Effets de l'inventaire fédéral des paysages, sites et monuments naturels d'importance nationale (IFP) Rapport de la Commission de gestion du Conseil national, sur la base d'une évaluation de l'Organe parlementaire de contrôle de l'administration du 3 septembre 2003

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Rapport 1

Objectifs et approche

L'inventaire fédéral des paysages, sites et monuments naturels d'importance nationale (IFP), entré en vigueur en 1977, est un instrument essentiel de la politique de protection du paysage. L'IFP constitue le premier inventaire fédéral basé sur la loi fédérale du 1er juillet 1966 sur la protection de la nature et du paysage (LPN). Il répertorie 162 paysages, sites et monuments naturels à protéger, lesquels représentent environ 20 % de la superficie de la Suisse. Ces objets inscrits dans l'IFP se répartissent sur tout le pays, y compris le Plateau suisse. L'objectif de l'IFP consiste à conserver intact, ou en tout cas à ménager le plus possible, des objets inventoriés, sur la base de leur contenu spécifique en termes de protection. L'IFP ne vise donc pas à empêcher toute intervention humaine dans un objet de l'IFP, mais à ce que d'éventuelles interventions soient examinées avec un soin particulier.

La Commission de gestion du Conseil national (CdG-N) a décidé, dans le cadre de son programme annuel 2002, de procéder à une évaluation de l'IFP. La souscommission DFI/DETEC a accompagné l'examen. Présidée par la conseillère nationale Milli Wittenwiler, elle est composée des conseillers nationaux Max Binder, Toni Brunner, Maurice Chevrier, Hugo Fasel, Jakob Freund, Odilo Schmid, Pierre Tillmanns et Christian Waber. Le 24 juin 2002, elle a chargé l'Organe parlementaire de contrôle de l'administration (OPCA) de tirer un bilan de l'IFP, d'examiner le concept sur lequel il se base et de donner une appréciation de sa mise en oeuvre en particulier au niveau fédéral.

Pour effectuer un contrôle des effets de l'IFP, l'OPCA a comparé, sur la base de la statistique suisse de la superficie, l'utilisation du sol des objets de l'IFP avec celle des régions de référence non répertoriées dans l'IFP. Etant donné que la statistique suisse de la superficie ne donne qu'une vue d'ensemble relativement peu détaillée, l'OPCA s'est, dans une deuxième étape, penché plus en détail sur certains objets et a réalisé des études de cas pour vérifier si l'utilisation réelle concorde avec les objectifs spécifiques de protection des objets sélectionnés. Pour l'analyse du concept du programme IFP, l'OPCA s'est appuyé sur des textes juridiques, sur des décisions pertinentes du Tribunal fédéral et sur des études scientifiques; il a en outre
mené des entretiens avec des experts de la protection du paysage. L'OPCA a également recouru à des études de cas pour traiter la question de la mise en oeuvre de l'IFP.

L'OPCA a présenté ses résultats à la sous-commission le 26 mai 2003. Le 26 juin 2003, cette dernière s'est penchée sur la question des conclusions pouvant être tirées de l'évaluation de l'IFP sur le plan politique. Le 3 septembre 2003, elle a rendu compte à la CdG-N, après avoir donné au chef du Département fédéral de l'environnement, des transports, de l'énergie et de la communication (DETEC) la possibilité de prendre position. Selon le DETEC, la réalisation des recommandations de la CdG-N nécessiterait des ressources financières et en personnel supplémentaires. La CdG-N part en revanche du principe que ces ressources supplémentaires pourront être crées à travers des synergies au sein du DETEC. La CdG-N a approuvé le présent rapport le 3 septembre 2003. Elle a décidé de publier, outre ce rapport, les résultats de l'évaluation effectuée par l'OPCA. Ainsi, l'étendue du présent texte peut être limitée, sachant qu'il reprend uniquement les principaux résultats de l'évaluation.

