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22.461 Initiative parlementaire Loi urgente concernant l'accélération de projets de parcs éoliens avancés et de grands projets de centrales hydrauliques à accumulation Rapport de la Commission de l'environnement, de l'aménagement du territoire et de l'énergie du Conseil national du 23 janvier 2023

Monsieur le Président, Mesdames et Messieurs, Par le présent rapport, nous vous soumettons le projet de loi fédérale sur l'accélération des procédures d'autorisation pour les projets d'installations éoliennes que nous transmettons simultanément au Conseil fédéral pour avis.

La commission propose d'adopter le projet d'acte ci-joint.

23 janvier 2023

Pour la commission: Le président, Jacques Bourgeois

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Condensé La Suisse doit s'engager activement pour développer sa production d'énergie issue de sources renouvelables. L'énergie éolienne peut apporter une contribution décisive à cet effet. Les procédures d'autorisation relatives à la construction d'installations éoliennes sont toutefois extrêmement longues et complexes. Le présent projet vise à accélérer la dernière phase de cette procédure afin que les projets d'installations éoliennes déjà fortement avancés puissent rapidement être mis en oeuvre. Les exigences légales auxquelles doivent répondre les projets d'installations éoliennes, notamment en matière de protection de l'environnement, ne sont pas modifiées.

Contexte Durant les mois d'hiver surtout, la Suisse est fortement dépendante des importations d'électricité en provenance des pays européens. Il est toutefois à craindre que, à court ou moyen terme, ces importations ne puissent plus être garanties dans les volumes nécessaires, en raison de divers facteurs économiques et politiques. Par conséquent, il est urgent de développer la production nationale d'énergies renouvelables. En raison des conditions climatiques qui règnent en Suisse, les installations éoliennes livrent près de deux tiers de leur production annuelle d'énergie lors du semestre d'hiver. L'énergie éolienne est donc un instrument dont le fort potentiel pourrait permettre de compenser le manque d'électricité en hiver, mais qui reste aujourd'hui encore fortement sous-exploité. Cela est dû en partie à des procédures d'autorisations longues et complexes: à partir d'une certaine taille, la construction d'installations éoliennes nécessite en effet une inscription dans les plans directeurs, une planification spécifique au niveau de l'affectation et l'obtention d'un permis de construire. La planification d'affectation ainsi que l'autorisation de construire peuvent faire l'objet d'un recours jusque devant le Tribunal fédéral, ce qui rallonge d'autant la procédure, et constitue une situation insatisfaisante pour l'ensemble des parties concernées.

Contenu du projet Le présent projet prévoit que les autorisations de construction concernant les installations éoliennes d'intérêt national seront délivrées par les cantons, à condition que les plans d'affectation soient entrés en force. Un recours contre l'autorisation de construction ne peut
plus être déposé que devant le tribunal cantonal supérieur, et la poursuite de la procédure devant le Tribunal fédéral n'est possible que si le recours soulève une question juridique de principe. Les tribunaux doivent dans la mesure du possible statuer rapidement et sans renvoyer le dossier à l'instance précédente pour réexamen. Cette procédure accélérée s'applique jusqu'à ce que la production d'énergie supplémentaire atteigne 1 TWh par an; une fois ce cap atteint, la procédure ordinaire s'appliquera de nouveau. Le projet ne remet en rien en cause les dispositions du droit matériel, en particulier du droit de l'environnement.

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Rapport 1

Genèse du projet

1.1

Nécessité de légiférer et objectifs

L'hiver 2022/2023 s'annonce comme une période difficile pour la Suisse sur le plan de l'approvisionnement énergétique, en raison notamment de l'interruption des livraisons de gaz entre la Russie et l'Europe suite à la guerre en Ukraine et de la situation critique du parc nucléaire français. Le Conseil fédéral a donc dû prendre des mesures extraordinaires, telles que l'installation de centrales thermiques d'urgence et la constitution d'une réserve hydroélectrique. La situation pourrait encore se détériorer à l'hiver 2023/2024; en effet, si l'Europe a encore pu suffisamment remplir ses réservoirs de gaz lors des premiers mois de l'année 2022, elle pourrait ne pas pouvoir compter sur cette possibilité en 2023. Même si la situation géopolitique revenait à la normale, la Suisse pourrait, en fonction de l'évolution des possibilités d'importation de l'électricité, avoir à faire face à une pénurie d'électricité à la fin des mois d'hiver à partir de 2025.1 À long terme, la décarbonation de notre société2 va entraîner un besoin toujours croissant en électricité, notamment avec la prolifération des véhicules électriques et la transition énergétique du bâtiment vers le tout électrique. Il est donc incontestable que la Suisse doit développer considérablement ses capacités de production d'énergies renouvelables, et ce le plus rapidement possible. La production d'électricité au cours des mois d'hiver doit tenir une place importante dans ce processus de développement, car la production d'électricité provenant de centrales hydrauliques ou, sur le Plateau, des panneaux solaires, est fortement réduite durant cette période de l'année.

