04.053 Message relatif au Traité d'entraide judiciaire en matière pénale entre la Suisse et les Philippines du 1er septembre 2004

Messieurs les Présidents, Mesdames et Messieurs, Nous avons l'honneur de vous soumettre par le présent message, en vous proposant de l'adopter, un projet d'arrêté fédéral portant approbation du traité d'entraide judiciaire en matière pénale, signé le 9 juillet 2002 entre la Suisse et les Philippines.

Nous vous prions d'agréer, Messieurs les Présidents, Mesdames et Messieurs, l'assurance de notre haute considération.

1er septembre 2004

Au nom du Conseil fédéral suisse: Le président de la Confédération, Joseph Deiss La chancelière de la Confédération, Annemarie Huber-Hotz

2004-0637

4559

Condensé Point de la situation Aujourd'hui l'efficacité de la lutte contre la criminalité passe de plus en plus par la collaboration internationale. Sous l'effet de la globalisation croissante et de la mondialisation, la criminalité revêt de plus en plus un caractère transfrontalier. Les nouvelles technologies, notamment en matière de communication et de transmission des données, contribuent à l'internationalisation grandissante de la criminalité. En outre, certains types de criminalité sont de plus en plus souvent le fait d'organisations structurées. Tous ces éléments font qu'un Etat est de moins en moins capable de maîtriser seul les enjeux d'une lutte efficace contre le crime. Pour contrecarrer le déficit de sécurité qui peut en résulter, il convient de développer continuellement, à l'échelle mondiale, un réseau de traités bilatéraux dans le domaine de l'entraide judiciaire en matière pénale. La conclusion du traité avec les Philippines apporte une nouvelle pierre à cet édifice. Il constitue, en outre, une poursuite dans la voie de la collaboration engagée avec cet Etat de l'Asie du Sud-Est, puisque la Suisse et les Philippines ont conclu un traité d'extradition dès 1989.

Dans le cadre des relations avec les Philippines, la volonté première de la Suisse était de pouvoir, à l'avenir, lutter plus efficacement contre les auteurs d'infractions telles que l'exploitation sexuelle des enfants, la traite des femmes et des enfants, le trafic de stupéfiants, la corruption, la criminalité économique et le terrorisme.

Teneur du traité Le traité établit une base légale internationale permettant aux deux Etats de collaborer dans la recherche, la poursuite et la répression d'infractions. Les Etats contractants s'y sont engagés à s'accorder mutuellement l'entraide judiciaire dans les limites fixées par le texte. Jusqu'ici, la Suisse ne pouvait accorder l'entraide judiciaire aux Philippines que sur la base de la loi sur l'entraide pénale internationale (EIMP; RS 351.1).

Le traité s'inscrit dans la lignée des instruments d'entraide judiciaire que la Suisse a conclus récemment avec le Pérou, l'Equateur, Hong Kong et l'Egypte. A l'instar de ces derniers, il reprend les principes essentiels consacrés par la Convention européenne d'entraide judiciaire en matière pénale (CEEJ; RS 0.351.1) ainsi que par l'EIMP,
tout en tenant compte des dernières évolutions dans le domaine.

Diverses dispositions ont été intégrées dans le traité pour simplifier et accélérer la procédure d'entraide judiciaire ainsi que pour améliorer, d'un point de vue général, les relations entre les autorités chargées de l'entraide dans les deux Etats. Par ailleurs, le traité souligne l'importance qu'il convient d'attacher à la protection des droits de l'homme en prévoyant un motif supplémentaire permettant explicitement de refuser l'entraide en cas de violation de ceux-ci.

4560

Message 1

Lignes de force du traité

1.1

Point de la situation

Le développement continu, à l'échelle mondiale, d'un réseau de traités bilatéraux dans le domaine de l'entraide judiciaire en matière pénale répond à l'exigence d'une lutte plus efficace contre le crime, dans l'intérêt d'une meilleure sécurité. Ce développement est porté par l'idée qu'un Etat est de moins en moins capable de maîtriser seul les enjeux d'une lutte efficace contre la criminalité.

Le traité qui fait l'objet du présent message poursuit cette politique éprouvée. Il s'agit du deuxième instrument que la Suisse négocie avec ce pays d'Asie du Sud-Est dans le domaine de la coopération internationale en matière pénale. A la fin des années 80, en effet, la Suisse et les Philippines ont décidé de collaborer sur ce terrain, décision qui a abouti à la conclusion d'un traité d'extradition1, en 1989. Sur le principe, les deux pays s'étaient également mis d'accord pour négocier un traité d'entraide judiciaire. Cependant, compte tenu de la procédure d'entraide judiciaire qui avait été ouverte en 1986 dans l'affaire de l'ancien président des Philippines, Ferdinand Marcos, et n'était pas encore close, la réalisation de ce projet avait ensuite été ajournée. Il s'agissait d'éviter qu'un rapport direct puisse être établi entre ce qui n'était qu'un cas particulier, même s'il revêtait une certaine importance, et un traité visant à régler de manière générale l'entraide judiciaire accessoire entre les deux Etats.

En l'an 2000, lorsque le traitement du «cas Marcos» fut suffisamment avancé pour que ce risque soit écarté, l'idée de négocier un traité d'entraide judiciaire a refait son chemin.

L'objectif du traité était de permettre une lutte plus efficace contre la criminalité en améliorant, en renforçant et en accélérant la coopération entre les deux pays. Du côté suisse, la volonté première était de pouvoir, à l'avenir, agir plus efficacement contre des délits comme l'exploitation sexuelle des enfants, la traite des femmes et des enfants, le trafic de stupéfiants, la corruption, la criminalité économique et le terrorisme.

