FF 2021 www.droitfederal.admin.ch La version électronique signée fait foi

21.067 Message relatif à l'initiative populaire «Pour des primes plus basses.

Frein aux coûts dans le système de santé (initiative pour un frein aux coûts)» et au contre-projet indirect (modification de la loi fédérale sur l'assurance-maladie) du 10 novembre 2021

Messieurs les Présidents, Mesdames, Messieurs, Nous vous proposons, par le présent message, de soumettre l'initiative populaire «Pour des primes plus basses. Frein aux coûts dans le système de santé (initiative pour un frein aux coûts)» au vote du peuple et des cantons en leur recommandant de la rejeter. Nous vous soumettons simultanément une modification de la loi fédérale sur l'assurance-maladie en tant que contre-projet indirect, en vous suggérant de l'approuver.

Nous vous prions d'agréer, Messieurs les Présidents, Mesdames, Messieurs, l'assurance de notre haute considération.

10 novembre 2021

Au nom du Conseil fédéral suisse: Le président de la Confédération, Guy Parmelin Le chancelier de la Confédération, Walter Thurnherr

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Condensé L'initiative populaire «Pour des primes plus basses. Frein aux coûts dans le système de santé (initiative pour un frein aux coûts» demande l'introduction d'un frein aux coûts dans l'assurance obligatoire des soins (AOS). Le Conseil fédéral reconnaît qu'il est important de maîtriser les coûts, mais rejette l'initiative au motif que cet objectif ne doit pas être lié exclusivement à l'évolution de l'économie et des salaires.

Il oppose à l'initiative un contre-projet indirect prévoyant que le Conseil fédéral et les cantons fixent, en fonction des besoins médicaux, le pourcentage maximal de l'augmentation des coûts de l'AOS par rapport à l'année précédente (objectif en matière de coûts). Si ces objectifs ne sont pas respectés, les cantons et le Conseil fédéral évalueront si des mesures sont nécessaires pour corriger les développements indésirables. Les instruments existants seront complétés de manière ciblée.

Contenu de l'initiative L'initiative populaire fédérale «Pour des primes plus basses. Frein aux coûts dans le système de santé (initiative pour un frein aux coûts)» a été déposée le 10 mars 2020 par le PDC (aujourd'hui, le Centre). L'initiative vise à compléter l'art. 117 de la Constitution, de telle manière que le Conseil fédéral limite l'évolution des coûts de l'AOS et veille, en collaboration avec les cantons, les assureurs-maladie et les fournisseurs de prestations, à ce que ces coûts évoluent conformément à l'économie nationale et aux salaires moyens.

Avantages et inconvénients de l'initiative L'objectif de l'initiative de réduire la croissance des coûts de l'AOS et la charge sur les payeurs de primes est justifié. Entre 1996 et 2018, les coûts bruts à la charge de l'AOS ont augmenté de 4 % par an en moyenne, passant de 12 à 32 milliards de francs. Toutefois, considérer les coûts de l'AOS exclusivement en fonction de l'évolution de l'économie globale et des salaires, comme le demande l'initiative, est réducteur. Une croissance médicalement justifiée des coûts peut en effet dépasser la croissance économique et salariale, par exemple pour des raisons démographiques. Si de telles circonstances ne sont pas prises en compte, elles peuvent déboucher sur un rationnement des prestations et une médecine à deux vitesses. Enfin, une modification législative permet également d'atteindre les
objectifs de l'initiative.

Proposition du Conseil fédéral Le Conseil fédéral propose à l'Assemblée fédérale de rejeter l'initiative, tout en lui soumettant un contre-projet indirect qui prévoit d'introduire un objectif de maîtrise des coûts. Ce dernier vise à renforcer la transparence des coûts de l'AOS dont l'évolution est médicalement justifiée et à limiter ainsi l'augmentation des primes payées par les assurés.

Il est prévu d'instaurer un objectif de maîtrise des coûts définissant la croissance maximale des coûts de l'AOS. Le Conseil fédéral, puis chacun des cantons, fixent en fonction des besoins médicaux le pourcentage maximal de l'augmentation des coûts

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de l'AOS par rapport à l'année précédente (objectif en matière de coûts). Pour certaines catégories de coûts, seul le Conseil fédéral fixe des objectifs, à l'exclusion des cantons. Cela concerne en particulier les médicaments, les analyses ainsi que les moyens et appareils diagnostiques ou thérapeutiques.

Si les augmentations effectives dans une catégorie de coûts dépassent sur une année les objectifs en matière de coûts fixés par le canton ou par le Conseil fédéral, le gouvernement cantonal et le Conseil fédéral évaluent, dans leur domaine de compétence respectif, si des mesures de correction sont nécessaires.

Les instruments nécessaires existent déjà en grande partie (admission des fournisseurs de prestations, approbation des conventions tarifaires, adaptation subsidiaire des structures tarifaires devenues inappropriées). Seules quelques rares lacunes doivent être comblées de manière ciblée. Le Conseil fédéral doit également pouvoir procéder à l'adaptation subsidiaire des structures tarifaires applicables aux traitements stationnaires. Lorsque des conventions tarifaires qui règlent le niveau de rémunération ne satisfont plus aux exigences légales auxquelles est soumise leur approbation, en particulier leur caractère économique, et que les partenaires tarifaires n'adaptent pas ces conventions ou ne les résilient pas de leur propre initiative, l'autorité compétente doit désormais avoir la possibilité d'inviter les partenaires tarifaires à les renégocier.

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Table des matières Condensé

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Aspects formels et validité de l'initiative 1.1 Texte de l'initiative 1.2 Aboutissement et délais de traitement 1.3 Validité

6 6 6 7

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Contexte 2.1 Hausse des coûts de la santé: une charge croissante pour la population suisse 2.2 Bases légales actuelles 2.3 Modifications de loi en cours

7 7 9 10

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Buts et contenu de l'initiative

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Appréciation de l'initiative

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Conclusions

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Contre-projet indirect 6.1 Procédure préliminaire, en particulier procédure de consultation 6.1.1 Programme de maîtrise des coûts du Conseil fédéral 6.1.2 Consultation sur le 2e volet des mesures visant à freiner la hausse des coûts 6.1.3 Les objectifs en matière de coûts, contre-projet indirect 6.2 Comparaison avec le droit étranger, notamment européen 6.3 Grandes lignes du projet 6.3.1 Nouvelle réglementation proposée 6.3.2 Concordance des tâches et des moyens financiers 6.3.3 Questions de mise en oeuvre 6.4 Commentaire des dispositions 6.5 Conséquences 6.5.1 Conséquences pour la Confédération 6.5.2 Conséquences pour les cantons et les communes ainsi que pour les centres urbains, les agglomérations et les régions de montagne 6.5.3 Conséquences économiques 6.5.4 Conséquences pour la société 6.6 Aspects juridiques 6.6.1 Constitutionnalité 6.6.2 Compatibilité avec les obligations internationales de la Suisse 6.6.3 Forme de l'acte à adopter 6.6.4 Frein aux dépenses

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6.6.5 6.6.6 6.6.7

Conformité aux principes de subsidiarité et d'équivalence fiscale Délégation de compétences législatives Protection des données

49 50 50

Arrêté fédéral relatif à l'initiative populaire «Pour des primes plus basses. Frein aux coûts dans le système de santé (initiative pour un frein aux coûts)» (Projet)

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Loi fédérale sur l'assurance-maladie (LAMal) (Mesures visant à freiner la hausse des coûts ­ objectifs en matière de coûts) (Projet)

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Message 1

Aspects formels et validité de l'initiative

1.1

Texte de l'initiative

L'initiative populaire «Pour des primes plus basses. Frein aux coûts dans le système de santé (initiative pour un frein aux coûts)» a la teneur suivante: La Constitution1 est modifiée comme suit: Art. 117, al. 3 et 4 Elle [la Confédération] règle, en collaboration avec les cantons, les assureurs-maladie et les fournisseurs de prestations, la prise en charge des coûts par l'assurance obligatoire des soins de manière à ce que, moyennant des incitations efficaces, les coûts évoluent conformément à l'économie nationale et aux salaires moyens. Elle introduit à cet effet un frein aux coûts.

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4

La loi règle les modalités.

Art. 197, ch. 122 12. Disposition transitoire ad art. 117, al. 3 et 4 (Assurance-maladie et assurance-accidents) Si, deux ans après l'acceptation par le peuple et les cantons de l'art. 117, al. 3 et 4, la hausse des coûts moyens par assuré et par année dans l'assurance obligatoire des soins est supérieure de plus d'un cinquième à l'évolution des salaires nominaux et que, à cette date, les assureurs-maladie et les fournisseurs de prestations (partenaires tarifaires) n'ont pas arrêté de mesures contraignantes pour freiner la hausse des coûts, la Confédération prend en collaboration avec les cantons des mesures visant à faire baisser les coûts, qui produisent effet à partir de l'année suivante.

1.2

Aboutissement et délais de traitement

L'initiative populaire «Pour des primes plus basses. Frein aux coûts dans le système de santé (initiative pour un frein aux coûts)» a fait l'objet d'un examen préliminaire par la Chancellerie fédérale le 2 octobre 20183 et a été déposée le 10 mars 2020 avec le nombre de signatures valables nécessaire.

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RS 101 Le numéro définitif de la présente disposition transitoire sera fixé par la Chancellerie fédérale après le scrutin.

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Par décision du 2 juin 2020, la Chancellerie fédérale a constaté que, munie de 103 761 signatures valables, l'initiative a abouti4.

L'initiative revêt la forme d'un projet rédigé. Le Conseil fédéral lui oppose un contreprojet indirect. En vertu de l'art. 97, al. 2, de la loi du 13 décembre 2002 sur le Parlement (LParl)5 et de l'ordonnance du 20 mars 2020 sur la suspension des délais applicables aux initiatives populaires fédérales et aux demandes de référendum au niveau fédéral6, le Conseil fédéral est donc tenu de présenter à l'Assemblée fédérale un projet d'arrêté fédéral accompagné d'un message d'ici au 21 novembre 2021. Selon l'art. 100 LParl, l'Assemblée fédérale a jusqu'au 21 novembre 2022 pour se prononcer sur une recommandation en vue de la votation populaire, à moins qu'un Conseil prenne une décision sur un contre-projet ou sur un projet d'acte en rapport étroit avec l'initiative populaire. Dans ce cas, l'Assemblée fédérale peut proroger d'un an le délai imparti pour traiter l'initiative (art. 105, al. 1, LParl).

1.3

Validité

L'initiative répond aux exigences de l'art. 139, al. 3, de la Constitution (Cst.): a.

elle est présentée sous la forme d'un projet rédigé; elle respecte donc les exigences d'unité de la forme;

b.

les différentes parties du texte sont en relation directe; l'initiative respecte donc les exigences d'unité de la matière;

c.

l'initiative n'est contraire à aucune règle impérative du droit international; elle respecte donc les exigences du droit international.

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Contexte

2.1

Hausse des coûts de la santé: une charge croissante pour la population suisse

Le système suisse de santé présente diverses particularités. Ses structures sont complexes et un grand nombre de prestations peuvent difficilement être standardisées. La couverture d'assurance souhaitée ainsi que l'asymétrie des connaissances entre fournisseurs de prestations et patients créent une incitation à augmenter le volume des prestations. Ces circonstances favorisent notamment une demande induite par l'offre qui déborde le cadre de ce qui est médicalement nécessaire et que les instruments existants ne permettent pas de contenir assez efficacement. De ce fait, les coûts de la santé augmentent de manière constante non seulement en raison de l'évolution démographique et des progrès médico-techniques, mais aussi en raison d'une augmentation du volume des prestations qui ne se justifie pas du point de vue médical.

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Une étude7 commandée par l'Office fédéral de la santé publique (OFSP) montre que le système de santé suisse présente un potentiel de gain d'efficience encore inexploité dans presque tous les domaines de prestations. Sur l'ensemble des prestations devant être prises en charge en vertu de la loi fédérale du 18 mars 1994 sur l'assurance-maladie (LAMal)8 (prestations obligatoires LAMal), l'étude situe ce potentiel entre 16 % et 19 %, ce qui est considérable. Outre l'augmentation du volume des prestations (liée à l'offre et à la demande), des inefficiences de production ainsi que des tarifs et des prix trop élevés y contribuent.

Entre 1996, année d'entrée en vigueur de la LAMal, et 2018, les coûts bruts à la charge de l'AOS sont passés de 12 à 32 milliards de francs9. Ils ont donc presque triplé en l'espace de 20 ans. En conséquence, l'AOS a dû dépenser chaque année, en moyenne, 4 % de plus par assuré pour la prise en charge de produits et de prestations médicaux.

Il est en outre frappant de constater que les coûts de l'AOS ont progressé de manière disproportionnée par rapport à l'évolution des coûts du secteur de la santé dans sa globalité. Si, de 2005 à 2018, les dépenses globales ont augmenté de quelque 56 %, passant de 52,4 à 81,9 milliards de francs, celles de l'AOS ont progressé, sur la même période, de 60 %, passant de 20,3 à 32,5 milliards de francs. En outre, près de 80 % des prestations brutes de l'AOS concernent les quatre catégories de coûts les plus importantes («Hôpital stationnaire» [20,3 %], «Traitements médicaux ambulatoires» [23 %], «Médicaments» [18,1 %] et «Hôpital ambulatoire» [17,1 %]). Ce pourcentage n'a guère varié au fil des ans, alors que l'augmentation des coûts de l'AOS connaissait des variations et différait selon la catégorie de coûts. Depuis 2005, de fortes hausses ont aussi été enregistrées dans les domaines des traitements ambulatoires hospitaliers (+ 109 %) et médicaux (+ 65 %), ainsi que dans les domaines «Spitex», «Laboratoires», «Physiothérapie» et «Moyens et appareils» (+ 132 % en tout). En 2018, l'augmentation des coûts de l'AOS a pu être légèrement freinée grâce à des mesures de maîtrise des coûts (+ 230 millions de francs seulement, soit + 0,7 %)10.

Ces coûts, qui correspondent à 11,9 % du produit intérieur brut (PIB), sont très élevés en Suisse en comparaison internationale, la moyenne des pays de l'Organisation pour la coopération et le développement économiques (OCDE) étant de 8,8 % du PIB11. Il 7

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10

11

Institut pour l'économie de la santé de Winterthur, de l'Université des sciences appliquées de Zurich (ZHAW) et INFRAS (2019): Effizienzpotenzial bei den KVG-pflichtigen Leistungen (Potentiel de gain d'efficience dans l'AOS). Le document, rédigé en allemand, comprend un résumé en français et peut être consulté à l'adresse suivante: www.ofsp.admin.ch > Assurances > Assurance-maladie > Projets de révision en cours > 2e volet de mesures visant à maîtriser les coûts.

RS 832.10 Statistique de l'assurance-maladie obligatoire 2018. Le document peut être consulté à l'adresse suivante: www.ofsp.admin.ch > Chiffres & statistiques > Assurance-maladie: statistiques > Statistiques de l'assurance-maladie obligatoire.

Seules sont prises en compte les primes et les participations aux coûts des assurés, à l'exclusion des contributions étatiques aux prestations obligatoirement prises en charge par l'AOS (telles que la participation des cantons à la rémunération des prestations stationnaires).

Office fédéral de la santé publique, Statistique de l'assurance-maladie obligatoire 2018 (STAT AMal 18). Le document peut être consulté à l'adresse suivante: www.ofsp.admin.ch > Chiffres & statistiques > Assurance-maladie: statistiques > Statistiques de l'assurance-maladie.

OCDE (2018). OECD.Stat, consultable à l'adresse: http://stats.oecd.org.

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est également frappant de constater que la part des dépenses totales (env. 81,9 milliards de francs en 2018) assumée directement par les ménages est la plus élevée. En 2018, les versements directs des ménages se chiffraient à 27,3 %, soit 22,4 milliards de francs. En comptant les primes versées pour l'AOS et les autres assurances privées, les ménages supportent plus de 70 % de l'ensemble des dépenses de santé12.

Le niveau élevé des primes d'assurance-maladie représente une lourde charge financière pour de nombreuses personnes; c'est l'un des principaux sujets de préoccupation cités par la population suisse. Dans l'enquête représentative «Baromètre des préoccupations» effectuée en 2019, 41 % des personnes interrogées ayant le droit de vote considéraient le système de santé et les caisses-maladie comme l'une des cinq thématiques posant en Suisse les problèmes les plus aigus. Dans la situation de pandémie actuelle, peu représentative, ce pourcentage est tombé à 28 %.

Pour que le système de santé puisse être financé sur la durée, des mesures plus poussées s'imposent en matière de maîtrise des coûts et de gain d'efficience. L'objectif doit être, d'une part, de maintenir la charge financière des primes d'assurance-maladie à un niveau supportable et aussi proche que possible des effets démographiques, du progrès technique et de l'évolution des salaires et des prix et, d'autre part, de garantir la qualité des soins médicaux ainsi que l'accès de la population aux soins.

2.2

Bases légales actuelles

L'art. 117 Cst. donnant à la Confédération une compétence étendue en matière de réglementation de l'AOS, une gestion des coûts telle que l'exige l'initiative peut en principe aussi être réglée dans la loi. Dans le domaine hospitalier stationnaire, plusieurs cantons appliquent des instruments de gestion des coûts, notamment des «budgets globaux» au sens de l'art. 51 LAMal. Cet article permet aux cantons de fixer un montant global pour le financement des hôpitaux ou des établissements médico-sociaux après avoir consulté les fournisseurs de prestations et les assureurs. On peut citer d'autres instruments ayant pour effet de limiter les coûts, par exemple la limitation directe du volume des prestations ou la prise en charge dégressive des coûts dans le domaine hospitalier stationnaire. Selon la répartition fédéraliste des compétences dans le domaine de la santé, la planification hospitalière relève de la compétence des cantons (art. 39 LAMal). Ceux-ci peuvent lier l'attribution de mandats de prestations à une limitation des volumes. Ils peuvent également fixer un montant global, conformément à l'art. 51 LAMal. Dans le nouveau régime de financement hospitalier, les budgets globaux appliqués dans le domaine stationnaire constituent également un instrument qui complète la rémunération au moyen de forfaits liés aux prestations, régime mis en oeuvre depuis 2012 dans les soins somatiques aigus (SwissDRG) et depuis 2018 dans la psychiatrie (TARPSY). Une série d'autres mesures visant à freiner la hausse des coûts dans le domaine hospitalier stationnaire sont par ailleurs entrées en vigueur par étapes depuis 2009 avec la révision de la LAMal dans le domaine du financement hospitalier. Or, dans leur configuration actuelle, les budgets globaux et les instruments 12

Office fédéral de la statistique, Coût et financement du système de santé en 2018 (données provisoires). Le document peut être consulté à l'adresse suivante: www.statistique.admin.ch > Trouver des statistiques > Santé > Coût, financement.