Face à ce constat, le Parlement a adopté, lors de la session d'automne 2022, des mesures urgentes visant à assurer rapidement l'approvisionnement en électricité pendant l'hiver (modification de la loi sur l'énergie [LEne], «offensive solaire»)3. Pour permettre une adoption rapide de ce projet de loi, les Chambres fédérales ont pris uniquement en considération les grandes installations photovoltaïques alpines et un seul projet concernant l'énergie hydraulique, laissant de côté toute autre source d'énergie.

La Commission de l'environnement, de l'aménagement du territoire et de l'énergie du Conseil national (CEATE-N) a notamment renoncé à déposer une proposition relative aux conditions
régissant la construction des installations éoliennes.

Du point de vue de la CEATE-N, l'énergie éolienne est toutefois un moyen tout indiqué pour renforcer la sécurité de l'approvisionnement en fournissant de l'électricité renouvelable durant la période hivernale. C'est une source d'énergie au potentiel encore sous-exploité en Suisse: une grande partie de l'énergie éolienne est produite en hiver, les installations ne nécessitent qu'une faible superficie et leur écobilan est très 1 2 3

Rapport final, «Analyse Stromzusammenarbeit CH-EU», Frontier Economics, 13 octobre 2021 (en allemand uniquement).

Cf. Loi fédérale sur les objectifs en matière de protection du climat, sur l'innovation et sur le renforcement de la sécurité énergétique (LCl), FF 2022 2403.

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bon4. Les estimations actuelles, qui tiennent compte des exigences écologiques, économiques et sociétales, chiffrent la production annuelle potentielle provenant de l'énergie éolienne à 29,5 TWh. On estime que 55 % à 70 % de cette énergie seraient produits durant les mois d'hiver (d'octobre à mars).5 Pourtant, malgré tous les avantages que présente l'énergie éolienne, cette dernière n'est que très peu mise à contribution en Suisse, par rapport aux régions et pays voisins.6 Cette situation est notamment due à la complexité et à la longueur des procédures d'autorisation; en effet, les zones qui se prêtent à l'exploitation de l'énergie éolienne doivent être inscrites dans les plans directeurs cantonaux, ce qui nécessite de procéder à une consultation et à un examen de projet avant d'obtenir l'aval de la Confédération.

Ensuite, les communes concernées7 procèdent à la planification d'affectation; le projet d'installation est soumis à une étude de l'impact sur l'environnement et doit éventuellement faire l'objet de procédures d'autorisation spéciale (par ex. une autorisation de défrichement ou une autorisation en matière de protection des eaux). Dans la plupart des cantons, les autorités compétentes (en règle générale, les communes) doivent ensuite accorder un permis de construire.8 Des recours peuvent être déposés jusque devant le Tribunal fédéral contre le plan d'affectation et contre le permis de construire, si bien qu'entre le moment où le projet est développé et celui où il est réalisé, il peut s'écouler une vingtaine d'années. La durée de la procédure n'entrave pas seulement le développement des énergies renouvelables, qui devrait pourtant prendre place rapidement, mais pose également problème du point de vue du droit constitutionnel, car il existe un droit à des délais de procédure raisonnables.

Le présent projet doit permettre de développer rapidement des capacités supplémentaires de production d'énergie éolienne. Pour ce faire, il prévoit d'accélérer les procédures d'autorisation des projets déjà bien avancés et notamment ceux pour lesquels le respect des prescriptions environnementales a déjà été vérifié et confirmé. Les exigences définies par le droit matériel, comme les normes de protection de l'environnement, doivent rester inchangées et ne peuvent en aucun cas être remises en question.
La procédure d'autorisation de construire accélérée ne doit être appliquée que pour un nombre limité d'installations éoliennes, qui revêtent un intérêt national; cela permettra de garantir que l'énergie éolienne contribue rapidement et de façon tangible à résoudre le problème de l'approvisionnement. Lorsque cette énergie aura été suffisamment développée, il conviendra de revenir à la procédure ordinaire.