1.2

Déroulement des négociations

Après que les deux Etats se sont entendus sur l'ouverture de négociations, des entretiens entre une délégation suisse et une délégation philippine ont eu lieu à Manille en novembre 2001. Un projet de traité élaboré par la Suisse avait au préalable été envoyé aux autorités compétentes des Philippines pour qu'elles l'examinent. Cet examen n'ayant pas fait apparaître de divergences insurmontables, les discussions ont pu être menées sur la base du projet présenté par la Suisse. La première série de pourparlers aura suffi pour éliminer toutes les divergences et mettre au point un texte commun.

1

RS 0.353.964.5; en vigueur depuis le 23 février 1997.

4561

D'un commun accord, les deux délégations ont ensuite décidé de prendre, dans leurs pays respectifs, les mesures nécessaires à la signature du traité. Le Conseil fédéral a approuvé le traité et donné son accord pour la signature, en juin 2002. La conseillère fédérale Ruth Metzler-Arnold, alors ministre de la justice, a signé le traité le 9 juillet 2002, à l'occasion de sa visite aux Philippines.

1.3

Aperçu de la teneur du traité

Le traité règle la coopération entre la Suisse et les Philippines en matière de recherche, de poursuite et de répression des infractions. Les Etats contractants s'y engagent à s'accorder mutuellement l'entraide judiciaire la plus large possible, selon les termes du traité, dans les procédures visant des infractions. Jusqu'ici, la Suisse ne pouvait accorder l'entraide aux Philippines que sur la base de la loi sur l'entraide pénale internationale (EIMP)2 et dans la mesure prévue par ce texte.

Le traité se situe dans la lignée des traités bilatéraux d'entraide judiciaire que la Suisse a conclus récemment3. A l'instar de ces derniers, il s'inspire de la Convention européenne d'entraide judiciaire en matière pénale (CEEJ)4 ainsi que de l'EIMP, dont il reprend les principes essentiels. En outre, il prend en compte les dernières évolutions dans le domaine en question.

Parmi les principales innovations qu'il contient, citons: ­

Un motif supplémentaire de refus: le traité prévoit explicitement que l'entraide judiciaire peut être refusée s'il existe de sérieuses raisons de supposer que la procédure étrangère viole les garanties contenues dans le Pacte de l'ONU du 16 décembre 1966 relatif aux droits civils et politiques (art. 3, par. 1, let. f).

­

Les objets ou valeurs saisis à titre conservatoire peuvent être remis à l'Etat requérant en vue de leur confiscation ou de leur restitution à l'ayant droit (art. 11).

­

Sous certaines conditions, des informations peuvent être transmises à l'autre Etat contractant même si ce dernier n'a pas présenté au préalable une demande d'entraide judiciaire (art. 15).

­

Les témoins, les experts et, si elles y consentent, les personnes poursuivies pénalement ou les suspects peuvent être interrogés par vidéoconférence, s'il est impossible ou inopportun qu'ils comparaissent en personne sur le territoire de l'autre Etat contractant (art. 22).

Les prescriptions de procédure figurant dans la première et la troisième partie de l'EIMP forment la base de l'application du traité.

2 3 4

RS 351.1 Traités d'entraide judiciaire avec le Pérou (RS 0.351.964.1), l'Equateur (RS 0.351.932.7), Hong Kong (RS 0.351.941.6) et l'Egypte (RS 0.351.932.1).

RS 0.351.1

4562

1.4

Appréciation du traité

Le traité doit être considéré comme faisant partie intégrante de la politique de développement du réseau d'instruments bilatéraux que la Suisse cherche à tisser dans toutes les régions du monde, en matière d'entraide judiciaire. La collaboration internationale dans ce domaine vise à renforcer l'efficacité de la lutte contre la criminalité.

Le traité est en harmonie avec les dispositions et les principes éprouvés qui régissent le domaine de l'entraide judiciaire. Il reprend les principes essentiels consacrés par le droit suisse en la matière, tels que la double punissabilité, la règle de la spécialité, l'exclusion de l'entraide en cas de délit fiscal ainsi que le principe selon lequel les mesures d'entraide sont exécutées conformément au droit procédural de l'Etat requis. L'intégration de dispositions novatrices fait que cet instrument bilatéral tient également compte des dernières évolutions dans le domaine en question. Différentes dispositions ont, en effet, été adoptées dans le but de simplifier, d'accélérer et d'améliorer le déroulement de la procédure d'entraide. En reprenant certaines dispositions qui figuraient déjà dans l'EIMP, le traité en fait des normes de portée internationale, pareillement valables pour les deux Etats contractants.

Le traité constitue un instrument moderne et simple qui répond aux impératifs de la pratique. En intégrant des dispositions qui prévoient une amélioration de la collaboration entre les autorités de la justice pénale des deux Etats ou qui se traduisent par une telle amélioration, il jette les bases d'un renforcement de l'efficacité dans la lutte contre la criminalité. Toutefois, ce gain d'efficacité ne doit pas se faire au détriment des droits fondamentaux des personnes concernées. Cela explique que l'on ait voulu souligner dans le texte, par l'adoption d'une disposition nouvelle, l'importance du respect des droits de l'homme. La Suisse a ainsi obtenu satisfaction sur un point qui revêt une grande importance à ses yeux.

2

Commentaire des différentes dispositions du traité

2.1

Chapitre I: Dispositions générales

Art. 1

Obligation d'accorder l'entraide

Le par. 1 oblige les Etats contractants, sur la base du droit international public, à s'accorder l'entraide judiciaire en matière pénale la plus large possible. S'il n'y a pas de motif d'inapplicabilité ou de refus au sens des art. 2 et 3, une demande d'entraide judiciaire doit être exécutée.

