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23.066 Message concernant la loi sur les biens utilisés pour la torture du 29 septembre 2023

Monsieur le Président, Madame la Présidente, Mesdames, Messieurs, Par le présent message, nous vous soumettons le projet d'une loi sur les biens utilisés pour la torture1, en vous proposant de l'adopter.

Nous vous prions d'agréer, Monsieur le Président, Madame la Présidente, Mesdames, Messieurs, l'assurance de notre haute considération.

29 septembre 2023

Au nom du Conseil fédéral suisse: Le président de la Confédération, Alain Berset Le chancelier de la Confédération, Walter Thurnherr

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Condensé Le projet de loi fédérale qui fait l'objet du présent message règle le commerce transfrontalier des biens susceptibles d'être utilisés en vue d'infliger la peine capitale, la torture ou d'autres peines ou traitements cruels, inhumains ou dégradants. Il met en oeuvre la recommandation du Conseil de l'Europe du 31 mars 2021 sur le contrôle des biens pouvant être utilisés pour infliger la peine de mort ou la torture.

Contexte L'harmonisation des contrôles nationaux des biens pouvant être utilisés pour infliger la torture ou la peine de mort fait l'objet de discussions au sein tant de l'Organisation des Nations Unies que du Conseil de l'Europe.

Le 31 mars 2021, le Comité des Ministres du Conseil de l'Europe a adopté une recommandation à ce sujet et invité les États membres à examiner la mise en oeuvre de celle-ci au plus tard cinq ans après son adoption. La recommandation du Conseil de l'Europe s'appuie largement sur le règlement de 2005 de l'Union européenne (UE) concernant le commerce de certains biens susceptibles d'être utilisés en vue d'infliger la peine capitale, la torture ou d'autres peines ou traitements cruels, inhumains ou dégradants. Les listes des biens interdits ou soumis au contrôle figurant à l'annexe de la recommandation du Conseil de l'Europe correspondent à celles du règlement de l'UE.

La Suisse met déjà en oeuvre une partie de la recommandation du Conseil de l'Europe dans le cadre de la législation sur les produits thérapeutiques. Ainsi, Swissmedic publie la liste des médicaments pouvant être destinés à l'exécution d'êtres humains selon le règlement de l'UE et soumet à un régime d'autorisation l'exportation et le commerce à l'étranger de ces médicaments. La Suisse ne dispose toutefois d'aucune base légale qui lui permettrait de mettre en oeuvre les autres parties de la recommandation du Conseil de l'Europe.

Contenu du projet Le projet de loi sur les biens utilisés pour la torture se base sur le contenu du règlement de l'UE.

Il fait une distinction entre les biens n'ayant aucune autre utilisation pratique que celle d'infliger la peine capitale, la torture ou d'autres peines ou traitements cruels, inhumains ou dégradants (biens utilisés à titre primaire pour la torture), les biens ayant d'autres utilisations pratiques (bien utilisés à titre secondaire pour la torture)
et les médicaments susceptibles d'être utilisés pour infliger la peine capitale.

L'importation, le transit et l'exportation de biens utilisés à titre primaire pour la torture seront interdits, de même que la fourniture d'une assistance technique pour ces biens ainsi que la promotion de ces biens.

L'exportation et le courtage de biens utilisés à titre secondaire ainsi que la fourniture d'une assistance technique pour ces biens seront soumis à autorisation.

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La partie de la recommandation du Conseil de l'Europe concernant les médicaments susceptibles d'être utilisés pour infliger la peine capitale, que la Suisse met déjà en oeuvre, sera transférée dans la loi sur les biens utilisés pour la torture. En plus de l'exportation, le courtage et la fourniture d'une assistance technique pour ces médicaments seront eux aussi soumis à autorisation.

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Message 1

Contexte

1.1

Développements internationaux

Le contrôle des biens pouvant être utilisés pour la torture fait l'objet de discussions au sein tant de l'Organisation des Nations Unies (ONU) que du Conseil de l'Europe.

L'Alliance internationale pour un commerce sans torture (Alliance internationale) a vu le jour le 3 juillet 2017, sur l'initiative de l'Argentine, de la Mongolie et de l'Union européenne (UE). Le 18 septembre 2017, à New York, 57 membres de l'ONU, dont la Suisse, ont signé la déclaration correspondante2. L'Alliance internationale compte aujourd'hui plus de 60 États membres en plus de l'UE. Elle a pour but de mettre un terme au commerce des biens utilisés pour infliger la peine capitale ou la torture, en favorisant les contrôles harmonisés à l'échelle internationale ainsi que l'échange d'informations et l'assistance technique entre les pays.

Le 28 juin 2019, l'Assemblée générale de l'ONU a adopté la résolution 73/304 proposée par l'Alliance internationale («Mettre fin au commerce des instruments de torture: examen de la possibilité d'établir des normes internationales communes, du champ d'application de telles normes et des paramètres applicables»)3. Cette résolution habilite le Secrétaire général de l'ONU à procéder à des clarifications concernant une éventuelle harmonisation internationale des contrôles de ces biens menés à l'échelon national et à créer un groupe d'experts ad hoc. Sur la base des réponses fournies par 46 États membres (dont la Suisse) à un questionnaire, le Secrétaire général de l'ONU a remis un rapport en septembre 2020. La plupart des États ayant répondu au questionnaire étaient favorables à la mise en place de normes internationales communes et d'un instrument juridique contraignant afin de contrôler les biens pouvant être utilisés pour infliger la peine capitale ou la torture. Un groupe d'experts gouvernementaux, institué en octobre 2020, a été chargé de poursuivre les travaux relatifs à ce thème dans le cadre de l'ONU. Dans son rapport4, qui a été présenté à l'Assemblée générale de l'ONU le 22 juin 2022, il recommande que les futures normes internationales prévoient une interdiction de fabrication et de commerce des équipements de maintien de l'ordre intrinsèquement abusifs. Il préconise en outre de mettre sur pied des contrôles du commerce des biens de maintien de l'ordre lorsqu'il y a lieu de penser que
ces biens serviront à infliger la torture ou d'autres mauvais traitements. Il suggère enfin de traiter séparément la question de la peine de mort de celle de la torture et d'autres peines ou traitements cruels, inhumains ou dégradants. Le 15 décembre 2022,

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Global Alliance to end trade in goods used for capital punishment and torture. Political Declaration. Disponible sous: www.torturefreetrade.org > About Us > 2017 Declaration.

Résolution 73/304 de l'Assemblée générale disponible sous: www.ohchr.org > Search > 73/304.

A/76/850: Towards torture-free trade: examining the feasibility, scope and parameters for possible common international standards ­ Report of the Group of Governmental experts.

Disponible sous: www.ohchr.org > Search > 76/850.

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l'Assemblée générale de l'ONU a adopté la résolution 77/2095, qui demande à tous les États de prendre les mesures qui s'imposent, notamment d'ordre législatif, administratif et judiciaire, pour prévenir et interdire la production, le commerce, l'exportation, l'importation et l'utilisation de matériel n'ayant aucune autre utilité pratique que celle d'infliger la torture ou d'autres peines ou traitements cruels, inhumains ou dégradants.

Le Conseil de l'Europe a lui aussi mené des discussions à ce sujet, qui ont progressé plus vite que celles de l'ONU. En janvier 2018, l'Assemblée parlementaire du Conseil de l'Europe a émis une recommandation en vue de renforcer la réglementation internationale interdisant le commerce des biens utilisés pour la torture et la peine de mort.

Dans le sillage de cette recommandation, le Comité des Ministres du Conseil de l'Europe a chargé le Comité directeur pour les droits de l'homme (CDDH) de mener une étude de faisabilité6 sur la création d'un instrument juridique concernant le commerce des biens utilisés pour la torture et la peine de mort. Sur la base des réponses obtenues à un questionnaire soumis aux États membres du Conseil de l'Europe et en collaboration avec l'expert Michael Crowley (Research Associate, Université de Bradford [Royaume-Uni] et Omega Research Foundation), le secrétariat du CDDH a réalisé l'étude de faisabilité, qui a été adoptée par le CDDH en novembre 2019. L'étude analyse la situation relative au commerce de biens susceptibles d'être utilisés pour la torture et la peine de mort ainsi que les réponses juridiques nationales et internationales existantes. Elle préconise l'adoption, par le Conseil de l'Europe, d'une recommandation contenant une série de mesures afin de renforcer la réglementation internationale en la matière. Le Comité des Ministres a commandé la rédaction d'une telle recommandation en février 2020.

Le Comité des Ministres a adopté la recommandation CM/Rec(2021)27 le 31 mars 2021. Bien que juridiquement non contraignante, elle est, selon lui, un instrument important dans la lutte contre la peine de mort et la torture: elle constitue une aide précieuse pour les États membres et les organisations non gouvernementales qui militent contre de telles méthodes en Europe et envoie un signal fort aux autres organisations internationales. La recommandation s'appuie largement sur le règlement

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6

7

Call for input: The nature, scope and regulation of the production and trade of law enforcement equipment and weapons and the relationship with torture and other cruel, inhuman or degrading treatment or punishment. Disponible sous: www.ohchr.org > Search > 77/209.

Étude de faisabilité du Comité directeur pour les droits de l'homme d'un instrument juridique concernant l'interdiction du commerce des biens utilisés pour la torture et d'autres peines ou traitements cruels, inhumains ou dégradants et pour la peine de mort.

Disponible sous: www.coe.int > Search > CDDH(2019)R92Addendum3.

Recommandation CM/Rec(2021)/2 du Comité des Ministres aux États membre sur des mesures contre le commerce de biens utilisés pour la peine de mort, la torture et autres peines ou traitements cruels, inhumains ou dégradants, adoptée par le Comité des Ministres le 31 mars 2021. Disponible sous: www.coe.int > Droits de l'homme > Coopération intergouvernementale en matière de droits de l'homme > Publications > Recommandation CM/Rec (2021)2.