4 5 6 7

8

Rapport final «Ökobilanzierung Schweizer Windenergie», ZHAW, sur mandat de l'OFEN, 11 mars 2015 (en allemand uniquement).

Rapport final «Windpotenzial Schweiz 2022», Meteotest AG sur mandat de l'OFEN, 24 août 2022 (en allemand uniquement).

«Vive le vent d'hiver! Pourquoi la Suisse a aussi besoin de l'énergie éolienne», OFEN, 1 mars 2020.

La planification d'affectation par les communes est la norme pour les projets éoliens.

Des plans d'affectation cantonaux n'existent pour l'instant que pour les projets du canton de Neuchâtel et pour un projet dans le canton de Vaud.

Certains cantons, par exemple le canton de Vaud, appliquent une procédure en une seule étape pour les projets éoliens. Dans ce cas, il n'est plus nécessaire d'obtenir un permis de construire distinct.

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1.2

Solutions étudiées et solution retenue

La formulation originale de l'initiative parlementaire «Loi urgente concernant l'accélération de projets de parcs éoliens avancés et de grands projets de centrales hydrauliques à accumulation» prévoyait que les plans d'affectation des installations éoliennes d'intérêt national déjà entrés en force valent directement comme autorisation de construire. Elle supprimait ainsi la nécessite d'une procédure d'autorisation de construction séparée, et ainsi la possibilité de faire recours contre cette autorisation auprès d'un tribunal. La CEATE-N renonce à présent à cette règlementation, car la procédure d'autorisation de construire permet d'examiner, au niveau de planification adéquat, certaines questions qui n'étaient pas encore d'actualité au moment de l'établissement du plan d'affectation. Si la formulation originelle de l'initiative était conservée, il serait dans certains cas impossible de garantir que les projets remplissent toutes les exigences matérielles et que la procédure d'autorisation de construire satisfasse aux dispositions du droit constitutionnel.

Entre autres éléments, le texte de l'initiative parlementaire prévoyait des allègements du droit environnemental pour le projet de centrale hydraulique «Trift»: en vertu de la loi, la nécessité de ce projet ainsi que le fait qu'il est imposé par sa destination devaient être considérés comme acquis, l'obligation de planification devait disparaître, et l'intérêt que revêt sa mise en oeuvre devait primer d'autres intérêts publics.

Cette disposition est désormais abandonnée, la question de l'énergie hydraulique étant déjà traitée de manière exhaustive dans le cadre de la révision de la loi sur l'énergie et de la loi sur l'approvisionnement en électricité (loi relative à un approvisionnement en électricité sûr reposant sur des énergies renouvelables, 21.047), actuellement en cours d'examen par la CEATE-N.

1.3

Délibérations de la commission

L'accélération des procédures concernant les projets d'énergie éolienne déjà avancés est un point qui a été soulevé dans le cadre de l'examen préalable du projet de l'offensive solaire auquel a procédé la CEATE-N le 19 septembre 2022. La commission a décidé, le 22 septembre 2022, de ne pas intégrer cette thématique dans ce projet de loi, mais de traiter ce point séparément en déposant une initiative parlementaire spécifique. La commission a fait état de la diversité des cas et aux obstacles particuliers qui peuvent empêcher le développement des installations éoliennes par rapport aux autres sources d'énergie renouvelable. Le 25 octobre 2022, la Commission de l'environnement, de l'aménagement du territoire et de l'énergie du Conseil des États (CEATE-E) a, à l'unanimité, approuvé la décision de son homologue du Conseil national; cette dernière a donc pu discuter des grandes lignes du projet lors de la séance du 1er novembre 2022 et a alors chargé l'administration d'élaborer un projet. À sa séance du 23 janvier 2023, la commission a, dans le cadre d'une audition, donné la possibilité de s'exprimer sur le projet aux conférences des directeurs cantonaux concernées ainsi qu'aux représentants des associations de l'économie électrique et des organisations de protection de l'environnement. La commission a ensuite procédé à la discussion par article, ainsi qu'examiné et constaté la constitutionnalité du projet.

Lors du vote sur l'ensemble, la commission a approuvé le projet par 18 voix contre 7.

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Une minorité de la commission demande le renvoi du projet à la commission; selon elle, les dispositions relatives à la procédure d'autorisation de construire accélérée prévue pour les éoliennes doivent être remaniées de sorte que, même dans le cadre de cette nouvelle procédure, la décision définitive concernant l'autorisation de construire puisse être prise par votation populaire au niveau communal.

