La Suisse comme membre des institutions de Bretton Woods Rapport de la Commission de gestion du Conseil des Etats du 14 octobre 2003

2003-2233

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Rapport 1

Introduction

1.1

Situation initiale

Le 17 mai 1992, une votation populaire a approuvé tant l'arrêté fédéral sur l'adhésion de la Suisse aux institutions de Bretton Woods que la loi fédérale concernant la participation de la Suisse à ces institutions. La Suisse a adhéré aux institutions de Bretton Woods le 29 mai 1992, par le biais de la ratification des accords concernant le Fonds monétaire international du 22 juillet 1944 (RS 0.979.1) et des accords internationaux sur les institutions du Groupe de la Banque mondiale1. Les institutions de Bretton Woods comprennent, d'une part le Fonds monétaire international (FMI), d'autre part le Groupe de la Banque mondiale (ou Banque mondiale). Ce dernier est composé de cinq organisations étroitement liées (Banque internationale pour la reconstruction et le développement ­ BIRD, Association internationale de développement ­ AID, Société financière internationale ­ SFI, Agence multilatérale de garantie des investissements ­ AMGI et Centre international pour le règlement des différends relatifs aux investissements ­ CIRDI). Le FMI a pour mission de maintenir la stabilité des systèmes monétaires et de promouvoir la liberté du commerce et des paiements internationaux. De son côté, la Banque mondiale joue un rôle primordial dans le financement et la coordination, à l'échelle internationale, de projets de coopération au développement. Ces deux volets sont très importants pour la Suisse. En effet, en tant que partie intégrante du système économique international et surtout en raison de l'importance de son industrie de l'exportation, l'économie suisse est particulièrement intéressée par la mise en oeuvre des objectifs du FMI. Par ailleurs, la coopération suisse au développement mise en place depuis de longues années correspond aux principes de solidarité et d'universalité de la politique extérieure de la Suisse. La coopération au développement multilatérale mise en oeuvre dans le cadre de la Banque mondiale y occupe une place essentielle et vient compléter la coopération au développement bilatérale de la Suisse.

Les Conseils des gouverneurs, qui se réunissent une fois par an, constituent les organes suprêmes des deux institutions. Les Conseils d'administration des institutions de Bretton Woods représentent la principale instance sur le plan opérationnel.

Chacun d'entre eux est composé de 24 membres. En
règle générale, les décisions sont adoptées par voie de consensus. Depuis son adhésion, la Suisse est à la tête d'un groupe de vote et siège par conséquent au sein des Conseils d'administration du FMI et de la Banque mondiale, où elle contribue activement à forger la politique des deux institutions. Les membres de son groupe de vote sont l'Azerbaïdjan, le Kirghizistan, l'Ouzbékistan, la Pologne, la Serbie-Monténégro, le Tadjikistan et le Turkménistan.

Ce groupe a un poids électoral de 2,84 % au sein du FMI et de 2,97 % au sein de la Banque mondiale, celui de la Suisse représentant 1,60 % (FMI) et 1,66 % (Banque mondiale). Par ailleurs, la Suisse est représentée dans chacun des Conseils des gouverneurs par un gouverneur et un vice-gouverneur (Conseil des gouverneurs du 1

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Statuts de la Banque internationale pour la Reconstruction et le Développement, du 22 juillet 1944, RS 0.979.2; Statuts de l'Association Internationale de Développement, du 26 janvier 1960, RS 0.979.3; Statuts de la Société Financière Internationale, du 25 mai 1955, RS 0.979.4.

FMI et Conseils des gouverneurs du Groupe de la Banque mondiale). Il s'agit, pour le FMI, du président de la Banque nationale suisse (BNS) et du chef du DFF (vicegouverneur), la Suisse étant représentée dans les autres Conseils des gouverneurs par le chef du DFE et la cheffe du DFAE (vice-gouverneur).

1.2

Mandat et objectif de l'examen

A l'occasion du dixième anniversaire de l'adhésion de la Suisse aux institutions de Bretton Woods, la Commission de gestion du Conseil des Etats (CdG-E) a décidé d'étudier de plus près le rôle de la Suisse au sein de ces institutions et de dresser un bilan sur ces 10 années, du point de vue de la haute surveillance parlementaire. Son étude a porté sur les objectifs et intérêts du statut de membre des institutions de Bretton Woods tels qu'ils sont définis par la législation suisse, sur leur exécution par les représentants et les autorités fédéraux, sur l'influence exercée par la Suisse au sein des deux institutions et sur les avantages qu'elle tire de son statut de membre.

La sous-commission DFF/DFE a été chargée de l'inspection. Elle est composée des députés au Conseil des États Peter Briner (président de la sous-commission), Françoise Saudan, Michel Béguelin, Hannes Germann et Hans Hess. La sous-commission DFF/DFE a mis l'accent, dès la formulation des questions de l'inspection, sur l'exécution par les autorités fédérales et sur les avantages que tire la Suisse de son statut de membre, sachant qu'elle était consciente, concernant ce dernier point, que les avantages ne peuvent être quantifiés. Il s'agissait plutôt de parvenir à formuler des énoncés en termes de qualité. En ce qui concerne l'exécution, les questions portaient notamment sur le nombre des autorités fédérales concernées, les interfaces, d'éventuelles redondances, sans oublier la coordination et, par conséquent, la cohérence en termes d'exécution. Enfin, l'examen devait également répondre à la question de savoir si, dix ans après, les attentes liées à l'adhésion ont été remplies.

1.3

Limites de l'objet de l'inspection

Aux termes de l'art. 169 de la Constitution fédérale et de l'art. 47ter, al. 1, de la loi sur les rapports entre les conseils, les Commissions de gestion exercent la haute surveillance exclusivement sur l'activité du Conseil fédéral et de l'administration fédérale, des tribunaux fédéraux et des autres organes ou personnes auxquels sont confiées des tâches de la Confédération. Partant, l'examen de la CdG-E doit se limiter au comportement des autorités fédérales concernées par le statut de pays membre des institutions de Bretton Woods de la Suisse et aux effets de cette action administrative. Soulignons notamment que l'examen n'avait pas pour but une étude ou une évaluation de la manière dont sont effectuées les tâches ou les effets et avantages des institutions de Bretton Woods. Ces questions sont régulièrement discutées et évaluées à l'échelle internationale. Les études les plus diverses sur le sujet sont d'ailleurs accessibles au public.