Le par. 2 énumère les mesures d'entraide judiciaire possibles sur la base du traité. A noter qu'une clause générale permet aux autorités d'ordonner d'autres mesures que celles qui sont expressément énumérées, à condition toutefois que celles-ci soient compatibles avec les buts du traité et acceptables pour les Etats contractants (let. h).

En Suisse, de telles mesures peuvent être arrêtées si nécessaire pour autant qu'elles respectent les limites imparties par le droit national. La clause générale susmentionnée devrait offrir une certaine souplesse dans le cas d'espèce et permettre de tenir compte de besoins particuliers et d'évolutions futures.

4563

Art. 2

Inapplicabilité

Sont exclus du champ d'application du traité l'extradition, l'arrestation ou la recherche de personnes poursuivies pénalement ou condamnées pour une infraction, ainsi que l'exécution de jugements pénaux.

Art. 3

Motifs pour refuser ou différer l'entraide judiciaire

Cette disposition énumère exhaustivement les motifs qui permettront de refuser l'entraide judiciaire. Il s'agit de motifs classiques de refus. Ces motifs sont présentés sous forme potestative, afin que l'entraide judiciaire soit la plus large possible, mais aussi pour permettre une certaine flexibilité, tenant compte de l'évolution du droit.

Quant à savoir si l'Etat requis est tenu de refuser l'entraide judiciaire dans les cas énumérés, c'est là un point qui se détermine chaque fois à la lumière du droit national. Pour la Suisse les dispositions pertinentes sont essentiellement les art. 1a, 2, 3 et 5 EIMP, dont la liste des motifs de refus est inspirée. Ces dispositions prévoient, de manière générale, une irrecevabilité de la demande d'entraide fondée sur l'un des motifs justifiant un refus5.

En vertu du par. 1, l'entraide judiciaire pourra être refusée si la procédure étrangère se rapporte à un délit politique, à une infraction fiscale ou à une infraction réprimée exclusivement par la législation militaire (let. a et b); il en va de même lorsque l'exécution de la demande menace de porter atteinte à la souveraineté, à la sécurité, à l'ordre public ou à d'autres intérêts essentiels de l'Etat requis (let. c). Selon la doctrine juridique suisse, la notion d'«ordre public» recouvre également le respect des droits humains fondamentaux dont font notamment partie le droit à la vie, l'interdiction de la torture ou de tout autre traitement ou châtiment cruel, inhumain ou dégradant ainsi que les garanties de procédure élémentaires. Au niveau mondial, ces garanties figurent notamment dans le Pacte de l'ONU relatif aux droits civils et politiques6. En se prévalant de l'«ordre public», la Suisse refusera d'accorder l'entraide judiciaire aux Philippines par exemple lorsque la demande vise une infraction passible de la peine de mort, cela tant que cette peine n'aura pas été définitivement abolie dans ce pays. Est réservé cependant le cas d'espèce pour lequel les Philippines donnent des assurances suffisantes (aux yeux de la Suisse) que la peine de mort ne sera pas appliquée7.

L'entraide peut aussi être refusée lorsque la demande vise une infraction pour laquelle la personne concernée a déjà été condamnée ou acquittée dans l'Etat requis, à condition que la sanction éventuellement prononcée soit en cours
d'exécution ou ait déjà été exécutée (let. d). Enfin, l'entraide peut également être refusée s'il existe de sérieuses raisons de supposer que l'exécution de la demande conduira une personne à subir une discrimination du fait de sa race, de son sexe, de sa religion, de sa nationalité ou de ses opinions politiques, ou que la procédure étrangère viole les garanties contenues dans le Pacte international du 16 décembre 1966 relatif aux droits civils et politiques (let. e et f).

5 6 7

A signaler toutefois une exception dans le domaine fiscal: l'entraide judiciaire peut être accordée si la procédure vise une escroquerie en matière fiscale (cf. art. 3, al. 3, EIMP).

Pacte international du 16 décembre 1966 relatif aux droits civils et politiques (RS 0.103.2).

Cf. art. 3, par. 3 du traité, selon lequel l'octroi de l'entraide peut être subordonné à des conditions.

4564

La let. f constitue une innovation par rapport aux instruments bilatéraux d'entraide judiciaire que la Suisse a conclus jusqu'ici. Elle doit être mise en relation avec le motif de refus concernant l'atteinte à l'ordre public (let. c). Là encore ­ ainsi que nous l'avons déjà exposé ­ la notion d'«ordre public» recouvre notamment le respect des droits humains fondamentaux ainsi que des garanties de procédure élémentaires, telles qu'elles figurent notamment dans le Pacte de l'ONU relatif aux droits civils et politiques. La mention explicite, à la let. f, du pacte de l'ONU, auquel ont adhéré tant la Suisse que les Philippines, renforce cependant la sécurité du droit en précisant expressément que l'entraide judiciaire pourra être refusée en cas de violation d'une garantie dudit pacte. La valeur de signal d'une telle disposition entraîne un renforcement supplémentaire de la dimension des droits de l'homme à la sauvegarde desquels la Suisse attache un grand prix.

Le par. 2 donne à l'Etat requis la possibilité de différer l'entraide judiciaire lorsque l'exécution d'une demande pourrait être préjudiciable à une procédure pénale en cours dans cet Etat.

Le par. 3 règle la procédure à suivre lorsque l'Etat requis souhaite refuser ou différer l'entraide judiciaire: avant de prendre une décision négative, il devra informer l'Etat requérant des motifs qui l'incitent à envisager de refuser l'entraide ou de différer l'exécution de la demande (let. a). Parallèlement, l'Etat requis devra examiner s'il peut tout de même accorder l'entraide, et à quelles conditions. Le cas échéant, ces conditions devront être respectées par l'Etat requérant (let. b).

