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Mesure de l'efficacité dans la coopération internationale Rapport de la Commission de gestion du Conseil des États du 14 novembre 2023 Avis du Conseil fédéral du 21 février 2024

Monsieur le Président, Mesdames et Messieurs, Conformément à l'art. 158 de la loi sur le Parlement, nous nous prononçons comme suit sur le rapport de la Commission de gestion du Conseil des États du 14 novembre 2023 concernant la mesure de l'efficacité dans la coopération internationale.

Nous vous prions d'agréer, Monsieur le Président, Mesdames, Messieurs, l'assurance de notre haute considération.

21 février 2024

Au nom du Conseil fédéral suisse: La présidente de la Confédération, Viola Amherd Le chancelier de la Confédération, Viktor Rossi

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Avis 1

Contexte

Le 25 janvier 2022, les Commissions de gestion des Chambres fédérales (CdG) ont décidé de mener une inspection sur la mesure de l'efficacité dans la coopération internationale (CI) et ont confié cette tâche à la sous-commission DFAE/DDPS de la Commission de gestion du Conseil des États. Le 23 mai 2022, la sous-commission a chargé le Contrôle parlementaire de l'administration (CPA) de mener une enquête à ce sujet. Sur la base du rapport du CPA du 27 avril 20231, la CdG-E a rédigé un rapport sur la mesure de l'efficacité dans la coopération internationale, qu'elle a adopté le 14 novembre 20232.

La CdG-E invite le Conseil fédéral à tenir compte, pour autant que cela soit possible, des recommandations du rapport lors de l'élaboration de son message sur la stratégie de coopération internationale 2025­2028, et à les mettre en oeuvre au plus tard d'ici la parution du rapport sur la prochaine période stratégique. Par ailleurs, elle prie le Conseil fédéral de prendre position sur ses constatations et ses recommandations ainsi que sur le rapport d'évaluation du CPA d'ici au 21 février 2024, et de lui indiquer par quelles mesures et dans quel délai il entend mettre en oeuvre les recommandations.

L'objet de l'enquête se limite à l'instrument de l'évaluation. Une distinction est faite entre les évaluations de projet et de programmes dites «externes», qui sont commandées en premier lieu par les chargés de programmes compétents, y compris dans les représentations à l'étranger, et les évaluations stratégiques dites «indépendantes», qui sont commandées par les unités d'évaluations centrales de la CI.

La coopération internationale de la Confédération est mise en oeuvre conformément à la stratégie de coopération internationale 2021­2024. La responsabilité en la matière relève de la Direction du développement et de la coopération (DDC) du Département fédéral des affaires étrangères (DFAE), du centre de prestations Coopération et développement économiques du Secrétariat d'État à l'économie (SECO) du Département fédéral de l'économie, de la formation et de la recherche (DEFR) ainsi que de la Division Paix et droits de l'homme (DPDH) du Secrétariat d'État du DFAE. Les unités mentionnées disposent de services spécialisés compétents pour la mesure de l'efficacité et l'évaluation. Les évaluations sont utilisées, d'une
part, pour piloter les projets et les programmes ainsi que l'apprentissage institutionnel et, d'autre part, pour rendre des comptes. Sur le plan méthodologique, elles s'articulent autour des six critères d'évaluation internationaux adoptés par le Comité d'aide au développement de l'Organisation de coopération et de développement économiques (OCDE-CAD).

Les unités d'évaluation centrales de la DDC, du SECO et de la DPDH sont responsables de la planification et de l'attribution des évaluations au niveau thématique (3 à 5 par an au total). La majeure partie de l'activité d'évaluation menée dans le cadre de la CI suisse concerne les projets commandés par les représentations à l'étranger. En1 2

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viron 130 évaluations de projets ou de programmes de ce type sont commandées chaque année.

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Avis du Conseil fédéral

Après concertation avec les unités administratives compétentes pour la CI, le Conseil fédéral se prononce comme suit: Le Conseil fédéral se félicite du contrôle réalisé par la CdG-E. Les unités administratives compétentes ont été consultées et ont pu exposer leur point de vue sur les différents points en discussion.

Le CPA consacre son rapport essentiellement aux évaluations de projets, c'est-à-dire à la qualité et à l'utilité des rapports d'évaluation. Dans ce contexte, il postule des exigences très élevées en matière de qualité, lesquelles ne sont pas toujours remplies en dépit des prescriptions existantes. Le rapport ne met en outre en lumière qu'un aspect partiel de la mesure de l'efficacité de la CI suisse.

Bien que les travaux des unités d'évaluation responsables soient considérés comme positifs dans l'ensemble, le Conseil fédéral reconnaît que la qualité des évaluations des projets peut encore s'améliorer et a déjà pris des mesures à cet effet. Les mesures sont répertoriées en annexe.

Le Conseil fédéral prend acte de l'avis du CPA selon lequel, malgré un besoin d'amélioration avéré, la qualité de l'examen des rapports d'évaluation est comparable, voire supérieure à celle d'autres agences de développement étatiques. La mesure de l'efficacité de la CI continue cependant à faire l'objet de débats au niveau international (p. ex. au sein du CAD de l'OCDE).