837

1.4

Démarche

Après avoir pris, début 2002, la décision de principe d'inclure dans le programme annuel 2002/2003 un examen portant sur ce domaine, la CdG-E a confié à sa souscommission DFF/DFE l'élaboration et la réalisation de cet examen. L'Organe parlementaire de contrôle de l'administration (OPCA) a ensuite été chargé d'élaborer un concept pour l'évaluation qui devait donner à la sous-commission et à la CdG-E une base scientifique pour l'évaluation des questions de l'étude. La sous-commission a traité le concept fin août 2002. Les axes prioritaires de l'étude ont été définis, le concept a été adopté et il a été décidé de faire appel à des experts externes pour l'élaboration de différentes parties de l'évaluation. L'OPCA et les experts externes, M. Cédric Dupont (Institut universitaire de hautes études internationales) et M. Pascal Sciarini (Institut de hautes études en administration publique) ont alors effectué l'évaluation en se basant surtout sur des entretiens réalisés avec des représentants des autorités fédérales concernées, de la BNS et des acteurs non étatiques (groupes d'intérêt, partis politiques) en Suisse, mais aussi sur des analyses de documents et sur des études de cas. En ce qui concerne les avantages, des entretiens ont en outre été menés avec des représentants des milieux économiques et scientifiques, des ONG (organisations non gouvernementales) et de l'administration allemande.

Cette évaluation a fait l'objet d'un rapport final de l'OPCA du 6 juin 2003 à l'intention de la sous-commission, qui l'a traité lors de deux séances à l'été 2003.

Le présent rapport de la CdG-E est basé sur le rapport final de l'OPCA et sur le rapport d'expertise de Dupont/Sciarini, lesquels sont publiés en même temps que le présent rapport. Ce dernier contient les conclusions de la sous-commission et de la CdG-E. Il a été approuvé par la CdG-E le 14 octobre 2003. Il ne reprend les explications du rapport final de l'OPCA que dans la mesure où celles-ci présentent un intérêt pour l'évaluation des questions de l'inspection, qu'elles sont nécessaires à la compréhension des questions et qu'elles sont requises pour une lecture autonome du rapport de la CdG-E. Pour de plus amples détails, se reporter au rapport final de l'OPCA et au rapport d'expertise.

2

La Suisse dix ans après son adhésion aux institutions de Bretton Woods

2.1

Généralités

Tant la CdG-E que les autorités fédérales ainsi que les représentants des milieux économiques et scientifiques et des organisations non gouvernementales ont estimé qu'il était important de dresser un bilan intermédiaire sur le statut de membre des institutions de Bretton Woods de la Suisse.

2.2

Objectifs du statut de membre

L'OPCA a répertorié les objectifs, contenus dans la législation, concernant la politique de la Suisse au sein des institutions de Bretton Woods. Ce faisant, il a constaté que la loi fédérale du 4 octobre 1991 concernant la participation de la Suisse aux institutions de Bretton Woods (RS 979.1) ne contient aucun objectif en la matière, hormis le fait que pour toute décision ou prise de position concernant les pays en 838

voie de développement, les représentants de la Suisse doivent s'inspirer des principes et des objectifs de la politique suisse de développement (art. 6). Il est fait ici référence à la loi fédérale du 19 mars 1976 sur la coopération au développement et l'aide humanitaire internationales (RS 974.0), laquelle met l'accent sur l'amélioration des conditions de vie des groupes de population les plus démunis dans les pays les plus pauvres et doit contribuer à mettre ces pays en mesure d'assurer leur développement par leurs propres forces. Des objectifs explicites ne sont d'ailleurs pas nécessaires, la Suisse s'étant engagée, lors de son adhésion, à poursuivre les objectifs des institutions de Bretton Woods. Dans le cadre de la marge de manoeuvre qui en résulte, il convient de tenir compte, pour l'exécution, des contraintes légales de l'ordre légal suisse, en particulier de la politique économique extérieure et de la coopération au développement.

La concordance des objectifs des deux institutions avec ceux de la politique poursuivie par la Suisse dans ces domaines est affirmée dans le message du Conseil fédéral concernant l'adhésion de la Suisse aux institutions de Bretton Woods (FF 1991 II 1212 ss). L'OPCA identifie dans le message trois sous-objectifs relatifs à la politique de la Suisse au sein du FMI. Ceux-ci portent sur la politique réglementaire, la politique monétaire et la politique de développement: 1.

encourager des ajustements structurels du marché dans tous les Etats membres,

2.

corriger les surévaluations de la monnaie, maîtriser l'accroissement de la masse monétaire et limiter les déficits budgétaires et

3.

définir des programmes tenant compte des retombées sociales et environnementales afin que les programmes du FMI ne pèsent pas sur les couches les plus pauvres de la population notamment.

Dans le domaine de la Banque mondiale, il n'y a pas d'objectif portant sur la politique monétaire, mais un but additionnel concernant les droits de l'homme: 1.

création des conditions nécessaires au bon fonctionnement du marché en vue d'assurer l'accès de tous aux ressources productives et de permettre une croissance durable de l'économie,

2.

lutte contre la pauvreté et participation au développement économique de toutes les couches de la population, y compris les femmes, ainsi que la prise en compte accrue des aspects environnementaux et

3.

respect des droits de l'homme.

La CdG-E adhère au constat relevé par l'OPCA dans son rapport, selon lequel la concrétisation de ces objectifs fait apparaître un effort de cohérence de la politique suisse au sein des institutions de Bretton Woods. Toutefois, elle est également d'avis que, de ce fait, des conflits d'objectifs ne peuvent pas toujours être évités. Les objectifs liés au statut de membre, respectés pour l'ensemble de manière contraignante en dépit des concrétisations partielles qui ont suivi, et l'éventualité de conflits d'objectifs, qui ne peut être exclue de manière absolue, confèrent aux services de l'administration chargés de l'exécution une marge de manoeuvre importante, mais leur fait également endosser des responsabilités de taille lors de la formulation et de la mise en oeuvre de la politique suisse au sein des institutions de Bretton Woods.

Par conséquent, les règlements en matière de compétence et de procédure sont d'une

839

importance capitale pour la politique en résultant. C'est sur cet aspect que porte le chapitre suivant.

2.3

Compétences, coordination et collaboration des acteurs suisses

2.3.1

Activités liées au Fonds monétaire international

Les activités liées au FMI diffèrent de celles liées à la Banque mondiale, ce qui se retrouve dans les compétences des services chargés de l'élaboration des prises de position de la Suisse. Dans le domaine du FMI, la responsabilité principale revient à l'Administration fédérale des finances (AFF) et à la BNS. L'AFF dispose, pour ce domaine, d'un nombre de postes équivalant à 5 postes à temps plein et la BNS de l'équivalent de 4,5 postes à temps plein. Une convention passée entre le Conseil fédéral et la BNS en 1992 a permis dès le début de définir clairement les compétences de l'AFF et de la BNS, l'AFF étant chargée des questions générales et politiques, la BNS des questions techniques. Les positions élaborées par l'AFF ou par la BNS requièrent l'approbation des deux services. Pour la représentation de la Suisse au sein du Conseil d'administration, il existe également des règles précises, qui n'avantagent aucune des deux institutions. Cette répartition des compétences a fait ses preuves et est jugée appropriée par les acteurs. La coordination a lieu de manière informelle et ne semble pas engendrer de problèmes. On remarquera que la signature de la convention en 1992 a constitué une étape importante dans la mesure où elle a permis d'instaurer dès le début des conditions claires et de prévenir des problèmes de coordination. Il convient de mettre l'accent sur la collaboration fructueuse entre l'AFF et la BNS ainsi que sur leur contribution à la stabilité du système monétaire.

