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24.033 Message concernant la modification de la loi sur l'approvisionnement en électricité (Réserve d'électricité) du 1er mars 2024

Monsieur le Président, Madame la Présidente, Mesdames, Messieurs, Par le présent message, nous vous soumettons le projet d'une modification de la loi sur l'approvisionnement en électricité, en vous proposant de l'adopter.

Nous vous prions d'agréer, Monsieur le Président, Madame la Présidente, Mesdames, Messieurs, l'assurance de notre haute considération.

1er mars 2024

Au nom du Conseil fédéral suisse: La présidente de la Confédération, Viola Amherd Le chancelier de la Confédération, Viktor Rossi

2024-0618

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Condensé Les mesures décidées jusqu'à présent par le Conseil fédéral et le Parlement pour renforcer la sécurité de l'approvisionnement de la Suisse en électricité sont importantes, mais insuffisantes. Il est essentiel, face aux risques pour l'approvisionnement, en particulier pendant les mois d'hiver, de pouvoir mettre à disposition de l'énergie supplémentaire en cas de besoin. L'inscription d'une réserve d'électricité dans la loi vise à garantir cet approvisionnement.

Contexte Le Parlement a clôturé les débats sur la loi fédérale relative à un approvisionnement en électricité sûr reposant sur des énergies renouvelables pendant la session d'automne 2023. Cette loi prévoit déjà une réserve d'électricité, composée de centrales hydroélectriques à accumulation, d'accumulateurs et d'une réserve liée à une réduction de la consommation. Au vu des expériences et des enseignements tirés des hivers passés ainsi que des développements escomptés à l'échelle européenne et mondiale, d'autres capacités doivent venir compléter ces éléments de réserve. La durée de validité de l'ordonnance sur une réserve d'hiver en vigueur et de la réserve d'électricité constituée sur cette base est limitée à fin 2026. L'objectif de la présente révision de la loi est de créer une base légale formelle spécifique.

Une réserve d'électricité vise à accroître la résilience de l'approvisionnement. Il ne s'agit toutefois pas d'approvisionner la Suisse de manière autarcique. Outre le développement accru de la production d'électricité d'origine renouvelable et une meilleure efficacité énergétique, les importations et les exportations continueront de jouer un rôle majeur aussi bien pour des motifs économiques que pour la sécurité de l'approvisionnement. Tant que de l'électricité sera disponible en Suisse et que des importations seront possibles en quantités suffisantes, la réserve d'électricité et, partant, les centrales de réserve et les autres éléments de la réserve (voir plus loin) ne seront pas utilisés. La réserve d'électricité sera employée si le marché ne répond pas à la demande.

Contenu du projet Le renforcement de la sécurité de l'approvisionnement en électricité implique que la Suisse dispose d'une réserve d'électricité. Celle-ci se compose des éléments suivants: une réserve hydroélectrique, une réserve thermique constituée de
centrales de réserve, de groupes électrogènes de secours et d'installations de couplage chaleur-force (installations CCF) et, le cas échéant, une réserve liée à une réduction de la consommation et une réserve de stockage.

Une utilisation de la réserve d'électricité pour le marché de l'électricité est en principe exclue. À titre exceptionnel, la réserve d'électricité peut toutefois être utilisée de manière anticipée lorsqu'un recours est déclenché est qu'un supplément d'énergie est fourni à la réserve hydroélectrique depuis une centrale de réserve.

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En outre, les mesures prises au titre de la loi sur l'approvisionnement du pays (LAP) doivent être coordonnées avec la réserve d'électricité. Le texte de l'acte enjoint au Conseil fédéral et aux autorités compétentes d'harmoniser judicieusement les instruments de la réserve d'électricité et les mesures ressortant de la LAP.

En principe, les centrales de réserve doivent être exploitables avec au moins deux agents énergétiques différents (par ex. gaz et pétrole) afin de pouvoir assurer la redondance nécessaire en cas de pénurie simultanée dans l'approvisionnement en électricité et dans l'approvisionnement en gaz ou en pétrole. Par ailleurs, les centrales doivent être exploitées de manière à ne pas alourdir, dans l'ensemble, le bilan en matière de gaz à effet de serre.

L'introduction de contributions d'investissement pour les centrales CCF dans la loi sur l'énergie constitue un autre élément du projet. La production supplémentaire d'électricité à partir des installations CCF doit permettre de préserver la réserve hydroélectrique. Les installations encouragées doivent être exploitées au moyen de combustibles renouvelables. Si ce n'est pas le cas, leurs émissions de CO2 doivent être compensées. Les contributions d'investissement sont financées au moyen du supplément existant pour l'utilisation du réseau.

Il faut de plus inscrire dans la loi sur l'énergie le mandat confié à l'Office fédéral de l'énergie d'informer le public des développements actuels concernant l'approvisionnement énergétique de la Suisse. Les données nécessaires pour cela doivent lui être livrées.

Enfin, le projet permet à la Confédération de rembourser aux exploitants d'installations capables de fonctionner avec plusieurs agents énergétiques (installations bicombustibles ou multicombustibles) les dépenses supplémentaires occasionnées lorsqu'ils passent à l'autre agent énergétique sur ordre de la Confédération, doivent pour cela acquérir des droits d'émissions de CO2 supplémentaires et subissent ainsi un préjudice financier excessif.

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Table des matières Condensé

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1

Contexte 1.1 Nécessité d'agir 1.2 Mesures déjà prises 1.3 Objectifs du projet 1.4 Solutions étudiées et solution retenue 1.5 Relation avec le programme de la législature et avec le plan financier, ainsi qu'avec les stratégies du Conseil fédéral

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Consultation

10

3

Comparaison avec le droit étranger, notamment européen

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4

Présentation du projet 4.1 Règlementation proposée 4.1.1 Réserve d'électricité 4.1.2 Encouragement d'installations CCF 4.1.3 Information du public concernant l'approvisionnement actuel en énergie 4.1.4 Indemnisation des coûts pour l'achat de droits d'émissions de CO2 supplémentaires 4.2 Adéquation des moyens requis 4.3 Mise en oeuvre

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Commentaire des dispositions 5.1 Loi sur l'approvisionnement en énergie 5.2 Modification d'autres actes: loi sur le CO2 5.3 Modification d'autres actes: loi sur l'énergie

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6

Conséquences 6.1 Conséquences pour la Confédération 6.1.1 Conséquences financières et sur l'état du personnel 6.1.2 Conséquences pour le fonds alimenté par le supplément et autres conséquences 6.2 Conséquences pour les cantons et les communes, ainsi que pour les centres urbains, les agglomérations et les régions de montagne 6.3 Conséquences pour les consommateurs finaux (en particulier les ménages et les grands consommateurs) 6.4 Conséquences économiques 6.4.1 Évaluation des conséquences en lien avec la réalisation de l'objectif de zéro émission nette 6.4.2 Conséquences pour l'emploi et effets de répartition

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6.4.3 Conséquences pour les branches Conséquences sociales et environnementales

Aspects juridiques 7.1 Constitutionnalité 7.1.1 Bases juridiques 7.1.2 Compatibilité avec les droits fondamentaux 7.2 Compatibilité avec les obligations internationales de la Suisse 7.3 Forme de l'acte à adopter 7.4 Frein aux dépenses 7.5 Conformité à la loi sur les subventions 7.6 Délégation de compétences législatives 7.7 Protection des données

Loi sur l'approvisionnement en électricité (LApEI) (Réserve d'électricité) (Projet)

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Message 1

Contexte

1.1

Nécessité d'agir

D'une importance cruciale pour la Suisse, la sécurité de l'approvisionnement en électricité est au premier rang des préoccupations du Conseil fédéral. D'après un rapport de 2020 de l'Office fédéral de la protection de la population (OFPP)1, le risque le plus important pour la Suisse est celui d'une pénurie d'électricité, devant celui d'une pandémie.

Les défis pour garantir un approvisionnement sûr en électricité sont grands, en particulier en hiver, et au regard des nombreuses incertitudes: les conséquences de la guerre d'agression de la Russie contre l'Ukraine, le recul des capacités d'exportation d'électricité des pays voisins, l'influence des conditions climatiques sur la production hydraulique ou la disponibilité limitée des centrales nucléaires en France.

Fin 2021, déjà, la Commission fédérale de l'électricité (ElCom) recommandait au Conseil fédéral, dans son étude du 30 novembre 2021 intitulée «Concept relatif à des centrales à gaz destinées à couvrir les charges de pointe pour assurer la sécurité du réseau dans des situations d'urgence exceptionnelles»2, d'initier la préparation de travaux en vue de mettre en place deux ou trois centrales de réserve, pour une puissance allant jusqu'à 1000 MW. En 2023, l'ElCom a mis à jour ses analyses relatives à la sécurité de l'approvisionnement en électricité à moyen et long termes. Elle recommande sur cette base des centrales thermiques de réserve d'une capacité minimale de 400 MW pour l'année 2025 et de 700 à 1400 MW à partir de 2030. Compte tenu des grandes incertitudes existantes, l'ElCom estime qu'une procédure par étapes est judicieuse, car elle permet le cas échéant d'adapter le développement des réserves.

1.2

Mesures déjà prises

Le Conseil fédéral mise sur plusieurs piliers pour renforcer la sécurité de l'approvisionnement en électricité: on peut notamment citer un développement rapide et systématique des énergies renouvelables indigènes, une efficacité électrique accrue et un développement ou une modernisation des réseaux électriques.

Un nouvel art. 8a a été introduit dans la loi du 23 mars 2007 sur l'approvisionnement en électricité (LApEl)3 dans le cadre de la loi fédérale du 29 septembre 2023 relative à un approvisionnement en électricité sûr reposant sur des énergies renouvelables4 que le Parlement a approuvée. Une demande de référendum a cependant abouti depuis 1 2 3 4

OFPP, 2020: 3e édition de l'analyse nationale des risques «Catastrophes et situations d'urgence en Suisse».

Consultable sous www.elcom.admin.ch > Documentation > Rapports et études > Sécurité de l'approvisionnement et affaires internationales.

RS 734.7 FF 2023 2301

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lors. L'al. 1 de cette disposition prévoit qu'une réserve d'énergie est constituée chaque année, à titre d'assurance, pour parer aux situations exceptionnelles touchant par exemple de manière critique le marché de l'électricité ou les réseaux. Conformément à l'al. 2 de cet article, participent à la constitution de la réserve d'énergie, à titre obligatoire, les exploitants des centrales à accumulation d'une capacité de stockage supérieure ou égale à 10 GWh qui conservent de l'eau. Le Conseil fédéral a décidé début 2022 d'anticiper par voie d'ordonnance une réserve d'énergie sous la forme d'une réserve hydroélectrique afin qu'elle soit disponible dès l'hiver 2022­2023. Il a mis l'ordonnance concernée en vigueur le 1er octobre 20225.

La situation en matière d'approvisionnement s'étant encore détériorée à partir de l'été 2022, le Conseil fédéral a accéléré la planification des capacités de la réserve thermique et étendu la base légale en édictant l'ordonnance du 25 janvier 2023 sur une réserve d'hiver (OIRH)6. Entrée en vigueur le 15 février 2023, l'OIRH a effet jusqu'au 31 décembre 2026. Elle réglemente le recours à la réserve hydroélectrique et à une réserve complémentaire constituée de centrales de réserve, de pools de groupes électrogènes de secours et d'installations de couplage chaleur-force (installations CCF).

L'OIRH se fonde sur les art. 9 et 30, al. 2, LApEl ainsi que sur les art. 5, al. 4, et 38, al. 2, de la loi du 17 juin 2016 sur l'approvisionnement du pays (LAP)7 Une installation temporaire de l'entreprise General Electric, d'une puissance de 250 MW, a été mise en service en mars 2023 à Birr (AG). La Confédération a en outre signé un contrat pour la centrale thermique existante du Groupe E SA à Cornaux (NE) et dont la puissance peut atteindre 36 MW. À l'instar de celle de Birr, cette centrale est exploitable en tant qu'installation bicombustible (gaz naturel ou huile de chauffage extra-légère). La troisième centrale de réserve, sous contrat jusqu'au printemps 2026, est la centrale à cycle combiné de la Compagnie industrielle de Monthey SA, qui fonctionne au gaz naturel et dont la puissance maximale est de 50 MW. Des appels d'offres seront organisés pour de nouvelles centrales de réserve. Le but est de trouver les sites et les exploitants les plus adéquats et d'acquérir la puissance
nécessaire auprès des centrales au meilleur rapport coût/bénéfice. En raison des longues procédures de planification et d'autorisation, l'Office fédéral de l'énergie (OFEN) a lancé en juillet 2023 déjà un premier appel d'offres de l'ordre de 400 MW sur la base de l'OIRH.

La Confédération a également conclu des contrats avec des pools de groupes électrogènes de secours (agrégateurs). Ceux-ci sont chargés de coordonner sur mandat de la Confédération une centrale de réserve nationale virtuelle, composée de groupes électrogènes de secours. Les détenteurs de ces derniers les mettent à disposition volontairement contre une indemnisation. Ils peuvent s'annoncer depuis l'automne 2022 auprès des agrégateurs. Le but est de conclure des contrats pour des groupes électrogènes de secours d'une puissance totale d'environ 280 MW.

Comme aucune décision n'a encore été prise concernant la base légale prévue pour la réserve thermique, les responsables de projet potentiels sont dans l'incertitude concernant la couverture des coûts qu'ils encourront pour l'élaboration du projet et les prestations préalables nécessaires. Afin de les prémunir contre ce risque, le Conseil 5 6 7

RO 2022 514 RS 734.722 RS 531

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fédéral a intégré une prise en charge des coûts correspondante dans l'OIRH. Cette adaptation de l'ordonnance est entrée en vigueur le 1er février 2024.

Étant donné que l'OIRH arrive à échéance fin 2026 et que la loi fédérale susmentionnée relative à un approvisionnement sûr reposant sur des énergies renouvelables ne comprend qu'une première partie de la réserve d'électricité, la réserve thermique doit être inscrite dans une base légale formelle spécifique à durée illimitée. Le Conseil fédéral a ouvert à cet effet une consultation sur une révision correspondante de la LApEl, qui s'est déroulée du 28 juin au 20 octobre 2023. Après en avoir évalué les résultats, il soumet le présent message au Parlement.

1.3

Objectifs du projet

L'objectif de la réserve d'électricité est d'augmenter la résilience de l'approvisionnement en électricité et de contribuer à éviter ou à atténuer autant que possible toute pénurie. Il ne s'agit pas d'assurer un approvisionnement autonome de la Suisse. Tant que de l'électricité est disponible dans le pays et que des importations sont possibles en quantité suffisante, la réserve d'électricité n'est pas utilisée. Elle est donc une assurance pour les cas d'urgence et n'est employée, en principe, que si le marché ne répond pas à la demande.

