17.068 Message concernant l'approbation de la convention contre les doubles impositions entre la Suisse et le Kosovo du 15 novembre 2017

Messieurs les Présidents, Mesdames, Messieurs, Par le présent message, nous vous soumettons le projet d'un arrêté fédéral portant approbation de la convention contre les doubles impositions entre la Suisse et le Kosovo, en vous proposant de l'adopter.

Nous vous prions d'agréer, Messieurs les Présidents, Mesdames, Messieurs, l'assurance de notre haute considération.

15 novembre 2017

Au nom du Conseil fédéral suisse: La présidente de la Confédération, Doris Leuthard Le chancelier de la Confédération, Walter Thurnherr

2017-1620

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Condensé Depuis l'indépendance du Kosovo le 17 février 2008, la Convention du 13 avril 2005 entre le Conseil fédéral suisse et le Conseil des Ministres de Serbie-et-Monténégro en vue d'éviter les doubles impositions en matière d'impôts sur le revenu et la fortune avait, dans un premier temps, continué d'être appliquée tacitement dans les relations avec le Kosovo. Cependant, par un échange de notes des 21 octobre et 18 décembre 2009 entre la Suisse et le Kosovo, ces deux Etats ont renoncé notamment à poursuivre l'application de cette Convention. Celle-ci a par conséquent cessé de s'appliquer avec effet au 1er janvier 2011.

En juin 2015, le Kosovo a demandé à la Suisse d'initier des négociations en vue de la conclusion d'une convention contre les doubles impositions (ci-après «CDIKosovo»). La Suisse a répondu positivement à cette demande.

La CDI-Kosovo a été signée à Pristina le 26 mai 2017. Elle correspond à la politique conventionnelle actuelle des deux Etats et au texte du Modèle de l'Organisation de coopération et de développement économiques (ci-après «Modèle OCDE»).

Ainsi, le projet tient compte des développements issus du projet de l'OCDE de lutte contre l'érosion de la base d'imposition et le transfert de bénéfices (ci-après «projet BEPS»).

Les cantons et les milieux économiques ont approuvé la conclusion de la convention.

Il est également proposé que l'Assemblée fédérale soit autorisée à approuver à l'avenir les conventions contre les doubles impositions qui règlent d'une manière comparable les mêmes domaines que ceux contenus dans la CDI-Kosovo, par voie d'arrêté simple.

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Message 1

Présentation de l'accord

1.1

Contexte, déroulement et résultat des négociations

Depuis l'indépendance du Kosovo le 17 février 2008, la Convention du 13 avril 2005 entre le Conseil fédéral suisse et le Conseil des Ministres de Serbie-et-Monténégro en vue d'éviter les doubles impositions en matière d'impôts sur le revenu et la fortune1 avait dans un premier temps continué d'être appliquée tacitement dans les relations avec le Kosovo. Cependant, par un échange de notes des 21 octobre et 18 décembre 2009 entre la Suisse et le Kosovo, ces deux Etats ont renoncé à poursuivre l'application notamment de cette Convention. Celle-ci a par conséquent cessé de s'appliquer avec effet au 1er janvier 20112.

Le Kosovo est une des régions les plus pauvres et les moins développées d'Europe.

Sa croissance reste fortement dépendante des transferts des émigrés. Il a actuellement un réseau restreint de conventions contre les doubles impositions (ci-après «CDI») qu'il essaye de développer afin de favoriser l'investissement économique au Kosovo. Outre certaines conventions datant de l'ère de la Yougoslavie (Finlande, Allemagne), le Kosovo a récemment signé plusieurs conventions avec des Etats européens (Albanie, Croatie, Hongrie, Royaume-Uni et Slovénie). Le but à long terme du Kosovo est de faire des réformes structurelles suffisantes afin de pouvoir adhérer à l'UE. 113 Etats dont la Suisse ont reconnu le Kosovo à ce jour. Ceux-ci incluent aussi tous les Etats de l'ex-Yougoslavie, à l'exception de la Bosnie-etHerzégovine et de la Serbie. Cependant, le fait que plusieurs pays de l'UE n'aient pas reconnu le Kosovo (Espagne, Slovaquie, Roumanie, Grèce et Chypre) complique la position de l'UE sur la question de l'aspiration du Kosovo à l'intégration européenne.

