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Feuille Fédérale

Berne, le 27 octobre 1975

127e année

Volume U

N°43 Paraît, en règle générale, chaque semaine. Prix: 75 francs par an: 42 fr. 50 pour six mois: étranger: 91 francs par an, plus la taxe postale d'abonnement ou de remboursement.

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75.084 Message du Conseil fédéral à l'Assemblée fédérale relatif à un projet d'arrêté fédéral concernant la surveillance des prix (Du 29 septembre 1975) Monsieur le Président, Mesdames et Messieurs,

Nous avons l'honneur de vous soumettre, avec le présent message, un projet de nouvel arrêté fédéral concernant la surveillance des prix.

1 Sommaire L'arrêté fédéral urgent sur la surveillance des prix, des salaires et des bénéfices, édicté en décembre 1972, arrive à échéance à la fin de 1975. Cet arrêté nous donne la compétence de surveiller les prix, les salaires et les bénéfices, de faire des enquêtes dans ce secteur, d'entamer des entretiens dans des cas exceptionnels et d'abaisser des prix majorés sans raison justifiable. Actuellement, il serait prématuré de renoncer à des mesures complémentaires visant l'évolution des prix. La lutte contre le renchérissement demeure une tâche prioritaire dans notre pays où l'inflation reste importante. La surveillance des prix peut y apporter une précieuse contribution ainsi qu'il résulte de l'expérience acquise jusqu'ici. C'est pourquoi nous sommes d'avis que les attributions qui nous sont conférées dans ce domaine restent indispensables.

Le nouvel arrêté fédéral devra tenir compte des modifications survenues dans la situation économique. Les nouvelles mesures se limiteront aux prix et seront fixées selon les secteurs et les branches économiques afin que l'évolution économique et le renchérissement puissent être pris en considération.

2

L'arrêté sur la surveillance de 1972

En octobre 1972, la hausse annuelle de l'indice du coût de la vie a atteint le taux record de 7,3 pour cent. Devant la persistance d'un fort renchérissement, accompagné d'une expansion croissante de la demande et de multiples indices de 1975 -- 679 Feuille fédérale. 127- année. Vol. n.

109

1622 surchauffe, nous avons été amenés à vous soumettre notre message du 4 décembre 1972 à J'appui d'arrêtés fédéraux urgents relatifs à des mesures complémentaires visant à combattre la surchauffe économique. Nous relevions dans notre message l'évolution désordonnée des années précédentes et l'insuffisance des bases légales pour combattre efficacement les fortes tendances inflationnistes (message 11 460 du 4 décembre 1972). Nous y considérions que, si on laissait libre cours à l'évolution, la croissance du produit national réel serait de plus en plus influencée par la forte poussée des prix et des coûts dans tous les domaines et par une mentalité inflationniste s'étendant toujours plus. A notre avis, les mesures prises jusqu'alors ne semblaient pas avoir de chances de succès.

Le train de mesures présenté englobait des arrêtés fédéraux dans le domaine du crédit, la prorogation des dispositions sur le dépôt à l'exportation, la limitation des amortissements admissibles pour les impôts sur le revenu, la stabilisation du marché de la construction et la surveillance des prix. Pour des rais.ons d'ordre général ou pratique, nous avons cependant refusé de prendre des mesures influençant la politique des revenus en bloquant les prix et les salaires.

En revanche, nous avons jugé nécessaire d'instituer une surveillance des prix afin de ne pas demeurer impuissants devant la hausse excessive des prix de certaines marchandises et prestations de services. Si des hausses extraordinaires de prix étaient constatées, on envisagerait de prendre contact avec les groupes économiques intéressés, de procéder à des enquêtes et d'intervenir, lors d'abus manifestes, dans la formation des prix, ce qui permettrait d'obtenir du public un comportement favorisant la stabilité.

L'Assemblée fédérale adopta le 20 décembre 1972 les cinq arrêtés fédéraux urgents que nous avions présentés. Le projet relatif à la surveillance des prix fut élargi au cours des délibérations parlementaires. Il fut d'abord complété, pour les cartels ou les organisations analogues, par l'obligation d'annoncer et de motiver les hausses de prix envisagées. Les salaires et les bénéfices furent également soumis à la surveillance; cependant les mesures prévues ne comprenaient que des enquêtes et des entretiens. Contrairement à ce qui avait été décidé pour la
surveillance des prix, les autorités n'avaient aucun véritable pouvoir d'intervention pour réduire les salaires et les bénéfices.

Cet arrêté fédéral, ayant été soumis au peuple et aux cantons conformément à l'article 89Ms, 1er et 3e alinéas, de la constitution, fut accepté, lors de la votation du 2 décembre 1973, par le peuple par 751 173 voix contre 505 843 ainsi que par dix-sept cantons et six demi-cantons contre deux cantons.

Conformément à l'article 13 de l'arrêté fédéral, nous avons délégué nos pouvoirs au préposé à la surveillance des prix, des salaires et des bénéfices en édictant l'ordonnance du 10 janvier 1973 concernant la surveillance des prix, des salaires et des bénéfices. Une commission consultative a été chargée d'assister le préposé; elle est composée paritairement de représentants des organisations faîtières des employeurs et des travailleurs.

1623

3 Exécution de l'arrêté fédéral depuis 1973 31 Surveillance des prix L'arrêté nous donne la compétence de surveiller l'évolution des prix et notamment d'abaisser les prix augmentés sans raison justifiable. Nous pouvons prescrire que les prix de détail seront affichés. Nous pouvons également obliger les cartels ou les organisations analogues à annoncer et motiver les hausses de prix envisagées avant leur entrée en vigueur.

Dans l'ordonnance du 10 janvier 1973 concernant la surveillance des prix, des salaires et des bénéfices, nous avons disposé que chacun peut annoncer les hausses de prix aux autorités et services désignés. Sont soumis à l'obligation d'annoncer les hausses de prix et de les motiver, les cartels ou organisations analogues des branches économiques suivantes: industrie de la construction, meubles, chaussure, arts graphiques, alimentation, boissons, restauration et hôtellerie, garages, secteur bancaire et assurances. Cette obligation s'étend en outre aux marchandises suivantes : pain et petite boulangerie, viande et préparations de viande, produits hygiéniques, cosmétiques et pharmaceutiques, produits de nettoyage, carburants et combustibles liquides.

Dans notre ordonnance du 12 juin 1973 sur l'affichage des prix de détail, nous avons fixé les modalités de l'affichage dans le commerce de détail et pour les prestations des hôtels et restaurants.

Comme ni l'arrêté fédéral ni l'ordonnance ne donnent une définition complète d'une hausse de prix injustifiée, le préposé a fait établir des principes complémentaires. Les «Directives concernant l'appréciation des hausses de prix» du 27 juillet 1973 disposent ce qui suit: 1. L'appréciation est limitée aux augmentations de prix.

2. Les augmentations de prix sont réputées injustifiées dans la mesure où elles dépassent les augmentations du coût et aboutissent à des augmentations extraordinaires du bénéfice.

