# S T #

XXXIXme année. Vol. III.

N° 30.

# S T #

Samedi 2 juillet 1887

Message du

conseil fédéral à l'assemblée fédérale -relatif à un projet de loi fédérale .sur la pêche, revisant la loi du 18 septembre 1875.

(Du 3 juin 1887.)

Monsieur le président et messieurs, La loi fédérale sur la pêche, du 18 septembre 1875, a été le premier acte législatif concernant la pêche, pris par la Confédération en exécution de l'article 25 de la constitution fédérale du 29 mai 1874.

Lors de l'élaboration de la loi, les conditions sur la pêche en Suisse étaient encore peu connues, et un petit nombre de cantons seulement avaient mis à disposition des matériaux sur lesquels on pût Caire fonds ; malgré cela, la loi a cependant d'une manière générale répondu au but et a contribué, dans la mesure où elle a été réellement mise à exécution par les cantons, à la protection et à la multiplication du poisson.

Quelques cantons et fractions de cantons ont aussi pu constater avec plaisir que le nombre des poissons augmentait toujours plus par suite de la création de districts mis à ban, de la mise en eau libre de poissons obtenus dans des établissements de pisciculture, d'une application plus sévère de la police de la pêche, etc., tandis que dans des eaux d'autres cantons, autrefois très poissonneuses, le poisson a toujours plus diminué et diminue encore actuellement ensuite de l'exécution défectueuse de la loi.

Feuille fédérale suisse. Année XXXIX.

Vol. III.

1

En outre, dans le courant des dix années pendant lesquelles la loi a été eu vigueur, des facteurs extérieurs ont aussi plus ou moins contribué, surtout dans les contrées industrielles, à ce dépeuplement.

Ainsi, par l'établissement de nouvelles usines hydrauliques, les poissons ont toujours été pins en danger et leur passage a été rendu beaucoup plus difficile ou interrompu; plusieurs eaux ont été souillées au détriment du poisson par la création de nouvelles fabriques chimiques et autres; de nombreuses frayères ont été détruites par des corrections de rivières ; l'augmentation du nombre des bateaux à vapeur sur nos lacs a eu pour effet, grâce au ressac plus fréquent, d'emporter de plus en plus le frai se trouvant.sur les frayères; de nouveaux engins de poche des plus désastreux pour le poisson ont été nouvellement introduits, et enfin, l'augmentation considérable de la fréquentation des étrangers a fait élever les prix du poisson et a engagé les pêcheurs à exercer un vrai pillage.

Dans les circonstances susmentionnées, une très grande fortune nationale repose plus on moins sans profit dans beaucoup de nos lacs, rivières et ruisseaux avec leurs eaux la plupart excellentes pour le poisson, c'est pourquoi nous avons tout intérêt, en considération surtout des barrières douanières qui nous entourent, à relever aussi vite que possible l'état en poissons dans nos eaux et à lui procurer l'utilisation la plus élevée et la plus durable possible.

Alors, nous épargnerons au pays même les grandes sommes que nous payons annuellement à l'étranger pour des poissons d'eau douce.

D'après l'avis de tous les pêcheurs consciencieux, de sociétés de pisciculture, de personnes compétentes et d'autorités s'occupant de la pêche, une revision de la loi fédérale sur la pêche est absolument nécessaire pour atteindre ce but. Cette revision devrait s'effectuer principalement dans le sens d'augmenter la sévérité de la police sur la pêche par l'extension des dispositions protectrices et des mesures minima en faveur d'autres précieuses espèces de poissons, par l'interdiction de l'emploi d'un certain nombre de vieux engins de .pêche qui ne sont pas énumérés dans la loi ou de quelques engins nouvellement introduits, et qui tous sont trop désastreux pour le poisson. Cette revision comprendrait en outre: l'obligation pour les
cantons de conclure des concordats sur la pêche en vuo d'une réglementation uniforme de la pêche dans les eaux intercantonales, la nomination de surveillants de pêche, etc.

Ensuite des motifs qui précèdent, nous avons cru devoir entreprendre sans délai la revision de la loi fédérale sur la pêche, et nous avons l'honneur de soumettre maintenant à votre baute aasern-

blée un projet de revision de la loi, projet qui a été discuté par une commission spéciale et que nous expliquons et motivons d'une manière détaillée dans les lignes qui suivent.

Prenant le projet article par article, nous avons à faire oliserver ce qui suit: Art. 1er. Reste le même.

Art. 2. Est le même que celui de la loi actuelle, sauf quelques modifications peu importantes de rédaction.