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similaires appliqués dans le domaine hospitalier stationnaire limitent le financement des prestations prises en charge par les cantons en vertu de la LAMal, mais non le financement de ces prestations par les assureurs-maladie. L'AOS est ainsi le seul grand secteur de la sécurité sociale en Suisse dont les dépenses ne sont pas réglementées13. Cet état de fait a joué un rôle déterminant dans le lancement de l'initiative.

2.3

Modifications de loi en cours

Le Conseil fédéral a adopté le 21 août 2019 le message concernant la modification de la LAMal (mesures visant à freiner la hausse des coûts, 1er volet)14. Sur le fond, il existe une certaine corrélation entre la notion d'objectif en matière de coûts et les mesures de gestion des coûts proposées dans le présent projet de loi. Les fournisseurs de prestations et les assureurs ou leurs fédérations respectives (partenaires tarifaires) sont tenus par la loi de prévoir par convention des mesures de gestion des coûts dans les domaines pour lesquels ils doivent, en vertu de l'art. 43, al. 4, LAMal, conclure une convention tarifaire et la soumettre à l'approbation du Conseil fédéral. Les partenaires tarifaires devraient pouvoir définir eux-mêmes dans une large mesure le mécanisme de gestion des coûts. Ils pourraient donc aussi prévoir des adaptations de la structure tarifaire, du prix de base ou de la valeur du point, ou même une combinaison entre remboursement et adaptation du tarif. Les modifications apportées à une structure tarifaire dont la validité s'étend à toute la Suisse devraient toutefois être soumises à l'approbation du Conseil fédéral. Si le mécanisme devait prévoir des adaptations de tarifs cantonaux, les règles prévues à cet effet devraient aussi être intégrées dans les conventions tarifaires cantonales. Celles-ci devraient alors, conformément aux prescriptions légales existantes, être soumises à l'approbation du gouvernement cantonal.

Le projet prévoit que si, dans un délai de deux ans, les partenaires tarifaires ne parviennent pas à s'entendre, le Conseil fédéral fixe lui-même les mesures. Les fournisseurs de prestations et les assureurs lui communiquent, sur demande, les informations nécessaires pour ce faire. En cas de manquement à cette obligation, le Département fédéral de l'intérieur (DFI) peut, en sa qualité de département de tutelle, prononcer des sanctions à leur encontre. Le Conseil fédéral peut restreindre les domaines dans lesquels des mesures doivent être convenues. Les mesures de gestion des coûts doivent permettre de mettre rapidement les acteurs à contribution afin qu'ils appliquent des instruments efficaces. Les mesures adoptées par les partenaires tarifaires dans des conventions dont la validité s'étend à toute la Suisse pourraient également contribuer à la réalisation d'éventuels objectifs en matière de coûts.

13

14

Voir Brändle, T., Colombier, C., Baur, M. et S. Gaillard (2018). Zielvorgaben für das Wachstum der Gesundheitsausgaben: Ausgewählte Erfahrungen und Erkenntnisse für die Schweiz. Working Paper no 22 de l'Administration fédérale des finances, disponible à l'adresse: www.efv.admin.ch Thèmes > Publications > Travaux de base du domaine d'état-major Analyse et conseil économiques > Perspectives à long terme des finances publiques.

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Le 1er volet a été divisé en deux par le Parlement. Le volet 1a a été adopté le 18 juin 202115. Les mesures de maîtrise des coûts susmentionnées font partie du volet 1b et se trouvent donc encore dans la phase des débats parlementaires16.

3

Buts et contenu de l'initiative

Selon l'initiative, un frein aux coûts doit être introduit dans le système de santé afin de réduire les inefficiences et les incitations inopportunes. Ce mécanisme doit permettre d'éviter les coûts inutiles, de freiner la croissance des coûts et de stopper la hausse constante des primes, l'objectif étant d'alléger la charge financière pesant sur les assurés. Selon le comité d'initiative, plusieurs milliards de francs pourraient être économisés chaque année dans le domaine de la santé sans diminution de la qualité des soins.

L'initiative prévoit de compléter l'art. 117 Cst. de manière à ce que le Conseil fédéral instaure un frein aux coûts dans l'AOS. En collaboration avec les cantons, les assureurs-maladie et les fournisseurs de prestations, la Confédération doit régler la prise en charge des coûts par l'AOS et créer des incitations efficaces à la réduction des coûts dans le domaine de la santé, de telle sorte que ceux-ci évoluent conformément à l'économie suisse dans son ensemble et aux salaires moyens. Les partenaires tarifaires sont invités à faire usage de l'autonomie contractuelle prévue par la LAMal pour fixer les tarifs de manière à répondre aux défis actuels et pour adopter des mesures contraignantes de maîtrise des coûts. S'ils n'y parviennent pas et que l'évolution des coûts par assuré, deux ans après l'adoption de l'initiative, dépasse d'un cinquième17 celle des salaires nominaux, une disposition transitoire prévoit que la Confédération et les cantons doivent prendre des mesures efficaces visant à faire baisser les coûts dès l'année suivante. Le texte de l'initiative ne définit pas plus précisément la forme que revêtirait le frein aux coûts, ni les mesures visant à abaisser les coûts que devraient prendre la Confédération et les cantons. Les modalités doivent être réglées dans la loi. En cas d'acceptation de l'initiative, il faut partir du principe que la LAMal devrait être modifiée de manière à répondre aux exigences de la disposition transitoire prévue.

4

Appréciation de l'initiative

L'initiative a été lancée dans le contexte d'une forte progression des coûts dans le domaine de la santé, en particulier celle des primes moyennes de l'AOS, lesquelles, depuis l'entrée en vigueur de la LAMal, ont augmenté de manière nettement supérieure aux salaires, aux prix ou au PIB. Elle répond ainsi à une préoccupation importante de la population suisse. La forte augmentation des coûts pèse sur le budget des 15 16 17

FF 2021 1496 Numéro de référence 19.046 Augmentation 1,2 fois supérieure à l'augmentation des salaires; à titre de comparaison: l'augmentation des primes entre 1996 et 2018 a été 1,93 fois supérieure à l'augmentation des salaires.

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ménages à revenu faible ou moyen, ainsi que sur le budget des cantons et de la Confédération. En adoptant la stratégie «Santé2020» de 2013, la stratégie «Santé2030» de 2019 qui lui succède et les objectifs de la législature, le Conseil fédéral a fait de la viabilité financière des soins de santé l'un de ses principaux objectifs. Pour pouvoir l'atteindre, il faut appliquer les mesures de maîtrise des coûts à toutes les principales catégories de coûts et ­ en raison de la répartition des compétences dans le système de santé suisse ­ à tous les niveaux et auprès de tous les acteurs. Dans le cadre de la stratégie «Santé2020», le Conseil fédéral avait déjà défini plusieurs objectifs et mesures qui ont pu réduire les coûts de la santé de plusieurs centaines de millions de francs par an. D'autres économies sensibles sont également attendues dans les années à venir.

Pour renforcer ces mesures, le DFI a mis en place un groupe d'experts chargé d'évaluer les expériences nationales et internationales. Au premier plan figurait la réduction de l'augmentation médicalement non justifiée du volume des prestations. Les experts ont été chargés d'analyser les expériences internationales en matière d'instruments de gestion des volumes et de proposer des mesures propres à la Suisse.

Le rapport des experts, daté du 24 août 2017 et intitulé «Mesures visant à freiner la hausse des coûts dans l'assurance obligatoire des soins»18, propose de nombreuses mesures dans l'intérêt des contribuables et des payeurs de primes, afin d'exploiter le potentiel de gain d'efficacité existant et de freiner la croissance des coûts. L'une d'elles, «M01 Objectif de coûts» (cf. ch. 6.1.1), présente en particulier des similitudes avec l'initiative populaire.

Le 28 mars 2018, le Conseil fédéral a adopté un programme de maîtrise des coûts basé sur ce rapport. Le 18 juin 2019, il a soumis un premier volet législatif (mesures de maîtrise des coûts ­ 1er volet)19 aux Chambres fédérales. Le 8 mars 2019, il a par ailleurs chargé le DFI de préparer dans le cadre du deuxième volet un projet de loi visant à introduire un objectif de maîtrise des coûts dans l'AOS.

Toutefois, les mesures prises dans ce but ne doivent pas être liées uniquement à l'évolution de l'économie nationale et à un indice salarial. L'évolution des coûts est en effet déterminée
par de nombreux facteurs autres que le salaire du personnel de santé, facteurs qui ne sont pas induits par l'offre, tels l'évolution démographique ou les progrès médico-techniques. Les coûts médicalement et économiquement justifiés peuvent aussi très bien augmenter plus fortement que les salaires et les prix, ce qui peut se produire par exemple en cas de récession, mais également sur une plus longue période du fait de l'évolution démographique.

Si l'initiative était acceptée, on pourrait certes s'attendre, selon sa mise en oeuvre, à une modération importante de la croissance des coûts, mais l'augmentation autorisée des primes pourrait être nettement inférieure à l'augmentation des coûts médicalement et économiquement justifiée. Dans un premier temps, cette évolution pourrait rester largement sans gravité compte tenu du potentiel de gain d'efficacité existant. Celui-ci épuisé, il serait cependant à craindre que, par manque de moyens, des traitements médicalement nécessaires et économiquement judicieux ne soient plus effectués. Une 18 19

Le rapport d'experts est disponible à l'adresse: www.bag.admin.ch > Assurances > Assurance-maladie > Maîtrise des coûts > Documents.

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règle de dépenses trop stricte risque ainsi, selon la manière dont elle est mise en oeuvre, d'aboutir à un rationnement des prestations et, par voie de conséquence, à une médecine à deux vitesses.

Comme l'initiative ne précise pas concrètement l'orientation des mesures à prendre, il est permis de douter qu'une obligation constitutionnelle abstraite de prendre des mesures puisse réellement conduire le Conseil fédéral et le Parlement à agir de manière plus efficace et plus résolue. La mise en oeuvre de l'initiative et son efficacité ne sont pas claires. Il est aussi possible d'atteindre les objectifs visés par l'initiative au moyen de révisions législatives. La formulation ouverte de l'art. 117 Cst. permet déjà à la Confédération d'instaurer des mesures de maîtrise des coûts. Il n'est donc pas nécessaire d'inscrire une disposition supplémentaire dans la Constitution.

Enfin, l'obligation de la Confédération d'exercer sa compétence législative «en collaboration avec les cantons, les assureurs-maladie et les fournisseurs de prestations» est inhabituelle pour la réglementation d'une compétence fédérale. Cette «collaboration» implique-t-elle seulement une obligation de consulter les cantons, les assureurs-maladie et les fournisseurs de prestations au cours du processus législatif ou signifie-t-elle qu'une partie de la compétence législative est déléguée aux cantons, voire aux partenaires tarifaires, en ce sens que certains aspects seraient par exemple réglés par le biais des conventions tarifaires entre assureurs et fournisseurs de prestations? En l'absence d'indice d'une volonté de modifier les rapports entre droit fédéral, droit cantonal et conventions tarifaires, on peut malgré tout supposer que la formulation «en collaboration avec les cantons, les assureurs-maladie et les fournisseurs de prestations» vise à maintenir le rôle que la législation fédérale reconnaît aujourd'hui aux cantons d'une part et à l'autonomie des partenaires tarifaires d'autre part dans le domaine de l'assurance-maladie.

5

Conclusions

Le Conseil fédéral approuve l'objectif de l'initiative de réduire la croissance des coûts dans l'AOS et la charge pesant sur les assurés. L'art. 117 Cst. actuel confère toutefois déjà à la Confédération une large compétence pour réglementer l'AOS, si bien qu'il n'est pas nécessaire de modifier la Constitution. Le Conseil fédéral rejette par conséquent l'initiative et a décidé le 20 mai 2020 d'élaborer un contre-projet indirect prévoyant d'introduire un objectif de maîtrise des coûts dans l'AOS.

Le DFI a déjà élaboré, sur mandat du Conseil fédéral et sur la suggestion d'un groupe d'experts (cf. ch. 6.1.1), une modification de la LAMal qui instaure un objectif de maîtrise des coûts et peut permettre d'atteindre le but visé par l'initiative. L'objectif de maîtrise des coûts doit être fixé par la Confédération avec le concours des principaux acteurs du domaine de la santé et d'experts indépendants, le but étant de rendre transparente la part de l'augmentation des coûts qui peut être justifiée du point de vue médical et d'établir une valeur de référence pour l'évolution des coûts. Cette valeur est moins arbitraire que le facteur 1,2 appliqué à une évolution des salaires dépendante de la conjoncture choisi par les auteurs de l'initiative. De plus, elle doit être expressément fixée en fonction des besoins médicaux, de manière à éviter tout rationnement de prestations économiques et médicalement justifiées. Enfin, la modification de la 13 / 52

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LAMal instaurant un objectif de maîtrise des coûts prévoit une série de mesures grâce auxquelles la Confédération et les cantons pourront s'attacher à la réalisation effective des objectifs en matière de coûts et qui créeront la pression nécessaire pour que les partenaires tarifaires s'accordent eux-mêmes sur des mesures adéquates. Si l'initiative devait être acceptée, la disposition transitoire prévue pourrait restreindre la mise en oeuvre de l'objectif de maîtrise des coûts, car la modération de la hausse des coûts se limite à l'augmentation des salaires et des prix. Des modifications législatives supplémentaires pourraient se révéler nécessaires.

Le Conseil fédéral prend au sérieux le problème posé par la hausse des primes et entend, grâce à un objectif de maîtrise des coûts, rendre transparente la part justifiée de l'augmentation des coûts. La Confédération et les cantons doivent disposer d'instruments efficaces pour renforcer les incitations des partenaires tarifaires à s'accorder sur des mesures propres à freiner l'augmentation des coûts et augmenter l'efficience du système.

6

Contre-projet indirect

6.1

Procédure préliminaire, en particulier procédure de consultation

6.1.1

Programme de maîtrise des coûts du Conseil fédéral

Quelques années seulement après l'entrée en vigueur de la LAMal, on avait déjà constaté que si l'approvisionnement en soins s'était amélioré durablement et que la solidarité visée entre les assurés s'était renforcée, les coûts n'avaient pas pu être suffisamment maîtrisés. C'est pourquoi la révision partielle de la LAMal du 24 mars 200020 a introduit des réglementations dans les domaines de la réduction des primes, de la gestion des admissions dans le secteur ambulatoire et de l'encouragement de la remise de génériques. En 2002, le Conseil fédéral a fait de la maîtrise des coûts l'objectif principal de sa stratégie de réforme de l'assurance-maladie. Une deuxième révision partielle de la LAMal21, qui prévoyait diverses mesures visant à améliorer la gestion des volumes et l'adéquation des prestations médicales, a échoué quelques années plus tard devant le Parlement. Seules quelques adaptations urgentes et peu controversées ont été adoptées peu après22. Si le financement hospitalier a pu être révisé en 200723, d'autres projets de maîtrise des coûts, notamment les projets

20 21 22 23

RO 2000 2305 Voir Message du 18 septembre 2000 concernant la révision partielle de la loi fédérale sur l'assurance-maladie, FF 2001 693, numéro de référence 00.079.

RO 2005 1071 RO 2008 2049

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relatifs à la participation aux coûts24, aux soins intégrés (managed care)25 ou à la liberté de contracter26 ont également échoué. Un projet qui proposait des mesures visant à contenir l'évolution des coûts face aux hausses de primes extraordinaires qui se dessinaient pour 201027.a été rejeté par le Conseil national au vote final. Il prévoyait notamment d'octroyer au Conseil fédéral la compétence d'abaisser les tarifs si l'augmentation des coûts était supérieure à la moyenne.

En adoptant sa stratégie «Santé2020»28 de 2013, sa stratégie subséquente «Santé2030»29 et les objectifs des législatures 2015­201930 et 2019­202331, le Conseil fédéral réaffirmait que des soins de santé financièrement supportables constituaient un de ses objectifs principaux. Pour pouvoir l'atteindre, il faut appliquer les mesures de maîtrise des coûts dans toutes les catégories de coûts importantes et ­ en raison de la répartition des compétences dans le système de santé suisse ­ à tous les niveaux et auprès de tous les acteurs. Dans le cadre de la stratégie «Santé2020», le Conseil fédéral a déjà défini plusieurs objectifs et mesures qui ont permis d'abaisser les coûts de la santé de quelques centaines de millions de francs par année. On peut s'attendre à d'autres économies sensibles dans les années à venir.

Afin de consolider ces mesures, le DFI a institué un groupe d'experts chargé d'évaluer les expériences faites aux niveaux national et international. La suppression des augmentations de volume de prestations qui ne peuvent s'expliquer par des raisons médicales figurait au premier plan. Le groupe d'experts avait pour mandat de proposer des instruments permettant de gérer l'augmentation des volumes en Suisse à l'aide d'une analyse des expériences faites à l'étranger. Son rapport, daté du 24 août 2017 et intitulé «Mesures visant à freiner la hausse des coûts dans l'assurance obligatoire des soins»32, propose de nombreuses mesures dans l'intérêt des contribuables et des assurés, mesures qui doivent permettre d'exploiter les possibilités existantes de développer l'efficience du système et de freiner la hausse des coûts, en particulier dans les quatre catégories de coûts les plus importantes. La mesure principale proposée par le groupe 24

25

26

27

28 29 30 31 32

Voir Message du Conseil fédéral du 26 mai 2004 relatif à la modification de la loi fédérale sur l'assurance-maladie (participation aux coûts), FF 2004 4121, numéro de référence 04.034.