2.2 Art. 4

Chapitre II: Obtention d'éléments de preuve Droit applicable

Le par. 1 consacre le principe selon lequel les demandes seront exécutées conformément au droit de l'Etat requis. En Suisse, l'exécution se fera conformément à l'EIMP, ainsi qu'au droit de procédure déterminant des cantons et de la Confédération.

Il sera possible, à certaines conditions, de déroger au principe du par. 1. A la demande explicite de l'Etat requérant, une demande d'entraide judiciaire pourra être exécutée selon ses propres règles de procédure, pour autant que le droit de l'Etat requis ne s'y oppose pas (par. 2). Cette possibilité de dérogation vise à éviter que l'utilisation, dans l'Etat requérant, d'éléments de preuve obtenus par la voie de l'entraide judiciaire échoue ou se heurte à des difficultés disproportionnées en raison du non-respect d'une procédure obligatoire dans cet Etat. La même idée est à la base de l'art. 65 EIMP.

4565

Art. 5

Mesures de contrainte

En vertu de l'art. 5, les demandes d'entraide judiciaire dont l'exécution implique des mesures de contrainte8 devront en principe être acceptées. L'entraide peut cependant être refusée lorsque les faits à la base de la demande ne constituent pas une infraction punissable tant dans l'Etat requis que dans l'Etat requérant9. L'exigence de la double punissabilité comme préalable à mesure coercitive correspond à un principe important pour la Suisse, qui figure dans la déclaration suisse relative à l'art. 5, al. 1, CEEJ, ainsi qu'à l'art. 64 EIMP.

Art. 6

Mesures provisoires ou d'urgence

Le par. 1 prévoit que sur demande de l'Etat requérant, l'autorité compétente de l'Etat requis ordonne des mesures provisoires, par exemple le blocage d'un compte bancaire. Pour qu'une mesure de ce type puisse être ordonnée, il faut toutefois qu'il n'y ait pas de motifs manifestes qui devraient entraîner un refus d'accorder l'entraide judiciaire.

Dans des cas urgents, le par. 2 permet d'ordonner des mesures provisoires avant même que la demande d'entraide judiciaire ait été formellement présentée. La simple annonce d'une demande suffit. Les informations communiquées doivent toutefois permettre de vérifier que toutes les conditions sont réunies pour pouvoir ordonner de telles mesures. L'Etat requérant se voit fixer un délai pour présenter sa demande formelle d'entraide judiciaire. Si ce délai n'est pas respecté, les mesures provisoires sont levées.

C'est l'art. 18 EIMP qui sert de modèle à cette réglementation.

Art. 7

Utilisation restreinte

Cette disposition définit le principe, important pour la Suisse, de la spécialité. Elle précise l'utilisation qui peut être faite, dans l'Etat requérant, des informations et des moyens de preuve obtenus par voie d'entraide. L'objectif de cette disposition est d'empêcher que des documents transmis par cette voie soient ensuite utilisés par l'Etat requérant dans une procédure pour laquelle l'entraide judiciaire ne lui aurait pas été accordée.

Ainsi, le par. 1 précise que l'Etat requérant ne peut utiliser les informations et les éléments de preuve qu'il obtient par la voie de l'entraide judiciaire que dans une procédure concernant une infraction pouvant faire l'objet de l'entraide judiciaire.

Pour la Suisse, l'intérêt principal de cette disposition est que les renseignements qu'elle transmet ne puissent pas être utilisés dans des procédures fiscales ­ à moins qu'il ne s'agisse d'un cas d'escroquerie en matière fiscale, également réprimé par le 8

9

Selon la conception suisse, cette catégorie comprend toutes les mesures impliquant le recours à une contrainte prévue par le droit de procédure. Outre la perquisition et la saisie d'objets et de valeurs, il s'agit notamment de la comparution de témoins récalcitrants, des dépositions de témoins faites sous la contrainte ou de la divulgation de secrets protégés par la loi.

La double punissabilité ne signifie pas que les législations des deux Etats doivent appréhender les faits incriminés sous le même angle juridique ni que les éléments constitutifs de l'infraction que représentent ces faits doivent être identiques dans les deux droits nationaux. Il suffit que l'état de fait exposé dans la demande d'entraide judiciaire constitue une infraction aussi bien dans l'Etat requis que dans l'Etat requérant (cf. ATF 126 II 409, cons. 6c.cc, avec renvois).

4566

droit suisse10. L'interdiction d'utiliser les informations transmises s'applique également aux faits qualifiés d'infractions politiques ou militaires.

Le par. 2 prévoit que toute autre utilisation des informations transmises est subordonnée à l'approbation de l'Etat requis. Il énumère ensuite les cas où cette approbation n'est pas nécessaire.

C'est l'art. 67 EIMP qui sert de modèle à cette disposition.

Art. 8

Présence de personnes qui participent à la procédure

Les personnes ou autorités participant à la procédure étrangère peuvent être autorisées à être présentes lors de l'exécution de la demande, à condition que l'Etat requis donne son accord.

Cette disposition correspond à l'art. 4 CEEJ. Lorsque la Suisse est l'Etat requis, les détails sont réglés par l'art. 65a EIMP. Cet article prévoit, en particulier, que des faits ressortissant au domaine secret ne doivent pas être portés à la connaissance des personnes participant à la procédure étrangère avant que l'autorité compétente ait statué sur l'octroi et l'étendue de l'entraide. Il appartient à l'autorité suisse compétente en matière d'exécution de la demande d'entraide de prendre les dispositions nécessaires à cette fin.

Art. 9

Déposition de témoins dans l'Etat requis

En vertu de l'art. 9, l'audition de témoins dans l'Etat requis doit se dérouler conformément au droit de cet Etat. La personne concernée peut cependant aussi refuser de témoigner si le droit de l'Etat requérant le permet (par. 1). Dans ce cas, l'Etat requérant est appelé à confirmer que, en l'espèce, la personne concernée a le droit de refuser de témoigner (par. 2). L'invocation de ce droit ne peut entraîner aucune sanction légale (par. 3).

