de l'exécution des tâches fédérales. Pour cette raison, les réflexions à la base de cette réactualisation se concentrent sur les procédures et les décisions au cours des années 2000 à 2002. En ce qui concerne la période examinée, l'étude de 1997 diffère donc de celle portant sur l'actualisation partielle de l'évaluation des effets déployés par l'IFP (Hintermann & Weber 2003a) qui fait un bilan des modifications subies par les paysages sur les dix années qui ont suivi 1992.

Aussi, les domaines pour lesquels les procédures ont été examinées ne recouvrent-telles que partiellement les domaines qui avaient été examinés dans le cadre du contrôle des effets de l'IFP (voir paragraphe 1.4.2). Etant donné que, pour des questions de ressources, il a été nécessaire de recourir aux études existantes et qu'il n'a été possible de procéder qu'à une réactualisation partielle des recherches, il a fallu renoncer à une meilleure concordance entre contrôle des effets et contrôle de la mise en oeuvre. Par conséquent, les résultats du contrôle de la mise en oeuvre et ceux du contrôle des effets ne permettent pas d'établir un lien de cause à effet direct.

La réactualisation partielle du rapport 1997 répond aux cinq questions suivantes: 1.

Les étapes des procédures spécifiques à l'IFP sont-elles accomplies intégralement et d'une manière formellement correcte dans le cadre de l'exécution de tâches fédérales en relation avec les objets IFP?

2.

Dans le cas contraire, les dispositions en matière de protection de l'IFP ne sont-elles pas ou insuffisamment mise en oeuvre au niveau des instructions internes de l'office relatives au traitement des dossiers?

3.

La qualité des expertises de la CFNP est-elle suffisante pour favoriser une mise en oeuvre correcte de l'IFP?

4.

Les avis de la CFNP et des autorités chargées de la protection de la nature et du paysage sont-ils repris par les décisions de l'autorité directrice?

5.

Les décisions de l'autorité directrice permettent-elles de conserver les objets inscrits à l'IFP intacts ou du moins de les ménager le plus possible?

La réactualisation partielle de l'étude de 1997 a été effectuée de manière à ce que les résultats puissent être comparés à ceux du premier relevé. La présente étude procède à une mise à jour du premier relevé, également sur la base d'études de cas. Les sections suivantes résument les résultats de la réactualisation partielle.

76

Hintermann & Weber: 2003b.

789

3.2

Intégralité et conformité de la procédure

Pour répondre à la question de savoir si les étapes des procédures spécifiques à l'IFP et voulues par le législateur sont accomplies intégralement et d'une manière formellement correcte, Hintermann & Weber ont examiné 20 procédures dans quatre domaines différents. Il s'agit d'une part de défrichements forestiers pour des projets de gravières et de décharges ainsi que de subventions fédérales en faveur de dessertes forestières ­ deux catégories de projets qui ont été étudiés lors du premier relevé et pour lesquelles la mise en oeuvre des étapes des procédures idoines avait été considérée comme insuffisante. Hintermann & Weber ont d'autre part examiné des projets de constructions hydrauliques et d'améliorations foncières dans des zones cultivées. Il s'agit en effet de catégories de projets qui ont fortement influencé les contenus protégés de divers paysages inscrits à l'IFP. Ces projets remplacent les concessions pour des surfaces de transport touristiques et des centrales hydroélectriques étant donné que, dans ces domaines, le premier relevé avait déjà permis de constater que, dans la majorité des cas, les procédures ont été respectées intégralement et d'une manière formellement correcte77.

En comparaison avec la première étude de 1997, la mise en oeuvre s'est nettement améliorée. Sur les 20 procédures examinées pour la période 2000 à 2001, 18 ont été conduites intégralement et d'une manière formellement correcte, ce qui constitue un taux de mise en application de 90 %. Deux procédures (10 %) ont été suivies de manière partiellement lacunaire. En ce qui concerne le versement de subventions en faveur de dessertes forestières, l'autorité fédérale compétente n'a, dans deux cas, pas procédé à la pesée d'intérêts dans l'optique de l'IFP et n'a pas lié sa décision à des conditions ou a des charges. Dans le premier relevé portant sur une période d'observation allant de 1977 à 1992, la part des procédures qui ont été suivies intégralement et de manière formellement correcte n'était que de 37 %.

Il y a deux explications plausibles à cette amélioration: Lors de l'introduction de l'IFP, la conscience des autorités concernées en matière de protection des paysages et de la nature n'était pas encore très développée. Divers arrêts du Tribunal fédéral, l'entrée en vigueur de l'inventaire des biotopes au cours
des années 90 et les améliorations générales au niveau de l'exécution de la législation sur la protection de la nature et du paysage ont également contribué à améliorer la mise en oeuvre de la protection de l'IFP. Une amélioration avait d'ailleurs déjà été observée lors de la réalisation du premier relevé de 1997. De plus l'entrée en vigueur de la loi fédérale sur la coordination et la simplification des procédures de décision a considérablement contribué à décharger les autorités directrices de certaines étapes de procédure.

Actuellement, les autorités sectorielles chargées de la protection de la nature et du paysage jouent un rôle important en ce qui concerne la mise en oeuvre des dispositions de protection de l'IFP.

77

790

A ce sujet, il convient de rappeler ici que l'entrée en vigueur de la loi fédérale du 18 juin 1999 sur la coordination et la simplification des procédures de décision a modifié diverses étapes de procédure spécifiques à l'IFP par rapport à l'étude de 1997. De plus les compétences entre autorités fédérales et cantonales ont été révisées pour plusieurs d'entre elles.

3.3

Qualité des expertises de la CFNP

Ce volet de l'analyse est consacré à l'évaluation des bases décisionnelles ­ il s'agit principalement des expertises de la CFNP ­ du point de vue de leur intégralité et de leur cohérence formelle. Ce contrôle a été effectué à partir de 20 expertises de la CFNP établies au cours des années 2000 et 2001. Dans la mesure du possible, le choix s'est porté sur des objets faisant partie de catégories de projets différentes afin d'obtenir une image la plus représentative possible de la situation. C'est à dessein que les expertises relatives aux objets traités ci-dessus à la section 3.2 ont été exclues de cette partie de l'analyse.

