Examen des contacts des services de renseignement suisses avec l'Afrique du Sud du temps de l'apartheid Rapport de la Délégation des Commissions de gestion des Chambres fédérales du 18 août 2003 Avis du Conseil fédéral du 19 décembre 2003

Monsieur le Président, Madame la Conseillère aux Etats, Messieurs les Conseillers nationaux et les Conseillers aux Etats, Le Conseil fédéral a pris connaissance de l'approbation et de la publication de votre rapport du 18 août 2003 sur les contacts des services de renseignement suisses avec l'Afrique du Sud du temps de l'apartheid (rapport, FF 2004 2101).

Le rapport vous a permis de conclure avec satisfaction des investigations poussées sur les relations entre les services de renseignement suisses et ceux de l'Afrique du Sud au temps de l'apartheid. Vous considérez le traitement de cette affaire comme définitivement terminée. Le Conseil fédéral partage cet avis.

Dans le cadre de l'exercice de la surveillance parlementaire ­ l'examen des activités dans le domaine des services de renseignement ­ vous avez déjà examiné, à plusieurs reprises, les relations entre certains services suisses et l'Afrique du Sud au temps de l'apartheid. Les résultats de ces examens ont notamment été publiés en 1993 (Echanges de pilotes avec l'Afrique du Sud) et en 1999 (Rôle des services de renseignement suisses dans le cadre des relations entre la Suisse et l'Afrique du Sud).

De surcroît, le 4 octobre 1999, s'ouvrait en Afrique du Sud le procès du médecin sud-africain Wouter Basson, l'ancien chef du projet «Coast», lors duquel de nouveaux soupçons et de nouvelles accusations avaient été portés contre l'ancien Groupe des renseignements et contre son chef d'alors, le divisionnaire Peter Regli.

C'est ainsi que Wouter Basson, lors de son procès, a déclaré, entre autres, qu'il avait été soutenu par les services de renseignement suisses, et notamment par le divisionnaire Peter Regli, dans le cadre du projet «Coast». D'autres sources ont également mentionné un accord entre la Suisse et l'Afrique du Sud dans les domaines de la biologie et de la chimie. Etant donné que ces nouveaux éléments ont alimenté les soupçons selon lesquels les anciens rapports de la délégation avaient pu être lacunaires, votre délégation a décidé, à la mi-novembre 2001, de reprendre ses investigations.

De par vos examens, qui ont été menés sur plus d'une année et dans le cadre desquels de nombreuses personnes ont été interrogées et ­ selon vos propres données ­ toutes les sources d'information mises à votre disposition en Suisse ont été utilisées et
évaluées, vous avez pu vous faire une idée globale des relations des services de renseignement suisses avec l'Afrique du Sud du temps de l'apartheid. Le Conseil 2004-1164

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fédéral apprécie cette procédure largement étayée grâce à laquelle la lumière a pu être faite sur de nombreuses accusations portées depuis longtemps déjà contre certaines personnes ou services. Le Conseil fédéral vous remercie de cette analyse approfondie et des réponses que vous avez apportées.

Comme l'ont montré vos investigations, la mise à jour des relations entre les services de renseignement suisses et l'Afrique du Sud s'est avérée être une affaire plutôt complexe. C'est en raison même de la complexité du sujet et de l'étendue de la période soumise à examen qu'il est aisé de comprendre que certaines circonstances ont pu donner lieu à des interprétations bien différentes, en particulier si l'on tient compte du point de vue sur la situation du moment. Dans l'ensemble, le Conseil fédéral partage la plupart de vos constatations et de vos appréciations, en particulier celles qui précisent que le rapport final de votre délégation rend superflu la poursuite d'investigations sur le rôle des services de renseignement suisses avec l'Afrique du Sud et que l'affaire doit donc être considérée comme close ­ sous réserve de faits nouveaux importants.

D'autre part, le Conseil fédéral juge diversement certaines constatations et appréciations. Les trois thèmes spécifiques ci-après doivent être traités brièvement, mais avec toute l'attention requise.