Les principaux objectifs de la présente révision peuvent être formulés comme suit: 1) Ajout des éléments «centrales de réserve», «groupes électrogènes de secours», «installations CCF» et, éventuellement, «accumulateurs» dans les bases légales relatives à la réserve d'électricité D'après le texte de la loi fédérale du 29 septembre 2023 relative à un approvisionnement en électricité sûr reposant sur des énergies renouvelables qui a été soumis au vote final, la réserve d'électricité repose actuellement sur des centrales hydroélectriques à accumulation, des accumulateurs et des baisses de consommation. La réserve thermique, qui englobe des centrales de réserve, des groupes électrogènes de secours et des installations CCF, ne s'appuie que sur une ordonnance, à savoir l'OIRH, dont les dispositions sont limitées jusqu'à fin 2026. La présente révision de la LApEl vient donc réglementer la réserve thermique au niveau de la loi. Ainsi, toutes les capacités de réserve se fonderont sur une base légale spécifique à durée illimitée, ce qui renforcera la sécurité d'approvisionnement à long terme.

2) Allégements possibles des prescriptions de l'ordonnance sur la protection de l'air et des prescriptions d'exploitation cantonales pour les centrales de réserve et les groupes électrogènes de secours Pour assurer la sécurité de l'approvisionnement en électricité, le présent projet fournit des instruments juridiques qui permettent l'exploitation de centrales de réserve et de groupes électrogènes de secours en allégeant, le cas échéant, les prescriptions de l'ordonnance du 16 décembre 1985 sur la protection de l'air (OPair)8. En général, les centrales thermiques de réserve ne peuvent pas respecter toutes les exigences liées aux 8

RS 814.318.142.1

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valeurs limites en matière de gaz d'échappement et de bruit. Par ailleurs, l'OPair limite de manière générale la durée d'exploitation des groupes électrogènes de secours à 50 heures par an. Plusieurs dispositions cantonales ont encore réduit cette durée d'exploitation maximale autorisée.

3) Prise en compte d'autres coûts imputables en lien avec la réserve d'électricité Énergie d'ajustement: en cas de recours à la réserve thermique, il peut arriver que l'installation de production ne puisse produire de l'énergie pour diverses raisons. La différence est facturée aux groupes-bilan en tant qu'énergie d'ajustement et peut être très coûteuse. Il est donc prévu que le Conseil fédéral peut régler, au dans les dispositions d'exécution, dans quels cas les coûts de l'énergie d'ajustement correspondants sont supportés par l'exploitant de la centrale et dans quels cas ils s'ajoutent aux coûts d'exploitation imputables du réseau de transport via l'indemnisation en cas de recours à la réserve.

Coûts pour la compensation des émissions de CO2: c'est également par la rémunération pour l'utilisation du réseau que seront financés les coûts qui incombent aux exploitants de centrales de réserve, de groupes électrogènes de secours et d'installations CCF conformément à la législation sur le CO2 et aux dispositions d'exécution du Conseil fédéral pour la compensation des émissions de CO2 occasionnées par le recours à leur réserve. Ces dépenses font partie des coûts d'exploitation et sont en conséquence compensées par l'indemnisation en cas de recours à la réserve. Les exploitants d'installations bicombustibles ou multicombustibles qui sont soumis au système d'échange de quotas d'émission (SEQE) sont ainsi placés sur un pied d'égalité avec ceux qui ne le sont pas.

4) Traitement des liens entre la réserve d'électricité et les mesures relevant de la LAP En cas de grave pénurie d'électricité, déclarée ou imminente, le Conseil fédéral peut prendre des mesures au titre de la LAP pour garantir l'approvisionnement. Les instruments offerts par la réserve d'électricité et l'approvisionnement économique du pays se complètent en principe et ne s'excluent dès lors pas mutuellement. Le présent projet demande au Conseil fédéral et aux autorités compétentes de coordonner judicieusement les instruments de la réserve d'électricité et les
mesures relevant de la LAP.

5) Encouragement des installations CCF Le 3 mai 2023, le Conseil national a accepté la motion 23.3022 «Garantie de l'approvisionnement en électricité en hiver grâce à des installations CCF», transmise par la Commission de l'environnement, de l'aménagement du territoire et de l'énergie du Conseil national. La Commission de l'environnement, de l'aménagement du territoire et de l'énergie du Conseil des États (CEATE-E) a également accepté la motion le 1er février 2024. Cette motion charge le Conseil fédéral d'inscrire dans le présent projet de loi l'encouragement des installations CCF. Cet encouragement a pour but de ménager les réservoirs d'eau existants en produisant de l'électricité supplémentaire en hiver. Les installations au bénéfice de l'encouragement ne peuvent toutefois pas participer en même temps à la réserve, à l'instar de ce que prévoit l'art. 7, al. 3, OIRH.

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1.4

Solutions étudiées et solution retenue

Dans son étude «Concept relatif à des centrales à gaz destinées à couvrir les charges de pointe pour assurer la sécurité du réseau dans des situations d'urgence exceptionnelles», l'ElCom décrit plusieurs solutions alternatives aux centrales de réserve (ch. 3). Même si ces solutions sont susceptibles de réduire en partie les risques, l'ElCom considère que la mise à disposition de centrales de réserve est inévitable. En 2023, elle a mis à jour ses analyses relatives à la sécurité de l'approvisionnement en électricité à moyen et long termes et recommande sur cette base des centrales thermiques de réserve d'une capacité minimale de 400 MW pour l'année 2025 et de 700 à 1400 MW à partir de 2030.

Pour cette raison, le Conseil fédéral demande une extension et, dans le même temps, une modification des art. 8a, 15 et 15a LApEl, ainsi que l'ajout des nouveaux art. 8b à 8n à la LApEl.

De plus, un nouvel art. 19b doit être intégré dans la loi du 23 décembre 2011 sur le CO29. Les modifications apportées à la loi du 30 septembre 2016 sur l'énergie (LEne)10 comprennent l'ajout d'un nouvel art. 55a et la modification de l'art. 56 existant.

1.5

Relation avec le programme de la législature et avec le plan financier, ainsi qu'avec les stratégies du Conseil fédéral

Le 24 janvier 2024, le Conseil fédéral a adopté le message sur le programme de la législature 2023 à 2027. Le présent objet est ancré comme mesure dans le programme de la législature 2023 à 2027 sous l'objectif 25 «La Suisse assure la sécurité et la stabilité de l'approvisionnement énergétique et encourage le développement de la production indigène d'énergie renouvelable». Concrètement, il est prévu dans le programme de la législature que le Conseil fédéral adopte le message concernant la modification de la loi sur l'approvisionnement en électricité durant la première moitié de la législature.

Le projet complète la réserve d'électricité établie dans la loi relative à un approvisionnement en électricité sûr reposant sur des énergies renouvelables. Cette réserve contribue à maintenir en Suisse une sécurité élevée de l'approvisionnement en électricité, qui figure parmi les objectifs de la Stratégie énergétique 2050.

2

Consultation

Le Conseil fédéral a mené entre le 28 juin et le 20 octobre 2023 une consultation sur la révision correspondante de la LApEl. Le projet mis en consultation comprenait également de nouvelles dispositions de la LEne sur l'encouragement des installations 9 10

RS 641.71 RS 730.0

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CCF et l'information du public concernant l'approvisionnement en énergie actuel ainsi que de nouvelles dispositions de la loi sur le CO2 relatives au remboursement des coûts liés aux droits d'émission de CO2 des installations bicombustibles ou multicombustibles. Au total, 96 avis ont été reçus. La plupart des participants à la consultation (cantons, Conférence des directeurs cantonaux de l'énergie [EnDK], Conférence suisse des directeurs cantonaux des travaux publics, de l'aménagement du territoire et de l'environnement [DTAP], Les Libéraux-Radicaux [PLR], l'Union démocratique du centre [UDC], le Centre et le secteur de l'électricité) ont salué la révision proposée de la LApEl, car elle consolide l'approvisionnement en électricité dans des situations extraordinaires. Les VERT-E-S et les associations de protection de l'environnement (dont le WWF et Birdlife) s'y opposent, car la crise climatique ne permet pas d'investir dans des infrastructures destinées aux énergies fossiles. La majorité des cantons, l'EnDK/la DTAP ainsi que la Conférence des chefs des services de la protection de l'environnement ont demandé que la norme de délégation, qui permet au Conseil fédéral d'accorder des assouplissements des prescriptions de l'OPair et des prescriptions cantonales d'exploitation, soit limitée à fin 2026 au plus tard. D'autres participants à la consultation doutent que des centrales de réserve soient fondamentalement nécessaires. Le Parti socialiste, notamment, réclame un développement accru des énergies renouvelables, des investissements plus conséquents dans l'efficacité énergétique et un accord sur l'électricité avec l'Union européenne (UE). Les coûts élevés de la réserve d'électricité sont critiqués. À titre d'alternative, une réserve liée à une réduction de la consommation est demandée, car elle serait sensiblement plus avantageuse que les nouvelles centrales de réserve. Les avis sont partagés quant à l'encouragement des installations CCF. Ses opposants soulignent les rejets de CO2 de ces dernières et le fait que le fonds alimenté par le supplément n'est pas prévu pour encourager les installations fonctionnant avec des énergies fossiles. Selon l'UDC, les générateurs de secours décentralisés devraient être mieux intégrés dans le projet, par exemple en abrogeant la limite d'exploitation de 50 heures par
an en cas de pénurie d'électricité.

Compte tenu des critiques formulées sur la structure des nouvelles dispositions par rapport à la systématique, la réserve d'électricité dispose désormais de sa propre section dans la loi, et la subdivision des différentes prescriptions est plus claire. Lors de ce remaniement, plusieurs normes de délégation prévues dans le projet présenté en consultation ont été transférées dans des dispositions matérielles. Le contenu, l'objectif et la portée d'autres normes de délégation ont été précisés. En outre, certains éléments de l'OIRH sont mieux illustrés dans la base légale.

Sur le fond, les changements par rapport au projet mis en consultation sont minimes.

Il convient de souligner le nouveau soutien financier possible pour l'aménagement ultérieur (destiné au respect de l'OPair) des groupes électrogènes de secours participant à la réserve d'électricité (dans le cadre des coûts d'exploitation imputables du réseau de transport).

La demande visant à ce que la réserve liée à une réduction de la consommation fasse impérativement partie de la réserve d'électricité n'a pas été reprise. Le texte de loi reste donc ouvert en la matière. Il laisse au Conseil fédéral le soin de prévoir les éléments de la réserve d'électricité qui seront ou non constitués. Le 28 juin 2023, le Conseil fédéral a décidé en l'espèce de renoncer provisoirement à intégrer une réserve liée 11 / 44

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à une réduction de la consommation dans l'OIRH, car les dispositions requises seraient complexes et, selon leur conception, pourraient avoir des interactions néfastes avec les mesures d'efficacité, les mesures d'économie volontaires, les produits du marché et les mesures relevant de la LAP. En attendant, le Département fédéral de l'énergie, des transports, de l'environnement et de la communication (DETEC) et l'ElCom ont invité le secteur à développer et à proposer des produits correspondants destinés à cette réserve.

3

Comparaison avec le droit étranger, notamment européen

La réglementation proposée complète la réserve d'énergie resp. la réserve hydroélectrique contenue dans la loi, constituée pour empêcher les pénuries critiques durant l'hiver, en y ajoutant d'autres éléments (centrales de réserve, groupes électrogènes de secours et installations CCF). Tant qu'il n'y a pas d'accord sur l'électricité, le droit sectoriel de l'UE concernant l'électricité n'est pas applicable en Suisse. En principe, les mesures prévues ne sortent cependant pas du cadre des prescriptions du droit européen. En effet, l'art. 21, par. 3, du règlement (UE) 2019/94311 dispose également que les réserves stratégiques constituées et gérées en dehors du marché habituel de l'électricité doivent servir d'instrument prioritaire pour prévenir les situations critiques sur le plan de l'approvisionnement. En outre, les règles de l'UE en matière d'aides d'État sont applicables. L'UE est relativement stricte en ce qui concerne la nécessité de telles mesures; des analyses précises des besoins incluant les pays voisins sont nécessaires. Une réflexion approfondie sur la structure et le dimensionnement de l'ensemble de la réserve d'électricité devrait avoir lieu dans le cadre des négociations relatives à un accord sur l'électricité. De nombreux arguments plaident en faveur de la compatibilité de la réserve d'électricité suisse avec le droit européen.

4

Présentation du projet

4.1

Règlementation proposée

4.1.1

Réserve d'électricité

Le nouvel art. 8a pour la constitution d'une réserve d'énergie a été introduit dans la LApEl dans le cadre de la loi fédérale relative à un approvisionnement en électricité sûr reposant sur des énergies renouvelables que le Parlement a approuvée. Avec le présent projet, le Conseil fédéral entend élargir cette réserve d'énergie en y incluant des centrales de réserve, des groupes électrogènes de secours et des installations CCF.

Des prescriptions sont prévues concernant l'utilisation de la réserve et le recours à celle-ci ainsi que l'ordre et le volume des réserves qui sont utilisées. Sur la base de

11

Règlement (UE) 2019/943 du Parlement européen et du conseil du 5 juin 2019 sur le marché intérieur de l'électricité, JO L 158 du 14.6.2019, p. 54.

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l'OIRH, l'ElCom a fixé dans une directive12 les interactions entre les éléments de la réserve d'électricité et le moment de la disponibilité opérationnelle des réserves. Le type de situation d'approvisionnement et la disponibilité des différentes réserves d'électricité jouent un rôle important.

Dimensionnement Le Conseil fédéral peut imposer des limites inférieures et supérieures pour le dimensionnement de la réserve d'électricité et de ses éléments. L'ElCom décide du dimensionnement concret en accord avec l'OFEN, à l'aide d'analyses des risques qui se fondent sur des études sur l'adéquation du système. Cela englobe également des estimations de la production hivernale en cas de scénarios de crise aiguë portant sur la disponibilité de la production en Suisse et dans les pays voisins. Le dimensionnement de la réserve d'électricité se base entre autres sur des calculs concernant la couverture de la consommation avec des hypothèses sur la disponibilité des centrales nucléaires, la demande en électricité, le développement des énergies renouvelables, l'évolution des importations d'électricité et la disponibilité du gaz en Europe. Il faut procéder au dimensionnement de manière séparée pour la réserve hydroélectrique et pour la réserve thermique. Une puissance allant jusqu'à 1000 MW au total a été fixée pour la réserve thermique dans l'actuelle OIRH. Les dimensions de la réserve d'électricité peuvent être modifiées en fonction de l'évolution de la situation. Par exemple, l'ElCom a mis à jour en 2023 ses analyses relatives à la sécurité de l'approvisionnement à moyen et long termes et recommande sur cette base des centrales thermiques de réserve d'une capacité minimale de 400 MW pour l'année 2025 et de 700 à 1400 MW à partir de 2030. Compte tenu des grandes incertitudes, elle estime qu'une procédure par étapes est judicieuse, car elle permet le cas échéant d'adapter le développement des réserves. Le DETEC planifie donc de procéder par étapes, afin de pouvoir tenir compte des nouveaux développements et adapter le dimensionnement.

