16.081 Message concernant l'approbation de la convention du Conseil de l'Europe sur la prévention et la lutte contre la violence à l'égard des femmes et la violence domestique (convention d'Istanbul) du 2 décembre 2016

Madame la Présidente, Monsieur le Président, Mesdames, Messieurs, Par le présent message, nous avons l'honneur de vous soumettre, en vous proposant de l'adopter, le projet d'arrêté fédéral portant approbation de la convention du Conseil de l'Europe du 11 mai 2011 sur la prévention et la lutte contre la violence à l'égard des femmes et la violence domestique (convention d'Istanbul).

Nous vous prions d'agréer, Madame la Présidente, Monsieur le Président, Mesdames, Messieurs, l'assurance de notre haute considération.

2 décembre 2016

Au nom du Conseil fédéral suisse: Le président de la Confédération, Johann N. Schneider-Ammann Le chancelier de la Confédération, Walter Thurnherr

2016-2225

163

Condensé La convention du Conseil de l'Europe sur la prévention et la lutte contre la violence à l'égard des femmes et la violence domestique (convention d'Istanbul) est entrée en vigueur le 1er août 2014. Il s'agit du premier instrument contraignant à l'échelle de l'Europe qui protège les femmes et les filles de toutes les formes de violence, y compris la violence domestique. La Suisse répond aux exigences de la convention.

Contexte La convention a pour objectif de prévenir, poursuivre et éliminer toutes les formes de violence à l'égard des femmes. Elle vise également à éliminer la discrimination des femmes et promouvoir l'égalité entre les femmes et les hommes. Elle est centrée ce faisant sur les droits, la protection et le soutien des victimes.

Contenu du projet La convention contient d'une part des dispositions pénales matérielles. Elle oblige notamment les Parties à ériger en infractions pénales la violence psychique, physique et sexuelle, le harcèlement, les mariages forcés, les mutilations génitales et l'avortement et la stérilisation forcés. Certaines infractions doivent aussi être poursuivies quand elles sont commises à l'étranger, dans un pays qui ne les réprime pas.

La convention impose également aux Parties de prévoir des mesures préventives telles que des programmes de sensibilisation, la formation des professionnels et des programmes d'intervention et de traitement pour les auteurs d'actes de violence. Il s'agit en outre pour elles de protéger et de soutenir les victimes, notamment en prévoyant suffisamment d'hébergements où trouver refuge et un numéro d'appel téléphonique national pour obtenir des conseils. La convention contient d'autre part des dispositions sur la procédure pénale. Les Parties doivent également prévoir des interdictions de contact et de périmètre pour les auteurs de violences et des délais de prescription des infractions suffisamment longs. Dans le domaine des migrations et de l'asile, la convention demande notamment des titres de séjour indépendants pour les victimes de violence. Enfin, elle aborde la coopération internationale en matière pénale, qui doit être rapide et efficace. Le suivi de la mise en oeuvre de la convention est assuré par un groupe d'experts indépendant.

Les buts de la convention ­ harmoniser les législations nationales dans le cadre européen
et au-delà dans ce domaine important, prévenir et poursuivre la violence à l'égard des femmes et la violence domestique selon des standards comparables à l'échelle de l'Europe, et intensifier et simplifier la coopération et l'échange d'informations entre les Parties ­ sont dans l'intérêt de la Suisse.

Le droit suisse satisfait dans l'ensemble aux exigences de la convention. Seule la question de savoir si et comment l'offre de conseils téléphoniques doit être développée réclame des examens approfondis. Les travaux nécessaires sont en cours.

L'adhésion à la convention n'en est pas remise en question.

164

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Table des matières Condensé

164

1

Contexte 1.1 Genèse 168 1.2 Aperçu du contenu de la convention 1.3 Appréciation de la convention 1.4 Procédure de consultation 1.5 Relation avec l'Union européenne

168

Commentaire des dispositions de la convention 2.1 Chapitre I ­ Buts, définitions, égalité et non-discrimination, obligations générales 2.1.1 Art. 1 Buts de la convention 2.1.2 Art. 2 Champ d'application de la convention 2.1.3 Art. 3 Définitions 2.1.4 Art. 4 Droits fondamentaux, égalité et non-discrimination 2.1.5 Art. 5 Obligations de l'Etat et diligence voulue 2.1.6 Art. 6 Politiques sensibles au genre 2.2 Chapitre II Politiques intégrées et collecte des données 2.2.1 Art. 7 Politiques globales et coordonnées 2.2.2 Art. 8 Ressources financières 2.2.3 Art. 9 Organisations non gouvernementales et société civile 2.2.4 Art. 10 Organe de coordination 2.2.5 Art. 11 Collecte des données et recherche 2.3 Chapitre III Prévention 2.3.1 Art. 12 Obligations générales 2.3.2 Art. 13 Sensibilisation 2.3.3 Art. 14 Education 2.3.4 Art. 15 Formation des professionnels 2.3.5 Art. 16 Programmes préventifs d'intervention et de traitement 2.3.6 Art. 17 Participation du secteur privé et des médias 2.4 Chapitre IV Protection et soutien 2.4.1 Art. 18 Obligations générales 2.4.2 Art. 19 Information 2.4.3 Art. 20 Services de soutien généraux 2.4.4 Art. 21 Soutien en matière de plaintes individuelles/collectives 2.4.5 Art. 22 Services de soutien spécialisés 2.4.6 Art. 23 Refuges 2.4.7 Art. 24 Permanences téléphoniques 2.4.8 Art. 25 Soutien aux victimes de violence sexuelle

170

2

169 169 169 170

170 170 170 172 174 176 177 178 178 180 181 182 184 187 187 189 192 195 198 199 200 200 200 200 201 201 202 204 205 165

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2.5

2.6

2.7

166

2.4.9 Art. 26 Protection et soutien des enfants témoins 2.4.10 Art. 27 Signalement 2.4.11 Art. 28 Signalement par les professionnels Chapitre V Droit matériel 2.5.1 Art. 29 Procès civil et voies de droit 2.5.2 Art. 30 Indemnisation 2.5.3 Art. 31 Garde, droit de visite et sécurité 2.5.4 Art. 32 Conséquences civiles des mariages forcés 2.5.5 Art. 33 Violence psychologique 2.5.6 Art. 34 Harcèlement 2.5.7 Art. 35 Violence physique 2.5.8 Art. 36 Violence sexuelle, y compris le viol 2.5.9 Art. 37 Mariages forcés 2.5.10 Art. 38 Mutilations génitales féminines 2.5.11 Art. 39 Avortement et stérilisations forcés 2.5.12 Art. 40 Harcèlement sexuel 2.5.13 Art. 41 Aide ou complicité et tentative 2.5.14 Art. 42 Justification inacceptable des infractions pénales, y compris les crimes commis au nom du prétendu «honneur» 2.5.15 Art. 43 Application des infractions pénales 2.5.16 Art. 44 Compétence 2.5.17 Art. 45 Sanctions et mesures 2.5.18 Art. 46 Circonstances aggravantes 2.5.19 Art. 47 Condamnations dans une autre Partie 2.5.20 Art. 48 Interdiction des modes alternatifs de résolution des conflits ou des condamnations obligatoires Chapitre VI Enquêtes, poursuites, droit procédural et mesures de protection 2.6.1 Art. 49 Obligations générales 2.6.2 Art. 50 Réponse immédiate, prévention et protection 2.6.3 Art. 51 Appréciation et gestion des risques 2.6.4 Art. 52 Ordonnances d'urgence d'interdiction 2.6.5 Art. 53 Ordonnances d'injonction ou de protection 2.6.6 Art. 54 Enquêtes et preuves 2.6.7 Art. 55 Procédures ex parte et ex officio 2.6.8 Art. 56 Mesures de protection 2.6.9 Art. 57 Aide juridique 2.6.10 Art. 58 Prescription Chapitre VII Migration et asile 2.7.1 Art. 59 Statut de résident 2.7.2 Art. 60 Demandes d'asile fondées sur le genre 2.7.3 Art. 61 Non-refoulement

206 207 207 209 209 210 211 212 213 213 215 216 216 218 219 219 219 220 221 221 223 224 224 224 226 226 227 228 230 230 231 232 234 238 238 239 239 242 243

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2.8

Chapitre VIII Coopération internationale (art. 62 à 64) 2.8.1 Art. 62 à 64 2.8.2 Art. 65 Protection des données 2.9 Chapitre IX Mécanisme de suivi (art. 66 à 70) 2.10 Chapitres X à XII Relations avec d'autres instruments internationaux, amendements à la convention et clauses finales (art. 71 à 81)

244 244 246 246

Conséquences 3.1 Conséquences sur les finances et sur l'état du personnel de la Confédération 3.2 Conséquences sur les finances et sur l'état du personnel des cantons 249

249

4

Relation avec le programme de législature

250

5

Aspects juridiques 5.1 Constitutionnalité 5.2 Forme de l'acte à adopter 5.3 Frein aux dépenses

250 250 250 251

3

248

249

Arrêté fédéral portant approbation de la convention du Conseil de l'Europe sur la prévention et la lutte contre la violence à l'égard des femmes et la violence domestique (Convention d'Istanbul) (Projet)

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Convention du Conseil de l'Europe sur la prévention et la lutte contre la violence à l'égard des femmes et la violence domestique

255

167

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Message 1

Contexte

1.1

Genèse

La violence à l'égard des femmes constitue une grave violation des droits de l'homme. Elle est à la fois la cause et la conséquence de l'inégalité de traitement entre les femmes et les hommes. Cette forme de violence est très répandue à travers le monde, y compris dans les Etats membres du Conseil de l'Europe. Le Conseil de l'Europe joue un rôle de pionnier dans la prévention et la lutte contre la violence faite aux femmes et la violence domestique. Il y a des années qu'il condamne toute forme de violence à l'égard des femmes et lutte contre elle1. Dans plusieurs arrêts récents2, la Cour européenne des droits de l'homme a constaté des violations de la Convention du 4 novembre 1950 de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales (CEDH)3 en lien avec des situations de violence domestique. La Cour a retenu que certains Etats avaient violé leur devoir de diligence en omettant de réagir de manière appropriée à ces situations, notamment en mettant en place des mesures préventives. La Convention du Conseil de l'Europe du 16 mai 2005 sur la lutte contre la traite des êtres humains4 et la Convention du Conseil de l'Europe du 25 octobre 2007 sur la protection des enfants contre l'exploitation et les abus sexuels5 interdisent toutes deux la traite d'êtres humains et l'exploitation et les abus sexuels d'enfants. Seule la recommandation Rec(2002)5 du Comité des Ministres sur la protection des femmes contre la violence6 traite d'autres formes de violence.

C'est pourquoi le Comité des Ministres du Conseil de l'Europe a instauré un comité d'experts qu'il a chargé de mettre au point un instrument complet pour prévenir et lutter contre la violence à l'égard des femmes et la violence domestique, protéger les victimes et poursuivre les auteurs. Le comité d'experts a élaboré la convention du Conseil de l'Europe sur la prévention et la lutte contre la violence à l'égard des femmes et la violence domestique (convention d'Istanbul) entre avril 2009 et décembre 2010. Le texte a été ouvert à la signature des Etats membres le 11 mai 2011 à Istanbul. La Suisse a signé la convention le 11 septembre 2013. La convention est entrée en vigueur le 1er août 2014. Elle a déjà été ratifiée par 22 Etats7.

1

2 3 4 5 6 7

168

Voir la liste de résolutions et recommandations de l'Assemblée parlementaire (2002­2012) figurant à l'annexe III du «Manuel à l'usage des parlementaires» sous www.ebg.admin.ch > Thèmes > Violence domestique > Affaires internationales > Conseil de l'Europe.

Dont un arrêt de référence rendu dans l'affaire Opuz c. Turquie, requête no 33401/02, 9 juin 2009, Recueil des arrêts et décisions 2009-III, p. 169.

RS 0.101.

RS 0.311.543, en vigueur en Suisse depuis le 1er avril 2013 RS 0.311.40, en vigueur en Suisse depuis le 1er juillet 2014 www.coe.int Etat au 20 oct. 2016

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1.2

Aperçu du contenu de la convention

La convention d'Istanbul est le premier instrument contraignant à l'échelle de l'Europe qui protège les femmes et les filles de toutes les formes de violence, y compris la violence domestique. Elle énonce explicitement les principes de l'égalité entre les femmes et les hommes et l'interdiction de la discrimination (art. 1 à 4). Elle couvre toutes les formes de violence auxquelles les femmes sont exposées, à savoir la violence psychologique (art. 33), physique (art. 35) et sexuelle (art. 36), le harcèlement (art. 34), les mariages forcés (art. 37), les mutilations génitales (art. 38) et l'avortement et la stérilisation forcés (art. 39). La convention autorise ici et là des sanctions autres que pénales (art. 78, par. 3, pour les art. 33 et 34). Elle contient également des dispositions sur la prévention (par ex. sur la sensibilisation à la thématique, art. 13; sur la formation des professionnels, art. 15; sur les programmes de traitement destinés aux auteurs, art. 16), sur la protection et le soutien des victimes (par ex. la mise en place de suffisamment de refuges pour les victimes, art. 23; de conseils téléphoniques à l'échelle nationale, art. 24), sur la poursuite pénale et les mesures de protection (par ex. l'interdiction de contact et de périmètre pour les auteurs, art. 53; des délais de prescription suffisamment longs, art. 58), sur les migrations et l'asile (par ex. des titres de séjour indépendants pour les victimes, art. 59) et sur la coopération internationale (art. 62 à 65). Elle prévoit également que sa mise en oeuvre soit suivie par un groupe d'experts indépendants («GREVIO», art. 66 à 70). Les Parties ne peuvent apporter des réserves que sur certains articles (art. 78).

Les Etats membres sont encouragés à appliquer la convention à toutes les victimes de violence domestique, hommes et garçons compris (art. 2, par. 2).

1.3

Appréciation de la convention

La convention se distingue par son approche globale de la prévention et de la lutte contre la violence à l'égard des femmes et la violence domestique. Elle vise en première ligne à protéger les femmes de toutes les formes de violence, y compris la violence domestique. Les buts de la convention ­ harmoniser les législations nationales dans le cadre européen et au-delà dans ce domaine important, poursuivre ce type de criminalité selon des standards comparables à l'échelle de l'Europe, et intensifier et simplifier la coopération et l'échange d'informations entre les Parties ­ sont dans l'intérêt de la Suisse.

1.4

Procédure de consultation

Le 7 octobre 2015, le Conseil fédéral a chargé le Département fédéral de justice et police (DFJP) d'organiser une procédure de consultation sur le projet d'arrêté et le rapport explicatif. Le DFJP a donc invité les cantons, les partis représentés au sein de l'Assemblée fédérale et les institutions et organisations intéressées à prendre

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position sur le texte jusqu'au 29 janvier 2016. Il a reçu 84 avis (4 participants ont renoncé à s'exprimer)8.

Les participants à la procédure de consultation approuvent clairement et à une large majorité l'adhésion de la Suisse à la convention d'Istanbul et sa mise en oeuvre. La plupart le font explicitement, quelques-uns implicitement, dans le sens où ils ne prennent position que sur quelques points matériels du texte ou n'apportent pas de remarque. Seuls neuf participants rejettent l'adhésion, dont trois cantons et un parti9.

Les différents commentaires et points critiqués sont abordés sous les dispositions concernées (voir ch. 2).

1.5

Relation avec l'Union européenne

La mise en oeuvre de la convention ne pose aucun problème de compatibilité entre le droit suisse et le droit de l'Union européenne (UE). Le Conseil de l'UE a adopté le 5 juin 2014 des conclusions dans lesquelles il intime aux Etats membres de signer, ratifier et mettre en oeuvre la convention d'Istanbul10. Parmi les Parties à la convention, on trouve déjà plusieurs Etats membres de l'UE; des travaux de mise en oeuvre de la convention sont en cours dans d'autres Etats. La convention est également ouverte à la signature de l'Union européenne (art. 75, par. 1)

2

Commentaire des dispositions de la convention

2.1

Chapitre I ­ Buts, définitions, égalité et non-discrimination, obligations générales

2.1.1

Art. 1 Buts de la convention

Le par. 1 énonce les buts de la convention. Ces buts sont concrétisés dans les articles qui suivent. La mise en oeuvre de la convention doit être assurée par un mécanisme de suivi (par. 2).

2.1.2

Art. 2 Champ d'application de la convention

Le champ d'application de la convention englobe toutes les formes de violence à l'égard des femmes. La convention doit s'appliquer à toutes les victimes de la violence domestique et en particulier aux femmes, qui sont les premières victimes d'une violence fondée sur le genre. Elle s'applique en temps de paix et en situation de conflit armé.

8

9 10

170

Synthèse des résultats de la procédure de consultation, à consulter sous www.admin.ch > Droit fédéral > Procédures de consultation > Procédures de consultation terminées > 2016 > DFJP LU, SZ, TG et UDC «Prévenir et combattre toutes les formes de violence à l'égard des femmes et des filles, y compris les mutilations génitales féminines», CL14-097EN

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La convention est axée en priorité sur la violence faite aux femmes, y compris la violence domestique, dont la majorité des victimes sont féminines. Le terme «femme» inclut les filles de moins de 18 ans11. Les Parties sont toutefois libres de décider si elles veulent aussi appliquer la convention aux hommes et aux garçons et comment elles entendent le faire12. Dans le droit pénal et le droit civil suisses, les dispositions pertinentes sont en principe formulées de manière neutre et donc applicables aux personnes des deux sexes. Les femmes et les filles étant affectées par la violence de manière disproportionnée, les mesures de prévention et autres sont souvent taillées pour elles. Il existe toutefois de plus en plus d'activités et de mesures spécifiquement masculines (voir notamment le commentaire des art. 12, par. 4, et 16)13.

Les principes fondamentaux du droit international humanitaire et le Statut de Rome de la Cour pénale internationale, daté du 17 juillet 199814, auxquels il est fait référence dans le préambule de la convention, affirment la responsabilité pénale individuelle en droit international pour les actes de violence commis principalement (mais non exclusivement) en situation de conflit armé. L'art. 7 du Statut de Rome (crimes contre l'humanité commis dans le cadre d'une attaque généralisée ou systématique lancée contre toute population civile) et son art. 8 (crimes de guerre) incluent les actes de violence commis en grande partie contre les femmes, tels que le viol et la violence sexuelle. Il en va de même des protocoles additionnels I15 et II16 du 8 juin 1977 aux conventions de Genève du 12 août 1949 (ci-après: PA I et II). Les art. 75, ch. 2, let. b, PA I et 4, ch. 2, let. e, PA II répriment en effet les atteintes à la dignité de la personne, notamment les traitements humiliants et dégradants, la prostitution forcée et toute forme d'attentat à la pudeur.

La convention ne remet pas en cause les engagements internationaux de la Suisse, en particulier ceux découlant du Statut de Rome, des conventions de Genève et de leurs protocoles additionnels. En effet, aux termes de l'art. 71, par. 1, de la convention, celle-ci ne porte pas atteinte aux obligations découlant d'autres instruments internationaux contenant des dispositions relatives aux matières régies par elle. Conformément à la
Convention de Vienne du 23 mai 1969 sur le droit des traités 17, cette disposition vise à assurer la coexistence de la convention avec d'autres traités ­ multilatéraux ou bilatéraux ­ ou instruments traitant de matières qui sont aussi couvertes par la convention. Cette disposition est conforme à l'objectif global de la convention, qui est de protéger les droits des victimes de la violence à l'égard des femmes et de la violence domestique et de leur assurer le niveau de protection le plus élevé.

11 12 13

14 15 16 17

Art. 3, let. f, de la convention Rapport explicatif de la convention, ch. 36 et 37, www.coe.int > Explorer > Bureau des traités > Liste complète > 210 > Rapport explicatif Plusieurs participants à la consultation approuvent expressément le fait que la convention s'applique à toutes les victimes de la violence domestique, y compris aux hommes et aux garçons. Voir la synthèse des résultats de la procédure de consultation sous www.admin.ch > Droit fédéral > Procédures de consultation > Procédures de consultation terminées > 2016 > DFJP RS 0.312.1 RS 0.518.521 RS 0.518.522 RS 0.111

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Pour le surplus, en ce qui concerne la poursuite des infractions, les obligations découlant de la convention ne vont pas au-delà de celles prévues par le Statut de Rome et la convention de Genève (IV) relative à la protection des personnes civiles en temps de guerre et ses protocoles additionnels I et II. L'art. 44 de la convention prévoit en effet une compétence limitée, soumise à diverses conditions restreignant la compétence universelle prévue par l'art. 146 de la convention de Genève IV et les art. 12 ss du Statut de Rome. Quant au droit suisse, il repose également sur une conception «conditionnée» ou «limitée» de la compétence universelle18.

La Suisse remplit les exigences de l'art. 2.

2.1.3

Art. 3 Définitions

L'art. 3 définit quelques-uns des termes utilisés.

Définition de la «violence à l'égard des femmes» (let. a.) et de la «violence domestique» (let. b) La «violence à l'égard des femmes» au sens de la let. a doit être comprise comme une violation des droits de l'homme et une discrimination à raison du sexe (voir l'art. 1, let. b, de la convention), qui peut survenir dans la vie publique ou privée. La notion couvre différents types de violences interdits en droit suisse, notamment les violences domestiques (art. 111 ss, 122, 123, 126, 180, 181, 189, 190 CP), les mutilations génitales féminines (art. 124 CP), les mariages forcés (art. 181a CP) ou le harcèlement sexuel (art. 193 et 198 CP) au travail (art. 4 de la loi du 24 mars 1995 sur l'égalité [LEg]19).

La définition du terme «violence à l'égard des femmes» est la même que celle qui figure dans les textes internationaux en vigueur20. La seule nouveauté a consisté à ajouter une référence aux «dommages économiques». La définition de la «violence domestique» qui figure à la let. b inclut aussi les actes de violence «économique».

Selon le rapport explicatif21, celle-ci «peut être liée à la violence psychologique». En Suisse, la violence économique est comprise comme une forme de violence psychique qui peut consister, par exemple, à interdire à une personne de travailler, à l'astreindre à un travail forcé, à lui saisir son salaire ou à la contraindre à cosigner des contrats de crédit à la consommation22. Lorsqu'une personne victime de telle violence subit une atteinte à son intégrité psychique du fait d'une infraction pénale

18 19 20

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172

Voir les art. 264m du code pénal (CP, RS 311.0) et 10, al. 1bis, du code pénal militaire du 13 juin 1927 (CPM, RS 321.0) RS 151.1 Recommandation Rec(2002)5 du Comité des Ministres aux Etats membres sur la protection des femmes contre la violence, Recommandation générale n° 19 du Comité CEDEF sur la violence à l'égard des femmes (1992) et art. 1 de la Déclaration des Nations Unies sur l'élimination de toutes les formes de violence à l'égard des femmes Rapport explicatif de la convention, ch. 40 et 41 Bureau fédéral de l'égalité entre femmes et hommes, feuille d'information n° 1 «Violences domestiques: définition, formes et conséquences», let. b, avec les références, à consulter sous: www.bfeg.admin.ch > Documentation > Publications sur la violence > Feuilles d'information violence domestique

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au sens de l'art. 1, al. 1, de loi du 23 mars 2007 sur l'aide aux victimes (LAVI) 23, elle peut se prévaloir du soutien prévu par ce texte (voir aussi sous let. e). Il est supposé toutefois que cette violence présente une certaine gravité, autrement dit qu'elle soit pénalement répréhensible, au sens d'une menace (art. 180 CP) ou d'une contrainte (art. 181 CP).

Aux termes de la let. b, la «violence domestique» désigne tous les actes de violence physique, sexuelle, psychologique ou économique qui surviennent au sein de la famille ou du foyer ou entre des anciens ou actuels conjoints ou partenaires. La résidence conjointe de la victime et de l'auteur n'est pas requise. En Suisse, les lois cantonales sur la violence domestique contiennent des définitions similaires. La loi sur les violences domestiques du canton de Genève24, par exemple, désigne les «violences domestiques» comme «une situation dans laquelle une personne exerce des violences physiques, psychiques, sexuelles ou économiques sur une autre personne avec laquelle elle est liée par un rapport familial, conjugal, de partenariat ou d'union libre, existant ou rompu». Il n'est pas nécessaire que ces personnes fassent ménage commun au moment où l'atteinte a été commise. Le code pénal ne mentionne l'existence d'un ménage commun que par rapport aux actes de violence commis entre personnes qui ne sont pas liées par un contrat de mariage ou un partenariat enregistré25. Conformément à ce qui est demandé par la convention, la résidence conjointe n'est donc pas un élément constitutif de la définition des violences domestiques en droit suisse.

Définitions du «genre» (let. c) et de la «violence à l'égard des femmes fondées sur le genre» (let. d) La convention place l'obligation de prévenir et de combattre la violence à l'égard des femmes dans le cadre plus large de la réalisation de l'égalité entre femmes et hommes. Elle fait le lien entre la persistance de pratiques dommageables à l'égard des femmes et certains rôles différents que la société attribue aux femmes et aux hommes26. La définition du «genre» donnée à la let. c met en évidence ce phénomène de construction sociale des différences. Dans le cadre de la Convention des Nations Unies du 18 décembre 1979 sur l'élimination de toutes les formes de discrimination à l'égard des femmes (CEDEF)27 aussi,
«le mot renvoie à l'identité, aux attributs et au rôle de la femme et de l'homme, tels qu'ils sont définis par la société, et à la signification sociale et culturelle que la société donne aux différences biologiques, ce qui engendre des rapports hiérarchiques entre femmes et hommes et se traduit par une répartition du pouvoir et des droits favorable aux hommes et désavantageux pour les femmes»28. Aux termes de la let. d, le concept de «violence à l'égard des femmes fondée sur le genre» désigne toute violence faite à l'égard d'une femme parce qu'elle est une femme ou affectant les femmes de manière disproportionnée. Cette expression doit être comprise comme équivalent à 23 24 25 26 27 28

RS 312.5 Loi du 16 septembre 2005 (RS/GE F 1 30), art. 2, al. 1; voir aussi, dans le canton de Zurich, Gewaltschutzgesetz (GSG) du 19 juin 2006 (RS/ZH LS 351), § 2.

Voir par ex. l'art. 55a, al. 1, let. a, CP, l'art. 123, ch. 2, CP ou l'art. 126, ch. 2, CP.

Rapport explicatif de la convention, ch. 43 RS 0.108, entrée en vigueur pour la Suisse le 26 avril 1997 Recommandation générale n° 28 du 16 décembre 2010 concernant les obligations fondamentales des Etats parties découlant de l'art. 2 CEDEF, CEDAW/C/GC/28, par. 5

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celle de «violence fondée sur le genre», utilisée dans différents textes internationaux déjà applicables en Suisse29.

Définitions des termes «victime» (let. e) et «femmes» (let. f) Le terme «victime» doit être interprété à la lumière du champ d'application de la convention. Tandis que seules les femmes, y compris les filles de moins de 18 ans, peuvent être victimes de «violences à l'égard des femmes» au sens de la let. a, toute personne, quel que soit son sexe ou son âge, peut être victime de «violence domestique» au sens de la let. b.

Selon les art. 1 LAVI et 116 du code de procédure pénale (CPP)30, est victime toute personne qui a subi, du fait d'une infraction, une atteinte directe à son intégrité physique, psychique ou sexuelle. L'aide aux victimes et des droits particuliers ne sont accordés dans la procédure pénale que si l'infraction a entraîné pareille atteinte à l'intégrité de la victime. Lorsque la violence économique ne constitue pas une infraction au sens de la LAVI (voir les commentaires de la let. a), elle est couverte par les mesures, en grande partie cantonales, concernant la violence domestique. La notion de victime en droit suisse est donc compatible avec celle prévue par la convention.

Le terme «femme» englobe, selon la let. f, les filles de moins de 18 ans.

2.1.4

Art. 4 Droits fondamentaux, égalité et non-discrimination

Les Parties sont tenues de veiller à ce que toute personne, en particulier les femmes, puisse vivre à l'abri de la violence aussi bien dans la sphère publique que dans la sphère privée (par. 1).

Le droit à l'intégrité physique et psychique est un des éléments centraux du droit fondamental à la protection de la personnalité. Sa protection est garantie par l'art. 10, al. 2, de la Constitution (Cst.)31. Le droit à l'intégrité physique protège l'individu des atteintes de toutes sortes, même quand elles n'occasionnent ni dommage réel ni douleur32. Le droit à l'intégrité psychique protège quant à lui la liberté de décision d'une personne et il est considéré comme un instrument destiné à la protéger de toute tentative de la mettre psychiquement sous pression.

Les Parties doivent également condamner toutes les formes de discrimination à l'égard des femmes et prendre les mesures nécessaires pour la prévenir, en particulier en inscrivant dans la loi le principe de l'égalité entre les femmes et les hommes et en assurant l'application effective dudit principe (par. 2).

29

30 31 32

174

Le ch. 44 du rapport explicatif de la convention mentionne la Recommandation générale n° 19 du Comité CEDEF sur la violence à l'égard des femmes (1992), la Déclaration de l'Assemblée générale des Nations Unies sur l'élimination de la violence à l'égard des femmes (1993) et la Recommandation Rec (2002)5 du Comité des Ministres du Conseil de l'Europe sur la protection des femmes contre la violence (2002).

RS 312.0 RS 101 ATF 118 Ia 427 434

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L'art. 8, al. 3, Cst. dispose que l'homme et la femme sont égaux en droit. La norme constitutionnelle protège les femmes et les hommes de toute discrimination du fait de leur sexe. Selon la jurisprudence, une inégalité de traitement n'est admissible que lorsqu'elle est matériellement justifiée et qu'elle appelle impérativement des exceptions. Les motifs pouvant expliquer une discrimination sont pour l'essentiel des différences biologiques, spécifiquement liées au sexe, qui excluent une égalité de traitement dans le cas d'espèce. L'art. 8, al. 3, Cst. garantit à chacun le droit constitutionnel de se défendre contre les inégalités de traitement face aux organes de l'Etat, non seulement dans le cas concret, mais aussi sous la forme du contrôle abstrait des normes. La disposition assigne au législateur fédéral et cantonal de pourvoir à l'égalité de droit et de fait, en particulier dans les domaines de la famille, de la formation et du travail. L'art. 8, al. 3, Cst. est donc la base constitutionnelle des mesures destinées à éliminer les inégalités d'origine sociale dans tous les domaines de la vie.

Conformément à ce mandat constitutionnel, les lois suisses existantes ont été adaptées au plan aussi bien formel (formulation neutre) que matériel et de nouvelles lois ont été édictées. La LEg, par exemple, vise à promouvoir dans les faits l'égalité entre femmes et hommes et contient des consignes claires sur l'égalité de traitement ­ et en particulier l'égalité salariale ­ dans le droit privé et le droit public. Elle est également la base légale des aides financières que la Confédération verse pour promouvoir l'égalité entre femmes et hommes dans la vie active.

Le principe de non-discrimination fixé au par. 3 oblige les Parties à mettre en oeuvre la convention sans discrimination aucune, fondée notamment sur le sexe, la race, la couleur, la langue, la religion, les opinions politiques ou toute autre opinion, l'origine nationale ou sociale, l'appartenance à une minorité nationale, la fortune, la naissance, l'orientation sexuelle, l'identité de genre, l'âge, l'état de santé, le handicap, le statut marital, le statut de migrant ou de réfugié, ou toute autre situation. La définition de la discrimination correspond en principe à celle de l'art. 14 CEDH33.

Le principe de non-discrimination est aussi inscrit
dans le droit suisse. Selon l'art. 8, al. 2, Cst., nul ne doit subir de discrimination du fait notamment de son origine, de sa race, de son sexe, de son âge, de sa langue, de sa situation sociale, de son mode de vie, de ses convictions religieuses, philosophiques ou politiques ni du fait d'une déficience corporelle, mentale ou psychique. L'énumération n'est pas exhaustive; l'interdiction de la discrimination s'étend aussi à des infractions qui ne sont pas mentionnées expressément dans l'art. 8, al. 2, Cst. L'aspect décisif est qu'il s'agit de caractéristiques essentielles auxquelles un être humain ne peut que difficilement ou pas renoncer. L'interdiction de la discrimination s'adresse à l'Etat et ne déploie pas d'effets directs entre les individus. Pour assurer le respect de ce droit fondamental entre les particuliers, le législateur a d'une part conçu des lois sectorielles (loi sur 33

Rapport explicatif de la convention, ch. 41 ss; le principe de non-discrimination figure aussi dans d'autres traités internationaux, notamment dans la Charte des Nations Unies du 26 juin 1945 (RS 0.120, art. 1, par. 3) et dans les deux pactes des Nations Unies sur les droits de l'homme, à savoir le Pacte international du 16 décembre 1966 relatif aux droits économiques, sociaux et culturels (Pacte I) (RS 0.103.1, art. 2, par. 2, et 3) et le Pacte international du 16 décembre 1966 relatif aux droits civils et politiques (Pacte II) (RS 0.103.2, art. 2, par. 1), ainsi que dans d'autres conventions de portée universelle traitant de problèmes spécifiques de discrimination.

