03.079 Message relatif à la Charte européenne de l'autonomie locale du 19 décembre 2003

Messieurs les Présidents, Mesdames et Messieurs, Par le présent message, nous vous soumettons, en vous proposant de l'approuver, un projet d'arrêté fédéral concernant la Charte européenne de l'autonomie locale.

Nous vous prions d'agréer, Messieurs les Présidents, Mesdames et Messieurs, l'assurance de notre haute considération.

19 décembre 2003

Au nom du Conseil fédéral suisse: Le président de la Confédération, Pascal Couchepin La chancelière de la Confédération, Annemarie Huber-Hotz

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Condensé La Charte européenne de l'autonomie locale1 a été élaborée par le Conseil de l'Europe et ouverte à la signature en 1985. Elle vise à protéger et à renforcer l'autonomie locale en Europe. La Charte contient des principes d'ordre politique, administratif et financier qui garantissent aux collectivités locales une gestion aussi autonome que possible des affaires communales.

Comme l'écrivait le Suisse Adolf Gasser dans la préface à son ouvrage L'autonomie communale et la reconstruction de l'Europe: Principes d'une interprétation éthique de l'histoire2, «une complète liberté d'appréciation des communes est la condition première, sine qua non, de tout processus d'assainissement de l'Europe». Les idées contenues dans cet ouvrage, dont la première édition en langue allemande a paru en 1943, ont contribué de façon essentielle au renforcement de l'institution communale en Europe. La Charte qui fait l'objet du présent message peut être considérée comme la transposition en normes juridiques internationales des principes qui y avaient été énoncés.

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Dans la terminologie utilisée en Suisse, il est plus usuel d'utiliser le terme autonomie communale que celui d'autonomie locale.

Adolf Gasser, L'autonomie communale et la reconstruction de l'Europe: Principes d'une interprétation éthique de l'histoire, Neuchâtel, 1946; traduction en français du texte original allemand «Gemeindefreiheit als Rettung Europas / Grundlinien einer ethischen Geschichtsauffassung». L'ouvrage a également été traduit en italien.

Message 1

Partie générale

1.1

Introduction

L'autonomie locale contribue incontestablement à renforcer démocratiquement du bas vers le haut toute structure étatique. Cet axiome peut être considéré comme faisant partie du patrimoine commun européen3. Au vu de la grande diversité des structures institutionnelles, des systèmes juridiques et des traditions politiques qui caractérise les pouvoirs locaux dans les différents pays de l'Europe, c'est un indéniable mérite du Conseil de l'Europe d'avoir ancré l'autonomie locale dans un texte ayant qualité de traité international4.

Avec le passage, dans les années 90, des pays d'Europe centrale et orientale à la démocratie et leur progressive adhésion au Conseil de l'Europe, les principes contenus dans la Charte se sont étendus à tout le continent, même si leur réception n'a pas été égale partout5.

La Charte européenne de l'autonomie locale constitue, avec les autres conventions européennes qui ont vu le jour à l'initiative des autorités locales et régionales6, une pièce maîtresse du système des conventions du Conseil de l'Europe.

1.2

Genèse de la Charte et état des ratifications

La gestation de la Charte a une histoire de quelques décennies. Ce fut en 1953, à Versailles, que fut acceptée, lors de la Journée européenne des communes7, une «Charte européenne des libertés communales». L'idée de renforcer les pouvoirs locaux a fait son chemin, dans les années 60, au sein des institutions du Conseil de 3

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C'est le constat formulé par Franz-Ludwig Knemeyer dans son étude Die Europäische Charta der kommunalen Selbstverwaltung, parue peu après l'entrée en vigueur de la Charte dans la Zeitschrift für öffentliches Recht und Verwaltugswissenschaft, Stuttgart, 1988.

Une intéressante analyse des différents systèmes en place dans les pays d'Europe occidentale qui figuraient parmi les signataires de la Charte ­ la Suisse est toutefois également comprise dans l'étude ­ est offerte par Philip Blair, Die Gestaltung der kommunalen Selbstverwaltung in den europäischen Staaten, Zeitschrift für öffentliches Recht und Verwaltungswissenschaft, Stuttgart, 1988. Pour des données plus actuelles, nous renvoyons à l'étude menée par le Conseil de l'Europe avec le concours des autorités nationales et des associations des pouvoirs locaux actives dans les différents pays La régionalisation et ses conséquences sur l'autonomie locale, n° 64 série «Communes et régions d'Europe», Strasbourg, 1998.

On ne peut pas nier certaines faiblesses dans l'organisation de la démocratie locale dans certains pays, du moment que, comme l'a observé le directeur exécutif du Congrès des pouvoirs locaux et régionaux de l'Europe lors d'une allocution présentée le 5 mai 2003 à Bâle à l'occasion du 40me anniversaire de la présence de la Suisse au Conseil de l'Europe, «il arrive que l'élection d'un nouveau maire entraîne la substitution de la plupart des chefs des services communaux!».

Il s'agit de la Convention-cadre européenne du 21 mai 1980 sur la coopération transfrontalière des collectivités ou autorités territoriales (RS 0.131.1) et de la Charte européenne du 5 nov. 1992 des langues régionales ou minoritaires (RS 0.441.2).

L'initiateur de cette journée avait été le Conseil des communes d'Europe.

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l'Europe. Le Comité des Ministres fut saisi, en effet, d'une recommandation proposée conjointement par la Conférence des communes d'Europe8, institution chargée de la promotion et de la sauvegarde des intérêts des pouvoirs locaux, et l'Assemblée consultative9. Cette recommandation, d'un caractère très général, ne permit pas d'aboutir à une action plus concrète.

Durant les années qui suivirent, la Conférence permanente des pouvoirs locaux et régionaux de l'Europe, consciente de la nécessité de créer un cadre juridique fixant les principes de l'autonomie locale, décida d'élaborer une convention spécifique. Un projet de Charte européenne de l'autonomie locale fut soumis, en 1981, au Comité des Ministres. Ce premier projet fit l'objet d'un examen préalable de la part des Etats lors de la 5e Conférence des ministres européens responsables des collectivités locales, qui eu lieu, à Lugano, du 5 au 7 octobre 1982. A cette occasion, des réserves furent émises quant à la nécessité d'inscrire le principe de l'autonomie locale dans un instrument juridique contraignant, même si le principe général de l'autonomie locale fut unanimement reconnu.

Lors de la 6e Conférence des ministres européens responsables des collectivités locales (Rome, 6/8 novembre 1984), la majorités des Etats se déclara favorable à la forme juridique d'une convention. Ce résultat a été rendu possible grâce à l'introduction d'un article demandant aux Etats de choisir les dispositions applicables pour le territoire national. L'introduction de cet article a permis au Comité des Ministres, en juin 1985, d'adopter la Charte, qui fut ouverte à la signature le 15 octobre 1985.

La Charte est entrée en vigueur le 1er septembre 1988, après quatre ratifications. Elle est en passe d'être ratifiée par les 45 pays que compte aujourd'hui le Conseil de l'Europe.

Trois Etats (la Belgique, la France et la Géorgie) l'ont signée mais pas encore ratifiée. En Belgique, la procédure d'approbation des parlements des différentes régions et communautés du pays est en cours. En France, suite notamment au colloque organisé à Paris le 26 juin 2001 par le Sénat avec le concours du Congrès des pouvoirs locaux et régionaux de l'Europe (CPLRE) sur le thème de la décentralisation, les procédures en vue de la ratification sont près d'aboutir.

La Suisse figure parmi les pays qui n'ont pas encore signé la Charte, les autres étant Andorre, Saint-Marin10 et la Serbie-Monténégro11.

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La Conférence avait succédé en 1962, en tant qu'organe permanent, au Conseil des communes d'Europe. En 1975, la Conférence devint la Conférence permanente des pouvoirs locaux et régionaux de l'Europe et, depuis 1994, le Congrès des pouvoirs locaux et régionaux de l'Europe (CPLRE).