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(UE) 2019/1258 (règlement anti-torture de l'UE), qui a été promulgué en 2005 et entièrement révisé en 2019 et qui est la nouvelle version du règlement (CE) no 1236/20059. Les listes des biens interdits ou soumis au contrôle figurant à l'annexe de la recommandation reflètent celles de ce règlement. La recommandation prévoit en outre la publication d'un rapport d'activité national annuel ainsi qu'un échange d'informations entre les États membres du Conseil de l'Europe sur les autorisations octroyées et les exportations réalisées. Ces derniers sont par ailleurs invités à examiner la mise en oeuvre de la recommandation dans les cinq ans suivant son adoption.

Il existe déjà plusieurs accords internationaux et régionaux qui interdisent la torture.

L'art. 5 de la Déclaration universelle des droits de l'homme10, l'art. 7 du Pacte international du 16 décembre 1966 relatif aux droits civils et politiques (Pacte II de l'ONU)11, l'art. 3 de la Convention de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales du 4 novembre 1950 (CEDH)12 et la Convention du 10 décembre 1984 contre la torture et autres peines ou traitements cruels, inhumains ou dégradants13 (convention de l'ONU contre la torture) prévoient une interdiction globale de tout acte de torture et de toute peine ou tout traitement cruel, inhumain ou dégradant.

Du point de vue de la Suisse, la peine capitale est interdite, car elle contrevient à l'interdiction de la torture et d'autres peines ou traitements cruels, inhumains ou dégradants ainsi qu'au droit à la vie. La jurisprudence de la Cour européenne des droits de l'homme, notamment, soutient ce point de vue, ce dont témoignent les arrêts Soering contre le Royaume-Uni (1989)14, Jabari contre la Turquie (2000)15, Bader et Kanbor contre la Suède (2005)16, Al-Saadoon et Mufdhi contre le Royaume-Uni (2010)17 et A.L. (X.W.) contre la Russie (2015)18. Tous les pays ne partagent toutefois pas ce point de vue. L'art. 6, art. 2, du Pacte II de l'ONU limite l'application de la peine de mort aux États parties ne l'ayant pas abolie et aux crimes les plus graves. L'interprétation selon laquelle les crimes les plus graves visés par cette disposition s'entendent 8

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10 11 12 13 14 15 16 17 18

Règlement (UE) 2019/125 du Parlement européen et du Conseil du 16 janvier 2019 concernant le commerce de certains biens susceptibles d'être utilisés en vue d'infliger la peine capitale, la torture ou d'autres peines ou traitements cruels, inhumains ou dégradants, JO L 30 du 31.1.2019, p. 1; modifié en dernier lieu par le règlement délégué (UE) 2021/139 de la Commission du 4 décembre 2020 modifiant les annexes I et V du règlement (UE) 2019/125 concernant le commerce de certains biens susceptibles d'être utilisés en vue d'infliger la peine capitale, la torture ou d'autres peines ou traitements cruels, inhumains ou dégradants afin de tenir compte du retrait du Royaume-Uni de l'Union, JO L 43 du 8.2.2021, p. 5.

Règlement (CE) no 1236/2005 du Conseil du 27 juin 2005 concernant le commerce de certains biens susceptibles d'être utilisés en vue d'infliger la peine capitale, la torture ou d'autres peines ou traitements cruels, inhumains ou dégradants, JO L 200 du 30.7.2005, p. 1.

La Déclaration universelle des droits de l'homme. Disponible sous www.ohchr.org > Que sont les droits de l'homme > La Déclaration universelle des droits de l'homme.

RS 0.103.2 RS 0.101 RS 0.105 Arrêt disponible sous: hudoc.echr.coe.int > Search > Soering v. the United Kingdom.

Arrêt disponible sous: hudoc.echr.coe.int > Search > Jabari v. Turkey.

Arrêt disponible sous: hudoc.echr.coe.int > Search > Bader and Kanbor v. Sweden.

Arrêt disponible sous: hudoc.echr.coe.int > Search > Al-Saadoon and Mufdhi v. the United Kingdom.

Arrêt disponible sous: hudoc.echr.coe.int > Search > A.L. (X.W.) v. Russia.

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uniquement des crimes d'une extrême gravité, impliquant un homicide intentionnel, s'impose progressivement19. Le droit coutumier international interdit en outre la peine de mort pour les personnes âgées de moins de 18 ans au moment des faits ainsi que pour les femmes enceintes (art. 6, ch. 5, du Pacte II de l'ONU) et les personnes ayant un handicap mental. Le droit conventionnel prévoit lui aussi ces interdictions, en l'occurrence l'art. 6, ch. 5, du Pacte II de l'ONU et l'art. 37, let. a, de la Convention du 20 novembre 1989 relative aux droits de l'enfant20 ainsi que le rapport de la Commission interaméricaine des droits de l'homme no 62/02 du 22 octobre 200221. Le deuxième Protocole facultatif du 15 décembre 1989 se rapportant au Pacte II de l'ONU, visant à abolir la peine de mort22 interdit quant à lui la peine de mort en temps de paix.

Au niveau du Conseil de l'Europe, la peine de mort en période de paix a été abolie en 1983 par le Protocole no 6 du 28 avril 1983 à la CEDH concernant l'abolition de la peine de mort23. Enfin, le Protocole no 13 du 3 mai 2002 à la CEDH, relatif à l'abolition de la peine de mort en toutes circonstances24, qui est entré en vigueur pour la Suisse en 2003, a aboli la peine de mort en temps de paix comme de guerre.

1.2

Nécessité d'agir et objectifs visés

L'engagement en faveur du respect des droits de l'homme se fonde sur un mandat à la fois constitutionnel et légal. L'abolition de la peine de mort et la prévention de la torture sont en outre des objectifs concrets de la stratégie de politique extérieure 2020­ 202325 du Conseil fédéral (objectif 1.3). La Suisse a par ailleurs adhéré à l'Alliance internationale en septembre 2017 et soutenu, en mars 2021, l'adoption de la recommandation du Conseil de l'Europe, dans le but de restreindre à l'échelle internationale, en collaboration avec les pays partageant les mêmes vues, le commerce des biens utilisés pour la torture. Le projet de loi qui fait l'objet du présent message vise à adapter la législation nationale de la Suisse aux développements internationaux et aux règles de l'UE. Il serait choquant que la Suisse devienne un pays de contournement pour le commerce des biens utilisés pour la torture parce qu'elle ne s'est pas dotée des dispositions juridiques nécessaires.

La Suisse n'applique aujourd'hui que partiellement la recommandation du Conseil de l'Europe de 2021. Ainsi, l'art. 21, let. c, de la loi du 15 décembre 2000 sur les produits thérapeutiques (LPTh)26 interdit le commerce de médicaments à l'étranger à partir de la Suisse «s'il y a lieu de supposer qu'ils sont destinés à l'exécution d'êtres humains».

La LPTh emploie l'expression «exécution d'êtres humains», tandis que la loi sur les 19

20 21 22 23 24 25 26

Cf. Observation générale no 36 sur l'article 6 du Pacte II de l'ONU concernant le droit à la vie, ch. 35. Disponible sous: www.ohchr.org > Search > General comment No 36 on article 6: right to life.

RS 0.107 Report Nº 62/02 Case 12.285 Michael Domingues v. United States, al. 85. Disponible sous: www.oas.org > Search > Report No 62/02.

RS 0.103.22 RS 0.101.06 RS 0.101.093 Stratégie de politique extérieure 2020­2023. Disponible sous: www.eda.admin.ch > Politique extérieure > Stratégies et fondamentaux > Stratégie de politique extérieure.

RS 812.21

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biens utilisés pour la torture (LBT) emploie l'expression «infliger la peine capitale», qui correspond à la formulation choisie dans le règlement anti-torture de l'UE.

L'art. 50 de l'ordonnance du 14 novembre 2018 sur les autorisations dans le domaine des médicaments (OAMéd)27 fixe la procédure d'autorisation pour les médicaments susceptibles d'être utilisés pour l'exécution d'êtres humains. La liste des médicaments pouvant être utilisés pour l'exécution d'êtres humains en vertu de l'art. 21 LPTh est publiée par Swissmedic et correspond aux listes figurant à l'annexe 2 de la recommandation du Conseil de l'Europe et à l'annexe IV du règlement anti-torture de l'UE.

Par ailleurs, la recommandation du Conseil de l'Europe prévoit, tout comme le règlement anti-torture de l'UE, des réglementations pour d'autres biens, notamment ceux conçus uniquement pour infliger la peine capitale ou la torture et ceux ayant également d'autres utilisations pratiques. Le projet de loi a pour but de créer une base légale permettant de contrôler et, si nécessaire, d'interdire le commerce de ces biens. Cette base légale aura ainsi un effet dissuasif et empêchera que des opérations interdites dans l'UE ne puissent être réalisées depuis la Suisse.