Le Conseil fédéral estime que les six recommandations du rapport de la CdG-E sont efficaces et réalisables. À ce sujet, il souhaite souligner ce qui suit: Le Conseil fédéral est d'accord avec les recommandations 1 à 5; il émet toutefois une réserve partielle concernant la recommandation 2 (voir ci-après). Certaines mesures de mise en oeuvre des recommandations ont déjà été prises. Ainsi, en 2021, le SECO a révisé son modèle pour les évaluations. La DDC remanie de son côté ses lignes directrices d'évaluation et développe un programme de formation pour le renforcement des connaissances internes en la matière. À l'avenir, les évaluations de projets devront se référer plus explicitement à la stratégie CI, et il faudra garantir le suivi systématique de la mise en oeuvre des recommandations. En ce qui concerne la pratique en matière de publication des évaluations, le Conseil fédéral accepte les différences qui existent entre les différentes unités
CI; la DDC publie tous ses rapports d'évaluation dans le système d'information sur les projets de recherche de la Confédération (ARAMIS), tandis que le SECO et la DPDH n'en publient qu'une partie.

Une réserve est émise pour la recommandation 2, qui demande que les évaluations externes «tiennent toujours compte de tous les critères d'évaluation du CAD». Les unités CI appliquent la recommandation du CAD de l'OCDE, selon laquelle, lors de chaque évaluation de projet, il convient de hiérarchiser et de pondérer les six critères

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applicables en la matière, et ce, en fonction de l'intérêt concret des résultats. Dès lors, il apparaît justifié d'appliquer les critères du CAD en fonction des besoins.

La recommandation 6 se penche sur la mesure de l'efficacité en vue de rendre des comptes. La stratégie CI est mise en oeuvre au niveau des programmes géographiques et thématiques, qui en concrétisent les objectifs. Dès lors, agréger des résultats qui varient fortement d'un contexte à l'autre est un défi de taille Ici, il manque encore la méthodologie nécessaire à l'évaluation globale de l'efficacité.

Si les évaluations permettent de tirer des conclusions sur l'efficacité des projets et des programmes, un défi majeur demeure quant à en obtenir une vue d'ensemble objective de l'efficacité de la stratégie CI. Il est demandé aux unités CI de faire des progrès à ce sujet, d'améliorer la méthode pour évaluer de manière probante l'efficacité de la coopération internationale et d'informer le Conseil fédéral par des rapports réguliers.

Toutefois, les évaluations ne constituent pas toujours un moyen approprié de rendre des comptes au Parlement et au public. En effet, seul un certain nombre de projets sont évalués chaque année (pour la DDC et le SECO, il s'agit de 10 % environ du portefeuille de projets actif) et, de surcroît, ces évaluations n'abordent souvent que des aspects spécifiques des projets. La DDC et le SECO prévoient d'évaluer davantage de projets terminés afin de pouvoir tirer de meilleures conclusions sur leur efficacité et leur durabilité.

Les outils de suivi jouent un rôle crucial dans la mesure de l'efficacité; ici aussi, des mesures ont déjà été prises. Le développement du nouveau logiciel Results Data Management (RDM) a permis, pour la première fois en 2023, la collecte numérique des résultats des projets de la DDC. Grâce à cette innovation, il sera désormais possible d'obtenir une analyse des données plus performante et plus complète et de rendre des comptes sur les objectifs spécifiques de la stratégie CI. À moyen terme, il est prévu de rendre les données collectées dans le cadre du RDM accessibles au public afin d'améliorer la transparence sur les activités de la DDC et sur la mise en oeuvre de la stratégie CI.

Dans la perspective de la mise en oeuvre des recommandations de la CdG-E pour améliorer la mesure de l'efficacité dans la CI suisse, le Conseil fédéral a adopté des mesures contraignantes, mentionnées en annexe, qui seront mises en oeuvre d'ici à la fin de 2026.

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Annexe Recommandations de la CdG-E* (mots mis en évidence par DDC/SECO/AFM)

Mesures de mise en oeuvre

1 Renforcement de la coopération et des synergies concernant la gestion des évaluations dans la CI

1.

La DDC, le SECO et la DPDH examineront la pertinence et la faisabilité d'une harmonisation formelle des lignes directrices d'évaluation et des modèles internes.

2.

L'échange de connaissances et d'expériences entre les unités d'évaluation de la DDC, du SECO et de la DPDH est formalisé dans un comité de pilotage Évaluation.

Le Conseil fédéral est invité, en mettant à profit les synergies entre la DDC, le SECO et la DPDH, à renforcer la qualité des cahiers des charges pour l'attribution des évaluations ainsi que des processus et des outils de gestion des évaluations et d'assurance qualité et à établir des normes minimales communes.

De plus, le Conseil fédéral est invité à renforcer et institutionnaliser la collabora3.

tion et l'échange de connaissances et d'expériences des unités administratives précitées dans ces domaines.