L'Assemblée parlementaire, selon l'organisation actuelle.

Ceci s'explique pour des raisons institutionnelles, au vu du peu d'importance du niveau communal dans ces deux pays.

Ce pays vient de rejoindre l'organisation le 3 avril 2003 seulement.

1.3

Portée de la Charte

La Charte a pour but de définir le cadre général du statut des collectivités locales dans l'Etat. Elle contient des principes d'ordre politique, administratif et financier qui garantissent aux collectivités locales une gestion aussi autonome que possible des affaires communales. Elle garantit l'indépendance politique et économique des collectivités locales dans les affaires les concernant à l'égard du pouvoir central et des autres instances étatiques ou administratives.

La Charte vise, sans pour autant unifier le droit dans le domaine de l'organisation des communes dans les Etats membres du Conseil de l'Europe, l'établissement d'un standard minimum applicable dans le contexte d'une pluralité de régimes juridiques.

Pour respecter les spécificités des Etats, elle propose un système «à la carte» qui permet d'opérer le choix des dispositions applicables (cf. ch. 2.2 du présent message).

A la différence, par exemple, de la Convention européenne des droits de l'homme12, souvent considérée comme son équivalent en ce qui concerne les droits individuels, la Charte européenne de l'autonomie locale ne prévoit pas de mécanisme de contrôle institutionnel du respect des libertés communales13. On a estimé pouvoir se passer d'un système de surveillance complexe, étant donné que la Conférence permanente des pouvoirs locaux et régionaux de l'Europe ­ devenu le Congrès ­, qui a directement accès au Comité des Ministres, assure un contrôle politique suffisant du respect de la Charte par les Parties; un mécanisme de contrôle, consistant en l'établissement de rapports, s'est développé avec le temps. L'établissement de ces rapports a été confiée à un groupe de travail composé de onze membres représentant les deux chambres du CPLRE (celle des pouvoirs locaux et celle des pouvoirs régionaux); le groupe de travail est assisté par un comité d'experts indépendants. A ce jour, six rapports ont été établis14. Parallèlement, que les Etats aient signé ou non la Charte, des rapports sont établis par la Commission institutionnelle du CPLRE sur la situation de la démocratie locale et régionale dans les pays membres et dans les pays candidats. La Suisse est représentée au CPLRE au niveau cantonal et communal par six délégués, trois Conseillers d'Etat et trois syndics ou présidents de commune.

Leur possibilité d'action dans le contexte des pouvoirs régionaux et locaux ne pourra qu'être renforcée dès que la Suisse aura ratifié la Charte européenne de l'autonomie locale.

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Convention du 4 nov. 1950 de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales (RS 0.101).

L'art. 14 ne postule qu'un simple devoir d'information du Secrétariat général du Conseil de l'Europe.

Le premier rapport (mai 1994) a jeté un regard critique sur la mise en oeuvre de la Charte, spécialement sous l'angle de la conformité avec les législations nationales des pays l'ayant ratifiée. Cette question a été approfondie dans le troisième rapport (mars 1998), qui porte sur l'«incorporation de la Charte européenne de l'autonomie locale dans les ordonnancements juridiques des Etats l'ayant ratifiée et sur la protection légale de l'autonomie locale». Trois autres rapports généraux ont examiné des aspects se référant à des articles spécifiques, soit: «Contrôle des collectivités locales ­ application des art. 3; 6 par. 2; 7 par. 1; 8» (juin 1996); «Ressources financières des autorités locales par rapport à leurs compétences: un test pour la subsidiarité ­ application des art. 3 par. 1; 4 par. 1 à 5; 9» (avril 2000); «Relation entre les citoyens, l'assemblée et l'exécutif dans la démocratie locale (le cadre institutionnel de la démocratie locale) ­ application de l'art. 3 par. 2» (avril 202). Le dernier (avril 2003) est un rapport spécifique, qui porte sur la propriété municipale à la lumière des principes de la Charte.

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1.4

Position de la Suisse

1.4.1

Les communes en général

La Suisse compte 2842 communes15. Leur nombre varie considérablement d'un canton à l'autre; il ne dépend pas de la population du canton ni de sa superficie16. A côté des grandes communes (comme les cinq villes de plus de 100 000 habitants, soit Zurich, Bâle, Genève, Berne et Lausanne) coexistent des communes sensiblement plus petites: 587 comptent entre 200 et 499 habitants; leur population totale n'excède pas 199 522 habitants.

L'organisation des communes est régie par le droit cantonal17. Toutes disposent de leur propres institutions, comprenant un pouvoir exécutif et un pouvoir législatif. Le pouvoir législatif est exercé par l'assemblée des citoyens ou l'assemblée communale, dans les petites communes, ou par une assemblée élue et constituant le parlement communal18. Les compétences des assemblées législatives varient sensiblement19. Le pouvoir exécutif est exercé par un collège20 au quel sont soumis les employés communaux. Les compétences de cet organe varient fortement entre les cantons.

Les communes exercent de nombreuses compétences, dont l'étendue est définie par le droit cantonal. Elles sont notamment compétentes pour l'octroi du droit de cité communal (dans le cadre de la législation fédérale et cantonale), en matière de police des constructions et en matière d'aménagement du territoire (domaines dans 15

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Les données statistiques contenues dans ce chapitre se réfèrent à l'état au 1er janvier 2003 en ce qui concerne le nombre des communes et au 5 déc. 2000 en ce qui concerne le nombre d'habitants et leur répartition dans les différentes communes.

Le canton de Fribourg, par exemple, a un nombre de communes (202) très élevé par rapport à sa superficie et à sa population. Le même constat peut être fait pour le Tessin (238 communes) et pour les Grisons (208) par rapport à sa population; seuls les cantons de Berne (400 communes) et de Vaud (382), qui sont toutefois beaucoup plus peuplés et plus grands que les cantons de Fribourg et du Tessin, ont un nombre plus élevé de communes.

Outre la commune politique («politische Gemeinde»/«Einwohnergemeinde», «comune»/«comune politico»), objet de ce chapitre, il existe en Suisse d'autre types de commune soit, la bourgeoisie («Bürgergemeinde», «patriziato»/«comune patriziale»), la paroisse («Kirchgemeinde»/«Pfarrgemeinde», «parrocchia»/«comune parrocchiale»), la «commune scolaire» («Schulgemeinde»), la «commune d'assistance» («Armengemeinde») ainsi que, dans certaines régions du canton de Zurich, la «commune civile» («Zivilgemeinde»).

Comme le relève Andreas Ladner dans son ouvrage, Politische Gemeinden, kommunale Parteien und lokale Politik, Zurich, 1991, la terminologie varie selon les cantons.

En Suisse allemande, on parle de «Gemeinderat», «Bezirksrat», «Bürgerrat» ou «Urversammlung» dans le premier cas et de «Grosser Gemeinderat», «Stadtrat», «Einwohnerrat» ou «grosser Stadtrat» dans le cas d'une assemblée élue; en Suisse romande, on parle d'assemblée communale et de conseil général, de conseil communal ou de conseil municipal; en Suisse italienne, d'«assemblea comunale» respectivement de «consiglio comunale» (cf. p. 55).

Certaines assemblées ont la compétence d'élire l'exécutif; ce constat concerne 500 des 2300 communes organisées sous forme de participation populaire directe et situées pour la plupart dans les cantons d'Appenzell Rhodes-Intérieures, de Berne, des Grisons et de Thurgovie (cf. Hans Geser, Schweizer Gemeindestudien / Die politisch-administrative Organisation der Schweizer Gemeinden, 1997, Universität Zürich, Soziologisches Institut, 1997, http://www.unizh.ch/~gemeinde/001c.htm).