Voir Message du Conseil fédéral du 15 septembre 2004 relatif à la révision partielle de la loi fédérale sur l'assurance-maladie (Managed Care), FF 2004 5257, numéro de référence 04.062.

Voir Message du Conseil fédéral du 26 mai 2004 relatif à la révision partielle de la loi fédérale sur l'assurance-maladie (liberté de contracter), FF 2004 4055, numéro de référence 04.032.

Voir Message du Conseil fédéral du 29 mai 2009 concernant la modification de la loi fédérale sur l'assurance-maladie (Mesures pour endiguer l'évolution des coûts), FF 2009 5207, numéro d'objet 09.053.

La stratégie «Santé2020 » peut être consultée à l'adresse suivante: www.ofsp.admin.ch > Stratégie & politique > Santé2020.

La stratégie «Santé2030 » peut être consultée à l'adresse suivante: www.ofsp.admin.ch > Stratégie & politique > Santé2030.

Voir Message du Conseil fédéral du 27 janvier 2016 sur le programme de la législature 2015 à 2019, FF 2016 981.

Voir Message du Conseil fédéral du 29 janvier 2020 sur le programme de la législature 2019 à 2023, FF 2020 1709.

Le rapport du groupe d'experts peut être consulté à l'adresse suivante: www.ofsp.admin.ch > Assurances > Assurance-maladie > Maîtrise des coûts > Documents.

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d'experts est un objectif de maîtrise des coûts de l'AOS. Cet objectif est accompagné de mécanismes de correction.

Se fondant sur ce rapport, le Conseil fédéral a adopté le 28 mars 2018 un programme de mesures visant à freiner la hausse des coûts33. Il y prévoit l'examen de nouvelles mesures qui, si elles s'avèrent opportunes, doivent être reprises dans deux volets législatifs. Il convient de souligner que les mesures préconisées par le groupe d'experts ne requièrent pas toutes une adaptation législative. Le 8 mars 2019, le Conseil fédéral a également chargé le DFI d'élaborer un projet visant à instaurer un objectif de maîtrise des coûts et de l'intégrer dans un deuxième volet législatif. Les cantons et les partenaires tarifaires sont en outre invités à examiner et à mettre en oeuvre des mesures dans leur domaine de compétences respectif.

Le Conseil fédéral a soumis au Parlement en été 2019 un premier volet législatif (Message du Conseil fédéral du 21 août 2019 concernant la modification de la loi fédérale sur l'assurance-maladie (Mesures visant à freiner la hausse des coûts, 1er volet) 34. Le projet inclut neuf mesures impliquant des modifications de la LAMal ainsi que les modifications qui en découlent dans les domaines de l'assurance-accidents, de l'assurance militaire et de l'assurance-invalidité. Ces mesures s'adressent à l'ensemble des acteurs, tous appelés à prendre leurs responsabilités. Le Parlement a scindé le projet en deux volets (1a et 1b) et a adopté le volet 1a le 18 juin 202135.

6.1.2

Consultation sur le 2e volet des mesures visant à freiner la hausse des coûts

Conformément aux décisions du Conseil fédéral du 28 mars 2018, du 8 mars 2019 et du 20 mai 2020, un deuxième volet législatif a été élaboré, qui doit également servir de contre-projet indirect à l'initiative pour un frein aux coûts. Différentes mesures du rapport d'experts et des propositions du DFI ont été examinées. Neuf de ces mesures ont donné lieu à des adaptations de la LAMal, les modifications de la loi fédérale du 19 juin 1959 sur l'assurance-invalidité36 qui en découlent ayant également été proposées, dans le respect des particularités de cette branche des assurances sociales.

L'introduction d'un objectif de maîtrise des coûts dans l'AOS était au coeur du projet.

En outre, l'introduction d'un premier point de contact obligatoire pour tous les assurés impliquait la création d'un organisme auquel les assurés devaient s'adresser en cas de problèmes de santé et qui leur offrait information et sécurité. Afin de renforcer les soins coordonnés, les réseaux de soins coordonnés étaient définis comme des fournisseurs de prestations distincts et les programmes de prise en charge des patients étaient encouragés. Par ailleurs, les compétences de la Confédération en matière de prise en charge des prestations médicales devaient être renforcées, afin que celles-ci puissent à l'avenir être fournies de manière plus avantageuse. Cela incluait une réglementation 33

34 35 36

Voir le communiqué de presse de l'OFSP du 29 mars 2018. Le document peut être consulté à l'adresse suivante: www.ofsp.admin.ch > L'OFSP > Actualités > Communiqués de presse > Mesures du Conseil fédéral contre la hausse des coûts de la santé.

FF 2019 5765 FF 2021 1496 RS 831.20

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permettant de convenir de modèles de prix et d'éventuels remboursements, ainsi que de restreindre l'applicabilité de la loi du 17 décembre 2004 sur la transparence 37 aux documents concernant l'évaluation des médicaments de la liste des spécialités. Les bases légales nécessaires à un examen différencié selon les critères d'efficacité, d'adéquation et d'économicité (critères EAE) et au calcul d'une rémunération aussi avantageuse que possible des analyses, des médicaments ainsi que des moyens et appareils étaient en outre créées. La concurrence intercantonale entre les hôpitaux devait être encouragée par la fixation de tarifs de référence pour les traitements hospitaliers dans un établissement hors canton choisi par l'assuré. Les fournisseurs de prestations et les assureurs devaient notamment être obligés de transmettre les factures par voie électronique. Enfin, le volet a été complété par une précision concernant la participation aux coûts en cas de maternité pour assurer l'égalité de traitement des assurées.

La consultation sur l'avant-projet de modification de la LAMal (Mesures visant à freiner la hausse des coûts, 2e volet) (AP-LAMal), contre-projet indirect à l'initiative pour un frein aux coûts, a été menée du 19 août au 19 novembre 2020. À cette occasion, 328 prises de position ont été reçues (26 cantons et la CDS, 9 partis politiques, 4 associations faîtières de communes/villes/régions de montagne, 10 associations faîtières de l'économie, 214 fournisseurs de prestations, 7 assureurs, 4 associations de consommateurs, 29 associations et organisations de patients et autres participants)38.

La grande majorité des participants à la consultation ont reconnu la nécessité de maîtriser les coûts. Cependant, ils sont nombreux à s'être montrés critiques envers la modification de loi proposée et à avoir jugé que le projet était trop vaste, pas assez abouti et (politiquement) irréalisable. Le projet a été soutenu en premier lieu par les cantons, les associations de consommateurs et une partie des partis politiques, des organisations de patients et des assureurs. Les fournisseurs de prestations et les associations faîtières des communes, des villes et des régions de montagne, ainsi que les milieux économiques lui étaient pour la plupart fermement opposés.

Les critiques concernaient surtout l'objectif
de maîtrise des coûts et le premier point de contact. Cet objectif a été fermement rejeté par les fournisseurs de prestations. La FMH, par exemple, s'appuyant sur une expertise39 de Ueli Kieser, a même mis en doute la constitutionnalité du projet. Cependant, toutes les organisations économiques, de nombreuses associations de patients et de nombreux assureurs ont également exprimé des critiques. En revanche, la majorité des cantons ont exprimé une opinion prudemment positive, assortie de nombreuses réserves et points d'interrogation sur la mise en oeuvre de ce 2e volet. Les réactions des partis politiques, des associations de consommateurs et des associations de communes, de villes et de régions de montagne se sont également révélées très contrastées. Un objectif de maîtrise des coûts au sens d'une valeur de référence pour l'évolution des coûts, qui renforce la transparence, mais ne soit pas directement lié à des mesures correctives a remporté 37 38

39

RS 152.3 Les documents de la consultation et le rapport des résultats peuvent être consultés à l'adresse suivante: www.admin.ch > Droit fédéral > Procédures de consultation > Procédures de consultation terminées > 2020 > 2020/45.

Avis de droit sur la conformité de certaines mesures du droit de l'assurance-maladie (disponible seulement en allemand), à télécharger sous www.fmh.ch > Politique & Médias > Dossiers politiques > Maîtrise des coûts / budget global.

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une certaine adhésion, plusieurs assureurs et leurs associations s'étant par exemple prononcés en sa faveur.

L'obligation d'établir un premier point de contact a été clairement rejetée par toutes les parties prenantes, qui ont considéré qu'elle abolit le libre choix du médecin et reprend le projet des soins intégrés. La mesure a reçu un soutien modéré des cantons et d'une partie des associations de patients et de consommateurs. Le renforcement de la coordination des soins a reçu un accueil majoritairement favorable, bien que la conception des mesures proposées soit controversée.

Parmi les autres mesures de maîtrise des coûts, la réglementation prévoyant des tarifs de référence équitables et l'obligation de transmettre les factures par voie électronique ont été approuvées. Le principe d'une réglementation permettant de convenir de modèles de prix et d'éventuels remboursements a été approuvé par la majorité des participants. Cependant, de nombreux avis ont critiqué pour des raisons de transparence la limitation de l'accès aux documents officiels qui en découle. Enfin, la création de bases légales pour un examen différencié selon les critères EAE ainsi que pour le calcul d'une rémunération aussi avantageuse que possible des analyses, des médicaments ainsi que des moyens et appareils diagnostiques et thérapeutiques a reçu un accueil mitigé, laissant supposer que la réglementation législative proposée présentait un potentiel d'amélioration important.

Les critiques visant une grande partie des mesures ont nécessité une révision en profondeur du projet de loi. En raison des avis exprimés et des questions de mise en oeuvre à clarifier, le Conseil fédéral a décidé le 28 avril 2021 de détacher l'objectif de maîtrise des coûts de la modification LAMal «Mesures visant à freiner la hausse des coûts, 2e volet» afin d'en faire un contre-projet indirect à l'initiative pour un frein aux coûts.

Le présent message présente donc uniquement la nouvelle réglementation sur l'objectif de maîtrise des coûts aux Chambres fédérales. Le message relatif au deuxième volet de mesures visant à freiner la hausse des coûts sera adopté à une date ultérieure.

6.1.3

Les objectifs en matière de coûts, contre-projet indirect

Dans le système actuel, le flou règne en ce qui concerne l'augmentation des coûts qui est justifiée d'un point de vue médical et celle qui ne l'est pas. Les augmentations de coûts alourdissent la charge des primes, déjà problématique, et sont donc souvent rejetées par principe. Mais elles ne sont parfois pas suffisamment examinées sous l'angle de leur efficience et de leur caractère économique, et sont acceptées en bloc sous prétexte que les besoins de la population augmentent. L'ignorance des diverses composantes socialement acceptées ou non de la croissance des coûts peut conduire à des débats improductifs et à des accusations mutuelles, empêchant la mise en lumière des avantages du système de santé pour la société et l'étude des possibilités d'amélioration de son efficience. Une valeur de référence déterminée par un comité élargi et représentant la meilleure approximation possible d'une augmentation des coûts justifiée par sa nécessité médicale et par son caractère économique (objectifs en matière de coûts) est susceptible d'accroître la transparence, d'identifier une croissance excessive des coûts et de permettre un examen des mesures susceptibles d'y remédier.

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Ajoutons que les augmentations de coûts qui sont justifiées seront mieux acceptées.

C'est pourquoi l'objectif de maîtrise des coûts doit être présenté sous la forme d'un contre-projet indirect.

Le présent projet tient compte des réponses issues de la consultation en affirmant plus fermement que les objectifs en matière de coûts se fondent sur les besoins médicaux et les ressources nécessaires pour fournir les prestations assurées. Les mesures qui seraient prises à la suite d'un éventuel dépassement des objectifs en matière de coûts ont pour but de garantir que les exigences actuelles de la loi qui ne sont plus remplies (par exemple le caractère économique) seront à nouveau respectées. En outre, les mesures visant à corriger les développements indésirables ont été adaptées. Le dépassement des objectifs n'entraînera plus de réduction générale des tarifs mais sera le signal d'une éventuelle évolution indésirable, à laquelle il conviendra de remédier de manière ciblée et en fonction de ses causes. Les autorités compétentes disposent déjà d'un large éventail d'instruments à cet effet dans différents domaines (définition des prestations assurées, admission des fournisseurs de prestations, tarification, etc.). La transparence accrue résultant de l'objectif de maîtrise des coûts augmente les chances que ces instruments soient véritablement appliqués. Là où les instruments existants présentent des lacunes, ils doivent être complétés de manière ciblée. Les autorités compétentes, notamment les cantons, ne sont pas liées par des limites temporelles fixes s'agissant des mesures correctives. Elles bénéficieront donc de plus de flexibilité dans la mise en oeuvre et seront efficacement soulagées sur le plan administratif.

Il importe de renforcer les possibilités offertes aux cantons et à la Confédération d'intervenir par des mesures correctives en cas d'augmentation injustifiée des coûts. Les instruments dont les cantons et la Confédération ont disposé jusqu'à maintenant, par exemple la possibilité de ne pas augmenter les tarifs et les prix en cas de forte augmentation des coûts (art. 55 LAMal), sont insuffisants à cet égard, car la progression des coûts est due moins aux hausses de prix et de tarifs qu'à l'augmentation du volume des prestations, les tarifs et les prix inchangés pouvant avoir atteint un niveau
qui n'est plus économique ou dont la structure est devenue inappropriée. Bien que les partenaires tarifaires disposent d'une grande marge de manoeuvre pour prendre leurs propres mesures et conclure des conventions, ils ne sont pas suffisamment incités à en user. Pour rendre les objectifs de maîtrise des coûts plus contraignants, les cantons et la Confédération doivent pouvoir abaisser les tarifs et les prix si les conditions légales les concernant, notamment le caractère économique, ne sont plus remplies, par exemple lorsque les efforts d'adaptation des partenaires tarifaires ont été insuffisants.

En comparaison avec d'autres mesures susceptibles de gérer les coûts, la définition d'un objectif de maîtrise des coûts permet de contrôler directement la hausse des coûts et d'y réagir par des mesures ciblées. Une augmentation de la participation aux coûts permettrait certes d'abaisser quelque peu les primes, d'une part en raison du transfert direct de charges des assurés vers les patients et d'autre part parce que l'augmentation du volume des prestations induite par la demande serait en partie réduite du fait que les patients devraient désormais payer eux-mêmes une partie plus importante des coûts. Une augmentation de la participation aux coûts ne modifierait toutefois pas fondamentalement la demande, qui est en partie induite par l'offre. Une partie importante de la demande provient en effet d'assurés générant des coûts très élevés (et dont

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les franchises sont dans tous les cas dépassées). Les assureurs quant à eux ont aujourd'hui déjà la possibilité de proposer des modèles d'assurance qui se limitent aux fournisseurs de prestations de leur choix et de prévoir des conventions spécifiques pour la rémunération de ces derniers. De tels modèles peuvent contribuer à ralentir l'augmentation des coûts et les assureurs ne sont soumis, aujourd'hui déjà, qu'à de rares restrictions à cet égard. Il est donc essentiel que l'introduction d'un objectif de maîtrise des coûts induise une pression directe et accrue sur les partenaires tarifaires pour qu'ils conviennent de mesures de réduction des coûts.

6.2

Comparaison avec le droit étranger, notamment européen

Le groupe d'experts a analysé les expériences internationales relatives à la gestion de la hausse du volume des prestations.

L'accent a été mis sur l'Allemagne et les Pays-Bas en particulier, dont les systèmes de santé et les dépenses de santé élevées sont comparables à ceux de la Suisse. Les trois pays disposent d'une assurance maladie sociale dans laquelle la concurrence entre les assureurs est réglementée. L'Allemagne, comme la Suisse, pratique le libre choix du médecin; aux Pays-Bas, les médecins de famille assurent l'accès au système de santé. Comme la Suisse, les Pays-Bas imposent une franchise relativement élevée à leurs assurés; en Allemagne la contribution des ménages privés est relativement faible. En Allemagne comme aux Pays-Bas, le système de santé est organisé de manière beaucoup plus centralisée qu'en Suisse.

En Allemagne, le principe de la stabilité du taux de cotisation a été introduit comme valeur cible pour l'évolution de la rémunération des prestations dans le domaine de l'assurance-maladie publique (gesetzliche Krankenversicherung, GKV). Celui-ci a pour objectif de maintenir constants les taux de cotisation à la GKV dans le cadre d'une politique de dépenses orientée sur les recettes. Les dépenses des caisses-maladie dans leur ensemble, mais aussi dans chaque domaine de prestations, ne doivent pas augmenter plus que les recettes de la GKV provenant des cotisations. Lors des négociations tarifaires annuelles, les partenaires tarifaires doivent définir les rémunérations de telle sorte que les cotisations (ambulatoire, stationnaire et médicaments) n'augmentent pas. Le principe permet des augmentations du taux de cotisation dans la mesure où l'approvisionnement en soins médicaux nécessaires ne peut pas être garanti, même après épuisement des réserves, et tient donc compte des développements de la médecine et des changements dans la structure de morbidité des assurés. Les autorités de surveillance fédérales et régionales examinent les projets de budget annuels des caisses dans leur domaine de compétence respectif. En cas de dépassement du volume de prestations convenu, des réductions tarifaires sont appliquées aux médecins et aux hôpitaux à titre de mesures correctives. Dans l'ensemble, l'évolution des dépenses de la GKV montre que la mise en oeuvre légale de l'objectif contraignant,
alliée au fait que les partenaires tarifaires assument une responsabilité financière, s'est avérée efficace. L'évolution des dépenses de la GKV a été à peu près proportionnelle à la croissance du PIB et est donc restée dans le cadre des exigences légales.

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Aux Pays-Bas, les dépenses de santé, y compris les dépenses des assurances-maladies financées par les cotisations, font partie d'un processus budgétaire assujetti à des règles, et sont soumises à une sorte d'objectif budgétaire («Budgetary Framework for Healthcare»). Le budget du secteur de la santé est divisé en différents domaines d'approvisionnement, tels que les soins de longue durée, les traitements hospitaliers et les traitements dispensés par les médecins de famille. Des priorités politiques peuvent être fixées entre différents sous-secteurs ou par le choix des prestations à financer. En cas de dépassement de ces objectifs de dépenses, le ministère de la santé est habilité à restreindre les volumes ou à réduire les tarifs à titre rétroactif. Ce système a été complété à partir de 2012 par des accords spécifiques entre le gouvernement et des représentants des assureurs, de l'organisation des patients et des différents domaines de prestations (soins ambulatoires de base, spécialistes, hôpitaux et psychiatrie)40.