Art. 11

Remise d'objets ou de valeurs en vue de leur confiscation ou de leur restitution

L'art. 11 contient une disposition importante dans la pratique. Elle prévoit que les objets ou valeurs saisis à titre conservatoire peuvent être remis à l'Etat requérant en vue de leur confiscation ou de leur restitution à l'ayant droit. La remise se fait selon le droit interne de l'Etat requis (pour la Suisse, selon l'art. 74a EIMP).

Cette disposition complète celle que l'on trouve habituellement sur la restitution à des fins de preuve, qui figure dans la CEEJ et qui a été reprise à l'art. 10 du traité.

Elle tient compte du fait que la saisie, à titre conservatoire, d'objets, et plus particulièrement de valeurs, dans le cadre d'une procédure d'entraide judiciaire, n'a, en particulier, de sens que s'il est ensuite possible de les remettre à l'Etat requérant pour qu'il les confisque ou les rende à leur propriétaire légitime.

10

Cf. art. 3, al. 3, EIMP.

4567

Art. 13

Casier judiciaire et échange d'avis de condamnation

Le par. 1 a trait aux demandes d'informations du casier judiciaire présentées dans le cadre d'une affaire pénale. Les informations à communiquer sont celles qu'il est d'usage, pour l'Etat requis, de transmettre à ses propres autorités judiciaires.

Le par. 2 stipule que des extraits du casier judiciaire peuvent également être transmis dans un cadre autre que pénal, par exemple aux fins d'une procédure administrative. En l'occurrence, c'est le droit interne qui s'applique. En Suisse, la communication d'extraits du casier judiciaire à des autorités étrangères est réglée par l'art. 24 de l'ordonnance du 1er décembre 1999 sur le casier judiciaire informatisé11.

Le par. 3 porte sur la communication automatique à l'autre Etat contractant des sentences pénales prononcées contre des ressortissants de cet Etat. L'obligation d'informer se limite aux inscriptions telles qu'elles figurent dans le casier judiciaire.

Dans la pratique, ces informations sont transmises au moyen d'un formulaire. Dans le cadre de la présente disposition, l'obligation ne vise pas la transmission d'informations plus détaillées, par exemple sous forme d'un jugement complet.

Cette disposition s'inspire des art. 13 et 22 CEEJ.

Art. 14

Dénonciation aux fins de poursuites ou de confiscation

L'art. 14 permet de demander à l'autre Etat contractant d'ouvrir une procédure pénale. Cette disposition sera utilisée lorsqu'un Etat a connaissance d'une infraction et montre un intérêt à sa répression, sans toutefois être en mesure d'ouvrir lui-même une procédure. Ce peut être le cas lorsqu'une personne qui s'est rendue coupable d'une infraction dans un des Etats contractants se réfugie par la suite sur le territoire de l'autre Etat, et qu'une extradition est impossible, par exemple en raison de la nationalité de la personne en question. On peut également penser au cas où l'un des Etats contractants a des informations concrètes montrant qu'une infraction a été commise contre l'un de ses ressortissants sur le territoire de l'autre Etat, mais qu'il ne peut pas engager lui-même des poursuites contre l'auteur de cette infraction, puisqu'une extradition, là encore, n'entre pas en ligne de compte.

Cette disposition ne fonde pas une obligation d'engager des poursuites pénales.

L'Etat qui reçoit une telle dénonciation doit toutefois informer l'autre Etat de toutes les mesures qu'il prend suite à cette dénonciation.

Cette réglementation reprend celle de l'art. 21 CEEJ, mais de manière plus complète, puisqu'elle couvre également les dénonciations visant à la confiscation de l'objet d'une infraction selon l'art. 11.

Art. 15

Transmission spontanée d'informations

Compte tenu de la dimension transnationale qu'ont souvent les infractions aujourd'hui, il peut arriver qu'au cours de ses investigations, une autorité découvre des informations et des éléments de preuve qui peuvent également présenter un intérêt pour les autorités de l'autre Etat contractant. Des éléments de preuve et des informations de cette nature doivent pouvoir être transmis même sans demande d'entraide judiciaire préalable s'ils sont de nature à aider l'autre Etat à engager ou à mener à bien ses propres investigations ou procédures, ou s'ils peuvent le mettre en 11

RS 331

4568

situation de présenter une demande d'entraide judiciaire. L'échange le plus rapide possible des informations obtenues pouvant intéresser l'autre partie constitue une arme importante dans la lutte contre la criminalité et contribuera ainsi à renforcer son efficacité.

La communication des informations se fait dans les limites du droit national. Elle est facultative et n'empêche pas l'Etat qui les communique de mener ses propres investigations ou d'engager ses propres procédures. L'utilisation des informations transmises peut être soumise à certaines conditions.

L'idée de la transmission d'informations sans demande d'entraide judiciaire préalable est inspirée de l'art. 10 de la Convention du 8 novembre 1990 relative au blanchiment, au dépistage, à la saisie et à la confiscation des produits du crime12.

L'art. 67a EIMP, qui prévoit également la transmission spontanée de moyens de preuve et d'informations, règle les détails dans le cas où la Suisse est la partie qui communique les informations.

2.3

Chapitre III: Remise d'actes de procédure et de décisions judiciaires ­ comparution de témoins, d'experts et de personnes poursuivies pénalement

Art. 16 à 19

Remise d'actes de procédure; comparutions

Les dispositions relatives à la remise d'actes de procédure et de décisions judiciaires ainsi que celles qui concernent la comparution de témoins et d'experts ont été reprises du chapitre III CEEJ (art. 7 à 10 et art. 12).