3. Les augmentations de prix sont réputées injustifiées dans la mesure où elles sont fondées sur une appréciation de la valeur du matériel ou des marchandises qui s'écarte du prix de revient.

4. Les augmentations de prix sont réputées injustifiées dans la mesure où elles ne tiennent pas compte de la réduction de coût résultant des changements de parité de la monnaie.

5. Les augmentations de salaires convenues collectivement ou celles qui leur sont assimilables sont en principe considérées comme des coûts. En cas de

1624 hausse extraordinaire des salaires - au sens de l'article 4 de l'arrêté fédéral et de l'article 7 de l'ordonnance - le préposé peut diminuer le taux d'imputation d'une telle augmentation. Ce faisant, il tiendra compte des profits réalisés par l'entreprise ou par la branche et du niveau général des salaires, ainsi que des obligations déjà souscrites et d'autres circonstances particulières.

6. En principe, les recommandations générales que des associations font pour toute la Suisse en matière de prix ne sont pas licites.

32 Surveillance des salaires et des bénéfices L'arrêté fédéral nous autorise à surveiller l'évolution des salaires et des bénéfices. En cas de hausse extraordinaire, nous cherchons des solutions de concert avec les milieux intéressés aux fins de maintenir l'évolution dans des limites supportables pour l'ensemble de l'économie.

Pour assurer .l'exécution de ces dispositions, le préposé a édicté, le 23 janvier 1974, des directives sur l'obligation d'annoncer les augmentations de salaires et de bénéfices. Selon ces directives, il est en droit de se faire communiquer les informations nécessaires tant par les organisations des employeurs que par celles des travailleurs. Il engage des conversations avec les parties lorsque ces informations lui paraissent inquiétantes. Si la négociation n'aboutit pas à une entente, le préposé soumet le cas à la commission consultative.

Les directives prévoient en outre que le préposé peut faire périodiquement des enquêtes sur l'évolution des bénéfices et, en cas de hausse extraordinaire de ceux-ci, appliquer la procédure prévue à l'article 3 de l'arrêté sur la surveillance aux fins d'empêcher ou de réduire des augmentations de prix injustifiées.

Ni les organisations d'employeurs ni celles des travailleurs n'ont fait par la suite de communications de cette sorte au préposé. En revanche, l'évolution des bénéfices d'un certain nombre d'entreprises et de branches économiques a été examinée à diverses reprises (cf. rapport du Conseil fédéral à l'Assemblée fédérale sur les mesures complémentaires visant à combattre la surchauffe économique, du 16 octobre 1974, FF 1974 1116).

Par la suite, il n'a pas para nécessaire, en raison des changements rapides sur le marché du travail et de l'état des revenus, de poursuivre les conversations entamées avec les partenaires sociaux aux fins d'empêcher des hausses de salaires et de bénéfices que l'ensemble de l'économie ne pourrait supporter.

Cette tâche a été confiée, dès le 1er juillet 1974, au délégué aux questions conjoncturelles et aux possibilités de travail.

1625 33 Annonces et enquêtes sur les hausses de prix L'efficacité des mesures prises a été démontrée non seulement par le nombre impressionnant d'annonces reçues du public au sujet d'augmentations de prix - on a enregistré quelque 25 000 annonces depuis l'entrée en vigueur de l'arrêté fédéral - mais encore par le fait que les cartels et organisations analogues ont satisfait à l'obligation d'annoncer leurs hausses. Dans de nombreux cas, des entreprises et organisations qui n'étaient pas assujetties à cette obligation ont cependant annoncé librement au préposé les hausses de prix qu'elles envisageaient et les ont soumises à son examen.

L'ouverture d'un centre collecteur a répondu à la demande d'une grande partie de l'opinion publique et a donné la possibilité de lutter contre les abus choquants dans le domaine des prix. Les annonces de hausses de salaires et de bénéfices ont été plutôt rares; des enquêtes systématiques n'ont pas été entreprises.

Sur les 22 260 annonces enregistrées jusqu'à la fin d'août 1975, 5900 ne concernaient pas des augmentations de prix. Les autres (16 360) se répartissent comme il suit entre les groupes de dépenses : En %

Loyer, chauffage et électricité Ménage et aménagement du logement Travaux d'artisanat Denrées alimentaires Boissons et tabac Habillement et entretien Instruction et divertissements Santé et soins corporels Restauration et hôtellerie Secteur bancaire Transports et services publics Divers

14 2 14 6 3 2 3 9 15 6 11 15

Durant la même période, les milieux économiques ont soumis au préposé, pour examen, 4980 demandes d'augmentation de prix.

Le préposé a d'emblée voué une grande attention à l'évolution des prix à l'importation. Sur mandat du Conseil fédéral, une enquête a été entreprise au début de 1975 sur les répercussions des réductions de prix à l'importation résultant du cours du change. Le rapport a été présenté le 30 mai 1975 au Département fédéral de l'économie publique.

1626

34 Organisation de l'exécution Un bureau composé de seize à dix-huit collaborateurs a été mis à la disposition du préposé. Afin d'être en mesure d'apprécier les augmentations de prix, il a été en outre fait appel à la collaboration des services spécialisés de la Confédération, à des commissions créées par le préposé, à des organisations de l'économie et enfin, dans certains cas, à des experts étrangers à l'administration.

Au cours de dix-huit séances, la commission consultative a traité notamment des questions de principe et a entendu des rapports du préposé sur l'exécution de l'arrêté.

En étroite collaboration avec les services cantonaux et communaux du contrôle des prix, le bureau du préposé a surveillé l'application des réglementations et des mesures prises. Les offices cantonaux compétents veillent à une application correcte des dispositions de l'ordonnance sur l'affichage des prix de détail.

35 Interventions La surveillance des prix établit d'abord l'ampleur des augmentations de prix. Elle apprécie ensuite leur justification, au sens de l'arrêté et des «Directives touchant l'appréciation des hausses de prix»; elle mesure aussi leur importance pour l'ensemble de l'économie et évalue leurs répercussions éventuelles sur l'indice des prix à la consommation. Ces analyses préliminaires terminées, on fixera les points essentiels sur lesquels le préposé devra faire porter ses interventions. Depuis l'entrée en vigueur de l'arrêté, il a été procédé à plus de 4000 analyses d'augmentations de prix.

Si l'analyse préalable permet de constater qu'une augmentation de prix n'est pas conforme aux « directives», le préposé s'entretient avec l'entreprise ou l'organisation en question (environ 700 entretiens jusqu'ici). Des diminutions de prix, des hausses de prix moins fortes que celles qui étaient envisagées ou certaines réglementations concernant le comportement futur à adopter dans le domaine des prix résultent de ces entretiens.

Si les entretiens n'aboutissent pas au résultat escompté, le préposé peut ordonner que les prix soient abaissés. Il s'agit en l'occurrence d'une décision administrative contre laquelle un recours peut être interjeté auprès du Département fédéral de l'économie publique. En vertu de la pratique approuvée par le Tribunal fédéral (ATFPPI b 215), l'effet suspensif peut en principe
être retiré au recours.