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Principaux résultats de l'évaluation de l'Organe parlementaire de contrôle de l'administration

Dans son rapport, l'OPCA dresse un bilan critique des effets de l'IFP. Les études de cas font apparaître, surtout dans les années 80, des interventions indésirables du point de vue des objectifs de protection de l'IFP. Durant cette période, l'objectif de protection selon l'art. 6 LPN n'a pas été atteint dans trois quarts des cas examinés. Il est cependant aussi constaté que les contenus de protection spécifiques de quelques paysages ont été revalorisés. Selon l'OPCA, l'évolution des années 90 demeure problématique: dans près de deux tiers des cas analysés, l'objectif de protection n'a pas été atteint. Toutefois, par rapport aux années 80, la tendance à la perte de valeur des paysages a été freinée. Mais cette tendance ne concerne pas, selon les études de l'OPCA, les constructions isolées ni les grandes zones bâties. Sur la base des données et indicateurs disponibles, l'OPCA constate que, globalement, l'objectif de protection générale de l'IFP formulé à l'art. 6 LPN n'a pas été atteint.

Sur le plan du concept, l'OPCA souligne une contradiction entre les objectifs très ambitieux de l'IFP et l'insuffisance des instruments déployés pour les atteindre. Les objectifs de protection de l'inventaire ne sont que vaguement définis et leur concrétisation représente une tâche difficile pour les autorités d'application. L'OPCA qualifie de principal point faible la détermination vague du caractère contraignant de l'IFP lors de l'accomplissement de tâches cantonales et communales ainsi que l'intégration relativement faible de l'IFP dans les autres domaines politiques à incidence spatiale. Au vu de la compétence limitée de la Confédération dans le domaine de la protection de la nature et du patrimoine, la LPN met surtout l'accent sur la protection de l'IFP lors de l'accomplissement de tâches fédérales. Concernant l'IFP, on observe un fractionnement de la mise en oeuvre, cette dernière dépendant d'un nombre élevé d'autorités et de politiques sectorielles qui représentent des intérêts différents, parfois opposés. La législation se rapportant à l'IFP ne prévoit pas de coordination institutionnalisée entre les autorités de décision.

Sur la base de son analyse du programme IFP dans le contexte de l'aménagement du territoire, l'OPCA parvient à la conclusion que la loi sur l'aménagement du territoire (LAT) prévoit
implicitement des instruments pour la mise en oeuvre des objectifs de l'IFP. Toutefois, il ajoute que le potentiel de la législation relative à l'aménagement du territoire n'est pas exploité entièrement. Le niveau de protection accordé aux objets de l'IFP tient pour l'essentiel à la question de savoir comment et dans quelle mesure les cantons et communes sont disposés à tenir compte de l'IFP, dans le cadre de l'exécution de la LAT.

Dans le cadre de l'accomplissement de tâches de la Confédération, l'OPCA constate une amélioration de la mise en oeuvre des dispositions de protection de la LPN par rapport aux années 80. La qualité du contenu des décisions prises par les autorités est en grande majorité satisfaisante. Alors que, dans les sondages passés, 77 % des décisions s'avéraient inappropriées pour protéger les objets de l'IFP contre des altérations, aujourd'hui, dans 40 % des cas une altération de l'objet de l'IFP concernée par la décision est à craindre au sens de l'objectif de protection. En dépit des améliorations de procédure constatées à l'échelle de la Confédération, l'OPCA évalue les résultats du contrôle des effets de l'IFP de manière critique. Il explique cela par les faiblesses de procédure persistantes à l'échelle de la Confédération et plus encore par l'influence des décisions cantonales et communales sur l'IFP. Dans 721

ce contexte, l'OPCA souligne que, lors du choix des objets de l'IFP, les requêtes des cantons et des communes n'ont pas toujours reçu l'attention qu'elles méritaient. Les cantons et les communes ont perçu l'IFP comme une mesure imposée par Berne. La disposition des autorités locales à mettre en oeuvre l'IFP a en outre été amoindrie par l'existence d'inventaires se recoupant géographiquement et disposant, pour certains, d'un cadre contraignant mal défini et d'objectifs de protection différents les uns des autres.