Le premier relevé avait permis de constater que les expertises de la CFNP comportaient des lacunes importantes qui ont, au moins en partie, conduit aux décisions très problématiques voire erronées prises par les autorités directrices. D'une manière générale, ces expertises ne procédaient pas à une évaluation conséquente des effets d'intervention du point de vue des objectifs de protection spécifiques de l'objet IFP concerné. En outre, la CFNP ­ s'écartant en cela du mandat légal ­ n'avait, au premier abord, guère tenu compte de l'objectif de protection générale de l'IFP (la conservation intacte). Dans ses considérations et ses propositions, elle s'était avant tout contentée de limiter les dégâts.

Les expertises des années 2000 et 2001 de la CFNP récemment examinées montrent une image complètement différente et très réjouissante. Elles respectent le mandat légal, elles sont complètes et leurs conclusions et exigences sont claires et logiques.

Il serait certes possible d'améliorer, ici ou là, l'argumentation ou la documentation, mais, contrairement à ce qui a été le cas par le passé, l'essentiel est atteint: ­

elles sont axées sur les contenus protégés spécifiques à l'objet concerné,

­

elles poursuivent l'objectif de protection générale qui est la conservation intacte,

­

elles rejettent les projets problématiques sans équivoque.

Contrairement à ce qui était le cas lors du premier relevé, le manque d'effet de protection de l'IFP ne peut actuellement plus s'expliquer par le manque de qualité des expertises de la CFNP.

Cela étant, la suppression de l'examen obligatoire par la CFNP a peut-être contribué à créer un nouveau point faible. Depuis l'entrée en vigueur de la loi fédérale sur la coordination et la simplification des procédures de décision le 1er janvier 2000, la CFNP n'intervient plus que lorsque les autorités chargées de la protection de la nature et du paysage (N+P) estiment que le projet soumis risque d'entraîner des altérations considérables pour un objet figurant à l'IFP. Les avis des autorités N+P n'auraient toutefois pas atteint le standard de qualité des expertises de la CFNP. Il semble en outre y avoir des différences de qualité importantes d'un canton à l'autre.

3.4

Qualité des décisions des autorités directrices

La section 3.4 est consacrée à la question de savoir si les décisions des autorités directrices permettent de conserver les objets inscrits à l'IFP intacts ou du moins de les ménager le plus possible. La qualité de ces décisions est évaluée à partir des dossiers soumis en 2000 et 2001. L'évaluation a été effectuée au moyen de deux 791

approches. La première permet de déterminer si, et le cas échéant dans quelle mesure les avis de la CFNP et des autorités chargées de la protection N+P ont été repris par les décisions des autorités directrices78. Les 20 objets décrits plus haut à la section 3.2 ont servi de base à l'évaluation de cette question. Pour pouvoir mieux étayer ces conclusions, dix des 20 expertises de la CFNP décrites à la section 3.3 ci-dessus ont également été prises en compte pour l'analyse. Les décisions des autorités directrices sont déjà disponibles pour sept de ces dix dossiers. Ainsi, il est possible d'estimer dans quelle mesure les avis de la CFNP ont été repris dans leurs décisions. La seconde approche permet d'évaluer les décisions des autorités directrices dans la perspective des objectifs de protection spécifiques aux objets IFP concernés. En d'autres termes, il s'agit d'évaluer les effets des projets autorisés sur la qualité des paysages des objets IFP concernés. Cette analyse est effectuée à partir des 20 objets pris en compte à la section 3.379.

3.4.1

Influence de la CFNP ou des services cantonaux sur les décisions des autorités directrices

L'évaluation ci-après part de l'hypothèse selon laquelle plus les conditions et charges des expertises80 sont reprises de manière intégrale dans les décisions des autorités directrices, plus la qualité de la mise en oeuvre de l'IFP augmente. L'échelle d'évaluation retenue est la suivante: ­

Objectif de qualité atteint: Les conditions et les charges émises par la CFNP ou le service cantonal N+P ont pour la plupart été reprises dans la décision.

Elles ont été formulées de manière contraignante pour le maître d'ouvrage.

­

Objectif de qualité manqué: Les conditions et les charges émises par la CFNP ou le service cantonal N+P n'ont pas, ou pas suffisamment été reprises dans la décision.

­

Sans objet: Il n'est pas possible d'évaluer la mise en oeuvre.

L'objectif de qualité a été atteint pour 20 des 30 objets analysés. Dans 18 de ces 20 cas, les conditions et charges émises par la CFNP ou le service cantonal N+P ont été repris à au moins () 80 %81 dans les décisions. De plus, les autorités directrices ont formulé ces conditions et charges de manière contraignante pour le maître d'ouvrage. Dans deux cas, le degré de mise en oeuvre se situe entre 50 et 80 %.

78

79 80

81

792

La CFNP et les autorités N+P doivent examiner les projets du point de vue des objectifs de protection spécifiques à chaque objet IFP. Elles doivent notamment montrer aux autorités directrices, lorsque c'est possible, comment les éléments concernés du paysage de l'objet IFP peuvent être maintenus intacts. Ainsi, la CFNP et les autorités N+P jouent un rôle d'experts. Lorsque la décision de l'autorité directrice reprend intégralement les conditions et les charges proposées dans les avis de la CFNP et des autorités N+P, elle doit partir du principe qu'elle a agi de manière optimale en ce qui concerne le maintien de la qualité de l'objet IFP concerné.

Il s'agit des seuls projets pour lesquels des documents permettant de procéder à une évaluation étaient disponibles (copies des plans du projet et rapports techniques).

Les expertises de la CFNP et le avis des autorités N+P sont considérés comme étant équivalents. En l'absence d'expertise de la CFNP, l'avis du service cantonal a été pris en compte pour l'évaluation.

Part de la somme de toutes les conditions et charges pour chaque objet analysé.

L'objectif de qualité a été clairement manqué pour 3 des 30 objets pris en compte.

Les autorités directrices ont accordé les autorisations correspondantes sans reprendre les conditions ou les charges en matière de protection des objets IFP concernés. Les expertises ont certes été mentionnées dans le texte de la décision, mais la raison pour laquelle l'autorité directrice n'a pas tenu compte des conditions et charges formulées par la CFNP ou le service cantonal N+P n'apparaît pas.

Sept objets sur 30 n'ont pas pu être évalués, parce qu'il n'y avait pas d'expertise (1 objet), parce que les expertises ont approuvé le projet sans conditions ni charges (3 objets) si bien que les décisions ne pouvaient reprendre aucune réserve, parce que le maître d'oeuvre, au vu des conclusions négatives de l'expertise, a retiré son projet d'affichage publicitaire dans l'objet IFP n° 1507/1706 avant que l'autorité directrice prenne sa décision (1 objet) ou encore parce que la décision est encore en suspens (2 objets).