175

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l'égalité, loi sur l'égalité pour les handicapés, etc.); il l'a d'autre part protégé par des normes pénales (par ex. l'art. 261bis CP34).

La Suisse remplit donc les conditions de l'art. 4 de la convention.

2.1.5

Art. 5 Obligations de l'Etat et diligence voulue

Les Parties doivent s'abstenir de commettre tout acte de violence à l'égard des femmes et s'assurer que les autorités, les fonctionnaires, les agents et les institutions étatiques, ainsi que les autres acteurs qui agissent au nom de l'Etat se comportent conformément à cette obligation (par. 1). Elles prennent les mesures législatives et autres nécessaires pour agir avec la diligence voulue afin de prévenir, enquêter sur, punir, et accorder une réparation pour les actes de violence couverts par le champ d'application de la présente convention commis par des acteurs non étatiques (par. 2).

La garantie de l'intégrité physique et psychique inscrite à l'art. 10, al. 2, Cst.

s'entend comme une obligation négative face aux atteintes de l'Etat. Mais la norme constitutionnelle impose aussi à l'Etat de prendre des mesures concrètes pour protéger ses citoyens. Cette obligation incombe non seulement aux autorités qui appliquent le droit, mais aussi au législateur. Ce dernier doit édicter les lois nécessaires ­ avant tout dans le domaine du droit pénal, du droit de la procédure pénale et du droit civil ­ pour que tous les individus soient protégés des atteintes à leur intégrité et que la protection de ce droit fondamental soit aussi assurée entre les individus.

Le droit pénal suisse protège chacun, indépendamment de son sexe, des atteintes à son intégrité physique. A côté des infractions générales destinées à protéger la vie et l'intégrité corporelle (art. 111 ss CP), il faut signaler en particulier les dispositions pénales régissant les infractions contre l'intégrité sexuelle (art. 187 ss CP). Le code pénal punit en outre les atteintes à l'intégrité psychique qui peuvent nuire à la liberté de décision d'une personne et la mettre sous pression (comme la menace, art. 180 CP, ou la contrainte, art. 181 CP). En ce qui concerne les droits procéduraux en amtière pénale et les mesures de protection en faveur des victimes, voir les explications fournies au ch. 2.6.8.

Le droit civil suisse contient pour sa part, dans le code civil (CC)35, une série d'instruments développés à partir des principes de la protection de la personnalité qui peuvent être utilisés pour protéger contre la violence, les menaces et le harcèlement (art. 28b CC). Les personnes qui sont victimes de pareilles atteintes peuvent notamment requérir
le juge d'interdire à l'auteur de l'atteinte de les approcher ou d'accéder à un périmètre déterminé autour de leur logement, qui peut englober des rues, des places ou des quartiers entiers, ou de prendre contact avec elles, par téléphone, par écrit ou par voie électronique. Le juge peut également astreindre l'auteur de l'atteinte à d'autres comportements destinés à protéger la victime de ses vio34

35

176

Voir aussi l'initiative parlementaire «Lutter contre les discriminations basées sur l'orientation sexuelle», 13.407, qui demande que l'art. 261bis CP soit étendu à la discrimination en raison de l'orientation sexuelle, à laquelle il a été donné suite.

RS 210

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lences. L'art. 28b CC permet aussi au juge de l'expulser du logement commun. Pour ce qui est de l'indemnisation et de la réparation morale, voir les explications données au ch. 2.5.2.

Il faut mentionner enfin la LAVI, qui garantit aux victimes d'infraction des conseils et une aide et qui prévoit que lesdites victimes bénéficient, sous certaines conditions, de prestations financières telles qu'aide immédiate, aide à long terme, indemnisation et réparation morale (voir les explications figurant au ch. 2.5.2).

La Suisse remplit donc les conditions de l'art. 5 de la convention.

2.1.6

Art. 6 Politiques sensibles au genre

L'art. 6 engage les Parties à inclure une perspective de genre dans la mise en oeuvre et l'évaluation de l'impact de la convention et à promouvoir et mettre en oeuvre de manière effective des politiques d'égalité entre les femmes et les hommes et les droits des femmes (voir aussi les art. 1, let. b, et 4, par. 2, de la convention).

En Suisse, le principe d'égalité entre femmes et hommes est inscrit à l'art. 8, al. 3, Cst. Adoptée en vertu de cette disposition, la LEg décrit à l'art. 16 la mission et les tâches du Bureau fédéral de l'égalité entre femmes et hommes (BFEG) 36, office fédéral rattaché au Département fédéral de l'intérieur (DFI)37. Aux niveaux cantonal et communal, des dispositions légales similaires fondent l'action des bureaux cantonaux et communaux de l'égalité.

La loi du 13 décembre 2002 sur le Parlement (LParl)38 prévoit que, lorsqu'il soumet un projet d'acte au Parlement, le Conseil fédéral y joint un message où sont notamment indiquées les conséquences que le projet aura sous l'angle de l'égalité entre femmes et hommes39. Sur la base de cette loi et en adéquation avec l'art. 6 de la convention, l'administration fédérale a récemment élaboré des instruments qui vont lui permettre d'améliorer la manière dont elle intègre une perspective de genre dans l'ensemble du processus législatif40.

Selon le programme de législature 2015 à 2019, la Suisse encourage la cohésion sociale et l'égalité entre femmes et hommes. Elle prévient la violence, la criminalité et le terrorisme et les combat. Un des moyens consiste à adopter le message concernant l'approbation de la convention d'Istanbul (voir les explications données au ch. 4).

Les mesures prises dans ce contexte sont expliquées par rapport aux chap. II et III de la convention (voir en particulier les explications concernant l'art. 7).

La Suisse respecte donc les consignes données par l'art. 6 de la convention.

36 37 38 39 40

Art. 16 LEg Voir l'art. 5 de l'ordonnance du 28 juin 2000 sur l'organisation du Département fédéral de l'intérieur (Org DFI), RS 172.212.1.

RS 171.10 Art. 141, al. 2, let. i, LParl Voir la réponse du Conseil fédéral à la question Leutenegger Oberholzer, 13.1011 «Exposer systématiquement dans les messages du Conseil fédéral les conséquences d'un projet d'acte sur l'égalité des sexes».

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2.2

Chapitre II Politiques intégrées et collecte des données

2.2.1

Art. 7 Politiques globales et coordonnées

Le par. 1 demande aux Etats d'adopter et de mettre en oeuvre des politiques nationales effectives, globales et coordonnées pour prévenir et combattre toutes les formes de violence couvertes par le champ d'application de la convention. Le par. 2 demande de placer les droits des victimes au centre de toutes les mesures et de veiller à ce que les politiques adoptées soient mises en oeuvre sur la base d'une coopération interinstitutionnelle efficace. Le par. 3 appelle à l'implication de toutes les institutions et organisations pertinentes.

Afin de mettre en oeuvre le Programme d'action issu de la Conférence mondiale de l'ONU sur les femmes de Pékin (1995), le Conseil fédéral a adopté en 1999 un plan d'action national «Egalité entre femmes et hommes» qui prévoit 19 mesures pour prévenir et éliminer la violence à l'égard des femmes. La Confédération a publié en octobre 2014 un bilan de l'avancement de la mise en oeuvre de ce plan d'action 41, qui a été conçu à l'attention et en collaboration avec de nombreux acteurs étatiques et non étatiques aux niveaux national, cantonal et communal.

Un rapport du Conseil fédéral du 13 mai 200942 prévoit 20 mesures pour lutter au niveau fédéral contre la violence dans les relations de couple. Un groupe de travail interdépartemental permanent dirigé par le BFEG et composé de représentants d'autres offices fédéraux (notamment des domaines de la justice, de la police, des migrations, de la santé, des assurances sociales, de la statistique, des affaires étrangères) se réunit chaque année pour coordonner la mise en oeuvre de ces 20 mesures et d'autres dossiers pendants43.

Les cantons de Genève44, de Neuchâtel45, de Nidwald46, d'Obwald47, du Valais48 et de Zurich49 ont adopté des lois spéciales qui visent à renforcer, institutionnaliser et coordonner les mesures de protection contre la violence domestique. Dans les cantons qui ne possèdent pas de loi spécifique sur le sujet, on trouve des règles corres-

41

42 43

44 45 46 47 48 49

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Égalité entre femmes et hommes Plan d'action de la Suisse Bilan 1999­2014: www.ebg.admin.ch > Documentation > Publications sur la collaboration internationale/la mise en oeuvre en Suisse Rapport du 13 mai 2009 sur la violence dans les relations de couple. Ses causes et les mesures prises en Suisse, FF 2009 3611 Voir le rapport intermédiaire du Conseil fédéral du 22 février 2012 sur l'état d'avancement des mesures prévues dans le rapport du 13 mai 2009 à l'intention de la Commission des affaires juridiques du Conseil national (CAJ-N), FF 2012 2209 Loi du 16 septembre 2005 sur les violences domestiques (LVD), RS/GE F 1 30 Loi du 30 mars 2004 sur la lutte contre la violence dans les relations de couple (LVCouple), RS/NE 322 05 Gesetz zum Schutz der Persönlichkeit (Persönlichkeitsschutzgesetz, PschG) du 25 juin 2008, RS/NI 211.2 Gesetz über den Schutz bei häuslicher Gewalt du 21 mai 2010, RS/OB 510.6.

Loi du 18 décembre 2015 sur les violences domestiques.

Gewaltschutzgesetz (GSG) du 19 juin 2006, RS/ZH LS 351

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pondantes dans les lois sur la police, sur l'aide sociale, etc.50. Il est fréquent que des institutions et des procédures (par ex. des tables rondes) aient été mises en place afin de coordonner les interventions des différentes autorités dans les domaines de la sécurité, de la poursuite pénale, de l'aide sociale et de l'aide aux victimes, de la migration et de la traite des êtres humains. Au sujet des services qui assurent la coordination au niveau fédéral et cantonal, voir les explications relatives à l'art. 10.

Le domaine Violence domestique du BFEG collabore en permanence avec les conférences cantonales dans le domaine de la prévention et de la lutte contre la violence domestique51. Le BFEG soutient également le travail et les réunions annuelles nationales de coordination de la Conférence suisse contre la violence domestique (CSVD). Il collabore aussi en continu avec les associations faîtières et spécialisées 52.

Le BFEG organise en outre tous les ans une conférence nationale vouée à l'information, aux échanges et à la discussion entre la Confédération, les cantons, les organisations spécialisées et différentes catégories professionnelles, sur des sujets d'actualité dans le domaine de la prévention et de la lutte contre la violence entre les sexes.

Le Conseil fédéral a lancé le 14 septembre 2012 un programme national de lutte contre les mariages forcés53 piloté par le Secrétariat d'Etat aux migrations (SEM), en collaboration avec le BFEG, pour la période 2013 à 2017. Le programme prévoit, outre l'information et la sensibilisation, la mise en place de réseaux fonctionnels contre les mariages forcés dans toutes les régions de Suisse, afin de permettre une coopération et des échanges réguliers entre le personnel enseignant, d'autres milieux professionnels et les services de consultation en matière de violence domestique et d'intégration.

La Confédération s'engage depuis 2003 contre les mutilations génitales, dans le cadre du Programme national migration et santé54, via des mesures de sensibilisation et de prévention. L'Office fédéral de la santé publique (OFSP) et le SEM financent depuis 2006 un service de médiation Prévention contre l'excision des filles géré par Caritas Suisse. La Confédération soutient également des mesures dans les domaines de l'information, de la mise en réseau et du
transfert de savoir. Un groupe de travail national contre les mutilations génitales féminines (GT MGF) a également été créé début 2012, à l'initiative de l'OFSP et du SEM, dans le but de regrouper et d'harmoniser les mesures prises par les différentes organisations (au niveau de la Confédération et des organisations non gouvernementales) et de générer des connaissances sur la thématique. Avec l'arrivée d'immigrants en provenance de pays où les MGF sont 50 51

52

53 54

Un aperçu des bases légales cantonales est fourni à l'adresse: www.ebg.admin.ch > Thèmes > Violences domestiques > Législation Notamment la Conférence des directrices et directeurs des départements cantonaux de justice et police (CCDJP), la Conférence des directrices et directeurs cantonaux des affaires sociales (CDAS) et la Conférence suisse des offices de liaison de la loi fédérale sur l'aide aux victimes d'infractions (CSOL - LAVI) qui lui est rattachée, la Conférence en matière de protection des mineurs et des adultes (COPMA) et la Conférence suisse des déléguées à l'égalité entre femmes et hommes (CSDE).

Comme l'organisation faîtière suisse des maisons d'accueil pour femmes (DAO) et l'Association professionnelle suisse de consultations contre la violence (APSCV), au sein de laquelle les services de consultation pour les personnes violentes sont organisés.

www.mariages-forces.ch www.ofsp.admin.ch > Thèmes > Stratégies & politique > Politique nationale de la santé

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couramment pratiquées, la Suisse est de plus en plus confrontée au problème. Le rapport sur les mesures qui ont été prises au cours des dernières années, en exécution de la motion Bernasconi55, prépare actuellement l'orientation des prochaines mesures et les compétences concernant leur mise en oeuvre.

La Suisse satisfait aux exigences de l'art. 7.

2.2.2

Art. 8 Ressources financières

En vertu de l'art. 8, les Parties allouent des ressources financières et humaines appropriées pour la mise en oeuvre des mesures visant à prévenir et combattre toutes les formes de violence couvertes par le champ d'application de la convention. Les ressources doivent bénéficier aux autorités, mais aussi aux organisations non gouvernementales et à la société civile. Le rapport explicatif de la convention précise que la portée de cette obligation est limitée à l'allocation de ressources appropriées, c'est-à-dire adaptées à l'objectif fixé ou à la mesure mise en oeuvre 56.

Il est compréhensible que la convention ne contienne pas d'indications chiffrées sur les ressources considérées comme appropriées. La disposition s'entend davantage comme une recommandation faite aux Etats d'engager des efforts dans le domaine évoqué. Le caractère programmatique de l'art. 8 est particulièrement valable pour un pays aux structures fédérales comme la Suisse, où beaucoup des mesures évoquées relèvent de la compétence des cantons, qui ont en conséquence pour rôle de fournir les ressources nécessaires.

En Suisse, la poursuite pénale, l'aide aux victimes, la protection des victimes, le travail avec les auteurs de violences domestiques et la mise en place de lieux d'hébergement pour les victimes de violences relèvent de la compétence des cantons. C'est donc à eux qu'incombe en priorité l'allocation des moyens appropriés à l'exécution de ces tâches, un soutien de la Confédération pouvant être envisagé ponctuellement. Cela concerne notamment la mise en place de refuges pour les victimes au sens de la convention (voir le commentaire de l'art. 23) et de permanences téléphoniques à l'échelle nationale (voir le commentaire de l'art. 24). Dans le domaine de l'aide aux victimes, la Confédération participe déjà financièrement à la formation de spécialistes. Elle peut en outre accorder des aides financières à des organisations privées sans but lucratif pour des mesures destinées à protéger les enfants et les adolescents de toutes formes de violences physiques ou psychiques, d'abus sexuels et de harcèlement sexuel (voir les explications données au sujet de l'art. 13).

Au niveau fédéral, plusieurs départements et offices assument des tâches dans le domaine de la prévention et de la lutte contre les formes de violence évoquées à
l'art. 3, notamment le Département fédéral de l'intérieur (DFI)57, le Département fédéral de justice et police (DFJP)58 et le Département fédéral des affaires étrangères 55 56 57 58

180

05.3235 «Mutilations sexuelles féminines. Mesures de sensibilisation et de prévention» Rapport explicatif de la convention, ch. 66 et 67 OFSP, Office fédéral de la statistique (OFS), OFAS, BFEG OFJ, SEM, Office fédéral de la police (fedpol)

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(DFAE)59. Ces services coordonnent leurs activités dans le cadre du groupe de travail interdépartemental sur la violence domestique, placé sous la houlette du domaine Violence domestique du BFEG (voir le commentaire de l'art. 10).

On pourrait voir si d'autres mesures de prévention, de protection et de lutte contre les formes de violence visées par la convention (art. 7 et 13 à 15) doivent être prises et si pareilles mesures prises par des tiers doivent bénéficier d'aides financières.

L'art. 386 CP permet à la Confédération de prendre des mesures d'information et d'éducation ou d'autres mesures visant à éviter les infractions et à prévenir la délinquance. Une ordonnance d'exécution pourrait prévoir, outre les mesures de prévention de la violence envers les femmes et de la violence domestique, les tâches de l'organe de coordination (art. 10 de la convention). Les aides financières que la Confédération verse pour soutenir les ONG ou leurs activités régulières ne seraient fixées que dans le cadre de l'élaboration des nouvelles dispositions.

La Suisse satisfait à l'exigence élémentaire consistant à prévoir des moyens pour la prévention et la lutte contre la violence faite aux femmes et la violence domestique.

Il en va de même en ce qui concerne la prise en compte des organisations non gouvernementales et de la société civile.

2.2.3

Art. 9 Organisations non gouvernementales et société civile

Les Parties reconnaissent, encouragent et soutiennent, à tous les niveaux, le travail des organisations non gouvernementales pertinentes et de la société civile qui sont actives dans la lutte contre la violence à l'égard des femmes et établissent une coopération effective avec ces organisations.

Les politiques et organes étatiques évoqués aux art. 7 et 10 favorisent la collaboration et le réseautage entre la Confédération, les cantons et les organisations non gouvernementales. Les ONG sont associées à l'élaboration de rapports et d'études ou à la préparation de réunions et à la mise en oeuvre de projets, aux niveaux national et cantonal, via des organes tels que tables rondes ou groupes de suivi.

Le programme fédéral de lutte contre les mariages forcés 60, en particulier, vise à rendre possible une coopération entre tous les partenaires et institutions concernés.

Dans le domaine de la violence domestique, les services cantonaux d'intervention et de coordination mettent en réseau les organismes privés et publics associés à la lutte contre la violence domestique dans différents cantons. Leur ancrage légal et institutionnel, leurs priorités d'action et leurs ressources humaines ou financières sont toutefois très variables.

La Suisse satisfait à cette disposition.

59 60

Division Sécurité humaine (DSH) www.mariages-forces.ch

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2.2.4

Art. 10 Organe de coordination

Les Parties désignent ou établissent au niveau gouvernemental un ou plusieurs organes responsables de la coordination, la mise en oeuvre, le suivi et l'évaluation des politiques et des mesures visant à prévenir et combattre toutes les formes de violence couvertes par le champ d'application de la convention; le ou les organes doivent coordonner la collecte des données mentionnées à l'art. 11, en analyser et en diffuser les résultats (par. 1). Le ou les organes peuvent être établis au niveau national ou régional. Les Parties décident de leur taille et de leur financement et fixent leurs obligations en matière de rapports et à qui elles incombent. Elles peuvent créer de nouvelles structures ou charger des entités existantes d'accomplir ces missions61.

Ces structures doivent réunir des informations d'ordre général sur les mesures prévues au chap. VIII (par. 2) et communiquer directement et entretenir des contacts avec leurs homologues dans les autres Parties (par. 3).

Coordination au niveau fédéral Le domaine Violence Domestique du BFEG a été institué en 2003 par le Conseil fédéral, qui lui a notamment confié le mandat de favoriser la collaboration et le réseautage au sein de l'administration fédérale ainsi qu'entre la Confédération, les cantons et les ONG. Le BFEG dirige le groupe de travail interdépartemental sur la violence domestique, qui assure une mise en oeuvre et un suivi coordonnés des mesures arrêtées par le Conseil fédéral dans son rapport du 13 mai 200962 et d'autres dossiers pendants. Comme il est expliqué au sujet de l'art. 7, ce groupe est notamment composé de représentants de l'OFSP, qui coordonne les mesures dans le domaine des mutilations génitales féminines63, du SEM, qui conduit le Programme fédéral de lutte contre les mariages forcés durant la période 2013-201764, en étroite collaboration avec le BFEG, de l'OFJ, qui conduit différents projets sur la protection des victimes, et de l'Office fédéral des assurances sociales (OFAS), qui assume des tâches de coordination et d'information dans le domaine de la protection des enfants et des adolescents65 et qui a coordonné et mis en oeuvre les programmes nationaux de protection de la jeunesse 2011­201566.

Coordination au niveau international Pour ce qui est de la coopération et de la coordination au niveau international, l'action du BFEG s'étend à toutes les formes de violences à l'égard des femmes. Le BFEG représente la Suisse depuis plusieurs années au sein de la Commission pour 61 62

63

64 65 66

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Rapport explicatif de la convention, ch. 70 à 73 Rapport du 13 mai 2009 sur la violence dans les relations de couple. Ses causes et les mesures prises en Suisse (en réponse au postulat Stump 05.3694 «Identifier les causes de la violence et engager la lutte contre ce phénomène»), FF 2009 3611 www.ofsp.admin.ch > Thèmes > Stratégies & politique > Stratégies nationales en matière de santé > Programme national Migration et santé > Egalité des chances dans le système de santé > Mesures contre les mutilations génitales féminines www.sem.admin.ch > Entrée & Séjour > Intégration > Thèmes > Mariages forcés > Programme fédéral de lutte contre les mariages forcés. www.mariages-forces.ch www.ofas.admin.ch > Politique sociale > Politique de l'enfance et de la jeunesse > Protection de l'enfance www.ofas.admin.ch > Politique sociale > Politique de l'enfance et de la jeunesse > Protection des jeunes

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l'égalité entre femmes et hommes (GEC) du Conseil de l'Europe (ancien Comité directeur pour l'égalité entre femmes et hommes CDEG). A ce titre, il a participé à l'élaboration de la Recommandation CM/Rec(2002)5 sur la protection des femmes contre la violence et livré les réponses de la Suisse lors des quatre cycles de suivi de cette recommandation. Sous la conduite de l'OFJ, le BFEG a en outre participé avec le DFAE à la délégation suisse qui a élaboré la convention d'Istanbul. Au niveau des Nations Unies, le BFEG pilote la rédaction des rapports gouvernementaux relatifs à la mise en oeuvre de la CEDEF et de la plateforme d'action de Pékin, qui portent notamment sur la violence à l'égard des femmes et des filles. L'OFAS participe aux travaux nécessités par la mise en oeuvre de la Stratégie du Conseil de l'Europe sur les droits de l'enfant 2016­2021: un des cinq domaines prioritaires concerne la violence et les abus visant les enfants. L'OFAS est également chargé de rendre compte des travaux exécutés par la Suisse pour mettre en oeuvre la Convention des Nations Unies du 20 novembre 1989 relative aux droits de l'enfant 67. L'OFJ est représenté dans le Comité de la Convention du Conseil de l'Europe sur la protection des enfants contre l'exploitation sexuelle et les abus sexuels (Convention de Lanzarote), qui surveille la mise en oeuvre de la convention dans les Parties.

Coordination au niveau cantonal On trouve au niveau cantonal plusieurs organes de coordination: la Conférence suisse des offices de liaison de la loi fédérale sur l'aide aux victimes d'infractions (CSOL-LAVI), rattachée à la Conférence des directrices et directeurs cantonaux des affaires sociales (CDAS), coordonne les tâches exécutées en vertu de la LAVI. La Conférence des directrices et directeurs des départements cantonaux de justice et police (CCDJP) dirige la Prévention suisse de la criminalité (PSC), qui fournit un travail intercantonal de prévention. La CSVD réunit et coordonne les services cantonaux d'intervention et de coordination dans le domaine de la prévention et de la lutte contre la violence domestique. L'organisation faîtière suisse des maisons d'accueil pour femmes (DAO) regroupe toutes les maisons d'accueil. L'Association professionnelle suisse de consultations contre la violence (APSCV) rassemble les services de
consultation pour les individus violents. Les bureaux de l'égalité des cantons et des villes sont regroupés au sein de la Conférence suisse des déléguées à l'égalité entre femmes et hommes (CSDE).

Si la convention exige une coordination matérielle, elle ne la définit pas qualitativement et laisse une grande latitude aux Parties en la matière. Le BFEG assume déjà une importante fonction de coordination. On peut toutefois supposer que la mise en oeuvre et le suivi de la convention entraîneront pour lui des tâches et un fardeau supplémentaires qui nécessiteront davantage de ressources en personnel (voir ch. 3).

La Suisse satisfait dans l'ensemble aux exigences de la convention.

67

RS 0.107, en vigueur en Suisse depuis le 26 mars 1997

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2.2.5

Art. 11 Collecte des données et recherche

Les Parties s'engagent, en vertu de l'art. 11, à collecter des données statistiques à intervalle régulier sur toutes les formes de violence couvertes par le champ d'application de la convention (par. 1a) et à soutenir la recherche (par. 1b). Elles s'efforcent en outre d'effectuer des enquêtes basées sur la population, à intervalle régulier, afin d'évaluer l'étendue et les tendances de toutes les formes de violence couvertes par le champ d'application de la convention (par. 2). Les informations collectées doivent être fournies au groupe d'experts mentionné à l'art. 66 afin de stimuler la coopération internationale et de permettre une comparaison internationale (par. 3). Les Parties veillent en outre à ce que les informations collectées soient mises à la disposition du public (par. 4).

Données statistiques La Suisse dispose de données statistiques détaillées sur la violence en général et la violence domestique en particulier. Ces données concernent les actes de violence qui constituent une infraction de par la loi et qui sont enregistrées par la police (criminalité apparente). Le caractère «spécifique au sexe» n'est en revanche pas relevé par la statistique et ne peut qu'être présumé dans les cas de violence physique, psychique ou sexuelle au sein du foyer. Aucune affirmation ne peut être faite sur la violence économique dont les femmes seraient victimes.

La principale source de données sur la violence (domestique) est la statistique policière de la criminalité (SPC). Pour chiffrer la violence domestique, les fonctionnaires de police relèvent, pour une liste exhaustive d'infractions contre l'intégrité physique, psychique et sexuelle, la relation existant entre l'auteur de l'infraction et la victime. Lorsqu'il s'agit du partenaire actuel, d'un ancien partenaire ou d'un autre membre de la famille de la victime, les infractions enregistrées par la police et les personnes impliquées sont classées dans la rubrique domestique. Ce classement est effectué indépendamment du sexe et de l'âge des personnes concernées. L'Office fédéral de la statistique (OFS) fournit chaque année les données de la SPC, qui existe depuis 2009, à un large public. Les données publiées contiennent des informations sur le sexe et l'âge des prévenus et de leurs victimes. Les données sont détaillées dans le rapport annuel et sur les
pages Internet de l'OFS68 pour les domaines de la violence en général, de la violence domestique et des infractions contre l'intégrité sexuelle. Les comparaisons annuelles et cantonales établies à l'aide des données de la SPC permettent de tirer des conclusions sur l'étendue et les tendances de la violence (domestique) dans le domaine apparent.

La statistique de l'aide aux victimes recense séparément les consultations occasionnées par les cas de violence domestique. Les données sont publiées par l'OFS.

Toutes les données concernant le thème de la violence sont disponibles sous forme anonyme à des fins de recherche.

68

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www.ofs.admin.ch

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Les statistiques cantonales recensent en particulier les mesures policières protectrices prises envers la violence domestique69.

A côté des données sur la criminalité apparente, les données sur la criminalité non enregistrée par la police (criminalité réelle) font elles aussi l'objet d'enquêtes. Le premier sondage représentatif réalisé en Suisse au sujet de la violence domestique date de 199470. En 2004, la Suisse a pris part à l'International Violence against Women Survey71 sous la conduite de l'Université de Lausanne. L'étude Optimus72 livre des données représentatives sur la victimisation sexuelle des enfants et des adolescents. Par ailleurs, des sondages ont été réalisés auprès de patients, dans le cadre de projets menés dans différents hôpitaux de Suisse, sur leurs expériences en matière de violence, comme celui de la maternité Inselhof Triemli, à Zurich (2003)73.

Recherche Dans le domaine de la recherche, il existe une multitude de rapports et d'études consacrés au thème de la violence faite aux femmes (et à d'autres) et de la violence domestique. Leur réalisation et leur publication contribue à l'information de la population au sens de l'art. 11, par. 4, et à sa sensibilisation au sens de l'art. 13, par. 2.

Citons à titre d'exemple: ­

69

70 71

72 73

74 75

76

De façon permanente, le domaine Violence domestique du BFEG finance et met à disposition des études, des rapports et des évaluations, qui servent de base à l'élaboration de mesures et d'instruments efficaces de prévention et d'intervention74. Il a également publié une série d'expertises sur les différents aspects de la violence domestique75. Plusieurs feuilles d'information éclairent brièvement divers volets de la violence domestique et citent les dernières publications de la recherche76.

Voir la feuille d'information: La violence domestique en chiffres au niveau national.

www.ebg.admin.ch > Documentation > Publications sur la violence > Feuilles d'information violence domestique Gillioz Lucienne et al. 1997, Domination et violence envers la femme dans le couple, Lausanne Killias Martin, Simonin Mathieu et al. 2004: Violence experienced by woman in Switzerland over their lifespan. Results of the International Violence against Women Survey.

Lausanne Averdijk, Müller-Johnson & Eisner 2012 Voir la feuille d'information: La violence domestique en chiffres au niveau national.

Violence, www.ebg.admin.ch > Documentation > Publications > Feuilles d'information violence domestique www.ebg.admin.ch > Documentation > Publications sur la violence Expertise concernant les conditions juridiques préalables nécessaires à une gestion des menaces dans le contexte de la violence domestique en Suisse; évaluation du degré de gravité de la violence domestique; expertise juridique concernant l'astreinte à des séances de consultation contraintes et à des programmes d'apprentissage dans le cadre de sanctions pénales; expertise juridique concernant les arrangements des contacts parents/enfants en cas de séparation à la suite de violences domestiques www.ebg.admin.ch > Documentation > Publications >Publications sur la violence

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­

Le domaine Violence domestique du BFEG a publié en 2011 un rapport sur les besoins en matière de recherche sur la violence dans les relations de couple77. Ce rapport mentionne cinq champs de recherche dans lesquels les études scientifiques font défaut78.

­

Pour ce qui est du coût de la violence dans les couples, le BFEG a commandé en 2013 une étude qui chiffre les coûts qu'elle induit dans une fourchette allant de 164 à 287 millions de francs par an79.

­

L'OFS a publié en 2012 une première évaluation approfondie des données de la SPC sur la violence domestique pour les années 2009 à 2012. La publication met ces données en rapport avec les groupes de la population afin de montrer les pourcentages par sexe et par âge80.

­

L'OFAS a rédigé en 2012 un rapport sur la protection des enfants et des jeunes contre la violence au sein de la famille, qui traite aussi de leur exposition à la violence conjugale81.

­

L'OFAS a publié en 2014 un rapport donnant une vue d'ensemble des dernières connaissances disponibles à l'échelle internationale sur la manière de prévenir efficacement la violence. Ce rapport fournit notamment des informations sur les programmes de lutte contre la violence au sein des jeunes couples82.

­

L'OFSP a publié en 2013 une étude sur la double problématique de la violence dans le couple et l'alcool83 et d'autres travaux qui traitent du lien entre alcool/drogue et violence.

­

Le Fonds national suisse (FNS) a encouragé les projets suivants dans le domaine de la violence faite aux femmes et de la violence domestique84: ­ PNR 40 «Violence au quotidien ­ crime organisé» ­ PNR 52 «L'enfance, la jeunesse et les relations entre générations dans une société en mutation» ­ PNR 60 «Egalité entre hommes et femmes»85

77 78

79 80 81 82 83

84 85

186

www.ebg.admin.ch > Documentation > Publications sur la violence Survenance, modèle, dynamique et conséquences de la violence dans les relations de couple; conditions régissant la naissance et le développement de relations dominées par la violence et de relations non violentes; mesures de prévention et d'intervention prises par l'Etat et la société civile; la violence dans le couple dans le système familial: couples et enfants victimes directes ou indirectes; manière dont les spécialistes et le grand public perçoivent la violence au sein du couple.

www.ebg.admin.ch > Documentation > Publications sur la violence www.ofs.admin.ch > Trouver des statistiques > Criminalité et droit pénal www.ofas.admin.ch > Politique sociale > Politique de l'enfance et de la jeunesse > Protection de l'enfance www.jeunesetviolence.ch Gloor Daniela, Meier Hanna (2013): Violence dans le couple et alcool ­ Fréquence de l'association des deux problèmes, schémas et settings des centres d'aide, étude mandatée par l'OFSP, Social Insight, Schinznach-Dorf www.snf.ch > Point recherche > Dossiers Gloor Daniela, Meier Hanna: Betroffenensicht zu Recht und Interventionen bei Partnergewalt ­ auf dem Weg zur Gleichstellung der Geschlechter. Schinznach-Dorf, 2014

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­

Dans le cadre du sondage de victimisation en Suisse 2011, il a été décidé, en accord avec la Conférence des commandants des polices cantonales (CCPCS) et sous les auspices de l'OFJ, de réaliser une étude complémentaire sur la question de la violence domestique dans l'objectif de mesurer l'ampleur de la violence domestique, les comportements de dénonciation, les interventions de la police et les contacts avec les organismes d'aide aux victimes. Les résultats de cette étude figurent dans le rapport du Conseil fédéral établi en exécution du postulat Fehr86, publié en 201387.