Les liens avec la Suisse sont forts, 200 000 personnes d'origine kosovare habitant en Suisse. Le Kosovo est également un pays prioritaire des activités de la promotion de la paix à l'étranger du Département fédéral de la défense, de la protection de la population et des sports et l'engagement de la Suisse y est important.

En juin 2015, le Kosovo a demandé à la Suisse d'initier des négociations en vue de la conclusion d'une convention contre les doubles impositions. La Suisse a répondu positivement à cette demande.

Après deux rondes de négociations, les paraphes ont été apposés en septembre 2016 sur un projet de convention en vue d'éviter les
doubles impositions en matière d'impôts sur le revenu et de prévenir la fraude et l'évasion fiscales (ci-après «CDIKosovo»). La CDI-Kosovo a bien été accueillie par les cantons et les milieux économiques intéressés à la conclusion des conventions contre les doubles impositions.

La CDI-Kosovo a été signée le 26 mai 2017 à Pristina.

1 2

RS 0.672.968.21 RO 2010 1203

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1.2

Appréciation

Au vu des liens étroits existants entre la Suisse et le Kosovo, la conclusion d'une CDI constitue un apport supplémentaire dans le cadre du développement des relations économiques entre les deux pays. Elle est également cohérente avec la politique actuelle de la Suisse, d'autant plus que la Suisse a conclu des CDI avec tous les Etats de l'ex-Yougoslavie (sauf la Bosnie-et-Herzégovine). De son côté, le Kosovo est actuellement actif afin d'étendre son réseau de CDI.

Les conditions de la CDI-Kosovo sont similaires à celles d'autres conventions conclues avec les pays de la région.

Les dispositions régissant l'imposition des dividendes, intérêts et redevances correspondent pour l'essentiel à la politique conventionnelle suisse. Elles s'inspirent largement du Modèle OCDE. La CDI-Kosovo prévoit un taux d'impôt résiduel général sur les dividendes de 15 %, ainsi qu'un taux d'impôt résiduel réduit de 5 % si le bénéficiaire effectif est une société qui détient directement au moins 25 % du capital de la société qui paie les dividendes, avec une exonération dans l'Etat de la source pour les dividendes versés à une institution de prévoyance ou à la banque nationale de l'autre Etat contractant. Un taux résiduel de 5 % est prévu pour les intérêts, mais l'Etat de résidence du bénéficiaire des intérêts bénéficie d'un droit d'imposition exclusif dans un nombre élevé de cas. Enfin, en ce qui concerne les redevances, l'imposition exclusive dans l'Etat de résidence du bénéficiaire a été prévue à la demande à la Suisse.

Ces règles encouragent les investissements et les échanges économiques entre les deux Etats.

En outre, la CDI-Kosovo contient une clause anti-abus faisant référence aux buts principaux d'un montage ou d'une transaction (principal purpose test rule ou règle PPT), conformément au texte proposé par le rapport de l'action 6 du projet BEPS (Base erosion and profit shifting), projet de l'OCDE contre l'érosion de la base d'imposition et le transfert de bénéfices. Elle est dès lors conforme au standard minimum BEPS en ce qui concerne la lutte contre les abus dans des situations de chalandage fiscal (treaty shopping).

Le standard minimum prévoit alternativement une clause anti-abus spécifique sous forme de règle de limitation des avantages conventionnels (limitations on benefits rule ou règle LOB). Cependant,
la Suisse propose de renoncer à reprendre la clause LOB dans le cadre de sa politique conventionnelle, et cela pour les raisons qui suivent.

Premièrement, l'avantage de la règle LOB consiste en ce qu'elle repose sur des critères objectifs et qu'elle propose dès lors en apparence une délimitation claire entre cas d'abus et cas conforme à la convention de double imposition. Cependant, une analyse plus détaillée révèle que la ligne de délimitation est en réalité loin d'être claire. La règle LOB est en effet sujette à une grande marge d'interprétation, notamment dans le cadre de l'application du test de l'activité commerciale effective (active business test). En outre, la règle LOB revêt un caractère subjectif, dans la mesure où elle prévoit également la possibilité d'octroyer des avantages conventionnels de manière discrétionnaire (discretionnary relief).