Dans le cadre du premier relevé de Hintermann et Weber sur la période allant de 1977 à 1992, la même évaluation avait été effectuée pour 84 objets. Seuls 47 objets avaient fait l'objet d'expertise. La comparaison avec les objets traités au cours des années 2000 et 2001 met en évidence deux différences flagrantes entre le premier et le second relevé: ­

La part des objets pour lesquels il n'a pas été possible de procéder à une évaluation a fortement baissé entre les deux relevés. Cette baisse est particulièrement marquée pour les objets qui n'ont pas fait l'objet d'une expertise de la part de la CFNP ou de l'autorité cantonale N+P (de 44 à 3 %).

­

La mise en oeuvre s'est améliorée dans le domaine observé, la part des objets pour lesquels les conditions et réserves en matière de protection de la nature et des paysages n'ont pas été reprises en majorité ou pas reprises du tout a été quasiment divisé par deux (de 21 à 11 %).

3.4.2

Evaluation de la qualité des décisions

L'évaluation de la qualité des décisions part du principe que les projets ont été réalisés tels qu'ils avaient été planifiés et autorisés et que les conditions et charges liées ont également été respectées. Les résultats se présentent comme suit:

793

Qualité des décisions, mesurée par rapport aux objectifs de protection des objets Tableau 1 Type de projet

Effets des décisions examinées +

o

­

­­

±

Défrichements forestiers pour des projets de gravières

0

3

2

0

0

(Subventions fédérales en faveur de) dessertes forestières

0

2

2

0

1

(Subventions fédérales en faveur de) projets de constructions hydrauliques

2

1

1

0

1

(Subventions fédérales en faveur de) projets d'améliorations foncières

1

1

3

0

0

Ecart des projets autorisés par rapport à l'objectif de la «conservation intacte»

+

= effet de la décision faiblement positif par rapport aux objectifs de protection de l'objet IFP concerné.

o = pas d'effet notable de la décision par rapport aux objectifs de protection de l'objet IFP concerné.

­ = effet de la décision faiblement négatif par rapport aux objectifs de protection de l'objet IFP concerné.

­ ­ = effet de la décision nettement négatif par rapport aux objectifs de protection de l'objet IFP concerné.

± = effet ambivalent de la décision; réévaluations et les atteintes se compensent.

Source: Hintermann & Weber, 2003b

Pour douze décisions sur les 20 analysées, le contenu permet de partir du principe que l'objectif de conservation intacte de l'objet inscrit à l'IFP a été atteint. Dans sept de ces cas, les décisions n'ont eu aucun effet notable sur les éléments du paysage qui ont contribué à le faire classer dans les objets d'importance nationale; ces décisions sont neutres. Dans deux de ces douze cas, les atteintes et les revalorisations attendues se compensent. Trois de ces douze décisions auront probablement des effets positifs et entraîneront une réévaluation des paysages IFP concernés.

Les huit décisions restantes auront des effets négatifs sur les objets IFP concernés, pour autant, bien sûr, que les projets soient réalisés. Des éléments importants des paysages sous protections en seront affectés.

En regardant les résultats par type de projets, il apparaît que quatre décisions relatives aux projets de constructions hydrauliques sur cinq entraîneront une revalorisation ou au moins le maintien de la valeur du paysage concerné. Cela découle du fait qu'il s'agit de projets de remise en l'état naturel de cours d'eau endigués ou corrigés ou de projets comportant des mesures de compensation écologique visant à revaloriser les cours d'eau. La décision de l'autorité directrice n'entraîne une atteinte que dans le cas de la correction de ruisseaux situés dans le périmètre de l'objet IFP n° 1411 (Untersee ­ Hochrhein), objet dont la qualité du paysage réside en bonne partie dans l'état naturel de ses cours d'eaux et de leurs rives.

794

Pour ce qui est des défrichements forestiers, trois décisions ont un effet notable sur les qualités particulières des paysages IFP concernés. Les projets concernent des zones d'objet peu sensibles ou des arrondissages de peu d'importances de gravières existantes. Deux décisions de défrichement pour la création de nouvelles gravières entraînent des atteintes malgré les conditions et les charges liées. Le projet de carrière à Villeneuve mérite d'être mentionné. Une restructuration et des adaptations importantes du projet ont permis d'en limiter les impacts négatifs sur le paysage. Les expertises de la CFNP y ont grandement contribué.

Pour le type de projet «dessertes forestières», trois décisions peuvent être considérées comme neutres. Dans deux cas il s'agit de la reconstruction d'infrastructures existantes qui avaient été endommagées par des éléments naturels. Dans le cas de la construction d'un nouveau chemin de débardage sur le périmètre de l'objet IFP n° 1606 (Vierwaldstättersee mit Kernwald, Bürgenstock und Rigi), les atteintes ont pu être compensées grâce aux mesures compensatoires exigées. Deux des cinq décisions dans ce domaine provoquent des pertes de valeur des paysages concernés.

En ce qui concerne les améliorations foncières analysées, les décisions problématiques sont majoritaires. Elles concernent des dessertes de régions isolées et la construction de chemins avec revêtement. Une de ces décisions peut être considérée comme neutre et l'amélioration intégrale du Seebachtal permet de réévaluer le paysage de l'objet IFP n° 1403.

Les différences essentielles entre le premier et le deuxième relevé peuvent être résumées de la manière suivante: D'un relevé à l'autre, la part des décisions qui entraînent des altérations d'éléments importants des paysages d'objets IFP est passée de trois quarts à 40 %. En outre, aucun des objets examinés dans le cadre du deuxième relevé ne déploie d'effets fortement négatifs.

La part des projets et des décisions ayant un effet positif sur le paysage est en augmentation et a atteint 15 % lors du deuxième relevé.

La part des décisions qui ont un effet considéré comme neutre sur les qualités essentielles des paysages a doublé d'un relevé à l'autre et a atteint 45 % lors du deuxième relevé.

Dans la majorité des cas, la qualité des décisions des autorités est
satisfaisante. Pour deux tiers des objets analysés, l'autorité directrice a repris les conditions et les charges émises par les expertises de la CFNP ou dans les avis des autorités cantonales chargées de la protection de la nature et du paysage. Toutefois, dans 40 % des cas examinés, les décisions ne semblent pas garantir la conservation intacte de la valeur du paysage des objets inscrits à l'IFP en cas de réalisation des projets autorisés. Bien que nettement meilleur par rapport à celui constaté lors du premier relevé (à l'époque, 77 % des décisions ne permettaient pas de garantir la réalisation de cet objectif), le résultat n'est toujours pas satisfaisant sur ce point.

