FF 2021 www.droitfederal.admin.ch La version électronique signée fait foi

21.079 Message sur la modification de la loi fédérale contre la concurrence déloyale du 17 novembre 2021

Messieurs les Présidents, Mesdames, Messieurs, Par le présent message, nous vous soumettons le projet d'une modification de la loi fédérale contre la concurrence déloyale, en vous proposant de l'adopter.

Nous vous proposons simultanément de classer l'intervention parlementaire suivante: 2017

M 16.3902

Interdire les contrats léonins des plates-formes de réservation en ligne dont l'hôtellerie fait les frais (E 6.3.17, Bischof; N 18.9.17)

Nous vous prions d'agréer, Messieurs les Présidents, Mesdames, Messieurs, l'assurance de notre haute considération.

17 novembre 2021

Au nom du Conseil fédéral suisse: Le président de la Confédération, Guy Parmelin Le chancelier de la Confédération, Walter Thurnherr

2021-3792

FF 2021 2858

FF 2021 2858

Condensé La présente modification de la loi fédérale contre la concurrence déloyale a pour but de mettre en oeuvre la motion 16.3902 Bischof. Le projet déclare déloyales les clauses limitant la liberté tarifaire, notamment les clauses de parité tarifaire, que les exploitants de plateformes introduisent dans leurs conditions générales à l'endroit des établissements d'hébergement. En vertu de l'art. 20 du code des obligations, les clauses contractuelles déloyales de ce type sont nulles. La nouvelle disposition de la LCD relève du droit civil et ne prévoit aucune sanction pénale.

La motion 16.3902 «Interdire les contrats léonins des plates-formes de réservation en ligne dont l'hôtellerie fait les frais», déposée par le conseiller aux États Pirmin Bischof le 30 septembre 2016 et adoptée par le Parlement, demande au Conseil fédéral d'interdire les clauses de parité tarifaire (au sens large et au sens strict) dans les contrats entre plateformes de réservation en ligne et établissements d'hébergement.

Les relations commerciales entre exploitants de plateformes et établissements d'hébergement sont réglées par des contrats-types dont les conditions générales contiennent souvent des clauses limitant la liberté tarifaire. Selon ces clauses, les établissements d'hébergement ne peuvent pas proposer de nuitées sur d'autres canaux de distribution (clause de parité tarifaire au sens large) ou à tout le moins sur leur propre site Internet (clause de parité tarifaire au sens strict) à des prix inférieurs à ceux de la plateforme de réservation en ligne.

Le nouvel art. 8a de la loi fédérale contre la concurrence déloyale déclare déloyales les clauses limitant la liberté tarifaire figurant dans les conditions générales des contrats conclus entre les plateformes de réservation en ligne et les établissements d'hébergement. Le caractère déloyal réside dans le fait que ces clauses restreignent la liberté des établissements d'hébergement de fixer leurs prix, ce qui induit un déséquilibre entre les droits et les obligations des parties au contrat. Les conditions générales qui ont pour objet une chose illicite sont nulles en vertu de l'art. 20 du code des obligations.

La nouvelle disposition relève du droit civil. Elle doit être appliquée par les acteurs économiques privés concernés. Aucune sanction pénale n'est prévue.
Des pays voisins (France, Italie et Autriche) ont également instauré une interdiction légale des clauses de parité tarifaire au sens large et au sens stricts entre les plateformes de réservation en ligne et les établissements d'hébergement. En Allemagne, où il n'existe actuellement aucune réglementation légale spécifique dans ce domaine, les clauses de parité tarifaire (tant au sens large qu'au sens strict) sont considérées comme contraires au droit des cartels sur la base de différentes décisions judiciaires.

L'analyse d'impact de la réglementation réalisée suggère que l'interdiction proposée des clauses limitant la liberté tarifaire ne conférerait une plus grande marge de manoeuvre aux établissements d'hébergement que sur le plan juridique: leur position sur le marché ne devrait guère s'améliorer par rapport aux plateformes de réservation en ligne.

2 / 22

FF 2021 2858

Message 1

Contexte

1.1

Nécessité d'agir et objectifs visés

La motion 16.3902 «Interdire les contrats léonins des plates-formes de réservation en ligne dont l'hôtellerie fait les frais», déposée par le conseiller aux États Pirmin Bischof le 30 septembre 2016, demande au Conseil fédéral d'interdire les clauses de parité tarifaire (au sens large et au sens strict) dans les contrats entre plateformes de réservation en ligne et établissements d'hébergement.

Dans le cas de clauses de parité tarifaire au sens strict, l'établissement d'hébergement s'engage vis-à-vis d'une plateforme de réservation en ligne à ne pas offrir, sur son propre site Internet, de chambres à un prix inférieur à celui offert sur la plateforme de réservation en ligne. Il n'est toutefois pas tenu de proposer les mêmes prix à toutes les plateformes de réservation en ligne.

Dans le cas de clauses de parité tarifaire au sens larges, l'établissement d'hébergement s'engage à ne pas proposer sur d'autres canaux de distribution de prix inférieurs à ceux qu'il applique sur la plateforme de réservation en ligne. Il ne peut notamment pas faire des offres plus avantageuses par téléphone, par courriel ou sur une plateforme de réservation en ligne concurrente.

A la demande d'HotellerieSuisse, la Commission de la concurrence (COMCO) a ouvert une enquête en décembre 2012 contre les trois plateformes de réservation en ligne Booking.com, Expedia et HRS. Elle soupçonnait notamment que les clauses paritaires entre les plateformes et les établissements d'hébergement constituaient une entrave à la concurrence. Par décision du 19 octobre 2015, la COMCO a estimé que l'utilisation de clauses de parité tarifaire au sens large contrevenait à la loi du 6 octobre 1995 sur les cartels (LCart)1, 2. Elle ne s'est en revanche délibérément pas prononcée sur les clauses de parité tarifaire au sens strict, faute d'expérience suffisante en la matière3.

En vertu de la LCart, la COMCO ou les tribunaux compétents pourraient dans certains cas déclarer dès à présent illicites des clauses de parité tarifaire au sens strict si elles entraînent une entrave illicite à une concurrence efficace.

Dans son avis du 16 novembre 2016, le Conseil fédéral a proposé de rejeter la motion 16.3902 Bischof en avançant notamment que la loi permettait déjà d'empêcher que les clauses de parité tarifaire restreignent la concurrence. Le Conseil national
(second conseil) a adopté la motion lors de la session d'automne 2017, après que le Conseil des États l'eut adoptée au printemps 2017. En conséquence, le Conseil fédéral est chargé de présenter les modifications législatives nécessaires pour interdire les clauses

1 2 3

RS 251 Décision de la COMCO du 19 octobre 2015 (en allemand uniquement) relative aux plateformes de réservation hôtelière en ligne; DPC 2016, p. 67 ss; rapport annuel 2015 de la COMCO, p. 5.

Décision de la COMCO du 19 octobre 2015, DPC 2016, p. 67 ss., N 69.

3 / 22

FF 2021 2858

de parité tarifaire dans les rapports contractuels entre plateformes de réservation en ligne et établissements d'hébergement.

Selon la motion, l'interdiction des clauses de parité tarifaire a pour but de promouvoir la distribution directe sur les sites Internet des établissements d'hébergement et de renforcer ainsi la compétitivité de ces derniers. Les clauses limitant la liberté tarifaire, notamment les clauses de parité tarifaire, restreignent la liberté des établissements d'hébergement de fixer leurs prix, étant donné qu'elles leur ôtent la possibilité de se démarquer de l'offre des plateformes de réservation en ligne via une distribution directe. L'objectif principal est d'interdire les clauses limitant la liberté tarifaire dans les contrats conclus entre des plateformes de réservation en ligne et des établissements d'hébergement. Pour y parvenir, le meilleur moyen est de frapper ces clauses de nullité.