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Deuxièmement, la règle LOB, contrairement à la règle PPT, n'est pas une disposition générale pour lutter contre les abus conventionnels. La règle LOB constitue en effet une clause anti-abus spécifique (specific anti avoidance rule ou SAAR), et non une clause anti-abus générale (general anti avoidance rule ou GAAR). Elle permet de lutter en particulier contre le chalandage fiscal, sans pour autant en couvrir toutes les formes d'abus. Dès lors, la règle LOB ne suffit pas à combattre à elle seule tous les cas d'abus.

Troisièmement, il peut résulter de la rigidité de la règle LOB que les avantages de la convention contre les doubles impositions applicable soient refusés dans certaines situations qui ne constituent pas en réalité des cas d'abus.

Au vu de ce qui précède, la règle PPT conforme au texte proposé par l'action 6 du projet BEPS suffit, en tant que clause anti-abus générale, à éviter que la CDIKosovo soit utilisée par des personnes qui n'ont pas droit aux avantages de la CDIKosovo.

La CDI-Kosovo contient également une clause d'arbitrage qui permettra d'accroître la sécurité juridique pour les contribuables.

Enfin, la CDI-Kosovo respecte la norme internationale dans le domaine de l'échange de renseignements sur demande.

La CDI-Kosovo présente un résultat équilibré qui contribuera au bon développement des relations économiques bilatérales. Elle corrobore vis-à-vis de la communauté internationale les engagements pris par la Suisse depuis 2009 en matière d'assistance administrative. Elle garantit une sécurité juridique et un cadre contractuel, qui auront un effet favorable sur l'évolution des relations économiques bilatérales.

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Commentaire des dispositions de la convention

Dans l'ensemble, la CDI-Kosovo suit, tant sur le plan formel que sur le plan matériel, le Modèle OCDE ainsi que la pratique conventionnelle de la Suisse. Les commentaires suivants se limitent à expliquer les principales différences par rapport au Modèle OCDE et à la politique conventionnelle suisse, de même que les dispositions issues du projet BEPS pour lutter contre les abus.

A noter à titre liminaire que l'habituel art. 14 (Professions indépendantes) ne fait pas partie de la CDI-Kosovo, conformément au Modèle OCDE. Il ne s'agit principalement que d'une modification formelle, dans la mesure où il n'existe pas de différence voulue entre les concepts d'établissement stable (art. 5 et 7) et celui d'installation fixe d'affaires (ancien art. 14). La suppression de l'ancien art. 14 du Modèle OCDE a pour effet que les revenus tirés de l'exercice de professions libérales ou d'autres activités de caractère indépendant sont désormais traités par référence à l'art. 7 en tant que des bénéfices d'entreprises.

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Titre et préambule Il est précisé, dans le titre et dans le préambule, que la CDI-Kosovo vise aussi à prévenir la fraude et l'évasion fiscales. Ceci correspond au titre et au préambule du Modèle OCDE adapté suite à l'action 6 du projet BEPS.

Art. 2

Impôts visés

Dans la mesure où le droit interne du Kosovo ne prévoit aucun impôt sur la fortune, la CDI-Kosovo ne s'applique qu'à l'impôt sur le revenu. Elle ne contient dès lors pas la disposition habituelle concernant l'impôt sur la fortune (art. 22 du Modèle OCDE). Conformément à la politique conventionnelle de la Suisse, la CDI-Kosovo ne s'applique pas à l'impôt anticipé sur les gains de loterie.

