17.009 Rapport sur la politique extérieure 2016 du 11 janvier 2017

Messieurs les Présidents, Mesdames, Messieurs, Nous vous soumettons le rapport sur la politique extérieure 2016, en vous priant de bien vouloir en prendre acte.

Nous vous prions d'agréer, Messieurs les Présidents, Mesdames, Messieurs, l'assurance de notre haute considération.

11 janvier 2017

Au nom du Conseil fédéral suisse: La présidente de la Confédération, Doris Leuthard Le chancelier de la Confédération, Walter Thurnherr

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Condensé Le présent rapport brosse un tableau général de la politique extérieure menée par la Suisse en 2016. Sa forme et sa structure sont conformes à la décision de 2011 du Conseil fédéral, qui chargeait le Département fédéral des affaires étrangères (DFAE) de soumettre pour chaque année civile un rapport sur les activités de politique extérieure du pays. La Commission de politique extérieure du Conseil des États ayant demandé que ces activités fassent l'objet d'un seul et unique rapport annuel (postulat 06.3417), une annexe retrace les activités de la Suisse au Conseil de l'Europe.

En exécution de la motion 10.3212 («Pour une stratégie claire en matière de politique extérieure»), le Conseil fédéral a adopté en février 2016 un deuxième rapport sur les axes stratégiques de la politique étrangère pour la législature (stratégie de politique étrangère 2016­2019), dans lequel sont définis les axes stratégiques suivants: relations avec l'Union européenne et avec les États de l'UE/AELE, relations avec des partenaires mondiaux, paix et sécurité ainsi que développement durable et prospérité. Le présent rapport est en majeure partie structuré selon ces axes, et montre comment ils ont été suivis en 2016. Il contient en outre un chapitre introductif présentant sous une forme synthétique la politique extérieure menée par la Suisse au cours de l'année sous revue, ainsi qu'un chapitre consacré au thème prioritaire de l'année 2016: l'engagement de la Suisse en faveur de la paix et du développement dans les régions en crise, de la Syrie au Sahel. Les chapitres «Protection des droits de l'homme des minorités ethniques, religieuses, linguistiques et autres» (ch. 3.3.4, Promotion de la Paix) et «L'aide humanitaire dans le cadre de questions de minorités» (ch. 3.4.2, Aide humanitaire) répondent au Postulat 14.3823 von Siebenthal («Rapport sur la situation des minorités religieuses et mesures qui pourraient être prises par la Suisse»).

Politique extérieure de la Suisse 2016: appréciation et perspectives Le chapitre introductif du présent rapport donne un aperçu des principaux développements en matière de politique internationale. L'année 2016 a été marquée par une remise en question croissante de l'ordre international libéral et les incertitudes pesant sur l'évolution de l'environnement européen et mondial de la
Suisse se sont accentuées. La transformation du monde s'est poursuivie à un rythme soutenu, mais elle était placée sous le signe de tensions internationales accrues et d'une disponibilité à coopérer en diminution. Élaborer des solutions politiques viables aux nombreux conflits et crises en cours était très difficile dans ces conditions. Force est donc de constater que 2016 n'a pas été une bonne année pour la paix, pour la liberté et pour un ordre mondial fondé sur le droit, même si l'on ne peut pas encore conclure à une tendance négative à long terme. Dans ce contexte, le chapitre dresse un état des lieux politique de la politique extérieure de la Suisse et évalue la mise en oeuvre de la stratégie de politique étrangère 2016­2019. En plus de sa volonté d'instaurer une relation contractuelle avec l'UE et d'optimiser celle-ci, la Suisse avait de nouveau pour priorités au cours de l'exercice sous revue la paix et la

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sécurité ainsi que le renforcement des initiatives multilatérales et des règles mondiales.

Thème prioritaire: l'engagement de la Suisse en faveur de la paix et du développement dans les régions en crise, de la Syrie au Sahel Les crises et conflits répétés dans l'environnement régional élargi de l'Europe ont sur la Suisse des effets plus directs et plus tangibles que jamais. C'est la raison pour laquelle la promotion de la paix et du développement dans les États du ProcheOrient et du Moyen-Orient, d'Afrique du Nord, de la Corne de l'Afrique, du Sahel et de la région du lac Tchad font partie des priorités de sa politique extérieure. Le présent chapitre expose les caractéristiques de ces régions, leurs effets sur la Suisse ainsi que les grandes lignes de l'engagement helvétique et sa mise en oeuvre sur le terrain.

Les enjeux diffèrent d'un pays à l'autre, il ne saurait donc être question d'adopter la même démarche dans chacun des 34 pays de ces régions. Il n'en demeure pas moins que les facteurs constitutifs des crises s'accumulent au sud de l'Europe, à commencer par le nombre de crises et de conflits, la concentration élevée d'États fragiles, le phénomène de fragmentation observé ici et là et un retour à la concentration démesurée du pouvoir. L'évolution démographique, le souvent faible niveau de développement et l'aggravation des changements climatiques représentent eux aussi des enjeux de taille; ils génèrent souvent une situation humanitaire catastrophique, qui offre un terreau propice à l'extrémisme violent et provoque d'importants flux migratoires et vagues de réfugiés. Cette situation se traduit en Europe notamment par le nombre élevé des demandes d'asile. L'augmentation des attentats djihadistes est également lié à la guerre et la violence, notamment en Syrie. L'engagement de la Suisse au sein de l'arc de crise qui s'étend au Sud de l'Europe, outre le fait qu'il s'inscrit dans le mandat constitutionnel de promotion de la paix et du développement, traduit donc l'intérêt qu'a la Suisse à évoluer dans un environnement sûr et stable.

L'engagement de la Confédération sur le terrain se traduit par une forte présence dans cette région du monde, avec un total de 19 ambassades et sept bureaux de coopération. Ses activités sont guidées par le principe de l'utilisation coordonnée des instruments dans
le but d'atteindre les objectifs stratégiques définis conjointement. La Direction du développement et de la coopération (DDC), la Direction politique du DFAE, le Secrétariat d'État à l'économie (SECO) et le Secrétariat d'État aux migrations (SEM) comptent parmi les acteurs helvétiques de premier plan dans ces régions, où ils recourent principalement aux instruments suivants: promotion civile de la paix, défense de l'État de droit, bonne gouvernance et démocratie ainsi que promotion des droits de l'homme, coopération au développement et aide humanitaire. Par ailleurs, les thèmes transversaux de l'exil et de la migration, de la prévention de l'extrémisme violent ainsi que de la prévention et de la résolution des conflits liés à l'eau revêtent une importance croissante.

L'engagement sur le terrain est aussi varié que le sont les contextes; il va de la recherche de solutions politiques au conflit syrien à la réalisation de projets visant à protéger les réfugiés dans la Corne de l'Afrique en passant par la coopération avec

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la Tunisie en matière de prévention de l'extrémisme violent et la promotion de la bonne gouvernance au Mali. En raison du nombre élevé de réfugiés érythréens, la Suisse a décidé de déployer en Érythrée des activités, réduites dans un premier temps. Outre la coopération bilatérale, elle ne cesse de renforcer ses relations avec les organisations régionales dans les régions mentionnées plus haut, conformément à la stratégie de politique étrangère.

Relations avec l'Union européenne et avec les États de l'UE/AELE En 2016 aussi, les relations entre la Suisse et l'UE ont été guidées par l'objectif du Conseil fédéral visant à mieux maîtriser l'immigration en Suisse tout en préservant et en développant la voie bilatérale. Les travaux se sont focalisés pour l'essentiel sur la recherche d'une solution consensuelle concernant la mise en oeuvre de l'art. 121a de la Constitution (Cst.) et sur la question des futures conditions qui encadreront les relations entre la Suisse et l'UE. En décembre, le Parlement a retenu pour ledit article un texte de loi d'application compatible avec l'accord de libre-circulation (ALC) conclu avec l'UE. Cette décision a permis au Conseil fédéral de ratifier le protocole concernant l'extension de l'ALC à la Croatie et assuré à la Suisse sa pleine association, dès début 2017, au programme «Horizon 2020». Au cours de l'année sous revue, les relations avec l'UE ont également été dominées par la question de la maîtrise des flux migratoires en provenance du voisinage méridional de l'Europe. La Suisse a défendu l'idée de solutions solidaires définies à l'échelle européenne et de l'adaptation des règles existantes, par exemple dans le cadre du système de Dublin.

Dans sa recherche de solution consensuelle avec l'UE concernant l'ALC, la Suisse n'a pas hésité à utiliser systématiquement ses contacts avec les gouvernements des pays membres de l'UE. Elle a rencontré à plusieurs reprises de hauts représentants des Pays-Bas et de la Slovaquie, qui assuraient en 2016 la présidence tournante du Conseil de l'UE. A l'issue du vote britannique en faveur du Brexit, elle a intensifié ses relations déjà étroites avec Londres pour prévenir les problèmes qui pourraient rejaillir de ce vote sur ses relations.

Au-delà des questions de politique européenne, la Suisse accorde une importance particulière aux
États voisins, en témoignent notamment les nombreuses rencontres bilatérales entre le président de la Confédération et ses homologues. Au niveau bilatéral, des avancées ont été enregistrées avec l'Italie et la France au sujet de plusieurs dossiers portant sur des questions fiscales: le protocole additionnel relatif à la convention contre les doubles impositions entre la Suisse et l'Italie est entré en vigueur et le régime fiscal applicable à l'aéroport de Bâle-Mulhouse a pu être négocié avec la France et paraphé; en revanche, l'accord relatif à l'imposition des travailleurs frontaliers n'a pas encore pu être signé avec l'Italie. Les relations bilatérales avec l'Autriche ont été dominées en 2016 par les questions de politique européenne et de politique migratoire. Étant donné qu'elle assurera la présidence de l'Organisation pour la sécurité et la coopération en Europe (OSCE) en 2017, l'Autriche reste un partenaire important de la Suisse pour les questions de sécurité.

En 2016, la Confédération a nommé à Vaduz un consul général honoraire, expri-

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mant ainsi son estime pour le Liechtenstein et saluant les excellentes relations bilatérales qu'elle entretient avec la principauté.

Relations avec des partenaires mondiaux L'intensification et la diversification de la coopération avec les pays prioritaires que sont le Brésil, les États-Unis, l'Afrique du Sud, la Turquie, la Russie, l'Inde, la Chine et le Japon figurent toujours parmi les objectifs de la législature qui prendra fin en 2019. Elles se sont traduites en 2016 par la signature de différents accords et déclarations d'intention, par exemple l'accord avec l'Inde sur l'exemption de visa pour les diplomates. Les consultations bilatérales diverses et variées ont elles aussi contribué à renforcer les relations. La Suisse mène avec la Chine un peu plus de 20 dialogues thématiques, dont font partie des sujets sensibles tels que les droits de l'homme. Au cours de l'année sous revue, plusieurs rencontres ont eu lieu à différents niveaux et sur les sujets les plus divers avec la Russie et les États-Unis.

Comme défini dans la stratégie de politique étrangère 2016­2019, la Suisse a approfondi en 2016 ses relations avec d'autres pays du G20. Les relations avec le Canada et l'Argentine ont, par exemple, pu être dynamisées. La visite effectuée en Corée du Sud par le président de la Confédération a ainsi permis d'intensifier la coopération bilatérale dans les domaines de la recherche et de la formation et de signer une déclaration d'intention relative à la coopération en matière de technologies de l'information. La Suisse vise à renforcer ses liens bilatéraux au-delà de ceux avec les pays du G20. De nombreux contacts ont eu lieu à divers niveaux avec l'Iran au cours de la période sous revue et les deux pays ont adopté une feuille de route destinée à approfondir les relations bilatérales. La Suisse continue de juger importante la région des Balkans occidentaux, où son engagement est principalement au service de la paix, de la stabilité et de la prospérité économique.

Outre l'attention particulière accordée aux relations bilatérales, la Confédération a pu développer sa coopération avec différentes organisations régionales. Des déclarations d'intention communes et des accréditations accordées à des ambassadeurs suisses ont permis de consolider l'institutionnalisation des relations de la Suisse avec
plusieurs organisations régionales d'Afrique. De plus, le président de la Confédération a participé en 2016 aux sommets du «Dialogue Asie­Europe» (ASEM) et de la Francophonie. Ce dernier a été l'occasion d'organiser plusieurs rencontres bilatérales avec d'autres chefs d'État et de lancer des initiatives dans les domaines de la prévention de l'extrémisme violent ainsi que de l'eau en tant que facteur de paix et de sécurité.

Paix et sécurité Comme le prévoit la stratégie de politique étrangère 2016­2019, la Suisse a oeuvré en 2016 en faveur de la paix et de la sécurité en Europe et dans le monde. L'OSCE a un rôle essentiel à jouer à l'échelon régional; de son côté, la Suisse défend l'idée d'un renforcement de la sécurité coopérative et de la promotion du dialogue en Europe. Outre la lutte contre le terrorisme, le cyberespace revêt une importance grandissante pour la sécurité internationale et la gestion des menaces transnationales. En 2016, la Suisse s'est focalisée notamment sur le développement et le

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renforcement du cadre normatif en prenant appui sur le droit international. Elle avait également pour priorité l'engagement, au niveau multilatéral, dans le domaine du contrôle des armements, du désarmement et de la non-prolifération.

Au niveau global, la Suisse s'engage en particulier au sein de l'ONU en faveur de la paix et de la sécurité, notamment en accueillant des processus de paix, concernant la Syrie, par exemple. De plus, elle est de nouveau membre depuis début 2016 de la principale entité onusienne en charge des droits de l'homme: le Conseil des droits de l'homme. Elle a par ailleurs apporté son appui aux projets de réforme de l'ONU, en mettant l'accent sur la gestion de l'organisation, notamment en matière de ressources humaines. En outre, la Suisse s'est engagée pour un processus de nomination plus structuré et plus transparent du prochain secrétaire général de l'ONU. Le message adotpé par le Conseil fédéral en 2014 concernant les mesures à mettre en oeuvre pour renforcer le rôle de la Suisse comme État hôte est appliqué depuis janvier.

Fortement sollicités en 2016 en raison des nombreux conflits persistants et catastrophes humanitaires, les instruments de politique de la paix de la Suisse ont été utilisés dans divers contextes, dans des conditions souvent difficiles. En dépit de revers, l'année écoulée a également eu son lot de développements positifs ­ auxquels la Suisse a contribué ­ pour la promotion de la paix et de la sécurité humaine, par exemple au Myanmar et en Colombie. De plus, l'engagement helvétique en faveur de la promotion et de la protection des droits de l'homme ainsi qu'en faveur des minorités, religieuses et autres, a occupé une place importante en 2016.

Le sujet a été discuté tant lors de consultations bilatérales que dans l'enceinte d'organes multilatéraux. A l'occasion du dixième anniversaire du Conseil des droits de l'homme, la Suisse a lancé son «appel du 13 juin», soutenu par 70 pays, dans lequel elle invite les États membres à s'engager en faveur d'une meilleure prise en considération des droits de l'homme dans la prévention des conflits.

Au cours de l'année sous revue, le droit international humanitaire a souvent été violé par des parties en conflit, étatiques et non étatiques. Réagissant à cela, la Suisse a réitéré avec force ses appels en faveur du
respect des conventions de Genève. Elle a en outre poursuivi son engagement pour le droit international humanitaire dans le cadre du Forum du document de Montreux, qu'elle a co-présidé avec le Comité international de la Croix-Rouge (CICR). Accordant une importance particulière à la Cour pénale internationale (CPI) s'agissant des violations du droit international les plus graves, elle a de nouveau plaidé en 2016 pour que celle-ci soit saisie de plusieurs situations. Enfin, dans le domaine de la restitution de fonds d'origine illicite, le Conseil fédéral et le gouvernement du Nigéria ont signé en mars 2016 une lettre d'intention visant la restitution de quelque 320 millions de dollars américains.

Constatant dans sa stratégie de politique étrangère 2016­2019 qu'il existe des interactions entre la paix et le développement, la Confédération a utilisé plusieurs instruments pour déployer des activités à l'interface entre politique de paix, droits de l'homme, développement durable et aide humanitaire. Figurent parmi celles-ci la prévention de l'extrémisme violent, la prévention des conflits liés à l'eau au travers de l'encouragement de solutions coopératives ainsi que les contributions de la

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politique étrangère à la maîtrise de flux accrus de réfugiés et de migrants. La mise en oeuvre de ces priorités de la politique étrangère de la Suisse requiert l'action conjuguée de la diplomatie, de la promotion de la paix et du développement, pardelà les barrières administratives.

Développement durable et prospérité La Suisse oeuvre pour un monde sans pauvreté et pour un développement durable.