Il n'existe pas de pouvoir d'intervention semblable dans le domaine de la surveillance des salaires et des bénéfices. Toujours est-il que la surveillance des prix exerce aussi une influence indirecte sur l'évolution des salaires et notam-

1627 ment sur l'évolution des bénéfices. En principe, les hausses de salaires invoquées pour motiver les augmentations de prix ne sont reconnues que pour le montant convenu collectivement; de plus, lors d'augmentations de prix, la progression des bénéfices ne doit pas être supérieure à celle des salaires.

36

Effets

II n'est pas possible d'évaluer exactement l'influence qu'exercent les mesures de surveillance sur l'évolution des prix. Il est certain que l'exécution de l'arrêté sur la surveillance n'a pas seulement eu des effets psychologiques, mais a été également un signal d'alarme. L'opinion publique, renseignée continuellement - et tout spécialement par l'affichage des prix de détail - a accordé plus d'attention aux prix. Consommateurs et entreprises sont beaucoup moins enclins à accepter passivement des augmentations de prix. De nombreuses entreprises n'ont pas appliqué les augmentations de prix envisagées, ou ne l'ont fait qu'en partie seulement, pour éviter une discussion avec la surveillance des prix, qui serait désagréable pour leur prestige. D'une manière générale, l'économie s'est montrée très coopérative; elle a également maintenu ses augmentations de prix dans les limites fixées par les «directives» alors que le marché leur permettait encore de pratiquer des prix plus élevés.

Le ralentissement de l'augmentation des prix dû à l'activité du préposé a eu des effets appréciables sur la moyenne annuelle du taux de renchérissement, calculé sur la base de l'indice des prix à la consommation.

Une planification chronologique et un échelonnement des interventions ont permis, tant en 1973 qu'en 1974, de modérer le renchérissement.

Quant aux interventions directes dans le processus de formation des prix, il s'agissait avant tout d'empêcher, si les circonstances le permettaient, des augmentations de prix rendues possibles par la situation du marché. Dans les cas où les augmentations de prix avaient déjà eu lieu, il a fallu rendre plus difficile ou empêcher les répercussions sur l'échelon suivant. Il était désirable que les augmentations de prix inévitables aient le moins d'influence possible sur les prix aux échelons suivants de la production, afin qu'il ne se produise pas de hausse générale des prix. Enfin, il y avait lieu d'empêcher que le maintien d'anciennes méthodes ayant perdu leur justification en matière de calcul des marges ne provoquent, lors d'un renchérissement dû aux matières premières, une hausse de prix exagérée à l'échelon du consommateur. On a ainsi tenté d'atténuer ou de supprimer les effets du mécanisme de transfert et d'accélération du renchérissement inhérent au système des institutions
économiques.

L'influence exercée sur l'indice a été plus ou moins forte suivant l'intensité des mesures de surveillance. La surveillance des prix des médicaments a eu pour

1628 effet que la hausse de l'indice du groupe «médicaments et matériel sanitaire» a été inférieure de moitié, pour 1973 et 1974, à celle de l'ensemble du groupe «santé et soins corporels».

Les effets exercés sur l'indice des prix à la consommation par la réglementation des taux d'intérêt hypothécaire et par l'accord sur l'essence et les huiles de chauffage peuvent être évalués avec plus d'exactitude. Sans réglementation, les taux applicables aux hypothèques existantes des immeubles locatifs (anciennes hypothèques) dépasseraient de 0,5 à 0,6 pour cent le niveau actuel, ce qui aurait pu entraîner une hausse du taux d'inflation de 1,5 à 1,8 pour cent. La hausse du taux de l'intérêt hypothécaire en octobre 1974 a montré qu'il est toujours possible de faire supporter aux locataires ces augmentations de coûts. La hausse du taux de l'intérêt hypothécaire de Vi à. % pour cent, accompagnée d'autres facteurs de renchérissement importants, s'est traduite, en novembre 1974, par une augmentation de 6 pour cent du groupe «loyer» de l'indice des prix à la consommation, augmentation à laquelle est venue s'ajouter, jusqu'en mai 1975, une nouvelle majoration des loyers de 4,8 pour cent.

Dans la mesure du possible, des accords particuliers sur les coûts ont été conclus avec l'économie pendant la période de renchérissement des matières premières de 1973/1974; ces accords prescrivent une baisse des prix à la production dès qu'une baisse de prix des matières premières se manifestera.

Ainsi, des baisses de prix ont été obtenues dans plusieurs cas, notamment pour les produits saccharifères, le ciment et le papier.

En ce qui concerne les mesures prises en vertu de l'arrêté fédéral sur la surveillance des prix, des salaires et des bénéfices, vous avez été renseignés par nos rapports annuels sur les mesures complémentaires visant à combattre la surchauffe économique. (Il s'agit des rapports du Conseil fédéral à l'Assemblée fédérale du 24 octobre 1973, [FF 1973II 884] et du 16 octobre 1974 [FF 1974II 1093]). A ce propos, nous vous renvoyons également au compte rendu de l'activité des organes chargés de l'exécution, qui a paru dans nos rapports de gestion de 1973 et 1974.

4

Nécessité de poursuivre la surveillance des prix 41 Récession et renchérissement

A la surchauffe des années dernières a succédé, dès le milieu de 1974, un fléchissement économique à l'échelle mondiale. Il a rapidement abouti à une véritable récession qui dure encore et à laquelle notre économie nationale n'a pu échapper. En outre, la forte réévaluation du franc suisse a porté préjudice à nos exportations. Sur le marché intérieur, une baisse de la demande, liée à nos structures mêmes, a accompagné ce renversement économique général, en

1629 particulier dans le domaine de la construction. Plusieurs secteurs de l'économie ont été touchés par un fléchissement de l'emploi et des revenus. Le produit national brut n'augmente donc plus en valeur réelle. La production est en baisse tant pour la demande intérieure que pour les exportations.

Malgré les changements survenus dans l'économie, le taux de renchérissement se maintient à un niveau élevé. Le taux d'accroissement des biens et des services, pris en considération dans l'indice des prix à la consommation, n'est pas sensiblement inférieur à ce qu'il était à l'époque où a été édicté l'arrêté fédéral du 20 décembre 1972. Les frais de construction et une partie des prix de gros ont accusé un certain recul. Le marché de diverses matières premières s'est modifié et un ralentissement partiel a succédé à la montée des prix. Dans l'ensemble, il n'a cependant pas encore été possible d^arriver à une stabilisation.

Le renchérissement persiste, bien que son rythme se soit légèrement ralenti par rapport aux trois dernières années.

Les mesures, prises dans l'intervalle par les pays industrialisés de l'Ouest, ont principalement pour but de remédier à la crise parfois sensible de l'emploi.

La politique monétaire restrictive est assouplie et les dépenses publiques sont considérablement augmentées. Le problème de l'inflation demeure important; il convient donc d'en tenir compte dans nos dispositions. Le renchérissement persiste sous l'influence de l'économie tant extérieure qu'intérieure.