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Appréciation et conclusions de la Commission de gestion

3.1

Remarques générales

Sur la base des résultats de l'évaluation de l'OPCA, se pose la question des conclusions à tirer sur le plan politique. L'objectif de l'analyse de la CdG-N n'est pas de remettre en question l'inventaire fédéral des paysages, sites et monuments naturels d'importance nationale tel qu'il est formulé dans la loi, mais d'étudier sa mise en oeuvre. C'est là la mission d'une Commission de gestion, laquelle évalue l'application de lois fédérales selon les critères de la légalité, de la pertinence et de l'effet produit.

L'IFP est un instrument basé sur la LPN. Il revêt un caractère juridiquement contraignant pour toutes les autorités qui accomplissent une tâche fédérale au sens de la LPN. Sachant que différentes autorités participent à l'exécution à des niveaux variés, les effets de l'IFP dépendent de différents facteurs et acteurs du développement du paysage. L'évaluation de l'OPCA fait apparaître les limites de la réalisation des objectifs. En dépit d'une évaluation critique, on observe, ces dernières années, une tendance à l'amélioration en termes de réalisation des objectifs et plus particulièrement de mise en oeuvre de l'IFP dans le cadre de l'accomplissement de tâches fédérales. Toutefois, il existe encore des possibilités permettant de renforcer cet instrument ou de l'exploiter encore mieux.

La CdG-N est d'avis que seule une politique qui intègre les intérêts de la protection de la nature et du paysage dans le développement régional du territoire et de l'économie tout en tenant compte des intérêts de la population concernée et de ceux liés à la propriété peut permettre à l'IFP d'avoir les effets escomptés.

La CdG-N pense en outre que les résultats de l'évaluation de l'OPCA devraient faire l'objet d'une discussion la plus large possible et que des conclusions devraient en être tirées, en particulier au sein de cercles d'experts. A l'heure actuelle, la CdG-N s'impose une certaine réserve et limite ses conclusions aux domaines permettant d'optimiser l'instrument IFP à l'échelle fédérale. Ce faisant, elle tient compte de l'orientation fédéraliste de la protection de la nature et du paysage.

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3.2

Objectifs de protection de l'IFP

Au regard du bilan plutôt modeste de l'IFP, la CdG-N se pose la question de savoir si, dans les conditions-cadres actuelles, les objectifs de protection de l'IFP peuvent être mis en oeuvre. Comme il a déjà été évoqué, différents facteurs et acteurs ont une influence sur le succès de l'IFP. Il semble à la CdG-N qu'aujourd'hui, un examen des objectifs de l'IFP est nécessaire. Différentes raisons parlent en faveur d'un examen de fond. Certains des objectifs de protection décrits dans les feuilles d'inventaire correspondant à chaque objet de l'IFP n'ont pas été remaniés depuis 1977 et ne semblent plus à jour, considérés sous l'angle d'une politique consensuelle du paysage et de l'environnement. Ces dernières décennies, les politiques à incidence spatiale de la Confédération (politiques en matière d'ouvrages hydrauliques, de forêt, d'énergie, de transport, etc.) se sont fortement développées et modifiées.

L'évaluation a indiqué une superposition d'objectifs problématique pour la mise en oeuvre, et la formulation floue des objectifs incite elle aussi à une révision des objectifs. Il faudrait éventuellement supprimer de l'IFP des objets dès lors que ceux-ci ne correspondent plus à l'objectif visé à l'art. 6 LPN, ou il peut s'avérer qu'un objet de l'IFP doit être répertorié dans un autre inventaire fédéral qui, éventuellement, tient davantage compte des objectifs de protection au sens où il a un spectre juridique plus large ou décrit les objectifs plus précisément. Un examen de l'inventaire est expressément prévu dans l'art. 5, al. 2, LPN et devrait en fait être effectué périodiquement.

