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Message concernant la modification du code pénal militaire et de la loi fédérale sur l'organisation militaire

du 27 mai 1987

Messieurs les Présidents, Mesdames et Messieurs, Par le présent message, nous vous soumettons un projet de modification du code pénal militaire (RS 327.0) et de la loi fédérale sur l'organisation militaire (RS 510.10) et vous proposons de l'adopter.

Nous vous demandons en outre de classer les interventions parlementaires suivantes: 1984 Code pénal militaire. Objecteurs de conscience M ad 82.058 (N 27. 9. 83, Commission du Conseil national; E 20. 6. 84) 1984 M 84.324 Service civil (Graf) 1984 M 84.358 Service civil. Nouveau projet (Groupe AdI/PEP) 1984 P 84.314 Obligation de servir et défense du pays (Groupe radical-démocratique) 1984 P 84.330 Service civil (E 20. 6. 84, Matossi) 1984 P 84.399 Modèles concrets pour un service civil (E 20. 6. 84, Meier Josi).

Nous vous prions d'agréer, Messieurs les Présidents, Mesdames et Messieurs, l'assurance de notre haute considération.

27 mai 1987

1987-438

Au nom du Conseil fédéral suisse: Le président de la Confédération, Aubert Le chancelier de la Confédération, Buser

1335

Condensé Le 26 février 1984, pour la deuxième fois en six ans, le peuple et les cantons ont clairement rejeté l'introduction d'un service civil.

Le 4 juin 1984, en réponse à différentes interventions parlementaires, le Conseil fédéral s'est exprimé sur ce qu'il entendait entreprendre dans ce domaine.

Par le présent projet, le Conseil fédéral répond à une motion demandant gué «les objecteurs de conscience authentiques ne soient plus assimilés aux criminels de droit commun quant aux peines encourues et à l'exécution de celles-ci».

Pour l'essentiel, la révision partielle du code pénal militaire touchera les points suivants: - la notion d'objecteur de conscience continuera à se fonder sur des motifs d'ordre religieux ou éthique mais sera élargie dans ce sens que le critère permettant de bénéficier d'un régime de faveur en matière d'exécution des peines ne sera plus un «grave conflit de conscience», mais le fait de ne pas pouvoir «concilier le service militaire avec les exigences de sa conscience»; - les peines d'emprisonnement ou d'arrêts seront remplacées par une astreinte à un travail servant l'intérêt général; - les mesures d'astreinte au travail ne seront plus inscrites au casier judiciaire, innovation qui répond parfaitement au souci de décriminaliser l'objection de conscience; - les tribunaux devront désormais attribuer les hommes qui refusent de porter une arme pour des raisons de conscience et qui ont refusé le service militaire, au service sans arme, s'ils sont prêts à accomplir un tel service.

Par le présent message, nous proposons également d'introduire, dans la loi fédérale sur l'organisation militaire, le principe du service militaire sans arme pour des raisons de conscience. A cette fin, il s'agira d'adapter les critères d'admission au service sans arme aux nouveaux critères retenus en vue défaire bénéficier les objecteurs de conscience d'un régime défaveur en ce qui concerne l'exécution de leur peine. Par ailleurs, le service des militaires non armés sera prolongé de 6 à 20 jours. Une telle mesure devrait permettre, en cas de doute, de mieux apprécier le sérieux et la conviction des requérants.

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Message I II

Généralités Rétrospective

Le 26 février 1984, pour la deuxième fois en six ans, le peuple et les cantons se sont clairement prononcés contre l'introduction d'un service civil."

Lors de chacune des deux votations, un modèle de service civil avait été proposé; ces deux modèles différaient fondamentalement l'un de l'autre.

Le 4 juin 1984, en réponse à diverses interventions parlementaires, le Conseil fédéral a fait part de ses intentions en la matière. Il a cependant précisé que l'on ne saurait attendre de lui qu'il propose immédiatement un nouveau modèle de service civil. En revanche, il tenterait de trouver des solutions au problème de l'objection de conscience dans les limites de la constitution. Le Conseil fédéral ajoutait que des travaux dans ce sens étaient en cours à deux niveaux. Il s'agissait d'une part de décriminaliser l'exécution de la peine frappant les objecteurs de conscience authentiques et d'autre part de transférer au niveau législatif la réglementation édictée par le Conseil fédéral sur le service militaire sans arme. Enfin, le Conseil fédéral estimait que l'on ne pourrait raisonnablement soumettre au peuple et aux cantons un nouveau projet de norme constitutionnelle portant sur l'introduction d'un service civil que lorsque l'on aura procédé aux modifications mentionnées et tiré de ces améliorations les enseignements qui s'imposent.

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Décriminalisation de l'exécution des peines

La décriminalisation des peines frappant les objecteurs de conscience a été demandée par voie de motion par la commission du Conseil national qui a examiné l'initiative populaire pour un authentique service civil fondé sur la preuve par l'acte. Cette motion (1984 M 82.058), proposée par la conseillère nationale Segmüller, avait la teneur suivante: Le Conseil fédéral est prié de soumettre aux Chambres fédérales un rapport assorti de propositions tendant à modifier le code pénal militaire, dans les limites des normes constitutionnelles actuelles, de telle sorte que les objecteurs de conscience authentiques ne soient plus assimiliés aux criminels de droit commun quant aux peines encourues et à l'exécution de celles-ci.

>>Le 4 décembre 1977, l'initiative dite de Münchenstein a été rejetée par 885868 non contre 533 733 oui. Elle a par ailleurs été rejetée par tous les cantons. Participation au scrutin: 38,3 pour cent.

Le 26 février 1984, l'initiative populaire «pour un authentique service civil fondé sur la preuve par j'acte» a été rejetée par 1 361 482 non contre 771 413 oui. Elle a par ailleurs été rejetée par les cantons dans une proportion de 195/2 à l'/2. Participation au scrutin: 52,8 pour cent.

1337

Le Conseil fédéral s'est déclaré prêt à accepter la motion.

Le Conseil national a adopté la motion le 27 septembre 1983 et le Conseil des Etats le 20 juin 1984.