Chacun des accords prévoit une possibilité légale de sanction sous la forme de réductions budgétaires rétroactives. Chaque groupe de fournisseurs de prestations est donc collectivement responsable du respect des accords budgétaires et du fait de devoir supporter d'éventuelles sanctions prononcées par le ministère de la santé41. L'approche corporatiste appliquée depuis 2012 consistant à freiner l'évolution des coûts au moyen d'accords contraignants et étendus s'est avérée être un succès et l'État n'a pas dû intervenir depuis.

La comparaison avec d'autres pays européens révèle une prise de conscience, sur le plan international également, du fait que le système de santé ne dispose pas de moyens illimités et que ceux-ci doivent donc être utilisés de la manière la plus efficiente possible afin de continuer à répondre aux besoins médicaux. Les expériences réalisées dans différents pays montrent que même des systèmes à vocation concurrentielle prévoient des règles en matière de dépenses pour assurer une gestion responsable et une maîtrise des coûts. Ces règles peuvent encourager les partenaires tarifaires à s'entendre sur une rémunération des prestations qui empêche une augmentation du volume des prestations qui ne se justifierait pas du point de vue médical.

6.3

Grandes lignes du projet

6.3.1

Nouvelle réglementation proposée

Le modèle proposé d'un objectif de maîtrise des coûts repose sur une approche largement décentralisée, qui reprend et poursuit la répartition actuelle de compétences entre 40

41

Les objectifs annuels de croissance réels pour le secteur de la santé étaient de 1,3 % (1994­1998), 2,3 % (1999­2002), 2,5 % (2003­2007) et 2,7 % par la suite. Pour la période de 2012 à 2014, un taux de croissance annuel réel cible a été fixé à 2,5 % des volumes de prestations dans les secteurs des spécialistes, de la psychiatrie et du stationnaire, et à 3 % dans le secteur des soins ambulatoires de base. Le taux cible de 3 % dans le secteur ambulatoire doit prendre en compte le transfert souhaité des prestations stationnaires vers l'ambulatoire. Des objectifs encore plus stricts ont été convenus pour la période de 2015 à 2017.

Voir Plafonds visant à freiner la croissance des dépenses de santé: expériences choisies et enseignements pour la Suisse, Working Paper 22 de l'AFF; ce document peut être consulté à l'adresse: www.efv.admin.ch > Thèmes > Publications > Travaux de base du conseil économiques.

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Confédération et cantons. La forte position des cantons correspond à leur compétence primaire dans le domaine de la santé, et permet d'adopter des solutions adaptées aux circonstances et de tenir compte des intérêts des patients, des assurés et de la société en général.

Afin de simplifier l'instauration de cet objectif, il importe de modifier le moins possible la répartition actuelle des compétences. Le caractère de l'assurance obligatoire et le droit au remboursement des prestations obligatoirement prises en charge, indépendamment des moyens disponibles, ainsi que le système de la concurrence régulée ne seront pas affectés. Il faut éviter tout rationnement de prestations efficaces, appropriées et économiques. Des mesures d'accompagnement telles qu'un monitorage continu sont prévues pour atteindre cet objectif (cf. art. 54, al. 6, P-LAMal).

Définition des objectifs en matière de coûts et des mesures correctives Le concept de définition des différents objectifs et mesures correctives peut se résumer en quatre étapes.

­

Premièrement, le Conseil fédéral définit, sur recommandation d'une commission consultative et après consultation des cantons, des fournisseurs de prestations et des assureurs, l'objectif limitant la croissance globale des coûts (objectif global national en matière de coûts). Cet objectif doit se baser sur une augmentation des volumes et des prix qui se justifie d'un point de vue médical et économique. À cet effet, certaines valeurs macroéconomiques comme le développement économique, en particulier l'évolution des salaires et des prix, le progrès technique et le potentiel de gain d'efficience, doivent être considérées comme des facteurs de coûts importants pour une fourniture efficiente des prestations. Ces mêmes facteurs, auxquels s'ajoute l'évolution de la démographie et de la morbidité, doivent également être mentionnés comme facteurs d'influence importants pour le volume des prestations considérées comme nécessaires et économiques.

Le Conseil fédéral détermine en outre pour chaque canton, selon les mêmes critères, un objectif spécifique en matière de coûts, lequel tient notamment compte de l'évolution démographique cantonale. Cet objectif spécifique au canton ne concerne que les catégories de coûts relevant de la compétence cantonale, c'est-à-dire qu'il exclut notamment les médicaments. De plus, le Conseil fédéral fixe une marge de tolérance contraignante (la même pour tous les cantons) au-delà des objectifs spécifiques qu'il a attribués à chaque canton. Il détermine en outre des valeurs de référence concernant la répartition de l'augmentation admise entre les différentes catégories de coûts. Ces valeurs, qui s'adressent aux cantons, se fondent sur la situation nationale et ne tiennent pas compte des spécificités cantonales. Le Conseil fédéral fixe des objectifs à l'échelle nationale pour les catégories de coûts relevant de la compétence de la Confédération (à savoir les médicaments, les analyses, les moyens et appareils diagnostiques ou thérapeutiques, ainsi que les domaines de prestations pour lesquels les partenaires tarifaires ont convenu d'un niveau des tarifs uniforme dans toute la Suisse).

­

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Deuxièmement, chaque canton définit un objectif global cantonal pour toutes les catégories de coûts relevant de la compétence cantonale dans les limites

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de la marge de tolérance fixée. Les acteurs concernés (fournisseurs de prestations et assureurs) doivent être consultés de manière appropriée. La mise en oeuvre concrète de cette consultation est laissée à l'appréciation des cantons.

Les valeurs de référence de la Confédération s'appliquent sans marge de tolérance lorsqu'un canton ne fixe pas un objectif répondant à ces exigences dans le délai imparti.

­

Troisièmement, les cantons répartissent leur objectif global respectif entre les catégories de coûts définies par le Conseil fédéral, après avoir consulté les acteurs intéressés. Les cantons peuvent en principe procéder librement à cette répartition pour les catégories de coûts relevant de leur compétence, pour autant que l'objectif global cantonal soit respecté (compte tenu de la marge de tolérance). Ils peuvent ainsi adapter aux spécificités de leur canton les valeurs de référence fixées par le Conseil fédéral pour la répartition des objectifs entre les différentes catégories de coûts, par exemple en tenant compte d'un transfert du secteur hospitalier stationnaire vers le secteur ambulatoire, qui a déjà largement eu lieu ou qui, au contraire, est en train de s'intensifier.

­

Quatrièmement, le projet de loi oblige tant le Conseil fédéral que les gouvernements cantonaux, en cas de dépassement des objectifs dans une catégorie de coûts, à examiner si des mesures sont nécessaires pour corriger les éventuels développements indésirables qui ont conduit à ce dépassement. Un dépassement des objectifs en matière de coûts n'est pas nécessairement dû à une augmentation du volume médicalement injustifiable ou à des tarifs élevés et non économiques; il commande cependant d'identifier les éventuels développements indésirables et de les corriger si nécessaire. Le Conseil fédéral et les gouvernements cantonaux doivent en particulier examiner si les tarifs convenus par les partenaires tarifaires et approuvés par le Conseil fédéral (dans le cas de structures tarifaires ou de valeurs du point tarifaire applicables au niveau national) ou par les gouvernements cantonaux (dans le cas de tarifs applicables au niveau cantonal), ou fixés en cas d'absence d'accord entre les partenaires tarifaires, répondent toujours aux exigences légales de l'art. 46, al. 4, LAMal, en particulier le caractère économique. Outre cette vérification, le Conseil fédéral et les gouvernements cantonaux doivent également examiner si d'autres mesures déjà prévues par la LAMal sont nécessaires, par exemple dans le domaine de la planification hospitalière ou de l'admission des fournisseurs de prestations ambulatoires, ou encore dans la définition des prestations assurées ou non assurées, et considérées comme économiques ou non économiques. Si cela s'avérait judicieux et nécessaire, des adaptations du cadre légal seraient envisageables en cas de dépassements persistants des objectifs.

­

Pour la mise en oeuvre de la quatrième étape, le projet doit combler les lacunes des instruments fédéraux et cantonaux, qui peuvent rendre difficile l'application des exigences actuelles de la LAMal. Celle-ci exige déjà des tarifs qui soient fixés d'après les règles applicables en économie d'entreprise et structurés de manière appropriée (art. 43, al. 4, LAMal), qui permettent d'obtenir des soins appropriés et d'un haut niveau de qualité, et qui soient les plus avantageux possible (art. 43, al. 6, LAMal). Les autorités compétentes vérifient 23 / 52

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que le tarif est conforme à la loi et à l'équité et qu'il satisfait au principe d'économie (art. 46, al. 4, LAMal). Dans le cas des structures tarifaires portant sur des tarifs à la prestation, le Conseil fédéral peut procéder à des adaptations subsidiaires si ces structures s'avèrent ne plus être appropriées et que les partenaires tarifaires ne parviennent pas à s'entendre sur une révision (art. 43, al. 5bis, LAMal). Les adaptations adoptées dans le cadre du premier volet de mesures visant à freiner la hausse des coûts (art. 43, al. 5, P-LAMal42) étendraient de manière générale la compétence subsidiaire du Conseil fédéral aux tarifs à la prestation ainsi qu'aux tarifs forfaitaires par patient liés aux traitements ambulatoires. Ainsi, aucune révision supplémentaire n'est nécessaire pour pouvoir adapter les structures tarifaires ambulatoires lorsque des mesures correctives sont requises, car il existe déjà des possibilités de déblocage en cas de désaccord entre les partenaires tarifaires. Le dépassement des objectifs est ici un signal, en premier lieu pour les partenaires tarifaires et en second lieu pour les autorités compétentes, leur enjoignant d'examiner de plus près si des ajustements sont nécessaires dans le cadre des compétences existantes et prévues.

Dans le cas des conventions tarifaires qui ne concernent pas les structures tarifaires, mais les niveaux tarifaires (par exemple les valeurs du point tarifaire et les prix de base), ainsi que les structures tarifaires pour les traitements hospitaliers stationnaires (art. 49 LAMal), la situation est toutefois différente.

Outre les exigences susmentionnées de l'art. 43 LAMal, l'art. 59c, al. 2, de l'ordonnance du 27 juin 1995 sur l'assurance-maladie (OAMal)43 oblige certes déjà les partenaires tarifaires à revoir et à adapter régulièrement les tarifs afin que les exigences légales restent remplies. Toutefois, s'ils ne se plient pas à cette obligation et qu'aucun des partenaires tarifaires ne résilie le tarif, l'autorité qui a approuvé le tarif à un moment où les conditions d'approbation étaient encore remplies n'a actuellement aucune possibilité d'imposer une adaptation du tarif, dans la mesure où le niveau du tarif (par exemple la valeur du point tarifaire) est affecté.

Il en va de même au titre des mesures de gestion des coûts des partenaires
tarifaires proposées dans le volet 1b de mesures de maîtrise des coûts: le Conseil fédéral ne peut, à titre subsidiaire, que définir les mesures de gestion des coûts. Dans les cas où les mesures prévoient une adaptation des tarifs cantonaux, l'approbation des tarifs adaptés relève des cantons. Toutefois, si les partenaires tarifaires n'adaptent pas les tarifs à la suite des mesures de gestion des coûts (prises subsidiairement par le Conseil fédéral cas échéant), les cantons n'ont pas non plus la possibilité d'inviter les partenaires à adapter les tarifs qui ne répondent plus aux exigences légales. Le projet proposé prévoit de combler cette lacune.

Si le Conseil fédéral ou le gouvernement cantonal estiment dans un cas particulier qu'un tarif ne remplit plus les exigences de l'art. 46, al. 4, LAMal, ils doivent désormais pouvoir inviter les partenaires tarifaires à l'adapter. Si les 42 43

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fournisseurs de prestations et les assureurs n'adaptent pas la convention tarifaire dans un délai d'un an, l'autorité d'approbation doit fixer le tarif après avoir entendu les parties concernées. À la différence de la proposition rejetée par le Conseil national en 201044 (cf. ch. 6.1.1.), ce n'est pas toujours le Conseil fédéral qui doit décider des adaptations tarifaires, mais l'autorité responsable de l'approbation des tarifs dans le cas d'espèce. En outre, ces autorités ne doivent pas se fonder sur le critère d'une évolution des coûts supérieure à la moyenne, mais s'assurer que les conditions tarifaires légales non respectées soient à nouveau remplies.

En outre, le Conseil fédéral doit désormais avoir la possibilité de procéder à l'adaptation des structures tarifaires pour les traitements hospitaliers stationnaires ­ comme c'était le cas jusqu'ici pour les structures des tarifs à la prestation, et comme le prévoit le volet 1a de mesures visant à freiner l'augmentation des coûts pour les structures tarifaires portant sur des forfaits en matière de traitements ambulatoires ­ si elles s'avèrent ne plus être appropriées et que les parties ne parviennent pas à s'entendre sur une révision. Comme dans le domaine ambulatoire, il s'agit donc d'une compétence subsidiaire, qui n'est appliquée que si les partenaires tarifaires et les cantons ne parviennent pas à s'entendre.

Étant donné que les autorités compétentes sont tenues de vérifier si les tarifs et les structures tarifaires remplissent les exigences de la LAMal, indépendamment du fait que les objectifs en matière de coûts soient respectés ou dépassés, les instruments de gestion envisagés peuvent également être utilisés indépendamment des objectifs, pour autant que les conditions à cet effet soient réunies.

Les gouvernements cantonaux ordonnent les adaptations dans les domaines qui leur incombent, notamment dans le cas des conventions tarifaires qui s'appliquent à l'intérieur du canton concerné, par exemple pour les valeurs cantonales du point tarifaire. Le Conseil fédéral est compétent pour les adaptations dans les domaines relevant de la compétence de la Confédération (prestations selon l'art. 52 LAMal et conventions tarifaires applicables dans toute la Suisse: structures tarifaires nationales ou niveaux tarifaires uniformes). Dans leurs décisions,
les autorités compétentes considèrent l'évolution des coûts sur plusieurs années afin de ne pas surestimer les fluctuations aléatoires et tiennent compte des effets des mesures déjà prises.

Mesures prises par les partenaires tarifaires sous leur propre responsabilité Le but visé est que les partenaires tarifaires conviennent de mesures visant à respecter les objectifs en matière de coûts dès que ceux-ci leur sont communiqués, afin qu'aucune mesure corrective ne soit requise. Les partenaires tarifaires ont différentes possibilités à cet égard. Le volet 1b de mesures visant à freiner la hausse des coûts propose notamment une disposition légale obligeant les partenaires tarifaires à convenir de 44

Voir Message du Conseil fédéral du 29 mai 2009 concernant la modification de la loi fédérale sur l'assurance-maladie (Mesures visant à freiner l'évolution des coûts), FF 2009 5207, numéro d'objet 09.053.

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mesures de gestion des coûts, laquelle répond aussi à la motion 19.3419 de la Commission de la sécurité sociale et de la santé publique du Conseil des États «Assurance obligatoire des soins. Prise en compte de l'accroissement du volume des prestations dans les négociations tarifaires». Les objectifs en matière de coûts et la possibilité de prendre des mesures correctives inciteront davantage les acteurs responsables à conclure de telles conventions. Les objectifs en matière de coûts peuvent ainsi fournir aux partenaires tarifaires un cadre de référence en ce qui concerne l'évolution des coûts et les valeurs seuils des mesures de gestion des coûts. La compétence subsidiaire de déterminer les mesures de gestion des coûts dévolue au Conseil fédéral dans le premier volet est complétée dans le présent projet de loi par une compétence subsidiaire de l'autorité d'approbation (en règle générale les gouvernements cantonaux) pour adapter les tarifs (valeurs du point tarifaire, prix de base).

Réalisation des objectifs de maîtrise des coûts Enfin, les cantons ont l'obligation de communiquer à l'OFSP les objectifs définis et les éventuelles mesures correctives adoptées. L'OFSP détermine si les objectifs ont été respectés ou non dans les différents cantons et publie les résultats afin de les porter à la connaissance de tous les acteurs de la branche, renforçant la transparence et le caractère contraignant des mesures. Celles qui ont fait leurs preuves dans certains cantons peuvent ainsi être rapidement adoptées par d'autres.

Application de l'objectif de maîtrise des coûts en cas de crise En cas d'événement extraordinaire, épidémie ou autre crise sanitaire par exemple, la demande de prestations médicales peut augmenter fortement ou changer à très court terme. Il faut alors réagir rapidement et de façon ciblée pour garantir aux fournisseurs de prestations qu'ils ne s'exposent pas à la menace de corrections injustifiées, sous peine de voir apparaître des phénomènes de rationnement. L'art. 54d, al. 2, P-LAMal oblige les autorités compétentes à tenir compte d'événements extraordinaires lors de l'examen des mesures. La sécurité de l'approvisionnement en soins médicaux en cas de crise n'est donc pas mise en péril par les objectifs de maîtrise des coûts.

6.3.2

Concordance des tâches et des moyens financiers

De gros volumes de coûts sont en jeu dans la maîtrise des coûts de l'AOS. Même une mesure générant un effet d'économie mineur en valeurs relatives a des effets considérables en valeurs absolues et justifierait si nécessaire certaines charges d'exécution.

La solution proposée instaurant un objectif de maîtrise des coûts permet de limiter cet effort.