Elle s'engage fortement pour ce dernier, à travers sa politique extérieure, notamment la coopération internationale ainsi que les politiques extérieures sectorielles, l'Agenda 2030 et le message sur la coopération internationale 2017­2020 (CI) guidant son action. À l'été, elle a été l'un des premiers pays à présenter à l'ONU ses premières mesures de mise en oeuvre de l'Agenda 2030. L'année sous revue était la dernière année de mise en oeuvre du message sur la coopération internationale 2013­2016. Le nouveau message sur la CI adopté en 2016 met notamment l'accent sur le renforcement de la complémentarité entre les instruments, tenant ainsi compte de l'expérience acquise, selon laquelle une approche combinée permet d'obtenir les meilleurs résultats. Il se focalise par ailleurs sur la mesure de l'efficacité et un système de rapports transparents. Au cours de l'année sous revue, la coopération bilatérale a été définie dans l'esprit du futur message sur la CI. Les activités déployées dans le cadre des sept programmes régionaux en Afrique, en Asie et en Amérique latine ainsi qu'au sein des quinze programmes spécifiques ont été consacrées au développement mondial durable, à la réduction de la pauvreté, à la lutte contre les conflits et les crises, à la gestion durable des ressources naturelles et à la défense des droits de l'homme.

Comme les années précédentes, la Suisse a accentué ses efforts dans le domaine de la formation, par exemple en finançant des formations professionnelles pour des jeunes dans un camp de réfugiés au Kenya, et renforcé la collaboration avec le secteur privé. En définissant cinq programmes globaux ­ sécurité alimentaire, changement climatique, eau, santé ainsi que migration et développement ­ la DDC se penche sur des enjeux qui influencent de plus en plus les perspectives de développement des pays pauvres. Par ailleurs, la Suisse a poursuivi et développé en 2016 son étroite coopération
avec ses organisations partenaires prioritaires sur le plan multilatéral. Elle a de nouveau apporté son soutien, dans le cadre de la coopération avec l'Europe de l'Est, aux pays des Balkans occidentaux et à huit pays de l'exUnion soviétique dans leur transition vers la démocratie et l'économie de marché.

Une fois de plus, l'aide humanitaire a été fortement sollicitée au vu des nombreux conflits, crises et catastrophes qui ont marqué l'année 2016. La Suisse a fourni une aide bilatérale et multilatérale ainsi qu'en collaboration avec des organisations partenaires dans divers contextes tels que le conflit syrien, l'Ukraine, les foyers de crise en Afrique subsaharienne ou encore après le passage de l'ouragan Matthew en Haïti, où 100 000 personnes ont bénéficié de son aide d'urgence. Enfin, elle a oeuvré au sein d'instances multilatérales à la recherche de solutions aux problèmes les plus urgents et à la réduction des risques de catastrophes.

Pour la mise en oeuvre de l'Agenda 2030, la Suisse veille à éviter autant que possible les conflits d'intérêts entre les différentes politiques sectorielles et transver-

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sales. Elle encourage à ce titre une plus grande transparence dans le négoce des matières premières et oeuvre pour la réduction des flux financiers déloyaux et illicites en provenance de pays en développement. Le Conseil fédéral souligne ainsi sa volonté d'une plus grande cohérence des politiques de développement et contribue à une meilleure compréhension de la notion de cohérence du développement durable.

Politiques extérieures sectorielles Le maintien durable de la prospérité repose sur une collaboration fondée sur des règles dans différents domaines au niveau international. Par son engagement aux processus sectoriels internationaux, notamment les accords multilatéraux et bilatéraux, ainsi que les programmes (onusienne) régionaux et globaux, la Suisse contribue à la promotion des trois dimensions du développement durable, à savoir les enjeux sociaux, l'économie et l'environnement. Du fait de l'importance capitale de conditions de concurrence égales pour tous et de l'accès aux marchés pour la place financière suisse, à vocation exportatrice, la Suisse a mené en 2016 des dialogues financiers et réglementaires avec des pays du G20 et d'autres États partenaires importants. Cette démarche lui permet de coordonner ses positions au sein d'organisations internationales importantes et d'évoquer des sujets bilatéraux. Sur le plan multilatéral, elle a été invitée par la présidence chinoise du G20 à participer au G20 des ministres des finances et au groupe de travail sur la lutte contre la corruption. Elle a par ailleurs participé au sommet anticorruption de Londres. La Suisse a également défendu des approches multilatérales en matière de politique scientifique et environnementale ainsi que dans le domaine de la santé. Au cours de l'année sous revue, l'initiative de Batumi pour une économie verte, lancée par la Suisse, a ainsi été adoptée lors de la huitième conférence ministérielle «Un environnement pour l'Europe». Par ailleurs, la Suisse a réaffirmé sa volonté d'obtenir le statut d'observateur au Conseil de l'Arctique. En 2016, la Confédération a continué de porter un soin particulier aux contacts bilatéraux et multilatéraux dans les domaines de l'énergie, de la culture, de la coopération scientifique, de la gouvernance d'Internet, des transports et de l'environnement. Profitant de l'inauguration du tunnel
de base du Saint-Gothard, les ministres des transports d'Allemagne, d'Italie, de France, d'Autriche, du Liechtenstein, de Slovénie et de Suisse se sont réunis en mai à Lugano, dans le cadre du Processus de Zurich, pour s'entretenir de la sécurité des transports et de la mobilité dans la région alpine. Enfin, en organisant le Conseil ministériel de l'Agence spatiale européenne (ESA) à Lucerne, la Suisse a clos avec brio la coprésidence de l'ESA, qu'elle assurait avec le Luxembourg.

Services de proximité Faisant office de guichet unique, le réseau des représentations suisses, conjointement avec la Direction consulaire du DFAE, met une offre complète de services à la disposition des ressortissants suisses à l'étranger. Pour qu'il soit aisé d'accéder à la Suisse économique et touristique ainsi qu'à la Genève internationale, une importance particulière est accordée au traitement des demandes de visas soumises par des hôtes étrangers. Les Suisses, qu'ils résident à l'étranger ou y voyagent, peuvent s'adresser 365 jours par an à la Helpline DFAE, conçue elle aussi comme un guichet unique. S'ils sont en situation d'urgence, ils peuvent en outre, dans le cadre de

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la protection consulaire, bénéficier de l'assistance du DFAE. Du fait du développement volatile de la situation sécuritaire dans différentes régions du monde, la prévention des crises et les mesures de préparation ainsi que la gestion des crises revêtent une importance capitale pour les ressortissants suisses à l'étranger. Dans ses conseils aux voyageurs, le Centre de gestion des crises du DFAE informe un large public des risques sécuritaires à l'étranger; il suit en permanence l'évolution de la situation internationale et, lors de crises, il coordonne les moyens mis en oeuvre par la Confédération pour protéger les citoyens suisses. Ainsi, il a assuré la gestion de crises lors de nombreux événements survenus en 2016, notamment lors du séisme en Équateur, de l'évacuation de la représentation suisse au Sud-Soudan et des nombreux attentats terroristes perpétrés à travers le monde, en particulier en Belgique, en France, en Allemagne, au Burkina Faso, en Turquie et en Indonésie.

Communication Au cours de l'année sous revue, les activités d'Information DFAE ont été principalement consacrées à la mise à disposition d'informations relatives à la stratégie de politique étrangère 2016­2019 et au message sur la coopération internationale 2017­2020 ainsi qu'à la politique de la Suisse à l'égard de l'UE. Comme les années précédentes, la communication internationale s'est employée à faire valoir les atouts de la Suisse. 2016 était placée sous le signe du Championnat d'Europe de football en France et des Jeux olympiques de Rio de Janeiro. La «Maison de la Suisse», plate-forme de réseautage et de promotion de la Suisse, a été ouverte durant ces deux manifestations. La campagne de soutien du tour du monde de l'avion solaire suisse Solar Impulse et, surtout, l'ouverture du tunnel de base du SaintGothard ont offert une excellente occasion à la Suisse de mettre en exergue ses atouts et ses compétences. Plus de 70 manifestations ont été organisées dans ce cadre dans une quarantaine de représentations. Le Service historique du DFAE s'est consacré en 2016 notamment à l'examen des sources sur lesquelles repose la thèse d'un «accord secret» passé en 1970 entre la Suisse et l'Organisation de libération de la Palestine (OLP).

Ressources, réseau extérieur et personnel Constitué actuellement de 170 représentations et de 200
représentations honoraires à l'étranger, le réseau extérieur suisse est constamment adapté aux besoins de la Suisse et à la situation internationale. En plus du recours aux nouvelles technologies, comme la biométrie mobile, des solutions novatrices sont mises en oeuvre, à l'image de la colocation avec des pays partenaires. Ainsi, le consulat général ouvert en 2016 à Lagos (Nigéria) a pris ses quartiers dans la représentation du Danemark.

La création d'ambassades intégrées, qui favorisent l'image cohérente de la Suisse et l'exploitation de synergies, a progressé considérablement. Enfin, l'année 2016 a été consacrée aux mesures d'économies visant les charges de personnel, prévues pour le DFAE dans le programme de stabilisation 2017­2019. En ce qui concerne le réseau extérieur, ces mesures se traduiront autant que possible par des réorganisations, l'exploitation de synergies et des ajustements des services fournis par les représentations.

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Table des matières Condensé

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Politique extérieure de la Suisse 2016: appréciation et perspectives 1.1 Lignes d'évolution de la politique mondiale 1.1.1 L'ordre international libéral sous pression 1.1.2 Environnement européen et mondial: de nombreuses interrogations 1.1.3 Peu de progrès dans le règlement des conflits 1.2 État des lieux: la politique extérieure suisse en temps de crise 1.2.1 La stratégie de politique étrangère 2016­2019 comme guide 1.2.2 Nouveau cadre d'action pour le développement et la paix 1.2.3 Vaste réseau extérieur comme base éprouvée 1.3 État de mise en oeuvre des priorités de la politique extérieure 1.3.1 Consolidation progressive et développement de la voie bilatérale 1.3.2 Intensification et diversification des partenariats internationaux 1.3.3 Bons offices et gouvernance de la mondialisation en accord avec les valeurs de la Suisse 1.3.4 Engagement sans faille au service du développement durable et de la prospérité Thème prioritaire: engagement de la Suisse pour la paix et le développement dans les régions en crise, de la Syrie au Sahel 2.1 Introduction 2.2 Les caractéristiques régionales et leur importance pour la Suisse 2.3 Les grandes lignes de l'engagement de la Suisse 2.4 Priorités de la Suisse dans les différentes régions 2.4.1 Proche-Orient et Moyen-Orient 2.4.2 Afrique du Nord 2.4.3 La région du Sahel et du lac Tchad 2.4.4 Corne de l'Afrique Activités de politique extérieure de la Suisse en 2016 3.1 Relations avec l'Union européenne et avec les États de l'UE/AELE 3.1.1 Union européenne 3.1.2 Relations avec les États voisins 3.1.3 Relations avec les autres États membres de l'UE et de l'AELE 3.2 Relations avec des partenaires mondiaux 3.2.1 Pays prioritaires 3.2.2 Balkans occidentaux

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3.2.3 Europe de l'Est et Asie centrale 3.2.4 Continent américain 3.2.5 Afrique subsaharienne 3.2.6 Moyen-Orient et Afrique du Nord 3.2.7 Asie et Pacifique Paix et sécurité 3.3.1 Sécurité européenne: OSCE, Partenariat pour la paix, Conseil de l'Europe 3.3.2 Sécurité internationale et menaces transnationales 3.3.3 L'ONU et la Genève internationale 3.3.4 Promotion de la paix 3.3.5 Droits de l'homme, état de droit 3.3.6 Droit international, droit international humanitaire et justice pénale internationale 3.3.7 Thèmes transversaux: prévention de l'extrémisme violent (PEV), diplomatie de l'eau, réfugiés et migrants Développement durable et prospérité 3.4.1 Lignes d'action de la coopération internationale: Agenda 2030 et message 2017­2020 3.4.2 Aide humanitaire 3.4.3 Coopération bilatérale au développement 3.4.4 Programmes globaux et recherche 3.4.5 Coopération multilatérale au développement 3.4.6 Coopération avec l'Europe de l'Est 3.4.7 Partenariats institutionnels 3.4.8 Cohérence des politiques en faveur du développement durable 3.4.9 Suivi rigoureux et leçons à en tirer Politiques extérieures sectorielles 3.5.1 Politique financière et économique internationale 3.5.2 Environnement 3.5.3 Santé, transports et énergie 3.5.4 Formation, recherche et innovation (FRI) 3.5.5 Culture 3.5.6 Société de l'information et gouvernance d'Internet Services de proximité Communication Ressources, réseau extérieur et personnel

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Liste des abréviations

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Index des pays

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Annexe: Informations complémentaires concernant le Conseil de l'Europe

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Rapport 1

Politique extérieure de la Suisse 2016: appréciation et perspectives

1.1

Lignes d'évolution de la politique mondiale

L'année 2016 a été marquée par une remise en question croissante de l'ordre international libéral et les incertitudes pesant sur l'évolution de l'environnement européen et mondial de la Suisse se sont accentuées. La transformation du monde s'est poursuivie à un rythme soutenu, mais elle était placée sous le signe de tensions internationales accrues et d'une disponibilité à coopérer en diminution. Élaborer des solutions politiques viables aux nombreux conflits et crises en cours était très difficile dans ces conditions. Force est donc de constater que 2016 n'a pas été une bonne année pour la paix, pour la liberté et pour un ordre mondial fondé sur le droit, même si l'on ne peut pas encore conclure à une tendance négative à long terme.

1.1.1

L'ordre international libéral sous pression

L'ordre international moderne s'est progressivement instauré à partir de 1945, sous la conduite des États-Unis. Après la chute du mur de Berlin, en 1989, il s'est même imposé comme la norme à l'échelle planétaire. Cet ordre repose sur la démocratie et sur l'économie de marché, ainsi que sur des valeurs telles que la liberté et l'état de droit. Il dépend en outre de la volonté des États de coopérer dans un cadre multilatéral pour relever les défis communs qui se posent à eux. Enfin, l'encouragement de la libre circulation, en particulier des marchandises, des capitaux et des informations, est une autre de ses composantes essentielles. L'ordre international libéral et la mondialisation sont donc étroitement liés.

Cet ordre n'a cependant jamais été respecté dans la même mesure par tous les pays.

Des États autoritaires ont en effet décidé unilatéralement, et dans certains cas de façon limitée, de n'adhérer qu'à sa dimension économique. Divers acteurs non étatiques ayant recours à la force, comme les groupes terroristes djihadistes, la rejettent quant à eux entièrement. Cela faisait déjà quelques années que les critiques du statu quo gagnaient du terrain, au fur et à mesure que le poids politique et économique de certains pays en développement ou émergents augmentait. La Russie a joué un rôle de premier plan dans cette évolution: prenant de plus en plus ses distances par rapport aux pays occidentaux, elle a non seulement violé, avec l'annexion de la Crimée, les principes de base du droit international et du système de sécurité développé en commun par les États européens, mais défend également une conception différente de l'ordre international. Elle ne manque en outre pas de reprocher aux pays occidentaux d'avoir eux-mêmes enfreint les principes fondamentaux de cet ordre, notamment avec les interventions au Kosovo, en Iraq et en Libye.

Cette remise en question de l'ordre international, que l'on observait donc depuis quelque temps déjà, s'est faite plus virulente durant l'année sous revue, notamment 1148

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sous l'effet conjugué de trois facteurs: premièrement, la Russie a fait valoir ses prétentions de puissance indépendante garante de l'ordre international au niveau non plus seulement régional, mais également mondial. C'est ainsi que l'entrée en guerre de Moscou en Syrie a radicalement changé la situation militaire et politique sur le terrain, la faisant basculer en faveur du président Bachar el-Assad. Ce renforcement de l'influence russe au Moyen-Orient s'est traduit par une nouvelle diminution des options ouvertes aux États-Unis dans le conflit syrien. Après l'échec des tentatives de gestion commune de cette crise par les Américains et les Russes, les tensions entre Washington et Moscou au sein du Conseil de sécurité de l'ONU ont atteint un niveau que l'on n'avait plus observé depuis la guerre en Iraq, en 2003. La Russie défend en l'occurrence la vision d'un ordre international multipolaire à la place d'un ordre fondé sur la coopération multilatérale.

Deuxièmement, divers États ont tourné le dos au libéralisme dans leur structure interne, ce qui n'a pas manqué de se répercuter sur l'ordre international. En effet, lorsque des valeurs comme la démocratie, l'état de droit, la liberté individuelle et la tolérance sont mises sous pression en politique intérieure, cela se reflète dans les relations internationales. Durant l'année sous revue, la communauté internationale a été particulièrement attentive à l'évolution de la situation en Turquie. Suite au coup d'État manqué du mois de juillet, plus de 100 000 fonctionnaires ont été licenciés, des dizaines de milliers de personnes arrêtées et 200 entreprises de médias fermées.

La pression sur la justice, sur la presse et sur l'opposition a nettement augmenté et la liberté individuelle diminué. On a par ailleurs aussi observé une concentration du pouvoir et un recul des libertés notamment dans plusieurs États arabes et d'Asie centrale. Ces mutations internes des États s'accompagnent en outre souvent d'une recrudescence du nationalisme, qui monte ainsi dans le monde entier.

