FF 2022 www.droitfederal.admin.ch La version électronique signée fait foi

22.067 Message relatif à la modification de la loi fédérale sur les étrangers et l'intégration (Admission facilitée pour les étrangers titulaires d'un diplôme d'une haute école suisse) du 19 octobre 2022

Madame la Présidente, Monsieur le Président, Mesdames, Messieurs, Par le présent message, nous vous soumettons, en vous proposant de l'adopter, un projet de modification de la loi fédérale sur les étrangers et l'intégration (admission facilitée pour les étrangers titulaires d'un diplôme d'une haute école suisse).

Dans le même temps, nous vous proposons de classer l'intervention parlementaire suivante: 2017

M 17.3067

Si la Suisse paie la formation coûteuse de spécialistes, ils doivent aussi pouvoir travailler ici (N 20.9.18, Dobler; E 19.3.19)

Nous vous prions d'agréer, Madame la Présidente, Monsieur le Président, Mesdames, Messieurs, l'assurance de notre haute considération.

19 octobre 2022

Au nom du Conseil fédéral suisse: Le président de la Confédération, Ignazio Cassis Le chancelier de la Confédération, Walter Thurnherr

2022-3373

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Condensé La proposition de modification de la loi fédérale sur les étrangers et l'intégration (LEI) vise à mettre en oeuvre la motion 17.3067 Dobler «Si la Suisse paie la formation coûteuse de spécialistes, ils doivent aussi pouvoir travailler ici», dont l'auteur demande que les ressortissants d'États tiers formés dans une haute école suisse ne soient pas imputés sur les nombres maximums annuels d'autorisations de séjour lorsque leur activité lucrative revêt un intérêt scientifique ou économique prépondérant.

Contexte La motion 17.3067 Dobler «Si la Suisse paie la formation coûteuse de spécialistes, ils doivent aussi pouvoir travailler ici» charge le Conseil fédéral de modifier l'ordonnance relative à l'admission, au séjour et à l'exercice d'une activité lucrative (OASA) afin de créer les conditions nécessaires pour que les ressortissants d'États tiers qui ont été formés dans les universités cantonales ou les écoles polytechniques fédérales (EPF) et qui y ont obtenu un master ou un doctorat dans un domaine qui souffre d'une pénurie avérée de personnel qualifié puissent rester en Suisse facilement et sans formalités excessives afin d'y exercer une activité lucrative. Cet objectif doit être atteint en excluant des nombres maximums annuels les autorisations de séjour octroyées en vue de l'exercice d'une activité lucrative.

La motion est motivée par le fait que les ressortissants d'États tiers formés en Suisse quittent le pays parce qu'ils n'ont pas pu être engagés, en raison de contingents épuisés. L'auteur de la motion estime qu'il s'agit là d'une perte pour le marché du travail suisse, notamment au vu de la pénurie de main-d'oeuvre qualifiée. Cette situation doit tout particulièrement être évitée dans les domaines MINT (mathématiques, informatique, sciences naturelles et technique).

Contenu du projet Pour des raisons de systématique, il n'est pas judicieux de créer une exception aux nombres maximums annuels par le biais d'une modification de l'OASA, comme le propose la motion. Dans le cadre de l'OASA, le Conseil fédéral n'a en effet jusqu'à présent exclu des nombres maximums que certains types de séjour de courte durée avec activité lucrative. Toutes les autres dérogations aux conditions d'admission visant des catégories de personnes déterminées sont énumérées de manière exhaustive dans la LEI. Il
convient de se tenir à ce principe; c'est pourquoi le Conseil fédéral propose de modifier la LEI. Le fait d'exclure des nombres maximums les diplômés étrangers des hautes écoles lors de l'admission sur le marché du travail ne doit s'appliquer qu'aux personnes dont l'activité lucrative revêt un intérêt scientifique ou économique prépondérant. À noter que, si cette condition est remplie, le droit en vigueur permet déjà à ces personnes de ne pas être soumises au principe de la priorité accordée aux travailleurs présents en Suisse.

La création d'une nouvelle exception aux nombres maximums demandée par l'auteur de la motion est en contradiction avec l'art. 121a, al. 2, de la Constitution (Cst.), lequel prévoit que le nombre d'autorisations de séjour délivrées aux étrangers qui 2 / 22

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entrent en Suisse doit être limité par des plafonds et des contingents annuels. Cependant, le Parlement a mis en oeuvre cet article constitutionnel en instaurant une obligation d'annoncer les postes vacants et s'est abstenu de contingenter complètement l'immigration. Dans de nombreux cas, les autorisations délivrées aux étrangers qui entrent en Suisse restent donc exclues des limitations quantitatives. Le Parlement a transmis la motion en connaissance de l'art. 121a Cst.

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Message 1

Contexte

1.1

Nécessité d'agir et objectifs visés

Le 7 mars 2017, le conseiller national Marcel Dobler a déposé la motion 17.3067 «Si la Suisse paie la formation coûteuse de spécialistes, ils doivent aussi pouvoir travailler ici». Cette dernière a été adoptée le 20 septembre 2018 par le Conseil national et le 19 mars 2019 par le Conseil des États. Elle charge le Conseil fédéral de modifier l'ordonnance du 24 octobre 2007 relative à l'admission, au séjour et à l'exercice d'une activité lucrative (OASA)1 afin de créer les conditions nécessaires pour que les ressortissants d'États tiers qui ont été formés dans des universités cantonales ou des EPF et qui y ont obtenu un master ou un doctorat dans un domaine qui souffre d'une pénurie avérée de personnel qualifié puissent rester en Suisse facilement et sans formalités excessives afin d'y exercer une activité lucrative. Cet objectif doit être atteint en créant une exception aux nombres maximums annuels d'autorisations de séjour octroyées en vue de l'exercice d'une activité lucrative.

L'auteur de la motion estime qu'il faut empêcher que les jeunes spécialistes provenant de pays tiers et formés en Suisse à grands frais quittent notre pays parce que, malgré une pénurie de personnel qualifié, ils n'ont pas pu être engagés, en raison de contingents épuisés, directement après leur diplôme. Selon lui, ce cas de figure se produit notamment dans les cantons ayant un grand besoin de main-d'oeuvre qualifiée. Les spécialistes formés en Suisse trouvent d'après lui un premier emploi à l'étranger et sont alors perdus pour le marché du travail suisse, à moyen et long terme. Devraient notamment être exclus des nombres maximums les travailleurs des domaines MINT (mathématiques, informatique, sciences naturelles et technique) et du domaine de la médecine.

Le Conseil fédéral avait proposé de rejeter la motion. Selon lui, créer une exception aux nombres maximums irait à l'encontre du système d'admission binaire actuel et réduirait la marge de manoeuvre dont il dispose pour gérer l'immigration. Par ailleurs, les ressortissants d'États tiers diplômés d'une haute école suisse bénéficient déjà de facilités d'admission: sous certaines conditions, ils ne sont pas soumis au principe de la priorité accordée aux travailleurs présents en Suisse et aux ressortissants des États membres de l'UE ou de l'AELE.