En Suisse allemande: «Gemeinderat», «Stadtrat», «Kleiner Gemeinderat», «Bezirksrat», «Gemeindevorstand»; en Suisse romande: conseil communal, municipalité, conseil administratif ou maire; en Suisse italienne: «municipio».

lesquels leur compétences sont à la fois législatives et administratives); elles peuvent disposer de leur propre police locale. De plu, leurs attributions s'étendent à l'édilité, à la voirie, à l'équipement des zones, aux travaux publics, à la fourniture d'eau et d'énergie, aux transports publics, à l'assistance sociale, à la culture, aux sports et loisirs, à l'enseignement primaire, aux crèches, aux cimetières et aux services du feu21. Les tâches et les attributions communales diffèrent toutefois considérablement selon les législations cantonales.

La collaboration intercommunale est de plus en plus pratiquée pour faire face aux exigences d'une société moderne et pour gérer au mieux les ressources financières dans le cas des communes de petite et moyenne taille. Les communes s'associent pour accomplir certaines tâches (p. ex. service du feu, incinération des ordures) ou pour réaliser certains ouvrages (hôpitaux, maisons de retraite, stations d'épuration des eaux). La collaboration peut être institutionnalisée avec la création d'associations de communes («Gemeindeverbände»/«associazioni tra comuni»). Ces groupements intercommunaux («Gemeindezusammenschlüsse»/«consorzi intercomunali») sont, le plus souvent, régis par le droit public cantonal ­ les formes juridiques de droit privé, peuvent aussi entrer en ligne de compte ­ et peuvent comprendre des communes situées sur le territoire d'autres cantons22.

Depuis un certain temps, des collaborations existent entre communes pour résoudre de manière sectorielle les problèmes qui se posent dans les agglomérations urbaines.

Une dynamique intéressante vient de prendre corps avec le développement de projets novateurs (projets-modèles). Ces projets sont mis en place par les cantons avec les villes et les communes. Ils bénéficient d'un soutien de la Confédération23. Ils ont comme dénominateur commun l'amélioration de la coopération au sein de l'agglomération. La manière de les réaliser varie beaucoup selon les objectifs fixés. Certains projets considèrent la collaboration au sens large du terme et évaluent les champs de coopération potentiels24. D'autres portent sur des aspects sectoriels25, ou tendent à résoudre les problèmes des agglomérations en région alpine26. L'agglomération de Fribourg, où la collaboration est abordée au travers de la discussion sur
les structures à mettre en place dans le cadre de la nouvelle loi cantonale de 1995 sur les agglomérations, constitue un cas particulier. A mentionner aussi la collaboration transfrontalière, qui représente un défi particulier pour les agglomérations concer-

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25 26

Andreas Auer ­ Giorgio Malinverni ­ Michel Hottelier, Droit constitutionnel suisse, L'Etat, vol. I, Berne, 2000, n°s 232­233.

Une analyse scientifique de cette matière est proposée par Reto Steiner, Interkommunale Zusammenarbeit und Gemeindezusammenschlüsse in der Schweiz / Erklärungsansäzte, Umsetzungsmöglichkeiten und Erfolgsaussichten, Bern-Stuttgart-Wien, 2002.

Le rapport du Conseil fédéral du 19 déc. 2001 sur la politique des agglomérations de la Confédération contient les amorces de cette politique.

Des groupes de travail, comme c'est le cas dans le canton de Berne et dans les agglomérations de Lucerne, de Lausanne et de Vevey-Montreux-Riviera, se concertent sur des actions concrètes à mener dans le futur.

Les villes de Zurich et de Winterthour se concertent par exemple sur la politique de localisation des mégacentres commerciaux.

Interlaken entend élaborer un projet d'agglomération en matière d'économie, de culture, de sport et de détente, et réfléchir à la création d'une conférence d'agglomération.

Le projet-modèle de Coire et environs prévoit d'analyser les relations entre les régions urbaines et les stations touristiques et développer à partir de là des projets pilotes de collaboration. La région de Brigue­Viège­Naters s'attache à renforcer la compétitivité dans la perspective de l'ouverture du tunnel de base des NLFA au Lötschberg.

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nées27. On trouvera une description détaillée des projets modèles de la politique des agglomérations sur le site internet de l'Office fédéral du développement territorial28.

1.4.2

Etapes franchises et consultations

Le Conseil fédéral avait envisagé une adhésion rapide de la Suisse à la Charte.

Immédiatement après l'ouverture à la signature, il a mis, en janvier 1986, la Charte en consultation auprès des cantons, des partis politiques représentés au Conseil fédéral et des organisations intéressées. Quatorze cantons se sont exprimés en faveur de l'adhésion, contre onze qui s'y sont opposés. Parmi les partis politiques, seul le parti socialiste a donné un avis favorable. Les associations des villes et des communes étaient, pour leur part, en faveur de l'adhésion. Compte tenu du faible soutien politique, le Conseil fédéral avait décidé de renoncer, temporairement, à signer la Charte, tout en chargeant le DFAE de suivre le dossier.

En 1990, le Conseil fédéral a été saisi à nouveau du dossier à l'initiative d'une interpellation parlementaire29. Convaincu que le contexte politique était plus favorable qu'en 1986, il a fait connaître son intention de relancer le dossier en vue de l'adhésion de la Suisse à la Charte. Le rôle du Conseil de l'Europe avait gagné en importance en raison de l'évolution survenue dans les pays d'Europe centrale et orientale, qui se sont référés à la Charte européenne de l'autonomie locale pour l'organisation démocratique de leurs pouvoirs locaux. Le fait que la Suisse reste à l'écart était de moins en moins compris par les autres pays.

Deux ans plus tard, en août 1992, le Conseil fédéral s'est déclaré prêt à accepter un postulat de la Commission de politique extérieure du Conseil national30, lui demandant d'entamer une nouvelle procédure de consultation des cantons. Le Conseil fédéral a proposé une consultation au sein du Groupe de contact Confédération/cantons. La transmission du postulat a toutefois été refusée par 46 voix contre 41.

Sur demande des associations suisses des villes et des communes ainsi que des délégués suisses au Congrès des pouvoirs locaux et régionaux de l'Europe, le Conseil fédéral a consulté les cantons lors de la réunion du Groupe de contact Confédération/cantons du 24 juin 1994. Les cantons firent savoir que leurs positions sur la question étaient encore partagées, estimant le moment peu favorable sur le plan politique.

La Conférence des gouvernements cantonaux (CdC), qui a été créée en 1993, a entre-temps repris, en avril 1997, le dossier pour le compte des cantons, et informé le DFAE qu'une majorité d'entre eux serait favorable à une adhésion de la Suisse à 27

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L'agglomération trinationale de Bâle, très active dans ce contexte, réalisera progressivement le programme de développement qui existe déjà sous la forme de projets clés. Dans la région franco-valdo-genevoise, les partenaires entendent lancer le processus d'élaboration d'un projet d'agglomération en se basant sur les travaux préparatoires déjà existants dans différant secteurs. L'agglomération de Schaffhouse entend étudier la création de nouvelles formes d'organisation et évaluer d'éventuels thèmes de coopération.

www.are.ch.

90.850 / Interpellation Martin Paul-René, «Charte européenne de l'autonomie locale.

Signature et ratification».

91.081 / Postulat de la Commission de politique extérieure CN, «Conventions du Conseil de l'Europe. Ratification».

certaines conditions: l'exclusion de l'applicabilité directe de la Charte en Suisse et une déclaration portant sur les termes constitution, loi et législation contenus dans la Charte. Ces deux «réserves» auraient dues être déposées auprès du Secrétariat du Conseil de l'Europe. Les autorités fédérales ont indiqué les raisons pour lesquelles ces conditions ne pouvaient être acceptées. Les rencontres qui ont eu lieu par la suite entre les autorités fédérales et cantonales ne permirent pas de rapprocher les positions.