Troisièmement, on assiste à une évolution de la politique intérieure des pays occidentaux qui remet en question la pérennité de l'ordre international établi ces dernières décennies. Des mouvements politiques qui s'opposent à l'ouverture des frontières et de la société et réclament un
profond changement de politique ont beaucoup gagné en importance dans de nombreux États européens, ainsi qu'aux États-Unis. Les raisons en sont certes diverses, mais sont généralement à mettre en relation avec les facteurs suivants: la faible croissance économique qui perdure depuis la crise financière et celle de la dette, l'augmentation des inégalités au sein de la société ainsi que les questions identitaires et les craintes de pertes que soulève la mondialisation. Le succès de ces mouvements reflète entre autres l'insécurité ressentie par de nombreuses personnes ainsi qu'une méfiance croissante à l'égard des élites et de la politique traditionnelles. En particulier, les systèmes de régulation multilatéraux, surtout dans le domaine économique, sont souvent perçus comme problématiques. Ces courants sociétaux sont donc souvent animés par un refus de la mondialisation et particulièrement sensibles aux promesses de politiques davantage axées sur les questions nationales.

L'année sous revue a été marquée par deux décisions populaires de première importance pour la politique mondiale, l'une au Royaume-Uni et l'autre aux États-Unis ­ deux États piliers de l'ordre libéral. Le Brexit et l'élection présidentielle américaine auront en effet des répercussions en Europe et dans le monde entier, qu'il n'est cependant pas encore possible d'appréhender avec précision. Le vote du 23 juin 1149

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2016 en faveur de la sortie du Royaume-Uni de l'Union européenne (UE) est un coup dur porté au processus d'unification de l'Europe. Certes, les futures relations entre l'UE27 et le Royaume-Uni sont encore nébuleuses et Londres n'activera la clause de retrait du traité sur l'UE qu'en 2017, mais il faut s'attendre à ce que le Brexit transforme durablement les deux parties. Sans le Royaume-Uni et sur la base des chiffres actuels, le PIB des 27 États restants de l'UE va diminuer de 15 %, la population de près de 9 %, les exportations hors de l'UE de presque 13 % et les dépenses en matière de défense de plus de 22 %. Quant au Royaume-Uni, son retrait de l'UE le place face à des questions cruciales: comment entend-il et pourra-t-il, d'une part, réaménager ses relations économiques avec l'UE et, d'autre part, faire valoir son droit de participation politique auprès de cette dernière?

L'élection de Donald Trump en tant que 45e président des États-Unis est également susceptible de déboucher sur un véritable tournant. Les États-Unis ont fait jusqu'ici figure d'épine dorsale de l'ordre international libéral. Certes, leur volonté et leur capacité de s'engager comme grande puissance garante de la liberté et de la stabilité mondiales se sont affaiblies sous la présidence Obama, mais leur politique extérieure reste frappée au coin de la défense de l'ordre mondial libéral. Largement consensuelle, cette politique s'inscrit dans le droit fil de celle suivie depuis la fin de la deuxième guerre mondiale. Or, en tant que candidat à la présidence, Donald Trump a largement remis en question cette orientation. Ce sera cependant la politique qu'il mettra effectivement en oeuvre en tant que président qui sera décisive. Ses effets concrets sur l'ordre international n'apparaîtront que progressivement, si bien qu'il faut s'attendre à une période d'imprévisibilité accrue. Si les États-Unis devaient largement renoncer à leur rôle hégémonique, la politique mondiale pourrait devenir encore plus volatile et plus instable que ces dernières années.

1.1.2

Environnement européen et mondial: de nombreuses interrogations

Les incertitudes pesant sur l'évolution de l'environnement européen et mondial de la Suisse se sont accentuées, débouchant sur une insécurité stratégique qui est un véritable défi, sur les plans tant politique que diplomatique. La première question qui se pose à l'échelle européenne est celle de la suite du processus d'unification de l'Europe. L'UE est aux prises avec toute une série de crises superposées, notamment les crises ­ persistantes ­ de l'euro et de la dette, auxquelles sont venues s'ajouter la crise des réfugiés et celle du Brexit. Depuis quelques années, l'euroscepticisme gagne en outre du terrain dans de nombreux États membres. Dans quelle mesure et dans quels domaines faut-il dès lors compter avec «plus» ou avec «moins» d'Europe à l'avenir? Cela dépendra entre autres de l'issue des élections qui se tiendront en 2017 dans plusieurs grands États membres. Comme aux États-Unis pour ce qui est de l'ordre mondial libéral, on assiste dans de nombreux pays de l'UE à l'érosion du large consensus qui a prévalu jusqu'ici en matière de politique extérieure, en relation dans ce cas avec la question européenne. Soulignons dans ce contexte que la préservation de la stabilité et de la capacité d'action de l'UE est dans l'intérêt de la Suisse, tant pour sa prospérité que pour sa liberté et sa sécurité.

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L'avenir du système de sécurité européen est également incertain. Durant l'année sous revue, la situation sécuritaire dans l'espace de l'OSCE s'est détériorée. Les parties au conflit ukrainien sont encore loin d'une solution politique et les relations entre la Russie et les pays occidentaux restent très tendues. La menace nucléaire russe, les provocations militaires et les mesures réciproques de dissuasion ont même aggravé la crise de confiance. Les conceptions de l'ordre régional défendues respectivement par l'UE et par la Russie sont totalement incompatibles. De plus, le dialogue entre l'UE et l'Union économique eurasienne (UEEA) brille toujours par son absence. La situation se présente mal également en ce qui concerne la dimension humaine de l'OSCE, qui est un volet essentiel du système de sécurité européen: la volonté de tenir les engagements souscrits et d'élaborer de nouvelles normes dans le domaine des droits de l'homme est en recul dans un nombre croissant d'États ex-soviétiques membres de l'organisation. De plus, la reconnaissance partagée de la démocratie et de la liberté, sur laquelle s'est construite la coopération en matière de sécurité dans les années 90, s'est essoufflée, comme en témoigne le fait que l'on n'est pas parvenu, pour la deuxième année consécutive, à adopter une déclaration ministérielle relevant de la dimension humaine de l'OSCE.

Il existe cependant aussi des indices de développements positifs. Alors qu'elles n'avaient guère eu de résonance ces dernières années, les propositions d'ouverture d'un dialogue de sécurité inclusif au sein de l'OSCE ­ dans lesquelles la Suisse est fortement impliquée ­ ont récemment commencé à produire des effets. La présidence allemande de l'organisation a par exemple convoqué le 1 er septembre 2016, à Potsdam, une réunion ministérielle informelle de l'OSCE visant à encourager le dialogue politique sur les défis actuels. Peu après, lors de la réunion ordinaire du Conseil ministériel de l'OSCE de décembre 2016, à Hambourg, les États participants sont parvenus à s'accorder ­ contre toute attente ­ sur l'ouverture d'un «dialogue structuré» sur les défis et sur les risques de sécurité dans l'espace de l'OSCE. Ce succès s'inscrit également dans le contexte d'une initiative prise par l'Allemagne au second semestre 2016 et visant à relancer le
contrôle des armes conventionnelles en Europe. Cette initiative a été très bien accueillie à Hambourg. Le bilan de ce Conseil ministériel, qui a débouché sur l'adoption de dix textes au total malgré un climat général très tendu, est globalement positif. Avec la déclaration de Hambourg, la troïka de l'OSCE 2017 (Allemagne, Autriche et Italie) a en outre présenté un programme ambitieux, qui témoigne d'une forte volonté d'agir.

Si la disponibilité à dialoguer sur la sécurité coopérative a augmenté, c'est en raison, d'une part, des préoccupations que suscite la stabilité en Europe et, d'autre part, des incertitudes politiques croissantes qui se font jour, en relation notamment avec le futur rôle des États-Unis dans le système de sécurité européen. Quelles dynamiques vont-elles en résulter au sein de l'OSCE et de l'Organisation du Traité de l'Atlantique Nord (OTAN), ainsi que dans la politique de sécurité et de défense de l'UE? Il est encore trop tôt pour le savoir. Nul doute cependant que les futures relations entre les États-Unis et la Russie seront un facteur d'influence important. Un retour à davantage de coopération offrirait de bonnes chances de renforcer la sécurité en Europe, pour autant que cette coopération se fonde sur les principes d'Helsinki et de Paris, ainsi que sur le respect des besoins de sécurité et de la souveraineté de tous les États participants à l'OSCE.

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Les futures relations des États-Unis avec la Russie, mais aussi avec la Chine, l'Iran et d'autres États encore, joueront un rôle important au niveau mondial. Il faut cependant encore attendre pour savoir si les rivalités entre intérêts nationaux définis étroitement vont s'accentuer et si la concurrence multipolaire va continuer à entraver la coopération multipolaire. Quant aux foyers de tensions géopolitiques que sont le Proche-Orient, le Moyen-Orient et la mer de Chine méridionale, rien n'indique qu'ils se résorberont dans un avenir prévisible. Par ailleurs, le fossé qui sépare les besoins de régulation mondiale et les capacités d'action coopérative devrait encore se creuser, plutôt que se combler. L'ONU s'engage certes très activement en faveur de la paix et de la sécurité, comme en témoignent les seize missions de maintien de la paix qu'elle mène actuellement dans le monde entier, et qui mobilisent plus de 100 000 soldats, policiers et observateurs militaires ainsi que plus de 18 000 civils au total. Il n'en reste cependant pas moins qu'en 2016, le Conseil de sécurité de l'organisation, autrement dit son organe central en charge des questions de paix et de sécurité, s'est montré largement incapable d'agir dans plusieurs foyers de crise politique internationale, comme en Syrie et en Ukraine. La polarisation croissante de la communauté internationale s'est par ailleurs manifestée notamment lorsque l'Assemblée générale de l'ONU a pour la première fois écarté la candidature d'une grande puissance disposant du droit de veto, en l'occurrence la Russie, à l'élection au Conseil des droits de l'homme. On observe en outre, tant au siège new-yorkais de l'organisation qu'à celui de Genève, un nombre croissant d'États membres qui reviennent à une défense plus vigoureuse de leurs intérêts nationaux et privilégient une politique de non-ingérence, relativisant ainsi des engagements internationaux qu'ils ont pourtant librement souscrits, en particulier dans le domaine des droits de l'homme.

Dans ce monde marqué par une recrudescence des conflits politico-militaires, le droit international public subit également de fortes pressions. Les attaques lancées contre des installations médicales et contre le personnel humanitaire ainsi que les sièges et bombardements des villages et des quartiers au nom de la lutte
antiterroriste dans divers conflits, comme en Syrie et au Yémen, sont symptomatiques du fait que le respect de ce droit est en recul. De plus, le retrait annoncé de plusieurs pays africains (Afrique du Sud, Burundi et Gambie) de la Cour pénale internationale est un autre coup porté à un ordre international et à un système de responsabilité fondée sur le droit. L'état des ratifications de l'accord global sur le climat fait en revanche partie des signaux positifs qu'il convient également de relever: fin 2016, plus de 120 États, dont la Chine et les États-Unis, avaient déjà ratifié l'accord, qui est entré en vigueur le 11 novembre 2016, onze mois à peine après sa conclusion à Paris. Si tous les États clés le mettent effectivement en oeuvre, cet accord deviendra un important témoignage de la capacité d'action multilatérale de la communauté internationale.

Enfin, nombre d'interrogations planent également sur l'avenir du libre-échange. Les craintes suscitées par la mondialisation et la recrudescence du nationalisme se traduisent par une demande accrue de protectionnisme économique. Immédiatement après son élection à la présidence des États-Unis, Donald Trump a annoncé que son pays ne ratifierait pas l'accord de libre-échange transpacifique (Partenariat transpacifique, PTP), qui doit associer douze États riverains de l'océan Pacifique, sans la Chine. Le retrait américain du PTP va donc contraindre à revoir les règles appelées à 1152

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régir les échanges économiques dans cette région émergente, mais il pourrait également affaiblir la position des États-Unis en tant que puissance garante de l'ordre international dans le Pacifique. Quant aux négociations d'un accord commercial plurilatéral similaire entre les États-Unis et l'UE, elles devraient au minimum subir un sérieux coup de frein. Le maintien à l'agenda politico-économique de la conclusion d'un tel accord de libre-échange transatlantique dépend cependant aussi du partenaire européen. Or les critiques de ce projet se sont faites plus virulentes en Europe également. Un avant-goût des controverses auxquelles il faut s'attendre nous a d'ailleurs été présenté durant l'exercice sous revue avec les difficultés que l'UE a rencontrées au moment de conclure l'accord de libre-échange avec le Canada. Si la tendance à l'abandon des principes du libre-échange devait se confirmer, en particulier si les États-Unis renonçaient à jouer les avocats d'un ordre commercial international libéral pour miser davantage sur un cloisonnement protectionniste, cela aurait d'importantes conséquences dans le monde entier.

1.1.3

Peu de progrès dans le règlement des conflits

Les crises et les conflits sont toujours aussi nombreux. Se chiffrant à 65 millions, le nombre de personnes en fuite est même le plus élevé enregistré depuis la deuxième guerre mondiale, ce qui témoigne bien de la multiplicité des conflits non résolus. La maîtrise de cette situation est un défi majeur pour la diplomatie internationale.

L'exercice sous revue a montré combien il est difficile de trouver des solutions politiques aux conflits en cours, qui se caractérisent par leur complexité et peuvent être aussi bien intérieurs que transnationaux. Les efforts de médiation internationale ont certes conduit à une désescalade dans plusieurs cas, mais non à une paix durable.

Le bilan est donc plutôt maigre, avec cependant une exception: le processus de paix mené entre le gouvernement colombien et les Forces armées révolutionnaires de Colombie (FARC). Long et tortueux, ce processus n'en a pas moins abouti à l'approbation d'un accord de paix révisé par le parlement colombien, mettant ainsi officiellement fin à un conflit qui durait depuis plusieurs décennies. Il s'agit maintenant de consolider cette paix et de promouvoir le processus de réconciliation.

En 2016, la diplomatie de crise internationale a concentré ses efforts sur la guerre en Syrie. Même si, fin 2015, la résolution 2254 du Conseil de sécurité avait posé les jalons d'un règlement politique du conflit, c'est la logique militaire qui a largement repris le dessus au second semestre 2016. Cet échec des tentatives politiques de mettre fin à la violence au terme de l'année sous revue est la plus grande faillite morale de la politique mondiale contemporaine. Relevons au demeurant que les États-Unis et la Russie ne sont pas seuls en cause: les puissances régionales également ne sont pas parvenues à trouver un compromis viable sur l'application d'un cessez-le-feu, ni sur la reprise des pourparlers de paix interrompus fin avril à Genève. Des intérêts géopolitiques divergents et le refus de partager le pouvoir ont fait obstacle jusqu'ici à un processus politique acceptable par toutes les parties. La défaite militaire des oppositionnels à Alep a ouvert une nouvelle phase du conflit. Le chemin vers une paix durable passe cependant obligatoirement par le dialogue et par l'acceptation de compromis. Vers la fin de l'année sous revue le Conseil de sécurité s'est accordé sur une résolution sur la situation à Alep. En outre, la Russie et la 1153

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Turquie arrivaient à s'accorder sur un cessez-le-feu accepté par le gouvernement syrien ainsi que par les principaux groupes de l'opposition et soutenu par le Conseil de sécurité. En cas de maintien du cessez-le-feu, des négociations de paix devraient se tenir à Astana, avec la Russie, la Turquie et l'Iran, trois Etats non-arabes, se proposant comme puissances garantes pour un traité de paix. Les Nations Unies ont pour leur part annoncé la reprise des pourparlers intra-syriens à Genève. La question de savoir dans quelle mesure un processus de paix durable peut être réalisé en 2017 reste ouvert. Quoi qu'il en soit, étant donné les divisions politiques, confessionnelles et ethniques profondes de la société syriennes, qu'impose la guerre, les contours d'une solution politique s'avèrent de plus en plus difficile à dessiner.

Les conséquences humanitaires de cette guerre persistante pour la population syrienne sont catastrophiques. Selon le Bureau de la coordination des affaires humanitaires des Nations Unies (OCHA), le conflit a fait jusqu'ici plus de 250 000 victimes. Près de 5 millions de personnes ont fui le pays et 6,5 millions sont des déplacés internes. Les Syriens sont actuellement plus de 13 millions à dépendre de l'aide humanitaire, dont 6 millions d'enfants. De plus, quelque 600 000 personnes vivent dans des zones assiégées auxquelles l'aide humanitaire ne peut pratiquement pas accéder. La violence inouïe qui règne dans des villes comme Alep, sans considération pour les victimes civiles, ainsi que le recours à l'interruption de l'approvisionnement en eau et en nourriture comme armes de guerre témoignent bien de la terrible cruauté du conflit syrien.