La problématique soulevée par l'auteur de la motion a déjà fait l'objet de plusieurs interventions parlementaires2. Ces interventions sont d'ailleurs l'une des raisons pour 1 2

RS 142.201 Motion 00.3039 Neirynck «Intégration des chercheurs formés par les EPF» (transmise sous forme de postulat); postulat 02.3263 Neirynck «Intégration des chercheurs étrangers» (adopté); motion 03.3205 Neirynck «Permis de travail pour entreprises de haute technologie» (classée car l'auteur a quitté le conseil); motion 07.3782 Barthassat «Permis de séjour pour les étrangers titulaires d'un diplôme universitaire suisse» (classée car le conseil n'a pas achevé son examen dans un délai de deux ans); motion 08.3376 Groupe libéral-radical «Formation d'universitaires étrangers. Tirer profit en Suisse des investissements consentis» (rejetée).

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lesquelles la loi fédérale sur les étrangers (LEtr) entrée en vigueur le 1er janvier 2008 (aujourd'hui loi fédérale du 16 décembre 2005 sur les étrangers et l'intégration [LEI]3) et les dispositions d'exécution correspondantes ont facilité l'admission des étrangers diplômés d'une haute école suisse dans certains domaines.

Mise en oeuvre de l'initiative parlementaire 08.407 Neirynck «Faciliter l'admission et l'intégration des étrangers diplômés d'une haute école suisse» Le 19 mars 2008, le conseiller national Jacques Neirynck a déposé l'initiative parlementaire 08.407 «Faciliter l'admission et l'intégration des étrangers diplômés d'une haute école suisse», à laquelle il a été donné suite. Cette initiative proposait de modifier la loi pour ce qui est de la priorité accordée aux travailleurs présents en Suisse, des conditions d'admission, du séjour à des fins de formation ou de formation continue et de l'octroi d'autorisations d'établissement. Les modifications de la LEtr adoptées par le Parlement le 18 juin 20104 sont entrées en vigueur le 1er janvier 2011. Elles concernent les points suivants: ­

Les ressortissants d'États tiers diplômés d'une haute école suisse ne sont pas soumis au principe de la priorité accordée aux travailleurs présents en Suisse et aux ressortissants des États membres de l'UE ou de l'AELE lorsque leur activité lucrative revêt un intérêt scientifique ou économique prépondérant (art. 21, al. 3, LEI). Cette disposition légale supprime la nécessité de déléguer au Conseil fédéral la réglementation des dérogations aux conditions d'admission applicables à cette catégorie de personnes. C'est pourquoi l'art. 30, al. 1, let. i, LEtr et les dispositions d'exécution correspondantes de l'OASA ont été abrogés.

­

Les ressortissants d'États tiers diplômés d'une haute école suisse sont admis à titre provisoire pendant six mois à compter de la fin de leur formation ou de leur formation continue en Suisse pour trouver une telle activité (art. 21, al. 3, LEI).

­

Ils n'ont plus à apporter la garantie qu'ils quitteront notre pays (art. 27, al. 1, let. d, LEtr) pour être admis en vue d'une formation ou d'une formation continue en Suisse.

­

Dans certaines circonstances, les séjours en vue d'une formation ou d'une formation continue (art. 27 LEI) sont pris en compte dans le délai d'octroi d'une autorisation d'établissement (art. 34, al. 5, LEI).

Selon les estimations, 150 à 200 admissions par an découlent de cette réglementation.

Elles sont néanmoins soumises aux nombres maximums d'autorisations de séjour octroyées en vue de l'exercice d'une activité lucrative (art. 20 LEI). Depuis 2020, les admissions fondées sur l'art. 21, al. 3, LEI peuvent être évaluées statistiquement de manière exacte. En 2020, 280 admissions ont été prononcées en vertu de l'art. 21, al. 3, LEI. De janvier à la mi-août 2021, on en relevait 239. S'agissant des périodes antérieures, les chiffres sont des estimations du Secrétariat d'État aux migrations

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RS 142.20 RO 2010 5957

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(SEM). Il faut partir du principe que ces admissions sont soumises à des fluctuations annuelles.

Interventions parlementaires actuelles Ces dernières années, plusieurs interventions portant sur l'admission de travailleurs hautement qualifiés en provenance d'États tiers ont été déposées: ­

Motion 17.3071 Noser «Une Suisse attractive pour la recherche grâce à un visa destiné aux fondateurs de jeunes entreprises» (rejetée).

­

Postulat 19.3651 Nantermod «Pour une gestion migratoire répondant aux besoins de la Suisse» (adopté): le Conseil fédéral est prié d'analyser dans un rapport différentes options permettant d'améliorer le régime de gestion de l'immigration de travailleurs qualifiés originaires d'État tiers. L'auteur du postulat propose ainsi d'améliorer le modèle actuel de contingent ou d'introduire un système plus adapté aux besoins de l'économie, en particulier dans les secteurs de pointe où la main-d'oeuvre indigène fait défaut.

­

Motion 19.3882 Derder «Autorisation de séjour pour les États tiers. Adapter le système aux besoins des secteurs de pointe» (pendante au deuxième conseil).

­

Interpellation 19.4124 Vonlanthen «Efforts déployés à l'échelle mondiale pour attirer des talents. Les critères et les procédures d'autorisation applicables au personnel qualifié sont-ils adaptés aux besoins de l'économie?» (classée car l'auteur a quitté le conseil).

­

Postulat 19.4351 Riklin «Des talents et des spécialistes pour la place technologique suisse au XXIe siècle» (classé car le conseil n'a pas achevé son examen dans un délai de deux ans): l'auteure de ce postulat réclame, entre autres, l'introduction urgente d'un visa à durée déterminée destiné aux professionnels du secteur des technologies de l'information et de la communication et à d'autres spécialistes d'États tiers.

­

Motion 19.4517 Silberschmidt «Prévoir l'admission hors contingent de personnel qualifié en provenance de pays tiers pour soutenir les secteurs en pénurie de main-d'oeuvre» (rejetée).

L'objectif de ces interventions est de faciliter l'admission de la main-d'oeuvre qualifiée en provenance d'États tiers dont l'économie suisse a impérativement besoin, dans un contexte de forte concurrence internationale autour des meilleurs talents.

Ajuster le système actuel d'admission des travailleurs en provenance d'États tiers nécessite d'examiner en profondeur et dans leur globalité les différentes solutions possibles. Parmi les principales difficultés à surmonter: l'évolution démographique et les changements structurels (y compris ceux qui sont induits par la transformation numérique) en Suisse comme à l'étranger. Le 4 mars 2022, le Conseil fédéral a adopté le

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rapport rédigé en réponse au postulat 19.3651 Nantermod5, en tenant compte autant que possible des problèmes soulevés dans les autres interventions.