1.4

Renonciation à une procédure de consultation

Le projet entre dans le champ d'application de l'art. 3, al. 1, let. b, de la loi sur la consultation (LCo)9 et constituerait donc un «objet de la procédure de consultation».

La CEATE-N renonce toutefois à une consultation en vertu de l'art. 3a, al. 1, let. b, LCo, au motif qu'aucune information nouvelle n'est à attendre et que les positions des milieux intéressés sont connues.

Le 3 février 2022, le Conseil fédéral a ouvert une consultation sur un projet de modification de la loi sur l'énergie (LEne)10 visant à accélérer les procédures de planification et d'autorisation pour les installations hydrauliques et éoliennes les plus importantes. Ce projet comportait déjà les principaux éléments dont on retrouve l'essentiel dans le présent projet, notamment l'accélération des procédures pour les installations éoliennes d'importance nationale.

La consultation a démontré que les différents milieux concernés s'accordent sur la nécessité d'accélérer les procédures de construction d'installations de production d'électricité produite à partir d'énergies renouvelables, afin d'assurer l'approvisionnement électrique de la Suisse et d'atteindre les objectifs énergétiques 2050. La plupart des acteurs consultés ont par ailleurs accueilli favorablement les trois éléments suivants, qui font également partie du présent projet: ­

Ce sont désormais les cantons (et non les communes) qui octroient les autorisations de construire pour les nouvelles installations éoliennes;

­

Une procédure de recours au niveau cantonal contre une autorisation de construire octroyée par le canton ne peut être adressée qu'au tribunal supérieur cantonal correspondant;

­

Les autorités de recours doivent prononcer dans la mesure du possible des jugements réformatoires.

En revanche, plusieurs thèmes mis en consultation en février 2022 ne font pas l'objet du présent projet. Premièrement, le projet ne porte que sur les installations éoliennes.

De plus, le projet ne propose pas de concentration des différentes procédures d'autorisation. Finalement, il ne prévoit pas l'élaboration par la Confédération d'une conception consacrée aux installations éoliennes, un point qui soulevait le problème de séparation des compétences de la Confédération et des cantons et qui avait rencontré une forte opposition de la part des acteurs concernés.

9 10

RS 172.061 https://fedlex.data.admin.ch/eli/dl/proj/2022/4/cons_1

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Présentation du projet

L'élément central du projet est le transfert au niveau cantonal de la procédure d'autorisation de construire pour les installations éoliennes lorsque certaines conditions sont remplies. Ainsi, ce transfert ne s'appliquera qu'aux projets éoliens présentant un intérêt national, c'est-à-dire aux installations dont la production annuelle est égale ou supérieure à 20 GWh11. Le projet a pour objectif d'augmenter la production annuelle d'électricité éolienne de 1 TWh. Dès que cet objectif aura été atteint, la procédure accélérée ne s'appliquera plus. Un plan d'affectation entré en force devra par ailleurs exister pour les projets concernés. Ceci permettra notamment de garantir que leur compatibilité avec le droit environnemental a été examinée et constatée définitivement de manière juridique.

Si un projet remplit ces conditions, le canton est alors compétent pour octroyer une autorisation de construire, indépendamment des prescriptions du droit cantonal, qui prévoient dans la plupart des cas que cette autorisation doit être délivrée par la commune. Les voies de recours contre cette autorisation de construire sont également limitées. Au niveau cantonal, un recours n'est plus recevable que devant le tribunal cantonal supérieur, et donc devant une seule instance cantonale. Le jugement rendu par cette instance peut être réexaminé par le Tribunal fédéral uniquement si une question juridique de principe est soulevée. Les tribunaux sont en outre tenus, dans la mesure du possible, de prononcer un jugement réformatoire, c'est-à-dire de porter un jugement définitif sur l'affaire au lieu de la renvoyer à l'instance précédente pour réexamen, et de rendre leur décision dans un délai raisonnable. Les tribunaux compétents sont donc appelés à faire tout leur possible, dans le cadre de leur organisation interne et de l'instruction des procédures, pour accélérer les procédures, qui sont aujourd'hui d'une longueur préjudiciable. Cette accélération des procédures sert à la fois l'intérêt national d'un approvisionnement sûr et durable en énergie électrique pour le pays et la mise en oeuvre de la stratégie énergétique de la Confédération. En outre, elle tient compte de l'obligation constitutionnelle d'observer des délais raisonnables dans les procédures.