795

3.5

Conclusions relatives à la mise en oeuvre de l'IFP, niveau Confédération

D'un point de vue global, la mise en oeuvre des dispositions de protection relatives à l'IFP dans le cadre de l'accomplissement de tâches de la Confédération a été améliorée par rapport à ce qui était le cas durant les années 80. Ce résultat est lié à l'effet contraignant de l'IFP pour l'autorité qui effectue les tâches de la Confédération en rapport avec la LPN ainsi qu'à l'expérience et à la plus grande conscience acquises par les autorités concernées dans le domaine de la LPN. Malgré les améliorations réjouissantes, la réactualisation partielle du premier relevé effectué par Hintermann & Weber intitulé «Umsetzungs- und Verfahrenskontrolle BLN» a encore révélé des points faibles. L'évaluation qualitative des décisions prises par les autorités directrices montre que des altérations d'éléments importants des paysages d'objets figurant à l'IFP sont encore à craindre dans 40 % des cas. Les résultats de cette réactualisation partielle ne sont pas en contradiction avec la constatation faite dans le cadre du contrôle des effets (chap. 1) selon laquelle les objectifs de protection n'ont été que partiellement atteints. Cela est d'autant plus vrai que ce contrôle tient également compte des altérations subies par des objets IFP dans l'accomplissement de tâches cantonales et communales. Il faut cependant rappeler qu'une mise en oeuvre, aussi parfaite soit-elle, ne saurait être en mesure de corriger les lacunes conceptuelles du programme IFP. Pour terminer, il faut encore souligner que l'actualisation du premier relevé de Hintermann & Weber présente la situation actuelle en matière de la mise en oeuvre de l'IFP dans le cadre de l'exécution de tâches fédérales et que, pour cette raison, les effets ne sont pas encore déployés sur tous les objets inscrits à l'IFP et n'ont donc pas encore pu être relevés lors du contrôle des effets (chap. 1).

4

Conclusion générale

A l'issue de cette étude, force est de constater que, malgré quelques tendances positives au cours des années 90, l'IFP n'a pas pu assurer le maintien intact, ni le ménagement maximum des zones répertoriées. Les buts très ambitieux poursuivis par programme IFP, dès son entrée en vigueur en 1977, contrastent avec la faiblesse des instruments prévus pour les atteindre.

L'incohérence majeure du programme IFP réside dans le fait que la force contraignante de l'IFP sur les tâches des cantons et des communes n'a pas été établie de façon définitive, alors que c'est surtout à ce niveau que les altérations ont lieu.

Un problème non moins essentiel est constitué par la formulation très vague des objectifs de préservation des objets de l'IFP. Les autorités d'application sont ainsi contraintes à effectuer un travail de concrétisation coûteux et difficile.

Pour atteindre ses objectifs, l'IFP doit s'imposer à travers les politiques sectorielles à incidence spatiale. L'IFP n'étant cependant pas une conception ni un plan sectoriel au sens de l'art. 13 LAT, son rôle dans la planification et la coordination des activités de la Confédération n'est pas prépondérant. Dans leur législation, les politiques à incidence spatiale se contentent, pour une large majorité, de mentionner de façon générale la protection de la nature et du patrimoine, sans se référer directement à l'IFP. Dans certains cas, il manque même cette référence générale à la protection de la nature et du patrimoine. De plus, des instruments incitatifs pour encourager une utilisation du paysage en conformité avec les buts de l'inventaire font défaut. L'inté796

gration de l'IFP dans les politiques sectorielles semble donc faible. La coordination entre l'IFP et les autres politiques ne parait pas optimale.

Les activités de plus d'une vingtaine de services fédéraux ont une incidence spatiale.

Les décisions qui ont un impact sur l'IFP sont donc éparpillées dans différents offices et dans différents départements. L'IFP n'est qu'un aspect parmi une multitude d'autres qui entrent en ligne de compte. Les contacts entre les autorités s'établissent au cas par cas. La coordination entre les autorités de décision dépend plus de personnes, que d'un processus institutionnalisé. Une approche interdépartementale et globale des questions ayant trait à l'IFP fait défaut.

La protection des objets de l'IFP n'est pas absolue, mais doit être appréciée au cas par cas. Cette procédure est lourde. Les projets à examiner sont souvent vastes et compliqués. Les intérêts en présence sont multiples et contradictoires. Le poids à attribuer à un intérêt particulier n'est pas défini précisément. En plus, la description des objectifs de protection est floue. La tâche de la pondération des intérêts n'en est que plus complexe et exigeante. Le danger étant que certaines autorités de décision manquent d'expérience et de compétence pour effectuer correctement ce travail.

Les autorités spécialisées (OFEFP et CFNP) défendant le point de vue de la protection du paysage dans le processus de prise de décision, n'ont pas de compétence décisionnelle: ils ne fournissent qu'une aide à la décision. Le droit de recours prévu à l'art. 12 LPN constitue donc un instrument d'autant plus important pour une mise en application correcte des dispositions relatives à l'IFP. Toutefois, pour des raisons structurelles (notamment des chances de succès faibles par rapport aux coûts de la procédure), la voie de recours est peu empruntée. A noter également que les atteintes portées à l'IFP notifiées dans les conceptions, plans sectoriels et plans directeurs, qui sont entérinés par le Conseil fédéral, ne peuvent pas êtres contestées devant une juridiction.

Certaines altérations minimes sont admissibles sans la présence d'un intérêt national.

Le risque en découlant est que la somme des interventions minimes dans un objet de l'IFP peut finalement aboutir à une altération importante de ce dernier. L'absence d'objectifs
concrets, une protection qui n'est pas absolue, des objets de l'IFP géographiquement très différents et une mise en application impliquant une chaîne de causalité complexe rendent un suivi à long terme des effets extrêmement compliqué.

Dans le cadre de l'accomplissement de tâches de la Confédération, la mise en oeuvre des dispositions de protection de la LPN s'est améliorée par rapport à la fin des années 80. Malgré cette tendance réjouissante, le contrôle de la mise en oeuvre mandaté par l'OPCA a également démontré que certaines faiblesses persistaient.

L'appréciation qualitative des décisions prises par les autorités directrices a révélé que dans 40 % des cas une altération de l'objet de l'IFP concernée par la décision est à craindre.