Par ailleurs, une ordonnance et des instructions stipulent que, au titre de sa mission de maintien de la cohérence de la politique extérieure suisse, la Direction politique (DP) du DFAE est associée aux activités liées au FMI. Cette compétence revient en particulier à la Division V, chargée des questions économiques et financières. Son effectif chargé du suivi des dossiers liés aux institutions de Bretton Woods représente l'équivalent de 0,25 postes à temps plein. Il s'est avéré, lors de l'exécution, que la DP du DFAE n'est pas très présente dans ce domaine, notamment en raison de ressources limitées. Au final, cette situation semble engendrer peu de problèmes, l'AFF étant elle aussi tenue de respecter les principes de politique extérieure de la Suisse. La CdG-E est d'avis qu'il n'existe pas, dans ce domaine, de besoin d'action direct.

2.3.2

Activités liées au Groupe de la Banque mondiale

Comme il a été évoqué en introduction, l'activité de la Banque mondiale est axée sur la coopération au développement internationale. La loi concernant la participation de la Suisse aux institutions de Bretton Woods ne définissant aucune compétence spécifique pour la position suisse au sein de la Banque mondiale, la loi du 19 mars 1976 sur la coopération au développement et l'aide humanitaire internationales, plus ancienne, s'applique. Cette dernière réglemente notamment l'activité de la Confédération dans le domaine de la coopération au développement; toutefois, elle ne définit elle non plus aucune attribution des compétences aux services. Seul l'art. 1 de 840

l'ordonnance d'exécution (ordonnance du 12 décembre 1977 concernant la coopération au développement et l'aide humanitaire internationales, ci-après désignée OCA; RS 974.01) stipule que la DDC et le seco sont chargés de l'exécution de la loi. La section 2 OCA définit les compétences en matière de coopération au développement: la DDC, le seco et l'AFF sont responsables de la conception globale, sachant que la coordination incombe à la DDC (art. 4 OCA). Si des problèmes généraux ou diverses formes de la coopération au développement sont traités lors de conférences internationales ainsi qu'au sein d'organisations internationales, le DFAE et le DFE préparent en commun la position de la Suisse. La coordination et la représentation de la Suisse à la conférence ou au sein de l'organisation «incombent à l'office fédéral compétent» (art. 5 OCA).

Comme le rapport d'expertise le constate en s'appuyant sur les travaux préparatoires, le Conseil fédéral a attribué au seco les tâches de coordination relatives à la Banque mondiale. Une confirmation en a été faite en 1997 lorsque, après plusieurs tentatives à l'échelon de l'office, le Conseil fédéral a affiné la délimitation des compétences entre le seco et la DDC dans le cadre du projet NOVE. Par conséquent, l'art. 8, al. 3, OCA, aux termes duquel la DDC coordonne l'ensemble de l'aide financière multilatérale, n'est appliqué, pour le domaine de la Banque mondiale, que dans les affaires intérieures, le seco étant compétent pour la coordination avec l'extérieur. Toujours dans le cadre de NOVE, le Conseil fédéral stipule également que toutes les prises de position de la Suisse formulées dans le cadre de la Banque mondiale doivent être élaborées conjointement par les deux offices (cf. art. 8, al. 1, OCA). Avec NOVE Due (1997­2000), des règles détaillées, encore appliquées aujourd'hui, sont formulées par les deux offices concernant la délimitation des compétences. Ces règles définissent également, l'occupation du siège au sein du Conseil des gouverneurs (le chef du DFE est gouverneur, la cheffe du DFAE occupant le poste de vice-gouverneur) ainsi que, au sein d'une procédure accessible à toutes les personnes qualifiées, le poste d'administrateur. Outre des problèmes d'acceptation de cette dernière règle de la part de la DDC, l'OPCA et les experts relèvent dans leur
évaluation différentes zones d'ombre concernant la délimitation des compétences entre la DDC et le seco. Cela vaut plus particulièrement pour les nouveaux sujets traités dans le cadre de la Banque mondiale.

Outre le règlement en matière de compétences, des instances de coordination ont également été créées. Aux termes de l'art. 13 de la loi du 19 mars 1976 sur la coopération au développement et l'aide humanitaire internationales (RS 974.0), un Comité interdépartemental de la coopération au développement et de l'aide humanitaire internationales (CICDA) chargé de la coordination au sein de l'administration a été créé (cf. art. 24 OCA). En charge de questions générales touchant à la coopération au développement, il a cessé ses activités à la fin des années 80. Il a été reconstitué en 1997, sous un autre nom, dans le cadre de NOVE et complété par des instances de coordination à l'échelon des directeurs d'offices (planification stratégique, résolution de conflits de compétences aux échelons inférieurs) et à l'échelon des divisions (trois Comités de pilotage, dont l'un est chargé de l'aide financière multilatérale). Deux ans plus tard, la coordination dans le domaine de la coopération multilatérale a encore été affinée: pour la coordination des activités liées à la Banque mondiale, un groupe de coordination a été créé à l'échelon des sections.

Pour la réalisation de ces tâches, la DDC est dotée d'une section des institutions de Bretton Woods qui dispose d'un nombre de postes équivalant à 4,90 postes à temps plein. Au sein du seco, la responsabilité incombe à la section Institutions financières 841

multilatérales. Les effectifs de celle-ci représentent, pour les activités liées à la Banque mondiale, l'équivalent de 1,70 poste à temps plein, sachant que les secteurs opérationnels du centre de prestations Développement et transition du seco lui apportent un soutien correspondant à 0,6 poste à temps plein.

