FF 2022 www.droitfederal.admin.ch La version électronique signée fait foi

21.501 Initiative parlementaire Contre-projet indirect à l'initiative pour les glaciers.

Zéro émission nette de gaz à effet de serre d'ici à 2050 Rapport de la Commission de l'environnement, de l'aménagement du territoire et de l'énergie du Conseil national du 25 avril 2022

Madame la Présidente, Mesdames et Messieurs, Par le présent rapport, nous vous soumettons le projet de loi fédérale relative aux objectifs en matière de protection du climat ainsi que les projets de deux arrêtés fédéraux sur le financement de l'encouragement de technologies et de processus innovants et sur le financement du programme extraordinaire de remplacement des installations de chauffage. Nous transmettons simultanément les projets au Conseil fédéral pour avis.

La commission propose d'adopter le projet de loi fédérale et les deux arrêtés fédéraux.

25 avril 2022

Au nom de la commission: Le président, Jacques Bourgeois

2022-1668

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Condensé La Commission de l'environnement, de l'aménagement du territoire et de l'énergie du Conseil national (CEATE-N) souhaite opposer un projet de loi à l'initiative populaire «Pour un climat sain (initiative pour les glaciers)». En plus de l'objectif de zéro émission nette d'ici à 2050, le projet prévoit des objectifs intermédiaires et des valeurs indicatives. La décarbonation de l'industrie et du parc immobilier bénéficie d'un encouragement de respectivement 1,2 milliard de francs au total durant six ans et 2 milliards de francs au total durant dix ans. La Confédération, les cantons et les communes sont appelés à jouer un rôle de modèle en matière de protection du climat.

L'initiative pour les glaciers a été déposée à la fin du mois de novembre 2019. La CEATE-N a décidé de lui présenter un contre-projet indirect. À cet effet, elle a déposé une initiative parlementaire en octobre 2021, à laquelle son homologue du Conseil des États a donné suite en novembre 2021. Le présent projet, que la CEATE-N a adopté le 25 avril 2022, a la forme d'une loi-cadre, dont les objectifs doivent être mis en oeuvre à travers des lois définissant des mesures, en premier lieu de la loi sur le CO2. Le Conseil fédéral est chargé de soumettre des propositions suffisamment tôt.

Le projet reprend la préoccupation centrale de l'initiative pour les glaciers, à savoir l'abaissement des émissions de gaz à effet de serre de la Suisse à zéro net d'ici à 2050.

En outre, il prévoit des objectifs intermédiaires pour 2040 ainsi que pour les périodes 2031­2040 et 2041­2050, et définit des valeurs indicatives pour les secteurs du bâtiment, des transports et de l'industrie. En conformité avec les obligations internationales contractées par la Suisse dans le cadre de l'Accord de Paris (accord sur le climat), le projet vise en outre une adaptation aux changements climatiques et une orientation des flux financiers qui soit compatible avec les objectifs climatiques.

Les feuilles de route des entreprises et des branches en vue du zéro net visent à accélérer la décarbonation de l'industrie. Un montant de 1,2 milliard de francs au total durant six ans, provenant du budget général de la Confédération, est mis à disposition jusqu'en 2030 pour encourager les technologies et processus innovants et pour couvrir également les risques
d'investissement dans les infrastructures publiques. Les installations pilotes et de démonstration obtiennent des aides financières supérieures.

Avec un montant allant jusqu'à 200 millions de francs par an, la Confédération soutient, dans le cadre d'un programme extraordinaire d'une durée de dix ans complétant son Programme Bâtiments, le remplacement d'installations de chauffage et octroie des cautionnements si des mesures d'isolation thermique sont simultanément prises.

La Confédération, les cantons et les communes sont appelés à jouer un rôle de modèle en matière de réduction des émissions de gaz à effet de serre et d'adaptation aux changements climatiques. L'objectif de zéro net pour les émissions, directes et indirectes, liées à l'énergie consommée ainsi que pour les émissions générées en amont et en aval de processus est visé pour l'administration fédérale centrale d'ici à 2040.

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Table des matières Condensé

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3

4

Historique 1.1 «Pour un climat sain (initiative pour les glaciers)» 1.2 Contre-projet direct du Conseil fédéral à l'initiative pour les glaciers 1.3 Ratification de l'accord sur le climat 1.4 Politique climatique de la Suisse 1.5 Examen au sein de la commission 1.6 Renonciation à une consultation

5 6 6 7 8

Présentation du projet 2.1 Le contre-projet indirect en tant que loi-cadre 2.2 Les objectifs de l'accord sur le climat 2.2.1 Objectifs de réduction des émissions de gaz à effet de serre 2.2.1.1 Zéro net d'ici à 2050 2.2.1.2 Trajectoire de réduction et développement de capacités en matière d'émissions négatives 2.2.1.3 Valeurs indicatives pour les différents secteurs 2.2.2 Objectifs d'adaptation aux changements climatiques 2.2.3 Objectifs d'orientation des flux financiers respectueuse du climat 2.3 Aides financières aux entreprises ayant établi une feuille de route zéro net 2.3.1 Feuilles de route zéro net 2.3.2 Conception des aides financières 2.3.3 Interfaces avec les instruments et les aides existants 2.3.4 Couverture des infrastructures publiques 2.4 Programme extraordinaire de remplacement des installations de chauffage 2.5 Rôle de modèle de la Confédération, des cantons et des communes

9 9 10

Commentaire des dispositions 3.1 Loi fédérale relative aux objectifs en matière de protection du climat 3.2 Loi sur l'énergie

21

Conséquences 4.1 Conséquences sur les émissions de gaz à effet de serre 4.2 Conséquences pour l'économie 4.3 Conséquences financières et sur le personnel

34 34 36 39

10 10 11 13 14 14 15 15 17 18 19 20 20

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4.4

4.3.1 Conséquences financières 4.3.2 Conséquences sur le personnel Applicabilité

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5

Relation avec le droit européen

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6

Aspects juridiques 6.1 Constitutionnalité et conformité avec la loi 6.2 Compatibilité avec les obligations internationales 6.3 Frein aux dépenses 6.4 Forme de l'acte à adopter 6.5 Délégation de compétences législatives 6.5.1 Loi fédérale relative aux objectifs en matière de protection du climat 6.5.2 Loi sur l'énergie

42 42 42 43 43 43 43 45

Loi fédérale relative aux objectifs en matière de protection du climat (LCl) (Projet)

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Arrêté fédéral sur le financement de l'encouragement de technologies et de processus innovants (Projet)

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Arrêté fédéral sur le financement du programme extraordinaire de remplacement des installations de chauffage (Projet)

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Rapport 1

Historique

1.1

«Pour un climat sain (initiative pour les glaciers)»

L'initiative populaire «Pour un climat sain (initiative pour les glaciers)» a été déposée le 27 novembre 2019 munie de 113 125 signatures valables par l'Association suisse de protection du climat. Elle prévoit l'introduction d'un nouvel article constitutionnel relatif à la politique climatique (art. 74a Cst.) exigeant que, à partir de 2050, la Suisse n'émette pas davantage de gaz à effet de serre que ce que les puits de gaz à effet de serre sûrs sont capables de stocker durablement. En outre, elle vise à ce que, dès cette date, il ne soit plus possible de mettre en circulation en Suisse des carburants et des combustibles fossiles. Des exceptions ne seront admises qu'en cas d'applications pour lesquelles il n'existe pas d'autres solutions techniques.

1.2

Contre-projet direct du Conseil fédéral à l'initiative pour les glaciers

Par sa décision du 28 août 2019 visant une neutralité (zéro net) pour toutes les émissions de gaz à effet de serre d'ici à 2050, le Conseil fédéral poursuit sur le principe le même objectif que l'initiative. C'est pourquoi il se félicite de l'orientation suivie par celle-ci, qui vise à inscrire l'objectif de zéro émission nette dans la Constitution. Estimant que l'initiative va trop loin sur certains points, le Conseil fédéral a élaboré le 11 août 2021 un contre-projet direct1 qui remplace l'interdiction générale des agents énergétiques fossiles par une obligation de réduction de la consommation de ces derniers. L'armée, la police et les services de secours doivent pouvoir recourir en cas de besoin à des carburants fossiles durant leurs interventions. De plus, des exceptions doivent être possibles si les technologies de substitution ne sont pas disponibles en quantités suffisantes ou à des coûts économiquement supportables. Outre l'acceptabilité sociale, il convient de tenir compte de la situation particulière des régions de montagne et des régions périphériques, qui sont généralement moins bien desservies par les transports publics. Le potentiel de stockage durable du CO2 dans des puits (p. ex.

forêts, sols, gisements géologiques) étant limité en Suisse du fait de conditions techniques, économiques, écologiques et sociales, le Conseil fédéral entend laisser ouverte la question de savoir si les émissions issues d'énergies fossiles demeurant en 2050 devront être compensées par des puits de carbone en Suisse ou à l'étranger.

1

21.055 Message relatif à l'initiative populaire «pour un climat sain (initiative pour les glaciers)» et au contre-projet direct (arrêté fédéral relatif à la politique climatique); FF 2021 1972.

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1.3

Ratification de l'accord sur le climat

En réponse à la menace que les changements climatiques font peser sur l'être humain et les écosystèmes, la communauté internationale a adopté, en décembre 2015, l'Accord de Paris (accord sur le climat), qui engage pour la première fois tous les États à prendre des mesures, principalement au niveau national, en vue de réduire les émissions de gaz à effet de serre et d'atteindre à plus long terme le zéro net. Cet accord a pour but de contenir le réchauffement mondial moyen bien en dessous du seuil critique de 2 °C, l'objectif étant de limiter la hausse de la température à 1,5 °C. L'accord sur le climat est entré en vigueur le 4 novembre 2016. Il a été ratifié, dans l'intervalle, par 193 États sur 197.

Après l'approbation de l'accord sur le climat par l'Assemblée fédérale, le 16 juin 2017, la Suisse a déposé, le 6 octobre 2017, son instrument de ratification. Le Parlement avait également approuvé l'objectif de réduction de 50 % par rapport à 1990 d'ici à 2030 et l'objectif moyen de 35 % pour la période 2021­2030 dans l'arrêté fédéral y afférent2, mais avait délibérément renoncé à limiter la part à réaliser en Suisse et à l'étranger.

Sur le plan international, la Suisse a annoncé, en tant qu'objectif indicatif, son intention d'atteindre la neutralité climatique d'ici à 2050. Le Conseil fédéral a adopté cet objectif de zéro net le 28 août 2019 et l'a réaffirmé dans son message du 11 août 2021 relatif à l'initiative pour les glaciers et au contre-projet direct.

1.4

Politique climatique de la Suisse

En Suisse, la législation sur le climat est périodiquement adaptée pour rester conforme aux engagements internationaux. En application du Protocole de Kyoto, la loi sur le CO2 actuellement en vigueur exige que, jusqu'en 2020, les émissions de gaz à effet de serre soient réduites de 20 % par rapport à 1990. L'inventaire des gaz à effet de serre pour l'année 2020, publié le 11 avril 2022, montre que l'objectif légal de réduction a été manqué de peu (19 %), malgré des émissions du secteur des transports inhabituellement basses en raison de la pandémie et un temps chaud qui a réduit les besoins en chauffage et donc les émissions de CO2 du secteur du bâtiment.

En application de l'obligation internationale découlant de l'accord sur le climat (cf.

point 1.3), le Conseil fédéral a soumis au Parlement, le 1er décembre 2017, le message sur la révision totale de la loi sur le CO2, lequel fixe des objectifs et mesures jusqu'en 20303. Un référendum a été lancé contre cette révision totale4, adoptée par le Parlement le 25 septembre 2020. Le 13 juin 2021, le projet a été refusé de peu, par 51,6 % des votants.

Étant donné que des instruments importants arriveraient ainsi à échéance fin 2021, le Parlement a décidé le 17 décembre 2021, sur la base d'une initiative parlementaire de la Commission de l'environnement, de l'aménagement du territoire et de l'énergie du 2 3 4

RO 2017 5735 FF 2018 229 FF 2020 7607

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Conseil national (CEATE-N)5, de procéder à une révision partielle de la loi sur le CO26, qui est entrée en vigueur avec effet rétroactif au début de l'année 2022, le délai référendaire ayant expiré sans avoir été utilisé. Les objectifs et les mesures décidés dans le cadre de la prolongation de la loi sur le CO2 ne sont toutefois pas suffisants pour respecter l'engagement international pris dans le cadre de l'accord sur le climat d'ici à 2030. Les efforts doivent être considérablement accrus après 2024, de sorte que les émissions de gaz à effet de serre diminuent plus rapidement. En outre, l'engagement à l'étranger doit être renforcé. Dans ce contexte, le Conseil fédéral a également mis en consultation le 17 décembre 2021, en exécution de l'art. 3, al. 5, de la loi sur le CO2 en vigueur, un nouveau projet; la consultation a duré jusqu'au 4 avril 20227. Cette révision de la loi doit remplacer la prolongation de la loi sur le CO2 jusqu'en 2024 décidée par le Parlement le 17 décembre 2021. Parallèlement, le présent contre-projet indirect à l'initiative pour les glaciers doit définir le cadre des prochaines révisions de la loi sur le CO2 et marquer l'ambition de la politique climatique de la Suisse.

1.5

Examen au sein de la commission

Le 12 octobre 2021, la CEATE-N a entamé l'examen de l'initiative pour les glaciers en s'appuyant sur le message du Conseil fédéral (21.055) et entendu le comité d'initiative. Par 15 voix contre 9 et 1 abstention, elle a décidé d'opposer un contre-projet indirect à l'initiative, afin qu'une solution efficace puisse rapidement être trouvée au niveau de la loi. Elle a ainsi déposé l'initiative 21.501 «Contre-projet indirect à l'initiative pour les glaciers. Zéro émission nette de gaz à effet de serre d'ici à 2050», à laquelle la Commission de l'environnement, de l'aménagement du territoire et de l'énergie du Conseil des États (CEATE-E) a décidé de donner suite le 15 novembre 2021, par 7 voix contre 4 et 2 abstentions.

Lors de la discussion par article de la séance du 15 février 2022, la CEATE-N a décidé de recommander, par 14 voix contre 9 et 2 abstentions, le rejet de l'initiative pour les glaciers, et s'est prononcée par 14 voix contre 11 en faveur d'un contre-projet direct modifié par rapport à la proposition du Conseil fédéral8, afin de garder toutes les options ouvertes. La commission soutient, sur le fond, l'objectif de zéro émission nette d'ici à 2050, qui consiste à réduire autant que possible les émissions de gaz à effet de serre et à compenser les émissions résiduelles d'ici à cette date. Mais la majorité de ses membres estiment que l'initiative va trop loin ­ l'interdiction générale des combustibles et des carburants fossiles, notamment, est jugée trop contraignante. Une minorité était favorable à l'initiative; elle n'a pas été suivie lors de la séance plénière du Conseil national du 3 mars 2022. Par 108 voix contre 70 et 14 abstentions, ce dernier a ainsi décidé d'entrer en matière sur le contre-projet direct, qu'il a adopté lors du vote sur l'ensemble par 104 voix contre 67 et 21 abstentions. En outre, le Conseil national 5 6 7 8

21.477 Iv. pa. Prolongation de l'objectif de réduction de la loi sur le CO2.

FF 2021 2994 www.fedlex.admin.ch/fr/consultation-procedures/ongoing#https://fedlex.data.admin.ch/eli/dl/proj/2021/123/cons_1 La majorité du Conseil national a décidé, le 3 mars 2022, de suivre en grande partie la majorité de sa commission; cf. dépliant N11 F (parlement.ch).