La Confédération et les cantons auront besoin de certaines ressources pour fixer les objectifs, déterminer s'ils ont été respectés et vérifier si des adaptations sont nécessaires. Toutefois, indépendamment des objectifs de maîtrise des coûts, les autorités compétentes ont l'obligation d'examiner notamment si les structures tarifaires et les tarifs sont adéquats et économiques et si l'admission des fournisseurs de prestations remplit les exigences. Un objectif de maîtrise des coûts peut faciliter cet examen, car il fournit des informations permettant d'évaluer si l'évolution des coûts se situe dans une fourchette que les besoins médicaux semblent justifier. Le projet tend à ce que les 26 / 52

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partenaires tarifaires conviennent de leur propre chef de mesures visant à maîtriser les coûts afin d'éviter l'intervention des autorités compétentes, réduisant ainsi la charge de la Confédération et des cantons. Il conviendra d'instituer une commission extraparlementaire chargée d'adresser des recommandations au Conseil fédéral, ainsi que d'éventuels organes de soutien cantonaux. Les acteurs du système de santé qui siégeront dans la commission consultative et les organes cantonaux occasionneront un surcroît de travail, d'une part pour la collaboration au sein de ces organismes et, d'autre part, lors de la mise en oeuvre des adaptations tarifaires éventuellement nécessaires.

De telles adaptations pourraient toutefois être évitées si les tarifs et les structures tarifaires sont actualisés régulièrement par les partenaires tarifaires eux-mêmes et répondent en tout temps aux exigences, notamment celle du caractère économique.

Une analyse d'impact de la régulation (AIR) a été réalisée en collaboration avec le Secrétariat d'État à l'économie (SECO), afin d'étudier les conséquences du projet et d'effectuer une analyse coûts-bénéfice approfondie. Cette étude est parvenue aux conclusions suivantes: ­

Il est nécessaire d'agir sur la croissance des coûts, notamment en raison des défaillances du marché et de la réglementation ainsi que des inefficiences du système qui en ont découlé. On peut supposer que les objectifs de maîtrise des coûts augmenteront l'efficience du système de santé et auront un effet de réduction des coûts, permettant ainsi de réaliser leur mission principale. Il faut toutefois veiller à ce que la sécurité de l'approvisionnement, les charges d'exécution et la concurrence réglementée ne soient pas affectées.

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Les objectifs de maîtrise des coûts ont des effets distributifs importants et touchent les acteurs de la branche de manière différenciée. Les auteurs de l'AIR estiment que l'accès aux soins de santé restera garanti, les directives thérapeutiques, en particulier, limitant la possibilité pour les fournisseurs de prestations de réduire les prestations nécessaires. Selon eux, les objectifs de maîtrise des coûts permettront donc principalement de réduire les inefficiences. En raison du potentiel de gain d'efficience existant et parce que les objectifs ne font que limiter la croissance des coûts (avec un effet marginal sur les coûts euxmêmes), il ne faut pas s'attendre à une baisse de la qualité des traitements. Si des mesures strictes injustifiées devaient être prises en cas de dépassement des coûts, l'accès aux services de santé pourrait se détériorer, notamment pour certains groupes de patients vulnérables. Des mesures d'accompagnement telles que la promotion accrue des réseaux de soins intégrés et l'examen des effets des objectifs de maîtrise des coûts sur l'évolution de la qualité pourraient contrecarrer cet effet.

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Alternatives et possibilités d'optimisation: le projet soumis à consultation devrait être concrétisé davantage. Un système de bonus/malus pourrait être envisagé afin que les fournisseurs de prestations jusqu'à présent efficients ne soient pas pénalisés. Dans l'idéal, les objectifs doivent permettre une plus large utilisation des instruments de maîtrise des coûts existants et le développement de nouveaux instruments.

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L'objectif générera des charges d'exécution, notamment pour les partenaires tarifaires (collecte et traitement des données) et pour les pouvoirs publiques 27 / 52

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(détermination des objectifs en matière de coûts et des mesures correctives).

Il faut également s'attendre à une augmentation des litiges. Dans l'ensemble, l'effort supplémentaire attendu reste limité. On peut donc partir du principe que les objectifs de maîtrise des coûts présenteront un haut degré d'efficacité: le bénéfice macroéconomique et le potentiel de réduction des coûts devraient clairement dépasser les charges d'exécution attendues.

La validité des résultats est limitée dans la mesure où, au moment de l'évaluation, la structure exacte de l'objectif de maîtrise des coûts n'était pas encore clairement définie sur certains points. Certaines incertitudes subsistent donc quant aux effets définitifs d'un objectif de maîtrise des coûts.

6.3.3

Questions de mise en oeuvre

Il appartient au Conseil fédéral de fixer les objectifs globaux en matière de coûts pour les différents cantons et pour l'ensemble de la Suisse, ainsi que de délimiter les catégories de coûts et de déterminer des valeurs de référence concernant les objectifs spécifiques aux catégories de coûts. La Confédération est en outre chargée d'examiner les mesures à prendre dans les catégories de coûts soumises à sa responsabilité (cf. art. 54, al. 1, let. b, P-LAMal). Elle institue une commission consultative pour l'assister dans la réalisation de ses tâches. Le Conseil fédéral pourra décrire dans une ordonnance la mise en oeuvre concrète de ses tâches, notamment la détermination des objectifs.

L'ordonnance pourra par exemple préciser la manière dont le Conseil fédéral déterminera les objectifs de chaque canton, notamment en fonction de son évolution démographique. Elle fixera par ailleurs le nombre de membres de la Commission fédérale des objectifs en matière de coûts. Ce nombre ne devrait pas être trop important, car le travail est plus efficace en petit groupe. Les acteurs les plus importants seront dûment représentés et les intérêts des groupes de patients et des assurés seront défendus par des représentants indépendants. Un effectif de onze à treize membres semble raisonnable.

Il faudra en outre préciser si les objectifs en matière de coûts doivent se rapporter aux fournisseurs de prestations d'un canton donné et inclure tous les assurés traités par ces derniers, quel que soit le canton dans lequel ils résident (principe du canton où se situent les fournisseurs de prestations) ou s'ils doivent se rapporter aux assurés domiciliés dans un canton, quel que soit le canton dans lequel ils sont traités (principe du canton de résidence des assurés).

Le principe du canton de résidence des assurés est prioritaire pour la définition des objectifs en matière de coûts, car ces derniers sont définis dans la perspective de l'approvisionnement en soins, que le canton de résidence est chargé d'assurer pour ses habitants. Les prévisions de l'évolution démographique dont nous disposons se rapportent également au canton de résidence, de même que les primes et le cofinancement par les recettes fiscales. Enfin, les coûts par personne assurée se rapportent eux aussi au canton de résidence. Le principe du canton de résidence facilite en pratique la définition et la vérification des objectifs en matière de coûts, qui se reflètent dans l'évolution des primes.

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Les compétences existantes régiront l'adaptation subsidiaire des structures ou des niveaux tarifaires, ou l'invitation adressée aux partenaires tarifaires à cet effet. Les conventions tarifaires qui ne s'appliquent que dans un canton donné concernent généralement les fournisseurs de prestations situés dans ce même canton. Par conséquent, le canton dans lequel ces fournisseurs de prestations sont situés est également compétent pour approuver ces conventions et peut inviter les partenaires tarifaires à procéder à des corrections s'il s'avère, par exemple, qu'un tarif ne répond plus au critère d'économicité. Dans le cas le plus extrême, un fournisseur de prestations pourrait devoir facturer selon 26 tarifs différents. Par ailleurs, la modification d'un tarif par un canton autre que celui où se trouve le fournisseur de prestations ne correspondrait pas aux processus de négociation des tarifs.

Les objectifs en matière de coûts couvrent donc également les prestations fournies dans un autre canton que le canton de résidence de l'assuré. Si d'éventuelles corrections ne concerneraient en règle générale que les fournisseurs de prestations domiciliés dans le canton de résidence de l'assuré, elles toucheraient également les prestations qu'ils fournissent à des assurés domiciliés dans un autre canton. Objectifs en matière de coûts et éventuelles mesures correctives ne se recouvrent donc pas s'agissant des prestations et des fournisseurs de prestations hors canton. Ces disparités peuvent se justifier par une simplification administrative et correspondent à la pratique actuelle impliquant que le niveau des valeurs du point tarifaire fixé dans un canton a également un impact sur les coûts dans les autres cantons, dans la mesure où les résidents de ceux-ci ont recours à des prestations auprès de fournisseurs de prestations situés dans celui-là. Il est important que les cantons tiennent compte de cette configuration lorsqu'ils envisagent des mesures. Si, par exemple, le dépassement d'un objectif est principalement dû à des tarifs non économiques dans un canton voisin, un ajustement tarifaire dans son propre canton n'est pas forcément opportun, une coordination mutuelle entre les cantons étant en revanche indiquée.

Il incombe aux cantons de fixer des objectifs cantonaux en matière de coûts (dans les limites de la
marge de tolérance du droit fédéral) et d'examiner la nécessité d'éventuelles mesures correctives. Il convient de définir au niveau de l'ordonnance dans quel délai les cantons doivent communiquer à l'OFSP les objectifs en matière de coûts et les éventuelles adaptations demandées ou déterminées.

L'objectif de la nouvelle réglementation est de contenir l'évolution des coûts des prestations à charge de l'AOS et de limiter ainsi l'augmentation des primes payées par les assurés. L'impact d'un objectif de maîtrise des coûts sur les primes ne peut être quantifié avec précision, car il dépend de la mise en oeuvre concrète par les acteurs concernés, notamment les cantons. De manière générale, on peut s'attendre à ce que le contre-projet indirect permette des économies substantielles en faveur des acteurs qui financent l'AOS. Ces économies se répercuteront sur les primes, car les assureurs doivent fixer les primes de telle manière qu'elles couvrent juste les coûts. Dès que ces économies figureront effectivement dans les données relatives aux prestations des assureurs, elles auront un impact durable sur les prévisions de coûts qui en découlent.

L'OFSP fonde son approbation des primes des assureurs précisément sur ces prévisions, ainsi que sur d'autres facteurs tels que la solvabilité de chaque assureur. Le processus de détermination des objectifs et le processus de fixation des primes doivent

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être étroitement coordonnés afin que l'objectif visé soit connu en temps utile et puisse être reflété dans les estimations de coûts.

Chaque assureur fixe ses primes par canton et les soumet à l'OFSP pour approbation.

Dans son évaluation de ces primes, l'OFSP doit prendre en considération, outre l'évolution cantonale des coûts, tous les facteurs influençant les primes de chaque assureur.

Ces facteurs comprennent entre autres la situation financière (une augmentation ou diminution des réserves devant éventuellement être opérée) et la prise en compte des rendements du capital. De plus, l'évolution du portefeuille d'assurés doit être prise en considération: outre l'augmentation ou la diminution des effectifs, la structure des risques joue également un rôle car elle se reflète dans l'estimation des montants attribués à la compensation des risques. L'évolution cantonale des coûts sans les facteurs d'influence supplémentaires cités, qu'on appelle renchérissement exogène, constitue une valeur comparative pertinente pour l'objectif de maîtrise des coûts. L'objectif de maîtrise des coûts de la Confédération pour une année donnée est fixé en décembre de l'année précédente, les cantons déterminant leur objectif en juin, à temps pour la définition des prévisions de coûts à l'aide desquelles les assureurs et les cantons estiment l'évolution des coûts. Le renchérissement exogène devrait ainsi correspondre à l'objectif de maîtrise des coûts. L'assureur doit expliquer toute divergence à l'OFSP.

L'effet de base doit par ailleurs être pris en considération dans l'appréciation de l'évolution des primes (3 % de 300 francs sont par exemple supérieurs à 3 % de 280 francs).

Dans leurs tâches de mise en oeuvre, la Confédération et les cantons disposent d'une grande marge de manoeuvre à l'intérieur du cadre légal. Il leur sera octroyé suffisamment de temps pour en préparer l'exécution. Les objectifs en matière de coûts doivent certes être redéfinis chaque année, impliquant que le processus correspondant soit répété annuellement. Sur le plan technique, les objectifs peuvent toutefois être préparés par les cantons pour plusieurs années, puisqu'ils se rapportent à des facteurs à long terme qui varient relativement peu avec le temps, tels que la croissance des prix et des salaires corrigés des variations conjoncturelles,
l'évolution démographique ou le progrès technique. Le Conseil fédéral soutient la préparation des cantons au niveau technique en fixant, en plus de l'objectif pour l'année à venir, des objectifs provisoires pour les trois années qui suivent. En outre, si les objectifs en matière de coûts ne sont pas respectés, il n'y a pas non plus de délai pour examiner si des ajustements sont nécessaires. Des objectifs en matière de coûts non respectés sont une indication pour les autorités compétentes que l'évolution des coûts est supérieure à un niveau médicalement explicable, et représentent une invitation à examiner plus attentivement le caractère économique et l'adéquation des tarifs, des structures tarifaires et des prix, et à examiner si l'admission des fournisseurs de prestations est gérée de manière appropriée. Cependant, d'éventuelles adaptations dans ces domaines peuvent intervenir indépendamment d'un dépassement des objectifs de maîtrise des coûts.

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6.4

Commentaire des dispositions

Art. 21, al. 2 et 4 En vertu de la loi fédérale du 19 mars 2021 sur la transmission de données des assureurs dans l'assurance obligatoire des soins45, les assureurs sont tenus de transmettre régulièrement à l'OFSP les données dont celui-ci a besoin pour accomplir les tâches que lui assigne la LAMal. Les données sont transmises sous forme agrégée.

Pour certaines tâches énumérées, le Conseil fédéral peut toutefois prévoir que les données doivent également être transmises par personne assurée si les données agrégées ne suffisent pas à remplir lesdites tâches et que les données par personne assurée ne peuvent être obtenues autrement.

La nouvelle lettre d de l'art. 21, al. 2, ajoute la fixation d'objectifs en matière de coûts aux tâches énumérées: si les données agrégées ne suffisent pas pour fixer des objectifs en matière de coûts et que les données par personne assurée ne peuvent être obtenues autrement, le Conseil fédéral peut prévoir que les assureurs doivent transmettre les données par personne assurée à l'OFSP.

En outre, l'al. 4 prévoit explicitement que l'office compétent met à la disposition des cantons les données récoltées par les assureurs. La loi fédérale du 19 mars 2021 sur la transmission de données des assureurs dans l'assurance obligatoire des soins inclut les cantons dans la notion plus large de «public».

La modification de la loi proposée crée une base légale permettant d'assurer la mise en oeuvre des mesures visant à freiner l'évolution des coûts conformément aux art. 54 à 54e P-LAMal. Les catégories de données susceptibles d'être concernées par cette transmission de données devront être précisées dans l'ordonnance.

Art. 46a Selon le droit en vigueur, un tarif doit être fixé d'après les règles applicables en économie d'entreprise et structuré de manière appropriée (art. 43, al. 4, LAMal); il doit également permettre que les soins soient appropriés et de haute qualité, tout en étant le plus avantageux possible (art. 43, al. 6, LAMal), ce qui par ailleurs doit être vérifié par l'autorité d'approbation (art. 46, al. 4, LAMal). L'ordonnance dispose que les partenaires tarifaires sont tenus de vérifier régulièrement les tarifs et de les adapter lorsque le respect des principes énoncés pour un tarif n'est plus garanti (art. 59c, al. 2, OAMal). Si les partenaires tarifaires ne remplissent
pas cette obligation et ne parviennent pas à s'entendre sur une révision, le Conseil fédéral peut procéder à des adaptations subsidiaires de la structure tarifaire dans le domaine ambulatoire lorsque cette structure s'avère inappropriée (art. 43, al. 5bis, LAMal). Toutefois, il n'a actuellement pas la possibilité d'adapter à titre subsidiaire une structure tarifaire qui n'est plus appropriée dans le domaine hospitalier stationnaire (cf. art. 49, al. 2bis, P-LAMal) ou des tarifs qui ne sont plus appropriés ou économiques (il s'agit du niveau tarifaire, à distinguer de la structure tarifaire) ni d'inviter les partenaires tarifaires à

45

FF 2021 664. Adopté par la Parlement mais non encore entré en vigueur.

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les renégocier si ces derniers ne parviennent pas à s'entendre sur une révision. Le projet de loi comble cette lacune.

Si un tarif ne répond plus aux exigences de l'art. 46, al. 4, LAMal, l'autorité compétente pour approuver la convention tarifaire peut inviter les partenaires à adapter le tarif de manière à ce qu'il réponde à nouveau aux exigences de l'article précité. Si les partenaires tarifaires ne parviennent pas à conclure une convention adaptée dans un délai d'un an, l'autorité d'approbation fixe le tarif après avoir entendu les intéressés.

La procédure dans ce dernier cas correspond à la réglementation en cas de non-accord entre les partenaires tarifaires ou d'absence de convention tarifaire (art. 47 LAMal).

Cette solution élimine l'incohérence caractérisant le fait qu'un tarif nouvellement convenu doive toujours être soumis à l'approbation de l'autorité compétente, mais que celle-ci n'avait auparavant aucune possibilité d'exiger une adaptation alors que les circonstances avaient changé entre-temps et que les conditions d'approbation n'étaient plus remplies. La nouvelle possibilité d'exiger la correction des tarifs qui ne sont plus économiques existe indépendamment du fait que les objectifs en matière de coûts au sens des art. 54 à 54e P-LAMal soient respectés ou dépassés.

L'autorité qui approuve une convention tarifaire, adopte un tarif ou des dispositions sur le niveau de rémunération ou établit des listes de prix est également compétente pour examiner les mesures correctives. Dans le cas des conventions tarifaires qui règlent le niveau de rémunération convenu (niveau tarifaire) d'un ou plusieurs fournisseurs de prestations, il s'agit généralement du canton. Les gouvernements cantonaux décident eux-mêmes de la nature et de l'ampleur des mesures correctives à prendre en cas de dépassement des objectifs en matière de coûts. Toutefois, ils sont liés par l'exigence de garantir l'accès aux prestations assurées. En outre, les mesures doivent être aptes à rétablir les conditions d'application d'un tarif qui ne sont plus remplies, notamment le caractère économique. Par analogie avec la procédure générale d'élaboration des conventions tarifaires (art. 46 et 47 LAMal), les partenaires doivent, dans un premier temps, déterminer eux-mêmes dans les conventions tarifaires les mesures nécessaires
au respect des objectifs en matière de coûts et les soumettre à l'approbation du gouvernement cantonal. Ce n'est que si les partenaires tarifaires ne satisfont pas à cette exigence que le gouvernement cantonal doit fixer lui-même un tarif.