La Syrie n'est cependant que l'un des nombreux conflits en cours au Sud de l'Europe. Les défis majeurs découlant des foyers de crise qui constellent ces régions sont présentées en détail au chapitre suivant. Nous nous contenterons de relever ici que, durant l'année sous revue, la situation s'est détériorée dans deux conflits issus des révoltes et des révolutions arabes de 2011. Au Yémen, la guerre s'est intensifiée dès la suspension des pourparlers de paix, au mois d'août. Les risques d'une nouvelle escalade sont en outre considérables et pourraient même menacer le trafic maritime international. En Libye, le blocage politique reste patent et la
violence entre milices rivales a de nouveau augmenté. Quant au conflit proche-oriental, il n'y a toujours pas de solution politique en vue. En 2016, la France, l'Égypte et la Russie ont certes pris diverses initiatives visant à relancer les pourparlers entre les parties au conflit et à renforcer la perspective d'une solution à deux États. En outre, le Conseil de sécurité des Nations Unies a adopté, en décembre 2016, la résolution S/RES/2334. Cette dernière qualifie les colonies israéliennes dans le territoire palestinien occupé d'illégales et d'obstacle à la mise en oeuvre de la solution de deux États, et demande à l'Israël un arrêt immédiat de la colonisation. En raison de la grande défiance qui règne entre les parties au conflit, de la colonisation progressive d'Israël et des dissensions inter-palestiniennes persistantes, les conditions nécessaires à l'atteinte d'une résolution juste et durable du conflit restent difficiles.

Des progrès ont en revanche été enregistrés dans les opérations militaires contre les groupes djihadistes. Les territoires contrôlés par l'organisation dite «État islamique» (EI) en Syrie et en Iraq ont considérablement rétréci. Le caractère paraétatique de l'EI le rend de fait plus vulnérable. En Libye également, l'EI est sur la défensive, de même que Boko Haram au Nigéria. La situation qui prévaudra en Syrie et en Iraq après l'éventuel démantèlement complet du califat reste cependant confuse. Les 1154

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risques d'actes de vengeance et d'épurations y sont en effet élevés, en raison notamment des tensions accrues entre Sunnites et Chiites vivant dans la région.

En Ukraine, le conflit qui sévit depuis 2014 a déjà fait plus de 10 000 victimes, et la situation sur la ligne de contact reste très volatile. De plus, les doutes quant à la volonté des parties de réellement appliquer l'accord de Minsk ont augmenté. Enfin, même si Kiev a mis d'importantes réformes en chantier, la corruption reste un défi majeur. Dans le conflit du Haut-Karabagh, la situation a évolué dans la bonne direction. Suite à la confrontation militaire du mois d'avril, les efforts visant à trouver une solution politique au conflit se sont intensifiés. Toutefois, si les pourparlers en cours ne devaient pas déboucher sur les progrès politiques escomptés, le risque d'une nouvelle escalade militaire n'est de loin pas écarté. De nombreux autres foyers de conflit, dont on a moins parlé en 2016, doivent également être suivis de près.

Citons pour exemple la crise politique qui persiste au Burundi ou la violence récurrente au Myanmar, notamment dans la province de Rakhine.

En 2016 comme en 2015, l'instabilité persistante de plusieurs régions du monde, en particulier de celle qui s'étend du Proche-Orient au Sahel, a eu d'évidentes répercussions en Europe et, par conséquent, en Suisse. Les mouvements migratoires vers l'Europe ont certes globalement diminué ­ ce qui s'explique principalement par l'accord passé entre l'UE et la Turquie et par la fermeture de la route des Balkans ­, mais aucune solution durable à la crise des réfugiés n'est en vue, d'autant moins que la viabilité à long terme de l'accord entre Bruxelles et Ankara est incertaine et que l'Europe peine toujours à développer des réponses communes aux défis que posent les réfugiés et la migration. La pression migratoire reste en outre très forte, malgré la fermeture partielle des routes de transit. C'est ainsi que le nombre de réfugiés et de migrants qui sont arrivés en Italie par la route de la Méditerranée centrale en 2016 s'est élevé à plus que 180 000, un chiffre encore jamais atteint précédemment.

Une autre conséquence de l'instabilité des régions situées au Sud et à l'Est du bassin méditerranéen reste bien évidemment la menace terroriste djihadiste qui pèse sur l'Europe. Le
nombre d'attentats qui y ont été perpétrés en 2016 a augmenté par rapport à l'année précédente, même s'ils ont globalement fait moins de victimes.

Selon les estimations du Service de renseignement de la Confédération, le risque d'attentats terroristes est important en Suisse également. Suite aux pertes territoriales que l'EI a subies au Proche-Orient et au Moyen-Orient, la menace djihadiste sur l'Europe pourrait même encore augmenter, en raison aussi bien d'un changement de tactique de l'EI que de l'augmentation des retours de combattants en Europe. Enfin, les mouvements migratoires et la menace terroriste ont provoqué un changement durable du climat politique intérieur de nombreux États européens. La résistance croissante contre l'ordre international libéral évoquée plus haut s'explique, entre autres, par cette évolution.

1155

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1.2

État des lieux: la politique extérieure suisse en temps de crise

1.2.1

La stratégie de politique étrangère 2016­2019 comme guide

Le dynamisme des changements globaux appelle une politique extérieure présentant une grande flexibilité. Le positionnement de la Suisse dans cet environnement en mutation ­ qui se mondialise tout en se fragmentant de plus en plus sur le plan politique et traversant de nombreuses crises ­ est pour le moins exigeant. Dans ce contexte, la politique extérieure de notre pays profite de sa grande continuité et de sa prévisibilité. Selon la Constitution, la Confédération assure l'indépendance et la sécurité du pays et en favorise la prospérité. Elle s'engage en outre en faveur d'un ordre international juste et pacifique. Enfin, elle contribue notamment à soulager les populations dans le besoin et à lutter contre la pauvreté, ainsi qu'à promouvoir le respect des droits de l'homme, la démocratie, la coexistence pacifique des peuples et la préservation des ressources naturelles.

La politique extérieure suisse se caractérise traditionnellement par sa grande proximité avec les citoyens. Elle est, à cet égard, la parfaite expression de la culture politique de notre pays, où les politiques intérieure et extérieure sont plus étroitement imbriquées que dans de nombreux autres États. Dans le contexte actuel, cette proximité avec les citoyens est un véritable atout pour notre pays. La politique extérieure de la Suisse est axée sur la prospérité de sa population et tient donc davantage compte de cet élément que ce n'est le cas dans d'autres pays. Les échanges et la collaboration du Conseil fédéral avec le Parlement et les cantons sur les questions de politique extérieure ont toujours été intenses et se sont même renforcés ces dernières années. De plus, les valeurs qui font la force de la Suisse à l'intérieur de ses frontières guident aussi sa politique à l'étranger. Cela signifie concrètement qu'en tant que pays se caractérisant par sa diversité à la fois linguistique, culturelle et religieuse, la Suisse s'engage en faveur du dialogue et des solutions inclusives, de l'intégration et du partage du pouvoir, de l'État de droit et des principes humanitaires, d'une société civile libre et forte ainsi que de la subordination du pouvoir au droit. Une autre constante de la Suisse est qu'elle fait toujours bonne figure dans les comparaisons internationales, en raison de sa stabilité politique, de la compétitivité de son
économie, de son faible taux de chômage et de sa capacité d'innovation. La Suisse est la 17e puissance économique mondiale. Elle n'est donc pas à cet égard un «petit» État, mais se présente plutôt comme un État d'importance moyenne, qui dispose d'instruments efficaces pour promouvoir ses valeurs et ses intérêts et dont la voix est écoutée au niveau international.

Dans ce contexte, le Conseil fédéral a adopté en février 2016 une nouvelle stratégie de politique étrangère, qui s'inscrit certes dans la continuité, mais présente aussi quelques changements de priorités. Cette stratégie sert de guide à la politique extérieure suisse. Le Conseil fédéral continue en l'occurrence de miser sur une politique étrangère indépendante et participative. Dans un monde de plus en plus multipolaire, la Suisse n'est rattachée à aucune grande puissance. Même si elle fait partie de l'Europe et partage les valeurs européennes, elle mène sa propre politique extérieure, en toute indépendance. Cette position est certes très exigeante, mais elle offre à notre 1156

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pays de grandes chances. La Suisse peut jeter des ponts pour débloquer des situations, coopérer avec les partenaires les plus divers et prendre des initiatives. Elle s'engage résolument en faveur de la liberté, du droit et de la société civile, mais le fait objectivement, discrètement, opportunément et en misant sur la persuasion. En tant que pays fortement tributaire de ses relations avec le monde et tourné vers l'exportation, la Suisse a besoin d'un environnement stable et d'un ordre international viable et juste pour préserver sa sécurité et sa prospérité. Il est donc important ­ et cela d'autant plus en période de crise et d'insécurité ­ qu'elle contribue très largement et de façon créative à façonner son environnement, conformément à ses intérêts et à ses valeurs.

Dans sa nouvelle stratégie, le Conseil fédéral souligne la nécessité d'une gouvernance de la mondialisation. La mondialisation a offert et continue d'offrir, tant au monde qu'à notre pays, de grandes chances, dont la Suisse a déjà largement profité.

C'est grâce à la mondialisation, en particulier, que la pauvreté dans le monde a considérablement diminué. Il y a cependant un revers à la médaille, qui s'est fait de plus en plus patent ces dernières années: bien qu'elle favorise la prospérité globale, la mondialisation crée également de nouvelles inégalités, surtout à l'intérieur même des États. C'est pourquoi la Suisse entend contribuer, sur la base de ses valeurs et conjointement avec d'autres États, à assurer une gouvernance de la mondialisation qui garantisse que celle-ci profite au plus grand nombre et qui garantit la préservation des fondements naturels. Dans le même temps, le Conseil fédéral continuera à se mobiliser pour un ordre international reposant sur la démocratie, la liberté, le multilatéralisme et le libre-échange. Le cloisonnement des États et le protectionnisme ne sont pas dans l'intérêt de notre pays et auraient un impact négatif sur sa prospérité.

Dans ce contexte et eu égard aussi bien aux changements en cours dans l'environnement de la Suisse qu'aux incertitudes pesant sur cet environnement, le Conseil fédéral a défini, dans sa stratégie de politique étrangère 2016­2019, les quatre grands axes suivants: premièrement, le Conseil fédéral souhaite que la Suisse entretienne avec l'UE des relations de partenariat
susceptibles d'évoluer grâce à la consolidation et au renouvellement de la voie bilatérale et qu'elle s'attache également à développer d'étroites relations avec les pays membres de l'UE/AELE. L'UE et ses États membres restent donc les principaux partenaires politiques et économiques de notre pays. Deuxièmement, la Suisse doit approfondir ses relations avec des partenaires mondiaux. Pour le Conseil fédéral, ce deuxième axe stratégique doit permettre à la Suisse de tenir compte des basculements géopolitiques. Troisièmement, il s'agit de renforcer l'engagement de la Suisse en faveur de la paix et de la sécurité, en réaction à la multiplication des crises qui affectent son environnement. De plus, dans un monde de plus en plus polarisé et fragmenté, ses bons offices devraient encore gagner en importance. En particulier, grâce à son habileté à jeter des ponts et à sa politique extérieure indépendante, la Suisse peut contribuer utilement aussi bien aux efforts de règlement pacifique des conflits qu'à la recherche de réponses communes aux défis mondiaux. Enfin, quatrièmement, la Suisse doit oeuvrer pour un monde sans pauvreté et pour un développement durable et contribuer à l'instauration de conditions-cadres internationales propices à la prospérité. Ce faisant, elle doit tenir compte des interactions croissantes que l'on observe entre le développement durable

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et la paix. Ces interactions se reflètent également dans l'Agenda 2030, dont les objectifs de développement durable sont une référence importante pour notre pays.

1.2.2

Nouveau cadre d'action pour le développement et la paix

Le Conseil fédéral a présenté en 2016 un nouveau cadre d'action destiné à assurer l'application d'un volet important de sa politique extérieure. Le message du 17 février 2016 sur la coopération internationale 2017­20201 prévoit en l'occurrence cinq instruments: l'aide humanitaire, la coopération technique et aide financière, des mesures de politique économique et commerciale, la coopération à la transition dans les États d'Europe de l'Est ainsi que les mesures de promotion de la paix et de la sécurité humaine. Chacun de ces instruments a certes son propre rôle à jouer, mais il s'agit d'en axer l'utilisation sur la réalisation d'objectifs stratégiques communs de manière plus systématique que ce n'était le cas jusqu'ici, afin de créer des synergies et d'augmenter l'efficacité de l'engagement de la Suisse.

Soulignons que le message sur la coopération internationale intègre pour la première fois la promotion civile de la paix et de la sécurité humaine. Par cette mesure, le Conseil fédéral tient compte des interactions croissantes évoquées plus haut entre le développement durable et la paix: sans développement durable, pas de paix, et sans paix, pas de développement durable et sans le respect des droits de l'homme, aucun de ces objectifs ne peut être atteint. La multiplicité des causes des conflits ainsi que des situations de fragilité et du non-développement exigent en effet un entrelacement accru de l'utilisation des divers instruments de la coopération internationale. Dans ce contexte, une priorité est donnée à la mesurabilité de l'impact de l'engagement suisse.

En comparaison internationale, la Suisse est nettement en avance dans l'application de cette nouvelle approche, sur laquelle se fonde également l'Agenda 2030. Abstraction faite du message sur la coopération internationale 2017­2020, cette avance se mesure aussi au fait qu'au niveau opérationnel, on compte déjà environ la moitié des 44 stratégies de coopération actuelles qui impliquent la totalité des acteurs de la coopération. Cette approche interdépartementale concertée (Whole of Government Approach), qui veut que tous les offices opérant dans le même pays ou dans la même région élaborent et mettent en oeuvre des stratégies communes, est exigeante.

Le regroupement des instruments requiert en effet un gros travail de coordination, ainsi
que la suppression de tous les obstacles administratifs internes. Cette approche est très efficace et se fait même incontournable dans de nombreux contextes, avant tout dans les contextes fragiles et touchés par des conflits, eu égard à la complexité des défis qui s'y posent.

Le nouveau cadre d'action de la coopération internationale permet à la Suisse de s'engager plus efficacement et plus durablement pour promouvoir la paix, réduire la pauvreté et offrir de meilleures perspectives aux personnes sur le terrain. Compte tenu des défis actuels, le message prévoit notamment de développer les capacités de 1

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médiation, d'augmenter légèrement l'aide humanitaire et de renforcer l'engagement de la Suisse dans les contextes fragiles. Il s'agit également d'augmenter les moyens consacrés à l'éducation de base et à la formation professionnelle. Une place importante est en outre accordée au traitement des défis mondiaux qui se posent dans les domaines de l'eau, du changement climatique, de la sécurité alimentaire et de la migration, en notant qu'ici aussi les causes et les êtres humains, et non les symptômes, restent au premier plan. Enfin, le message souligne le rôle majeur que joue le secteur privé dans le développement durable.

Parmi les thèmes qui ont gagné en importance et se situent à l'interface entre paix et développement figurent la prévention de l'extrémisme violent, la promotion de la diplomatie de l'eau et les défis liés aux réfugiés et à la migration. La Suisse s'engage résolument et sans réserve dans chacun de ces thèmes, mais plus particulièrement dans celui de la migration, que le Conseil fédéral considère comme très important en relation avec la coopération internationale. Environ 20 % des dépenses de cette dernière relèvent de la migration. Dans les pays et les régions qu'elle juge particulièrement importants du point de vue de la politique migratoire, la Suisse s'engage aussi sur le terrain, toujours dans le cadre de la coopération internationale. Sont concernés la Syrie, l'Iraq, l'Afrique du Nord, la Corne de l'Afrique, la région des Grands Lacs, l'Afghanistan et les Balkans occidentaux. Le Conseil fédéral examine en outre une reprise de la coopération au développement en Érythrée, malgré toutes les difficultés que cela implique. Dans une première phase, la Suisse y a lancé un projet pilote dans le domaine des emplois et de la formation professionnelle pour les jeunes et prévoit d'amplifier cet engagement avec des projets additionnels. Cette phase initiale permettra de vérifier si l'Érythrée est prête à coopérer. Le Conseil fédéral entend établir ensuite progressivement un partenariat dans lequel chacune des parties s'engagera concrètement, étape par étape: la Suisse sous la forme de contributions au développement et l'Érythrée sous celle d'améliorations de la situation en matière de droits de l'homme ­ y compris la possibilité pour le CICR de visiter des prisons ­ ainsi que de mesures
relevant des domaines de la migration et de l'économie.

En septembre 2016, le Parlement a approuvé les cinq crédits-cadres des instruments de la coopération internationale couvrant la période 2017 à 2020. Cela représente légèrement moins qu'un francs par habitant par jour pour cette période. Les dépenses consacrées à l'aide publique au développement représentent donc 0,48 % du PIB, y inclus les coûts d'asile imputables. Dans le même temps, le Parlement a donné mandat au Conseil fédéral d'associer stratégiquement, chaque fois que ce serait judicieux, la coopération internationale et la politique migratoire, autrement dit de lier le traitement des causes des conflits et des mouvements migratoires et les efforts accomplis en vue de la conclusion d'accords et de partenariats dans le domaine de la migration. Avec la structure interdépartementale pour la coopération migratoire internationale mise sur pied ces dernières années, le Conseil fédéral dispose d'une base appropriée pour mener une politique migratoire cohérente et appliquer efficacement le modèle de la conditionnalité stratégique.