La procédure accélérée est limitée aux installations présentant un
intérêt national et ne peut être appliquée que jusqu'à ce qu'une production supplémentaire de 1 TWh soit atteinte. Ces deux restrictions permettent de garantir le respect du principe de proportionnalité: il ne peut être dérogé aux prescriptions cantonales en matière de procédure que dans la mesure où cela est nécessaire pour atteindre une augmentation significative de la production d'électricité en hiver. D'après les perspectives énergétiques 2050+ de l'Office fédéral de l'énergie, une augmentation de cet ordre de grandeur doit être atteinte d'ici à 2035 pour pouvoir mettre en oeuvre la Stratégie énergétique 2050. Dès que cet objectif sera atteint, la procédure ordinaire sera de nouveau appliquée. La concentration des procédures d'autorisation de construire auprès du canton simplifie et accélère le processus d'autorisation de construire, notamment pour les projets qui concernent plusieurs communes. Les dispositions relatives à la voie de recours permettent également de raccourcir les procédures sans pour autant porter atteinte au principe constitutionnel de la garantie des voies de droit, puisque le tribunal cantonal supérieur peut examiner les faits et les questions juridiques de manière 11

Art. 9, al. 2, de l'ordonnance sur l'énergie (RS 730.01).

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approfondie. Les communes concernées ont toujours la possibilité de s'impliquer dans le projet dans le cadre du plan d'affectation. C'est également lors de l'élaboration de ce plan qu'a lieu, en règle générale, l'évaluation de l'impact environnemental du projet. Le projet de loi ne comporte aucune adaptation du droit matériel. Les exigences du droit de l'environnement s'appliquent donc sans restriction et l'impact environnemental des projets peut toujours être examinée par un juge.

L'accélération et la concentration des procédures pour la construction d'installations de production d'énergies renouvelables répondent à un large consensus politique, ce qui s'est également vérifié lors de la consultation sur le «projet d'accélération des procédures». Des procédures à rallonge ne sont avantageuses pour aucune des parties et suscitent d'importantes incertitudes. Etant donné leur diversité et leur complexité, les procédures à l'échelon cantonal peuvent entraver l'intérêt qu'a la Suisse à développer les énergies renouvelables. Grâce à ce projet de loi, les projets éoliens avancés, pour lesquels il ne se pose plus guère de questions matérielles fondamentales, peuvent entrer rapidement dans leur phase de mise en oeuvre. En décembre 2022, 6 projets totalisant 39 installations et une production annuelle de 250 GWh ont reçu une autorisation d'exploitation entrée en force.12 Pour ces installations, la procédure d'autorisation de construire est en cours, de sorte que la procédure simplifiée prévue par le présent projet pourrait être directement appliquée. Pour 4 autres projets d'une production annuelle de 250 GWh, le plan d'affectation est pendant devant le Tribunal fédéral.

En cas de décision positive, la procédure simplifiée d'octroi de l'autorisation de construire s'appliquerait conformément au projet de loi faisant l'objet du présent rapport.

3

Commentaire des dispositions

3.1

Loi sur l'énergie

Art. 71c

Dispositions transitoires relatives à la modification du ...

(production d'électricité supplémentaire à l'aide d'installations éoliennes)

L'art. 71c prévoit d'accélérer la procédure pour les installations éoliennes en confiant l'octroi de l'autorisation de construire au canton et en limitant la procédure de recours.

Ces règles de procédure ne s'appliquent qu'aux installations éoliennes d'intérêt national dont les plans d'affectation sont entrés en force (al. 1). Ces plans d'affectation ne devront pas nécessairement être entrés en force au moment de l'entrée en vigueur de la présente disposition, mais pourront également être adoptés et entrer en force par la suite. Quant à la limitation, il ne s'agit pas d'une limitation dans le temps, mais d'un objectif de production annuelle supplémentaire de 1 TWh par rapport à 2021. Cette année-là, la production d'électricité à partir de l'énergie éolienne a atteint 146 GWh, soit 0,146 TWh. En 2022, à peine 20 projets éoliens, représentant une production 12

«L'énergie éolienne en Suisse en chiffres», Suisse Éole, https://suisse-eole.ch/wp-content/uploads/2022/10/SE_02_20_FACTSHEET_D_V3-1.pdf (uniquement en allemand); à cela s'ajoute le parc éolien du Mollendruz (VD), autorisé le 27 octobre 2022, qui comptera 12 éoliennes.