Reproches adressés à la direction actuelle du RS: Sur divers points, le rapport se montre critique à l'égard de l'actuelle direction du Renseignement stratégique (RS), car celle-ci n'a pas pu satisfaire tous les besoins en informations de votre délégation. L'actuelle direction du RS ne peut communiquer des renseignements ­ qu'en cas d'obligation et en dernier recours ­ que si elle-même dispose effectivement de telles informations. En raison de l'état lacunaire ­ en matière de preuves ­ des dossiers et du fait que les cadres actuels du RS ne connaissaient pas tout ce qui se déroulait au sein de l'ancien Grrens, il est simplement impossible de se prononcer clairement ou d'attendre d'elle des déclarations sur des faits qui se sont déroulés il y a dix ans et plus, quelque souhaitables que ces déclarations puissent être. Le Conseil fédéral estime donc qu'il est injustifié de considérer l'actuelle direction du RS comme co-responsable, même indirectement, des lacunes
constatées dans les dossiers remontant à l'époque du Grrens.

Appréciation des prescriptions relatives au maintien du secret et élargissement illicite des contacts des services de renseignement dans le cadre de la discussion politique: Le rapport précise, entre autres choses, que «le maintien exagéré du secret a finalement pour but d'éviter toute discussion politique sur les activités, l'efficacité et la direction politique des services de renseignement» (rapport ch. 13.5).

Face à ces déclarations et à d'autres déclarations similaires, le Conseil fédéral se doit d'émettre un certain nombre de réserves, car il est d'avis qu'avec une telle approche, les besoins particuliers de la protection des services de renseignement et la nécessité des prescriptions relatives au maintien du secret qui en découlent ne sont pas suffisamment différenciés.

Du point de vue du Conseil fédéral, la protection des informations des services de renseignement doit notamment protéger les objectifs, les moyens et les méthodes de ces services. Elle permet avant tout la protection des sources, qui est explicitement

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inscrite dans la loi fédérale sur l'armée et l'administration militaire (LAAM)1 et dans la loi fédérale instituant des mesures visant au maintien de la sûreté intérieure (LMSI)2 pour le trafic avec l'étranger, permet de protéger la personnalité des membres des services de renseignement.

Ainsi, la raison pour laquelle des contacts ­ et donc des procès-verbaux de contacts ­ et tous les documents relatifs à des voyages de service sont classifiés tient uniquement au fait que les sources sont protégées. Même si, aux yeux de tiers, le contenu de certains documents s'avère sans importance, le principe de la protection des sources commande la classification de ces derniers. Pour tout service de renseignement, la protection des sources est un principe de base qui a la priorité maximale.

L'application de ce principe garantit que les personnes ou services concernés contribuant à l'acquisition et à la transmission d'informations sensibles ne vont pas subir de préjudices. C'est donc là une condition inaliénable de la préservation de la sécurité des membres des services de renseignement (gestionnaire des sources) et de leurs fournisseurs en informations sensibles (sources). Cette protection doit impérativement être si complète qu'il ne doit, en aucun cas, être possible d'établir des recoupements avec les activités ou les contacts des services de renseignement. Si la protection des sources ne peut être garantie, les sources se tarissent immanquablement.

Défaut d'appréciation adéquate du processus de réorientation: Le Conseil fédéral regrette que le processus de réorientation touchant les bases mêmes des services de renseignement du DDPS ­ processus engagé par le DDPS au cours de l'an 2000 ­ n'ait que peu été mentionné dans le rapport, n'étant en fait abordé que dans le cadre des recommandations qui lui sont jointes. Ces circonstances donnent malheureusement crédit à l'impression certes fausse que les lacunes relevées par la délégation au sein du RS existeraient toujours. Or, il faut relever, au contraire, que c'est précisément sur la base de l'expérience et des enseignements tirés du passé que des changements marquants et d'importance politique ont été réalisés, ces dernières années, dans le cadre du processus de réorientation. Ainsi, le RS ­ du fait de la mise en place des nouvelles bases juridiques ­ doit,
par exemple, obtenir à l'avance l'approbation du Conseil fédéral pour lier des contacts réguliers avec des services partenaires à l'étranger. D'autre part, depuis longtemps déjà, le Conseil fédéral donne régulièrement des informations, par la voix du chef du DDPS, sur les contacts du RS avec des services partenaires, ce que fait, par ailleurs aussi, le directeur du RS à l'égard de votre délégation. Le Conseil fédéral, dans une lettre du 10 avril 2002 envoyée à votre délégation, vous a adressé un rapport circonstancié, classifié SECRET, sur la coopération des services de renseignement suisses avec des services étrangers, rapport qui traite globalement et juge l'utilité de tels contacts.