1.2

Plateformes de réservation en ligne: modèle économique et importance

Les plateformes de réservation en ligne standardisent les offres des établissements d'hébergement et les proposent aux clients finaux sur leur plateforme. Les indications fournies par le prestataire initial sont souvent complétées avec des informations supplémentaires. Les évaluations effectuées par d'anciens clients jouent un rôle majeur.

À quelques exceptions près, l'offre proposée au client final (y c. le prix) est définie par le prestataire initial. Si le client décide de réserver l'offre par le biais de la plateforme en ligne, celle-ci reçoit de la part de l'établissement d'hébergement une partie du prix de vente sous la forme d'une commission.

Ce marché est principalement caractérisé par deux aspects. Premièrement, la structure des coûts du côté des plateformes de réservation en ligne se distingue par des coûts fixes élevés et des coûts variables relativement bas. Une grande partie des dépenses de ces plateformes sont liées au développement et à l'exploitation de leur site Internet et de l'infrastructure informatique sous-jacente. Deuxièmement, dans le cadre de ce modèle économique, la plateforme de réservation en ligne agit comme intermédiaire tant auprès des établissements d'hébergement que des clients finaux, raison pour laquelle on parle de marché «biface» ou à double versant. Ce type de marché présente d'importants effets de réseau: l'attrait d'une plateforme pour les clients finaux et les établissements d'hébergement augmente avec le nombre d'acteurs présents. De telles caractéristiques peuvent favoriser une importante concentration du marché et l'émergence de monopoles naturels, permettant ainsi à quelques plateformes de réservation en ligne d'occuper une forte position sur le marché.

Les clients finaux des plateformes de réservation en ligne peuvent accéder facilement à une vision d'ensemble des différentes offres des établissements d'hébergement. Cet aperçu, conjugué au système d'évaluation par les clients et au système de paiement harmonisé, réduit les coûts de recherche et de transaction. La transparence accrue du marché peut en outre favoriser l'intensification de la concurrence entre les établissements d'hébergement et, partant, l'amélioration de la qualité et la réduction des prix.

4 / 22

FF 2021 2858

Les services fournis par les plateformes de réservation en ligne ne sont pas directement payés par le client final, mais par les établissements d'hébergement sous la forme d'une commission.

Pour les établissements d'hébergement, la visibilité des plateformes de réservation en ligne est essentielle. Ils peuvent ainsi atteindre un grand nombre de clients potentiels, notamment sur des marchés lointains, sans déployer des mesures de marketing additionnelles. Cet argument peut s'avérer décisif en particulier pour des petits prestataires indépendants ou pour des nouveaux prestataires, qui disposent souvent d'un budget marketing limité. Alors que la grande visibilité des plateformes offre aux établissements d'hébergement des avantages en matière d'acquisition de nouveaux clients, elle peut potentiellement constituer un inconvénient vis-à-vis des clients existants et des clients locaux. Les plateformes perçoivent une commission pour leurs services allant d'environ 12 à 16 % du prix de vente.

Malgré l'importance croissante des plateformes de réservation en ligne, la structure de réservation de nuitées en Suisse reste dominée par la distribution directe. En 2018, plus de la moitié des nuitées ont été réservées directement auprès des établissements d'hébergement. Une comparaison avec l'année 2013 montre toutefois que la distribution directe via le site Internet d'un établissement d'hébergement n'a pratiquement pas profité de la tendance à l'augmentation des réservations en ligne. La part de marché des réservations sur les sites Internet des hôtels n'a progressé que de façon marginale entre 2013 et 2018, en dépit du recul des canaux de distribution hors ligne. À l'inverse, la part de marché des plateformes de réservation en ligne a considérablement augmenté durant la même période. En 2018, une réservation sur quatre était faite sur une telle plateforme.

Notons que les chiffres présentés constituent une vue d'ensemble. La dépendance individuelle d'un établissement d'hébergement est essentiellement fonction de la structure de sa clientèle. Les plateformes jouent ainsi un rôle moins important pour un hôtel de vacances qui occupe une niche de marché et qui profite d'une vaste clientèle de longue date ainsi que d'une distribution directe conviviale en ligne que pour un hôtel en ville ayant une faible proportion de clients réguliers et accueillant un grand nombre d'hôtes étrangers4.

1.3

Solutions étudiées et solution retenue

Comme mentionné plus haut, les importants effets de réseau et la structure des coûts marquée par des coûts fixes élevés favorisent une forte concentration des marchés et l'émergence de monopoles naturels en faveur des plateformes de réservation en ligne.

Une intervention étatique pourrait donc être nécessaire.

Le droit des cartels en vigueur donne déjà à la COMCO un instrument permettant d'empêcher et, le cas échéant, de sanctionner également sur ces marchés les accords 4

La présentation du modèle économique est reprise de l'étude suivante: ECOPLAN, Regulierungsfolgenabschätzung zum Verbot von Preisparitätsklauseln im Vertragsverhältnis von Online-Buchungsplattformen und Beherbergungsunternehmen, rapport final du 22 avril 2020 (AIR ECOPLAN), pp. 8 à 12.

5 / 22

FF 2021 2858

en matière de concurrence non justifiés d'un point de vue économique, de même que l'exercice abusif d'une position dominante. Sur la base de la décision, toujours valable, du 19 octobre 2015 de la COMCO, les clauses paritaires au sens large de Booking.com, d'Expedia et d'HRS sont interdites en vertu du droit des cartels. Dans ses considérants, la COMCO ne s'est volontairement pas prononcée sur l'admissibilité des clauses paritaires au sens strict en vertu du droit des cartels, faute d'expérience suffisante en la matière5. L'évaluation, sous l'angle du droit de la concurrence, des relations entre les établissements d'hébergement et les plateformes de réservation en ligne pourrait par ailleurs être considérablement influencée par l'introduction des dispositions concernant le pouvoir de marché relatif (cf. art. 7 P-LCart), qui a été adoptée par le Parlement dans le cadre de son contre-projet indirect à l'initiative populaire fédérale «Stop à l'îlot de cherté ­ pour des prix équitables (initiative pour des prix équitables)»6, 7. Les conséquences exactes de cette réglementation ne peuvent pas encore être déterminées. En principe, la notion de pouvoir de marché relatif pourrait toutefois offrir de nouvelles possibilités pour empêcher, en vertu du droit des cartels, différentes pratiques en cas de relations contractuelles bilatérales créant des situations de dépendance. Indépendamment de cette réglementation, une procédure en cours ouverte par le Surveillant des prix contre Booking.com pourrait déboucher sur une réduction des taux de commission8. Selon l'analyse d'impact approfondie de la réglementation réalisée par ECOPLAN, aucune raison évidente ne justifie du point de vue de la concurrence une interdiction spécifique supplémentaire des clauses de parité tarifaire. Renoncer à toute interdiction constitue par conséquent également une option envisageable.

À l'origine, le Conseil fédéral avait prévu de mettre en oeuvre la motion 16.3902 Bischof dans le cadre du contre-projet indirect à l'initiative pour des prix équitables et de la classer dans le message correspondant. Les résultats de la consultation9 l'ont toutefois conduit à renoncer à cette idée10.Le retard qu'a connu la mise en oeuvre de la motion s'explique par son traitement sous forme d'objet distinct.