Pour une telle révision des objectifs, il faudrait veiller à ce que les cantons et les communes aient la possibilité de participer suffisamment au processus de définition et de précision des objectifs. Une participation de cette nature est déterminante pour un accueil positif par les autorités d'application. Manifestement, il n'a pas toujours été suffisamment tenu compte de cette exigence lors de la genèse de l'IFP.

Pour conférer à l'IFP une nouvelle dynamique s'inscrivant dans une protection du paysage consensuelle, il paraît judicieux d'examiner, également pour l'IFP, l'approche des conceptions d'évolution du paysage (CEP) qui implique la participation de collectivités locales. Cela correspondrait au concept des parcs
paysagers prévus dans le cadre de la révision de la LPN. Le concept de développement du paysage esquisse l'évolution souhaitée d'un paysage à l'échelon cantonal, régional et communal dans l'optique d'une utilisation durable et d'une mise en valeur esthétique.

L'élaboration d'un tel concept est axée sur les processus et a lieu dans le cadre d'une collaboration constructive entre la population, les groupes d'intérêts et les personnes directement concernées.

Indépendamment d'un examen de fond des objectifs, il convient de préciser les objectifs de protection de l'IFP spécifiques à un objet. Aujourd'hui, l'application est d'autant plus ambitieuse pour tous les acteurs que le contenu de l'IFP en termes de protection ne peut être défini une bonne fois pour toutes mais doit être déterminé spécifiquement pour chaque objet. Cette concrétisation est actuellement très complexe et coûteuse pour les autorités d'application. Le manque de clarté des objectifs de protection ne permet pas de déterminer clairement jusqu'où peut aller une possible utilisation et où les intérêts en matière de protection et ceux en matière d'utilisation entrent en conflit. C'est pourquoi la CdG-N est d'avis qu'il faut préciser les objectifs de protection pour que soit facilitée la mise en oeuvre de l'IFP. La concrétisation des objectifs de protection peut en partie s'appuyer sur des expertises 723

existantes de la Commission fédérale pour la protection de la nature et du patrimoine (CFNP).

Recommandation 1 La Commission de gestion du Conseil national recommande au Conseil fédéral d'examiner et de préciser les objectifs de protection de l'IFP spécifiques à un objet. Les objectifs doivent être reformulés sous l'angle d'un développement régional global et d'une politique environnementale moderne. Cette nouvelle formulation doit s'effectuer dans le cadre d'une collaboration fructueuse entre les autorités, en association avec la population et les personnes directement concernées.

3.3

Coordination et intégration de l'IFP dans les autres domaines politiques à incidence spatiale

La superposition de différents instruments relatifs à la politique de protection de la nature et du paysage a déjà été abordée. Cette superposition d'instruments et d'objectifs de protection différents entrave une mise en oeuvre efficace. Selon la CdG-N, une coordination renforcée des instruments doit aller de pair avec une collaboration plus intense entre les autorités d'application compétentes. Cela signifie que l'IFP doit être mieux intégré dans les autres domaines politiques à incidence spatiale. Les intérêts parfois contradictoires pourraient être discutés et coordonnés dans le cadre d'une plate-forme institutionnelle des autorités d'application. Il conviendrait de préciser quelle autorité met en oeuvre quel aspect. Il faut éventuellement introduire dans les bases légales d'importantes politiques sectorielles à incidence spatiale des références concrètes à l'IFP afin que la coordination et l'intégration de celui-ci puissent être renforcées. Pour l'exécution de tâches fédérales, il faudrait vérifier si l'Office fédéral du développement territorial (ODT) est, en tant qu'instance d'approbation indépendante, approprié pour une concentration des décisions d'approbation. La coordination de la mise en oeuvre en ce qui concerne les tâches fédérales peut également être renforcée par des mesures de perfectionnement et des schémas décisionnels appropriés.