Malheureusement, cet avis d'importance politique que le Conseil fédéral vous a donné n'a pas trouvé d'écho dans votre rapport.

Malgré ces remarques et ces divergences, le Conseil fédéral est tout à fait d'avis que le rapport global de votre délégation stimulera le développement constant des instruments de gestion et de contrôle concernant les services de renseignement. Il approuve la plupart des recommandations et constate que le DDPS ­ et le RS en particulier ­ a, par le passé déjà, pris diverses mesures en ce sens.

1 2

Art. 99, al. 4, LAAM, RS 510.10 Art. 17, al. 7, LMSI, RS 120

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Du point de vue du Conseil fédéral, les diverses recommandations et constatations tirées du rapport ont été jugées comme suit (cf. ch. 13 du rapport): A propos de la recommandation 13.1

Instrumentaire de la DélCdG sur la surveillance des services de renseignement

La commission considère souhaitable que la loi sur le Parlement accorde à la DélCdG la possibilité d'interdire ou d'interrompre des enquêtes administratives ou disciplinaires sur des faits ou des personnes qui font l'objet de ses propres investigations.

La recommandation 13.1 n'est pas jugée ici: Le Conseil fédéral ne s'étend pas, ici, sur cette recommandation; celle-ci constitue toutefois le sujet principal d'un autre rapport de la DélCdG (sur la limitation des enquêtes de la Délégation des Commissions de gestion aux enquêtes administratives internes, à l'exemple des révélations sur «l'Afrique du Sud»; rapport de la DélCdG du 30 septembre 2003) qui sera approuvé et publié sous peu.

En ce qui concerne ce rapport complémentaire, le Conseil fédéral donnera également son avis à la DélCdG d'ici à la fin 2003.

A propos de la constatation 13.2

Direction politique et définition des besoins des services de renseignement

La commission, depuis la publication de son dernier rapport (1999), salue les efforts du département sur la voie des réformes entreprises. Même si ces dernières n'ont pas encore abouti, la DélCdG renonce à émettre d'autres recommandations à ce propos.

La Délégation du Conseil fédéral pour la sécurité fixe les priorités dans l'établissement des rapports des services de renseignement. Les instruments de travail qui s'y rapportent ont fait leurs preuves, comme l'a également démontré, au printemps 2002, un rapport final de cette même délégation sur une procédure d'évaluation spécialement mandatée pour traiter ce thème. Le Conseil fédéral considère comme allant de soi que l'organe de direction de ces instruments de gestion en matière de politique de sécurité soit, à l'avenir aussi, soumis à un contrôle régulier et continue de se développer.

A propos de la constatation 13.3

Primauté de la politique

La commission espère un effet à long terme de la révision, décidée par le Parlement, de la loi fédérale sur l'armée et l'administration militaire, laquelle précise que le Renseignement stratégique est désormais directement subordonné au chef du DDPS.

En subordonnant directement le RS au chef du DDPS à compter du 1er janvier 2004, le Parlement a suivi les précédentes recommandations de la DélCdG sur le Service 2906

de renseignement. En retirant le RS de l'Etat-major général pour l'intégrer au Secrétariat général du DDPS, la recommandation selon laquelle le RS devrait être dans les environs immédiats de la direction politique s'est concrétisée en 2001 déjà. Depuis quelque temps, des entretiens entre le chef du DDPS et le directeur du RS ont lieu tous les mois. La subordination directe formelle, et pas simplement de facto, au chef du DDPS montre désormais ­ même aux yeux de l'étranger ­ que les autorités politiques suisses sont désireuses de donner au Renseignement stratégique de notre pays l'importance qu'il mérite et d'assumer la responsabilité politique de sa direction.

