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24.030 Message relatif à l'approbation de l'accord entre la Suisse et le Royaume-Uni en matière de reconnaissance des qualifications professionnelles et à sa mise en oeuvre (modification de la loi sur les avocats) ainsi qu'à la délégation au Conseil fédéral de la compétence de conclure des traités internationaux en matière de reconnaissance des qualifications professionnelles dans le champ d'application de la loi sur les professions médicales, de la loi fédérale sur les professions de la santé, de la loi sur les avocats et de la loi sur les professions de la psychologie du 14 février 2024

Monsieur le Président, Madame la Présidente, Mesdames, Messieurs, Par le présent message, nous vous soumettons: ­

le projet d'un arrêté fédéral portant approbation de l'Accord entre la Confédération suisse et le Royaume-Uni de Grande-Bretagne et d'Irlande du Nord en matière de reconnaissance des qualifications professionnelles et mise en oeuvre de cet accord1 (modification de la loi sur les avocats),

­

le projet d'une loi portant sur la délégation au Conseil fédéral de la compétence de conclure des traités internationaux en matière de reconnaissance des qualifications professionnelles dans le champ d'application de la loi sur les professions médicales, de la loi fédérale sur les professions de la santé, de la loi sur les avocats et de la loi sur les professions de la psychologie2,

en vous proposant de les adopter.

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Nous vous prions d'agréer, Monsieur le Président, Madame la Présidente, Mesdames, Messieurs, l'assurance de notre haute considération.

14 février 2024

Au nom du Conseil fédéral suisse: La présidente de la Confédération, Viola Amherd Le chancelier de la Confédération, Viktor Rossi

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Condensé Suite au BREXIT, la Suisse et le Royaume-Uni ont redéfini les règles de reconnaissance des qualifications professionnelles qui les lient. Le projet d'accord prévoit un système de reconnaissance future qui fera suite à l'Accord sur les droits acquis des citoyens. Il s'accompagne d'une nouvelle norme de délégation en faveur du Conseil fédéral pour conclure des traités internationaux en matière de reconnaissance des qualifications professionnelles.

Pendant plus de vingt ans, la Suisse et le Royaume-Uni ont reconnu mutuellement leurs qualifications professionnelles en application de l'accord du 21 juin 1999 sur la libre circulation des personnes (ALCP). À la suite de la décision du Royaume-Uni de quitter l'UE (Brexit), les deux pays se sont entendus pour atténuer les conséquences de cette sortie; l'accord du 25 février 2019 sur les droits acquis des citoyens (CRA) maintenait ainsi le régime de l'ALCP applicable pendant une phase transitoire de quatre ans à compter de l'entrée en vigueur effective du Brexit, soit le 1 er janvier 2021. La Suisse et le Royaume-Uni marquaient par là leur volonté de garder une relation privilégiée en matière de reconnaissance des qualifications professionnelles.

Les parties ont souhaité conserver cette relation au-delà de la période transitoire.

Elles ont dès lors négocié un accord destiné à garantir de manière permanente la reconnaissance de leurs qualifications professionnelles. Le fruit de ces négociations a fait l'objet d'une consultation externe dont les résultats ont été entièrement positifs.

L'Accord entre la Confédération suisse et le Royaume-Uni de Grande-Bretagne et d'Irlande du Nord en matière de reconnaissance des qualifications professionnelles («l'accord») vise à permettre aux professionnels de chacune des parties d'accéder aux professions réglementées dans l'autre partie. Il contient un système général de reconnaissance qui s'inspire fortement du système en vigueur lorsque le RoyaumeUni était membre de l'UE, en ce sens qu'il couvre toutes les professions réglementées et qu'il permet aux régulateurs ou aux autorités compétentes de faire un examen des qualifications professionnelles pour vérifier que les exigences nationales soient remplies. Les citoyens obtiennent une garantie assez large de reconnaissance, mais l'autorité compétente conserve la
possibilité de demander des mesures de compensation (examen ou période d'adaptation) si elle identifie des différences substantielles dans la formation. L'accord permet également aux autorités compétentes de définir des régimes préférentiels pour une profession spécifique, en concluant des arrangements de reconnaissance mutuelle ou en créant des annexes à l'accord. Le projet contient une telle annexe portant sur la profession d'avocat, qui pérennise largement le système actuel du CRA.

La Suisse est le seul pays à avoir conclu un accord global avec le Royaume-Uni en matière de reconnaissance des qualifications professionnelles. Cet accord garantit une reconnaissance des qualifications professionnelles dans tous les cas où un professionnel peut être admis sur le marché du travail de l'autre partie, par exemple en cas d'établissement lorsque la législation nationale le permet, en cas de prestation de services en vertu de l'accord temporaire du 14 décembre 2020 sur la mobilité des

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fournisseurs de services (ou d'un futur accord de libre-échange) ou dans le cas de tout autre accord que les parties concluraient à l'avenir.

Le projet comporte un deuxième volet consistant en la modification de la loi du 23 juin 2006 sur les professions médicales, de la loi fédérale du 30 septembre 2016 sur les professions de la santé, de la loi du 23 juin 2000 sur les avocats et de la loi du 18 mars 2011 sur les professions de la psychologie, dont l'objectif est de permettre au Conseil fédéral de conclure des traités internationaux en matière de reconnaissance des qualifications professionnelles.

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Message 1

Contexte

1.1

Nécessité d'agir et objectifs visés

L'encouragement de la reconnaissance internationale des qualifications professionnelles suisses a été fixé comme l'un des objectifs de la stratégie internationale du Conseil fédéral dans le domaine de la formation, de la recherche et de l'innovation3.

Les particuliers dépendent en effet de la reconnaissance de leurs qualifications professionnelles pour accéder au marché du travail dans d'autres pays et les entreprises dépendent de la reconnaissance des qualifications professionnelles de leurs employés.

Les employeurs et institutions basés en Suisse ont aussi besoin de pouvoir vérifier que les formations professionnelles étrangères sont équivalentes à celles qui sont délivrées en Suisse.

La reconnaissance des qualifications professionnelles étrangères a gagné en importance dans le contexte international de l'intégration économique transfrontalière et de la mobilité des travailleurs, contexte marqué par ailleurs par une pénurie de maind'oeuvre croissante. La conclusion d'un accord avec l'Allemagne en 20214, puis avec le Québec en 20225, en est le témoin.