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Service militaire sans arme pour des raisons de conscience

Peu après le rejet par le peuple et les cantons, le 4 décembre 1977, de l'initiative dite de Münchenstein, le Conseil fédéral a été invité, par deux motions, à établir, pour le service militaire sans arme, une nouvelle réglementation qui donne toute satisfaction sur le plan juridique (1979 P 77.487; Sigrist-Friedrich; 1979 P 77.493; Groupe socialiste). Dans sa réponse du 6 juin 1979 aux deux motions transformées par la suite en postulats, le Conseil fédéral s'est engagé à procéder à diverses améliorations. Le 24 juin 1984, il a édicté une réglementaion provisoire concernant le service militaire sans arme. L'ordonnance en question est entrée en vigueur le 1er janvier 1982 (RS 511.19). En édictant cette réglementation valable cinq ans, le Conseil fédéral poursuivait deux buts: il s'agissait d'une part de faire bénéficier aussi rapidement que possible des améliorations et facilités adoptées les citoyens astreints au service que l'utilisation d'une arme aurait plongés dans un grave conflit de conscience en raison de leurs convictions religieuses ou morales.

D'autre part, l'introduction de cette nouvelle réglementation constituait un essai pragmatique devant aboutir, après quelques années, à l'inscription du principe du service sans arme dans la loi. Un groupe de travail composé d'agents du Département militaire fédéral (DMF) a été chargé de tirer les conclusions de cet essai.

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Pourquoi présenter les deux projets simultanément?

La «décriminalisation des peines infligées aux objecteurs de conscience authentiques» et le «service militaire sans arme pour des raisons de conscience» sont des domaines étroitement liés. Dans les deux cas, il y va du sort des citoyens qui, pour des raisons de conscience, refusent tout service militaire (refus de servir) ou une partie de celui-ci (refus de porter une arme).

2 21 211 211.1

Révision du CPM (décriminalisation de l'exécution des peines) Généralités Réglementation actuelle et appréciation critique Réglementation actuelle

Selon l'article 81, chiffre 2, du code pénal militaire, est un objecteur de conscience celui qui refuse le service militaire pour des motifs religieux ou éthiques et qui est en proie à un grave conflit de conscience. La peine pré1338

vue pour ces objecteurs est de six mois de prison au plus, peine subie sous forme d'arrêts répressifs. Les articles 86 s. de l'ordonnance concernant la justice pénale militaire (RS 322.2) précisent en quoi consiste cette forme d'exécution et renvoient à l'article 39, chiffre 2, du code pénal suisse (RS 311.0), libellé comme il suit: Les peines d'arrêts sont subies dans un établissement spécial, mais en tout cas dans des locaux ne servant pas à l'exécution d'autres peines privatives de liberté ou de mesures.

Pendant la journée, le condamné travaille dans un établissement public ou privé d'intérêt général. Il passe son temps libre dans un établissement spécial. On peut donc dire que l'application stricte des dispositions légales actuelles conduit déjà à un certain allégement de l'exécution des peines pour les objecteurs de conscience. Cependant, les cantons chargés de l'exécution ne disposent pas, à de rares exceptions près, de ces établissements spéciaux.

Les objecteurs de conscience sont donc placés, durant le temps libre, en général, dans des prisons de district.

L'ordonnance du 24 octobre 1979 concernant la justice pénale militaire (RS 322.2) prévoit aussi que les cantons peuvent faire exécuter les arrêts répressifs et les peines d'emprisonnement de brève durée sous forme de semi-détention.

Le nombre des objecteurs de conscience condamnés par les tribunaux militaires se présente comme suit: Année

1982 .

1983 1984 1985 .

1986

211.2

Total des réfractaires condamnés

729 745 788 686 542

Dont objecteurs en proie iì un grave conflit de conscience Total

Condamnation avec sursis

230 228 234 143 153

58 57 50 58 44

Appréciation critique

L'appréciation de la gravité du conflit de conscience pose un sérieux problème. Il n'est déjà pas aisé de déterminer si un objecteur est en proie à un conflit de conscience ou non. A plus forte raison est-il malaisé d'apprécier la gravité d'un tel conflit.

La principale critique émise contre le traitement actuel des objecteurs de conscience est qu'ils doivent séjourner dans une prison ou une maison d'arrêts où ils sont en contact avec des délinquants de droit commun. Un tel régime paraît inadéquat pour des gens dont la motivation est honorable.

1339

L'expérience montre, en outre, qu'il n'y a pas d'uniformité entre les cantons et que souvent l'activité des condamnés, durant la journée, ne fait pas l'objet d'une surveillance suffisante.

212

Procédure préliminaire

Au début de 1984, avant même la votation sur l'initiative pour un authentique service civil fondé sur la preuve par l'acte, le chef du DMF a mis sur pied une commission d'étude chargée d'examiner les possibilités de décriminaliser l'objection de conscience et de présenter des propositions.

La commission d'étude était composée des personnes suivantes: Brigadier Raphaël Barras, auditeur en chef, président Mme Eva Segmüller, conseillère nationale, Saint-Gall M. Pascal Couchepin, conseiller national, Martigny M. Heinrich Ott, conseiller national, Münchenstein M. Jean-François Leuba, conseiller d'Etat, Puidoux Colonel Peter Saxer, ancien président du Tribunal de division 7, Saint-Gall Colonel Rudolf Bosshard, président du Tribunal de division 6, Berne Professeur Franz Riklin, Faculté de droit, Fribourg Me François Godet, avocat, chef de la division juridique de la Direction de l'administration militaire fédérale (DAMF) M. Giancarlo Buletti, licencié en droit, chef de section à la DAMF Me Heinz Sutter, section de droit pénal, Office fédéral de la justice (OFJ).

La commission d'étude a présenté son rapport au Département militaire fédéral à la fin du mois de juin 1984, soit dans le délai qui lui avait été imparti. Le Conseil fédéral a pris connaissance dudit rapport.

Une deuxième commission, également présidée par l'auditeur en chef, a reçu le mandat de concrétiser les propositions faites par la première commission. Comme cela lui avait été demandé, elle a livré son rapport final à fin mai 1985. Outre certains membres de la première commission, cette deuxième commission comprenait les personnes suivantes: M. Florian Schlegel, conseiller d'Etat, Saint-Gall M. Rolf Röthlisberger, chef de l'exécution des peines du canton de Berne M. Ueli Merz, directeur de l'établissement de rééducation d'Uitikon M. Andréa Baechtold, dr es se. poi., chef de la section exécution des peines et des mesures, OFJ.

Les travaux de ces deux commissions ont servi de base au projet de décriminalisation des peines frappant les objecteurs de conscience.