Art. 3. Les dispositions concernant les grandeurs des mailles des engins de pêche ont été rendues plus sévères par la suppression de la disposition de la lettre c de la loi actuelle qui autorisait des engins dont les ouvertures étaient de 2 cm. seulement. Par suite de cette suppression, le dernier alinéa de cet article tombe de môme.

Au lieu de «l'intérieur des nasses», on dirait pour plus de clarté « le réseau de l'entonnoir de la nasse ·».

Ces dispositions n'étaient pas applicables pour la pêche des poissons servant d'amorce ; cette exception a été étendue à la pêche des poissons devant servir de nourriture pour des établissements de pisciculture.

Art. 4. Les systèmes de pêche interdits (articles 4 et 5 de la loi actuelle) ont été réunis dans cet article avec une rédaction quelque peu modifiée. Nous avons admis à nouveau l'interdiction de recueillir et de vendre des poissons qui ont été étourdis ou tués au moyen des matières indiquées, et en outre l'interdiction d'employer le grappin (Schorpf) qui est si désastreux pour le poisson^ l'engin appelé «Otter», celui nommé «Juckschnur», et la smuscia (qui est employée au Tessin). Dans le chiffre 7, il a été ajouté ù, la disposition actuelle concernant la mise à sec de cours d'eau, qu'il devait aussi être donné avis de cette opération à l'autorité locale que cela concerne. Les mots « si possible » ont été laissés de côté comme étant superflus.

La disposition précitée concernant la prise et la vente do poissons a été admise sur le désir spécial de diverses sociétés do pisciculture, et parce qu'en effet on peut, par cette interdiction, prévenir le mieux l'emploi de la dynamite, etc., car celui qui prend les poissons est dans la plupart des cas aussi celui qui a occasionné leur étourdissement ou leur mort: Cette disposition se trouve également dans l'article "VI, alinéa 2, de la convention sur la pêche avec l'Italie.

L'article 5 contient les dispositions renfermées dans l'article 5, alinéas 4 et 5, de la loi actuelle avec une rédaction quelque peu modifiée. Par le dernier alinéa, les cantons sont tenus d'installer des échelles à poissons aux endroits où des obstacles naturels empêchent le libre passage des poissons, si toutefois les frais qui en résultent ne sont pas trop élevés, ce dont le conseil fédéral est juge.

Art. 6: Les dispositions sur les périodes d'interdiction, contenues dans la loi actuelle ont subi une modification essentielle.

Il est vrai que la période d'interdiction pour les saumons est la même que celle prescrite par l'article 7 de la loi actuelle et qui concorde avec la convention conclue entre la Suisse, l'Allemagne et la Hollande au sujet de la réglementation de la pêche du saumon dans le Rhin ; par contre, celle pour les truites a été fixée du 1er octobre au 31 décembre pour la truite des lacs et du 10 octobre au 10 janvier pour la truite de rivière au lieu du 10 octobre au 20 janvier pour les deux espèces (article 8 de la loi actuelle).

L'expérience a démontré que la truite des lacs quitte déjà les lacs à la fin de septembre pour remonter les rivières et les ruisseaux, en vue du frayage et redescend de nouveau en décembre. Cette période d'interdiction concorde aussi avec celle admise par les états riverains du lac de Constance. La période d'interdiction pour les truites de rivière a été raccourcie de 10 jours ; cette réduction a été provoquée par des demandes de pêcheurs ainsi que par l'adoption de la même période d'interdiction dans le projet de revision de la convention sur la pêche avec le grand-duché de Bade ot l'Alsace-Lorraine. Une interruption de la pêche des truites pendant une durée de plus de trois mois nous paraît en effet trop longue pour le pêcheur de profession.

La période d'interdiction pour l'ombre de rivière est nouvelle ; cette espèce de poisson suit de près la truite, en ce qui concerne la saveur de la viande et sa valeur, et a diminué dans la plupart âo nos eaux d'une façon extraordinaire.

Art. 7. Comme l'époque de frai de la truite et de l'ombre de rivière diffère plus ou moins dans quelques contrées, surtout dans les hantes régions, de la période d'interdiction fixée, le conseil fédéral est autorisé par l'article 7 à permettre, dans de tels cas, aux cantons que
cela concerne de modifier la période d'interdiction.

Toutefois, le conseil fédéral ne donnera des autorisations de ce genre que sous des conditions relatives au contrôle sur le commerce des poissons péchés en dehors du temps prohibé ordinaire.

Le conseil fédéral peut, de la même manière, autoriser aussi les .cantons à laisser pêcher durant la période d'interdiction des truites,

les truites stériles, truites bleues ou argentées (dites Silber- ou Schwebforelleu), faciles à reconnaître, et, qui discontinuent pendant au moins une année à frayer.