­

Sur mandat du Conseil fédéral, le SEM a fait réaliser une étude approfondie sur les causes, les formes et la fréquence des mariages forcés en Suisse88, qui sert de base au Programme fédéral de lutte contre les mariages forcés (2013­2017).

­

En matière de harcèlement sexuel au travail, le BFEG et le Secrétariat d'Etat à l'économie (SECO) ont fait réaliser en 2006 et 2007 une enquête téléphonique auprès de 2020 personnes actives sur la fréquence du harcèlement sexuel sur le lieu de travail en Suisse alémanique et en Suisse romande89. Une étude similaire menée dans le cadre du Programme national de recherche PNR 60 «Egalité entre hommes et femmes» a permis d'établir l'étendue du phénomène au Tessin90.

­

Au cours des 10 dernières années, des chercheurs des universités et hautes écoles spécialisées de Suisse et des experts ont rédigé des études et des articles divers sur le thème de la violence faite aux femmes et de la violence domestique, se focalisant notamment sur les aspects suivants: causes, évaluation de mesures, suspension de la procédure en vertu de l'art. 55a CP, besoins en matière de consultation, estimation des risques, degré de gravité, moyens utilisés, harcèlement, enfants co-victimes de la violence domestique, violence envers les enfants, violence dans les relations entre adolescents, migrations et dénonciations.

La Suisse satisfait donc aux exigences de l'art. 11 de la convention.

2.3

Chapitre III Prévention

2.3.1

Art. 12 Obligations générales

L'art. 12 pose les principes généraux régissant les obligations concrètes décrites dans les autres articles du chap. III.

86 87 88 89 90

09.3878 «Dénonciation et effet dissuasif vont de pair» www.ofj.admin.ch > Société > Aide aux victimes d'infractions> Publications Neubauer Anna, Dahinden Janine, «Mariages forcés» en Suisse: causes. Formes et ampleur, Berne 2012 Strub Silvia, Schär Moser Marianne, «Risque et ampleur du harcèlement sexuel sur le lieu de travail», Berne, 2008 Krings Franziska, Schaer Moser Marianne, Moudon Audrey, «Harcèlement sexuel sur le lieu de travail: Qui harcèle qui, comment et pourquoi? Une meilleure compréhension pour une meilleure prévention», octobre 2013

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Le par. 1 demande aux Parties de prendre les mesures nécessaires en vue d'éradiquer toute pratique fondée sur l'idée de l'infériorité des femmes ou sur un rôle stéréotypé des femmes et des hommes. Les Etats sont libres de déterminer la nature de ces mesures91. Pour des exemples en Suisse, voir les explications données au sujet de l'art. 14 dans le domaine de l'éducation et de l'art. 17 dans celui des médias.

Le par. 2 oblige les Parties à prendre les mesures nécessaires pour prévenir toutes les formes de violence couvertes par la convention (voir les commentaires des art. 13 ss).

Le par. 3 demande aux Etats de veiller à ce que les mesures de prévention répondent spécifiquement aux besoins des personnes vulnérables. A ce sujet, voir en particulier les explications des art. 13 et 15.

Le par. 4 souligne la nécessité d'encourager les hommes et les garçons à contribuer activement à prévenir la violence. De façon générale, les bureaux de l'égalité cherchent à impliquer les hommes dans leur travail de promotion de l'égalité entre femmes et hommes, comme en témoigne le «Dialogue des sexes» qui réunit périodiquement le BFEG, l'association faîtière masculinités.ch92 et Alliance F ­ Alliance de sociétés féminines suisses93. En outre, les présidents des organisations faîtières masculines participent chaque année à une rencontre de travail avec les présidentes des organisations faîtières féminines, sous l'égide du BFEG. L'initiative du BFEG «Make it work. Projets destinés aux hommes pour plus d'égalité dans la vie professionnelle» montre comment des projets ciblant les hommes peuvent être réalisés grâce aux aides financières prévues par la LEg94. Plus spécifiquement, des hommes spécialisés dans la prévention de la violence travaillent avec les auteurs de violences dans le cadre des programmes et services95 mentionnés à l'art. 16. Dans le cadre de la Campagne Suisse Ruban Blanc, des hommes et des femmes s'engagent pour l'élimination de la violence à l'égard des femmes 96.

En ce qui concerne le par. 5, qui engage les Parties à veiller à ce que la culture, la coutume, la religion, la tradition ou le prétendu «honneur» ne soient pas considérés comme justifiant des actes de violence couverts par la convention, voir le commentaire de l'art. 42.

Conformément à ce qui est demandé au par. 6, à savoir qu'il s'agit
de promouvoir les programme et activités visant à renforcer les droits des femmes, les bureaux de l'égalité mettent l'accent sur les mesures propres à garantir aux femmes une autonomie, en particulier sur le plan économique (par ex: lutte contre les inégalités salariales, encouragement à concilier travail et famille).

La Suisse remplit les exigences de l'art. 12 de la convention.

91 92 93 94 95 96

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Rapport explicatif de la convention, ch. 85 www.maenner.ch www.alliancef.ch www.ebg.admin.ch > Prestations > Gérer un projet Voir par ex.: www.mannebuero.ch www.white-ribbon.ch

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2.3.2

Art. 13 Sensibilisation

Les Parties sont tenues par l'art. 13 de promouvoir ou conduire, régulièrement et à tous les niveaux, des campagnes ou des programmes de sensibilisation pour accroître la prise de conscience et la compréhension par le grand public des différentes manifestations de toutes les formes de violence couvertes par le champ d'application de la convention et leurs conséquences sur les enfants, et de la nécessité de les prévenir (par. 1). Elles assurent en outre une large diffusion parmi le grand public d'informations sur les mesures disponibles pour prévenir les actes de violence (par. 2).

En matière de violence domestique, le BFEG et les services cantonaux d'intervention sensibilisent le grand public via l'organisation de manifestations et la diffusion de nombreux documents (feuilles d'information97, brochures, dépliants, etc.), la plupart disponibles sur la banque de données «Toolbox. Violence domestique»98.

Trois grandes campagnes ont été organisées jusqu'ici sur la violence domestique à l'échelle nationale: «Halte à la violence contre les femmes dans le couple», par la CSDE, en 1997, qui a informé sur la problématique à l'aide de matériel d'information (affiches, spots TV, dépliants plurilingues, cartes postales, deux CD, page Internet, spots de cinéma, émissions de radio) et de manifestations régionales et locales. La campagne «Stop à la violence domestique» a été réalisée entre 2003 et 2005 par la Prévention suisse de la criminalité. La tournée de la section suisse d'Amnesty International contre la violence domestique date quant à elle de 2006.

Depuis lors, divers cantons ont mené des campagnes de sensibilisation destinées au grand public et à certains groupes vulnérables, comme les femmes migrantes. Les cantons romands, par exemple, ont organisé fin 2009 une campagne d'affichage dans les espaces publics. Le canton de Genève, en particulier, a mené en 2011 et 2012 une campagne de sensibilisation et d'information (affiches, pancartes sur les tramways, rassemblements publics) sur l'ensemble de son territoire. «Willkommen zu Hause» (bienvenue à la maison) est une exposition itinérante interactive sur la violence au sein de la famille et du couple qui a été montrée pour la première fois dans le canton de Lucerne en 2013, puis dans plusieurs autres cantons alémaniques, avec beaucoup de succès99.
Par ailleurs, le Christliche Friedensdienst (cfd) coordonne chaque année, à l'occasion de la Journée internationale pour l'élimination de la violence à l'égard des femmes (25 novembre), la campagne «16 jours contre la violence faite aux femmes», à laquelle différentes ONG prennent part au niveau régional.

En ce qui concerne le harcèlement sexuel au travail, le BFEG et le SECO mettent à disposition une brochure avec des conseils pour les personnes qui en sont victimes, une brochure d'information pour les employeurs ainsi que d'autres outils de prévention, comme des listes de contrôle100. Dans le cadre des aides financières prévues 97

Voir en particulier les feuilles d'information du BFEG: www.ebg.admin.ch > Documentation > Publications > Feuilles d'information sur la violence domestique 98 www.ebg.admin.ch > Nos prestations >Toolbox Violence domestique 99 www.gewaltpraevention.lu.ch > Willkommen zu Hause ­ Eine Ausstellung zu Gewalt in Familie und Partnerschaft > Weitere Informationen 100 www.harcelement-sexuel.ch

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par la LEg, le BFEG a en outre financé deux sites Internet101 à l'intention des travailleurs, qui contribuent à sensibiliser le grand public au thème du harcèlement sexuel.

La Confédération s'engage depuis 2008 dans les domaines de la sensibilisation des personnes susceptibles d'être concernées par un mariage forcé et dans la formation complémentaire des spécialistes confrontés à cette problématique. Un programme national de lutte contre les mariages forcés a été lancé en 2012, qui doit compléter la loi fédérale du 15 juin 2012 concernant les mesures de lutte contre les mariages forcés102. Il est conduit par le SEM, en étroite collaboration avec le BFEG. Le programme prévoit la mise en place dans les cinq ans (2013 à 2018) de réseaux fonctionnels contre les mariages forcés dans toutes les régions de Suisse. Ceux-ci doivent permettre une coopération et des échanges réguliers entre les enseignants, d'autres professionnels et les services de consultation en matière de violence domestique et d'intégration. Le programme vise le développement de mesures de prévention et d'offres concrètes (accompagnement/prise en charge, protection, formation) des victimes (potentielles) et de leur environnement ainsi que des spécialistes.

Dans le cadre d'un projet modèle de lutte contre les mariages forcés, le canton de Genève a organisé un atelier pour les jeunes abordant entre autres la question des stéréotypes de genre. Dans le canton de Bâle-Campagne, l'entretien obligatoire que l'Office cantonal de la migration mène avec tous les étrangers arrivant pour s'établir intègre désormais des informations sur la prévention de la violence domestique et du mariage forcé. Le service d'intervention du canton de Bâle-Ville renseigne et sensibilise les étrangères en organisant des réunions d'information sur le mariage et le partenariat.

La Confédération (OFSP) a également abordé le thème des mutilations génitales féminines dès 2003, d'abord dans le cadre du Programme national migration et santé 2002­2007. Elle s'engage depuis, par un travail de prévention et de sensibilisation, contre les mutilations génitales féminines. Le SEM participe aux mesures depuis 2010. En collaboration avec différentes organisations, la Confédération encourage le développement de matériels d'information à destination de différents groupes cibles,
et elle soutient financièrement un service de médiation Prévention contre l'excision des filles.

La compétence en matière de protection de l'enfance relève avant tout des cantons, dont les services traitent pratiquement tous les aspects du développement de l'enfant. Au plan fédéral, l'OFAS est responsable de la politique de l'enfance et de la jeunesse, des droits de l'enfant et de la protection et de l'encouragement de l'enfance et de la jeunesse. A ce titre, il fournit des informations dans le domaine de la protection de la jeunesse et prend des mesures en vue d'améliorer la collaboration entre les différents acteurs. Il entretient également des contacts et des échanges avec les différents offices fédéraux actifs dans le domaine de la protection de l'enfance et avec les cantons. Il peut accorder des aides financières aux cantons pour leurs programmes de mise en place et de développement de politiques de la jeunesse, et

101 102

190

www.non-c-non.ch/je-subis-du-harcelement-sexuel; www.ladragueautravail.ch RO 2013 1035

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notamment de protection de la jeunesse103. Il subventionne en outre des organisations qui s'engagent à l'échelle nationale pour la prévention de la maltraitance infantile, des abus sexuels et de la négligence d'enfants.

La Confédération peut, en vertu de l'ordonnance du 11 juin 2010 sur des mesures de protection des enfants et des jeunes et sur le renforcement des droits de l'enfant104, exécuter à l'échelle nationale des programmes ou des projets modèles destinés à protéger les enfants et les jeunes. Elle peut aussi accorder des aides financières aux organisations privées sans but lucratif qui opèrent soit dans une région linguistique, soit dans toute la Suisse. Elle subventionne ainsi «Conseils + aide 147», qui conseille les enfants et les adolescents dans leurs problèmes familiaux ou lorsqu'ils sont victimes de violences. Sur la base de l'ordonnance précitée, la Confédération poursuit elle-même deux programmes nationaux de prévention de la violence: avec le programme national «Jeunes et médias» (2011­2015)105, elle a sensibilisé notamment aux questions de la violence sexuelle et psychique exercée contre les enfants au moyen des nouvelles technologies de l'information et de la communication. Et avec le programme national «Jeunes et violence» (2011 - 2015)106, elle a soutenu les efforts de prévention des cantons, des villes et des communes dans le domaine de la violence chez les jeunes. Au terme de ce programme, le Conseil fédéral a décidé de poursuivre les activités menées dans le domaine de la protection des jeunes dans le domaine des médias (voir ch. 2.3.6).

Les cantons mènent des campagnes de sensibilisation, en particulier sur l'éducation sans violence. Le service spécialisé pour la protection de l'enfance du canton de Soleure a par exemple lancé en 2012 la campagne Erziehung ohne Körperstrafen. La première phase de la campagne a consisté à informer les spécialistes des domaines concernés de l'étendue et des conséquences du phénomène et de la situation juridique en Suisse et à leur présenter les moyens de punir sans recourir aux châtiments corporels. La deuxième phase a été celle de la mise en place d'une offre de conseil spécialisé par téléphone pour les parents qui frappent leurs enfants ou risquent de passer à l'acte. La troisième phase de la campagne ­ depuis 2014 ­ vise à informer un
large public, et en particulier les parents, et à insister sur l'illicéité du recours à la force dans l'éducation, tout en rappelant l'existence de la ligne téléphonique.

Les cantons réalisent aussi ponctuellement des programmes de prévention de la violence au sein des couples d'adolescents à l'école 107. Il s'agit de lever le tabou qui entoure la violence des jeunes en couple et d'encourager les comportements positifs dans leurs relations.

Les organisations non gouvernementales réalisent elles aussi des projets de prévention. Depuis 2013, la Fondation suisse pour la protection de l'enfant mène une campagne nationale de sensibilisation contre les châtiments corporels et en faveur de l'éducation non violente. Elle se focalise depuis 2015 sur la situation des enfants témoins de violences domestiques et a lancé divers projets de sensibilisation et 103 104 105 106 107

www.bsv.admin.ch > Politique sociale RS 311.039.1 www.jeunesetmedias.ch www.jeunesetviolence.ch Comme le canton de ZH: «Herzsprung ­ Freundschaft, Liebe, Sexualität ohne Gewalt», www.stadt-zuerich.ch

191

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d'information en la matière108. Depuis 2011, le National Coalition Building Institute Suisse mène un projet scolaire et extrascolaire intitulé «Pas d'claques! Aucun enfant ne les mérite: élevons notre voix pour une éducation non-violente!»109, qui incite à la réflexion sur le sujet et fait comprendre aux enfants et aux adolescents que les châtiments corporels sont tout sauf acceptables.

Le SEM soutient, en collaboration avec les cantons et d'autres partenaires, les différents programmes et mesures destinés à renforcer et autonomiser les migrants, qui contribuent à la prévention de la violence faite aux femmes et aux filles. La politique de la Confédération en faveur de l'intégration définit les femmes comme un groupe cible de ladite intégration, indiquant qu'il s'agit de prendre en compte leurs besoins particuliers. Elle englobe donc des aspects liés au sexe dans l'encouragement des migrants. Les programmes cantonaux d'intégration réalisent (depuis 2014) des mesures spécifiques au genre dans les domaines des conseils et de la primo-information, du travail et de l'éducation, de la compréhension linguistique et de l'intégration sociale (par ex. des cours de langue pour les femmes avec enfants, le soutien des migrantes bien qualifiées, etc.). Ces mesures relèvent de la compétence des cantons.

La Confédération les soutient aux plans financier et stratégique.

La Conférence tripartite sur les agglomérations (CTA) a lancé en novembre 2013 le dialogue sur l'intégration «Dès la naissance ­ entrer dans la vie en pleine santé», dont le but est que la Confédération, les cantons et les communes agissent de concert, dans le cadre de leurs politiques de la santé et de l'intégration, pour offrir aux nouveau-nés les meilleures chances possibles de bien démarrer dans la vie. Les associations professionnelles de tous les spécialistes qui assistent les jeunes familles durant la période de la grossesse, pendant et après l'accouchement, au cours des premières années de vie de l'enfant, soutiennent ces efforts. La CTA a adopté le 27 juin 2014 des recommandations concrètes à l'attention des acteurs étatiques. Elle a aussi pris acte des recommandations adressées aux acteurs non étatiques. Pour leur part, ceux-ci envisagent de participer à la concrétisation des recommandations dans la mesure de leurs possibilités.
Il faut signaler enfin que la réalisation et la diffusion des projets de recherche au sens de l'art. 11 servent également à sensibiliser et déploient par conséquent des effets préventifs (voir les commentaires figurant au ch. 2.2.5).

Avec ce large éventail d'activités à divers niveaux, la Suisse satisfait aux exigences de l'art. 13 de la convention.

2.3.3

Art. 14 Education

Le matériel pédagogique consacré aux thèmes de la résolution non violente de conflits, de la violence à l'égard des femmes fondées sur le genre et du respect mutuel, mentionné au par. 1, doit faire partie du programme d'étude officiel (primaire, secondaire ou tertiaire). Son utilisation par le personnel enseignant est obligatoire ou encouragée. La convention laisse «aux Parties le soin de décider le type 108 109

192

www.kinderschutz.ch/fr > Thèmes www.ncbi.ch/fr > Projets > Pas d'claques

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d'enseignement et le groupe d'âge d'apprenants pour lesquels elles considèrent ce matériel pédagogique comme adapté»110.

En Suisse, l'éducation est une tâche incombant à l'Etat, de l'entrée à l'école obligatoire jusqu'au niveau tertiaire (hautes écoles et formation professionnelle supérieure). L'instruction publique est du ressort des cantons (art. 62 Cst.). Dans le domaine post-obligatoire (écoles de culture générale, formation professionnelle, hautes écoles), les cantons et la Confédération ont leurs domaines de compétence et assument ensemble la responsabilité qui leur incombe à ce niveau.

La conférence alémanique de la Conférence suisse des directeurs cantonaux de l'instruction publique (CDIP) a adopté le Lehrplan 21 à l'automne 2014 en vue de son introduction par les cantons. Ce premier plan d'études commun en matière de scolarité obligatoire permet aux 21 cantons alémaniques ou bilingues de respecter le mandat donné par l'art. 62 Cst., qui prévoit que l'instruction publique doit être harmonisée111. La question de la place donnée au thème de l'égalité entre femmes et hommes dans l'enseignement scolaire est actuellement débattue dans le cadre de l'introduction de ce plan d'études dans les différents cantons.

Les départements de l'instruction publique des cantons francophones mènent depuis 2006, conjointement avec les bureaux romands de l'égalité entre femmes et hommes, le projet «L'école de l'égalité», qui propose aux enseignants une documentation de fond et des outils didactiques112. En 2010, le canton de Genève a publié une série d'outils didactiques et de documents baptisée «Balayons les clichés», destinée aux enseignants dans différentes classes d'âge et diffusée par les bureaux romands de l'égalité113. D'autres cantons, comme le canton d'Argovie, contribuent aussi, par des analyses et des publications, à sensibiliser les directions d'école et le corps enseignant114.

L'enseignement de la culture générale dans la formation professionnelle de base comporte deux domaines: «Langue et communication» et «Société». Ce dernier englobe entre autres l'aspect de l'éthique. Tous les apprentis bénéficient de cet enseignement. Les thèmes qui nous occupent y ont aussi leur place.

Ces thèmes peuvent également être abordés dans le cadre des cours d'éducation sexuelle. Les écoles disposent de services
de consultation pour les cas de mauvais traitements ou, plus généralement, d'un service sanitaire ou psychologique auquel les enfants peuvent s'adresser en premier recours. Plusieurs cantons ont pris des mesures de prévention (brochures, séances d'information, circulaires, formation des enseignants, directeurs et éducateurs, théâtre, cinéma, expositions itinérantes, etc.).

Un des projets de prévention qui remporte le plus de succès est la campagne interactive «Mon corps est à moi!». Ce projet de la Fondation suisse pour la protection de l'enfant s'adresse aux classes primaires de la 2e à la 4e. L'exposition offre aux enfants un cadre pour aborder, sur un mode participatif et ludique, le thème de la violence et des abus sexuels. Elle vise à renforcer les capacités et les droits des 110 111 112 113 114

Rapport explicatif de la convention, ch. 95 www.lehrplan.ch www.egalite.ch > nos projets > l'école de l'égali www.egalite.ch > nos projets > Balayons les clichés www.ebg.admin.ch > Nos prestations > Toolbox Violence domestique

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enfants et à leur montrer les options qui s'offrent à eux. Le projet englobe un module de formation pour les enseignants et une séance d'information pour les parents. Les enseignants reçoivent également des documents utiles pour aborder le sujet en cours115.

De plus en plus d'écoles engagent des assistants sociaux. Cette réalité permet d'améliorer les compétences et les capacités d'intervention et de prévention dans le domaine social et en cas de problèmes de développement individuels et de prévenir la violence dans la vie scolaire et extrascolaire. A côté des offres destinées aux enfants d'âge scolaire, les cantons prévoient aussi diverses offres pour les enfants qui n'ont pas encore commencé leur scolarité et pour les parents (information, éducation, conseil, thérapie).

Le par. 2 étend l'obligation de promouvoir les principes énumérés au par. 1 aux structures éducatives informelles, sportives, culturelles et de loisirs ainsi qu'aux médias.

L'encouragement des principes de l'égalité entre les femmes et les hommes, des rôles non stéréotypés, du respect mutuel et de la résolution non violente des conflits est mise en oeuvre de moult manières. Dans le domaine du sport par exemple, on peut mentionner, au titre de bonne pratique, le programme «Genre et sport» mené par la ville de Genève en 2014116. Il faut évoquer aussi la Charte d'éthique défendue par Swiss Olympic, l'Office fédéral du sport (OFSPO) et les clubs sportifs suisses117.

Elle dicte la conduite des différents acteurs du domaine sportif. La mise en oeuvre de la charte est assurée lors de la planification des fédérations et lors des manifestations sportives nationales et internationales, au quotidien dans les actes et les comportements, et plus spécifiquement dans les programmes et les différentes activités de Swiss Olympic et de l'OFSPO. Par ailleurs, la loi du 17 juin 2011 sur l'encouragement du sport (LESp)118 vise notamment, pour accroître les capacités physiques de la population, promouvoir la santé, encourager le développement global de l'individu et renforcer la cohésion sociale, à encourager les comportements qui inscrivent les valeurs positives du sport dans la société et qui luttent contre ses dérives119. La Confédération atteint ces buts en soutenant et réalisant des programmes et des projets et en prenant des mesures, notamment
dans les domaines de la formation, du sport de compétition, de l'éthique et de la sécurité dans le sport ainsi que de la recherche120. En ce qui concerne les médias, il faut signaler les bonnes pratiques suivantes: la plateforme «Médias et Genre» du Syndicat suisse des mass media (SSM)121, la participation régulière de la Suisse au Global Media Monitoring Project122, les analyses et recommandations envers les médias de la Commission fédérale pour les questions féminines (CFQF) à l'occasion des élections fédé115 116 117 118 119 120 121 122

194

www.kinderschutz.ch www.ville-geneve.ch > Dossiers d'information > Genre et sport www.swissolympic.ch > Ethique > Charte d'éthique RS 415.0 Voir l'art. 1, al. 1, let. d, LESp.

Voir l'art. 1, al. 2, LESp.

www.ssm-site.ch > Médiathèque> Dossier > Médias et genre La Suisse participe régulièrement au projet mondial de monitorage des médias. Pour l'édition 2010, elle a réalisé une analyse spécifique approfondie, à titre de supplément:www.egalite.ch

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rales123, ainsi que le Prix «Femmes et Médias» de la Conférence des bureaux romands de l'égalité entre femmes et hommes124.

Etant donné la large marge de manoeuvre laissée aux Parties dans la mise en oeuvre de l'art. 14125, la Suisse satisfait aux exigences posées par cette disposition.

2.3.4

Art. 15 Formation des professionnels

Les personnes qui sont en contact avec des auteurs de violence ou des victimes du fait de leur profession doivent, selon le par. 1 de la convention, bénéficier d'une formation adéquate sur les thèmes de la convention. Parmi les catégories professionnelles concernées, on trouve des agents des autorités judiciaires, des praticiens du droit, des agents des services répressifs et des professionnels en matière de soins de santé, de travail social et d'éducation126. Le par. 2 incite les Parties à encourager l'inclusion dans la formation mentionnée au par. 1 d'une formation sur la coopération coordonnée interinstitutionnelle.

Confédération Les compétences de la Confédération sont limitées dans le domaine de la formation et de la formation complémentaire. L'art. 31 LAVI permet à la Confédération d'accorder des aides financières pour encourager la formation spécifique du personnel des centres de consultation et des personnes chargées de l'aide aux victimes. Elle fait régulièrement usage de cette possibilité depuis des années en soutenant nombre de filières, cours et séminaires abordant la thématique de l'aide aux victimes et par conséquent la violence domestique. Ces manifestations sont organisées par divers prestataires privés et cantonaux, notamment des hautes écoles spécialisées. Les directives sur le versement d'aides financières ont été remaniées en 2014. Elles permettent maintenant de soutenir un large cercle de personnes (notamment celles qui ont souvent affaire dans leur travail à des victimes au sens de la LAVI et qui sont en contact avec les centres de consultation ou les instances d'indemnisation, comme les membres des autorités de protection de l'enfant et de l'adulte, les médecins de famille, les gynécologues, les spécialistes des antennes destinées aux victimes ayant des besoins particuliers, les enseignants). La formation de base des collaborateurs des centres de consultation et de la police englobe, partout en Suisse, le thème de la violence domestique.

Afin de sensibiliser les autorités judiciaires à la problématique de la violence domestique, l'Université de Saint-Gall a conçu, à l'instigation de l'OFJ et du BFEG, un séminaire de formation continue destiné aux juges et aux membres du ministère public, puis a organisé en 2012 et 2013 un séminaire d'introduction suivi d'un séminaire d'approfondissement. Le BFEG et le SEM ont organisé en 2013 des 123

Voir par ex. le document «Faits et chiffres sur la présence des candidates dans les médias» ainsi que des analyses plus récentes sur cette page: www.efk.admin.ch 124 Ce prix récompense les journalistes qui, dans un souci d'éthique professionnelle, font avancer l'égalité entre femmes et hommes: www.egalite.ch 125 Rapport explicatif de la convention, ch. 95 126 Rapport explicatif de la convention, ch. 100

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ateliers régionaux à l'intention des autorités cantonales des migrations et des services spécialisés (maisons d'accueil pour femmes, centres d'aide aux victimes, bureaux de l'intégration), afin d'optimiser la collaboration entre ces services lors de l'examen des cas de rigueur (au sens de l'art. 50, al. 1, let. b, de la loi fédérale du 16 décembre 2005 sur les étrangers, LEtr127) invoqués par les victimes de violence conjugale. Le programme national de lutte contre les mariages forcés pour la période 2013 à 2017 a lui aussi pour but, entre autres, de développer la formation pour les professionnels.

Dans l'avant-projet de loi fédérale sur l'amélioration de la protection des victimes128, le Conseil fédéral propose d'inscrire dans la loi le perfectionnement du personnel chargé de garantir la protection contre la violence, les menaces et le harcèlement, en ajoutant une deuxième phrase à l'al. 4 de l'art. 28b CC.

En exécution d'un postulat129, le Conseil fédéral est chargé de rédiger un rapport sur les possibilités de mettre en place un dépistage des violences intrafamiliales à l'égard des enfants et de faire des recommandations portant sur la mise en oeuvre. Il examinera aussi si la formation de base et la formation continue des professionnels de la santé leur fournit les connaissances et les possibilités d'action qui leur sont nécessaires.

Bonnes pratiques émanant des cantons et des villes Aux niveaux des cantons et des communes, il existe bon nombre de programmes de formation et de formation permanente destinés aux professionnels sur les thèmes de la violence faite aux femmes et aux enfants et de la violence domestique. Le tour d'horizon fait ci-dessous a caractère d'exemple.

La ville de Zurich a adopté un plan pour l'égalité entre femmes et hommes mettant stratégiquement l'accent sur la sensibilisation et la formation de divers acteurs à la détection et à la prévention de la violence domestique. Ces actions visent les écoles, les hôpitaux, les garderies, les services d'aide et de soins à domicile et les services de promotion de la santé. Le plan d'action de la ville de Berne fait également une très large place à la sensibilisation à la violence domestique et à la lutte contre elle.

L'Unité de médecine des violences du Centre universitaire romand de médecine légale de Lausanne organise régulièrement
des formations, qui couvrent la détection de la violence ainsi que les conseils et l'assistance aux victimes et qui s'adressent au personnel médical et à la police.

Le service de formation sur la violence domestique du canton de Lucerne offre des modules d'éducation et de formation consacrés à la violence domestique. Il assure auprès des professionnels et du grand public un travail d'information et de sensibilisation sur les formes, les effets et les conséquences de la violence concrète,

127 128

RS 142.20 www.bj.admin.ch > Sécurité > Projets législatifs en cours > Protection des victimes de violence domestique > Procédure de consultation. Les résultats de la procédure de consultation sont en cours d'évaluation.

129 Postulat Feri 12.3206 «Violences intrafamiliales à l'égard des enfants. Créer les conditions permettant un dépistage par les professionnels de la santé»

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s'exprime sur des questions et des points d'actualité et organise des réunions, des projets et des campagnes sur le thème général de la violence domestique.

Le service d'intervention contre la violence domestique du canton de Berne a organisé diverses réunions de sensibilisation visant des groupes professionnels variés (médecins scolaires, médecins de premier recours, conseils, autorités tutélaires, etc.).

Le service d'intervention contre la violence domestique du canton de Zurich propose sur son site Internet un manuel destiné aux spécialistes qui contient des informations complètes et à jour sur divers aspects de la protection contre la violence domestique130. Les autres services cantonaux d'intervention contre la violence domestique organisent aussi régulièrement des manifestations à l'intention de différentes catégories professionnelles.

En matière de harcèlement sexuel au travail, la Conférence romande et tessinoise des offices cantonaux de protection des travailleurs (CRTI) a organisé en 2009, avec le soutien du BFEG, des journées de formation continue à l'intention des inspections du travail dans cinq cantons romands. En outre, dans le cadre d'une campagne de la Conférence romande des bureaux de l'égalité entre femmes et hommes sur la LEg, des journées de formations continue ont été organisées entre 2012 et 2014 afin de sensibiliser les professionnels du droit (membres des autorités de conciliation, juges prud'hommes, avocats) notamment à la notion de harcèlement sexuel au travail et au devoir de protection des employeurs.

Les hautes écoles pédagogiques organisent différents cours, dans le cadre de la formation et de la formation complémentaire des enseignants, abordant la thématique de la protection des enfants et des jeunes face à la violence. La Fondation suisse pour la protection de l'enfant a publié en 2011 et 2013 plusieurs guides à l'intention des spécialistes131. L'Institut international des droits de l'enfant (IDE)132, en Valais, met au point, en collaboration avec le Centre interfacultaire en droits de l'enfant de l'Université de Genève (CIDE), une série de formations académiques aboutissant à différents masters, diplômes et certificats dans le domaine des droits et de la protection de l'enfant133. Il existe aussi des ONG qui offrent des formations sur la prévention des abus
sexuels et des mauvais traitements 134.

Au niveau de la formation professionnelle supérieure, des universités et des hautes écoles spécialisées, on trouve aussi plusieurs filières et études postgrade qui abordent le sujet.