1.2

Solutions étudiées et solution retenue

1.2.1

Débats au Parlement

Les débats parlementaires montrent que la motion 17.3067 Dobler est soutenue pour des raisons économiques. Dans la continuité des facilités déjà accordées, l'accès au marché du travail suisse pour les ressortissants d'États tiers titulaires d'un diplôme d'une haute école suisse doit être encore amélioré. Une exception aux nombres maximums annuels doit ainsi être prévue lorsque l'activité lucrative revêt un intérêt scientifique ou économique prépondérant, notamment dans les domaines qui souffrent d'une pénurie avérée de main-d'oeuvre qualifiée.

Certains avis émis au Parlement relèvent que ce principe est contraire à l'art. 121a, al. 2, Cst.6, qui prévoit que le nombre d'autorisations de séjour délivrées aux étrangers qui entrent en Suisse doit être limité par des plafonds et des contingents annuels (cf. ch. 7.1). Compte tenu de l'intérêt économique prépondérant des demandes d'autorisation dont il est ici question et de leur nombre vraisemblablement peu élevé, le Conseil fédéral est donc appelé à examiner, outre l'exception aux nombres maximums, des solutions de substitution telles que la création de contingents spécifiques.

Les débats montrent également qu'une solution ciblée et axée sur les besoins est souhaitée uniquement pour les domaines qui souffrent d'une pénurie avérée de maind'oeuvre qualifiée. Il ressort des débats que la solution ne devrait pas se restreindre aux domaines MINT mentionnés dans la motion, mais qu'elle ne devrait pas non plus aller jusqu'à prévoir une ouverture généralisée du marché du travail suisse à tous les étrangers diplômés d'une haute école suisse.

1.2.2

Mise en oeuvre de la motion 17.3067 Dobler

Depuis que l'initiative parlementaire 08.407 Neirynck a été mise en oeuvre, les étrangers titulaires d'un diplôme d'une haute école suisse peuvent être admis sur le marché du travail sans être soumis au principe de la priorité accordée aux travailleurs présents en Suisse et aux ressortissants des États membres de l'UE ou de l'AELE lorsque leur activité revêt un intérêt scientifique ou économique prépondérant (cf. ch. 1.1).

La motion 17.3067 Dobler demande également d'exclure des nombres maximums annuels les autorisations de séjour octroyées en vue d'exercer une activité lucrative lorsqu'elles concernent des étrangers titulaires d'un master ou d'un doctorat formés dans une université cantonale ou une EPF qui exercent une activité lucrative dans un domaine affichant une pénurie avérée de main-d'oeuvre qualifiée. L'exception aux 5

6

www.sem.admin.ch > Publications & services > Rapports > Rapports du Conseil fédéral > 2022 > Rapport du Conseil fédéral en réponse au postulat 19.3631, Nantermod, 19.06.2019 «Pour une gestion migratoire répondant aux besoins de la Suisse» RS 101

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nombres maximums doit s'appliquer notamment aux travailleurs des domaines MINT et aux personnes diplômées en médecine. Une étude de l'Office fédéral de la statistique datée de 2017 et intitulée «Étudiants et diplômes des hautes écoles dans les filières MINT»7 définit les filières MINT et en dresse la liste au sein des hautes écoles universitaires et des hautes écoles spécialisées.

La motion charge le Conseil fédéral de modifier l'art. 21 OASA. Pour des raisons de systématique, le projet de loi du Conseil fédéral prévoit plutôt de modifier l'art. 30 LEI (cf. ch. 4.1). Cet article énumère les exceptions aux conditions d'admission (art. 18 à 29 LEI) pour certaines catégories de personnes. Par ailleurs, il donne au Conseil fédéral la compétence de fixer les conditions générales et d'arrêter la procédure (art. 30, al. 2, LEI).

Les exceptions déjà en place, notamment les exceptions aux nombres maximums prévues par l'art. 30 LEI, englobent par exemple les cas individuels d'une extrême gravité ou les intérêts publics majeurs ainsi que l'activité lucrative des personnes relevant du domaine de l'asile. En principe, les étrangers diplômés de hautes écoles suisses remplissent les conditions d'admission prévues par la LEI lorsque leur activité lucrative revêt un intérêt scientifique ou économique prépondérant. Le projet vise toutefois à garantir que, dans ces cas-là, l'admission reste possible même si les contingents sont épuisés.

Dans les dispositions d'exécution, le Conseil fédéral définit les conditions d'admission susceptibles de faire l'objet d'une exception visée à l'art. 30, al. 1, LEI (art. 30, al. 2, LEI; art. 26 à 53a OASA). Pour mettre en oeuvre la motion, le Conseil fédéral doit donc également inscrire dans l'OASA le fait d'exclure des nombres maximums certains diplômés de hautes écoles suisses ainsi que les conditions à remplir (cf. ch. 5).

La compatibilité de cette exception aux nombres maximums avec l'art. 121a Cst. est expliquée au ch. 7.1.

1.2.3

Solutions écartées

Introduction de nombres maximums distincts dans l'OASA L'introduction dans l'OASA de nombres maximums distincts pour la catégorie de personnes définie dans la motion 17.3067 Dobler permettrait d'empêcher que l'admission ne doive être refusée au motif que le contingent a déjà été atteint parce que des autorisations de séjour visant un autre but ont été octroyées. Cette solution atténuerait le problème des contingents limités pour les personnes diplômées en Suisse et renforcerait la sécurité du droit et de la planification pour les entreprises concernées.

S'il est vrai qu'elle aurait été compatible avec l'art. 121a Cst., cette solution n'aurait pas permis de répondre pleinement à l'objectif central de la motion, à savoir la création d'une exception complète aux nombres maximums. Qui plus est, introduire des nombres maximums distincts pour certains secteurs porterait préjudice aux autres secteurs, qui pourraient alors eux aussi réclamer des nombres maximums distincts.

7

https://www.bfs.admin.ch/bfs/fr/home/statistiques/education-science.

assetdetail.2140049.html; p. 32.

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Jusqu'à présent, le Conseil fédéral a toujours rejeté l'idée de prévoir des nombres maximums distincts pour certains secteurs, notamment à cause des problèmes d'exécution considérables que cela engendrerait et pour éviter que l'attribution des contingents ne perde en flexibilité.

Depuis que le système d'admission binaire existe, le Conseil fédéral a uniquement introduit, lorsque cela s'est avéré nécessaire, des nombres maximums spécifiques pour certains pays sur la base d'accords bilatéraux (par ex., pour les nouveaux membres de l'UE, à la faveur de l'introduction progressive de l'Accord du 21 juin 1999 entre la Confédération suisse, d'une part, et la Communauté européenne et ses États membres, d'autre part, sur la libre circulation des personnes8, ou dans le cadre de la solution transitoire après la sortie du Royaume-Uni de l'UE).