À la suite de cette décision du Conseil
fédéral, il a fallu déterminer où inscrire l'interdiction des clauses de parité tarifaire demandée par le Parlement, la motion étant muette à ce sujet. Les possibilités suivantes ont été examinées: création d'une loi spé-

5 6 7 8 9

10

Décision de la COMCO du 19 octobre 2015, DPC 2016, p. 67 ss., N 69.

Numéro d'objet 19.037, www.bk.admin.ch/ch/f/pore/vi/vis469.html.

Cf. contre-projet indirect adopté (FF 2021 757) et contre-projet indirect du Conseil fédéral, 19.037.

DPC 2017, p. 725.

Rapport de mai 2019 sur les résultats de la consultation relative à la modification de la loi sur les cartels (LCart): contre-projet indirect à l'initiative populaire fédérale «Stop à l'îlot de cherté ­ pour des prix équitables (initiative pour des prix équitables)» et mise en oeuvre de la motion 16.3902 Bischof, p. 15; www.seco.admin.ch/seco/fr/ home/wirtschaftslage---wirtschaftspolitik/wirschaftspolitik/Wettbewerbspolitik/ kartellgesetz/Fair-Preis-Initiative.html.

Cf. message du 29 mai 2019 relatif à l'initiative populaire «Stop à l'îlot de cherté ­ pour des prix équitables (initiative pour des prix équitables)» et au contre-projet indirect (modification de la loi sur les cartels), FF 2019 4665 4724.

6 / 22

FF 2021 2858

ciale ou réglementation dans la LCart, dans la loi du 20 décembre 1985 sur la surveillance des prix (LSPr)11, dans le code des obligations (CO)12 ou dans la loi fédérale du 19 décembre 1986 contre la concurrence déloyale (LCD)13.

L'avantage d'une loi spéciale est qu'elle pourrait être taillée sur mesure pour la matière à réglementer. Elle nécessiterait toutefois la mise en place d'un régime de droits et d'un système de sanctions. On risquerait alors une surréglementation, susceptible d'entraîner une fragmentation de l'ordre juridique.

La LCart a pour but d'empêcher les conséquences nuisibles d'ordre économique ou social imputables aux cartels et aux autres restrictions à la concurrence (art. 1 LCart).

Elle s'applique à toutes les branches et ne connaît donc pas de réglementation spécifique à une branche (dans le cas d'espèce: l'hôtellerie). Elle repose sur une approche incitative et ne prévoit pas d'interdictions (à l'exception de la suppression de la concurrence). Une interdiction générale, applicable dans tous les cas de figure, est par conséquent contraire à la systématique du droit des cartels. Même si la LCart ne convient pas pour accueillir l'interdiction demandée, elle pourrait toujours être applicable aux cas portant sur des clauses de parité tarifaire au sens large ou au sens strict (indépendamment de la branche concernée).

La LSPr ne prévoit pas non plus de réglementations sectorielles ni d'interdictions. Par ailleurs, l'élément déterminant pour la LSPr est le prix. C'est d'ailleurs sur ce point que repose la procédure formelle ouverte par le Surveillant des prix à l'encontre de Booking.com concernant le montant des commissions que la plateforme exige en tant qu'intermédiaire d'établissements d'hébergement14.

Le CO déclare nul tout contrat ayant pour objet une chose impossible, illicite ou contraire aux moeurs est la nullité (art. 20 CO). Dans le cas présent, il y aurait d'abord lieu d'établir le caractère illicite des clauses de parité tarifaire entre les plateformes de réservation en ligne et les établissements d'hébergement. Inscrire une disposition de ce type dans le CO serait problématique: elle serait étrangère à la partie générale du CO et trouverait difficilement sa place dans la partie spéciale. En tout état de cause, les normes impératives de droit privé requièrent une
justification particulière. En outre, la CO ne contient pas de réglementations sectorielles.

Le Conseil fédéral estime par conséquent que la LCD, malgré certaines réserves, se prête le mieux à l'introduction d'une telle interdiction. Même si, dans le cadre de la procédure de consultation, certains participants étaient d'avis que la LCD n'était pas l'endroit indiqué, les arguments en sa faveur sont prépondérants: la LCD prévoit un régime de droits et un système de sanctions civiles efficace (art. 9 à 13a). Par ailleurs, la nullité des clauses de parité tarifaire peut être réalisée dans la LCD: il suffit d'y qualifier ces clauses de conditions générales abusives. Enfin, l'art. 8 LCD qualifie déjà de déloyale l'utilisation de conditions générales abusives.

11 12 13 14

RS 942.20 RS 220 RS 241 DPC 2017, p. 725.

7 / 22

FF 2021 2858

1.4

Relation avec le programme de la législature et avec le plan financier, ainsi qu'avec les stratégies du Conseil fédéral

Le projet n'est annoncé ni dans le message du 29 janvier 2020 sur le programme de la législature 2019 à 202315 ni dans l'arrêté fédéral du 21 septembre 2020 sur le programme de la législature 2019 à 202316.

La réglementation proposée n'affecte ni le plan financier ni les stratégies du Conseil fédéral.

1.5

Classement d'interventions parlementaires

Le projet mis en consultation met en oeuvre la motion 16.3902 Bischof, raison pour laquelle son classement est proposé. L'objectif de la motion est totalement atteint par l'inscription, dans la LCD, d'une interdiction des clauses limitant la liberté tarifaire.

2

Procédure préliminaire, consultation comprise

2.1

Projet envoyé en consultation

Le Conseil fédéral a autorisé le Département fédéral de l'économie, de la formation et de la recherche à mener une procédure de consultation du 11 novembre 2020 au 26 février 2021 concernant la modification de la LCD. L'avant-projet mis en consultation prévoit d'inscrire dans un nouvel art. 8a LCD l'interdiction des clauses limitant la liberté tarifaire. En vertu de cette disposition, «agit de façon déloyale celui qui, notamment, prévoit, en tant qu'exploitant d'une plateforme en ligne de réservation de prestations d'hébergement, des conditions générales restreignant la fixation des prix par les établissements d'hébergement au moyen de clauses limitant la liberté tarifaire, en particulier de clauses de parité tarifaire».

2.2

Aperçu des résultats de la procédure de consultation

Au total, 124 avis ont été reçus dans le cadre de la procédure de consultation. Le projet du Conseil fédéral a été approuvé par la grande majorité des participants. Sur l'ensemble des cantons ayant participé à la consultation, 25 d'entre eux se sont prononcés en faveur du projet, à l'exception de Zurich. Parmi les partis politiques, Le Centre, le PS et l'UDC soutiennent le projet, tandis que le pvl et le PLR le rejettent. Une nette majorité des associations qui ont rendu un avis l'accueillent favorablement, tout comme bon nombre d'établissements d'hébergement, alors que les deux plateformes de réservation en ligne Booking.com et Expedia y sont opposées.

15 16

FF 2020 1709 FF 2020 8087

8 / 22

FF 2021 2858

Les partisans soulignent que le projet garantit la liberté économique des établissements d'hébergement, en particulier la liberté de définir leurs tarifs. Ils considèrent également qu'il renforce la compétitivité des établissements d'hébergement. Les opposants et les voix critiques jugent qu'il n'y a pas lieu d'intervenir sur le plan légal, arguant de la possibilité de lutter contre d'éventuels abus avec les instruments prévus par le droit des cartels.

Plusieurs participants appellent de leurs voeux une réglementation plus poussée. Ainsi, les cantons des Grisons et de Vaud, le PS, Le Centre, différentes associations et de nombreux établissements d'hébergement demandent également l'interdiction des clauses de parité relatives à la disponibilité et aux conditions de réservation (pour la définition de ces termes, cf. ch. 4.2). Enfin, certains participants souhaitent que l'application indirecte des clauses de parité tarifaire soit également interdite.