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annuelle totale de 750 GWh, en sont à un stade de planification avancé. De nombreux autres projets en sont à un stade précoce de planification. Des projets éoliens supplémentaires sont notamment attendus dans les cantons dont le plan directeur est en cours d'élaboration pour les secteurs propices à l'éolien (Lucerne, Saint-Gall, Grisons, Appenzell Rhodes-Extérieures).

Une minorité de la commission propose que la procédure ordinaire soit à nouveau appliquée dès que la production supplémentaire aura atteint 600 GWh (0,6 TWh).

Ceci permettrait de mieux pouvoir évaluer, du point de vue actuel, quels projets éoliens pourront bénéficier de la procédure accélérée. Une autre minorité encore souhaite que la production supplémentaire soit calculée sur la base de la puissance installée et non de la production annuelle; elle propose comme limite une puissance installée supplémentaire de 600 MW, ce qui correspond environ à une production annuelle de 1 TWh. Il sera ainsi possible d'éviter que les fluctuations de la production n'aient un impact sur le fait que la valeur-seuil soit atteinte ou non.

Le canton octroiera l'autorisation de construire à la place de la commune compétente (let. a). Les cantons devront définir les autorités qui en seront chargées. Pour des raisons économiques, la plupart des éoliennes ne sont pas installées individuellement, mais regroupées en parcs éoliens. Ceux-ci s'étendent souvent sur le territoire de plusieurs communes, raison pour laquelle les autorisations de construire de plusieurs communes peuvent être nécessaires pour un seul projet. Si l'autorisation de construire est octroyée par le canton, une seule procédure sera encore nécessaire. Cette disposition s'appliquera également quand une procédure d'autorisation est déjà pendante devant les autorités communales au moment de l'entrée en vigueur de la présente disposition. En ce cas, la procédure sera transférée de l'autorité communale à l'autorité cantonale compétente, sauf si le requérant exerce son droit conformément à l'al. 2.

Au niveau cantonal, un recours contre l'autorisation de construire sera recevable uniquement auprès du tribunal cantonal supérieur (let. b). Il y a ainsi une instance qui pourra examiner de manière exhaustive les éventuels recours, mais il sera en même temps possible d'accélérer les procédures.
Un recours devant le Tribunal fédéral contre la décision du tribunal cantonal supérieur sera recevable uniquement s'il soulève une question juridique de principe (let. c).

Cette disposition garantit que les voies de droit devant le Tribunal fédéral sont préservées, mais que les questions juridiques qui ont déjà été tranchées à plusieurs reprises ne retardent pas une procédure.

Les autorités de recours jugeront les procédures le plus rapidement possible et ne devront pas renvoyer les décisions aux instances inférieures, dans la mesure du possible (let. d). Des décisions judiciaires réformatoires contribuent en général à l'économie de procédure. Si le tribunal juge le recours fondé et si la situation de fait et de droit concrète dans le cas d'espèce le permet, il doit se prononcer lui-même dans la mesure du possible. Cela permet d'éviter des complications chronophages qui prolongent les procédures et sont liées à des renvois du tribunal pour clarifications complémentaires ou nouvelle décision.13 Il ne s'agit pas d'un nouveau principe, mais d'un appel aux

13

Cf. DORMANN, Basler Kommentar Bundesgerichtsgesetz, 3e éd. 2018, art. 107 ch. 12.

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tribunaux ­ éventuellement avec leurs propres clarifications des faits ­ à rendre une décision sur le fond de l'affaire.

En vertu de l'al. 2, les nouvelles dispositions doivent être applicables à compter de l'entrée en vigueur, comme c'est généralement le cas pour les règles de procédure.

Pour les procédures pendantes devant des autorités communales, il se pourrait toutefois que les procédures soient prolongées à la suite du changement d'autorité. Cela serait contraire au sens et au but des nouvelles dispositions, qui visent précisément à accélérer les procédures. Pour éviter des retards inutiles, les requérants doivent avoir la possibilité, malgré les nouvelles dispositions, de faire examiner la demande par les autorités communales. Cela permet aussi d'éviter que les requérants n'attendent la modification législative pour déposer les demandes d'autorisation de construire. Le nouveau droit (art. 71c, al. 1, let. b à d, LEne, et art. 83, let. z, LTF) s'applique aux recours contre ces autorisations de construire. C'est aussi le cas pour les délais de recours en cours au moment de l'entrée en vigueur.