Réserve hydroélectrique Conformément à la loi fédérale relative à un approvisionnement en électricité sûr reposant sur des énergies renouvelables, les exploitants de centrales hydroélectriques à accumulation doivent obligatoirement participer à la constitution de la réserve
hydroélectrique et percevront pour cela une indemnité forfaitaire modérée. Après l'entrée en vigueur de la loi fédérale susmentionnée (prévue au 1er janvier 2025), il n'y aura donc plus d'appels d'offres pour la réserve hydroélectrique. La société nationale du réseau de transport conclura des contrats directement avec les exploitants. En accord avec l'OFEN, l'ElCom définit le dimensionnement de la réserve hydroélectrique.

Centrales de réserve À ce jour, les centrales de réserve sont seulement prévues dans l'OIRH et ne sont pas mentionnées dans la LApEl ni dans la révision de cette dernière. Tandis que la réserve hydroélectrique se limite à conserver l'énergie dans des lacs d'accumulation, les centrales de réserve apportent, en tant que partie intégrante de la réserve thermique, une puissance et une énergie supplémentaires dans le système électrique. Les centrales 12

Cf. directive 2/2023 de l'ElCom «Consignes pour le recours aux centrales de la réserve hivernale»: www.elcom.admin.ch > Documentation > Directives.

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participant à la réserve peuvent fonctionner au gaz ou avec d'autres agents énergétiques. Les centrales de réserve sont utilisées uniquement pour la réserve et ne doivent pas produire d'électricité pour le marché. Le fait que les centrales de réserve ne soient prévues que dans l'OIRH comme partie de la réserve est problématique à long terme.

En effet, la durée de validité de cette ordonnance est limitée au 31 décembre 2026 (art. 30 OIRH).

Groupes électrogènes de secours et installations CCF Les groupes électrogènes de secours et les petites installations CCF ne sont à ce jour, eux aussi, prévus que dans l'OIRH et pas dans la LApEl. L'expression «groupes électrogènes de secours» désigne aussi des moteurs à combustion stationnaires servant à produire de l'électricité. Selon l'OPair, les groupes électrogènes de secours ne peuvent être utilisés que 50 heures par an au maximum. Ces limitations impliquent, pour les groupes électrogènes de secours, des exigences moins strictes que pour les moteurs à combustion stationnaires dont la durée de fonctionnement dépasse 50 heures par an.

Dans la mesure du possible, il faudrait que les groupes électrogènes de secours participant à la réserve d'électricité soient améliorés pour être au même niveau que les moteurs stationnaires. Cela requiert une mise à niveau technique pour correspondre aux moteurs à combustion stationnaires visés à l'annexe 2, ch. 82, OPair. L'utilisation de groupes électrogènes de secours et d'installations CCF peut contribuer au renforcement de la sécurité de l'approvisionnement en électricité. Ces installations seront regroupées pour former un pool. Le problème inhérent à la validité limitée de l'OIRH se pose de la même manière pour les groupes électrogènes de secours et les installations CCF.

Allégements des prescriptions de l'OPair et des prescriptions d'exploitation cantonales pour les centrales de réserve et les groupes électrogènes de secours Ainsi que l'ont montré les premières expériences réalisées lors de la constitution d'une réserve thermique pour l'hiver 2022­2023, différents obstacles s'opposent à la mise à disposition urgente d'électricité tant au niveau du droit fédéral que du droit cantonal.

Pour les centrales de réserve (actuellement les trois installations de Birr, Cornaux et Monthey), les exigences relatives aux valeurs
limites d'émission de l'OPair et aux valeurs limites de bruit ne peuvent pas être respectées à moyen terme la plupart du temps.

Les groupes électrogènes de secours sont confrontés au fait que l'OPair prescrit une limitation générale de leur durée d'exploitation de 50 heures par an au maximum. À cela s'ajoute que différentes dispositions cantonales ont encore réduit cette durée maximale autorisée. Afin de permettre aux groupes électrogènes de secours participant à la réserve thermique d'être tout de même mis en service en cas d'urgence, le Conseil fédéral peut faire entrer en vigueur l'ordonnance relative à l'exploitation de centrales de réserve et de groupes électrogènes de secours le cas échéant. En cas de pénurie d'électricité imminente ou déclarée, son entrée en vigueur supprimerait temporairement les valeurs limites prescrites par l'OPair ainsi que la limitation du nombre d'heures d'exploitation pour ces installations.

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Ces deux exemples illustrent que selon les cas, le Conseil fédéral a besoin d'instruments juridiques pour assurer la sécurité de l'approvisionnement en électricité et permettre l'exploitation de centrales de réserve et de groupes électrogènes de secours.

Pour l'instant, les exceptions nécessaires se fondent sur les art. 32, al. 1 et 2, let. a, et 34 LAP. Avec le nouvel art. 8n, al. 2, LApEl, le Conseil fédéral devra pouvoir s'appuyer sur une réglementation sectorielle se référant spécifiquement aux centrales de réserve, aux groupes électrogènes de secours et aux installations CCF participant à la réserve d'électricité. Les conditions auxquelles le Conseil fédéral peut accorder certains allégements sur la base de cette disposition dérogatoire sont toutefois délibérément formulées de manière restrictive.

Réserve liée à une réduction de la consommation Au lieu de développer les capacités des centrales de réserve, une réserve liée à une réduction de la consommation a été réclamée lors de la consultation, car elle devrait être sensiblement plus avantageuse que de nouvelles centrales de réserve. Elle était déjà prévue à l'art. 8a de la version révisée de la LApEl, dont le texte final a été approuvé par le Parlement le 29 septembre 2023. Lors de la consultation sur l'OIRH à l'automne 2022, il avait déjà été demandé d'examiner si la mise aux enchères de la réduction de la demande était plus avantageuse à réaliser que le recours aux centrales de réserve pour assurer la sécurité d'approvisionnement, et si une telle mise aux enchères pourrait être mise en place en prévision de l'hiver 2023­2024. Plusieurs participants à la consultation ont aussi demandé que les charges interruptibles soient utilisées en tant que réserve liée à une réduction de la consommation. Lors de l'examen mené par la suite, il s'est avéré que les règles nécessaires pour cela seraient très complexes, notamment s'il faut exclure des interactions négatives avec des mesures d'économie volontaires et des produits du marché. Des interactions négatives pourraient aussi apparaître avec des mesures d'efficacité et les mesures relevant de la LAP. Le Conseil fédéral considère qu'il est plus efficace que la branche de l'électricité propose ce genre de produits sur le marché. Des règles en ce sens figurent dans la loi sur un approvisionnement en
électricité sûr reposant sur des énergies renouvelables (simplifications pour des tarifs dynamiques, conditions-cadres pour une réglementation des flexibilités). Le Conseil fédéral a donc renoncé à des dispositions complémentaires dans le cadre du présent projet.

Interactions entre la réserve d'électricité et les mesures relevant de la LAP En cas de pénurie d'électricité grave, déclarée ou imminente, à laquelle l'économie ne peut remédier par ses propres moyens, le Conseil fédéral peut mettre en vigueur des mesures visées par la LAP afin de garantir l'approvisionnement. La LAP offre les bases légales permettant de mettre en oeuvre une large palette de mesures différentes.

Les instruments offerts par la réserve d'électricité et l'approvisionnement économique du pays se complètent en principe et ne s'excluent dès lors pas mutuellement. En vertu du présent projet, le Conseil fédéral est tenu de coordonner de manière judicieuse les différents instruments.

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4.1.2

Encouragement d'installations CCF

Les installations CCF peuvent contribuer à produire de l'électricité en hiver. Il est donc prévu que leur développement sera encouragé à l'aide de contributions d'investissement d'un montant maximal de 20 millions de francs par an, afin de pouvoir ménager d'autres sources d'énergie grâce à cette production d'électricité supplémentaire.

Les installations encouragées doivent être exploitées au moyen de combustibles renouvelables, ou, à défaut, leurs émissions de CO2 doivent être compensées. Cet encouragement est financé au moyen du fonds alimenté par le supplément et requiert 0,04 ct./kWh. Le supplément de 2,3 ct./kWh perçu sur le réseau n'augmente pas.

Comme les installations CCF produisent simultanément de la chaleur, l'encouragement proposé pour ces installations est soumis à la condition que la chaleur sera obligatoirement utilisée (et donc prélevée). Cela présuppose que les installations soutenues soient exploitées en mode «chaleur» et donc utilisées exclusivement en fonction du besoin en chaleur des consommateurs. L'électricité ainsi produite est injectée dans le réseau public ou utilisée pour couvrir les propres besoins en électricité. La situation est différente pour les installations CCF utilisées comme centrales de réserve, qui doivent être exploitées en mode «électricité», en fonction des valeurs de la demande en électricité. L'installation peut ainsi fournir une prestation utile au réseau, qu'il s'agisse de la participation au marché de l'énergie de réglage ou du stockage d'énergie en tant que centrale de réserve.

Dans le cadre de l'encouragement des installations CCF, il a été renoncé à un examen approfondi d'une possible utilisation des technologies de captage et de stockage du CO2 (CSC). De telles installations pourront être utilisées lorsque les émissions de CO2 ne peuvent entièrement être évitées, comme cela est le cas de la combustion des déchets dans les usines d'incinération des ordures ménagères (UIOM). Cette technologie n'est toutefois pas encore suffisamment mûre pour être mise sur le marché. L'Association suisse des exploitants d'installations de traitement des déchets a conclu avec la Confédération un accord de branche la dispensant de participer au SEQE, accord qui l'oblige à investir dans le déploiement de technologies CSC jusqu'en 2030. En règle générale, les UIOM
injectent la chaleur qu'elles produisent dans des réseaux de chaleur à distance équipés de chaudières fonctionnant avec des énergies fossiles et destinées à couvrir la charge de pointe. Grâce à l'encouragement prévu, ces chaudières pourront être remplacées par des installations CCF qui n'alourdissent pas, dans l'ensemble, le bilan en matière de gaz à effet de serre.

La majorité des avis émis lors de la consultation étaient opposés à l'encouragement des installations CCF, du fait notamment de leurs émissions de CO2 et parce que le fonds alimenté par le supplément n'est pas destiné à encourager des installations fossiles (cf. chap. 2). Toutefois, le Conseil fédéral a laissé cet élément dans le projet compte tenu de la motion de la CEATE-N «Garantie de l'approvisionnement en électricité en hiver grâce à des installations CCF» (23.3022), adoptée par le Conseil national le 3 mai 2023. À l'unanimité, la CEATE-E propose à sa chambre d'adopter également la motion. Cette dernière charge le Conseil fédéral d'introduire l'encouragement des installations CCF dans le présent projet de loi.

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4.1.3

Information du public concernant l'approvisionnement actuel en énergie

Par une autre modification de la LEne, l'OFEN est mandaté pour informer le public de la situation actuelle et des développements en cours de l'approvisionnement énergétique de la Suisse. Cela comprend notamment l'information sur les indicateurs importants de la sécurité d'approvisionnement tels que la consommation et la production d'énergie. La population et l'économie reçoivent ainsi des informations à jour sur la situation de l'approvisionnement en énergie en Suisse en général ainsi que sur la transformation en cours de l'approvisionnement en énergie. Il est par exemple envisageable de fournir des informations sur les gains d'efficacité énergétique et les économies réalisées en matière de demande d'énergie, des objectifs cruciaux dans le cadre de la transformation du système énergétique. En ce qui concerne la sécurité d'approvisionnement, il est possible de sensibiliser la population et l'économie aux fluctuations des prix de l'énergie ainsi qu'aux mesures d'économie d'énergie nécessaires, et ce, pour toutes les sources d'énergie. Ces informations sont jugées importantes et sont attendues par la population, comme l'a démontré l'hiver 2022.

Il convient de distinguer le devoir d'information de l'OFEN de celui de l'ElCom (art. 22 LApEl) ou encore de celui de l'Office fédéral de l'approvisionnement économique du pays (OFAE; art. 57 LAP en relation avec l'art. 1 LAP). Alors que l'ElCom observe et surveille l'évolution des marchés de l'électricité en vue d'assurer un approvisionnement sûr et abordable dans toutes les régions du pays, informe sur ses activités et rend compte une fois par an au Conseil fédéral, l'information fournie par l'OFEN est plus exhaustive, ne se limitant pas uniquement aux marchés de l'électricité. Les informations potentiellement nécessaires concernant les marchés de l'électricité sont ainsi échangées entre les deux institutions afin d'éviter tout doublon inutile. De plus, contrairement à celle de l'OFAE, l'information de l'OFEN est permanente, peu importe que la situation en matière d'approvisionnement en énergie soit normale ou tendue. L'OFAE quant à lui informe uniquement en cas de menace imminente d'une pénurie grave ou en cas de survenance de celle-ci. Cette tripartition a fait ses preuves durant l'hiver 2022.

Pour mener à bien sa mission d'information, l'OFEN doit disposer
d'un accès complet aux données correspondantes. Une base de données de bonne qualité est importante en particulier en situation de crise ou à ses prémices. Elle permet au Conseil fédéral et à l'administration fédérale d'évaluer de manière fondée la situation de l'approvisionnement, l'efficacité des mesures prises et la nécessité d'agir. Elle lui permet aussi de montrer l'efficacité des efforts fournis par la population et l'économie. Aujourd'hui, les bases légales pour l'accès aux données sont rares, raison pour laquelle l'OFEN compte sur les initiatives volontaires des acteurs concernés. Les travaux concernant le dashboard de l'énergie de la Confédération13, notamment, ont montré que la situation actuelle n'est pas favorable à un accès efficace et rapide aux données.

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www.energiedashboard.admin.ch

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4.1.4

Indemnisation des coûts pour l'achat de droits d'émissions de CO2 supplémentaires

Enfin, le projet de loi prévoit que la Confédération peut indemniser les exploitants d'installations capables de passer d'un agent énergétique à un autre (installations bicombustibles ou multicombustibles) pour les dépenses occasionnées, s'ils passent à l'autre agent énergétique sur ordre de la Confédération, doivent pour cela acquérir des droits d'émissions de CO2 supplémentaires et subissent ainsi un préjudice financier excessif. Ce point concerne notamment un passage du gaz au pétrole. Ces exploitants sont dès lors placés sur un pied d'égalité avec ceux qui ne sont pas soumis au SEQE.

4.2

Adéquation des moyens requis

Compte tenu des coûts attendus, selon l'OFPP, en cas de pénurie d'électricité (cf.

ch. 1.1), les dépenses pour la présente procédure législative ainsi que pour la mise en oeuvre des nouvelles dispositions légales et les coûts qui en découleront pour la population et l'économie sont acceptables.

4.3

Mise en oeuvre

Concernant les prescriptions d'exécution pour la réserve d'électricité, il est possible de se référer à l'OIRH en vigueur, dont les dispositions devront cependant être actualisées après l'entrée en vigueur de la révision en cours de la loi fédérale relative à un approvisionnement en électricité sûr reposant sur des énergies renouvelables et du présent projet.

5

Commentaire des dispositions

5.1

Loi sur l'approvisionnement en énergie

Remplacement d'une expression L'expression «réserve d'énergie» était utilisée dans les bases légales créées dans la LApEl dans le cadre de la loi fédérale relative à un approvisionnement en électricité sûr reposant sur des énergies renouvelables (ci-après révision de la LApEl de 2023).

Elle est désormais remplacée par l'expression «réserve d'électricité», plus précise.