Divers projets et activités sont par ailleurs financés dans le cadre du programme fédéral «Egalité des chances entre femmes et hommes dans les universités», que la 130 131

132 133

134

www.kapo.zh.ch > Prävention >IST-Interventionsstelle gegen Häusliche Gewalt > Informationen für Fachpersonen > Manual für Fachleute Pour sensibiliser les médecins de toutes spécialités, elle a publié en 2011 le guide «Maltraitance infantile ­ protection de l'enfant». Deux autres guides ont suivi en 2013: l'un sur la protection de l'enfant dans le quotidien des travailleurs sociaux, l'autre sur la détection précoce de la violence faite aux enfants en bas âge.

www.iukb.ch www.childsrights.org > IDE; www.unige.ch > L'Université se présente > Centres, instituts et programmes plurifacultaires > centre interfacultaire en droits de l'enfant > Le Centre.

Par ex. Castagna ou Limita (www.castagna-zh.ch; www.limita-zh.ch).

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Confédération soutient depuis 2000. Il s'agit notamment d'élaborer et de diffuser des règles de comportement et des règlements destinés à prévenir le harcèlement sexuel, le mobbing et les menaces et d'autres discriminations135. Le sujet est régulièrement abordé lors de conférences ou de journées d'action. Les Ecoles polytechniques fédérales de Zurich et de Lausanne fournissent des informations et des points de contact en cas de harcèlement sexuel dans le cadre des mesures destinées à améliorer l'égalité des chances dans les deux écoles136.

Les exigences posées par l'art. 15 de la convention sont donc remplies.

2.3.5

Art. 16 Programmes préventifs d'intervention et de traitement

Les Etats ont l'obligation d'établir ou de soutenir des programmes destinés aux auteurs de violence domestique (par. 1) ou d'infraction contre l'intégrité sexuelle (par. 2), en étroite coordination avec les services spécialisés dans le soutien aux victimes (par. 3). Les personnes qui travaillent avec les auteurs doivent posséder une formation spécifique et les compétences culturelles et linguistiques nécessaires. La participation auxdits programmes se fait en vertu de la décision d'un tribunal ou sur une base volontaire137.

La prévention et la lutte contre les actes de violence et l'exécution de la LAVI relèvent en grande partie de la compétence des cantons. Le financement des programmes généraux de prévention et des programmes d'intervention et de traitement préventifs est par conséquent leur affaire. Ce sont eux qui mettent en place les offres nécessaires, et la situation varie d'un canton à l'autre. Presque tous les cantons disposent de services cantonaux d'intervention et de coordination de la lutte contre la violence domestique ainsi que de services de consultation et de programmes à l'intention des hommes et des femmes violents. Les services cantonaux d'intervention et de coordination forment un réseau qui veille à la régularité des échanges entre spécialistes. Selon l'Association professionnelle suisse de consultations contre la violence (APSCV), 31 institutions offrent actuellement pareilles prestations en Suisse allemande et en Suisse romande138. En 2012, le BFEG a publié un avis de droit qui examine les bases légales sur lesquelles les tribunaux peuvent se fonder pour ordonner la participation à des consultations et à des programmes de lutte contre la violence (en particulier l'art. 63 CP, traitement ambulatoire, et l'art. 94 CP, règles de conduite)139. Le BFEG a également soutenu la création de l'APSCV, le 135

Exemple de code de comportement de l'Université de Zurich: www.uzh.ch > Universität > Leitbild und Grundsätze > Verhaltenskodex Gender Policy 136 Des pages Internet informent sur les différents types de discrimination et fournissent les adresses de points de contact: www.equal.ethz.ch/beratung, egalite.epfl.ch/harcelement, http://helpme.epfl.ch/ 137 Rapport explicatif de la convention, ch. 104 138 Voir sous www.apscv.ch > Services de consultation.

139 A ce sujet, voir l'expertise réalisée sur mandat du BFEG: Peter Mösch Payot, «Astreinte à des séances de consultation contraintes et à des programmes d'apprentissage pour auteurs de violence dans le cadre de sanctions pénales, notamment à titre de règles de conduite», 2011 (sous BFEG, publications sur la violence).

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développement de normes de qualité, une statistique uniforme et l'organisation de rencontres nationales de coordination des services de consultation pour les auteurs de violences.

La Suisse satisfait dans l'ensemble aux exigences posées par l'art. 16 de la convention.

2.3.6

Art. 17 Participation du secteur privé et des médias

Le par. 1 demande que le secteur privé et les médias mettent en place des lignes directrices et des normes d'autorégulation. Le Conseil suisse de la presse a adopté une déclaration des devoirs et des droits du ou de la journaliste qui impose à ses membres de respecter la dignité humaine. En cas de violation, il est possible d'alerter le Conseil suisse de la presse, qui prend position sur des questions ayant trait à l'éthique professionnelle des journalistes140. La Commission suisse pour la loyauté a défini la publicité sexiste comme une pratique déloyale à laquelle une entreprise peut être contrainte de renoncer141. Le BFEG et le SECO encouragent les entreprises à mettre sur pied des dispositifs de prévention du harcèlement sexuel en mettant à disposition des modèles de règlements instaurant des procédures142.

Conformément au par. 2, les Parties développent et promeuvent, en coopération avec les acteurs du secteur privé, les capacités des enfants, parents et éducateurs à faire face à l'environnement des technologies de l'information et de la communication. Le programme «Jeunes et médias»143, mis en oeuvre par l'OFAS entre 2011 et 2015 en collaboration avec la branche des médias et des organisations privées, cherchait avant tout à aider les enfants et les adolescents à utiliser les médias de façon sûre, responsable et adaptée à leur âge. Il entendait aussi conforter les parents, les enseignants et les adultes de référence dans leur rôle d'accompagnateurs et d'éducateurs, en leur proposant des informations et une formation ciblées. Au terme de ce programme, le Conseil fédéral a décidé de renforcer encore la protection des jeunes face aux médias. Des spécialistes seront dorénavant appelés à la rescousse dans les activités de jeunesse, les foyers, les structures d'accueil ou encore les écoles professionnelles144.

140 141

Règlement du Conseil suisse de la presse, art. 1, al. 2: www.presserat.ch Selon la Commission, est en particulier sexiste «toute publicité dans laquelle: des hommes ou des femmes sont affublés de stéréotypes sexuels mettant en cause l'égalité entre les sexes; est représentée une forme de soumission ou d'asservissement ou est suggéré que des actions de violence ou de domination sont tolérables; (...); il n'existe pas de lien naturel entre la personne représentant l'un des sexes et le produit vanté; la personne sert d'aguiche, dans une représentation purement décorative; (...)» (Règles ­ Loyauté dans la communication commerciale, version d'avril 2008, www.faire-werbung.ch > Documentation > Règles de la CSL, règle 3.11, al. 2).

142 www.ebg.admin.ch >Thèmes > Travail > Le harcèlement sexuel sur le lieu de travail > La prévention dans les entreprises.

143 www.jeunesetmedias.ch 144 www.ofas.admin.ch > Politique sociale > Politique de l'enfance et de la jeunesse > Protection de la jeunesse > Mise en oeuvre des programmes de protection de la jeunesse face aux médias.

199

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La campagne de Pro Juventute145 en 2014, «La vraie vie», montre que la vie prétendument parfaite des autres ne correspond pas à la réalité et renforce les jeunes dans leur capacité à résister à la pression d'images idéales impossibles. Un spot conçu pour les jeunes, des affiches scolaires, des opérations dans les écoles, une bande dessinée, des feuilles d'information pour les enfants et les jeunes, les parents et les enseignants, et des informations sur Internet sensibilisent le public à la thématique et confortent les jeunes dans l'image qu'ils ont d'eux-mêmes.

2.4

Chapitre IV Protection et soutien

2.4.1

Art. 18 Obligations générales

L'art. 18 énonce les obligations générales qu'ont les Parties de protéger et soutenir les victimes. La coopération institutionnelle au sens du par. 2 est traitée par les art. 7 et 10, le soutien des victimes au sens du par. 3 par les art. 19 à 28 et la fourniture de services au sens du par. 4 par l'art. 22. L'obligation que le par. 5 fait aux Parties de garantir une protection consulaire à leurs ressortissants et aux autres victimes est remplie par l'art. 8, al. 2, LAVI.

2.4.2

Art. 19 Information

L'art. 19 de la convention oblige les Parties à assurer que les victimes reçoivent une information adéquate et en temps opportun sur les services de soutien et les mesures légales disponibles, dans une langue qu'elles comprennent.

L'art. 305 CPP contient des instructions détaillées à l'attention des autorités de poursuite pénale en ce qui concerne l'information des victimes sur l'aide à laquelle elles ont droit. La poursuite pénale relevant pour l'essentiel des cantons, ce sont les autorités cantonales de poursuite pénale, et notamment la police et le ministère public, qui informent les victimes dans le cas concret. Si la victime y consent, les autorités de poursuite pénale communiquent son nom et son adresse à un centre de consultation. Les centres de consultation LAVI des cantons informent les victimes à leur demande et plus généralement par des prospectus et des pages Internet, etc.

La Suisse remplit donc les exigences posées à l'art. 19 de la convention.

2.4.3

Art. 20 Services de soutien généraux

Le par. 1 oblige les Parties à prendre les mesures nécessaires pour que les victimes aient accès à des services facilitant leur rétablissement. Leur soutien peut prendre plusieurs formes: conseils juridiques et psychologiques, aide financière, hébergement, formation, scolarité ou assistance en matière de recherche d'emploi. Selon le par. 2, les victimes doivent avoir accès à des services de santé et des services sociaux appropriés, dotés de ressources adéquates et de professionnels formés.

145

200

www.projuventute.ch > Actualité > Campagnes > La campagne «La vraie vie»

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En Suisse, ces exigences sont satisfaites par les assurances privées et les assurances sociales. En complément, la LAVI prévoit un large éventail de prestations en faveur des personnes ayant subi, du fait d'une infraction, une atteinte directe à leur intégrité physique, psychique ou sexuelle. L'aide aux victimes comprend, en vertu de l'art. 2 LAVI, des conseils et une aide immédiate, une aide à plus long terme (fournie en partie par les centres de consultation cantonaux eux-mêmes, en partie sous la forme de contribution aux frais pour l'aide fournie par des tiers), une indemnisation et une réparation morale. Les conseils et l'aide immédiate sont gratuits pour les victimes.

La contribution aux frais de l'aide à long terme et l'indemnisation sont fonction des revenus (art. 16 et 20, al. 2, LAVI). La loi fixe également des plafonds pour l'indemnisation et la réparation morale (art. 20, al. 3, et 23, al. 2, LAVI).

La Suisse remplit donc les exigences posées à l'art. 20 de la convention.

2.4.4

Art. 21 Soutien en matière de plaintes individuelles/collectives

Les Parties doivent veiller à ce que les victimes soient informées sur les mécanismes régionaux et internationaux de plainte applicables dans le pays où elles se trouvent et qu'elles y aient accès. Elles doivent promouvoir la mise à disposition, par l'Etat, les associations d'avocats, les ONG pertinentes, ou les autres acteurs potentiels, d'un soutien sensible et avisé aux victimes dans la présentation de leurs plaintes146.

Comme il a été exposé au sujet des art. 13 et 15 de la convention, la Confédération et les cantons informent le public et les milieux professionnels sur le droit applicable en cas de violence domestique et les autorités auxquelles s'adresser le cas échéant.

L'application pour smartphones Women's Human Rights, développée par le DFAE en collaboration avec le Centre de compétence pour les droits humains (CSDH), facilite l'accès aux textes de droit international relatifs aux droits des femmes147. Un guide mis en ligne par la CFQF encourage l'application de la CEDEF par les avocats, les juges ainsi que les conseils juridiques148.

Les centres de consultation conseillent également les victimes en vertu de l'art. 12 LAVI et les aident à faire valoir leurs droits. Ils disposent d'une liste d'avocats spécialisés et connaissent les ONG travaillant dans le domaine.

La Suisse satisfait aux exigences posées par l'art. 21 de la convention.

2.4.5

Art. 22 Services de soutien spécialisés

Le par. 1 requiert des Parties qu'elles prennent les mesures nécessaires pour fournir aux victimes ou aménager, selon une répartition géographique adéquate, des services de soutien spécialisés immédiats, à court et à long terme.

146 147 148

Rapport explicatif de la convention, ch. 130 itunes.apple.com/WebObjects/MZStore.woa/wa/viewSoftware?id=695483339&mt=8 www.efk.admin.ch

201

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La LAVI charge les cantons de veiller à ce qu'il y ait des centres de consultation, autonomes dans leur secteur d'activité, pour venir en aide aux victimes au sens du droit suisse. Ces centres doivent tenir compte des besoins particuliers des différentes catégories de victimes, telles que les femmes exposées à la violence domestique (art. 9 ss LAVI).

Ils fournissent les prestations suivantes: conseils personnels, aide immédiate pour répondre aux besoins les plus urgents (par ex. logement de secours, soins médicaux, premiers conseils juridiques), aide à plus long terme et contributions aux frais pour l'aide à plus long terme fournie par des tiers (recours à des spécialistes tels que psychiatres par ex.) jusqu'à ce que les autres répercussions de l'infraction soient éliminées ou compensées et que l'état de santé de la personne concernée soit stabilisé.

En règle générale, tous les cantons disposent d'au moins un centre de consultation.

Les cantons de SG, AR et AI gèrent un centre commun, tout comme les cantons de Bâle-Ville, de Bâle-Campagne, de Schwyz et d'Uri. Plusieurs cantons disposent en outre d'institutions spécialisées pour certaines catégories de victimes (par ex. les femmes ou les victimes de violences sexuelles). Il existe au total une soixantaine d'institutions en Suisse. Les victimes sont libres de s'adresser au centre de leur choix (art. 15, al. 3, LAVI).

Le par. 2 demande aux Parties de fournir ou aménager des services de soutien spécialisés pour toutes les femmes victimes de violence et leurs enfants. La CDAS propose une liste à jour des centres de consultation cantonaux sur son site Internet, qui précise quels services s'adressent aux femmes victimes de violences et à leurs enfants149. Il s'agit en premier lieu des services de consultation ambulatoire des maisons d'accueil pour les femmes et des services de consultation qui s'occupent de violence sexuelle ou domestique. Il existe aussi des centres de consultation LAVI dont les prestations sont ciblées sur les enfants et les jeunes victimes de violences.

Les centres de consultation LAVI, tels qu'ils existent, répondent aux exigences de l'art. 22 de la convention.

2.4.6

Art. 23 Refuges

Les Parties sont tenues par l'art. 23 de prendre les mesures nécessaires pour permettre la mise en place de refuges appropriés, facilement accessibles et en nombre suffisant, pour les victimes au sens de la convention. Le terme «en nombre suffisant» vise à assurer que les besoins de toutes les victimes puissent être couverts. Le nombre de refuges doit dépendre des besoins réels. Il n'existe pas de consigne d'ordre quantitatif, seulement des grandeurs de référence. Ce sont les besoins spécifiques de chaque pays qui sont déterminants150.

149 150

202

www.sodk.ch Le ch. 135 du rapport explicatif renvoie au rapport final d'activité de la Task Force du Conseil de l'Europe pour combattre la violence à l'égard des femmes, y compris la violence domestique (EG-TFV (2008)6), qui recommande un accueil sûr dans des refuges spécialisés pour femmes répartis dans toutes les régions et capables de recevoir une famille pour 10 000 habitants.

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La mise en place de refuges relève de la compétence des cantons. Tous disposent de maisons d'accueil pour femmes, mais l'offre varie d'un canton à l'autre. Pour pouvoir répondre à la question de savoir s'il existe suffisamment de places d'accueil pour les victimes de violence et leurs enfants et si leur financement est assuré à long terme, la CDAS et le BFEG ont publié en mai 2015 une analyse de la situation et des besoins151 qui doit fournir aux cantons une base d'évaluation régionale.

En matière de places, le rapport constate certaines disparités entre les régions au plan des capacités des maisons d'accueil pour femmes et il fournit des indications sur leurs causes. Le problème du manque de solutions transitoires est le plus frappant: il explique la prolongation inutile des séjours en maison d'accueil. Au plan du financement, le rapport conclut que les maisons d'accueil rencontrent souvent des problèmes de ressources. Il signale également que les prestations des maisons d'accueil varient et qu'il serait nécessaire de débloquer des moyens financiers pour les prestations de leur organisation faîtière (assurance de la qualité, bases statistiques, etc.). Un sondage réalisé par la suite auprès des cantons a montré que la grande majorité de ceux qui y ont participé estiment que l'offre de places (en maison d'accueil pour femmes ou ailleurs) est adaptée et que les éventuels problèmes de capacités doivent être compensés en priorité par des mesures prises en amont ou en aval (prévention et mesures policières, solutions transitoires)152. La CDAS a par la suite élaboré, avec des experts issus des rangs des bénéficiaires (aide aux victimes, aide sociale) et de ceux des fournisseurs de prestations (maisons d'accueil pour femmes), un «catalogue de prestations maisons d'accueil pour femmes» qui, dans l'esprit d'une recommandation, définit ce qu'on entend par l'offre de prestations des maisons d'accueil. Ce catalogue offre aux cantons, aux villes et aux communes une base de collaboration et en particulier de financement des maisons d'accueil pour femmes153.

En 2015, l'évaluation de la LAVI154 que l'OFJ a commandée a révélé que l'offre de refuges et de places d'hébergement pour les femmes victimes de violence domestique ne suffit pas toujours. L'équipe d'évaluation recommande aux cantons d'examiner les mesures
qui permettraient d'éviter les problèmes de capacité.

Dans sa réponse aux interpellations Feri155, le Conseil fédéral s'est déclaré prêt à vérifier, une fois en possession de l'analyse de la situation et des besoins de maisons d'accueil (voir plus haut), s'il peut soutenir les cantons en matière de coordination.

151 152

153

154 155

www.ebg.admin.ch > Documentation>PublicationenPublications >Publications sur la violence Ces avis recoupent les résultats de la procédure de consultation, voir la synthèse des résultats de la procédure de consultation, sous www.admin.ch > Droit fédéral > Procédures de consultation > Procédures de consultation terminées > 2016 > DFJP Catalogue de prestations maisons d'accueil pour femmes et informations sur le site de la CDAS, www.sodk.ch > Domaines>Familles et société> Aides aux victimes > Maisons d'accueil pour femmes.

www.ofj.admin.ch > Société > Aides aux victimes d'infractions > Publications 13.4071 «Refuges pour femmes. Stratégie nationale» et 13.4290 «Pour une stratégie nationale de mise en place de structures d'accueil pour hommes victimes de violences domestiques»

203

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Le postulat Feri soulève la question d'une incitation financière de la Confédération en faveur de ces lieux d'hébergement156.

Les centres de consultation LAVI procurent un hébergement d'urgence aux victimes au sens de la LAVI (art. 14, al. 1, LAVI). Avec l'évolution de la situation, c'est-àdire lorsque la menace n'est plus actuelle et qu'il en va surtout de réhabilitation, un hébergement en maison d'accueil pour femmes peut suffire.

Le droit suisse satisfait aux exigences de l'art. 23 de la convention.

2.4.7

Art. 24 Permanences téléphoniques

L'art. 24 oblige les Parties à mettre en place à l'échelle nationale des permanences téléphoniques gratuites, accessibles 24 heures sur 24 et sept jours sur sept, pour fournir aux personnes qui appellent, de manière confidentielle ou dans le respect de leur anonymat, des conseils concernant toutes les formes de violence couvertes par le champ d'application de la convention.

La CCDJP envisageait de mettre en place une ligne nationale d'aide spécifique (gratuite, accessible 24h/24, pour les victimes et les auteurs de violence domestique); mais, en novembre 2013, elle a décidé de mettre un terme au projet. Sa décision était notamment motivée par la crainte que cette assistance téléphonique vienne concurrencer les services existants et qu'elle apporte peu d'avantages par rapport à ces services, compte tenu de l'importance des frais d'exploitation.

Il existe déjà en Suisse des permanences téléphoniques destinées aux victimes de violence, même si elles ne répondent pas entièrement aux exigences formulées dans la convention. La Main Tendue, par exemple, si elle couvre bien l'intégralité du territoire et s'adresse à des personnes en situation de crise (large éventail de services de conseil), ne fonctionne pas avec du personnel formé, est axée sur l'écoute plutôt que sur le conseil et ses services ne sont pas entièrement gratuits (facturation des appels pour les cas de faible gravité). Certains cantons ont confié un mandat spécial à La Main Tendue, afin d'assurer un service de permanence pour les centres LAVI en-dehors des heures de bureau. En ce qui concerne les jeunes, la fondation privée Pro Juventute propose, depuis des années, ­ par téléphone, SMS, chat et courrier électronique ­ le service «Conseils et aide 147». En moyenne, 400 jeunes font appel chaque jour à ce service qui est disponible gratuitement dans trois des quatre langues nationales, 24 heures sur 24. En proposant ce service par le biais du numéro ou du site 147, la fondation Pro Juventute joue un rôle majeur d'interface avec les enfants et les adolescents qui cherchent de l'aide et les services de conseil spécialisés.

Le 27 février 2013, le Conseil fédéral a adopté un rapport157 en exécution du postulat Fehr158. Parallèlement, il a confié au DFJP plusieurs mandats d'examen à exécuter en collaboration avec les cantons. La mise en place d'une assistance téléphonique 156

16.3695 «Incitation financière pour les centres d'accueil destinés aux victimes de violence domestique» 157 www.ofj.admin.ch > Société > Aide aux victimes d'infraction > Publications > Autres études et publications 158 09.3878 « Dénonciation et effet dissuasif vont de pair »

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dans toute la Suisse sera examinée plus en détail à l'occasion de ces travaux. L'aide aux victimes s'adresse à toutes les victimes de violence, hommes et femmes confondus, et ne se limite pas aux seuls actes de violence domestique. L'OFJ a commandé une étude pour connaître la faisabilité et les coûts d'un numéro de téléphone gratuit, valable pour tous les centres de consultation LAVI. L'étude examinera aussi les possibilités de développement de ce numéro (fonctionnement étendu pouvant aller jusqu'à une offre 24 heures sur 24). Les résultats de l'étude seront présentés débuts 2017. Ils fourniront à la Confédération et aux cantons une base pour la suite des travaux159.

Pour l'heure, les exigences posées par l'art. 24 de la convention ne sont que partiellement mises en oeuvre dans le droit suisse.

2.4.8

Art. 25 Soutien aux victimes de violence sexuelle

En vertu de l'art. 25, les Parties doivent veiller à la mise en place de centres d'aide d'urgence pour les victimes de violences sexuelles, appropriés et facilement accessibles et en nombre suffisant, afin de leur dispenser un examen médico-légal, un soutien lié au traumatisme et des conseils. Les Parties sont tenues de mettre en place ces centres et de veiller à ce qu'ils soient en nombre suffisant160.

Il n'existe pas en Suisse de centres spécialisés réunissant sous un même toit l'ensemble des prestations requises. Les services proposés résultent plutôt d'une interaction entre plusieurs institutions, en particulier les centres de consultation et les hôpitaux (voir explications relatives à l'art. 19 ss). Les autorités de poursuite pénale fournissent à la victime des informations sur l'aide aux victimes et communiquent, à certaines conditions, son nom et son adresse à un centre de consultation (art. 305, al. 2 et 3, CPP et 8, al. 2, LAVI; voir aussi art. 330, al. 3, CPP). Conformément à la LAVI, les cantons doivent mettre à disposition des victimes des centres de consultation autonomes dans leur secteur d'activité. Ces centres proposent un large éventail de services aux victimes, tels que des conseils personnalisés, une aide immédiate pour répondre aux besoins les plus urgents (par ex. hébergement d'urgence, assistance médicale161, première consultation d'un avocat), une aide à plus long terme et une contribution aux frais générés par l'aide à plus long terme fournie par un tiers (par ex. psychiatre); il existe également des centres de consultation spécialisés.

Les infrastructures existantes répondent globalement aux exigences de l'art. 25.

159

Un nombre considérable de participants à la consultation est d'avis que la réorganisation des permanences téléphoniques ou l'extension de leur offre doit être examinée en fonction des structures cantonales existantes. Voir la synthèse des résultats de la procédure de consultation, sous www.admin.ch > Droit fédéral > Procédures de consultation > Procédures de consultation terminées > 2016 > DFJP 160 Rapport explicatif de la convention, ch. 142 161 Voir aussi le postulat du groupe socialiste du 26.11.2014, 14.4026 «Prise en charge médicale des cas de violence domestique. Politiques et pratiques cantonales et opportunité d'un mandat explicite dans la LAVI».

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2.4.9

Art. 26 Protection et soutien des enfants témoins

Conformément au par. 1, les Parties doivent s'assurer que, dans l'aide aux victimes dont les enfants ont été témoins d'actes de violence, les droits et les besoins de ces derniers soient dûment pris en compte. Le par. 2 précise que les mesures prises en ce sens incluent les conseils psychosociaux adaptés à l'âge des enfants témoins et tiennent dûment compte de l'intérêt supérieur de l'enfant.

L'art. 149 CPP recense les mesures de protection que la direction de la procédure peut prendre, sur demande ou d'office, pour protéger un témoin qui, en raison de sa participation à la procédure, est exposé à un danger sérieux menaçant sa vie ou son intégrité corporelle ou à un autre inconvénient grave (art. 149, al. 1, CPP). La direction de la procédure peut notamment assurer l'anonymat du témoin, procéder à des auditions en l'absence des parties ou à huis clos, vérifier l'identité de la personne à protéger en l'absence des parties ou à huis clos, modifier l'apparence et la voix du témoin ou le masquer à la vue des autres personnes et limiter le droit des parties à consulter le dossier (art. 149, al. 2, CPP). Le témoin peut en outre se faire accompagner d'un conseil juridique ou d'une personne de confiance (art. 149, al. 3, CPP). La direction de la procédure peut également ordonner des mesures de protection au sens de l'art. 154, al. 2 et 4, CPP pour les personnes appelées à donner des renseignements ou les témoins âgés de moins de 18 ans (art. 149, al. 4, CPP). Ainsi, la première audition de l'enfant doit avoir lieu dès que possible (art. 154, al. 2, CPP). Une confrontation de l'enfant avec le prévenu est exclue sauf si l'enfant la demande expressément ou que le droit du prévenu d'être entendu ne peut être garanti autrement (art. 154, al. 4, let. a, CPP). Le témoin mineur ne doit en principe pas être soumis à plus de deux auditions sur l'ensemble de la procédure (art. 154, al. 4, let. b et c, CPP). Par ailleurs, les auditions d'enfants sont menées par un enquêteur formé à cet effet, en présence d'un spécialiste (art. 154, al. 4, let. d, CPP).

Le CPP fixe en outre une limite d'âge précise pour la qualité de témoin. Les personnes qui ont une capacité de discernement restreinte ne doivent pas être soumises à l'obligation de répondre conformément à la vérité lorsqu'elles sont entendues.

Pour cette raison,
les personnes qui n'ont pas encore quinze ans au moment de l'audition ne doivent pas être entendues comme témoins mais comme personnes appelées à donner des renseignements (art. 178, let. b, CPP).

Ont également droit à l'aide aux victimes le conjoint, les enfants et les parents de la victime ainsi que d'autres personnes qui lui sont proches d'une manière ou d'une autre162 (voir les explications données au sujet de l'art. 20 de la convention).

Lorsque le bien de l'enfant est menacé, des mesures prévues par le droit civil sont également possibles (voir les explications données au sujet de l'art. 31 de la convention).

Des conseils psychosociaux adaptés à l'âge des enfants qui sont les témoins de violences domestiques, au sens du par. 2, les aident à surmonter leur traumatisme.

En Suisse, il existe des offres spécifiques ponctuelles d'aide aux enfants consécutive à une intervention policière pour violence domestique163, dont les besoins et 162 163

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Art. 1, al. 2, LAVI Par ex. dans les cantons de Zurich, Thurgovie, Berne et Vaud.

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l'efficacité ont été confirmés164. Le Conseil-exécutif du canton de Berne, par exemple, a arrêté à l'automne 2014 la planification des mesures destinées à protéger les enfants témoins de violences domestiques165.

Les exigences posées par l'art. 26 de la convention sont donc satisfaites.

2.4.10

Art. 27 Signalement

L'art. 27 vise à encourager toute personne qui est témoin d'une infraction au sens de la convention ou qui a de sérieuses raisons de croire qu'une telle infraction pourrait être commise ou que des nouveaux actes de violence sont à craindre, à le signaler aux autorités compétentes.

Les législations fédérale et cantonales prévoient différentes formes de droit, voire d'obligation d'aviser les autorités en cas d'acte grave de violence (voir explications concernant l'art. 28). En ce qui concerne la violence à l'égard des femmes et la violence domestique, les témoins les plus importants sont en général les victimes.

Dans son rapport du 27 février 2013 en exécution du postulat Fehr 166, le Conseil fédéral énumère une série de mesures qui tiennent également compte des préoccupations de l'art. 27. Il s'agit par exemple de renforcer le rôle des centres de consultation (meilleure information du public, formation ciblée de certaines catégories de personnes), de faciliter l'accès aux informations sur l'aide aux victimes (numéro d'appel commun à tous les centres de consultation LAVI, accès simplifié aux offres d'aide sur Internet), de suivre l'application du nouveau droit de procédure pénale et d'effectuer une première évaluation des effets du nouveau droit pour les victimes. Il est important de lever les obstacles qui peuvent dissuader la victime de dénoncer les infractions subies. Cependant, les recherches menées à la suite de ce postulat ont démontré qu'une victime a parfois de bonnes raisons de ne pas vouloir dénoncer une infraction.

Les exigences posées par l'art. 27 de la convention sont satisfaites.

2.4.11

Art. 28 Signalement par les professionnels

L'art. 28 prescrit aux Parties de s'assurer que certains professionnels soumis à des règles de confidentialité ont néanmoins la possibilité, dans les conditions appropriées, d'adresser un signalement aux organisations ou autorités compétentes, si un acte grave de violence couvert par le champ d'application de la convention a été commis et que de nouveaux actes graves de violence sont à craindre. L'idée est d'autoriser les professionnels en question à signaler aux autorités compétentes des actes graves de violence au sens de la convention, sans enfreindre le secret profes164

Voir Marie Meierhofer Institut für das Kind 2012, Bericht der Evaluation der Projekte KidsCare und KidsPunkt im Kanton Zürich. Indizierte Prävention für von Häuslicher Gewalt betroffene Kinder, www.mmi.ch.

165 Conseil-exécutif du canton de Berne, ACE 1393/2014 du 26.11.2014 166 www.ofj.admin.ch > Société > Aide aux victimes d'infraction > Publications > Autres études et publications

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sionnel (droit d'aviser les autorités). Par contre, cette disposition de la convention n'a pas pour objet d'introduire une obligation d'aviser les autorités. Son intention est plus de protéger la vie et l'intégrité physique des victimes que de lancer une enquête criminelle. Les Parties peuvent préciser les situations ou les cas dans lesquels cette disposition s'applique, en prescrivant par exemple l'obligation de requérir le consentement préalable de la victime avant tout signalement, à l'exception de certains cas spécifiques, notamment lorsque la victime est mineure167.

Les personnes astreintes au secret professionnel au sens de l'art. 321 CP, ont la possibilité de s'en faire délier moyennant consentement de l'intéressé ou autorisation écrite de l'autorité supérieure ou de l'autorité de surveillance (art. 321, ch. 2, CP). Il existe d'autres dispositions prévoyant un droit ou une obligation d'aviser: ainsi, aux termes de l'art. 364 CP, les personnes astreintes au secret professionnel ou au secret de fonction (art. 320 et 321 CP) peuvent aviser l'autorité de protection de l'enfant des infractions commises à l'encontre d'un mineur. L'art. 75, al. 3, CPP prévoit en outre que l'autorité pénale, si elle constate lors de la poursuite d'infractions impliquant des mineurs, que d'autres mesures s'imposent, en avise immédiatement les autorités de protection de l'enfant. Par ailleurs, les centres de consultation LAVI peuvent dénoncer une infraction ou informer les autorités de protection de l'enfant si une victime ou une autre personne mineure est sérieusement mise en danger (art. 11, al. 3, LAVI). De nombreuses législations cantonales sur la santé s'appuient sur l'art. 321, ch. 3, CP pour accorder aux professionnels de la santé un droit d'aviser les autorités plus étendu, y compris lorsqu'il s'agit de victimes adultes.

Certaines en font même une obligation.