1.3

Solutions étudiées et solution retenue

La Suisse n'a pas encore de loi sur le contrôle des biens pouvant être utilisés en vue d'infliger la torture ou la peine capitale. Des lois sectorielles incluent certains biens entrant dans cette catégorie, comme la LPTh, la loi du 20 juin 1997 sur les armes (LArm)28 et la loi du 13 décembre 1996 sur le contrôle des biens (LCB)29. Certains des biens visés dans le règlement anti-torture de l'UE (et, partant, dans la recommandation du Conseil de l'Europe), par exemple les substances irritantes, figurent déjà dans les lois susmentionnées (cf. commentaire de l'art. 12). Même si ce n'est pas le cas actuellement, il se pourrait que l'ajout de biens aux listes concernées engendre des recoupements avec la loi fédérale du 13 décembre 1996 sur le matériel de guerre (LFMG)30. À l'exception de la LPTh concernant certains médicaments, les lois en vigueur ne prévoient aucun contrôle pour déterminer si les biens sont utilisés en vue d'infliger la torture ou la peine capitale et ne définissent pas de critères de refus permettant d'empêcher un transfert de ces biens même s'il y a lieu de penser qu'ils seront destinés à un tel usage. La LBT prévoit non seulement un contrôle des biens, mais aussi un contrôle de l'assistance technique liée à ces biens, activité qui n'est pas non plus réglée en Suisse. Une telle assistance ne peut être soumise à l'obligation de déclarer une activité en vertu de la loi fédérale du 27 septembre 2013 sur les prestations de sécurité privées fournies à l'étranger (LPSP)31 que dans des cas très spécifiques.

Après l'adoption de la recommandation du Conseil de l'Europe, trois options ont été étudiées pour la Suisse: ­

27 28 29 30 31

Maintien du statu quo: la Suisse pourrait se contenter de prendre acte de la recommandation du Conseil de l'Europe, qu'elle soutient. Elle risquerait touRS 812.212.1 RS 514.54 RS 946.202 RS 514.51 RS 935.41

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tefois, sur le plan de la politique tant intérieure qu'étrangère, de s'écarter des exigences légales applicables dans l'UE et de servir ainsi de pays de contournement dans un domaine économiquement peu important pour elle et dans lequel elle a toujours défendu, aux niveaux national et international, une position fondée sur des valeurs.

­

Révision de la législation en vigueur (de la LCB ou de la LArm, p. ex.): le champ d'application de la LCB se limite aux biens qui font l'objet d'accords internationaux ou figurent sur des listes établies dans le cadre de régimes multilatéraux de contrôle à l'exportation politiquement contraignants. La LCB ne prévoit pas de listes nationales. L'annexe 5 de l'ordonnance du 3 juin 2016 sur le contrôle des biens (OCB)32 ne se base pas sur la LCB, mais sur la LArm et la loi fédérale du 25 mars 1977 sur les explosifs (LExpl)33. La mise en oeuvre de la recommandation du Conseil de l'Europe dans la législation sur le contrôle des biens changerait la nature de la LCB et nécessiterait par conséquent une modification de son champ d'application. En ce qui concerne la LArm, son champ d'application porte tant sur les armes interdites que sur celles soumises à déclaration et à autorisation. Les activités qu'elle couvre ne correspondent toutefois pas aux activités interdites ou soumises à autorisation au titre du règlement anti-torture de l'UE.

­

Adoption d'une nouvelle loi: la Suisse pourrait adopter une nouvelle loi en s'appuyant sur le règlement anti-torture de l'UE, c'est-à-dire en reprenant sa teneur à l'échelon de la loi pour ce qui est des dispositions importantes et à l'échelon d'une ordonnance pour ce qui est des listes des biens. Les entreprises suisses et celles de l'UE seraient alors soumises aux mêmes règles, ce qui permettrait de réduire le risque que la Suisse serve de pays de contournement du règlement anti-torture de l'UE. Afin que tous les biens soumis à autorisation susceptibles d'être utilisés en vue d'infliger la torture ou la peine capitale soient couverts par la même loi, il serait possible de transférer les médicaments concernés, relevant actuellement de la LPTh, dans le champ d'application de la nouvelle loi.

Par le présent message, le Conseil fédéral propose d'arrêter une loi ad hoc.

1.4

Relation avec le programme de la législature et avec le plan financier, ainsi qu'avec les stratégies du Conseil fédéral

Le projet n'est annoncé ni dans le message du 29 janvier 2020 sur le programme de la législature 2019 à 202334 ni dans l'arrêté fédéral du 21 septembre 2020 sur le programme de la législature 2019 à 202335. En adoptant la LBT, la Suisse met en oeuvre la recommandation du Conseil de l'Europe.

32 33 34 35

RS 946.202.1 RS 941.41 FF 2020 1709 FF 2020 8087

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2

Procédure préliminaire, consultation comprise

La procédure de consultation concernant la LBT s'est déroulée du 19 octobre 2022 au 31 janvier 2023.

À l'issue de la consultation, le Département fédéral de l'économie, de la formation et de la recherche (DEFR) avait reçu 45 prises de position. La majorité des cantons et groupes d'intérêts consultés ont soutenu l'avant-projet de loi; plusieurs d'entre eux ont toutefois soumis des propositions de modification ou d'ajout. Deux groupes d'intérêts ont rejeté l'avant-projet.

Les avis concernant les différentes dispositions de la LBT sont présentés au ch. 5. Les points suivants sont néanmoins déjà abordés ici.

Exceptions au régime d'autorisation Certains participants ont proposé d'exclure du régime d'autorisation la fourniture d'une assistance technique en lien avec les biens soumis à autorisation lorsqu'elle est destinée à des autorités de poursuite pénale ou à des affectations transfrontalières des forces de police. Étant donné que le règlement anti-torture de l'UE connaît également des exceptions à cet égard, cette proposition a été retenue (cf. commentaire de l'art. 5 LBT).

Des exceptions ont également été demandées pour les biens utilisés dans l'industrie du sexe. Selon les données de l'office allemand chargé de l'économie et du contrôle à l'exportation (Bundesamt für Wirtschaft und Ausfuhrkontrolle), ces biens ne tombent pas dans le champ d'application du règlement anti-torture de l'UE. Ils ne sont donc pas non plus couverts par la LBT, et il n'est dès lors pas nécessaire de prévoir une exception en la matière (cf. commentaire de l'art. 1 LBT).

Reprise des listes de biens du règlement anti-torture de l'UE Les avis des participants ont divergé concernant le contenu des listes de biens: alors que d'aucuns préconisent des listes aussi limitées que possible, d'autres souhaitent que les listes de la Suisse aillent au-delà de celles de l'UE. La LBT reprend les listes de biens du règlement anti-torture de l'UE, ce qui permet de combler les divergences entre la législation suisse et celle de l'UE (cf. commentaire de l'art. 2 LBT).

Création d'une commission consultative d'experts Plusieurs groupes d'intérêts demandent la création d'une commission consultative d'experts, qui aurait pour tâche de soutenir les autorités compétentes dans le réexamen de la pertinence des listes de biens et de leur fournir
des informations et des appréciations aux fins de l'évaluation des opérations soumises à autorisation. La commission serait en outre responsable de veiller à la mise en oeuvre de la LBT.

L'UE a, de son côté, institué un groupe de coordination contre la torture chargé d'examiner toute question concernant l'application du règlement anti-torture, y compris l'échange d'informations sur les pratiques administratives (art. 31 du règlement antitorture de l'UE). Le groupe se compose d'un représentant par État membre et se réunit normalement une fois par an. Il sert de plateforme d'échange d'informations entre les

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États membres et n'est pas un organe consultatif. La recommandation du Conseil de l'Europe ne prévoit pas de commission d'experts.

Étant donné qu'en vertu de la LBT, le Conseil fédéral reprendrait les listes des biens de l'UE, une commission d'experts n'apporterait aucune plus-value apparente. La mise en place d'une telle commission n'est donc pas indiquée.

Documentation Des participants ont proposé que l'autorité qui délivre les autorisations consigne toutes les procédures liées à l'application de la LBT (nombre, valeur, catégorie et type de biens concernés, autorisations accordées et refusées et évaluations des conditions d'octroi de l'autorisation) et qu'elle les conserve pendant au moins 10 ans. Une réglementation spéciale n'est toutefois pas nécessaire, vu que la loi fédérale du 26 juin 1998 sur l'archivage36 s'applique.

Protection des données Certains participants ont signalé des imprécisions concernant la protection des données en lien avec l'entraide administrative entre autorités suisses. Le présent message précise par conséquent que l'entraide administrative doit se faire dans le respect des exigences légales de la Confédération et des cantons en matière de protection des données (cf. commentaire de l'art. 13 LBT).

3

Comparaison avec le droit étranger, notamment européen

Le règlement anti-torture de l'UE, qui régit le contrôle des biens utilisés pour la torture, est entré en vigueur le 27 juin 2005. L'un des objectifs de la politique étrangère de l'UE est de promouvoir le respect des droits fondamentaux dans les pays tiers et de veiller à ce que les biens pouvant être utilisés pour infliger la torture soient réglementés. Le règlement anti-torture est par conséquent considéré comme un instrument de la politique étrangère. L'UE a ainsi mis en place le premier règlement régional formel visant à contrôler le commerce de ces biens. Au niveau de l'UE, l'interdiction absolue de la torture, inscrite dans les conventions de l'ONU relatives aux droits de l'homme, est consacrée par la Charte des droits fondamentaux de l'Union européenne37, dont l'art. 2, par. 2, dispose que nul ne peut être condamné à la peine de mort, ni exécuté et l'art. 4 que nul ne peut être soumis à la torture ni à des peines ou traitements inhumains ou dégradants. Du côté de la Suisse, l'interdiction absolue de la torture et des mauvais traitements est inscrite dans les principales conventions internationales pour la protection des droits de l'homme et dans la CEDH.

Le règlement anti-torture de l'UE prévoit des interdictions et un régime d'autorisation pour le commerce international de biens pouvant être utilisés pour infliger la peine

36 37

RS 152.1 Charte des droits fondamentaux de l'Union européenne, JO 364 du 18.12.2000, p. 1.

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capitale, la torture ou d'autres peines ou traitements cruels, inhumains ou dégradants.