Taux de chômage et indices des prix à la consommation dans certains pays de l'OCDE Taux de chômage

1972

1973

Indice des prix à la consommation.

Modification en % par rapport à la période correspondante de l'année precedente

1974

i"t.

2« t.

1975

1972

3,3 -- 4,5

1975

Etats-Unis d'Amérique Canada ....

Japon République féd, d'Ail. .

France . . . . .

GrandeBretagne .

Italie Suèdç Suisse

1973

i"t.

2" t.

1975

11,0

9,9 10,5

1975

5,2 6,4 1,4

4,9 5,6 13

5,6 5,4 14

8,4 6,9 19

8,9 7,2

0,9 2,9

1,1 31

2,4 36

3,2 50

4,6 55

5,8 6,0

7,2 7,3

4,4 3,9 2,8

3,0 38 25

3,0 32 20

3,6 34 18

4,1

7,1 5,7 6,0 6,7

9,5 10,7 6,7 8,7

18

1974

6,2 11,1 -- 10,8 11,7 226

11,7

147

n^

5,9 140

1V

16,0 20,3 190 226 137 102 98 80

24,3 19,7 91 85

7,0 13 6

6,2

Sources: rapports de la Commission de recherches économiques: La situation économique, supplément de La Vie économique.

1630

42 Marchés internationaux des matières premières Sur les marchés des matières premières, la montée des prix, qui s'est manifestée surtout en 1973, est devenue presque stationnaire vers la fin de 1974.

Par la suite, les cours mondiaux de nombreuses matières premières ont accusé un recul, ce qui a eu pour effet de ralentir la progression du renchérissement dans un grand nombre de pays. Cette évolution a eu des répercussions sur les prix à la consommation, bien que les changements de prix des matières premières ne se soient produits que par étapes et avec un décalage de trois à six mois en moyenne, à en juger d'après l'indice des prix de détail. L'expérience a montré que les prix indigènes des produits importés, fondés sur les cours boursiers, sont très différents et varient suivant la concurrence, la position du marché, le renouvellement des stocks et l'importance des facteurs de risque.

Les marchés des matières premières restent instables malgré l'évolution des mois derniers. De nouvelles tendances à la hausse sont toujours possibles. Elles peuvent être provoquées par les conditions du marché mais aussi par des spéculations ou par les effets de la politique économique. Leurs répercussions sur les prix et le renchérissement continuent d'être importants en Suisse, II convient, dans la mesure du possible, de les limiter à l'essentiel, en empêchant des augmentations de prix injustifiées et en procédant aux adaptations nécessaires si de nouvelles baisses des prix des matières premières le justifient. Une baisse non négligeable des taux de renchérissement a pu être obtenue par le contrôle des augmentations. Ce sera également le cas à l'avenir tant qu'il faudra s'attendre à de nouvelles fluctuations et à ime situation instable sur le marché. Il suffit d'évoquer les problèmes posés par l'approvisionnement en carburants et en combustibles liquides ainsi que les effets spectaculaires des hausses de prix de l'automne 1973, qui ont contribué d'une manière déterminante au renchérissement de 11,9 pour cent enregistré à l'époque, le plus élevé qu'ait jusqu'ici connu notre pays. Les perspectives du marché demeurent incertaines. II n'y a pas de doute que de nouvelles augmentations de prix décidées par les pays producteurs se feront sentir jusque dans les prix de détail.

43 Economie intérieure Nous avons évoqué
les répercussions des prix des matières premières sur l'évolution des prix du marché intérieur. La hausse des prix à la consommation qui en a découlé, après s'être affirmée jusqu'en 1974, a fortement diminué depuis lors. En 1975, le taux de renchérissement intérieur se place de nouveau en tête,' tant pour les prix à la consommation que pour les prix de gros.

C'est pourquoi il convient de continuer à vouer une attention particulière au renchérissement d'origine intérieure. Celui-ci provient d'abord de l'augmentation des frais de production et des salaires ainsi que du prix des matériaux.

Selon les conditions du marché, il peut être causé par l'accumulation des besoins

Evolution des prix de 1972 à 1975 Modification, en %, par rapport à la même période de l'année précédente 1972

Indices des prix

1973

1975

1974

l"t.

2't.

17 3 12,7

3,7

-2,5

12,9

7,3

1,6

21,4 12,4

-4,0

-11,0

8,8

8,0

8,5

9,2

10,4

10,2

9,5

16,6

4,1

-0,6

3;9

l»l.

2' t.

3«t.

+·1.

l«t.

2- 1.

ÎH.

5,5

79

9,7

11 0

13,9

164

18,3

38

48

66

82

87

106

124

149

155

04

14

7,6

10,9

13,6

16,9

22,0

26,3

26,2

6,5

6,5

fi6

7,0

7,7

8,2

8,3

10,7

10,4

9,4

10,5

7,7

7,7

7,0

6,8

7,6

7,7

7,3

7,3

7,1

7,7

1,5

n,R

4,5

8,0

8,2

10,6

13,4

27,5

25,8

17,8

i«t.

2- 1.

3't. 4- 1.

2,7

2,5

37

43

35

-0,8

Total Renchérissement intérieur Renchérissement extérieur

4' t.

Prix de gros Total Produits indigènes

..

Produits importés Prix à la consommation

Sources: «La Vie économique», divers fascicules; données destinées à l'usage interne.

163u>

1632 ou par le désir de renforcer l'autofinancement. Le renchérissement persistant de nombreux services et tout particulièrement de ceux qui ont un caractère de monopole joue cependant aussi un rôle important. L'intérêt hypothécaire peut également devenir un important facteur de renchérissement. Le recours croissant au marché des capitaux pai- les pouvoirs publics, de même que la demande accrue de crédits commerciaux, déterminée en partie par les difficultés d'exportation, peuvent provoquer de nouveau une tendance à la hausse des intérêts, tendance qui, dans la situation économique actuelle, représenterait une charge considérable. Le comportement des collectivités publiques en matière de prix prend de plus en plus d'importance. Les augmentations visant à compenser un retard souvent considérable dans l'adaptation des prix exercent sur le renchérissement une action toujours plus marquée, sans compter qu'elles donnent le signal de la hausse à d'autres branches.

Sur le marché intérieur, les prix tendent plutôt, en général, à se stabiliser à un niveau élevé. Bien que la compétition soit plus forte entre les entreprises, cette concurrence n'agit pas toujours d'une manière satisfaisante sur les prix, parce que l'approvisionnement monétaire de l'économie est suffisant et que le pouvoir d'achat collectif reste donc élevé.

Souvent on tente de ne pas faire bénéficier les consommateurs des économies réalisées aux échelons antérieurs de la production ou dues à des achats relativement avantageux à l'étranger, et on cherche au contraire à s'en servir pour compenser le déséquilibre des revenus résultant de la baisse du chiffre d'affaires.