Le nouveau droit de la protection de l'enfant et de l'adulte168 est entré en vigueur le 1er janvier 2013. Il prévoit, à l'art. 443 CC, que toute personne a le droit d'aviser l'autorité de protection de l'adulte et de l'enfant lorsqu'une personne semble avoir besoin d'aide, sous réserve des dispositions sur le secret professionnel (al. 1). Toute personne qui, dans l'exercice de sa fonction officielle, a connaissance d'un tel cas est tenue d'en informer
l'autorité. Les cantons peuvent prévoir d'autres obligations d'aviser l'autorité (al. 2). Cette disposition s'applique aussi au droit de la protection de l'enfant, de par le renvoi à l'art. 314, al. 1, CC. La motion Aubert 169 a en outre chargé le Conseil fédéral de soumettre au Parlement une modification du code civil ou de toute autre loi pour que l'obligation de signalement auprès des autorités de protection de l'enfance soit généralisée dans l'ensemble des cantons suisses, moyennant certaines exceptions clairement délimitées. Le 15 avril 2015, le Conseil fédéral a pris acte dus résultat de la procédure de consultation et adopté le message concernant la modification du CC170. Les délibérations parlementaires sont en cours.

Les exigences posées par l'art. 28 de la convention sont satisfaites.

167 168

Rapport explicatif de la convention, ch. 147 et 148 Code civil (protection de l'adulte, droit des personnes et droit de la filiation), modification du 19 décembre 2008, FF 2006 6767 169 08.3790 «Protection de l'enfant face à la maltraitance et aux abus sexuels» 170 www.dfjp.admin.ch > Actualité > News > 2015 > Renforcement de la protection de l'enfant grâce à l'extension des droit et obligation d'avi

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2.5

Chapitre V Droit matériel

2.5.1

Art. 29 Procès civil et voies de droit

Les Parties sont tenues de fournir aux victimes des recours civils adéquats à l'encontre de l'auteur de l'infraction (par. 1). Ce paragraphe a caractère programmatique et doit être replacé dans le contexte des dispositions concrètes qui lui succèdent. Il faut pouvoir enjoindre une personne de cesser de tenir une conduite particulière ou de s'abstenir à l'avenir de tenir une conduite particulière171.

L'art. 28, al. 1, CC prévoit que celui qui subit une atteinte illicite à sa personnalité peut agir en justice pour sa protection contre toute personne qui y participe. Le droit de la personnalité protège notamment la personnalité physique, c'est-à-dire les biens juridiques que sont l'intégrité corporelle et la liberté de mouvement, et la personnalité sociale (par ex. le droit à l'honneur). L'intégrité psychique ­ qui peut par exemple souffrir de la peur provoquée par autrui ­ est elle aussi couverte par les art. 28 ss CC (protection de la personnalité affective) 172. Le demandeur peut, en vertu de l'art. 28a, al. 1, CC, requérir le juge d'interdire une atteinte illicite, si elle est imminente, de la faire cesser, si elle dure encore ou d'en constater le caractère illicite, si le trouble qu'elle a créé subsiste. Les actions en dommages-intérêts et en réparation du tort moral sont réservées selon l'art. 28a, al. 3, CC (voir les explications concernant l'art. 30 de la convention). L'art 28b CC, entré en vigueur le 1er juillet 2007, prévoit en outre des mesures spécifiques pour protéger de la violence, de menaces ou de harcèlement dans l'environnement proche (voir le commentaire de l'art. 34 de la convention).

Dans le cadre de la révision législative visant à améliorer la protection des victimes de violence domestique173, le Conseil fédéral a en outre proposé d'autres mesures destinées à faciliter l'accès à la justice civile dans les affaires en question et à supprimer les obstacles liés aux frais judiciaires. Dans la perspective de cette révision, la Confédération a fait procéder à l'évaluation des dispositions de droit civil relatives à la protection contre la violence174.

Les Parties sont également tenues de prendre les mesures nécessaires pour fournir aux victimes des réparations civiles adéquates à l'encontre des autorités étatiques ayant manqué à leur devoir de prendre les mesures de prévention ou
de protection nécessaires (par. 2). Ce paragraphe concerne la responsabilité de l'Etat. Quand les autorités de l'Etat ne remplissent pas les obligations que leur confère l'art. 5 de la

171 172

Rapport explicatif de la convention, ch. 157 Pour plus détails: Hausheer Heinz, Aebi-Müller Regina E., Das Personenrecht des Schweizerischen Zivilgesetzbuches, 3e éd., Berne 2012, n° 12.41 ss.; Meili Andreas, in: Honsell Heinrich, Vogt Nedim Peter, Geiser Thomas (éd.), Basler Kommentar, Zivilgesetzbuch I, 5e éd., Bâle 2014, art. 28, N 17 173 www.ofj.admin.ch > Sécurité > Projets législatifs en cours > Protection des victimes de violence domestique > Procédure de consultation. Les résultats de la procédure de consultation sont en cours d'évaluation.

174 www.ofj.admin.ch > Sécurité > Projets législatifs en cours > Protection des victimes de violence domestique > Rapport d'évaluation (ce document est uniquement disponible en allemand).

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convention, le droit civil doit prévoir des moyens de recours tels des actions en dommages-intérêts pour réparer cette omission175.

En Suisse, la responsabilité de l'Etat est régie par des textes législatifs de droit public, non de droit civil; mais les prétentions qui en découlent satisfont aux exigences de la convention. Au niveau de la Confédération, la loi du 14 mars 1958 sur la responsabilité (LRCF)176 fixe le principe de la responsabilité causale de l'Etat. La Confédération répond du dommage causé sans droit à un tiers par un employé de la Confédération dans l'exercice de ses fonctions (art. 3, al. 1, LRCF). La condition de l'illicéité est généralement réalisée quand il y a atteinte à des biens juridiques jouissant d'une protection absolue comme le droit à la vie et l'intégrité physique et psychique (voir le commentaire de l'art. 30 de la convention)177. Lorsqu'il est reproché au fonctionnaire d'avoir commis une omission, il faut en outre qu'il y ait eu obligation d'agir pour fonder la position de garant. L'atteinte portée par le fonctionnaire à son devoir de fonction ou par l'Etat à son devoir de protection est supposée 178. Si ces conditions sont remplies, la Confédération est responsable, qu'il y ait eu faute du fonctionnaire ou non. En cas de faute du fonctionnaire, l'autorité peut, en tenant compte des circonstances particulières, accorder à la victime une réparation morale en vertu de l'art. 6 LRCF. Les cantons prévoient un régime de responsabilité analogue à celui de la Confédération179.

Les exigences de l'art. 29 de la convention sont donc remplies.

2.5.2

Art. 30 Indemnisation

Les Parties sont également tenues de prendre des mesures pour que les victimes aient le droit de demander une indemnisation de la part des auteurs de l'infraction (par. 1). Une indemnisation adéquate devrait en outre être octroyée par l'Etat dans certains cas (par. 2), cette disposition pouvant faire d'objet d'une réserve (art. 78, par. 2, de la convention).

L'art. 41, al. 1, du code des obligations (CO)180 prévoit que celui qui cause, d'une manière illicite, un dommage à autrui est tenu de le réparer. L'atteinte est illicite, notamment, quand des biens juridiques personnels comme le droit à la vie ou l'intégrité physique, psychique ou morale sont touchés; ces biens jouissent d'une protection absolue181. Lorsque la personne lésée a subi un dommage financier des suites de l'infraction (par ex. frais médicaux, perte de gain), elle peut exiger un remboursement de son auteur s'il a commis une faute. La victime de lésions corporelles (art. 47 CO) ou d'autres atteintes graves à la personnalité dont l'auteur n'a pu 175 176 177 178

Rapport explicatif de la convention, ch. 162 RS 170.32.

Voir ATF 132 II 449, consid. 3.3.

ATF 133 V 14, consid. 8.1; Häfelin Ulrich, Müller Georg, Uhlmann Felix, Allgemeines Verwaltungsrecht, 6e éd., Zurich/St-Gall 2010, N 2249 179 Moor, Droit administratif Vol. II, 3e éd., Berne 2011, 852 ss 180 RS 220 181 Heierli Christian, Schnyder Anton K., in: Honsell Heinrich, Vogt Nedim Peter, Geiser Thomas (éd.), Basler Kommentar, Obligationenrecht I, 5e éd., Bâle 2011, art. 41, N 33; voir aussi les explications conc. l'art. 29

210

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lui donner satisfaction autrement (art. 49 CO) peut en outre exiger réparation morale. Celle-ci ne dépend pas des répercussions économiques de l'atteinte et doit compenser le tort moral subi182. Condition: il faut que la douleur physique ou psychique ait été d'une certaine importance183 ou l'atteinte aux droits de la personnalité suffisamment grave184.

En vertu de l'art. 19, al. 1, LAVI, les victimes ont droit à une indemnité pour le dommage qu'elles ont subi. A la différence de la convention, la LAVI vise toutes les victimes, pas seulement celles qui ont subi un dommage grave. L'indemnité s'élève à 120 000 francs au plus (art. 20, al. 3, LAVI). Le principe de subsidiarité s'applique aux indemnisations versées au titre de la LAVI (voir art. 4 LAVI).

La convention exige en outre que l'indemnisation soit octroyée dans un délai raisonnable (par. 3). La LAVI oblige les cantons à prévoir une procédure simple et rapide pour l'octroi d'indemnisations (art. 29 LAVI). Elle permet aussi d'octroyer une provision.

Les exigences de l'art. 30 de la convention sont ainsi remplies. Il n'y a pas à réserver l'application du par. 2.

2.5.3

Art. 31 Garde, droit de visite et sécurité

Les incidents de violence couverts par la convention doivent être pris en compte lors de la détermination des droits de garde et de visite concernant les enfants (par. 1).

En Suisse, le bien de l'enfant, principe supérieur inscrit à l'art. 3 de la convention relative aux droits de l'enfant, a acquis rang constitutionnel avec l'entrée en vigueur de la nouvelle Constitution le 1er janvier 2000, L'art. 11, al. 1, Cst. prévoit que les enfants et les jeunes «ont droit à une protection particulière de leur intégrité et à l'encouragement de leur développement». La révision de l'autorité parentale, entrée en vigueur le 1er juillet 2014, en fixe expressément le principe dans la loi: l'autorité parentale sert le bien de l'enfant, qui doit toujours être pris en compte (art. 296, al. 1, CC). L'autorité parentale conjointe est devenue la règle: les enfants sont soumis, pendant leur minorité, à l'autorité parentale conjointe de leur père et mère. Si la sauvegarde du bien de l'enfant l'exige, l'autorité parentale peut être confiée exclusivement à un des parents (art. 298, al. 1, et 298b, al. 2, CC). Etant donné que la violence domestique remet en question non seulement l'autorité parentale conjointe, mais aussi la capacité de chacun des parents d'exercer l'autorité parentale, elle figure explicitement, depuis la révision, parmi les motifs de retrait de l'autorité parentale prévus à l'art. 311, al. 1, ch. 1, CC. Pour la même raison, l'autorité parentale peut être retirée dès le départ. Peu importe que l'enfant soit lui-même victime de cette violence ou qu'il ne subisse qu'indirectement les violences que l'un des parents fait subir à l'autre185.

182

ATF 123 III 204, consid. 2.e; Heierli Christian, Schnyder Anton K. (note 154), art. 47, N 4 183 ATF 110 II 163, consid. 2.c 184 ATF 129 III 715, consid. 4.4 185 Message du 16 novembre 2011 concernant une modification du Code civil suisse (Autorité parentale), FF 2011 8315 8342 8346

211

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Le bien de l'enfant est également le principe supérieur présidant à l'aménagement du droit d'entretenir des relations personnelles (droit de visite)186. Ce droit peut donc être refusé ou retiré si lesdites relations personnelles compromettent le bien de l'enfant (art. 274, al. 2, CC). Les incidents de violence au sens de la convention peuvent être pris en compte chaque fois qu'il s'agit de décider des droits de garde ou de visite.

Les Parties doivent en outre assurer que l'exercice de tout droit de visite ou de garde ne compromette pas les droits et la sécurité de la victime ou des enfants (par. 2).

La menace des droits et de la sécurité de la victime d'incidents de violence ou d'enfants dans l'exercice des droits de visite ou de garde doit être considérée comme incompatible avec le bien de l'enfant et par conséquent prise en compte par les tribunaux et les autorités dans le cadre des dispositions précitées. En ce qui concerne l'exercice du droit de visite, l'autorité de protection de l'enfant peut en outre émettre des rappels à l'ordre ou des instructions pour que les relations personnelles ne nuisent pas à l'enfant (art. 273, al. 2, et 307, al. 3, CC). Peuvent être envisagés par exemple un curateur chargé de surveiller l'exercice du droit de visite, qui s'entretiendra séparément avec les parents, un droit de visite accompagnée187 ou l'ordonnance d'une thérapie188 ou d'une médiation189.

Les conditions de l'art. 31 de la convention sont donc remplies.

2.5.4

Art. 32 Conséquences civiles des mariages forcés

Les Parties sont tenues par l'art. 32 de veiller à ce que les mariages contractés en ayant recours à la force puissent être annulables, annulés ou dissous sans faire peser sur la victime une charge financière ou administrative excessive.

Un mariage conclu en violation de la libre volonté d'un des époux doit être annulé en vertu de l'art. 105, ch. 5, CC. Il en va de même, en principe, lorsque l'un des époux est mineur, à moins que son intérêt supérieur ne commande de maintenir le mariage (art. 105, ch. 6, CC). L'action est intentée d'office par l'autorité cantonale compétente du domicile des époux; elle peut l'être également par toute personne intéressée. Les autorités ayant connaissance de l'existence d'un mariage forcé sont en outre tenues d'en informer l'autorité compétente pour intenter l'action (art. 106, al. 1, CC). L'action peut être intentée en tout temps (art. 106, al. 3, CC). Le juge compétent déclare l'annulation du mariage. Les dispositions relatives au divorce s'appliquent par analogie aux effets du jugement d'annulation en ce qui concerne les époux et les enfants (art. 109, al. 1 et 2, CC).

Les exigences de l'art. 32 de la convention sont ainsi remplies.

186 187 188 189

212

Voir seulement ATF 130 III 585, consid. 2.1.

Voir ATF 122 III 404, consid. 3.c.

Voir arrêt du Tribunal fédéral 5A_140/2010 du 11 juin 2010, consid. 3.2.

Voir arrêt du Tribunal fédéral 5A_457/2009 du 9 décembre 2009, consid. 4.1.

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2.5.5

Art. 33 Violence psychologique

Les Parties sont tenues d'ériger en infraction pénale le fait, lorsqu'il est commis intentionnellement, de porter gravement atteinte à l'intégrité psychologique d'une personne par la contrainte ou les menaces. Elles peuvent préciser dans une déclaration qu'elles prévoiront des sanctions non pénales pour ce comportement (art. 78, par. 3, de la convention).

Dans le droit pénal suisse, celui qui, par une menace grave, aura alarmé ou effrayé une personne sera puni sur plainte (art. 180, al. 1, CP). La poursuite a lieu d'office si l'auteur de l'infraction est le conjoint de la victime, son partenaire enregistré, son partenaire hétérosexuel ou homosexuel faisant ménage commun avec elle et que la menace a été commise durant la relation ou dans l'année qui a suivi le divorce, la dissolution ou la séparation (art. 180, al. 2, CP). L'al. 2 est donc spécifiquement axé sur les domaines couverts par la convention. Est également passible d'une peine celui qui, en usant de violence envers une personne ou en la menaçant d'un dommage sérieux, ou en l'entravant de quelque autre manière dans sa liberté d'action, l'aura obligée à faire, à ne pas faire ou à laisser faire un acte (art. 181, al. 1, CP).

L'intégrité psychique et morale d'une personne est aussi protégée par le droit civil.

Toute atteinte portée à cette intégrité ­ par exemple en inspirant la peur ­ est considérée comme illicite en vertu de l'art. 28 CC190. Les victimes peuvent requérir le juge de l'interdire, de la faire cesser ou d'en constater le caractère illicite (art. 28a CC) et, le cas échéant, intenter une action en dommages-intérêts ou en réparation du tort moral (art. 28a, al. 3, CC en relation avec les art. 41, al. 1, 49 et 47 CO) 191.

L'art. 33 de la convention est entièrement couvert par le droit suisse. La réglementation suisse prévoyant aussi bien des mesures pénales que civiles, elle dépasse même les exigences de la convention. Une déclaration au sens de l'art. 78, par. 3, de la convention est superflue.

2.5.6

Art. 34 Harcèlement

L'art. 34 oblige les Parties à ériger en infraction pénale le fait, lorsqu'il est commis intentionnellement, d'adopter, à plusieurs reprises, un comportement menaçant dirigé envers une autre personne, conduisant celle-ci à craindre pour sa sécurité.

Elles peuvent préciser dans une déclaration qu'elles prévoiront des sanctions non pénales pour ce comportement (art. 78, par. 3, de la convention).

Le droit pénal suisse ne prévoit pas explicitement l'infraction de harcèlement. Le Parlement a rejeté une intervention allant dans ce sens192. Le harcèlement peut 190

Voir Hausheer Heinz, Aebi-Müller Regina E., Das Personenrecht des Schweizerischen Zivilgesetzbuches, 3e éd., Berne 2012, N 12.64 ss.

191 Voir le commentaire de l'art. 30.

192 Motion Fiala 08.3495 «Harcèlement obsessionnel», voir aussi la motion Fiala 13.3742 «Agir rapidement contre le harcèlement obsessionnel» (rejetée) et le postulat Feri 14.4204 «Agir plus efficacement contre le harcèlement obsessionnel en Suisse» (le point 1, qui charge le Conseil fédéral de présenter les mesures prises en Suisse et à l'étranger contre le harcèlement, a été accepté).

213

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toutefois déjà être réprimé pénalement, dans son ensemble ou dans les différents comportements qu'il implique. Les infractions les plus fréquentes commises à ce titre sont la menace (art. 180 CP), la contrainte (art. 181 CP), l'utilisation abusive d'une installation de communication (art. 179 septies CP), les atteintes contre l'honneur (art. 173 ss CP), la violation de domicile (art. 186 CP), les dommages à la propriété (art. 144 CP), les lésions corporelles (art. 122 s. CP), les voies de fait (art.

126 CP), la pornographie (art. 197 CP) et les désagréments causés par la confrontation à un acte d'ordre sexuel (art. 198 CP). Sont poursuivies d'office la contrainte, la pornographie et les lésions corporelles graves.

Le droit civil prévoit lui aussi des mesures de protection contre le harcèlement qui vont au-delà des exigences de la convention. L'art. 28b CC, entré en vigueur le 1er juillet 2007, permet aux victimes de violence de se protéger contre toute atteinte ou menace portée à leur intégrité physique, psychique, sexuelle ou sociale par des actes de violence, menaces ou harcèlement dans ou à proximité de leur logement en faisant ordonner des mesures de droit civil et ce, indépendamment de la relation de droit ou de fait qu'elles entretiennent avec l'auteur de l'atteinte. La disposition énumère à l'al. 1, ch. 1 à 3, les mesures que le juge peut prendre pour prévenir le risque d'atteinte illicite à la personnalité ou pour remédier à une atteinte concrète. Il peut par exemple ordonner en faveur du demandeur que l'auteur ne puisse accéder à un périmètre déterminé, fréquenter certains lieux ou prendre contact avec lui. Ces interdictions peuvent être appliquées très rapidement grâce à des mesures provisionnelles, voire superprovisionnelles. Le juge peut également assortir la décision de la menace d'une peine conformément à l'art. 292 CP (insoumission à une décision de l'autorité), de manière à pouvoir aussi toucher pénalement l'auteur d'atteintes par le truchement du droit civil.

La liste des mesures n'est pas exhaustive: le juge peut aussi décider d'autres mesures propres à protéger le demandeur de la violence, de menaces ou de harcèlement. Il peut par exemple envisager un placement à des fins d'assistance (art. 426 ss CC) à l'encontre de l'auteur de violences. L'art. 28b, al. 2 et 3, CC permet
d'expulser la personne violente du logement dans le cas où elle vit avec sa victime et, avec l'accord du bailleur, de mettre le contrat de bail au nom du seul demandeur.

L'objectif est d'offrir à la victime une alternative à la fuite. L'al. 4 oblige les cantons à désigner un service pouvant prononcer l'expulsion immédiate du logement commun en cas de crise. Les cantons ont confié cette tâche à la police; nombre d'entre eux ont également adopté leur propre loi sur la protection contre la violence. Lorsque les deux personnes sont mariées entre elles, il est également possible de faire valoir des mesures visant à protéger la personnalité dans le cadre de la protection de l'union conjugale (art. 172, al. 3, CC) ou de la procédure de divorce (art. 276 du code de procédure civile [CPC]193, mesures provisionnelles).

Le droit suisse prévoit aussi bien des mesures pénales que civiles pour lutter contre le harcèlement et dépasse par conséquent les exigences de la convention. Il n'y a pas lieu de faire une déclaration au sens de l'art. 78, par. 3, de la convention.

193

214

RS 272

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2.5.7

Art. 35 Violence physique

Les Parties sont tenues par l'art. 35 d'ériger en infraction pénale le fait de commettre intentionnellement des actes de violence physique à l'égard d'une autre personne.

Le code pénal punit largement les infractions contre la vie et l'intégrité corporelle.

Les art. 122 CP (lésions corporelles graves) et 123 CP (lésions corporelles simples) satisfont aux exigences de la convention. En ce qui concerne l'art. 126 CP (voies de fait), il reste à vérifier si la convention oblige ou non les Parties à déclarer punissable cette forme légère de violence physique et, si oui, dans quelle mesure. La question joue essentiellement un rôle par rapport aux art. 41 (aide ou complicité et tentative, voir ch. 2.5.13), 48 (interdiction des modes alternatifs de résolution des conflits ou des condamnations obligatoires, voir ch. 2.5.20) et 55 (procédures ex parte et ex officio, voir ch. 2.6.7).

En vertu de l'art. 126 CP, celui qui se sera livré sur une personne à des voies de fait qui n'auront causé ni lésion corporelle ni atteinte à la santé sera, sur plainte, puni d'une amende. Est considérée comme voie de fait toute agression minime et sans conséquence commise contre le corps ou la santé d'autrui. Le Tribunal fédéral admet qu'il y a voie de fait, indépendamment de la douleur causée, quand l'ampleur habituellement et socialement tolérée de l'atteinte portée au corps d'autrui est dépassée, mais qu'aucun dommage n'est infligé (par ex.: donner une gifle, un coup de poing, un coup de pied, une forte bourrade, ébouriffer une coiffure élaborée, couper des cheveux, asperger de liquide, etc.). Les petits préjudices à la santé, causant un malaise évident, mais passager, sont à considérer comme des voies de fait (par ex.: administrer violemment ou sournoisement des substances liquides ou gazeuses entraînant nausée, toux ou éternuement ou ayant un effet laxatif) 194. Le terme englobe aussi le fait d'en venir aux mains en égratignant, griffant, éraflant, provoquant des bleus ou des contusions, choses qui ne réclament pas de traitement particulier, guérissent vite et ne provoquent pas de douleur intense195. Les voies de fait se distinguent des lésions corporelles simples par le fait qu'elles n'entraînent pas forcément de dommages pour le corps ou la santé.

194

Roth Andreas, Keshelava Tornike, in: Niggli Marcel Alexander, Wiprächtiger Hans (éd.), Basler Kommentar, Strafrecht II, 3e éd., Bâle 2007, N 2 ss conc. l'art. 126, N 2 ss 195 ATF 107 IV 40, 43; Roth Andreas A., Berkemeier Anne, in: Niggli Marcel Alexander, Wiprächtiger Hans (éd.), Basler Kommentar, Strafrecht II, 3 e éd., Bâle 2013, conc.

l'art. 123, N 8

215

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Il est dit dans le rapport explicatif de la convention que les Parties doivent incriminer tout acte intentionnel de violence physique commis à l'encontre d'une autre personne indépendamment du contexte dans lequel il survient. Le terme «violence physique» désigne des blessures corporelles provenant de l'emploi d'une force physique immédiate et illicite. Il inclut également la violence provoquant la mort de la victime196. On peut en conclure que la convention n'exige pas la criminalisation des voies de fait au sens du droit suisse, telles que décrites plus haut, parce que l'infraction, formulée de manière négative, ne présuppose pas de blessure corporelle.

L'art. 35 de la convention est couvert par le CP.

2.5.8

Art. 36 Violence sexuelle, y compris le viol

Les Parties sont tenues d'ériger en infraction pénale les actes sexuels non consentis avec une personne (par. 1, let. a et b) ou le fait de contraindre une personne à se livrer à des actes sexuels non consentis avec un tiers (par. 1, let. c). Le consentement doit être donné volontairement (par. 2). Les comportements décrits au par. 1 doivent également être punis lorsqu'ils sont commis contre les anciens ou actuels conjoints ou partenaires, conformément au droit interne (par. 3). Cet article couvre certes toutes les formes de violence sexuelle auxquelles une personne est soumise intentionnellement sans son consentement. Les Parties disposent toutefois d'une certaine latitude puisqu'elles sont libres «de décider de la formulation exacte de la législation et des facteurs considérés comme exclusifs d'un consentement libre»197.

Les comportements visés sont punis par le titre 5 CP (infractions contre l'intégrité sexuelle), notamment en tant que contrainte sexuelle (art. 189 CP) et viol (art. 190 CP). Peu importe que la victime soit l'ancien ou l'actuel conjoint ou partenaire.

L'exigence posée par le par. 2 est elle aussi remplie puisque le consentement doit être donné volontairement pour qu'il n'y a ait pas infraction.

L'art. 36 de la convention est couvert par le CP.

2.5.9

Art. 37 Mariages forcés

Les Parties sont tenues d'ériger en infraction pénale le fait, lorsqu'il est commis intentionnellement, de forcer un adulte ou un enfant à contracter un mariage (par. 1).

Elles doivent également punir celui qui, intentionnellement, trompe un adulte ou un enfant afin de l'emmener sur le territoire d'une Partie ou d'un Etat autre que celui où il réside avec l'intention de le forcer à contracter un mariage (par. 2).

Art. 37, par. 1 Le mariage forcé est une infraction que le code pénal sanctionne explicitement depuis le 1er juillet 2013 (art. 181a CP). Quiconque, en usant de violence envers une 196 197

216

Rapport explicatif de la convention, ch. 187 et 188 Rapport explicatif de la convention, ch. 193

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personne ou en la menaçant d'un dommage sérieux ou en l'entravant de quelque autre manière dans sa liberté d'action, l'oblige à conclure un mariage ou un partenariat enregistré est puni d'une peine privative de liberté de cinq ans au plus ou d'une peine pécuniaire (art. 181a, al. 1, CP). Est également punissable quiconque se trouve en Suisse et n'est pas extradé et commet l'infraction à l'étranger (art. 181a, al. 2, CP; voir aussi ch. 2.5.16).

Art. 37, par. 2 Le par. 2 de la convention érige en infraction pénale le fait de tromper une personne pour l'emmener dans un Etat tiers (souvent le pays de ses ascendants) dans le but de la forcer à y contracter un mariage. Il n'est pas indispensable que le mariage soit conclu. Le terme «tromper» désigne toute conduite permettant à l'auteur de l'infraction d'inciter la victime à se rendre à l'étranger, notamment en usant d'un prétexte ou en fabriquant une raison comme la nécessité de rendre visite à un membre de la famille souffrant198. Aucune réserve n'est possible.

La mise en oeuvre de cette variante de l'infraction dans le droit suisse réclame un examen approfondi: Le comportement décrit à l'art. 37, par. 2, ne constitue pas un mariage conclu par la force (art. 181a, al. 1, CP), car celui-ci présuppose, au plan objectif, l'existence d'une contrainte. La tentative de conclure un mariage par la force, en revanche, est également punissable en droit suisse. Elle se distingue de l'infraction consommée par le fait que l'élément objectif n'est que partiellement réalisé, tandis que l'élément subjectif doit l'être dans les deux cas. Pour que la tentative soit punissable, il faut que la volonté de passer à l'acte, typiquement constitutive de l'infraction, soit manifeste. Dans la jurisprudence du Tribunal fédéral, il y a tentative quand la dernière étape décisive a été franchie, autrement dit l'étape à partir de laquelle il n'y a pas de retour possible dans le plan de l'auteur, sauf circonstances extérieures. L'acte qui marque le début de l'exécution est celui par lequel l'auteur commence à réaliser l'infraction. Il implique aussi bien la proximité géographique que l'imminence 199.

L'art. 37, par. 2, de la convention exige que l'auteur agisse sur la personne concernée dans l'intention de la forcer à se marier dans un Etat tiers. A partir du moment où la personne
a entamé son voyage à l'étranger et que l'auteur agit intentionnellement dans le but de l'y faire contracter un mariage, le seuil de la tentative punissable de mariage forcé est en tout cas franchi. Le comportement que l'art. 37, par. 2, de la convention veut ériger en infraction pénale est donc en principe couvert par le droit pénal suisse.

La convention exige cependant, conformément à l'art. 37, par. 2, en relation avec l'art. 41, par. 2 (voir ch. 2.5.13), que la tentative de commettre l'infraction, c'est-àdire le fait de tromper la victime, soit elle aussi déclarée punissable. La question de savoir si les préparatifs de voyage effectués en Suisse doivent être considérés comme tentative d'infraction à l'art. 181a CP ou seulement comme des actes préparatoires, non punissables, doit être appréciée dans le cas d'espèce, au vu des circons198 199

Rapport explicatif de la convention, ch. 195 à 197 Niggli Marcel Alexander, Maeder Stefan, in: Niggli Marcel Alexander, Wiprächtiger Hans (éd.), Basler Kommentar, Strafrecht I, 3e éd., Bâle 2013, art. 22, N 16 ss

217

FF 2017

tances concrètes. Etant donné l'interprétation extensive de la tentative retenue par le Tribunal fédéral dans des cas similaires, il est possible que de tels préparatifs soient considérés comme constitutifs d'une tentative punissable sur sol suisse200. La limite devrait être atteinte lorsqu'il n'y a pas de préparatifs de voyage concrets (comme la réservation d'un vol).

La punissabilité de la tentative d'infraction à l'art. 181a CP couvre suffisamment les faits envisageables, comme il est dit plus haut. Avancer encore le seuil de la punissabilité équivaudrait en outre à s'engager sur la voie d'un «droit pénal réprimant les convictions ou les opinions», chose contraire au système du droit pénal suisse.

De manière générale, le droit suisse satisfait aux exigences de l'art. 37 de la convention.

2.5.10

Art. 38 Mutilations génitales féminines

Les Parties s'engagent à ériger en infractions pénales, lorsqu'ils sont commis intentionnellement, l'excision, l'infibulation ou toute autre mutilation de la totalité ou partie des labia majora, labia minora ou clitoris d'une femme (let. a). Elles doivent également déclarer punissable le fait de contraindre une femme à subir tout acte énuméré à la let. a ou de lui fournir les moyens à cette fin (let. b). Cette disposition couvre le cas où une personne apporte assistance à l'auteur de l'infraction en contraignant une femme à subir les actes en question ou en lui fournissant les moyens nécessaires à cette fin201. Les Parties doivent également réprimer le fait d'inciter ou de contraindre une fille à subir tout acte énuméré à la let. a ou de lui fournir les moyens à cette fin (let. c). L'incitation s'ajoute ici aux infractions prévues à la let. b202.

L'art. 124 CP, en vigueur depuis le 1er juillet 2012, punit explicitement celui qui aura mutilé des organes génitaux féminins, aura compromis gravement et durablement leur fonction naturelle ou leur aura porté toute autre atteinte (al. 1). Il réprime également quiconque commet la mutilation à l'étranger, se trouve en Suisse et n'est pas extradé (al. 2, voir aussi ch. 2.5.16). La let. a de la convention est donc couverte.

Les variantes prévues aux let. b et c entrent dans le champ de la contrainte (art. 181 CP), de la complicité, voire de l'instigation (art. 24 et 25 CP). La participation aux infractions visées aux let. b et c, au sens de l'art. 41 de la convention, n'a pas à être déclarée punissable. Le droit pénal suisse protège aussi bien les filles que les femmes des mutilations génitales.

L'art. 38 de la convention est donc entièrement couvert par le CP.

200

Message du 23 février 2011 relatif à une loi fédérale concernant les mesures de lutte contre les mariages forcés, FF 2011 2080 s. avec renvois 201 Rapport explicatif de la convention, ch. 200 202 Rapport explicatif de la convention, ch. 201

218

FF 2017

2.5.11

Art. 39 Avortement et stérilisations forcés

Les Parties sont tenues d'ériger en infractions pénales l'avortement (let. a) et la stérilisation (let. b) forcés.

Le droit pénal suisse punit celui qui interrompt la grossesse d'une femme sans son consentement (art. 118, al. 2, CP). La stérilisation forcée est punissable en tant que lésion corporelle grave (art. 122 CP).