Le règlement inclut trois listes de biens: ­

l'annexe II comprend les biens interdits, qui n'ont aucune autre utilisation pratique que celle d'infliger la peine capitale ou la torture; l'interdiction porte sur l'importation, le transit, l'exportation, le courtage, l'exposition à des salons professionnels et la promotion de ces biens ainsi que sur la fourniture d'une assistance technique en lien avec ces biens;

­

l'annexe III comprend les biens susceptibles d'être utilisés en vue d'infliger la torture; l'exportation, le courtage et la fourniture d'une assistance technique sont soumis à autorisation;

­

l'annexe IV comprend les biens susceptibles d'être utilisés en vue d'infliger la peine capitale; pour ces biens aussi, l'exportation, le courtage et la fourniture d'une assistance technique sont soumis à autorisation.

Le règlement ne régit pas l'importation dans l'UE des biens énumérés aux annexes III et IV ni le transfert de ces biens entre les États membres de l'UE. Il n'interdit pas non plus le commerce des biens visés à l'annexe II à l'intérieur de l'UE. Le règlement est juridiquement contraignant et s'applique à tous les États membres de l'UE. Dans le but de réduire à un minimum la charge administrative des entreprises lors de l'exportation de médicaments vitaux, le règlement prévoit un système d'autorisation d'exportation globale pour les biens visés à l'annexe IV. Pour recevoir une telle autorisation, les entreprises doivent prouver qu'elles ont mis en place les contrôles nécessaires afin d'empêcher que de tels médicaments soient vendus dans le but d'être utilisés pour infliger la peine capitale.

L'autorité compétente peut refuser d'accorder l'autorisation s'il existe de bonnes raisons de penser que les biens énumérés à l'annexe III seront utilisés à des fins de torture ou que les biens énumérés à l'annexe IV seront utilisés pour infliger la peine capitale.

Par ailleurs, le transit des biens énumérés aux annexes III et IV est interdit dès lors que le transitaire sait que ces biens sont destinés à infliger la torture. Lors de la prise d'une décision relative à l'octroi d'une autorisation, les autorités compétentes des États membres tiennent compte des arrêts déjà parus, rendus par des juridictions internationales, des résultats des travaux des organes compétents de l'ONU, du Conseil de l'Europe et de l'UE, ainsi que des rapports du Comité européen pour la prévention de la torture et des peines ou traitements inhumains ou dégradants du Conseil de l'Europe et du rapporteur spécial de l'ONU sur la torture et autres peines ou traitements cruels, inhumains ou dégradants. Elles peuvent également se baser sur d'autres informations pertinentes, telles que les arrêts rendus par les juridictions nationales, les rapports ou autres informations émanant d'organisations de la société civile et les informations sur les restrictions appliquées par le pays de destination aux exportations de biens énumérés aux annexes II et III.

Les autorités compétentes des États membres sont responsables de surveiller le respect des interdictions et du régime d'autorisation prévus par le règlement. Il incombe aux États membres de
déterminer le régime des sanctions applicables aux violations des dispositions du règlement. Lesdites sanctions doivent être effectives, proportionnées et dissuasives (art. 33, par. 1, du règlement anti-torture de l'UE). Les États membres sont en outre tenus de publier un rapport d'activité annuel public, dans lequel ils four12 / 28

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nissent des informations détaillées sur le nombre de demandes d'autorisation reçues et le nombre d'autorisations octroyées. L'application du règlement fera l'objet d'un examen approfondi tous les cinq ans. Le prochain examen est prévu en 2025.

4

Présentation du projet

4.1

Réglementation proposée

La LBT réglera le commerce transfrontalier des biens susceptibles d'être utilisés en vue d'infliger la peine capitale, la torture ou d'autres peines ou traitements cruels, inhumains ou dégradants. La mise à jour des listes des biens concernés ressortira au Conseil fédéral et sera réalisée par une modification des annexes de l'ordonnance correspondante.

Le projet de loi établit une distinction entre les biens utilisés à titre primaire pour la torture, dont le commerce est généralement interdit, les biens utilisés à titre secondaire, qui ont d'autres utilisations pratiques, et les médicaments susceptibles d'être utilisés pour infliger la peine capitale.

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L'importation, le transit et l'exportation de biens utilisés à titre primaire seront interdits, de même que la fourniture d'une assistance technique pour ces biens ainsi que la promotion de ces biens, y compris leur présentation à des salons professionnels.

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L'exportation et le courtage de biens utilisés à titre secondaire, qui ont d'autres utilisations pratiques que celle d'infliger la peine capitale, la torture ou d'autres peines ou traitements cruels, inhumains ou dégradants, de même que la fourniture d'une assistance technique pour ces biens seront soumis à autorisation. Le transit de ces biens sera par contre interdit s'il y a lieu de penser qu'ils sont destinés à infliger la torture. À l'instar du règlement antitorture de l'UE, la LBT ne s'appliquera pas à l'importation de biens utilisés à titre secondaire pour la torture.

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Les médicaments susceptibles d'être utilisés pour infliger la peine capitale, qui sont couverts par la LPTh, seront transférés dans le champ d'application de la LBT.

4.2

Mise en oeuvre

Par voie d'ordonnance, le Conseil fédéral désignera les autorités compétentes en matière d'autorisation et de contrôle, réglera les dispositions relatives à la coordination (cf. commentaire de l'art. 12) et précisera la procédure d'autorisation.

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Commentaire des dispositions

Titre Malgré les propositions faites pendant la procédure de consultation, le titre de la nouvelle loi reste inchangé («loi fédérale sur le commerce des biens utilisés pour la torture»). Ce titre rend compte du fait que la loi ne prévoit pas une interdiction totale des biens utilisés pour la torture, mais a pour but de réguler le commerce de ces biens.

L'utilisation du terme «biens» n'implique par ailleurs nullement une appréciation (positive) des biens utilisés pour la torture. Le terme «biens utilisés pour la torture» a été préféré à «instruments de torture» ou à «matériel de torture», car «biens» est le terme employé dans le domaine du contrôle à l'exportation («biens à double usage», «biens d'équipement militaires», p. ex.) ainsi que dans l'UE, ce qui ressort par exemple du communiqué de presse du Conseil européen du 14 novembre 201638.

Préambule Le préambule renvoie à l'art. 54, al. 1 et 2, de la Constitution (Cst.)39. La LBT réglant le commerce transfrontalier des biens susceptibles d'être utilisés pour infliger la torture ou la peine capitale, elle relève des affaires étrangères (al. 1) et contribue à promouvoir le respect des droits de l'homme (al. 2).

Section 1

Dispositions générales

Art. 1

Objet

La LBT règle le commerce transfrontalier des biens susceptibles d'être utilisés en vue d'infliger la peine capitale, la torture ou d'autres peines ou traitements cruels, inhumains ou dégradants. Elle s'applique à l'importation, au transit, à l'exportation, au courtage et à la promotion de ces biens ainsi qu'à la fourniture d'une assistance technique en lien avec ces biens. La réglementation qu'elle instaure est conforme à la recommandation du Conseil de l'Europe et au règlement anti-torture de l'UE.

Art. 2

Champ d'application

Le Conseil fédéral détermine les biens qui tombent dans le champ d'application de la LBT, en se fondant sur les annexes II à IV du règlement anti-torture de l'UE. Les biens qui relèvent de la LBT seront énumérés dans les annexes de l'ordonnance d'exécution. Le Conseil fédéral pourra ainsi transposer dans le droit suisse, par voie d'ordonnance, les modifications faites dans les annexes du règlement anti-torture de l'UE.

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39

Une annexe contiendra la liste des biens utilisés à titre primaire pour la torture, qui n'ont aucune autre utilisation pratique que celle d'infliger la peine capitale, la torture ou d'autres peines ou traitements cruels, inhumains ou dégradants.

Biens pouvant servir à la torture: le Conseil adopte un règlement modificatif.

Disponible sous: www.consilium.europa.eu > Actualités et médias > Communiqués de presse > 14 novembre 2016.

RS 101

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Une deuxième annexe recensera la liste des biens utilisés à titre secondaire pour la torture, qui ont d'autres utilisations pratiques que celle d'infliger la peine capitale, la torture ou d'autres peines ou traitements cruels, inhumains ou dégradants.

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Enfin, une troisième annexe englobera la liste des médicaments susceptibles d'être utilisés pour infliger la peine capitale.

Ce système de listes garantit la sécurité juridique pour les acteurs économiques concernés, qui pourront dès lors savoir avec certitude à quels biens s'applique la LBT.

Les biens utilisés dans l'industrie du sexe ne relèvent pas de la LBT, car ils ne sont pas non plus visés par le règlement anti-torture de l'UE.

La procédure de consultation a mis au jour de grandes divergences d'avis en ce qui concerne le contenu des listes de biens. Alors que certains groupes d'intérêts ont demandé que la réglementation suisse aille plus loin que celle de l'UE, d'autres ont préconisé des listes aussi restreintes que possible. D'autres encore ont mis en garde contre des listes moins exhaustives que celles de l'UE. Enfin, il a également été proposé que la LBT interdise l'expérimentation animale et la recherche sur les animaux. La reprise des listes de biens de l'UE permet de combler les divergences entre la législation suisse et celle de l'UE. Ces listes sont exhaustives, mais peuvent faire l'objet d'un réexamen et être adaptées à de nouvelles réalités. Étant donné que les listes de biens de la Suisse se fondent sur celles de l'UE, la LBT ne prévoit aucune procédure formelle de réexamen.