La reconnaissance des qualifications professionnelles pour les professions réglementées dans le pays d'accueil est impérative pour accéder au marché du travail. En effet, les professionnels dont l'activité est légalement liée à la possession de qualifications professionnelles déterminées ne peuvent exercer sans cette reconnaissance.

Il va de soi que la conclusion d'un accord avec le Royaume-Uni revêt une signification particulière. Liés pendant plus de vingt ans par l'accord du 21 juin 1999 sur la libre circulation des personnes (ALCP)6, puis par l'accord du 25 février 2019 sur les droits acquis des citoyens (CRA)7 jusqu'à fin 2024, la Suisse et le Royaume-Uni doivent désormais définir leur relation future en matière de reconnaissance des qualifications 3

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5

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Stratégie internationale de la Suisse dans le domaine de la formation, de la recherche et de l'innovation de 2018, disponible à l'adresse suivante: www.sefri.admin.ch > Publications et services > Publications > Base de données des publications > Thèmes > Relations internationales > document «Stratégie internationale de la Suisse dans le domaine de la formation, de la recherche et de l'innovation».

Accord du 10 février 2021 entre le Conseil fédéral suisse et le Gouvernement de la République fédérale d'Allemagne concernant la constatation mutuelle de l'équivalence des diplômes professionnels, RS 0.412.113.6.

Entente du 14 juin 2022 entre le Conseil fédéral suisse et le Gouvernement du Québec en matière de reconnaissance mutuelle des qualifications professionnelles, RS 0.412.123.209.1.

Accord du 21 juin 1999 entre la Confédération suisse, d'une part, et la Communauté européenne et ses États membres, d'autre part, sur la libre circulation des personnes, RS 0.142.112.681.

Accord du 25 février 2019 entre la Confédération suisse et le Royaume-Uni de Grande-Bretagne et d'Irlande du Nord relatif aux droits des citoyens à la suite du retrait du Royaume-Uni de l'Union européenne et de la fin de l'applicabilité de l'accord sur la libre circulation des personnes, RS 0.142.113.672.

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professionnelles. Si aucun accord bilatéral n'était conclu avec le Royaume-Uni, la possibilité d'exercer une profession réglementée dans l'autre partie dépendrait du droit national à partir du 1er janvier 2025. Il faudrait dès lors s'attendre à de grosses difficultés au Royaume-Uni. En effet, chaque régulateur (autorité qui réglemente une profession) connaît ses propres règles, qui peuvent varier au surplus entre l'Angleterre, l'Écosse, le Pays de Galles et l'Irlande du Nord. En outre, aucune garantie de droit international ne protégerait les professionnels suisses. Dans le domaine de la formation professionnelle et des hautes écoles, les professionnels du Royaume-Uni en Suisse conserveraient quant à eux des règles plutôt favorables, étant donné les dispositions pertinentes de la loi fédérale du 13 décembre 2002 sur la formation professionnelle (LFPr)8 et de la loi du 30 septembre 2011 sur l'encouragement et la coordination des hautes écoles (LEHE)9. La nécessité d'un accord est donc particulièrement marquée pour maintenir les droits des professionnels suisses au Royaume-Uni, et aussi pour éviter un recul considérable des possibilités de reconnaissance.

Le niveau atteint par la partie générale de l'accord correspond à celui de l'accord de libre-échange conclu en 2021 entre le Royaume-Uni, d'une part, et la Norvège, l'Islande et le Liechtenstein, d'autre part10. L'annexe relative aux avocats donne quant à elle un avantage comparatif inégalé à ce jour, puisque les avocats suisses seront les seuls à pouvoir pratiquer la représentation en justice au Royaume-Uni en utilisant le titre d'avocat correspondant, moyennant une période d'adaptation, alors que les avocats des autres pays ne peuvent pratiquer que le droit international et leur propre droit national.

1.2

Déroulement et résultat des négociations

La Suisse et le Royaume-Uni ont envisagé dès 2017 d'adopter un régime destiné à régler la reconnaissance des qualifications professionnelles après le Brexit. La conclusion du CRA en février 2019 a toutefois relativisé le besoin de conclure rapidement un accord, vu la possibilité de bénéficier du régime de l'ALCP jusqu'à fin 2024 (période de transition de quatre ans à compter de la sortie effective de l'UE).

Les premières discussions relatives à un régime permanent de reconnaissance des qualifications professionnelles ont formellement débuté dans le cadre de la négociation de l'accord temporaire du 14 décembre 2020 sur la mobilité des fournisseurs de services (AMFS)11. Vu la nécessité de conclure l'AMFS rapidement et le régime de reconnaissance transitoire en place jusqu'au 31 décembre 2024, les parties se sont entendues pour poursuivre les négociations relatives aux qualifications professionnelles dans le cadre d'un groupe de travail (art. 16 AMFS).

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RS 412.10 RS 414.20 www.efta.int > Global Trade Relations > All Partners > United Kingdom Accord temporaire du 14 décembre 2020 entre la Confédération suisse et le Royaume-Uni de Grande-Bretagne et d'Irlande du Nord sur la mobilité des fournisseurs de services, RS 0.946.293.671.2.

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Les négociations se sont terminées en avril 2023 et l'accord a pu être signé le 14 juin 2023.

1.3

Relation avec la stratégie du Conseil fédéral (stratégie «Mind the Gap»)

Dans le cadre de sa stratégie «Mind the Gap», le Conseil fédéral a estimé qu'il était très important de conserver un régime de reconnaissance mutuelle des qualifications professionnelles (décision du 19 octobre 2016). La stratégie «Mind the Gap» vise à établir un régime de succession garantissant la continuité juridique ainsi que le maintien des droits et des obligations réciproques au-delà du Brexit. L'objectif politique prioritaire est donc la sécurité juridique et la consolidation des relations avec le Royaume-Uni.

Au-delà de la continuité juridique, la stratégie «Mind the Gap» prévoit la possibilité d'un élargissement et d'un approfondissement des relations avec le Royaume-Uni pour autant que les deux pays le souhaitent et que le projet soit réalisable.