Les interlocuteurs consultés au cours de l'inspection ont cité différents problèmes dans le domaine des compétences, sachant que tous ne se placent pas dans la même optique. Ont été évoquées les zones d'ombre persistantes, les bases juridiques lacunaires (loi fédérale du 19 mars 1976 sur la coopération au développement et l'aide humanitaire internationales et l'OCA y afférente), les divergences de sensibilité, les luttes de pouvoir occasionnelles entre les deux offices ainsi qu'une certaine domination du point de vue du seco. Dans le domaine de la Banque mondiale, la CdG-E constate un besoin d'action, en dépit des différents efforts positifs déployés par les deux offices et le Conseil fédéral dans le but d'améliorer la délimitation des compétences et en dépit des bonnes relations que semblent actuellement entretenir les collaborateurs des deux offices. Seuls les «insiders» comprennent plus ou moins les structures complexes en matière de compétences. L'idée d'un Bureau interdépartemental, soumise dans ce contexte par différentes personnes interrogées, présente certes un intérêt en tant que proposition de solution; la CdG-E estime toutefois qu'un bureau de cette nature ne serait pas en mesure de résoudre le problème. L'absence, dès l'année de l'adhésion de la Suisse à la Banque mondiale, d'un règlement clair en matière de compétences, l'ampleur des tâches liées à la Banque mondiale et le fait que ces tâches sont réparties sur plusieurs unités d'organisation expliquent dans une large mesure les problèmes et les approches relativement complexes de résolution de ces problèmes. La CdG-E estime en outre important qu'il soit suffisamment tenu compte des avis des deux offices. De même, les activités de l'administration ne doivent pas uniquement fonctionner en raison des bonnes relations des collaborateurs.

Il semble que nombre des personnes interrogées ne connaissent pas les mécanismes de coordination ou, lorsqu'elles les connaissent, ce n'est que très schématiquement.

L'importance du Comité de
pilotage pour l'aide multilatérale est, en revanche, incontestée, bien que ses effets soient perçus très différemment d'une personne à l'autre. Les mécanismes de coordination généraux en vigueur au sein de l'administration (consultations des offices, co-rapport) ainsi que les entretiens stratégiques entre directeurs d'office s'avèrent importants dans la pratique. Si l'on compare ces énoncés avec la perception des problèmes décrite au paragraphe précédent, on constate que les mécanismes de coordination n'ont pu résoudre que partiellement les problèmes de compétences et qu'il existe, là aussi, un potentiel d'optimisation.

On peut en revanche se réjouir de la collaboration fructueuse avec les bureaux de Washington.

La DP du DFAE est un acteur de second plan pour les activités liées à la Banque mondiale, son rôle étant similaire à celui qu'elle joue dans le domaine du FMI (voir les explications sous ch. 2.3.1). L'AFF a également un rôle à jouer, l'art. 4 OCA stipulant qu'elle participe à la conception globale de la contribution suisse à la coopération au développement internationale. Selon l'avis de Dupont/Sciarini, toutefois, les compétences réelles ne sont définies que vaguement. L'OFEFP peut lui aussi intervenir ponctuellement. L'ordonnance du 14 août 1991 concernant l'exécution, dans les pays en développement, de programmes et de projets en faveur de l'environnement global (RS 172.018) attribue des compétences à l'OFEFP dans certains domaines (cf. art. 2, al. 1, let. b). Etant donné que ce manque de clarté ne 842

semble pas avoir eu de répercussions importantes dans la pratique, il n'existe pas de besoin d'action urgent en la matière.

2.3.3

Les rapports entre les deux domaines d'activité

Bien que les domaines d'activité du FMI et de la Banque mondiale diffèrent profondément l'un de l'autre, l'activité du FMI peut avoir des répercussions sur des pays en développement qui, à leur tour, peuvent avoir une incidence sur l'activité de la Banque mondiale. De son côté, la Banque mondiale soutient de plus en plus de programmes structurels de nature plus générale dans les pays en développement. En raison de ces recoupements, on constate ces dernières années un rapprochement des activités des deux institutions. Le FMI et la Banque mondiale sont conscients de cette évolution et des besoins qui en résultent en matière de coordination.

Le législateur suisse a également pris en compte ce rapport de dépendance lorsqu'il a explicitement ancré dans l'art. 6 de la loi fédérale concernant la participation de la Suisse aux institutions de Bretton Woods la prise en considération des principes et objectifs de la politique suisse de coopération au développement pour les activités de la Suisse au sein du FMI. Depuis l'adhésion de la Suisse aux institutions de Bretton Woods, la DDC est dotée d'une section chargée plus particulièrement des dossiers du FMI concernant les pays en développement. L'évaluation de l'OPCA et des experts a toutefois montré que l'influence de la DDC et du seco en matière de coopération au développement concernant les dossiers du FMI est minime. Bien que cette situation soit jugée différemment d'une personne interrogée à l'autre, la CdG-E estime qu'il est important que la volonté du législateur, exprimée dans l'art. 6 de la loi fédérale concernant la participation de la Suisse aux institutions de Bretton Woods, soit respectée et que des efforts soient déployés pour l'intégration suffisante de la DDC et du seco.

Pour les sujets communs au FMI et à la Banque mondiale, il manque des règlements spécifiques pour leur traitement conjoint par les services fédéraux concernés. Il va de soi que les mécanismes de coordination usuels peuvent être utilisés; cependant, les compétences, la responsabilité principale et la coordination ne sont pas axées spécifiquement sur un traitement conjoint. Un travail de coordination est effectué ponctuellement et ad hoc. Or il serait important, dans ce domaine, d'adopter systématiquement un point de vue global dès la phase d'élaboration des positions suisses pour qu'une position homogène puisse être défendue lors d'efforts de coordination entre le FMI et la Banque mondiale.

2.4

Influence de la Suisse

L'influence de la Suisse sur les tâches des institutions de Bretton Woods dépend des facteurs suivants: possibilités d'influence à sa disposition et ampleur de l'utilisation de ces possibilités. Dupont/Sciarini constatent qu'il existe différents canaux d'influence tels que le financement d'études et de rapports, l'organisation de conférences et de séminaires ainsi que la participation à ces conférences et séminaires, l'aide technique, les contributions ciblées à des fonds fiduciaires et autres participations financières à des projets du FMI. Le principal canal est toutefois la représentation au sein des Conseils des gouverneurs et des Conseils d'administration des 843

institutions de Bretton Woods, où les représentants suisses peuvent prendre position par oral (Conseils des gouverneurs et Conseils d'administration) et par écrit (Conseils d'administration) et disposent d'un droit de vote. Leur siège au sein des Conseils d'administration des institutions de Bretton Woods permet en outre aux représentants suisses d'être membres de différents groupes de travail et commissions des deux institutions et de bénéficier d'un accès privilégié aux échelons supérieurs de l'administration des deux institutions.