Plus particulièrement, il apparaît aux yeux de la CdG-N que les instruments du droit de l'aménagement du territoire sont appropriés pour mieux intégrer l'IFP dans les domaines politiques à incidence spatiale. L'évaluation de l'OPCA a montré que la LAT tient implicitement compte de l'IFP et lui apporte un soutien au travers de ses instruments. Il relève de la compétence et du devoir de la Confédération d'exercer un contrôle sur l'application de la législation relative à l'aménagement du territoire.

La CdG-N est convaincue que, dans le cadre du règlement existant en matière de compétences, une application systématique de la LAT peut renforcer l'effet des objectifs de l'IFP. La Commission est par ailleurs tout à fait consciente que les cantons et les communes disposent, en vertu de la Constitution et de la loi, d'une large marge d'interprétation en matière d'aménagement du territoire. Le Conseil fédéral a en particulier la possibilité, dans le cadre de
l'acceptation des plans directeurs, d'influer sur les aménagements cantonaux et communaux. L'art. 45 de l'ordonnance sur l'aménagement du territoire (OAT) donne à la Confédération la possibilité d'évaluer l'évolution des objets de l'IFP. Le Conseil fédéral devrait 724

également examiner une variante consistant à intégrer les objets de l'IFP dans une conception ou un plan sectoriel au sens de l'art. 13 OAT afin d'exploiter les synergies entre l'IFP et le droit de l'aménagement du territoire.

La CdG-N constate que, ces derniers temps, la Confédération s'est engagée en faveur d'un renforcement de sa fonction de coordination. Dans le cadre des programmes de réalisation, le Conseil fédéral informe régulièrement sur l'application et l'orientation de l'organisation du territoire. Il convient de poursuivre ces efforts visant à mettre systématiquement en oeuvre, sur le plan politique, le mandat de coordination de la Confédération aux termes de l'art. 75 al. 2 de la Constitution fédérale.

Recommandation 2 La Commission de gestion du Conseil national recommande au Conseil fédéral de mieux ancrer l'IFP dans les domaines politiques à incidence spatiale. En vue d'améliorer la coordination, il conviendrait de vérifier s'il serait judicieux de désigner l'Office fédéral de l'aménagement du territoire comme autorité indépendante de décision. Il faut que le Conseil fédéral continue de s'engager en faveur d'une application coordonnée de la législation relative à l'aménagement du territoire et exploite les synergies entre l'IFP et le droit relatif à l'aménagement du territoire.

3.4

Acceptation de l'IFP

L'IFP est souvent perçu par les cantons et les communes comme un instrument imposé par la Confédération. La disposition des collectivités locales à mettre en oeuvre les objectifs de l'IFP est donc faible. Or, la mise en oeuvre de l'IFP est une tâche commune à la Confédération, aux cantons, aux communes et aux particuliers.

Pour diverses raisons déjà évoquées, l'acceptation de l'IFP est affaiblie. La superposition d'objectifs de protection et de zones protégées déconcerte les autorités locales et la population. La non-participation des acteurs locaux est également préjudiciable à une collaboration axée sur les objectifs. A cela s'ajoute le problème de la mise en oeuvre complexe de l'IFP en raison du manque de clarté des objectifs de protection.

Diverses mesures sont envisageables en vue de renforcer la collaboration entre les différents acteurs et de réserver à l'IFP un meilleur accueil. Tout d'abord, un meilleur échange d'informations, une formation ciblée et une coordination renforcée entre les différents responsables de la mise en oeuvre peuvent déboucher sur une application collective de l'IFP optimale. Par ailleurs, le Conseil fédéral pourrait se pencher sur la question de savoir s'il n'est pas judicieux de renforcer les incitations financières pour la mise en oeuvre de l'IFP. Aujourd'hui, les subventions allouées par la Confédération, aux termes de l'art. 13 LPN, pour des mesures d'entretien ne couvrent que 35 % des coûts de l'IFP contre 60 à 90 % des coûts afférents à la protection des biotopes et des sites marécageux. D'autres incitations (paiements directs, par ex.) pourraient en outre rendre plus attrayantes les formes d'agriculture respectueuses du paysage sur des zones abritant des objets de l'IFP. La CdG-N est d'avis que ce ne sont pas les dispositions légales qui font défaut, mais les incitations en vue d'encourager et de favoriser les évolutions propres aux objets figurant dans 725

l'IFP. Pour mettre en place de telles incitations, la Confédération devrait examiner les synergies entre utilisation et protection et encourager une utilisation des objets de l'IFP en adéquation avec les objectifs de protection.