La LBT sera applicable sur le territoire douanier suisse, dans les entrepôts douaniers suisses et dans les enclaves douanières suisses. Son champ d'application géographique correspond donc à celui de la législation sur le contrôle des biens. Il conviendra de préciser à l'échelon de l'ordonnance que les livraisons aux représentations diplomatiques ou consulaires ainsi qu'aux organisations internationales situées sur le territoire douanier suisse constituent des exportations au sens de la LBT. Il n'est par contre pas prévu de soumettre à la LBT les entreprises suisses sises à l'étranger.

Par ailleurs, seules les personnes physiques ou morales ayant leur domicile civil, leur siège ou un établissement sur le territoire de la Suisse ou de la Principauté de Liechtenstein, à Büsingen am Hochrhein ou dans les vallées de Samnaun et Sampuoir seront autorisées à déposer une demande. Contrairement à la législation sur le contrôle des biens, aucune exception n'est prévue pour les touristes, les biens utilisés à titre secondaire pour la torture ou les médicaments susceptibles d'être utilisés pour infliger la peine capitale, tels que définis
ici, ne pouvant raisonnablement pas être considérés comme des souvenirs.

La LBT ne s'appliquera que dans la mesure où la LFMG n'est pas applicable. Les critères d'autorisation prévus par la LFMG permettent de refuser une opération qui devrait être refusée au titre de la LBT.

Art. 3

Définitions

Sont considérés comme des biens utilisés à titre primaire pour la torture les biens qui n'ont aucune autre utilisation pratique que celle d'infliger la peine capitale ou la torture et d'autres peines ou traitements cruels, inhumains ou dégradants. Ces biens cor15 / 28

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respondent à ceux figurant à l'annexe II du règlement anti-torture de l'UE (potences, chaises électriques, panneaux à chaînes et poucettes, p. ex.). L'art. 4, al. 1, prévoit une interdiction de principe du commerce transfrontalier de ces biens. Selon les informations du Conseil de l'Europe, l'éventail de biens entrant dans cette catégorie est relativement restreint, et seul un petit nombre d'entreprises les fabriquent ou en font la publicité au niveau international.

Les biens utilisés à titre secondaire pour la torture désignent les biens qui ont d'autres utilisations pratiques que celle d'infliger la peine capitale, la torture ou d'autres peines ou traitements cruels, inhumains ou dégradants. Ces biens correspondent à ceux figurant à l'annexe III du règlement anti-torture de l'UE, comme les biens conçus pour immobiliser les êtres humains ou les armes et dispositifs destinés aux autorités chargées de l'application de la loi et conçus à des fins de lutte contre les émeutes ou d'autoprotection.

Le courtage au sens de la LBT désigne la création des conditions essentielles pour la conclusion de contrats portant sur la fabrication, l'offre, l'acquisition ou le transfert de biens, le transfert de biens immatériels ou la concession de droits afférents à des biens ou, lorsque les prestations sont fournies par des tiers, la conclusion elle-même de tels contrats.

L'expression «assistance technique» provient du règlement anti-torture de l'UE. Si la recommandation du Conseil de l'Europe ne contient aucune définition, l'exposé des motifs qui l'accompagne fournit quant à lui une définition analogue à celle applicable dans l'UE. L'assistance technique désigne tout soutien technique en lien avec la réparation, le développement, la fabrication, les essais, l'entretien, le montage ou tout autre service technique, et qui peut prendre les formes suivantes: instruction, conseil, formation, transmission de connaissances ou qualifications opérationnelles, ou encore services de conseil. L'assistance technique comprend les formes d'assistance verbale et l'assistance fournie par voie électronique. La fourniture d'informations accessibles au public ne constitue pas une assistance technique.

Section 2

Interdictions et régime de l'autorisation

Art. 4

Biens utilisés à titre primaire pour la torture

L'importation, le transit et l'exportation des biens utilisés à titre primaire pour la torture sont interdits. Il est également interdit de fournir à toute personne, toute entité ou tout organisme établi dans un pays tiers des services de courtage liés à ces biens, quelle que soit la provenance de ces derniers. Il est en outre interdit de fournir ou de proposer à toute personne, toute entité ou tout organisme établi dans un pays tiers des prestations de formation concernant l'utilisation de ces biens. La publicité ou toute autre forme de promotion de ces biens ainsi que la fourniture d'assistance technique en lien avec ces biens sont également interdites. Cette interdiction concerne aussi les activités de publicité des fabricants, des distributeurs ou des agences de marketing ainsi que l'utilisation des moyens de communication de masse comme l'internet, la télévision, la radio ou la presse. La présentation et la proposition à la vente, dans le cadre d'une exposition ou d'un salon professionnel, sont également interdites. Ces interdictions sont conformes au règlement anti-torture de l'UE et à la recommandation du Conseil de l'Europe. Il n'y a pas lieu d'en prévoir d'autres.

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L'importation, le transit et l'exportation de biens utilisés à titre primaire pour la torture sont soumis à autorisation si ces biens sont exclusivement destinés à un musée ouvert au public. Par «musée ouvert au public», on entend les musées accessibles au grand public. Les participants à la procédure de consultation ont émis des avis divergents concernant cette exception. Alors que certains ont demandé de l'étendre, d'autres ont proposé de la rendre encore plus stricte. Le droit communautaire prévoit une telle exception, qui va toutefois plus loin, puisqu'elle couvre la fourniture d'une assistance technique en lien avec l'exposition de ces biens dans des musées ouverts au public.

L'exception prévue par la LBT doit être très restrictive à dessein, afin d'écarter tout risque de contournement de la loi.

Art. 5

Biens utilisés à titre secondaire pour la torture

Tout comme dans le règlement anti-torture de l'UE, le transit de biens utilisés à titre secondaire pour la torture est interdit lorsqu'il y a lieu de penser qu'ils sont destinés à infliger la peine capitale ou la torture (al. 1).

L'exportation et le courtage de biens utilisés à titre secondaire pour la torture sont soumis à autorisation, de même que la fourniture d'une assistance technique liée à ces biens (al. 2). Par souci d'uniformisation, la LBT utilise uniquement le terme «assistance technique», tel que défini à l'art. 3.

L'UE soumet elle aussi ces biens à un régime d'autorisation. Il ressort de l'exposé des motifs de la recommandation du Conseil de l'Europe que l'ONU et des organisations non gouvernementales de défense des droits de l'homme, comme Amnesty International, Omega Research Foundation, Physicians for Human Rights, Stockholm International Peace Research Institute et Institute for Security Studies, ont à plusieurs reprises dénoncé l'utilisation illégale d'équipements et de biens spécialisés dans l'application de la loi pour infliger la torture. En outre, des équipements de maintien de l'ordre, en particulier de contrôle des foules tels que les gaz lacrymogènes, les bombes au poivre ainsi que des armes utilisant des balles en plastique ou en caoutchouc ont été déployés de manière inappropriée lors de manifestations et d'autres réunions publiques. Certains participants à la consultation ont demandé qu'une autorisation en lien avec les biens utilisés à titre secondaire pour la torture soit requise uniquement si une autorisation n'est pas déjà obligatoire en vertu de la LCB, de la LFMG ou de la LArm ou si une activité ne concorde pas déjà avec la LPSP. S'agissant de la coordination, il convient de se référer au commentaire de l'art. 12.

Les art. 11, par. 3, et 15, par. 3, pt a, du règlement anti-torture de l'UE prévoient une exception au régime d'autorisation dans le contexte de la participation de personnel militaire ou civil à une opération de maintien de la paix ou de gestion de crise de l'UE ou de l'ONU, ou à une opération reposant sur des accords conclus entre des États membres et des pays tiers dans le domaine de la défense. La recommandation du Conseil de l'Europe contient également une exception similaire au point 3.2.1. Durant la consultation, plusieurs groupes d'intérêts
ont évoqué l'impact de la LBT sur le travail de la police, notamment en lien avec les affectations transfrontalières et la fourniture d'une assistance technique, et ont demandé de prévoir à cet égard une exception au régime d'autorisation. D'aucuns ont en outre souligné le fait que certains biens utilisés par la police dans le cadre de rapatriements sous escorte policière tomberaient dans le 17 / 28

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champ d'application de la LBT et seraient donc soumis au régime d'autorisation. Il s'agit par exemple des cagoules anticrachats, qui figurent sur la liste de l'annexe III du règlement anti-torture de l'UE (no 1.3). Les groupes d'intérêts concernés renvoient au consid. 26 du règlement anti-torture de l'UE, selon lequel des exemptions spécifiques aux contrôles à l'exportation peuvent être prévues afin de ne pas entraver le bon fonctionnement des services de police.

Dans ce contexte, il y a également lieu d'intégrer de telles exemptions dans la LBT, à condition que les biens utilisés à titre secondaire pour la torture soient impérativement réimportés en Suisse après leur utilisation. La dérogation s'appliquerait aux affectations transfrontalières des forces de police suisses et aux opérations de maintien de la paix ou de gestion de crise à l'étranger menées par du personnel militaire ou civil.

Art. 6

Médicaments

Depuis 2019, la LPTh règle l'exportation et le commerce à l'étranger à partir de la Suisse de médicaments pouvant être destinés à l'exécution d'êtres humains (art. 21, al. 1, let. c, et al. 1bis, LPTh). En vertu de l'OAMéd, l'exportation et le commerce à l'étranger de certains médicaments requièrent dans tous les cas une autorisation de Swissmedic. Les médicaments pouvant être destinés à l'exécution d'êtres humains sont intégrés dans la LBT afin que tous les biens soumis à autorisation qui peuvent être utilisés en vue d'infliger la torture ou la peine capitale soient couverts par la même loi. L'obligation d'obtenir une autorisation, actuellement limitée aux exportations, est élargie pour inclure la fourniture d'une assistance technique et le courtage, comme c'est déjà le cas dans l'UE (al. 2). Les autorisations sont délivrées au cas par cas, selon la pratique actuelle au titre de la LPTh. Contrairement à la réglementation anti-torture de l'UE, la LBT ne prévoit pas d'autorisation générale d'exportation.

