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MESSAGE du

Conseil fédéral à l'Assemblée fédérale concernant la modification de la loi du 12 avril 1907 sur l'organisation militaire.

(Du 23 septembre 1932.)

Monsieur le Président et Messieurs, Notre message du 20 juin 1932 concernant l'adaptation temporaire des traitements et salaires des personnes au service de la Confédération annonçait également une réduction des dépenses pour la défense nationale.

Il s'agissait de trouver 4 à 5 millions, dont 2% grâce à la baisse des traitements, tandis que 2 à 2% millions devraient être économisés sur d'autres chapitres. Le département militaire s'est mis sans retard à la tâche et a cherché où et dans quelle mesure pourraient être opérées des réductions.

Il s'est heurté à de nombreuses difficultés, mais ne sera pas moins à même de vous soumettre les propositions nécessaires dans le projet de budget.

On a constaté à cette occasion qu'il est impossible de faire certaines économies sans modifier des dispositions légales. Le but du présent message est précisément de vous proposer de telles modifications. Il s'agit d'ailleurs, en partie, de répondre à des voeux de la commission des économies.

I.

CHEVAUX A LA RATION DES COMMANDANTS DE TROUPE ET DES OFFICIERS DE L'ÉTAT-MAJOR GÉNÉRAL Aux termes des articles 73 et 74 de la loi sur l'organisation militaire de 1907, les lieutenants-colonels et les officiers d'un grade plus élevé exerçant un commandement dans l'élite ont droit à une indemnité pour un cheval de selle en leur possession. Cette disposition, qui ne figurait pas dans la loi de 1874, avait un double but: d'abord augmenter le nombre des chevaux d'officiers en prévision d'une mobilisation, puis développer l'équitation chez nos commandants de régiments et d'unités supérieures. Au début,

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de nombreux officiers firent usage de ce droit. Le maximum fut atteint en 1912, avec 148; la moyenne de 1909 à 1913 fut de 121. Après la guerre, leur nombre diminua sensiblement. Il se peut que l'emploi plus fréquent de l'automobile et les conditions économiques y aient contribué; mais ce qui a été déterminant, c'est que, l'indemnité, réduite pour des raisons d'économie, ne suffisait plus, de beaucoup, à couvrir les frais d'entretien d'un cheval. Les officiers qui n'étaient pas en mesure de prendre la différence à leur charge se virent contraints de renoncer au cheval à la ration.

Depuis 1926, l'indemnité de pansage et de fourrage est de 4 fr. 50 par jour, somme qui est insuffisante, surtout dans les villes. Alors qu'en 1920 80 officiers possédaient encore un cheval à la ration, leur nombre n'a cessé de diminuer, pour tomber à 53 en 1931. 11 saute aux yeux que tout le système a perdu de son importance. Le nombre des chevaux à la ration ne pourrait être augmenté que si l'on relevait l'indemnité, mais ce serait en opposition formelle avec la politique d'économie qui nous est imposée.

Comme il ne s'agit pas, en définitive, d'une question vitale -- quelque précieux que soient les avantages résultant de la garde d'un grand nombre de chevaux a la ration --· nous estimons, non sans regret, que toute l'institution peut être supprimée. Il faut, pour cela, modifier les articles 73 et 74 de la loi sur l'organisation militaire. Nous avons l'honneur de vous soumettre, dans le projet de loi ci-annexé, une nouvelle rédaction de ces deux articles. L'économie est de 80 à 90,000 francs par année.

II.

Il est possible, sans nuire beaucoup à la puissance défensive du pays, de faire d'autres économies en réduisant le nombre des inspections. Il y a, ici, deux choses à considérer: 1. Aux termes de l'article 101 de la loi sur l'organisation militaire, le matériel de corps des bataillons d'infanterie et du génie, ainsi que des unités des armes spéciales, est inspecté tous les deux ans par les commandants de ces troupes. Cette disposition tend, avec d'autres, à rehausser la situation des officiers de troupe envers l'administration et à leur permettre notamment d'exercer une influence plus grande. Elle était, sans aucun doute, justifiée en soi; en outre, elle s'avéra très utile pour la préparation à la mobilisation de guerre. L'expérience a toutefois démontré que ses avantages ne doivent pas être estimés trop haut; ils sont notamment disproportionnés aux frais qu'ils entraînent pour la Confédération et au temps que les officiers doivent consacrer aux inspections. Sur le désir exprimé par la commission des finances les inspections ont été considérablement réduites dans plusieurs directions. On a ainsi fait d'importantes économies, mais l'utilité de l'inspection a, elle aussi, fortement diminué.