L'art. 71c LEne est applicable jusqu'à ce qu'une production supplémentaire de 1 TWh d'électricité à partir d'énergie éolienne soit atteinte. En raison de la protection de la bonne foi, c'est-à-dire de l'intérêt du requérant pour une évaluation de la demande qui s'inscrive dans la procédure accélérée, la validité de cette disposition ne peut pas expirer du jour au lendemain. C'est pourquoi ces règles restent valables pour toutes les procédures qui portent sur des demandes ayant été mises à l'enquête publique avant que le seuil de 1 TWh ne soit atteint. Cela vaut également pour les éventuelles procédures de recours qui en découlent. Cette disposition reste par ailleurs applicable aux procédures qui ont déjà été engagées devant le tribunal administratif ou le Tribunal fédéral.

3.2

Loi sur le Tribunal fédéral

Art. 83, let. z L'art. 83, let. z, LTF prévoit que les recours contre les décisions qui concernent les autorisations de construire pour les installations éoliennes d'intérêt national selon l'art. 71c, al. 1, let. b, LEne sont irrecevables devant le Tribunal fédéral, sauf si la contestation soulève une question juridique de principe. Cette disposition découle de l'art. 71c, al. 1, let. c, LEne. Le Tribunal fédéral est déchargé, il peut se limiter aux questions importantes et les juger plus rapidement. Avec les tribunaux cantonaux supérieurs (les tribunaux administratifs cantonaux en règle générale), c'est une autorité de recours investie du plein pouvoir de cognition qui conserve la compétence d'examiner les recours contre les autorisations de construire. Il appartient au Tribunal fédéral de déterminer selon sa pratique et jurisprudence ce qui relève d'une question juridique de principe. D'après sa jurisprudence, le Tribunal fédéral ne doit se saisir d'une question juridique de principe qu'avec réserve. C'est le cas quand il y a un intérêt général et pressant à ce qu'une question controversée soit clarifiée par la Cour

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suprême afin d'aboutir à une application et à une interprétation uniforme du droit fédéral et de dissiper ainsi un flou juridique important.14 Par souci d'exhaustivité, il convient de mentionner que les procédures engagées avant l'entrée en vigueur de la présente disposition seront examinées selon l'ancien droit.

4

Conséquences

4.1

Conséquences pour la Confédération

Le projet n'a pas de conséquences pour l'administration fédérale, car les procédures seront menées par le canton à la place des communes. Le Tribunal fédéral sera déchargé à la suite de la limitation des motifs de recours.

4.2

Conséquences pour les cantons et les communes, ainsi que pour les centres urbains, les agglomérations et les régions de montagne

Les cantons devront désigner les autorités chargées de ces procédures. Pour les autorités cantonales compétentes, la nouvelle compétence en matière d'autorisations de construire impliquera une charge organisationnelle et administrative supplémentaire.

Les communes et les autorités de recours de première instance seront en revanche déchargées. Les cantons suivants devraient être concernés par la réglementation: Argovie (1), Berne (2), Neuchâtel (4), Soleure (2), Vaud (6) et Valais (3)15. D'autres cantons, en particulier ceux dont le plan directeur est en cours d'élaboration pour les secteurs propices à l'éolien (Lucerne, Saint-Gall, Grisons, Appenzell Rhodes-Extérieures), pourraient aussi être concernés.

Comme plusieurs services cantonaux sont d'ores et déjà associés à la procédure de planification (plan directeur cantonal, étude de l'impact sur l'environnement dans le cadre du plan d'affectation), certaines autorités cantonales connaissent déjà les procédures et les projets. Il ne sera donc en principe pas nécessaire que de nouveaux services se familiarisent avec les dossiers.

Puisqu'il ne s'agit que de modifications des règles de procédure, il n'y aura pas de conséquences pour les centres urbains, les agglomérations et les régions de montagne.

4.3

Conséquences économiques

L'accélération des procédures d'autorisation de construire pour les installations éoliennes fournira une contribution importante pour réaliser les objectifs de développement visés par la loi, et donc pour garantir la sécurité de l'approvisionnement du pays en électricité. L'économie en profitera également. Des procédures plus rapides 14 15

ATF 147 II 201 consid. 2.1 p. 207 Entre parenthèses le nombre de projets qui devraient être concernés par la réglementation.

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devraient aussi faire baisser les frais de procédure. La charge administrative diminuera pour les entreprises, car il suffira de soumettre une seule demande au service cantonal, à la place de plusieurs demandes à différentes communes.