Art. "8. La période d'interdiction pour l'omble chevalier (Kothel), pour les corégones et pour les agoni est fixée à 6 semaines et le soin de déterminer le commencement du temps prohibé est laissé aux cantons, sous réserve de la sanction du conseil fédéral. Dans la loi actuelle (article 8), la période d'interdiction pour l'omble chevalier était fixée à la môme époque, du 10 octobre au 20 janvier, que celle de la truite, tandis que pour les autres espèces de poissons mentionnées il n'existait aucune période d'interdiction spéciale.

Pour ce qui concerne en premier lieu les corégones, ceux-ci frayent à des époques très différentes de l'année suivant le bassin du lac où ils se trouvent ; par exemple, la palée de fond, du lac de Neuchàtel, fraye en janvier et au commencement de février ; la fera du lac Léman, dans la seconde moitié do février et an commencement de mars; l'édelfisch, dans le lac des Quatre-cantons, en août; les corégones d'autres lacs en septembre et en octobre, et la plupart de ceux-ci en novembre et décembre.

De même, l'ombre de rivière et les poissons de l'espèce des aloses (Maifische, agoni) frayent à des époques passablement différentes, de sorte que nous avons jugé convenable de ne fixer dans la loi que la durée de la période d'interdiction et de laisser aux cantons la fixation exacte de cette période d'après les conditions qui se présentent chez eux.

L'article 9 correspond à l'article 8, alinéa 4, de )a loi actuelle au sujet de l'obtention des éléments de reproduction pour des établissements de pisciculture. Les dispositions plus précises sur la matière appartiennent au règlement d'exécution.

L'article 10 défend de faire commerce, etc., pendant les périodes d'interdiction, des poissons cités à l'article 6 ; cet article 10 correspond à l'article 8, alinéa 1, de la loi actuelle, auquel sont ajoutés les mots « à l'exception des trois premiers jours » ; il interdit en même tenlps, d'une manière plus sévère la mise en vente dans les auberges, restaurants, hôtels, etc., et l'expédition de ces poissons.

Les cantons sont autorisés à faire des exceptions en ce qui concerne les poissons qui, pendant ce temps, ont été pris pour obtenir les éléments de reproduction nécessaires aux établissements du pisciculture.

Aucune période d'interdiction pour les corégones, l'ombre de rivière et les agoni n'a été introduite dans la loi, et cela pour deux raisons. D'abord parce que, ainsi que nous l'avons déjà dit, ces poissons, et surtout les corégones, fraient à des époques très différentes, de sorte qu'un contrôle sur la vente, l'expédition, etc., ne serait absolument pas possible. La seconde raison, c'est qu'une telle interdiction pour les corégones et l'ombre de rivière n'est point nécessaire, parce que ces poissons ne montent qu'à l'époque du frai depuis les profondeurs considérables où ils vivent, après quoi ils y retournent do nouveau. Dans ces profondeurs, leur pêche est très difficile et dans la plupart des cas peu rémunératrice, c'est pourquoi elle n'a lieu qu'exceptionnellement.

Pour les motifs qui précédent, les corégones et l'ombre de rivière no sont pris presque absolument que pendant l'époque do frai ; il est donc d'une grande importance, pour compenser ceci, que l'on veille à ce que les éléments de reproduction soient enlevés à ces poissons, les oeufs fructifies et placés dans des établissements spéciaux pour les faire incuber artificiellement.

Art. 11. Dans cet article, on a pris en juste considération, en ce qui concerne la vente de poissons pendant les temps prohibés, les cas où des eaux à poissons sont desséchées en temps de sécheresse, ou doivent, pour cause de circonstances majeures, être mises à sec. Les réserves nécessaires pour prévenir des abus sont contenues dans cet article.

Art. 12. L'alinéa 1 de cet article est le môme que l'alinéa 1 de l'article 9 de la loi actuelle.

Dans l'alinéa 2, la mention des bondelles a été laissée de côté, parce que l'alinéa 3 autorise la pêche des corégones pendant ce temps prohibé.

La disposition concernant les districts interdits ou mis à ban, alinéa 3 de l'article précité, a été prise dans l'article 23.

Art. 13. Cet article correspond à l'article 8, alinéa 3, et à l'article 6, alinéa 2, de la loi actuelle.

Art. 14. Correspond à l'article 8, alinéa 2, de la loi actuelle.

Art. 15. Cet article contient les longuem-s minima pour les espèces précieuses de poissons. Si des poissons de ces espèces n'ayant pas les longueurs prescrites sont pris, il doivent être de nouveau rejetés à l'eau. L'anguille a été ajoutée aux espèces admises jusqu'à présent (saumons, trnites, ombles chevaliers, ombres de rivière et corégones).