Art. 3

Définitions générales

Le terme d'«institution de prévoyance» est défini conformément aux travaux de l'OCDE, sans que cela représente de différence matérielle par rapport à la définition utilisée dans les conventions les plus récentes. Cette disposition est précisée davantage au ch. 1 du protocole par référence à la législation interne des deux Etats. Pour la Suisse, il s'agit des institutions d'assurances sociales et de prévoyance qui sont concernées, c'est-à-dire les 1er et 2e piliers ainsi que le 3e pilier A. La liste des dispositions légales suisses a été complétée afin d'inclure également une référence expresse aux fondations de libre-passage, aux fondations de prévoyance en faveur du personnel, aux fonds patronaux de prévoyance à prestations discrétionnaires et aux fondations de financement.

Art. 4

Résident

Sur demande de la Suisse, il est précisé au ch. 2 du protocole que les organisations d'utilité publique exonérées d'impôt et les institutions de prévoyance sont également considérées comme des résidents. Cette disposition permet de préciser que ces institutions peuvent être qualifiées de résidentes également en cas d'exonération fiscale.

En effet, en Suisse, même en l'absence d'une disposition correspondante, les institutions de ce genre sont considérées comme des résidents aux fins des conventions contre les doubles impositions, même lorsqu'elles sont exemptées d'après le droit interne de l'impôt en raison des buts qu'elles poursuivent.

Art. 5

Etablissement stable

Une solution qui suit en règle générale le Modèle OCDE en matière d'établissement stable a été retenue, y compris la période de 12 mois fixée au par. 3. Sur proposition de la Suisse, un chantier de montage qui est conduit par une entreprise d'un État contractant dans l'autre État contractant en liaison avec la livraison de machines ou d'équipements produits par cette entreprise ne constitue pas un établissement stable.

Art. 7 et 9

Bénéfices des entreprises et entreprises associées

L'art. 7 correspond à la version la plus récente du Modèle OCDE.

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Le standard minimal issu de l'action 14 du projet BEPS prévoit qu'un accord amiable est en principe à mettre en oeuvre quels que soient les délais internes. Cependant, les Etats qui, comme la Suisse, veulent se prévaloir de leurs délais de droit interne doivent être prêts à adopter d'autres dispositions conventionnelles qui limitent le délai pendant lequel un État contractant peut effectuer un ajustement en application de l'art. 9, par. 1 ou de l'art. 7, par 2 du Modèle OCDE, afin d'éviter les ajustements tardifs qui ne pourront faire l'objet d'un allègement en vertu de la procédure amiable. Dans ce cadre, l'art. 7, par. 4, et l'art. 9, par. 3, de la CDI-Kosovo limitent ce délai à 5 ans. Au vu de ces deux dispositions, la Suisse met donc en oeuvre la solution alternative proposée par l'action 14 du projet BEPS.

Le ch. 4 du protocole précise en outre qu'en cas d'accord préalable sur les prix («APA»), la Suisse peut réviser dans certaines circonstances des périodes fiscales antérieures conformément à l'accord préalable sur les prix, même si plus de 5 ans se sont écoulés depuis la fin de l'exercice fiscal en question. Ceci évite la prescription dans des situations d'«APA», dont la procédure est longue.

Art. 10, 11 et 12

Dividendes, Intérêts et Redevances

La CDI-Kosovo prévoit un taux d'impôt résiduel général sur les dividendes de 15 %, ainsi qu'un taux d'impôt résiduel réduit de 5 % si le bénéficiaire effectif est une société qui détient directement au moins 25 % du capital de la société qui paie les dividendes, compte tenu d'une période de détention de 365 jours, conformément au libellé inclus dans le rapport de l'action 6 BEPS. Une exonération dans l'État de la source est prévue pour les dividendes versés à une institution de prévoyance ou à la banque nationale de l'autre Etat contractant.

Un taux résiduel de 5 % est prévu pour les intérêts, mais l'Etat de résidence du bénéficiaire des intérêts bénéficie d'un droit d'imposition exclusif dans les cas suivants: les intérêts au titre d'une dette résultant de la vente à crédit d'un équipement, de marchandises ou de services, les intérêts sur les prêts inter-sociétés, de même que les intérêts versés aux institutions de prévoyance, au Gouvernement de l'autre Etat et les intérêts versés au titre d'un prêt bancaire.

Enfin, la CDI-Kosovo attribue le droit d'imposer les redevances exclusivement à l'Etat de résidence du bénéficiaire effectif des redevances.