Augmentation des nombres maximums d'autorisations de séjour octroyées en vue de l'exercice d'une activité lucrative Conformément à l'art. 20, al. 2, LEI, le Conseil fédéral pourrait augmenter les nombres maximums actuels (annexes 1 et 2 OASA) afin de garantir l'admission de la catégorie de personnes définie dans la motion. Pour autant, il convient de noter que, depuis l'entrée en vigueur de la LEI, le SEM n'a jamais rejeté de demandes déposées par des diplômés de hautes écoles uniquement parce que les contingents étaient épuisés. Le Conseil fédéral n'a pas non plus connaissance de cas où des cantons auraient rejeté des demandes en raison des contingents. Les cantons peuvent solliciter des unités de contingent supplémentaires issues de la réserve fédérale lorsque les contingents qui leur ont été attribués sont épuisés. Ces dernières années, la réserve fédérale n'a jamais été épuisée.

Cette solution ne permettrait pas de répondre pleinement à l'objectif central de la motion, à savoir la création d'une exception complète aux nombres maximums. Qui plus est, augmenter les nombres maximums annuels ne permettrait pas de réserver ces autorisations supplémentaires à un groupe de personnes déterminé. Elles risqueraient ainsi d'être utilisées pour des travailleurs d'autres secteurs ou pour des personnes qui ne seraient pas des diplômés de hautes écoles, ce qui réduirait la sécurité du droit et de la planification pour les entreprises. Selon cette approche, il appartiendrait aux
cantons de garantir que les nombres maximums soient utilisés conformément à leur destination. L'expérience montre cependant que les priorités des cantons peuvent évoluer au fil du temps et en fonction de la situation économique. Là encore, cette solution risquerait de porter préjudice aux autres secteurs, lesquels pourraient alors également réclamer une augmentation des nombres maximums pour combler leurs propres besoins.

8

RS 0.142.112.681

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1.3

Relation avec le programme de la législature et avec le plan financier, ainsi qu'avec les stratégies du Conseil fédéral

Le projet n'a été annoncé ni dans le message du 27 janvier 2016 sur le programme de la législature 2015 à 20199, ni dans le message du 29 janvier 2020 sur le programme de la législature 2019 à 202310. Il présente cependant un lien étroit avec l'un des objectifs du Conseil fédéral de l'année 2022 (objectif 13: La Suisse gère la migration, exploite le potentiel économique et social qu'offre celle-ci et promeut la coopération internationale)11.

1.4

Classement d'interventions parlementaires

La modification de la LEI met en oeuvre la motion 17.3067 Dobler, laquelle peut donc être classée.

2

Procédure de consultation

2.1

Remarques générales

Le 27 octobre 2021, le Conseil fédéral a chargé le Département fédéral de justice et police (DFJP) de mener une consultation. Celle-ci s'est achevée le 10 février 2022.

Le DFJP a reçu un total de 69 avis sur le projet, provenant de 25 cantons, de 5 partis politiques, du Tribunal administratif fédéral (TAF), de 6 associations faîtières oeuvrant au niveau national et de 32 autres acteurs des milieux intéressés. Cinq des destinataires ont expressément renoncé à prendre position.

Vingt-trois cantons (AG, AI, AR, BL, BS, FR, GE, GL, JU, LU, NE, NW, OW, SG, SH, SO, SZ, TG, TI, UR, VD, VS et ZH) se déclarent favorables au projet de même que BE, sous réserve toutefois de la prise en compte de certaines propositions de modification et d'autres suggestions. ZG, au contraire, le rejette.

Parmi les partis politiques, le PLR, le PVL et Le Centre approuvent la proposition de mise en oeuvre de la motion. Alors que le PS soutient le projet dans son principe, l'UDC le rejette. Parmi les associations faîtières qui oeuvrent au niveau national, economiesuisse, l'Union patronale suisse (UPS), l'Union suisse des arts et métiers (usam), l'Union syndicale suisse (USS) et l'Union des villes suisses approuvent le projet mis en consultation tout comme Travail.Suisse, à une réserve près.

Les 32 autres acteurs des milieux intéressés (actionuni le corps intermédiaire académique suisse [actionuni], Association patronale des banques en Suisse, Campus Tou-

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rismus Graubünden, Centre Patronal, Chambre de commerce, d'industrie et des services de Genève, Chambre vaudoise du commerce et de l'industrie, Association faîtière des diplômés des Hautes Écoles Spécialisées, Digitalswitzerland, EHL Hospitality Business School [EHL], EHL Hotelfachschule Passugg [EHL SSTH], Fédération des Entreprises Romandes, GastroGraubünden, GastroSuisse, Groupement des Entreprises Multinationales, HotellerieSuisse, HotellerieSuisse Graubünden, Syndicat du service public [transfair], Conseil des écoles polytechniques fédérales, Fédération suisse du tourisme [FST], Association économique suisse de la bureautique, de l'informatique, de la télématique et de l'organisation [SWICO], scienceindustries, Swiss Entrepreneurs & Startup Association [SWESA], Swiss-American Chamber of Commerce [Amcham], Swissmem, swissuniversities, Fédération des Associations de Professeurs des Hautes écoles spécialisées suisses [HES-CH], Fédération des groupes industriels et de services en Suisse, Union des étudiant-e-s de Suisse, Association des étudiants de l'EPFZ [VSETH], Fédération des médecins suisses, Association des services cantonaux de migration [ASM], Chambre de commerce zurichoise) qui ont pris position sont favorables au projet.

Malgré leur approbation de principe, plusieurs participants à la consultation ont formulé des propositions de modification et des observations sur le rapport explicatif.

2.2

Exception aux nombres maximums annuels pour les étrangers titulaires d'un diplôme d'une haute école suisse

2.2.1

Modification des indicateurs

Campus Tourismus Graubünden, EHL, EHL SSTH, GastroGraubünden et HotellerieSuisse Graubünden demandent que les indicateurs utilisés pour évaluer la pénurie de main-d'oeuvre qualifiée dans les secteurs où la demande varie selon les régions et les saisons (c'est-à-dire la restauration et l'hôtellerie) soient revus et représentés avec précision (HotellerieSuisse estime qu'il faudrait améliorer ces indicateurs). GastroSuisse et la FST proposent que l'évaluation prenne davantage en compte des indicateurs tels que les difficultés de recrutement et le nombre de postes vacants.

Avis du Conseil fédéral Outre le système d'indicateurs dont se sert le Secrétariat d'État à l'économie (SECO) pour évaluer la demande en personnel qualifié, d'autres outils peuvent être utilisés pour établir si un besoin de personnel qualifié est avéré (cf. ch. 5). Les instruments mentionnés par les participants à la consultation, notamment dans la restauration et l'hôtellerie, en font partie.