L'accord proposé répond aux objectifs fixés puisqu'il maintient un système de reconnaissance applicable à l'ensemble des professions réglementées en s'inspirant du système général de reconnaissance en vigueur sous l'ALCP, puis sous le CRA. S'agissant de l'approfondissement des relations avec le Royaume-Uni, l'accord permet de définir des régimes préférentiels pour certaines professions par le biais d'arrangements de reconnaissance mutuelle (ARM) ou d'annexes à l'accord, qui permettraient de se rapprocher encore plus du statu quo ante. Le Royaume-Uni ne prévoit de tels ARM avec aucun autre pays à ce jour. L'accord est également unique en ce sens que la Suisse deviendrait le seul pays à disposer d'un accord autonome relatif à la reconnaissance des qualifications professionnelles avec le Royaume-Uni en dehors d'un accord de libre-échange.

2

Procédure préliminaire, consultation comprise

L'accord entre la Suisse et le Royaume-Uni en matière de reconnaissance des qualifications professionnelles a été signé par le conseiller fédéral Guy Parmelin le 14 juin 2023 à Londres. La procédure de consultation a eu lieu du 15 juin au 6 octobre 2023.

Les cantons, les partis politiques représentés à l'Assemblée fédérale, les associations faîtières des communes, des villes et des régions de montagne qui oeuvrent au niveau national, les associations faîtières de l'économie qui oeuvrent au niveau national et les autres milieux intéressés ont été invités à soumettre leur avis.

2.1

Positions relatives à l'accord et à sa mise en oeuvre dans la loi sur les avocats

En raison de l'importance de ce nouvel accord international pour les cantons, les organisations du monde du travail et les partenaires de la formation professionnelle, 7 / 20

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le Département fédéral de l'économie, de la formation et de la recherche (DEFR) a mené une consultation du 15 juin au 6 octobre 2023. Il a recueilli 42 avis provenant de 24 cantons, de la Conférence des gouvernements cantonaux, de trois partis politiques, de deux associations faîtières nationales de l'économie et de 12 autres organisations intéressées.

Les acteurs qui ont pris position sur le projet d'accord et sa mise en oeuvre dans la loi du 23 juin 2000 sur les avocats (LLCA)12 sont tous largement favorables au projet et saluent l'effort du DEFR de maintenir voire de consolider la reconnaissance des qualifications professionnelles avec le Royaume-Uni.

Plusieurs remarques, tant générales que spécifiques à certaines dispositions, et quelques suggestions de modification ont été formulées par les cantons. Elles portent en particulier sur la prise en compte des anciennes formations, l'obligation d'information entre autorités, l'entraide judiciaire, l'envoi postal des décisions à l'étranger ou encore une clarification concernant l'accès à un titre postgrade. Certains cantons demandent également de tenir compte de la pratique actuelle en matière de validation de l'expérience et de veiller à la non-discrimination des diplômes suisses au RoyaumeUni, ou relèvent que l'autorisation de fournir des prestations relevant du droit des assurances sociales n'est pas couverte par l'accord.

Les associations faîtières nationales de l'économie et d'autres organisations intéressées estiment nécessaire d'être impliquées dès le début dans les négociations portant sur de futurs ARM. Certaines suggèrent de compléter les articles concernant la transparence, le champ d'application, les mesures de compensation et les connaissances linguistiques. D'autres attirent l'attention sur l'origine de certains diplômes médicaux provenant de pays tiers qui auraient été reconnus par le Royaume-Uni et sur la nécessité de prévenir le risque de dumping salarial. Plusieurs acteurs souhaitent que leur profession fasse l'objet de négociations visant à conclure un ARM ou une annexe à l'accord.

2.2

Positions relatives à la délégation au Conseil fédéral de la compétence de conclure des traités internationaux dans le domaine des professions médicales, des professions de la santé, des avocats et des professions de la psychologie

La délégation au Conseil fédéral de la compétence de conclure des traités internationaux dans le champ d'application de la loi du 23 juin 2006 sur les professions médicales (LPMéd)13, de la loi fédérale du 30 septembre 2016 sur les professions de la santé (LPSan)14, de la LLCA et de la loi du 18 mars 2011 sur les professions de la psychologie (LPsy)15 a elle aussi été bien accueillie par l'ensemble des participants.

Aucune modification formelle des normes de délégation n'ayant été demandée.

12 13 14 15

RS 935.61 RS 811.11 RS 811.21 RS 935.81

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Les cantons rappellent que les modalités de l'accord ne devront permettre la reconnaissance que de qualifications équivalentes aux diplômes suisses correspondants.

Dans le domaine des soins de la santé, la sécurité des patients, la protection de la santé et la qualité des prestations fournies demeurent une priorité incontestable. En vertu des art. 54, al. 3, et 55 Cst., les droits constitutionnels des cantons (y compris la consultation des cantons) doivent en outre être garantis en tout temps. Enfin, les cantons ne souhaitent pas que l'accord couvre l'admission de fournisseurs de prestations de sécurité sociale.

3

Présentation de l'accord et de sa mise en oeuvre

3.1

Considérations générales

L'accord prévoit un régime permanent de reconnaissance qui permettra de maintenir en substance le système que les parties appliquent grâce au CRA. Il prévoit: ­

un régime général applicable à l'entier des professions réglementées avec comparaison des formations et le cas échéant mesures de compensation;

­

la possibilité d'ajouter des annexes à l'accord ou de conclure des ARM avec des régulateurs britanniques pour définir des règles plus favorables pour certaines professions;

­

des règles spécifiques pour les avocats (annexe A de l'accord), qui bénéficient déjà d'un régime spécial dans le CRA.

L'accord couvre en Suisse les professions réglementées tant par la Confédération que par les cantons, voire par les communes. Ce n'est en effet que pour ces professions que la reconnaissance est obligatoire. Il s'appliquera aux détenteurs d'un diplôme professionnel suisse ou britannique. Seul un accord de ce type permet aux professionnels d'être admis à des professions dont l'exercice requiert une formation spécifique. Cet accord est donc un élément indispensable à l'activité internationale des professionnels et des entreprises suisses.

L'accord concerne tant les ressortissants suisses résidant au Royaume-Uni que les prestataires de services en application de l'AMFS ou d'un éventuel futur accord de libre-échange ou encore les jeunes professionnels qui bénéficieraient d'un accord leur permettant d'effectuer un stage dans l'autre partie.