La Suisse exerce surtout son influence par le biais de son siège au sein des Conseils d'administration des institutions de Bretton Woods. Elle entretient également des contacts fréquents avec l'administration des deux institutions et se sert de sa représentation au sein de certaines commissions. Les prises de position au sein des Conseils d'administration sont généralement orales. En tant qu'instrument d'influence, le droit de vote n'a d'effet qu'indirectement, la Suisse ne pouvant que difficilement obtenir une majorité avec son faible poids éléctoral. Il lui procure toutefois un droit de participation aux débats, aspect non négligeable, d'autant plus que les décisions sont généralement prises par voie de consensus. La Suisse tente d'exercer son influence au sein des Conseils d'administration notamment en élaborant une position élaborée de concert avec d'autres pays. Elle tente de mettre au point, avec d'autres Etats, des positions communes ou compatibles. Elle y parvient généralement avec certains pays européens qui, d'ailleurs, ne sont généralement pas membres du groupe de vote. Quand la crédibilité et le point de vue de la Suisse sont en jeu, la Suisse prendra une position qui lui est propre.

Quels effets la Suisse vise-t-elle en recourant à ces canaux d'influence? Dupont/ Sciarini ont tenté de répondre à cette question en se penchant sur des dossiers sélectionnés et en réalisant trois études de cas. Ils ont identifié quatre facteurs clés pour le succès de la politique poursuivie par la Suisse dans le cadre d'un dossier: la défense d'une position claire et crédible, l'expérience de longue date concernant le domaine spécifique traité, la capacité à former des alliances et le timing choisi. Les efforts suisses ont eu peu d'effet lorsque les positions de la Suisse
ont été rejetées par les grandes puissances et qu'aucune alliance n'a pu être conclue avec d'autres pays. Les études de cas ont démontré en outre que les travaux réalisés par la Suisse auprès de l'administration des institutions de Bretton Woods, en amont des discussions au sein des Conseils d'administration, ainsi que des contacts bilatéraux avec des pays importants ont apporté une contribution essentielle à son succès. Le timing joue également un rôle non négligeable. La Suisse doit s'approprier un sujet avant d'autres pays membres et se donner les moyens pour l'élaboration de sa position. En d'autres termes, la marge de manoeuvre liée à un sujet doit être utilisée tant que les grandes puissances n'ont pas encore arrêté leur position sur le sujet. Ces résultats recoupent en partie les résultats d'un groupe de travail interne à l'administration et mis sur pied par le chef du DFF en été 2000, qui a formulé des recommandations concrètes sur la préservation de la position suisse au sein des institutions financières internationales. La mise en oeuvre de ces recommandations n'étant pas achevée, elle ne peut encore être évaluée en détail. Selon les informations dont dispose la commission, la mise en oeuvre semble toutefois sur la bonne voie. Aux yeux de la commission, il est particulièrement important que le Conseil fédéral et l'Administration fédérale accordent une grande attention au maintien des sièges suisses au sein des Conseils d'administration.

844

En résumé, la CdG-E constate que la Suisse joue un rôle actif au sein des institutions de Bretton Woods, en particulier en raison de son siège au sein des Conseils d'administration, et qu'elle parvient régulièrement à donner du poids à sa position.

Au vu des conclusions de Dupont/Sciarini et des ressources limitées de l'administration fédérale, la CdG-E estime important que la Suisse définisse des priorités pour les dossiers qu'elle doit approfondir et concentre ses efforts sur ces dossiers. Il conviendrait de diversifier les possibilités de contacts avec les services administratifs des institutions de Bretton Woods durant la phase des travaux préliminaires liés à un dossier, de les systématiser et de les intensifier. Cela permettrait une présence plus continue de la Suisse au sein de l'administration de Bretton Woods. De surcroît, il faudrait davantage encourager l'occupation de postes clés au sein de l'administration des institutions de Bretton Woods par des spécialistes suisses.

2.5

Coûts et avantages du statut de membre

Du point de vue de la haute surveillance, les coûts et les avantages du statut de membre des institutions de Bretton Woods de la Suisse sont également importants.

La CdG-E tient au préalable à préciser qu'elle est consciente que, les avantages étant difficilement quantifiables, il n'est pas pertinent de comparer les coûts avec les avantages. Elle a toutefois la conviction qu'une transparence la plus grande possible concernant ces deux aspects relève de l'intérêt public.

2.5.1

Les coûts du statut de membre

2.5.1.1

Dans le domaine de la Banque mondiale

La sous-commission chargée de l'étude a constaté que l'instauration d'une transparence concernant les paiements versés par la Suisse à la Banque mondiale est loin d'être une entreprise aisée. Il existe certes au sein de la Direction politique III (DP III) un service qui effectue chaque année, sous forme cumulée, un relevé des paiements versés par la Suisse à la Banque mondiale et au FMI auprès des offices concernés, mais l'analyse postérieure des données, en particulier anciennes, relatives aux paiements versés à la Banque mondiale représenterait désormais une grande charge de travail pour les services concernés du seco et de la DDC. C'est la raison pour laquelle les données chiffrées présentées ci-après ne sont pas toutes détaillées au même degré. De surcroît, la vue d'ensemble de la DP III ne semble pas être exhaustive, sachant que les services responsables ont confirmé l'exactitude de l'ordre de grandeur de toutes les données. En dépit de ces réserves et faute d'alternatives, la vue d'ensemble a été intégrée au présent rapport dans un souci de présentation de l'ordre de grandeur des paiements effectués (voir tableau 1).

La CdG-E est d'avis qu'il faut, dans le cadre de ces statistiques, distinguer entre les paiements obligatoires liés au statut de membre (contributions générales) et les participations facultatives de la Suisse. Ces dernières consistent pour l'essentiel en des cofinancements. Il s'agit de contributions versées par la Suisse à la Banque mondiale pour un projet déterminé, dans le cadre de sa politique générale de coopération au développement. Il faut en outre opérer une distinction claire entre les participations au capital des institutions de Bretton Woods et les contributions à fonds perdus. Les chiffres de la DP III, présentés dans le tableau 1, contiennent tant 845

les contributions générales que les autres paiements (cofinancements compris) de la Suisse aux institutions de Bretton Woods (à compter de 1992) et ne font pas de distinguo entre les participations au capital des institutions et les paiements non remboursables. Les participations au capital devraient surtout correspondre, dans les rubriques BIRD et SFI, aux statistiques relatives aux premières années de l'adhésion, relevées par la DP III.