Le débat a été relancé à la fin des années 90 par la préparation d'un instrument juridique européen en matière d'autonomie régionale, qui présente des liens étroits avec la Charte.

La question d'une adhésion de la Suisse a été évoquée lors du Dialogue confédéral du 3 octobre 2002, au cours duquel il a été décidé de discuter sans plus tarder de l'adhésion de la Suisse à la Charte dans le cadre d'une rencontre tripartite Confédération/cantons/villes et communes.

Cette rencontre a eu lieu le 9 janvier 2003. Les positions respectives étant connues, il a été possible de s'engager immédiatement dans la recherche de solutions satisfaisantes pour toutes les parties. Les représentants des cantons ont affirmé disposer de la marge de manoeuvre nécessaire en vue de la recherche d'une solution selon le mandat de la CdC. Une entente a pu être trouvée entre tous les partenaires sur l'ensemble des points en suspens (réserves, dispositions qui ne seraient pas applicables en Suisse).

Tant les cantons que les villes et les communes ont fait savoir à cette occasion qu'une nouvelle procédure de consultation n'était pas nécessaire, pour autant que, comme l'ont proposé les autorités fédérales, les parties du message les concernant leur soient soumises lors de la phase d'élaboration. Le présent message est le produit de cette concertation.

Les partis politiques représentés au Conseil fédéral ont été informés du consensus et approuvent, compte tenu des nouvelles circonstances, l'adhésion de la Suisse à la Charte.

1.4.3

Appréciation des réserves des Cantons

La partie qui suit traite des deux conditions majeures soulevées par les cantons.

Applicabilité directe Les cantons ont, comme première condition, demandé au Conseil fédéral d'émettre, à l'intention du Conseil de l'Europe, une réserve sur l'applicabilité directe de la Charte, en déclarant que la Suisse la considérait dans son ensemble «non selfexecuting».

Les cantons ont ainsi entendu manifester leur crainte que l'adhésion de la Suisse à la Charte ne puisse constituer une brèche dans un domaine relevant de leur compétence propre. Ils craignaient en particulier que le Tribunal fédéral (qui connaît des violations de l'autonomie communale sur recours de droit public) puisse, en se fondant sur la Charte, définir le contenu de l'autonomie communale.

79

Les Cantons ont, par la suite, convenu qu'une déclaration à l'adresse du Conseil de l'Europe n'était pas la solution la plus appropriée pour qu'il soit tenu compte de leurs préoccupations. Désirant toutefois connaître quelles dispositions de la Charte pourraient avoir, de l'avis des autorités fédérales, un effet direct, le Conseil fédéral a été invité par les cantons à s'exprimer dans le cadre du présent message.

Si le contenu de l'autonomie locale est certes défini par le droit cantonal, une fois la Charte entrée en vigueur pour la Suisse, ses dispositions auront force obligatoire et s'appliqueront à tous les organes étatiques, cantonaux et fédéraux. Le Tribunal fédéral pourra donc s'y référer.

Le Conseil fédéral est extrêmement sensible aux arguments présentés par les cantons. Il est néanmoins de l'avis que le moyen le plus adéquat pour tenir compte de ces exigences ­ et pour éviter d'éventuels effets indésirables ­ est de déceler les dispositions qu'il serait préférable d'exclure du champ d'application en Suisse, ainsi que l'autorise l'art. 12 de la Charte. Dans la partie spéciale du présent message, seront donc indiqués les articles qui, sur proposition des autorités cantonales, seront exclus du champ d'application en Suisse, en raison du fait notamment que les cantons estiment qu'ils ne seraient pas en harmonie avec le droit cantonal sur les communes.

D'une manière générale, il y a lieu de préciser que la question de l'applicabilité directe des dispositions d'un traité international est réglée par les Etats eux-mêmes, à moins que le traité n'en dispose autrement. C'est par l'interprétation que les autorités chargées d'appliquer le droit concluent ou non à l'applicabilité directe d'une norme internationale. En Suisse, le Tribunal fédéral a développé une série de critères pour déterminer si une norme internationale est directement applicable. L'application directe de dispositions de droit international («self-executing») suppose que celles-ci soient «considérées dans leur contexte et à la lumière tant de l'objet que du but du traité ..., inconditionnelles et suffisamment précises pour produire un effet direct et s'appliquer comme telles à un cas d'espèce et constituer le fondement d'une décision concrète»31.

Dans le cas de la Charte européenne de l'autonomie locale, le Conseil fédéral est
de l'avis que les art. 4, par. 6, art. 5, art. 9, par. 6, et art. 10, par. 1 (1re partie du paragraphe) sont de nature à être considérés comme directement applicables. Ces dispositions, à l'exception du dernier paragraphe, ont en commun le fait de fixer des règles de droit en matière de consultations des communes. On ne saurait toutefois exclure qu'une autre disposition, notamment l'art. 11, soit aussi jugée d'application directe par une instance judiciaire.

Ne sont pas directement applicables, en revanche, les dispositions qui ont un contenu programmatique fixant des lignes directrices; elles ne s'adressent pas aux autorités administratives des Etats parties au traité, mais au législateur. Elles laissent à ce dernier une certaine marge de manoeuvre dans la rédaction des normes de droit interne nécessaires à leur application.

En conséquence, une commune ne pourra se prévaloir d'une norme internationale dépourvue d'effet direct devant la justice tant que le législateur ne l'aura pas concrétisée. Dans le cas de la Charte, le législateur qui peut être interpellé en ce sens ne peut être que le législateur cantonal. Par ailleurs, la mise en oeuvre en Suisse des principes énoncés dans la Charte par les cantons est largement réalisée.

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ATF 111 V 201; ATF 112 Ib 183.

Termes «constitution», «loi» et «législation« Les cantons ont exprimé le souhait que le Conseil fédéral déclare, lors de l'adhésion de notre pays, que seul le droit cantonal est concerné par les termes «constitution», «loi» et «législation» figurant dans la Charte.

A ce propos, il y a lieu de préciser que l'autonomie communale est une institution de droit fédéral (art. 50, al. 1, Cst.) dont le contenu matériel est défini par le droit cantonal32.

L'autonomie communale jouit par ailleurs de la protection juridique fédérale (art. 189, al. 1, let. b, Cst.). Le Tribunal fédéral avait reconnu depuis longtemps le droit des communes de recourir au juge constitutionnel pour violation de leur autonomie comme faisant partie des droits constitutionnels. La commune peut se prévaloir de ce droit par la voie du recours de droit public33.

A la lumière de ces constats, le Conseil fédéral est de l'avis qu'il serait erroné d'exclure, par le biais d'une déclaration, toute référence au droit fédéral34, comme l'ont proposé les cantons.

Les autorités cantonales et fédérales ont finalement convenu qu'il était préférable d'indiquer pour chaque article, dans le message, si les termes «constitution», «loi» et «législation» figurant dans la Charte se réfèrent au niveau fédéral ou cantonal. Une explication sur le plan interne est en effet jugée plus adéquate qu'une déclaration à l'adresse du Conseil de l'Europe. En conséquence, dans la partie spéciale du présent message, il sera précisé pour chaque article et paragraphe dans lequel figurent les termes en question35 quel est le niveau étatique visé, fédéral ou cantonal, voire les deux.

D'une manière générale, la Charte n'a aucune conséquence sur la répartition interne des compétences entre la Confédération et les cantons. La situation spécifique des Etats fédéraux est d'ailleurs reconnue dans le commentaire relatif à l'art. 2 de la Charte dans le rapport explicatif du Conseil de l'Europe36, lequel précise: «Il faut également tenir compte du fait que dans les pays à structure fédérale, les pouvoirs locaux peuvent être réglementés par les Etats fédérés plutôt que par le gouvernement central de la fédération. La présente Charte n'affecte en aucune manière, en ce qui concerne les Etats fédéraux, la répartition des compétences entre l'Etat fédéral et les Etats fédérés»37.