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s'est prononcé à l'unanimité en faveur d'une prolongation d'un an du délai de traitement de l'initiative populaire, celle-ci nécessitant alors une décision similaire du Conseil des États. Lors de sa séance du 1er avril 2022, la CEATE-E a décidé à l'unanimité de proposer à son conseil de prolonger le délai de traitement, tout en repoussant les délibérations sur l'initiative pour les glaciers afin d'attendre les travaux de la CEATEN relatifs au présent contre-projet indirect.

Par conséquent, suite à la décision de principe adoptée le 15 février 2022 par 22 voix contre 0 et 1 abstention d'opposer une loi-cadre à l'initiative pour les glaciers, la CEATE-N a poursuivi ses travaux le 21 mars 2022 et adopté le projet d'acte ainsi que le rapport explicatif y afférent le 25 avril 2022 par 17 voix contre 7. L'arrêté fédéral sur le financement de l'encouragement de technologies et de processus innovants a été soutenu par 17 voix contre 7 et l'arrêté fédéral sur le financement du programme extraordinaire de remplacement des installations de chauffage, par 16 voix contre 8.

Une minorité propose de ne pas entrer en matière, ni sur le projet de loi, ni sur les deux arrêtés fédéraux de financement.

Lors de la discussion par article sur le projet, la commission s'est prononcée sur de nombreuses propositions. Sur celles qui ont été rejetées, quinze ont été soumises comme propositions de minorité (cf. explications au point 3). Certaines minorités entendent supprimer les valeurs indicatives définies pour les différents secteurs, l'objectif visant à rendre les flux financiers compatibles avec les objectifs climatiques, la mise en oeuvre des objectifs dans une loi définissant des mesures ou le programme extraordinaire de remplacement des installations de chauffage. D'autres minorités souhaitent se diriger vers une politique plus ambitieuse en visant l'objectif de zéro net dès 2040 ou en proposant des mesures supplémentaires dans les secteurs du bâtiment et des transports. Enfin, plusieurs minorités veulent affaiblir les objectifs intermédiaires fixés par la majorité, supprimer certaines mesures ou tenir compte de la croissance démographique et économique dans le cadre de l'atteinte des objectifs.

1.6

Renonciation à une consultation

Le projet entre dans le champ d'application de l'art. 3, al. 1, let. b, de la loi sur la consultation (LCo)9 et constituerait donc un «objet de la procédure de consultation».

La CEATE-N renonce toutefois à une consultation en vertu de l'art. 3a, al. 1, let. b, LCo, au motif qu'aucune information nouvelle n'est à attendre et que les positions des milieux intéressés sont connues.

En 2020, le Conseil fédéral a réalisé une consultation sur le contre-projet direct à l'initiative pour les glaciers10: ce dernier comportait déjà les principaux éléments dont on retrouve l'essentiel dans le présent projet ­ notamment l'objectif de zéro émission nette d'ici à 2050, l'application de technologies d'émission négative, une trajectoire de réduction au moins linéaire des émissions de gaz à effet de serre d'ici à 2050 et la prise en compte des régions de montagne et des régions périphériques dans le cadre de l'élaboration de la politique climatique.

9 10

RS 172.061 https://fedlex.data.admin.ch/eli/dl/proj/6020/47/cons_1

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Le projet introduit deux nouveaux objets de subventionnement: l'encouragement de technologies et de processus innovants au sein des entreprises et le programme extraordinaire de remplacement des installations de chauffage. Mais là encore, aucune information nouvelle n'est à attendre d'une consultation, car ces éléments ont déjà été abordés en partie dans le cadre de la révision totale de la loi sur le CO2 adoptée le 25 septembre 2020. De plus, le Conseil fédéral propose lui aussi des aides supplémentaires pour le remplacement des installations de chauffage dans le cadre de la révision partielle de la loi sur le CO2 qui a fait l'objet d'une consultation du 17 décembre 2021 au 4 avril 2022. Ce projet de révision partielle a également permis de discuter d'une modification de l'art. 53 de la loi sur l'énergie (LEne)11 au sujet des installations pilotes et de démonstration.

2

Présentation du projet

2.1

Le contre-projet indirect en tant que loi-cadre

Le contre-projet indirect reprend les préoccupations de l'initiative pour les glaciers, mais offre une solution plus rapide et plus efficace. Le présent projet de loi fédérale relative aux objectifs en matière de protection du climat est conçu comme une loicadre et doit concrétiser les objectifs de la politique climatique suisse sur la base de l'accord sur le climat.

En vertu de l'art. 2, par. 1, l'accord sur le climat12 poursuit trois objectifs: a.

contenir l'augmentation de la température moyenne planétaire nettement en dessous de 2 °C par rapport aux niveaux préindustriels et s'efforcer de limiter l'augmentation de la température à 1,5 °C par rapport aux niveaux préindustriels;

b.

renforcer la capacité d'adaptation aux effets néfastes des changements climatiques;

c.

rendre les flux financiers compatibles avec un profil d'évolution vers un développement à faible émission de gaz à effet de serre et résilient aux changements climatiques.

En ratifiant l'accord sur le climat, la Suisse s'est engagée à atteindre ces trois objectifs.

La loi fédérale relative aux objectifs en matière de protection du climat doit donc préciser ces trois objectifs et fixer ainsi un cadre pour l'élaboration future de la politique climatique et énergétique.

La loi-cadre ne contient qu'un petit nombre de mesures ciblées permettant d'amorcer la transition nécessaire à long terme vers le zéro net. En principe, les mesures permettant d'atteindre les objectifs doivent être inscrites dans une loi définissant des mesures.

L'art. 11, al. 1, de la loi-cadre oblige le Conseil fédéral à soumettre suffisamment tôt à l'Assemblée fédérale, après avoir entendu les milieux concernés et en tenant compte

11 12

RS 730.0 RS 0.814.012

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des dernières connaissances scientifiques, des propositions de mise en oeuvre des objectifs de la loi pour les périodes suivantes: a.

pour la période 2025­2030;

b.

pour la période 2031­2040;

c.

pour la période 2041­2050.

En vertu de l'art. 11, al. 2, la loi définissant des mesures est en premier lieu la loi sur le CO2, qui régit déjà aujourd'hui la majeure partie des mesures de politique climatique. Sur la base des résultats de la consultation, le Conseil fédéral soumettra au Parlement, probablement à l'automne 2022, une révision partielle de la loi sur le CO2 pour la période après 2024, qui comprendra des objectifs et des mesures jusqu'en 2030.

Mais la loi sur le CO2 n'est pas la seule à devoir contribuer à la réalisation des objectifs de la loi-cadre. Conformément à l'art. 12, les prescriptions d'autres actes législatifs fédéraux et cantonaux doivent également être conçues et appliquées de manière à contribuer à la réalisation des objectifs. S'il existe une situation de départ particulière pour les régions de montagne et les régions périphériques, de telles particularités doivent être prises en compte dans la mesure du possible.

2.2

Les objectifs de l'accord sur le climat

2.2.1

Objectifs de réduction des émissions de gaz à effet de serre

2.2.1.1

Zéro net d'ici à 2050

Le contre-projet indirect à l'initiative pour les glaciers précise les objectifs de réduction des émissions de gaz à effet de serre et d'utilisation de technologies d'émission négative, par lesquels la Suisse contribue de manière appropriée à limiter le réchauffement global à 2 °C, voire à 1,5 °C. C'est la première fois que l'objectif de zéro net est ancré dans une loi fédérale.

Les objectifs et les objectifs intermédiaires fixés dans la loi fédérale relative aux objectifs en matière de protection du climat découlent de la stratégie climatique à long terme du Conseil fédéral du 27 janvier 2021, qui présente, sur la base des perspectives énergétiques 2050+13 de l'Office fédéral de l'énergie (OFEN), l'évolution possible des émissions dans les différents secteurs en vue d'atteindre l'objectif de zéro net en 2050.

Outre l'abandon des énergies fossiles et l'exploitation aussi complète que possible des possibilités d'amélioration de l'efficacité énergétique, les émissions résiduelles inévitables doivent être réduites grâce au captage et au stockage du carbone de sources

13

cf. www.bfe.admin.ch/bfe/fr/home/politique/perspectives-energetiques-2050-plus.html

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fossiles ou lié aux processus (CSC14) et compensées par des technologies d'émission négative (NET15).

Les NET ont pour fonction de compenser les émissions difficiles à éviter, telles que celles générées par l'agriculture, par les installations industrielles qui ne peuvent pas réduire leurs émissions grâce au CSC ou encore par les décharges. L'objectif est qu'en 2050, ces émissions résiduelles, difficiles à éviter, soient entièrement compensées par des émissions négatives, dans le but d'atteindre l'objectif de zéro net. La stratégie climatique à long terme estime le besoin annuel à environ 7 millions de tonnes de CO2 d'émissions négatives en 2050.

De manière générale, des émissions négatives peuvent être produites à la fois en Suisse et à l'étranger ­ grâce aux exportations d'émissions de CO2 biogènes en vue de leur stockage géologique durable ou via le captage sur place du CO2 présent dans l'air ambiant en vue de son stockage («Direct Air Capture and Storage», DACCS). En Suisse, ce sont avant tout les capacités de stockage qui font défaut (cela s'applique aussi au CSC). Les perspectives énergétiques 2050+ estiment que ces capacités de stockage géologique atteindront 3 millions de tonnes de CO2 par an en 2050, pour autant que de tels puits géologiques puissent être mis en place. Mais cela ne suffira pas pour respecter l'objectif de zéro net. La Suisse dépendra également de capacités de stockage du CO2 à l'étranger, que cela soit pour stocker le CO2 capté en Suisse et issu de sources biogènes, fossiles ou lié aux processus (dans le cas de sources biogènes, des émissions négatives seraient générées) ou pour financer des émissions négatives directement à l'étranger.

2.2.1.2

Trajectoire de réduction et développement de capacités en matière d'émissions négatives

Le développement des capacités nécessaires en matière d'émissions négatives prendra du temps. Les usines de valorisation des ordures ménagères et l'industrie du ciment estiment qu'elles pourront mettre en service les premières installations pilotes de captage du CO2 d'ici à 2030. De même, la prise en compte des émissions négatives à l'étranger doit encore faire l'objet d'un projet pilote dans le cadre de l'accord sur le climat.

La figure ci-dessous montre, outre la trajectoire de réduction des émissions nationales de gaz à effet de serre, y compris le CSC (ligne continue), qui suit la stratégie climatique à long terme du Conseil fédéral à partir de 2030, les trajectoires de développement possibles pour la production d'émissions négatives dans le pays (ligne en pointillé) ainsi que les émissions négatives totales nécessaires (ligne en tirets courts). La différence entre ces deux lignes correspond aux émissions négatives produites à l'étranger. Ces trajectoires sont également reprises des perspectives énergétiques 2050+ et de la stratégie climatique à long terme du Conseil fédéral.

14

15

Le CSC est une mesure permettant d'extraire et de stocker le CO2 à des sources ponctuelles comme les cimenteries ou les usines d'incinération des ordures ménagères Ainsi, les gaz à effet de serre ne parviennent pas en premier lieu dans l'atmosphère.

Les NET sont des mesures permettant de retirer, au moyen de procédés biologiques et techniques, le CO2 de l'atmosphère et de le stocker durablement.

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­

La trajectoire de réduction et les objectifs intermédiaires prévus dans le projet se fondent sur les engagements internationaux pris par la Suisse, à savoir réduire ses émissions de gaz à effet de serre de moitié d'ici à 2030 et de 35 % en moyenne sur la période 2021­2030 par rapport à 1990. La prolongation de la loi sur le CO2 jusqu'à fin 2024 et la première loi définissant des mesures permettront de baisser les émissions de gaz à effet de serre dans le pays d'environ 30 % par rapport à 1990. Les réductions manquantes devront être compensées par des mesures prises à l'étranger (ligne en tirets).

­

À partir de 2030, la ligne pleine suit la trajectoire décrite par le Conseil fédéral dans sa stratégie climatique à long terme. Une réduction de près de 90 % par rapport à 1990 est possible d'ici à 2050. Comme mentionné plus haut, cela implique non seulement l'exploitation de tous les potentiels de réduction techniquement disponibles dans l'ensemble des secteurs, mais aussi le recours au CSC dans l'industrie afin d'éviter les émissions fossiles et les émissions des processus.

­

La ligne en tirets représente une trajectoire de réduction des émissions de gaz à effet de serre qui prend en compte des prestations de réduction à l'étranger et des NET en Suisse et à l'étranger. À partir de 2030, la trajectoire est linéaire jusqu'au point final du zéro net en 2050 (soit une réduction de 100 %). L'espace entre les deux lignes correspond au besoin de réduction à l'étranger et de NET en Suisse et à l'étranger.

­

La ligne en pointillé indique les voies de développement possibles pour la production d'émissions négatives dans le pays.

­

La ligne en tirets courts montre les voies de développement possibles pour la production d'émissions négatives dans le pays et à l'étranger.

À long terme, c'est-à-dire au-delà de 2050, le bilan mondial des émissions doit devenir globalement négatif, de sorte que la concentration de gaz à effet de serre dans l'at-

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mosphère diminue à nouveau. Ce n'est qu'à cette condition que le réchauffement global pourra être limité, avec une probabilité suffisamment élevée, à 1,5 °C. Le projet précise que la Suisse doit apporter sa contribution à cet égard.

2.2.1.3

Valeurs indicatives pour les différents secteurs

Dans sa stratégie climatique à long terme, le Conseil fédéral a également fixé des objectifs pour les différents secteurs. Ainsi, les secteurs du bâtiment et des transports ne devront plus émettre de gaz à effet de serre à partir de 2050. Le secteur de l'industrie (y c. la valorisation des ordures ménagères) devra réduire d'au moins 90 % ses émissions par rapport à leur niveau de 1990 (y c. CSC des émissions de sources fossiles et liées aux processus). Ces chiffres sont utilisés comme base pour les valeurs indicatives définies pour les différents secteurs en vertu de l'art. 4 du projet de loicadre.

Le tableau ci-dessous présente les réductions d'émissions possibles au total et par secteur pour les années 2020, 2030, 2040 et 2050. Il indique également les valeurs de départ pour l'année 1990 ainsi que les réductions d'émissions réalisées en 2020 selon l'inventaire des gaz à effet de serre publié en avril 2022. Les valeurs pour 2030 sont reprises du projet de révision de la loi sur le CO2 élaboré par le Conseil fédéral et mis en consultation. Les valeurs pour les autres années ont, quant à elles, été reprises de la stratégie climatique à long terme du Conseil fédéral et des évolutions qui y sont décrites pour chaque secteur. Concernant l'industrie, afin de montrer clairement l'importance du CSC, la réduction des émissions avec et sans le CSC est indiquée. On constate ainsi que sans le CSC, les émissions en 2050 seraient supérieures de 34 points de pour cent; on estime que le CSC évitera 5 millions de tonnes d'émissions de sources fossiles et liées aux processus en 2050.