Contributions de la Suisse au Groupe de la Banque mondiale 1992­2001 (en millions de CHF) Tableau 1

BIRD AID SFI AMGI

1992

1993

1994

1995

1996

59,4 133,7 40,2

59,9 69,6

58,1 82,9 5,2

59,5 73,7 6,2

75,2 5,9 9,7 21,9 34,8 20,4 405,2 80,9 110,0 106,6 118,0 123,0 145,2 1043,9 10,5 5,1 3,3 21,2 9,8 12,4 114,2 1,0 1,6 3,6 6,2

1997

1998

1999

2000

2001

Total

CIRDI Pas de données sur des paiements de la Suisse au CIRDI

Total BM

233,4 129,5 146,3 139,4 167,7 121,1 119,6 162,8 167,7 181,7 1569,7

BIRD = Banque internationale pour la reconstruction et le développement AID = Association internationale de développement SFI = Société financière internationale AMGI = Agence multilatérale de garantie des investissements CIRDI = Centre international pour le règlement des différends relatifs aux investissements Source: DP III (coordination ONU; état: mi-2003)

La BIRD octroie des crédits aux pays en développement avancé lorsque les banques commerciales estiment trop élevé le risque d'un octroi de crédits à un pays en nécessitant. L'AID remplit la même mission, à ceci près qu'elle alloue des crédits aux pays les plus démunis. Les bénéficiaires des crédits sont, dans les deux cas, les gouvernements des pays concernés (sachant que, pour la BIRD, une garantie du gouvernement pour le bénéficiaire est également suffisante). La SFI a pour mission d'encourager la croissance économique des pays en développement en soutenant le secteur privé de l'économie d'un pays et, pour ce faire, en contribuant à l'acquisition de capitaux à l'intérieur du pays et de capitaux étrangers. La tâche de l'AMGI consiste à encourager les participations au capital et autres investissements directs dans les pays en développement en soutenant l'instauration de conditions propices aux placements (assurance du risque politique et conseils aux pays pauvres en cas d'investissements étrangers, par exemple). La Suisse a adhéré à l'AMGI dès sa création, en 1988. Concernant les contributions générales de la Suisse à ces organisations, il s'agit, en règle générale, de contributions que la Suisse est tenue de verser en raison de son statut de membre de chaque organisation. Ce sont les organisations elles-mêmes qui décident de l'utilisation des moyens financiers. Les intérêts de la Suisse sont défendus par ses représentants au sein des instances des organisations.

Les autres contributions de la Suisse à ces organisations dépendent d'elle seule. Pour les cofinancements, la Suisse dispose d'un droit de codécision important.

Certains chiffres généraux contenus dans la vue d'ensemble de la DP III sont précisés ci-dessous au moyen de données du seco et de la DDC.

846

Le seco n'a pu fournir à la sous-commission que des évaluations sommaires du montant des cofinancements. Pour la SFI, il s'agit de paiements annuels s'élevant à environ 20 à 25 millions de francs (facilités pour le développement de projets, mise sur pied d'institutions pour le secteur privé, fonds fiduciaires de consultants).

D'autres contributions annuelles d'un montant de 7 à 10 millions de francs sont versées à la Banque mondiale dans le cadre de cofinancements. Par ailleurs, des paiements sont effectués auprès du fonds fiduciaire PPTE, lequel vise le désendettement des pays les plus pauvres.

Versements de la Suisse au fonds fiduciaire PPTE (attribué à l'AID) Tableau 2 Année de versement

Montant du versement en CHF

1996 1998 2000 2001 2002

20 000 000 18 000 000 25 000 000 23 500 000 7 600 000

Total

94 100 000

Source: seco (état: août 2003)

Du côté de la DDC, des contributions bilatérales sont également versées à la Banque mondiale, la majeure partie consistant en des cofinancements de projets et programmes de l'AID dans des domaines tels que les ajustements structurels, la santé, l'éducation, l'eau et l'assainissement, la gestion post-conflit, la désertification et le fonds de reconstruction (en Afghanistan, p. ex.) Il en résulte, sous forme de récapitulatif, les montants ci-dessous: Contributions bilatérales de la DDC à la Banque mondiale (en majorité, cofinancements dans le cadre de l'AID) Tableau 3 Année de versement

Montant du versement en CHF

1997 1998 1999 2000 2001 2002

26 050 652 20 921 630 26 715 992 15 370 672 8 435 009 9 981 487

Total

107 475 442

Source: DDC (état: juillet 2003)

847

La CdG-E estime insuffisantes les données existantes. Il faut bien sûr tenir compte de circonstances alourdissant la tâche telles que le nombre des projets et des services impliqués; toutefois, les services responsables ont accordé trop peu d'importance à la transparence dans le domaine des paiements et, par conséquent, à un aperçu homogène des paiements et de la manière dont ils se décomposent, du moins au début. Une meilleure transparence devrait pouvoir être instaurée sans charge de travail trop élevée à condition que soient définis les priorités et des critères clairs et homogènes pour la classification des paiements et qu'une coordination entre les offices ait lieu. Un premier pas a été accompli dans cette direction avec l'introduction de la saisie électronique des données destinées à la DP III. Il convient, à l'avenir, d'accorder une plus grande importance à un concept statistique homogène et transparent, qui donne une vue d'ensemble actualisée de tous les paiements effectués dans le cadre du statut de membre des institutions de Bretton Woods.

2.5.1.2

Dans le domaine du Fonds Monétaire International

Par rapport aux paiements effectués dans le cadre de la Banque mondiale, les coûts occasionnés pour la Suisse dans le cadre du FMI sont relativement faibles. Les crédits de la BNS (soit des crédits rémunérés octroyés au FMI dans le cadre de la quote-part suisse) et les prêts rémunérés et garantis par la Confédération qui sont octroyés aux fonds fiduciaires FRPC et FRPC-PPTE doivent être remboursés; à ce titre, il ne s'agit pas de dépenses. Ne sont donc à relever que les paiements à fonds perdu versés aux fonds fiduciaires mentionnés. Ces deux fonds octroient des crédits à taux préférentiels aux pays les plus pauvres en vue de contribuer à la réduction de la pauvreté et à la croissance de ces pays. La différence entre les taux d'intérêt exigés et les taux d'intérêt du marché est prise en charge par les pays donateurs et le FMI. La Suisse verse des contributions au fonds FRPC depuis 1995 et au fonds FRPC-PPTE depuis 2000. Ce deuxième fonds a une durée de vie limitée dans le temps, tandis que le fonds FRPC devrait s'autofinancer à compter de 2005 et par conséquent ne plus nécessiter de versements de la part de la Suisse. Les paiements ci-dessous ont été versés par la Suisse à ces deux fonds:

848

Paiements versés aux fonds FRPC et FRPC-PPTE (en CHF) Tableau 4 Année de versement

FRPC

FRPC-PPTE

Total

1995 1996 1997 1998 1999 2000 2001 2002 2003

7 492 979 7 436 328 8 260 880 8 505 378 8 288 904 8 204 403 8 514 518 8 170 791 7 782 392

­ ­ ­ ­ ­ 7 000 000 7 179 016 6 456 703 6 046 720

7 492 979 7 436 328 8 260 880 8 505 378 8 288 904 15 204 403 15 693 534 14 627 494 13 829 112

Total

72 656 573

26 682 439

99 339 012

Source: AFF (état: juillet 2003)

Par ailleurs, la Suisse a effectué en 2002 une dotation unique de 1 million de dollars US au Fonds de péréquation des intérêts du FMI pour les crédits d'urgence aux pays touchés par des conflits. Depuis 1998, elle a en outre versé des contributions d'un montant de 3,9 millions de francs, destinées au soutien de l'aide technique apportée par le FMI aux pays du Caucase et d'Asie centrale du groupe de vote suisse.