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37

Voir, en ce sens, ATF 128 I 3.

ATF 103 Ia 191; ATF 98 Ia 427.

D'autres dispositions de la Constitution fédérale interpellent aussi, à différents titres, les communes (p. ex.: art. 37; 39; 100, al. 4; 134).

Les termes apparaissent aux art. suivants: 2; 3 par. 2; 3 par. 3; 4 par. 1, 2 et 4; 5; 6 par. 1; 7 par. 3; 8 par. 1 et 2; 9 par. 2, 3 et 8; 10 par. 1 et 3; 11. A noter que presque toutes ces dispositions (sauf les art. 6 par.1; 7,1; 8,1 et 10,3) font partie du noyau dur au sens de l'art. 12.

Le rapport explicatif est disponible sur le site internet du Conseil de l'Europe http://conventions.coe.int/Treaty/FR/Cadreprincipal.htm (n° de référence de la Charte: STE 122). Il peut être obtenu auprès de la Direction du droit international public du DFAE.

Cette conception est répétée également à d'autres endroits du rapport explicatif, notamment lorsqu'il est précisé que le pouvoir supérieur peut être représenté non seulement par le pouvoir central mais aussi bien par le niveau régional, soit, en Suisse, par les cantons (cf. le commentaire à propos des art. 4 par. 4; 6 par. 1 et 9 par. 3).

81

2

Partie spéciale

Outre le préambule, qui comprend les principes fondamentaux, et l'art. 1 (engagement des Parties), la Charte comprend trois parties. La première énonce les principes de l'autonomie locale; la seconde des dispositions concernant la portée des engagements souscrits par les Parties. La troisième contient des dispositions finales qui correspondent à celles figurant habituellement dans les conventions du Conseil de l'Europe.

2.1

Préambule, article 1 et partie I

Au travers du préambule, les Parties à la Charte affirment leur volonté de réaliser une union plus étroite entre les Etats membres du Conseil de l'Europe. Elles reconnaissent la contribution vitale qu'apporte au bon fonctionnement de toute société démocratique l'existence de structures communales bénéficiant d'une large autonomie. En plaidant pour une organisation de l'institution communale plus proche des citoyens («droit des citoyens de participer à la gestion des affaires publiques»), le Conseil de l'Europe a joué un rôle précurseur, dans la mesure notamment où la Charte énonce pour la première fois, dans un instrument juridique au niveau européen, le principe de subsidiarité.

L'art. 1 exprime l'engagement des Etats parties à la Charte de respecter les dispositions qu'ils auront choisies d'appliquer dans leur pays conformément aux modalités prévues à l'art. 12. Pour la Suisse, ce choix est opéré d'entente avec les cantons.

L'art. 2 dispose que le principe de l'autonomie locale doit être consacré dans la législation interne et, autant que possible, dans la Constitution. Comme on l'a dit au ch. 1.4.3, l'examen doit ici porter sur les termes «législation» et «Constitution» contenus dans cet article pour déterminer si, en Suisse, ils se rapportent uniquement au niveau cantonal ou si le niveau fédéral est aussi concerné. Pour ce qui est du terme «Constitution», on a vu que les deux niveaux sont concernés. En ce qui concerne la «législation» ­ et il ne s'agit alors que des lois ­ il faut préciser que seul le niveau cantonal est concerné. Même si certains textes législatifs fédéraux mentionnent expressément les communes38 (tout particulièrement dans le cadre de l'exécution du droit fédéral), seules les législations des cantons peuvent contenir des dispositions portant sur le principe de l'autonome communale.

L'art. 3 donne une définition des éléments essentiels de l'autonomie locale.

Son par. 1 définit l'autonomie à l'aide de deux critères. Les collectivités locales doivent être en mesure de disposer d'une «capacité effective» de gestion des affaires publiques les concernant. Les communes doivent donc disposer des moyens nécessaires à l'exercice effectif de leurs tâches. Elles doivent, en outre, en toutes circons38

82

Cf. p. ex. art. 19 de l'ordonnance du 28 juin 2000 sur l'aménagement du territoire (RS 700.1), art. 3 de l'ordonnance du 20 janv. 1971 concernant la déclaration du départ des étrangers (RS 142.212), art. 427, al. 2 du Code civil suisse du 10 déc. 1907 (RS 210), art. 7 de la loi fédérale du 9 oct. 1992 sur la statistique fédérale (RS 431.01), art. 1 de la loi fédérale du 4 oct. 1963 sur les constructions de protection civile (RS 520.2), art. 3 de la loi fédérale du 19 déc. 1958 sur la circulation routière (RS 741.01), art. 12 de la loi fédérale du 19 mars 1976 sur la coopération au développement et l'aide humanitaire internationales (RS 974.0).

tances, pouvoir agir «sous leur propre responsabilité», ce qui, selon le rapport explicatif du Conseil de l'Europe, signifie qu'elles «ne doivent pas être confinées dans le rôle de simples agents des autorités supérieures». S'agissant du terme «loi», il se réfère en premier lieu au droit cantonal.

Le par. 2 postule la nécessité de disposer d'autorités communales démocratiquement constituées, de manière à ce que les collectivités locales puissent valablement exercer leur droit en matière d'autonomie locale. Les assemblées et conseils doivent être élus selon les formes démocratiques (suffrage libre, secret, égalitaire, direct et universel). Il est opportun de préciser que le mode d'élection envisagé par la Charte ne vise que les législatifs communaux39. Les assemblées de citoyens ­ telles qu'elles existent en Suisse dans nombre de petites communes ­ sont toutefois une forme admise par la Charte.

En ce qui concerne le terme «loi» contenu dans ce paragraphe, il est évident que seule la loi cantonale est visée.

L'art. 4 a trait à la portée de l'autonomie locale. Il contient les principes généraux qui doivent être respectés dans l'attribution des compétences et dans la définition du pouvoir des collectivités locales.

Le par. 1, règle l'attribution de compétences de base de sorte que les collectivités locales puissent agir dans un cadre juridique clair. La Constitution ou la loi doivent contenir les dispositions en ce sens. Il est toutefois prévu que des compétences peuvent être attribuées également «à des fins spécifiques» dans le cadre de la loi.

Compte tenu du fait qu'en Suisse l'existence et l'étendue de l'autonomie locale sont déterminées par la Constitution et la législation cantonales40, les termes «Constitution» et «loi» dans la première phrase du paragraphe se réfèrent aux Constitutions et aux lois cantonales. Inversement, pour le terme «loi» contenu dans la deuxième phrase, le droit fédéral est aussi concerné, car il arrive parfois qu'une loi fédérale confie aux communes des tâches d'exécution.

Le par. 2 tient compte du fait que les collectivités locales doivent pouvoir agir également au-delà du cadre général de leurs compétences. Il postule en effet une compétence générale des communes pour toutes les affaires qui n'ont pas été attribuées à une autre autorité. L'idée qui sous-tend cette
disposition est que l'action des collectivités locales doit être vouée au bien-être général des populations qui résident sur leur territoire. La loi peut fixer les règles générales par lesquelles les communes peuvent agir. Par ce terme, pour les raisons déjà indiquées, il faut entendre tant le niveau cantonal que le niveau fédéral.

Le par. 3 contient un énoncé du principe de subsidiarité. Le rapport explicatif du Conseil de l'Europe précise que le principe général exprimé par ce paragraphe consiste à vouloir favoriser la décentralisation de l'exercice des responsabilités publiques.

39

40

Le prof. Daniel Thürer s'était exprimé dans un sens différent dans son étude Schweizerische Gemeindeautonomie und die Europäische Charta der kommunalen Selbstverwaltung, Aktuelle Probleme des Staats- und Verwaltungsrechts, Festschrift für Otto K. Kaufmann, Berne 1989, p. 232.