3.2 Art. 1.1

Commentaire des dispositions de l'accord Champ d'application territorial

L'accord s'applique à la Suisse, d'une part, et à l'Angleterre, à l'Écosse, au Pays de Galles et à l'Irlande du Nord, d'autre part. Il ne couvre ni les territoires britanniques d'outre-mer, ni les dépendances de la Couronne que sont les îles de Guernesey, de Jersey et de Man.

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Art. 1.2

Relations avec d'autres accords internationaux

Cette disposition renvoie aux accords pertinents conclus entre les parties. Les références aux accords commerciaux comme l'Accord instituant l'Organisation mondiale du commerce et l'Accord général sur le commerce des services (AGCS)16 ont leur importance puisque ce sont les accords de ce type qui vont régir la circulation des personnes à l'avenir, un accord permettant en particulier l'établissement n'étant pas envisagé.

Le par. 2 de cette disposition confirme que les activités prévues par le chapitre 3 de l'AMFS ont été réalisées. Ce chapitre avait été inséré dans l'AMFS pour donner un cadre aux négociations sur un accord relatif à la reconnaissance des qualifications professionnelles. Le groupe de travail de l'AMFS sera abandonné au profit du comité mixte de l'accord.

Les parties ont renoncé à mentionner spécifiquement d'autres accords spéciaux ou préférentiels qui pourraient permettre l'accès à des professions réglementées à titre de lex specialis. Ces accords sont couverts par les termes «ainsi que de tout autre accord international pertinent auquel elles sont parties». On pense en particulier aux services aériens.

Art. 1.3

Transparence

Cette disposition vise à ce que les citoyens disposent de toutes les informations requises pour pouvoir bénéficier de l'accord. Son par. 2 vise à assurer un dialogue dynamique entre autorités compétentes et demandeurs, tandis que le par. 3 permet aux parties de ne pas révéler des données personnelles dont la divulgation ferait obstacle à l'application des lois, serait contraire à l'intérêt public ou porterait préjudice aux intérêts commerciaux légitimes d'un opérateur économique.

Art. 1.4

Exceptions concernant la sécurité

Cette exception provient de l'AGCS et permet aux parties de déroger à l'accord dans certaines situations exceptionnelles en raison de leur politique de sécurité. Elle est destinée à protéger les intérêts essentiels de sécurité des deux parties. De plus, elle maintient la cohérence avec les précédents accords, les parties ayant pour habitude d'inclure ces exceptions dans tout accord touchant notamment aux services.

Art. 2.1

Définitions

Les définitions reprennent des notions déjà connues, avec lesquelles les autorités de reconnaissance des deux parties sont familières. On peut toutefois apporter les précisions suivantes sur certains termes: ­

16

let. a: cette notion permet d'exclure du champ d'application de l'accord les professions ayant trait à l'exercice de la puissance publique qui étaient déjà exclues du champ d'application de l'ALCP (art. 10 et 16 de l'annexe I ALCP);

RS 0.632.20

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let. b et c: les références à la période d'adaptation et à l'épreuve d'aptitude reprennent les définitions de l'annexe III ALCP;

­

let. h et i: le terme de «mesure» est repris à différents endroits du texte (notamment aux art. 2.10, 3.2, par. 2, et 3.3.) et celui de «mesures prises par une partie» permet de délimiter la notion de «profession réglementée» (let. o) en subordonnant son exercice à des mesures prises par des autorités ou des entités privées qui se sont vu légalement déléguer des tâches officielles;

­

let. o: cette lettre couvre l'exercice des professions réglementées à tous les niveaux en Suisse, y compris à l'échelle cantonale ou communale: la référence aux «dispositions législatives ou réglementaires» vise à éviter qu'une «mesure» qui prendrait la forme d'une action administrative ou d'une pratique selon la let. h, par exemple des statuts d'association, une coutume locale ou une pratique en vigueur dans un certain cercle professionnel, puisse étendre le champ des professions réglementées sans qu'une base légale formelle ne limite valablement la liberté économique;

­

let. p: par «autorité compétente», on vise en Suisse toute autorité fédérale, cantonale ou communale compétente pour la reconnaissance des qualifications professionnelles et pour l'autorisation de l'exercice d'une profession réglementée sur un territoire; toutes les autorités compétentes sont directement liées par l'accord et doivent en appliquer les dispositions (caractère directement applicable en droit interne [self-executing] de l'accord); au RoyaumeUni, le système est décentralisé et délègue certaines activités à des organisations professionnelles.

Art. 2.2

Champ d'application

L'accord a un champ d'application personnel plus large que le CRA. L'absence de critère de nationalité permet en particulier de régler la situation de ressortissants de l'UE qui ont un diplôme britannique ou suisse, groupe-cible non pris en compte par le CRA. Les parties ont souhaité couvrir l'ensemble de leurs qualifications professionnelles, sans s'attacher à la nationalité de leur titulaire. Elles renforcent ainsi l'attrait de leur système de formation, fortement tourné vers l'international dans les deux pays. L'accord couvre donc les ressortissants d'États tiers qui auraient acquis un diplôme au Royaume-Uni, pour autant qu'ils puissent prétendre à travailler en Suisse en vertu de la loi fédérale du 16 décembre 2005 sur les étrangers et l'intégration17 et qu'ils bénéficient de qualifications professionnelles comparables (voir art. 2.3). En revanche, l'accord ne prévoit pas la reconnaissance de diplômes non britanniques que le Royaume-Uni aurait reconnus.

Le par. 3 de cette disposition réserve les professions ayant trait à l'exercice de la puissance publique, qui peuvent ne pas être reconnues. Cette disposition s'inspire directement de l'ALCP qui liait les parties avant le Brexit (voir le commentaire de l'art. 2.1, let. a).

17

RS 142.20

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Art. 2.3

Reconnaissance des qualifications professionnelles

Cette disposition est centrale dans l'accord. Elle pose plusieurs principes: ­

elle rappelle que l'accord ne s'applique qu'aux professions réglementées;

­

elle énonce le principe de l'obligation de reconnaissance des qualifications professionnelles de l'autre partie, un refus n'étant possible que pour des raisons explicitement mentionnées, notamment à l'art. 2.4;

­

elle prévoit le principe de l'accès plein et entier à la profession, sous réserve des restrictions justifiée notamment par les conditions visées à l'art. 2.4 ou les dispositions l'art. 2.6;

­

elle prévoit que le professionnel doive disposer de «qualifications professionnelles comparables», ce par quoi il faut comprendre qu'il est qualifié, dans son pays d'origine, pour exercer une profession comparable à celle à laquelle il demande l'accès dans le pays d'accueil et que sa formation ne s'éloigne pas drastiquement des normes de ce pays.