Dans le cas particulier des prestations pour lesquelles les partenaires tarifaires ont conclu des conventions d'application nationale au sens de l'art. 46, al. 4, LAMal, dans lesquelles un niveau de rémunération uniforme (niveau tarifaire) a été convenu pour toute la Suisse (il ne s'agit donc pas des conventions de structure tarifaire nationales telles que SwissDRG ou TARPSY, qui ne prévoient pas de niveau tarifaire uniforme pour toute la Suisse), le Conseil fédéral est chargé de vérifier si le tarif reste approprié.

S'il arrive à la conclusion que les conditions pour l'approbation donnée précédemment ne sont plus remplies, il peut inviter les partenaires tarifaires à adapter le tarif de manière à ce qu'il réponde à nouveau aux exigences de l'art. 46, al. 4, LAMal. Si aucune nouvelle convention tarifaire n'est conclue dans le délai imparti, l'autorité d'approbation (dans ce cas, le Conseil fédéral) peut révoquer l'approbation accordée précédemment. Il n'est pas prévu de voie de recours contre cette révocation, ni contre l'approbation antérieure de la convention tarifaire par le Conseil fédéral. Ensuite, les dispositions s'appliquent à nouveau comme en l'absence de convention tarifaire 32 / 52

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(art. 47 LAMal), ce qui rend aux cantons la compétence d'adapter les tarifs de manière à ce qu'ils soient appropriés. Le Conseil fédéral n'adaptera donc pas les tarifs dans ce cas.

Art. 49, al. 2bis Le Conseil fédéral doit désormais pouvoir adapter les structures tarifaires applicables aux traitements hospitaliers stationnaires si celles-ci s'avèrent ne plus être appropriées et que les parties ne parviennent pas à s'entendre sur une révision. Il s'agit d'une compétence subsidiaire analogue à la réglementation actuelle concernant les structures des tarifs à la prestation ­ et à l'extension de la compétence subsidiaire du Conseil fédéral aux structures tarifaires des forfaits par patient applicables aux traitements ambulatoires, compétence adoptée avec la modification de la loi fédérale sur l'assurance-maladie (Mesures visant à freiner la hausse des coûts, volet 1a)46.

Le Conseil fédéral dispose ainsi, pour toutes les structures tarifaires applicables aux prestations relevant de la LAMal, des mêmes compétences subsidiaires, qui ne peuvent être exercées que si les partenaires tarifaires ne peuvent pas assurer seuls la maintenance et l'adaptation des structures tarifaires. Comme pour les compétences subsidiaires existantes ou prévues en matière de structures tarifaires applicables aux prestations ambulatoires, la possibilité d'exercer la compétence subsidiaire est donnée indépendamment du respect ou du dépassement des objectifs en matière de coûts selon les art. 54 à 54e P-LAMal.

Art. 53, al. 1 Remarque préliminaire: Coordination avec l'objet 19.046 «Mesures visant à freiner la hausse des coûts, 1er volet» Une modification de l'art. 53, al. 1, LAMal a été proposée dans le Message du 21 août 2019 concernant la modification de la loi fédérale sur l'assurance-maladie (Mesures visant à freiner la hausse des coûts, 1er volet)47, modification que les Chambres fédérales ont adoptée le 18 juin 202148. Celle-ci est prise en compte dans le présent projet (mention du nouvel art. 47b, al. 2, LAMal concernant la décision d'un gouvernement cantonal pouvant faire l'objet d'un recours au Tribunal administratif fédéral).

L'art. 53, al. 1, énumère les décisions des gouvernements cantonaux inhérentes à la mise en oeuvre de la LAMal qui peuvent faire l'objet d'un recours au Tribunal administratif fédéral. Les décisions
des autorités d'approbation cantonales concernant l'adaptation de tarifs qu'elles exigent en raison d'un dépassement des objectifs en matière de coûts constaté à la suite d'une vérification (art. 46a P-LAMal) doivent également pouvoir être contestées devant le Tribunal administratif fédéral et sont donc mentionnées ici. En revanche, les mesures prises par le Conseil fédéral en vertu de l'art. 46a P-LAMal concernant les prestations au sens de l'art. 54, al. 1, let. b, P-LAMal, et l'adaptation des structures dans le domaine hospitalier stationnaire (art. 49,

46 47 48

FF 2021 1496 FF 2019 5765 FF 2021 1496

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al. 2bis, P-LAMal) ne sont pas sujettes à recours, pas plus que l'adaptation des structures dans le domaine ambulatoire en vertu de l'actuel art. 43, al. 5bis, LAMal.

Art. 54 Al. 1 L'art. 54 fixe les grandes lignes de l'objectif de maîtrise des coûts. Le Conseil fédéral doit définir un objectif concernant l'augmentation des coûts des prestations au sens de la LAMal, en comparaison avec l'année précédente. Le renvoi aux prestations au sens de la loi signifie que l'objectif en matière de coûts inclut non seulement les «prestations nettes» des assureurs, mais aussi la participation des assurés aux coûts ainsi que le cofinancement des cantons pour les prestations stationnaires et le financement résiduel des cantons pour les prestations de soins.

La fixation des objectifs intervient d'une part pour toute la Suisse, en lien avec toutes les prestations (let. a). Pour certaines catégories de coûts relevant de sa compétence exclusive (let. b), le Conseil fédéral fixe d'autre part des objectifs en matière de coûts pour l'ensemble de la Suisse (art. 54a P-LAMal). Il s'agit ici des analyses, des médicaments, des moyens et appareils diagnostiques et thérapeutiques, ainsi que des prestations pour lesquelles les partenaires tarifaires ont conclu des conventions dont la validité s'étend à toute la Suisse au sens de l'art. 46, al. 4, LAMal, qui ont été approuvées par le Conseil fédéral et dans lesquelles un niveau de rémunération (niveau du tarif) a été fixé de manière uniforme pour toute la Suisse. Il ne s'agit donc pas de conventions de structures tarifaires d'application uniforme qui portent sur des évaluations relatives de prestations comparées à d'autres (sans valeur du point tarifaire ou d'une valeur analogue). Dans les cas où le niveau tarifaire (du point tarifaire ou d'une valeur analogue) n'est pas fixé de manière uniforme pour toute la Suisse, comme par exemple dans les conventions tarifaires TARMED, SwissDRG ou TARPSY, les prestations ne relèvent pas de la catégorie visée à l'art. 54, al. 1, let. b, ch. 4.

Al. 2 Le Conseil fédéral fixe d'autre part un objectif pour chaque canton. Ces objectifs fixant une croissance maximale des coûts sont différenciés et adaptés à la situation économique et démographique de chaque canton. Ils concernent la somme des catégories de coûts relevant de la compétence des
cantons (let. a). Le Conseil fédéral est lié par le principe de proportionnalité. Il définit pour tous les cantons une marge de tolérance uniforme à l'intérieur de laquelle ceux-ci peuvent dépasser les objectifs cantonaux qui leur ont été fixés et définir leur propre objectif (let. b). Le Conseil fédéral fixe également des valeurs de référence pour l'évolution des coûts dans les différentes catégories de coûts relevant de la compétence des cantons (let. c). Ces valeurs ne se basent pas sur des situations spécifiques, mais se réfèrent à la moyenne de tous les cantons. Tous les objectifs sont publiés.

Les objectifs en matière de coûts définis par le Conseil fédéral sont des taux d'augmentation maximaux (pourcentage par rapport à l'année précédente) que les coûts de l'AOS ne doivent pas dépasser.

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Al. 3 Les objectifs en matière de coûts doivent être fixés sur la base des besoins médicaux et des prestations considérées comme économiques. Sont des critères importants à cet égard l'évolution des volumes d'une part (évolution démographique, progrès technique, potentiel de gain d'efficience) et des prix d'autre part (évolution des salaires et des prix, progrès technique, potentiel de gain d'efficience). Par conséquent, la fixation des objectifs en matière de coûts ne doit pas faire abstraction des critères macroéconomiques (évolution économique, évolution des salaires et des prix, notamment), ni d'autres critères comme la démographie et les progrès de la médecine. Le potentiel de gain d'efficience est par ailleurs considérable, puisqu'il est estimé entre 16 % et 19 % des coûts des prestations à la charge de la LAMal. Il doit également être pris en compte lors de la définition des objectifs en matière de coûts et des marges de tolérance49. La liste n'est pas exhaustive et peut inclure d'autres critères importants.

Al. 4 Pour l'assister, le Conseil fédéral institue une commission consultative des objectifs en matière de coûts, dans laquelle les cantons, les fournisseurs de prestations, les assureurs, les assurés et les experts sont représentés de manière appropriée (art. 54e P-LAMal). En outre, le Conseil fédéral consulte les cantons, les fournisseurs de prestations et les assureurs avant de fixer les objectifs et les catégories de coûts.

Al. 5 Le droit des assurés à la prise en charge des coûts des prestations assurées est dans tous les cas garanti. Cela signifie notamment que les objectifs en matière de coûts doivent être suffisamment élevés pour que l'accès des assurés aux prestations jugées économiques puisse être garanti. Les éventuelles mesures correctives ne doivent pas être draconiennes au point de rendre les prestations assurées non accessibles, par exemple parce qu'un nombre trop important de fournisseurs de prestations cessent leur activité.

Al. 6 Les effets des objectifs en matière de coûts sur l'évolution des coûts et de la qualité sont régulièrement contrôlés. Il s'agit de s'assurer d'une part que la réalisation des objectifs en matière de coûts et les éventuelles mesures prises à cet effet (art. 54d P-LAMal) dans les différents cantons soient transparentes, et d'autre part, qu'une
éventuelle baisse indésirable de la qualité soit rapidement identifiée et corrigée.

L'art. 54 LAMal actuel peut être abrogé car la possibilité qui y est prévue pour les assureurs de demander au canton de fixer un montant global (budget global) pour le financement des hôpitaux et des établissements médico-sociaux est restée lettre morte dans la pratique. L'art. 51 LAMal permettra toujours aux cantons de fixer un montant global pour le financement des hôpitaux ou des établissements médico-sociaux après 49

Voir Institut d'économie de la santé de Winterthour, de l'Université des sciences appliquées de Zurich (ZHAW) et INFRAS (2019): Effizienzpotenzial bei den KVG-pflichtigen Leistungen, Le document peut être consulté à l'adresse suivante: www.ofsp.admin.ch > Assurances > Assurance-maladie > Projets de révision en cours > 2e volet de mesures visant à maîtriser les coûts.

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consultation des fournisseurs de prestations et des assureurs. Cette prérogative des assureurs, conçue comme une mesure extraordinaire, sera remplacée par un objectif en matière de coûts, conçu au contraire comme une mesure permanente de maîtrise des coûts, qui permet d'en surveiller l'évolution afin de déterminer la nécessité d'éventuelles mesures correctives.

Art. 54a Al. 1 Le Conseil fédéral attribue les différents domaines de prestations à des catégories de coûts. Cette attribution doit être définie de façon uniforme pour toute la Suisse et être aussi stable que possible pour que des comparaisons relatives à l'augmentation des coûts soient possibles sur plusieurs années et entre les cantons. Il est prévu de distinguer au moins entre fournisseurs de prestations ambulatoires, de prestations hospitalières ambulatoires et de prestations stationnaires. Le Conseil fédéral peut en outre procéder à d'autres différenciations. Par exemple, si les réseaux de soins coordonnés devaient être définis par la loi comme une catégorie distincte de fournisseurs de prestations à l'avenir, le Conseil fédéral pourrait leur attribuer une catégorie de coûts distincte. Mais il pourrait aussi regrouper plusieurs types de fournisseurs de prestations en une catégorie de coûts et définir, notamment pour les prestations médicales ambulatoires, des catégories de coûts distinctes selon la spécialisation, des groupes de spécialisations ou le type de fournisseurs de prestations (par exemple hospitalières ambulatoires ou ambulatoires en cabinet). Les cantons doivent adopter les catégories de coûts fixées à l'échelon fédéral. Le Conseil fédéral consulte les cantons, les fournisseurs de prestations et les assureurs avant de définir les catégories de coûts.

Al. 2 Certaines prestations pour lesquelles la fixation d'objectifs en matière de coûts relève exclusivement de la compétence de la Confédération (art. 54, al. 1, let. b, P-LAMal) forment des catégories de coûts spécifiques. Les prestations au sens de l'art. 54, al, 1, let. b, ch. 4, P-LAMal peuvent être réparties entre différentes catégories de coûts.

Al. 3 Le Conseil fédéral peut exclure de l'attribution à une catégorie de coûts des domaines de prestations dont l'influence sur l'évolution globale des coûts est minime. Des domaines de prestations à faible volume peuvent
cependant afficher une forte augmentation des coûts. Il ne faut donc pas uniquement tenir compte du volume, mais aussi de son évolution. Des frais d'administration disproportionnés par rapport au volume concerné peuvent également être pris en compte dans la décision d'exemption.

Art. 54b Al. 1 L'art. 54b règle la procédure et les critères que les cantons doivent respecter lors de la définition des objectifs en matière de coûts. La définition concrète de leurs objectifs et des différentes catégories de coûts qui relèvent de leur compétence incombe aux

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cantons. Ces derniers doivent en principe se baser sur les mêmes critères que la Confédération lors de la définition de leurs objectifs. Ils disposent pour ce faire d'une grande marge d'appréciation.

Al. 2 Les cantons peuvent s'écarter des valeurs de référence fixées par le Conseil fédéral pour les différentes catégories de coûts tant que l'objectif global cantonal et la somme des objectifs des différentes catégories de coûts n'excèdent pas l'objectif attribué par la Confédération à chaque canton, compte tenu de la marge de tolérance admise. Ils ont ainsi la possibilité de tenir compte de circonstances spécifiques au canton et du potentiel de gain d'efficience dans les différents domaines. L'état du transfert, avancé au non, du secteur hospitalier stationnaire vers le secteur ambulatoire peut par exemple jouer un rôle.

Al. 3 Eu égard à l'autonomie d'organisation des cantons, ceux-ci n'ont pas l'obligation de mettre en place une commission consultative similaire à celle qui est prévue à l'échelon fédéral (art. 54e P-LAMal). Ils sont toutefois tenus d'impliquer les fournisseurs de prestations et les assureurs dans la prise de décision concernant les objectifs en matière de coûts.

Al. 4 Les cantons doivent communiquer à l'OFSP les objectifs en matière de coûts qu'ils ont définis et ceux-ci sont publiés. L'OFSP établit dans quelle mesure ces objectifs (tout comme ceux fixés par la Confédération) ont été respectés. Pour les prestations de soins, l'OFSP évalue également l'ampleur et l'évolution des contributions des assurés et du financement résiduel par les cantons dans le cadre des modalités de financement actuelles. Les cantons sont informés en détail par l'OFSP, dans la limite des informations disponibles, si les objectifs qu'ils ont fixés ont été dépassés et, le cas échéant, dans quelle mesure et dans quels domaines. Les cantons disposent ainsi d'une base de décision pour examiner les mesures éventuellement nécessaires (art. 54d P-LAMal). L'OFSP publie en outre les résultats concernant le degré de réalisation des objectifs dans les différents cantons et catégories de coûts, ce qui favorise la transparence et renforce le caractère contraignant des mesures.

Art. 54c Al. 1 Le Conseil fédéral doit fixer les objectifs en matière de coûts au plus tard 12 mois avant le début de l'année civile à laquelle
ils doivent s'appliquer. Dans l'optique d'une planification permanente, il définit simultanément des objectifs provisoires, non encore contraignants, pour les trois années qui suivent. Cela permet à toutes les parties prenantes de s'adapter aux objectifs prévus à moyen terme. Si de nouvelles connaissances le justifient, par exemple lors de l'examen régulier des effets sur l'évolution des coûts et de la qualité (art. 54, al. 6, P-LAMal), le Conseil fédéral peut, lorsqu'il fixe les objectifs définitifs des trois années suivantes, s'écarter des valeurs cibles communiquées précédemment s'il le juge nécessaire, par exemple pour éviter 37 / 52

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une augmentation injustifiée des coûts ou une diminution indésirable des prestations et de la qualité.

Al. 2 Les objectifs en matière de coûts définis de manière contraignante au niveau fédéral pour les prestations visées à l'art. 52 LAMal, tout comme ceux des cantons, doivent être fixés au plus tard 6 mois avant leur entrée en vigueur. Il en va de même des objectifs des autres catégories de coûts relevant de la compétence de la Confédération (art. 54a, al. 3, P-LAMal).

Al. 3 Les cantons doivent fixer les objectifs en matière de coûts à l'intérieur de la marge de tolérance 6 mois au plus tard avant le début de l'année à laquelle ceux-ci s'appliqueront. Les cantons sont libres de publier également leurs objectifs pour les trois années suivantes, afin que les acteurs concernés puissent s'adapter à l'évolution attendue et que la définition des objectifs au niveau technique puisse s'effectuer sur plusieurs années.

Al. 4 Au cas où un canton ne déterminerait pas ses objectifs dans le délai fixé, les objectifs fixés par le Conseil fédéral et les valeurs de référence visées à l'art. 54, al. 2, let. c, PLAMal s'appliqueraient sans marge de tolérance. L'objectif attribué par le Conseil fédéral au canton et la valeur de référence relative à la répartition de l'augmentation des coûts entre les différentes catégories de coûts seraient donc appliqués sur la base de l'objectif global attribué au canton.

Art. 54d Al. 1 Les objectifs en matière de coûts sont déterminés sur la base des besoins médicaux et des coûts nécessaires pour les couvrir (art. 54 P-LAMal). Le dépassement des objectifs en matière de coûts est donc une indication que l'augmentation des coûts n'est peut-être pas seulement due à des prestations et des coûts médicalement justifiés, mais que l'on assiste aussi à une expansion des volumes qui n'est pas médicalement justifiée, que trop de fournisseurs de prestations sont admis, ou que des tarifs, des structures tarifaires et des prix sont peut-être trop élevés ou, d'une autre manière, non appropriés ou non économiques. L'art. 54d oblige le Conseil fédéral et les cantons, en cas de dépassement des objectifs en matière de coûts dans les domaines qui relèvent de leur compétence, à identifier les causes possibles de ce dépassement et à examiner si des mesures régulatrices sont nécessaires.