213 213.1

Modifications proposées et justification Définition des objecteurs de conscience

Pour l'essentiel, la définition actuelle doit être maintenue. En particulier doivent être admises, comme éléments constitutifs du refus de servir par objection de conscience, les convictions religieuses ou morales. Il s'agit de 1340

notions connues, précisées par la jurisprudence et assez aisément reconnaissables par les tribunaux. Les motifs d'ordre politique en revanche doivent continuer d'être exclus. Il en va de même des motifs d'ordre humanitaire qui renvoient à une notion trop peu précise et trop extensible. De tels motifs, comme aussi certains motifs de nature idéologique, sont cependant proches de motifs d'ordre moral et peuvent être reconnus comme tels par les tribunaux.

En revanche, la notion de grave conflit de conscience doit être revue et remplacée par une formule d'application plus aisée. Ce conflit ne pouvant pas être prouvé formellement, il convient de reprendre dans la loi les exigences de la jurisprudence, selon laquelle il appartient à celui qui s'estime en proie à ce conflit de conscience de le rendre vraisemblable.

213.2

Décriminalisation de l'exécution des peines

La décriminalisation totale de l'objection de conscience est impossible dans le cadre constitutionnel actuel. L'obligation générale de servir fixée à l'article 18 de la constitution ne peut pas être assouplie. A deux reprises en l'espace de six ans, le peuple suisse et les cantons ont refusé nettement un tel assouplissement. Cet article oblige le législateur à prendre les mesures nécessaires à l'exécution des obligations militaires. Au nombre de ces mesures figure la sanction pénale pour celui qui viole ces obligations. Cette sanction peut être cependant différente des peines et des mesures prévues par les codes pénaux. La tendance actuelle est de remplacer la peine traditionnelle par certaines alternatives, notamment la peine privative de liberté par une peine restrictive de liberté. Le droit pénal des mineurs connaît, aux articles 87 et 95 CPS, «une astreinte au travail». On peut donc imaginer que pour les objecteurs de conscience authentiques, la peine d'emprisonnement ou d'arrêts répressifs soit remplacée par une mesure sui generis d'astreinte au travail, qui conserve le caractère de sanction.

La mesure d'astreinte au travail doit servir l'intérêt général. Par principe, sa durée doit être supérieure d'une fois et demie à la durée du service militaire refusé, sans toutefois dépasser deux ans. Une telle durée doit permettre d'éviter que les hommes astreints au travail soient favorisés par rapport à ceux qui accomplissent leur service militaire et qui sont soumis à des exigences plus strictes. En outre, l'astreinte au travail doit, par sa durée, avoir un caractère dissuasif à l'égard de ceux qui seraient tentés d'y trouver une alternative au service militaire.

Par souci de décriminaliser l'objection de conscience, nous avons prévu que la mesure d'astreinte au travail ne sera pas inscrite au casier judiciaire.

213.3

Refus du service armé

II arrive qu'un réfractaire comparaisse devant un tribunal de division uniquement pour avoir refusé le service armé. Il ne peut s'agir que d'un militaire qui n'a pas demandé à effectuer un service sans arme ou dont la de90 Feuille fédérale. 139e année. Vol. II

1341

mande a été rejetée. Si le tribunal admet que l'intéressé est en proie à un véritable conflit de conscience, il ne l'astreindra pas à un travail après avoir prononcé un verdict de culpabilité, mais attribuera l'accusé au service militaire sans arme.

213.4

Inexécution du travail ou du service militaire sans arme imposé

Si celui qui a été astreint à un travail ou attribué au service militaire sans arme n'exécute pas son obligation ou viole gravement, dans son exécution, les devoirs qui lui sont imposés, le juge reprendra la procédure et prononcera une peine privative de liberté.

213.5

L'autorité de décision

Dans ce contexte, on doit se demander qui de l'autorité civile (administrative ou judiciaire) ou de l'autorité judiciaire militaire doit statuer sur l'authenticité de l'objection de conscience dans le cas d'espèce? Nous estimons quant à nous que la compétence des tribunaux militaires, qui ont l'expérience en la matière, doit être maintenue. A défaut, il faudrait constituer une autorité civile qui ne pourrait fonctionner avec une sûreté suffisante qu'après avoir acquis de l'expérience. Il est en outre souhaitable que l'autorité qui statue sur cette question de principe soit la même que celle qui inflige la sanction. Il doit donc s'agir d'une autorité judiciaire.

Déférer aux tribunaux civils la compétence de juger les objecteurs de conscience nécessiterait la modification du code pénal ordinaire et du code pénal militaire. Cette compétence serait conférée aux tribunaux des cantons.

On imagine mal, en effet, qu'on puisse charger encore le Tribunal fédéral de la poursuite des objecteurs de conscience. On n'imagine pas non plus la création de cours spéciales qui auraient le caractère de tribunaux d'exception.

Mais les tribunaux des cantons manquent totalement d'expérience en cette matière très délicate. En outre, le for compétent dans les juridictions pénales ordinaires est celui du lieu de commission. Ainsi on pourrait voir par exemple un Suisse alémanique relever d'un tribunal romand ou tessinois, ce qui poserait notamment un problème de langue.

Il y a plus encore: jusqu'aux délibérations du tribunal il est souvent difficile de savoir si l'auteur a commis une insoumission ou un refus de servir. L'insoumission étant un délit typiquement militaire, elle resterait du ressort des tribunaux militaires, d'où un risque de conflit de compétence entre tribunaux ordinaires et tribunaux militaires. Songeons au cas où le tribunal ordinaire estimerait être en présence d'une insoumission et transmettrait la cause au tribunal militaire et où ce dernier arriverait à la conclusion qu'il y a effectivement refus de servir. Pour trancher ce conflit de compétence, le Tribunal fédéral devrait en quelque sorte statuer à titre préjudiciel, ce qui n'est pas souhaitable.

1342

Pour toutes ces raisons, il importe de laisser aux tribunaux militaires la compétence de juger les objecteurs de conscience.

213.6

Inaptitude au service militaire constatée en cours de procédure

II arrive qu'en cours de procédure soit ordonnée une expertise psychiatrique, qui concluera souvent à une inaptitude au service militaire pour des motifs d'ordre caractériel. Souvent aussi, une commission de visite sanitaire, aura, sur l'avis d'un médecin et avant le jugement du tribunal, déclaré l'accusé inapte au service militaire.

Actuellement, celui qui a refusé de se présenter au service militaire peut être condamné même si, en cours de procédure, il a été déclaré inapte au service militaire. Une telle situation peut paraître choquante et il convient d'y porter remède. Aussi, proposons-nous de déclarer non punissable celui qui a été déclaré inapte au service si l'inaptitude existait déjà lors de la commission du refus de servir.