L'art. 39 de la convention est entièrement couvert par le CP.

2.5.12

Art. 40 Harcèlement sexuel

Les Parties sont tenues de prendre les mesures législatives ou autres nécessaires pour que toute forme de comportement non désiré, verbal, non verbal ou physique, à caractère sexuel, ayant pour objet ou pour effet de violer la dignité d'une personne, en particulier lorsque ce comportement crée un environnement intimidant, hostile, dégradant, humiliant ou offensant, soit soumise à des sanctions pénales ou autres sanctions légales.

Le code pénal contient deux dispositions punissant le harcèlement sexuel. Celui qui aura causé du scandale en se livrant à un acte d'ordre sexuel en présence d'une personne qui y aura été inopinément confrontée et celui qui aura importuné une personne par des attouchements d'ordre sexuel ou par des paroles grossières, seront, sur plainte, punis d'une amende (art. 198 CP). Et celui qui se sera exhibé sera, sur plainte, puni d'une peine pécuniaire de 180 jours-amende au plus (art. 194 CP).

Quant à la discrimination sexuelle pratiquée sur le lieu de travail, elle est punie en vertu des art. 4 et 5 LEg.

La convention laisse beaucoup de latitude aux Etats dans la mise en oeuvre de cet article203. D'un côté, les Parties peuvent prévoir des sanctions autres que pénales. De l'autre, elles ne doivent pas déclarer punissables la tentative de harcèlement sexuel ou la complicité (art. 41 de la convention). De même, elles ne doivent pas ériger le harcèlement sexuel en infraction poursuivie d'office (art. 55 de la convention).

Le droit suisse satisfait donc aux exigences de la convention.

2.5.13

Art. 41 Aide ou complicité et tentative

Les Parties doivent ériger en infraction pénale l'aide ou la complicité dans la commission des infractions visées aux art. 33 (violence psychologique), 34 (harcèlement), 35 (violence physique), 36 (violence sexuelle), 37 (mariages forcés), 38, let. a (mutilations génitales féminines) et 39 (avortement et stérilisation forcés) de la convention ainsi que la tentative d'infraction aux art. 35 (en cas de violence physique grave), 36, 37, 38, let. a, et 39 de la convention.

203

Rapport explicatif de la convention, ch. 207

219

FF 2017

L'instigation et la complicité dans la commission d'un crime ou d'un délit sont punies par le code pénal suisse (art. 24 et 25 CP), la tentative de crime ou de délit également (art. 22 CP). En matière de contraventions, la tentative et la complicité ne sont punissables que dans les cas expressément prévus par la loi (art. 105, al. 2, CP).

L'instigation à commettre une contravention reste par contre punissable.

Les infractions au droit suisse correspondant à celles qui sont énumérées de manière exhaustive dans la convention sont quasiment toutes des crimes ou des délits. Les seules exceptions sont les voies de fait au sens de l'art. 126 CP, qui sont punies en tant que contravention. La tentative de et la complicité à des voies de fait ne sont en règle générale, ou faute de disposition spéciale, pas punissables. Comme nous l'avons exposé au ch. 2.5.7, la mise en oeuvre de l'art. 35 de la convention ne nécessite pas que les voies de fait au sens de l'art. 126 CP soient déclarées punissables.

La punissabilité de la tentative de violence physique que requiert la convention (art. 35) ne pose pas de problème de prime abord, car les Parties ont la possibilité d'établir en tant qu'infraction la tentative de commission de violence physique pour les seuls cas graves204. Les voies de fait ne relèvent a priori pas de cette catégorie.

Reste à voir si la complicité dans la commission de violence physique est suffisamment couverte. En droit suisse, nous l'avons dit, la complicité est punissable aussi bien dans le cas des lésions corporelles graves que des lésions corporelles simples (art. 122 et 123 en relation avec l'art. 25 CP). La complicité de voies de fait n'est en revanche pas punissable (art. 126 en relation avec l'art. 105, al. 2, CP). Il faut signaler ici aussi que la convention ne prévoit pas la punissabilité des voies de fait. Cela vaut en conséquence pour la complicité de voies de fait.

Pour ces raisons, la Suisse satisfait également aux exigences de la convention sur ce point. Il en va de même, comme nous l'avons dit au ch. 2.5.9., pour la tentative de variante de mariage forcé prévue à l'art. 37, par. 2, de la convention.

2.5.14

Art. 42 Justification inacceptable des infractions pénales, y compris les crimes commis au nom du prétendu «honneur»

Les Parties doivent s'assurer que, dans les procédures pénales diligentées à la suite de la commission de l'un des actes de violence couverts par le champ d'application de la convention, la culture, la coutume, la religion, la tradition ou le prétendu «honneur» ne soient pas considérés comme justifiant de tels actes (par. 1). Elles doivent également faire en sorte que la responsabilité pénale de toute personne incitant un enfant à commettre un acte mentionné au par. 1 ne soit pas diminuée pour les actes commis (par. 2).

204

220

Rapport explicatif de la convention, ch. 214

FF 2017

Le droit pénal suisse ne connaît aucun des motifs de justification cités au par. 1. Les infractions au sens du par. 2 sont régies par les règles générales concernant l'instigation ou la participation en qualité d'auteur médiat de l'infraction en question. Les motifs mentionnés dans la convention n'ont pas non plus d'effet justificatif.

L'art. 42 de la convention est couvert par le droit pénal suisse.

2.5.15

Art. 43 Application des infractions pénales

Les infractions établies conformément à la présente convention s'appliquent indépendamment de la nature de la relation entre la victime et l'auteur de l'infraction.

Le code pénal s'applique en principe indépendamment de la nature des relations existant entre la victime et l'auteur de l'infraction. Depuis le 1er avril 2004, la plainte requise pour que la contrainte sexuelle et le viol entre époux ou entre partenaires soit poursuivie a été abandonnée. Le code pénal est en revanche plus sévère quand l'auteur et la victime de l'infraction sont liés entre eux. Selon l'art. 180, al. 2, CP la menace est poursuivie d'office si l'auteur est le conjoint de la victime et que la menace a été commise durant le mariage ou dans l'année qui a suivi le divorce (art. 180, al. 2, let. a, CP). Le code pénal prévoit une disposition identique pour les partenaires enregistrés (art. 180, al. 2, let. abis, CP) et pour les partenaires hétérosexuels ou homosexuels pour autant qu'ils fassent ménage commun pour une durée indéterminée (al. 2, let. b). La même règle s'applique en cas de lésion corporelle simple (art. 123, al. 2, CP) et de voies de fait si l'auteur a agi à réitérées reprises (art. 126, al. 2, CP). Ces dispositions correspondent à l'esprit et au but de la convention et sont donc compatibles avec son art. 43.

L'art. 43 de la convention est couvert par le droit pénal suisse.

2.5.16

Art. 44 Compétence

L'art. 44 décrit pour l'essentiel les critères en fonction desquels les Parties établissent leur compétence à l'égard des infractions prévues par la convention, critères usuels dans les conventions du Conseil de l'Europe.

Le par. 1 oblige les Parties à établir leur compétence juridictionnelle lorsque l'infraction est commise sur leur territoire (let. a, principe de territorialité), à bord d'un navire battant leur pavillon (let. b, principe du pavillon), ou d'un aéronef immatriculé selon leurs lois internes (let. c). La compétence des tribunaux suisses résulte des art. 3 CP, 4, al. 2, de la loi fédérale du 23 septembre 1953 sur la navigation maritime sous pavillon suisse205 et 97, al. 1, de la loi fédérale du 21 décembre 1948 sur l'aviation206. Les Parties doivent également établir leur compétence quand l'infraction a été commise par un de leurs ressortissants (let. d). Dans ces cas, la compétence des tribunaux suisse est régie par l'art. 7, al. 1, let. a, CP (principe de la 205 206

RS 747.30 RS 748.0

221

FF 2017

personnalité active). Enfin, la compétence juridictionnelle sur les infractions visées par la convention doit être établie lorsque l'infraction est commise par une personne ayant sa résidence habituelle sur leur territoire (let. e). En vertu de l'art. 78, par. 2, tiret 2, tout Etat peut se réserver le droit de ne pas appliquer cette disposition ou de ne l'appliquer que dans des cas ou conditions spécifiques. La réserve possible au sujet de la let. e est usuelle dans les conventions pénales du Conseil de l'Europe.

Dans le droit pénal suisse, la résidence habituelle ne fonde pas, en soi, l'exercice de la compétence juridictionnelle suisse. Sont déterminants le lieu de la commission de l'infraction ou la nationalité de son auteur ou de sa victime. C'est pourquoi la Suisse fait usage de la possibilité évoquée plus haut de formuler une réserve, comme elle l'a fait dans le cas de la convention de Lanzarote207.

Selon le par. 2, les Parties s'efforcent d'établir leur compétence à l'égard de toute infraction établie conformément à la convention lorsque l'infraction est commise contre l'un de leurs ressortissants ou contre une personne ayant sa résidence habituelle sur leur territoire. Si la première variante (principe de la personnalité passive) est déjà mise en oeuvre dans le droit pénal suisse (art. 7, al. 1, en relation avec l'al. 2, CP), ce dernier ne connaît pas non plus le critère de la résidence habituelle du côté de la victime. La disposition n'étant pas formulée de manière contraignante, il n'y a toutefois aucune nécessité de la mettre en oeuvre.

Le par. 3 oblige les Parties à établir leur compétence juridictionnelle à l'égard des infractions prévues aux art. 36 (violence sexuelle), 37 (mariages forcés), 38 (mutilations génitales féminines) et 39 (avortement et stérilisations forcés), que les faits soient incriminés ou non sur le territoire où ils ont été commis (l'abandon du principe de la double incrimination et de la prise en compte du droit éventuellement plus favorable du pays où l'infraction est commise). Le droit pénal suisse contient des dispositions correspondantes sur les mariages forcés et les mutilations génitales: il prévoit que quiconque se trouve en Suisse et n'est pas extradé et commet l'une ou l'autre infraction à l'étranger est punissable (art. 181a, al. 2, et 124, al. 2, CP).
L'art. 5 CP renonce à la double incrimination pour certaines infractions sexuelles lorsqu'elles sont commises à l'étranger sur des mineurs, mais pas sur des adultes. Il n'existe pas non plus de disposition correspondante dans le code pénal pour les infractions d'avortement et de stérilisation forcés. Comme le code pénal ne renonce à la double incrimination que dans de rares cas, la Suisse fait usage de la possibilité de formuler une réserve que prévoit l'art. 78, par. 2, tiret 2, eu égard à la violence sexuelle envers des adultes (art. 189 et 190 CP) et à l'avortement et la stérilisation forcés (art. 118, al. 2, et 122 CP). Le fait que la possibilité de formuler une réserve soit prévue montre que d'autres Etats membres du Conseil de l'Europe n'abandonnent pas systématiquement la double incrimination.

Le par. 4 enjoint aux Parties de faire en sorte que l'établissement de leur compétence juridictionnelle à l'égard des infractions prévues aux art. 36 (violence sexuelle), 37 (mariages forcés), 38 (mutilations génitales féminines) et 39 (avortement et stérilisations forcés) ne soit pas subordonné à la condition que la poursuite soit précédée d'une plainte de la victime ou d'une dénonciation de l'Etat du lieu où l'infraction a été commise, dans la mesure où l'auteur est un de leurs ressortissants 207

222

RS 0.311.40; art. 25, par. 1, let. e

FF 2017

ou une personne ayant sa résidence habituelle sur leur territoire. Les infractions correspondantes dans le droit pénal suisse étant conçues pour être poursuivies d'office, la Suisse n'a pas à faire usage de la possibilité de formuler une réserve au sens de l'art. 78, par. 2, tiret 2.

Selon le par. 5, les Parties doivent aussi établir leur compétence à l'égard de toute infraction établie conformément à la présente convention dans les cas où l'auteur présumé est présent sur leur territoire et ne peut être extradé vers une autre Partie uniquement en raison de sa nationalité. La Suisse se conforme à cette obligation de poursuivre pénalement en cas de non-extradition (aut dedere aut iudicare) sur la base des art. 6 et 7 CP. L'art. 7 de la loi du 20 mars 1982 sur l'entraide pénale internationale (EIMP)208 dispose qu'aucun citoyen suisse ne peut être extradé sans son consentement écrit à un Etat étranger pour y faire l'objet d'une poursuite pénale. La Convention européenne d'extradition du 13 décembre 1957209 règle à l'art. 6 l'extradition de ses propres ressortissants. On y trouve la même obligation que dans la présente convention.

Les conditions de l'art. 44 de la convention sont donc remplies, à deux réserves près (art. 44, par. 1, let. e, et 3). Elles ne réclament aucune révision du droit interne.

2.5.17

Art. 45 Sanctions et mesures

Les Parties doivent faire en sorte que les infractions établies conformément à la convention soient passibles de sanctions effectives, proportionnées et dissuasives, au regard de leur gravité; celles-ci incluent, le cas échéant, des peines privatives de liberté pouvant donner lieu à l'extradition (par. 1).

Il ressort clairement de la formulation «le cas échéant» que les Parties sont libres de décider quelles infractions établies conformément à la convention sont passibles d'une peine privative de liberté pouvant donner lieu à une extradition210. Les infractions correspondantes dans le droit pénal suisse sont, pour autant qu'elles entraînent forcément le prononcé d'une sanction pénale, frappées pratiquement sans exception d'une sanction privative de liberté d'un maximum d'au moins un an et peuvent donc donner lieu à extradition211. Quelques contraventions, comme l'art. 198 CP, ne s'opposent pas à la mise en oeuvre du par. 1 car les Etats disposent là d'une marge de manoeuvre considérable.

Les Parties peuvent adopter d'autres mesures à l'égard des auteurs d'infractions telles que le suivi ou la surveillance des personnes condamnées et la déchéance de leurs droits parentaux si l'intérêt supérieur de l'enfant ne peut être garanti d'aucune autre façon (par. 2). Ces mesures sont possibles en Suisse (voir le commentaire fait au ch. 2.5.3).

L'art. 45 de la convention est mis en oeuvre dans le droit suisse.

208 209 210 211

RS 351.1 RS 0.353.1 Rapport explicatif de la convention, ch. 232 Voir art. 35, al. 1, let. a, EIMP.

223

FF 2017

2.5.18

Art. 46 Circonstances aggravantes

Les circonstances que les Parties doivent considérer comme aggravantes lors de la détermination des peines, en vertu de l'art. 46, peuvent en principe toutes, selon le droit pénal suisse, être prises en compte par le juge lorsqu'il fixe la peine (art. 47 CP). Quelques dispositions prévoient une qualification pour les comportements particulièrement condamnables, comme les art. 189, al. 3, (contrainte sexuelle) et 190, al. 3, CP (viol). Dans les deux cas, le fait que l'auteur a agi avec cruauté, notamment qu'il a fait usage d'une arme dangereuse ou d'un autre objet dangereux, sera un motif d'aggravation de la peine.

La Suisse satisfait donc aux exigences de la convention.

2.5.19

Art. 47 Condamnations dans une autre Partie

Aux termes de l'art. 47, les Parties doivent prévoir la possibilité de prendre en compte, dans le cadre de l'appréciation de la peine, les condamnations définitives prononcées dans une autre Partie. L'art. 47 CP répond à cette exigence. Cette disposition n'impose pas de rechercher activement des condamnations prononcées à l'étranger212.

2.5.20

Art. 48 Interdiction des modes alternatifs de résolution des conflits ou des condamnations obligatoires

Le par. 1 enjoint aux Parties de prendre les mesures nécessaires pour interdire les modes alternatifs de résolution des conflits obligatoires, y compris la médiation et la conciliation, en ce qui concerne toutes les formes de violence couvertes par le champ d'application de la convention. Selon le rapport explicatif, l'Etat doit permettre à la victime d'avoir accès à une procédure juridictionnelle contradictoire, afin d'éviter la reprivatisation de la violence domestique et de la violence à l'égard des femmes213.

Le droit suisse prend en compte cette exigence de la manière suivante: En ce qui concerne les cas de violence domestique et de violence à l'égard des femmes visés par la convention, l'art. 55a CP s'applique en premier lieu. En vigueur depuis le 1er avril 2004, il prévoit que les autorités compétentes peuvent suspendre une procédure engagée pour lésions corporelles simples, voies de fait réitérées, menace ou contrainte. La première condition est que la victime est le conjoint ou exconjoint de l'auteur et que l'atteinte a été commise durant le mariage ou dans l'année qui a suivi le divorce. Des conditions analogues sont énoncées pour les partenaires enregistrés et pour les partenaires menant de fait une vie de couple. La 212 213

224

Rapport explicatif de la convention, ch. 250 Rapport explicatif de la convention, ch. 252

FF 2017

seconde condition, qui est importante pour l'art. 48, par. 1, de la convention, prévoit que la victime doit requérir cette suspension ou donner son accord à la proposition de suspension (art. 55a, al. 1, CP). Si la victime révoque son accord dans les six mois qui suivent la suspension, la procédure est reprise (art. 55a, al. 2, CP). Autrement dit, la procédure doit être menée ou reprise dès lors que la victime n'en demande pas la suspension, rejette la proposition en ce sens présentée par les autorités ou révoque son accord. Voir les explications données au ch. 2.6.7 pour ce qui est de la révision proposée de l'art. 55a CP.

Si les conditions énoncées à l'art. 55a CP ne sont pas remplies, l'art. 316 CPP peut alors s'appliquer: aux termes de l'al. 1, le ministère public peut citer le plaignant et le prévenu à une audience dans le but d'aboutir à un arrangement à l'amiable, lorsque la procédure préliminaire porte exclusivement sur des infractions poursuivies sur plainte. Si la conciliation aboutit, le lésé retire sa plainte et le ministère public classe la procédure (art. 316, al. 3, CPP). Le plaignant n'est pas obligé d'assister aux audiences de conciliation214. Il n'est pas non plus obligé de prendre part aux audiences de conciliation prévues à l'art. 316, al. 2, CPP, en vue d'une éventuelle exemption de peine au titre de réparation selon l'art. 53 CP. De même, la participation du lésé à une conciliation ou une médiation au sens de la procédure pénale applicable aux mineurs du 20 mars 2009 (PPMin)215 n'est pas obligatoire216.

En vertu du par. 2, les Parties doivent veiller à ce que la capacité de l'auteur de l'infraction à faire face aux obligations financières qu'il a envers la victime soit dûment prise en compte lorsque le paiement d'une amende est ordonné.

Le CP prévoit deux formes de sanction financière, la peine pécuniaire et l'amende.

Le tribunal calcule le nombre de jours-amende correspondant à la peine pécuniaire en tenant compte de la situation personnelle et économique de l'auteur au moment du jugement (art. 34, al. 2, CP). Outre le revenu et la fortune, il prend également en compte le mode de vie, le minimum vital ainsi que les éventuelles obligations familiales et obligations d'assistance. Le calcul d'une amende tient aussi compte de la situation de l'auteur, mais dans une moindre
mesure (art. 106, al. 3, CP). Il s'agit ainsi de garantir que l'auteur pourra s'acquitter de ses éventuelles obligations d'entretien et d'assistance vis-à-vis de la victime, malgré la condamnation. Toutefois, il n'est pas toujours possible d'éviter que les membres de la famille de l'auteur, et partant la victime, soient affectés par la peine pécuniaire ou par l'amende.

214

En vertu de l'art. 316, al. 1, 2e phrase, CPP, si le plaignant fait défaut, la plainte est considérée comme retirée.

215 Voir art. 16 s. PPMin, RS 312.1 216 A. Donatsch, Th. Hansjakob, V. Lieber, Kommentar zur Schweizerischen Strafprozessordnung (StPO), 2e édition 2014, art. 316, N 7 et 15

225

FF 2017

Les intérêts financiers de la victime sont par ailleurs protégés par l'art. 73 CP: lorsque certaines conditions sont réunies, le tribunal alloue au lésé, à sa demande, jusqu'à concurrence des dommages-intérêts ou de la réparation morale fixés par un jugement ou par une transaction, les valeurs patrimoniales qui reviennent normalement à l'Etat. Ainsi, la peine pécuniaire ou l'amende payée par le condamné, les objets et valeurs patrimoniales confisqués, les créances compensatrices et le montant du cautionnement préventif peuvent être alloués au lésé (art. 73, al. 1, CP). Cette règle permet d'opérer une compensation entre l'auteur et le lésé et d'éviter que le lésé se retrouve les mains vides le cas échéant.

Ces dispositions répondent aux exigences posées par l'art. 48 de la convention.

2.6

Chapitre VI Enquêtes, poursuites, droit procédural et mesures de protection

Les mesures prescrites dans ce chapitre sont notamment mises en oeuvre dans le CPP, dans le CC et en partie dans les lois cantonales sur la police.

2.6.1

Art. 49 Obligations générales

En vertu du par. 1, les Parties doivent veiller à ce que les enquêtes et les procédures judiciaires soient traitées sans retard et que les droits de la victime soient pris en considération à toutes les étapes des procédures.

La première obligation formulée est mise en oeuvre dans le droit suisse grâce au principe de célérité énoncé dans l'art. 5 CPP, en vertu duquel les autorités pénales engagent les procédures pénales sans délai et les mènent à terme sans retard injustifié. Les lésés, qui au sens de l'art. 116, al. 1, CPP sont considérés comme des victimes d'infractions, bénéficient de droits particuliers (droit à des mesures de protection, droit de refuser de témoigner, droit à l'information), conformément à l'art. 117 CPP. En outre, les autorités pénales garantissent les droits de la personnalité des victimes à tous les stades de la procédure (art. 152, al. 1, CPP) et, pour tous les actes de procédure, la victime peut se faire accompagner d'une personne de confiance en sus de son conseil juridique (art. 152, al. 2, CPP). La liste de droits énumérée à l'art. 117, al. 1, CPP n'est pas exhaustive. L'al. 2 de ce même article recense des dispositions supplémentaires visant à protéger les victimes mineures; cette liste n'est pas exhaustive non plus.

Le par. 2 exige que les Parties garantissent une enquête et une poursuite effectives des infractions, conformément aux principes fondamentaux des droits de l'homme et en prenant en considération la compréhension de la violence fondée sur le genre.

Cette exigence est satisfaite grâce aux principes régissant la procédure pénale, qui sont énoncés aux art. 3 à 11 CPP et précisés dans de nombreuses dispositions du CPP217. Le principe du droit de chacun à un procès équitable, (art. 3, al. 2, let. c, 217

226

Voir le message du Conseil fédéral du 21 décembre 2005 relatif à l'unification du droit de la procédure pénale, FF 2006 1057 1103 ss.

FF 2017

CPP), le principe de l'indépendance du juge (art. 4 CPP) et la présomption d'innocence (art. 10, al. 1, CPP) sont des notions fondamentales. L'art. 335, al. 4, CPP mérite une mention particulière en ce qui concerne les aspects liés au genre (composition spécifique du tribunal en cas d'infraction sexuelle).

La Suisse satisfait aux exigences posées par l'art. 49 de la convention.

2.6.2

Art. 50 Réponse immédiate, prévention et protection

En vertu de l'art. 50, les services répressifs sont censés réagir rapidement et de manière appropriée, en offrant une protection adéquate et immédiate aux victimes (par. 1). Ils doivent également engager de manière appropriée la prévention et la protection contre toutes les formes de violence couvertes par le champ d'application de la convention, y compris l'emploi de mesures opérationnelles préventives et la collecte des preuves (par. 2).

Conformément à l'art. 28b, al. 4, CC, les cantons désignent un service qui peut prononcer l'expulsion immédiate de l'auteur de l'atteinte hors du logement commun en cas de crise. Ce sont également les cantons qui règlent les modalités de la procédure. Le canton de Berne par exemple les a réglées dans sa loi du 8 juin 1997 sur la police (LPol BE)218. En vertu de l'art. 29, al. 1, let. f, LPol BE, la Police cantonale peut renvoyer temporairement une personne d'un lieu ou lui en interdire l'accès si celle-ci met en danger la vie ou l'intégrité corporelle, psychique ou sexuelle d'une autre personne, ou menace sérieusement d'y attenter. Cette disposition s'applique en particulier dans les cas de violence domestique. L'art. 29a LPol BE dispose expressément que, dans les cas de violence domestique, une personne peut être renvoyée du domicile commun ainsi que de ses abords immédiats ou s'en voir interdire l'accès pour une durée de 14 jours (al. 1). De plus, la victime de même que la personne qui fait l'objet de l'interdiction reçoivent des offres de conseil (al. 2). En outre, l'art. 39, al. 1, let. d, LPol BE autorise la police à pénétrer dans un lieu et à le perquisitionner s'il y a de sérieuses raisons de présumer qu'une personne a besoin d'aide pour la protection de sa vie ou de son intégrité corporelle.

Dans le cadre de la révision législative visant à améliorer la protection des personnes victimes de violence, le Conseil fédéral a proposé, en exécution de la motion Perrin219, de créer une base légale qui permettra d'équiper l'auteur potentiel, et éventuellement la victime, d'un dispositif électronique qui détermine le lieu où il se trouve et transmet les données à une centrale220. Cette mesure pourrait contribuer à améliorer la mise en oeuvre de l'interdiction de contact ou de périmètre.

Le CPP prescrit aux art. 149 ss plusieurs mesures destinées à protéger les
diverses personnes participant à la procédure. Aux termes de l'art. 153, al. 1, CPP par exemple, l'audition de la victime d'une infraction contre l'intégrité sexuelle peut 218 219 220

RSB 551.1 09.4017 «Protection des femmes battues».

www.ofj.admin.ch > Sécurité > Législation > Protection des victimes de violence domestique > Procédure de consultation. Les résultats de la procédure de consultation sont en cours d'évaluation.

227

FF 2017

être confiée à une personne du même sexe, à sa demande. L'art. 221, al. 2, CPP propose une autre mesure de protection, en ce sens que la détention provisoire et la détention pour des motifs de sûreté peuvent être ordonnées lorsqu'il y a sérieusement lieu de craindre qu'une personne passe à l'acte après avoir menacé de commettre un crime grave.

Lors de la première audition, la police ou le ministère public informent la victime de manière détaillée sur ses droits et devoirs dans le cadre de la procédure pénale (art. 305, al. 1, CPP). La victime reçoit en outre des informations sur les centres de consultation LAVI, sur la possibilité de solliciter des prestations relevant de l'aide aux victimes et sur le délai à respecter pour introduire une demande d'indemnisation et de réparation morale (art. 305, al. 2, CPP). Les nom et adresse de la victime sont communiqués à un centre de consultation, pour autant que celle-ci y consente (art. 305, al. 3, CPP).

Enfin, les centres de consultation proposent une assistance en cas de besoin (art. 9 ss LAVI). Ils peuvent pour cela faire appel à des tiers. Leur assistance comporte une aide immédiate et une aide à plus long terme, sur le plan médical, psychologique, social, matériel et juridique. Les prestations de l'aide aux victimes ont toutefois un caractère subsidiaire (art. 4, LAVI); par principe, c'est à l'auteur de l'infraction de répondre des dommages qu'il a causés. La victime reçoit en outre une aide des assurances sociales et, souvent, des assurances privées. L'aide aux victimes pallie le cas échéant les insuffisances des débiteurs primaires.

Le droit suisse satisfait aux exigences posées par l'art. 50 de la convention.

2.6.3

Art. 51 Appréciation et gestion des risques

Le par. 1 demande que toutes les autorités pertinentes procèdent à une appréciation du risque de létalité, de la gravité de la situation et du risque de réitération de la violence afin de gérer le risque et de garantir, si nécessaire, une sécurité et un soutien coordonnés.

Cette tâche est principalement du ressort des cantons. Durant l'automne 2014, la PSC a mené un sondage auprès de l'ensemble des cantons sur la question de la gestion des menaces au niveau cantonal (Kantonales Bedrohungsmanagement, KBM). Une gestion des menaces consiste à «reconnaître, évaluer et désamorcer» des menaces grâce à une collaboration systématique, interinstitutionnelle et professionnelle au sein des cantons. Ces derniers en sont à des stades différents en termes de mise en place et d'exploitation d'un outil de gestion des menaces. Les premières expériences montrent qu'il est très important de faire comprendre aux organisations et aux responsables associés au projet le rôle et la pertinence d'une gestion des menaces et qu'il est utile de développer le travail en réseau même après une première session d'information. L'échange de données entre la police et les autres services concernés (notamment les services au sens de l'art. 28b CC, les autorités de protection de l'enfant et de l'adulte, les centres d'hébergement pour femmes, les centres de consultation LAVI, les centres de consultation destinés aux auteurs de violence, les tribunaux des mesures protectrices de l'union conjugale et les services sociaux) se fonde essentiellement sur la législation cantonale en matière de protec228

FF 2017

tion des données (art. 2, al. 1, de la loi fédérale du 19 juin 1992 sur la protection des données221 a contrario). A l'avenir, la PSC se concentrera sur le travail de réseau auprès des professionnels et sur la sensibilisation des décideurs politiques.

Au niveau fédéral, le postulat Feri222 charge le Conseil fédéral de rédiger un rapport sur la gestion des menaces émanant de violences domestiques. Il convient également de signaler l'avant-projet élaboré en réponse à la motion Perrin (voir aussi ch. 2.6.2).

En vertu du par. 2, les appréciations mentionnées au par. 1 doivent dûment prendre en compte, à tous les stades de l'enquête et de l'application des mesures de protection, le fait que l'auteur possède ou ait accès à des armes à feu.

L'art. 31 de la loi du 20 juin 1977 sur les armes (LArm) 223 prévoit que les autorités d'exécution cantonales mettent sous séquestre les armes trouvées en possession de personnes qui peuvent se voir opposer un des motifs visés à l'art. 8, al. 2, LArm. Il s'agit notamment de personnes dont il y a lieu de craindre qu'elles utilisent l'arme d'une manière dangereuse pour elles-mêmes ou pour autrui. Il y a lieu de craindre une mise en danger de tiers par exemple lorsqu'une personne a déjà menacé quelqu'un avec une arme. Il s'agit généralement d'infractions relevant de la violence domestique. Par ailleurs, la personne qui souhaite acquérir une arme ne doit pas être enregistrée au casier judiciaire pour un acte dénotant un caractère violent ou dangereux (par ex. antécédent judiciaire pour lésions corporelles intentionnelles) ou pour la commission répétée d'actes délictueux (au moins deux). Les autorités confisquent définitivement les armes mises sous séquestre si le risque subsiste qu'elles soient utilisées de manière abusive.

La loi fédérale du 25 septembre 2015 concernant l'amélioration de l'échange d'informations entre les autorités au sujet des armes 224, entrée en vigueur le 1er juillet 2016, vise en outre à améliorer les échanges entre les différentes autorités militaires et civiles qui s'occupent de la question des armes. Il est important que ces autorités soient immédiatement informées lorsque des détenteurs d'armes présentent un potentiel de dangerosité, afin de pouvoir rapidement confisquer leurs armes.

Concrètement, une obligation d'aviser est introduite dans
le CPP. La direction de la procédure doit informer les autorités militaires compétentes des procédures pénales en cours lorsque des indices sérieux laissent présumer que le prévenu pourrait utiliser une arme à feu d'une manière dangereuse pour lui-même ou pour autrui. La révision partielle de la LArm crée la base légale permettant aux autorités civiles ou militaires d'être directement informées des cas de refus ou de retrait d'autorisation ou de reprises d'armes à feu inscrits dans la plate-forme d'information sur les armes ARMADA gérée par la Confédération. Les autorités compétentes ont ainsi la possibilité de vérifier si des motifs justifiant le retrait de l'arme peuvent être invoqués. En outre, une base juridique permettant la mise en relation des registres cantonaux des armes, entre eux et avec ARMADA, est également créée. Dans le cadre d'une procédure pénale, des armes peuvent être mises sous séquestre lorsqu'il est probable qu'elles devront être confisquées (art. 263, al. 1, let. d, CPP). La confiscation est 221 222

RS 235.1 13.3441 «Gestion des menaces émanant de violences domestiques. Faire le point sur la situation juridique et créer une définition nationale», pas encore traitée.

223 RS 514.54 224 RO 2016 1831

229

FF 2017

ensuite prononcée en application de l'art. 69 CP. Si aucune procédure pénale n'est engagée, par exemple lorsqu'aucune plainte pénale n'a été déposée dans le cadre d'une infraction poursuivie sur plainte et qu'il est donc impossible d'ouvrir une procédure pénale contre l'auteur, une procédure de confiscation indépendante est introduite, en application de l'art. 376 ss CPP.

La Suisse satisfait aux exigences posées par la convention.