Réduction des émissions par rapport à 1990 (en %)16

1990

2020

2030

2035

2040

2045

2050

Émissions totales (y c. réductions à l'étranger et NET)17

53,7

­20 %

­50 %

­62 %

­75 %

­87 %

­100 %

Émissions générées en Suisse

53,7

­19 %

­34 %

­47 %

­60 %

­73 %

­90 %

Bâtiment

17,1

­39 %

­54 %

­74 %

­82 %

­90 %

­100 %

Transports

14,9

­8 %

­27 %

­39 %

­57 %

­78 %

­100 %

Industrie (avec CSC)

13,0

­17 %

­28 %

­38 %

­50 %

­72 %

­90 %

Industrie (sans CSC)

13,0

­17 %

­28 %

­36 %

­43 %

­49 %

­56 %

16 17

Valeurs pour 1990 en millions de tonnes d'équivalents CO2.

Valeur pour l'année 2020: prestations de puits de carbone imputables (stockage de carbone dans les forêts suisses et dans les produits en bois suisse) comprises, mais réductions réalisées à l'étranger non comprises. Cf. Examen de l'objectif 2020 (pour la période de 2013 à 2020).

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2.2.2

Objectifs d'adaptation aux changements climatiques

En raison de la progression des changements climatiques, la nécessité de s'adapter aux modifications de plus en plus marquées des conditions climatiques s'accroît également en Suisse. Depuis le milieu du 19e siècle, les températures moyennes ont augmenté de 2,1 °C dans le pays. C'est environ deux fois plus qu'en moyenne mondiale.

Parallèlement, les événements extrêmes tels que les canicules, les périodes de sécheresse et les fortes précipitations se sont multipliés au cours des dernières décennies, et les milieux naturels ainsi que la composition des espèces se sont modifiés.

La politique climatique suisse prévoit l'adaptation aux changements climatiques en complément à la réduction des émissions de gaz à effet de serre. La loi sur le CO2 en vigueur charge la Confédération de coordonner les activités d'adaptation aux changements climatiques et de veiller à ce que les bases nécessaires à cette fin soient mises à disposition. La stratégie «Adaptation aux changements climatiques en Suisse» du Conseil fédéral fixe le cadre en vue d'une action coordonnée au niveau fédéral18.

Les objectifs fixés dans la loi-cadre doivent aider à axer encore plus fortement à l'avenir les activités et les stratégies d'adaptation sur la réduction des risques liés au climat, comme la multiplication des canicules, l'accentuation de la sécheresse estivale, l'aggravation du risque de crues, la fragilisation des pentes, la recrudescence des mouvements de terrain, la modification des milieux naturels et de la composition des espèces ainsi que des paysages ou encore la propagation d'organismes nuisibles, de maladies et d'espèces exotiques. L'accent est mis sur la protection des personnes, des ressources vitales et des biens de valeur. À cet égard, la mise en oeuvre de mesures d'adaptation doit être encouragée à tous les niveaux. En outre, l'évolution des changements climatiques et de la perte de biodiversité, qui se renforcent mutuellement, doit être prise en compte dans d'autres régions du monde, la Suisse étant vulnérable face aux changements climatiques aussi en raison de son interdépendance internationale.

2.2.3

Objectifs d'orientation des flux financiers respectueuse du climat

Les décisions d'investissement prises aujourd'hui ­ par exemple en matière d'approvisionnement énergétique ou d'infrastructures de transport et de construction ­ ont une influence sur les gaz à effet de serre qui seront émis demain. L'un des trois principaux objectifs de l'accord sur le climat est de «rendre les flux financiers compatibles avec un profil d'évolution vers un développement à faible émission de gaz à effet de serre et résilient aux changements climatiques». C'est pourquoi cet objectif, formulé en termes généraux, est également inscrit dans la loi-cadre.

Avec une part de plus de 9 % du produit intérieur brut (PIB), le secteur financier suisse est un secteur important pour l'économie suisse. En raison de ses liens étroits avec les secteurs de l'économie réelle en Suisse et à l'étranger, ce secteur présente un levier 18

Adaptation aux changements climatiques en Suisse ­ Premier volet de la stratégie du Conseil fédéral du 2 mars 2012 (admin.ch).

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considérable en matière d'orientation des flux financiers compatible avec les objectifs climatiques. Dès 2020, le Conseil fédéral a énoncé l'objectif suivant: la place financière suisse doit être l'un des principaux centres mondiaux de services financiers durables; elle doit notamment contribuer efficacement à la réalisation des objectifs climatiques et améliorer ainsi sa compétitivité. En novembre 2021, le Conseil fédéral a recommandé aux acteurs d'accroître volontairement la transparence en matière de compatibilité climatique de tous les produits financiers et portefeuilles des clients. La Confédération mesure en outre régulièrement les progrès des secteurs financiers à l'aide de tests climatiques comparables. De plus en plus d'établissements et d'associations financiers s'engagent publiquement en faveur de l'objectif de zéro émission nette, même si les objectifs intermédiaires et les mesures concrètes sont encore difficilement comparables. Grâce à des accords concrets avec la Confédération, de telles promesses et leur mise en oeuvre effective peuvent être rendues transparentes et comparables pour l'ensemble du secteur financier (banques, gestionnaires de fortune, assurances, institutions de prévoyance) et être harmonisées avec les objectifs de la Suisse. Par exemple, le marché financier suisse étant très étroitement lié au secteur du bâtiment par le biais des hypothèques, il pourrait soutenir activement les objectifs de ce dernier. S'ils sont axés sur les résultats, en tant que contribution mesurable à l'objectif climatique, les accords permettent aux acteurs du marché financier concernés de viser de manière autonome les objectifs convenus. Parallèlement, les promesses de réduction du secteur acquièrent un caractère plus contraignant et gagnent donc en crédibilité.

2.3

Aides financières aux entreprises ayant établi une feuille de route zéro net

Avec le contre-projet indirect à l'initiative pour les glaciers, les entreprises qui sont prêtes à élaborer des feuilles de route permettant d'atteindre l'objectif de zéro émission nette (ci-après «feuille de route zéro net») et à mettre en oeuvre des mesures dès la phase initiale doivent pouvoir demander des aides financières pour l'application de technologies ou de processus innovants. Il s'agit ainsi d'inciter toutes les entreprises à se pencher suffisamment tôt sur la manière d'aborder la décarbonation.

2.3.1

Feuilles de route zéro net

Le projet de loi exige des entreprises qu'elles atteignent le niveau de zéro émission nette au plus tard en 2050. Cette exigence concerne les émissions directes et indirectes (scopes 1 et 2) en Suisse19. Sont visées les entreprises de l'industrie, de l'artisanat et des services, mais pas les exploitations agricoles.

19

Émissions directes (scope 1): émissions de gaz à effet de serre causées par l'exploitation, notamment par la combustion d'agents énergétiques ainsi que par les processus. Émissions indirectes (scope 2): émissions de gaz à effet de serre causées par la mise à disposition de l'énergie achetée.

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Pour atteindre cet objectif, il est judicieux que les entreprises, voire les branches, établissent des feuilles de route zéro net. Toutefois l'élaboration de telles feuilles de route reste facultative. Dans celles-ci, les entreprises et les branches peuvent également aller au-delà de l'objectif fixé, notamment en prenant en compte, outre les émissions des scopes 1 et 2, les émissions du scope 3 dans l'objectif de zéro émission nette20.

Au niveau mondial, il existe différentes approches pour l'élaboration, par les entreprises, de feuilles de route zéro net. Un exemple connu est celui de l'initiative «Science Based Target»21, dans le cadre de laquelle les entreprises planifient les étapes de réduction de leurs émissions de gaz à effet de serre (type «top-down»).

D'autres approches sont axées sur les mesures (type «bottom-up»). Divers types d'approches peuvent être combinés entre eux.

De nombreuses entreprises, en particulier celles qui émettent beaucoup de gaz à effet de serre, pourraient avoir intérêt de ne plus attendre pour établir une feuille de route zéro net. Il en va de même pour les entreprises qui, pour mettre en oeuvre une telle feuille de route, prévoient des mesures concrètes faisant appel à des technologies et des processus innovants et qui sont intéressées par un soutien financier de la Confédération, comme cela est décrit ci-après au point 2.3.2.

La Confédération mettra donc des bases et des normes à la disposition des entreprises et des branches qui élaboreront des feuilles de route zéro net comportant des mesures concrètes d'ici à 2029. La définition et le développement d'une méthodologie uniforme et contraignante ainsi que la mise en place d'un réseau de conseil et la formation des conseillers permettront de contribuer à ce qu'un conseil d'experts soit proposé. La méthodologie et le conseil devraient être adaptés tant aux grandes qu'aux petites entreprises (éventuellement regroupées en branches) et être disponibles à l'entrée en vigueur de la loi. À cet effet, la Confédération prendra en charge les coûts du développement de la systématique et de la formation ad hoc des conseillers. Ce développement peut être assuré par l'extension des programmes de conseil existants déjà soutenus par la Confédération, tels que Pinch, PEIK et Reffnet.ch22 pour l'augmentation de l'efficacité dans
l'utilisation des ressources et de l'efficacité énergétique dans les entreprises ou celui pour la mise en oeuvre des engagements de réduction du CO2. Le conseil proprement dit est proposé et mis en oeuvre par des organisations privées. Les coûts liés à l'élaboration des feuilles de route sont supportés par les entreprises ou les associations sectorielles; les entreprises disposant de telles feuilles de manière précoce pourront bénéficier d'aides financières dans le cadre de la mise en oeuvre (cf. 2.3.2).

En tant que contre-projet indirect à l'initiative populaire «Entreprises responsables ­ pour protéger l'être humain et l'environnement» (16.077 CO. Droit de la société anonyme. Projet 2), il est prévu d'imposer des obligations de faire rapport sur des questions non financières, notamment sur les thèmes de l'environnement (en particulier les objectifs en matière de CO2), des questions sociales, des préoccupations des travailleurs, des droits humains et de la lutte contre la corruption. Le 30 mars 2022, le 20 21 22

Scope 3: émissions causées en amont et en aval par des tiers (sans les émissions du scope 2).

Cf. https://sciencebasedtargets.org/ Cf. https://pinch-analyse.ch, www.peik.ch, https://www.reffnet.ch

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Conseil fédéral a ouvert la consultation sur l'ordonnance d'exécution correspondante23. La consultation durera jusqu'au 7 juillet 2022. À partir du 1er janvier 2023 probablement, les grandes entreprises de l'économie réelle et de l'économie financière devront également présenter un plan de transition dans le cadre de leurs obligations de faire rapport. Ce plan s'inscrit obligatoirement dans un rapport sur le climat et décrit l'approche qu'il est prévu d'appliquer pour parvenir à une économie à faibles émissions de carbone. En ce qui concerne le contenu, ces plans de transition ont de nombreux points communs avec les feuilles de route zéro net du présent projet de loi.

Il convient d'en tenir compte lors de l'élaboration de la méthodologie relative aux feuilles de route zéro net.

Dans le cadre de la révision partielle de la loi sur le CO2 pour la période après 2025, le Conseil fédéral propose en outre que les entreprises souhaitant prendre un engagement de réduction (exemption de la taxe sur le CO2) expliquent de manière crédible comment elles n'émettront plus de gaz à effet de serre issus de l'utilisation énergétique des combustibles fossiles d'ici à 2040 au plus tard.

2.3.2

Conception des aides financières

Le projet de loi prévoit que la Confédération peut soutenir financièrement les entreprises qui souhaitent utiliser des technologies et des processus innovants d'ici à 2030 pour mettre en oeuvre une feuille de route zéro net. Jusqu'en 2030, la Confédération doit disposer à cet effet de 1,2 milliard de francs au total. La demande d'aides financières doit être accompagnée d'une feuille de route zéro net axée sur des mesures (cf.

point 2.3.1). Celle-ci doit notamment mettre en évidence les risques technologiques ou liés aux processus pour lesquels une aide financière est demandée dans le cadre de la mise en oeuvre de la feuille de route.

Le cycle d'innovation en matière de technologies et de processus peut être divisé en six phases: (1) recherche fondamentale, (2) recherche appliquée, (3) prototype de laboratoire, (4) installation pilote et de démonstration, (5) certification et introduction sur le marché, (6) diffusion sur le marché et exportation. Ces phases sont d'importance et de durée plus ou moins équivalentes. La Confédération étant déjà fortement engagée financièrement dans les trois premières phases, elle se concentrerait, dans le cadre du présent encouragement, sur les phases 4 à 6, en mettant l'accent sur les utilisateurs de technologies et de processus innovants, c'est-à-dire sur le côté de la demande. Le soutien à celle-ci exerce également un effet positif sur l'offre, de sorte que les développeurs de technologies et de processus innovants parviennent plus rapidement sur le marché.

Le présent projet et les normes d'exécution définiront le cadre matériel des aides financières (ce que la Confédération peut encourager). En ce qui concerne les conditions d'encouragement (comment la Confédération peut encourager), il est prévu que les aides financières soient versées via un ou plusieurs instruments d'encouragement existants. Il s'agit notamment de la promotion des technologies environnementales, du programme pilote et de démonstration, de «SWiss Energy research for the Energy 23

Cf. www.admin.ch/gov/fr/accueil/documentation/communiques.msg-id-87790.html

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Transition» (SWEET), du fonds de technologie ou de SuisseEnergie. Ces programmes d'encouragement interviennent dans les phases d'innovation 4 à 6 mentionnées cidevant.

Afin que les moyens soient utilisés de la manière la plus judicieuse possible et parce que le temps et les moyens disponibles sont limités, la Confédération devrait également avoir la possibilité de lancer des appels d'offres concurrentiels. Le soutien des demandes devrait ainsi supposer non seulement le respect de critères formels, mais également celui de critères de contenu et/ou d'efficacité pertinents (bon rapport coûts/bénéfices, potentiel d'évitement et de captage des gaz à effet de serre, horizons temporels de mise en oeuvre et d'impact, potentiel de multiplication et de création de valeur en Suisse, possibilité de contrôle de l'impact, organisation appropriée, financement assuré, prestation propre adéquate, etc.).

Parallèlement à l'encouragement décrit ici, le présent projet prévoit d'assouplir les conditions d'encouragement du programme pilote et de démonstration déjà existant via une modification de la LEne (art. 53). De manière générale, cette modification est indiquée, mais, dans le cas présent, elle est également nécessaire pour que le programme pilote et de démonstration ­ comme décrit ci-devant ­ puisse être utilisé pour la promotion de mesures visant à mettre en oeuvre les feuilles de route zéro net. Le montant de la subvention pour les projets pilotes et de démonstration s'élèvera au plus à 50 % des coûts imputables (jusqu'à présent 40 % au maximum), et pour certaines exceptions au plus à 70 % (jusqu'à présent 60 %). Les coûts imputables doivent se concentrer sur les coûts non amortissables des aspects innovants d'un projet. Le Conseil fédéral a déjà proposé ces adaptations concernant le programme pilote et de démonstration dans le projet de révision de la loi sur le CO2 mis en consultation le 17 décembre 2021. Elles sont maintenant intégrées en plus dans le présent projet en tant que modification d'autres actes, afin qu'elles entrent en vigueur au plus tard en même temps que la loi-cadre.

2.3.3

Interfaces avec les instruments et les aides existants

Un soutien financier n'est possible que si une mesure sert à la certification et à l'introduction sur le marché ou à la diffusion sur celui-ci de technologies et de processus innovants, si elle n'a pas déjà été soutenue par ailleurs et si elle n'est pas intégrée dans un instrument de réduction des émissions de gaz à effet de serre. En d'autres termes:

24

­

Les installations soumises au système d'échange de quotas d'émission (SEQE) ne reçoivent pas d'aides pour les mesures concernant les émissions de gaz à effet de serre couvertes par le SEQE.