Cette dernière a déjà été utilisée dans l'OIRH et fait donc partie du vocabulaire spécialisé.

Il convient également de préciser ici que les dispositions légales créées à la suite de la révision de la LApEl de 2023 concernant la réserve d'électricité comportent certaines modifications en grande partie formelles. Du fait de l'extension des prescriptions de la loi, l'objet de la norme est si étendu qu'il mérite d'avoir sa propre section dans l'ordonnance. Dans le cadre de cette adaptation formelle, une correction terminologique est également apportée en lien avec les centrales de réserve, les groupes électrogènes de secours et les installations CCF. L'OIRH parle de «réserve complémen18 / 44

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taire». Cet élément de la réserve d'électricité est appelé désormais «réserve thermique».

Coordination nécessaire avec d'autres révisions de la loi Les présentes adaptations de la LApEl se basent sur la révision de la LApEl de 2023, en particulier sur son art. 8a («Réserve d'énergie pour les situations d'approvisionnement critiques») et son art. 8b («Saisie et transmission des données sur les lacs d'accumulation»). Parallèlement à la présente révision, un nouvel art. 8a LApEl («Protection contre les cybermenaces») est prévu dans le cadre de la modification de loi fédérale du 18 décembre 2020 sur la sécurité de l'information (LSI; ch. II/4; FF 2023 2296)14.

Comme indiqué dans la révision de la LApEl de 2023 (voir notes de bas de page 17 et 18), il est prévu que les deux dispositions précitées de la présente révision soient insérées à la suite de l'art. 8a LApEl tel qu'il est prévu dans la révision de la LSI et deviendront les art. 8b et 8c.

Après l'entrée en vigueur des trois révisions, la structure de la loi devrait se présenter, dans le deuxième chapitre («Garantie et sécurité de l'approvisionnement»), comme suit: la disposition de la LApEl prévue dans la révision de la LSI sera placée à la fin de la première section («Garantie de l'approvisionnement de base et tâches des gestionnaires de réseau») en tant qu'art. 8a. Les nouvelles dispositions relatives à la réserve d'électricité constitueraient, en tant qu'art. 8b à 8o, la deuxième section («Réserve d'électricité») de ce chapitre, et viendraient ainsi remplacer l'art. 8a («Réserve d'énergie pour les situations d'approvisionnement critiques») de la révision de 2023.

En revanche, l'art. 8b («Saisie et transmission des données sur les lacs d'accumulation») de la révision de l'acte modificateur ne serait pas supprimé mais placé au début de la section 2a («Autres mesures visant à garantir l'approvisionnement») en tant qu'art. 8p.

Art. 8a

Constitution et dimensionnement d'une réserve d'électricité

L'al. 1 reprend la prescription de l'art. 8a, al. 1, de la révision de la LApEl de 2023.

La réserve d'électricité n'est pas un programme obligatoire. Tant que la sécurité d'approvisionnement semble garantie même sans réserve, celle-ci ne doit pas être constituée.

Al. 2: la constitution éventuelle d'une réserve d'électricité et son dimensionnement sont décidés à l'aide d'analyses des risques qui se fondent sur des études de l'adéquation du système. Le dimensionnement de la réserve d'électricité se base sur des calculs concernant la couverture de la consommation avec des hypothèses portant notamment sur la disponibilité des centrales nucléaires, la demande en électricité, le développement des énergies renouvelables, l'évolution des importations d'électricité et la disponibilité du gaz en Europe. La responsabilité de déterminer la taille de la réserve incombe toujours à l'ElCom (art. 2, al. 1, OIRH et art. 8a, al. 3, révision de la LApEl de 2023), en accord avec l'OFEN. Cette concertation implique un réel échange d'opinions entre les autorités. Une simple information de l'OFEN ne suffit pas. L'OFEN 14

RS 128

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n'a toutefois pas de droit de veto. En effet, c'est l'ElCom qui a le dernier mot et qui est donc responsable du bon dimensionnement de la réserve d'électricité. L'ElCom est toutefois liée par les éventuelles prescriptions d'exécution visées à l'al. 4.

L'ElCom fixe le dimensionnement de la réserve hydroélectrique chaque année. Pour les autres composantes de la réserve d'électricité, la périodicité dépend également de l'horizon temporel de la constitution des différents éléments de la réserve ou de la durée de participation. En principe, le Conseil fédéral pourrait également édicter des dispositions concernant la fréquence des prises de décision. S'il devait s'avérer que la réserve d'électricité est trop importante au regard des attentes initiales, les dispositions prévues dans l'ordonnance pour une éventuelle dissolution anticipée s'appliqueraient alors (art. 8b, al. 2, let. b et c).

Al. 3: la gestion opérationnelle de la réserve d'électricité incombe à la société nationale du réseau de transport. La réglementation des compétences en vigueur est donc conservée (cf. OIRH et art. 8a, al. 4, 1re phrase, de la révision de la LApEl de 2023).

Les différentes tâches sont définies à l'art. 8k. Dans ce rôle, la société nationale du réseau de transport assure le financement préalable, si nécessaire. Le refinancement est exécuté conformément à l'art. 15a, al. 1, let. b, sur les coûts d'exploitation imputables du réseau de transport et à la rémunération correspondante pour l'utilisation du réseau.

Al. 4: l'al. 4 donne au Conseil fédéral la possibilité d'édicter des prescriptions relatives au dimensionnement minimal et maximal de la réserve d'électricité (cf. art. 6, al. 1 et 3, let. a, OIRH). Cette disposition doit être considérée dans le contexte de la grande importance de la sécurité de l'approvisionnement en électricité pour la Suisse ainsi que dans celui des coûts.

Art. 8b

Éléments de la réserve d'électricité et désignation des participants

Les al. 1 à 3 ajoutent à la réglementation légale en vigueur (art. 8a, al. 2, de la révision de la LApEl de 2023) la réserve thermique, qui comprend des centrales de réserve, des groupes électrogènes de secours et des installations CCF. Jusqu'à présent, cet élément de la réserve d'électricité n'était traité que dans l'OIRH, dont la durée est limitée à fin 2026. Le présent projet crée des bases légales solides afin de réglementer durablement tous les éléments de la réserve d'électricité par voie d'ordonnance. Du point de vue rédactionnel, la réglementation en vigueur est modifiée, puisque ces quatre éléments sont désormais clairement désignés: réserve hydroélectrique, réserve thermique, réserve liée à une réduction de la consommation et réserve de stockage.

Al. 4: dans les prescriptions d'exécution, le Conseil fédéral peut notamment régler les modalités de réalisation des appels d'offres qui permettent de désigner les participants à la réserve thermique, à la réserve liée à une réduction de la consommation et à la réserve de stockage. Par exemple, il pourrait être judicieux d'organiser un appel d'offres commun pour les centrales de réserve et les grandes installations CCF, d'un côté, et pour les groupes électrogènes de secours et les petites installations CCF, de l'autre. En principe, le Conseil fédéral cherchera à réaliser un appel d'offres aussi ouvert que possible à l'égard de la technologie.

Let. a: il est possible de renoncer provisoirement ou durablement à constituer certains éléments de la réserve d'électricité. Jusqu'à présent, l'OIRH ne comportait aucune 20 / 44

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disposition spécifique pour la réserve de stockage ou celle liée à une réduction de la consommation. Par conséquent, aucun appel d'offres n'a été réalisé en la matière. En ce qui concerne la réserve liée à une réduction de la consommation, le secteur de l'électricité est en train de prendre des dispositions pour développer et proposer à titre subsidiaire des produits correspondants. La mise en place éventuelle d'une réserve de stockage par l'intermédiaire de dispositions correspondantes dans une ordonnance dépendra des progrès réalisés dans les différentes technologies de stockage.

Let. b: le Conseil fédéral peut prendre des dispositions différentes pour réglementer la durée de participation aux divers éléments de la réserve d'électricité. Des durées de participation supérieures à un an sont possibles pour la réserve hydroélectrique (cf. art. 8a, al. 7, let. a, de la révision de la LApEl de 2023). Pour ce qui est des centrales de réserve, la participation est prévue pour une longue durée (contrats de 15 ans).

Let. c: cette norme de délégation est reprise telle quelle du droit déjà en vigueur (art. 8a, al. 7, let. a, de la révision de la LApEl conformément à l'acte modificateur unique). De telles directives pourraient se concrétiser s'il s'avère que l'on peut renoncer plus tôt que prévu à constituer une réserve d'électricité.

Let. d à f: dans le cadre des prescriptions d'exécution, le Conseil fédéral peut prévoir certaines particularités pour les appels d'offres. Le plafonnement éventuel des prix (let. d) revêt une importance pratique considérable. De plus, le Conseil fédéral peut également charger le DETEC de réaliser des appels d'offres (let. e) soit de manière générale, soit pour certains éléments de la réserve d'électricité, soit pour certaines catégories de participants (par ex. petites installations CCF). De son côté, le DETEC peut déléguer cette tâche à l'OFEN dans le cadre de son organisation administrative.

Enfin, en vertu de la let. f, le Conseil fédéral peut mettre en place une autre procédure pour désigner les participants, y compris l'attribution des compétences correspondantes. En principe, des appels d'offres sont lancés. Lorsque le rapport coûts/efficacité semble opportun, on pourrait également envisager d'écrire directement aux milieux intéressés et de les inviter à faire une
offre pour des produits standard prédéfinis.

Al. 3: si le DETEC fait usage de cette possibilité et impose à l'exploitant d'une centrale, d'un groupe électrogène de secours ou d'une installation CCF de participer à la réserve d'électricité, il fixe dans le même temps la durée de participation et la rémunération correspondante allouée à cet exploitant (art. 8c, al. 2, 2e phrase). Il ne peut toutefois obliger l'exploitant à participer que si le dimensionnement visé de la réserve thermique n'est pas atteint (en temps opportun) ou si les offres reçues lors de l'appel d'offres sont inappropriées sur le plan tarifaire. Cette mesure ne peut intervenir qu'en dernier ressort. En outre, le DETEC peut recourir à cet instrument uniquement conformément au principe de proportionnalité. Il faut notamment prendre en considération le contexte de l'installation et du but qu'elle doit remplir. Le rapport entre la puissance installée et les besoins en électricité de l'entreprise pour laquelle elle doit être utilisée en cas d'urgence est également un facteur pertinent. Une obligation est ainsi exclue lorsqu'un groupe électrogène de secours peut produire à peine assez d'électricité pour assurer le maintien de l'exploitation d'un hôpital. Une obligation pour les installations militaires n'entre généralement pas en ligne de compte. De plus, les exploitants des installations concernées doivent être consultés avant une possible obligation.

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Art. 8c

Indemnité forfaitaire et rémunération pour la participation

L'al. 1 reprend pour la réserve hydroélectrique les prescriptions prévues à l'art. 8a, al. 7, let. c, de la révision de la LApEl de 2023. L'al. 2 règle le montant de la rémunération pour la participation aux autres éléments de la réserve. Le montant de la rémunération est généralement fixé dans les appels d'offres.

Art. 8d

Conditions de participation à la réserve hydroélectrique

Les prescriptions légales relatives à la constitution d'une réserve hydroélectrique et les conditions de participation correspondantes figuraient déjà à l'art. 8a de la révision de la LApEl de 2023. Elles sont reprises ici avec quelques modifications rédactionnelles, mais ne changent pas sur le fond. En vue d'une meilleure compréhension, il convient de préciser que la taille de référence déterminante pour l'obligation (art. 8b, al. 1, let. a: «centrales hydroélectriques à accumulation à partir d'une capacité de stockage de 10 GWh») s'applique à chaque lac d'accumulation et ne concerne pas l'ensemble du portefeuille de centrales hydroélectriques à accumulation d'une entreprise.

Art. 8e

Conditions de participation des centrales de réserve à la réserve thermique

Al. 1: les exploitants de centrales doivent veiller à une disponibilité maximale ou garantir la mise à disposition de leurs centrales. Cela contribue à une résilience aussi grande que possible de la réserve d'électricité. Il est supposé à cet égard que les centrales participant à la réserve thermique injectent de l'électricité dans la zone de réglage Suisse (art. 6, al. 2, let. b, OIRH).

Dans ce contexte, l'al. 2 pose aussi comme condition à l'al. 2 que les centrales de réserve doivent fonctionner avec au moins deux agents énergétiques, dont impérativement le gaz, car il est tout à fait possible qu'une situation critique de l'approvisionnement en électricité et une pénurie de l'approvisionnement en gaz aient lieu simultanément. Dans les dispositions d'exécution, le Conseil fédéral peut fixer des exigences plus précises sur la possibilité de passer à des agents énergétiques alternatifs (par ex. mazout, hydrogène, bois). Le principe de neutralité à l'égard de la technologie est ainsi pris en considération.

Al. 3: les exploitants de centrales de réserve n'ont pas le droit de produire de l'électricité directement pour le marché, sous réserve des exceptions définies à l'art. 8l, al. 6, LApEl. Une utilisation pour le marché aurait des conséquences néfastes sur la sécurité d'approvisionnement; les prix du marché seraient réduits artificiellement, ce qui rendrait les investissements dans de nouvelles capacités de production moins attrayants et éliminerait les mesures fondées sur le marché (comme l'arrêt volontaire en cas de prix élevés). Les effets négatifs sur l'environnement dus à l'utilisation d'agents énergétiques fossiles sont réduits au minimum. C'est pourquoi il ne peut pas être fait appel à l'énergie des centrales de réserve sur la base de la LApEl en cas d'équilibre du marché. Une mesure d'intervention sera nécessaire pour ce faire, combinée à une déclaration d'inapplicabilité des dispositions correspondantes sur la base de la LAP.

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L'al. 4 concerne le besoin de réglementer par voie d'ordonnance. En vertu de la let. a, le Conseil fédéral peut prévoir des exceptions à l'obligation de fonctionner avec deux agents énergétiques. On peut notamment penser aux situations dans lesquelles le combustible requis est stocké en quantité suffisante à proximité immédiate d'une centrale.

La let. b prévoit que les dispositions d'exécution déterminent si et dans quelle mesure les centrales de réserve sont autorisées à fournir des services-système. Il peut s'agir de l'utilisation de générateurs pour maintenir la tension en dehors de la période de disponibilité de la centrale (cf. art. 11, al. 2, OIRH). La let. c confirme qu'un recours à la réserve d'électricité avant un déséquilibre du marché de l'électricité ne peut se produire que dans le cadre de mesures d'intervention économiques conformément aux art. 31 à 34 LAP, ceci à l'exception des cas spécifiés à l'art. 8l, al. 6, let. b, dans lesquels aucune quantité (significative) d'électricité n'est mise sur le marché suisse. Plus particulièrement, l'interdiction d'utiliser les centrales de réserve pour le marché libre de l'électricité, telle qu'énoncée à l'al. 3, serait temporairement suspendue en vertu de l'art. 34 LAP. Cette possibilité ne s'applique qu'aux centrales de réserve. Il est prévu que l'électricité appelée de manière anticipée soit acheminée de manière non discriminatoire sur le marché libre suisse via Swissgrid.