Considérés comme objets d'importance nationale, les objets de l'IFP entrent dans le champ d'application de la LAT et jouissent théoriquement d'une certaine protection des instruments qui y sont prévus. L'étendue de cette protection dans la pratique est cependant très variable. Elle dépend largement de la volonté politique des cantons ou communes, qui disposent d'une marge de manoeuvre relativement grande lorsqu'il s'agit de tenir compte de l'IFP dans l'exécution de la LAT. Bien que, la plupart des plans directeurs cantonaux mentionnent l'inventaire, ce n'est que lorsque les objets de l'IFP sont affectés à des zones protégées ou sont préservés par d'autres moyens légaux que la protection devient effective, c'est-à-dire contraignante pour 797

les autorités et les particuliers. C'est le cas pour seulement environ 46 % de la surface de l'IFP.

Au niveau cantonal, les objets de l'IFP peuvent ainsi, dans certains cas, être des zones où toute intervention est quasiment taboue, et, dans d'autres, des zones sur lesquelles des interventions peuvent être admises à des conditions plus ou moins strictes. Le niveau de protection peut varier d'un canton à l'autre, voire d'une commune à l'autre.

En plus, les cantons et les communes ne sont pas tenus d'affecter la totalité de la surface des objets de l'IFP à une zone protégée, ils peuvent n'y attribuer que les éléments principaux. Le degré de protection peut, de ce fait, être très différent au sein d'un même objet de l'IFP. Une construction inadmissible dans une partie d'un paysage inventorié peut tout à fait être admissible dans une autre partie du même objet de l'IFP.

En outre, les art. 24 à 24d LAT autorisent à certaines conditions la construction hors zone à bâtir. Ainsi, la protection contre de nouvelles constructions, qu'accorde l'art. 22, al. 2, LAT aux parties d'un objet de l'IFP situées hors zone à bâtir, en est nettement affaiblie. D'ailleurs, dans la pratique ces dispositions vident de sa substance un des buts principaux de l'aménagement du territoire, à savoir la séparation des zones à bâtir et des zones non bâtissables. Il existe donc des incohérences à l'intérieur même de la LAT.

La motivation des cantons joue un rôle clé dans l'application de l'IFP. La bonne volonté des cantons n'a cependant pas toujours été ménagée lors de la désignation des objets de l'inventaire et de la fixation des buts de protection. A l'instauration de l'IFP, quand bien même ils avaient été formellement consultés, les cantons se sont sentis mis devant le fait accompli et ont perçu les objets IFP comme mesure imposée par Berne. Contrairement à ce que prévoyait le législateur, ils n'ont donc pas été incités à prendre les mesures adéquates pour préserver les objets de l'IFP dans le cadre de l'accomplissement de leurs propres tâches. D'ailleurs, les inventaires plus stricts pour les cantons basés sur les art. 18 et 23 LPN, adoptés par le peuple suisse et la Confédération dans les années 80, peuvent être considérés comme tentative de renforcer la protection de certains paysages spécifiques dont l'IFP n'a pas su
garantir la préservation.

Au niveau des autorités cantonales, l'adoption de ces nouveaux inventaires plus contraignants a été appréciée de façon pour le moins mitigée. D'autant plus que de nombreux chevauchements géographiques entre eux et l'IFP existent, que les divers inventaires poursuivent des buts différents et que leur effet contraignant n'est pas clair. Souvent les autorités locales perçoivent les inventaires avant tout en termes de coûts et de restrictions de leurs activités. Ils les jugent comme imposés par la Confédération de façon non coordonnée et confuse. Il va sans dire que la disposition des autorités locales à mettre en application ces inventaires n'en a pas été favorisée.

L'application des dispositions de l'IFP en souffre particulièrement, car parmi les inventaires fédéraux, elles sont les moins contraignantes pour les cantons et les communes. En plus, les subsides que touchent les autorités locales pour l'entretien des objets de l'IFP sont moins élevés que ceux des autres inventaires.

Actuellement la politique fédérale de protection de la nature et du paysage a changé de perspective. Elle n'essaie plus d'inciter les cantons et les communes à respecter la protection de zones déterminées par Berne, mais cherche à intégrer la conservation

798

de la nature et du paysage dans le développement régional et l'économie locale, cela en particulier grâce à l'écotourisme82.

Le projet de révision partiel de la LPN actuellement en préparation, qui encourage la création de trois catégories de parcs naturels et paysagers d'importance nationale, se situe dans cette nouvelle optique. Pour être soutenu par la Confédération, au moyen de subventions globales et de l'attribution d'un label, le projet d'un parc naturel et paysager devra répondre à deux critères essentiels. Premièrement, il présentera des éléments de haute valeur naturelle et paysagère. Deuxièmement, il devra être issu d'initiatives régionales, appuyés par la population locale et intégrés dans un programme cantonal. Contrairement aux inventaires fédéraux actuels, la Confédération ne désignera donc pas les zones qui accueilleront ces nouveaux parcs, mais en laissera le soin aux autorités locales. Le résultat attendu est une meilleure acceptation des dispositions de protection et une mise en oeuvre plus conséquente au niveau local.

Le projet de révision partielle de la LPN ne concerne que très indirectement les objets de l'IFP. Certains seront probablement partiellement voire entièrement intégrés dans un parc naturel ou paysager (comme en Valais), ce qui les revaloriserait.

Ce ne sera toutefois pas le cas de la majorité des objets de l'IFP. L'importance de l'IFP pour la protection du paysage ne s'en trouvera donc pas amoindrie. D'autant plus que les buts qu'il poursuit, notamment la préservation de paysages sur une large surface contre des interventions indifférenciées, n'est pris en charge par aucun autre inventaire et ne sera pas repris par l'éventuelle instauration des nouveaux parcs.

C'est pourquoi tous les experts consultés sont unanimes: l'IFP a un rôle déterminant à jouer au niveau de la protection de paysage. Il assumera son rôle avec d'autant plus d'efficacité que le concept qui le sous-tend et sa mise en oeuvre seront renforcés.

82

Voir rapport explicatif accompagnant la mise en consultation de la révision de la LPN.