­

Les installations ayant pris un engagement de réduction ne reçoivent pas de soutien pour les mesures faisant l'objet de l'engagement. Les mesures qui ne font pas l'objet de l'engagement de réduction et qui, malgré le soutien, sont considérées comme non rentables au sens de l'art. 39, al. 1bis, de l'ordonnance sur l'énergie24 peuvent être soutenues. Elles ne peuvent toutefois pas être RS 730.01

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prises en compte dans l'engagement de réduction. Afin de limiter la charge administrative, ce critère doit s'appliquer de manière uniforme à toutes les entreprises ayant conclu une convention d'objectifs.

­

Les mesures faisant l'objet d'un projet ou d'un programme de compensation ne reçoivent pas d'aides.

­

Les entreprises bénéficiant du Programme Bâtiments ne reçoivent pas d'aides.

2.3.4

Couverture des infrastructures publiques

La construction et l'exploitation d'infrastructures publiques ­ comme les réseaux thermiques ou les conduites permettant le transport des émissions inévitables de CO2 captées et pour le stockage géologique permanent ­ impliquent des investissements initiaux élevés et de longues périodes d'amortissement. Pour les parties concernées, il existe en outre des risques financiers qui freinent aujourd'hui le développement.

C'est notamment le cas lorsqu'une source de chaleur centrale ou un consommateur de poids fait défaut de manière imprévue avant que les investissements ne soient amortis.

De tels risques pour la construction et l'extension de réseaux thermiques ­ également appelés réseaux de chauffage à distance ou de proximité ou réseaux de refroidissement à distance ­ y compris des installations de production de chaleur correspondantes, alimentés par des énergies renouvelables et des rejets thermiques, doivent pouvoir être couverts par l'État. Dans le projet mis en consultation relatif à la loi sur le CO2 pour la période après 2024, le Conseil fédéral a proposé une telle couverture via le fonds de technologie.

Les infrastructures de transport (pipelines de CO2) et le stockage sûr et durable des émissions de gaz à effet de serre inévitables même à long terme captées (au moyen du CSC de CO2 et des NET), nécessitent également une planification et d'importantes ressources. La construction et l'exploitation de telles lignes, y compris l'interconnexion avec les pays voisins, présentent des risques considérables pour les investisseurs, en particulier dans la phase initiale de ce développement en Suisse. Les investisseurs peuvent conclure un cautionnement directement avec la Confédération afin de se prémunir contre les risques financiers imprévus et les pertes d'investissement.

La condition préalable à la garantie de l'État est qu'elle entraîne ou permette une réduction supplémentaire des émissions qui n'est pas couverte par le marché privé et les mesures existantes, ou que l'infrastructure publique soit absolument nécessaire pour atteindre le zéro net. Par l'intermédiaire des cautionnements, l'État intervient moins fortement sur le marché que par celui des subventions directes. Les risques encourus par les investisseurs privés sont réduits, ce qui améliore les incitations à investir et accélère le
développement de l'infrastructure publique centrale permettant d'atteindre les objectifs climatiques. Sont concernées les installations servant à la réalisation de tâches incombant aux pouvoirs publics en vertu de la Constitution ou de la législation.

Elles ne bénéficient pas à la communauté par la valeur financière qu'elles représentent, mais par leur valeur d'usage.

Pour la couverture des infrastructures, il convient d'utiliser une partie des moyens qui sont également utilisés pour la mise en oeuvre des feuilles de route zéro net et qui 19 / 46

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proviennent du fonds de technologie existant. Pour cela, le montant du crédit d'engagement pour le fonds de technologie prévu à l'art. 118 de l'ordonnance sur le CO2 doit être augmenté à moyen terme.

2.4

Programme extraordinaire de remplacement des installations de chauffage

On estime que 900 000 chauffages fossiles sont encore en service aujourd'hui dans toute la Suisse, rien que dans les habitations. En moyenne, la durée de vie d'une installation de production de chaleur fossile est d'environ 20 ans. Pour que le parc immobilier n'émette plus de CO2 d'ici à 2050, il faudrait remplacer chaque année au moins 30 000 chauffages fossiles par des installations de chauffage fonctionnant aux énergies renouvelables dans les immeubles d'habitation. À cet égard, les mesures existantes sont insuffisantes, comme l'a montré une étude d'Infras (2020)25 commandée par la ville de Zurich. En 2021, environ 15 000 installations de chauffage ont été remplacées dans toute la Suisse dans le cadre du Programme Bâtiments. C'est pourquoi le projet mis en consultation par le Conseil fédéral concernant la loi sur le CO2 pour la période après 2024 prévoit des moyens supplémentaires provenant de la taxe sur le CO2 pour le remplacement des chauffages. Ces moyens doivent être intégrés dans le Programme Bâtiments existant.

Pour les mêmes raisons, la loi-cadre met à disposition, durant dix ans, 2 milliards de francs au total, à raison de 200 millions de francs par an au plus, de fonds fédéraux supplémentaires pour le remplacement des installations de chauffage à combustible fossile, des chauffages électriques à résistances et des installations de préparation d'eau chaude par une source de chaleur renouvelable, une pompe à chaleur ou un raccordement à un réseau de chauffage à distance. Cette incitation financière doit permettre de remplacer le plus rapidement possible des installations de chauffage supplémentaires et de réduire ainsi davantage les émissions du parc immobilier.

2.5

Rôle de modèle de la Confédération, des cantons et des communes

En vertu de la loi-cadre, la Confédération, les cantons et les communes doivent jouer un rôle de modèle pour ce qui est de l'atteinte de l'objectif de zéro émission nette et de l'adaptation aux effets des changements climatiques. L'administration fédérale centrale doit avoir au minimum atteint l'objectif de zéro émission nette d'ici à 2040.

En plus des émissions directes et indirectes, les émissions générées en amont et en aval par des tiers doivent également être prises en considération. Les cantons doivent en outre viser au minimum l'objectif de zéro émission nette à partir de 2040 pour leurs administrations centrales; il en va de même pour les entreprises proches de la Confédération.

25

INFRAS & Quantis, 2020: Émissions nettes zéro de gaz à effet de serre de la ville de Zurich.

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L'initiative Exemplarité Énergie et Climat s'adresse aujourd'hui déjà aux principaux fournisseurs suisses de prestations d'intérêt public qui souhaitent agir de manière innovante et exemplaire dans le domaine de l'énergie26. En signant une déclaration d'intention, ils s'engagent à contribuer à la mise en oeuvre de l'accord sur le climat. Les acteurs de l'initiative sont actuellement l'administration fédérale, Skyguide, la Poste, Postfinance, CarPostal, le domaine des EPF, Flughafen Zürich, Genève Aéroport, RUAG, les CFF, la SRG SSR, SIG et Swisscom. L'initiative peut intégrer de nouveaux acteurs ou collaborer avec eux. Une forme d'intégration a été élaborée pour l'échelon cantonal: un groupe d'institutions du canton de Genève devrait ainsi rejoindre l'initiative en septembre 2022.

Il est également possible de développer les mesures existantes dans le cadre spécifique de l'administration fédérale. Le SMEA DDPS et RUMBA, qui concerne toutes les autres unités de l'administration fédérale centrale, ont été mis en place dès 1999. Le 3 juillet 2019, le Conseil fédéral a renforcé leurs objectifs en adoptant le train de mesures sur le climat pour l'administration fédérale. Actuellement, ces objectifs sont les suivants: d'ici à fin 2030, le DDPS doit réduire ses émissions de gaz à effet de serre d'au moins 40 % par rapport à 2001. Les autres unités de l'administration fédérale ainsi que les unités décentralisées telles que l'Institut fédéral de métrologie (METAS) doivent, pour leur part, réduire leurs émissions de gaz à effet de serre de 50 % par rapport à 2006. L'ensemble des émissions de gaz à effet de serre de l'administration fédérale centrale et une grande partie de celles de l'administration fédérale décentralisée sont intégralement compensées à l'étranger depuis 2020.

Le service spécialisé RUMBA et celui en charge du SMEA DDPS coordonnent les travaux de mise en oeuvre. Outre l'amélioration de l'efficacité énergétique de ses bâtiments, l'administration fédérale dispose d'un potentiel de réduction particulièrement important dans le domaine de la mobilité. C'est pourquoi le Conseil fédéral décidera cet été de l'éventuelle mise en place d'une gestion de la mobilité à l'échelle de la Confédération.

3

Commentaire des dispositions

3.1

Loi fédérale relative aux objectifs en matière de protection du climat

Art. 1

But

Les objectifs de réduction des émissions de gaz à effet de serre et l'utilisation de NET visent à garantir la contribution de la Suisse à la limitation du réchauffement global à 2 °C voire 1,5 °C (let. a). La réduction des émissions de gaz à effet de serre comprend des mesures destinées à empêcher que ces gaz parviennent dans l'atmosphère. Il s'agit, par exemple, de mesures visant à remplacer les énergies fossiles par des énergies exemptes de CO2 ou le captage à la source des émissions de gaz à effet de serre de sources fossiles ou liées aux processus (CSC). Les mesures qui extraient durable-

26

www.exemplarite-energie-climat.admin.ch

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ment le CO2 de l'atmosphère sont appelées technologies d'émission négative (cf. définition à l'art. 2, let. a). Les objectifs définis à la let. a sont précisés aux art. 3 et 4 du projet d'acte.

Les let. b et c reprennent les deux autres objectifs de l'accord sur le climat, qui sont précisés aux art. 8 (adaptation) et 9 (flux financiers) du projet d'acte.

Art. 2

Définitions

L'art. 2 contient des définitions légales de termes importants, listés ci-après, qui figurent à plusieurs reprises dans le projet d'acte.

Les NET (let. a) sont des procédés biologiques et techniques permettant d'extraire le CO2 de l'atmosphère et de le fixer durablement dans les forêts, les sols, des produits en bois et d'autres puits de carbone. Les NET n'empêchent pas le CO2 de pénétrer dans l'atmosphère, mais l'en extraient par des approches naturelles ou techniques.

Les émissions directes (let. b) sont des émissions de gaz à effet de serre générées en particulier par l'exploitation. Il s'agit notamment des émissions de gaz à effet de serre issues des processus de combustion (y c. des carburants), mais aussi des émissions des processus (p. ex. les émissions de protoxyde d'azote libérées lors de processus chimiques ou les émissions géogènes lors de la production de ciment). Dans le langage international, ces émissions sont également appelées émissions de scope 127.

Les émissions indirectes (let. c) sont des émissions de gaz à effet de serre découlant de la mise à disposition de l'énergie achetée (notamment lors de la production et du transport) telle que l'électricité produite par des centrales à charbon ou le chauffage à distance avec des énergies fossiles. Dans le langage international, elles sont également appelées émissions de scope 2.

On entend par zéro émission nette (let. d) le fait que les émissions de gaz à effet de serre doivent en premier lieu être réduites afin d'éviter qu'elles parviennent dans l'atmosphère. Cela implique également l'utilisation de CSC pour les émissions de CO2 de sources fossiles et liées aux processus. Les émissions de gaz à effet de serre qui ne peuvent pas être évitées par des moyens techniques devront être compensées par le recours à des NET.

Art. 3

Objectifs en matière de réduction des émissions et de technologies d'émission négative

L'al. 1 prévoit que l'objectif de zéro net doit être atteint d'ici à 2050. Cet objectif sera réalisé lorsque l'effet des émissions anthropiques de gaz à effet de serre émises en Suisse jusqu'à cette date sera égal à zéro. Cet objectif doit être mis en oeuvre de manière à ce que la priorité soit de réduire le plus possible les émissions de gaz à effet de serre, donc d'éviter qu'elles parviennent dans l'atmosphère (let. a). L'effet des émissions de gaz à effet de serre résiduelles qui, en l'état actuel des connaissances, ne peuvent pas être évitées uniquement par des mesures techniques doit être compensé par le recours à des NET (let. b). Ces émissions de gaz à effet de serre difficilement

27

Cf. Greenhouse Gas Protocol | (ghgprotocol.org).

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évitables sur le plan technique sont avant tout générées par l'agriculture, l'incinération des déchets et certains processus industriels28.

À long terme, c'est-à-dire au-delà de 2050, le bilan mondial des émissions devra devenir globalement négatif afin que la concentration de gaz à effet de serre dans l'atmosphère baisse à nouveau. Ce n'est qu'à cette condition que le réchauffement de la planète pourra être limité, avec une probabilité suffisamment élevée, à 1,5 °C. L'al. 2 précise que ce principe s'applique également à la Suisse.

L'al. 3 définit les objectifs intermédiaires qui devront être atteints sur la voie vers l'objectif de zéro net. Ces objectifs intermédiaires découlent de l'évolution des émissions décrite dans la stratégie climatique à long terme. Ils comprennent le CSC des émissions de sources fossiles et liées aux processus, mais pas le recours aux NET, et se fondent sur le principe selon lequel les émissions doivent être tout d'abord réduites en Suisse, dans la mesure où cela est réalisable sur le plan de la technique et économiquement supportable (al. 4). D'une manière générale, l'évaluation doit être faite dans une optique macroéconomique tenant également compte de la compétitivité internationale. Il conviendra de déterminer dans quelle mesure les applications pour lesquelles des technologies de remplacement éprouvées qui existent déjà pourront continuer à être autorisées. Par conséquent, l'acceptabilité économique ne peut pas être assimilée à la viabilité économique (ou rentabilité), mais doit plutôt être comprise dans le sens d'une exigence raisonnable du point de vue économique, par exemple en ce qui concerne les liquidités d'une entreprise modèle économiquement saine de la branche concernée.

L'al. 4 garantit également que les mesures de compensation classiques réalisées à l'étranger peuvent continuer à jouer un rôle secondaire à long terme. Certes, ces dernières ne doivent pas être exclues, mais la réduction des émissions pour atteindre l'objectif de zéro net doit autant que possible être réalisée par des mesures mises en oeuvre en Suisse. De plus, le potentiel de réduction à l'étranger diminuera à l'avenir, toutes les Parties à l'accord sur le climat visant à atteindre zéro émission nette.

En revanche, les émissions négatives peuvent en principe être produites aussi bien
en Suisse qu'à l'étranger. À l'étranger, cela peut se faire, par exemple, par le biais de l'exportation d'émissions de CO2 biogène en vue de leur stockage durable dans le sous-sol ou par captage direct du CO2 dans l'air et stockage. En Suisse, le facteur limitant réside surtout dans les capacités de stockage (cela vaut également pour le CSC des émissions de sources fossiles et liées aux processus). C'est pourquoi l'al. 5 prévoit que la Confédération et les cantons doivent veiller à ce qu'au plus tard d'ici à 2050, des puits de carbone soient disponibles en Suisse et à l'étranger en quantité suffisante pour atteindre l'objectif de zéro net, ce qui comprend également l'infrastructure de transport éventuellement nécessaire et la conclusion de traités bilatéraux pour l'imputation du CO2 exporté ou des émissions négatives financées à l'étranger aux objectifs climatiques de la Suisse. Pour accomplir cette tâche, il conviendra de tenir compte des compétences constitutionnelles de la Confédération et des cantons.

Ainsi, la réglementation concernant d'éventuels pipelines de CO2 relève de la compétence des cantons, car il n'existe actuellement aucune base constitutionnelle pour une

28

Cf. Conseil fédéral (2021): Stratégie climatique à long terme de la Suisse.