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2.2.2

Prolongation de l'admission pour rechercher un emploi à l'issue de la formation et stage facultatif

Economiesuisse, l'UPS, scienceindustries, SWESA, SWICO et VSETH proposent deux mesures supplémentaires pour créer l'attrait dont la Suisse a impérativement besoin dans la course aux meilleurs talents qui se joue au niveau international: une prolongation unique, soumise à autorisation, de l'admission de six mois pour rechercher un emploi à compter de la fin de la formation (même proposition de la part de GE, actionuni et Amcham) et la possibilité de suivre un stage facultatif pendant ou après les études.

Avis du Conseil fédéral Il n'est pas nécessaire de prolonger l'admission de six mois prévue pour la recherche d'un emploi à compter de la fin de la formation (art. 21, al. 3, LEI) si l'activité lucrative visée revêt effectivement un intérêt scientifique ou économique prépondérant et qu'il existe une pénurie avérée de main-d'oeuvre qualifiée. Lors de la mise en oeuvre de l'initiative parlementaire 08.407 Neirynck (cf. ch. 1.1), l'admission de six mois prévue pour la recherche d'un emploi a été jugée suffisante, et elle n'a jamais posé de problème pratique depuis son instauration, le 1er janvier 2011. Le Conseil fédéral ne juge pas non plus nécessaire de permettre aux intéressés de suivre un stage facultatif pendant ou après leur formation. Dans les domaines où la pénurie de main-d'oeuvre qualifiée est avérée, l'entrée dans la vie professionnelle peut être envisagée sans stage facultatif en amont. De plus, une telle mesure irait au-delà de l'objectif de la motion, qui est de faciliter l'accès au marché du travail au moyen d'une exception aux nombres maximums.

2.2.3

Coordination avec l'art. 30 LEI

Le TAF estime que l'art. 21, al. 3, LEI ne s'appliquerait plus guère si l'art. 30, al. 1, let. m, P-LEI entrait en vigueur, mais que si l'art. 21, al. 3, LEI était maintenu et si l'on souhaitait que les cantons épuisent d'abord les contingents dans le cadre des demandes de ce type, il serait nécessaire de coordonner les deux dispositions.

Avis du Conseil fédéral La mise en oeuvre du projet ne vise pas à ce qu'un canton commence par épuiser les contingents qui lui ont été attribués. L'objectif est d'exclure les personnes concernées des nombres maximums. Il n'est pour autant pas prévu de modifier les conditions d'admission. L'art. 21, al. 3, LEI doit continuer à s'appliquer. Il prévoit une dérogation à la priorité accordée aux travailleurs présents en Suisse et aux ressortissants d'États avec lesquels a été conclu un accord sur la libre circulation des personnes. Il n'est donc pas nécessaire de coordonner l'art. 30, al. 1, let. m, P-LEI avec l'art. 21, al. 3, LEI.

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2.2.4

Fuite des cerveaux

Pour l'USS, ce projet place la Suisse dans une position où elle continue à profiter de la fuite des cerveaux. Cette problématique est également soulevée par Travail.Suisse et par un membre de l'ASM.

Avis du Conseil fédéral La modification proposée ne facilite pas l'admission des personnes formées à l'étranger, puisqu'il faut que la formation ait été suivie en Suisse. De plus, les personnes susceptibles de remplir ces conditions sont peu nombreuses et proviennent de pays très divers. Il ne saurait donc être question d'amplification du phénomène de fuite des cerveaux.

2.2.5

Activité lucrative revêtant un intérêt scientifique ou économique prépondérant / haute école suisse

Aux yeux du PS, l'activité lucrative d'intérêt scientifique ou économique prépondérant qui est visée à l'art. 30, al. 1, let. m, P-LEI constitue une barrière bien trop importante. L'UPS estime que, en pratique, le critère du degré élevé de spécialisation, en particulier, peut conduire à ce que les personnes concernées n'aient pas accès au marché suisse du travail et soient donc perdues pour lui.

De l'avis de ZG, la modification de loi prévue va trop loin, car elle ouvre l'accès au marché du travail à tous les étudiants étrangers des hautes écoles spécialisées cantonales titulaires de différents diplômes (bachelors et Masters of Advanced Studies compris). L'UDC demande que l'admission soit limitée aux domaines MINT.

Certains participants à la consultation affirment que le projet contient des notions juridiques vagues et ambiguës (haute école / université suisse, par ex.), qu'il faudrait préciser dans l'OASA (pour TI et deux membres de l'ASM) ou dans la loi (pour swissuniversities). BE suggère de définir directement dans la loi, et non dans l'ordonnance, les conditions d'admission qui restent en vigueur avec la nouvelle disposition.

La HES-CH demande que l'admission soit aussi facilitée si l'activité lucrative revêt un intérêt social prépondérant: le système de formation suisse forme non seulement des scientifiques hautement spécialisés, mais aussi des spécialistes qui mettent en oeuvre des connaissances de base et servent ainsi l'économie aussi bien que la société.

Avis du Conseil fédéral L'art. 21, al. 3, LEI utilise déjà les notions d'«activité lucrative [revêtant] un intérêt scientifique ou économique prépondérant» et de «haute école suisse». L'interprétation de ces notions fait l'objet d'une pratique bien établie, qui peut être prise en considération pour appliquer l'art. 30, al. 1, let. m, P-LEI. Compte tenu au surplus de la jurisprudence du TAF et des explications fournies dans les directives du SEM, il n'est pas nécessaire de donner une définition plus précise de ces notions dans la loi.

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2.2.6

Autres demandes et observations

L'UDC demande la création d'un contingent distinct pour le groupe de personnes concerné, qui serait imputé sur le contingent global. Elle estime en outre que les ressources actuelles du domaine de la formation tertiaire subventionnée devraient être transférées vers les domaines MINT et que les étudiants étrangers devraient assumer au moins la moitié des coûts de leurs études. L'UDC souligne par ailleurs la forte augmentation de la population étrangère présente en Suisse enregistrée au fil des dernières décennies.

Pour transfair, il faut éviter de dépendre de la main-d'oeuvre de l'étranger et créer suffisamment d'incitations pour que la main-d'oeuvre présente en Suisse obtienne les diplômes nécessaires et travaille dans les domaines correspondants.

Plusieurs participants à la consultation estiment que les titulaires d'un diplôme reconnu obtenu dans une haute école, y compris les écoles hôtelières (Campus Tourismus Graubünden, EHL, EHL SSTH, GastroGraubünden, GastroSuisse, HotellerieSuisse Graubünden et FST), et les diplômés des écoles supérieures (HotellerieSuisse et FST) devraient également être admis.

Avis du Conseil fédéral Les demandes concernant la réaffectation des moyens financiers disponibles dans la formation tertiaire, l'augmentation des taxes d'études pour les étrangers ou la création d'incitations pour la main-d'oeuvre présente en Suisse ne s'inscrivent pas dans le cadre du présent projet. Quant à l'idée de prévoir des nombres maximums distincts pour certains secteurs ou certaines formations, le Conseil fédéral l'a toujours rejetée car cette mesure rendrait le système d'admission rigide et compliqué (voir ch. 1.2.3).