Les mesures
régulatrices à envisager correspondent aux instruments que la loi attribue aux autorités compétentes et qui sont aptes à atténuer les causes d'une évolution des coûts excessive et non motivée par des besoins médicaux. Elles doivent être adaptées à la structure du problème identifié et à la cause du dépassement. Il est par ailleurs essentiel que le droit des assurés aux prestations assurées soit toujours garanti. Les mesures correctives ne doivent donc pas être draconiennes au point d'empêcher l'accession future à certaines prestations, par exemple parce qu'un trop grand nombre 38 / 52

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de fournisseurs de prestations cessent leur activité ou annoncent leur récusation au sens de l'art. 44, al. 2, LAMal.

Il serait par exemple envisageable de revoir la définition des prestations assurées réputées conformes au critère d'économicité et la régulation du nombre de fournisseurs de prestations ainsi que de corriger les déséquilibres tarifaires ou le niveau des tarifs ou des prix. Les autorités compétentes doivent notamment vérifier si les tarifs convenus par les partenaires tarifaires et approuvés par l'autorité compétente ou ­ en cas de désaccord entre les partenaires tarifaires ­ fixés par l'autorité d'approbation répondent toujours aux exigences légales, à savoir aux critères de l'art. 46, al. 4, LAMal. Les autorités ne sont pas liées par des délais lors de cet examen, afin notamment de tenir compte des différents horizons temporels requis pour les ajustements réglementaires dans les divers domaines (par exemple, les cycles de la planification hospitalière).

Al. 2 L'autorité chargée de l'examen des mesures doit tenir compte de l'évolution des coûts et des résultats des mesures prises les années précédentes, ainsi que des événements extraordinaires. Par exemple, il est possible que les mesures n'aient un effet qu'après un certain délai, que des développements extraordinaires modifient l'ampleur de l'augmentation des coûts médicalement justifiés par rapport aux objectifs en matière de coûts définis précédemment, et que les volumes de prestations fluctuent certaines années de manière aléatoire, en particulier dans les cantons et les catégories de coûts à faibles volumes de coûts.

En cas d'événement extraordinaire, les cantons restent les premiers compétents. Dans le cadre de leur devoir d'examen des mesures, ils peuvent renoncer entièrement ou partiellement à prendre des mesures correctives. Si par exemple une canicule durable constituait une menace pour la santé publique, chaque canton serait libre de décider s'il veut ou non prendre des mesures. Comme la menace due aux événements extraordinaires peut varier d'une région à l'autre, il se justifie de laisser cette compétence aux cantons. Si un événement extraordinaire, une épidémie par exemple, nécessite une solution uniforme à l'échelle suisse, le Conseil fédéral peut, en vertu de la loi du 28 septembre 2012 sur les épidémies50,
ordonner les mesures qui s'imposent pour le pays tout entier ou pour des régions données.

Par événement extraordinaire au sens de l'art. 54d, al. 2, il faut entendre au premier chef une grave mise en danger de la santé publique en Suisse. Dans son Rapport sur l'analyse nationale des risques51, l'Office fédéral de la protection de la population dresse un tableau systématique des dangers que représentent les éventuelles catastrophes et situations d'urgence qui pourraient également avoir des conséquences pour la santé publique, soit un large éventail d'événements dont l'origine peut être naturelle, technique ou sociétale. Sont particulièrement pertinents pour l'objectif de maîtrise des coûts les événements qui entraîneraient une forte augmentation des cas de 50 51

RS 818.101 Office fédéral de la protection de la population: Catastrophes et situations d'urgence en Suisse 2020, Rapport sur l'analyse nationale des risques, consultable à l'adresse suivante: www.babs.admin.ch > Autres domaines d'activités > Risques et dangers > Analyse nationale des risques.

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maladie au sein de la population et qui ne correspondent pas à la définition de l'accident au sens de l'art. 4 de la loi fédérale du 6 octobre 2000 sur la partie générale du droit des assurances sociales52. Il pourrait s'agir par exemple de pannes ou de restrictions prolongées affectant les infrastructures critiques (approvisionnement en électricité, en eau potable ou en médicaments), de dangers naturels (canicules) ou encore de dangers d'origine sociétale (afflux de réfugiés). Sont considérés comme des accidents les événements tels que les dangers naturels gravitationnels (crues, avalanches, éboulements), les accidents touchant des installations de production, de distribution ou de stockage (centrales nucléaires) ou encore les dangers d'origine sociétale (terrorisme et cybercriminalité).

Al. 3 Les cantons sont soumis à une obligation de communication, comme pour les objectifs fixés en matière de coûts. Ils communiquent les mesures prises à l'OFSP, qui les publie. Les mesures qui ont fait leurs preuves dans certains cantons peuvent ainsi arriver rapidement à la connaissance d'autres cantons.

Al. 4 L'obligation faite aux cantons d'établir périodiquement un rapport sur l'évolution des coûts par rapport aux objectifs fixés et d'énumérer les mesures prises va dans le même sens. La périodicité doit être définie au niveau de l'ordonnance. Une publication tous les quatre ans serait par exemple un rythme envisageable.

Art. 54e Al. 1 Le Conseil fédéral institue une Commission des objectifs en matière de coûts.

L'art. 57b, let. a à c, de la loi du 21 mars 1997 sur l'organisation du gouvernement et de l'administration (LOGA)53 définit les conditions dans lesquelles des commissions extraparlementaires peuvent être instituées, conditions qui en l'occurrence sont remplies: fixer les objectifs en matière de coûts requiert des savoirs particuliers dont l'administration fédérale ne dispose pas suffisamment; la participation précoce des cantons et des autres acteurs du système de santé est indispensable; enfin les recommandations relatives à la fixation des objectifs ne doivent pas être liées par des instructions. La tâche de la commission ne peut pas être accomplie de manière plus adéquate par une unité de l'administration fédérale centrale. En même temps l'organisation ne doit pas se trouver en dehors de
l'administration fédérale, afin qu'elle dispose des ressources nécessaires et qu'une orientation vers les besoins de la LAMal soit garantie. Les exigences de l'art. 57c LOGA sont donc également remplies.

Al. 2 La commission conseille le Conseil fédéral lorsqu'il fixe les objectifs en matière de coûts, les catégories de coûts et la marge de tolérance applicable à tous les cantons.

52 53

RS 830.1 RS 172.010

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Al. 3 La commission est composée de représentants des cantons, des fournisseurs de prestations, des assureurs et des assurés ainsi que de spécialistes indépendants, issus notamment du domaine médical et de l'économie.

Le Conseil fédéral peut concrétiser davantage cette disposition. Les dispositions générales de la LOGA et de l'ordonnance du 25 novembre 1998 sur l'organisation du gouvernement et de l'administration (OLOGA)54 sur les commissions extraparlementaires sont par ailleurs applicables. Le financement de la Commission des objectifs en matière de coûts doit être assuré par la Confédération, puisque le mandat de la commission est de conseiller le Conseil fédéral. Par conséquent, il n'est pas nécessaire de prévoir des dispositions distinctes sur le financement; les principes généraux des art. 57a ss. LOGA sont applicables.

Dispositions transitoires Les premiers objectifs en matière de coûts seront fixés pour l'année qui commence deux ans après l'entrée en vigueur de la présente révision de la LAMal. Si, par exemple, la révision devait entrer en vigueur le 1er janvier 2023, les objectifs en matière de coûts seraient fixés pour 2025. Considérant les délais prévus à l'art. 54c P-LAMal, le Conseil fédéral devrait instituer en 2023 la Commission des objectifs en matière de coûts chargée de le conseiller (art. 54e P-LAMal). Avant le 31 décembre 2023, il devrait fixer la marge de tolérance et les objectifs en matière de coûts pour 2025 (ainsi que les objectifs provisoires pour 2026, 2027 et 2028) pour toutes les prestations en Suisse ainsi que pour les différents cantons et fixer les valeurs de référence concernant la répartition entre les différentes catégories de coûts (art. 54, al. 1, let. a, 54, al. 2, et 54c, al. 1, P-LAMal). Les cantons et le Conseil fédéral devraient fixer avant le 30 juin 2024 les objectifs pour les catégories de coûts relevant de leur compétence (art. 54 al. 1 let. b, 54b, al. 1, et 54c, al. 2 et 3, P-LAMal). Une fois l'année 2025 écoulée, l'OFSP déterminerait le degré de réalisation des objectifs au cours du premier semestre 2026 et le communiquerait aux cantons (art. 54b, al. 4, P-LAMal).

6.5

Conséquences

6.5.1

Conséquences pour la Confédération

Conséquences financières L'objectif de la réglementation proposée est de freiner l'évolution des coûts des prestations à la charge de l'AOS, afin de limiter la hausse des primes que doivent payer les assurés. Cette mesure devrait donc aussi contribuer à freiner la progression des subventions que la Confédération accorde aux cantons en vertu de l'art. 66, al. 2, LAMal pour réduire les primes des assurés de condition économique modeste. Cette

54

RS 172.010.1

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contribution se chiffre à quelque 2,8 milliards de francs dans le budget de la Confédération et, comme elle est définie en pourcentage des coûts bruts de l'AOS (7,5 %), elle continuera d'augmenter ces prochaines années.

De manière générale, le Conseil fédéral part du principe que la mesure proposée peut freiner la hausse des coûts dans les quatre catégories de coûts les plus importantes. Le Conseil fédéral estime notamment qu'un objectif de maîtrise des coûts constitue un instrument approprié pour exploiter le potentiel de gain d'efficience existant dans le système de santé, ce qui peut freiner l'augmentation des coûts de l'AOS. Selon les estimations actuelles, ce potentiel d'efficience représente 16 % à 19 % des coûts des prestations soumises à la LAMal55. Les estimations de l'AIR révèlent un potentiel élevé d'économies à l'échelle nationale, mais elles ne sont pas en mesure de prévoir précisément comment les objectifs affecteraient l'évolution des coûts, étant donné les incertitudes. Une projection des économies qui pourraient être réalisées, basée sur les estimations de l'Administration fédérale des finances concernant les coûts futurs des soins de santé, montre un effet potentiel de réduction des coûts de l'ordre de 0,7 % du PIB sur le long terme (30 ans). Toutefois, ces projections sont incertaines, car elles reposent sur des hypothèses qui ne se réaliseront pas nécessairement.

L'effet de maîtrise des coûts dépend notamment de la manière dont la mesure est mise en oeuvre par les acteurs, en particulier les cantons, et de la manière dont les fournisseurs de prestations et les assurés y réagissent. Actuellement, il est donc impossible de quantifier de manière fiable les conséquences financières concrètes d'une grande partie des mesures pour la Confédération. Sur la base des chiffres de l'année 2017, l'AIR fournit une estimation des économies possibles en présence d'un objectif de maîtrise des coûts jusqu'en 2047 par rapport à un scénario de référence sans objectif56.

Toutefois, ces projections à long terme sont incertaines et dépendent de nombreuses hypothèses, de sorte qu'aucune prévision quantitative réelle n'est possible.

Indépendamment du fait qu'il n'est pas possible de chiffrer précisément le potentiel d'économies, le Conseil fédéral part du principe que l'effet de maîtrise des coûts
sera globalement perceptible. L'objectif de maîtrise des coûts est un instrument qui devrait réduir à long terme le taux de croissance des coûts en renforçant la transparence des coûts et des volumes, entraînant des effets financiers positifs, notamment pour la Confédération.

55

56

Voir le rapport final de l'Institut d'économie de la santé de Winterthour, de l'Université des sciences appliquées de Zurich (ZHAW) et INFRAS (2019): Effizienzpotenzial bei den KVG-pflichtigen Leistungen, Le document peut être consulté à l'adresse suivante: www.ofsp.admin.ch > Assurances > Assurance-maladie > Projets de révision en cours > 2e volet de mesures visant à maîtriser les coûts.

Sur la base d'un volume de coûts des prestations au sens de la LAMal de 45 milliards de francs en 2017, l'AIR prévoit une croissance dont résulterait un montant de 90 milliards de francs de coûts annuels d'ici 2047 dans le scénario de référence sans objectif de maîtrise des coûts, et de 81 milliards de francs de coûts annuels dans un scénario avec un tel objectif. Dans un scénario avec objectif de maîtrise des coûts, les coûts en 2047 seraient donc inférieurs de 9 milliards de francs à ceux du scénario de référence sans objectif.

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Conséquences en matière de personnel La mise en oeuvre d'un objectif de maîtrise des coûts entraîne des tâches d'exécution supplémentaires au niveau fédéral principalement en relation avec la fixation des objectifs en matière de coûts (y compris le secrétariat de la Commission des objectifs en matière de coûts), l'évaluation de la réalisation des objectifs et l'éventuelle mise en oeuvre de mesures en cas de dépassement des objectifs en matière de coûts dans les domaines relevant de la compétence de la Confédération. En outre, il faut s'attendre à une certaine charge de travail supplémentaire dans le cadre d'éventuels litiges juridiques (prises de position dans les procédures de recours). Dans l'ensemble, il faut donc partir du principe que la mise en oeuvre des objectifs à l'échelon de la Confédération nécessitera probablement des ressources en personnel supplémentaires.

L'AIR a estimé que 3 à 4 postes à plein temps seraient nécessaires.

Le Conseil fédéral a déjà accordé des ressources pour le volet 1 dans le cadre du programme de maîtrise des coûts adopté le 28 mars 2018. Selon l'issue des débats parlementaires sur le projet, une décision devra être prise quant à l'octroi d'éventuelles ressources en personnel supplémentaires et quant à leur financement pour la mise en oeuvre des mesures proposées.

6.5.2

Conséquences pour les cantons et les communes ainsi que pour les centres urbains, les agglomérations et les régions de montagne

On considère qu'une maîtrise des coûts a pour effet de réduire les primes des assurés, de même que les réductions de primes accordées par les cantons.

Les cantons joueront un rôle primordial pour mettre en oeuvre l'objectif de maîtrise des coûts. Une approche largement décentralisée est suivie dans l'accomplissement de leur tâche actuelle consistant à garantir l'approvisionnement en soins de leur population résidante. Elle offre aux cantons la liberté nécessaire pour définir et mettre en oeuvre l'objectif cantonal et pour examiner les éventuelles mesures correctives en cas de dépassement. Ces tâches nécessiteront des ressources en personnel supplémentaires dans les cantons57.

On peut s'attendre à ce qu'un objectif de maîtrise des coûts ait un effet positif sur les finances cantonales et communales. Outre les assureurs, les cantons sont les principaux agents payeurs pour les prestations prévues par la LAMal. L'objectif de maîtrise des coûts leur offre un instrument de gestion supplémentaire. Ils disposent d'une marge de manoeuvre considérable quant à l'utilisation de cet instrument et aux ressources qu'ils veulent engager à cet effet.

57

L'AIR a estimé les coûts en personnel supplémentaires par canton à moins de 2 postes à temps plein. Cette estimation se fonde toutefois sur l'avant-projet, qui a été sensiblement simplifié, notamment en ce qui concerne la charge administrative des cantons, de sorte que les dépenses supplémentaires en personnel par canton seront nettement inférieures.

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6.5.3

Conséquences économiques

Considérant les 80 milliards de francs qui sont dépensés chaque année dans le domaine de la santé, il est clair que ce dernier revêt une grande importance économique.

Une amélioration de l'efficience du système de santé augmente le pouvoir d'achat de la population en freinant la hausse des primes.

Tous les acteurs de la santé sont tenus d'agir. Les partenaires tarifaires, les assurés ainsi que la Confédération et les cantons assument ensemble la responsabilité de la maîtrise des coûts de la santé. Les effets peuvent varier selon les acteurs, notamment les différents groupes de fournisseurs de soins, par exemple en fonction du potentiel de gain d'efficience dans leur domaine.

Le potentiel de gain d'efficience du système de santé résulte entre autres d'une asymétrie d'information plus marquée que dans d'autres secteurs économiques et, partant, d'une demande induite par l'offre, de rémunérations excessives, de tarifs et de prix surfaits pour des prestations et des produits médicaux, d'incitations inopportunes en matière de rémunération (rémunération à la prestation par exemple), d'inefficiences dans la production ainsi que d'une demande accrue du fait de la couverture d'assurance (moral hazard ou augmentation du volume des prestations liée à la demande).

L'objectif doit accroître la transparence. En définissant à l'aide d'indicateurs un ordre de grandeur de l'augmentation du coût des prestations assurées considérées comme économiques et médicalement justifiées, la part de l'augmentation des coûts qui est explicable est distinguée de celle qui pourrait être due à des augmentations de volumes résultant de tarifs et de prix excessifs ou non adaptés. Cette transparence incite à l'action et réduit la marge de manoeuvre des groupes d'intérêt, ce qui devrait se répercuter favorablement sur l'économie dans son ensemble.

L'objectif de maîtrise des coûts modifie par ailleurs les incitations auxquelles sont soumis les partenaires tarifaires. La propension des acteurs de la santé, notamment des fournisseurs de prestations, à la négociation augmente en raison de la menace d'une intervention tarifaire de la Confédération et des cantons au cas où les tarifs et les structures tarifaires ne seraient pas économiques et appropriés. L'augmentation du volume des prestations induite par l'offre et le maintien du statu
quo en matière de tarifs perdront de l'intérêt face aux innovations émanant des partenaires tarifaires et le partenariat tarifaire se verra dynamisé. La mesure renforcera donc également l'effet du premier volet des mesures visant à freiner la hausse des coûts, notamment l'obligation faite aux partenaires tarifaires de convenir de mesures visant à gérer les coûts.

Si les partenaires tarifaires conviennent de règles qui prévoient des rémunérations appropriées pour les volumes nécessaires à la garantie de l'approvisionnement en soins, mobilisant lors des négociations les connaissances dont ils disposent de manière décentralisée pour réduire les inefficiences, il en résultera des effets positifs pour l'ensemble de l'économie nationale.