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réglementation globale par la Confédération (il en va de même pour les puits de carbone géologiques en Suisse). La Confédération entend bien entendu jouer un rôle de coordination, dans la mesure où cela est possible et souhaité par les acteurs concernés.

Le Conseil fédéral est investi de la compétence de fixer des valeurs indicatives pour le recours à des NET.

En vertu de l'al. 6, l'objectif de zéro net visé à l'al. 1 et l'objectif de négatif net défini à l'al. 2 incluent le bilan climatique des carburants utilisés et dont les pleins sont effectués en Suisse pour les transports aériens et maritimes internationaux. Le trafic aérien a cependant un impact climatique supplémentaire, causé dans l'atmosphère par les émissions de NOx, de vapeur d'eau et de particules de sulfate et de suie. Selon la période considérée, les conditions météorologiques et l'altitude de vol, cet effet varie toutefois du simple au triple29 en ce qui concerne les émissions de CO2 issues de la combustion de carburants d'aviation fossiles. Cet impact sur le climat ne peut donc pas être déterminé forfaitairement à l'aide d'un facteur uniforme, mais que de manière approximative. Par conséquent, il convient de ne pas tenir compte de l'effet atmosphérique, mais de prendre en compte uniquement les émissions de CO2 dues aux carburants d'aviation fossiles pouvant être déterminées de manière univoque, et sur lesquelles sont également basés le SEQE européen et le système mondial CORSIA.

En accord avec les règles valables sur le plan international, l'aviation et la navigation internationales ne sont pas incluses dans les objectifs intermédiaires quantifiés à l'al. 3; en l'occurrence, seules les émissions dues au trafic aérien et à la navigation en Suisse doivent être prises en compte, par analogie à la loi sur le CO2 en vigueur.

Une minorité veut atteindre l'objectif de zéro net d'ici à 2040. Une autre minorité souhaite que l'objectif de zéro net d'ici à 2050 fixé à l'al. 1 soit défini par rapport à l'année de référence 1990 et en tenant compte de l'évolution de la population et de l'économie.

Une autre minorité veut réduire de moitié, par rapport à la version de la majorité, les objectifs intermédiaires définis à l'al. 3.

Une autre minorité encore souhaite également prendre en compte, dans les objectifs intermédiaires définis à l'al. 3, les émissions des carburants dont les pleins sont effectués en Suisse pour les transports aériens et maritimes internationaux.

Art. 4

Valeurs indicatives pour les différents secteurs

Dans sa stratégie climatique à long terme, le Conseil fédéral a fixé des objectifs pour certains secteurs, en se fondant sur les trajectoires de réduction techniquement possibles. Les valeurs indicatives inscrites à l'art. 4 en sont dérivées, et ce pour les années cibles 2040 et 2050. Selon cet article, les secteurs du bâtiment (al. 1, let. a) et des transports (al. 1, let. b) ne devront plus générer d'émissions de gaz à effet de serre en 2050. Le secteur de l'industrie (al. 1, let. c) devra réduire ses émissions d'au moins 90 % par rapport à 1990, CSC des émissions de sources fossiles et liées aux processus compris. La loi sur le CO2 en vigueur habilite le Conseil fédéral à définir des objectifs sectoriels intermédiaires. Celui-ci a fait usage de cette compétence durant la période 29

Neu U. (2021): Die Auswirkungen der Flugverkehrsemissionen auf das Klima.

Swiss Academies Communications 16 (3).

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d'engagement 2013­2020, en arrêtant dans l'ordonnance sur le CO230 des objectifs intermédiaires pour 2015 s'appliquant aux secteurs du bâtiment, des transports et de l'industrie.

La réalisation des objectifs sera vérifiée au moyen de l'inventaire des gaz à effet de serre; aussi, les différents secteurs définis coïncident avec ceux de l'inventaire. Cela signifie que le secteur des transports ne comprend pas l'aviation et la navigation internationales, que le secteur de l'industrie intègre la valorisation des ordures ménagères et que les entreprises de la branche des services qui n'utilisent que de l'énergie de chauffage sont assimilées au secteur du bâtiment.

Au vu de l'horizon temporel long, il paraît important que le Conseil fédéral puisse réagir lorsque, par exemple, les bases scientifiques ou les directives internationales changent. Sont concernées notamment les bases et la métrologie pour l'évaluation de l'impact climatique des différents gaz à effet de serre. Le Conseil fédéral mettra systématiquement ces bases à jour en fonction des connaissances scientifiques les plus récentes. Il est donc judicieux d'introduire une disposition selon laquelle le Conseil fédéral pourra, par exemple, définir des valeurs indicatives pour d'autres secteurs, tels que l'agriculture, l'aviation internationale ou les NET. L'al. 2 tient compte de cette préoccupation. Si de nouvelles connaissances devaient appeler une adaptation des valeurs indicatives visées aux let. a à c, une révision de la loi serait nécessaire.

Une minorité souhaite ajouter une let. d à l'al. 1 afin de fixer des valeurs indicatives pour le secteur agricole. Une autre minorité veut introduire des valeurs limites en matière de CO2 à partir de 2027 pour les constructions anciennes dans les cantons qui ne parviendront vraisemblablement pas à atteindre les valeurs indicatives visées à l'al. 1, let. a.

Une autre minorité encore souhaite supprimer l'art. 4.

Art. 5

Feuilles de route pour les entreprises et les branches

L'al. 1 dispose le principe selon lequel toutes les entreprises doivent avoir ramené leurs émissions, directes et indirectes, à zéro net d'ici à 2050 au plus tard. Selon la définition de l'art. 2, let. d, zéro net signifie que l'effet des émissions qui ne peuvent être évitées est compensé par le recours à des NET. Les entreprises peuvent toutefois prendre en compte également les émissions de scope 3 dans l'objectif de zéro net.

Sont visées dans cet alinéa les entreprises de l'industrie, de l'artisanat et des services, mais pas les exploitations agricoles.

Eu égard à cet objectif à long terme, il est judicieux que les entreprises ou les branches établissent une feuille de route zéro net, ce qui doit toutefois rester facultatif (al. 2). Il doit être possible pour les branches homogènes de concevoir une seule feuille de route, qui sera mise à la disposition de toutes les entreprises concernées. Le projet d'acte prévoit que la Confédération mette en place les conditions-cadres afin que les entreprises et les branches qui établissent un tel document d'ici à 2029 pour atteindre le zéro net puissent se faire conseiller et accompagner (al. 3). Pour ce faire, la Confédé-

30

RS 641.711

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ration fournira des bases uniformisées (documents, méthodologies, etc.) et des conseils d'experts. Les feuilles de route se réfèrent aux émissions générées en Suisse, mais peuvent et doivent également s'appliquer aux émissions produites à l'étranger.

Il est possible de s'appuyer sur les normes reconnues internationalement, tels que les objectifs fondés sur des données scientifiques («science based targets»), et les recommandations du groupe de travail sur la publication d'informations financières relatives au climat («Task Force on Climate Related Financial Disclosure»).

Une minorité veut prévoir à l'al. 1 que les entreprises sont tenues de réduire autant que possible leurs émissions de gaz à effet de serre d'ici à 2050. Pour ce faire, elles doivent prendre en compte les connaissances scientifiques les plus récentes et les nouvelles technologies à disposition.

Art. 6

Encouragement de technologies et de processus innovants

Les entreprises ayant établi une feuille de route en vertu de l'art. 5, al. 2, peuvent demander une aide financière pour sa mise en oeuvre ou pour réaliser certaines mesures qui y sont prévues, à condition que les fonds correspondants soient garantis au plus tard en 2030 («early movers»). Sont soutenus uniquement les technologies et processus ayant un caractère novateur (dans le cadre du cycle d'innovation, phases 4 à 6) ou les technologies existantes qui ne se sont pas encore largement établies (al. 1). À titre d'exemple, les pompes à chaleur classiques d'usage courant ne sont pas subventionnées contrairement aux pompes à chaleur haute température.

Toutes les formes d'aide financière sont envisageables, par exemple les contributions à fonds perdu, les couvertures de risques ou les subventions remboursables. L'adjudication peut être réalisée sur la base d'appels d'offres publics Les instruments existants sont utilisés à cette fin (al. 2), ce qui permet d'éviter la création d'un dispositif parallèle, de miser à la place sur les instruments d'encouragement établis et sur le savoirfaire disponible. Les conditions relatives à l'octroi des moyens sont réglées dans les actes juridiques correspondants. Si une mesure ne relève pas, sur le fond, des bases juridiques susmentionnées, l'al. 1 constitue une base juridique distincte supplémentaire pour l'élargissement de l'encouragement dans le cadre des instruments existants (objectif d'encouragement p. ex.).

Il revient au Conseil fédéral de préciser les mesures donnant droit à subvention et les conditions requises afin de garantir que soient soutenues uniquement les mesures efficaces en matière de réduction des émissions et essentielles à l'atteinte de l'objectif de zéro émission nette dans les entreprises (al. 3, let. a). Le Conseil fédéral peut également prévoir des délais de mise en oeuvre (al. 3, let. b), étant donné que la mesure d'encouragement est limitée dans le temps et que les demandes déposées ne doivent pas bloquer les ressources disponibles pour une durée trop longue.

La première partie de l'al. 4 dispose qu'aucune contribution n'est versée pour des mesures qui bénéficient déjà d'autres soutiens. Une seule et même mesure ayant un effet spécifique ne doit pas être encouragée deux fois conformément à un principe de base du système de subvention (voir à ce sujet l'art. 12 de loi sur les subventions (LSu)31).

La délivrance d'attestations dans le cadre de projets de compensation est considérée 31

RS 616.1

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comme une subvention, raison pour laquelle aucune contribution selon l'art. 6 ne peut être octroyée pour ces projets. Certaines dispositions de la loi sur le CO2 obligent les entreprises à prendre certaines mesures pour lesquelles l'art. 12 LSu ne s'applique pas, car il n'existe pas de subvention correspondante. Une telle mesure, prise en vertu d'une obligation légale, ne doit pas être encouragée, étant donné qu'il ne s'agirait que d'un effet d'aubaine. La deuxième partie de l'al. 4 précise par conséquent que les mesures prévues par un instrument de réduction relevant notamment de la législation sur le CO2 (tels que SEQE ou engagement de réduction) ne peuvent pas non plus être encouragées en vertu de l'art. 6.

Il n'en demeure pas moins que lorsqu'un effet de réduction ne peut être atteint que par l'association de différentes mesures (et de différents acteurs), chacune de ces mesures peut en principe être encouragée.

Pour que les aides financières puissent, conformément à l'al. 1, être garanties aux «early movers» jusqu'à fin 2030, l'Assemblée fédérale accorde un crédit d'engagement par voie d'arrêté fédéral simple (al. 5). Ce crédit d'engagement doit se monter à 1,2 milliard de francs et porter sur une période de six ans (art. 1 de l'arrêté fédéral sur le financement de l'encouragement de technologies et de processus innovants). Il doit être valable à compter de l'entrée en vigueur de la loi fédérale relative aux objectifs en matière de protection du climat. Étant donné que les branches et les entreprises doivent établir des feuilles de route avant de pouvoir obtenir une aide financière, la plus grande partie des fonds disponibles sera versée probablement seulement à la fin de la période d'encouragement. Les ressources non allouées d'ici à la fin 2030 seront reversées au budget de la Confédération.

Art. 7

Couverture des risques

Une partie des moyens financiers mis à disposition en vertu de l'art. 6, al. 5, doivent être utilisés pour soutenir aussi les infrastructures publiques, si cette aide est nécessaire pour atteindre l'objectif de zéro net. Il pourrait s'agir, par exemple, de réseaux thermiques, de pipelines de transport de CO2 ou de puits de carbone géologiques.

Dans le cas des infrastructures, l'encouragement doit prendre la forme d'une couverture des risques financiers et se dérouler par le biais du fonds de technologie existant.

Il y a deux raisons à cela: premièrement, dans la plupart des cas, ces infrastructures sont de la compétence des communes et des cantons et, deuxièmement, les investissements nécessaires dans le domaine des infrastructures représentent des montants très élevés qui ne peuvent être couverts. Un instrument de couverture des risques financiers permet un effet de levier grâce aux fonds engagés. La hauteur de la couverture des risques devra être réglementée dans les dispositions d'exécution. La couverture des risques devra être aussi bien plafonnée que limitée dans le temps.

Art. 8

Objectif pour l'adaptation aux changements climatiques

L'adaptation aux effets négatifs des changements climatiques est une tâche qui doit être assumée conjointement par la Confédération et les cantons dans le cadre de leurs compétences (al. 1).

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Dans sa stratégie d'adaptation aux changements climatiques en Suisse32, le Conseil fédéral a défini les objectifs en matière d'adaptation aux changements climatiques. Il s'agit en particulier d'éviter une augmentation des dommages causés par les changements climatiques à l'être humain et aux biens de valeurs33 (surtout la réduction des risques au minimum, l'exploitation des opportunités et l'augmentation de la capacité d'adaptation). Ce principe est inscrit dans la phrase introductive de l'al. 2. Les mesures qu'il est nécessaire de prendre doivent poursuivre cet objectif. Il s'agit en priorité de mesures visant à éviter des dommages causés par les changements climatiques à l'être humain et aux biens de valeurs, d'une part en raison de la hausse de la fréquence et de l'intensité d'événements extrêmes tels que les fortes précipitations ou les vagues de chaleur (al. 2, let. b) et, d'autre part, en raison de la hausse de la température moyenne et de la modification du régime de précipitations, qui peuvent, par exemple, compromettre l'adéquation de certaines plantes cultivées aux conditions locales ou la sécurité de l'enneigement dans les domaines skiables (al. 2, let. a). L'épicéa souffre par exemple de plus en plus de la sécheresse estivale croissante, avec notamment pour conséquence que les forêts de protection ne peuvent plus remplir leur fonction. Enfin, l'al. 2, let. c, précise que des mesures visant à éviter des dommages en raison de modifications des milieux naturels et de la composition des espèces sont également nécessaires. Il s'agit par exemple de la propagation d'organismes nuisibles et d'espèces envahissantes.

Les mesures d'adaptation prises en Suisse doivent satisfaire aux principes de la stratégie d'adaptation, où la durabilité, l'action conjointe de la Confédération, des cantons, des communes et des particuliers, la compatibilité des adaptations avec la protection du climat et la prise en compte des découvertes scientifiques jouent notamment un rôle essentiel.

Art. 9

Objectif visant à rendre les flux financiers compatibles avec les objectifs climatiques

La première phrase de l'al. 1 dispose que la Confédération veille à ce que la place financière suisse apporte une contribution effective à un développement à faible émission capable de résister aux changements climatiques. Cette disposition est en adéquation avec le rapport du Conseil fédéral «Le développement durable dans le secteur financier en Suisse. État des lieux et positionnement focalisés sur les aspects environnementaux», du 24 juin 202034. Le Conseil fédéral y a formulé l'objectif selon lequel la place financière suisse devienne l'un des principaux centres mondiaux de services financiers durables. À cet effet, il entend aménager les conditions-cadres afin d'améliorer en permanence la compétitivité de la place financière suisse et de permettre au secteur financier d'apporter une contribution efficace au développement durable, en particulier à la réalisation des objectifs climatiques.