Art. 8f

Obligations des exploitants d'installations de transport par conduites

Cette disposition impose aux exploitants des conduites de gaz auxquelles une centrale de réserve est raccordée de proposer à l'exploitant de cette centrale des conditions d'utilisation du réseau définies sur mesure pour le recours à ladite centrale de réserve.

Cette disposition (cf. également art. 12 OIRH) est nécessaire car la rémunération pour l'utilisation du réseau pour la distribution du gaz est un facteur de coûts important.

Comme les centrales de réserve ne sont utilisées que dans des cas exceptionnels, leurs exploitants dépendent de produits de transports appropriés. Les centrales de réserve présentent un profil de consommation et de prélèvement très spécifique. La plupart du temps, elles n'ont pas besoin de gaz voire n'ont peut-être même jamais besoin de gaz.

Lorsqu'elles sont utilisées, les quantités de gaz nécessaires peuvent cependant être considérables. La partie de phrase «[...] des conditions adaptées au recours à cette centrale de réserve pour l'utilisation de leurs conduites» signifie que les gestionnaires de réseau proposent à l'exploitant de la centrale des produits de capacité de transport à court terme (produits journaliers ou hebdomadaires) ou des produits interruptibles et tiennent compte des particularités des centrales de réserve dans les règles de comptabilité (par ex. dans la conception de la marge de tolérance).

En cas de litige, l'OFEN décide des conditions d'utilisation du réseau conformément à l'obligation de transport prévue à l'art. 13 de la loi du 4 octobre 1963 sur les installations de transport par conduites15. Lors d'un litige, l'OFEN devra également tenir compte de ces dispositions particulières. L'entrée en vigueur de la future loi sur l'approvisionnement en gaz devrait réduire la portée de cette disposition spéciale de l'art. 8f.

15

RS 746.1

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Art. 8g

Obligations des exploitants de centrales de réserve après la participation à la réserve d'électricité

Les dispositions légales relatives à la réserve d'électricité ne précisent pas si et à quelles conditions les centrales de réserve peuvent continuer à être exploitées après leur sortie de la réserve d'électricité. Concernant les centrales de réserve construites en vue de la constitution de la réserve thermique, l'art. 8g contient toutefois certaines dispositions relatives à la période suivant la participation à la réserve thermique. Les obligations sont différentes si la centrale concernée continue ou non d'être exploitée.

Al. 1: si la centrale ne continue pas d'être exploitée, elle doit être démantelée pour éviter qu'elle ne soit laissée à l'abandon dans le paysage (rétablissement de l'état antérieur du site). Les coûts de démantèlement sont remboursés par la société nationale du réseau de transport (conformément à l'art. 15a, al. 1, let. b, ch. 2, en tant que coûts d'exploitation imputables du réseau de transport), pour autant que le démantèlement soit effectué de manière économique et rapide. La question du remboursement des frais ne sera résolue qu'au moment concerné, car il n'est pas possible de prévoir les coûts de démantèlement au préalable avec une certitude suffisante et de les indemniser ainsi au moyen de la rémunération pour la participation à la réserve thermique.

Une centrale de réserve ne doit pas être démantelée lorsqu'elle est encore exploitée de manière ordinaire après sa participation à la réserve thermique. Dans ce cas, son exploitant est tenu, conformément à l'al. 2, de procéder à un remboursement approprié de la rémunération reçue pour la participation. On évite ainsi des avantages concurrentiels injustifiés sur le marché libre de l'électricité.

Les détails concernant le calcul du montant de ces obligations de paiement peuvent être réglés par voie d'ordonnance sur la base de l'al. 3. Pour ce qui est des coûts de démantèlement, outre des critères d'efficacité, il s'agit de savoir tout ce qui relève de l'obligation de démantèlement (par ex. distinctions entre la centrale et le raccordement au réseau, comme les stations de transformation et les lignes électriques). Par ailleurs, il est possible de fixer par voie d'ordonnance des délais ou des dates de référence pour déterminer si une centrale dont la poursuite de l'exploitation après la sortie de la réserve d'électricité est
incertaine, du moins dans un premier temps, relève de la réglementation de l'al. 1 ou de celle de l'al. 2.

Il convient de souligner ce qui suit: ces dispositions ne s'appliquent pas aux centrales qui étaient déjà construites avant leur participation à la réserve thermique. En outre, elles ne précisent pas à quelles conditions une centrale peut continuer d'être exploitée.

Il s'agit en l'espèce d'une décision entrepreneuriale qui doit tenir compte des prescriptions légales applicables à l'exploitation d'une centrale (exigences environnementales, autorisations d'exploitation, etc.).

Art. 8h

Conditions de participation à la réserve thermique des groupes électrogènes de secours et des installations CCF

L'al. 1 comprend les mêmes prescriptions que celles prévues pour les centrales de réserve à l'art. 8e, al. 1. Il est donc renvoyé aux commentaires correspondants.

L'al. 2 limite l'interdiction de production d'électricité pour le marché libre à la période durant laquelle l'installation doit être disponible pour la réserve. En dehors de 24 / 44

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cette période, il est envisageable que les installations CCF produisent de l'électricité pour le marché.

L'al. 3 concerne les agrégateurs (aussi appelés poolers). Pour des raisons d'exécution, ceux-ci sont indispensables à une utilisation coordonnée des groupes électrogènes de secours et des petites installations CCF et figurent déjà dans l'ordonnance en vigueur (art. 7, al. 1, 15 et 16, al. 3, OIRH). Conformément à l'art. 7, al. 1, OIRH, le seuil entre petites et grandes installations CCF se situent à 5 MW. Le rôle des agrégateurs est défini à l'art. 8i.

L'al. 4, let. a, constitue la base légale de l'art. 7, al. 3, OIRH, mais laisse au Conseil fédéral la liberté, sans l'y contraindre, de prévoir l'exclusion de la participation à la réserve d'électricité en cas d'obtention de soutiens financiers de la part des pouvoirs publics (par ex. contributions d'investissement). Cette exclusion est justifiée par le fait que certains participants percevraient une double aide financière s'ils recevaient des subventions tout en participant à la réserve thermique.

Let. b, ch. 1: par analogie avec la réglementation des conditions de participation pour les centrales de réserve, il existe également pour les groupes électrogènes de secours et les installations CCF une base légale sur laquelle les dispositions d'exécution peuvent se fonder quant à l'admissibilité de la fourniture de services-système (en dehors de la période de disponibilité).

Let. b, ch. 2: contrairement aux centrales de réserve, il existe d'autres cas dans lesquels l'utilisation des groupes électrogènes de secours et des installations CCF en dehors de la réserve d'électricité peut être admise à des fins d'exploitation (également pendant la période de disponibilité). Pour ce qui est des groupes électrogènes de secours, il s'agit surtout d'utilisations lors de pannes locales ou de tests mensuels. Quant aux installations CCF, ces cas concernent un besoin de chaleur imprévu qui requiert leur utilisation (par ex. panne d'une autre installation). D'autres cas dans lesquels une utilisation pour les propres besoins des exploitants est nécessaire et doit être autorisée sont également envisageables.

Art. 8i

Agrégateurs pour la participation de groupes électrogènes de secours et de petites installations CCF

Les agrégateurs font le lien entre la société nationale du réseau de transport et les participants à la réserve. Le regroupement de plusieurs unités de réserve (al. 1) augmente l'efficacité des différents processus. La relation triangulaire se caractérise par deux rapports contractuels distincts, l'un entre la société nationale du réseau de transport et les agrégateurs (art. 8k, al. 1) et l'autre entre l'agrégateur et les exploitants des différentes installations (al. 2). Le contenu de ces deux rapports de droit peut être précisé par voie d'ordonnance. Seuls les agrégateurs interviennent directement vis-à-vis de la société nationale du réseau de transport. Ce sont eux qui participent aux appels d'offres (al. 3, 1re phrase), les exploitants des différentes installations restant en retrait. Des responsabilités légales existent néanmoins dans les deux sphères (al. 3, 2e phrase). Alors que les exploitants des différentes installations doivent garantir la disponibilité de leurs installations (art. 8h, al. 1), il incombe aux agrégateurs d'y recourir de manière coordonnée en cas de besoin. Outre les sanctions qui peuvent être prononcées par l'ElCom (art. 22, al. 2, let. f), les conséquences d'une faute dépendent 25 / 44

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également de l'accord contractuel entre les parties. Des peines conventionnelles peuvent ainsi être convenues (cf. art. 5, al. 2, let. g, 10, al. 2, let. f et 15, al. 4, OIRH). Le montant du forfait de prestations (al. 4) est fixé dans les appels d'offres. Le forfait de prestations doit être versé aux agrégateurs en plus de la rémunération pour la participation à la réserve qui est allouée aux différents participants.

Art. 8j

Aménagements ultérieurs de groupes électrogènes de secours

En vertu de l'art. 8j, le Conseil fédéral peut créer des bases légales permettant à la société nationale du réseau de transport de financer les éventuels aménagements ultérieurs des groupes électrogènes de secours et des installations CCF (art. 15a, al. 1, let. b, ch. 3). Dans ce cas, des moyens supplémentaires destinés à l'aménagement ultérieur nécessaire peuvent être alloués en plus de la rémunération pour la participation à la réserve thermique, par exemple pour les équipements de pilotage [à distance] de l'installation ainsi que ceux visant à limiter la pollution atmosphérique (par ex. installations de dénitrification de l'air et adaptations des systèmes de filtres). Dans le cadre des prescriptions d'exécution, le Conseil fédéral peut également régler la répartition des compétences correspondantes.

Art. 8k

Tâches de la société nationale du réseau de transport

Al. 1: les conditions de participation juridiques sont précisées dans des accords dont le contenu diverge en fonction des différents éléments de la réserve d'électricité. La société nationale du réseau de transport étant chargée de la gestion opérationnelle de cette réserve (art. 8a, al. 3), il lui incombe de conclure ces accords même lorsque les participants à la réserve d'électricité n'ont pas été sélectionnés dans le cadre de ses appels d'offres. Cela concerne la réserve hydroélectrique, une éventuelle obligation de participation en vertu de l'art. 8b, al. 5 (cf. art. 5, al. 3, OIRH concernant la conclusion du contrat), et des dérogations dans le cas de la procédure visée à l'art. 8b, al. 4, let. e et f.

Les principales tâches de la société nationale du réseau de transport dans le cadre de la gestion opérationnelle de la réserve d'électricité sont énumérées à l'al. 2 de manière non exhaustive. Le soutien à l'ElCom concerne surtout l'élaboration d'études sur l'adéquation du système et d'autres analyses en vue du dimensionnement de la réserve d'électricité.

Art. 8l

Recours à la réserve d'électricité

Les dispositions sur le recours à la réserve d'électricité définies ici reprennent la législation en vigueur. Les al. 1 à 5 sont actuellement contenus dans l'art. 8a, al. 5, 6 et 7, let. f à h, de la révision de la LApEl de 2023. L'al. 6, let. b, s'inspire de l'art. 19 OIRH (cas particuliers du recours à la réserve). Contrairement à l'OIRH, le ch. 1 n'exige pas que la menace pour la stabilité de l'exploitation du réseau soit immédiate. Le ch. 2 ne serait pertinent qu'en cas de conclusion d'un accord de solidarité avec un État voisin, le cas échéant en combinaison avec l'art. 61, al. 2, LAP. La possibilité de recourir aux centrales de réserve pour augmenter la réserve hydroélectrique, prévue au ch. 3, est

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importante. À la p. 15 du rapport explicatif concernant l'OIRH16, cette possibilité a été commentée comme suit: un recours aux centrales de réserve «peut s'avérer nécessaire lorsque le marché est encore équilibré, mais qu'il apparaît qu'il n'y aura pas assez d'énergie disponible pour l'approvisionnement en électricité jusqu'à la fin de l'hiver. Pour limiter au maximum les distorsions de marché le cas échéant, l'énergie supplémentaire produite par les centrales de réserve n'est pas vendue sur le marché, mais ajoutée à la réserve hydroélectrique. Plus précisément, l'électricité qui aurait été produite dans une centrale à accumulation est remplacée par de l'électricité provenant des centrales de réserve. L'eau reste dans le lac d'accumulation et donc à la disposition de la réserve hydroélectrique; cette eau ne peut plus être utilisée pour la vente d'électricité sur le marché».

La réglementation figurant à l'al. 6, let. b, sur la gestion des coûts de l'énergie d'ajustement (art. 4, al. 1, let. eter) en cas de recours à la réserve thermique est nouvelle (cf. aussi art. 15a, al. 1, let. b, ch. 6). Elle s'applique aux centrales de réserve, aux groupes électrogènes de secours et aux installations CCF, mais peut avoir des effets différents selon les catégories de participants. Jusqu'à présent, la gestion de l'énergie d'ajustement est régie dans les accords de participation à la réserve. En principe, il s'agit de coûts liés au recours à la réserve qui peuvent être couverts par l'indemnisation correspondante. Les accords convenus ont des caractéristiques différentes.

L'énergie d'ajustement peut représenter un facteur de coûts considérable pour les centrales de réserve. Celles-ci n'étant utilisées qu'à titre exceptionnel, leur mise en service peut être retardée, et les prévisions correspondantes peuvent être modifiées. Par conséquent, dans les accords en vigueur, une grande part de l'énergie d'ajustement est financée par la rémunération pour l'utilisation du réseau de transport, dans le cadre de l'indemnisation en cas de recours.

Art. 8m

Coordination avec des mesures prévues dans la loi sur l'approvisionnement du pays

L'art. 8m établit le principe selon lequel le recours à la réserve d'électricité et aux mesures relevant de l'approvisionnement économique du pays doit être coordonné.

Le Conseil fédéral détermine les mesures relevant de l'approvisionnement économique du pays, qu'il s'agisse de préparatifs ou de mesures d'intervention économique pour faire face à une pénurie grave (art. 5 et 31 à 34 LAP). Le recours à la réserve d'électricité se fonde sur les consignes à fixer par l'ElCom (art. 8l, al. 2). L'art. 8l, al. 1, dispose que la réserve d'électricité ne peut être libérée pour le marché de l'électricité que si la quantité d'électricité demandée est supérieure à l'offre (absence d'équilibre du marché). Si la réserve d'électricité doit être utilisée de manière anticipée pour éviter ou maîtriser une pénurie, cela peut se faire uniquement par une mesure d'intervention sur la base de la LAP, tel que cela est prévu à l'art. 8e, al. 4, let. c. Une telle décision incombe au Conseil fédéral. Pour ce faire, il se fonde notamment sur une évaluation de la situation et des risques, qui serait réalisée avec des instruments 16

Consultable sous www.fedlex.admin.ch > Recueil systématique > Droit interne > 7 Travaux publics - Énergie - Transports et communications > 734 Installations électriques > 734.722 Ordonnance du 25 janvier 2023 sur l'instauration d'une réserve d'électricité pour l'hiver (Ordonnance sur une réserve d'hiver, OIRH) > Rapport explicatif de l'acte de base.

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comme la surveillance du courant de la société nationale du réseau de transport pour l'Approvisionnement économique du pays (AEP).