Aussi longtemps que l'inflation ne peut être maintenue dans des limites raisonnables, nous devrons continuer à vouer toute notre attention à l'évolution des prix sur le marché intérieur, compte tenu des effets de cette évolution sur le renchérissement. H faut empêcher les augmentations de prix injustifiées parce qu'elles sont contraires à l'objectif général de notre économie.

44 Tâches nouvelles Les changements survenus dans la situation économique et l'expérience acquise jusqu'ici entraînent de nouvelles tâches, II faut s'attendre à ce que certains de nos principaux partenaires écono^ miques continuent à subir des taux d'inflation élevés. Le renchérissement intérieur diminuera
et la capacité de concurrence de la Suisse augmentera. Le franc suisse restera, semble-t-il, une monnaie appréciée, le cours de son change demeurera élevé. Les désavantages qui en résultent, notamment pour l'industrie d'exportation, pourront être compensés dans la mesure où les baisses de prix des produits importés résultant de la dévaluation des monnaies étrangères se répercuteront sur le marché de détail. En l'occurrence, il s'agit moins d'empêcher des augmentations de prix injustifiées que de parvenir à abaisser des prix

1633 maintenus à un niveau élevé malgré les économies réalisées sur le cours du change. La surveillance des prix ne pouvait jusqu'ici s'y intéresser que s'il était question en même temps d'augmentations de prix; elle n'était en revanche pas en mesure d'intervenir lorsque les prix restaient nominalement les mêmes.

L'enquête sur la «dévaluation des monnaies étrangères et répercussion des réductions de prix à l'importation» a montré qu'une bonne part des avantages obtenus s'arrêtent à l'échelon des importateurs et que l'augmentation des marges ainsi réalisée ne paraît pas justifiée.

Les effets des mesures de relance prises à l'échelle mondiale devraient se faire sentir en 1976. Il est possible qu'en cas de reprise, la production doive faire face à des goulots d'étranglement consécutifs à la récession actuelle. Des hausses ·de prix se produiront et se répercuteront jusqu'à ce qu'une capacité de production suffisante ait été atteinte. Une telle inflation due à des goulots d'étranglement de la production ne peut être empêchée à court terme que par des mesures relevant de la politique des prix.

L'affichage des prix de détail a donné de bons résultats. Ce moyen d'action, qui permet d'obtenir la transparence des prix, devrait donc être étendu de manière à s'appliquer également aux prix des prestations de services et aux prix présentés dans la publicité.

L'introduction de la taxe sur la valeur ajoutée peut entraîner une nouvelle tâche pour la surveillance des prix. Dans son rapport au Département fédéral des finances et des douanes, la commission d'experts pour la taxe sur la valeur ajoutée relève que, suivant l'évolution de la situation économique, des mesures complémentaires seront peut-être nécessaires afin d'éviter des hausses de prix injustifiées, et cela pendant la période de transition où le régime de l'impôt sur le chiffre d'affaires sera remplacé par celui de la taxe sur la valeur ajoutée. Les constatations faites par le préposé montrent que les augmentations du taux'de l'impôt sur le chiffre d'affaires ou l'inclusion du service dans les prix des consommations, dans les cafés et restaurants, ont souvent servi de prétexte à une augmentation injustifiée des prix. L'arrêté sur la surveillance des prix peut servir de point de départ pour y remédier. Cette surveillance pourrait rendre des services
appréciables pendant la période transitoire précédant l'institution de la taxe sur la valeur ajoutée. Des mesures semblables ont été prises dans d'autres pays lorsqu'ils ont institué la taxe sur la valeur ajoutée ou qu'ils ont procédé à d'importantes hausses des taux fiscaux.

45 Situation de l'emploi et évolution des prix Si l'on entend garder le plus possible en main le contrôle de l'emploi et de l'évolution des prix dans un milieu touché par la récession et l'inflation, il est indispensable de maintenir la politique que nous avons adoptée et qui utilise des moyens d'action sans effets déflationnistes. Il n'est pas indiqué de suivre une

1634 politique restreignant trop la masse monétaire, ni d'affaiblir le pouvoir d'achat en prenant des mesures fiscales ou parafiscales, à moins que l'état des finances publiques ne l'exige.

Les interventions dans le domaine de la formation des prix doivent être considérées comme un des moyens d'action sans effets déflationnistes. La régression des hausses de prix injustifiées et la lutte contre les abus en matière de formation des prix peuvent contribuer dans une large mesure à assurer le pouvoir d'achat des masses et à stimuler la consommation, les investissements et l'emploi, dans une situation où l'amélioration du revenu réel devient de plus en plus problématique et où la compensation intégrale du renchérissement est impossible pour les travailleurs, les personnes exerçant une activité indépendante et les rentiers. Si la hausse des prix est combattue efficacement, ou du moins ralentie là où elle peut être encore pratiquée en raison du manque d'élasticité des prix, il s'ensuit que du pouvoir d'achat est libéré pour la consommation d'autres biens ou prestations de services et que l'emploi s'en trouve consolidé.

.

Le taux de renchérissement toujours élevé, de même que le danger persistant de poussées de renchérissement dues à l'économie intérieure montrent que si la Confédération n'intervient pas dans la situation économique actuelle, les tendances à la récession pourraient s'accentuer. C'est pourquoi il convient de faire en sorte que des baisses effectives des prix et des coûts renforcent la position de l'économie suisse en ce qui touche la concurrence et, partant, l'emploi.

46

Maintien de la lutte contre le renchérissement

Les taux d'inflation qu'on enregistre actuellement demeurent excessifs. Ils ne sauraient être tolérés sans dangers ou désavantages d'ordre social et économique. Dans l'intérêt général de notre économie et pour des raisons sociales et de politique sociale, il faut donc s'employer à abaisser encore le taux d'inflation par tous les moyens disponibles. C'est la seule manière d'enrayer et de faire régresser la vague de renchérissement. Le renchérissement influe lourdement sur la situation économique actuelle; il est presque impossible d'en réduire les effets. Les augmentations de prix ont des conséquences particulièrement graves parce qu'il n'est plus toujours possible, en particulier, d'assurer la compensation intégrale du renchérissement. Dans certains cas, il faut se résoudre à des baisses réelles des revenus. Nombreuses sont les entreprises et exploitations qui n'arrivent pas à couvrir leurs frais; elles sont donc particulièrement touchées par les hausses de prix. En outre, les branches de notre économie ayant un intérêt majeur à voir diminuer le taux d'inflation sont précisément celles qui ont à souffrir, sur le plan de la concurrence internationale, du renchérissement causé par la réévaluation du franc, par exemple l'industrie d'exportation et le tourisme. Une atténuation de l'inflation sur le marché intérieur équivaut, pour ces industries, à une compensation appréciable des frais et, par conséquent, à une amélioration de leur position concurrentielle.

1635

Etant donné les considérations qui précèdent, le retour à la stabilité demeure une tâche prioritaire qu'il s'agit de poursuivre par tous les moyens qui s'offrent. Ainsi que le prouve l'expérience, la surveillance des prix peut contribuer efficacement à la réalisation de cette tâche.