799

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802

Liste des abréviations ASPAN BD CdG CFNP CPS Cst DDPS DETEC DFF DFI EFSM EPF FP GIS IDHEAP IFICF IFP ISOS LAT LPN LOGA LSu N+P OAT OCDE ODT OFAC OFAG OFAT OFC OFCL OFCOM OFEFP OFEG OFEN OFROU OFS

Association suisse pour l'aménagement national le programme «Monitoring de la biodiversité en Suisse» Commissions de gestion des Chambres fédérales Commission fédérale pour la protection de la nature et du paysage Conception «Paysage suisse» Constitution fédérale de 1999 Secrétariat général du Département fédéral de la défense, de la protection de la population et des sports Departement fédéral de l'environnement, des transports, de l'énergie et de la communication Département fédéral des finances Département fédéral de l'intérieur Ecole fédérale de sport de Macolin Ecole polytechnique fédérale Fondation suisse pour la protection et l'aménagement du paysage système d'information géographique Institut de hautes études en administration publique Inspection fédérale des installations à courant fort Inventaire fédéral des paysages, sites et monuments naturels d'importance nationale l'Inventaire fédéral des sites construits à protéger en Suisse Loi fédérale sur l'aménagement du territoire Loi fédérale sur la protection de la nature et du paysage Loi fédérale sur l'organisation du gouvernement et de l'administration Loi sur les subventions Service spécialisé nature et paysage Ordonnance sur l'aménagement du territoire Organisation de coopération et de développement économiques Office fédéral du développement territorial Office fédéral de l'aviation civile Office fédéral de l'agriculture Office fédéral de l'aménagement du territoire, nouvellement ODT Office fédéral de la culture Office fédéral des constructions et de la logistique Office fédéral de la communication Office fédéral de l'environnement, des forêts et du paysage Office fédéral des eaux et de la géologie Office fédéral de l'énergie Office fédéral des routes Office fédéral de la statistique 803

OFT OIFP OIVS OPCA PA seco SIA TF

804

Office fédéral des transports Ordonnance de l'inventaire fédéral des paysages, sites et monuments naturels Inventaire fédéral des voies de communication historique de la Suisse Organe parlementaire de contrôle de l'administration Procédure administrative Secrétariat d'Etat à l'économie Société suisse des ingénieurs et architectes Tribunal fédéral

Annexe 1

Liste des paysages, sites et monuments naturels d'importance nationale Numéro

Objet

Inscription

1001 1002 1003 1004 1005 1006 1007 1008 1009 1010 1011 1012 1013 1014 1015 1016 1017 1018 1019

Linkes Bielerseeufer Le Chasseral Tourbière des Ponts-de-Martel Creux du Van et gorges de l'Areuse Vallée de la Brévine Vallée du Doubs La Dôle Franches-Montagnes Gorges du Pichoux Weissenstein Lägerengebiet Belchen-Passwang-Gebiet Les Roches de Châtoillon Chassagne Pied sud du Jura proche de La Sarraz Aarewaage Aarburg Aargauer und östlicher Solothurner Faltenjura Aareschlucht Brugg Wasserschloss (Zusammenfluss Aare/Reuss/ Limmat) Ravellenflue und Chluser Roggen bei Oensingen Gorges de Moutier Vallée de Joux et Haut-Jura vaudois Le Mormont Etangs de Bonfol et de Vendlincourt Randen Koblenzerlaufen Tafeljura nördlich Gelterkinden Baselbieter und Fricktaler Tafeljura Chilpen bei Diegten Gempenplateau Aargauer Tafeljura Aarelandschaft bei Klingnau Wangen- und Osterfingertal La Côte

1977 1977 1977 1977 1977 1977 1977 1977 1977 1977 1977 1983 1983 1983 1983 1996 1996 1996 1996

1020 1021 1022 1023 1101 1102 1103 1104 1105 1106 1107 1108 1109 1110 1201

1996 1996 1998 1998 1977 1977 1977 1983 1983 1983 1983 1996 1996 1996 1977

Révision

1983 1998 1983 1983 1996

1996 1998 1998

1983

1996 1996

1998 805

Numéro

Objet

Inscription

Révision

1202 1203

Lavaux Grèves vaudoises de la rive gauche du lac de Neuchâtel Le Rhône genevois-Vallons de l'Allondon et de La Laire Bois de Chênes Coteaux de Cortaillod et de Bevaix Marais de la haute Versoix Rive sud du lac de Neuchâtel Mont Vully Chanivaz ­ delta de l'Aubonne St. Petersinsel-Heidenweg Alte Aare/Alte Zihl Hallwilersee Baldeggersee Reusslandschaft Albiskette-Reppischtal Glaziallandschaft zwischen Lorzentobel und Sihl mit Höhronenkette Moorlandschaft Rothenthurm-Altmatt-Biberbrugg Zugersee Gletschergarten Luzern Napfbergland Wässermatten in den Tälern der Langete, der Rot und der Önz Steinhof-Steinenberg-Burgäschisee Aarelandschaft Thun-Bern Amsoldinger- und Uebeschisee Stausee Niederried Endmoränenzone von Staffelbach Wauwilermoos-Hagimoos-Mauensee Aareknie Wolfwil-Wynau Schwarzenburgerland mit Sense- und Schwarzwasser-Schluchten Emmentallandschaft mit Räbloch, Schopfgraben und Rämisgummen Drumlinlandschaft Zürcher Oberland Imenberg Glaziallandschaft zwischen Thur und Rhein mit Nussbaumer Seen und Andelfinger Seenplatte Glaziallandschaft Neerach-Stadel

1977 1977

1998 1998

1977

1996

1977 1977 1977 1983 1983 1996 1977 1977 1977 1977 1977 1983 1993

1205

1204 1205 1206 1207 1208 1209 1210 1301 1302 1303 1304 1305 1306 1307 1308 1309 1310 1311 1312 1313 1314 1315 1316 1317 1318 1319 1320 1321 1401 1402 1403 1404

806

1983 1983 1983 1983 1983

1998 1998

1996

1996

1983 1983 1983 1983 1996 1996 1996 1996 1996 1977 1977 1977 1977

1983

Numéro

1405 1406 1407 1408 1409 1410 1411 1412 1413

Objet

Frauenwinkel-Ufenau-Lützelau Zürcher Obersee Katzenseen Unteres Fällander Tobel Pfäffikersee Irchel Untersee-Hochrhein Rheinfall Thurgauisch-fürstenländische Kulturlandschaft mit Hudelmoos 1414 Thurlandschaft Lichtensteig-Schwarzenbach 1415 Böllenbergtobel bei Uznach 1416 Kaltbrunner Riet 1417 Lützelsee-Seeweidsee-Uetziker Riet 1418 Espi-Hölzli 1419 Pfluegstein ob Erlenbach 1420 Hörnli­Bergland (Quellgebiete der Töss und der Murg) 1501 Gelten-Iffigen 1502 Les Grangettes 1503/1713 Diablerets-Vallon de Nant-Derborence (partie ouest) 1504 Vanil Noir 1505 Hohgant 1506 Chaltenbrunnenmoor-Wandelalp 1507/1706 Berner Hochalpen und Aletsch-BietschhornGebiet (nördlicher Teil) 1508 Weissenau 1509 Luegibodenblock 1510 La Pierreuse-Gummfluh-Vallée de l'Etivaz 1511 Giessbach 1512 Aareschlucht Innertkirchen-Meiringen 1513 Engstligenfälle mit Engstligenalp 1514 Breccaschlund 1515 Tour d'Aï-Dent de Corjon 1601 Silberen 1602 Murgtal-Mürtschental 1603 Maderanertal-Fellital 1604 Lauerzersee 1605 Pilatus