2.6.4

Art. 52 Ordonnances d'urgence d'interdiction

En vertu de l'art. 52, les Parties prennent les mesures nécessaires pour que les autorités compétentes se voient reconnaître le pouvoir d'ordonner, dans des situations de danger immédiat, à l'auteur de violence domestique de quitter la résidence de la victime ou de la personne en danger pour une période de temps suffisante et d'interdire à l'auteur d'entrer dans le domicile de la victime ou de la personne en danger ou de la contacter.

Les explications relatives aux art. 34 et 50 de la convention s'appliquent aussi ici.

En application de l'art. 28b, al. 4, CC et afin de garantir une intervention rapide, les cantons ont désigné des services qui peuvent prononcer l'expulsion immédiate du logement commun en cas de crise. L'art. 28b CC donne en outre la possibilité au juge d'interdire à l'auteur de s'approcher de la victime, de prendre contact avec elle ou de fréquenter certains lieux. Ces mesures de protection peuvent aussi être requises à titre de mesures provisionnelles lorsque le requérant rend vraisemblable qu'il fait l'objet ou risque de faire l'objet d'une atteinte à sa personnalité en raison de violences, de menaces ou de harcèlement (art. 261, al. 1, CPC). En cas d'urgence particulière, le tribunal peut ordonner des mesures provisionnelles immédiates, sans entendre la partie adverse (mesures dites superprovisionnelles, art. 265, al. 1, CPC).

De surcroît, les lois cantonales sur la police prévoient la possibilité de placer une personne en garde à vue afin de limiter les risques.

Les conditions énoncées dans l'art. 52 de la convention sont donc pleinement satisfaites.

2.6.5

Art. 53 Ordonnances d'injonction ou de protection

Les Parties sont tenues de prendre les mesures nécessaires pour que des ordonnances d'injonction ou de protection appropriées soient disponibles pour les victimes de toutes les formes de violence couvertes par le champ d'application de la convention (par. 1). Une série de critères détermine l'application de ces ordonnances d'injonction ou de protection (par. 2). Enfin, les Parties doivent s'assurer que la violation des ordonnances d'injonction ou de protection émises conformément au par. 1 fait l'objet de sanctions pénales, ou d'autres sanctions légales, effectives, proportionnées et dissuasives (par. 3).

En ce qui concerne les ordonnances d'injonction ou de protection ainsi que les mesures de protection des victimes, on se réfèrera aux explications relatives aux art. 34, 51 et 52.

230

FF 2017

Les mesures de protection au sens de l'art. 28b CC sont applicables indépendamment des autres procédures. Les injonctions et interdictions peuvent être assorties de la menace d'une peine conformément à l'art 292 CP (insoumission à une décision de l'autorité) selon lequel celui qui ne se sera pas conformé à une décision à lui signifiée, sous la menace de la peine prévue au présent article, par une autorité ou un fonctionnaire compétents sera puni d'une amende.

La victime, au sens où l'entend la LAVI, et ses proches (art. 1 LAVI) peuvent s'adresser aux centres de consultation mis en place à leur intention par les cantons (art. 9 ss LAVI)225. Ces centres conseillent la victime et ses proches et les aident à faire valoir leurs droits. En cas de besoin, les centres procurent un hébergement d'urgence (art. 14, al. 1, LAVI). L'aide fournie est gratuite pour la victime et ses proches (art. 5 LAVI). Le juge qui prononce des mesures de protection doit respecter le principe fondamental de la proportionnalité énoncé dans la Cst. (voir art. 5, al. 2, et 36, al. 3, Cst.), notamment en ce qui concerne la durée des mesures. Il décide d'une éventuelle limitation de ces mesures dans le temps selon son pouvoir discrétionnaire226. En outre, il est possible de demander une assistance judiciaire (art. 117 ss CPC).

La Suisse satisfait aux exigences posées par l'art. 53 de la convention.

2.6.6

Art. 54 Enquêtes et preuves

Les Parties s'assurent que, dans toute procédure civile ou pénale, les preuves relatives aux antécédents sexuels et à la conduite de la victime ne soient recevables que lorsque cela est pertinent et nécessaire. L'article limite ainsi l'admissibilité de telles preuves, dans les procédures civiles ou pénales, aux affaires dans lesquelles elles portent directement sur un des points spécifiques à trancher227.

L'art. 3 CPP souligne la nécessité de respecter la dignité de toutes les personnes impliquées dans une procédure pénale. L'art. 152, al. 1, CPP précise à cet égard que les autorités pénales doivent garantir les droits de la personnalité de la victime à tous les stades de la procédure. En vertu de l'art. 6, al. 1, CPP, les autorités pénales recherchent uniquement les faits pertinents pour la qualification de l'acte et le jugement du prévenu. En conséquence, l'art. 139, al. 2, CPP précise qu'il n'y a pas lieu d'administrer des preuves sur des faits non pertinents. Les personnes victimes d'infraction contre leur intégrité sexuelle, dont la protection est l'une des finalités de l'art. 54, peuvent aussi invoquer l'art. 169, al. 4, CPP: une victime peut, dans tous les cas, refuser de répondre aux questions qui ont trait à sa sphère intime. Le droit de refuser de témoigner s'applique aussi aux questions sans lien avec les infractions à instruire, comme les questions portant sur la conduite sexuelle générale de la vic-

225 226

Liste des centres de consultation disponible sur Internet: www.sodk.ch Initiative parlementaire Vermot-Mangold, 00.419 «Protection contre la violence dans la famille et dans le couple», rapport du 18 août 2005 de la Commission des affaires juridiques du Conseil national, FF 2005 6437, 6451 s.

227 Rapport explicatif de la convention, ch. 278

231

FF 2017

time. La règle énoncée à l'art. 169, al. 4, CPP est une règle absolue; elle prime l'obligation de déposer prévue dans l'art. 168, al. 4, CPP228.

En procédure civile, les parties ne peuvent présenter que des moyens de preuve fondés sur des faits pertinents (art. 150, al. 1, CPC); autrement, dit, les faits doivent être pertinents pour la qualification juridique du cas et la décision du tribunal. On se réfèrera au droit matériel229 pour savoir si tel est le cas.

Les conditions énoncées dans l'art. 54 de la convention sont ainsi satisfaites.

2.6.7

Art. 55 Procédures ex parte et ex officio

Les Parties doivent veiller à ce que les enquêtes ou les poursuites d'infractions établies conformément aux art. 35 (violence physique), 36 (violence sexuelle), 37 (mariages forcés), 38 (mutilations génitales) et 39 (avortement et stérilisation forcés) de la convention ne dépendent pas entièrement d'une dénonciation ou d'une plainte de la victime et à ce que la procédure puisse se poursuivre même si la victime se rétracte ou retire sa plainte (par. 1). Les Parties peuvent émettre une réserve et décider de ne pas appliquer ou d'appliquer de façon restreinte l'art. 55, par. 1, en ce qui concerne l'art. 35 à l'égard des infractions mineures (art. 78, par. 2, 3 e tiret).

A l'exception partielle de l'art. 123 CP (lésions corporelles simples), les infractions déterminantes sont poursuivies d'office. La situation juridique concernant l'art. 123 CP (et l'art. 126 CP, que la mise en oeuvre de la convention n'exige pas, voir ch.

2.5.7) se présente comme suit: les lésions corporelles simples et les voies de fait sont en principe des infractions poursuivies sur plainte. Elles sont néanmoins poursuivies d'office (art. 123, ch. 2, et 126, al. 2, CP), si l'auteur: ­

s'en est pris à une personne hors d'état de se défendre ou à une personne, notamment à un enfant, dont il avait la garde ou sur laquelle il avait le devoir de veiller,

­

est le conjoint de la victime et que l'atteinte a été commise durant le mariage ou dans l'année qui a suivi le divorce,

­

est le partenaire enregistré de la victime et que l'atteinte a été commise durant le partenariat enregistré ou dans l'année qui a suivi sa dissolution judiciaire,

­

est le partenaire hétérosexuel ou homosexuel de la victime, pour autant que l'auteur et la victime fassent ménage commun pour une durée indéterminée et que l'atteinte ait été commise durant cette période ou dans l'année qui a suivi la séparation.

En ce qui concerne les voies de fait, l'auteur est censé avoir agi à réitérées reprises.

228

Voir le message du Conseil fédéral du 21 décembre 2005 relatif à l'unification du droit de la procédure pénale, FF 2006 1057 1180.

229 Christian Leu, in: Alexander Brunner, Dominik Gasser, Ivo Schwander (éd.), Schweizerische Zivilprozessordnung (ZPO) Kommentar, Zurich/St-Gall 2011, art. 150 N 48

232

FF 2017

Dans le champ d'application de la convention, les lésions corporelles simples (comme les voies de fait) sont en principe des infractions poursuivies d'office.

Demeurent néanmoins certaines formes connexes de lésions corporelles simples qui relèvent de la convention mais ne peuvent être poursuivies que sur plainte (par ex.

lésions corporelles simples commises sur des femmes dans l'espace public, ou dans l'espace privé entre frères et soeurs). Etant donné que la Suisse satisfait en grande partie aux exigences de la convention relatives aux infractions poursuivies d'office, et que par conséquent seule une petite partie des lésions corporelles simples relevant de la convention constitue des infractions poursuivies sur plainte, il ne serait pas rationnel de modifier le système différencié du droit national. C'est pourquoi la Suisse entend recourir à la possibilité évoquée plus haut d'émettre une réserve, de sorte que certaines formes modérées de violence physique ne soient pas poursuivies d'office. En ce qui concerne les actes de violence (légers) commis au sein d'un couple, l'art. 55a CP mérite aussi d'être mentionné. Conformément à son al. 1, le ministère public et les tribunaux peuvent suspendre la procédure, notamment en cas de lésions corporelles simples (art. 123, ch. 2, al. 3 à 5, CP) et de voies de fait réitérées (art. 126, al. 2, let. b, bbis et c, CP), si la victime est le conjoint de l'auteur et que l'atteinte a été commise durant le mariage ou dans l'année qui a suivi le divorce, si elle est le partenaire enregistré de l'auteur et que l'atteinte a été commise durant le partenariat enregistré ou dans l'année qui a suivi sa dissolution judiciaire, ou si elle est le partenaire hétérosexuel ou homosexuel de l'auteur et que l'atteinte a été commise durant la période de ménage commun ou dans l'année qui a suivi la séparation.

La procédure peut être suspendue si la victime le requiert ou donne son accord à la proposition de suspension (al. 1, let. b). Selon la jurisprudence du Tribunal fédéral, l'autorité n'est pas habilitée à poursuivre la procédure pénale contre la volonté de la victime230. La victime peut révoquer son accord pendant un délai de six mois (al. 2).

En l'absence de révocation, le classement de la procédure devient définitif (al. 3).

Cette règle de procédure fondée sur le CP
prend en compte les intérêts des victimes qui ne souhaitent pas engager de procédure pénale dans leur environnement social proche. Elle constitue une exception au principe de l'instruction d'office exigé par la convention en toutes circonstances, raison pour laquelle une réserve sera émise à ce sujet également.

Il n'en demeure pas moins important de réviser l'art. 55a CP dans le cadre du projet portant sur une meilleure protection des personnes touchées par la violence231.

L'objectif étant de décharger la victime, il convient notamment de modifier l'article 55a CP, respectivement la disposition correspondante du CPM, comme suit: premièrement, la décision de poursuivre la procédure pénale ne doit plus dépendre entièrement de l'expression de la volonté de la victime. La responsabilité de la suspension, de la reprise ou du classement de la procédure doit plutôt échoir aux autorités, aptes à prendre en compte et à évaluer des circonstances qui viennent s'ajouter à la déclaration de la victime. Il faut aussi tenir compte du comportement du prévenu, par exemple lorsqu'il participe à un groupe de parole pour personnes 230

Arrêt du Tribunal fédéral du 21 mars 2006 en la cause 6S.454/2004, consid. 3 avec référence à la FF 2003 1779 1783 s.; 6B 835/2009 du 21 décembre 2009, consid. 4.2 231 www.admin.ch > Sécurité > Projets législatifs en cours > Protection des victimes de violence domestique > Procédure de consultation. Les résultats de la procédure de consultation sont en cours d'évaluation.

233

FF 2017

violentes. Deuxièmement, il devrait devenir impossible de suspendre une procédure lorsqu'existe une suspicion de violences répétées. Si le prévenu a déjà été condamné pour avoir commis un acte punissable contre la vie et l'intégrité corporelle, la liberté ou l'intégrité sexuelle de sa ou son partenaire actuel ou passé, la suspension ne sera plus admise. Troisièmement, la victime sera entendue encore une fois avant le classement de la procédure et devra confirmer sa volonté de classer celle-ci. Ces modifications mettent en oeuvre la motion Keller-Suter232 et les observations et constats issus du rapport en réponse à la motion Heim233. Elles permettent également de répondre dans une plus large mesure aux exigences de la convention.

En vertu du par. 2, les Parties garantissent la possibilité, pour les organisations gouvernementales et non gouvernementales ainsi que les conseillers spécialisés dans la violence domestique, d'assister et/ou de soutenir les victimes, sur demande de leur part. Ces services ne sont pas juridiques mais pratiques ou psychologiques 234. Les victimes, au sens où l'entend le CPP, peuvent se faire accompagner d'une personne de confiance en sus de leur conseil juridique (art. 152, al. 2, CPP).

Les exigences posées par l'art. 55 de la convention sont entièrement satisfaites, moyennant recours à la possibilité de réserve susmentionnée.

2.6.8

Art. 56 Mesures de protection

Aux termes du par. 1, les Parties prennent les mesures nécessaires pour protéger les droits et les intérêts des victimes, y compris leurs besoins spécifiques en tant que témoins, à tous les stades des enquêtes et des procédures judiciaires. La convention requiert notamment les mesures suivantes: Selon la let. a, les Parties doivent veiller à ce que les victimes, ainsi que leurs familles et les témoins à charge, soient à l'abri des risques d'intimidation, de représailles et de nouvelle victimisation. Les art. 149 ss CPP, déjà évoqués en amont (voir les explications relatives aux art. 26 et 50 de la convention) recensent diverses mesures de protection que peut prononcer la direction de la procédure, sur demande ou d'office. Pour ce faire, elle doit avoir lieu de craindre qu'un témoin, une personne appelée à donner des renseignements, ou encore une personne ayant avec ces derniers un lien de parenté ou une autre relation personnelle (art. 168, al. 1 à 3, CPP) puissent en raison de leur participation à la procédure être exposés à un danger sérieux menaçant leur vie ou leur intégrité corporelle ou à un autre inconvénient grave. A cette fin, la direction de la procédure peut limiter de façon appropriée les droits de procédure des parties et notamment assurer l'anonymat de la personne à protéger, procéder à des auditions en l'absence des parties ou à huis clos, vérifier l'identité de la personne à protéger en l'absence des parties ou à huis clos, modifier l'apparence et la voix de la personne à protéger ou la masquer à la vue des autres personnes ou limiter le droit de consulter le dossier (art. 149, al. 2, let. a à e, CPP).

En vertu de l'art. 169, al. 3, CPP, une personne peut refuser de témoigner si ses 232 233 234

234

12.4025 «Mieux protéger les victimes de violences domestiques» 09.3059 «Endiguer la violence domestique» Rapport explicatif de la convention, ch. 282

FF 2017

déclarations sont susceptibles d'exposer sa vie ou son intégrité corporelle ou celles d'un proche au sens de l'art. 168, al. 1 à 3, CPP à une menace sérieuse ou de l'exposer à un autre inconvénient majeur que des mesures de protection ne permettent pas de prévenir.

La victime peut exiger des autorités pénales qu'elles évitent une confrontation avec le prévenu. A cette fin, la victime peut être auditionnée en l'absence des parties et son apparence et sa voix peuvent être modifiées ou masquées (art. 152, al. 3, en relation avec l'art. 149, al. 2, let. b et d, CPP; voir aussi les explications relatives à la let. g).

La let. b oblige les Parties à informer les victimes lorsque l'auteur de l'infraction s'évade ou est libéré temporairement ou définitivement, au moins dans les cas où les victimes et la famille pourraient être en danger. L'art. 214, al. 4, CPP prévoit d'informer la victime au sens du CPP de la mise en détention provisoire ou en détention pour des motifs de sûreté du prévenu, de sa libération de cette mesure de contrainte ou de son évasion, à moins qu'elle ne s'y soit expressément opposée.

L'information n'est pas divulguée lorsqu'elle risque de faire peser un sérieux danger sur le prévenu.

Les informations concernant la libération d'une personne condamnée sont définies partiellement dans le droit cantonal. L'art. 21 de la loi du canton de Berne du 25 juin 2003 sur l'exécution des peines et mesures235 prévoit par exemple qu'une victime au sens de l'art. 1, al. 1, LAVI peut, sur demande motivée, être informée à l'avance de la date et de la durée des congés et de la date d'interruption de la détention, de la libération anticipée ou définitive de la personne détenue, de l'évasion de cette personne et de son arrestation. Au niveau fédéral, l'art. 92a CP, qui règle le droit à l'information des victimes et de leurs proches, est entré en vigueur le 1 er janvier 2016.

Conformément à la let. c, les victimes doivent être informées du déroulement de l'enquête ou de la procédure qui les concerne en leur qualité de victime. En d'autres termes, elles sont tenues informées de leurs droits et des services à leur disposition mais aussi des suites données à leur plainte, des chefs d'accusation retenus, du déroulement général de l'enquête ou de la procédure, de leur rôle au sein de celle-ci ainsi que de
la décision rendue.

Les victimes au sens du CPP bénéficient du droit à l'information (art. 117, al. 1, let. e, CPP). Lors de sa première audition par la police ou le ministère public (art. 305 CPP), ou au plus tard lors de la préparation des débats (art. 330, al. 3, CPP), la victime est informée sur ses droits et devoirs dans le cadre de la procédure pénale, sur les adresses et les fonctions des centres de consultation, sur la possibilité de solliciter diverses prestations relevant de l'aide aux victimes et sur le délai imparti pour introduire une demande d'indemnisation et de réparation morale. La victime reçoit en outre des informations sur la suspension de l'instruction (art. 314, al. 4, CPP) et le ministère public lui notifie l'ordonnance de non-entrée en matière (art. 310 en relation avec l'art. 321, al. 1, let. b, CPP), l'ordonnance de classement (art. 321, al. 1, let. b, CPP) ainsi que l'acte d'accusation et un éventuel rapport final 235

RSB 341.1

235

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(art. 327, al. 1, let. c, CPP). L'art. 105, al. 2, CPP prévoit par ailleurs que même si la victime ne s'est pas (encore) constituée partie plaignante, elle se voit reconnaître la qualité de partie dans la mesure nécessaire à la sauvegarde de ses intérêts, lorsqu'elle est directement touchée dans ses droits. Cette reconnaissance lui confère le droit d'être entendu (art. 107 CPP) et, partant, le droit de consulter le dossier (art. 101 CPP). Lorsqu'elle s'est constituée partie plaignante, la victime obtient la qualité de partie, qui s'accompagne par exemple d'un droit de participation aux auditions et aux inspections effectuées par le ministère public et les tribunaux (art. 147 CPP). La partie plaignante est en outre convoquée aux débats (art 331, al. 4, CPP) et se voit notifier le jugement du tribunal (art. 351, al. 3, en relation avec l'art. 84 CPP).

Selon le rapport explicatif de la convention, les proches des victimes ont le droit de recevoir eux aussi une information adéquate. Le CPP les mentionne expressément, à plusieurs reprises. On entend par proches de la victime, au sens du CPP, son conjoint, ses enfants, ses père et mère et les autres personnes ayant avec elle des liens analogues (art. 116, al. 2, CPP). Ils reçoivent, au même titre que les victimes, des informations sur l'aide aux victimes et sur leurs droits et devoirs dans le cadre de la procédure pénale (art. 305, al. 4, CPP). Lorsque les proches de la victime se portent parties civiles contre les prévenus, ils jouissent des mêmes droits que la victime (art. 117, al. 3, CPP). Ils peuvent se constituer partie plaignante, dans la mesure où ils font valoir contre le prévenu des conclusions civiles propres (art. 122, al. 2, CPP), ce qui leur confère la qualité de partie et l'ensemble des droits qui en découlent.

En vertu de la let. d, les Parties sont tenues de donner aux victimes la possibilité d'être entendues, de fournir des éléments de preuve et de présenter leurs vues, besoins et préoccupations, directement ou par le recours à un intermédiaire, et que ceux-ci soient examinées. Dans le CPP, la victime doit systématiquement se constituer partie plaignante pour obtenir la qualité de partie et les droits qui en découlent (art. 104, al. 1, let. b, et 118 ss CPP). D'une manière générale, une partie qui se voit accorder le droit d'être
entendue peut notamment consulter le dossier, participer à des actes de procédure, se faire assister par un conseil juridique, se prononcer au sujet de la cause et de la procédure et déposer des propositions relatives aux moyens de preuve (art. 107, al. 1, CPP). En sa qualité de partie, la victime peut par exemple présenter des requêtes à la direction de la procédure (art. 109, al. 1, CPP).

Aux termes de la let. e, les Parties doivent fournir aux victimes une assistance appropriée pour que leurs droits et intérêts soient dûment présentés et pris en compte.

Comme on l'a vu plus haut, le CPP prévoit la possibilité, pour une victime, de participer à la procédure en tant que partie plaignante, ce qui lui confère le droit de se faire assister par un conseil juridique pour défendre ses intérêts (art. 107, al. 1, let. c, et 127, CPP). Lorsque certaines conditions sont réunies, la direction de la procédure peut accorder l'assistance judiciaire gratuite à la partie plaignante afin de lui permettre de faire valoir ses prétentions civiles (art. 136 CPP, voir aussi les explications relatives à l'art. 57 de la convention).

En vertu de la let. f, les Parties veillent à ce que des mesures puissent être prises pour protéger la vie privée et l'image de la victime, et notamment prévenir la diffusion publique de toute information pouvant permettre d'identifier les victimes. La victime au sens du CPP bénéficie du droit à la protection de la personnalité (art. 117, al. 1, 236

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let. a, CPP). Si des intérêts dignes de protection de la victime l'exigent, le tribunal peut restreindre partiellement la publicité de l'audience ou ordonner le huis clos (art.

70, al. 1, let. a, CPP, voir aussi l'al. 3). En application de l'art. 74, al. 4, CPP, les autorités et les particuliers ne sont habilités, en dehors d'une audience publique de tribunal, à divulguer l'identité de la victime qu'à des conditions bien précises.

La let. g enjoint aux Parties de veiller, lorsque cela est possible, à ce que les contacts entre les victimes et les auteurs d'infractions à l'intérieur des tribunaux et des locaux des services répressifs soient évités. Le CPP traite cette question à l'art. 152, al. 3, en relation avec l'art. 149, al. 2, let. b et d, CPP. Conformément à cet article, la victime peut exiger que les autorités pénales lui évitent d'entrer en contact avec le prévenu. Dans ce cas, les autorités tiennent compte autrement du droit du prévenu à être entendu. Elles peuvent auditionner la victime en l'absence des parties ou à huis clos, modifier son apparence et sa voix ou la masquer à la vue des autres personnes.

L'expression «entrer en contact» ne désigne pas seulement la confrontation mais aussi toute rencontre entre victime et prévenu dans la sphère d'influence des autorités pénales. Ces dernières sont donc tenues de prendre les mesures appropriées pour éviter que la victime n'entre en contact avec le prévenu, par exemple lorsqu'elle attend son audition. La confrontation peut toutefois être ordonnée dans des circonstances précises (art. 152, al. 4, et 153, al. 2, CPP; pour les victimes mineures: art. 154, al. 4, let. a, CPP); la convention n'exclut pas ce cas de figure puisqu'elle spécifie que le contact doit être évité «lorsque cela est possible».

Chaque Partie s'assure, en application de la let. h, que les victimes sont assistées d'interprètes indépendants et compétents lorsqu'elles sont parties aux procédure ou lorsqu'elles fournissent des éléments de preuve. Aux termes de l'art. 68, al. 1, CPP, la direction de la procédure fait appel à un traducteur ou à un interprète lorsqu'une personne participant à la procédure ne comprend pas la langue de la procédure ou n'est pas en mesure de s'exprimer suffisamment bien dans cette langue. L'indépendance du traducteur ou de l'interprète est garantie
dans la mesure où les motifs de récusation lui sont applicables (art. 56 en relation avec l'art. 183, al. 3, en relation avec l'art. 68, al. 5, CPP). Une traduction volontairement erronée est punissable (art. 184, al. 2, let. f, CPP, en relation avec l'art. 307, CP). Peuvent être désignées comme traducteur ou interprète les personnes qui possèdent les connaissances et les compétences nécessaires (art. 68, al. 5, en relation avec l'art. 183, al. 1, CPP). Si la victime qui s'est constituée partie plaignante ou son représentant légal ne sont pas à même, pour des raisons linguistiques, de s'orienter dans la procédure et de faire valoir leurs intérêts, ils peuvent bénéficier d'un conseil juridique gratuit (art. 136, al. 2, let. c, CPP), à condition que la partie plaignante soit indigente et que l'action civile ne paraisse pas vouée à l'échec (art. 136, al. 1, let. a et b, CPP).

La let. i prévoit la possibilité, pour les victimes, de témoigner en salle d'audience sans être présentes, ou du moins sans que l'auteur présumé de l'infraction ne soit présent, en faisant notamment appel aux technologies de communication appropriées, si elles sont disponibles. Le CPP satisfait ces exigences (voir aussi les explications relatives aux let. a et g).

Le par. 2 prescrit des mesures de protection spécifiques pour les enfants. A propos du statut des enfants comme témoins dans une procédure pénale, prière de se reporter aux explications relatives à l'art. 26. Si les enfants sont des victimes au sens de 237

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l'art. 116, al. 1, CPP, ils bénéficient notamment des droits particuliers énoncés à l'art. 117, al. 1 et 2, CPP, qui ont déjà été évoqués. En vertu de l'art. 319, al. 2, CPP, le ministère public peut classer à titre exceptionnel la procédure à laquelle participe une victime mineure, si certaines conditions sont réunies. L'intérêt de l'Etat à la poursuite pénale passe au second plan. Cette disposition tient ainsi compte de la forte pression qu'une procédure pénale peut faire peser sur un enfant.

Les exigences posées par l'art. 56 de la convention sont ainsi satisfaites.

2.6.9

Art. 57 Aide juridique

L'art. 57 impose aux Parties de veiller à ce que les victimes aient droit à une assistance juridique et à une aide juridique gratuite selon les conditions prévues par leur droit interne.

En sa qualité de lésé, de témoin ou de partie plaignante, la victime peut se faire assister d'un conseil juridique pour défendre ses intérêts (art. 127, al. 1, en relation avec les art. 105 et 107, al. 1, let. c, CPP). La direction de la procédure peut en outre accorder l'assistance judiciaire gratuite à la partie plaignante pour lui permettre de faire valoir ses prétentions civiles (art. 136 CPP). Cette assistance qui, en vertu de l'art. 136, al. 2, let. c, CPP, comprend aussi la désignation d'un conseil juridique gratuit lorsque la défense des intérêts de la partie plaignante l'exige, est accordée à condition que la partie plaignante soit indigente et que l'action civile ne paraisse pas vouée à l'échec (art. 136, al. 1, let. a et b, CPP).

Si ces conditions sont réunies, la victime peut se voir accorder une assistance judiciaire gratuite aux termes de l'art. 117, en relation avec l'art. 118, al. 1, let. c, CPC, dès lors qu'elle engage une procédure exclusivement civile contre l'auteur. Si les conditions donnant droit à une assistance judiciaire gratuite ne sont pas remplies, les frais d'avocat peuvent éventuellement être pris en charge par un centre de consultation LAVI (art. 13 et 14 LAVI). C'est ce qui peut se produire par exemple lorsque la victime se constitue partie pénale mais pas partie civile (art. 119, al. 2, CPP), parce qu'elle dépend économiquement du prévenu. L'aide accordée par un centre de consultation LAVI est une aide subsidiaire à l'assistance judiciaire prévue à l'art. 136 CPP.

La mise en oeuvre de l'art. 57 de la convention est ainsi réalisée.

2.6.10

Art. 58 Prescription

Les Parties doivent prendre les mesures nécessaires pour que les délais de prescription applicables aux infractions définies aux art. 36 (violence sexuelle), 37 (mariages forcés), 38 (mutilations génitales) et 39 (avortement et stérilisation forcés) de la convention continuent de courir pour une durée suffisante et proportionnelle à la gravité de l'infraction, afin de permettre d'engager la procédure après que la victime a atteint la majorité. Les Parties peuvent émettre une réserve et décider de ne pas

238

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appliquer cette exigence concernant les art. 37, 38 et 39 ou de ne l'appliquer que dans des cas ou conditions spécifiques (art. 78, al. 2, 4e tiret).

En vertu de l'art. 97, al. 2, CP, la prescription de l'action pénale pour les actes d'ordre sexuel avec des enfants (art. 187 CP) ou des personnes dépendantes (art. 188 CP) et pour les infractions définies aux art. 122, 124 et 189 à 191 CP, dirigées contre des enfants de moins de seize ans, court en tout cas jusqu'au jour où la victime a 25 ans. Si la victime est âgée de seize ans ou plus au moment des faits, le délai de prescription ordinaire est de quinze ans. De plus, l'art. 101, al. 1, let. e, CP est entré en vigueur le 1er janvier 2013: il concrétise l'art. 123b Cst. en prévoyant que les infractions aux art. 187, ch. 1, 189, 190, 191, 192, al. 1, et 193, al. 1, sont imprescriptibles lorsqu'ils ont été commis sur des enfants de moins de 12 ans. Les délais de prescription pour la poursuite des infractions couvertes par les art. 36, 38 et 39 (concernant la stérilisation forcée que l'art. 122 CP considère comme une lésion corporelle grave) sont donc suffisamment longs pour répondre aux exigences de la convention.

Le délai de prescription ordinaire de quinze ans (art. 97, al. 1, let. b, CP) s'applique aux infractions de mariage forcé (art. 181a CP et 37 de la convention) et d'avortement forcé (art. 118, al. 2, CP et 39 de la convention). Ce délai est suffisant pour l'avortement forcé étant donné que l'infraction à l'égard de jeunes enfants est irréalisable pour des raisons biologiques. On peut se demander en revanche si le droit en vigueur satisfait les exigences de la convention dans le cas du mariage forcé. En Suisse, les mariages avec des mineurs sont considérés comme nuls au regard du droit civil. Si un enfant âgé d'à peine dix ans subit un mariage forcé à l'étranger et qu'une poursuite pénale est engagée en Suisse des années plus tard, le délai de prescription ordinaire de quinze ans est suffisamment long pour répondre aux exigences de la convention. Dans les faits, il correspond en outre à l'extension du délai de prescription pour des infractions spécifiques prévue à l'art. 97, al. 2, CP, en vertu duquel la prescription de l'action pénale court en tout cas jusqu'au jour où la victime a 25 ans. Dans la pratique, les cas où l'enfant victime d'un
mariage forcé est encore plus jeune sont rares. Seuls les mariages forcés d'enfants âgés de moins de cinq ans pourraient poser un problème au regard du délai de prescription prévu à l'art. 58 de la convention. Il n'y a aucune raison d'émettre une réserve pour prendre en compte ce cas théorique marginal.

Les exigences posées par l'art. 58 de la convention sont donc remplies.

2.7

Chapitre VII Migration et asile

2.7.1

Art. 59 Statut de résident

En vertu du par. 1, les Parties sont tenues de garantir que les victimes de violence domestique dont le statut de résident dépend de celui de leur conjoint ou de leur partenaire se voient accorder, en cas de situations particulièrement difficiles, un permis de résidence autonome, indépendamment de la durée du mariage ou de la relation. Les conditions relatives à l'octroi et à la durée du permis de résidence autonome sont fixées conformément au droit interne. Les Parties peuvent émettre 239

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une réserve et décider de ne pas appliquer l'art. 59 ou de ne l'appliquer que dans des cas ou conditions spécifiques (art. 78, al. 2, 5e tiret).

L'art. 50 LEtr accorde aux conjoints de ressortissants suisses ou d'étrangers titulaires d'un permis C le droit à l'octroi d'une autorisation de séjour ou à la prolongation de sa durée de validité après dissolution de la famille, notamment lorsque la poursuite du séjour en Suisse s'impose pour des raisons personnelles majeures. Les raisons personnelles majeures sont notamment données lorsque le conjoint est victime de violence conjugale, que le mariage a été conclu en violation de la libre volonté d'un des époux ou que la réintégration sociale dans le pays de provenance semble fortement compromise. En revanche, les conjoints d'étrangers titulaires d'une autorisation de séjour à l'année ou d'une autorisation de courte durée (permis B et L, art. 44 et 45 LEtr) ne bénéficient pas de ce droit. Pour ces groupes de personne, la prolongation de l'autorisation pour des raisons personnelles majeures est laissée à l'appréciation du service des migrations compétent (art. 77 de l'ordonnance du 24 octobre 2007 relative à l'admission, au séjour et à l'exercice d'une activité lucrative, OASA236). La prolongation de l'admission provisoire et l'examen ultérieur des cas de rigueur au sens de l'art. 84, al. 5, LEtr peuvent tenir compte de motifs importants comme la violence conjugale pour les conjoints de personnes admises provisoirement (art. 85, al. 7, LEtr). Mais là encore, les personnes concernées ne peuvent pas exiger l'application d'une disposition en ce sens.