Le par. 2 exclut du champ d'application de l'accord les questions de migration (permis de séjour et autorisation de travail).

Le par. 3 prévoit l'obligation d'accorder en matière d'accès et d'exercice de la profession l'égalité de traitement avec les professionnels ayant obtenu leurs qualifications dans le pays d'accueil. Par conséquent, les personnes titulaires d'un diplôme reconnu sur la base de l'accord sont soumises aux mêmes conditions et obligations en matière d'autorisation de pratiquer, par exemple dans le domaine des professions médicales universitaires, que les ressortissants suisses (cf. art. 36 ss. LPMéd).

Art. 2.4

Conditions pour la reconnaissance

Cette disposition ne permet de refuser la reconnaissance que pour trois raisons: ­

différence substantielle dans les formations et échec ou refus d'accomplir des mesures de compensation;

­

différence dans les champs d'activité et échec ou refus d'accomplir des mesures de compensation;

­

différences telles que des mesures de compensation reviendraient à refaire la formation.

Ces trois conditions sont déjà connues des autorités de reconnaissance, qui les appliquent actuellement dans le cadre de la directive 2005/36/CE18.

Art. 2.5

Mesures de compensation

Cette disposition reprend le système actuel, à la différence notable que le choix entre la période d'adaptation et l'épreuve d'aptitude ne revient pas au demandeur comme c'est le cas dans l'UE, mais à l'autorité (par. 2, sous réserve du régime spécifique 18

Directive 2005/36/CE du Parlement européen et du Conseil du 7 septembre 2005 relative à la reconnaissance des qualifications professionnelles, JO L 255 du 30.9.2005, p. 22.

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applicable aux avocats défini à l'annexe A). Cette disposition facilitera le travail des autorités, puisqu'elles n'auront pas à concevoir systématiquement deux types de mesures de compensation.

Le par. 3 est une disposition requise avant tout pour le Royaume-Uni, dont les régulateurs devront mettre en oeuvre l'accord dans leur législation. En Suisse, les règles nationales prévoient de toute façon l'obligation systématique de motiver une décision.

Art. 2.6

Autres conditions

L'art. 2.6 permet de refuser purement et simplement la reconnaissance des qualifications professionnelles si l'accès à la profession et son exercice sont soumis à des conditions particulières et que le demandeur ne les remplit pas. L'accord vise ici toutes les conditions annexes comme l'exigence de démontrer sa bonne conduite, l'obligation d'être assuré notamment en matière de responsabilité civile, les modalités liées aux locaux dans lesquels la profession s'exerce et l'obligation de démontrer l'absence de faillite. Cette disposition vise à assurer l'égalité de traitement, c'est-à-dire l'absence de discrimination des professionnels de l'autre partie. Le demandeur est ainsi soumis aux mêmes conditions que les professionnels de l'autre partie, ni plus, ni moins.

Les éventuelles conditions auxquelles le professionnel sera soumis sont régies par l'art. 2.8, qui vise à informer les demandeurs lorsqu'ils font une demande.

Art. 2.7

Procédure applicable aux demandes

L'art. 2.7 prévoit des modalités procédurales analogues à celles qui sont déjà appliquées sous le régime du CRA. Cet article vise à s'assurer que les autorités ne demanderont pas de documents inutiles à un traitement efficace de la demande, que ce soit en lien avec les qualifications professionnelles (par. 2) ou les autres conditions visées à l'art. 2.6 (par. 3).

Le par. 4 traite de la certification de copies, les parties renonçant ainsi à l'apostille prévue par la Convention du 5 octobre 1961 supprimant l'exigence de la légalisation des actes publics étrangers19.

Les par. 6 et 7 règlent la transmission de données personnelles. Ces paragraphes prévoient que l'échange de données personnelles est régi par le droit national des parties.

L'accord ne prévoit donc pas d'obligations formelles pour les autorités de livrer des données sensibles, ce qui ne serait d'ailleurs pas nécessaire puisqu'il appartient fondamentalement au demandeur de démontrer par exemple qu'il est de «bonne conduite» («good conduct») et qu'il n'a pas fait l'objet de condamnations ou de restrictions dans le cadre de sa profession dans son pays d'origine.

Art. 2.8

Informations

L'art. 2.8 dresse la liste des informations que les parties devront mettre à la disposition des professionnels. En Suisse ces informations seront centralisées sur le site Internet 19

RS 0.172.030.4

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du Secrétariat d'État à la formation, à la recherche et à l'innovation. Au RoyaumeUni, il reviendra en principe à chaque régulateur compétent de s'acquitter de cette obligation.

Art. 2.9

Connaissances linguistiques

L'art. 2.9 fixe les cas dans lesquels un contrôle des connaissances linguistiques peut être exigé. Il correspond largement à la pratique actuelle, étant précisé que le contrôle des connaissances linguistiques ne doit pas forcément être découplé de la procédure de reconnaissance elle-même, comme c'est le cas dans le cadre de l'ALCP. Contrairement à l'AMFS, qui exclut une telle exigence, on reconnait ici que la connaissance d'une langue locale peut être essentielle à la pratique de certaines professions réglementées.

Art. 2.12

Arrangements spécifiques d'un secteur

L'accord permet de définir des régimes préférentiels pour des professions particulières. L'art. 2.12 permet d'améliorer le système au fil du temps. Ainsi, il est possible par exemple de convenir pour une profession donnée d'une reconnaissance automatique, de mesures de compensation standardisées ou de procédures plus efficaces. Les arrangements peuvent prendre deux formes: ­

une annexe à l'accord, à l'instar de celle qui est proposée pour les avocats;

­

un ARM.

Ces instruments ont pour but de définir, dans des secteurs d'intérêt des deux parties, des règles assurant au demandeur des procédures plus efficaces et prévisibles (exigences, durée de la procédure, etc.).