Inscription

1977 1977 1977 1977 1977 1977 1983 1983 1983 1983 1983 1983 1983 1983 1983 1996 1977 1977 1977 1977 1977 1977 1983 1983 1983 1983 1996 1996 1996 1996 1998 1977 1977 1977 1977 1977

Révision

1996

1996

1998 1998 1996/98

1996

1998

807

Numéro

1606

Objet

Vierwaldstättersee mit Kernwald, Bürgenstock und Rigi 1607 Bergsturzgebiet von Goldau 1608 Flyschlandschaft Hagleren-Glaubenberg-Schlieren 1609 Schrattenflue 1610 Scheidnössli bei Erstfeld 1611 Lochseite bei Schwanden 1612 Säntisgebiet 1613 Speer-Churfirsten-Alvier 1614 Taminaschlucht 1615 Melser Hinterberg-Flumser Kleinberg 1701 Binntal 1702 Lac de Tanay 1703 Val de Bagnes 1704 Mont d'Orge près de Sion 1705 Valère et Tourbillon 1706/1507 Berner Hochalpen und Aletsch-BietschhornGebiet (südlicher Teil) 1707 Dent Blanche-Matterhorn-Monte Rosa 1708 Pyramides d'Euseigne 1709 Blocs erratiques au-dessus de Monthey et de Collombey 1710 Rhonegletscher mit Vorgelände 1711 Raron-Heidnischbiel 1712 Les Follatères-Mont du Rosel 1713/1503 Diablerets-Vallon de Nant-Derborence (partie est) 1714 Bergij-Platten 1715 Gorges du Trient 1716 Pfynwald-Illgraben 1717 Laggintal-Zwischbergental 1718 Val de Réchy-Sasseneire 1801 Piora-Lucomagno-Dötra 1802 Delta del Ticino e della Verzasca 1803 Monte Generoso 1804 Monte San Giorgio 1805 Monte Caslano 1806 Ponte Brolla-Losone 1807 Val Verzasca 1808 Val Bavona 1809 Campolungo-Campo Tencia-Piumogna 1810 San Salvatore 808

Inscription

Révision

1983 1983 1983 1983 1983 1983 1996 1996 1996 1996 1977 1977 1977 1977 1977 1983 1983 1983 1983 1996 1996 1996 1996 1998 1998 1998 1998 1998 1977 1977 1977 1977 1977 1977 1983 1983 1983 1983

1998 1998

1998

Numéro

Objet

Inscription

1811 1812 1813 1814

Arbòstora-Morcote Gandria e dintorni Denti della Vecchia Paesaggio fluviale e antropico della Valle del Sole (Blenio) Lag da Toma Ruinaulta Auenlandschaft am Unterlauf des Hinterrheins Val di Campo Kesch-Ducan-Gebiet Trockengebiet im unteren Domleschg Quellgebiet des Hinterrheins und San Bernardino Passhöhe Oberengadiner Seenlandschaft und Berninagruppe Piz Arina Silvretta-Vereina Tomalandschaft bei Domat/Ems Paludi del San Bernardino Greina-Piz Medel Plasseggen-Schijenflue Schweizerischer Nationalpark und Randgebiete Val Bondasca-Val da l'Albigna

1983 1983 1983 1996

1901 1902 1903 1904 1905 1906 1907 1908 1909 1910 1911 1912 1913 1914 1915 1916

Révision

1977 1977 1977 1977 1977 1977 1977 1983 1983 1983 1983 1996 1996 1996 1996 1998

809

Avis de la CFNP, art. 7 et 8 LPN

Contributions financières, art. 13 et 14 LPN

810

Inventairefédéral fédéraldes desvoies voiesdede Inventaire communicationhistoriques historiquesdedelalaSuisse Suisse communication (IOVS) (IOVS)

Inventaire fédéral des sites construits à protéger en Suisse (ISOS)

Inventaire fédéral des paysages, sites et monuments naturels d'importance nationale (IFP)

Inventaires fédéraux, art. 5 et 6 LPN

Obligation de ménagement, art. 2 à 12 LPN

Droit de recours, art. 12 LPN

Mesures de protection directe de la Confédération, art. 15 et 16 LPN

Art.

78, al.

al.11àà44Cst., Cst.,dispositions dispositions Art. 78, sur la protection et du sur protectiondedelalanature nature et du paysage patrimoine

Bases légales des inventaires fédéraux

Inventaire fédéral des sites de reproduction des batraciens d'importance nationale

Inventaire fédéral des zones alluviales d'importance nationale

Biotopes d'importance nationale, art. 18a, al.

Protection des plantes et des animaux, art. 18 à 18d et art. 23 LPN

Cst.

LPN

Inventaire fédéral des sites marécageux d'une beauté particulière et d'importance nationale

Inventaire fédéral des basmarais d'importance nationale

Inventaire fédéral des hautsmarais et marais de transition d'importance nationale

Dispositions détaillées sur la protection des marais, art. 18 à 18d et art. 23a à 23c LPN

Art. 78, al. 5 Cst., dispositions sur la protection des marais directement ancrées dans Cst.

L'IFP dans la législation sur la protection de la nature et du paysage

Inventaire fédéral des réserves d'oiseaux d'eau et de migrateurs d'importance internationale et nationale

Inventaire fédéral des districts francs généraux

Dispositions sur la protection des espèces, art. 18 à 18d et art. 23 LPN

Zones protégées, art 11, al. 2 de la loi sur la chasse

Art. 79 Cst., dispositions sur la chasse et la pêche

= Constitution fédérale du 18.4.1999 = Loi sur la protection de la nature et du paysage

Source : Serge Zogg, OPCA, 2002

Annexe 2

Annexe 3

Liste des personnes interviewées Bachmann Heinrich: Leiter der Abteilung Raumentwicklung, Baudepartement des Kantons Aargau, Aarau.