32 33 34

cf. www.bafu.admin.ch/bafu/fr/home/themes/climat/publications-etudes/publications/adaptation-aux-changements-climatiques-en-suisse-plan-d-action-2020-2025.html Les ressources naturelles comptent également parmi les biens de valeurs.

cf. www.newsd.admin.ch/newsd/message/attachments/61903.pdf

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La seconde phrase de l'al. 1 précise que les mesures à prendre doivent en particulier contribuer à la réduction de l'effet climatique des flux financiers nationaux et internationaux au moyen d'activités pertinentes de la place financière suisse.

Le Conseil fédéral peut, en vertu de l'al. 2, conclure des conventions avec les secteurs financiers. Les différents secteurs financiers (entreprises d'assurance, institutions de prévoyance, banques et gestionnaires de fortune), représentés par leurs associations, s'engageraient sur des objectifs concrets et des mesures destinées à protéger le climat grâce à ces conventions sectorielles visant à rendre les flux financiers compatibles avec les objectifs climatiques. Ce faisant, les situations de départ des secteurs financiers et des associations sont prises en compte.

Une minorité souhaite une réglementation plus contraignante à l'al. 2 concernant ces conventions, en obligeant le Conseil fédéral à en conclure avec les différentes branches du secteur financier.

Une autre minorité souhaite supprimer l'art. 9.

Art. 10

Rôle de modèle de la Confédération, des cantons et des communes

La Confédération, les cantons et les communes doivent jouer un rôle de précurseur et de modèle pour ce qui est des objectifs climatiques de la Suisse (al. 1). Cette disposition renvoie à la réduction des émissions de gaz à effet de serre, à l'utilisation de NET pour les émissions difficilement évitables et à l'adaptation aux effets des changements climatiques.

La Confédération assume son rôle de modèle en veillant à ce que l'administration fédérale centrale ait atteint l'objectif de zéro émission nette d'ici à 2040. En plus des émissions directes (scope 1) et des émissions indirectes provenant de l'énergie achetée (scope 2), les émissions générées en amont et en aval par des tiers (scope 3) sont également prises en considération en vertu de l'al. 2. Les émissions visées dans le scope 3 sont considérées sur l'ensemble du cycle de vie d'un produit ou d'une prestation. Les émissions sont ainsi comptabilisées de la fabrication à l'élimination ou au recyclage d'un produit ou d'une prestation, en passant par l'utilisation, ce qui permet une vision d'ensemble des émissions générées par l'administration. Pour les processus en aval, l'accent est mis sur l'entretien et l'élimination, et non pas sur l'utilisation des bâtiments publics. Les processus en amont, eux, englobent également les marchés publics.

Le Conseil fédéral définit les mesures pour que l'administration fédérale centrale atteigne son objectif. Ces mesures porteront en particulier sur les points suivants: ­

réduire et éviter les voyages de service en avion;

­

remplacer la flotte de véhicules à carburants fossiles par des véhicules à carburants non fossiles;

­

assainir énergétiquement le parc immobilier de l'administration fédérale, renoncer aux chauffages à combustibles fossiles et aux chauffages électriques et les remplacer;

­

introduire une obligation d'utiliser les transports publics pour les voyages de service et, le cas échéant, pour se rendre au travail;

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­

doter les bâtiments et les infrastructures de la Confédération d'installations de production d'énergies renouvelables et de bornes de recharge pour les véhicules électriques; et

­

optimiser l'exploitation et les processus.

Le Conseil fédéral devra régulièrement examiner la nécessité de remplacer les mesures précitées ou de les compléter pour atteindre l'objectif. Pour ce faire, il dispose du système de management environnemental et de l'aménagement du territoire du Département fédéral de la défense, de la protection de la population et des sports (SMEA DDPS) et du Système de gestion des ressources et de management environnemental (RUMBA) pour le reste de l'administration fédérale. Il peut prévoir des exceptions si ces mesures compromettent la sécurité du pays ou la protection de la population (p. ex. exceptions pour l'armée, la protection civile ou la police). Il informe en outre régulièrement l'Assemblée fédérale sur le degré d'atteinte de l'objectif (al. 3).

En vertu de l'al. 4, les cantons doivent également assumer un rôle de modèle pour leurs administrations centrales et les entreprises proches de la Confédération et viser l'objectif de zéro émission nette d'ici à 2040. La définition et la mise en oeuvre des mesures nécessaires leur incombent. La Confédération soutient les cantons dans le cadre de l'initiative «Exemplarité Énergie et climat», en leur fournissant des documents et des méthodes uniformes. L'Assemblée fédérale examinera la nécessité d'imposer un objectif contraignant aux entreprises proches de la Confédération dans les différentes lois spéciales (p. ex. loi sur la poste35 ou loi sur les Chemins de fer fédéraux36).

Une minorité souhaite limiter le rôle de modèle inscrit à l'al. 1 pour ce qui est de l'atteinte de l'objectif de zéro émission nette à la Confédération et aux cantons, sans mentionner les communes.

Art. 11

Mise en oeuvre des objectifs

La mise en oeuvre des objectifs visés par la présente loi implique de renforcer les mesures existantes et d'en introduire de nouvelles. En vertu de l'al. 1, le Conseil fédéral doit faire des propositions suffisamment tôt à l'Assemblée fédérale, après avoir entendu les milieux concernés et en tenant compte des connaissances scientifiques les plus récentes. Pour ce faire, il est tenu de proposer des révisions de loi pour les périodes 2025­2030 (let. a), 2031­2040 (let. b) et 2041­2050 (let. c). Le coeur de la réglementation restera toutefois la loi sur le CO2 (al. 2).

Cette cadence permet au Conseil fédéral de réagir aux développements nationaux et internationaux les plus récents et de s'assurer de la réalisation des objectifs pour 2050.

Les propositions du Conseil fédéral doivent viser un renforcement de l'économie et l'acceptabilité sur le plan social. (al. 3).

L'al. 4 précise que la Confédération et les cantons s'engagent, dans le cadre de leurs compétences, sur les plans national et international, à limiter les risques et les conséquences des changements climatiques conformément aux objectifs de la loi.

35 36

RS 783.0 RS 742.31

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Une minorité veut supprimer l'al. 4, tandis qu'une autre minorité souhaite obliger le Conseil fédéral, dans un nouvel al. 5, à baisser progressivement jusqu'à 0 gramme de CO2/km les valeurs visées en matière d'émissions pour les nouvelles voitures de tourisme et les nouveaux véhicules utilitaires et à prévoir des prescriptions pour l'utilisation de carburants renouvelables. Une autre minorité encore veut biffer l'art. 11.

Art. 12

Relation avec d'autres actes

La réalisation des objectifs fixés par la loi implique aussi l'élaboration et l'application de prescriptions d'autres actes fédéraux ou cantonaux, notamment dans les domaines du CO2, de l'environnement, de l'énergie, de l'aménagement du territoire, des finances, de l'agriculture, de l'économie forestière et de l'industrie du bois, du trafic routier et aérien et de l'imposition des huiles minérales.

Là où la situation particulière des régions de montagne et des régions périphériques l'exige, il faut si possible prévoir un soutien supplémentaire (al. 2).

Art. 13

Exécution

Le Conseil fédéral assure l'application de la loi, notamment lors de la mise en oeuvre des mesures prévues aux art. 5, 6 et 7 (al. 1). De plus, il édicte les dispositions d'exécution.

Il peut confier certaines tâches aux cantons ou à des organisations privées (al. 2).

Art. 14

Modification du droit en vigueur

La modification du droit en vigueur est réglée en annexe. Le présent projet inclut une modification de la LEne.

Art. 15

Référendum et entrée en vigueur

La loi est sujette au référendum (al. 1). Elle est publiée dans la Feuille fédérale dès que l'initiative pour les glaciers est retirée ou rejetée (al. 2). Le Conseil fédéral fixe la date de l'entrée en vigueur (al. 3).

3.2 Art. 50a

Loi sur l'énergie Programme extraordinaire de remplacement des installations de chauffage

La Confédération doit lancer un programme extraordinaire d'une durée de dix ans destiné à encourager le remplacement des installations de chauffage à combustible fossile, les chauffages électriques à résistances et les installations de préparation d'eau chaude (al. 1).

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Afin d'éviter de créer un nouvel instrument ad hoc, ce programme est conçu comme un complément au Programme Bâtiments au sens de l'art. 34 de la loi sur le CO237 actuellement en vigueur (al 2). Le Conseil fédéral a également proposé, dans le cadre de la consultation sur la loi révisée sur le CO2 pour l'après-2024, un programme d'impulsion similaire pour le remplacement des installations de chauffage, mais le programme extraordinaire dont il est question ici se voit allouer davantage de moyens (jusqu'à 200 millions de francs par an) sur une période plus longue (dix ans contre un horizon à fin 2030). Par ailleurs, les ressources supplémentaires ne sont pas versées de façon globale aux cantons sous la forme de contributions de base par habitant: de contributions fédérales seront octroyées aux cantons en fonction des demandes validées. Le Conseil fédéral fixe les taux de financement en vertu de l'art. 50b, al. 2.

Le Conseil fédéral détermine dans quelle mesure les contributions peuvent être cumulées à d'autres aides cantonales ou communales afin que ce financement supplémentaire soit intégré aux programmes d'encouragement cantonaux existants avec un maximum d'effet (al. 3).

Étant donné que le programme extraordinaire constitue un élargissement du Programme Bâtiments, l'al. 4 prévoit que les cantons soient, là encore, chargés de son exécution.

En plus de remplacer les installations de chauffage, il faut promouvoir l'utilisation efficace de la chaleur produite. Le projet prévoit par conséquent que les mesures d'isolation thermique accompagnant le remplacement de l'installation de chauffage peuvent bénéficier d'un cautionnement de la Confédération (al. 5).

Une minorité souhaite supprimer l'art. 50a.

Art. 50b

Étendue et modalités de l'aide prévue par le programme extraordinaire de remplacement des installations de chauffage

Les propriétaires de bâtiments qui remplacent une installation de chauffage mentionnée à l'art. 50a, al. 1, par une source de chaleur renouvelable, une pompe à chaleur ou le raccordement à un réseau de chauffage à distance peuvent bénéficier d'une aide financière (al. 1).

Des montants forfaitaires pour les subventions et les cautionnements sont fixés par voie d'ordonnance. Il arrive toutefois que les possibilités évoquées à l'al. 1 prennent sens uniquement si elles s'accompagnent de mesures d'amélioration d'une isolation insuffisante ou de l'installation d'un système de distribution de chaleur. Ces éléments, tout comme le nombre d'unités de logement, sont alors pris en compte pour définir les montants appropriés (al. 2).

Si les demandes d'aides sont nombreuses, des listes d'attente peuvent être établies (al. 3). En vertu de l'art. 4, le Conseil fédéral peut déroger au principe du droit sur les subventions selon lequel les travaux ne peuvent commencer que si la subvention a été accordée à la personne requérante (cf. art. 26 LSu), et prévoir des exceptions (al. 4).

Une minorité veut supprimer l'art. 50b.

37

RS 641.71

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Art. 52a

Programme extraordinaire de remplacement des installations de chauffage

La Confédération met à disposition jusqu'à 200 millions de francs par an pour le programme extraordinaire au sens de l'art. 50a (al. 1); ces fonds permettront de soutenir les propriétaires d'immeubles dans le cadre du remplacement d'installations de chauffage durant dix ans à compter de l'entrée en vigueur de la loi . À cette fin, un crédit d'engagement de 2 milliards de francs doit être demandé, en vertu de l'al. 2, via un arrêté fédéral simple (art. 1 de l'arrêté fédéral sur le financement du programme extraordinaire de remplacement des installations de chauffage). Le crédit d'engagement est limité à dix ans et doit être valable à compter de l'entrée en vigueur de la loi fédérale relative aux objectifs en matière de protection du climat. Si celle-ci entre en vigueur début 2025, les moyens non engagés à fin 2034 demeurent dans le budget de la Confédération.

Une minorité souhaite supprimer l'art. 52a.

Art. 53, al. 2, première phrase et al. 2bis et 3, let. a Les modifications portent sur les aides financières au titre de l'art. 49, al. 2, LEne, c'est-à-dire en particulier sur les aides financières pour les projets pilotes et de démonstration, dont le taux de financement passe de 40 % à 50 % (al. 2bis). La Confédération peut ainsi assumer jusqu'à la moitié du risque financier de ces projets, de façon à ce que les nouvelles technologies nécessaires à la mise en oeuvre de la politique énergétique et climatique puissent passer du stade de recherche à celui de commercialisation. Les petites et moyennes entreprises (PME) notamment, qui représentent plus de 80 % du tissu économique suisse, ont besoin de soutien à ce stade précoce en raison du manque d'accessibilité du marché des capitaux. Grâce à ces modifications, le taux d'encouragement des projets pilotes et de démonstration est harmonisé avec celui d'autres programmes d'encouragement comparables. À titre d'exemple, les projets d'innovation peuvent être soutenus par Innosuisse à hauteur de 50 % au plus.

Le taux des aides financières peut désormais être relevé à 70 % au lieu de 60 % pour les projets pilotes présentant un stade de maturité technologique peu avancé et un risque technique et financier élevé (al. 2bis), à condition que ceux-ci suscitent un intérêt particulier auprès de la Confédération et affichent un rapport coût-utilité favorable.
Cette modification permet de soutenir des projets se trouvant dans une phase critique, lorsque les risques demeurent trop élevés pour les investisseurs.

Le soutien financier apporté aux projets pilotes et de démonstration doit se concentrer sur les aspects du projet pour lesquels un risque d'«innovation» existe. Sont par conséquent réputés coûts imputables les coûts non amortissables directement liés au développement et au test des aspects innovants du projet (al. 3, let. a).

Étant donné que les aides financières visées à l'art. 49, al. 2, sont désormais définies à l'al. 2bis, l'al. 2, 1re phrase, doit être modifiée afin de renvoyer aux art. 47, 48 et 50 LEne.

Dans le cadre de la révision de la loi sur le CO2, qui a fait l'objet d'une consultation du 17 décembre 2021 au 4 avril 2022, le Conseil fédéral a déjà proposé une modifi-

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cation de l'art. 53 LEne afin de renforcer la portée du programme pilote et de démonstration. Cette modification est reprise dans le présent projet, car elle peut permettre de soutenir plus particulièrement les mesures d'encouragement visées à l'art. 6. Elle y est intégrée afin de garantir son entrée en vigueur au plus tard au même moment que l'art. 6.

4

Conséquences

4.1

Conséquences sur les émissions de gaz à effet de serre

Les conséquences sur les émissions de gaz à effet de serre de la Suisse sont indiquées par les objectifs concrets de la loi-cadre. D'ici à 2050, le bilan climatique doit être équilibré et, à compter de cette date, l'atmosphère doit être globalement délestée, les quantités de gaz à effet de serre captées et stockées étant supérieures à celles émises.

Les lois définissant des mesures à venir doivent impérativement être axées sur les objectifs intermédiaires fixés par la loi pour les périodes 2031­2040 et 2041­2050 ainsi que pour 2040. Les instruments de politique climatique doivent en outre être conçus de manière à permettre le respect des valeurs indicatives pour les différents secteurs d'une manière générale, c'est-à-dire indépendamment des variations dues aux conditions climatiques ou aux performances économiques.