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1.2.3

Vaste réseau extérieur comme base éprouvée

Le réseau extérieur de la Suisse ­ qui est de première importance aux fins de la mise en oeuvre de la politique étrangère ­ repose sur les principes de l'universalité, de la cohérence et de l'efficacité. Sa forte présence à l'étranger, avec 170 représentations assurées par du personnel diplomatique de carrière et 200 représentations honoraires, est à la fois une caractéristique et un atout de notre pays. Ce réseau extérieur est la condition à laquelle la Suisse peut mener une politique étrangère indépendante et participative et défendre ses intérêts politiques et économiques. Dans l'environnement actuel, il lui permet en outre de se positionner de manière optimale aux niveaux tant européen que mondial et de se mobiliser efficacement sur le terrain en faveur de la paix et de la sécurité, du développement durable et de la prospérité.

Le réseau extérieur doit sans cesse être adapté à l'évolution de la situation mondiale.

La Suisse se doit en effet de réagir aux changements observés sur la scène internationale et de tenir compte par exemple de l'évolution des rapports de force politiques ainsi que des situations de crise. Elle suit également de près l'évolution des besoins des Suisses de l'étranger, les habitudes de voyage de sa population ainsi que les changements intervenant sur les divers marchés économiques mondiaux, en particulier du point de vue de leur importance. En 2016, la Suisse a par exemple ouvert deux nouveaux consulats généraux dans des métropoles économiques, l'un à Lagos (Nigéria) et l'autre à Chengdu (Chine). Afin d'optimiser la cohérence, l'efficacité et l'efficience de son réseau extérieur, le DFAE s'emploie actuellement, dans les pays où la Suisse dispose à la fois d'une ambassade et d'un bureau de la DDC, à regrouper ces structures dans des représentations intégrées. Au final, le nombre de représentations intégrées sera de 40. Le processus d'intégration est en cours ou déjà terminé pour 35 d'entre elles. Un examen par les pairs indépendant a montré que les premières expériences faites avec ces représentations sont positives. Les défis que pose encore ce processus de transformation sont connus du DFAE, qui s'applique à les surmonter.

Les représentations du DFAE et les autres représentations de la Confédération doivent être regroupées sous un même toit partout où cela est judicieux
et possible.

C'est ainsi que les 21 Swiss Business Hubs ont été intégrés au réseau extérieur, sur les plans tant organisationnel qu'administratif, de même que certaines agences de Suisse Tourisme. Des solutions innovantes sont en outre mises en oeuvre avec divers pays partenaires. Citons pour exemple le regroupement des représentations diplomatiques ou consulaires de plusieurs pays dans un même immeuble. La Suisse a déjà conclu de tels contrats de colocation avec les Pays-Bas (pour les représentations à Oman et en Angola; une colocation est également prévue en Norvège) et avec le Danemark (pour le Nigéria). D'autres projets sont en cours de réalisation avec l'Allemagne, l'Autriche et la Norvège.

Les mesures d'économies imposées au DFAE ont un impact sur le réseau extérieur également, comme en témoigne la fermeture de l'ambassade suisse au Paraguay, fin 2015. Des mesures d'économies supplémentaires devraient, dans la mesure du possible, être mises en oeuvre via des réorganisations, comme par exemple le regroupement de divisions consulaires dans des centres consulaires régionaux, l'exploitation de synergies et un ajustement de la liste des services fournit par les 1160

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représentations. Avec ces mesures, le potentiel de synergie dans le cadre du réseau extérieur est largement épuisé. Des consignes d'économie additionnelles pourraient conduire à une réduction du réseau extérieur ainsi que de ses services.

1.3

État de mise en oeuvre des priorités de la politique extérieure

Dans ses rapports de politique extérieure, le Conseil fédéral dresse chaque année un bilan intermédiaire de la mise en oeuvre de sa stratégie de politique étrangère.

D'importantes étapes ont été franchies dans la consolidation et le développement de la voie bilatérale au cours de la première année de la stratégie de politique étrangère 2016­2019. Le développement des relations avec les partenaires mondiaux de la Suisse s'est poursuivi en 2016. Les bases d'une action renforcée dans le domaine de la paix et de la sécurité ont été posées et la Suisse a régulièrement été sollicitée pour ses bons offices, même si les efforts de paix internationaux aient produit peu des résultats positifs. Le bilan peu favorable des efforts de paix internationaux au cours de l'année sous revue a constitué un véritable défi pour l'engagement de la Suisse.

Plus que jamais, le travail au service de la paix n'est pas un simple sprint, mais confine à un véritable marathon. La mise en oeuvre de l'Agenda 2030 a par ailleurs démarré. Dans un domaine primordial pour la gouvernance de la mondialisation, à savoir la migration, la Suisse s'est vu confier un rôle important dans l'élaboration d'un cadre global au sein de l'ONU.

Le nombre de contacts bilatéraux officiels à l'échelon du Conseil fédéral, du chancelier de la Confédération et des secrétaires d'État a encore augmenté en 2016, conformément à la volonté exprimée par le Conseil fédéral de permettre à la Suisse de se positionner de façon optimale sur la scène internationale, de promouvoir ses intérêts et ses valeurs et de faire face aux défis qui l'attendent. Plus de la moitié de ces rencontres se sont déroulées avec des États européens, environ un quart avec des États voisins de la Suisse. De nombreuses entrevues officielles ont également eu lieu en 2016 avec des États non européens ­ l'Asie étant à cet égard la région la plus représentée. Cet équilibre entre contacts européens et mondiaux correspond à la stratégie de politique étrangère de la Suisse.

1.3.1

Consolidation progressive et développement de la voie bilatérale

L'établissement de relations de partenariat réglementées et évolutives avec l'UE constitue une priorité de la politique extérieure helvétique. La stabilité et la sécurité juridique des relations avec l'UE sont en effet essentielles pour la prospérité de la Suisse. Elles déterminent l'accès aux principaux marchés étrangers, le climat d'investissement ainsi que la préservation des emplois et du savoir-faire. Les échanges commerciaux entre la Suisse et l'UE atteignent presque un milliard de francs par jour. Par ailleurs, la coopération entre la Suisse et l'UE constitue l'un des piliers de l'ordre international libéral. L'UE et ses États membres jouent un rôle

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important dans la promotion de la paix et de la sécurité ainsi que dans la gouvernance de la mondialisation.

Dans le cadre des relations entre la Suisse et l'UE, l'ambition de mener une politique étrangère de proximité implique pour le Conseil fédéral de consolider et de développer la voie bilatérale. Celle-ci a fait ses preuves et représente la seule option acceptable pour une majorité du peuple suisse. L'approche bilatérale a en effet été confirmée à sept reprises par le souverain en votation populaire au cours des quinze dernières années. Parallèlement, le Conseil fédéral souhaite mieux gérer la migration en provenance des pays de l'UE, conformément au nouvel article constitutionnel 121a.

Au cours de l'année sous revue, la mise en oeuvre de cette disposition constitutionnelle a été au centre de la politique européenne de la Suisse. Le Conseil fédéral s'est concentré sur la recherche d'une solution consensuelle avec l'Union européenne qui soit conforme aux accords bilatéraux et offre une base solide pour la consolidation et le développement de la voie bilatérale. Afin de respecter le délai de trois ans imparti pour la mise en oeuvre de la nouvelle disposition constitutionnelle, il a présenté en mars une solution alternative unilatérale dans le cadre du projet de loi. Celle-ci ne serait toutefois pas compatible avec l'accord sur la libre circulation des personnes et ouvrirait une période d'incertitudes accrues au niveau de la politique européenne de la Suisse.

L'UE ayant opposé une fin de non-recevoir à la demande de la Suisse d'engager des négociations sur une adaptation de l'accord du 21 juin 1999 sur la libre circulation des personnes (ALCP)2, les efforts se sont concentrés sur la recherche d'une solution consensuelle à la question des modalités d'interprétation de l'art. 14, par. 2, ALCP.

Il s'agissait d'identifier les critères pouvant permettre de prendre des mesures en cas de difficultés sérieuses d'ordre économique ou social. Après avoir bien progressé en 2015, les négociations avec l'UE ont été interrompues par Bruxelles durant le premier semestre 2016 dans l'attente du résultat du référendum sur le Brexit. Les pourparlers ont certes repris après le vote britannique, mais ont été marqués par l'issue du scrutin et par un durcissement de l'attitude de la Commission européenne vis-àvis
des propositions helvétiques. Malgré plusieurs rencontres entre le président de la Confédération et le président de la Commission européenne Jean-Claude Juncker, les nombreux contacts avec la présidence du Conseil de l'UE et une intense activité diplomatique auprès des États membres, les négociations avec l'UE n'ont pas abouti à une solution mutuellement convenue dans les délais prévus.

Dans ce contexte, les Chambres fédérales ont adopté le 16 décembre la loi d'application de l'art. 121a Cst. Un mécanisme de priorité à l'embauche en faveur des demandeurs d'emploi inscrits auprès des services régionaux de placement sera instauré durant une période limitée dans les groupes professionnels, les secteurs d'activités et les régions économiques qui connaissent un taux de chômage supérieur à la moyenne. Le Conseil fédéral considère que cette loi d'application est compatible avec l'ALCP. La variante de mise en oeuvre choisie par le Parlement constitue donc un engagement clair en faveur de l'approche bilatérale. Elle offre à la Suisse et à l'UE l'opportunité de normaliser leurs relations et de renforcer la voie bilatérale. Le 2

RS 0.142.112.681

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Conseil fédéral s'attend à ce que l'UE soit favorable à une telle normalisation. La Suisse est le troisième partenaire commercial de l'UE et ­ aujourd'hui plus que jamais ­ un pôle de stabilité dans une Europe en crise. Les deux parties profitent de cette stabilité politique et du dynamisme de leurs relations économiques.

Suite à la décision du Parlement, le Conseil fédéral s'est engagé à ratifier le protocole concernant l'extension de l'ALCP à la Croatie. Cela permettra à la Suisse de retrouver, pour la première fois depuis le début de la huitième génération de programmes, dès janvier 2017 son statut d'État pleinement associé au programme-cadre de recherche «Horizon 2020». Dans le cadre du développement de la relation d'ensemble de la Suisse avec l'UE, le Conseil fédéral se prononcera en 2017 sur le renouvellement éventuel de la contribution de la Suisse à l'atténuation des disparités économiques et sociales dans l'Union européenne élargie.

Après la normalisation des relations, la pérennisation de la voie bilatérale passera par la résolution d'une série de questions institutionnelles liées aux relations entre la Suisse et l'UE. Celles-ci porteront premièrement sur les modalités de reprise des développements du droit communautaire qui concernent les accords d'accès au marché passés avec la Suisse, deuxièmement sur l'interprétation de ces accords, troisièmement sur la surveillance de leur application et quatrièmement sur le règlement des litiges entre les parties. Le Conseil fédéral est prêt à mener à terme les négociations en cours à ce sujet sur la base du mandat qui a été approuvé. D'autres progrès peuvent être réalisés si l'UE modifie sa position sur certains points. Un accord sur les questions institutionnelles permettra d'actualiser les accords existants réglant l'accès au marché entre la Suisse et l'UE et, si nécessaire, de conclure de nouveaux accords d'accès au marché. La voie bilatérale garantit la sécurité juridique et la prévisibilité à long terme des accords avec l'UE, ce qui est vital pour l'économie helvétique.

Le Conseil fédéral continuera également à suivre avec attention les négociations sur la sortie du Royaume-Uni de l'UE. Les relations bilatérales avec Londres reposent largement sur les accords bilatéraux conclus entre la Suisse et l'UE. L'objectif du Conseil fédéral est de
définir un nouveau cadre qui régira les relations bilatérales entre la Suisse et le Royaume-Uni lorsque celui-ci sortira de l'UE, afin d'éviter un vide juridique, d'assurer la sécurité juridique et de renforcer les relations bilatérales entre les deux pays. D'importants travaux préparatoires ont été menés au sein de l'administration afin de maintenir les contacts avec Londres et de préparer d'éventuels mandats de négociation sur la base de la stratégie adoptée par le Conseil fédéral en octobre 2016 et du mandat correspondant.

Le développement futur de l'UE et la réorganisation des relations entre Londres et Bruxelles sont encore difficiles à prévoir. Ces deux facteurs peuvent avoir d'importantes répercussions potentielles sur la politique européenne de la Suisse. Le Conseil fédéral continuera à oeuvrer résolument et de manière constructive à la consolidation et au développement de la voie bilatérale. Il portera un regard attentif sur le changement des conditions-cadres de la politique européenne et dressera à cette fin un état des lieux de la politique européenne en 2017.

Le Conseil fédéral entend maintenir sa collaboration très étroite avec les États limitrophes sur les questions de politique européenne ainsi que sur d'autres thèmes. La 1163

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Suisse entretient des liens économiques et humains particulièrement forts avec ses voisins. Cela se manifeste notamment par le fait qu'un quart de l'ensemble des frontaliers européens travaille dans notre pays. La stabilité des relations Suisse-UE, mais aussi l'instauration d'une coopération étroite avec les pays limitrophes dans d'autres domaines de la politique étrangère vont dans le sens des intérêts de la Suisse et de ses voisins. La bonne collaboration qui s'est instaurée sur les questions relatives à l'OSCE avec les trois États occupant la présidence de cette organisation en 2016 (Allemagne), 2017 (Autriche) et 2018 (Italie) ainsi qu'avec le Liechtenstein en est l'illustration.

La participation du président de la République française François Hollande, de la chancelière d'Allemagne Angela Merkel, du président du Conseil de ministres italien Matteo Renzi, du chancelier d'Autriche Christian Kern et du chef du gouvernement du Liechtenstein Adrian Hasler à la cérémonie d'inauguration du nouveau tunnel ferroviaire du Saint-Gothard, en juin, symbolise les liens étroits qui unissent la Suisse à ses voisins ainsi que la contribution de notre pays à l'intégration de l'Europe. Ces personnalités ont été reçues par le Conseil fédéral in corpore. L'année sous revue a dans l'ensemble été marquée par l'intensité des contacts avec les États limitrophes qui ont permis certaines avancées dans la résolution des problèmes bilatéraux. Un accord franco-suisse sur la fiscalité applicable à l'aéroport de BâleMulhouse a par exemple été paraphé le 2 novembre. Il permet de mettre en place un régime juridique pérenne dans le domaine fiscal et d'assurer le développement et l'attractivité de l'aéroport binational. Dès que l'UE aura décidé d'accorder l'exception de la TVA dans le secteur suisse de l'aéroport, confirmant la pratique actuelle consistant à y appliquer la TVA suisse, les procédures nationales de signature et de ratification du projet d'accord pourront être achevées. En Suisse, l'accord sera soumis au Parlement. Certains aspects spécifiques aux relations bilatérales ont également été approfondis. L'accord de coopération policière et douanière avec l'Italie qui est entré en vigueur en 2016 en est un bon exemple.

1.3.2

Intensification et diversification des partenariats internationaux

Le développement des relations avec des partenaires internationaux inscrit dans la stratégie de politique étrangère s'opère à trois niveaux. Premièrement, le Conseil fédéral a établi en 2005 une liste de pays prioritaires (États-Unis, Japon, Turquie, États du BRICS) avec lesquels la Suisse souhaite établir des partenariats stratégiques en raison de leur importance politique et économique. Les relations avec la Chine ont connu une évolution particulièrement dynamique au cours de l'année sous revue.

Le maintien d'un dialogue constant avec la Turquie a constitué une tâche à la fois importante et exigeante. Deuxièmement, la Suisse a noué des relations étroites avec de nombreux autres États du G20 au cours de ces dernières années. Elle a poursuivi ses efforts en 2016 et de nombreux progrès qualitatifs ont été réalisés, en particulier dans le cadre des relations avec le Canada et l'Argentine. Troisièmement, la Suisse s'efforce d'approfondir ses relations avec des organisations régionales non européennes et a pris à cet égard d'importantes mesures en 2016. Au final, la Suisse est

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parvenue à diversifier, voire dans certains cas à intensifier ses partenariats internationaux durant l'année sous revue.

Eu égard aux relations instaurées en 2005 avec un certain nombre de pays prioritaires, c'est incontestablement le partenariat avec la Chine qui a connu l'essor le plus dynamique en 2016. A l'occasion de la visite du président de la Confédération à Pékin et à Shanghai au printemps 2016, la Suisse et la Chine ont signé une déclaration conjointe de partenariat stratégique innovateur visant à élargir et à approfondir les relations. Deux dialogues politiques ont par ailleurs été menés en janvier et en décembre sous la direction du chef du DFAE. À l'invitation de la Présidence chinoise du G20, la Suisse a également participé aux deux réunions des ministres des finances du G20. Le président chinois XI Jinping effectuera une visite d'État en Suisse au début 2017.