Elles peuvent l'être exceptionnellement par le droit cantonal non écrit et coutumier (ATF 115 Ia 44): cf. l'expression «normalement» contenue dans le rapport explicatif à propos de cette disposition.

83

Le par. 4 prescrit que les collectivités locales disposent de compétences «pleines et entières». La Charte exige que, si le pouvoir supérieur estime nécessaire de restreindre ces compétences, en s'attribuant, par exemple, des compétences plus étendues, il ne puisse le faire que sur une base légale. En ce qui concerne la Suisse, la compétence en ce sens revient aux législateurs cantonaux.

Cette disposition postule une condition essentielle pour l'exercice d'une autonomie locale effective: plus les compétences des collectivités locales sont originaires (compétences propres), plus l'autonomie locale en ressort renforcée.

Constatant, dans les années 60 déjà, un rétrécissement graduel des compétences communales propres ­ ce qui ressort d'ailleurs aussi du rapport explicatif du Conseil de l'Europe41 ­, le Tribunal fédéral en est toutefois venu à la conclusion que l'autonomie communale pouvait être mieux garantie par ce que la jurisprudence définit comme une «notable liberté d'appréciation» que par l'exercice de compétences originaires42. Cette évolution de la jurisprudence se fonde sur la conviction qu'il n'est pas adéquat d'offrir une protection de l'autonomie communale en opérant la distinction traditionnelle entre tâches propres et tâches déléguées, distinction qui a donc été abandonnée comme critère de protection de l'autonomie communale. Le risque est en effet grand que le législateur «déclasse» une tâche propre pour que cette protection perde toute efficacité.

Le Conseil fédéral considère que la Charte n'offre pas ­ tout au moins dans ses effets sinon dans sa lettre ­ de garanties supérieures à celles du droit cantonal et de la jurisprudence du Tribunal fédéral.

Les cantons se sont toutefois prononcés pour une exclusion de l'application en Suisse de cette disposition, le libellé de la Charte leur paraissant empiéter sur leur domaine de compétence propre, d'où leur crainte de ne pouvoir respecter cette disposition.

Le Conseil fédéral respecte cette préoccupation et propose donc d'exclure l'application de cette disposition en Suisse.

Le par. 5 vise la situation où les collectivités locales se sont vues confier par l'autorité supérieure des tâches dans l'exercice de pouvoirs délégués. Dans ce cas, elles doivent être en mesure de prendre en compte la situation locale dans l'exercice de ces
pouvoirs. Le rapport explicatif précise toutefois que cette disposition ne peut pas enter en ligne de compte lorsque certaines fonctions exigent une réglementation uniforme au niveau national.

Le par. 6 contient une garantie selon laquelle les collectivités locales doivent être consultées sur toute question les concernant. La consultation doit s'effectuer de manière à permettre aux communes de disposer d'un temps de réflexion suffisant.

La consultation est également possible par le biais des associations représentant les villes et les communes. Ce sont en premier lieu les autorités cantonales qui sont concernées par cette disposition. L'art. 50, al. 2 et 3, Cst. impose toutefois aussi à la 41 42

84

Le rapport indique expressément qu'il faut «éviter toute tendance vers une dilution graduelle des responsabilités» des communes.

ATF 93 I 154; 93 1 427. Sur l'évolution de la jurisprudence du Tribunal fédéral, cf. Jean-Michel Piguet, La jurisprudence du Tribunal fédéral en Suisse en matière d'autonomie communale: une «Charte prétorienne» de l'autonomie locale, Revue de droit administratif et de droit fiscal, Revue genevoise de droit public, n° 3, 1992, p. 145 ss.

Confédération de tenir compte des conséquences de son activité pour les communes43. Cela peut impliquer des échanges d'informations, voire une participation appropriée des communes au processus de décision sur le plan fédéral.

L'art. 5 confirme l'intégrité territoriale des collectivités locales. La question est intéressante sous l'angle des fusions et agrégations de communes. La Charte postule une consultation préalable des communes intéressées. Elle envisage également la voie de la consultation populaire, pour autant que la loi prévoie cette forme de consultation. Dans cet article, par le terme «loi» il faut entendre la loi des cantons.

Le par. 1 de l'art. 6 concerne l'organisation des services administratifs et de gestion des collectivités locales. La Charte vise par cette disposition à permettre aux collectivités locales de se doter des structures les plus adéquates à leurs exigences et spécificités. Il est toutefois évident que le niveau supérieur peut fixer les principes généraux de cette organisation. Lorsque ce cadre est défini par la «loi», il s'agit, en Suisse, des lois cantonales.

Le par. 2 exprime la nécessité, pour une collectivité locale, qu'elle soit en mesure de recruter et d'employer du personnel suffisamment qualifié pour faire face aux tâches. Il postule qu'une formation, une rémunération et des perspectives de carrière adéquates soient offertes au personnel.

Les cantons ont souhaité renoncer à l'application de cette disposition en Suisse, en raison du système de milice et de bénévolat qui prévaut dans nombre de communes suisses. Le Conseil fédéral partage leur avis.

L'art. 7 a trait aux conditions requises pour l'exercice de la fonction d'élu local et du traitement, en particulier financier.

Selon le par. 1, les élus locaux doivent être libres dans l'exercice de leur mandat.

Le par. 2 règle leur traitement financier. Pour des raisons identiques à celles qui ont été évoquées pour l'article précédent, les cantons proposent de renoncer à l'application de cette disposition. Le Conseil fédéral s'est rangé à leurs avis.

Aux termes du par. 3, les cas d'incompatibilité avec l'exercice d'un mandat dans un organe délibératoire communal doivent être fondés sur une base légale; les cas d'incompatibilité doivent normalement être fixés par la «loi». Ce terme se réfère, en Suisse,
aux lois cantonales.

L'art. 8 pose le principe d'un contrôle administratif des actes des collectivités locales par les autorités du niveau supérieur.

Le par. 1 dispose que le contrôle ne peut s'effectuer que sur la base de dispositions constitutionnelles ou légales. Les termes «Constitution» et «loi» se réfèrent, en Suisse, aux constitutions et aux lois cantonales.

Selon le par. 2, le contrôle administratif des actes des collectivités locales par les autorités de niveau supérieur se limite à la question de la légalité et de la conformité aux principes constitutionnels. Un contrôle de l'opportunité est toutefois admis pour les tâches dont l'exécution a été déléguée au niveau communal par une autorité

43

Voir, à cet égard, les lignes directrices du Conseil fédéral du 16 oct. 2002 à l'attention de l'administration fédérale concernant la collaboration entre la Confédération, les cantons et les communes (FF 2002 7795).

85

supérieure. La Charte reflète ici la distinction entre tâches propres et contrôle de la légalité d'une part, et tâches déléguées et contrôle d'opportunité d'autre part.

Or, en Suisse, le Tribunal fédéral, comme on l'a dit à propos du par. 4 de l'art. 4, a abandonné la distinction entre tâches propres et tâches déléguées. Cette distinction était en effet difficile à pratiquer et ne permettait pas de maintenir un haut niveau d'autonomie communale. Par la jurisprudence fédérale, l'autonomie communale est garantie moins à travers l'exercice de compétences originaires (tâches propres), que par la notable liberté d'appréciation dont jouissent les autorités communales. La jurisprudence du Tribunal fédéral exige que le contrôle, de l'opportunité ou de la légalité, se fonde sur une base légale. Plus encore, la jurisprudence a franchi un pas supplémentaire en allant au-delà de l'exigence formelle d'une base légale pour protéger matériellement l'autonomie communale contre un usage arbitraire du contrôle, y compris de l'opportunité44.

Il est vrai que le par. 2 de l'art. 8 semble offrir une garantie plus étendue, en ce qu'il prohibe le contrôle de l'opportunité dans les cas de compétences pleines et entières.