Les arrangements (annexe ou arrangements de reconnaissance mutuelle) sont conclus, côté Royaume-Uni, par les régulateurs qui en ont reçu le pouvoir dans une loi nationale (par. 2). Côté suisse, l'accord confère au Conseil fédéral la compétence de conclure seul de tels arrangements sous la forme d'une nouvelle annexe à l'accord ou d'un ARM (par. 3). Le par. 4 de cette disposition prévoit ce que peuvent contenir une annexe ou un ARM et circonscrit ainsi la délégation de compétence prévue au par. 3.

Chap. 3

Dispositions finales

Les dispositions finales portent essentiellement sur le rôle du comité mixte (art. 3.1).

Les parties ont voulu un comité mixte fort, qui dispose de toute une palette de fonctions pour assurer le bon fonctionnement de l'accord et veiller au respect de son esprit.

Il s'agit toutefois d'un organe uniquement politique, sans fonction juridictionnelle ou décisionnelle.

L'art. 3.2 permet d'assurer une forme de surveillance sur la mise en oeuvre de l'accord.

Si une partie estime que des mesures ne respectent pas l'accord, elle peut demander une consultation à l'autre partie et lui demander une prise de position officielle.

Les art. 3.3 à 3.6 contiennent les dispositions usuelles relatives à l'entrée en vigueur, à la modification et à la dénonciation de l'accord. Idéalement, l'accord devrait entrer en vigueur le 1er janvier 2025, pour éviter un vide juridique une fois la phase transi14 / 20

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toire du CRA terminée. Il ne peut pas entrer en vigueur avant, au risque d'un conflit de normes avec le CRA. La date précise à laquelle la Suisse pourra notifier l'accomplissement de ses procédures internes dépendra de l'approbation de l'Assemblée fédérale et de l'issue du référendum facultatif. Il s'agit évidemment de tout mettre en oeuvre pour que l'accord puisse entrer en vigueur le plus rapidement possible en 2025.

3.3

Commentaire de l'annexe relative aux avocats

L'accord comprend une annexe spécifique aux avocats. À l'instar de ce qui a été fait dans le CRA, les parties ont souhaité conserver un régime particulier pour cette profession. Comme le Royaume-Uni compte 11 régulateurs pour cette profession, il a été jugé plus efficace d'insérer directement une annexe au lieu de devoir négocier 11 ARM une fois l'accord en vigueur.

L'annexe relative aux avocats institue un régime préférentiel par rapport au système général des art. 2.3 à 2.5. de l'accord. Ce régime permet aux avocats suisses de pratiquer la représentation en justice au Royaume-Uni en utilisant le titre d'avocat correspondant, moyennant une période d'adaptation. La solution retenue tient compte du fait qu'en Suisse et au Royaume-Uni, les avocats sujets à des mesures de compensation ont systématiquement choisi la période d'adaptation. L'annexe à l'accord permet donc à l'avocat de choisir la période d'adaptation et non l'épreuve d'aptitude, et précise les modalités de la période d'adaptation.

Le régime préférentiel applicable aux avocats se résume aux points suivants:

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l'avocat a le droit de choisir sa mesure de compensation; s'il choisit l'examen, ce qui est peu probable, l'annexe ne s'applique pas; s'il choisit la période d'adaptation, celle-ci doit durer au moins trois ans, cette durée pouvant être réduite si l'avocat peut justifier d'une expérience professionnelle appropriée dans le droit du pays d'accueil (art. A.3, par. 2, let. c);

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l'avocat a le droit d'être enregistré par l'autorité compétente pendant sa période d'adaptation, si bien qu'il peut exercer sa profession tout de suite en utilisant le titre de son pays d'origine; l'autorité du pays d'accueil peut toutefois limiter l'exercice de sa profession (art. A.3, par. 2, let. e); en Suisse, cette limitation est déjà prévue par l'art. 23 LLCA; au Royaume-Uni, ces restrictions sont plus importantes mais sont également limitées à la durée de la période d'adaptation: en fonction du régulateur, les restrictions peuvent porter en particulier sur l'exercice d'un droit d'audience, la conduite d'un litige, les activités liées aux instruments réservés, les activités d'homologation, les activités notariales et l'administration des serments20;

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si l'avocat ne remplit pas les conditions auxquelles sont soumis les avocats du pays d'accueil, comme la bonne conduite, l'autorité peut refuser l'enregistrement (art. A.3, par. 2, let. b); cette règle est le pendant de l'art. 2.6 de l'accord;

En anglais: «the exercise of a right of audience, the conduct of litigation, reserved instrument activities, probate activities, notarial activities and the administration of oaths».

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la période d'adaptation s'effectue sous le titre d'avocat du pays d'origine; ce titre est soumis aux règles d'exercice du pays d'accueil (art. A.3, par. 2, let. d et f);

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une fois la période d'adaptation accomplie, l'avocat a plein accès aux activités professionnelles du pays d'accueil et peut utiliser le titre professionnel de ce pays (art. A4).

L'annexe prévoit enfin qu'en cas de modification de l'annexe, un délai de douze mois doit être respecté pour permettre aux régulateurs et aux bénéficiaires de l'annexe de s'adapter et de prendre d'éventuelles mesures.

L'annexe A règle la reconnaissance des qualifications professionnelles de la profession d'avocat. Elle ne confère pas directement le droit d'effectuer des prestations de services au sens des art. 21 et 22 LLCA, ni ne donne droit à un permis de séjour ou à une autorisation de travail (cf. art. 2.3, par. 2, let. a). Dès lors que la reconnaissance par l'autorité du pays hôte est obtenue au terme de la procédure prévue par l'accord, et que toute autre formalité liée à son séjour, son établissement ou celui d'une personne morale est réglée, que l'avocat titulaire d'un titre de l'autre partie peut utiliser le titre du pays hôte et fournir des services juridiques, soit en y étant établi, soit à distance ou par une présence temporaire dans le pays hôte.

Le régime spécifique aux avocats va notablement plus loin que ce que le RoyaumeUni a conclu avec l'UE ou les États de l'AELE/EEE. En particulier, il permet à l'avocat suisse d'exercer au Royaume-Uni l'entier des facettes de l'activité une fois la période d'adaptation terminée, de sorte que son activité ne sera nullement limitée à la pratique du droit international public ou du droit du pays d'origine comme pour les avocats de l'UE ou de l'AELE/EEE. Cette annexe constitue dès lors un avantage comparatif très intéressant pour les avocats suisses.