2.2.7

Conclusion

Pour les raisons précitées, le Conseil fédéral estime que les modifications proposées ne sont pas nécessaires. Il se tient donc au projet mis en consultation qui a du reste été approuvé par une grande majorité des participants sans y apporter de modifications.

3

Comparaison avec le droit étranger, notamment européen

Chaque État membre de l'UE peut délivrer un titre de séjour une carte bleue pour l'UE, dite carte bleue européenne aux ressortissants d'États tiers pour qu'ils exercent

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une activité lucrative sur son territoire. La carte bleue européenne relève de la directive 2009/50/CE12. Le demandeur doit notamment présenter un contrat de travail valable ou une offre d'emploi ferme, d'une durée d'au moins un an, assortis d'un salaire au moins égal à une fois et demie le salaire annuel brut moyen dans l'État membre concerné soit, en 2022, 56 400 euros en Allemagne13 et 66 593 euros en Autriche14, par exemple. Si sa demande est acceptée, il reçoit une carte bleue européenne d'une durée de validité standard, comprise entre un et quatre ans. L'État membre concerné décide de la durée de validité de la carte. Après 18 mois de séjour, son titulaire peut obtenir plus facilement le visa nécessaire pour s'installer dans un autre État membre.

Le demandeur ne doit pas représenter une menace pour l'ordre, la sécurité ou la santé publics.

Cependant, de manière générale, le processus de demande peut varier considérablement d'un État membre à l'autre. De plus, nombreux sont les États membres où la carte bleue européenne est en «concurrence» avec les conditions nationales d'entrée15.

En septembre 2021, le Parlement européen a adopté une réforme de la directive relative à la carte bleue européenne qui vise à faciliter l'emploi de ressortissants hautement qualifiés issus de pays tiers afin de réduire la pénurie de main-d'oeuvre dans les secteurs-clés16. Le Conseil européen a adopté la nouvelle directive 2021/188317 le 7 octobre 2021. Les États membres ont deux ans à compter de la publication du texte au Journal officiel pour adapter leur législation afin de se conformer à cette directive.

4

Présentation du projet

4.1

Réglementation proposée

Modifier l'art. 21 OASA comme le propose l'auteur de la motion ne permettrait pas de créer une exception aux nombres maximums annuels pour les diplômés étrangers des hautes écoles lors de l'admission sur le marché du travail. Les exceptions à l'imputation sur les nombres maximums prévues par cette disposition ne se réfèrent en effet pas à un motif d'admission particulier mais concernent deux cas de figure: le 12

13

14 15

16

17

Directive 2009/50/CE du Conseil du 25 mai 2009 établissant les conditions d'entrée et de séjour des ressortissants de pays tiers aux fins d'un emploi hautement qualifié, JO L 155 du 18.6.2009, p. 17.

www.auswaertiges-amt.de > Service > Häufig gestellte Fragen (FAQ) > Arbeiten und Leben in Deutschland > Was ist die Blaue Karte EU / EU Blue Card? Wer kann sie bekommen? Wo bekomme ich sie?

www.migration.gv.at > Formen der Zuwanderung > Dauerhafte Zuwanderung > Blaue Karte EU Stitteneder, Tanja (2018): Die Blaue Karte EU: Ein länderübergreifender Überblick.

In: ifo Schnelldienst 2018/6, 43­47. Disponible à l'adresse suivante: https://www.ifo.de/DocDL/sd-2018-06-stitteneder-eu-blue-card-2018-03-22.pdf (en allemand).

Parlement européen (15.9.2021): Carte bleue européenne: nouvelles règles pour les immigrants hautement qualifiés souhaitant travailler en Europe. Disponible à l'adresse suivante: www.europarl.europa.eu/portal/fr > Actualité > Salle de presse.

Directive 2021/1883 du Parlement européen et du Conseil du 20 octobre 2021 établissant les conditions d'entrée et de séjour des ressortissants de pays tiers aux fins d'un emploi hautement qualifié, et abrogeant la directive 2009/50/CE du Conseil, JO L 382 du 28.10.2021, p. 1.

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départ de Suisse de l'intéressé dans les 90 jours qui ont suivi le début de l'activité lucrative et la renonciation à exercer l'activité lucrative autorisée. L'art. 20 LEI permet au Conseil fédéral de fixer des nombres maximums d'autorisations de séjour.

Cette disposition étant toutefois potestative, le Conseil fédéral peut aussi décider de ne pas fixer de nombres maximums pour certains motifs d'admission. Jusqu'à présent, il n'a exclu des nombres maximums que les étrangers qui exercent une activité lucrative pour une courte durée (art. 19, al. 4, OASA). Toutes les autres dérogations aux conditions d'admission visant des catégories de personnes déterminées sont réglées au niveau de la loi. C'est pourquoi le Conseil fédéral propose de modifier l'art. 30 LEI.

Le fait d'exclure des nombres maximums les diplômés étrangers des hautes écoles lors de l'admission sur le marché du travail ne doit s'appliquer qu'aux personnes dont l'activité revêt un intérêt scientifique ou économique prépondérant. La législation en vigueur permet déjà à ces personnes, dans les mêmes conditions, de ne pas être soumises au principe de la priorité accordée aux travailleurs présents en Suisse et aux ressortissants des États membres de l'UE ou de l'AELE (art. 21, al. 3, LEI).

4.2

Adéquation des moyens requis

Le projet a pour but de mettre en oeuvre la motion 17.3067 Dobler adoptée par le Parlement. La réglementation proposée permettra aux ressortissants d'États tiers formés dans une haute école suisse d'être exclus des nombres maximums annuels d'autorisations de séjour si leur activité lucrative revêt un intérêt scientifique ou économique prépondérant. Comme la modification proposée ne modifie pas les compétences, elle n'impose pas de nouvelles tâches à la Confédération ou aux cantons. Il y a également lieu d'estimer que ni la Confédération ni les cantons n'auront à engager de ressources financières ou humaines (cf. ch. 6.1).

4.3

Mise en oeuvre

Le projet ne prévoit pas de nouvelles tâches pour les autorités fédérales et cantonales chargées de l'exécution. Les modifications de l'OASA rendues nécessaires par le projet sont expliquées aux ch. 1.2.2 et 5.

5

Commentaire de la disposition

Art. 30, al. 1, let. m Conformément aux avis exprimés au sein du Parlement, la motion 17.3067 Dobler doit être mise en oeuvre dans la continuité de l'initiative parlementaire 08.407 Neirynck, déjà mise en oeuvre (cf. ch. 1.1). Par conséquent, la définition du cercle des personnes concernées s'appuie sur l'art. 21, al. 3, LEI, qui prévoit déjà une dérogation

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au principe de la priorité accordée aux travailleurs présents en Suisse. Cette mesure permet de garantir une exécution cohérente et simple.