Cependant, comme on l'a vu à propos de l'art. 4, cette garantie est en réalité bien aléatoire et susceptible de s'éroder avec le temps.

De l'avis du Conseil fédéral, la jurisprudence du Tribunal fédéral garantit une protection de l'autonomie locale plus étendue et plus efficace que ne l'offre le par. 2 de l'art. 8 de la Charte. Les cantons se sont toutefois prononcés pour une exclusion de l'application en Suisse de cette disposition. Le Conseil fédéral respecte ce voeu et propose donc de l'exclure de l'application en Suisse.

Par le par. 3, la Charte stipule le principe de la proportionnalité entre l'ampleur du contrôle et l'importance des intérêts que l'autorité supérieure entend préserver.

L'art. 9 contient des dispositions visant à faire bénéficier les collectivités locales de ressources financières adéquates.

Le par. 1 fixe le principe selon lequel les collectivités locales doivent disposer de ressources propres suffisantes, dont elles peuvent disposer librement. Ce paragraphe tend à garantir que les collectivités locales puissent fixer les priorités en matière de dépenses. On peut considérer
que cette condition est réalisée en Suisse.

Selon le par. 2, une proportion doit exister entre les ressources financières des collectivités locales et les tâches qui leur incombent en vertu de la «Constitution» ou de la «loi». Pour le premier terme, seul le niveau cantonal est, en Suisse, concerné.

Par le terme «loi», par contre, le niveau fédéral est également visé.

Le par. 3 postule une compétence des collectivités locales en matière de taxes, redevances et impôts locaux. Les collectivités locales doivent pouvoir en fixer le taux, dans le cadre de la «loi». Cette condition est largement remplie en Suisse, où les communes jouissent d'une grande autonomie fiscale45. En Suisse, le terme «loi» désigne les lois cantonales.

Aux termes du par. 4, les ressources financières des collectivités locales doivent être, dans la mesure du possible, adaptables à l'évolution des facteurs économiques.

Le par. 5 règle le principe de la péréquation financière.

44 45

86

ATF 112 Ia 283; ATF 113 Ia 192 (concernant des plans directeurs cantonaux).

Pour l'année 2001, les recettes des communes provenaient en raison de 48,93 % des impôts communaux.

Les cantons ont demandé de renoncer à l'application en Suisse de cette disposition.

Ils veulent éviter que par cette disposition leur compétence décisionnelle en matière de redistribution des ressources financières en faveur des communes puisse être entravée, dans la mesure où, comme l'exige la deuxième phrase de la disposition, la liberté d'option des collectivités locales dans leur propre domaine de responsabilité ne doit pas être réduite.

Le par. 6 prévoit une consultation des collectivités locales lors de l'élaboration, par voie législative, des règles de péréquation financière.

Selon le par. 7, les subventions accordées aux collectivités locales ne doivent, de préférence, pas être destinées au financement de projets spécifiques. La priorité doit être donnée aux subventions générales. La Charte veut ainsi accorder aux collectivités locales une plus grande liberté d'action au sujet de l'affectation des ressources financières qui leur sont versées.

En Suisse, la plupart des subventions sont liées à des projets spécifiques. A la demande des cantons, le Conseil fédéral a donc convenu de renoncer à l'application en Suisse de cette disposition.

Au terme du par. 8, les collectivités locales doivent pouvoir avoir accès aux marchés des capitaux pour leurs investissements. Peut être visé ici tant le droit cantonal que le droit fédéral.

L'art. 10 traite de la coopération entre collectivités locales par le biais de groupements et d'associations.

Le par. 1 concerne la coopération à laquelle les collectivités locales doivent pouvoir avoir recours, à l'intérieur d'un pays. Elles doivent également pouvoir se grouper pour mener à bien des tâches communes. Les modalités et les conditions peuvent être fixées par la «loi», par quoi, il faut entendre, en Suisse, les lois cantonales.

Le par. 2 postule le droit des collectivités locales de se constituer en associations, tant sur le plan interne que sur le plan international. En Suisse, l'Union des villes suisses et l'Association des communes suisses en particulier sont des interlocuteurs reconnus par les autorités cantonales et fédérales. Au niveau international, on peut mentionner le Conseil des communes et régions d'Europe et l'Union internationale des villes et pouvoirs locaux.

Selon le par. 3, la coopération est envisageable aussi par des contacts directs
entre collectivités locales situées dans plusieurs pays. La Charte fait ici référence à la coopération transfrontalière (et interterritoriale) qui, au sein des institutions du Conseil de l'Europe, était en passe, au moment de l'élaboration de la Charte, d'être promue et encouragée par la mise au point d'instruments juridiques spécifiques46.

Cette forme de coopération doit se conformer aux dispositions en vigueur dans les cantons, comme le Conseil fédéral l'a affirmé lors de l'adhésion de la Suisse à ces différents instruments juridiques. En ce sens, le terme «loi» contenu dans cette disposition se réfère, en Suisse, essentiellement aux lois cantonales.

46

On citera notamment la Convention-cadre européenne du 21 mai 1980 sur la coopération transfrontalière des collectivités ou autorités territoriales (en vigueur pour la Suisse depuis le 4 juin 1982 / RS 0.131.1 / FF 1981 II 801), complétée par le Protocole additionnel du 9 nov. 1995 (en vigueur pour la Suisse depuis le 1er déc. 1998 / RS 0.131.11 / FF 1997 IV 539), ainsi que le Protocole n° 2 du 5 mai 1998 relatif à la coopération interterritoriale (en vigueur pour la Suisse depuis le 27 mai 2003 / pas encore publié / FF 2002 2937).

87

L'art. 11 postule que l'autonomie locale doit bénéficier d'une protection juridique par le biais d'un droit de recours. Cette protection juridique doit permettre aux collectivités locales d'invoquer une violation de leur autonomie.

En Suisse, comme on l'a vu, les violations de l'autonomie communale peuvent, en vertu de l'art. 189, al. 1, let. b de la Constitution, être portées devant le Tribunal fédéral sur recours de droit public après épuisement des voies de droit cantonales.

Bien que le champ et la portée de l'autonomie communale soient déterminés par le droit cantonal, la législation fédérale peut également être l'objet d'un examen de la part du Tribunal fédéral. Dans la plupart des cas, l'examen du Tribunal fédéral porte toutefois sur le droit cantonal, que la cour examine librement s'il s'agit de dispositions constitutionnelles, et sous l'angle restreint de l'arbitraire dans le cas de dispositions légales47.

Une commune peut également engager une action judiciaire devant le Tribunal fédéral au moyen du recours de droit administratif pour violation du droit fédéral ainsi que contre les décrets et les décisions cantonales ou fédérales lorsque le droit fédéral prévoit sa légitimation active48 ou lorsqu'elle est affectée au même titre qu'un particulier49. A mentionner aussi la voie du recours administratif50, pour laquelle les mêmes critères sont applicables.

2.2

Partie II

L'art. 12, par. 1 prévoit une formule sélective des engagements, à savoir la possibilité pour les Etats de souscrire uniquement à 20 des 30 paragraphes que compte la partie I de la Charte; au moins dix d'entre eux doivent être choisis parmi quatorze paragraphes d'un noyau dur de principes fondamentaux.

Selon le présent message, la Suisse pourra s'engager au respect des articles et des paragraphes suivants (en italique les dispositions du noyau dur):

47 48 49 50

88

­

art. 2;

­

art. 3, par. 1 et 2;

­

art. 4, par. 1, 2, 3, 5 et 6;

­

art. 5;

­

art. 6, par. 1;

­

art. 7, par. 1 et 3;

­

art. 8, par. 1 et 3;

­

art. 9, par. 1, 2, 3, 4, 6 et 8;

­

art. 10, par. 1, 2 et 3;

­

art. 11.