La Suisse a renforcé ses relations avec l'Inde, dont le premier ministre a été reçu à Genève par le président de la Confédération pour un entretien officiel. Les relations entre les deux pays peuvent encore être renforcées. À noter que les négociations relatives à un accord de libre-échange entre l'AELE et l'Inde pourraient reprendre après une pause de deux ans et demi. Les relations avec le Brésil, l'Afrique du Sud et le Japon ont évolué dans le cadre habituel. Des rapports intenses et diversifiées ont été noués avec la Russie au cours des dix dernières années. Après le déclenchement de la crise ukrainienne, la Suisse a maintenu le dialogue, qui porte désormais davantage sur la diplomatie de crise et sur les thèmes liés à la promotion de la paix.

L'année sous revue a été marquée par une visite du chef du DFAE à Moscou et par les consultations politiques au niveau des secrétaires d'État.

La politique de bons offices de la Suisse continue à jouer un rôle important dans ses relations avec les États-Unis. Eu égard aux relations particulières qui découlent du mandat de puissance protectrice assumé pour le compte des États-Unis en Iran, la Suisse a facilité les négociations confidentielles entre les deux États qui ont entraîné la libération de onze personnes en janvier. Notre pays a maintenu des contacts étroits avec Washington au cours de l'année sous revue. Suite aux élections présidentielles, une importance particulière a été
accordée à la prise de contact avec la nouvelle administration mise en place par Donald Trump. Le Conseil fédéral souhaite poursuivre son étroite coopération avec les États-Unis. La Suisse et les États-Unis, pays dans lequel les sociétés helvétiques offrent un demi-million d'emplois, sont des partenaires commerciaux et investisseurs importants. Un fort potentiel de coopération subsiste dans les domaines de la formation et de l'innovation. Le Conseil fédéral continuera à l'avenir à défendre la position de la Suisse dans des dossiers comme la libéralisation du commerce mondial, le droit international et un ordre mondial réglementé et basé sur le multilatéralisme, ainsi que la lutte contre le changement climatique. Notre pays maintient par ailleurs sa politique de bons offices et d'accueil de négociations en toute discrétion.

Les relations avec la Turquie ont été marquées par l'évolution de la situation intérieure de ce pays. Suite à ces développements, le Conseil fédéral a instauré un dialogue ouvert, direct, critique et constructif avec le gouvernement turc. De nombreuses réunions formelles et informelles se sont déroulées tout au long de l'année entre les ministres des affaires étrangères. Le Conseil fédéral a condamné le coup d'État avorté et reconnaît le droit de la Turquie à se défendre contre les tentatives de 1165

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renversement du pouvoir et les attaques terroristes. Il a toutefois exprimé sa préoccupation face aux nombreux licenciements et arrestations qui ont suivi cette tentative, et rappelé que la proclamation de l'état d'urgence ne dispense pas la Turquie de respecter ses engagements internationaux en matière de droits de l'homme. La Suisse a appelé plusieurs fois la Turquie à respecter les libertés fondamentales et les principes de l'État de droit et de la proportionnalité, et à se conformer à ses engagements internationaux. Outre le dialogue bilatéral, la Suisse a fait entendre sa position dans les forums multilatéraux que sont l'OSCE, le Conseil de l'Europe et l'ONU. En raison des tensions persistantes et de la détérioration de la situation dans le Sud-Est de la Turquie, la Suisse a exprimé à plusieurs reprises sa volonté de contribuer activement au rapprochement des parties si la demande lui en est faite. Au niveau des relations bilatérales, des progrès ont été réalisés dans les négociations sur les accords de réadmission qui ont été menées à terme à la fin de l'année. Le Conseil fédéral devra encore donner son aval en vue de la signature de l'accord.

S'agissant des autres États membres du G20, les relations avec le Canada se sont intensifiées grâce aux visites des chefs du DFAE et du DETEC à Ottawa et à une rencontre des ministres des affaires étrangères à New York et à Hambourg. Un nouvel élan a été donné aux relations avec l'Argentine, qui assumera la présidence du G20 en 2018. Les visites du président de la Confédération en Corée du Sud et au Mexique, des chefs du DETEC en Indonésie et du DFAE en Arabie saoudite ont également donné de nouvelles impulsions aux relations avec les États concernés, la rencontre de Ryad étant placée sous le signe des bons offices de la Suisse. La Suisse s'est également efforcée d'intensifier ses relations avec des États n'appartenant pas au G20, notamment lors d'une visite d'État du président de la Confédération à Singapour et d'une visite du chef du DFAE au Nigéria. De nombreux contacts ont eu lieu à divers niveaux avec l'Iran au cours de la période sous revue. Les deux pays ont adopté une feuille de route destinée à approfondir les relations bilatérales lors de la visite officielle du président de la Confédération à Téhéran.

Des progrès ont enfin été réalisés dans
la mise en oeuvre de l'objectif visant à renforcer la coopération avec les organisations régionales. La Suisse a obtenu en juillet le statut de partenaire de dialogue sectoriel attribué par l'Association des nations de l'Asie du Sud-Est (ANASE). Notre pays pourra ainsi participer à l'avenir aux rencontres de haut niveau de l'ANASE et renforcer sa coopération avec cette organisation dans des domaines d'intérêt commun comme le renforcement des relations économiques, la coopération au développement ou la diminution des risques de catastrophe. La Communauté des Caraïbes (CARICOM) a pour sa part approuvé la demande de la Suisse d'accréditer un ambassadeur en qualité d'observateur auprès de l'organisation. S'agissant de la Ligue arabe, les préparatifs en vue de l'accréditation d'un ambassadeur et de la signature d'une déclaration de coopération sont bien avancés. En Afrique, l'augmentation du nombre de contacts ministériels et le renforcement de la coopération dans le cadre régional constituent également des nouvelles réjouissantes. La Suisse et l'Union africaine ont notamment signé une déclaration d'intention visant à renforcer la coopération dans le domaine de la paix. Un ambassadeur de Suisse a pour la première fois été accrédité auprès de la Communauté de l'Afrique de l'Est (EAC). La coopération avec l'Autorité intergouvernementale sur le développement (Intergovernmental Authority on Development, IGAD) formalisée depuis 2014 se poursuit de manière satisfaisante.

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1.3.3

Bons offices et gouvernance de la mondialisation en accord avec les valeurs de la Suisse

En 2016, la crise syrienne a été au coeur de l'engagement de la Suisse pour la paix et la sécurité, comme en témoignent les activités qu'elle a conduites dans ce cadre et qui sont présentées en détail dans le chapitre introductif. En résumé, trois points méritent d'être soulignés. Tout d'abord, la Suisse s'est fortement mobilisée en faveur d'une solution politique. Elle a non seulement soutenu les efforts de paix déployés par l'envoyé spécial de l'ONU, Staffan de Mistura, à Genève, mais aussi contribué à bien d'autres initiatives de dialogue, pour partie informelles. D'ailleurs, dans le cadre de la diplomatie de crise mise en place à l'échelle internationale, diverses rencontres et négociations portant sur la Syrie se sont déroulées sur son sol.

En outre, la Suisse a eu à coeur de combattre l'impunité et de promouvoir le respect du droit international humanitaire. Enfin, elle a fourni une aide humanitaire aux populations en détresse tout en s'attachant à promouvoir le renforcement de leur résilience.

Compte tenu des perspectives d'insécurité quant à une solution politique, l'aide aux victimes du conflit sur place constituera un volet important de l'action de la Suisse en 2017. Depuis le début des hostilités en 2011, la Suisse a investi plus de 250 millions de francs dans des missions d'aide humanitaire et d'amélioration des conditions de vie des populations dans le besoin. Une enveloppe de 66 millions de francs supplémentaires est prévue pour 2017. Ces fonds seront également affectés à l'aide humanitaire ainsi qu'à des programmes de renforcement de la résilience des personnes concernées. Au titre de la coopération au développement et en vue d'une meilleure protection des réfugiés, une aide accrue sera également fournie en Jordanie, au Liban et en Turquie. De plus, le DFAE prévoit d'ouvrir un bureau humanitaire à Damas en 2017, afin de veiller à ce que l'assistance apportée par la Suisse soit mise en oeuvre de manière aussi efficace que possible localement. En parallèle, ce bureau permettra à la Suisse de s'affirmer en tant qu'acteur crédible sur le terrain, où elle pourra soutenir les organisations humanitaires dans leur travail et s'associer aux opérations conduites pour venir en aide à un maximum de personnes. Le Conseil fédéral n'est pas seulement résolu à renforcer son action destinée à
améliorer les perspectives des populations sur place: le 9 décembre, il a également décidé que la Suisse accueillerait, en 2017 et 2018, 2000 autres personnes particulièrement vulnérables auxquelles le Haut-Commissariat des Nations Unies pour les réfugiés (HCR) a déjà accordé le statut de réfugié.

En dehors de la Syrie, la Suisse est intervenue dans la gestion de nombreux conflits au cours de l'année sous revue. Elle a continué d'apporter son soutien aux efforts de paix engagés par l'ONU au Yémen et en Libye. De même, elle a amplement participé aux initiatives de l'OSCE en faveur de la paix. Dans le cadre du conflit ukrainien, elle a mis à disposition un coordinateur pour le groupe de travail consacré à l'action humanitaire au sein du groupe de contact trilatéral, tout comme elle a dépêché un chef suppléant et une douzaine de moniteurs pour la mission d'observation de l'OSCE en Ukraine (SMM), auxquels s'ajoute le chef de la mission d'observation de l'OSCE aux postes-frontières. Outre son engagement sans faille aux côtés de l'OSCE, la Suisse agit sur d'autres fronts en Ukraine: elle y est aussi partie prenante 1167

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à la mission de conseil de l'UE sur la réforme du secteur de la sécurité civile, y appuie les activités du Conseil de l'Europe et de l'ONU, et met son expertise au service du nouveau ministère ukrainien chargé des territoires temporairement occupés et des déplacés internes. Elle intervient aussi dans la gestion des conflits dans le Caucase du Sud et, en 2017, elle affectera de nouveau son représentant spécial de la présidence de l'OSCE dans cette région.

Les bons offices de la Suisse sont toujours extrêmement demandés. En 2016, ils lui ont valu de participer à une vingtaine de processus de médiation. L'expérience et la crédibilité dont elle jouit en matière d'accompagnement des négociations ainsi que le savoir-faire qu'elle a développé sur des sujets tels que le partage du pouvoir lui permettent d'apporter des contributions précieuses dans le contexte mondial actuel.

C'est pourquoi, la Suisse continue de développer ses capacités de médiation. En collaboration avec le DFAE, l'EPF de Zurich est en train de concevoir un programme de formation international (Master of Advanced Studies) axé sur la médiation au service de la paix et du règlement des conflits. Il doit permettre à la Suisse, aux États partenaires et aux organisations internationales de disposer d'un plus vaste réservoir de diplomates et d'experts dotés du bagage nécessaire pour accompagner les processus de paix, si complexes aujourd'hui. Il viendra en outre conforter le positionnement de la Suisse en tant que centre de compétences mondial en matière de médiation.

En 2016, la Suisse a apporté son soutien à des processus de médiation en Syrie et en Ukraine, mais aussi en Colombie, où elle a notamment mis à profit son expertise pour aider à l'élaboration d'un accord définitif de cessez-le-feu et promouvoir la participation de divers représentants de la société civile au processus de paix. Au Myanmar, elle a poursuivi sa démarche d'assistance aux parties en présence en vue de leurs futures négociations. Elle a fourni un appui à d'autres processus de paix, par exemple au Kosovo ou encore dans le cadre de son engagement en faveur de la réconciliation intra-palestinienne. C'est aussi en raison de son rôle particulier dans ce processus de réconciliation qu'elle a pris part à l'initiative de la France pour relancer les négociations sur une
solution à deux États dans le cadre du conflit au Proche-Orient. Faciliter le dialogue et créer des passerelles, la Suisse s'y emploie aussi au titre de ses activités de puissance protectrice, qu'elle exerce notamment pour les États-Unis et l'Iran depuis 1980, ou encore pour la Géorgie et la Russie depuis 2008. Dans un monde multipolaire, les missions de représentation des intérêts diplomatiques et consulaires liées à une rupture des relations entre deux États pourraient regagner en importance, et la Suisse justifie d'un savoir-faire historique dans ce domaine. En février 2016, l'Iran et l'Arabie saoudite ont donné leur accord de principe à une représentation par la Suisse de leurs intérêts respectifs, mais Téhéran et Riyad ne sont pas encore parvenus à s'entendre sur les modalités de ce mandat de puissance protectrice.

Les bons offices de la Suisse englobent également ses activités d'État hôte. Siège de pourparlers de paix, elle est appréciée pour son appui discret et professionnel. Outre les entretiens consacrés à la Syrie qui se sont déroulées à Lausanne et à Genève, les négociations sur la réunification de Chypre ont eu lieu au Mont-Pèlerin, dans le canton de Vaud, et seront amenées à se poursuivre début 2017 à Genève, où elles devraient pouvoir déboucher sur un résultat positif. D'une manière générale, le 1168

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Conseil fédéral s'est mobilisé pendant toute l'année 2016 pour renforcer le rôle de la Suisse en tant qu'État hôte. Il a tout particulièrement eu à coeur de promouvoir la Genève internationale et sa vocation de centre de gouvernance mondiale. Dans ce domaine aussi, la Suisse estime qu'il est important d'améliorer la coordination entre les différents acteurs et instruments. La Genève internationale doit être la mieux placée pour mettre à disposition des lieux d'accueil propices aux échanges d'idées et au renforcement des synergies. C'est dans cette optique que des plates-formes consacrées à l'action humanitaire, au désarmement et aux sciences ont été créées en 2016, tandis que celles qui existaient déjà dans les domaines de la consolidation de la paix, de la lutte contre la criminalité organisée, d'Internet, de la santé mondiale et de l'environnement ont pu élargir leur sphère d'intervention. En parallèle, il y a eu des avancées dans le processus engagé pour inciter un nombre maximum d'États membres de l'ONU à établir une mission permanente à Genève. Le Guyana y est désormais représenté. Antigua-et-Barbuda, la Gambie, la Papouasie-NouvelleGuinée, Saint-Kitts-et-Nevis, Saint-Vincent-et-les-Grenadines, São Tomé-et-Príncipe, le Tonga et Vanuatu ont également exprimé leur volonté d'y implanter une mission permanente. Par ailleurs, en 2016, le Conseil fédéral a conclu un accord de siège avec le Secrétariat du traité sur le commerce des armes.

Outre ses bons offices, la Suisse a activement contribué à la promotion civile de la paix au cours de l'année sous revue. À titre d'exemples, il convient de citer ici ses initiatives en faveur du traitement du passé, entre autres aux Philippines, et son soutien à la conduite de processus constitutionnels, notamment au Sri Lanka, ou encore son engagement au service de la protection des minorités religieuses et ethniques. Pour agir sur ces fronts, la Suisse se mobilise au sein d'enceintes multilatérales telles que l'Assemble générale des Nations Unies et le Conseil des droits de l'homme, mais elle intervient aussi au niveau bilatéral pour lutter contre le racisme et la xénophobie. Elle exige également la protection des droits fondamentaux des minorités particulièrement vulnérables, et a soutenu, en 2016, des projets dans ce domaine en Syrie et en Iraq. En outre,
elle s'est associée à la Norvège pour mettre sur pied un séminaire international de réflexion sur différentes approches et initiatives en matière de protection des minorités religieuses. Dans le cadre de ses programmes d'aide humanitaire, elle apporte également une contribution à la protection des minorités religieuses et ethniques persécutées. De plus, elle utilise les consultations bilatérales et les dialogues sur les droits de l'homme pour thématiser les droits des minorités et la non-discrimination.