En procédant ainsi, on s'est écarté de la loi, ce qui n'est pas sans inconvénient. Aussi estimons-nous, avec la commission des économies, que cette

613 inspection du matériel de corps par les commandants de troupe doit être supprimée complètement et que la responsabilité du magasinage et de l'entretien du matériel doit être laissée entièrement à l'administration.

L'application intégrale des dispositions légales grèverait le budget militaire d'une somme de 10,000 francs chaque année. Grâce aux restrictions apportées, il n'a été dépensé que 8 à 9000 francs tous les deux ans.

2. L'article 144 de la loi sur l'organisation militaire pose en principe que toutes les écoles et cours doivent être inspectés. Ces inspections incombent principalement aux commandants des divisions et des corps d'armée. Les frais qu'elles entraînent sont très élevés et nous estimons qu'elles peuvent aussi être restreintes. Mais il ne peut naturellement pas être question de les supprimer complètement, comme pour le matériel de corps.

Ce qu'il faut supprimer, c'est leur caractère obligatoire. Quant aux principes nouveaux destinés à régir les inspections, mieux vaut ne pas les insérer dans la loi et laisser au Conseil fédéral le soin de régler la question.

Ce système, plus élastique, permettra de s'adapter aux circonstances.

Nous vous proposons donc de rédiger l'article 144 de la loi sur l'organisation militaire de manière que le Conseil fédéral pourra arrêter les prescriptions nécessaires sur l'inspection des écoles et cours. Il ne nous est pas possible de vous présenter aujourd'hui déjà des chiffres sur l'importance des économies qui résulteront de cette modification.

Les trois modifications susmentionnées ont un caractère définitif. On peut se demander si leur introduction ne pourrait pas être différée jusqu'à la réorganisation générale de nos institutions militaires, qui eât sur le chantier. Après mûre réflexion, nous avons jugé utile de vous les soumettre sans tarder sous forme de revision partielle de la loi. Nos motifs sont les suivants: D'abord la nécessité impérieuse de faire des économies aussi bien au militaire que dans les autres branches de l'administration. Mais il ne saurait être question de se mettre en contradiction avec les lois en vigueur. Quelque louable que soit l'intention d'alléger les charges de l'Etat, la fin ne saurait justifier des moyens illégaux. La seule voie à suivre est de modifier la loi. Il ne reste plus qu'à choisir entre la revision
partielle et la revision générale. Mais la réponse à cette question est conditionnée par l'urgence des économies à réaliser. S'il y a urgence, on n'attendra pas la revision générale de la loi, qui demandera sans doute beaucoup de temps.

La portée financière des revisions partielles que nous proposons n'est, à vrai dire, pas considérable. Mais cela n'empêche pas de les réaliser dès maintenant. Car il n'y a pas de petites économies, surtout quand elles ont un caractère définitif et qu'elles se font sentir chaque année. En outre, les modifications prévues concernent des questions particulières, qui peuvent être tranchées isolément et ne préjugent par conséquent en rien la revision générale de la loi sur l'organisation militaire. Le moment paraît donc venu de les effectuer.

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III.

Parallèlement aux revisions partielles et définitives, nous vous proposons, pour finir, une mesure législative qui ne serait valable que pour un an, mais qui entraîne une économie considérable. Il s'agit de réduire les effectifs des cours de répétition en 1933. Voici ce que nous avons à dire à ce sujet: En 1919, il avait été décidé de ne recruter les jeunes gens qu'à 20 ans, au lieu de 19 ans comme le prescrit la loi, et de ne les appeler à l'école de recrues qu'à 21 ans, au lieu de 20 ans. L'élite a ainsi été privée d'une classe.

Dès l'adoption de la nouvelle organisation des troupes, on se rendit compte de la nécessité de récupérer cette classe. On y arriva en appelant chaque année, dès 1925, les recrues d'une période de 13 à 15 mois. On instruisit ainsi : en 1926, les recrues de 15mois (classe de 1905, janvier, février et mars 1906), en 1927, les recrues de 13 mois (9 mois de' 1906 et 4 mois de 1907), en 1928, les recrues de 13 mois (8 mois de 1907, 5 mois de 1908), en 1929, les recrues de 14 mois (7 mois de 1908, 7 mois de 1909), en 1930, les recrues de 14 mois (5 mois de 1909, 9 mois de 1910), en 1931, les recrues de 15 mois (3 mois de 1910 et toute la classe de 1911).

Ainsi, la plus jeune classe a été récupérée et, en 1932, on n'instruit plus que les recrues de 12 mois, soit la classe de 1912.

D'après ce tableau, on a donc instruit, dans les 7 années de 1926 à 1932, les 8 classes entières de 1905 à 1912. A de rares exceptions près, tous ces hommes sont astreints aux cours de répétition en 1933. Cette année-là, les hommes de la classe de 1912 accompliront leur premier cours de répétition, ceux de la classe de 1905 leur dernier cours.