5

Champ d'application des mesures contre les abus dans le secteur locatif

Le 30 juin 1972, vous avez édicté un arrêté fédéral urgent instituant des mesures contre les abus dans le secteur locatif. En vertu de son article 2, cet arrêté régit les baux dans les communes où règne une pénurie de logements ou de locaux commerciaux. Nous désignons, selon l'article 3, les communes dans lesquelles ces mesures sont applicables.

Par les articles 6 et 17 de l'arrêté fédéral du 20 décembre 1972 sur la surveillance des prix, des salaires et des bénéfices, le champ d'application de l'arrêté fédéral du 30 juin 1972 a été étendu à l'ensemble du pays, afin de mettre les mesures contre les abus dans le secteur locatif au service de la lutte contre le renchérissement. Des dispositions d'organisation (création de commissions de conciliation, etc.) ont dû.être prises à cet effet; elles ont, depuis lors, donné de bons résultats. II semble nécessaire de continuer à étendre à l'ensemble du territoire l'application de l'arrêté fédéral du 30 juin 1972. Les loyers, qui constituent un élément très important de l'indice, exercent une influence déterminante sur le cours du renchérissement. La lutte contre les hausses abusives des loyers contribue largement à la réduction du taux d'inflation: l'expérience l'a montré.

L'extension de ces mesures à l'ensemble du pays exige une base juridique, tel l'arrêté fédéral du 20 décembre 1972. L'adoption de cette base ne souffre aucun retard, les dispositions légales en vigueur expirant à la fin de l'année. C'est pourquoi des dispositions adéquates doivent être prises à nouveau dans l'arrêté fédéral sur la surveillance des prix.

6

Surveillance des prix et économie de marché

L'Etat ne doit exercer d'influence sur la concurrence et les mécanismes du marché que s'il a de bonnes raisons de le faire et si son intervention, limitée au strict nécessaire, est dans l'intérêt général. Ces réserves s'appliquent aussi au domaine de la formation des prix, qui occupe une place importante dans un régime économique de marché. Les interventions de l'Etat constituent une restriction à cet égard. Elles ne sont donc pas conformes à notre politique économique. Elles sont incompatibles avec notre système. Tout comme en 1972,

1636 nous sommes aujourd'hui conscients de ces problèmes fondamentaux. Nous estimons cependant qu'il serait prématuré de renoncer à des mesures complémentaires en matière d'évolution des prix des marchandises et des prestations de services. A une époque comme la nôtre, caractérisée par un renchérissement atteignant en moyenne annuelle 6 à 8 pour cent, la lutte contre le renchérissement continue d'être une tâche d'importance primordiale. L'orientation actuelle de l'économie n'a guère modifié le problème, ainsi que l'attestent les nouvelles augmentations de prix constatées au sein de l'OCDE.

On n'est pas encore parvenu à ce que le marché et le jeu de la concurrence équilibrent eux-mêmes la formation des prix. Le fait que le Bureau de la surveillance des prix, des salaires et des bénéfices est toujours mis à contribution le montre. S'il est vrai que son domaine d'activité couvre un choix moins vaste de marchandises et de prestations de services que durant les années précédentes, son activité ne s'est cependant pas réduite ni simplifiée dans son ensemble. Le ralentissement qui s'est manifesté n'a touché que certains domaines de l'économie. D'autre part, de nouveaux facteurs de perturbation suscitent des tendances à la montée des prix. Il ne faut pas s'attendre à des changements fondamentaux dans un proche avenir. Il conviendra de veiller au contraire à ce que les mesures d'encouragement générales en particulier n'engendrent pas de nouvelles causes d'inflation. Appliquée judicieusement, la surveillance des prix est propre à renforcer la concurrence et à contribuer à la suppression des monopoles.

A plus longue échéance, la revision en cours de la loi sur les cartels contribuera à améliorer les conditions de la concurrence. Les travaux prendront encore deux à trois ans. Pendant ce laps de temps, une surveillance des prix peut, en tant que mesure complémentaire, permettre de lutter efficacement contre les abus en matière de prix, surtout contre ceux des entreprises qui occupent une position forte sur le marché.

Plusieurs Etats tentent de faire face à l'évolution inflationniste en instituant des contrôles ou en ordonnant un blocage général des prix. Dès 1972, nous avons volontairement renoncé à de telles interventions et nous nous sommes bornés à surveiller les prix. A notre avis, ce système est adapté
aux conditions de notre pays. Les faits montrent que les pronostics étaient exacts. Les résultats que l'on attendait à ce moment-là ont été pleinement atteints. La surveillance des prix a permis d'apporter une contribution importante à la lutte contre une inflation excessive, soit en empêchant des hausses injustifiées, soit en abaissant les prix ou ralentissant leur augmentation. L'importance psychologique de ce service et de ses possibilités d'intervention ne sont pas non plus à négliger.

Dans ces circonstances et en prévision de l'évolution future, nous considérons qu'il est nécessaire de prolonger pendant un certain temps encore la surveillance des prix pour contribuer à la lutte contre le renchérissement. Ces mesures ne doivent pas être abrogées de manière abrupte à la fin de l'année, mais par étapes et parallèlement à la stabilisation progressive du niveau des prix.

1637 7

Commentaires sur le projet d'arrêté fédéral

II convient de tenir compte, des changements survenus dans la situation économique depuis 1972, des causes de l'inflation et de l'orientation des objectifs qui en découlent. On peut tout d'abord renoncer à la surveillance des salaires et des bénéfices au sens des articles 4 et 5 de l'arrêté fédéral en vigueur. Elle s'est révélée peu efficace.et n'est plus indiquée dans les circonstances actuelles.

Il convient ensuite de redéfinir les possibilités d'intervention. Jusqu'à présent, celles-ci n'étaient pas limitées puisqu'elles s'étendent en principe à toutes les hausses de prix des marchandises et des prestations de services. C'est en partie la raison du grand nombre d'annonces reçues du public et des procédures qui ont suivi. A l'avenir, il sera loisible de décider que les réductions de prix ne s'appliqueront au besoin qu'à certains domaines ou groupes économiques. De même, l'obligation d'annoncer et de motiver les hausses de prix ainsi que le droit des tiers de faire des annonces pourront être limités.

\^ II y a lieu de prévoir que la simple surveillance dé l'évolution des prix, l'indication des prix de détail et l'obligation de fournir des renseignements continueront effectivement de ne pas être limitées pour toute la durée de validité du nouvel arrêté.

Il s'agit en outre de redéfinir la compétence du Conseil fédéral pour ordonner l'abaissement de prix non justifiés lorsque certaines conditions particulières sont remplies. Comme nous l'avons relevé, cela semble indiqué notamment en considération des effets des fluctuations du cours du change.

L'expérience montre que les prix à l'importation n'ont pas toujours été ajustés comme il aurait été possible. Cette constatation peut aussi s'appliquer aux réductions des droits de douane ou autres mesures fiscales. Il va de soi que ces interventions doivent être limitées aux cas où il y a un abus manifeste.