Les objectifs intermédiaires dessinent également le cadre des futurs engagements de la Suisse en vertu de l'accord sur le climat. La Suisse s'est engagée à réduire ses émissions de gaz à effet de serre de moitié d'ici à 2030 par rapport à leur niveau de 1990 et à les diminuer en moyenne de 35 % sur les années 2021­2030. Ces deux objectifs doivent, dans la première loi définissant des mesures, avoir valeur d'exigences pour la conception des instruments. Le Conseil fédéral a mis en discussion une révision correspondante de la loi sur le CO2 dans le cadre d'une procédure de consultation qui a couru du 17 décembre 2021 au 4 avril 2022. Le projet vise une réduction, d'ici à 2030, des émissions de gaz à effet de serre en Suisse de 33,2 % au total par rapport à 1990, de 54 % en ce qui concerne le bâtiment, de 27 % pour ce qui est des transports et de 28 % pour ce qui relève de l'industrie.

Dans sa stratégie climatique à long terme, le Conseil fédéral évalue les besoins de NET en 2050 à près de 7 millions de tonnes de CO2, dont 2 millions pourraient être réalisés en Suisse. Le développement de capacités en matière de NET en Suisse et à l'étranger va toutefois nécessiter beaucoup de temps, et ce n'est qu'à partir de 2040 qu'une quantité notable de 0,7 million de tonnes sera atteinte. L'Association suisse des exploitants d'installations de traitement des déchets s'est engagée à l'occasion d'une convention signée le 16 mars 2022 avec le Département fédéral de l'environnement, des transports,
de l'énergie et de la communication à mettre en service une première installation de captage et de stockage d'une capacité de 100 000 tonnes de CO2 au plus tard en 2030, seule la part biogène produisant des émissions négatives. La Confédération soutient, via la promotion des technologies environnementales de l'Office fédéral de l'environnement (OFEV), un centre de compétences en matière de CO2 en vue d'une installation pilote au sein de l'usine d'incinération des ordures ménagères Linth.

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La loi-cadre permet d'encourager à grande échelle les projets innovants et les installations pilotes et notamment d'apporter des garanties financières aux infrastructures nécessaires dans le contexte des NET et du CSC, et crée ce faisant les conditions indispensables à la génération des capacités correspondantes. En ce qui concerne la décarbonation de l'industrie, les technologies ne sont actuellement souvent pas assez matures ou pas assez éprouvées pour permettre de réduire les émissions à un minimum. L'encouragement prévu à l'art. 6 vise à promouvoir les technologies et processus innovants et ainsi à réduire les émissions. Le potentiel de réduction correspondant dépend fortement de l'utilisation des nouveaux instruments; il est donc difficile d'estimer l'effet.

Inversement, il existe des solutions de substitution respectueuses du climat pour le chauffage des bâtiments. L'encouragement du remplacement des chauffages fossiles et les garanties en vue d'une meilleure isolation de l'enveloppe des bâtiments en complément au Programme Bâtiments visent à réduire les obstacles financiers s'opposant à une diffusion à grande échelle. Les 200 millions de francs d'encouragement supplémentaires permettent de remplacer chaque année près de 10 000 chauffages de plus et ainsi d'atteindre un effet en matière de CO2 de 0,1 million de tonnes, ce qui correspond à une réduction de 1 million de tonnes de CO2 en 2034 et de 5,5 millions de tonnes au total sur dix ans.

L'initiative «Exemplarité Énergie et climat» de la Confédération a permis une réduction de presque 0,4 million de tonnes de CO2 entre 2006 et 2020, chaleur à distance et électricité comprise (scope 2). Au travers du train de mesures sur le climat pour l'administration fédérale, le Conseil fédéral a fixé à l'administration civile fédérale un objectif de réduction d'au moins 50 % d'ici à 2030 par rapport à 2006 et de 40 % par rapport à 2001 au DDPS. Les émissions résiduelles doivent être compensées depuis 2020. Le Conseil fédéral a défini le 11 mars 2022 le concept et le cadre financier pour ce qui est de la compensation à l'étranger selon les règles de l'accord sur le climat.

D'autres effets environnementaux (secondaires) pourraient découler de plusieurs mesures de politique climatique susceptibles d'être utilisées pour atteindre l'objectif de zéro
net. Ainsi, l'assainissement énergétique des bâtiments et le remplacement des combustibles et des carburants fossiles par des énergies non polluantes contribuent simultanément à réduire les polluants atmosphériques tels que les oxydes d'azote, le monoxyde de carbone, les poussières fines et l'ozone, ce qui se traduira par une diminution des affections liées à la pollution de l'air et des décès, et par une baisse des coûts de santé et des dégâts causés aux bâtiments. La combustion des énergies renouvelables ne présentera toutefois un bilan positif pour la qualité de l'air qu'à la condition qu'elle se fasse dans des installations à faibles émissions de poussières fines.

Parmi les autres effets secondaires environnementaux importants qui se manifestent, on peut citer les effets sur les émissions de bruit, la qualité du sol ou la biodiversité.

Dans le secteur des transports, les effets externes engendrés par la pollution atmosphérique s'élèvent actuellement à 4 milliards de francs, ceux liés aux émissions de bruit à 2,7 milliards de francs et ceux résultant des dommages causés à la nature et au paysage à 1,2 milliard de francs38.

38

Office fédéral du développement territorial (ARE) (2020): Coûts et bénéfices externes des transports en Suisse ­ Transports par la route et le rail, par avion et par bateau.

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4.2

Conséquences pour l'économie

La réduction des émissions à zéro net d'ici à 2050 suppose que les investissements soient, aujourd'hui déjà, axés sur cet objectif. Si les cycles de renouvellement sont utilisés de manière cohérente pour remplacer les installations, les véhicules et les installations de chauffage par des technologies générant moins de CO2, il sera possible d'économiser des frais d'exploitation et d'éviter de coûteux investissements inappropriés. Aujourd'hui déjà, plusieurs solutions de substitution renouvelables se révèlent concurrentielles, notamment dans le domaine de l'électromobilité ou de la production de chaleur.

Les efforts déployés dans tous les domaines doivent donc continuer d'être renforcés afin que les émissions de l'ensemble des secteurs puissent baisser dans toute la mesure du possible. Les investissements dans les gains en efficacité énergétique sont souvent rentabilisés en quelques années grâce aux économies réalisées. La réalisation de l'objectif de zéro émission nette implique toutefois aussi l'extension et la restructuration du système d'approvisionnement en énergie actuel, encore fortement marqué par les agents énergétiques fossiles, y compris de l'infrastructure du réseau, ainsi que des investissements dans des NET.

Les résultats obtenus à partir des modélisations des perspectives énergétiques 2050+ montrent que, d'ici à 2050, 1400 milliards de francs supplémentaires devront être investis dans le système énergétique, indépendamment de l'objectif de zéro net. Les investissements supplémentaires inhérents à ce dernier s'élèveront à 109 milliards de francs au total, soit 8 % de plus39. Les coûts d'exploitation des installations d'approvisionnement en énergie augmenteront d'environ 14 milliards de francs. Dans le même temps, la réduction des émissions à zéro net permettra de réaliser des économies sur les coûts de l'énergie à hauteur de 50 milliards de francs, notamment grâce à l'abandon des importations d'agents fossiles. La différence entre les investissements supplémentaires nécessaires et les économies réalisées en matière de coûts énergétiques sur la période allant de 2020 à 2050 donnent lieu à des coûts économiques annuels directs de près de 2,4 milliards de francs40.

La restructuration du système d'approvisionnement énergétique et d'autres adaptations des systèmes de production, nécessaires
pour réduire les émissions de manière globale, entraînent une modification de la structure sectorielle de la production et de la création de valeur, et par là de l'emploi. Les mesures de politique climatique conduisent à un abandon des produits et processus émettant d'importantes quantités de CO2. Elles renforcent ainsi l'imputation des coûts externes de la consommation d'énergies fossiles à ceux qui les occasionnent.

Concernant le commerce extérieur, le contexte international joue un rôle majeur: en se fixant l'objectif d'atteindre zéro émission nette d'ici à 2050, la Suisse s'aligne sur les stratégies de ses principaux partenaires commerciaux. Aucune baisse de compétitivité de l'industrie nationale ni aucun effet sectoriel consécutif sur le commerce ex-

39 40

Prognos/TEP Energy/Infras/Ecoplan (2020), p. 89.

Prognos/TEP Energy/Infras/Ecoplan (2020), p. 88.

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térieur ne sont donc à prévoir. Des objectifs climatiques ambitieux encouragent l'innovation technique, ce dont peuvent profiter les pays qui se préoccupent suffisamment tôt du développement des technologies d'avenir. Ils maintiendront ainsi la compétitivité de leur économie sur les marchés porteurs en pleine expansion.

En Suisse, la réduction des émissions à zéro net offre des opportunités de croissance dans certaines branches. La Suisse compte un grand nombre d'entreprises novatrices, et le secteur des technologies propres («cleantech») y est fortement représenté. Au cours des dernières années, ce secteur a connu une croissance nettement supérieure à la moyenne et a vu sa valeur ajoutée pratiquement doubler depuis 2000. Selon la définition de l'Office fédéral de la statistique, le secteur environnemental regroupe «les activités qui produisent des biens ou des services destinés soit à protéger l'environnement de la pollution et de toutes autres dégradations, soit à gérer les ressources naturelles de façon à éviter leur épuisement»41. Les possibilités en matière d'énergies renouvelables, d'économies d'énergie et de gestion de l'énergie se sont considérablement accrues. L'emploi dans le secteur des cleantech a augmenté de 87 % depuis 2000 et représente 150 000 équivalents plein temps. Dans l'ensemble, le secteur des cleantech ainsi que d'autres branches importantes pour ce secteur, comme les transports publics, emploient aujourd'hui 5,1 % de la main-d'oeuvre et contribuent à hauteur de 4,2 % au PIB.

On peut partir du principe que ces évolutions positives se renforceront encore avec l'objectif de zéro net. La réduction des émissions de gaz à effet de serre à zéro net offre également des chances de croissance au secteur des cleantech. Celui-ci offre également des possibilités de croissance en dehors du secteur des cleantech, notamment dans le domaine des technologies de l'information, qui peuvent contribuer à abaisser les émissions dans différents domaines grâce à des solutions numériques, ou dans les domaines des assurances et de la finance, qui peuvent augmenter leur compétitivité grâce à des services financiers durables et respectueux du climat42, ou encore de l'économie forestière, dont la production devrait augmenter en raison de la demande accrue en biomasse. La place suisse de la recherche
devrait, elle aussi, profiter d'une orientation cohérente sur l'objectif de zéro net.

La transition vers le zéro net s'accompagnera d'un changement structurel sectoriel accéléré. Toutefois, les mesures choisies détermineront les effets de la réduction des émissions de gaz à effet de serre sur des indicateurs macroéconomiques tels que le PIB, la prospérité et l'emploi. Les effets de la répartition dépendent, eux aussi, principalement de la combinaison de mesures de politique climatique concrètes. Une analyse détaillée des conséquences devra donc être réalisée lors de l'élaboration des lois définissant des mesures.

Les coûts de la réduction des émissions à zéro net sont compensés par les avantages retirés des coûts évités qui seraient induits par des changements climatiques non maîtrisés. Cela aussi grâce à la coopération internationale.

41 42

Cf. www.bfs.admin.ch > Trouver des statistiques > Espace, environnement > Comptabilité environnementale > Biens et services environnementaux.

Cf. Conseil fédéral (2020): rapport «Le développement durable dans le secteur financier en Suisse», dans lequel il est dit que la place financière suisse entend renforcer son rôle de référence mondiale en matière de services financiers durables.

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Les changements climatiques causent, entre autres, des dommages accrus aux infrastructures, des coûts de santé plus élevés, une baisse de la productivité agricole et des rendements plus faibles dans les secteurs économiques particulièrement touchés, notamment le tourisme d'hiver. Si les mesures prises pour contrer les changements climatiques sont insuffisantes, voire inexistantes, les effets et les coûts induits continueront d'augmenter au fil du temps. En cas d'élévation trop importante de la température, le risque d'un dépassement des points de basculement («tipping points»), qui aurait pour effet de modifier de manière permanente et irréversible le système climatique, n'est pas à exclure. Les coûts induits par le dépassement de ces points de basculement seraient considérables.

L'École polytechnique fédérale de Lausanne43 estime que la perte de PIB en cas de changements climatiques non maîtrisés pourrait atteindre 1,4 % en 2060. L'étude ne tient toutefois pas compte des événements inhabituels, tels que les vagues de chaleur exceptionnelles ou les périodes de sécheresse. Des études antérieures44 tablent sur une forte augmentation des coûts en cas d'élévation de la température de plus de 2 °C, surtout après 2050, qui pourrait représenter plusieurs pour cent du PIB de la Suisse vers la fin du siècle. Des coûts supplémentaires s'élevant à 1,1 % du PIB pourraient survenir en raison de pertes à l'exportation et d'interruptions des chaînes d'approvisionnement45. Dans le domaine des infrastructures, des changements climatiques non maîtrisés pourraient causer des dommages annuels à hauteur de 1 milliard de francs d'ici le milieu du siècle46. Dans le secteur de la santé, les coûts annuels pourraient même atteindre 11 milliards de francs à partir de 206047. Des travaux qui examinent les coûts des changements climatiques au niveau macroéconomique montrent que les coûts de l'inaction, en d'autres termes les coûts d'un réchauffement mondial non contrôlé, atteindront pour la Suisse en 2050 déjà un montant annuel équivalent à 4 % du PIB48. Des chiffres généralement un peu plus élevés sont articulés dans des études internationales comme le rapport Stern49 ou les estimations de l'Organisation de coopération et de développement économiques (OCDE)50, selon lesquelles la perte mondiale de PIB pourrait atteindre 10 % vers la fin du siècle.

43 44 45

46 47 48 49 50

École polytechnique fédérale de Lausanne (EPFL) (2017): Assessing the impacts of climate change for Switzerland. Sur mandat de l'OFEV, Lausanne.

Ecoplan / Sigmaplan (2007): Auswirkungen der Klimaänderung auf die Schweizer Volkswirtschaft (nationale Einflüsse). Sur mandat de l'OFEV et de l'OFEN, Berne.

Infras / Ecologic / Rütter + Partner (2007). Auswirkungen der Klimaänderung auf die Schweizer Volkswirtschaft (internationale Einflüsse). Berlin/Rüschlikon/Berne.

L'étude a été actualisée depuis (Infras [2018]). On a toutefois renoncé à effectuer une estimation quantitative des coûts.

Swiss Economics (2019): Bedeutung des Klimawandels für die Infrastrukturen der Schweiz ­ Stand der Literatur. Zurich.

Vöhringer et al. (2019): Cost and benefits of climate change in Switzerland, Climate Change Economics 10 (2), 1-34.

Kahn et al. (2019): Long-Term Macroeconomic Effects of Climate Change: A CrossCountry Analysis. IMF Working Paper 19/215.

Stern (2006): The Stern Review on the Economics of Climate Change, HM Treasury, Londres.

OCDE (2015): The Economic Consequences of Climate Change, OECD Publishing, Paris.

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À l'occasion de la discussion sur les conséquences, il convient de noter que les coûts et les avantages de la réduction à zéro net des émissions de gaz à effet de serre évoluent différemment au fil du temps. Conformément aux objectifs définis dans l'accord sur le climat, il convient de réduire ces émissions, en particulier les émissions de CO2, le plus rapidement et le plus largement possible en raison de leur persistance dans l'atmosphère. La restructuration de l'approvisionnement énergétique doit donc être accélérée au cours des prochaines années afin de s'achever d'ici le milieu du siècle.