L'introduction d'un objectif de maîtrise des coûts impliquera certaines charges d'exécution initiales, puis des charges administratives régulières pour les instances et acteurs impliqués (notamment la Confédération, les cantons et les partenaires tarifaires).

Ces charges dépendront aussi du niveau de différenciation des objectifs et de l'examen des mesures dans les différents cantons. On peut partir du principe que plus l'objectif 44 / 52

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est mis en oeuvre et vérifié de façon différenciée dans les cantons, plus les charges sont élevées pour les parties prenantes.

L'AIR conclut que les coûts de mise en oeuvre des objectifs ne devraient guère compter au regard du bénéfice macroéconomique et de la réduction des coûts qui en résulteront. Compte tenu du potentiel d'économies existant, les coûts de la mise en oeuvre d'un objectif de maîtrise des coûts sont donc justifiés du point de vue économique.

6.5.4

Conséquences pour la société

La Suisse dispose d'un bon système de santé, dont la qualité et l'efficacité satisfont les patients. En comparaison internationale, l'état de santé de la population suisse se situe à un niveau élevé et l'accès au système de santé est assuré. Il importe de maintenir cet état de fait. La situation en Suisse est toutefois moins bonne en ce qui concerne l'égalité en matière de financement. Les primes d'assurance-maladie, qui connaissent une augmentation annuelle de 4 %, représentent aujourd'hui une charge financière sensible pour une grande partie de la population suisse. La classe moyenne en particulier, qui ne bénéficie d'aucune réduction de primes, est fortement touchée.

Limiter la hausse des coûts de la santé doit donc être un objectif impératif de la politique sociale de la Confédération. L'innovation proposée dans le présent projet vise à réduire l'augmentation des volumes et des coûts qui ne se justifient pas par des raisons médicales, à freiner ainsi la hausse des coûts dans l'AOS et donc celle des primes, ainsi qu'à améliorer la qualité des soins médicaux et à renforcer la sécurité de l'approvisionnement. Des primes plus basses profitent aux assurés et, partant, à la société entière.

Dans la mesure où aucune règle contraignante liée à l'objectif de maîtrise des coûts ne restreint l'offre, des conséquences négatives sur la qualité ou l'accès aux prestations médicales sont peu probables. Des mesures d'accompagnement doivent en outre assurer, à l'instar d'un monitorage en temps réel, que la qualité des soins médicaux reste au moins identique et que la sécurité de l'approvisionnement en soins demeure garantie. Par ce biais, les éventuels effets négatifs sur la sécurité de l'approvisionnement et l'accès aux soins peuvent être identifiés de manière précoce, afin que l'on puisse prendre des mesures correctives si nécessaire.

6.6

Aspects juridiques

6.6.1

Constitutionnalité

Aux termes de l'art. 117, al. 1, Cst., la Confédération légifère sur l'assurance-maladie et sur l'assurance-accidents. Il s'agit d'une compétence globale de la Confédération,

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qui laisse une grande marge de manoeuvre au législateur. La réglementation du financement des prestations devant être prises en charge par l'AOS reste notamment du ressort du législateur fédéral58.

En relation avec l'introduction d'un objectif de maîtrise des coûts, il convient de noter à propos des fournisseurs de prestations que l'assurance sociale en tant que telle échappe largement à la liberté économique. Les domaines qui n'ont jamais connu de concurrence économique privée, tels que la fixation de tarifs et de prix pour des prestations payées par l'assurance sociale, (co)financée par l'État, peuvent être réglementés. La liberté économique ne confère notamment aucun droit à générer des prestations d'un quelconque montant à la charge de l'assurance-maladie sociale59. La LAMal poursuit le but d'instituer une assurance-maladie socialement supportable et non de garantir aux fournisseurs de prestations un développement économique libre de toute réglementation60.

En ce qui concerne les assurés, rappelons que le droit constitutionnel suisse ne connaît pas de «droit fondamental à la santé»61. Aux termes de l'art. 117a, al. 1, Cst., la Confédération et les cantons, dans les limites de leurs compétences respectives, veillent à ce que chacun ait accès à des soins médicaux de base suffisants et de qualité. Il s'agit d'une norme programmatique qui ne confère aucun droit à des prestations62. Des droits individuels à certaines prestations et à leur accessibilité peuvent cependant résulter d'autres dispositions constitutionnelles. Ainsi, une obligation étatique de garantir des soins minimaux aux personnes démunies peut par exemple se fonder sur le droit d'obtenir de l'aide dans des situations de détresse (art. 12 Cst.)63.

La modification de loi proposée demeure dans le cadre de ce que l'Art. 117 Cst. permet. La prise en charge des coûts des prestations assurées reste garantie après l'introduction d'un objectif de maîtrise des coûts (art. 54, al. 5, P-LAMal). La réglementation proposée laisse aux autorités d'exécution suffisamment de marge d'appréciation afin de leur permettre de veiller à une application conforme à la Constitution, en particulier de veiller à garantir l'accès des assurés aux prestations assurées et donc à des soins médicaux de base suffisants et de qualité au sens de l'art. 117a, al. 1,
Cst. Cela impliquera notamment que les objectifs définis en matière de coûts et les mesures correctives à examiner ne devront pas être si strict qu'ils auraient pour résultat d'empêcher que certaines prestations obligatoires légales soient accessibles à tous, par exemple parce que des fournisseurs de prestations indispensables cessent leur activité

58 59 60 61 62 63

Gächter/Renold-Burch, in: Waldmann et al. [éd.], Basler Kommentar zur Bundesverfassung, 2015, Art. 117 Cm 4­6.

Voir ATF 143 V 369, consid. 5.4.3 in fine; ATF 132 V 6, consid. 2.5.2; ATF 130 I 26, consid. 4.3.

Voir TAF C-1966/2014, consid. 4.3.

Voir Eugster, in: Meyer [éd.], Schweizerisches Bundesverwaltungsrecht, Soziale Sicherheit, 2016, E. Cm 14, 15.

Voir Gächter/Renold-Burch, in: Waldmann et al. [éd.], Basler Kommentar zur Bundesverfassung, 2015, Art. 117a Cm 21, 25.

Voir Eugster, in: Meyer [éd.], Schweizerisches Bundesverwaltungsrecht, Soziale Sicherheit, 2016, E. Cm 14, 15; Gächter/Werder, in: Waldmann et al. [éd.], Basler Kommentar zur Bundesverfassung, 2015, Art. 12 Cm 2­5, 25, 34; Tschentscher, in: Waldmann et al. [éd.], Basler Kommentar zur Bundesverfassung, 2015, Art. 10 Cm 17.

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ou se récusent conformément à l'art. 44, al. 2, LAMal. Les mesures correctives appliquées en cas de dépassement des objectifs en matière de coûts n'ont toutefois d'influence que sur le montant de la rémunération des prestations accordée aux fournisseurs de prestations, non sur l'accès des assurés à ces prestations. Les conséquences éventuelles de l'objectif sur la qualité des prestations sont en outre régulièrement contrôlées, de sorte que des contre-mesures pourraient si nécessaire être prises (art. 54, al. 6, P-LAMal).

Les doutes soulevés lors de la consultation et étayés par un avis juridique concernant la constitutionnalité de la réglementation proposée ne sont pas justifiés. La Constitution laisse au législateur une grande marge de manoeuvre et donc, entre autres, la possibilité de limiter le catalogue des prestations ou de durcir les conditions d'accès aux prestations assurées, mais aussi de fixer des objectifs aux coûts totaux maximaux à supporter par l'assurance et de prendre des mesures correctives en cas de non-respect de ces objectifs. La disposition constitutionnelle sur l'assurance-maladie ne s'oppose pas non plus à ce que le législateur tienne compte de certains critères tels que des considérations économiques ou de politique de la santé, lorsqu'il édicte une réglementation en matière d'assurance-maladie. Ainsi la jurisprudence a-t-elle en outre reconnu que des aspects politiques peuvent parfois être pris en compte lors de l'ajustement d'une structure tarifaire64.

Lors de la définition des mesures correctives consécutives à des dépassements d'objectif, les autorités compétentes devront veiller à respecter les principes fixés dans la Constitution, notamment le principe de proportionnalité. Il convient donc de distinguer les dépassements d'objectifs temporaires, non systématiques ou explicables de ceux qui révèlent des problèmes structurels. Dans le cas d'un dépassement temporaire d'objectifs, une adaptation durable des tarifs ou des structures tarifaires sur la base de l'art. 46a P-LAMal pour réduire les coûts futurs ne serait pas proportionnée, à moins que d'autres facteurs ne montrent que les exigences de l'art. 46, al. 4, LAMal ne sont pas respectées (cf. art. 54d, al. 3, P-LAMal).

6.6.2

Compatibilité avec les obligations internationales de la Suisse

Les modifications de loi proposées ne doivent pas être contraires aux engagements internationaux de la Suisse. Elles doivent notamment être compatibles avec l'Accord du 21 juin 1999 entre la Confédération suisse, d'une part, et la Communauté européenne et ses États membres, d'autre part, sur la libre circulation des personnes (ALCP)65 et avec la Convention du 4 janvier 1960 instituant l'Association Européenne de Libre-Échange (AELE) (convention AELE)66. L'annexe II de l'ALCP et l'appendice 2 de l'annexe K de la Convention AELE disposent que le droit de coordination de l'UE concernant les systèmes de sécurité sociale, par exemple le règlement

64 65 66

Voir ATF 144 V 138, consid. 6.2.

RS 0.142.112.681 RS 0.632.31

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(CE) no 883/200467 ainsi que le règlement (CE) no 987/200968 sont applicables à la Suisse dans ses rapports avec les États membres de l'UE ou de l'AELE. Ce droit ne vise pas à harmoniser les systèmes nationaux de sécurité sociale dans l'optique de la libre circulation des personnes. Les États parties sont libres de déterminer dans une large mesure la structure concrète, le champ d'application à raison des personnes, les modalités de financement et l'organisation de leur système de sécurité sociale. Mais, ce faisant, ils doivent observer les principes de coordination, tels que l'interdiction de discrimination, la prise en compte des périodes d'assurance et la fourniture transfrontalière des prestations, qui sont définis dans le règlement (CE) no 883/2004 et dans son règlement d'exécution (CE) no 987/2009.

L'introduction d'un objectif de maîtrise des coûts poursuit principalement un objectif interne à la Suisse, à savoir le contrôle de l'évolution des coûts dans l'AOS. Elle concerne surtout des acteurs en Suisse (cantons, fournisseurs de prestations, assureurs et assurés). Les dispositions proposées concernant cet objectif sont compatibles avec les engagements internationaux précités de la Suisse et avec les dispositions du droit de coordination européen.

Les cas de figure présentant un lien avec l'étranger qui sont prévus à l'art. 34, al. 2, LAMal (en relation avec les art. 36 à 37 OAMal), qui s'inscrivent par exemple dans le cadre de programmes de coopération transfrontalière (art. 36a OAMal), représentent éventuellement un cas particulier. Au cas où des conflits se manifesteraient à l'avenir dans de telles situations, le Conseil fédéral aurait la possibilité d'exclure les domaines de prestations correspondants de l'attribution à une catégorie de coûts (cf.

art. 54a, al. 4, P-LAMal).

6.6.3

Forme de l'acte à adopter

En vertu de l'art. 164 Cst., toutes les dispositions importantes qui fixent des règles de droit doivent être édictées sous la forme d'une loi fédérale. Cette exigence est remplie en l'espèce. Conformément à l'art. 141, al. 1, let. a, Cst., les lois fédérales sont sujettes au référendum. Le présent projet prévoit expressément le référendum facultatif.

67

68

Règlement (CE) no 883/2004 du Parlement européen et du Conseil du 29 avril 2004 portant sur la coordination des systèmes de sécurité sociale (JO L 166 du 30.04.2004, p. 1) Une version consolidée non contraignante de ce règlement est publiée: RS 0.831.109.268.1.

Règlement (CE) no 987/2009 du Parlement européen et du Conseil du 16 septembre 2009 fixant les modalités d'application du règlement (CE) no 883/2004 portant sur la coordination des systèmes de sécurité sociale, JO L 284 du 30.10.2009, p. 1. Une version consolidée non contraignante de ce règlement est publiée: RS 0.831.109.268.11.

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6.6.4

Frein aux dépenses

L'art. 159, al. 3, let. b, Cst. prévoit, afin de freiner les dépenses, que les dispositions relatives aux subventions, ainsi que les crédits d'engagement et les plafonds de dépenses, s'ils entraînent de nouvelles dépenses uniques de plus de 20 millions de francs ou de nouvelles dépenses périodiques de plus de 2 millions de francs, doivent être adoptés à la majorité des membres de chaque conseil. Étant donné que le projet ne contient ni dispositions relatives aux subventions ni décisions de financement, il n'est pas soumis au frein aux dépenses.

6.6.5

Conformité aux principes de subsidiarité et d'équivalence fiscale

Le projet n'entraîne aucune modification substantielle dans la répartition des tâches entre la Confédération et les cantons, ni dans l'accomplissement de ces tâches. Les adaptations prévues n'entraînent pas non plus de transfert de compétences fondamental. La répartition des compétences existante est modifiée le moins possible.

La définition de l'objectif en matière de coûts adopte la répartition fédérale des compétences; elle vise à animer et à renforcer le partenariat tarifaire. Le droit des assurés à la prise en charge des coûts des prestations assurées est préservé dans tous les cas.

Le Conseil fédéral se voit accorder des compétences dans le cadre de l'objectif de maîtrise des coûts. Il définit un objectif global national, des objectifs pour les différents cantons et catégories de coûts ainsi qu'une marge de tolérance uniforme. Il définit également des catégories de coûts homogènes. Il détermine les objectifs concernant les analyses, les médicaments et les moyens et les appareils (art. 52 LAMal) ainsi que les prestations pour lesquelles les partenaires tarifaires ont conclu des conventions applicables au plan national selon l'art. 46, al. 4, LAMal (à l'exception des conventions qui prévoient uniquement une structure tarifaire uniforme pour toute la Suisse) et examine si des mesures correctives sont nécessaires au cas où ces objectifs seraient dépassés. Les cantons joueront par ailleurs un rôle important dans la mise en oeuvre de l'objectif de maîtrise des coûts. Ils définissent l'objectif global cantonal en matière de coûts ainsi que les objectifs cantonaux pour les différentes catégories de coûts. Ils ont une grande marge de manoeuvre pour examiner si des mesures correctives sont nécessaires en cas de dépassement des objectifs, et, cas échéant, pour définir ces mesures. Ces attributions de compétences appliquent le principe de subsidiarité, la Confédération n'assumant que les tâches qui dépassent les possibilités des cantons ou qui requièrent une réglementation fédérale uniforme.

Les effets d'un objectif de maîtrise des coûts et de sa mise en oeuvre bénéficieront à la fois aux assureurs et aux assurés, mais aussi aux cantons en tant qu'agents payeurs importants pour les prestations prévues par la LAMal. L'introduction de cet objectif offre un instrument de contrôle supplémentaire aux
cantons. Ceux-ci ont une marge de manoeuvre considérable quant à l'utilisation de cet instrument et aux ressources qu'ils engagent à cet effet. Le principe de l'équivalence fiscale est ainsi respecté.

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6.6.6

Délégation de compétences législatives

L'art. 96 LAMal donne au Conseil fédéral la compétence générale d'édicter des dispositions d'exécution dans le domaine de l'assurance-maladie sociale. Le présent projet l'autorise à édicter des dispositions dans les domaines suivants: ­

fixer des objectifs en matière de coûts: objectif global national, objectifs des cantons et catégories de coûts ainsi que marges de tolérance; objectifs applicables aux prestations visées à l'art. 52 LAMal ainsi qu'aux prestations pour lesquelles les partenaires tarifaires ont conclu des conventions nationales selon l'art. 46, al. 4, LAMal (art. 54 P-LAMal);

­

attribuer les différents domaines de prestations à des catégories de coûts (art. 54a P-LAMal);

­

instituer une commission (art. 54e P-LAMal);

­

adapter les structures tarifaires applicables aux traitements stationnaires si les parties à la convention tarifaire ne parviennent pas à se mettre d'accord sur une révision (art. 49, al. 2bis, P-LAMal).

6.6.7

Protection des données

La loi fédérale du 19 mars 2021 sur la communication de données par les assureurs dans l'assurance obligatoire des soins 69 oblige les assureurs à transmettre régulièrement à l'OFSP les données dont celui-ci a besoin pour accomplir les tâches que la LAMal lui assigne. Les données sont en principe transmises sous forme agrégée. Toutefois, le Conseil fédéral peut prévoir que les données doivent être transmises par personne assurée si les données agrégées ne sont pas suffisantes pour accomplir certaines tâches énumérées et que les données par assuré ne peuvent pas être obtenues autrement. La fixation d'objectifs en matière de coûts compte désormais au nombre de ces tâches (art. 21, al. 2, let. d, P-LAMal).

La présente modification de loi relève du champ d'application de la loi fédérale du 19 juin 1992 sur la protection des données (LPD)70, qui s'applique aux cas dans lesquels des organes fédéraux ou des personnes privées traitent des données de personnes physiques et morales (art. 2, al. 1, LPD). On entend par traitement toute opération relative à des données personnelles, notamment la collecte, la conservation, l'exploitation, la modification, la communication, l'archivage ou la destruction de données (art. 3, let. e, LPD). Les données relatives à la santé constituent des données sensibles (art. 3, let. c, LPD). Il s'ensuit que leur traitement doit être expressément prévu dans une loi au sens formel (art. 17, al. 2, LPD pour le traitement par des organes fédéraux; art. 12, al. 2, let. c, et art. 13, al. 1, LPD pour le traitement par des personnes privées).

La révision de loi prévue instaure les bases légales permettant d'assurer la mise en oeuvre des mesures visant à maîtriser les coûts prévues aux art. 54 à 54e P-LAMal.

69 70

BBl 2021 664 RS 235.1

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Les dispositions générales en matière de protection des données, notamment en ce qui concerne la proportionnalité, la finalité et la sécurité des données (art. 4 ss LPD) doivent être respectées comme d'ordinaire lors du traitement des données personnelles requises, tant par les organes fédéraux que par les personnes privées.

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