ATF 94 I 54.

C'est le cas de l'art. 34, al. 2 de la loi fédérale sur l'aménagement du territoire (RS 700).

Cf. art. 103, let. a et c de la loi fédérale d'organisation judiciaire (RS 173.110).

Cf. art. 48, let. a de la loi fédérale sur la procédure administrative (RS 172.021).

La Suisse sera donc en mesure de s'obliger à respecter douze des quatorze principes fondamentaux du noyau dur de la Charte; les deux dispositions du noyau dur qu'elle n'entend pas accepter sont l'art. 4, par. 4 et l'art. 8, par. 2. Les autres dispositions auxquelles elle souhaite ne pas souscrire sont l'art. 6, par. 2, l'art. 7, par. 2, et l'art.

9, par. 5 et 7.

Les Parties contractantes notifient leur choix conformément aux modalités prévues au par. 2.

Selon le par. 3, les Parties peuvent revenir sur leur choix et étendre à d'autres articles et paragraphes l'application de la Charte dans leur pays respectifs.

L'art. 13 prévoit la possibilité pour les Parties d'indiquer les catégories de collectivités locales auxquelles la Charte s'applique ou ne s'applique pas. La raison de cet article doit être recherchée dans le fait que dans certains pays peuvent exister plusieurs catégories de collectivités locales, dotées de compétences différentes51.

Peu de pays ont fait une déclaration sur la base de cet article. L'esprit et la nature de la Charte permettent en effet d'en déduire qu'elle s'applique aux seules communes en tant qu'institutions politiques.

La Suisse pourrait faire une déclaration précisant que la Charte ne s'applique qu'aux communes politiques52. Cette déclaration permettrait d'exclure du champ d'application les communes ecclésiastiques et les bourgeoisies notamment.

L'art. 13 a récemment suscité un regain d'intérêt lors de la préparation d'un instrument du Conseil de l'Europe sur l'autonomie régionale. La deuxième phrase permet en effet d'inclure le niveau régional dans le champ d'application de la Charte53. En ce qui concerne la Suisse, la déclaration envisagée s'avérerait utile pour indiquer implicitement que ses dispositions ne sont pas applicables au niveau cantonal mais uniquement au niveau communal. Il n'est en effet pas concevable d'appliquer aux cantons des principes énoncés dans le cadre d'une Charte qui veut renforcer les institutions qui leur sont directement subordonnées.

D'entente avec les cantons, le Conseil fédéral propose donc d'émettre une déclaration précisant que la Charte s'applique, en Suisse, aux seules communes politiques («Einwohnergemeinde»/«comuni politici»).

L'art. 14 postule un devoir d'information du Secrétaire général du Conseil de l'Europe de la part
de chaque Etat partie à la Charte sur les développements législatifs, réglementaires ou autres concernant son application dans le pays. Il s'agit d'un mécanisme de contrôle limité. Sur le rôle que revêt le CPLRE dans ce contexte, il y a lieu de se reporter au ch. 1.3 du présent message.

51

52 53

A ce propos, le rapport explicatif donne l'exemple de «collectivités territoriales qui, en raison de leurs petites dimensions, n'exercent que des fonctions secondaires ou consultatives».

Une telle déclaration se situerait, d'ailleurs, dans la ligne de celle formulée par l'Allemagne.

Certains pays ont fait une déclaration dans ce sens: le Danemark, les Pays-Bas, la Suède, l'Irlande et le Royaume-Uni. Dans le cadre des travaux de préparation d'un instrument juridique sur l'autonomie régionale, certaines délégations ont même soutenu le point de vue selon lequel la Charte européenne de l'autonomie locale s'appliquerait ipso facto aux régions, sauf déclaration contraire expresse de l'Etat partie à la Charte.

89

2.3

Partie III

Parmi les articles constituant la troisième partie de la Charte, et qui correspondent aux dispositions finales figurant habituellement dans les conventions du Conseil de l'Europe, seul l'art. 16 nécessite une explication. Selon cet article, qui porte le titre «clause territoriale»54, il est possible de limiter le champ d'application de la Charte à certaines parties du territoire d'un Etat donné. Cet article s'applique aux territoires d'outre-mer de certains Etats et aux territoires qui, tout en faisant partie du territoire national, jouissent d'un statut particulier. L'article ne s'applique pas aux entités fédérées d'un Etat fédéral.

3

Conséquences financières et effets sur l'état du personnel

L'adhésion de la Suisse à la Charte n'aura pas de conséquences financières ni pour la Confédération ni pour les cantons. Elle n'aura pas non plus d'effets sur l'état de leur personnel.

4

Programme de la législature

Le projet est annoncé dans le programme de la législature 1999-200355. L'adhésion de la Suisse à la Charte correspond pleinement aux objectifs du Conseil fédéral en matière de relations étrangères, tout spécialement par rapport au rôle du Conseil de l'Europe dans la promotion de l'état de droit et des droits démocratiques.

5

Relation avec le droit européen

S'agissant de la relation avec le droit communautaire, l'Union européenne ne connaît pas de règles spécifiques en matière d'organisation des collectivités locales, l'institution communale étant régie par les Etats. Par contre, les programmes INTERREG encouragent aussi la coopération des collectivités locales par dessus les frontières. La Suisse a toujours été associée à ces programmes; le dernier porte sur la période 2000­200656.

54 55 56

90

La «clause territoriale» constitue par ailleurs une exception à la règle consacrée par l'art. 29 de la Convention de Vienne du 23 mai 1969 sur le droit des traités (RS 0.111).

FF 2000 2222, annexe 2, ch 1.1.

Cf. message du Conseil fédéral du 17 février 1999 relatif à la promotion de la participation suisse à l'initiative communautaire de coopération transfrontalière, transnationale et interrégionale (INTERREG III), pour la période 2000-2006 (FF 1999 2439).

6

Constitutionnalité

Selon l'art. 54, al. 1, Cst., les affaires étrangères, notamment la conclusion de traités internationaux, relèvent de la compétence de la Confédération. L'Assemblée fédérale est compétente pour l'approbation des traités en vertu de l'art. 166, al. 2, Cst.

D'après l'art. 141, al. 1, let. d, Cst., les traités internationaux sont sujets au référendum facultatif s'ils sont d'une durée indéterminée et ne sont pas dénonçables, prévoient l'adhésion à une organisation internationale ou contiennent des dispositions importantes fixant des règles de droit ou dont la mise en oeuvre exige l'adoption de lois fédérales. La Charte européenne de l'autonomie locale peut être dénoncée (cf.

art. 17) et ne prévoit pas l'adhésion à une organisation internationale.

Reste à savoir si cette Charte contient des dispositions importantes fixant des règles de droit ou si sa mise en oeuvre exige l'adoption de lois fédérales. Par dispositions fixant des règles de droit, il faut entendre, selon l'art. 22, al. 4, de la loi sur le Parlement57, les dispositions générales et abstraites d'application directe qui créent des obligations, confèrent des droits ou attribuent des compétences. Sera qualifiée d'importante, à la lumière de l'art. 164, al. 1, Cst., la prescription dont l'objet aurait valeur de disposition fondamentale en droit interne. Comme on l'a vu au ch. 1.4.3, quelques dispositions de la Charte peuvent être considérées comme fixant des règles de droit. Elles ne sont, cependant, pas fondamentales au point de devoir être qualifiées d'importantes dans le sens ci-dessus défini, de sorte que l'application, en l'espèce, de la clause référendaire n'est pas justifiée. Enfin, la mise en oeuvre de la Charte n'exige pas l'adoption de lois fédérales. Il résulte de ce qui précède que l'arrêté fédéral d'approbation n'est pas sujet au référendum en matière de traités internationaux.

57

Loi fédérale du 13 décembre 2002 sur l'Assemblée fédérale; RS 171.10.

91

92