2 Amélioration de la présentation de la méthodologie et des résultats des évaluations externes et renforcement des connaissances sur la méthodologie d'évaluation

4.

Le Conseil fédéral est invité à définir et à mettre en oeuvre des normes minimales pour la présentation de la méthodologie dans les rapports d'évaluation externe, qui permettent d'analyser réellement les résultats d'une évaluation et l'efficacité 5.

des projets de la CI.

Il est en outre prié de définir les critères de présentation des résultats dans les rapports d'évaluation externe de manière à ce que la présentation des résultats tienne toujours compte de tous les critères d'évaluation du CAD.

Enfin, il est invité à sensibiliser le personnel concerné, par exemple au moyen de formations, à l'importance de la méthodologie d'une évaluation.

Les normes minimales en matière d'évaluation existantes sont consignées dans un document commun.

La sensibilisation et le perfectionnement à l'intention des chargées et chargés de programme et du personnel des représentations à l'étranger dans le domaine de la gestion des évaluations sont approfondis au moyen de modules de formation.

La qualité des rapports d'évaluation externe (évaluations de projets) est contrôlée à l'aide d'une méta-analyse indépendante (concerne la DDC et le SECO). Les résultats de ces contrôles s'intègrent dans un processus continu d'amélioration de la pratique d'évaluation de la CI. À l'avenir, la DPDH mandatera des évaluations de processus entiers de paix ou d'initiatives diplomatiques en lieu et place des évaluations de projets.

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Recommandations de la CdG-E* (mots mis en évidence par DDC/SECO/AFM)

Mesures de mise en oeuvre

3 Formulation des recommandations dans les rapports d'évaluation externe et suivi des recommandations

6.

Les exigences posées aux évaluatrices et évaluateurs en matière de formulation et de hiérarchisation des recommandations sont concrétisées.

7.

La mise en oeuvre des mesures décidées dans le cadre des prises de position des instances responsables (Management Responses) et leur suivi (tracking) sont renforcés.

8.

Les directives internes de la DDC et les prescriptions correspondantes du SECO précisent que, à l'avenir, les évaluations mentionneront le lien entre les projets évalués et les buts supérieurs de la stratégie CI considérée.

9.

Les unités CI de la Confédération examineront les possibilités d'améliorer la pratique en matière de publication des évaluations de projets et la plateforme la plus appropriée à cet effet.

Le Conseil fédéral est invité à veiller à ce que les recommandations formulées dans les rapports d'évaluation externe s'adressent toujours à des destinataires spécifiques, à ce que les évaluateurs et les évaluatrices externes proposent une hiérarchisation de ces recommandations et à ce qu'un calendrier soit toujours défini pour leur mise en oeuvre.

Il est en outre invité à veiller à ce que les services compétents consignent systématiquement les mesures et les décisions qu'ils prennent sur la base des recommandations, de manière à en faire des instruments de conduite, et à ce que la mise en oeuvre des recommandations fasse l'objet d'un suivi systématique.

4 Référence explicite aux objectifs de la CI dans toutes les évaluations Le Conseil fédéral est invité à faire en sorte que les évaluations externes et les évaluations indépendantes tiennent compte de la réalisation des objectifs de la CI.

5 Pratique en matière de publication des évaluations Le Conseil fédéral est invité à mettre à la disposition du public, de façon claire et rapide, l'intégralité des rapports relatifs aux évaluations externes et aux évaluations indépendantes des trois unités administratives examinées.

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Recommandations de la CdG-E* (mots mis en évidence par DDC/SECO/AFM)

Mesures de mise en oeuvre

6 Compte rendu de l'efficacité de la CI au Parlement et au public

10. Les unités d'évaluation examineront la manière d'utiliser les évaluations de projets externes de façon encore plus systématique afin d'étayer les conclusions sur l'efficacité des projets de la CI. La DDC et le SECO prévoient en outre d'évaluer davantage de projets terminés afin de pouvoir tirer de meilleures conclusions sur l'efficacité et la durabilité desdits projets.

Le Conseil fédéral est invité à faire part de l'efficacité de la CI d'une manière transparente, représentative et compréhensible par le public et, en attendant que les taux de réussite reposent sur des bases correctes, à ne plus publier ces taux.

11. Le logiciel RDM de la DDC introduit en 2023 permet la saisie systématique des résultats des évaluations et, partant, des conclusions représentatives et claires sur l'efficacité de la CI suisse. À moyen terme, il est prévu de rendre les données collectées dans le cadre du RDM accessibles au public afin d'améliorer la transparence sur les activités de la DDC et sur la mise en oeuvre de la stratégie CI.

12. La DDC et le SECO continueront d'utiliser le taux de réussite à des fins internes. Lors de la publication de ce taux, les restrictions méthodologiques seront présentées en toute transparence afin d'éviter les interprétations équivoques. Le SECO continue de publier son taux de réussite comme composante du budget avec plan intégré des tâches et des finances.

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