Baumgartner Fred: Leiter der Sektion Siedlung und Landschaft, ARE, Bern.

Bühlmann Lukas: Geschäftsführer, VLP-ASPAN, Bern.

Bürgi Enrico: Leiter der Abteilung Landschaft, BUWAL, Bern.

Hegglin Peter: Leiter der Abteilung Natur und Landschaft, Kantonales Amt für Raumplanung, Zug.

Keusch Peter: Chef de la Section nature et paysage, Service cantonal des forêts et du paysage, Sion.

Maurer Richard: Leiter der Abteilung Landschaft und Gewässer, Baudepartement des Kantons Aargau, Aarau.

Meyer Willi: Sektionschef Landschaft und Planung, BUWAL, Bern.

Rodewald Raimund: Geschäftsleiter, Stiftung Landschaftsschutz Schweiz, Bern.

Stulz Franz-Sepp: Leiter der Abteilung Natur, BUWAL, Bern.

Werlen Christian: Chef du Service cantonal des forêts et du paysage, Sion.

Zimmermann Willi: Professor für Forstpolitik und Forstökonomie, ETH Zürich; Vize-Präsident, eidgenössische Natur- und Heimatschutzkommission, Bern.

811

Version originale du texte: L'essentiel en bref en français Chapitre 0 en français Chapitre 1 en allemand Chapitre 2 en français, excepté paragraphe 2.1.4.1 Chapitre 3 en allemand Chapitre 4 en français

Réalisation de l'évaluation: Serge Zogg: Chef de projet, OPCA Daniel Janett: Collaboration scientifique, OPCA Hedwig Heinis: Secrétariat, OPCA Barbara Koch: Stagiaire, OPCA Prof. Dr Peter Knoepfel: Conseil et contrôle de qualité, IDHEAP

Remerciements L'OPCA remercie Messieurs Berchten et Weber de l'entreprise Hintermann & Weber ainsi que toutes les personnes interrogées représentant la Confédération, les cantons, les associations et la science de leur disponibilité. Des remerciements tout particuliers vont à l'OFS, Division de l'économie spatiale, Section de l'utilisation du territoire pour les données, les appréciations et la précieuse assistance fournies pour l'interprétation de la statistique suisse de la superficie.

812

Table des matières Effets de l'inventaire fédéral des paysages, sites et monuments naturels d'importance nationale (IFP)

719

Evaluation de l'Inventaire fédéral des paysages, sites et monuments naturels d'importance nationale (IFP)

731

L'essentiel en bref

732

0 Introduction 0.1 Mandat 0.2 L'inventaire fédéral des paysages, sites et monuments naturels d'importance nationale 0.3 Questions de recherche 0.4 Structure du rapport

735 735

1 Contrôle des effets de l'IFP 1.1 Problématique 1.2 Approche méthodique 1.3 Evaluation de la statistique suisse de la superficie 1.3.1 Situation initiale et approche 1.3.2 Analyse de la statistique de la superficie 1.3.3 Résultats de l'analyse de la statistique de la superficie 1.4 Etudes de cas portant sur des objets choisis 1.4.1 Résultats du premier relevé de Hintermann & Weber et autres études de cas 1.4.2 Deuxième relevé de Hintermann & Weber 1.4.3 Résultats du deuxième relevé de Hintermann & Weber 1.5 Conclusions relatives au contrôle des effets de l'IFP

738 738 739 740 740 742 750 752

2 Analyse du programme IFP 2.1 Analyse du programme dans l'optique de la LPN 2.1.1 Force contraignante de l'IFP 2.1.2 Les objectifs de préservation 2.1.2.1 La formulation des objectifs 2.1.2.2 Recoupement d'objectifs de protection 2.1.3 Eléments évaluatifs 2.1.4 Aspect interpolitique et agencement des autorités 2.1.4.1 Coordination de la politique de l'IFP avec les politiques à incidence spatiale de la Confédération 2.1.4.2 L'autorité de décision 2.1.4.3 L'Office fédéral de l'environnement, des forêts et du paysage 2.1.4.4 La Commission fédérale pour la protection de la nature et du patrimoine 2.1.4.5 Conclusion sur l'aspect interpolitique et agencement des autorités 2.1.5 Mécanismes déterminant l'admissibilité d'une intervention 2.1.5.1 Etapes de la décision

757 758 759 761 761 763 764 766

735 737 738

752 754 755 756

766 767 768 769 770 771 771 813

2.1.5.2 Pesée des intérêts 2.1.5.3 Conclusion sur la procédure déterminant l'admissiblité 2.1.6 Voies de droit 2.1.7 Soutien accordé par la Confédération 2.1.8 Conclusion de l'analyse du programme dans l'optique de la LPN 2.2 Analyse du programme IFP par rapport à l'aménagement du territoire 2.2.1 Notions clé de la LAT 2.2.1.1 Conceptions et plans sectoriels fédéraux 2.2.1.2 Le plan directeur 2.2.1.3 La planification communale 2.2.2 Les 4 piliers de la protection 2.2.3 Digression: l'exécution dans les cantons 2.2.4 Incohérence au sein de la LAT 2.2.5 La protection de l'IFP au niveau cantonal et communal 2.2.6 Bref aperçu dans trois cantons 2.2.6.1 Argovie 2.2.6.2 Zoug 2.2.6.3 Valais 2.2.7 Conclusion sur la connexion entre l'IFP et l'aménagement du territoire.

772 772 773 774 775 777 778 778 780 781 781 782 783 783 785 785 786 787

3 Contrôle de la mise en oeuvre de l'IFP au niveau de la Confédération 3.1 Situation initiale 3.2 Intégralité et conformité de la procédure 3.3 Qualité des expertises de la CFNP 3.4 Qualité des décisions des autorités directrices 3.4.1 Influence de la CFNP ou des services cantonaux sur les décisions des autorités directrices 3.4.2 Evaluation de la qualité des décisions 3.5 Conclusions relatives à la mise en oeuvre de l'IFP, niveau Confédération

788 788 790 791 791

4 Conclusion générale

796

Bibliographie

800

Liste des abréviations

803

Annexe 1 Liste des paysages, sites et monuments naturels d'importance nationale

805

Annexe 2 L'IFP dans la législation sur la protection de la nature et du paysage

810

Annexe 3 Liste des personnes interviewées

811

814

788

792 793 796