Cependant, comme dans beaucoup de nos petits ruisseaux et l&cs des régions élevées, les truites de rivière restent petites et que de même, dans ces lacs, diverses espèces de corégones n'atteignent pas en moyenne la longueur de 20 cm., il a été réservé aux autorités cantonales que cela concerne de prendre des cas de ce genre en considération et d'abaisser, avec l'autorisation du conseil fédéral, les longueurs minima.

Quant à la détermination de la longueur minima, on a admis jusqu'à présent assez généralement et aussi dans l'article 6 de la loi actuelle, la longueur du poisson à partir de l'oeil jusqu'à la naissance de la nageoire caudale ; dans les derniers temps on est revenu de ce mode de mesurage, parce qu'il n'offre pas dans les ·deux points extrêmes de la longueur à mesurer la précision désirable ; on mesure donc la longueur de tout le poisson à partir de l'extrémité de la töte jusqu'à l'extrémité de la queue. Nous avons admis dans le projet cette détermination plus précise des longueurs minima.

Le dernier alinéa de l'article 15 n'exige aucune explication.

Art. 16. Dans ces derniers temps, quelques lois sur la pêche «ut abandonné la période d'interdiction pour les écrevisses ; ces lois défendent maintenant de prendre les écrevisses femelles, en général, ·et les écrevisses mâles qui n'ont pas un poids fixé.

Il n'y a aucun doute que ce mode de protection a beaucoup pour lui, mais d'un autre côté il rend difficile la police de la pêche, et comme, cette police, ainsi que nous l'avons fait remarquer plus haut, laisse en général encore beaucoup à désirer, nous avons préféré adopter une période déterminée d'interdiction pour les écrevisses et une longueur minima.

L'article 11 de la loi actuelle fixait le temps prohibé pour les écrevisses du 1er septembre au 30 avril ; les observations faites dès lors ont cependant démontré que l'acte du frai se prolonge encore jusque dans le mois de juin; c'est pourquoi, tout en conservant Ut durée actuelle de 8 mois, nous avons fixé le temps prohibé du 15 octobre au 15 juin. Nous avons en outre adopté une longueur minima de 7 cm., mesurée depuis l'extrémité du rostre jusqu'à l'extrémité de la queue.

Art. 17. Cet article correspond, sous une forme quelque peu modifiée, aux dispositions de l'article 12 de la loi actuelle au sujet de la souillure des cours d'eau.

Art. 18. Cet article a été pris de l'article 2 du règlement d'exécution pour la loi fédérale sur la pêche.

8 Art. 19. L'alinéa 2 de l'article 11 du règlement précité dit entre autres : « Les concordats sur l'exercice commun de la police de la pêche dans les lacs intercantonaux (sur le modèle de ceux qui ont trait à la pêche dans les lacs de Neuehâtel et de Morat) seront très profitables à l'exécution du règlement sur la pêche et au but qu'il se propose. » Jusqu'à présent un seul concordat de ce genre a été conclu r c'est celui relatif à la pêche dans' les lacs de Neuchàtel et de Morat ; les négociations qui ont eu lieu au sujet de la conclusion de semblables concordats pour les lacs des Quatre-Cantons et de Zurich n'ont pas abouti. Aucun doute n'existe sur l'opportunité, voire même sur la nécessité de telles conventions; c'est pourquoi nous avons, par l'article 19, déclaré obligatoire la réglementation de la pêche dans les eaux à poissons intercantonales, et donné au conseil fédéral les pleins pouvoirs pour décider sur les points litigieux qui pourraient se présenter.

Art. 20. Une des dispositions nouvelles les plus importantes, est bien celle contenue dans l'alinéa 1 de cet article, qui oblige les cantons à nommer des surveillants sur la pêche.

En ce moment, les cantons de Zurich et de Genève seuls possèdent des surveillants pour la pêche proprement dits ; dans tous les autres cantons la surveillance est confiée aux organes ordinaires de police cantonale, qui ne s'en occupent dans la plupart des cas que superficiellement et de mauvaise grâce.

Si la loi fédérale n'a pas eu. sauf dans quelques cantons, le résultat qu'on en attendait, la raison en est essentiellement dana l'absence d'une surveillance suffisante, ainsi que dans la manière souvent trop faible et trop indulgente dont sont jugées les contraventions.

Or, nous sommes d'avis que lorsqu'une autorité décrète une loi, elle doit admettre dans cette loi les dispositions qui rendent possible aux organes exécutifs compétents de la mettre en application.