4.4

Conséquences sociales

L'accélération de certaines procédures d'autorisation répond au principe constitutionnel de célérité (art. 29, al. 1, Cst.; art. 6, ch. 1, CEDH). De plus, elle renforce aussi les droits des requérants.

4.5

Conséquences environnementales

Le projet ne prévoit aucune adaptation du droit matériel de l'environnement. La construction de nouvelles installations éoliennes fournira une contribution importante à la sortie des combustibles fossiles, car elle permettra de remplacer les énergies fossiles par de l'électricité produite à partir de sources renouvelables. Les droits de recours des organisations de protection de l'environnement sont maintenus.

5

Aspects juridiques

5.1

Constitutionnalité

Les modifications prévues s'appuient sur les art. 89 (politique énergétique) et 75 Cst.

(aménagement du territoire). L'art. 89, al. 2, Cst. (politique énergétique) confie à la Confédération la tâche de fixer les principes législatifs applicables dans le domaine de l'utilisation des énergies indigènes et des énergies renouvelables. La Confédération dispose par conséquent de compétences législatives limitées. Elle a la compétence d'édicter des dispositions avec un haut degré d'abstraction et, exceptionnellement, des dispositions concrètes applicables au cas d'espèce, lorsque c'est nécessaire pour concrétiser des objectifs majeurs.16 Dans le domaine de l'aménagement du territoire, la Confédération fixe les principes (art. 75, al. 1, Cst.) et dispose donc également d'une compétence législative. Au regard de la situation d'approvisionnement tendue qui devrait persister ces prochaines années, il est indispensable d'accélérer les procédures d'autorisation. Les modifications se limitent à des installations d'importance nationale et elles sont ponctuelles, car elles ne concernent que des projets d'intérêt national déjà avancés.

Ces modifications se fondent par ailleurs sur l'art. 29, al. 1, Cst. et l'art. 6, ch. 1, CEDH. Les requérants et les opposants aux projets d'installations d'exploitation des énergies renouvelables ont le droit, dans le cadre d'une procédure équitable, d'obtenir une protection juridique efficace dans un délai raisonnable.17 16 17

JAGMETTI, Schweizerisches Bundesverwaltungsrecht, Band VII, Energierecht, ch. 1321 s.

Cf. Rapport explicatif concernant le projet de modification de la loi sur l'énergie du 30 septembre 2016 mis en consultation, avant-projet du 2 février 2022, ch. 5.1.

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L'art. 71c, al. 1, let. a et b affecte l'autonomie des cantons en matière d'organisation et de procédure (art. 47, al. 2, Cst.) et a aussi des conséquences pour les communes (art. 50, al. 2, Cst.). L'autonomie cantonale en matière d'organisation et de procédure n'est pas absolue et peut être limitée en présence de motifs suffisamment importants, d'après la pratique et la doctrine.18 L'atteinte limitée dans le temps est admissible et justifiée au regard de la situation en matière d'approvisionnement, de la durée des procédures et de la réalisation des objectifs de la loi sur l'énergie.

5.2

Compatibilité avec les obligations internationales de la Suisse

Le projet est compatible avec les obligations internationales de la Suisse.

5.3

Forme de l'acte à adopter

Comme il s'agit de modifications importantes qui fixent des règles de droit, il convient d'édicter ces dispositions sous la forme d'une loi fédérale, conformément à l'art. 164, al. 1, Cst. La compétence de l'Assemblée fédérale découle de l'art. 163, al. 1, Cst.

L'acte est sujet au référendum facultatif (art. 141, al. 1, let. a, Cst.)

5.4

Frein aux dépenses

Le projet ne contient pas de dispositions relatives aux subventions et ne prévoit ni crédits d'engagement ni plafonds de dépenses. Il n'est donc pas soumis au frein aux dépenses (art. 159, al. 3, let. b, Cst.).

5.5

Conformité à la loi sur les subventions

Le projet ne contient pas de dispositions légales relatives à des subventions ni ne prévoit de demandes de crédits d'engagement ou de plafond de dépenses. Les principes établis dans la loi sur les subventions ne s'appliquent donc pas dans le cas présent.

5.6

Délégation de compétences législatives

Le projet ne prévoit aucune nouvelle norme de délégation qui habiliterait à l'édiction de réglementations au niveau des ordonnances du Conseil fédéral.

18

Cf. EGLI, St. Galler Kommentar zu Art. 47 BV, ch. 21.

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5.7

Protection des données

Le projet n'a aucune pertinence du point de vue de la protection des données.

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