213.7

Exécution du travail imposé

Les modalités d'exécution doivent faire l'objet d'une ordonnance du Conseil fédéral. Cette ordonnance enumererà les genres d'engagements possibles, à savoir: - nettoyage de forêts, - nettoyage de rives de lacs et de cours d'eau, - aide aux agriculteurs de montagne, - amélioration de pâturages et de chalets d'alpages, - aménagement de chemins pédestres, - travaux de déblaiement lors de catastrophes, - aide dans des hôpitaux, - aide dans des hospices ou foyers.

Aux fins de garantir la plus grande uniformité possible dans l'exécution, il est prévu de confier à la Confédération le rôle principal et, plus précisément - le contrôle, - la convocation et l'instruction des personnes astreintes au travail, - la surveillance de l'exécution, - l'application de sanctions disciplinaires, - la coordination, - les obligations incombant à un employeur.

Leur instruction terminée, les personnes astreintes au travail seraient mises à la disposition de cantons, de communes voire d'institutions publiques ou privées d'intérêt général.

Le service fédéral responsable devrait être rattaché à un département autre que le Département militaire fédéral. En l'occurrence, nous songeons en

1343

premier chef à l'Office fédéral de l'industrie, des arts et métiers et du travail (OFIAMT) qui exerce déjà une activité similaire dans le cadre de la mise sur pied des mesures préventives prévues par l'assurance chômage.

La période d'instruction durerait en règle générale deux semaines mais pourrait être prolongée compte tenu de la nature des tâches à exécuter.

L'instruction elle-même devrait être dispensée dans une infrastructure existante (p. ex. un centre d'instruction de la protection civile). Elle pourrait être donnée par un ou plusieurs organismes mandatés par le service fédéral compétent.

Les réfractaires seraient en règle générale engagés en groupe, l'engagement individuel devant rester l'exception.

Les droits et devoirs des personnes astreintes au travail doivent être définis par le service fédéral compétent. Celui-ci passerait avec le bénéficiaire du travail un contrat qui fixerait notamment la durée du travail journalier et hebdomadaire.

Sur le plan matériel, il appartiendra à la Confédération de rémunérer les travailleurs. De même elle devra les assurer contre la maladie, les accidents et les conséquences de la responsabilité civile, et assumer en matière d'assurances sociales les obligations incombant à tout employeur.

La rémunération consistera en une indemnité journalière, fixée compte tenu, autant que possible, des charges de famille de l'ayant-droit.

En contrepartie, la Confédération exigerait en principe des indemnités des bénéficiaires du travail, selon leurs possibilités. Il y aurait en outre lieu de déléguer certaines fonctions d'employeur aux organes subordonnés (cantons, communes, organismes d'utilité publique). Les rapports de travail peuvent être réglés comme dans les rapports avec les agences de travail temporaire par un partage des attributions entre l'«employeur principal» (Confédération) et l'employeur secondaire (le canton ou la commune où s'effectue le travail), qui est chargé de l'organisation sur place et de l'entretien du réfractaire et qui dispose d'un pouvoir réglementaire et disciplinaire limité.

Il s'agira enfin d'élaborer un règlement disciplinaire afin de maintenir ou de rétablir la discipline. Les sanctions seraient infligées par le service fédéral compétent, ses décisions étant susceptibles de recours devant l'organe supérieur. Pour des raisons
pratiques, il faudra probablement renoncer à prévoir des peines d'arrêts.

En cas de refus d'accomplir le travail imposé, ou de manquements répétés à la discipline, au mépris d'un avertissement formel donné par le service fédéral, le tribunal militaire sera saisi et prononcera une peine. La transmission du cas au tribunal entraînera systématiquement le licenciement du réfractaire.

Etant donné sa durée, la mesure de travail pourra être fractionnée sur décision du service fédéral.

Les fractions ne devront cependant pas être inférieures à trois mois.

1344

,g

Enfin, en cas de service actif, les objecteurs de conscience pourront être astreints à des travaux supplémentaires, en vertu de l'article 202 OM (RS 510.10), ou du droit de nécessité.

214

Procédure de consultation

Le projet du DMF concernant la décriminalisation de l'exécution des peines, accompagné des propositions ayant trait à la nouvelle réglementation du service militaire sans arme (voir ch. 313) et d'un rapport explicatif, a été soumis à la consultation des cantons, des partis et des organisations intéressées le 15 août 1985. La procédure de consultation a pris fin le 13 janvier 1986. 111 prises de position ont été renvoyées (tous les cantons, 14 organisations consultées, 30 autres organisations ou groupements, 29 particuliers).

215

Résultats de la procédure de consultation

Réunis dans un rapport du DMF, les résultats de la procédure de consultation ont été soumis au Conseil fédéral pour information, puis publiés le 4juillet 1986. Les points les plus importants peuvent être résumés comme il suit: 215.1

Appréciation générale

La révision proposée du code pénal militaire a été accueillie favorablement par la majorité des cantons, des partis politiques et des organisations consultées, même si certaines réserves, parfois importantes ont été émises.

La révision a été rejetée par le canton de Zurich, par deux partis représentés au Parlement (AN et POCH), par trois des 14 organisations consultées et par divers groupements.

215.2

Définition de l'objecteur de conscience authentique

Les critiques les plus sérieuses concernent en premier lieu la définition de l'objecteur de conscience.

Alors que la grande majorité des cantons approuvent une limitation aux motifs «religieux et éthiques», quatre partis représentés au parlement (PEP, Adi, POCH et PSS), la plupart des organisations consultées ainsi que ceux qui ont donné leur avis spontanément se prononcent contre une telle limitation. L'opposition émane principalement des milieux religieux, de la Commission fédérale pour la jeunesse, du Cartel suisse des associations de jeunesse, des partisans du service civil ainsi que des organisations pacifistes.

Pour eux, l'argument décisif est que la conscience est une et indivisible.

Six cantons proposent que l'on conserve le critère du «grave conflit de conscience» en lieu et place de «... ne peut concilier le service militaire avec les exigences de sa conscience». Il devrait être ainsi possible, de l'avis 1345

de ces cantons, d'éviter que l'on en arrive au libre choix entre le service militaire et l'astreinte au travail.

215.3

Mesure d'astreinte au travail en lieu et place d'une peine

La majorité des avis recueillis sont favorables au remplacement des peines privatives de liberté par des mesures d'astreinte au travail servant l'intérêt général. Une partie des organes consultés souhaite cependant que le travail soit accompli dans le cadre de la défense générale. D'autres demandent que l'astreinte au travail ne soit pas considérée comme une peine.