Art 13

Gains en capital

Cet article correspond à la pratique conventionnelle suisse. Le par. 4 de cet article prévoit, à l'instar d'autres conventions suisses contre les doubles impositions, que les gains provenant de l'aliénation d'actions d'une société dont la fortune est, directement ou indirectement, composée pour plus de 50 % de biens immobiliers situés dans un Etat contractant, sont imposables dans cet Etat. Cependant, en cas de cession d'actions cotées en bourse, les gains ne sont imposables que dans l'Etat de résidence de l'aliénateur. Du côté suisse, il a été fixé dans l'article sur les méthodes pour éliminer les doubles impositions (art. 22, par. 1, let. a) que la Suisse ne doit exonérer de tels gains qu'après justification de l'imposition au Kosovo.

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Art. 17

Pensions

Les pensions, y compris les prestations en capital (ch. 6 du protocole) ne peuvent être imposées en principe, conformément à la politique conventionnelle de la Suisse, que dans l'État de résidence. Cependant, si cet État n'impose pas les pensions, l'État de la source peut les imposer. Sont exclues de la présente clause les pensions du secteur public au sens de l'art. 18, par. 2, lequel correspond au Modèle OCDE.

Art. 21

Droit aux avantages

Cette disposition contient une clause anti-abus faisant référence aux buts principaux des montages ou transactions (règle PPT). En vertu de cette règle, si l'un des objectifs principaux d'un montage ou d'une transaction est d'obtenir les avantages de la CDI-Kosovo, ces avantages seront refusés sauf s'il est démontré que leur octroi est conforme à l'objet et au but des dispositions de la convention. Cette clause anti-abus est conforme à la règle PPT prévue par le Modèle OCDE adapté suite au rapport de l'action 6 du projet BEPS.

Si la formulation de la clause anti-abus est nouvelle, cette dernière correspond toutefois en substance aux dispositions anti-abus telles que prévues dans la plupart des conventions contre les doubles impositions conclues ces dernières années par la Suisse. Cependant, la portée de cette nouvelle clause est plus large quant à son objet, car elle ne vise pas uniquement certains revenus comme les dividendes, les intérêts et les redevances, mais s'applique désormais à l'ensemble des revenus prévus par la CDI-Kosovo. Ainsi, tout avantage de la CDI-Kosovo est soumis à la réserve de l'abus prévu par le présent article.

Le libellé de la présente disposition diffère sur un autre point de la clause anti-abus prévue dans la plupart des conventions contre les doubles impositions conclues récemment par la Suisse. Les situations abusives ne sont plus restreintes aux cas où le but principal est d'obtenir les avantages conventionnels, mais étendues aux cas dans lesquels seul un des buts principaux du montage est d'obtenir un avantage conventionnel. Cependant, en pratique, cette différence de terminologie ne devrait pas aboutir à un résultat différent. En effet, la clause précise à la fin de son par. 1 que s'il est établi que l'octroi de l'avantage conventionnel dans le cas particulier est conforme à l'objet et au but des dispositions pertinentes de la convention, l'avantage conventionnel doit être accordé. Tel devrait être le cas en principe si la recherche de l'avantage conventionnel n'est pas le but principal du montage ou de la transaction.

De manière générale, l'insertion de clauses anti-abus dans une convention contre les doubles impositions présente l'avantage que les Etats contractants s'accordent sur les conditions qui doivent être remplies pour que les avantages conventionnels
puissent être refusés. A défaut d'une telle clause, chacun des deux Etats contractants pourrait définir lui-même la notion d'abus et décider ainsi unilatéralement, conformément à son droit interne, si un abus est réalisé dans une situation concrète et dès lors refuser d'accorder les avantages conventionnels. Cette situation créerait une insécurité juridique. L'insertion de la règle PPT permet d'éviter cette situation.

Certes, le libellé relativement vague de la règle PPT et la prise en compte de certains éléments subjectifs ne permettent pas de poser des critères de portée universelle afin de déterminer si, dans un cas particulier, on est en présence d'une utilisation abusive 7358

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de la convention. Cependant, l'explication détaillée et les nombreux exemples contenus dans le commentaire du Modèle de convention de l'OCDE constituent les lignes directrices pour interpréter la règle PPT.