2.5.2

Avantages que tire la Suisse de son statut de membre

En raison de la formulation générale des objectifs du statut de membre de la Suisse, la réalisation des objectifs est difficile voire très difficile à mesurer. C'est la raison pour laquelle l'OPCA a mis l'accent sur les intérêts, sur les attentes liées au statut de membre et sur les avantages que tire la Suisse de ce statut.

L'OPCA s'est penché sur les avantages du statut de membre en réalisant 47 entretiens et en analysant la littérature en la matière. L'éventail des personnes interrogées était très large et comprenait des représentants des administrations suisse et allemande, des hautes écoles supérieures et des milieux économiques, des ONG ainsi que des consultants. Les avantages les plus souvent cités sont, par ordre décroissant, les possibilités d'influence et de participation de la Suisse, la possibilité de communiquer la position suisse, qui résulte du premier avantage, le gain en renommée internationale pour la Suisse, l'avantage pour l'industrie de l'exportation, la place financière et l'économie en général ainsi que la garantie des biens publics, les synergies entre coopération bilatérale et coopération multilatérale (surtout dans le domaine de la coopération au développement), le transfert de savoir-faire, la formation de réseaux/les possibilités de former des alliances et l'accès aux informations des institutions de Bretton Woods.

849

Nombre de personnes interrogées ont indiqué qu'il était difficile de mesurer les avantages. A titre d'exemple, il est quasiment impossible de quantifier l'avantage que présente un système financier stable, bien que celui-ci existe bel et bien. On ne peut qu'adhérer à ce point de vue. Les avantages que tire la Suisse de son statut de membre peuvent certes êtres constatés, mais ils ne peuvent que difficilement être quantifiés. Différentes études scientifiques viennent confirmer ce constat. La mise en évidence des avantages à la lumière des bénéficiaires n'a pu être faite que partiellement. On peut toutefois affirmer que les pays soutenus par les institutions de Bretton Woods, l'économie suisse, les pays du groupe de vote et la Suisse ellemême tirent parti du statut de membre de la Suisse.

Il est important à ce sujet de remarquer que, selon les conclusions de l'OPCA, les attentes liées à l'adhésion de la Suisse, telles qu'elles ont été formulées dans le message du Conseil fédéral concernant l'adhésion de la Suisse aux institutions de Bretton Woods, ont été remplies dans une large mesure. Dans le cadre de son statut de pays membre, la Suisse contribue à un développement durable mondial et à la création de conditions-cadres favorables à l'industrie de l'exportation. Grâce à son adhésion aux institutions et à sa collaboration en leur sein, elle a gagné en renommée internationale. En outre, elle a désormais accès à toutes les informations du FMI. Il ne peut être apporté de réponse à la question de savoir dans quelle mesure l'industrie de l'exportation suisse se voit attribuer des mandats dans le cadre de projets de la Banque mondiale grâce au statut de membre de la Suisse, les mandats étant de plus en plus souvent octroyés directement par les pays concernés et non pas par la Banque mondiale. Enfin, il est important de souligner qu'aucun inconvénient majeur lié au statut de membre n'a été identifié dans le cadre de l'étude.

2.6

Perception, en Suisse, de la politique de la Confédération en matière d'institutions de Bretton Woods

Dans le cadre de l'étude, plusieurs personnes interrogées extérieures à l'administration fédérale ont indiqué qu'il était difficile d'obtenir une vue d'ensemble actuelle des activités de la Suisse au sein des institutions de Bretton Woods et des responsabilités liées aux dossiers qui en résultent au sein de l'administration fédérale. Les services concernés informent certes régulièrement par le biais de communiqués de presse ou de leur offre Internet, mais une vue centralisée et institutionnelle de ces activités d'information fait défaut. Dans ses rapports de politique extérieure et dans ses rapports annuels d'économie extérieure, le Conseil fédéral propose certes un récapitulatif concernant le statut de membre des institutions de Bretton Woods, mais ces rapports ne font que partiellement ressortir les dossiers actuels et les responsabilités y afférentes au sein de l'administration fédérale. Par ailleurs, l'intervalle de temps entre les différents rapports de politique extérieure, trop important, ne permet pas à ces derniers de donner une vue d'ensemble actuelle.

Un pas important a été récemment accompli dans cette direction avec la nouvelle conception du site Internet de l'AFF: désormais, il propose sur la même page aussi bien certaines informations sur la Banque mondiale que les informations sur le FMI.

Toutefois, les informations relatives au statut de membre de la Banque mondiale de la Suisse présentent des lacunes et aucune mention n'est faite de l'offre Internet de la DDC et du seco. De son côté, l'offre de ces services en matière d'information est 850

fortement forgée par l'optique propre à chacun des offices et contient peu d'informations sur des activités et objectifs concrets actuels de l'office dans le domaine des institutions de Bretton Woods. On y trouve plus facilement un lien vers chacune des institutions que vers les autres offices concernés. Les problèmes de coordination évoqués au ch. 2.3 se retrouvent dans le domaine de la communication.

Dans le cadre de l'enquête, plusieurs personnes déplorent le fait que les efforts des autorités suisses au sein des institutions de Bretton Woods ne sont pas suffisamment perçus et appréciés à leur juste valeur par l'opinion publique suisse. Il n'y a là rien de surprenant au vu des informations éparpillées et souvent trop générales fournies par les services fédéraux concernés.

La CdG-E estime qu'il est important que l'information et la communication relatives aux activités de la Suisse au sein des institutions de Bretton Woods soient davantage concentrées et fassent clairement ressortir les services compétents pour chaque dossier. Au vu des moyens techniques disponibles tels qu'Internet, une information relative au statut de membre des institutions de Bretton Woods et présentée de manière centralisée sous l'angle institutionnel devrait être possible sans occasionner une charge de travail trop élevée. Cela permettrait une plus grande transparence à l'égard du public intéressé; les efforts déployés par les services fédéraux dans l'accomplissement de leurs tâches seraient davantage reconnus et les interfaces avec les ONG seraient améliorées. Une plus grande transparence est en outre justifiée en raison des moyens financiers utilisés. Enfin, il serait souhaitable d'examiner la question de l'établissement d'un rapport annuel sur les activités de la Suisse dans le cadre de son statut de membre des institutions de Bretton Woods.