3.4

Mise en oeuvre de l'accord dans la LLCA

La LLCA doit être modifiée pour mettre en oeuvre l'accord avec le Royaume-Uni. Il s'agit de la seule loi fédérale qui transpose les accords internationaux en matière de reconnaissance des qualifications professionnelles, bien que ces derniers soient directement applicables en droit interne.

La LLCA n'est modifiée que marginalement, l'objectif étant de garder un texte légal simple et de tenir compte du fait que le régime applicable aux avocats britanniques reste très largement calqué sur le régime applicable aux avocats de l'UE/AELE. La LLCA voit donc son champ d'application élargi (art. 2, al. 2, let. c). Le régime applicable aux avocats du Royaume-Uni ne traite que de la reconnaissance des qualifications professionnelles, et ne donne pas directement l'accès au marché pour prester ce service. Cette adaptation permet en même temps de préciser que l'exclusion de la prestation de services au sens des art. 21 et 22 LLCA (c'est-à-dire sans passer par la procédure de reconnaissance) s'applique également aux avocats relevant du CRA. En ce qui concerne l'exercice par le biais d'une présence temporaire en Suisse, il faut en outre tenir compte des dispositions liées à l'entrée et au séjour, actuellement réglées par l'AMFS.

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Le champ d'application du CRA et celui de l'annexe à l'accord ne se recoupent pas, le CRA ne couvrant que les nationaux des deux parties. Le CRA continuera donc à trouver une application pour les inscriptions existantes dans un registre cantonal des avocats, même au-delà de la période transitoire de quatre ans. Les droits garantis par le CRA en vertu de l'ALCP (cf. art. 1 et 30 CRA) resteront garantis même après l'entrée en vigueur du présent accord. Un citoyen britannique titulaire d'un brevet d'avocat d'un État membre de l'UE qui était inscrit à un registre cantonal des avocats avant le 31 décembre 2020 pourra donc continuer à l'être. Par conséquent, la let. b de l'art. 2, par. 2, n'est pas abrogée.

4

Création d'une norme de délégation de compétence dans la LPMéd, la LPSan, la LLCA et la LPsy

L'art. 2.12 de l'accord confère au Conseil fédéral la compétence de conclure seul des arrangements en matière de reconnaissance des qualifications professionnelles par la voie d'ARM distincts ou d'annexes à l'accord. Cette délégation de compétence, dont l'objectif est de simplifier ou d'accélérer la procédure de reconnaissance prévue par l'accord, s'applique uniquement aux arrangements conclus avec le Royaume-Uni et se limite à certaines professions. Il convient donc de compléter ce dispositif en adaptant la LPMéd, la LPsy, la LLCA et la LPSan de manière à ce que la compétence du Conseil fédéral s'étende aux autres pays. Ces quatre lois spéciales contiendront ainsi les mêmes règles que les deux lois générales que sont la LFPr et la LEHE, qui permettent déjà au Conseil fédéral de conclure des accords de reconnaissance des diplômes dans le domaine de la formation professionnelle et des hautes écoles (art. 68, al. 2, LFPr et art. 66, al. 1, let. a, LEHE).

Pour ce qui est de la LLCA, une nouvelle section 7a permet au Conseil fédéral de conclure des accords internationaux en matière de reconnaissance des qualifications professionnelles. Afin de ne pas compliquer le système pour les autorités cantonales, tout accord conclu par le Conseil fédéral devra se calquer sur le régime applicable aux avocats de l'UE/AELE. Le Conseil fédéral devra également veiller à ce que les avocats titulaires de qualifications professionnelles reconnues soient soumis aux règles professionnelles suisses. Le Conseil fédéral est finalement autorisé à édicter des dispositions d'exécution pour mettre en oeuvre de futurs accords.

Ces modifications permettront d'harmoniser un grand nombre de professions de droit fédéral. Le Conseil fédéral pourra ainsi facilement conclure, par exemple, des ARM avec le Québec dans le cadre de l'Entente du 14 juin 2022 entre le Conseil fédéral suisse et le Gouvernement du Québec en matière de reconnaissance mutuelle des qualifications professionnelles ou procéder à des adaptations techniques de l'annexe III ALCP, ce pour quoi il est compétent tant que les professions médicales universitaires, de la psychologie, d'avocat et de la santé ne sont pas touchées, en vertu des dispositions précitées de la LFPr et de la LEHE. Le système sera ainsi uniformisé par souci de cohérence et d'efficacité. Il pourrait
aussi conclure des accords de reconnaissance avec d'autres pays, par exemple dans le cadre prévu par l'article VII para. 1 de l'AGCS sur la reconnaissance et d'accords de libre-échange existants ou faisant l'objet de mandats de négociation.

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La délégation de compétence proposée dans ces quatre lois ne permet pas au Conseil fédéral de régler des questions migratoires qui relèvent du droit des étrangers. La délégation proposée dans la LPMéd, la LPsy et la LPSan ne permet pas non plus au Conseil fédéral de régler le droit au remboursement par les assurances sociales.

La modification de ces quatre lois n'entraîne aucune conséquence directe pour l'économie, la société, l'environnement, les cantons et les communes, étant entendu que la norme de délégation ne dispensera pas de procéder à une consultation si les conditions légales sont remplies.

5

Conséquences

5.1

Conséquences pour la reconnaissance des qualifications professionnelles étrangères

Actuellement, la reconnaissance des qualifications professionnelles entre la Suisse et le Royaume-Uni est régie par le CRA. Cet accord prévoit un régime transitoire qui se termine le 31 décembre 2024. Faute de nouvel accord, la reconnaissance ne sera plus assurée entre les parties, ce qui engendrerait une perte de droits substantielle et menacerait l'accès aux professions réglementées des professionnels suisses au RoyaumeUni. Les droits découlant notamment de l'AMFS ne pourront par ailleurs plus s'exercer dans le cadre de professions réglementées. Le nouvel accord permet de maintenir un régime de reconnaissance des qualifications professionnelles simple, performant et calqué sur le système actuel.

Plus généralement, l'accord permettra aux diplômés des établissements de formation suisses d'être reconnus au Royaume-Uni selon des modalités qui n'existent pour aucun autre pays. La possibilité de conclure des ARM permettra de renforcer la collaboration entre les acteurs concernés.