Article premier La surveillance des prix doit être prévue comme une mesure de précaution pour toute la durée de validité de l'arrêté fédéral. Comme précédemment, seuls les prix des marchandises et des prestations de services lui sont soumis. En sont exclus toutes les taxes fiscales et les prix des biens fonciers, ainsi qu'en avait décidé le Parlement lorsqu'il a élaboré, en décembre 1972, l'arrêté fédéral en vigueur.

Article 2 L'obligation d'annoncer
les prix de détail existait déjà auparavant. Il convient d'ajouter à cette disposition que le Conseil fédéral peut aussi ordonner des mesures semblables pour les prix des prestations de services et pour les prix utilisés à des fins publicitaires. Ces mesures visent à l'information du consommateur. Elles se sont révélées judicieuses. Une ordonnance d'exécution réglera le détail, notamment en ce qui concerne les exceptions qui s'imposent.

Fiutile ferrale. 127- année. Vol. n.

110

1638 Article 3 Comme dans le droit en vigueur, la compétence pour abaisser les prix reste limitée aux cas où il s'agit d'augmentations de prix injustifiées. A l'avenir, elle ne sera cependant plus valable «ex lege» pour toutes les marchandises et prestations de services mais nécessitera une disposition du Conseil fédéral. Celui-ci peut faire usage de cette compétence si les conditions fixées sont remplies, c'està-dire en cas de persistance du renchérissement ou d'augmentations exceptionnelles des prix portant un préjudice notable à l'économie. Les prix ne pourront dorénavant être abaissés que dans ces limites.

Comme à l'article 2 de l'arrêté fédéral en vigueur, le Conseil fédéral peut prescrire l'obligation d'annoncer et de motiver les hausses de prix envisagées.

Les dispositions d'exécution déterminent les cas plus en détail et les délimitent sur la base des mesures appliquées jusqu'ici.

Article 4 Une telle disposition faisait jusqu'ici défaut, ce qui a exclu la possibilité d'intervenir lorsque les diminutions de prix résultant de la réévaluation du franc suisse n'ont pas été prises en considération dans les prix à l'importation. Le maintien de prix inadéquats qui en résulte n'est pas moins choquant qu'une hausse de prix injustifiée; les répercussions sur le renchérissement sont les mêmes. C'est pourquoi il paraît judicieux d'instituer une possibilité d'intervention. C'est cependant à bon escient qu'on a délimité étroitement les conditions dans lesquelles il est possible de procéder à des réductions. Il ne peut s'agir que d'empêcher des abus et non d'exercer une influence sur le fonctionnement du marché.

Article 5 Ainsi que nous l'avons déjà dit, il faut compter au nombre des innovations importantes Je fait que le champ d'application des prescriptions au sens des articles 3 et 4 peut être restreint à des secteurs et branches économiques déterminés. On veut ainsi obtenir que les efforts se concentrent sur certains points essentiels. Désormais, chaque augmentation de prix, qu'il s'agisse de marchandises ou de prestations de services, ne donnera plus lieu à des annonces, des enquêtes et des procédures. La surveillance générale de l'évolution des prix ne sera renforcée de dispositions permettant une intervention que dans des domaines qu'il reste à délimiter. C'est dans ce sens que nous restreindrons
le champ d'application des articles 3 et 4, en tenant compte de l'évolution du renchérissement et du développement général de l'économie.

Ces nouvelles mesures doivent tendre à une application plus souple de l'arrêté fédéral. Les modifications du marché et plus particulièrement celles de l'évolution des prix pourront être prises en considération de manière suivie. Il deviendra en outre possible de supprimer petit à petit, au fur et à mesure d'une normalisation du marché, les pouvoirs d'intervention.

1639

Article 6 L'obligation de fournir des renseignements est conforme au droit en vigueur. C'est la condition requise pour qu'on puisse procéder aux enquêtes nécessaires. Dans la pratique, elle n'a pas soulevé de grandes difficultés.

Articles 7 à 10 Ces dispositions sont conformes aux dispositions en vigueur, Article 11 L'arrêté fédéral du 30 juin 1972 instituant des mesures contre les abus dans le secteur locatif n'est applicable, selon son énoncé, que dans les communes où règne une pénurie de logements ou de locaux commerciaux, communes qui doivent être soumises à ces mesures par une décision expresse. Le pouvoir d'appliquer ces mesures à l'ensemble du pays contribue à la lutte contre le renchérissement. En vertu de l'article 6 de l'arrêté fédéral du 20 décembre 1972, cette disposition est déjà en vigueur.

Articles 12 à 15 Ces articles sont conformes au droit en vigueur.

Article 16 E paraît indiqué de prévoir une durée de validité de trois ans. Comme nous l'avons exposé, l'application des mesures particulières au sens des articles 3 et 4 doit de toute façon être limitée dans le temps. Si l'évolution du renchérissement le permet, nous pourrons abroger l'arrêté avant son échéance.

8

Base constitutionnelle

L'arrêté fédéral du 20 décembre 1972 devait s'appuyer sur l'article 89WB, 1 et 3e alinéas, de la constitution. Sa validité était donc limitée et il était soumis au vote du peuple et des cantons.

C'est le cas également du présent arrêté qui ne peut pas, lui non plus, s'appuyer sur une base constitutionnelle. Le projet de revision de l'article 31dum«iiiesf c'est-à-dire de l'article dit conjoncturel, devait donner une base constitutionnelle suffisante à des mesures de même nature. Cette revision constitutionnelle n'a pas eu lieu parce qu'elle n'a pas obtenu la majorité des voix des cantons lors de la votation du 2 mars 1975. La situation juridique est donc inchangée.

er

La nécessité des mesures proposées a déjà été exposée au début de notre message. Leur caractère urgent a également été relevé. L'arrêté fédéral deviendra caduc le 31 décembre 1975, de sorte qu'à partir du 1er janvier 1976 il n'y

1640 aura plus de base légale pour les mesures de surveillance. Faute de temps, il n'est pas possible de créer une base légale par la voie de la procédure législative ordinaire.

Comme il s'agit d'un arrêté fédéral extra-constitutionnel, il convient de le fonder sur l'article 89Ws, 1er et 3e alinéas, de la constitution. Il y aura lieu de le soumettre au vote du peuple et des cantons dans le délai d'un an, s'il doit rester en vigueur plus longtemps.

9 Proposition Vu ce qui précède, nous vous recommandons d'adopter le projet d'arrêté fédéral de portée générale que nous vous présentons, et de le déclarer urgent.

Nous vous prions d'agréer, Monsieur le Président, Mesdames et Messieurs, les assurances de notre haute considération.

Berne, le 29 septembre 1975 Au nom du Conseil fédéral suisse: Le président de la Confédération, Graber Le chancelier de la Confédération, Huber

1641

(Projet)

Arrêté fédéral sur la surveillance des prix

L'Assemblée fédérale de la Confédération suisse, vu le message du Conseil fédéral du 29 septembre 19751), arrête: Chapitre 1er: Mesures générales Article premier Surveillance des prix 1

Le Conseil fédéral surveille l'évolution des prix des marchandises et des prestations de services.