Quelques cantons (4), ainsi qu'un parti (PLS) demandent que les tribunaux prononcent automatiquement une peine privative de liberté tout en suspendant son exécution. Ce n'est qu'après coup que la peine serait remplacée par une mesure d'astreinte au travail.

215.4

Pas d'inscription au casier judiciaire

Le fait de renoncer à toute inscription au casier judiciaire a été approuvé par la majorité des organes consultés, cette mesure contribuant de manière déterminante à la décriminalisation de l'exécution des peines. Cinq cantons, un parti représenté au Parlement (PLS), ainsi que la Société suisse des officiers n'ont cependant pas souscrit à cette proposition. Ils estiment que l'inscription devrait être radiée après que le réfractaire s'est acquitté de la totalité du travail auquel il a été astreint.

215.5

Conclusion

La majorité des cantons, des partis et des organes consultés considèrent que les modifications proposées sont judicieuses. Rien ne s'oppose donc semblet-il à la révision proposée.

216

Exécution des peines sous forme de semi-détention

L'article 30 du code pénal militaire (RS 321.0) prescrit que les peines privatives de liberté doivent être exécutées conformément aux dispositions du code pénal suisse. Selon l'article 4 de l'ordonnance (1) du 13 novembre 1973 relative au code pénal suisse (RS 311.01), les cantons peuvent introduire l'exécution sous forme de semi-détention pour les courtes peines d'emprisonnement. L'article 89 de l'ordonnance du 24 octobre 1979 concernant la justice pénale militaire (RS 322.2) prévoit que les cantons peuvent faire exécuter les arrêts répressifs et les peines d'emprisonnement de brève durée par journées séparées ou sous forme de semi-détention.

Enfin, l'ordonnance 3 du 16 décembre 1985 relative au code pénal suisse (RS 311.03) permet aux cantons de prévoir dorénavant l'exécution sous for-

1346

me de semi-détention pour les peines d'emprisonnement et de détention de moins de six mois.

Cette ordonnance s'applique également aux objecteurs de conscience. Ceuxci pourront ainsi profiter de cette innovation dans tous les cantons qui feront usage de la possibilité offerte. En cas de libération prématurée avec sursis, l'objecteur de conscience devra purger une peine de quatre mois au maximum. Un tel mode d'exécution avantage dès lors les objecteurs de conscience pour ce qui est de la durée effective de la peine et de ses conséquences économiques. En revanche, la semi-détention ne va pas dans le sens d'une décriminalisation et ne répond dès lors pas aux exigences de la motion adoptée.

22 221 221.1

Commentaires des différentes dispositions légales Article 81 CPM Chiffre 1

L'actuel article 81, chiffre 1, CPM, réprime deux infractions distinctes: le refus de servir (1er al.) et l'insoumission intentionnelle (2e al.). Il y a lieu d'améliorer la systématique en sortant de l'article 81 la disposition concernant le délit d'insoumission pour en faire un article 8la distinct. Quant à l'actuel 1er alinéa, il ne subit qu'une modification purement rédactionnelle.

221.2

Chiffre 2, 1er alinéa

II y lieu de consacrer dans la loi la jurisprudence du Tribunal militaire de cassation selon laquelle le conflit de conscience, dont il est difficile d'apporter la preuve, doit être rendu vraisemblable par celui qui l'invoque.

Ayant reconnu l'auteur comme objecteur de conscience, le tribunal devra rendre un verdict de culpabilité et prononcer, au lieu d'une peine privative de liberté une mesure d'astreinte au travail.

221.3 Chiffre 2, 2e alinéa Cette disposition laisse au tribunal une large marge d'appréciation qui lui permet de tenir compte de situations particulières.

221.4

Chiffre 2, 3e alinéa

La peine que sera amené à prononcer le tribunal sera celle qui est prévue au chiffre 1.

La peine prévue actuellement pour les objecteurs de conscience (six mois d'emprisonnement au maximum, exécutable sous la forme des arrêts répressifs; art. 81, ch. 2, CPM) ne pourrait plus être prononcée. En effet, l'objecteur de conscience authentique ayant été privilégié une première fois

1347

par la condamnation à la mesure d'astreinte au travail, il n'y a pas de raison de le privilégier une seconde fois.

Le délai de prescription de dix ans tient compte d'un possible fractionnement de la période d'astreinte au travail.

221.5

Chiffre 2, 4e alinéa

L'exclusion de l'armée sera généralement prononcée. Toutefois, il faut laisser au tribunal la possibilité de ne pas la prononcer dans des cas particuliers, par exemple lorsque l'accusé dit vouloir dorénavant accomplir ses obligations militaires.

221.6

Chiffre 2, 5e alinéa

Le Conseil fédéral devra, par voie d'ordonnance, régler les modalités de l'exécution de la mesure d'astreinte au travail, et notamment: - l'organisation, - le déroulement, - les engagements possibles, - les indemnités, - les assurances, - le régime disciplinaire, - la participation des cantons en matière d'exécution (par analogie avec l'art. 211 PPM; RS 322.7).

221.7

Chiffre 2bis (nouveau)

Par analogie, celui qui refuse le service armé sera lui aussi l'objet d'un verdict de culpabilité et sera attribué à un service sans arme s'il est prêt à accomplir un tel service. Ce sera le seul cas où l'autorité judiciaire prononcera l'admission à un service sans arme.

221.8

ChiffreS

Ce chiffre n'a subi qu'une modification rédactionnelle.

221.9

Chiffre 5 (nouveau)

Les tribunaux devront se montrer circonspects et n'appliquer cette disposition que s'il est établi que l'inaptitude existait déjà lors du refus de servir et si elle est constatée dans une expertise dûment motivée.

222

Article 81 a CPM (nouveau)

Cet article concerne le délit d'insoumission. Le chiffre 1 définit l'insoumis1348

sion intentionnelle, quant au chiffre 2, dont la rédaction a été améliorée, et au chiffre 3, ils reprennent les dispositions actuelles.

Le chiffre 4, en revanche, est nouveau. Il est justifié et doit être appliqué avec les réserves faites à propos du chiffre 5 de l'article 81.

223

Article 83, 1er et 2e alinéas, et 4e aline'a, CPM (nouveau)

L'article relatif à la désertion doit être adapté. Celui qui déserte par objection de conscience (cf. art. 81, ch. 2) sera reconnu coupable de désertion mais astreint lui aussi à la mesure de travail.

Si l'auteur déserte parce qu'il ne refuse que le service armé, il sera traité conformément à l'article 81, chiffre 2bis (attribution à un service militaire sans arme).

Le 4e alinéa reprend le texte des articles 81, chiffre 5, et 8la, chiffre 4.