D'autre part, la création de normes de délégation en faveur du Conseil fédéral permettra de conclure plus facilement des accords en matière de reconnaissance des qualifications professionnelles. Cela facilitera le travail des autorités dans un domaine particulièrement technique.

5.2

Conséquences pour la Confédération, les cantons et les autres autorités chargées de la reconnaissance

L'accord n'a pas de conséquence financière ou en personnel pour la Confédération et les autres autorités de reconnaissance suisses. Les autorités fédérales, cantonales voire communales reconnaissent déjà les qualifications britanniques et continueront donc de le faire en application d'une autre base légale. S'agissant des avocats, le régime reste calqué sur le mécanisme applicable aux avocats de l'UE/AELE, si bien qu'aucune conséquence particulière n'est à attendre.

Rien n'indique que les qualifications qui étaient reconnues automatiquement sous le régime du CRA feront l'objet de mesures de compensation compliquées. Il ne faut donc pas s'attendre à ce que les demandes soient plus complexes à traiter.

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S'agissant de la mise en oeuvre, vu le caractère directement applicable en droit interne des dispositions de l'accord, il n'est pas nécessaire d'adapter les bases légales fédérales ou cantonales. Seule la LLCA sera adaptée, compte tenu de sa nature particulière.

Une éventuelle adaptation d'ordonnances devra être faite par les autorités fédérales compétentes d'ici à l'entrée en vigueur de l'accord.

Le projet d'accord n'a pas d'autre conséquence pour les cantons ou les communes. Il ne crée aucune nouvelle tâche d'exécution, compte tenu du régime actuel du CRA.

L'accord n'a pas non plus d'incidence sur la répartition des tâches entre la Confédération, les cantons et les communes.

5.3

Conséquences pour l'économie et la société

L'accord supprime le risque d'une perte de droits à la fin de la période transitoire du CRA. Il permettra aux professionnels (indépendants et salariés détachés par des entreprises) de continuer d'avoir accès aux professions réglementées au Royaume-Uni.

Il maintient ainsi la compétitivité économique de la Suisse, et la renforce même par rapport à ses concurrents de l'UE et de l'AELE, puisque ceux-ci ne disposent pas, à ce jour, d'un régime de reconnaissance des qualifications professionnelles applicable très largement, c'est-à-dire non seulement dans le cadre de prestations de services, mais aussi dans le cadre d'un établissement ou d'un régime de mobilité de jeunes professionnels.

Les régimes spécifiques à certaines professions, actuels comme pour les avocats ou futurs via des annexes à l'accord ou des ARM, permettront en outre de renforcer l'économie suisse et de contribuer à la compétitivité internationale des établissements suisses de formation.

6

Aspects juridiques

6.1

Constitutionnalité et bases légales

6.1.1

L'accord et sa mise en oeuvre dans la LLCA

Le projet d'accord se fonde sur l'art. 54, al. 1, de la Constitution (Cst.), qui dispose que les affaires étrangères relèvent de la compétence de la Confédération. Par ailleurs, l'art. 184, al. 2, Cst. confère au Conseil fédéral la compétence de signer des traités internationaux et de les ratifier. Enfin, conformément à l'art. 166, al. 2, Cst., l'Assemblée fédérale est compétente pour approuver ces traités, sauf si leur conclusion relève de la seule compétence du Conseil fédéral en vertu d'une loi ou d'un traité international (art. 24, al. 2, de la loi du 13 décembre 2002 sur le Parlement [LParl]21 et 7a, al. 1, de la loi du 21 mars 1997 sur l'organisation du gouvernement et de l'administration [LOGA]22).

21 22

RS 171.10 RS 172.010

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Le Conseil fédéral ne dispose pas d'une base légale formelle l'habilitant à conclure seul le présent accord. Par ailleurs, de par son contenu et sa portée, ledit accord ne peut être qualifié de traité de portée mineure pouvant être conclu par le seul Conseil fédéral en vertu de l'art. 7a, al. 2, LOGA. Aussi le présent accord est-il soumis à l'approbation de l'Assemblée fédérale conformément à l'art. 166, al. 2, Cst.

La modification de la LLCA permet la mise en oeuvre de l'accord avec le RoyaumeUni. Il s'agit de la seule loi fédérale qui transpose les accords internationaux en matière de reconnaissance des qualifications professionnelles, malgré le caractère directement applicable en droit interne de ces accords.

6.1.2

Les normes de délégation

Le projet de modification de la LLCA se fonde sur l'art. 95, al. 1, Cst., qui habilite la Confédération à légiférer sur l'exercice des activités économiques lucratives privées.

Le projet de modification de la LPMéd, de la LPSan et de la LPsy se fonde sur l'art. 117a, al. 2, let. a, Cst., qui dispose que la Confédération légifère sur les conditions d'exercice des professions des soins médicaux de base.

6.2

Compatibilité avec les autres obligations internationales de la Suisse

La conclusion de l'accord n'est pas contraire aux engagements de la Suisse vis-à-vis de l'UE ni à ses objectifs de politique européenne. L'accord est notamment compatible avec l'ALCP et les autres accords bilatéraux conclus entre la Suisse et l'UE.

L'accord est également conforme aux autres engagements internationaux de la Suisse.

6.3

Forme de l'acte à adopter (arrêté fédéral, acte de mise en oeuvre)

L'art. 141, al. 1, let. d, ch. 3, Cst. prévoit qu'un traité international est sujet au référendum lorsqu'il contient des dispositions importantes fixant des règles de droit ou lorsque sa mise en oeuvre exige l'adoption de lois fédérales. Comme le prévoit l'art. 22, al. 4, LParl, sont réputées fixer des règles de droit les dispositions générales et abstraites d'application directe qui créent des obligations, confèrent des droits ou attribuent des compétences. On entend par dispositions importantes celles qui, en vertu de l'art. 164, al. 1, Cst., devraient en droit interne être édictées sous la forme d'une loi fédérale.

Ce traité international règle l'accès aux professions réglementées. Il contient par conséquent des dispositions fondamentales relatives aux droits et aux obligations des personnes (cf. art. 164, al. 1, let. c, Cst.). Sa mise en oeuvre exige en outre une modification de la LLCA. L'arrêté fédéral portant approbation du traité est donc sujet au référendum en vertu de l'art. 141, al. 1, let. d, ch. 3, Cst.

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