Art. 8n

Compensation des émissions de CO2 et allègement pour l'exploitation de centrales de réserve, de groupes électrogènes de secours et d'installations CCF

L'al. 1 sert de base aux dispositions prévues aux art. 41, al. 1ter et 3, et 146w, de l'ordonnance du 30 novembre 2012 sur le CO217 en relation avec l'art. 7, al. 4, OIRH.

Ces dernières énoncent que les centrales de réserve doivent participer sans exception au SEQE. Pour les groupes électrogènes de secours ou les installations CCF, il est prévu soit qu'ils participent au SEQE, soit qu'ils doivent entièrement compenser les émissions de CO2 dues au recours à la réserve d'électricité via la remise d'attestations internationales.

Al. 2: différents obstacles susceptibles d'empêcher un approvisionnement en électricité de manière urgente subsistent dans le droit tant fédéral que cantonal. Cette norme de délégation fournit une solution d'assurance en cas d'événement difficilement prévisible nécessitant la mise en oeuvre rapide de mesures limitées dans le temps. Contrairement à la période à laquelle l'ordonnance du 21 décembre 2022 relative à l'exploitation de centrales de réserve et de groupes électrogènes de secours en cas de pénurie déclarée ou imminente18 a été adoptée, nous disposons pour les prochains hivers de plus de temps pour mettre en oeuvre des mesures de protection de l'environnement. Au vu des conditions restrictives telles qu'elles sont inscrites ici, il s'agit donc d'une solution de dernier recours. Ces allégements ne doivent être accordés qu'au cas par cas et uniquement lorsque cela est indispensable pour assurer la sécurité de l'approvisionnement en électricité. Dans ce contexte, il convient de souligner que de tels allègements ne s'appliqueraient que pour un éventuel recours à la réserve thermique via l'installation de production d'électricité concernée. Aucune autre utilisation de l'installation n'entre dans le champ d'application de cette disposition dérogatoire.

Par exemple, si une centrale de réserve ou une installation CCF doit être utilisée pour des services-système ­ pour autant que cela soit autorisé par les prescriptions d'exécution (cf. art. 8e, al. 4, let. b, et 8h, al. 4, let. b, ch. 1) ­, toutes les exigences relatives au droit de l'environnement doivent naturellement être remplies. Le champ d'application de cette norme est par ailleurs limité à l'OPair et aux prescriptions d'exploitation cantonales. Le droit en vigueur relatif à la protection contre le bruit offre déjà
suffisamment de marge de manoeuvre.

Art. 12, al. 2, let. f L'adaptation est de nature purement rédactionnelle.

Art. 15, al. 2, let. a L'imputabilité des coûts de la réserve d'électricité est désormais réglée à l'art. 15a, al. 1, let. b. Seuls les coûts des services-système figurent désormais à la let. a.

17 18

RS 641.711 RS 531.66

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Art. 15a, al. 1 Les coûts de la réserve d'électricité sont en principe tous couverts par la rémunération pour l'utilisation du réseau, qui est due pour l'utilisation du réseau de transport. Cette rémunération est répercutée sur l'ensemble des consommateurs d'électricité du pays.

Les différents coûts sont énumérés à la let. b de manière non exhaustive. Les principaux coûts comprennent les indemnités forfaitaires pour la participation obligatoire à la réserve hydroélectrique et les rémunérations pour la participation aux autres éléments de la réserve d'électricité (ch. 1), qui financent dans une certaine mesure les coûts fixes de la participation ne dépendant pas d'une utilisation. En revanche, les coûts liés à l'utilisation sont pris en charge à travers les indemnisations en cas de recours à la réserve (ch. 5). En fait notamment partie l'énergie à laquelle on recourt.

En ce qui concerne la réserve thermique, il convient également de mentionner la taxe sur le CO2 et les droits d'émissions. Par ailleurs, les coûts d'exécution sont explicitement cités (ch. 7). Ils sont occasionnés par la société nationale du réseau de transport sous la forme de dépenses administratives, notamment. Le Conseil fédéral peut cependant également régler à cet égard la prise en charge des coûts des éventuels dédommagements aux communes d'implantation, tels que visés à l'art. 23, al. 4, OIRH.

Ces coûts sont répercutés après déduction des recettes enregistrées par la société nationale du réseau de transport dans le cadre de la gestion opérationnelle de la réserve d'électricité. Ces recettes englobent par exemple l'encaissement auprès des groupesbilan qui ont occasionné le recours à la réserve et ont réceptionné les volumes d'électricité correspondants (art. 8l, al. 4). De plus, la société nationale du réseau de transport n'a pas le droit de comptabiliser une composante des bénéfices. Pour ce qui est des charges de fonds propres, le taux d'intérêt prévu pour le calcul figure à l'art. 22, al. 5, OIRH.

Art. 20, al. 2, phrase introductive (concerne uniquement la version française) et let. cbis Pour plus de clarté, la compétence de la société nationale du réseau de transport concernant la gestion opérationnelle de la réserve d'électricité est également mentionnée dans ce catalogue de tâches, en plus de l'art. 8a, al. 3.

Art. 22,
al. 2, let. f Les art. 8a, al. 7, let. e, et 22, al. 2, let. f, de la révision de la LApEl conformément à l'acte modificateur unique permettaient déjà à l'ElCom de prendre des sanctions contre les participants à la réserve d'électricité qui n'honoraient pas leurs obligations.

Cette compétence est réglée uniquement ici, afin que la structure de la loi se conforme autant que possible à la systématique.

Art. 25, al. 1bis La révision de la LApEl de 2023 réglementait l'obligation de renseigner l'ElCom et la société nationale du réseau de transport en relation avec les dispositions matérielles concernant la réserve d'électricité (art. 8a, al. 4, 5e phrase, de la révision de la LApEl

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de 2023). Cette obligation est étendue aux agrégateurs et transférée pour des raisons liées à la systématique législative.

Art. 29, al. 1, let. f, fbis et fter Les modifications aux let. f et fbis sont de nature purement rédactionnelles (adaptation des renvois). Dans la nouvelle let. fter, le manquement à l'obligation essentielle des participants à la réserve d'électricité d'apporter la contribution nécessaire en cas de recours à la réserve est ajouté à la liste des faits passibles d'une amende de 100 000 francs au plus.

Art. 33d

Disposition transitoire relative à la modification du ...

Les dispositions légales sur la réserve thermique entreront en vigueur à un moment où des centrales de réserve se sont déjà engagées à participer pour répondre à une situation d'urgence. Il s'agit des centrales de Birr (AG), de Cornaux (NE) et de Monthey (VS) ainsi que des autres centrales éventuelles qui remporteront l'adjudication pour participer à la réserve thermique lors des appels d'offres visés dans l'OIRH. Des groupes électrogènes de secours sont également déjà sous contrat. Les règles en vigueur sont toutefois provisoires, puisque l'art. 6, al. 4, OIRH précise que la participation à la réserve thermique dure jusqu'au 31 mai 2026 au plus tard. De même, les contrats avec les trois centrales de réserve susmentionnées arriveront à échéance au printemps 2026. Les appels d'offres en cours sont naturellement axés sur un horizon temporel plus long. Une fois le présent projet entré en vigueur, l'OIRH pourrait voire devrait être mise à jour et prolongée. L'art. 33d crée donc une base légale pour que le Conseil fédéral puisse définir les conditions dans lesquelles les installations concernées participent à la réserve d'électricité selon les nouvelles dispositions.

5.2 Art. 19b

Modification d'autres actes: loi sur le CO2 Indemnités en cas d'obligation d'utilisation d'un agent énergétique donné

Le Conseil fédéral peut ordonner un changement d'agent énergétique pour les processus pouvant par exemple fonctionner au gaz naturel ou à l'huile de chauffage. L'utilisation du pétrole engendre davantage d'émissions de CO2 que celle du gaz, toutes les émissions supplémentaires ne pouvant toutefois pas être forcément attribuées à l'injonction du Conseil fédéral. Si une pénurie de gaz menace, on peut supposer qu'un changement serait intervenu tôt ou tard, indépendamment de la décision du Conseil fédéral (prix élevés du gaz, quantités de gaz insuffisantes). Les exploitants d'installations participant au SEQE devront donc remettre davantage de droits d'émission. Il s'agit là de la seule façon pour eux de remplir leurs obligations quant au SEQE, ce qui pourrait entraîner des coûts supplémentaires pour les entreprises concernées.

Dans le cadre des crédits autorisés, la Confédération peut indemniser les coûts liés aux droits d'émission pour autant que les exploitants d'installations participant au SEQE subissent un préjudice financier démesuré du fait de ce changement (al. 1). Une 30 / 44

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vérification est faite au cas par cas, sur demande, pour le déterminer. Le montant des contributions est établi en fonction du prix moyen des droits d'émission sur le marché secondaire dans l'UE au moment où le changement est ordonné (al. 2). Le Conseil fédéral règle les modalités, par exemple en déterminant les critères du préjudice financier démesuré sur la base du rapport entre les coûts supplémentaires et la valeur ajoutée brute (al. 3).

Art. 31a Lors de l'introduction du remboursement de la taxe sur le CO2 aux exploitants d'installations CCF, l'art. 31a offrait la possibilité aux exploitants d'installations CCF ayant pris un engagement de réduction de s'en libérer et de soumettre l'installation à l'obligation d'investissement. L'égalité de traitement a ainsi été assurée lors de la période d'engagement en cours. Ce point n'a fait l'objet d'aucune demande, et les exploitants avaient la possibilité en 2021 et en 2022 de mettre fin à leur engagement de réduction. L'égalité de traitement a ainsi été assurée; cette règle n'est plus nécessaire et est abrogée.

Art. 32a La taxe sur le CO2 prélevée sur les combustibles dont il est avéré qu'ils sont utilisés pour produire de l'électricité est désormais remboursée dans sa totalité, et non plus que partiellement (al. 1). Le remboursement est effectué pour autant que l'exploitant de l'installation CCF remette, dans le registre des échanges de quotas d'émission, des attestations portant sur les réductions d'émissions de gaz à effet de serre réalisées en Suisse ou à l'étranger à hauteur des émissions de gaz à effet de serre générées par la production d'électricité (let. c). Dans l'ordonnance, le Conseil fédéral règle les modalités concernant par exemple les limites de puissance, les exigences minimales ainsi que les informations que doit contenir la demande, telles que le rapport sur les émissions de gaz à effet de serre générées par la production d'électricité (al. 2).

Art. 32b Le remboursement aux exploitants d'installations CCF est désormais réglé dans l'art. 32a. L'art. 32b est donc abrogé.

Art. 49b

Disposition transitoire

Dans l'hypothèse où la disposition entrerait en vigueur le 1er janvier 2027, la demande de remboursement de 60 % de la taxe CO2 pour 2026 prévue à l'art. 98b de l'ordonnance sur le CO2 peut être envoyée à l'Office fédéral de l'environnement (OFEV) jusqu'au 30 juin 2027. Le remboursement des 40 % restants de la taxe sur le CO2 pour 2026 prévu à l'art. 32b, al. 2, peut, conformément au droit en vigueur, être demandé au plus tard jusqu'à la fin de l'année 2029, pour autant que la Confédération reçoive la preuve que des mesures à hauteur de ce montant ont été prises pour augmenter l'efficacité énergétique propre ou l'efficacité énergétique d'installations utilisant l'électricité ou la chaleur issues de l'installation CCF.

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5.3 Art. 34a

Modification d'autres actes: loi sur l'énergie Contribution d'investissement allouée pour les installations de couplage chaleur-force

L'al. 1 prévoit des contributions d'investissement pour les installations CCF. Les dispositions du chap. 5 de la LEne s'appliquent à ces contributions d'investissement pour autant que l'art. 34a ne contienne pas de disposition contraire.

La contribution d'investissement visée à l'al. 1 ne peut être octroyée que si les conditions prévues à l'al. 2 sont satisfaites: Let. a: comme les installations CCF produisent aussi simultanément de la chaleur, il convient de prévoir une condition rendant obligatoire l'utilisation ou l'évacuation de la chaleur dans l'encouragement de telles installations. Cela présuppose que les installations soutenues seront exploitées en mode «chaleur», et donc exclusivement en fonction du besoin en chaleur du consommateur. L'électricité ainsi produite est injectée dans le réseau public ou utilisée pour couvrir les propres besoins en électricité. Les installations doivent par ailleurs être intégrées dans un nouveau réseau de chaleur, avec comme source primaire une énergie renouvelable. Ce réseau doit être identifié dans la planification énergétique territoriale pour les énergies renouvelables des collectivités compétentes (canton, communes). Les installations doivent remplacer une chaudière fossile destinée aux charges de pointe si elles sont intégrées dans un réseau de chaleur existant.

Let. b: l'art. 34a concerne les installations CCF exploitées principalement en hiver dans la mesure où la production d'électricité est augmentée en hiver grâce à l'encouragement.

Let. c: pour des raisons de politique climatique, les installations CCF doivent fonctionner avec des combustibles renouvelables. Si cela n'est pas possible, l'installation CCF participe au SEQE ou les émissions sont compensées par l'achat d'attestations (cf. modification de l'art. 32a de la loi sur le CO2).

La contribution d'investissement s'élève à 60 % au plus des coûts d'investissement imputables (al. 3).

Art. 35, al. 2, let. hter L'encouragement des installations CCF est financé au moyen du supplément perçu sur le réseau. Celui-ci n'augmente pas.

Art. 36, al. 1, let. d L'encouragement des installations CCF est limité à 20 millions de francs par an. Cela correspond à une charge supplémentaire du fonds alimenté par le supplément de 0,04 ct./kWh, bien qu'il ne soit pas encore certain que le montant annuel maximal
de l'encouragement soit pleinement exploité. En cas de contribution d'investissement de 60 % au plus des coûts d'investissement imputables, cela devrait déclencher des investissements globaux de presque 40 millions de francs. Cette démarche permet d'at32 / 44

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teindre une augmentation annuelle d'environ 20 MW de puissance électrique CCF ou 40 GWh d'électricité hivernale; la puissance supplémentaire correspond à la charge thermique moyenne d'environ quatre grands réseaux de chaleur à distance.

Art. 38, al. 1, let. c Les nouvelles installations CCF peuvent être encouragées pendant dix ans.

Art. 55a

Information du public

Cette nouvelle disposition prévoit que l'OFEN, en sa qualité d'autorité de la Confédération compétente pour tout ce qui a trait à l'approvisionnement en énergie et à l'utilisation de celle-ci (cf. art. 9 de l'ordonnance du 6 décembre 1999 sur l'organisation du Département fédéral de l'environnement, des transports, de l'énergie et de la communication19), informe le public sur l'approvisionnement énergétique du pays et notamment sur les principaux événements et constats. Les estimations à moyen et long termes concernant la sécurité d'approvisionnement figurent au premier plan, tout comme la sensibilisation de la population sur le thème de l'efficacité énergétique et des énergies renouvelables. Parmi les champs thématiques énumérés, l'OFEN dispose d'une certaine marge de manoeuvre quant au choix précis des sujets d'observation, à la définition des données nécessaires et à la fréquence de livraison des données. Les données agrégées et les indicateurs de base sont publiés pour le public. Les données individuelles sensibles sur le plan commercial ne sont pas incluses. Les données individuelles économiquement sensibles n'entrent pas dans le champ d'application de cet article. Sur la base de la let. f, aucune information sur les prix des produits en dehors des bourses ni aucune estimation ne peut en particulier être publiée si leur publication peut entraîner des accords sur les prix ou toute autre distorsion de la concurrence. Des données brutes peuvent être mises à la disposition des cantons, à condition qu'ils aient une base légale appropriée pour leur collecte et leur utilisation.