2.3

Appréciation des résultats de la procédure de consultation

Dans l'ensemble, le projet du Conseil fédéral mis en consultation est largement soutenu par les cantons, les partis, les associations et les établissements d'hébergement.

Même si bon nombre de participants estiment que le régime d'interdiction prévu à l'art. 8a LCD ne va pas assez loin, le Conseil fédéral est d'avis qu'une interdiction plus large serait disproportionnée, raison pour laquelle il a décidé de ne pas modifier le projet. Les raisons de cette décision sont détaillées au ch. 4.2.

3

Comparaison avec le droit étranger, notamment européen

Les clauses limitant la liberté tarifaire qui régissent les relations entre les exploitants de plateformes de réservation et les établissements d'hébergement, notamment les clauses de parité tarifaire, ne font l'objet d'aucune réglementation spécifique au niveau européen. Toutefois, le droit européen des cartels est également applicable aux cas portant sur les clauses de parité tarifaire. Aucune réglementation ou décision spécifique n'a été édictée à ce jour à l'échelle européenne.

Faute de réglementation au niveau européen, plusieurs pays ont édicté leurs propres normes légales au niveau national. La France, l'Italie, l'Autriche et la Belgique restreignent dans leur législation l'utilisation des clauses de parité tarifaire visant les établissements d'hébergement.

On trouvera ci-après une brève présentation des réglementations mises en place notamment par nos voisins et, pour l'Allemagne et la Suède, qui ne disposent d'aucune réglementation spécifique, un résumé de la jurisprudence actuelle.

9 / 22

FF 2021 2858

La France a mis en place, en août 2015, une réglementation ad hoc dans le code du tourisme (art. L. 311-5-1)17, qui dispose que l'hôtelier a la liberté de consentir à tout moment à ses clients tout rabais ou avantage tarifaire. Toute clause contraire figurant dans des contrats avec des exploitants de plateformes est interdite18. Le non-respect de cette disposition peut être puni d'une amende de 30 000 à 150 000 euros19.

L'Italie a également introduit une loi, en août 2017, interdisant aux plateformes de réservation en ligne l'utilisation de clauses de parité tarifaire. La modification correspondante figure à l'art. 1, al. 166, de la loi italienne sur la concurrence20.

La Belgique a introduit une loi ad hoc en juillet 2018, qui interdit l'utilisation de clauses de parité tarifaire21.

En Autriche, depuis janvier 2017, la loi fédérale contre la concurrence déloyale interdit les clauses de parité tarifaire. Cette mesure, qui s'applique aux exploitants de plateformes de réservation en ligne en relation d'affaires avec des établissements d'hébergement, est citée dans la liste des pratiques commerciales déloyales en toutes circonstances et jugées agressives22. Par ailleurs, la loi autrichienne sur l'indication des prix règle la conséquence juridique, à savoir la nullité, des clauses limitant la liberté tarifaire ou des clauses de meilleur prix figurant dans les contrats conclus entre les exploitants de plateformes de réservation et les établissements d'hébergement23.

17

18

19 20

21 22

23

Introduite par l'art. 133 de la loi no 2015-990 du 6 août 2015 pour la croissance, l'activité et l'égalité des chances économiques (dite «loi Macron»), sachant que l'art. L. 311-5 a été intégré dans le code du tourisme. Cf. www.legifrance.gouv.fr; Droit national en vigueur > Textes consolidés> Loi no 2015-990 du 6 août 2015 pour la croissance, l'activité et l'égalité des chances économiques.

L. 311-5-1 du code du tourisme: «Le contrat entre un hôtelier et une personne physique ou morale exploitant une plateforme de réservation en ligne portant sur la location de chambres d'hôtel aux clients ne peut être conclu qu'au nom et pour le compte de l'hôtelier et dans le cadre écrit du contrat de mandat mentionné aux articles 1984 et suivants du code civil. ­ Nonobstant le premier alinéa du présent article, l'hôtelier conserve la liberté de consentir au client tout rabais ou avantage tarifaire, de quelque nature que ce soit, toute clause contraire étant réputée non écrite».

Art. L. 311-5-3, al. 1, du code du tourisme.

Art. 1, al. 166, de la Legge annuale per il mercato e la concorrenza: «E' nullo ogni patto con il quale l'impresa turistico-ricettiva si obbliga a non praticare alla clientela finale, con qualsiasi modalità' e qualsiasi strumento, prezzi, termini e ogni altra condizione che siano migliorativi rispetto a quelli praticati dalla stessa impresa per il tramite di soggetti terzi, indipendentemente dalla legge regolatrice del contratto».

Cf. www.gazzettaufficiale.it/eli/id/2017/08/14/17G00140/sg.

Loi relative à la liberté tarifaire des exploitants d'hébergements touristiques dans les contrats conclus avec les opérateurs de plateformes de réservation en ligne. Abrufbar unter: www.ejustice.just.fgov.be/eli/loi/2018/07/30/2018031580/justel.

§ 1a, al. 4, en relation avec le ch. 32 de l'annexe öUWG: «Als unter allen Umständen unlautere Geschäftspraktik gilt: Das Verlangen eines Betreibers einer Buchungsplattform gegenüber einem Beherbergungsunternehmen, dass dieses auf anderen Vertriebswegen inklusive seiner eigenen Website keinen günstigeren Preis oder keine anderen günstigeren Bedingungen als auf der Buchungsplattform anbieten darf».

§ 7 öPrAG: «... Die Preise werden vom Gastgewerbetreibenden frei festgelegt und dürfen nicht durch Preisbindungs- oder Bestpreisklauseln durch Buchungsplattformbetreiber eingeschränkt werden. Derartige Klauseln in Verträgen zwischen Gastgewerbetreibenden und Buchungsplattformbetreibern sind absolut nichtig ...».

10 / 22

FF 2021 2858

En Allemagne, il n'existe pas pour l'instant d'interdiction légale des clauses de parité tarifaire, au sens large ou au sens strict. Toutefois, l'Office fédéral des ententes (Bundeskartellamt) a engagé des procédures à l'encontre des plateformes de réservation en ligne HRS et Booking.com pour infraction au droit des cartels. Dans le cas de HRS, il a interdit en 2013 l'utilisation des clauses de meilleur prix, une décision confirmée par le Tribunal régional supérieur de Düsseldorf (Oberlandesgericht). Les clauses de meilleur prix utilisées par HRS obligeaient les hôtels liés par contrat à toujours proposer à la plateforme les meilleurs tarifs tout en leur interdisant de les offrir sur leur propre site Internet et sur d'autres canaux de distribution24. Même si l'expression «clauses de parité tarifaire au sens large» n'a été utilisée ni par l'Office fédéral des ententes ni par le Tribunal, c'était bel et bien cela qui était en jeu. Dans le cas de Booking.com, la Cour fédérale de justice (Bundesgerichtshof) a décidé en mai 2021 que les clauses de meilleur prix au sens strict utilisées par Booking.com jusqu'en février 2016 étaient contraires au droit des cartels25. Il s'agissait d'accords complémentaires au contrat principal entre Booking.com et les établissements d'hébergement, qui étaient interdits en vertu de l'art. 101 du Traité sur le fonctionnement de l'Union européenne. Compte tenu de ces décisions, on peut dire que les clauses de parité tarifaire au sens strict et au sens large sont interdites en Allemagne.

En Suède, le Tribunal des brevets et des marchés a interdit l'utilisation de clauses de parité tarifaire au sens strict. Cette décision a toutefois été annulée par la juridiction d'appel, qui a estimé que les conséquences anticoncurrentielles des clauses de parité tarifaire de Booking.com sur le marché n'avaient pas été démontrées par l'instance précédente26.