Sans doute qu'il résultera pour les cantons de la nomination dont il s'agit une augmentation de dépenses, mais cette augmentation sera largement couverte au bout de peu d'années par le relèvement de l'état en poissons. Nous avons tenu compte de circonstances spéciales, en disant expressément que la surveillance demandée se borne aux eaux à poissons les plus importantes, et, en outre, que les cantons
sont libres, pour les eaux cantonales limitrophes, d'établir une surveillance commune.

Nous désirons des surveillants de pêche qui ne soient pas de simples gardes de police, mais des personnes compétentes, en état

de contribuer à la protection et à l'augmentation du poisson, et auxquelles peut être confier l'extraction des éléments de reproduction pour les établissements de pisciculture, le contrôle sur la pêche et, cas échéant, sur la vente du poisson pendant les périodes d'interdiction, ainsi que la surveillance sur les districts interdits ou mis à ban.

Dans l'alinéa 2 de cet article, le conseil fédéral est autorisé à permettre le concours des garde-frontières fédéraux, en vue de venir en aide à la police cantonale de la poche dans les eaux suisses limitrophes, attendu que la surveillance de la pêche dans ces eaux est très difficile et que la surveillance de la frontière en général n'en souffrira pas pour cela. Sur une demande du gouvernement de Neuchâtel, les garde-frontières fédéraux stationnés le long du tronçon du Doubs formant frontière entre ce canton et la France, ont déjà été chargés de la police de la pêche, pour autant toutefois que cette surveillance est compatible avec la surveillance des péages.

Art. 21. Les dispositions protectrices contenues dans cet article et relatives à des espèces précieuses de poissons qui pourraient être importées, n'ont pas besoin d'être motivées.

Art. 22. Cet article correspond à l'alinéa 3 de l'article 13 de la loi actuelle, avec adjonction de la disposition concernant la désignation de districts interdits ou mis à ban.

Art. 23. Les dispositions de cet article ont été en partie tirées du deuxième alinéa de l'article 13 de la loi actuelle, en ajoutant la disposition qui autorise aussi le conseil fédéral, dans les circonstances indiquées, à exiger la formation de districts interdits ou mis à ban, ainsi qu'à défendre temporairement l'emploi de certains engins de pêche qui sont sans cela autorisés.

Art. 24. Cet article est d'accord avec les postulats sur la matière adoptés par les chambres fédérales les 11 juin/13 décembre 1884; mais il est conçu sous une forme un peu plus générale que ces postulats.

Art. 25. Cet article correspond textuellement aux articles 15 et 16 de la loi actuelle.

Art. 26. Les dispositions pénales sont aggravées pour certains délits et, pour des délits graves surtout, un minimum d'amende plus proportionné a été fixé, ce qui a paru d'autant plus nécessaire qu'en général le juge punit avec beaucoup trop d'indulgence les

10

pêcheurs délinquants, de sorte que ceux-ci trouvent encore toujours leur profit à continuer leur braconnage.

Le premier alinéa de cet article a été pris de la loi actuelle, seulement le minimum de l'amende qui était fixé à fr. 3 était beaucoup trop bas et a été élevé à fr. 5 ; on a aussi admis la disposition contenue dans la loi sur les péages et d'après laquelle les amendes échoient par parts égales au canton, à la commune et au dénonciateur.

Dans l'alinéa 2, le minimum de l'amende de fr. 50 fixé par la loi actuelle seulement pour l'infraction à l'interdiction d'employer des pièges à ressort, des cartouches explosibles, do la dynamite ou des substances nuisibles, a été étendu aux contraventions suivantes : emploi d'appareils de pèche et de filets non autorisés (article 2 et article 4, chiffre 1) ; -- établissement de nouvelles pêcheries fixes (article 4, chiffre 3) ; -- emploi de l'engin dit « Otter » et de la smuscia (article 4, chiffre 5) ; -- en outre, mise à sec et souillure des cours d'eau, dans le sens de l'article 4, chiffre 7, et de l'article 17, ainsi que flottage des bois (article 14).

D'après la dernière phrase de l'alinéa 2 de l'article 14 de la îoi actuelle, l'amende peut en cas de récidive être doublée, tandis que l'article 26, alinéa 3, du projet dit : « doit être doublée ».

Dans le quatrième alinéa, la disposition disant que l'amende peut être combinée avec la privation du droit de pêche a été maintenue, toutefois la fixation de la dnréo de privation a été laissée au juge ; cette durée est fixée seulement pour le deuxième cas de récidive; elle est de 2 à 6 ans.