Art. 56, al. 1, phrase introductive, let. ebis et k et al. 2 Pour que l'OFEN puisse remplir sa mission d'information visée à l'art. 55a, le champ d'application matériel et personnel de l'al. 1 est élargi. La disposition comprend désormais également toutes les données dont l'OFEN a besoin pour informer la population. Des données concernant des personnes physiques et morales, pour autant qu'elles existent, doivent être fournies afin par exemple de pouvoir formuler des extrapolations et des affirmations concernant la consommation actuelle d'énergie de certains secteurs avec la granularité nécessaire. Il est évident que les données personnelles ne doivent pas être publiées sans l'autorisation des personnes concernées. L'OFAE et
les groupes-bilan figurent dans le catalogue des autorités, des entreprises et des collectivités devant livrer des données déjà disponibles. L'OFAE dispose des données sur le monitoring de l'électricité et du gaz que l'AAEP met en place à sa demande et qui permet d'évaluer la sécurité d'approvisionnement à court terme. Les groupes-bilan disposent de données issues de la gestion du bilan. Ces données sont importantes car elles fournissent un accès aux données agrégées concernant la consommation, les 19

RS 172.217.1

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standards et les écarts. On peut alors en déduire des conclusions concernant la situation de l'approvisionnement en électricité. Dans le secteur du gaz, cela permet notamment d'informer sur le rapport entre consommation et planification des importations.

Dans ce contexte, l'ampleur des écarts par rapport aux valeurs prébudgétées est elle aussi éloquente. De plus, le catalogue n'est plus exhaustif. Conformément à l'al. 2, le Conseil fédéral peut l'élargir si l'intérêt public l'exige, ce dernier ne cessant d'évoluer.

6

Conséquences

6.1

Conséquences pour la Confédération

6.1.1

Conséquences financières et sur l'état du personnel

Il faut s'attendre à ce que l'exécution des dispositions prévues entraîne pour la Confédération des charges accrues au niveau financier et du personnel, du moins dans la première phase de mise en oeuvre de la réserve d'électricité. Les dépenses supplémentaires concernent principalement l'ElCom, qui doit fixer le dimensionnement de la réserve d'électricité, veiller au respect des engagements en matière de conservation de la réserve, définir les consignes concernant le recours et soumettre les rapports périodiques. L'OFEN lui aussi doit faire face à des coûts d'exécution plus élevés, que cela concerne des questions de dimensionnement et de structure de la réserve d'électricité, la réalisation d'appels d'offres pour les centrales de réserves et le soutien apporté aux responsables de projet lors des échanges avec les autorités compétentes cantonales et communales dans le cadre de la planification et de la construction. Les besoins financiers supplémentaires (crédit de biens et services) peuvent être compensés sur le plan interne. Les charges supplémentaires au niveau du personnel à l'OFEN peuvent être couvertes par des ressources existantes. Les besoins supplémentaires à l'ElCom s'élèvent à 1,5 équivalent temps plein. Les moyens financiers requis sont compensés de manière interne.

La rémunération pour la disponibilité et l'indemnisation en cas de recours à la réserve versée pour les centrales de réserve sont répercutées respectivement sur les consommateurs d'électricité et sur les groupes-bilan, en tant que partie de la rémunération pour l'utilisation du réseau de transport. Il n'y a donc pas de charges pour le budget de la Confédération. Les coûts assumés par la Confédération pour que les centrales de réserve et les groupes électrogènes de secours puissent être exploités dès février 2023 dans le cadre de la réserve complémentaire lui seront également remboursés sans intérêt via la rémunération pour l'utilisation du réseau de transport (art. 23, al. 1, OIRH).

Les contributions prévues à l'art. 19b de la loi sur le CO2 en cas de changement ordonné d'agent énergétique peuvent être versées sur demande. Il n'est pas possible actuellement d'estimer de manière contraignante si et dans quelle mesure cette disposition entraînera des paiements et donc des effets sur le budget fédéral. En l'absence d'injonction
de la Confédération, il n'y a aucune conséquence financière. Si la Confédération ordonne un changement d'agent énergétique, le montant maximal est estimé à près de 5 millions de francs par an.

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La nouvelle réglementation prévue à l'art. 32a de la loi sur le CO2 concernant le remboursement complet de la taxe sur le CO2 peut être mise en oeuvre de manière neutre sur le plan budgétaire. Les recettes issues de la taxe sur le CO2 diminuent car une partie est remboursée. L'utilisation de la taxe sur le CO2 est toutefois affectée: la baisse des recettes de la taxe sur le CO2 entraîne une réduction des dépenses (redistribution et subventions du programme Bâtiments) de la même ampleur.

La nouvelle disposition de la LEne concernant l'information du public sur l'approvisionnement énergétique actuel peut être mise en oeuvre avec les moyens financiers existants.

En tant que consommatrice finale, la Confédération subira comme tout autre consommateur les conséquences financières de l'augmentation des prix de l'énergie découlant des mesures prises dans le cadre de la présente modification de loi.

6.1.2

Conséquences pour le fonds alimenté par le supplément et autres conséquences

L'encouragement supplémentaire des installations CCF est financé par le supplément perçu sur le réseau de 2,3 ct./kWh afin d'encourager la production d'électricité issue des énergies renouvelables. Le financement de l'encouragement des installations CCF nécessite 0,04 ct./kWh. Le supplément perçu sur le réseau n'augmentera pas. Les ressources existantes permettent de couvrir la charge supplémentaire en personnel.

6.2

Conséquences pour les cantons et les communes, ainsi que pour les centres urbains, les agglomérations et les régions de montagne

Les centrales de réserve ont notamment des incidences sur le territoire et l'environnement. Les cantons et les communes où les centrales de réserve doivent être implantées sont particulièrement concernés. La Confédération est en discussion avec les cantons et les communes en question ou va prendre contact avec eux. Au niveau financier et du personnel, les conséquences sont gérables. Elles peuvent être couvertes en partie par les redevances existantes. Dans les communes accueillant sur leur territoire des centrales de réserve, les autorités devront toutefois faire face à une charge de travail supplémentaire à court terme.

Étant donné que des installations CCF bénéficiant d'un encouragement ne peuvent être soutenues que dans un réseau de chaleur existant ou identifié dans la planification territoriale, les charges supplémentaires pour les communes seront négligeables.

L'exploitation du dashboard de l'énergie permet aux cantons et aux communes de disposer d'une meilleure base d'informations aussi bien pour leurs tâches en cours qu'en période de crise.

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6.3

Conséquences pour les consommateurs finaux (en particulier les ménages et les grands consommateurs)

Coûts et conséquences pour la période allant de 2023 à 2026 Les estimations de coûts pour la période allant de 2023 à avril 2026 tablent sur un montant total d'environ 790 millions de francs pour les centrales de réserve existantes et les groupes électrogènes de secours. Cela correspond à une augmentation de la rémunération pour l'utilisation du réseau d'environ 0,5 ct./kWh de 2024 à 2026. Pour la réserve hydroélectrique, les coûts estimés concernant la période allant de l'hiver 2022/23 jusqu'à l'hiver 2025/26 s'élèvent au départ à environ 1,2 milliard de francs au total, coûts qui devraient être légèrement inférieurs au vu des résultats de l'appel d'offres pour l'hiver 2023/24. Selon l'estimation de coûts initiale, la rémunération pour l'utilisation du réseau s'élève de quelque 0,7 ct./kWh supplémentaire. La société nationale du réseau de transport a fixé le tarif pour la «réserve d'électricité» à 1,2 ct./kWh pour l'année 2024. Pour un ménage moyen avec une consommation annuelle de 4500 kWh, cela correspond à un montant d'environ 60 francs par an. Dans le cas d'un grand consommateur d'électricité (par ex. consommation de 10 GWh par an), cela représente une charge supplémentaire de 120 000 francs. Le tarif est vérifié et fixé chaque année. Avec l'entrée en vigueur de la loi fédérale relative à un approvisionnement en électricité sûr reposant sur des énergies renouvelables, les exploitants de centrales hydroélectriques à accumulation doivent se constituer une réserve d'énergie hydroélectrique contre une indemnité forfaitaire. Une réduction du tarif actuel de la réserve d'électricité est donc probable à moyen terme.

Coûts et conséquences pour la période allant de 2026 à 2040 Pour atteindre la réserve requise, des investissements seront nécessaires entre 2026 et 2040 pour construire des centrales de réserve, des installation CCF et des groupes électrogènes de secours. Ces investissements représentent un montant pouvant aller jusqu'à 1,1 milliard de francs (dans l'hypothèse où plusieurs centrales d'une puissance totale allant jusqu'à 1000 MW sortiraient de terre). L'amortissement de cet investissement sur 15 ans d'exploitation, y compris les intérêts et les coûts d'exploitation et d'entretien, entraîne des coûts annuels estimés à 180 millions de francs. En outre, il faut compter avec des investissements
totaux de l'ordre de 130 millions de francs pour le regroupement des groupes électrogènes de secours (280 MW), y compris les coûts d'aménagement ultérieur (filtre DeNOx, filtre à particules, synchronisation). Au total, les coûts annuels pour les groupes électrogènes de secours sont évalués à 15 millions de francs. L'indemnité forfaitaire modérée de la réserve hydroélectrique peut être estimée à environ 20 millions de francs par an. Pour les consommateurs finaux, cela correspond (pour une consommation annuelle totale de 70 TWh) à un tarif «Réserve d'électricité» de 0,30 ct./kWh. Pour un ménage moyen avec une consommation annuelle de 4500 kWh, cela équivaut à un montant approchant 14 francs par an. Dans le cas d'un grand consommateur d'électricité qui consomme par exemple 10 GWh par an, cela représente une charge supplémentaire de quelque 30 000 francs par an.

Le dashboard de l'énergie permet aux entreprises et aux ménages de s'informer quand ils le souhaitent de l'approvisionnement actuel et de l'efficacité des diverses mesures 36 / 44

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prises (par ex. pour l'exploitation des centrales de réserve), ce qui pourrait avoir un effet positif sur l'état des connaissances et la sensibilisation des consommateurs en matière de consommation d'énergie efficace.

6.4

Conséquences économiques

6.4.1

Évaluation des conséquences en lien avec la réalisation de l'objectif de zéro émission nette

Les centrales de réserve, toutes technologies confondues, génèrent des émissions de CO2 lors des tests de fonctionnement et lors d'un recours effectif. Les centrales doivent toutefois être exploitées de manière à ne pas alourdir le bilan de CO2 dans l'ensemble. S'agissant des autres conséquences (par ex. qualité de l'air), certains assouplissements temporaires des prescriptions correspondantes sont nécessaires pour les installations participant à la réserve, dans l'intérêt supérieur de la sécurité d'approvisionnement.

6.4.2

Conséquences pour l'emploi et effets de répartition

La mise en oeuvre d'une réserve d'électricité a peu de conséquences pour l'emploi et les effets de répartition.

6.4.3

Conséquences pour les branches

Les branches industrielles seront davantage sollicitées par la mise en oeuvre d'une réserve d'électricité. Cette mise en oeuvre débouchera sur des commandes de matériel, une mobilisation de personnel d'ingénierie, un recours aux logistiques d'approvisionnement, une extension des raccordements de réseau électrique et de gazoducs aux lieux de production de la réserve. Ces diverses sollicitations représentent également une augmentation de la valeur ajoutée pour les branches concernées.

Dans une conception adaptée, le dashboard de l'énergie peut montrer la consommation d'énergie des branches et ainsi illustrer tout effort d'économie ou tout effet produit par les mesures prises. Par conséquent, il contribue ici aussi à une utilisation plus efficace de l'énergie ­ et en particulier en ce qui concerne la prévention des crises.

6.5

Conséquences sociales et environnementales

La réserve d'électricité, toutes technologies confondues, augmente la sécurité de l'approvisionnement pour les entreprises et les ménages en Suisse. Elle améliore la résilience de l'approvisionnement en électricité et permet de parer à une pénurie, ou de l'atténuer le plus possible. Selon son intensité et sa durée, une telle pénurie peut avoir

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des répercussions considérables sur l'économie et la population, occasionnant des coûts élevés. L'OFPP estime les coûts d'une pénurie à 185 milliards de francs20.

Les centrales de réserve, les groupes électrogènes de secours et les installations CCF ont des conséquences négatives sur le territoire et l'environnement. Les conséquences du projet sur les émissions de gaz à effet de serre sont évaluées au ch. 6.4.1. En cas de recours à la réserve thermique, il faut tenir compte du fait que les différentes installations ont des niveaux d'émissions différents. Les émissions générées par la production d'électricité issue d'installations thermiques à combustibles fossiles varient fortement en fonction de la technologie utilisée. Par exemple, la production de 1 GWh d'électricité génère dans le meilleur des cas environ 130 kilogrammes d'oxyde d'azote NOx (turbine à gaz fonctionnant au gaz et équipée d'un catalyseur SCR). Dans le pire des cas, il faut s'attendre, en revanche, à des émissions de plus de neuf tonnes de NOx pour la même quantité d'électricité (groupe électrogène de secours avec moteur à combustion sans catalyseur SCR). Pour une quantité d'électricité estimée à 220 GWh, ce qui correspond à peu près à une consommation journalière en hiver qui devrait être répartie entre toutes les installations de la réserve thermique, les émissions d'oxyde d'azote par jour de cette dernière atteignent, dans le pire des cas, environ 4 %, comparées avec les émissions annuelles de toutes les autres sources réunies. Le pourcentage est de près de 11 % en comparaison avec les émissions annuelles d'oxyde d'azote dues au transport de personnes par la route en Suisse. Les effets des centrales de réserve et des groupes électrogènes de secours sur l'environnement ne dépendent donc pas seulement de la durée d'utilisation ou de la quantité d'électricité, mais aussi, dans une large mesure, de l'ordre dans lequel les centrales de réserve ou les groupes électrogènes de secours sont exploités. Il faut en outre noter que les conséquences sur la qualité de l'air peuvent varier considérablement en fonction du site et des conditions météorologiques. En vue de réduire au maximum les effets sur l'environnement, les consignes pour le recours donnent la priorité aux installations à faible flux d'émissions. Afin de tenir compte des
différents niveaux d'émissions ainsi que des différentes conditions d'exploitation (comme la durée minimale d'exploitation) le recours ne se fera pas dans la même mesure pour toutes les installations dans le cas de la réserve thermique, contrairement à la réserve hydroélectrique. L'ElCom fixe dans les consignes pour le recours les installations ou les types d'installations auxquels il est fait appel selon la situation.