Recommandation 3 La Commission de gestion du Conseil national recommande au Conseil fédéral d'améliorer l'acceptation à l'égard de la mise en oeuvre de l'IFP au travers de mesures appropriées dans le domaine de la coordination, de l'information et de la participation.

3.5

Relations publiques

L'intégration de l'IFP ne suppose pas uniquement de meilleures conditions d'information et de coordination entre les différents responsables de la mise en oeuvre au sein de la Confédération, des cantons et des communes: en raison du manque de clarté des objectifs de l'IFP, évoqué plus haut, la CdG-N est d'avis que le besoin d'information et de clarification au sujet de l'IFP continue de se faire sentir également au sein de la population. La superposition des différentes mesures de protection du paysage peut donner à la population l'impression qu'il faut protéger toujours plus de zones et que les intérêts liés à l'utilisation ne sont plus pris au sérieux. La Commission pense qu'il faut opposer à cette impression une information et un travail de relations publiques adéquats. Il convient de souligner plus particulièrement que l'objectif n'est pas de protéger toujours plus de zones, mais de mieux protéger le paysage. Il faut également préciser ce qui doit être protégé, ce qui implique de concrétiser les objectifs de protection conformément aux propositions figurant au chap. 32.

Le travail de relations publiques doit mettre l'accent sur l'importance de l'IFP pour le développement régional du territoire, l'économie locale et le tourisme proche de la nature. Le potentiel économique du tourisme proche de la nature est important.

Actuellement, le Secrétariat d'Etat à l'économie (Seco) soutient, dans le cadre de RegioPlus, différents projets visant à encourager l'exploitation touristique d'objets de l'IFP. Selon lui, la création de valeur ajoutée au niveau du paysage, dans le cadre du tourisme proche de la nature, représente chaque année 2,3 milliards de francs.

Tout laisse penser que les synergies entre l'agriculture et la protection du paysage sont méconnues par les utilisateurs du sol. La protection du paysage est uniquement perçue comme un volet occasionnant des coûts et à effet restrictif. Bien que l'entretien du paysage rural fasse partie des objectifs de la politique agricole de la Confédération, la CdG-N est d'avis que nombre d'instruments font toujours défaut pour rendre plus attrayantes les formes d'agriculture sur des objets de l'IFP. Enfin, il convient de mentionner le volet de politique régionale de l'IFP.

Il semble également y avoir des malentendus sur la portée de la notion de protection
de l'IFP. Comme il a déjà été évoqué, l'IFP n'a pas pour objectif d'interdire toute intervention humaine sur des objets inscrits à l'IFP, mais d'examiner avec soin d'éventuelles interventions. En d'autres termes, les objets de l'IFP ne sont pas des zones absolument protégées mais des zones pour lesquelles il convient de peser soigneusement les intérêts de protection et les intérêts d'utilisation légitimes. De 726

surcroît, l'évaluation de l'OPCA a montré que des utilisations et des modifications du paysage peuvent entraîner la revalorisation d'un objet inscrit à l'IFP.

La CdG-N est d'avis que la perception de l'IFP en tant que composante d'une politique de l'environnement et de protection du paysage moderne ainsi que ses perspectives ne sont pas encore suffisamment ancrées dans l'esprit de la population à l'heure actuelle.

Recommandation 4 La Commission de gestion du Conseil national recommande au Conseil fédéral de faire apparaître et d'encourager, dans son travail de relations publiques concernant l'IFP, les synergies entre protection et utilisation.