2

II peut, au besoin, ordonner l'exécution d'enquêtes.

3

Dans la mesure du possible, la surveillance des prix est exercée en collaboration avec les milieux intéressés.

Art. 2

Indication des prix de détail 1

Le Conseil fédéral peut ordonner que les prix de détail des marchandises soient affichés et, pour ce qui concerne les prix des prestations de services, que le montant devant être effectivement payé soit indiqué sous une forme appropriée.

2

II peut aussi ordonner que seuls les prix à payer effectivement soient mentionnés à des fins publicitaires.

"FF 1975 II 1621

1642

Chapitre 2: Mesures spéciales Art. 3 Mesures visant à empêcher les augmentations de prix injustifiées 1

En cas de persistance du renchérissement ou d'augmentations extraordinaires des prix causant des préjudices notables à l'économie, le Conseil fédéral peut édicter des dispositions donnant à l'autorité la compétence d'abaisser des prix augmentés sans raison justifiable.

2 II peut aussi ordonner que les hausses de prix soient annoncées, motivées et soumises à l'examen de l'autorité avant leur entrée en vigueur. Les hausses de prix injustifiées seront interdites.

Art. 4 Abaissement de prix inappropriés 1 Le Conseil fédéral peut, en cas de persistance du renchérissement, édicter des dispositions donnant à l'autorité la compétence d'abaisser des prix inappropriés fixés ou appliqués aux fins de tirer abusivement parti de la situation du marché et qui procurent un profit injustifié.

2 L'abaissement des prix sera ordonné notamment lorsqu'il n'est pas tenu compte équitablement, dans les prix des marchandises importées, des avantages obtenus sur le cours du change ou lors de réductions des droits de douane.

Art. 5 Champ d'application Lorsque et aussi longtemps que le renchérissement et l'évolution économique le justifient, le champ d'application des prescriptions d'exécution des articles 3 et 4 doit être limité à certains domaines ou branches économiques.

Chapitre 3: Dispositions communes Art. 6 Obligation de fournir des renseignements Les autorités, les organisations de l'économie, les entreprises et exploitations ont l'obligation, lors de procédures engagées contre elles en vertu du présent arrêté, de fournir tous les renseignements nécessaires à son exécution, de produire les documents utiles et de permettre de consulter lès-livres de commerce et pièces justificatives.

Art. 7 Voies de droit Les dispositions générales régissant la juridiction administrative s'appliquent aux décisions rendues en vertu du présent arrêté.

1643

Art. 8 Dispositions pénales en général 1

Celui qui aura contrevenu au présent arrêté ou à ses dispositions d'exécution, en particulier a. celui qui aura violé l'obligation d'afficher les prix de détail; b. celui qui aura violé l'obligation d'annoncer les hausses de prix et de les motiver; c. celui qui n'aura pas réduit les prix dans la mesure ordonnée; d. celui qui n'aura pas satisfait à l'obligation de donner des renseignements ou qui aura fourni des indications inexactes ; sera puni, s'il a agi intentionnellement, des arrêts ou d'une amende de 100 000 francs au plus.

3

Si l'auteur a agi par négligence, la peine sera l'amende jusqu'à concurrence de 50 000 francs.

3 La tentative et la complicité sont punissables.

Art. 9 Infractions commises dans une entreprise, par un mandataire, etc.

1

Lorsqu'une infraction est commise dans la gestion d'une personne morale, d'une société en nom collectif ou en commandite, d'une entreprise individuelle ou d'une collectivité sans personnalité juridique ou de quelque autre manière dans l'exercice d'une activité pour un tiers, les dispositions pénales sont applicables aux personnes physiques qui ont commis l'acte.

2 Le chef d'entreprise, l'employeur, le mandant ou le représenté qui, intentionnellement ou par négligence et en violation d'une obligation juridique, omet de prévenir une infraction commise par le subordonné, le mandataire ou le représentant ou d'en supprimer les effets, tombe sous le coup des dispositions pénales applicables à l'auteur ayant agi intentionnellement ou par négligence.

3 Lorsque le chef d'entreprise, l'employeur, le mandant ou le représenté est une personne morale, une société en nom collectif ou en commandite, une entreprise individuelle ou une collectivité sans personnalité juridique, le 2e alinéa s'applique aux organes et à leurs membres, aux associés gérants, dirigeants effectifs ou liquidateurs fautifs.

Art. 10 Poursuite pénale 1 La poursuite pénale incombe aux cantons.

2 Les jugements, les prononcés administratifs ayant un caractère pénal et les ordonnances de non-lieu doivent être communiqués sans délai et sans frais, en expédition complète, au Ministère public de la Confédération, à l'intention du Conseil fédéral.

1644

Chapitre 4: Modification de l'arrêté fédéral instituant des mesures contre les abus dans le secteur locatif Art. 11 Pendant la durée de validité du présent arrêté, l'arrêté fédéral du 30 juin 19721' instituant des mesures contre les abus dans le secteur locatif est modifié comme il suit : Art. 2, titre et alinéas 1 et 2 En général 1

Le présent arrêté est applicable aux loyers des logements et des locaux commerciaux.

2

Abrogé

Art. 3 Abrogé

Chapitre 5: Exécution Art. 12 Coopération des cantons et des organisations Le Conseil fédéral peut faire appel à la collaboration des cantons et des organisations économiques pour appliquer le présent arrêté et ses dispositions d'exécution. Il peut contribuer financièrement à la couverture des frais des organisations.

Art. 13 Maintien du secret Le secret doit être observé sur les constatations faites, les documents consultés et les renseignements obtenus à l'occasion de procédures au sens du présent arrêté. On ne fera appel à aucune personne dont la collaboration pourrait présenter le danger d'un conflit d'intérêts.

Art. 14 Rapport Le Conseil fédéral fait rapport une fois par an à l'Assemblée fédérale sur les mesures prises ainsi que sur leurs effets.

W RS 221.213.1

1645 Art. 15

Exécution 1

Le Conseil fédéral est chargé de l'exécution. Il édicté les dispositions nécessaires à cet effet.

2 II peut déléguer la surveillance des prix et l'exécution des mesures qu'il ordonne en vertu du présent arrêté à un préposé subordonné au Département fédéral de l'économie publique.

Chapitre 6: Dispositions finales Art. 16 Le présent arrêté est de portée générale.

2 II est déclaré urgent au sens de l'article 89bis, 1er alinéa, de la constitution et entre en vigueur le 1er janvier 1976.

3 II sera soumis au vote du peuple et des cantons selon l'article 89wa, e 3 alinéa, de la constitution et aura effet, s'il est accepté, jusqu'au 31 décembre 1978.

4 Le Conseil fédéral peut l'abroger avant l'expiration de ce délai.

1

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Message du Conseil fédéral à l'Assemblée fédérale relatif à un projet d'arrêté fédéral concernant la surveillance des prix (Du 29 septembre 1975)

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