Ainsi, une exception aux nombres maximums n'est possible que si l'intéressé est titulaire d'un diplôme d'une haute école et si son activité revêt un intérêt scientifique ou économique prépondérant. Ces notions peuvent être interprétées à la lumière de la pratique incontestée du TAF concernant l'art. 21, al. 3, LEI, dans lequel elles apparaissent dans les mêmes termes. Selon le TAF18, la notion d'intérêt économique prépondérant doit être interprétée en tenant compte de la liberté de la science inscrite à l'art. 20 Cst. Compte tenu de la volonté du législateur de renforcer la position de la Suisse dans la course aux meilleurs talents qui se joue au niveau international sans se limiter à des branches scientifiques particulières19, il convient, en l'espèce, d'interpréter la notion de science de manière large. Doivent notamment bénéficier d'une admission facilitée les titulaires d'un diplôme en sciences naturelles, sociales ou humaines obtenu dans une haute école ou une haute école spécialisée lorsqu'ils remplissent les conditions prévues à l'art. 21, al. 3, LEI. Une activité lucrative revêt un intérêt économique prépondérant lorsqu'il existe sur le marché du travail un besoin avéré de main-d'oeuvre dans le secteur d'activité correspondant à la formation et que l'orientation suivie est hautement spécialisée et en adéquation avec le poste à pourvoir. Il en va de même lorsque l'occupation du poste permet de créer immédiatement de nouveaux emplois ou de générer de nouveaux mandats pour l'économie suisse.

Afin de déterminer si un besoin est avéré, on peut par exemple recourir au système d'indicateurs dont se sert le SECO pour évaluer la demande en personnel qualifié20 ou à d'autres instruments permettant d'analyser la conjoncture et la pénurie de maind'oeuvre. Cette approche permet de tenir compte comme il se doit de l'intérêt économique du pays et de n'admettre des personnes que dans des domaines qui présentent des signes manifestes de pénurie de main-d'oeuvre qualifiée.

Il faut non seulement faciliter l'admission en vue de l'exercice d'une activité salariée, mais également permettre l'admission en vue de l'exercice d'une activité indépendante. Cette démarche
permettrait de développer l'initiative parlementaire 08.407 Neirynck comme le souhaitait le Parlement et d'encourager les start-up innovantes.

Une telle réglementation rendrait en outre la Suisse plus compétitive au niveau international (voir à ce sujet les facilités accordées aux start-up au Canada, en Australie, en Nouvelle-Zélande, à Singapour, au Chili, en Irlande, au Royaume-Uni, en Estonie, en Italie, en France, aux Pays-Bas, au Danemark, au Portugal, en Espagne et en Lituanie21). Les expériences faites jusqu'à présent montrent que, dans ce domaine, les demandes déposées et acceptées en vue de l'exercice d'une activité lucrative indépendante sont peu nombreuses.

Concernant la notion de «haute école suisse», il convient là aussi de se référer à l'interprétation de l'art. 21, al. 3, LEI, où figure également cette expression. À cet égard, 18 19 20

21

Arrêt C-674/2011 du 2 mai 2012, consid. 6.3.1; arrêt C-3859/2014 du 6 janvier 2016, consid. 7.2.

FF 2010 373, p. 383 www.seco.admin.ch > Services et publications > Publications > Travail > Analyse du marché du travail > Besoins de main-d'oeuvre qualifiée > Système d'indicateurs pour évaluer la demande en personnel qualifié https://pickvisa.com/blog/the-world-best-15-startup-visas (en anglais)

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l'art. 2 de la loi du 30 septembre 2011 sur l'encouragement et la coordination des hautes écoles22 est déterminant. La notion de «haute école» englobe donc les hautes écoles universitaires (universités cantonales et EPF), les hautes écoles spécialisées et les hautes écoles pédagogiques ainsi que les institutions universitaires ayant droit à des contributions (comme le Laboratoire fédéral d'essai des matériaux et de recherche, l'Institut Paul-Scherrer, l'Institut fédéral pour l'aménagement, l'épuration et la protection des eaux ou encore l'Institut fédéral de recherches sur la forêt, la neige et le paysage). Ainsi, seuls les diplômés dont la formation a été en principe soutenue par des fonds publics peuvent bénéficier d'une admission facilitée. Conformément à la pratique établie concernant l'application de l'art. 21, al. 3, LEI, les niveaux de formation suivants sont considérés comme débouchant sur un diplôme d'une haute école suisse: bachelor, master et doctorat ainsi que Master of Advanced Studies. Le Certificate of Advanced Studies et le Diploma of Advanced Studies, qui sanctionnent des programmes de formation continue en cours d'emploi, ne sont pas considérés comme des diplômes des hautes écoles suisses.

Toute autorisation de séjour délivrée en vertu de cette disposition est temporaire et soumise aux dispositions légales relatives à la prolongation, à la révocation et à l'extinction d'une autorisation. La révocation ou la non-prolongation de l'autorisation de séjour peut donc être envisagée en cas de cessation de l'activité lucrative.

La nouvelle dérogation proposée aux conditions d'admission nécessite de modifier les conditions générales fixées dans l'OASA (art. 30, al. 2, LEI) afin de préciser le champ d'application. Il est ainsi prévu d'inscrire un nouvel article au chap. 3, section 4, OASA pour préciser que des admissions sont possibles en vertu de l'art. 30, let. m, P-LEI pour les secteurs et professions dans lesquels le besoin de main-d'oeuvre est avéré sur le marché du travail suisse. Dans des cas particuliers, il se peut également qu'un intérêt scientifique ou économique prépondérant justifie une admission facilitée dans d'autres domaines. Par ailleurs, les conditions de rémunération et de travail doivent toujours être respectées (art. 22 LEI), et l'étranger doit disposer d'un logement
approprié conformément (art. 24 LEI). Dans le cas d'une activité salariée, l'employeur du requérant doit déposer une demande (art. 18, let. b, LEI). En revanche, s'il s'agit d'une activité indépendante, l'étranger doit prouver que les conditions financières et les exigences relatives à l'exploitation de l'entreprise sont remplies (art. 19, let. b, LEI) et qu'il dispose d'une source de revenus suffisante et autonome (art. 19, let. c, LEI).

Par ailleurs, les autorisations de séjour accordées par les autorités cantonales doivent être soumises à l'approbation du SEM à des fins de contrôle et d'uniformisation de la pratique des cantons (art. 99 LEI), ce qui nécessite de modifier l'art. 5 de l'ordonnance du DFJP du 13 août 2015 concernant l'approbation23. Cet article prévoit que la procédure d'approbation s'applique également à la plupart des autres dérogations aux conditions d'admission visées à l'art. 30, al. 1, LEI.