Comparativement à ce que prévoit la CEEJ, le traité étend le champ d'application ratione temporis du sauf-conduit: l'immunité dont bénéficie la personne concernée contre toute poursuite et autre restriction de sa liberté individuelle sur le territoire de l'Etat requérant pour des faits ou condamnations antérieurs à son départ de l'Etat requis cesse si cette personne, ayant eu la possibilité de quitter le territoire de l'Etat requérant pendant trente jours consécutifs, n'a pas tiré parti de cette possibilité (art. 19, par. 3). Ce délai correspond à celui qui a été arrêté dans le cadre des traités d'entraide judiciaire avec l'Australie et Hong Kong13.

Art. 20

Etendue du témoignage dans l'Etat requérant

La personne qui comparaît dans l'Etat requérant à la suite d'une citation pour y déposer en tant que témoin est tenue de témoigner à moins que le droit de l'Etat requérant ou de l'Etat requis lui permette de refuser. Le respect de l'obligation de témoigner et de produire les moyens de preuve pertinents peut être assuré par des mesures de contrainte.

L'art. 20 constitue le pendant de l'art. 9 qui vise les dépositions de témoins dans l'Etat requis.

12 13

Convention relative au blanchiment d'argent (RS 0.311.53).

Art. 15 du traité d'entraide judiciaire avec l'Australie (RS 0.351.915.8) et art. 21 du traité d'entraide judiciaire avec Hong Kong (RS 0.351.941.6).

4569

Art. 21

Remise de personnes détenues

Cette disposition reprend la teneur de l'art. 11 CEEJ, tout en y ajoutant un par. 4, qui, dans l'intérêt de la personne remise, statue expressis verbis que la détention subie dans l'Etat requérant par cette personne sera imputée sur la peine qu'il lui reste à purger dans l'Etat requis. On trouve une disposition similaire dans le Traité d'entraide judiciaire avec l'Australie14.

Art. 22

Audition par vidéoconférence

Ainsi que son titre l'indique, cette disposition règle l'audition par vidéoconférence de témoins et d'experts ainsi que, dans certaines circonstances, de suspects et de personnes poursuivies pénalement. Elle tire parti des progrès enregistrés dans le domaine des télécommunications. En effet, en autorisant le recours à une liaison vidéo directe, elle permet d'auditionner des personnes dans l'Etat contractant dans lequel elles résident, ce qui les dispense de comparaître en personne sur le territoire de l'autre Etat contractant. Cette disposition est applicable s'il est inopportun ou impossible que la comparution ait lieu sur le territoire de l'autre Etat contractant. Tel peut être le cas, par exemple, lorsque la personne concernée s'est réfugiée à l'étranger parce qu'elle risque des poursuites pénales dans l'Etat qui a requis son audition. On peut également imaginer de recourir à la vidéoconférence lorsque la présence d'un témoin est indispensable au déroulement d'une autre procédure dans l'Etat requis ou encore lorsqu'un témoin appréhendé dans l'un des deux Etats contractants fait l'objet d'une procédure d'extradition vers un Etat tiers. Autres motifs pouvant justifier une audition par vidéoconférence: le risque de fuite ou de collusion, la nécessité d'assurer la protection d'un témoin ou encore l'âge ou l'état de santé de la personne concernée. Enfin si une personne doit faire un long voyage pour être auditionnée sur place, on peut se demander ­ eu égard notamment aux indemnités de déplacement qui devront lui être versées ­ s'il n'est pas disproportionné de l'obliger à comparaître en personne.

Les par. 1 à 6 règlent l'audition des témoins et des experts. Ils définissent les conditions auxquelles on peut recourir à la vidéoconférence et la procédure à suivre en la matière15.

Si les conditions visées au par. 1 sont réunies, l'Etat saisi d'une demande d'audition par vidéoconférence est tenu de consentir à cette audition pour autant que, dans le cas d'espèce, le recours à cette méthode ne soit pas contraire aux principes fondamentaux de son droit. Aux yeux de la Suisse, cette restriction signifie notamment que le recours à la vidéoconférence ne doit pas se traduire par une violation du droit à un procès équitable. En revanche, l'Etat requis ne peut refuser de donner suite à une demande d'audition
de témoins ou d'experts par vidéoconférence pour le seul motif que le recours à cette méthode n'est pas prévu par son droit ou parce que une ou plusieurs modalités auxquelles obéit l'audition par vidéoconférence ne sont pas remplies au regard de sa législation.

Si l'Etat requis ne dispose pas des moyens techniques permettant une vidéoconférence, l'Etat requérant peut les mettre à la disposition de celui-ci (par. 2).

14 15

Cf. art. 13 Les frais en rapport avec l'audition par vidéoconférence sont réglés dans une disposition distincte (art. 29).

4570

Au nombre des règles essentielles de procédure figure celle qui veut que les principes fondamentaux du droit de l'Etat requis soient respectés pendant l'audition (par. 4, let. a). Dans le cas de figure où la Suisse est l'Etat requis, son autorité judiciaire devra, en particulier, intervenir si elle constate que l'autorité judiciaire de l'Etat requérant use, durant l'audition, de moyens déloyaux ou incorrects dans le but d'influencer le résultat de celle-ci.

Le droit de refuser de témoigner est soumis aux mêmes règles que celles qui valent dans le cadre d'une audition ordinaire (par. 4, let. e). Les conséquences d'un refus de témoigner ou d'une fausse déposition sont identiques à celles qui s'appliqueraient si l'audition avait lieu dans le cadre d'une procédure nationale (par. 6).

Le par. 5 prévoit l'établissement d'un procès-verbal à l'issue de l'audition. N'y sont toutefois consignés que des éléments tels que le lieu et la date de l'audition, l'identité des personnes entendues, etc. et non la teneur des dépositions.