A propos de la recommandation 13.4

Contrôle de l'efficacité et de la qualité

La commission considère qu'il est impératif que le rapport entre les coûts et l'utilité des activités des services de renseignement soit analysé sur un plan général. Elle invite donc le Conseil fédéral à prendre les mesures qui s'imposent pour que la plus-value que constitue le Service de renseignement suisse pour la sécurité du pays, et en particulier son efficacité, puisse être mesurée.

Le Conseil fédéral considère que la recommandation 13.4 mérite d'être étudiée: La demande de la DélCdG d'analyser la relation entre les coûts et l'utilité des activités des services de renseignement afin que la «plus-value qui en résulte, et en particulier son efficacité, puisse être mesurée» est, pour le Conseil fédéral, envisageable.

Quant à savoir jusqu'à quel point cette demande peut obtenir un résultat pratique, seules des investigations poussées pourront, à l'avenir, fournir des renseignements précis.

A l'instar de tous les pays, la Suisse sait aussi que le gouvernement peut prendre des décisions en se fondant sur une source d'information qui soit aussi indépendante que possible. Dans le domaine de la politique de sécurité en particulier, des informations qui ne peuvent être rendues publiques sont souvent nécessaires et doivent donc être acquises par le biais des services de renseignement. La vraie valeur de telles informations, en raison des décisions prises sur le plan de la politique de sécurité et qui les concernent, ne se vérifie généralement qu'après coup, et vraisemblablement aussi dans des dimensions qui n'intéressent, au premier chef, que les historiens. Tout aussi difficile est l'appréciation de l'utilité d'une analyse des services de renseignement qui, de par sa nature, doit traiter les possibilités futures de l'évolution de la situation, ainsi que d'éventuels scénarios et autres conjectures.

C'est la tâche évidente de tout bénéficiaire des produits des services de renseignement que d'ambitionner, par le dialogue avec le fournisseur, un accroissement continu de la qualité. D'ailleurs, le Renseignement stratégique du DDPS a, ces derniers temps, fourni de gros efforts pour institutionnaliser ce contrôle de la qualité.

Votre délégation a été informée par le DDPS, en automne 2003, de l'avancement des travaux.

La question de l'efficacité de ces prestations fournies par le RS est une tâche relevant
de la gestion d'entreprise qui doit être menée dans le cadre du développement du processus de gestion appliqué au domaine des services de renseignement. Au train où va l'introduction du nouveau modèle comptable de la Confédération, et en particulier avec le compte coûts-prestations, le Conseil fédéral s'attend à d'autres

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progrès dans la direction espérée par la DélCdG. Dans ce sens, la recommandation de la DélCdG peut et doit être suivie.

A propos de la recommandation 13.5

Prescriptions relatives au maintien du secret

La commission recommande au Conseil fédéral d'examiner la pratique du maintien du secret appliquée par le Service de renseignement et, au besoin, d'adapter les prescriptions correspondantes au contexte politique actuel.

Le Conseil fédéral est prêt à concrétiser la recommandation 13.5: Du point de vue du Conseil fédéral, rien ne s'oppose à ce que les bases juridiques en vigueur soient examinées dans le détail pour ce qui concerne d'éventuelles lacunes au niveau des prescriptions relatives à la protection de l'information et à ce que, le cas échéant, des révisions soient menées à bien. Dans la pratique, il existe effectivement diverses réglementations pour les services de renseignement du DDPS et du DFJP. Dès lors, le Conseil fédéral accueille favorablement, dans son ensemble, l'uniformisation de ces prescriptions et leur concentration sur les intérêts des services de renseignement dignes d'être protégés. Dans tous les cas, ces prescriptions doivent garantir une surveillance et un contrôle conséquents et transparents des activités par les organes habilités à le faire.

Le Conseil fédéral est d'avis que cette problématique de la protection des informations doit être traitée dans le cadre d'un mandat donné par la Délégation pour la sécurité aux services administratifs compétents issus du processus de direction de la politique de sécurité. Par ailleurs, renvoi est fait à toutes les dispositions précédentes prises dans la perspective de la protection des informations des services de renseignement.