En différant, en 1919, le recrutement et l'appel au service des jeunes gens, on se proposait de faire des économies. Ce but n'a été jusqu'ici atteint que dans une faible mesure, parce que tout ce qui avait été économisé de 1920 à 1925 a de nouveau été absorbé dans les années suivantes par la récupération de la plus jeune classe d'âge. Si la mesure prise en 1919 doit, en fin de compte, avoir un certain effet, il importe d'agir. C'est maintenant la dernière occasion. Voici ce que nous envisageons: Ainsi que nous venons de le voir, les cours de répétition de 1933 seront suivis non seulement par les sept classes d'âge normales, mais par 8 classes.

Même si
l'une de ces classes était dispensée du cours, il en resterait toujours 7. Les cours de répétition peuvent également très bien être organisés d'une façon normale sans cette classe. C'est de cette possibilité qu'est née l'idée de renoncer à une classe en 1933. L'économie qui en résulterait pour l'exercice de 1933 s'élèverait, d'après les calculs naturellement approximatifs du département militaire, à environ 1,500,000 francs. C'est une somme.

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Si l'on se demande, enfin, laquelle des 8 classes d'âge doit être dispensée du cours de répétition, le choix se porte tout naturellement sur la plus ancienne, celle de 1905. C'est, dans son ensemble, la classe qui a accompli l'école de recrues non pas à 20 ans comme le prévoit la loi, mais seulement à 21 ans.

H ne s'agit pas simplement de renvoyer le cours de répétition des hommes de la classe de 1905, mais au contraire d'une dispense définitive entraînant une économie non moins définitive. C'est de cette manièrelà seulement que les mesures qui avaient été prises en 1919 atteindront, du moins partiellement, leur but.

Mais, ainsi que nous venons de l'exposer, il s'agit d'une mesure extraordinaire, non renouvelable et absolument passagère. Les circonstances qui la motivent ne se reproduiront plus.

Elle est contraire à la loi, voire même à une disposition essentielle de la loi, celle qui détermine l'obligation de suivre les cours de répétition. C'est la raison pour laquelle nous estimons qu'elle doit être prise par voie législative et non par voie budgétaire.

Nous vous recommandons l'adoption du projet de loi ci-annexé et saisissons cette occasion, Monsieur le Président et Messieurs, pour vous présenter les assurances de notre haute considération.

Berne, le 23 septembre 1932.

Au nom du Conseil fédéral suisse: Le président de la Confédération, MOTTA.

Le chancelier de la Confédération, KAESLIN.

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(Projet.)

Loi fédérale modifiant

la loi du 12 avril 1907 sur l'organisation militaire.

L'ASSEMBLÉE FÉDÉRALE DE LA

C O N F É D É R A T I O N SUISSE, vu le message du Conseil fédéral du 23 septembre 1932, arrête:

Article premier.

Les articles 73 et 74 de la loi sur l'organisation militaire sont abrogés et remplacés par les dispositions suivantes: Art. 73. La Confédération facilite aux officiers montés l'acquisition et le dressage de chevaux de selle.

Art. 74. Les chevaux fournis au service par les officiers montés sont estimés à l'entrée au service et dépréciés à la sortie. La Confédération alloue aux officiers, pendant la durée du service, une indemnité de location journalière pour ces chevaux.

Le Conseil fédéral arrête les prescriptions relatives à l'indemnité de location journalière et aux chevaux de service des fonctionnaires militaires et des instructeurs.

Art. 2.

L'article 101 de la loi sur l'organisation militaire est abrogé.

Art. 3.

L'article 144 de la loi sur l'organisation militaire est abrogé et remplacé par la disposition suivante: Art. 144. Les écoles et cours sont inspectés autant que de besoin. Le ·Conseil fédéral arrête les prescriptions nécessaires.

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Art. 4.

Le Conseil fédéral est autorisé, à titre non renouvelable et extraordinaire, et en dérogation passagère à l'article 120 de l'organisation militaire, à dispenser définitivement du septième cours de répétition réglementaire dans l'élite les caporaux, appointés et soldats de la classe de 190& qui auront accompli six cours de répétition à la fin de 1932. Ces militaires.

n'ont pas à payer la taxe pour compenser ce service.

Art. 5.

Le Conseil fédéral fixe la date de l'entrée en vigueur de la présente loi.

H arrête les dispositions d'exécution nécessaires.

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MESSAGE du Conseil fédéral à l'Assemblée fédérale concernant la modification de la loi du 12 avril 1907 sur l'organisation militaire. (Du 23 septembre 1932.)

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