7

Aspects juridiques

7.1

Constitutionnalité

7.1.1

Bases juridiques

Les modifications prévues dans la LApEl reposent essentiellement sur l'art. 91, al. 1, de la Constitution (Cst.)21. Cette disposition confère à la Confédération une compétence globale de légiférer sur le transport et la livraison de l'électricité, qui comprend notamment les régulations du marché ainsi que des mesures structurelles visant à 20 21

OFPP, Rapport sur l'analyse nationale des risques, 2020.

RS 101

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maintenir la sécurité d'approvisionnement22. La possibilité d'obliger des exploitants de centrales de réserve adaptées à participer à la réserve d'électricité s'appuie sur l'art. 102 Cst. concernant l'approvisionnement économique du pays. Il s'agit d'une mesure préventive au sens de l'al. 1, 2e phrase, de cette disposition.

Les modifications prévues dans la LEne visant à encourager des installations CCF ont été conçues en premier lieu pour une consommation économe et rationnelle et se fondent donc principalement aussi bien sur l'article concernant la politique énergétique (art. 89, al. 2, Cst.) que sur celui concernant la protection de l'environnement (art. 74 Cst.). Le Conseil fédéral avait déjà fixé dans son message du 4 septembre 2013 relatif au premier paquet de mesures de la Stratégie énergétique 205023 que l'art. 74 Cst. donne à la Confédération la compétence globale de prendre toutes mesures opportunes pour réaliser l'objectif de protection de l'environnement. Comme la gestion économe de l'énergie et la promotion des énergies renouvelables contribuent à réduire les atteintes à l'environnement, l'article constitutionnel sur l'environnement donne à la Confédération des possibilités considérables d'intervention et de pilotage dans le domaine de l'énergie. De ce fait, il est la base constitutionnelle de toutes les dispositions de la loi sur l'énergie qui visent en définitive à éviter ou à réduire les atteintes nuisibles à l'être humain ou à l'environnement. L'encouragement des installations CCF permet avant tout de remplacer les chaudières de charge de pointe existantes dans les zones urbaines, fonctionnant uniquement aux combustibles fossiles et produisant exclusivement de la chaleur pour l'injecter dans les réseaux de chaleur à distance. Outre la chaleur, les installations CCF permettent également de produire de l'électricité. L'énergie primaire dans ces installations est ainsi utilisée doublement, ce qui représente une consommation économe et rationnelle de l'énergie en comparaison avec les centrales à gaz. Avec les prescriptions énoncées à l'art. 34a, al. 2, let. c, LEne (participation au SEQE, compensation), les combustibles utilisés sont considérés comme climatiquement neutres selon la loi sur le CO2.

L'article sur la protection de l'environnement (art. 74 Cst.) sert aussi de base aux
modifications de la loi sur le CO2. La nouvelle disposition sur l'information du public (art. 55a LEne) repose sur les art. 89 et 102 Cst.

L'Office fédéral de la justice estime que l'appel d'offres pour la construction de nouvelles centrales de réserve ainsi que le financement de la construction et du démantèlement au moyen de la rétribution de l'utilisation du réseau ne sont pas compatibles avec la Constitution. L'art. 91, al. 1, Cst. ne confère aucune compétence à la Confédération dans le domaine de la production d'électricité. Par conséquent, la Confédération ne peut ni exploiter elle-même des installations de production d'électricité, ni mettre au concours ou commander la construction de nouvelles installations de production, ni régler leur financement. De même, la rémunération de l'utilisation du réseau ne pourrait inclure que les coûts des prestations directement liées à l'exploitation des réseaux. Or, le projet de loi prévoit de couvrir l'ensemble des coûts d'investissement pour les centrales de réserve.

22 23

FF 2022 1183, ch. 7.1 FF 2013 6771, 6959

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FF 2024 710

Du point de vue du Conseil fédéral, l'art. 91, al. 1, Cst. vise à garantir le fonctionnement effectif des réseaux électriques, pour lesquels la Confédération assume une responsabilité subsidiaire. Les nouvelles centrales de réserve sont un élément indispensable de la réserve d'électricité, dans la mesure où celle-ci garantit le maintien de la tension sur le réseau dans des situations exceptionnelles. La production d'électricité n'est qu'un moyen et non une fin en soi. Comme les nouvelles centrales de réserve sont fonctionnellement rattachées au réseau, elles peuvent également être financées par la rémunération de l'utilisation du réseau.

7.1.2

Compatibilité avec les droits fondamentaux

Le projet préserve les droits fondamentaux constitutionnels, en particulier la garantie de la propriété (art. 26 Cst.) et la liberté économique (art. 27 Cst.). Il ne contient pas de disposition contraire à la concurrence.

La réserve d'électricité se déroule en dehors du marché. Elle n'a aucune influence sur la production (régulière) d'électricité. La distribution de courant reste elle aussi intacte lors de l'approvisionnement ordinaire. Du côté de la consommation, seuls les coûts sont sensiblement réduits. Ces derniers peuvent être considérés comme une prime de couverture. Les participants à la réserve d'électricité sont en principe désignés par une procédure d'appel d'offres public ouverte à toutes les parties intéressées, à l'exception de la réserve hydroélectrique. Il y aurait atteinte à la garantie de la propriété ou de la liberté économique si le DETEC obligeait l'exploitant d'une centrale de réserve, d'un groupe électrogène de secours ou d'une installation CCF à participer à la réserve d'électricité car il ne serait pas possible autrement de constituer la réserve thermique à un coût approprié et dans l'ampleur escomptée. Cette atteinte aux droits fondamentaux serait licite à la lumière de l'art. 36 Cst. Le niveau normatif nécessaire (base légale formelle) est fourni par la loi fédérale dont il est question dans le présent message.

Il y a également un intérêt public notoire à constituer une réserve d'électricité dimensionnée de manière adéquate et à un coût approprié. Par ailleurs, le principe de proportionnalité resterait aussi garanti. Compte tenu des conditions restrictives telles qu'elles sont ancrées à l'art. 8b, al. 3, LApEl, une obligation de participation à la réserve d'électricité serait aussi nécessaire qu'appropriée pour dimensionner la réserve thermique de manière adéquate et à un coût approprié. Une telle obligation resterait donc dans les limites de ce qui est nécessaire à l'atteinte de l'objectif. Enfin, l'essence des droits fondamentaux resterait aussi inviolée, d'autant que la participation à la réserve d'électricité n'est pas prévue pour durer excessivement longtemps.

C'est grâce à l'encouragement d'installations CCF dans la LEne que ces installations ont une chance de participer au marché de l'électricité.

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7.2

Compatibilité avec les obligations internationales de la Suisse

Dans le droit du commerce mondial, l'électricité est assimilée à une marchandise ordinaire. De ce fait, les principes de l'Accord du 15 avril 1994 instituant l'Organisation mondiale du commerce24 et de l'Accord général du 30 octobre 1947 sur les tarifs douaniers et le commerce (GATT)25 s'appliquent aussi au commerce de l'électricité.

Les tâches qui présentent un caractère de service sont régies par l'Accord général sur le commerce des services. La gestion des aides d'État se conforme quant à elle à l'Accord sur les subventions et les mesures compensatoires (ASMC; annexe 1A.13 GATT), et l'introduction de prescriptions techniques et de normes est soumise aux dispositions de l'Accord du 12 avril 1979 relatif aux obstacles techniques au commerce26. Il faut encore tenir compte de l'Accord du 22 juillet 1972 entre la Confédération suisse et la Communauté économique européenne27 concernant le libre-échange et de la Convention du 4 janvier 1960 instituant l'Association Européenne de LibreÉchange (AELE)28 pour ce qui est des relations respectivement avec l'UE et l'AELE.

Le présent projet tient compte de ces obligations internationales. Compléter la réserve d'électricité au moyen de centrales de réserve, de groupes électrogènes de secours et d'installations CCF n'a aucune conséquence en termes de concurrence puisque la réserve d'électricité est constituée et gérée en dehors du marché. Les contributions d'investissement prévues dans la LEne pour les installations CCF doivent être considérées comme des subventions au sens de l'ASMC.

7.3

Forme de l'acte à adopter

Le projet contient des dispositions importantes fixant des règles de droit, qui doivent être édictées sous la forme d'une loi fédérale, conformément à l'art. 164, al. 1, Cst.

Les révisions de la LApEl, de la loi sur le CO2 et de la LEne suivent par conséquent la procédure législative normale.

7.4

Frein aux dépenses

Conformément à l'art. 159, al. 3, let. b, Cst., les dispositions relatives aux subventions ainsi que les crédits d'engagement et les plafonds de dépenses, s'ils entraînent de nouvelles dépenses uniques de plus de 20 millions de francs ou de nouvelles dépenses périodiques de plus de 2 millions de francs, doivent être adoptés à la majorité des membres de chaque conseil.

Les modifications de la LApEl n'entraînent aucune dépense supplémentaire pour la Confédération puisque les coûts de la réserve d'électricité sont financés au moyen de 24 25 26 27 28

RS 0.632.20 RS 0.632.21 RS 0.632.231.41 RS 0.632.401 RS 0.632.31

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la rémunération pour l'utilisation du réseau, bien que certains coûts puissent aussi être à la charge des groupes-bilan (cf. art. 8l, al. 4, LApEl). Sous réserve des coûts d'exécution de l'ElCom, lesquels ne peuvent pas être entièrement couverts par des émoluments, le financement de la réserve d'électricité n'a pas de conséquence sur le budget de la Confédération.

Le nouvel art. 19b de la loi sur le CO2 prévoit que la Confédération peut décharger les exploitants d'installations bicombustibles ou multicombustibles de coûts supplémentaires qu'engendre pour eux l'achat de droits d'émission de CO2, si ces exploitants doivent passer à un agent énergétique fossile sur instruction des autorités et subissent de ce fait un préjudice financier démesuré. Il en résulte alors des coûts supplémentaires pour la Confédération, ces dépenses étant financées par le budget fédéral. Le montant des coûts supplémentaires dépend de la durée du changement d'agent énergétique, des coûts des agents énergétiques et des droits d'émission ainsi que de la situation économique de chaque entreprise. Il est donc difficile d'estimer ces coûts, mais ils ne devraient pas dépasser 5 millions de francs par an. L'art. 19b est ainsi soumis au frein aux dépenses.

Dans la révision de la LEne, cela concerne les mesures prévues à l'art. 34a (contribution d'investissement allouée pour les installations de couplage chaleur-force). Ces mesures sont donc soumises au frein aux dépenses au sens de l'art. 159, al. 3, let. b, Cst (cf. explications dans le message relatif au premier paquet de mesures de la Stratégie énergétique 205029). Il n'est cependant pas prévu ici d'augmenter le supplément perçu sur le réseau, raison pour laquelle l'art. 34a n'a aucune conséquence dans le cadre du frein à l'endettement.

7.5

Conformité à la loi sur les subventions

L'art. 5 de la loi du 5 octobre 1990 sur les subventions (LSu)30 impose au Conseil fédéral d'examiner périodiquement les aides et les indemnités allouées par la Confédération. Dans le rapport 2008 du Conseil fédéral sur les subventions31, le Conseil fédéral a établi le principe selon lequel l'examen des subventions dont la base légale a été créée ou modifiée pendant la période d'examen doit systématiquement être intégré dans le message y afférent. Cet examen est réalisé dans le cadre du présent message, il a été vérifié que les aides financières et les indemnités allouées par la Confédération répondent à un intérêt justifié et suffisant de cette dernière, qu'elles atteignent leur objectif de manière économique et efficace et qu'elles sont allouées selon des principes uniformes et équitables. Il a en outre été vérifié qu'elles sont aménagées en tenant compte des impératifs de politique budgétaire et qu'elles correspondent à une répartition judicieuse des tâches et des charges entre la Confédération et les cantons.

29 30 31

FF 2013 6771, 6965 RS 616.1 Consultable sous www.efv.admin.ch > Thèmes > Politique budgétaire, Bases > Subventions, Examen des subventions > Rapport du Conseil fédéral sur les subventions.

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Les modifications proposées de la LApEl n'entraînent pas de changements fondamentaux dans le domaine de la réserve d'électricité sur le plan des aides ou des indemnités au sens de la LSu. Les mécanismes de financement de la réserve thermique ici concernés s'orientent vers ce qui a déjà été créé dans la loi fédérale relative à un approvisionnement en électricité sûr reposant sur des énergies renouvelables et dans l'OIRH pour la réserve existante.

Il en va autrement des modifications de la LEne. Celles-ci prévoient des subventions sous la forme de contributions d'investissement pour les nouvelles installations CCF.

Des installations CCF supplémentaires, qui remplacent notamment des chaudières destinées aux charges de pointe et fonctionnant aux énergies fossiles dans des réseaux de chauffage à distance, produisent de l'électricité supplémentaire durant le semestre d'hiver. Au vu des prévisions à long terme concernant les prix de l'électricité et du manque de rentabilité de ces installations qui en découle, soutenir ces dernières est inévitable.

L'octroi des contributions obéit à la procédure allégée que prévoit le chap. 5 LEne.

L'effet des subventions sera régulièrement évalué sur la base de l'art. 55 LEne. De plus, l'encouragement est limité à dix ans.

Sans la subvention prévue à l'art. 19b de la loi sur le CO2 pour les entreprises intégrées au SEQE, un ordre de passer du gaz au pétrole lorsqu'une pénurie de gaz se profile ne serait pas suivi, ou trop lentement. Cette subvention est donc suffisamment justifiée.

7.6

Délégation de compétences législatives

Une loi fédérale peut prévoir une délégation de la compétence d'édicter des règles de droit, à moins que la Constitution ne l'exclue (art. 164, al. 2, Cst.). L'art. 164, al. 1, Cst. et la jurisprudence afférente indiquent notamment, comme limitation générale, qu'il faut édicter sous la forme d'une loi les dispositions fondamentales importantes.

Dans le cas présent, certaines normes de délégation provenant de la loi fédérale relative à un approvisionnement en électricité sûr reposant sur des énergies renouvelables ont été reprises dans ce projet, dont celles sur les conditions de participation à la réserve hydroélectrique (art. 8d, al. 3). Les normes de délégation concernant le recours extraordinaire à la réserve d'électricité même en cas d'équilibre du marché ont été précisées (art. 8l, al. 6, let. a). Ont été ajoutées les normes de délégation relatives à la concrétisation des conditions de participation pour les centrales de réserve, les groupes électrogènes de secours et les installations CCF (art. 8e, al. 4, et 8h, al. 4). La compétence du Conseil fédéral de réglementer les conséquences financières en cas de démantèlement ou de poursuite de l'exploitation d'une centrale de réserve construite pour la réserve thermique (art. 8g, al. 3) est également nouvelle. Ces normes de délégation sont suffisamment précises s'agissant de leur contenu, de leur but et de leur portée, tout en évitant des dispositions trop concrètes dans le texte de loi et en créant une base légale pour les règles correspondantes dans l'OIRH.

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7.7

Protection des données

Le projet n'implique pas de traitement de données notable. Pour ce qui est de l'information du public concernant l'approvisionnement en énergie (art. 55a P-LEne), les données personnelles ne peuvent être publiées que sous une forme anonymisée. L'information (via notamment le dashboard de l'énergie de la Confédération) ne pose donc pas de problème du point de vue du droit sur la protection des données.

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