L'alinéa 5 prévoit la confiscation des poissons et éerevisses pris illégalement ainsi que celle des engins de pèche défendus qui ont été employés, tandis que l'article 14, alinéa 3, de la loi actuelle ne parle que des poissons, sans indiquer les éerevisses, et laisse au juge la décision quant à la confiscation. Dans la plupart des jugements, on a renoncé à toute confiscation.

L'alinéa 6 correspond textuellement à l'article 14, alinéa 4, de la loi actuelle, seulement le jour a été calculé à fr. 5 au lieu de fr. 3, attendu que dans l'alinéa 1, le minimum de l'amende a été élevé de fr. 3 à fr. 5.

Les dispositions finales ne nécessitent aucune explication.

11 Nous saisissons cette occasion, monsieur le président et messieurs, pour vous renouveler l'assurance de notre haute considération.

Berne, le 3 juin 1887.

Au nom du conseil fédéral suisse, Le président de la Confédération : DEOZ.

Le chancelier de la Confédération : RINGIER.

12

Projet.

Loi fédérale sur

l a p è e li e L'ASSEMBLÉE FÉDÉRALE de la CONFÉDÉRATION SUISSE, en exécution de l'article 25 de la constitution fédérale?, et en modification de la loi fédérale sur la pêche du 18 septembre 1875 ; vu le message du conseil fédéral du 3 juin 1887, décrète : Art. 1er. La concession ou la reconnaissance du droit de pêche est dans les attributions des cantons ; l'exercice de ce droit est régi par les dispositions suivantes.

Art. 2. Est interdite la pêche au moyen de tout appareil de pêche permanent (écrilles, gords) ou de tout filet.

fixe (filet de barrage) qui empêcherait la circulation du poisson sur plus de la moitié du cours de l'eau, mesurée an niveau bas ordinaire et à angle droit du bord.

13 L'espace libre entre les piquets formant les barrages à ·saumons (gords) et entre les traverses qui relient les piquets, doit être d'au moins dix centimètres.

Les appareils permanents ou filets fixes, employés simultanément sur la même rive ou sur les deux rives opposées, doivent être à une distance au moins double du développement du plus grand de ces appareils.

Art. 3. Ne peuvent être employés les engins de pêche de toute espèce et de toute dénomination dont les ouvertures des mailles à l'état humide n'ont pas en hauteur et ·en largeur au moins les dimensions suivantes : a. pour la pêche du saumon : les corbeilles (paniers, nasses) et les filets flottants, 6 centimètres ; le réseau de l'entonnoir de la nasse, 4 centimètres ; b. pour la pêche d'autres espèces de poissons, 3 centimètres.

Les engins destinés à la pêche des poissons devant serTir d'amorce ou des poissons devant servir de nourriture pour des établissements de pisciculture ne sont pas soumis à cette restriction.

Art. 4. Sont interdits pour la pêche : 1° l'emploi de matières destinées à étourdir les poissons, de matières explosibles ou d'autres matières nuisibles (particulièrement des amorces empoisonnées, cartouches explosibles, etc.).

Il est de même interdit de recueillir et de vendre des poissons qui ont été étourdis ou tués au moyen de ces matières ; 2° l'emploi de pièges à ressort, de tridents à poissons (harpons), de grappins (Schorpfen), " d'armes à feu et d'autres engins de pêche de ce genre qui peuvent blesser ou tuer les poissons ; 3° l'établissement de nouvelles pêcheries fixes (trappes à poissons). Les pêcheries existant déjà légalement doivent

14









être pourvues d'ouvertures de dimension correspondante à celle des mailles des filets (article 3) ; la mise à l'eau ou la fixation de filets flottants, de telle manière qu'ils y demeurent fixés' ou suspendus.

Si plusieurs filets flottants sont mis à l'eau, la distance entre chacun d'eux doit être égale au moins au double de la longueur du plus grand filet ; l'emploi de la smuscia, de l'engin dit « Otter » et de l'engin dit «Juckschnur». L'emploi d'autres hameçons est permis, sous réserve des temps prohibés prescrits par la loi (article 6) ; l'emploi de nasses dans le Rhin pour la pêche du saumon pendant la période du 20 octobre au 24 décembre ; la mise à sec de cours d'eau en vue de la pêche. Si cette opération est nécessaire dans un autre but, avis doit en être donné en temps utile aux autorités locales que cela concerne et, cas échéant, aux propriétaires ou concessionnaires de droits de poche.

Art. 5. Les propriétaires d'usines hydrauliques ont le devoir d'établir les constructions nécessaires pour que les poissons ne puissent s'engager dans les appareils.

Ces propriétaires sont en outre tenus d'établir des échelles à poissons aux vannes et barrages qui rendent le libre passage des poissons particulièrement difficile ou qui l'empêchent, si toutefois les frais qui en résultent ne sont pas trop grands, C0 dont le conseil fédéral est juge.