3

Conclusion

En résumé, la CdG-E constate que le statut de membre des institutions de Bretton Woods n'a pas jusqu'à présent engendré de problèmes importants et que les personnes et services chargés de la préservation des intérêts de la Suisse ont apporté une contribution non négligeable à la bonne réputation de la Suisse au sein des institutions de Bretton Woods et ont ce faisant fait preuve d'engagement et de compétence.

La CdG-E prend également note du fait que les départements responsables et le Conseil fédéral se sont régulièrement efforcés d'améliorer le volet de l'exécution.

Ajoutons toutefois que l'inspection a mis à jour divers domaines présentant encore des potentiels d'amélioration. Ces constats incitent la CdG-E à formuler les recommandations ci-dessous.

Dans le domaine de la Banque mondiale, la délimitation des compétences entre le seco et la DDC est relativement complexe et comporte différentes zones d'ombre.

Les personnes concernées ne connaissent que certains des mécanismes de coordination, lesquels ne semblent pas résoudre entièrement les problèmes de délimitation des compétences. A l'extérieur de l'administration, les responsabilités ne sont que partiellement transparentes.

851

Recommandation 1 Le Conseil fédéral est invité à réexaminer toute la répartition des tâches entre le seco et la DDC dans le domaine du Groupe de la Banque mondiale, à procéder à des simplifications et à éviter autant que possible des compétences dont la définition manque de clarté. Il faut créer une procédure de coordination permettant de résoudre rapidement et avec efficacité, dans le cadre de la conception globale de la coopération au développement suisse, les conflits de compétences, même si ceux-ci ne peuvent entièrement être exclus pour l'avenir. Afin d'avoir davantage de poids, la répartition des compétences et la procédure de coordination devraient être ancrées dans une ordonnance. Cela permettrait en outre d'améliorer considérablement la transparence à l'égard de l'extérieur.

Pour ce qui a trait à l'activité de l'administration fédérale et de la BNS dans le domaine du FMI, il a été remarqué par plusieurs interlocuteurs que les principes de la coopération au développement suisse trouvent trop peu d'écho dans les positions de la Suisse au sein du FMI. Cette perception de la situation est sûrement renforcée par le recoupement de plus en plus fréquent des activités du FMI et de la Banque mondiale. Pour les activités de cet ordre, des attributions de compétences et des mécanismes de coordination clairs font défaut.

Recommandation 2 Le Conseil fédéral est invité à prendre des mesures d'ordre organisationnel pour l'élaboration d'une position équilibrée de la Suisse qui tienne suffisamment compte du recoupement des activités du Fonds monétaire international et de la Banque mondiale. Cela implique que le Conseil fédéral définisse des objectifs stratégiques clairs pour les activités de la Suisse également dans ces domaines.

Lors de l'élaboration de prises de position suisses dans le cadre du Fonds monétaire international, il convient de veiller au respect de l'art. 6 de la loi fédérale concernant la participation de la Suisse aux institutions de Bretton Woods.

La commission a été étonnée par le fait que certains chiffres précis, par exemple les chiffres liés aux cofinancements dans le cadre de projets de la Banque mondiale, n'aient pas pu être livrés à la commission dans le temps imparti. Il faut améliorer les statistiques relatives aux paiements versés par la Suisse aux institutions de Bretton
Woods. Il convient en particulier d'établir, dans le domaine de la Banque mondiale, un concept de statistiques homogène, utilisé par tous les services concernés. Il faut en outre remédier aux zones d'ombre ayant trait à l'attribution d'un versement à une institution de la Banque mondiale. Un aperçu complet devrait rendre transparents ces paiements. Les différents éléments des chiffres cumulés, y compris le but du paiement, devraient être intégrés dans cet aperçu.

852

Recommandation 3 Le Conseil fédéral est invité à élaborer et à mettre en oeuvre un aperçu homogène et exhaustif des paiements et l'engagement de la Suisse au sein des institutions de Bretton Woods. Cela doit également permettre un controlling actualisé, sous l'angle de ces institutions.

Il faut améliorer l'information et la communication relatives aux activités et aux objectifs concrets de la Suisse au sein des institutions de Bretton Woods. L'information devrait au moins être concentrée sur un média sous le titre «Institutions de Bretton Woods» et présenter les compétences clairement définies des services concernés ainsi que les moyens financiers mis en oeuvre par la Suisse. L'exploitation conjointe d'un site Internet par les services concernés et/ou la publication d'un rapport annuel sur les activités de la Suisse au sein des institutions de Bretton Woods sont envisageables.

Recommandation 4 Le Conseil fédéral est invité à examiner l'élaboration d'un concept d'information et de reporting qui regroupe les activités et objectifs de la Suisse au sein des institutions de Bretton Woods.

La Commission de gestion du Conseil des Etats attend du Conseil fédéral qu'il l'informe d'ici mi-avril 2004 des mesures qu'il aura prises sur la base des considérations et recommandations contenues dans le présent rapport.

14 octobre 2003

Pour la Commission de gestion du Conseil des Etats Le président: Michel Béguelin, député au Conseil des Etats Le président de la sous-commission DFF/DFE: Peter Briner, député au Conseil des Etats Le secrétaire de la sous-commission DFF/DFE: Christoph Albrecht

853

Index des abréviations AFF AID al.

AMGI art.

BIRD BNS CdG-E CHF CICDA cf.

CIRDI DDC DFE DFAE DFF DP ex.

FF FMI FRPC OCA OFEFP OPCA ONG PPTE RS seco SFI ss

854

Administration fédérale des finances Association internationale de développement alinéa Agence multilatérale de garantie des investissements article Banque internationale pour la reconstruction et le développement Banque nationale suisse Commission de gestion du Conseil des États Francs suisses Comité interdépartemental de la coopération au développement et de l'aide humanitaire internationale confer Centre international pour le règlement des différends relatifs aux investissements Direction du développement et de la coopération Département fédéral de l'économie Département fédéral des affaires étrangères Département fédéral des finances Direction politique exemple Feuille fédérale Fonds monétaire international Facilité pour la réduction et pour la croissance Ordonnance du 12 décembre 1977 concernant la coopération au développement et l'aide humanitaire internationales, RS 974.01 Office fédéral de l'environnement, des forêts et du paysage Organe parlementaire de contrôle de l'administration Organisations non gouvernementales Pays pauvre très endetté Recueil du droit systématique du droit fédéral Secrétariat d'État à l'économie Société financière internationale suivants