A propos de la recommandation 13.6

Archivage et gestion des dossiers

La commission invite le Conseil fédéral, en vue de la révision imminente de l'Orens, à édicter des prescriptions sur la gestion des dossiers du Service de renseignement et de veiller à l'application de la loi sur l'archivage, même dans ce domaine des activités de l'Etat.

La recommandation 13.6 est en passe de se concrétiser: Depuis quelques temps déjà, le RS coopère en effet avec les Archives fédérales en vue de concrétiser cette recommandation. Cette coopération sera intensifiée, dans un proche avenir, par la mise en application des règles définies par l'art. 12 de l'ordonnance entièrement révisée du 26 septembre 2003 sur l'organisation des services de renseignements au sein du Département fédéral de la défense, de la protection de la population et des sports (Orens; RS 510.291; en vigueur à compter du 1er janvier 2004) pour tout ce qui concerne les documents classifiés obtenus dans le cadre de contacts directs avec des services étrangers ou dans le cadre de l'acquisition opérative.

Le Conseil fédéral est d'avis que le bon déroulement et la transparence des activités de l'administration n'ont de rapport immédiat ni avec la livraison de dossiers aux 2908

Archives fédérales, ni avec la classification de documents. Ils résultent plutôt d'une gestion ordonnée, conforme à la loi et systématique des dossiers. Dans le cadre d'un projet interne au DDPS, les prescriptions spécifiques relatives à l'organisation de l'administration des affaires, de la gestion des dossiers et de l'archivage au RS sont également émises en collaboration avec les Archives fédérales.

A propos de la recommandation 13.7

Coopération avec les sources et les informateurs

La commission considère qu'il est indispensable que des règles standard claires soient élaborées pour donner un cadre à la sélection, à l'instruction et au financement d'informateurs du Service de renseignement, et que des mécanismes de contrôle appropriés soient introduits. De telles dispositions devraient indubitablement concerner tous les services de renseignement de la Confédération et pas uniquement ceux du DDPS.

Le Conseil fédéral est d'avis ­ contrairement à la définition de la protection des sources ­ qu'une réglementation standard de la gestion des sources n'est pas opportune pour tous les services de renseignement et que la recommandation est déjà partiellement appliquée: La gestion des sources est un thème crucial de l'instruction de plusieurs mois donnée aux gestionnaires des sources du RS. Il existe, dans ce cadre, des directives contraignantes pour le recrutement, la gestion et le financement de prestations relevant des sources HUMINT. Le contrôle de la gestion des sources est assuré par «l'Intelligence Reporting» avec lequel les activités et les prestations des sources HUMINT sont enregistrées et documentées. Le déroulement du financement ­ en fonction des prestations ­ des sources HUMINT est soumis à un contrôle interne à plusieurs échelons dans lequel les supérieurs directs des gestionnaires des sources et la direction du RS sont impliqués. En outre, les gestionnaires des sources doivent, chaque année, rendre des comptes, à la façon d'un sondage, au représentant de l'inspection des finances.

Au DDPS, le RS est le seul service de renseignement à gérer et à indemniser les sources HUMINT. La gestion des sources du RS n'est comparable avec celles des autres services de renseignement de la Confédération que dans des proportions limitées. C'est pour cette raison que le Conseil fédéral considère inopportunes la standardisation et la généralisation, pour des raisons techniques, de la réglementation de la gestion des sources.

Au DFJP, la gestion des sources du Service d'analyse et de prévention (SAP), et de l'ancienne Police fédérale, est décrite depuis des années dans un manuel interne. Le DFJP l'a déjà présenté dans les détails à la DélCdG. Il est valable tant pour le SAP que pour les organes de protection de l'Etat des cantons, si tant est que ces derniers gèrent des sources et des
informateurs dans le champ d'application de la loi fédérale du 21 mars 1997 instituant des mesures visant au maintien de la sûreté intérieure (LMSI). A ce propos, le manuel ne règle pas de façon contraignante et exclusive la gestion des sources. Pour une part, il ne peut, du reste, établir des règles dérogatoires en sortant du cadre légal ; d'autre part, chaque cas de mise en service d'une source potentielle, et de sa gestion future, doit être jugé individuellement sur la base de son éventuelle utilité, des coûts engendrés et des risques encourus.