Les investissements nécessaires, et partant les coûts, vont donc en partie devoir être supportés pendant cette période. L'utilité des mesures prises par la communauté internationale dans le cadre de l'accord sur le climat ne se manifestera pleinement que sur le long terme étant donné que les coûts afférents à un réchauffement incontrôlé du climat ne progressent que lentement à court et moyen termes mais augmentent fortement au-delà de 2050.

Dans l'ensemble, le bénéfice à long terme de mesures de protection du climat cohérentes se révélera supérieur aux investissements consentis, comme les conséquences économiques, très probablement dès le milieu du siècle, et avec certitude dans un avenir plus lointain.

4.3

Conséquences financières et sur le personnel

4.3.1

Conséquences financières

La loi-cadre prévoit de possibles dépenses supplémentaires en provenance du budget général de la Confédération de 1,2 milliard de francs au total durant six ans jusqu'à fin 2030 pour l'encouragement de technologies et processus innovants et de 2 milliards de francs au total durant dix ans pour le remplacement des installations de chauffage. Les montants d'encouragement du remplacement des installations de chauffage n'étant pas versés aux cantons, comme dans le cas du Programme Bâtiments, via un relèvement des contributions globales mais de manière séparée sur la base des demandes validées, il convient de demander au Parlement un nouveau crédit d'engagement de 2 milliards de francs sur dix ans. L'encouragement prévu jusqu'en 2030 des technologies et processus innovants visé à l'art. 6 ainsi que la couverture des risques visée à l'art. 7 doit se faire via un nouveau crédit d'engagement d'un montant de 1,2 milliard de francs. Une partie des 1,2 milliard de francs au maximum disponibles doit être versée dans le fonds de technologie pour la couverture des risques visée à l'art. 7.

Pour des raisons d'efficacité en matière d'exécution et afin d'éviter toute redondance, l'encouragement doit être versé en fonction de la phase du cycle d'innovation au programme de la Confédération approprié déjà existant, et son budget doit être augmenté en conséquence. Peuvent être envisagés à cette fin Innosuisse, la promotion des technologies environnementales, des projets pilotes ou de démonstration ou encore SWEET et SuisseEnergie. Du fait du volume financier et de l'expertise spécifique nécessaires à l'évaluation des demandes, un service externe à l'administration et un organe composé d'experts venant d'horizons divers devraient toutefois être nécessaires. La gestion de la couverture des risques pour les infrastructures publiques par le fonds de technologie constituera un réel défi si on ne veut pas que la Confédération 39 / 46

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ait à supporter de trop lourdes pertes, notamment si le portefeuille n'est constitué que d'un nombre restreint de projets de grande ampleur. Les frais d'exécution devraient au maximum s'élever à 5 % des fonds d'encouragement.

Les entreprises doivent spontanément faire valoir leurs besoins d'aide en matière de mise en oeuvre des feuilles de route zéro net axées sur des mesures. Mais il est également possible d'envisager des appels d'offres concurrentiels afin de susciter des projets novateurs dans des domaines particuliers. L'examen des demandes, la gestion des données, le contrôle et la communication impliquent des charges supplémentaires.

S'agissant de l'exécution du programme extraordinaire de remplacement des installations de chauffage et de la tenue des listes d'attente, il convient de tabler sur des charges financières s'élevant à près de 1 million de francs par an pour les services informatiques, le soutien externe et la communication. Les cantons devant être chargés de l'exécution, les frais d'exécution pour lesquels ils devront être dédommagés par la Confédération vont également progresser. Ces dépenses sont évaluées à quelque 5 millions de francs par an, ce qui correspond à 2,5 % du volume des fonds d'encouragement.

L'initiative «Exemplarité Énergie et Climat» est mise en oeuvre par un service qui devrait coûter 780 000 francs par an. Pour les cantons et les communes, il convient de développer les tâches de suivi, de surveillance et de communication et d'élaborer des bases spécifiques telles que des outils «Life-Cycle-Costing» (LCC). Les coûts afférents à ces travaux et à l'embauche des nécessaires experts externes se montent à environ 3,5 millions de francs par an.

Le service spécialisé RUMBA est épaulé par des prestataires externes. En la matière, les coûts s'élèvent à 370 000 francs par an. L'élargissement aux émissions générées en amont et en aval par des tiers et l'augmentation de la demande de prestations par le service spécialisé RUMBA devraient nécessiter des ressources matérielles à hauteur de 600 000 francs par an.

4.3.2

Conséquences sur le personnel

Pour la Confédération, l'exécution de la loi-cadre signifie des charges supplémentaires de personnel.

Le programme extraordinaire de remplacement des installations de chauffage nécessite un poste à plein temps supplémentaire au sein de l'OFEN pour la gestion du crédit d'encouragement et des listes d'attente.

Pour la mise en oeuvre de l'encouragement visé à l'art. 6, de deux à quatre postes à plein temps seront nécessaires (en fonction des prestations fournies par les services externes). À des fins de préparation de l'exécution, des ressources supplémentaires devraient déjà être mises à disposition avant l'entrée en vigueur de la loi.

La couverture des risques pour les infrastructures publiques visée à l'art. 7 ne peut pas s'inspirer sans autre du modèle d'exécution du fonds de technologie, qui accorde des prêts à des PME innovantes; elle nécessite vraisemblablement des structures séparées impliquant au minimum un poste à plein temps supplémentaire.

40 / 46

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L'élargissement du rôle de modèle de la Confédération aux processus amont et aval ainsi qu'aux cantons et communes se traduit par des charges supplémentaires à hauteur d'un poste.

Si des accords doivent être conclus avec les branches financières, il convient de prévoir un poste à plein temps pour leur négociation et la surveillance ultérieure de l'atteinte des buts.

4.4

Applicabilité

Tant les lois fédérales que les actes cantonaux doivent être axés sur les objectifs fixés dans la loi-cadre. Dans l'optique du rôle d'exemple que les communes doivent assumer, les cantons doivent veiller à ce que celles-ci adaptent leurs bases légales en conséquence. Les communes sont libres de rejoindre les cantons de manière groupée ou l'initiative «Exemplarité Énergie et Climat» à titre individuel. L'initiative peut dans tous les cas mettre à disposition des bases telles que des outils LCC. Il serait toutefois bon que les instruments collaboratifs soient élaborés en commun avec les cantons.

L'augmentation des ressources du service existant et des ressources fédérales internes devrait garantir l'applicabilité du projet. Pour les communes, cette nouvelle obligation signifie une réorganisation pour laquelle les plus petites ont besoin d'un soutien technique. L'OFEV a développé un guide51 afin d'aider les communes à élaborer une stratégie climatique.

Au travers de RUMBA et du SMEA DDPS, l'administration fédérale dispose déjà de systèmes éprouvés. Les moyens mentionnés sont toutefois nécessaires à un élargissement ambitieux des limites des systèmes et à l'atteinte de l'objectif fixé pour 2040.

Plus le programme extraordinaire de remplacement des installations de chauffage sera intégré de manière optimale dans le Programme Bâtiments existant de la Confédération et des cantons, plus son applicabilité sera élevée. Le fait que les fonds d'encouragement destinés au remplacement des installations de chauffage ne soient pas versés aux cantons sous la forme de contributions globales mais sur la base des demandes validées implique la création d'un nouvel instrument. Il convient en outre de tenir des listes d'attente et de gérer un système parallèle destiné aux cautionnements pouvant être octroyés dans le cas d'un assainissement concomitant de l'enveloppe du bâtiment.

Ces nouveaux aspects ne correspondent pas à la pratique actuelle d'exécution au sein des cantons et nécessitent la mise sur pied de nouveaux éléments d'exécution.

Il est possible de proposer un conseil aux entreprises lors de l'élaboration de feuilles de route zéro net via le programme SuisseEnergie et dans le cadre des conventions d'objectifs et des engagements de réduction, lesquels donnent droit à une exonération de la taxe sur le CO2. Les
technologies et processus respectueux du climat doivent être encouragés via les instruments existants, pour lesquels les structures et l'exécution sont en principe organisés. Reste à savoir dans quelle mesure des connaissances spécialisées sont disponibles s'agissant des processus innovants et de l'évaluation des 51

Office fédéral de l'environnement (OFEV) et Office fédéral de l'énergie (OFEN)/EnergieSuisse (2022): Guide de la stratégie climatique pour les communes ­ méthode en huit étapes.

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demandes correspondantes. Ce sont les installations et les infrastructures qui devraient nécessiter les fonds d'encouragement les plus importants, les infrastructures étant uniquement soutenues par une couverture des risques. Des travaux supplémentaires d'approfondissement sont toutefois nécessaires pour la conception de tels cautionnements.

Conclure des accords avec le secteur financier constitue un moyen approprié pour rendre les flux financiers davantage compatibles avec les objectifs climatiques. Il convient tout particulièrement d'en signer avec les quatre grandes associations de la branche, à savoir l'Association suisse des banquiers, l'Association Suisse d'Assurances, l'Association Suisse des Institutions de Prévoyance et l'Asset Management Association Switzerland.

5

Relation avec le droit européen

Le projet est compatible avec le droit européen.

6

Aspects juridiques

6.1

Constitutionnalité et conformité avec la loi

Les bases constitutionnelles sur lesquelles se fonde ce projet sont les art. 74 (protection de l'environnement) et 89 (politique énergétique) de la Constitution (Cst.)52.

L'art. 74 Cst. oblige la Confédération à légiférer sur la protection de l'être humain et de son environnement naturel contre les atteintes nuisibles ou incommodantes.

L'art. 89, al. 3, Cst. dispose par ailleurs que la Confédération légifère sur la consommation d'énergie des installations, des véhicules et des appareils et qu'elle favorise le développement des techniques énergétiques, en particulier dans le domaine des économies d'énergie et des énergies renouvelables.

6.2

Compatibilité avec les obligations internationales

Le projet est compatible avec les obligations internationales contractées par la Suisse.

Il intègre notamment les objectifs de l'accord sur le climat53 dans le droit national.

Les objectifs intermédiaires visés à l'art. 3, al. 3, dessinent en outre le cadre des futurs engagements de la Suisse pour la période après 2030 en matière de réductions en vertu de l'accord sur le climat.

52 53

RS 101 RS 0.814.012

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6.3

Frein aux dépenses

En vertu de l'art. 159, al. 3, let. b, Cst., les dispositions relatives aux subventions, ainsi que les crédits d'engagement et les plafonds de dépenses doivent être adoptés à la majorité des membres de chaque conseil s'ils entraînent de nouvelles dépenses uniques de plus de 20 millions de francs ou de nouvelles dépenses périodiques de plus de 2 millions de francs.

Dans ce contexte, les articles suivants doivent être soumis au frein aux dépenses: art. 6 («Encouragement de technologies et de processus innovants») et 7 («Couverture des risques») ainsi qu'art. 50a dans le cadre de la révision de la LEne54.

Sont en outre soumis au frein aux dépenses les arrêtés fédéraux sur le financement d'un crédit-cadre de 1,2 milliard de francs sur six ans pour l'encouragement de technologies et de processus innovants et la couverture des risques ainsi que d'un créditcadre de 2 milliards de francs sur dix ans pour le programme extraordinaire de remplacement des installations de chauffage.

6.4

Forme de l'acte à adopter

En vertu de l'art. 164, al. 1, Cst., l'Assemblée fédérale édicte sous la forme d'une loi fédérale toutes les dispositions importantes qui fixent des règles de droit.

Conformément aux art. 163, al. 2, Cst. et 25, al. 2, de la loi sur le Parlement55, la forme de l'arrêté fédéral simple est prévue pour les crédits d'engagement dont il est question ici. Ceux-ci ne sont donc pas sujets au référendum.

6.5

Délégation de compétences législatives

L'art. 164, al. 2, Cst. dispose qu'une loi fédérale peut prévoir une délégation de la compétence d'édicter des règles de droit, à moins que la Cst. ne l'exclue. La norme de délégation doit décrire l'objet, l'ampleur et les lignes directrices de la réglementation déléguée. Ces délégations de compétences législatives dépassant la compétence générale d'exécution sont expliquées ci-après.

6.5.1

Loi fédérale relative aux objectifs en matière de protection du climat

Art. 4, al. 2 Le Conseil fédéral peut, après consultation des milieux concernés et en conformité avec l'al. 1, fixer pour d'autres secteurs des valeurs indicatives en matière de gaz à effet de serre et d'émissions générées par les agents énergétiques fossiles. Dans ce 54 55

RS 730.0 RS 171.10

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contexte, il tient compte des connaissances scientifiques les plus récentes, des nouvelles technologies disponibles et de l'évolution au sein de l'Union européenne.

Art. 6, al. 3 L'encouragement de technologies et de processus innovants peut subir l'influence de changements intervenant dans les conditions-cadres. Pour qu'il soit possible de réagir adéquatement dans ce type de situation, la loi délègue au Conseil fédéral la compétence de régler aussi bien les exigences auxquelles doivent répondre les mesures bénéficiant d'un soutien que les modalités de mise en oeuvre des différentes mesures ou des feuilles de route prévues à l'art. 5, al. 2.

Art. 7 Les investissements dans des infrastructures publiques nécessaires pour atteindre l'objectif de zéro net peuvent comporter des risques financiers. C'est pourquoi le Conseil fédéral se voit octroyer la compétence de régler, au niveau de l'ordonnance, les modalités de la couverture de ces risques.

Art. 9, al. 2 Le Conseil fédéral doit être habilité à conclure des conventions avec les secteurs financiers afin d'assurer une orientation des flux financiers qui soit compatible avec les objectifs climatiques. La place financière suisse doit ainsi apporter une contribution concrète à un développement pauvre en émissions et résilient aux changements climatiques.

Art. 10, al. 3 Le Conseil fédéral est chargé de définir les mesures nécessaires pour atteindre l'objectif de zéro émission nette fixé à l'al. 2. Il peut prévoir des exceptions pour assurer la sécurité du pays et la protection de la population. Il doit informer régulièrement l'Assemblée fédérale sur le degré d'atteinte de l'objectif.

Art. 11, al. 1 et 2 L'art. 11, al. 1, prévoit que le Conseil fédéral soumet suffisamment tôt à l'Assemblée fédérale des propositions pour la mise en oeuvre des objectifs fixés pour les périodes 2025­2030 (let. a), 2031­2040 (let. b) et 2041­2050 (let. c). Le Conseil fédéral consulte les milieux concernés dans le cadre de l'élaboration de ces propositions et tient compte des connaissances scientifiques les plus récentes. Il met en oeuvre les propositions visées à l'al. 1 en premier lieu par le biais d'adaptations de la loi sur le CO2 (al. 2).

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6.5.2

Loi sur l'énergie

Art. 50a et 50b Différents éléments doivent être définis dans l'ordonnance afin de permettre la mise en oeuvre du programme extraordinaire de remplacement des installations de chauffage: le montant des contributions à verser dans les cas particuliers, la délimitation concrète par rapport aux instruments d'encouragement cantonaux et communaux ainsi que les cas où les travaux de remplacement peuvent exceptionnellement être entamés avant l'attribution des soutiens. Le Conseil fédéral est investi des compétences nécessaires à cet effet. Il est également habilité à édicter au niveau de l'ordonnance les dispositions d'exécution nécessaires en rapport avec la possibilité prévue dans la loi d'octroyer des cautionnements si le remplacement de l'installation de chauffage est accompagné d'une amélioration de l'isolation thermique.

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