Le transit de médicaments susceptibles d'être utilisés pour infliger la peine capitale est interdit s'il y a lieu de penser qu'ils seront utilisés à cette fin (al. 1).

Les produits chimiques pharmaceutiques utilisés pour infliger la peine capitale sont également des médicaments vitaux. L'obligation d'obtenir une autorisation permet donc de garantir que les médicaments figurant sur la liste ne soient pas transmis en vue d'infliger la peine capitale, sans empêcher leur commerce légal à des fins médicales ou vétérinaires. La liste déjà publiée par Swissmedic contenant les médicaments dont l'exportation est soumise à autorisation est intégrée dans l'ordonnance d'exécution en tant qu'annexe. Elle contient uniquement les médicaments pouvant être utilisés pour infliger la peine capitale et pour lesquels l'industrie pharmaceutique n'a pas mis en place un système de contrôle propre à empêcher une telle utilisation.

Section 3

Refus et révocation de l'autorisation

Art. 7

Refus de l'autorisation

Une autorisation est refusée s'il y a lieu de penser que les biens concernés serviront à infliger la peine capitale, la torture ou d'autres peines ou traitements cruels, inhumains ou dégradants (al. 1), ou que les biens exportés ne resteront pas chez le destinataire final déclaré (al. 2, let. a). L'expression «avoir lieu de penser» est moins forte que «savoir» mais plus forte que «ne pouvoir exclure»; cette expression est par conséquent 18 / 28

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en corrélation avec une probabilité de réalisation d'un résultat qui n'est certes pas nécessairement garantie, mais qui doit tout de même être supérieure à la moyenne. Il s'agit de la règle du degré de vraisemblance prépondérante: l'autorité peut retenir l'exposé des faits dont la réalisation est la plus probable parmi toutes les possibilités40.

Dans le cas où l'accord de l'État d'origine est nécessaire à la réexportation, l'autorisation est refusée si ce dernier s'y oppose (al. 2, let. b). L'autorisation est en outre refusée si l'État de destination interdit l'importation (al. 2, let. c). De plus, par analogie avec l'art. 6, al. 1, let. c, LCB, aucune mesure de coercition fondée sur la loi du 22 mars 2002 sur les embargos (LEmb)41 ne doit avoir été édictée (al. 2, let. d).

Dans le cadre de la procédure de consultation, plusieurs groupes d'intérêts ont proposé que l'autorité compétente évalue les demandes d'autorisation en se fondant sur les rapports des instances internationales compétentes dans le domaine de la torture ainsi que sur ceux de la Commission nationale de prévention de la torture, du Département fédéral des affaires étrangères et de la société civile. Il est prévu que le Conseil fédéral règle la procédure d'autorisation dans l'ordonnance d'exécution. Des participants à la consultation ont en outre demandé que les conditions d'autorisation soient complétés par une disposition selon laquelle l'autorisation doit être refusée si un autre État membre du Conseil de l'Europe a déjà rejeté une demande identique en substance au cours des trois dernières années (obligation de «no-undercut»). La recommandation du Conseil de l'Europe ne prévoit pas une telle obligation. Elle préconise uniquement un échange d'informations volontaire entre les États membres concernant les décisions d'octroi d'autorisations et les exportations. Il n'est donc pas indiqué que la Suisse introduise unilatéralement une obligation de «no-undercut».

Art. 8

Révocation de l'autorisation

L'autorisation doit être révoquée si les conditions d'autorisation ne sont plus remplies (al. 1).

L'autorisation peut être assortie de charges. Elle continue d'avoir force juridique même en cas de non-respect de ces charges. La LBT doit par conséquent préciser que l'autorisation peut être révoquée si les charges dont elle est assortie ne sont pas observées (al. 2).

Section 4

Dispositions pénales

Art. 9

Infractions

Est puni d'une peine privative de liberté de trois ans au plus ou d'une peine pécuniaire quiconque, intentionnellement, contrevient à l'une des interdictions visées aux art. 4, al. 1, 5, al. 1, ou 6, al. 1 (al. 1, let. a), ou exerce une activité qui requiert une autorisation en vertu des art. 5, al. 2, ou 6, al. 2, sans être titulaire de l'autorisation correspondante (al. 1, let. b). Il en va de même pour toute personne qui, intentionnellement, livre ou fait livrer des biens visés aux art. 4 à 6 à un destinataire final ou à un lieu de destination autre que celui qui figure dans l'autorisation, fait ou fait faire un courtage de 40 41

Arrêt du Tribunal fédéral administratif B-4161/2020 du 11 janvier 2021, consid. 4.5.

RS 946.231

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ces biens pour un destinataire final ou vers un lieu de destination autre que celui qui figure dans l'autorisation (al. 1, let. c), ou fait parvenir des biens visés aux art. 4 à 6 à une personne dont il sait ou doit présumer qu'elle les transmettra, directement ou indirectement, à un destinataire final auquel ils ne doivent pas être livrés (al. 1, let. d).

Est puni d'une peine pécuniaire quiconque, intentionnellement, fournit des indications inexactes alors qu'elles sont essentielles pour l'autorité qui délivre les autorisations (al. 2, let. a), n'observe pas l'une des charges dont est assortie l'autorisation (al. 2, let. b), ou ne déclare pas ou ne déclare pas correctement à la douane les biens visés aux art. 4 à 6 (al. 2, let. c). Une infraction à l'al. 1 ou 2 commise par négligence est punie d'une amende (al. 3).

Art. 10

Infractions dans les entreprises

L'art. 6 de la loi fédérale du 22 mars 1974 sur le droit pénal administratif42 est applicable aux infractions à la LBT commises dans une entreprise, à l'instar de ce que prévoient la législation relative au matériel de guerre et celle relative au contrôle des biens. Cette disposition permet de garantir que les personnes assumant un rôle de garant qui ne veillent pas au respect des prescriptions dans leur entreprise puissent elles aussi être tenues pénalement responsables au même titre que la personne ayant commis l'acte punissable43.

Art. 11

Juridiction

La poursuite et le jugement des infractions relèvent de la juridiction pénale fédérale.

Section 5

Collaboration entre autorités

Art. 12

Coordination

En raison du champ d'application de la LBT, certains éléments de fait sont susceptibles de relever tant de cette nouvelle législation que de lois déjà en vigueur, auquel cas les autorités compétentes doivent pouvoir coordonner les procédures. La LPSP prévoit déjà une disposition similaire (art. 16). Les lois pouvant entrer en ligne de compte sont la LArm, la LPSP et la LCB.

Ces recoupements concernent avant tout les substances irritantes, comme l'ont relevé à juste titre certains participants à la procédure de consultation. La liste de biens du règlement anti-torture de l'UE contient les substances irritantes vanillylamide de l'acide pélargonique (PAVA, no CAS 2444-46-4) et capsicum oléorésine (OC, no CAS 8023-77-6) ainsi que des mélanges contenant au moins 0,3 % en poids de PAVA ou d'OC et un solvant. Ces deux substances irritantes ne sont citées explicitement dans aucune autre liste de contrôle de biens. En vertu de l'ordonnance du 2 juillet 2008 sur les armes (OArm)44 et de l'ordonnance du 25 février 1998 sur le matériel de guerre45, seuls le cyanure de bromobenzyle (CA, no CAS 5798-79-8), l'o-chloro42 43 44 45

RS 313.0 Arrêt du Tribunal fédéral 6B-108/2022 du 27 avril 2022, consid. 2.2.

RS 514.541 RS 514.511

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benzylidène-malononitrile (CS, no CAS 2698-41-1), la chloroacétophénone (CN, no CAS 532-27-4) et la dibenzo-(b,f)-1,4-oxazéphine (CR, no CAS 257-07-8) sont considérés comme substances irritantes. L'annexe 3 de l'OCB, quant à elle, cite les substances irritantes de manière analogue à la liste commune des équipements militaires de l'Union européenne46 (pt ML7.d). Étant donné qu'il s'agit d'une liste indicative non exhaustive, qui se base sur une définition donnée des substances irritantes («agents antiémeutes»), le point ML7.d inclut également le PAVA et l'OC. Il y a par conséquent un recoupement entre la LBT et la LCB pour ces substances irritantes, et il se pourrait qu'une autorisation soit nécessaire en vertu tant de la LBT que de la LCB.

Les équipements nécessaires à la dissémination des substances irritantes énumérées au point ML7.d sont regroupés dans le point ML7.e. Il n'existe toutefois aucun recoupement dans ce domaine, l'annexe III du règlement anti-torture de l'UE (pts 3.1 et 3.6) excluant explicitement les équipements visés par le point ML7.e du champ d'application du règlement. En vertu de la LArm (art. 4, al. 1, let. b), les engins conçus pour porter durablement atteinte à la santé de l'être humain par pulvérisation ou par vaporisation de substances sont considérés comme des armes. Mais cela vaut uniquement pour les substances irritantes visées à l'annexe 2 de l'OArm, lesquelles ne sont pas couvertes par la LBT. Il n'y a donc pas de chevauchement entre la LArm et la LBT à ce niveau. Seuls font exception les engins conçus pour la dissémination de substances irritantes lorsqu'ils peuvent être confondus avec des armes à feu du fait de leur apparence. Ces engins sont alors assimilés à des armes au sens de la LArm (art. 4, al. 1, let. g) et tombent dans le champ d'application de cette loi, de sorte que leur exportation nécessite une autorisation en vertu de la législation sur le contrôle des biens. L'annexe III du règlement anti-torture de l'UE (pt 3.1) comprend les armes portatives qui projettent des agents chimiques incapacitants ou irritants, ce qui inclut les engins conçus pour diffuser des substances irritantes.