Le par. 1 prévoit aussi d'octroyer par analogie un droit de séjour aux partenaires.

En Suisse, il convient d'utiliser plutôt le terme de concubin, pour éviter la confusion avec la notion de partenariat enregistré entre personnes du même sexe. Cela signifie que lorsqu'une personne étrangère admise au titre du regroupement familial avec son concubin est victime de violence conjugale, elle peut se voir accorder une autorisation de séjour pour cas de rigueur après sa séparation. Dans les faits, ces cas sont rares car les conditions d'admission des concubins sont très restrictives. Néanmoins, l'art. 30, al. 1, let. b, LEtr fournit la base légale légitimant une admission pour des motifs personnels majeurs, même s'il
ne s'agit pas d'un droit à proprement parler.

Dans la législation suisse, le droit à une autorisation de séjour dépend du statut de résident des personnes concernées. Puisque l'art. 59 consacre pleinement ce droit et délègue uniquement les modalités d'application au droit national, la Suisse utilisera la possibilité de réserve mentionnée; ainsi les conjoints ou concubins de personnes titulaires d'une autorisation de séjour à l'année ou d'une autorisation de courte durée ou de personnes admises provisoirement, qui sont victimes de violence au sein de leur couple, ne pourront pas exiger un permis de résidence autonome en cas de dissolution du mariage ou de la relation.

Le par. 2 se réfère au cas où la victime, venue en Suisse au titre du regroupement familial, doit quitter le pays avec son conjoint ou son concubin si celui-ci est renvoyé. Etant donné que l'autorisation de séjour d'une personne venue en Suisse dans le cadre du regroupement familial dépend de l'autorisation de séjour de la personne ayant demandé le regroupement familial, il faudrait accorder un sursis à exécution pour permettre à la victime d'obtenir une autorisation de séjour autonome pour

236

240

RS 142.201

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raisons humanitaires237. Les mesures requises dans le par. 2 correspondent à la pratique en vigueur en Suisse. Si une victime faisant l'objet d'une procédure d'expulsion (en terminologie suisse, procédure de révocation ou de renvoi) dirigée contre les deux conjoints (ou concubins) fait valoir auprès des autorités qu'elle subit des violences conjugales, l'octroi d'une autorisation de séjour autonome au sens de l'art. 59 de la convention et des art. 50 LEtr et 77 OASA peut être envisagé pour la victime, dans le cadre de la procédure en cours. Dans ce cas, le recours a en principe un effet suspensif. Les exigences du par. 2 sont donc remplies.

Le par. 3 exige des Parties qu'ils délivrent un permis de résidence renouvelable à une victime de violence domestique ou de violence à l'égard des femmes lorsque l'autorité compétente considère que la poursuite de son séjour en Suisse est nécessaire au regard de sa situation personnelle (let. a). Des facteurs comme la santé de la victime, sa sécurité, sa situation familiale ou la situation dans son pays d'origine doivent être pris en compte238. Ces facteurs correspondent aux critères d'évaluation d'un cas de rigueur après séparation, au sens des art. 50, al. 1, let. b, et 2, LEtr et 77 OASA, en relation avec l'art. 31, al. 1, OASA, sur la base desquels ces cas sont examinés en Suisse. Les victimes doivent pouvoir aussi obtenir un permis de résidence lorsque l'autorité compétente considère que son séjour est nécessaire aux fins de sa coopération avec les autorités compétentes dans le cadre d'une enquête ou d'une procédure pénale (let. b). L'art. 36 OASA constitue une base juridique explicite pour les victimes et les témoins de la traite d'êtres humains. Dans tous les autres cas, par exemple lorsqu'une procédure pénale pour violence conjugale est en cours, il est possible de délivrer une autorisation de séjour en application de l'art. 30, al. 1, let. b, LEtr en relation avec l'art. 32, al. 1, let. d, OASA pour sauvegarder l'intérêt public important que présente la nécessité de la présence d'un étranger pendant la durée de la procédure. La Suisse dispose donc des bases légales requises au par. 3.

Le par. 4 fait obligation aux Parties de prendre les mesures nécessaires pour que les victimes de mariages forcés ame nées dans un autre pays aux fins de ce mariage,
et qui perdent en conséquence leur statut de résident puissent recouvrer ce statut, notamment dans le cas de la dissolution du mariage. Si un étranger quitte la Suisse sans déclarer son départ, l'autorisation de courte durée prend automatiquement fin après trois mois et l'autorisation de séjour ou d'établissement après six mois (art. 61, al. 2, LEtr). Si l'étranger déclare son départ de Suisse, l'autorisation prend fin immédiatement (art. 61, al. 1, let. a, LEtr). Peuvent être réadmis les étrangers qui ont déjà été en possession d'une autorisation de séjour ou d'établissement, si leur précédent séjour en Suisse a duré cinq ans au moins et n'était pas seulement de nature temporaire (art. 34, al. 5, LEtr) et si leur libre départ de Suisse ne remonte pas à plus de deux ans (art. 49, al. 1, OASA). Dans tous les autres cas, une admission est envisageable pour tenir compte des cas individuels d'une extrême gravité (art. 30, al.

1, let. b, LEtr). Etant donné que l'octroi de ces autorisations est laissé à l'appréciation des autorités compétentes et ne confère aucun droit, la Suisse utilisera la possibilité de réserve prévue.

237 238

Rapport explicatif de la convention, ch. 306 Rapport explicatif de la convention, ch. 307

241

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Les conditions de l`art. 59 de la convention sont donc remplies, moyennant les réserves précitées concernant les paragraphes 1 et 4.

2.7.2

Art. 60 Demandes d'asile fondées sur le genre

En vertu du par. 1, les Parties doivent prendre les mesures nécessaires pour que la violence fondée sur le genre soit reconnue comme une forme de persécution au sens de l'art. 1, par. A, ch. 2, de la Convention du 28 juillet 1951 relative au statut des réfugiés239 et puisse conduire à l'octroi du statut de réfugié240, et qu'elle soit reconnue comme une forme de préjudice grave donnant lieu à une protection complémentaire ou subsidiaire.

En Suisse, la convention relative au statut des réfugiés est en vigueur depuis le 21 avril 1955. Sur le plan national, la violence fondée sur le genre est assimilée à une persécution en raison de l'appartenance à un groupe social déterminé (art. 3, al. 1, de la loi du 26 juin 1998 sur l'asile [LAsi]241). En outre, l'art. 3, al. 2, 2e phrase, LAsi inscrit dans la loi la notion de sérieux préjudices auxquels sont exclusivement exposées les femmes en introduisant la phrase «Il y a lieu de tenir compte des motifs de fuite spécifiques aux femmes».

La convention prévoit en outre d'accorder une protection internationale à des femmes qui ne remplissent pas les conditions leur permettant d'obtenir la qualité de réfugié mais qui, en cas de renvoi dans leur pays d'origine ou de résidence antérieure, seraient exposées à la violence fondée sur le genre, ce qui constituerait un traitement inhumain ou dégradant ou menacerait gravement la vie de la personne concernée. La disposition en question bénéficie des garanties de l'art. 3 CEDH (voir aussi l'art. 61 de la présente convention). En vertu de cet art. 3, nul ne peut être soumis à la torture ni à des peines ou traitements inhumains ou dégradants; de même, nul ne doit être expulsé s'il y a de sérieuses raisons de penser qu'après son renvoi, la personne risque de subir des persécutions au sens de l'art. 3 CEDH. Par ailleurs, il convient d'examiner si un renvoi de Suisse peut être raisonnablement exigé. Tel n'est pas le cas lorsque l'intérêt privé à la poursuite du séjour en Suisse l'emporte sur l'intérêt public militant en faveur du renvoi de Suisse, compte tenu des circonstances personnelles défavorables auxquelles la personne concernée serait confrontée en raison de la situation prévalant dans son pays d'origine (art. 83, al. 4, LEtr). Dans ce contexte, il convient de rappeler que trois postulats242 chargent le Conseil fédéral
de montrer dans un rapport comment améliorer le statut des étrangers admis à titre provisoire dans la loi sur l'asile et dans la loi sur les étrangers ou de trouver une nouvelle réglementation.

Le par. 2 oblige les Parties à adopter une interprétation de la convention relative au statut des réfugiés qui soit sensible au genre. Tous les facteurs pouvant entraîner 239 240 241 242

242

RS 0.142.30 Rapport explicatif de la convention, ch. 311 RS 142.31 11.3954 «Limitation de l'admission provisoire», 13.3844 «Admission provisoire. Une nouvelle réglementation pour davantage de transparence et d'équité», 14.3008 «Réexamen du statut des étrangers admis à titre provisoire et des personnes à protéger»

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l'octroi du statut de réfugié doivent faire l'objet d'une interprétation sensible au genre. La législation suisse répond à cette exigence à travers l'art. 3, al. 2, 2e phrase, LAsi, lequel prévoit qu'il y a lieu de tenir compte des motifs de fuite spécifiques aux femmes dans tous les aspects qui caractérisent la persécution.

Le par. 3 exige des Parties qu'elles garantissent un traitement sensible au genre pour tous les demandeurs d'asile pendant la procédure d'asile. Ce traitement s'étendra à l'accueil, aux services de soutien, aux employés des Parties qui y travaillent ainsi qu'à la procédure proprement dite. Les requérants d'asile doivent être logés dans des dortoirs non mixtes243. Lors d'une saisie d'objets, les requérants d'asile ne peuvent être fouillés que par des personnes du même sexe 244. Grâce à l'assurance obligatoire des soins, les requérants d'asile ont tous accès au système suisse de santé 245 et reçoivent les traitements médicaux nécessaires. Les personnes qui interviennent dans la procédure d'asile sont spécialement formées et sensibilisées à la problématique des persécutions fondées sur le genre. Il existe en outre au sein du SEM, compétent en la matière, un groupe de travail interne qui s'occupe de la question de la persécution fondée sur le genre. Ce groupe de travail élabore des supports de formation et des instruments de travail et répond aux questions soulevées à ce sujet.

Par ailleurs, l'art. 17, al. 2, LAsi délègue au Conseil fédéral la compétence d'édicter des dispositions complémentaires concernant la procédure d'asile, notamment pour qu'il soit tenu compte dans la procédure de la situation particulière des femmes et des mineurs. Le Conseil fédéral a ainsi édicté par voie d'ordonnance des règles spécifiques relatives aux procédures d'asile engagées par des femmes. L'art. 5 de l'ordonnance 1 du 11 août 1999 sur l'asile (OA 1) 246 énonce le droit des conjoints, partenaires enregistrés ou membres d'une famille à une procédure d'asile individuelle; les conjoints doivent être interrogés séparément lors de l'audition portant sur les motifs d'asile. L'art. 6 OA 1 précise que s'il existe des indices concrets de persécution fondée sur le genre, la personne requérant l'asile sera entendue par une personne du même sexe.

La Suisse satisfait par conséquent aux conditions posées par l'art. 60 de la convention.

2.7.3

Art. 61 Non-refoulement247

Le par. 1 demande aux Parties de prendre les mesures nécessaires pour respecter le principe de non-refoulement, conformément aux obligations existantes découlant du droit international. Le par. 2 prescrit que les victimes de violence à l'égard des femmes qui nécessitent une protection, indépendamment de leur statut ou lieu de 243 244 245

246 247

Art. 4 de l'ordonnance du DFJP du 24 novembre 2007 relative à l'exploitation des logements de la Confédération dans le domaine de l'asile, O du DFJP, RS 142.311.23 Art. 3, al. 2, O du DFJP.

Art. 3, al. 1, de la loi fédérale du 18 mars 1994 sur l'assurance-maladie, LaMal, RS 832.10, en relation avec l'art. 1, al. 2, let. c, de l'ordonnance du 27 juin 1995 sur l'assurance-maladie, OAMal, RS 832.102 RS 142.311 En Suisse, le législateur emploie les termes «interdiction du refoulement» ou «principe de non-refoulement».

243

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résidence, ne doivent en aucune circonstance être refoulées vers un pays où leur vie serait en péril et dans lequel elles pourraient être victimes de torture ou de peines ou traitements inhumains ou dégradants.

La validité et la mise en oeuvre de la convention relative au statut des réfugiés (notamment de son art. 33) et de la CEDH (notamment de son art. 3) sont garanties en Suisse. L'interdiction du refoulement est en outre consacrée dans le droit national, à l'art. 5 LAsi. Elle s'applique à tous, partant aussi à toutes les situations relevant du droit d'asile ou du droit des étrangers, et doit être respectée dans tous les cas de rapatriement. Ainsi, la Suisse a pris toutes les mesures, législatives ou autres, pour garantir l'application du principe de non-refoulement aux victimes de violence à l'égard des femmes.

Les exigences posées par l'art. 61 de la convention sont donc satisfaites.

2.8

Chapitre VIII Coopération internationale (art. 62 à 64)

2.8.1

Art. 62 à 64

La coopération internationale instaurée par la convention est administrative, pénale et civile. L'art. 62 couvre ces trois domaines, ce qui correspond d'ailleurs à la tendance actuellement ancrée dans les nouveaux instruments tant du Conseil de l'Europe qu'onusiens. L'objectif de la convention est d'établir une coopération qui réduit autant que possible les obstacles à la circulation rapide des informations et des preuves. L'obligation de coopérer a une portée générale. Selon l'art. 62, par. 1, il s'agit de prévenir, combattre et poursuivre les formes de violences couvertes par la convention (let. a), de protéger et d'assister les victimes (let. b), d'enquêter et de conduire les procédures concernant les infractions concernées (let. c) ainsi que d'appliquer les jugements civils et pénaux s'y rapportant après qu'ils aient été rendus par les autorités judiciaires des Parties (let. d). La Suisse est partie à divers instruments internationaux favorisant la coopération internationale telle que régie à l'art. 62248.

L'art. 62, par. 2, est inspiré de l'art. 11, par. 2 et 3, de la décision-cadre du Conseil de l'Union européenne du 15 mars 2001 relative au statut des victimes dans le cadre des procédures pénales249. Il vise à faciliter la possibilité pour une victime de porter plainte en lui permettant de déposer celle-ci auprès des autorités compétentes de son 248

Convention européenne d'entraide judiciaire en matière pénale du 20 avril 1959, RS 0.351.1 et son deuxième Protocole additionnel RS 0.351.12; Convention européenne d'extradition du 13 décembre 1957, RS 0.353.1 et ses deux protocoles additionnels RS 0.353.11, RS 0.353.12, RS 0.353.13, RS 0.353.14; Convention de La Haye du 19 octobre 1996 concernant la compétence, la loi applicable, la reconnaissance, l'exécution et la coopération en matière de responsabilité parentale et de mesures de protection des enfants (CLaH), RS 0.211.231.011; Convention de La Haye du 5 octobre 1961 concernant la compétence des autorités et la loi applicable en matière de protection des mineurs, RS 0.211.231.01 249 32001F0220 2001/220/JAI: décision-cadre du Conseil du 15 mars 2001 relative au statut des victimes dans le cadre de procédures pénales.

244

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Etat de résidence. Ces autorités peuvent alors engager une procédure ou transmettre la plainte aux autorités de l'Etat dans lequel les faits ont été commis. Cette transmission s'effectue conformément aux dispositions pertinentes des instruments de coopération applicables entre les Etats concernés250.

L'art. 62, par. 3, concerne les Etats tiers qui adhéreront à la convention et qui ne sont pas parties aux instruments pertinents en la matière. Pour la Suisse, il n'est pas nécessaire d'avoir un traité pour coopérer en matière judiciaire pénale avec les autres Etats, le droit interne permet une telle coopération et en fixe les conditions (EIMP).

Enfin, en vertu du par. 4, les Parties s'efforcent d'intégrer la prévention et la lutte contre la violence à l'égard des femmes et la violence domestique dans les programmes d'assistance au développement conduits au profit d'Etats tiers.

Dans le domaine pénal, la Suisse est active en relation avec les art. 63 et 64, en ce sens que l'autorité de poursuite pénale peut transmettre spontanément à une autorité étrangère, et donc sans demande préalable, des informations et des moyens de preuve qu'elle a recueillis au cours de sa propre enquête, lorsqu'elle estime que cette transmission est de nature à permettre d'ouvrir une poursuite pénale, ou peut faciliter le déroulement d'une enquête en cours251. La protection des enfants en matière civile prévoit aussi la transmission d'informations à une autorité étrangère lorsque l'intérêt juridiquement protégé de l'enfant l'exige. Les informations reçues de l'étranger par une autorité suisse sont à l'évidence communiquées aux autorités compétentes suisses afin d'être prises en compte dans les procédures civiles, pénales et administratives pertinentes.

Les art. 62 et 63 abordent également le sujet de l'exécution des jugements et autres ordonnances prononcées par une autorité. La loi fédérale du 18 décembre 1987 sur le droit international privé (LDIP)252 s'applique en l'occurrence pour toutes les questions relevant du droit civil. Quant aux relations avec les pays de l'UE et de l'AELE (à l'exception du Liechtenstein), elles sont réglées par la Convention du 30 octobre 2007 concernant la compétence judiciaire, la reconnaissance et l'exécution des décisions en matière civile et commerciale (convention de Lugano)253. Plusieurs
accords bilatéraux ont par ailleurs été signés. En revanche, il n'existe pas encore de convention multilatérale à laquelle la Suisse pourrait adhérer, qui serait consacrée à la reconnaissance et à l'exécution des mesures de protection étrangères. Cependant, la Conférence de La Haye de droit international privé examine actuellement l'opportunité d'un instrument juridique international dans le domaine cité254 et la Suisse est associée aux travaux. Une partie de la question est déjà réglée par les conventions de La Haye sur la protection des enfants et des adultes255.

250 251 252 253 254 255

Rapport explicatif de la convention, ch. 330 Art. 67a EIMP.

RS 291 RS 0.275.12 www.hcch.net > Projets > Projets législatifs > Ordonnances de protection Notamment la loi fédérale du 21 décembre 2007 sur l'enlèvement international d'enfants et les Conventions de La Haye sur la protection des enfants et des adultes, RS 211.222.32.

245

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Les exigences formulées par les art. 62 à 64 de la convention, qui pour une bonne part ne présentent pas de caractère impératif, sont par conséquent remplies.

2.8.2

Art. 65 Protection des données

En vertu de l'art. 65, les données personnelles sont conservées et utilisées conformément aux obligations contractées par les Parties à la Convention du 28 janvier 1981 pour la protection des personnes à l'égard du traitement automatisé des données à caractère personnel (STE no 108)256.

Cette convention est entrée en vigueur pour la Suisse le 1 er février 1998. Elle a pour objet de renforcer, dans les secteurs privé et public, la protection juridique des individus vis-à-vis du traitement automatisé des données à caractère personnel les concernant. Elle tend à assurer, dans tous les Etats, un minimum de protection de la personnalité lors du traitement de données personnelles et une certaine harmonisation du système de protection; d'autre part, elle garantit la circulation internationale des données en ce sens qu'aucun Etat partie ne peut interdire le transfert d'informations vers un autre Etat partie qui accorde la protection minimale prévue par elle.

La convention 108 est complétée par le Protocole additionnel du 8 novembre 2001 à la Convention pour la protection des personnes à l'égard du traitement automatisé des données à caractère personnel concernant les autorités de contrôle et les flux transfrontières de données257.

En Suisse, la protection des données personnelles est régie par la LPD 258. Cette loi vise à protéger la personnalité et les droits fondamentaux ­ et en particulier le droit à l'autodétermination en matière informationnelle garantie par l'art. 13, al. 2, Cst. ­ des personnes physiques et morales faisant l'objet d'un traitement de données personnelles (y compris de données sensibles ou de profils de la personnalité) par des personnes privées ou des organes fédéraux. Elle est conforme aux exigences de la convention 108.

Tant la convention 108 que la LPD sont en cours de révision.

Les exigences de l'art. 65 de la convention sont donc remplies.

2.9

Chapitre IX Mécanisme de suivi (art. 66 à 70)

La convention prévoit un mécanisme de suivi relativement poussé, destiné à assurer la mise en oeuvre de la convention par les Parties. Celui-ci repose sur deux piliers: un groupe d'experts indépendants en charge de la procédure d'évaluation de la mise en oeuvre de la convention, le GREVIO (art. 66), et une instance politique, le Comité des Parties (art. 67). En cela, il correspond au mécanisme mis en place pour la convention sur la lutte contre la traite des êtres humain 259.

256 257 258 259

246

RS 0.235.1 RS 0.235.11 RS 235.1 RS 0.311.543

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Le GREVIO est composé de dix membres au minimum et de quinze membres au maximum en tenant compte d'une participation équilibrée entre les femmes et les hommes ainsi que du point de vue géographique et d'une expertise multidisciplinaire. Ses membres sont élus par le Comité des Parties parmi des candidats désignés par les Parties, pour un mandat de quatre ans, renouvelable une fois (art. 66, par. 2).

Les critères d'élection prévus par la convention sont détaillés: personnalités de haute moralité connues pour leur compétence en matière de droits de l'homme, d'égalité entre les femmes et les hommes, de violence à l'égard des femmes et de violence domestique ou d'assistance et protection des victimes, ou ayant une expérience professionnelle reconnue dans les domaines couverts par la convention (art. 66, par. 4, let. a). En outre, les experts doivent ressortissants d'Etats différents et représenter d'une part les principaux systèmes juridiques et d'autre part les acteurs et instances pertinents dans le domaine de la violence à l'égard des femmes et la violence domestique (art. 66, par. 4, let. b, c et d). Ils ne représentent pas les Etats qui les ont désignés et siègent à titre individuel, sont indépendants et impartiaux dans l'exercice de leur mandat (art. 66, par. 4, let. e). Le Comité des Parties, composé des représentants des Parties à la convention (art. 67, par. 1), est principalement chargé d'élire les membres du GREVIO. Il permet d'assurer une participation sur un pied d'égalité de toutes les Parties dans la procédure de suivi et renforce la coopération, d'une part entre les Parties, d'autre part entre celles-ci et le GREVIO.

La procédure de suivi dirigée par le GREVIO débute par la soumission d'un premier rapport étatique présentant une vue d'ensemble des mesures pour donner effet à la convention (art. 68, par. 1). Pour alléger le travail de monitoring des Parties, la procédure d'évaluation ultérieure porte non pas sur l'ensemble de la convention, mais sur des dispositions particulières, selon des cycles déterminés par le GREVIO et sur la base de questionnaires thématiques (art. 68, par. 3). Subsidiairement, lorsque les informations reçues sont insuffisantes, le GREVIO peut organiser une visite dans le pays concerné, en collaboration avec les autorités nationales (art. 68, par. 9).

Le GREVIO
adopte ensuite son rapport et ses conclusions concernant les mesures prises par la Partie examinée, sur la base des informations récoltées, y compris celles qu'il peut recevoir des ONG, de la société civile, des institutions nationales de protection des droits de l'homme ainsi que des autres organes du Conseil de l'Europe, dont le Commissaire aux droits de l'homme (art. 68, par. 5, 8 et 11). Les conclusions du GREVIO résultent d'un dialogue mené avec la Partie concernée et sont publiées dans son rapport. De manière à donner une dimension politique à ce dialogue, le Comité des Parties, à qui le rapport a été transmis, peut adopter des recommandations indiquant certaines mesures à prendre (art. 68, par. 12).

L'une des plus-values du mécanisme de suivi de la convention réside dans la procédure spéciale selon laquelle le GREVIO est autorisé à demander la soumission d'un rapport par une Partie sur les mesures qu'elle a prises pour prévenir la réalisation d'un phénomène grave, massif ou persistant lié à un acte de violence couvert par la convention. La condition requise pour pouvoir demander un rapport spécial est que le GREVIO ait reçu des informations fiables indiquant une situation dans laquelle des problèmes nécessitent une attention immédiate. Sur la base des informations reçues, le GREVIO peut diligenter une enquête. Exceptionnellement, cette enquête peut inclure une visite dans le pays concerné (art. 68, par. 13 à 15). Selon les résultats, les conclusions de cette procédure spéciale donnent lieu à des recommandations 247

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qui sont transmises au Comité des Parties et au Comité des Ministres260. Une autre particularité et plus-value du mécanisme de suivi de la convention est que le GREVIO peut adopter des recommandations générales sur sa mise en oeuvre (art. 69). Les recommandations générales ont une signification commune à l'ensemble des Parties et ne visent pas spécifiquement un pays donné. Bien qu'elles n'aient pas de valeur contraignante, elles servent de référence aux Parties en permettant une meilleure compréhension des thèmes de la convention et en offrant des lignes directrices261. Vu le rôle important joué par les parlements nationaux dans la mise en oeuvre de la convention qui, dans de nombreux cas, pourra requérir des aménagements législatifs, il est prévu que les rapports et conclusions du GREVIO doivent leur être soumis (art. 70).

La mise en oeuvre par la Suisse du mécanisme de suivi de la convention devrait être proche de ce qui est pratiqué pour d'autres conventions du Conseil de l'Europe protégeant les droits de l'homme et ratifiées par la Suisse262, puisque ces systèmes de suivi ont servi de référence de base. Elle sera facilitée par la procédure d'évaluation fondée sur des questionnaires thématiques en lieu et place de rapports périodiques extensifs. De même, le fait que les visites sur place n'interviennent que subsidiairement et exceptionnellement allègera le travail des autorités nationales.

2.10

Chapitres X à XII Relations avec d'autres instruments internationaux, amendements à la convention et clauses finales (art. 71 à 81)

Ces dispositions reprennent pour l'essentiel les modalités arrêtées dans d'autres conventions du Conseil de l'Europe, en ce qui concerne le règlement de différends (art. 74), la signature et l'entrée en vigueur (art. 75), l'adhésion à la convention (art. 76), l'application territoriale (art. 77), les réserves (art. 78 et 79), la dénonciation (art. 80) et la notification (art. 81).

Pour entrer en vigueur, la convention doit avoir été ratifiée par un minimum de 10 signataires, dont au moins 8 Etats membres du Conseil de l'Europe (art. 75, par. 3). La convention est entrée en vigueur le 1er août 2014. Un Etat non-membre du Conseil de l'Europe qui n'a pas participé à l'élaboration de la convention peut néanmoins y adhérer, sur invitation du Comité des Ministres (art. 76). La convention peut être dénoncée à tout moment, moyennant un préavis de trois mois, en adressant une notification au Secrétaire Général du Conseil de l'Europe (art. 80).

260

Cette procédure spéciale s'inspire de la procédure d'enquête instituée par le protocole facultatif à la CEDEF (art. 8), entré en vigueur pour la Suisse le 29 décembre 2008, RS 0.108.1.

261 Cette procédure est également inspirée de la CEDEF (art. 21, par. 1). Au sein du Conseil de l'Europe, la Commission européenne contre le racisme et l'intolérance (ECRI) élabore aussi des recommandations de politique générale adressées aux gouvernements des Etats membres.

262 Ainsi la convention susmentionnée sur la lutte contre la traite des êtres humains ou la convention-cadre pour la protection des minorités nationales ratifiée par la Suisse le 21 octobre 1998, RS 0.441.1.

248

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Aucune réserve n'est admise à l'égard des dispositions de la convention, à l'exception des réserves expressément mentionnées (art. 78, par. 1). Les réserves admises sont énumérées dans une liste exhaustive (art. 78, par. 2). En outre, chaque Partie peut se réserver le droit de prévoir des sanctions non pénales, au lieu de sanctions pénales, pour les comportements mentionnés aux art. 33 et 34. (art. 78, par. 3). Les réserves prévues aux par. 2 et 3 de l'art. 78 sont valables cinq ans à compter du premier jour de l'entrée en vigueur de la convention pour la Partie concernée; elles peuvent être renouvelées pour des périodes de la même durée (art. 79, par. 1).

18 mois avant l'expiration de la réserve, le Secrétaire Général du Conseil de l'Europe informe la Partie concernée de cette expiration. Trois mois avant la date d'expiration, la Partie notifie au Secrétaire Général son intention de maintenir, de modifier ou de retirer la réserve (art. 79, par. 2).

3

Conséquences

3.1

Conséquences sur les finances et sur l'état du personnel de la Confédération

L'adhésion à la convention d'Istanbul n'aura pour la Confédération que des incidences minimes, tant sur le plan financier que sur le plan du personnel. Un effort supplémentaire lui sera demandé pour suivre la mise en oeuvre de la convention et pour mettre en place l'organe de coordination exigé par la convention, qui sera responsable de la coordination, de la mise en oeuvre, du suivi et de l'évaluation des mesures prises afin de prévenir et de combattre toutes les formes de violence à l'égard des femmes couvertes par la convention. Le domaine Violence domestique du BFEG est le mieux à même d'assumer les deux tâches susmentionnées. Il dispose du savoir-faire nécessaire et du réseau au niveau fédéral et cantonal indispensables pour mettre en oeuvre efficacement la convention, superviser les mesures et les évolutions en cours et rendre compte au groupe d'experts du Conseil de l'Europe chargé de contrôler la mise en oeuvre de la convention. Pour pouvoir mener à bien ces tâches, le BFEG aura besoin de personnel supplémentaire (un poste) et devra vraisemblablement créer un poste à cet effet; il devra également faire face à une augmentation de ses charges d'exploitation.

3.2

Conséquences sur les finances et sur l'état du personnel des cantons

Si elle se concrétise, la mise en place d'une ligne téléphonique unique pourrait entraîner des frais supplémentaires pour les cantons. Les ressources existantes devraient être suffisantes pour faire face aux éventuelles dépenses additionnelles dues à une coopération internationale accrue en matière de poursuites et de prévention.

249

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4

Relation avec le programme de législature

Le projet figure dans le message du 27 janvier 2016 sur le programme de la législature 2015 à 2019263et dans l'arrêté fédéral du 14 juin 2016 sur le programme de la législature 2015 à 2019264.

5

Aspects juridiques

5.1

Constitutionnalité

Le projet se fonde sur l'art. 54, al. 1, Cst. en vertu duquel les affaires étrangères relèvent de la compétence de la Confédération. L'art. 184, al. 2, Cst. autorise le Conseil fédéral à signer les traités internationaux et à les ratifier. Conformément à l'art. 166, al. 2, Cst., l'Assemblée fédérale a la compétence d'approuver les traités internationaux, à l'exception de ceux dont la conclusion relève de la seule compétence du Conseil fédéral en vertu d'une loi ou d'un traité international (art. 24, al. 2, LParl; art. 7a, al. 1, de la loi du 21 mars 1997 sur l'organisation du gouvernement et de l'administration265).

5.2

Forme de l'acte à adopter

Sont sujets au référendum les traités internationaux qui sont d'une durée indéterminée et ne sont pas dénonçables, prévoient l'adhésion à une organisation internationale, contiennent des dispositions importantes fixant des règles de droit ou dont la mise en oeuvre exige l'adoption de lois fédérales (art. 141, al. 1, let. d, Cst.). La convention est conclue pour une durée indéterminée mais elle peut être dénoncée à tout moment et ne prévoit pas d'adhésion à une organisation internationale. En vertu de l'art. 22, al. 4, LParl, sont réputées fixant des règles de droit les dispositions générales et abstraites d'application directe qui créent des obligations, confèrent des droits ou attribuent des compétences. Les dispositions qui doivent être édictées sous la forme d'une loi fédérale, conformément à l'art. 164, al. 1, Cst., sont considérées comme importantes. Le présent traité international n'exige pas l'adoption de lois fédérales, même s'il contient des dispositions importantes fixant des règles de droit, au sens de l'art. 164, al. 1, Cst. Il convient par conséquent d'assujettir l'arrêté fédéral portant approbation de la convention au référendum, conformément à l'art. 141, al. 1, let. d, ch. 3, Cst.

263 264 265

250

FF 2016 981 1063 FF 2016 4999 5005 RS 172.010

FF 2017

5.3

Frein aux dépenses

Le projet n'est pas soumis au frein aux dépenses au sens de l'art. 159, al. 3, let. b, Cst. car il ne contient pas de dispositions relatives à des subventions, à des crédits d'engagement ou à des plafonds de dépenses.

251

FF 2017

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