4

Présentation du projet

4.1

Réglementation proposée

Comme indiqué au ch. 1.3, il est prévu d'inscrire dans la LCD l'interdiction des clauses de parité tarifaire (nouvel article 8a). La nouvelle disposition correspond au projet mis en consultation27. La nullité des clauses de parité tarifaire visée par l'auteur de la motion peut être réalisée dans la LCD: il suffit d'y qualifier d'abusives ces clauses des conditions générales. Le caractère déloyal tient au fait que les clauses de parité tarifaire des plateformes de réservation restreignent la liberté des établissements d'hébergement de fixer les prix, ce qui crée un déséquilibre injustifié par rapport aux droits et aux obligations des établissements d'hébergement parties au contrat. Dans le cadre de la procédure de consultation, Booking.com, notamment, a contesté l'existence d'un tel déséquilibre. Pourtant, les clauses limitant la liberté tarifaire restreignent souvent la capacité des établissements d'hébergement de déterminer librement 24 25 26 27

Arrêt du 20 décembre 2013, B 9 ­ 66/10; confirmé par le Tribunal régional supérieur de Düsseldorf, arrêt du 9 janvier 2015, VI ­ Kart 1/14 (V).

Décision du 18 mai 2021, KVR 54/20.

https://kromannreumert.com/en/news/bookingcom-victorious-in-swedish-appealscase-over-mfn-clauses Seul le titre a été modifié. En qualifiant d'abusives les clauses limitant la liberté tarifaire, le titre signale que l'art. 8a est une concrétisation de l'art. 8.

11 / 22

FF 2021 2858

leurs prix, ce qui engendre un déséquilibre dans leurs rapports contractuels avec les plateformes en ligne. Le caractère déloyal réside donc ­ à l'instar de l'art. 8 LCD, qui se limite au consommateur ­ dans le fait que des conditions générales de ce type ont pour objet une chose illicite. Le caractère déloyal et l'illicéité de l'objet du contrat entraînent, en vertu de l'art. 20 CO, la nullité des clauses concernées.

Partant, le projet inscrit dans un nouvel art. 8a LCD l'interdiction des clauses limitant la liberté tarifaire dans les contrats conclus entre des plateformes de réservation en ligne et des établissements d'hébergement. Cette disposition prévoit que tout exploitant de plateforme qui restreint dans ses conditions générales la liberté des établissements d'hébergement de fixer leurs prix au moyen de clauses limitant la liberté tarifaire agit de manière déloyale. La nouvelle réglementation respecte le libellé de la motion ­ si ce n'est qu'elle englobe tous les établissements d'hébergement au lieu de se limiter aux hôtels et qu'elle utilise le terme générique «clause limitant la liberté tarifaire» (cf. ch. 5). Elle n'inclut pas d'autres clauses telles que les clauses de parité de disponibilité ou les clauses de parité de conditions de réservation, qui ont également fait l'objet de l'enquête de la COMCO (cf. ch. 4.2).

L'art. 8 LCD qualifie de déloyale l'utilisation de conditions générales abusives entre des entreprises et des consommateurs. Il considère abusives les conditions générales «qui, en contradiction avec les règles de la bonne foi prévoient, au détriment du consommateur, une disproportion notable et injustifiée entre les droits et les obligations découlant du contrat». En l'occurrence, toutefois, les conditions générales sont conclues entre professionnels, donc entre deux entreprises. Pour que des clauses de parité tarifaire soient considérées comme des conditions générales déloyales, il y a deux moyens en théorie. Le premier est d'étendre l'art. 8 LCD à toutes les relations d'affaires (en incluant du même coup les clauses abusives entre entreprises) et de prévoir une condition supplémentaire pour les clauses de parité tarifaire régissant les relations entre les plateformes de réservation en ligne et les établissements d'hébergement. Le deuxième est de créer une nouvelle
disposition légale qualifiant d'abusives, et donc de déloyales, les clauses de parité tarifaire figurant dans les conditions générales des plateformes de réservation en ligne et destinées aux établissements d'hébergement.

La première option, à savoir l'extension générale de l'art. 8 LCD à toutes les relations commerciales entre entreprises, est plus rigoureuse du point de vue de la systématique du droit et de la cohérence. Dans le cadre de la consultation, le pvl s'est exprimé en faveur de cette option pour le cas où le Conseil fédéral décidait de maintenir le projet en l'état. Le Conseil national a toutefois rejeté il y a peu (en décembre 2017) l'idée d'une telle extension en décidant de classer l'initiative parlementaire Flach28. Dès lors, la deuxième option s'impose: l'introduction d'un nouvel art. 8a LCD aura pour effet de déclarer déloyales les clauses de parité tarifaire introduites par les plateformes de réservation en ligne dans leurs conditions générales à l'intention des établissements d'hébergement. L'avantage de la deuxième option réside dans la mise en oeuvre fidèle de la motion en plus des points susmentionnés. La limitation de la disposition à certaines branches pose cependant problème du point de vue de la systématique du droit.

La LCD s'applique en effet à l'ensemble de l'économie, aussi les éléments constitutifs

28

Iv. pa. 14.440 Flach («Article 8 LCD. Conditions commerciales abusives») du 23 septembre 2014; BO 2017 N 2179.

12 / 22

FF 2021 2858

d'une concurrence déloyale se limitant à une seule branche lui sont-ils en principe étrangers.

4.2

Mise en oeuvre

Inscription de l'interdiction des clauses de parité tarifaire dans un nouvel art. 8a LCD À l'instar de l'art. 8 LCD, le nouvel art. 8a LCD est une disposition de droit civil.

Partant, l'application du droit s'appuie sur l'éventail des dispositions civiles prévu dans la LCD. Les voies de droit visées à l'art. 9, al. 1 et 2, et les actions en réparation prévues à l'art. 9, al. 3, sont disponibles. Pour les clauses limitant la liberté tarifaire ayant un caractère déloyal, il n'y a pas de sanction pénale telle que prévue à l'art. 23.

Juridiquement, ces clauses sont par contre frappées de nullité selon la doctrine dominante du fait de leur illicéité (art. 20 CO)29. Le caractère déloyal réside dans le déséquilibre qu'introduit le libellé de ces conditions générales entre les droits et les obligations contractuelles des exploitants de plateformes et des établissements d'hébergement.

S'agissant du champ d'application territorial de l'art. 8a, celui-ci s'applique, à l'instar des autres dispositions de la LCD, lorsque le marché suisse est concerné (cf. art. 136 de la loi fédérale du 18 décembre 1987 sur le droit international privé [LDIP]30), notamment lorsque l'établissement d'hébergement en question se trouve en Suisse. Par contre, le contrat conclu entre ce dernier et l'exploitant de la plateforme est régi par le droit désigné aux art. 116 et 117 LDIP. Ce droit découle en général des conditions générales de l'exploitant de la plateforme. Si le contrat est régi par un droit étranger, la disposition pertinente de ce droit s'applique au lieu de l'art. 20 CO. Dans le cas, peu probable, où le droit en question admettrait l'utilisation de clauses illicites au sens de l'art. 8a LCD, cette règlementation ne serait toutefois pas applicable en Suisse en vertu de l'art. 17 s. LDIP.

Conformément à l'art. 8a LCD, a qualité pour agir quiconque, en tant que concurrent, fournisseur ou acheteur, subit une atteinte dans ses intérêts économiques ou est menacé d'une telle atteinte en raison de clauses limitant la liberté tarifaire (art. 9, al. 1, et 10, al. 1, en relation avec l'art. 2 LCD). Les associations professionnelles et les associations économiques ont également qualité pour agir (art. 10, al. 2, let. a, LCD).