La promotion des droits de l'homme fait partie des priorités de la politique étrangère de la Suisse, qui s'attache à ce titre à mettre en oeuvre la stratégie Droits de l'homme du DFAE pour la législature en cours. Cette stratégie s'articule autour de trois grands axes: promouvoir l'universalité, l'interdépendance et l'indivisibilité des droits de l'homme, assurer la cohérence du cadre de référence international ainsi que la consolidation des mécanismes des droits de l'homme, et oeuvrer à une meilleure prise en compte des acteurs-clés. Face à la dégradation de la situation des droits de l'homme dans bon nombre de pays, la Suisse prend des initiatives, notamment pour améliorer le financement des activités déployées par l'ONU dans ce domaine car, à ce jour, une part de seulement 3,5 % de son budget ordinaire est affectée aux programmes consacrés aux droits de l'homme. Ainsi, en 2016, la Suisse a versé une contribution volontaire de cinq millions de francs en faveur du Haut-Commissariat 1169

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des Nations Unies aux droits de l'homme (HCDH). Elle a particulièrement à coeur de cofinancer les missions d'observation de la situation des droits de l'homme en Syrie, en Ukraine et au Yémen. Elle a, en outre, financée les opérations visant à assurer la présence du HCDH de l'ONU dans le territoire palestinien occupé et au Honduras. En outre, la Suisse soutient par ses contributions politiques et financières pour la mise en oeuvre de la Human Rights up Front Initiative l'intégration des droits de l'homme dans les activités des Nations-Unies. Par ailleurs, elle a renforcé son engagement en faveur de l'abolition de la peine de mort. Enfin, le Conseil fédéral a adopté un plan d'action national pour la mise en oeuvre des principes directeurs de l'ONU relatifs aux entreprises et aux droits de l'homme. Dans les pays partenaires de la coopération internationale, la Suisse soutient les services gouvernementaux avec compétence en matière de droits de l'homme, d'institutions nationales des droits de l'homme (Afghanistan, Népal, Pakistan, Bangladesh, Territoire palestinien occupé, Bolivie) ainsi qu'une multitude d'organisations de la société civile. Par son fort engagement dans le domaine de la réforme du système judiciaire, en Bosnie, au Tadjikistan ou en Bolivie elle promeut le respect pour les normes relatives aux droits de l'homme et un accès amélioré à la justice pour la population, notamment pour les groupes défavorisés. La Suisse a renforcé les droits des femmes et des filles par des programmes bilatéraux de prévention de la violence fondée sur le genre, par exemple, en Bolivie et en Mongolie, par le renforcement de la participation des organisations de la société civile au comité pour l'élimination de la discrimination à l'égard des femmes, ainsi que par des contributions à ONU Femmes et le Fonds des Nations unies pour la population. Dans le cadre de son action pour la paix et la sécurité dans le monde, la Suisse mise non seulement sur la gestion des conflits et la promotion des droits de l'homme mais aussi sur l'élaboration de réponses communes aux défis globaux. Elle s'engage sur la base de ses valeurs en faveur d'un multilatéralisme efficace pour une bonne gouvernance de la mondialisation.

S'employant là aussi à jeter des ponts, elle estime qu'il est primordial d'établir un ordre international
fondé sur des règles et de renforcer la capacité d'action des organisations internationales.

Au plan régional, la Suisse entend notamment contribuer à renforcer l'OSCE. Depuis qu'elle a exercé la présidence de l'organisation en 2014, elle milite en faveur de l'instauration d'un dialogue inclusif sur les principaux enjeux de la sécurité en Europe et se réjouit que des mesures aient été prises dans ce sens lors du Conseil ministériel de Hambourg. Elle aspire à une intensification de la collaboration embrassant les trois dimensions de l'OSCE, et soutient les efforts qui visent à relancer les discussions sur la maîtrise des armements conventionnels en Europe et à moderniser le document de Vienne sur les mesures de confiance et de sécurité. En tant qu'État neutre, la Suisse veut continuer d'oeuvrer à l'atténuation des divergences de points de vue qui subsistent sur la maîtrise des armements et qui sont, pour certaines, profondes. De même, elle prône l'adoption de mesures propres à accroître la confiance dans le domaine économique ainsi que la consolidation du rôle de l'OSCE dans le développement de la connectivité économique au sein de l'espace qui est le sien. La Suisse a aussi pour priorité de promouvoir un plus strict respect des engagements relatifs aux droits de l'homme, aux libertés fondamentales et aux questions qui touchent à la démocratie et à l'état de droit. En outre, elle s'est engagée au sein de l'OSCE pour une approche globale en matière de la migration.

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Au plan mondial, la Suisse a pour tout premier objectif de contribuer au renforcement de l'ONU. Depuis des années, elle plaide activement en faveur d'une réforme des méthodes de travail du Conseil de sécurité et assure la coordination du groupe de travail «Responsabilité», cohérence et transparence (Accountability, Coherence, Transparency), qui compte 25 membres. C'est dans ce cadre que la Suisse a pu apporter son concours à la mise en place d'une procédure transparente et clairement structurée pour la nomination du nouveau secrétaire général de l'ONU en 2016.

Après son élection à ce poste, Antonio Guterres a déclaré que l'une de ses priorités serait de donner plus de poids à la prévention au sein de l'ONU, ce qui répond à l'une des grandes aspirations de la Suisse dans le cadre de sa politique onusienne. En 2016, la Suisse a également lancé «l'appel du 13 juin» pour exhorter la communauté internationale à intensifier son action en matière de prévention des conflits. Concrètement, il s'agit de faire une plus grande place à la thématique des droits de l'homme dans la prévention des conflits tout en renforçant la collaboration entre le Conseil des droits de l'homme à Genève et le Conseil de sécurité à New York. 70 États se sont ralliés à cette initiative, qui doit avoir d'autres prolongements concrets en 2017.

Par ailleurs, en appuyant les efforts entrepris pour doter l'ONU d'une administration plus efficace, la Suisse oeuvre au renforcement de la capacité d'action de l'organisation. Au cours de l'année sous revue, elle a également progressé dans les démarches engagées en vue de sa candidature à un siège de membre non permanent du Conseil de sécurité pour la période 2023/2024. La Suisse peut et doit contribuer à l'élaboration de solutions viables au sein du Conseil de sécurité.

En ce qui concerne la gouvernance de la mondialisation dans le secteur de la sécurité, l'engagement à lutter contre le terrorisme à l'échelle planétaire revêt la plus haute importance. Dans ce domaine également, la Suisse met l'accent sur la prévention et sur le respect du droit international, tout en se souciant plus particulièrement du sort des enfants et des adolescents. Dans le cadre du Forum mondial de lutte contre le terrorisme (Global Counterterrorism Forum ­ GCTF), elle a lancé une initiative portant sur le droit
pénal des mineurs, qui a conduit à l'adoption du mémorandum de Neuchâtel sur les bonnes pratiques de justice des mineurs dans le cadre de la lutte contre le terrorisme en septembre dernier. C'est également lors du GCTF, à l'automne 2016, qu'ont été entrepris les travaux relatifs à une initiative helvéticobritannique visant à dresser l'inventaire des «meilleures pratiques» nationales en matière de suppression des contenus illicites sur Internet et de communication stratégique dans la lutte contre l'extrémisme violent, l'objectif étant de les adopter en tant que recommandations lors de la réunion ministérielle du GCTF en septembre 2017. L'engagement en faveur d'un cyberespace ouvert, libre et sécurisé, avec des règles claires régissant son utilisation, représente un autre dossier important, que la Suisse a également à coeur de mettre en avant, notamment au sein de l'ONU, en préconisant la mise en place de normes de conduite globales pour les États ainsi que la possibilité d'appliquer le droit international en vigueur. De plus, la Suisse participe au processus de l'OSCE portant sur des mesures d'instauration de la confiance dans le cyberespace. Le contexte actuel fait qu'il est difficile d'aborder des sujets tels que la maîtrise des armements, le désarmement et la non-prolifération des armes à l'échelle mondiale. Lors des négociations sur l'interdiction des armes nucléaires qui débuteront en 2017, la Suisse aura pour objectif de faciliter le dialogue et d'éviter que la communauté internationale ne se polarise encore davantage sur cette 1171

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thématique. Seul un soutien aussi vaste que possible à une éventuelle interdiction des armes nucléaires peut avoir un impact positif sur le désarmement nucléaire. Par ailleurs, en juin 2017, la Suisse accédera à la présidence du groupe de contrôle des exportations des pays fournisseurs nucléaires (Nuclear Suppliers Group ­ NSG), au sein duquel il s'agira surtout de trouver une réponse consensuelle à la question de savoir comment il convient de procéder avec les demandes d'adhésion de pays qui ne sont pas parties au traité sur la non-prolifération des armes nucléaires.

L'engagement de la Suisse au service du droit international est aujourd'hui plus important que jamais et vise avant tout à promouvoir un plus strict respect du droit international humanitaire. C'est dans cet esprit que, sur mandat de la 32 e Conférence internationale de la Croix-Rouge et du Croissant-Rouge, la Suisse et le CICR continuent de se mobiliser en vue d'obtenir un accord sur l'établissement d'un forum des États pour les conventions de Genève. Grâce à leurs efforts, il a déjà été possible de finaliser les modalités de la poursuite des négociations relatives aux fonctions et modalités d'un forum des États et d'esquisser les étapes à franchir d'ici à la 33e Conférence internationale programmée en 2019. La Suisse a également progressé avec détermination dans sa démarche consacrée à la restitution des avoirs d'origine illicite de personnes politiquement exposées. Au cours des 25 dernières années, elle a pu rapatrier près de deux milliards de francs de fonds de cette nature dans leurs pays d'origine. Avec sa politique proactive, elle joue un rôle de précurseur dans ce domaine. La loi du 18 décembre 2015 sur les valeurs patrimoniales d'origine illicite (LVP)3 est entrée en vigueur le 1er juillet 2016. De plus, le Conseil fédéral et le gouvernement de la République fédérale du Nigéria ont signé une déclaration d'intention portant sur la restitution de 321 millions de dollars américains. D'une manière générale, et tant dans le cadre bilatéral que multilatéral, la Suisse s'engage résolument en faveur de la lutte contre la corruption, un thème qui occupe une place de plus en plus importante dans sa politique étrangère. Ainsi, elle a participé au groupe de travail du G20 sur la lutte contre la corruption, et le chef du DFAE a assisté au sommet anticorruption qui s'est tenu à Londres.

1.3.4

Engagement sans faille au service du développement durable et de la prospérité

L'Agenda 2030 constitue pour le développement durable un cadre international accepté par tous les États. Articulé autour de 17 objectifs de valeur universelle, le programme, qui a pour ambition de «ne laisser personne de côté», apporte des réponses aux défis mondiaux. Il est une référence pour la gouvernance de la mondialisation. Son application a débuté en 2016. La Suisse, qui s'est engagée à contribuer à la réalisation des objectifs de développement durable sur le plan tant national qu'international, est l'un des premiers pays à avoir présenté à l'ONU, à l'été, sa stratégie de mise en oeuvre. Parallèlement, le Conseil fédéral s'est attelé à l'application du message sur la coopération internationale 2017­2020, présenté plus haut.

3

RS 196.1

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En mettant en oeuvre l'Agenda 2030, la Suisse veille à éviter autant que possible les conflits d'intérêts entre les différentes politiques sectorielles et transversales, tant dans sa politique intérieure que pour les mesures prises dans le domaine de la politique étrangère. Citons à titre d'exemple la plus grande transparence encouragée par le pays dans le négoce des matières premières ou encore, comme exposé plus haut, la politique menée pour réduire les flux financiers déloyaux et illicites en provenance de pays en développement. Le Conseil fédéral intensifie ainsi l'engagement qu'il a déployé jusqu'à présent pour accroître la cohérence des politiques de développement et apporte une contribution importante à une large compréhension de la notion de cohérence du développement durable. C'est notamment grâce aux résultats obtenus en 2016 dans le domaine de la coopération internationale qu'en 2018, la Suisse pourra établir, sur la base des indicateurs sélectionnés, un compte rendu concret de la réalisation des objectifs de développement durable. Par son engagement aux processus sectoriels internationaux, notamment les accords multilatéraux et bilatéraux, ainsi que les programmes (onusiens) régionaux et globaux, la Suisse contribue à la promotion des trois dimensions du développement durable, à savoir les enjeux sociaux, l'économie et l'environnement.

Le domaine de la coopération au développement ne déroge pas à la volonté de la Suisse d'oeuvrer systématiquement pour la promotion des droits de l'homme et pour les réformes démocratiques. Le pays a soutenu le processus de fusion des communes en Arménie, où, depuis cette année, des dizaines de milliers de citoyens bénéficient de services publics de qualité. Le gouvernement de Mongolie a poursuivi ses efforts de décentralisation avec l'appui de la Suisse et élaboré un projet de loi relatif aux droits en matière de démocratie directe. En s'engageant au Niger pour des élections régulières et non violentes ainsi que pour une presse équilibrée, la Confédération a contribuée au dialogue politique non violent dans ce pays. À l'heure où la Tunisie connaît elle aussi un processus d'ouverture politique, la Suisse a contribué à la tenue d'élections équitables et transparentes ainsi qu'à la réforme de la justice dans ce pays du Maghreb. Au Nicaragua et au Honduras,
qui connaissent un regain de répression et de violence, la Confédération a renforcé ses activités au profit de la société civile, de l'accès à l'information et de la protection des droits de l'homme.

Dans le domaine de la formation, la Suisse a étendu son aide. Elle a apporté un soutien à la formation professionnelle dans plus de 25 pays en développement ou en transition. La création d'un comité de donateurs marque une avancée importante dans la collaboration avec d'autres donateurs qui disposent eux aussi d'un système de formation professionnelle duale exemplaire. Grâce à la réforme des services publics de placement en Bosnie et Herzégovine, le taux de placement des personnes sans emploi a fait un bond en 2016 pour passer de 15 % à 40 %; 35 écoles d'enseignement professionnel ont introduit un modèle inspiré de la formation professionnelle duale et plus de 3900 jeunes gens ont trouvé un emploi. La coopération dans le domaine de la formation a également été développée dans les pays à contexte fragile. Ainsi, des formations professionnelles destinées aux jeunes ont été financées dans un camp de réfugiés au Kenya.

Comme les années précédentes, la Suisse a mis son expertise au service de la gestion des défis mondiaux: lors de la 22e conférence des parties à la convention-cadre des Nations Unies sur les changements climatiques (COP22), qui s'est tenue au Maroc 1173

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en septembre, la Suisse a contribué au succès de la mobilisation de la société civile et des jeunes en faveur des objectifs concernant le climat. Lors de la 28e conférence des parties au protocole de Montréal, la Suisse s'est impliquée avec succès pour l'inscription des substances à fort potentiel de réchauffement planétaire dans le protocole, ce qui représente une étape importante dans le processus de mise en oeuvre des objectifs climatiques de Paris. Activement encouragés par la Suisse, les États du BRIC ont accepté en 2016 d'apporter un soutien financier aux modèles novateurs de financement et de coordination pour la recherche et le développement de médicaments destinés au traitement de maladies qui sévissent surtout dans les pays en développement. Par ailleurs, la Suisse a approfondi ses partenariats dans le cadre de la coopération internationale et assumé sa fonction d'initiateur politique et de catalyseur des sources de financement. Un projet mené conjointement avec Nestlé et le ministère de l'agriculture du Vietnam a permis de réduire l'empreinte hydrique de la production locale de café. Enfin, la Suisse, en qualité de membre du Conseil d'administration du Consortium international des centres de recherche agricole, a défendu avec force en 2016 le développement de nouvelles variétés de cultures résistantes au changement climatique.

L'engagement de la Suisse dans des sujets-clés qui se situent à l'interface du développement et de la paix, à l'importance grandissante, est détaillé au ch. 3.3.7. En ce qui concerne la prévention de l'extrémisme violent (PEV), dont le Conseil fédéral a fait l'une de ses priorités de politique étrangère dans le domaine de la lutte contre le terrorisme, l'accent a été mis en 2016 sur la mise en oeuvre du plan d'action de politique étrangère de la Suisse consacré à ce sujet. La Confédération veut aider les États ainsi que les communautés concernées à donner à leur environnement social les contours qui permettront d'éviter à des personnes de basculer dans la violence extrémiste. L'approche visant à traiter les causes directes et structurelles de l'extrémisme violent doit priver celui-ci de son terreau. Elle passe par une mobilisation de longue haleine dans les contextes de conflit armé, de transition et de fragilité.

À cet effet, les instruments de la coopération
au développement et de la sécurité humaine ont un rôle essentiel à jouer. Dans son plan d'action, la Suisse donne la priorité notamment au travail effectué auprès des femmes et des jeunes, car ils peuvent être les acteurs d'un changement positif. Son action se traduit par la réalisation de projets de prévention qu'elle conduit elle-même. À titre d'exemple, la visite du chef du DFAE en Tunisie a été l'occasion de concrétiser les possibilités d'activités conjointes dans ce domaine. Du reste, la Suisse soutient d'ores et déjà, dans une banlieue défavorisée de Tunis, un projet qui vise à accroître l'intégration politique et sociale des jeunes en les incitant à participer à la gouvernance locale. Par ailleurs, l'action helvétique s'inscrit également dans une dimension multilatérale et dans la collaboration avec des organisations partenaires. En avril, la Suisse a organisé conjointement avec l'ONU une conférence de haut rang pour promouvoir le plan d'action du Secrétaire général des Nations Unies concernant la PEV et encourager la discussion sur le sujet à l'échelle internationale. Elle soutient en outre le Fonds mondial pour l'engagement de la communauté et la résilience, basé à Genève, qui a lancé des projets de prévention de l'extrémisme violent dans différents pays.