Aux termes du par. 7, les personnes poursuivies pénalement et les suspects peuvent également être auditionnés par vidéoconférence. Toutefois, en l'occurrence, le traité prévoit sur certains points des règles différentes de celles qui s'appliquent aux témoins et aux experts. D'abord, une audition par vidéoconférence ne peut avoir lieu que si la personne concernée y consent. Ensuite, l'Etat requis n'est pas tenu de donner suite à une demande d'audition par cette technique. La décision de tenir la vidéoconférence et la manière dont elle se déroulera doivent faire l'objet d'un accord entre les Autorités centrales des deux Etats contractants et être conforme à leur droit national et aux instruments internationaux en la matière.

Les dispositions relatives à l'audition par vidéoconférence s'inspirent de l'art. 9 du Deuxième Protocole additionnel à la CEEJ16. Sur le plan bilatéral, la Suisse a adopté pour la première fois une telle réglementation dans le cadre de l'Accord additionnel à la CEEJ, conclu avec l'Italie17.

2.4

Chapitre IV: Procédure

Art. 23 et 25

Autorité centrale; exécution de la demande

Le traité prévoit que les demandes d'entraide judiciaire seront transmises par les Autorités centrales désignées par les Etats contractants. Celles-ci joueront également le rôle d'interlocuteur pour le traitement de ces demandes. S'il est aujourd'hui d'usage de passer par la voie diplomatique, on ne recourra plus à ce canal que si cela se révèle indispensable dans le cas d'espèce. Cette disposition est propre à accélérer notablement la procédure. En outre, les contacts directs qu'elle permettra d'établir entre les personnes responsables de l'organisation de l'entraide judiciaire au sein des administrations de chacun des deux Etats, sont de nature à améliorer la collaboration dans son ensemble. Ils permettront notamment d'aplanir plus facilement les malentendus qui peuvent entraver cette collaboration.

16 17

Deuxième Protocole additionnel du 8 novembre 2001 à la Convention européenne d'entraide judiciaire en matière pénale (FF 2003 2912).

Art. VI de l'Accord du 10 septembre 1998 entre la Suisse et l'Italie en vue de compléter la Convention européenne d'entraide judiciaire en matière pénale du 20 avril 1959 et d'en faciliter l'application (RS 0.351.945.41).

4571

Pour la Suisse, l'Autorité centrale est l'Office fédéral de la justice. Dans le cadre de l'entraide judiciaire avec la République des Philippines, elle dispose, dans l'ensemble, de prérogatives moins étendues que l'Autorité centrale chargée des relations avec les USA ou l'Italie18, qui toutes les deux relèvent aussi de l'Office fédéral de la justice. Il lui incombe uniquement d'exercer les fonctions prévues par l'EIMP, à savoir examiner préalablement les demandes, les transmettre et en contrôler l'exécution, fonctions qui ressortent peu ou prou de l'art. 25. Dans ce contexte, il ne faut toutefois pas perdre de vue l'art. 79a EIMP qui, dans certaines circonstances, confère à l'Office fédéral de justice la compétence de statuer lui-même sur l'exécution d'une demande d'entraide judiciaire.

Quant à l'exécution concrète d'une demande d'entraide judiciaire, elle est régie par les dispositions pertinentes de l'EIMP et par les normes de procédure pénale des cantons et de la Confédération.

Art. 27

Exigences formelles

Le par. 1 statue la dispense de toutes formalités de légalisation ou autres formalités de même nature. En d'autres termes, l'Etat requérant ne peut soumettre les pièces et les autres éléments de preuve à transmettre par l'Etat requis dans le cadre d'une procédure d'entraide judiciaire au sens du traité à une quelconque exigence formelle.

Cette disposition revêt toute son importance lorsque l'on sait que, sur ce point, les Philippines sont empreintes de la culture juridique des Etats-Unis, Etat qui attache une grande importance au respect des formalités. Cette disposition qui s'inspire de l'art. 17 CEEJ, vise à simplifier et à accélérer la procédure d'entraide judiciaire.

Les pièces qui doivent être transmises ne devront être certifiées conformes par l'Autorité centrale de l'Etat requis que si l'Etat requérant l'exige expressément (par. 2). Toutefois il ne s'agira pas d'engager une lourde procédure de légalisation impliquant la mise sous scellés des pièces et autres moyens de preuve ainsi que des attestations sur l'honneur; il suffira de confirmer l'authenticité des documents et moyens de preuve en question, ce qui, en pratique, reviendra à apposer un sceau ad hoc. Le par. 3 précise la teneur des par. 1 et 2.

Aux termes du par. 4, la limitation des exigences formelles se répercute sur la procédure au sein de l'Etat requérant en ce sens que les éléments de preuve transmis par l'Autorité centrale de l'Etat requis sont acceptés comme moyens de preuve sans autre justification ou attestation d'authenticité.

Art. 28

Langue

La clause régissant la langue dans laquelle doivent être rédigées les demandes d'entraide judiciaire et leurs annexes est identique à celle que contient le traité conclu avec les Philippines en matière d'extradition19.

18

19

Art. 28 du Traité entre la Confédération suisse et les Etats-Unis d'Amérique sur l'entraide judiciaire en matière pénale (RS 0.351.933.6) en liaison avec l'art. 5 de la loi fédérale relative au traité conclu avec les Etats-Unis d'Amérique sur l'entraide judiciaire en matière pénale (RS 351.93); art. XVIII de l'accord avec l'Italie en vue de compléter la CEEJ.