224

Article 226 CPM

Le fait qu'aucune inscription ne sera faite au casier judiciaire constitue un facteur important de la décriminalisation projetée de l'exécution de la peine. Il faut dès lors compléter cet article en ajoutant aux sanctions disciplinaires la mesure d'astreinte au travail et l'attribution à un service non armé prévues à l'article 81, chiffres 2 et 2bis.

225

Article 236a CPM (nouveau)

Celui qui aura été jugé (selon l'ancien droit) entre l'adoption des nouvelles dispositions et leur entrée en vigueur, et qui n'aura pas encore complètement exécuté sa peine, doit pouvoir profiter du nouveau droit. La demande doit être présentée au tribunal dans le délai d'un mois à compter de l'entrée en vigueur de la nouvelle loi.

23 231

Effets sur les finances et sur l'état du personnel Pour la Confédération

La révision du code pénal militaire implique la création d'un service au Département fédéral de l'économie publique (OFIAMT), chargé de l'exécution des mesures d'astreinte au travail et dont les tâches sont décrites au chiffre 213. Ce service occupera deux ou trois personnes entraînant ainsi des frais supplémentaires pour la Confédération. Cette dernière devra en outre prendre à sa charge les frais inhérents au personnel d'instruction, les indemnités versées aux hommes astreints au travail, de même que les frais de subsistance et de logement pendant la période d'instruction. La Confédération devra aussi supporter le coût des assurances maladie, accidents et responsabilité civile ainsi que du matérel.

1349

En principe, la Confédération demanderait des indemnités aux organismes bénéficiant des prestations des hommes astreints au travail. Par ailleurs, elle ne devrait plus verser d'indemnité aux cantons.

Il est difficile actuellement de chiffrer avec précision le montant à la charge de la Confédération. On peut cependant estimer qu'il oscillera entre 3 et 4 millions de francs par année.

232

Pour les cantons et les communes

II n'est pas possible de calculer les montants à la charge des cantons et des communes. Les cantons et les communes qui bénéficieront des prestations d'objecteurs de conscience devront en principe assumer les frais de subsistance et de logement. En outre, les collectivités et organismes pour lesquels travailleront les hommes astreints devront, dans la mesure du possible, verser une indemnité à la Confédération pour le travail accompli.

24

Grandes lignes de la politique gouvernementale

La révision du code pénal militaire n'a pas été annoncée dans le rapport sur les Grandes lignes de la politique gouvernementale 1983-1987. Le Conseil fédéral présente cependant ce projet pour la bonne raison qu'il a déclaré, à la suite de diverses interventions parlementaires déposées après la rédaction du rapport, que le sort des objecteurs de conscience devait être amélioré.

25

Constitutionnalité

En vertu de l'article 18 de la constitution, tout Suisse est tenu au service militaire. Il n'est pas possible de s'écarter de cette obligation générale. Le législateur est donc tenu de prendre les mesures qui s'imposent pour garantir l'accomplissement du service militaire. Au nombre de celles-ci figurent les mesures de droit pénal prévues pour les réfractaires.

Les sanctions peuvent s'écarter des peines et des mesures prévues dans le code pénal suisse (RS 311). La tendance actuelle veut que l'on ordonne des mesures à la place des peines et notamment que la semi-détention remplace l'emprisonnement. Le droit pénal des mineurs prévoit, aux articles 86 et 96 CPS (RS 311), une astreinte au travail. Il est donc possible d'instituer une mesure d'astreinte au travail pour les objecteurs de conscience en lieu et place de l'emprisonnement ou des arrêts répressifs.

1350

3 31 311 311.1

Révision de l'organisation militaire (service militaire sans arme) Généralités Réglementation actuelle et appréciation critique Réglementation actuelle

Les modalités du service militaire sans arme sont réglées dans une ordonnance du Conseil fédéral dont la validité est limitée (RS 511.19). Les points essentiels de cette ordonnance sont les suivants: Celui qui rend vraisemblable que l'utilisation d'une arme le plongerait dans un grave conflit de conscience en raison de ses convictions religieuses ou éthiques est autorisé à servir sans arme. Ces critères correspondent à ceux établis à l'article 81, chiffre 2, première phrase, du code pénal militaire (RS 321.0). Selon cet article, celui qui, en raison de ses convictions religieuses ou morales, a agi à la suite d'un grave conflit de conscience, bénéficie d'un régime de faveur en ce qui concerne l'exécution de sa peine.

Celui qui aspire à servir sans arme doit présenter, par écrit, une demande dûment motivée, à laquelle il joint les déclarations de représentants d'autorités civiles ou ecclésiastiques, ou d'autres personnes qui le connaissent personnellement.

L'officier de recrutement est l'autorité de décision. Il est conseillé par le commandant d'arrondissement et un membre de la commission de visite sanitaire. Ces trois personnes entendent le requérant avant que l'officier de recrutement statue.

La procédure de recours est régie par les dispositions générales de la loi fédérale sur la procédure administrative (PA; RS 172.021). La loi fédérale d'organisation judiciaire (RS 173.110; art. 100, let. d, ch. 1) n'est pas applicable.

Conformément à la procédure administrative, il appartient au Département militaire fédéral de prendre une décision en dernière instance lorsqu'il s'agit d'affaires relevant du pouvoir de commandement (art. 74, let. d), comme c'est le cas ici. Pour prendre sa décision, le Département militaire fédéral se fonde sur les propositions de commissions civiles de recours (il y en a 15 au total).

Aussi longtemps que la procédure est en cours, le requérant est dispensé de tout service militaire ainsi que des tirs hors service obligatoires.

En règle générale, les hommes autorisés à servir sans arme sont incorporés dans les troupes sanitaires ou de protection aérienne. Ils peuvent exceptionnellement rester dans leur unité lorsque leur fonction ne nécessite pas l'emploi d'une arme.

1351

Comme le montrent les tableaux ci-après, le nombre des demandes présentées en vue de faire du service militaire sans arme a fortement diminué depuis 1982".

Demandes Etat au 31 déc. 1986

Présentées

Acceptées

Rejetées

898 547 469 368 356

223 121 214 166 129

562 355 217 159 143

Etat au 3l déc. 1986

Présentés

Admis

Rejetés

1982 1983 1984 1985 1986

362 269 140 121 99

141 116 63 64 42

193 136 68 52 29

,

1982 1983 1984 1985 1986 Recours

311.2

Appréciation critique

Dans l'ensemble, l'actuelle réglementation concernant le service militaire sans arme a donné satisfaction. L'extension de la procédure de recours, en particulier, a nettement amélioré la situation juridique des requérants.