Sous cette mémo réserve, les cantons ont lo devoir d'établir des échelles à poissons aux endroits où le libre passage des poissons est empêché par des obstacles naturels.

Art. 6. Pour les espèces de poissons ci-après indiquées, les époques pendant lesquelles la pêche est interdite sont fixées comme suit :

17 Art. 14. Pendant les temps prohibés, le flottage dans des fleuves et rivières est interdit si, par suite de la quantité insuffisante de l'eau, les grosses pièces de bois ne peuvent se mouvoir librement.

Art. 15. Les poissons des espèces ci-après désignées ne peuvent être mis en vente, vendus, achetés, expédiés ou servis dans des auberges, restaurants, hôtels, etc., si, mesurés depuis la pointe de la tête jusqu'à l'extrémité de la queue, ils n'ont pas au moins les longueurs suivantes : saumon .

.

.

.

.

.

.

. 5 0 cm., anguille .

.

.

.

.

.

.

35 » truite des lacs .

.

.

.

.

.

30 » ombre de rivière .

.

.

.

.

.

. 25 » truite de rivière .

.

.

.

.

.

.j omble chevalier (Roethel) .

.

.

.

. 120 » toutes les espèces de corégones .J Les autorités cantonales peuvent, pour certaines eaux à poissons et avec l'autorisation du conseil fédéral, réduire la longueur minima pour les truites de rivière et les corégones.

Les dispositions précitées ne s'appliquent pas à la vente et à l'expédition de poissons vivants n'ayant pas la longueur prescrite, qui proviennent d'établissements de pisciculture et qui sont destinés à être versos dans des eaux à poissons.

Art. 16. Du 15 octobre au 15 juin, il est interdit de prendre, d'acheter, de vendre, d'expédier ou de servir dans des auberges, restaurants, hôtels, etc., des écrevisses.

Cette interdiction est applicable pendant toute l'année pour les écrevisses dont la longueur minima, mesurée depuis l'extrémité du rostre jusqu'à l'extrémité de la queue, est inférieure à 7 cm. Les écrevisses prises et n'ayant pas cette longueur doivent être immédiatement rejetées dans l'eau.

Feuüle fédérale suisse. Année XXXIX.

Vol III.

2

18

Art. 17. Il est interdit de verser ou de faire couler dans des eaux à poissons, des résidus de fabrique ou d'autresmatières en quantités telles qu'il en résulte un dommagepour l'état en poissons et en écrevisses.

Les résidus de fabrique de ce genre doivent être déversés de manière à ne pas nuire au poisson.

Les gouvernements cantonaux et, dans le cas où leur décision ferait l'objet d'un recours, le conseil fédéral prononceront sur l'application de cette disposition aux écoulements provenant d'établissements agricoles ou industriels qui existaient déjà avant l'entrée en vigueur de la loi fédérale sur la pêche du 18 septembre 1875 (18 février 1876).

Art. 18. Les dispositions des articles 10 et 15 sont seules applicables pour la pêche dans des eaux privées établies artificiellement et dans lesquelles des poissons d'eaux publiques ne peuvent pénétrer.

Art. 19. La pêche dans toutes les eaux à poissons intercantonales doit être réglementée par des conventions entre les cantons intéressés. Le conseil fédéral prononce sur les dispositions au sujet desquelles les cantons ne peuvent s'entendre. La sanction des conventions lui est aussi réservée.

Art. 20. Pour la surveillance tout au moins des eaux à poissons les plus importantes, les cantons doivent désigner, soit chacun pour ce qui le concerne, soit en commun avec des cantons limitrophes, des surveillants de pêche (agents) auxquels peut aussi être remis le contrôle à exercer sur les établissements de pisciculture et l'utilisation des éléments de reproduction.

Le conseil fédéral peut ordonner que les garde-frontières fédéraux soient employés pour seconder la police cantonale pour la pêche dans les eaux suisses limitrophes. Ils reçoivent leurs instructions y relatives du département fédéral des péages.

19

Art. 21. Si d'excellentes espèces de poissons qui ne'xistent actuellement pas dans des eaux suisses y sont placées, le conseil fédéral édictera les prescriptions spéciales nécessaires pour leur protection.

Art. 22. Les cantons ont le droit de prendre des mesures plus sévères pour protéger et pour relever l'état en poissons et en écrevisses (notamment la désignation de districts interdits ou mis à ban) ; ces mesures doivent toutefois être soumises à l'approbation du conseil fédéral.