Art. 4, par. 4

4572

2.5

Chapitre V: Dispositions finales

Art. 31 et 32

Echange de vues; règlement des différends

Lorsque, de façon générale ou dans un cas particulier, l'application ou l'exécution du traité soulève des questions ou donne lieu à des difficultés, les Autorités centrales procèdent à un échange de vues (art. 31). Si elles ne parviennent pas à aplanir ellesmêmes les différends auxquels donne lieu le traité, ceux-ci seront réglés par la voie diplomatique (art. 32). Cette disposition est le résultat d'un compromis analogue à celui qui a été trouvé dans le cadre de l'Accord d'entraide judiciaire conclu avec Hong Kong20, les Philippines n'ayant pu souscrire à la proposition de la Suisse voulant que les différends soient tranchés par un tribunal arbitral.

3

Conséquences

3.1

Conséquences financières et effets sur l'état du personnel pour la Confédération et les cantons

Le traité fait naître de nouvelles obligations pour la Suisse. Cette affirmation vaut en particulier pour l'Office fédéral de la justice (OFJ) qui, en tant qu'Autorité centrale, assurera les relations en matière d'entraide judiciaire en provenance des Philippines et à destination de celles-ci.

Le supplément de tâches imposé aux autorités chargées de l'entraide judiciaire est fonction du nombre et de la complexité des demandes d'entraide judiciaire. Selon la fréquence à laquelle la collaboration des autorités cantonales sera sollicitée et le temps que prendra le règlement des différents cas, le traité pourrait aussi se traduire par un surcroît de travail pour certains cantons.

S'agissant de l'administration fédérale, l'augmentation des effectifs que pourrait exiger l'exécution du traité sera réglée au niveau du département concerné.

3.2

Conséquences économiques

Le traité n'aura aucune répercussion sur le plan économique en Suisse.

20

Art. 37

4573

4

Programme de législature

Garantir la sécurité a toujours été une composante importante de la politique que poursuit la Suisse. Cette composante est d'ailleurs mentionnée expressément à titre d'objectif dans le Programme de la législature 2003­200721. Pour atteindre cet objectif, il importe, entre autres, d'optimiser la coopération internationale en matière de justice et police. Le traité d'entraide judiciaire conclu avec les Philippines représente une contribution supplémentaire à la politique de sécurité que poursuit la Suisse par le biais de la coopération internationale.

5

Relation avec le droit européen

La coopération entre la Suisse et les Etats membres du Conseil de l'Europe dans le domaine de l'entraide judiciaire internationale en matière pénale est régie par la CEEJ. A l'avenir, elle le sera également par le Deuxième Protocole additionnel à cette convention. Des traités bilatéraux conclus entre la Suisse et ses voisins sont également appliqués à titre complémentaire22. D'autres instruments du Conseil de l'Europe, tels que la Convention relative au blanchiment des produits du crime, règlent l'entraide judiciaire au titre de la lutte contre certains types de criminalité.

Le traité d'entraide judiciaire en matière pénale entre la Suisse et les Philippines non seulement reprend tous les principes essentiels fixés dans la CEEJ, mais encore tire parti des innovations introduites par d'autres instruments du Conseil de l'Europe.

Partant, il est compatible avec le droit européen.

6

Constitutionnalité

En vertu de l'art. 54, al. 1, de la Constitution fédérale (Cst.), la Confédération est compétente en matière d'affaires étrangères. La conclusion de traités internationaux est donc de son ressort. L'approbation de traités internationaux incombe à l'Assemblée fédérale conformément à l'art. 166, al. 2, Cst.

Les traités internationaux sont sujets au référendum en vertu de l'art. 141, al. 1, let. d, Cst. lorsqu'ils sont d'une durée indéterminée et ne sont pas dénonçables (ch. 1), qu'ils prévoient l'adhésion à une organisation internationale (ch. 2), qu'ils contiennent des dispositions importantes fixant des règles de droit ou dont la mise en oeuvre exige l'adoption de lois fédérales (ch. 3).

Le traité d'entraide judiciaire avec les Philippines est dénonçable (cf. art. 33) et ne prévoit pas l'adhésion à une organisation internationale.

21 22

FF 2004 1035 ss, objectif 9.

La Suisse a conclu des traités additionnels avec tous ses voisins, sauf le Liechtenstein: avec l'Allemagne (RS 0.351.913.61), l'Autriche (RS 0.351.916.32), la France (RS 0.351.934.92) et l'Italie (RS 0.351.945.41).

4574

Il reste à déterminer si ce traité contient des dispositions importantes qui fixent des règles de droit ou si sa mise en oeuvre nécessite l'adoption d'une loi fédérale. Selon l'art. 22, al. 4, de la loi du 13 décembre 2002 sur l'Assemblée fédérale22, sont réputées fixant des règles de droit les dispositions générales et abstraites d'application directe qui créent des obligations, confèrent des droits ou attribuent des compétences. Sont importantes les dispositions qui doivent être édictées sous la forme d'une loi fédérale selon les critères posés à l'art. 164, al. 1, Cst.

En l'occurrence, force est d'affirmer que le traité d'entraide judiciaire conclu avec les Philippines contient des dispositions importantes qui fixent des règles de droit. Il crée pour les Etats contractants l'obligation de s'accorder une entraide judiciaire aussi large que possible. Cette obligation a, par ailleurs, des incidences sur les droits et les devoirs des individus. En outre, le traité attribue des compétences aux autorités chargées de son application. Partant, cet instrument international contient des dispositions qui fixent des règles de droit. Ces dispositions doivent être qualifiées d'importantes dans la mesure où, si elles devaient être édictées sur le plan national, elles le seraient sous la forme d'une loi fédérale, en vertu de l'art. 164, al. 1, Cst. En conséquence, l'arrêté de l'Assemblée fédérale portant approbation du traité est sujet au référendum, conformément à l'art. 141, al. 1, let. d, ch. 3, Cst.

22

Loi sur le parlement (LParl; RS 171.10).

4575

4576