22 23

RS 414.20 RS 142.201.1

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6

Conséquences

6.1

Conséquences pour la Confédération et les cantons

La modification de loi proposée n'a en principe pas de conséquences en termes de finances ni de personnel sur les activités d'exécution de la Confédération et des cantons. La Confédération et les cantons examinent les conditions d'octroi d'une autorisation relevant du droit des étrangers pour exercer une activité lucrative dans le cadre des procédures existantes et avec les ressources humaines et financières dont ils disposent. Si le nombre de demandes déposées venait à augmenter, les autorités cantonales du marché du travail et le SEM auraient plus à faire, mais cette augmentation devrait rester limitée. En outre, les cas en question ne devraient pas nécessiter de mesures d'intégration, étant donné que les personnes concernées auront suivi une formation tertiaire de plusieurs années en Suisse et devront prouver qu'elles ont la possibilité d'exercer une activité professionnelle dans un secteur qui connaît une pénurie de main-d'oeuvre qualifiée.

6.2

Conséquences économiques

La modification de loi proposée doit permettre à l'économie suisse de recruter plus facilement des spécialistes originaires d'États tiers diplômés d'une haute école suisse en cas de pénurie avérée de main-d'oeuvre qualifiée. La Suisse aurait ainsi besoin de moins de travailleurs qualifiés formés à l'étranger et n'ayant donc pas encore de lien avec elle. Dans les cas concernés, les conditions d'octroi d'une autorisation seraient encore simplifiées et l'issue d'une procédure d'autorisation serait moins incertaine pour les demandeurs.

L'objectif étant de recruter davantage de titulaires d'un diplôme d'une haute école suisse, les investissements consentis dans ce domaine par les pouvoirs publics profiteraient aussi davantage à l'économie suisse.

7

Aspects juridiques

7.1

Constitutionnalité

L'art. 121a, al. 2, Cst. oblige le législateur à gérer l'immigration en limitant le nombre d'autorisations de séjour par des plafonds et des contingents annuels. Les nombres maximums concernent tous les types d'autorisations de séjour de longue durée, et ce, quel que soit le motif d'admission considéré. Le Conseil fédéral a présenté un projet de loi en ce sens (message du 4 mars 2016 relatif à la mise en oeuvre de l'art. 121a Cst.24). Le Parlement a mis en oeuvre cet article par une obligation d'annoncer les postes vacants et s'est abstenu de contingenter complètement l'immigration, notamment dans le domaine de l'asile, du regroupement familial ou de l'admission sans

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activité lucrative. Les séjours en vue de l'exercice d'une activité lucrative étaient déjà soumis aux nombres maximums avant l'entrée en vigueur de l'art. 121a Cst.

Par conséquent, seuls les ressortissants d'États tiers qui exercent une activité lucrative et les prestataires de services d'États membres de l'UE ou de l'AELE dont le séjour dépasse 90 jours par année civile sont encore soumis aux nombres maximums, pour autant qu'aucune dérogation ne soit prévue. L'art. 30 LEI permet déjà d'autoriser, pour diverses raisons, l'exercice d'une activité lucrative sans imputation sur les nombres maximums. Cette règle s'applique notamment aux requérants d'asile, aux cas individuels d'une extrême gravité et aux conjoints de personnes titulaires d'une autorisation de courte durée ou de séjour. Sont aujourd'hui également soumis aux nombres maximums les ressortissants d'États tiers visés par la motion qui ont obtenu un diplôme d'une haute école suisse et souhaitent démarrer une activité dans notre pays. Exclure cette catégorie de personnes des nombres maximums irait à l'encontre des exigences de l'art. 121a, al. 2, Cst.

En termes d'effectifs, les ressortissants d'États tiers titulaires d'un diplôme d'une haute école suisse qui remplissent les conditions qualitatives prévues par la motion 17.3067 Dobler ne représentent sans doute que 200 à 300 personnes par an. En général, ils séjournent déjà depuis plusieurs années en Suisse et sont bien intégrés. En outre, ils ont bouclé avec succès un cursus financé par des fonds publics et disposent de qualifications professionnelles élevées et très demandées sur le marché du travail suisse. Il faut donc clairement distinguer la situation particulière de ce groupe de celle des autres personnes qui immigrent pour exercer une activité lucrative.

Dans ce contexte, créer une nouvelle exception aux nombres maximums en apportant à la loi la modification proposée semble raisonnable. Cette démarche est compatible en particulier avec les décisions prises jusqu'à présent par le Parlement, qui, lors de la mise en oeuvre de l'art. 121a, al. 2, Cst., avait renoncé à introduire des plafonds et des contingents dans de nombreux autres domaines beaucoup plus vastes. Il n'y a donc pas de changement de paradigme. Le Parlement a d'ailleurs transmis la motion au Conseil fédéral en connaissance
de cette problématique.

Le Conseil fédéral est néanmoins conscient que le projet est contraire à l'interprétation de l'art. 121a Cst. qui avait été faite dans le message du 7 décembre 2012 relatif à l'initiative populaire «Contre l'immigration de masse»25 et dans celui du 4 mars 2016 relatif à la mise en oeuvre de l'art. 121a Cst., et que ce projet n'est donc, selon lui, pas conforme au droit. Pour autant, inscrire à l'art. 121a, al. 2, Cst. une nouvelle exception pour cette catégorie de personnes restreinte serait disproportionné, d'autant plus que le Parlement n'avait pas voulu introduire dans la Constitution de exceptions pour d'autres domaines d'envergure également exclus des nombres maximums.

7.2

Compatibilité avec les obligations internationales de la Suisse

Le projet est compatible avec les obligations internationales de la Suisse.

25

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7.3

Forme de l'acte à adopter

Le projet vise à mettre en oeuvre la motion 17.3067 Dobler, qui charge le Conseil fédéral de modifier l'OASA afin de créer les conditions requises pour que certains étrangers formés dans des hautes écoles suisses soient exclus des nombres maximums.

Pour des raisons de systématique, le Conseil fédéral propose une modification législative car les autres dérogations aux conditions d'admission prévues en faveur de certaines catégories de personnes sont toutes fixées dans la loi. L'OASA comporte uniquement des exceptions aux nombres maximums pour des séjours de courte durée.

L'art. 164, al. 1, Cst. dispose que toutes les dispositions importantes qui fixent des règles de droit doivent être édictées sous la forme d'une loi fédérale.

7.4

Frein aux dépenses

Le projet ne contient pas de dispositions relatives aux subventions et ne prévoit ni crédits d'engagement ni plafonds de dépenses. Il n'est donc pas soumis au frein aux dépenses (art. 159, al. 3, let. b, Cst.).

7.5

Conformité aux principes de subsidiarité et d'équivalence fiscale

Le projet n'affecte pas la répartition des tâches de la Confédération et des cantons.

7.6

Délégation de compétences législatives

Le projet ne prévoit pas de délégation de compétences législatives au Conseil fédéral.

7.7

Protection des données

Le projet n'a pas de répercussions sur les réglementations en matière de protection des données.

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