Le par. 2 de l'art. 21 correspond à une disposition proposée comme règle complémentaire dans le commentaire relatif à la règle PPT. En cas de situation abusive prévue par le par. 1, les avantages conventionnels peuvent néanmoins être accordés s'il apparaît que ces derniers auraient été obtenus en l'absence de la transaction ou du montage abusifs. Il permet ainsi à un Etat contractant d'appliquer, en cas de situation abusive, les conséquences fiscales de l'état de fait fictif qui auraient existé en l'absence du montage ou de la transaction abusifs. Pour la Suisse, cette clause a une portée déclarative, car les autorités fiscales peuvent octroyer des avantages selon leur droit interne sans une telle clause.

Art. 22

Élimination des doubles impositions

D'une manière générale, le Kosovo évite la double imposition par la méthode de l'imputation. Conformément à sa politique conventionnelle, la Suisse évite la double imposition par la méthode de l'exemption et, pour les dividendes et intérêts, par la méthode de l'imputation. Comme elle le fait d'habitude, la Suisse accorde l'exemption aux gains issus de la vente d'actions de sociétés immobilières selon l'art. 13, par. 4, à condition que l'imposition effective dans l'autre pays contractant soit prouvée.

Le par. 4 évite des cas de doubles non-impositions en cas de conflit de qualification entre l'Etat de résidence et l'Etat de source concernant l'application de dispositions de la CDI-Kosovo. Cette disposition, qui clarifie expressément la politique conventionnelle suisse en la matière, fait partie du Modèle OCDE et figure dans les recommandations de l'action 2 du projet BEPS.

Art. 24

Procédure amiable

La CDI-Kosovo prévoit la possibilité pour une personne contribuable de demander l'ouverture d'une procédure amiable soit dans son Etat de résidence, soit dans l'autre Etat contractant. Cette disposition vise à améliorer la résolution des différends.

Cette disposition contient également une clause d'arbitrage sur la base du Modèle OCDE. Cela correspond à la politique conventionnelle de la Suisse. Concernant les détails de la procédure d'arbitrage en tant que telle, il y a lieu de se référer au message concernant une nouvelle convention contre les doubles impositions avec l'Afrique du Sud3.

Dans la pratique, il a été constaté que, souvent, le délai de deux ans prévu par le Modèle OCDE ne suffisait pas pour mener à leur terme les procédures amiables, en particulier celles qui touchent aux prix de transfert. Il a donc été convenu de prolonger le délai en vue d'un accord dans le cadre de la procédure amiable à trois ans.

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La procédure d'arbitrage est ouverte à la demande du contribuable concerné si les autorités compétentes des deux Etats contractants n'ont pas réussi à s'entendre après trois ans de procédure amiable et à condition qu'aucune décision judiciaire n'ait encore été rendue dans l'un des Etats contractants. La sentence du tribunal arbitral est contraignante pour les Etats contractants si aucun contribuable directement concerné ne s'y oppose et si les autorités compétentes et les personnes concernées n'aboutissent pas à une autre solution dans les six mois suivant la sentence arbitrale.

Les questions de procédure seront réglées d'un commun accord entre les autorités compétentes.

Art. 25

Échange de renseignements

La CDI-Kosovo contient une disposition concernant l'échange de renseignements conforme au standard. Les indications ci-après concernent certains points essentiels de l'art. 25 CDI-Kosovo, ainsi que les dispositions y relatives du protocole à la convention (ch. 8).

Comme dans les conventions contre les doubles impositions que la Suisse a conclues avec dautres Etats et comme le préconise le Modèle OCDE, la disposition sur léchange de renseignements sapplique à lensemble des impôts.

Les dispositions de l'art. 25 sont précisées dans le protocole à la convention (ch. 8).