Les appareils produisant des électrochocs sont également considérés comme des armes selon la LArm (art. 4, al. 1, let. e). L'aliénation, l'acquisition, le courtage pour des
destinataires en Suisse et l'introduction sur le territoire suisse de tels appareils sont interdits en vertu de l'art. 5, al. 2, let. c, LArm. L'exportation de ces appareils est réglée par l'OCB et est soumise à autorisation. S'agissant des appareils produisant des électrochocs et des engins conçus pour la dissémination de substances irritantes, il existe par conséquent des recoupements entre la LBT, d'une part, et la LArm en relation avec l'OCB, d'autre part, ce qui nécessite une coordination formelle et matérielle.

Des recoupements peuvent également survenir concernant les services considérés à la fois comme une assistance technique par la LBT et comme des prestations de sécurité privées au sens de la LPSP. À titre d'exemple, la formation portant sur certains biens pourrait être couverte par les deux lois et entrer ainsi dans le champ d'application tant de la LBT que de la LPSP. C'est pourquoi il est proposé de mentionner la LBT dans la disposition de la LPSP concernant la coordination (cf. commentaire de l'art. 17).

En raison des recoupements précités et outre la coordination prévue à l'art. 12, il est proposé d'adapter la LCB et de préciser que celle-ci ne s'applique que dans la mesure où la LBT n'est pas applicable (cf. commentaire de l'art. 17).

46

Liste commune des équipements militaires de l'Union européenne, JO C 72 du 28.2.2023, p. 2.

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Aucun chevauchement n'a encore été identifié entre le champ d'application de la LBT et celui de la LFMG. Il est toutefois prévu que la LBT soit subsidiaire à la LFMG (cf. art. 2, al. 3).

Compte tenu des recoupements potentiels avec d'autres textes législatifs, le règlement anti-torture de l'UE contient également, à l'art. 11, par. 1, une règle de conflit qui exclut de l'annexe III les biens régis par le règlement (UE) no 258/201247 sur les armes à feu, le règlement (UE) no 2021/82148 sur les biens à double usage, qui est la nouvelle version du règlement (CE) no 428/200949, ou la position commune 2008/944/ PESC50.

Art. 13

Entraide administrative entre autorités suisses

L'article prévoit que les autorités compétentes de la Confédération et des cantons se communiquent et communiquent aux autorités de surveillance compétentes les données nécessaires à l'exécution de la LBT.

Cette communication doit se faire dans le respect des exigences légales de la Confédération et des cantons en matière de protection des données. Des participants à la procédure de consultation ont signalé des imprécisions concernant la protection des données. Il était prévu à l'origine que les autorités pénales communiquent sans délai les décisions qu'elles ont rendues qui tombent dans le champ d'application de la LFMG, de la LArm, de la LExpl, de la loi fédérale du 25 juin 1982 sur les mesures économiques extérieures51 et de la LCB. Toutefois, étant donné que la communication des décisions rendues est avant tout pertinente sous l'angle des législations relatives au contrôle des biens et au matériel de guerre, en lien avec l'octroi de licences générales d'exportation et d'autorisations initiales, une telle disposition ne sera finalement pas inscrite dans la LBT. La LPSP, la LCB et la LFMG seront cependant complétées par une disposition mentionnant également les décisions rendues sur la base de la LBT (cf. commentaire de l'art. 17).

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51

Règlement (UE) no 258/2012 du Parlement européen et du Conseil du 14 mars 2012 portant application de l'article 10 du protocole des Nations unies contre la fabrication et le trafic illicites d'armes à feu, de leurs pièces, éléments et munitions, additionnel à la convention des Nations unies contre la criminalité transnationale organisée (protocole relatif aux armes à feu) et instaurant des autorisations d'exportation, ainsi que des mesures concernant l'importation et le transit d'armes à feu, de leurs pièces, éléments et munitions, JO L 94 du 30.3.2012, p. 1.

Règlement (UE) 2021/821 du Parlement européen et du Conseil du 20 mai 2021 instituant un régime de l'Union de contrôle des exportations, du courtage, de l'assistance technique, du transit et des transferts en ce qui concerne les biens à double usage (refonte), JO L 206 du 11.6.2021, p. 1.

Règlement (CE) no 428/2009 du Conseil du 5 mai 2009 instituant un régime communautaire de contrôle des exportations, des transferts, du courtage et du transit de biens à double usage (refonte), JO L 134 du 29.5.2009, p. 1.

Position commune 2008/944/PESC du Conseil du 8 décembre 2008 définissant des règles communes régissant le contrôle des exportations de technologie et d'équipements militaires, JO L 335 du 13.12.2008, p. 99.

RS 946.201

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Art. 14

Entraide administrative entre autorités suisses et étrangères

L'autorité qui délivre les autorisations doit pouvoir collaborer et échanger des données avec les autorités compétentes d'autres États. Une telle collaboration a déjà fait ses preuves, notamment en lien avec la législation sur le contrôle des biens. La Suisse ne pourra toutefois obtenir des données des autorités étrangères que si elle est également en mesure de leur en fournir. Cette disposition met donc notamment en oeuvre l'échange d'informations entre les États membres prévu par la recommandation du Conseil de l'Europe au sujet des autorisations accordées et des exportations réalisées.

L'échange d'informations doit être limité à l'exécution de la LBT (en Suisse) et des prescriptions étrangères comparables. Les autorités étrangères doivent être liées par un devoir de discrétion et garantir une protection contre l'espionnage économique (al. 1, let. b).

L'autorité qui délivre les autorisations est habilitée à fournir à l'étranger des données sur la nature, la quantité, le lieu de destination et d'utilisation, l'usage et les destinataires finaux des biens, les personnes qui participent à la fabrication, à la livraison ou au courtage des biens, et les modalités financières de l'opération concernée (al. 2).

Section 6

Dispositions finales

Art. 15

Exécution

Le Conseil fédéral règle par voie d'ordonnance les dispositions d'exécution, la procédure d'autorisation et l'exécution à la frontière, et désigne l'autorité qui délivre les autorisations et l'autorité chargée du contrôle. Il pourrait s'agir d'unités administratives du DEFR ou du Département fédéral de justice et police, ou de Swissmedic. Il n'est pas prévu de créer une nouvelle autorité qui délivre les autorisations ni une nouvelle autorité chargée du contrôle (cf. ch. 6.1 concernant les conséquences du projet pour la Confédération). Le rôle d'autres offices concernés par le projet devra aussi être réglé par voie d'ordonnance, de même que la durée de validité des autorisations.

Art. 16

Rapport

Tout comme pour la LCB et la LEmb, le Conseil fédéral devra, chaque année, informer l'Assemblée fédérale de l'application de la LBT dans son rapport sur la politique économique extérieure. Cette obligation de rendre compte sert la transparence des travaux du Conseil fédéral.

Art. 17

Modification d'autres actes

Loi fédérale sur le matériel de guerre L'art. 41 LFMG est complété par un deuxième alinéa, qui prévoit que les autorités pénales transmettent d'office à l'autorité qui délivre les autorisations les décisions qu'elles ont rendues qui tombent dans le champ d'application de la LFMG, de la LArm, de la LPSP, de la LExpl, de la loi fédérale sur les mesures économiques extérieures, de la LCB et de la LBT. L'al. 1 est quant à lui simplifié d'un point de vue linguistique.

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En vertu de l'art. 9, al. 1, LFMG, doit être titulaire d'une autorisation initiale toute personne (physique ou morale) qui a l'intention, sur le territoire suisse, de fabriquer du matériel de guerre, de faire le commerce de matériel de guerre ou d'en faire le courtage, à titre professionnel, pour des destinataires à l'étranger. Cette autorisation initiale est accordée aux personnes physiques ou morales qui offrent les garanties nécessaires d'une gestion régulière de leurs affaires et dont l'activité prévue n'est pas contraire aux intérêts du pays (art. 10, al. 1, LFMG). Afin de pouvoir évaluer si une personne physique ou morale offre ces garanties nécessaires, le SECO, en tant qu'autorité compétente en matière d'autorisation, doit savoir si cette personne a été condamnée pour infraction à la LFMG, à la LArm, à la LPSP, à la LExpl, à la LCB ou à la LBT.

Loi sur les produits thérapeutiques L'art. 21, al. 1, let. c, et al. 1bis, LPTh est abrogé. Le régime de l'autorisation prévu par la LPTh pour l'exportation de médicaments pouvant être utilisés en vue d'infliger la peine capitale est intégré dans la LBT (cf. commentaire de l'art. 6). Toutes les dispositions relatives aux biens visés par le règlement anti-torture de l'UE sont ainsi regroupées dans une seule loi.

Loi fédérale sur les prestations de sécurité privées fournies à l'étranger La disposition relative à la coordination (art. 16 LPSP) est adaptée pour inclure la LBT. Les prestations considérées comme étant une assistance technique au sens de la LBT peuvent également être des prestations de sécurité privées au sens de la LPSP.

Un élément de fait peut ainsi tomber dans le champ d'application à la fois de la LBT et de la LPSP. Étant donné que l'évaluation matérielle se base sur des critères différents dans ces deux lois, il est probable que ce recoupement engendre des problèmes de cohérence lors de l'application des bases légales. Il convient par conséquent de prévoir dans la LPSP que les éléments de fait couverts à la fois par la LPSP et la LBT puissent être coordonnés sur le plan matériel, comme c'est le cas aujourd'hui en lien avec la LCB, la LFMG et la LEmb. Le Conseil fédéral prévoit en outre d'adapter en conséquence l'art. 8a de l'ordonnance du 24 juin 2015 sur les prestations de sécurité privées fournies à l'étranger52, qui règle
l'obligation de déclarer en rapport avec la LFMG et la LCB.