Il incombe donc aux acteurs économiques privés, principalement les établissements d'hébergement, les concurrents et les associations professionnelles et économiques concernés, de se défendre contre ce type de clauses. Lorsque des intérêts collectifs 29

30

Cf. Heiss in: Reto Heizmann/ Leander Loacker, Bundesgesetz gegen den unlauteren Wettbewerb, Zurich / Saint-Gall, 2018, art. 8 LCD N 242 ss. avec autres renvois; cf. également message du 2 septembre 2009 concernant la modification de la loi fédérale contre la concurrence déloyale, FF 2009 5539, 5568; Florent Thouvenin in: Reto M. Hilty/Reto Arpagaus, Basler Kommentar Bundesgesetz gegen den unlauteren Wettbewerb (UWG), Bâle, 2013, art. 8 LCD N 144; Thomas Probst in: Peter Jung/Philippe Spitz, Stämpflis Handkommentar Bundesgesetz gegen den unlauteren Wettbewerb (UWG), Berne, 2016, art. 8 LCD N 291.

RS 291

13 / 22

FF 2021 2858

sont en jeu notamment, la Confédération peut également intenter une action (art. 10, al. 3, LCD). La compétence internationale des tribunaux suisses est régie par les dispositions pertinentes de la LDIP et de la Convention de Lugano du 30 octobre 200731.

Pas d'extension ou de restriction de l'interdiction ni de limitation dans le temps Lors de la consultation, de nombreux participants ont demandé que la réglementation proposée par le Conseil fédéral inclue également les clauses de parité relatives à la disponibilité et aux conditions de réservation. Les clauses de parité de disponibilité règlent l'écart admis entre les offres publiées sur les plateformes de réservation en ligne et celles proposées sur d'autres canaux de vente en ce qui concerne le type et le nombre de chambres. Les clauses de parité des conditions de réservation portent quant à elles sur l'égalité des offres des plateformes de réservation en ligne et celles d'autres canaux de vente. Cette expression générique concerne souvent différents aspects et points contractuels, comme les conditions d'annulation, mais aussi les prestations complémentaires incluses, telles que le petit-déjeuner, l'accès sans fil à Internet (WiFi) ou des bons de réduction pour les remontées mécaniques locales. La motion demande uniquement l'interdiction des clauses de parité tarifaire, mais pas d'autres clauses de parité comme celles relatives à la disponibilité et aux conditions de réservation. L'extension de la réglementation irait par conséquent au-delà de la volonté de l'auteur de la motion et du Parlement. Qui plus est, les clauses de parité de disponibilité et des conditions de réservation restreignent moins fortement la liberté des établissements d'hébergement que les clauses de parité tarifaire. Selon l'analyse approfondie d'impact de la réglementation réalisée par ECOPLAN, un régime d'interdiction incluant des clauses de parité de disponibilité et de parité des conditions de réservation renforcerait la liberté des établissements d'hébergement de définir leurs offres, du moins sur le plan purement juridique, mais il ne devrait pas produire d'effets notables en pratique32. Par conséquent, l'extension du régime d'interdiction prévu à l'art. 8a LCD paraît disproportionnée.

Plusieurs participants à la consultation ont aussi demandé que l'application
indirecte d'une parité tarifaire soit interdite. On entend par là principalement des mesures fondées sur des algorithmes, qui ont pour but de dissuader les établissements d'hébergement de proposer des prix inférieurs à ceux figurant sur la plateforme de réservation en ligne, par exemple au moyen d' un algorithme de classement qui définit l'ordre d'apparition des établissements d'hébergement dans les résultats de recherche. Les plateformes de réservation en ligne pourraient ainsi faire en sorte de rétrograder dans le classement les établissements de recherche qui ne respectent pas la parité tarifaire au sens strict. L'étude d'ECOPLAN souligne toutefois que l'interdiction de telles pratiques devrait être formulée de manière tellement large qu'elle pourrait créer une grande insécurité juridique. C'est pourquoi un régime d'interdiction allant plus loin que l'interdiction proposée n'est pas envisageable33. Dans le cadre d'une procédure civile, il serait difficile de prouver que la rétrogradation d'un établissement d'hébergement dans le classement de la plateforme en ligne est effectivement due au non-

31 32 33

RS 0.275.12 AIR ECOPLAN, pp. 3, 42, 43 et 46.

AIR ECOPLAN, pp. 3, 46 et 47.

14 / 22

FF 2021 2858

respect de la clause limitant la liberté tarifaire et non à des raisons objectives et légitimes, comme une baisse de la qualité des services. En raison de l'insécurité juridique qui en découlerait et des difficultés d'application , il n'y a pas lieu d'étendre l'interdiction prévue à l'art. 8a LCD.

Certains participants ont en outre demandé que l'interdiction des clauses limitant la liberté tarifaire ne soit pas restreinte aux seules relations entre les plateformes de réservation en ligne et les établissements d'hébergement, mais soit étendue à tous les secteurs. Le Conseil fédéral a décidé de ne pas retenir cette extension de l'interdiction, étant donné que la mise en oeuvre de la motion répond à une demande spécifique du secteur de l'hébergement. On ne dispose par ailleurs pas de données empiriques pour déterminer si les clauses de parité tarifaire constituent un problème dans les autres secteurs, ce qui pourrait justifier une réglementation. Interdire les clauses limitant la liberté tarifaire également dans les relations entre une entreprise et ses franchises, comme l'a demandé le groupe Expedia durant la consultation, n'est pas non plus judicieux. En effet, les franchises sont une forme de coopération particulièrement stricte, qui est difficilement comparable avec les relations, relativement souples, entre une plateforme de réservation en ligne et un établissement d'hébergement. La proposition du groupe Expedia d'appliquer l'interdiction des clauses limitant la liberté tarifaire uniquement aux plateformes de réservation en ligne détenant une part de marché d'au moins 30 % n'a pas non plus été retenue. Un tel critère quantitatif, propre au droit des cartels, est étranger à la LCD, dont le but est de garantir une concurrence loyale et non faussée.

Enfin, la demande d'economiesuisse de limiter la réglementation à dix ans n'a pas non plus été prise en considération, afin de garantir la systématique de la loi et la sécurité juridique. La LCD ne sera pas non plus complétée par une clause de réexamen prévoyant que les conséquences de la réglementation soient analysées trois ans après son entrée en vigueur, comme le demandait le groupe Expedia. Le Conseil fédéral n'exclut pas pour autant un réexamen du nouvel art. 8a LCD, mais un tel réexamen devra intervenir après un certain temps.

5

Commentaire de la nouvelle disposition

Les termes utilisés à l'art. 8a LCD sont commentés ci-dessous.

Exploitant d'une plateforme en ligne (exploitant de plateforme) Le nouvel article s'applique aux exploitants de plateformes. Il découle du contexte que seuls ceux qui gèrent la réservation en ligne de nuitées dans des hôtels ou d'autres établissements d'hébergement sont visés. Ces portails de réservation permettent aux clients de sélectionner et de réserver en ligne des chambres à partir de la liste des établissements d'hébergement mentionnés. Une relation commerciale est ainsi établie entre des exploitants de plateformes et des établissements d'hébergement. Les exploi-

15 / 22

FF 2021 2858

tants de plateformes proposent des prestations d'intermédiaires entre des établissements d'hébergement et des clients potentiels34. Les plateformes comparatives qui nouent une relation d'affaires directe avec des établissements d'hébergement relèvent également du champ d'application de la disposition.