Le ch. 8 du protocole à la convention règle ainsi en détail les exigences auxquelles une demande de renseignements doit répondre (let. b). Il faut notamment identifier la personne concernée (ce renseignement peut découler de tout élément qui permet une identification) et donner, pour autant qu'ils soient connus, le nom et l'adresse de la personne (par ex. une banque) que l'Etat requérant présume être en possession des renseignements demandés. Le protocole à la convention précise également que ces conditions ne doivent pas être interprétées de manière formaliste (let. c).

D'après le standard international en la matière, l'échange de renseignements est limité à des demandes concrètes. Selon le standard révisé de lOCDE, font également partie de ces demandes les demandes qui visent un groupe de contribuables définis précisément, dont on peut déduire quils nont pas rempli leurs obligations fiscales dans lEtat requérant. La CDI-Kosovo permet de donner suite à ces demandes. L'identification peut se faire par le nom et l'adresse de la personne concernée, mais aussi par d'autres moyens tels que la description d'un comportement. Cette interprétation est basée sur la clause dinterprétation (let. c en relation avec la let. b), qui oblige les Etats contractants à interpréter les exigences dune demande de manière à permettre un échange de renseignements qui soit aussi étendu que possible, sans pour autant autoriser la pêche aux renseignements. Les conditions procédurales pour répondre en Suisse aux demandes groupées sont réglées dans la loi du 28 septembre 2012 sur l'assistance administrative fiscale4.

L'art. 25 CDI-Kosovo ne prévoit pas l'échange de renseignements spontané ou automatique.

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RS 651.1

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Enfin, lors des négociations, la délégation suisse a communiqué à la délégation kosovare que la Suisse ne lui accordera pas l'assistance administrative en matière fiscale si la demande d'assistance administrative se fonde sur des données acquises de manière illégale.

Art. 27

Entrée en vigueur

La CDI-Kosovo sera applicable à partir du 1er janvier de l'année civile qui suivra l'entrée en vigueur de l'accord. Ceci vaut aussi pour l'échange de renseignements applicable aux informations concernant les périodes fiscales qui commencent le 1er janvier de l'année civile qui suit l'entrée en vigueur de la CDI-Kosovo, ou après cette date.

3

Conséquences financières

Dans toute convention contre les doubles impositions, les deux Etats contractants renoncent à certaines recettes fiscales. Le présent projet de convention réduit notamment le taux résiduel sur les dividendes à 15 % (5 % en cas de participation qualifiée) et à 5 % pour les intérêts, comme la Suisse l'a déjà fait avec de nombreux pays.

Globalement, ces mesures renforcent et garantissent les conditions fiscales cadres et exercent par conséquent un effet positif pour l'économie suisse. L'inclusion d'une clause sur l'échange de renseignements n'entraîne aucune diminution directe des recettes fiscales. La présente convention peut être mise en oeuvre dans le cadre des ressources en personnel existantes.

4

Aspects juridiques

4.1

Constitutionnalité

La CDI-Kosovo se fonde sur lart. 54 de la Constitution (Cst.) qui attribue à la Confédération la compétence en matière daffaires étrangères. En vertu de lart. 166, al. 2, Cst., lAssemblée fédérale est compétente pour l'approuver.

4.2

Forme de l'acte à adopter

Lart. 141, al. 1, let. d, Cst. dispose quun traité international est sujet au référendum sil est dune durée indéterminée et nest pas dénonçable, sil prévoit ladhésion à une organisation internationale ou sil contient des dispositions importantes fixant des règles de droit ou dont la mise en oeuvre exige l'adoption de lois fédérales. Selon l'art. 22, al. 4, de la loi du 13 décembre 2002 sur le Parlement5, sont réputées fixant des règles de droit les dispositions générales et abstraites d'application directe qui créent des obligations, confèrent des droits ou attribuent des compétences. Sont 5

RS 171.10

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considérées comme importantes les dispositions devant être édictées sous la forme d'une loi fédérale en vertu de l'art. 164, al. 1, Cst.

Conclue pour une durée indéterminée, la CDI-Kosovo peut néanmoins être dénoncée à tout moment pour la fin dune année civile, moyennant un préavis de six mois. Elle ne prévoit pas d'adhésion à une organisation internationale. Sa mise en oeuvre n'exige pas l'adoption de lois fédérales.