Dans ces conditions, il s'agira uniquement, dans la révision envisagée, d'éliminer les points faibles qui subsistent et d'améliorer la procédure actuelle.

312

Procédure préliminaire

Un groupe de travail du Département militaire fédéral a élaboré un nouveau projet de réglementation du service militaire sans arme, portant notamment sur les points suivants:

" II ressort des deux tableaux qu'un certain nombre de cas n'ont pas été tranchés en première ou en deuxième instance, ce qui s'explique par le fait que des demandes ou des recours sont encore pendants (ne vaut que pour 1986) ou qu'ils ont été réglés d'une autre manière (p. ex. inaptitude au service ou au tir). Il importe en outre de relever que tous les requérants dont la demande a été refusée n'ont pas présenté un recours.

1352

312.1

Propositions de modification de l'organisation militaire et justification 312.11 Transfert de la réglementation dans la loi fédérale sur l'organisation militaire Comme le Conseil fédéral l'a relevé à plusieurs reprises, la réglementation du service militaire sans arme, qui figure actuellement dans une ordonnance dont la validité est limitée, doit être transférée dans une loi.

En effet, la question de savoir si les militaires doivent être armés ou non doit être examinée à la lumière des obligations militaires fixées dans la loi fédérale sur l'organisation militaire (RS 510.10). Le caractère des obligations militaires, défini aux articles 8 et suivants, admet implicitement qu'un militaire est armé, exception faite des hommes qui sont dispensés pour des raisons médicales.

312.12 Critères d'admission Les critères d'admission au service militaire sans arme correspondent aux critères retenus en vue de faire bénéficier les objecteurs authentiques d'un régime de faveur quant à l'exécution de leur peine (art. 81, ch. 2, l re phrase, CPM). Il n'y a pas de raison de s'écarter de cette réglementation. Il importe donc de s'adapter aux nouveaux critères mentionnés dans le CPM (voirch. 213).

312.13 Service militaire sans arme plus long II n'est pas toujours facile de déterminer si le conflit de conscience dont fait état le requérant est réel, s'il est craint ou simplement feint. De plus, le requérant peut se tromper sur la nature de son conflit de conscience. Afin de pouvoir tenir compte aussi valablement que possible des éventuels doutes qui pourraient surgir quant à la gravité du conflit de conscience du requérant, il y a lieu d'astreindre celui qui ne porte pas d'arme à des jours de service supplémentaires. Cette solution s'impose en outre du fait que le militaire non armé n'est pas tenu d'accomplir les tirs hors service et ne monte pas la garde.

313

Procédure de consultation

La proposition de modification, à laquelle étaient joints le projet de révision concernant la décriminalisation de l'exécution des peines (voir ch. 213) des objecteurs de conscience ainsi qu'un rapport explicatif, a été mis en consultation auprès des cantons, partis et organisations intéressées le 15 août 1985 (voir également ch. 214).

1353

314 314.1

Résultats de la procédure de consultation Appréciation générale (introduction dans l'OM)

Le transfert dans l'OM de la réglementation du service militaire sans arme pour des raisons de conscience n'a pratiquement pas été contesté.

Sur les 13 cantons qui se sont exprimés (13), un seul (AR) s'est opposé à ce projet. Le PRD et l'UDC approuvent en principe le projet, alors que le POCH le rejette. Les autres partis n'ont pas soulevé d'objection.

Toutes les organisations consultées, à l'exception de la branche suisse du Service civil international, se sont prononcées expressément ou tacitement en faveur de l'inscription dans l'OM du service militaire sans arme.

314.2

Critères d'admission

La grande majorité des cantons ainsi que les partis bourgeois représentés au Parlement n'ont pas fait de remarque à propos de la limitation aux motifs «religieux et éthiques». Quatre partis représentés au Parlement se sont toutefois élevés contre une telle limitation (PEP, Adi, POCH et PSS). Il en est de même des milieux religieux (notamment la Conférence des Evêques suisses et la Fédération des Eglises protestantes de la Suisse), de la Commission fédérale pour la jeunesse, des partisans du service civil ainsi que des groupements pacifistes. L'argument majeur invoqué était que la conscience ne peut être divisée selon différents motifs.

Enfin, cinq cantons et l'UDC souhaiteraient que l'on conserve le critère du «grave conflit de conscience».

314.3

Prolongation du service militaire sans arme

A deux exceptions près (BS, qui se montre sceptique et SO qui est contre toute prolongation), tous les cantons qui se sont prononcés (12) approuvent sur ce point le projet. Quant aux partis représentés au Parlement: l'UDC et le PLS se sont expressément prononcés en faveur d'une prolongation alors que le PSS et le PEP s'y opposent. Les autres partis ne se sont pas exprimés.

Tous les milieux religieux, à l'exception des Quakers, sont en principe d'accord avec une prolongation du service (notamment la Conférence des Evêques suisses et la Fédération des Eglises protestantes de la Suisse). Les organisations qui se sont prononcées contre sont la Commission fédérale pour la jeunesse, des partisans du service civil et des groupements pacifistes.

32 321

Commentaires des différentes dispositions légales Article 10bis OM (nouveau)

Cet article devrait constituer la base légale du service militaire sans arme 1354

pour des raisons de conscience, qui existe déjà depuis plusieurs années. Les critères selon lesquels un militaire est autorisé à servir sans arme devraient être identiques à ceux qui figurent à l'article 81, chiffre 2, 1er alinéa, du CPM. Selon cette disposition, dont la révision est également proposée (voir ch. 213 et 31) l'objection de conscience devrait être décriminalisée.

322

Article 122, 5e alinéa, OM (nouveau)

Le fait d'astreindre les militaires non armés pour des raisons de conscience à un service supplémentaire (élite: 20 jours, landwehr: 13 jours et landsturm: 6 jours) permet de mieux apprécier le sérieux et la conviction du requérant. En outre, ce service supplémentaire compense en quelque sorte les privilèges dont jouit le militaire non armé par rapport au militaire armé (pas de garde, pas de tirs obligatoires hors service).

Toutes les autres modalités devront être réglées au niveau de l'ordonnance.

33

Conséquences financières et effets sur l'état du personnel

A l'exception des faibles coûts occasionnés par le service supplémentaire, le présent projet n'aura aucune conséquence financière ni d'effet sur l'état du personnel, que ce soit pour la Confédération, les cantons ou les communes.