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Le manuel du SAP est actuellement mis à jour. Le DFJP tient la délégation informée des éventuelles nouveautés. Par ailleurs, la gestion opérative des sources est aussi contrôlée dans le cadre du paquet de révision de la LMSI II sur le besoin d'agir au niveau législatif.

Le Conseil fédéral est d'avis que la responsabilité directionnelle des responsables des services de renseignement revêt une importance cruciale, tout particulièrement dans le domaine des activités opératives. S'ajoute à cela que, dans le champ d'application de la LMSI, sont définis des devoirs spécifiques de fournir aux organes politiques des rapports sur les opérations en cours impliquant la gestion des sources des services de renseignement.

En relation avec les activités d'investigation des services de renseignement du DDPS et du DFJP, il faut encore prendre en considération le fait que les conditions régissant les investigations menées sur le territoire national (SAP, en se fondant sur la LMSI) et celles menées à l'étranger (RS, en se fondant sur l'art. 99 LAAM) diffèrent beaucoup. Les investigations sur le sol national se déroulent toujours en fonction du cadre juridique propre à la Suisse ou selon les règles de la coopération avec des services partenaires étrangers approuvées sur la base de la LMSI. Les investigations à l'étranger sont régies par la LAAM, mais peuvent aussi, dans les cas de nécessité, s'effectuer en dehors du domaine d'application du droit suisse. Par conséquent, l'acquisition et la gestion des sources doivent être adaptées aux particularités de chaque cas. L'élaboration de directives générales pour ces deux modes d'activités fondamentalement différents ne s'avère, dès lors, pas opportune.

A propos de la constatation 13.8

Projet «Coast»

La commission arrive à la conclusion qu'il n'existe aucun indice prouvant que le Service de renseignement suisse, le Groupement de l'armement ou un de leurs collaborateurs, et en particulier Peter Regli, ont été impliqués dans l'affaire du projet «Coast».

C'est avec satisfaction et soulagement que le Conseil fédéral prend connaissance de cette constatation.

A propos de la constatation 13.9

Coopération de l'administration dans le cadre des investigations de la DélCdG

La commission proteste contre le fait qu'en diverses circonstances, les services et les employés concernés par ses investigations ont parfois mis de la mauvaise volonté à fournir des renseignements, renseignements d'ailleurs toujours lacunaires. Pour la DélCdG, la méfiance de l'administration à son égard, allant même jusqu'à des manoeuvres d'obstruction, est intolérable.

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Le Conseil fédéral rejette les reproches lorsqu'ils sont adressés globalement à des services ou à l'administration en général: Le Conseil fédéral regrette que la DélCdG ait été confrontée à de pareilles difficultés au cours de ses investigations. Il est cependant convaincu qu'il ne s'agit pas là de l'expression d'une méfiance fondamentale de l'administration à l'encontre de la DélCdG.

Selon les estimations du Conseil fédéral, les investigations de la DélCdG, tout comme celles des autres services, se sont parfois déroulées dans un climat politique animé. De temps à autre, l'objectivité en a fait les frais. Le Conseil fédéral et l'administration fédérale reconnaissent sans réserve le pouvoir de haute surveillance du Parlement sur les services de renseignement. Mais parler d'obstruction pour définir les difficultés rencontrées est une interprétation que le Conseil fédéral ne partage pas.

Le Conseil fédéral remercie la DélCdG de l'occasion qui lui a été donnée de prendre position sur ce sujet. Par ailleurs, le Conseil fédéral, de même que les départements principalement concernés par le rapport, se déclarent prêts à informer, à l'avenir également, la DélCdG sur l'évolution des travaux relatifs à ses recommandations.

En vous remerciant de l'attention que vous aurez bien voulu porter au présent avis, nous vous prions Monsieur le Président, Madame la Conseillère aux Etats, Messieurs les Conseillers nationaux et les Conseillers aux Etats, d'agréer notre haute considération.

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Au nom du Conseil fédéral suisse: Le président de la Confédération, Pascal Couchepin La chancelière de la Confédération, Annemarie Huber-Hotz

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