La CDI-Kosovo crée des obligations et confère des droits à la Suisse. Elle contient en particulier des dispositions mettant en oeuvre certains développements issus du projet BEPS de l'OCDE, dont la nouvelle règle PPT. L'assistance administrative est également accordée conformément au standard international en la matière, ce qui correspond à la politique conventionnelle récente dans ce domaine. La convention est dès lors réputée fixant des règles de droit importantes selon l'art. 22, al. 4, de la loi du 13 décembre 2002 sur le Parlement et l'art. 164, al. 1, Cst.

L'arrêté fédéral portant approbation de l'accord est ainsi sujet au référendum au sens de l'art. 141, al. 1, let. d, ch. 3, Cst.

4.3

Délégation de compétence

A la suite d'une analyse réalisée par l'Office fédéral de la justice6, le Conseil fédéral a décidé, le 22 juin 2016, que le fait qu'un traité international ne crée pas d'obligations plus étendues que des traités au contenu similaire déjà conclus par la Suisse n'était plus considéré comme déterminant lors de l'examen de son assujettissement au référendum. II a en outre chargé les départements d'élaborer des normes de délégation sectorielles, soit au Conseil fédéral soit à l'Assemblée fédérale, de la compétence de conclure par arrêté fédéral simple des traités internationaux dans les domaines qui relevaient de leur compétence et qui le nécessitaient. Ces normes de délégation doivent figurer dans un acte qui lui, est sujet au référendum.

La CDI-Kosovo est conforme à la politique conventionnelle suisse tout en mettant en oeuvre certains développements issus du projet BEPS. A l'avenir, de nombreuses conventions contre les doubles impositions seront modifiées, voire conclues en réglant de manière comparable les problématiques de droit fiscal international. Dans ce cadre, il est proposé que par arrêté fédéral portant approbation de la présente convention, l'Assemblée fédérale soit autorisée à approuver par voie d'arrêté fédéral simple, les conventions contre les doubles impositions qui règlent d'une manière comparable les mêmes domaines que ceux contenus dans la CDI-Kosovo. Cela permettra d'exclure du référendum, à l'avenir, la conclusion et la révision de conventions pour éviter les doubles impositions qui suivent un schéma similaire et conforme à la politique conventionnelle de la Suisse. En revanche, si la Suisse convenait, dans un accord ultérieur, de dispositions allant au-delà de celles prévues dans la CDI-Kosovo, leur arrêté d'approbation serait sujet au référendum.

6

Rapport du 29 août 2014 de l'Office fédéral de la justice sur l'évolution de la pratique adoptée par le Conseil fédéral et l'Assemblée fédérale, depuis 2003, en matière de référendum facultatif des traités internationaux. www.ejpd.admin.ch > Actualité > News > 2016 > Référendum facultatif en matière d'«accords standards».

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4.4

Procédure de consultation

Selon l'art. 3, al. 1, let. c, de la loi du 18 mars 2005 sur la consultation (LCo)7, une consultation est organisée pour les traités internationaux qui sont soumis au référendum prévu par l'art. 141, al. 1, let. d, ch. 3, Cst. Toutefois, selon l'art. 3a, al. 1, let. b, LCo, il est possible de renoncer à une procédure de consultation lorsqu'aucune information nouvelle n'est à attendre du fait que les positions des milieux intéressés sont connues, notamment parce que l'objet dont traite le projet a déjà été mis en consultation précédemment. La renonciation à la procédure de consultation doit être justifiée par des motifs objectifs (cf. art. 3a, al. 2, LCo).

La CDI-Kosovo a été soumise à une procédure d'orientation. Dans ce cadre, en date du 5 janvier 2017, une note explicative a été adressée aux cantons et aux milieux économiques intéressés à la conclusion des conventions contre les doubles impositions. La CDI-Kosovo a été bien accueillie et n'a pas rencontré d'opposition. Par conséquent, les positions des milieux intéressés sont connues et documentées. En vertu de l'art. 3a, al. 1, let. b, LCo, il a été dès lors renoncé à une consultation.

7

RS 172.061

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