34

Grandes lignes de la politique gouvernementale

Le projet a été annoncé dans le rapport du 18 janvier 1984 sur les Grandes lignes de la politique gouvernementale 1983-1987 (FF 1984 I 153, ch. 25).

35

Constitutionnalité

Les modifications proposées touchent uniquement des dispositions existantes de la loi fédérale sur l'organisation militaire (RS 510.10) et s'appuient dès lors comme celles-ci sur les dispositions constitutionnelles mentionnées dans le préambule de cette loi.

31549

1355

Code pénal militaire (CPM)

Projet

Modification du

L'Assemblée fédérale de la Confédération suisse, vu le message du Conseil fédéral du 27 mai 19871*, arrête: I

Le code pénal militaire (CPM)2' est modifié comme il suit:

Refus de servir

Art. 81, titre marginal, ch. 1, 2, 2bts (nouveau), 3 et 5 (nouveau) 1. Celui qui, dans le dessein de refuser le service militaire, n'obéit pas à un ordre de se présenter au recrutement ou au service, sera puni de l'emprisonnement.

2. Si l'auteur rend vraisemblable qu'en raison de ses convictions religieuses ou morales, il ne peut concilier le service militaire avec les exigences de sa conscience, le juge le reconnaîtra coupable et l'astreindra à un travail d'intérêt général.

Le juge fixera la durée de l'astreinte au travail. Celle-ci sera, en règle générale, une fois et demie plus longue que celle de la totalité du service militaire refusé, mais n'excédera pas deux ans.

Si l'auteur refuse d'accomplir le travail auquel il est astreint, ou s'il viole gravement les devoirs qui en résultent, le juge prononcera une peine conformément au chiffre 1. Il ne pourra plus infliger de peine lorsque dix ans se seront écoulés depuis le verdict de culpabilité.

Le juge pourra prononcer l'exclusion de l'armée.

Le Conseil fédéral règle les détails de l'exécution de l'astreinte au travail.

2bis. Si l'auteur rend vraisemblabe qu'en raison de ses convictions religieuses ou morales, il ne peut concilier le service mili-

»FF 1987 II 1335

2

>RS 321.0

1356

Code pénal militaire

taire armé avec les exigences de sa conscience, le juge le reconnaîtra coupable et l'attribuera au service sans arme, s'il est prêt à accomplir un tel service.

Si l'auteur refuse, par la suite, d'accomplir le service sans arme, le juge prononcera une peine conformément au chiffre 1.

Il ne pourra plus infliger de peine lorsque dix ans se seront écoulés depuis le verdict de culpabilité.

3. En service actif, le juge pourra prononcer la réclusion.

5. L'auteur ne sera pas punissable s'il est déclaré inapte au service militaire et si l'inaptitude existait déjà lors du refus de servir.

Insoumission

Art. 81a (nouveau) 1. Celui qui, sans avoir le dessein de refuser le service militaire, n'obéit pas à un ordre de se présenter au recrutement ou au service, sera puni de l'emprisonnement jusqu'à six mois.

L'auteur sera puni disciplinairement si l'infraction est de peu de gravité.

2. En service actif, le juge pourra prononcer la réclusion.

3. Si plus tard le délinquant se présente spontanément pour faire le service, le juge pourra atténuer librement la peine (art.

47).

4. L'auteur ne sera pas punissable s'il est déclaré inapte au service militaire et si l'inaptitude existait déjà lors de l'insoumission.

Art. 83, 1er, 2e al. et 4e al. (nouveau) 1 Celui qui, sans autorisation et dans le dessein de refuser le service militaire, aura abandonné son corps ou son emploi militaire, ou n'aura pas rejoint son corps après une absence justifiée, sera puni de l'emprisonnement. Si l'auteur rend vraisemblable qu'en raison de ses convictions religieuses ou morales, il ne peut concilier le service militaire avec les exigences de sa conscience, il sera jugé conformément à l'article 81, chiffre 2.

S'il se déclare prêt à accomplir un service sans arme, l'article 81, chiffre 2bis est applicable.

2 En service actif, le juge pourra prononcer la réclusion.

"L'auteur ne sera pas punissable s'il est déclaré inapte au service militaire et si l'inaptitude existait déjà lors de la désertion.

9l

Feuille fédérale. 139e année. Vol. II

1357

Code pénal militaire

Casier judiciaire

Refus de servir .Désertion

Art. 226 L'astreinte au travail ou l'attribution au service sans arme au sens de l'article 81, chiffre 2 ou 2bis et les sanctions disciplinaires ne sont pas inscrites au casier judiciaire. Au surplus, les articles 359 à 364 du code pénal suisse" sont applicables.

Art. 236a (nouveau) Celui qui, entre l'adoption et l'entrée en vigueur de la modification du .. .2) de la présente loi, a été condamné par un jugement définitif pour refus de servir ou désertion au sens de l'article 81, chiffre 2, ancienne teneur, et qui n'a pas encore exécuté la peine, peut, dans le délai d'un mois qui suit l'entrée en vigueur de cette modification, demander par écrit au juge qui l'a condamné d'être jugé derechef selon le nouveau droit.

II 1 2

La présente loi est sujette au référendum facultatif.

Le Conseil fédéral fixe la date de l'entrée en vigueur.

31549

»RS311.0 « RO...

1358

Loi fédérale sur l'organisation militaire

Projet

(OM) Modification du

L'Assemblée fédérale de la Confédération suisse, vu le message du Conseil fédéral du 27 mai 19871', arrête:

I La loi fédérale sur l'organisation militaire2' est modifiée comme il suit: Art. 70*'s (nouveau) Les hommes astreints aux obligations militaires qui, en raison de leurs convictions religieuses ou morales, ne peuvent concilier le service militaire armé avec les exigences de leur conscience, font du service militaire sans arme.

Art. 122, 5e al. (nouveau) 5 Les hommes astreints aux obligations militaires qui font du service militaire sans arme conformément à l'article 10bis accomplissent un cours de répétition supplémentaire. Ils font 13 jours de service militaire supplémentaire s'ils présentent leur demande lorsqu'ils sont dans la classe d'âge de la landwehr, 6 jours s'ils sont dans la classe d'âge du landsturm.

II 1 2

La présente loi est sujette au référendum facultatif.

Le Conseil fédéral fixe la date de l'entrée en vigueur.

31549

» FF 1987 II 1335 > RS 510.10

2

1359

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Message concernant la modification du code pénal militaire et de la loi fédérale sur l'organisation militaire du 27 mai 1987

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1987

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30

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87.043

Numéro d'affaire Numero dell'oggetto Datum

04.08.1987

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1335-1359

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