Art. 23. Pour autant que les périodes d'interdiction fixées par les articles 6 et 16, ainsi que les mesures prises par les cantons en vertu de l'article 22, ne suffiraient pas pour l'amélioration et le maintien du poisson et des écrevisses, le conseil fédéral est autorisé à prolonger temporairement les périodes d'interdiction pour certaines eaux, ou à exiger que, par la création de districts interdits ou mis à ban, la pêche des poissons ou la prise des écrevisses soient interrompues dans ces eaux. Il peut aussi exiger l'interdiction temporaire de l'emploi de certains engins de poche qui sont sans cela autorisés.

Art. 24. La Confédération encourage par des subsides, pouvant s'élever jusqu'à concurrence du tiers des frais, les efforts faits en vue d'améliorer l'état en poissons et en écrevisses, et particulièrement la pisciculture artificielle, ainsi que l'installation d'échelles à poissons.

Les crédits nécessaires à cet effet, et d'une manière générale ceux nécessaires à la surveillance et à l'exécution de la présente loi, doivent être fixés annuellement par le budget.

Art. 25. Le conseil fédéral est autorisé à conclure avec les états voisins, sur la police de la pêche dans les eauxfrontières, des conventions dans lesquelles les dispositions de la présente loi devront, autant que possible, être reproduites.

20

Le conseil fédéral est en outre autorisé à suspendre l'application de certaines dispositions de la présente loi dans les eaux-frontières pour lesquelles il n'existe pas de convention.

Art. 26. Les contraventions aux dispositions qui précèdent sont passibles d'amendes de fr. 5 à fr. 400 prononcées par les autorités judiciaires ou de police cantonales. Ces amendes échoient par parts égales au canton, à la commune et au dénonciateur.

Le chiffre de l'amende ne peut pas être inférieur à fr. 50 pour les contraventions suivantes : Emploi d'appareils de pêche non autorisés, de filets défendus et de matières nuisibles dans le sens de l'article 2 et de l'article é, chiffre 1, alinéa 1, et chiffre 2 ; -- établissement de nouvelles pêcheries fixes (article 4, chiffre 3) ; -- emploi de l'engin dit « Otter » et de la smuscia (article 4, chiffre 5) ; -- mise à sec non autorisée et souillure d'eaux à poissons, dans le sens de l'article 4, chiffre 7, et de l'article 17 ; -- enfin, flottage non autorisé (article 14).

En cas de récidive, l'amende doit être doublée.

L'amende peut être combinée avec la privation du droit de pêche pour un temps limité ; lors du deuxième cas de récidive, cette privation doit être d'une durée de 2 à 6 ans Les poissons et les éerevisses pris illégalement, ainsi que les engins de pêche défendus, qui ont été employés, doivent être confisqués.

En cas de non paiement de l'amende, la peine doit être transformée en emprisonnement, à raison d'un jour d'emprisonnement pour 5 francs d'amende.

Art. 27. Aussitôt que la présente loi sera entrée en vigueur, le conseil fédéral ordonnera les mesures d'exécution nécessaires et invitera les cantons à mettre sans retard leurs lois et ordonnances en harmonie avec la loi fédérale.

21

Art. 28. La présente loi abroge la loi fédérale sur la pêche, du 18 septembre 1875 (Ree. off., nouv. série, II. 74), et le règlement d'exécution pour cette loi, du 18 mai 1877 (Ree. off., nouv. série, III. 81).

Art. 29. Le conseil fédéral est chargé, conformément aux dispositions de la loi fédérale du 17 juin 1874 (Ree.

off., nouv. série, I. 97) concernant la votation populaire sur les lois et arrêtés fédéraux, de publier la présente loi et de fixer l'époque où elle entrera en vigueur.

Schweizerisches Bundesarchiv, Digitale Amtsdruckschriften Archives fédérales suisses, Publications officielles numérisées Archivio federale svizzero, Pubblicazioni ufficiali digitali

Message du conseil fédéral à l'assemblée fédérale relatif à un projet de loi fédérale sur la pêche, revisant la loi du 18 septembre 1875. (Du 3 juin 1887.)

In

Bundesblatt

Dans

Feuille fédérale

In

Foglio federale

Jahr

1887

Année Anno Band

3

Volume Volume Heft

30

Cahier Numero Geschäftsnummer

---

Numéro d'affaire Numero dell'oggetto Datum

02.07.1887

Date Data Seite

1-21

Page Pagina Ref. No

10 068 550

Das Dokument wurde durch das Schweizerische Bundesarchiv digitalisiert.

Le document a été digitalisé par les. Archives Fédérales Suisses.

Il documento è stato digitalizzato dell'Archivio federale svizzero.