Établissements d'hébergement À la différence de ce que prévoit la motion, l'art. 8a LCD protège tous les établissements d'hébergement (y c. les auberges de jeunesse et les prestataires de services de location de logements de vacances ou d'appartements), et non uniquement les établissements hôteliers classiques. Cette extension s'impose notamment pour des raisons d'égalité juridique et de politique de la concurrence. Nombreux sont les établissements d'hébergement qui estiment être dans une situation de dépendance et se sentent contraints de figurer sur des plateformes de réservation en ligne pour répondre à la flexibilisation actuelle du secteur touristique. Les micro-, petites et moyennes entreprises sont exposées de manière disproportionnée à d'éventuelles pratiques déloyales d'exploitants de plateformes. Elles aussi doivent être protégées par la nouvelle disposition.

Conditions générales Les relations commerciales entre exploitants de plateformes et établissements d'hébergement sont réglées par des contrats-types dont les conditions générales contiennent souvent des clauses limitant la liberté tarifaire. Par conditions générales, on entend les dispositions contractuelles formulées à l'avance pour un grand nombre de conclusions de contrat et non négociables. Pour le Tribunal fédéral, «les conditions contractuelles générales ou éléments contractuels préétablis sont des dispositions contractuelles formulées à l'avance, standardisées et destinées à des contrats-types pour particuliers, qui visent notamment à rationaliser la conclusion de contrats [traduction]35». En fin de compte, les conditions générales réunissent trois critères caractéristiques: il s'agit de dispositions contractuelles formulées à l'avance, applicables à une multitude de contrats et établies par leur auteur à l'intention de l'autre partie contractante36. Les conventions individuelles s'opposent aux dispositions contractuelles formulées à l'avance. Elles ne relèvent pas de l'art. 8a LCD, à moins d'intégrer des clauses formulées à
l'avance qui n'ont pas été négociées individuellement. Selon la doctrine, la forme concrète que prennent les conditions générales (abusives) ne joue aucun rôle, qu'il s'agisse d'indications dans le contrat ou d'une annexe à celui-ci, sous forme électronique ou imprimée37.

34 35 36 37

Pour de plus amples informations sur la notion et le modèle économique des plateformes de réservation, voir la décision de la COMCO du 19 octobre 2015, p 8 ss.; www.weko.admin.ch/weko/fr/home/praxis/dernieres-decisions.html, DPC 2016, p. 71 s.

ATF 4C.282/2003 du 15 décembre 2003, consid. 3.1; ATF 4A_47/2015 du 2 juin 2015, consid. 5.1 Heiss in: Reto Heizmann / Leander Loacker, Bundesgesetz gegen den unlauteren Wettbewerb, Zurich / Saint-Gall, 2018, art. 8 LCD N 73.

Thomas Probst, in: Peter Jung / Philippe Spitz, Bundesgesetz gegen den unlauteren Wettbewerb, 2. A., Berne, 2016, art. 8 LCD N 236; Helmut Heiss in: Reto Heizmann / Leander Loacker, Bundesgesetz gegen den unlauteren Wettbewerb, Zurich / Saint-Gall, 2018, art. 8 LCD N 74.

16 / 22

FF 2021 2858

Clauses limitant la liberté tarifaire, notamment clauses de parité tarifaire L'expression «clauses limitant la liberté tarifaire» est générique. Elle comprend les clauses de parité tarifaire (cf. définition des clauses de parité tarifaire au sens large et au sens strict au ch. 1.1) et les clauses par lesquelles un établissement d'hébergement s'engage à ne pas proposer un prix inférieur à celui imposé par l'exploitant de la plateforme. L'interdiction est générale, que les clauses soient larges ou restreintes. Les clauses limitant la liberté tarifaire qui interdisent aux établissements d'hébergement d'offrir sur leur propre site ou à travers d'autres canaux de distribution des prix inférieurs à ceux de la plateforme de réservation en ligne seront à l'avenir déloyales. Le caractère déloyal réside dans la teneur de ces clauses, qui restreignent la liberté des établissements d'hébergement de fixer les prix et induisent par conséquent un déséquilibre entre les droits contractuels et les obligations contractuelles régissant les relations entre des exploitants de plateformes et des établissements d'hébergement. L'illicéité de telles clauses a pour conséquence juridique leur nullité (art. 8a LCD en relation avec l'art. 20 CO), conformément à la doctrine dominante relative à l'art. 8 LCD38. La nouvelle disposition s'applique uniquement aux clauses limitant la liberté tarifaire. Elle ne vise pas les autres clauses usuelles, telles que les clauses de disponibilité ou les clauses de parité de conditions de réservation, qui ont également fait l'objet de l'enquête de la COMCO. Elle respecte en cela le libellé de la motion (cf. ch. 4.2).

Restriction à la liberté de fixer les prix Les clauses limitant la liberté tarifaire ont pour caractéristique de limiter la liberté des établissements d'hébergement de fixer leurs prix. Répétons-le, elles créent un déséquilibre entre les droits et les obligations, élément constitutif de conditions générales abusives au sens de l'art. 8 LCD. C'est pourquoi ces clauses qui lient exploitants de plateformes et établissements d'hébergement sont déclarées déloyales. À l'avenir, les établissements d'hébergement pourront proposer des tarifs inférieurs sur leur propre site Internet et sur d'autres canaux de distribution. L'interdiction soutient ainsi la liberté économique des établissements d'hébergement, car elle accroît leur marge de manoeuvre. Elle restreint en revanche la liberté économique des exploitants de plateformes.

6

Conséquences

6.1

Remarques liminaires

Les conséquences de l'interdiction de clauses de parité tarifaire sont brièvement présentées ci-après. Pour une description détaillée des effets économiques de cette interdiction, on consultera l'analyse d'impact de la réglementation réalisée par ECOPLAN39.

38 39

Cf. note 29.

AIR ECOPLAN pp. 25­32.

17 / 22

FF 2021 2858

Pour déterminer l'ensemble des conséquences qu'entraînerait une interdiction des clauses de parité tarifaire au sens strict, il faut principalement savoir dans quelle mesure une telle interdiction aurait pour effet d'accentuer la différenciation des prix entre les canaux de distribution. En théorie, l'interdiction accroîtrait les incitations à différencier les prix: non seulement elle rendrait contractuellement conforme une différenciation tarifaire par les établissements d'hébergement en leur permettant de majorer les prix sur les plateformes de réservation par rapport à leur propre site, mais elle encouragerait aussi la différenciation entre les plateformes. Toutefois, certains facteurs font que la différenciation des prix ne devrait pas augmenter considérablement.

Il semble en effet qu'un nombre non négligeable d'établissements d'hébergement ne respecte pas ou pas complètement les clauses de parité tarifaire au sens strict et qu'ils ne devraient donc pas différencier leurs prix de manière notable. De plus, il semblerait qu'un grand nombre d'établissements d'hébergement ne souhaite pas différencier leurs prix entre les différents canaux de distribution. Cette forme de parité tarifaire volontaire est justifiée par le fait que des éventuelles différences de prix pourraient dissuader des clients potentiels et fâcher les clients ayant déjà effectué une réservation.

La gestion de prix différents sur les divers canaux de réservation occasionne au surplus une certaine charge. L'expérience des pays voisins sur les conséquences d'une interdiction des clauses de parité tarifaire au sens strict soutient cette argumentation.