3.6

Bases d'information pour l'évaluation des évolutions au sein des objets de l'IFP

Des bases d'information probantes sur les effets de l'IFP sont une condition nécessaire à une mise en oeuvre efficace de l'IFP. Elles contribuent dans une large mesure à la connaissance de la situation de l'environnement et de l'évolution du paysage sur les objets de l'IFP. Jusqu'à présent, la gestion de l'environnement n'a pas systématiquement pris en compte l'évolution des objets de l'IFP. C'est pourquoi les systèmes d'information de la Confédération concernant le territoire et l'environnement devraient être davantage axés sur l'IFP et ses objectifs de protection. Un monitoring de l'environnement intégrant davantage l'IFP joue un rôle majeur en termes d'orientation pour des actions tournées vers l'avenir et d'éventuelles adaptations de l'IFP. Ce monitoring est en outre essentiel pour la coordination des différents instruments de politique environnementale. L'observation de l'évolution du paysage doit également donner lieu à des énoncés qualitatifs sur la protection atteinte et les utilisations, car toute utilisation n'entrave pas l'effet de protection. Dans le meilleur des cas, elle permet même une revalorisation.

Recommandation 5 La Commission de gestion du Conseil national recommande au Conseil fédéral d'axer davantage sur l'IFP les systèmes dont dispose la Confédération en matière de territoire et d'environnement.

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Perspective et suite de la démarche

Comme il a été exposé au chap. 31, la CdG-N mise sur un dialogue entre les services spécialisés et au sein de la population, portant sur les résultats de l'évaluation de l'IFP. Dans le présent rapport, elle propose des mesures pour la Confédération.

Celles-ci visent principalement à clarifier les objectifs de l'IFP et à améliorer la coordination et la transparence dans la mise en oeuvre de l'IFP en vue de renforcer ce dernier dans le cadre des compétences juridiques en vigueur. Les autorités sont 727

conviées à poursuivre leurs efforts au niveau politique et technique. La Commission de gestion du Conseil national transmet au Conseil fédéral le présent rapport et ses recommandations en le priant de prendre position d'ici fin 2003.

3 septembre 2003

Pour la Commission de gestion du Conseil national: La présidente de la Commission Brigitta M. Gadient, conseillère nationale La présidente de la sous-commission DFI/DETEC: Milli Wittenwiler, conseillère nationale Le secrétaire suppléant des Commissions de gestion: Martin Albrecht

Annexe Evaluation de l'Inventaire fédéral des paysages, sites et monuments naturels d'importance nationale (IFP). Rapport de l'Organe parlementaire de contrôle de l'administration à l'attention de la Commission de gestion du Conseil national

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Index des abréviations CdG-N CFNP DETEC DFI IFP LAT LPN OAT ODT OPCA RS Seco

Commission de gestion du Conseil national Commission fédérale pour la protection de la nature et du paysage Département fédéral de l'environnement, des transports, de l'énergie et de la communication Département fédéral de l'intérieur Inventaire fédéral des paysages, sites et monuments naturels d'importance nationale Loi fédérale du 22 juin 1979 sur l'aménagement du territoire, RS 700 Loi fédérale du 1er juillet 1966 sur la protection de la nature et du paysage, RS 451 Ordonnance du 28 juin 2000 sur l'aménagement du territoire, RS 700.1 Office fédéral du développement territorial Organe parlementaire de contrôle de l'administration Recueil systématique du droit fédéral Secrétariat d'Etat à l'économie

Liste des rapports d'expertise à la base de la présente étude ­

Organe parlementaire de contrôle de l'administration, 2003: Evaluation de l'inventaire fédéral des paysages, sites et monuments naturels d'importance nationale (IFP); voir annexe au présent rapport.

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Organe parlementaire de contrôle de l'administration (éd.), 2003: Umsetzungs- und Verfahrenskontrolle BLN, Teilaktualisierung der Ersterhebung von Hintermann & Weber AG

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Organe parlementaire de contrôle de l'administration (éd.), 2001: Wirkungskontrolle BLN, Teilaktualisierung der Ersterhebung von Hintermann & Weber AG

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