L'art. 28 LPSP est par ailleurs complété par un nouvel alinéa (al. 3): afin que l'autorité qui délivre les autorisations puisse disposer de tous les éléments pertinents pour statuer sur une demande ou une déclaration, il est important que les autorités pénales l'informent sans délai des décisions qu'elles ont rendues qui tombent dans le champ d'application de la LCB, de la LFMG, de la LBT, de la LArm, de la LExpl et de la loi fédérale sur les mesures économiques extérieures.

Loi fédérale sur les mesures économiques extérieures Étant donné que la LBT prévoit un rapport annuel sur l'application de la loi, l'art. 10 de la loi fédérale sur les mesures économiques extérieures doit être adapté pour inclure

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RS 935.411

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la LBT dans la liste des lois faisant l'objet d'un rapport annuel joint aux rapports sur la politique économique extérieure.

Loi sur le contrôle des biens Les dispositions de la LBT priment celles de la LCB. La LBT est donc également mentionnée à l'art. 2 LCB. Les critères de refus de la législation relative au contrôle des biens ne sont ainsi pas applicables aux biens utilisés pour la torture, auxquels ils ne sont de toute façon pas adaptés. Les critères de refus prévus par la LBT s'appliquent à la place.

Par ailleurs, deux modifications de la LCB ne concernent que le texte français: ­

la première vise à préciser la définition du terme «courtage» (art. 3, let. e);

­

la seconde vise à apporter une correction grammaticale et à clarifier la formulation (art. 14, al. 1, let. e).

Le SECO est habilité à délivrer des licences générales d'exportation ordinaires ou extraordinaires. Afin qu'il puisse examiner si les conditions de délivrance d'une licence générale d'exportation sont remplies, il est important que les autorités pénales lui transmettent sans délai et d'office les décisions qu'elles ont rendues qui tombent dans le champ d'application de la LCB, de la LFMG, de la LArm, de la loi du 21 mars 2003 sur l'énergie nucléaire53, de la LPSP, de la LExpl, de la loi fédérale sur les mesures économiques extérieures et de la LBT. L'art. 19 LCB est ainsi complété par un al. 2. L'al. 1 est quant à lui simplifié d'un point de vue linguistique.

6

Conséquences

6.1

Conséquences pour la Confédération

La loi ne nécessite pas la création d'une nouvelle autorité et peut être mise en oeuvre dans le cadre des structures existantes, sans création de postes supplémentaires.

Une comparaison avec l'UE peut aider à évaluer le nombre de demandes d'autorisation à escompter. Il ressort du rapport de la Commission au Parlement européen54 sur les médicaments et biens susceptibles d'être utilisés en vue d'infliger la torture que l'UE a délivré 295 autorisations en 2017, 231 en 2018, 285 en 2019, 247 en 2020 et 275 en 2021. Depuis l'entrée en vigueur de l'art. 21 LPTh, Swissmedic n'a plus accordé qu'un petit nombre d'autorisations par an: 8 en 2019, 13 en 2020, 3 en 2021 et 6 en 2022. L'entrée en vigueur de la LBT devrait par conséquent donner lieu à un nombre raisonnable de demandes.

La poursuite des infractions à la nouvelle législation relèvera de la juridiction fédérale.

Même s'il n'est actuellement pas possible d'estimer le nombre de cas concernés, cette 53 54

RS 732.1 Rapport de la Commission au Parlement européen et au Conseil du 31 octobre 2022 sur les autorisations d'exportation accordées en 2021 conformément au règlement concernant le commerce de certains biens susceptibles d'être utilisés en vue d'infliger la peine capitale, la torture ou d'autres peines ou traitements cruels, inhumains ou dégradants.

Disponible sous: eur-lex.europa.eu > Search > COM(2022) 567 final.

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extension de la juridiction fédérale implique une nouvelle tâche pour les autorités de poursuite pénale de la Confédération. S'il devait apparaître par la suite que cette nouvelle tâche engendre une nette hausse des besoins en ressources pour les autorités pénales de la Confédération, il conviendrait de demander en temps utile des moyens supplémentaires au Parlement.

6.2

Conséquences pour les cantons et les communes, ainsi que pour les centres urbains, les agglomérations et les régions de montagne

Il n'y a pas lieu de s'attendre à des conséquences pour les cantons et les communes ni pour les centres urbains, les agglomérations et les régions de montagne.

6.3

Conséquences économiques

Les conséquences économiques sont considérées comme modérées, étant donné que la loi ne concernerait qu'un petit nombre d'entreprises. L'importance économique de l'exportation de biens conçus pour la torture, notamment, peut être estimée comme faible.

Il ressort de l'étude de faisabilité du Conseil de l'Europe menée en 2019 que seul un petit nombre d'entreprises basées dans des États membres du Conseil de l'Europe participent à la fabrication, à la promotion ou au commerce de biens pouvant être utilisés pour la torture. L'étude a identifié une entreprise suisse faisant la promotion d'appareils à décharge électrique portés sur le corps. Par ailleurs, entre 2014 et 2018, des entreprises dans au moins 27 États membres du Conseil de l'Europe, dont en Suisse, ont fabriqué ou promu du matériel de lutte contre les émeutes destiné aux autorités chargées de l'application de la loi.

6.4

Conséquences sanitaires et sociales

L'interdiction du commerce des biens conçus pour infliger la torture ou la peine capitale et la restriction du commerce des biens pouvant être utilisés à de telles fins contribuent à promouvoir le respect des droits de l'homme à l'échelle mondiale.

6.5

Conséquences environnementales

Le projet n'a pas d'incidence sur l'environnement.

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Aspects juridiques

7.1

Constitutionnalité

Le projet de loi se fonde sur l'art. 54, al. 1 et 2, Cst., qui dispose que les affaires étrangères relèvent de la compétence de la Confédération, laquelle doit notamment s'attacher à promouvoir le respect des droits de l'homme, et sur la compétence de la Confédération en matière de législation pénale. L'adoption d'une loi sur les biens utilisés pour la torture est du ressort de la Confédération et répond à l'objectif de politique extérieure précité en réglant le commerce transfrontalier des biens pouvant être utilisés pour violer les droits de l'homme.

7.2

Compatibilité avec les obligations internationales de la Suisse

Le projet vise à mettre entièrement en oeuvre la recommandation du Conseil de l'Europe, ce qui permettra de renforcer l'engagement de la Suisse contre la peine capitale et la torture.

L'introduction d'un nouveau contrôle à l'exportation de biens est en conflit avec le droit de l'Organisation mondiale du commerce (OMC), notamment avec différentes dispositions de l'Accord général du 30 octobre 1947 sur les tarifs douaniers et le commerce (GATT)55, entre autres les principes de la nation la plus favorisée (art. I) et de l'élimination générale des restrictions quantitatives (art. XI). Le droit de l'OMC connaît toutefois une exception pour les mesures nécessaires à la protection de la santé et de la vie des personnes (art. XX[b] GATT).

L'Accord du 22 juillet 1972 entre la Confédération suisse et la Communauté économique européenne56 prévoit de son côté des exceptions pour les biens relevant des chap. 25 à 97 du Système harmonisé de désignation et de codification des marchandises (art. 2). Les biens concernés par la nouvelle législation relèvent de ces chapitres.

L'accord interdit toute nouvelle restriction quantitative à l'importation et à l'exportation (art. 13 et 13bis). Il admet toutefois des interdictions ou restrictions d'importation, d'exportation ou de transit justifiées par des raisons de protection de la santé et de la vie des personnes (art. 20).

La Convention du 4 janvier 1960 instituant l'Association Européenne de libreéchange (AELE)57 prévoit elle aussi une telle disposition (art. 13).

Le projet n'est par conséquent pas contraire aux obligations internationales de la Suisse.

55 56 57

RS 0.632.21 RS 0.632.401 RS 0.632.31

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7.3

Forme de l'acte à adopter

En vertu de l'art. 164, al. 1, Cst., toutes les dispositions importantes qui fixent des règles de droit, notamment celles qui touchent des droits constitutionnels, doivent être édictées sous la forme d'une loi fédérale. Le projet prévoit des restrictions de la liberté économique ainsi que des dispositions pénales.

7.4

Frein aux dépenses

Le projet n'engendre pas de dépenses qui sont soumises au frein aux dépenses (art. 159, al. 3, let. b, Cst.).

7.5

Conformité aux principes de subsidiarité et d'équivalence fiscale

Les principes de subsidiarité et d'équivalence fiscale ne sont pas affectés.

7.6

Conformité à la loi sur les subventions

Le projet ne prévoit aucune aide financière ni subvention.

7.7

Délégation de compétences législatives

Le projet autorise le Conseil fédéral à compléter la loi par une ordonnance sur le commerce des biens utilisés pour la torture afin de régler en détail la procédure d'autorisation et de contrôle et de désigner les autorités compétentes.

7.8

Protection des données

Conformément à l'art. 57h de la loi du 21 mars 1997 sur l'organisation du gouvernement et de l'administration58, l'autorité compétente peut utiliser un système de traitement des données automatisé à des fins de gestion des dossiers. Dans le cas de la LBT, il s'agit d'un système d'autorisation électronique utilisé pour l'enregistrement et le traitement des demandes déposées conformément à la nouvelle loi. Seuls les collaborateurs de l'autorité concernée ont accès à des données personnelles, et uniquement dans la mesure où ces données sont absolument nécessaires à l'accomplissement de leurs tâches (cf. commentaire de l'art. 12). Les données pouvant être transmises aux autorités étrangères sont décrites à l'art. 14, al. 2.

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RS 172.010

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