L'exploitation effective par les établissements d'hébergement de cette nouvelle marge de manoeuvre en matière de fixation des prix dépendra entre autres de la réaction des plateformes de réservation en ligne. Celles-ci pourront en effet réagir directement ou indirectement par le biais de l'algorithme de classement, qui définit les établissements d'hébergement qui apparaissent dans les résultats de recherche et leur ordre d'apparition, et qui décide ainsi de la visibilité d'une offre sur une plateforme. Des éléments indiquent que le non-respect de la parité tarifaire au sens strict peut engendrer une rétrogradation dans le classement. Économiquement, les plateformes de réservation en
ligne ont intérêt à privilégier dans les résultats de recherche les offres ayant une probabilité de réservation élevée. Ce mécanisme a toutefois pour effet (indirect) de faire dépendre le positionnement dans le classement de l'offre proposée via la distribution directe. Si celle-ci est plus attrayante que l'offre sur la plateforme, le nombre de réservations par le biais de cette dernière a tendance à diminuer, ce qui engendre une rétrogradation de l'établissement d'hébergement concerné dans les résultats de recherche. Il est donc fort probable que les mécanismes de classement des plateformes de réservation en ligne continueront de restreindre considérablement la liberté des établissements d'hébergement de fixer leurs prix, même en cas d'interdiction des clauses de parité tarifaire au sens strict.

Il faut encore se demander dans quelle mesure les offres plus attrayantes sur le site Internet d'un établissement d'hébergement favorisent un plus grand nombre de réservations via la distribution directe plutôt que par le biais des plateformes de réservation en ligne. L'ampleur de l'effet de substitution dépend fortement de la connaissance qu'a le client potentiel de l'offre plus attrayante proposée en réservation directe. Les plateformes sont aussi appréciées des utilisateurs pour leur convivialité. De plus, les clients de pays lointains privilégient souvent les plateformes de réservation en ligne, dont les offres standardisées sont disponibles en plusieurs langues. Par conséquent, l'effet est tendanciellement plus faible dans les établissements qui accueillent un grand nombre d'hôtes étrangers. De nombreux facteurs indiquent que des prix plus 18 / 22

FF 2021 2858

avantageux proposés via la distribution directe n'engendrent pas automatiquement un transfert des réservations depuis les plateformes de réservation en ligne vers la distribution directe. Il n'est donc pas sûr que l'interdiction des clauses de parité tarifaire permettra de renforcer la distribution directe.

6.2

Conséquences pour la Confédération

Le projet n'a pas de conséquences sur les finances ou l'état du personnel de la Confédération. Il s'agit d'une disposition de droit civil, dont la mise en oeuvre incombe en première ligne aux acteurs économiques privés concernés.

6.3

Conséquences pour les cantons et les communes, ainsi que pour les centres urbains, les agglomérations et les régions de montagne

Les conséquences pour les communes, les cantons, les centres urbains, les agglomérations et les régions de montagne dépendront des conséquences de l'interdiction pour les acteurs concernés. Celle-ci ne devrait pas avoir un impact notable (cf. ci-dessous).

6.4

Conséquences économiques

Les explications ci-après concernant les répercussions sur les différents acteurs du marché sont un résumé des conclusions de l'analyse d'impact de la réglementation réalisée par ECOPLAN40.

Établissements d'hébergement Même en cas d'intensification modérée de la différenciation des prix, la distribution directe en ligne ne devrait pas gagner d'importantes parts de marché face aux plateformes de réservation. Cela ne signifie pas pour autant qu'aucun établissement d'hébergement ne profitera de l'interdiction légale: si certaines conditions sont remplies, un établissement d'hébergement bien positionné pourrait bénéficier d'un certain report vers les canaux de réservation directs. Le transfert des parts de marché ne sera vraisemblablement pas assez important pour engendrer une dynamique concurrentielle qui se traduirait par une baisse des taux de commission. Il est par conséquent peu probable que l'interdiction prévue permette à d'autres établissements d'hébergement de profiter d'une diminution des commissions.

Plateformes de réservation en ligne Pour les plateformes de réservation, les conséquences d'une interdiction des clauses de parité tarifaire devraient être l'inverse de celles des établissements d'hébergement

40

AIR ECOPLAN pp. 33­35.

19 / 22

FF 2021 2858

à de nombreux égards. Sous l'effet de l'interdiction, l'offre disponible sur les plateformes de réservation sera davantage concurrencée par la distribution directe en ligne.

La position concurrentielle avantageuse qu'occupent les plateformes ne dépend pas principalement de l'existence de clauses de parité tarifaire: d'autres facteurs comme les effets de réseau, la convivialité et la stratégie de marketing jouent probablement un rôle bien plus important. La dynamique créée par l'interdiction ne devrait donc pas menacer sérieusement la position des plateformes de réservation. Il n'est en revanche pas exclu que le léger accroissement de la distribution directe engendre une certaine baisse du chiffre d'affaires et des bénéfices de ces plateformes.

Clients finaux En cas d'interdiction des clauses de parité tarifaire, les clients finaux seraient potentiellement touchés de deux façons. D'une part, l'interdiction pourrait avoir une incidence sur les prix finaux, sans qu'il soit possible de déterminer clairement si les prix vont évoluer et dans quel sens. Théoriquement, l'effet de l'interdiction devrait être faible. Il faut en outre tenir compte de l'impact qu'aura l'effet de substitution entre la distribution directe en ligne et les plateformes de réservation. Cet effet devrait cependant être limité, ce qui signifie que seule une partie des clients finaux profiteraient d'une éventuelle baisse des prix en cas de réservations directes. À l'inverse, en cas de hausse des prix sur les plateformes de réservation, la plupart des utilisateurs initiaux desdites plateformes accepteraient de facto de payer des tarifs plus élevés. Dès lors, l'effet escompté de l'interdiction sur les clients finaux devrait être encore moins marqué.

Par ailleurs, une interdiction des clauses de parité tarifaire pourrait influer sur les coûts de recherche. En effet, comme elle devrait engendrer une légère hausse de la différenciation des prix, les clients qui accordent une grande importance au prix devront consacrer plus de temps à la recherche de l'offre la plus attrayante. Les conséquences devraient cependant être relativement modeste grâce à l'utilisation de métamoteurs de recherche.

6.5

Conséquences sociales

Le projet ne devrait avoir aucune conséquence pour la société.

6.6

Conséquences environnementales

Le projet ne devrait avoir aucune conséquence sur l'environnement.

20 / 22

FF 2021 2858

7

Aspects juridiques

7.1

Constitutionnalité

Aux termes de l'art. 96, al. 2, let. b, de la Constitution (Cst.)41, le Conseil fédéral prend des mesures afin de lutter contre la concurrence déloyale. La législation en matière de droit civil relève de la compétence de la Confédération (art. 122 Cst.). Dans le but de garantir une concurrence équitable, le législateur peut notamment, en vertu de l'art. 96, al. 2, let. b, Cst., interdire l'utilisation de clauses abusives, comme les clauses de parité tarifaire. Contrairement à l'avis exprimé par Booking.com lors de la consultation, le nouvel art. 8a LCD se fonde ainsi sur une base constitutionnelle suffisante.

7.2

Compatibilité avec les obligations internationales de la Suisse

Le projet n'a aucune conséquence sur les obligations internationales de la Suisse.

7.3

Forme de l'acte à adopter

Conformément à l'art. 164, al. 1, Cst., toutes les dispositions importantes qui fixent des règles de droit doivent être édictées sous la forme d'une loi fédérale. Le présent projet respecte cette règle.

7.4

Frein aux dépenses

Le projet n'est pas soumis au frein aux dépenses prévu à l'art. 159, al. 3, let. b, Cst., car il ne prévoit ni subvention, ni crédit d'engagement, ni plafond de dépenses.

7.5

Délégation de compétences législatives

Le nouvel art. 8a LCD ne délègue aucune compétence législative.

41

RS 101

21 / 22

FF 2021 2858

22 / 22