Concernant un deuxième sujet transversal, celui de l'eau et de la sécurité, la Suisse a lancé au cours des années passées plusieurs initiatives régionales et mondiales dans le domaine de la diplomatie de l'eau (Blue Peace). Les travaux du panel mondial 1174

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d'experts mis en place à la fin 2015 à Genève pour réfléchir aux questions liées à l'eau et à la paix étaient au coeur de l'année sous revue. Composé de personnalités indépendantes provenant de quinze États, ce panel remettra en 2017 ses recommandations pour le renforcement des structures mondiales de prévention et de résolution des conflits liés à l'accès à l'eau. Il devra également indiquer des pistes pour faire de l'eau un instrument de paix et de coopération internationale plutôt qu'un vecteur de conflits. La Suisse s'emploie par ailleurs à ce que ce sujet occupe une plus grande place au sein de l'ONU. À cet effet, un événement de haut rang a été organisé en marge de la 71e Assemblée générale des Nations Unies, à l'initiative des ministres des affaires étrangères du Sénégal, du Costa Rica, de Slovénie et de Suisse. La Suisse a par ailleurs soutenu les efforts déployés pour que le Conseil de sécurité de l'ONU se saisisse du thème «eau, paix et sécurité». Enfin, elle a également soulevé cette problématique lors du Sommet de la Francophonie à Madagascar.

Dans le cadre de sa politique extérieure, la Suisse continue de juger également prioritaire le thème transversal de l'exil et de la migration. Sur place, ses champs d'action sont au nombre de trois: la protection des personnes déplacées de force, l'encouragement de l'indépendance économique et sociale, par exemple au travers de solutions de formation et de travail pour améliorer les perspectives à moyen et à long terme, et la prévention, autrement dit, la gestion des causes de l'exil. Dans tous ces champs d'action, la Confédération utilise ses différents instruments de façon coordonnée et ciblée, dans l'esprit de la politique extérieure en matière de migration, à caractère interdépartemental. L'engagement helvétique dans ce domaine est détaillé dans le chapitre introductif et au ch. 3 du présent rapport. Les partenariats migratoires avec la Serbie, le Kosovo, la Bosnie et Herzégovine, le Nigéria et la Tunisie sont des éléments importants de la politique extérieure en matière de migration.

C'est dans ce cadre que la Suisse a apporté son appui à la Tunisie dans l'élaboration d'une loi sur l'asile en 2016. La conclusion d'autres partenariats migratoires de ce type, qui reposent sur une approche globale et coopérative incluant des mesures en faveur
du développement et des migrations, est actuellement à l'étude.

Le thème de l'exil et de la migration constitue lui aussi un défi mondial auquel doivent être apportées des réponses mondiales. C'est dans cet esprit que la Suisse s'est fortement impliquée dans les travaux du premier sommet des Nations Unies pour les réfugiés et les migrants, organisé en septembre, lors duquel il a été décidé que deux pactes mondiaux seraient élaborés d'ici 2018, l'un sur la situation des réfugiés, l'autre sur les migrations. Le président de la 71 e Assemblée générale des Nations Unies a demandé à la Suisse d'assurer, avec le Mexique, la facilitation des discussions sur les modalités du processus de négociations du pacte mondial relatif aux migrations. Les deux pays devront jouer un rôle de bâtisseur de ponts puisqu'il est par exemple question de reconnaître que même des personnes qui ne sont pas protégées par la convention de Genève relative au statut des réfugiés peuvent se retrouver dans des situations de vulnérabilité, que celles-ci soient dues à des catastrophes naturelles ou aux effets du changement climatique. Au travers de l'initiative Nansen, la Suisse a contribué au développement d'un agenda de protection international pour ces personnes.

L'aide humanitaire évolue elle aussi à l'interface de la paix et du développement durable. Étant donné que les crises se complexifient et durent plus longtemps, la 1175

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fourniture d'aide humanitaire est plus exigeante, tout en gagnant encore en importance. L'aide humanitaire ne se limite pas à l'aide d'urgence, mais suscite chez les personnes touchées l'espoir que le monde ne soit pas indifférent à leur sort. La tradition humanitaire de la Suisse et sa crédibilité dans ce domaine lui confèrent un rôle particulier. En Ukraine, elle reste le seul pays à organiser des convois humanitaires qui franchissent la ligne de contact. En 2016, deux convois ferroviaires ont livré du matériel de préparation d'eau potable et du matériel médical dans des régions situées de part et d'autre de cette ligne. En Syrie, la Suisse a remis en juillet au Croissant-Rouge arabe syrien (CRAS) douze ambulances neuves ­ ces véhicules manquent cruellement dans le pays ­ qui ont notamment servi à évacuer la population civile d'Alep à la mi-décembre. Après le passage d'un ouragan en octobre, plus de 100 000 personnes ont bénéficié en Haïti de l'aide d'urgence de la Suisse. Cette dernière entend renforcer son aide humanitaire en 2017, la crise en Syrie restant une priorité. Elle continuera d'oeuvrer en faveur d'un meilleur accès humanitaire et du respect des principes humanitaires, sur le terrain mais aussi au niveau multilatéral, comme elle l'a fait par exemple lors du Sommet mondial sur l'action humanitaire qui s'est tenu à Istanbul.

Dans sa stratégie de politique étrangère, le Conseil fédéral fait figurer dans sa priorité «développement durable et prospérité» la défense d'un environnement international qui favorise la prospérité. La prospérité de la Suisse dépend des développements en Europe et dans les principaux centres économiques et financiers. Au vu de la pression accrue exercée sur l'ordre international libéral, l'action menée par la Suisse pour la gouvernance de la mondialisation dans le domaine économique, pour la participation de tous les pays au commerce international et pour l'accroissement de la capacité des pays en développement de mobiliser de plus en plus leurs propres ressources fiscales, revêt une importance particulière.

Comme sous la présidence russe en 2013, la Suisse a été invitée par la présidence chinoise du G20 à participer au G20 des ministres des finances et au groupe de travail de lutte contre la corruption. Dans ces enceintes, elle a plaidé en faveur d'une économie
mondiale stable et de mesures structurelles visant à promouvoir l'économie, et formulé des propositions de réforme du système financier international, l'objectif étant notamment d'apporter des solutions aux déséquilibres mondiaux. À l'invitation de l'Allemagne, la Suisse pourra de nouveau participer en 2017 aux travaux dans le secteur financier, plus particulièrement aux rencontres des ministres des finances et des gouverneurs des banques nationales ainsi qu'aux rencontres du groupe de travail sur la lutte contre la corruption des pays du G20.

D'importantes avancées ont été enregistrées en matière d'application de normes internationales concernant les questions financières et fiscales. Les efforts de la Suisse pour une place financière intègre, compétitive, stable et conforme aux règles de la fiscalité ont obtenu une reconnaissance internationale, notamment au travers des bons résultats obtenus par la Suisse lors des examens par les pairs du Forum mondial sur la transparence et l'échange de renseignements à des fins fiscales et du Groupe d'action financière (GAFI). Le premier a évalué la coopération avec l'étranger en matière d'entraide administrative dans le domaine fiscal, le second, la qualité du dispositif suisse de lutte contre le blanchiment d'argent et le financement

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du terrorisme. Dans l'environnement actuel, ces évolutions positives sont capitales pour l'acceptation internationale de la place financière suisse.

Enfin, la Suisse s'est également employée à renforcer son réseau d'accords bilatéraux de libre-échange. Elle a signé un tel accord avec les Philippines en avril et, dans le cadre de l'AELE, des négociations sont en cours avec l'Inde, l'Indonésie, le Vietnam, la Malaisie, le Mexique, le Chili et l'Équateur. Les entretiens exploratoires avec des États du MERCOSUR (Brésil, Argentine, Uruguay et Paraguay) se sont achevés, amorçant l'ouverture prochaine de négociations. Le Conseil fédéral continuera de suivre attentivement les débats sur le partenariat transatlantique de commerce et d'investissement et sur le partenariat transpacifique. Il plaidera également dans les années à venir pour une économie suisse ouverte et un marché mondial libre et équitable.

2

Thème prioritaire: engagement de la Suisse pour la paix et le développement dans les régions en crise, de la Syrie au Sahel

2.1

Introduction

L'environnement régional élargi de la Suisse et de l'Europe a été marqué par une prolifération des crises et des conflits au cours de ces dernières années. A l'Est, le conflit ukrainien a attisé la crise de l'ordre pacifique européen qui couvait depuis plusieurs années. Les relations entre la Russie et l'Occident ainsi que les conflits non résolus dans le voisinage commun de la Russie et de l'UE constituent à nouveau un thème central de la politique de sécurité du continent européen. Les régions situées au Sud de l'Europe connaissent de longue date un état de crise et d'instabilité.

Toutes ces situations ont pris une acuité nouvelle au cours des dernières années et ont, sur l'Europe ­ donc également sur la Suisse ­, des répercussions plus directes et plus tangibles que par le passé. La sortie de la crise sécuritaire européenne et la promotion de la paix et du développement durable dans les régions du Sud de la Méditerranée sont au nombre des priorités de la politique extérieure de la Suisse.

Le présent chapitre aborde les défis liés à l'arc de crise au Sud de l'Europe ainsi que les efforts déployés par la Suisse pour les relever. Il décrit les développements majeurs et les mesures prises par la Suisse dans cette zone immense composée de plusieurs régions, qui s'étend du Proche-Orient et du Moyen-Orient4 à l'Afrique du Nord5 en passant par la Corne de l'Afrique6 et les pays du Sahel et du lac Tchad7. Il convient d'emblée de souligner que la crise ne touche pas la totalité des 34 États situés dans la zone considérée et que les défis à relever sont très diversifiés selon les régions, mais aussi au sein des régions. Reste que le voisinage méridional de l'Europe est confronté à une accumulation de facteurs de crise. Le Proche-Orient et le Moyen-Orient sont aujourd'hui au centre de la politique mondiale, contrairement 4 5 6 7

Bahreïn, Territoire palestinien occupé (TPO), Iran, Irak, Israël, Yémen, Jordanie, Qatar, Koweit, Liban, Oman, Arabie saoudite, Syrie, Émirats arabes unis Égypte, Algérie, Libye, Maroc, Tunisie Éthiopie, Djibouti, Érythrée, Kenya, Somalie, Soudan et Soudan du Sud Burkina Faso, Cameroun, Mali, Mauritanie, Niger, Nigeria, Sénégal et Tchad

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aux attentes souvent exprimées il y a quelques années, selon lesquelles les développements et les tensions de la zone Asie-Pacifique n'allaient pas tarder à dominer l'ordre du jour de la politique de sécurité internationale. L'objet de ce chapitre n'est pas de fournir un panorama exhaustif des dynamiques très diversifiées ­ et parfois extrêmement positives ­ du voisinage méridional de l'Europe ni d'analyser en détail les relations de la Suisse avec ces régions et pays. L'accent portera plutôt sur l'instabilité, sur ses causes et sur l'engagement de la Suisse à cet égard.

2.2

Les caractéristiques régionales et leur importance pour la Suisse

Le nombre élevé de crises et de conflits constitue la principale caractéristique des régions situées dans le voisinage méridional de l'Europe. Selon l'édition 2016 du Global Peace Index, la zone considérée dans ce chapitre comprend sept des dix pays les plus instables de la planète8. De nombreux affrontements recensés dans le voisinage méridional de l'Europe sont des conflits internes qui revêtent fréquemment une dimension transfrontalière, voire régionale. C'est le cas de la guerre en Syrie et du conflit au Yémen qui sont guidés par les intérêts d'acteurs régionaux et mondiaux.

En outre, de tels conflits armés ont également une influence sur l'environnement régional, notamment par les flux de réfugiés parfois massifs qu'ils déclenchent.

Trois des conflits actuels sont issus des révolutions et révoltes nées du Printemps arabe de 2011. Selon diverses estimations, la guerre en Syrie aurait déjà fait plus de 400 000 victimes. En 2016, comme les années précédentes, aucune solution politique au conflit n'a été trouvée. Au Yémen, plus de 10 000 personnes ont été tuées depuis 2015 et les négociations de paix n'ont pas permis les avancées souhaitées. La Libye est en proie au chaos et à la violence malgré la signature d'accords de paix. Il reste encore beaucoup à faire pour rétablir le fonctionnement de l'État autour d'un gouvernement d'union nationale.

Vieux de plus de 60 ans, le conflit israélo-palestinien n'a toujours pas été résolu, tout comme la question kurde qui a gagné en acuité dans le contexte de la guerre en Syrie. Le Soudan du Sud, indépendant depuis 2011 seulement, est en proie à une guerre civile qui tient au fait que les chefs des deux principaux groupes ethniques refusent le partage du pouvoir. Au Soudan, le conflit du Darfour continue de s'amplifier. Le Mali est toujours en quête d'une stabilité intérieure malgré les accords de paix conclus en 2015. De plus, les conflits armés impliquent souvent la participation de groupes terroristes djihadistes ­ Boko Haram dans la région du lac Tchad, la milice Al-Shabab en Somalie, Al-Qaïda au Yémen (péninsule arabique) et l'organisation «État islamique» (EI) en Syrie, en Iraq et en Libye. De nombreux autres États de la région sont également confrontés aux activités terroristes menées hors des zones de conflits armés, à l'image du Burkina Faso ou
de l'Égypte.

Ce dernier point souligne une deuxième caractéristique régionale: le morcellement du pouvoir observé dans de nombreux contextes et la multiplication concomitante des groupements et acteurs violents non étatiques. Ce phénomène provoque un recul 8

Syrie, Soudan du Sud, Irak, Somalie, Yémen, Soudan, Libye

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des États nations et la remise en question toujours plus poussée des identités ainsi que des frontières et règles établies. Les régions et les zones frontalières qui échappent au contrôle de l'État deviennent des foyers de violence en rupture totale avec l'ordre étatique. On assiste par ailleurs à l'émergence d'une tendance inverse caractérisée par une concentration extrême du pouvoir. Le régime autoritaire comme mode de gouvernement reste très répandu dans le voisinage méridional de l'Europe9 et a encore gagné du terrain récemment dans plusieurs États. Cinq ans après le Printemps arabe, les aspirations à la participation et à la justice sociale, politique et économique exprimées par les populations concernées sont quelque peu déçues. La seule exception est la Tunisie, engagée dans un processus de transition prometteur.

Dans les pays de la Corne de l'Afrique, certains partis continuent à concentrer le pouvoir économique et politique entre leurs mains. Dans les États du Sahel, les intimidations et le placement en détention d'opposants lors des élections sont des pratiques fréquemment observées. Bien souvent, les médias n'ont pas les moyens de remplir leur fonction corrective: selon le dernier classement mondial publié par Reporters sans frontières, la situation de la liberté de la presse est jugée mauvaise ou très mauvaise dans 27 des 34 pays concernés par ce chapitre.

De nombreux États du voisinage méridional de l'Europe sont qualifiés de fragiles.

Selon l'Indice des États fragiles de l'ONG américaine Fonds pour la paix (Fund for Peace) publié en 2016, qui analyse le risque d'effondrement des États, la moitié des pays pris en compte dans l'évaluation sont placés dans la dernière catégorie. Six d'entre eux10 figurent même parmi les huit pays classés en «état d'alerte très élevée», la sous-catégorie regroupant les situations extrêmement fragiles. Outre la mauvaise gouvernance observée à très grande échelle et le manque de participation démocratique, la corruption constitue un défi de taille. Il ressort de l'indice de perception de la corruption établi par l'ONG Transparency International que neuf pays11 de la région considérée figurent parmi les 20 derniers classés. En outre, 22 des 34 États considérés se situent dans la seconde moitié du classement. D'importantes disparités régionales sont
toutefois perceptibles. Alors qu'une majorité d'États de la Corne de l'Afrique figure dans le dernier tiers du classement, les pays du Golfe ­ notamment le Qatar et les Emirats arabes unis ­ obtiennent de bons résultats.

La polarisation régionale est une caractéristique qui concerne avant tout le ProcheOrient et le Moyen-Orient. Les conflits géopolitiques, ethniques et religieux se sont renforcés et ont parfois été volontairement aiguisés au cours des dernières années.

L'absence de structures de gouvernance régionales et d'espaces de dialogue et de coopération participatifs constitue un obstacle important à la résolution des conflits dans cette région.

L'évolution démographique constitue un défi de taille pour de nombreux pays de la région. Certains États sahéliens ­ Mali, Tchad, Niger ­ connaissent un taux de croissance démographique annuel supérieur à 3 %, et plus de la moitié de leur population a moins de 15 ans. Dans ces pays, quelque 300 000 à 400 000 jeunes arrivent chaque année sans formation sur le marché du travail en raison d'un taux de scolari9 10 11

Selon l'indice démocratique établi par l'Economist Intelligence Unit en 2015, 21 des 34 pays considérés dans ce chapitre étaient qualifiés d'autoritaires Somalie, Soudan du Sud, Soudan, Yémen, Syrie, Tchad Somalie, Soudan, Soudan du Sud, Libye, Irak, Érythrée, Yémen, Syrie, Tchad

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sation qui peine à décoller. Dans le monde arabe également, le nombre d'enfants arrivés au terme de leur parcours scolaire croît nettement plus rapidement que le nombre de postes nouvellement créés. Même les jeunes bien formés ont des difficultés à trouver un emploi. En 2014, 34 % des jeunes diplômés d'universités égyptiennes se sont par exemple retrouvés au chômage. Le taux de chômage moyen des jeunes dans l'ensemble du monde arabe s'élève à 30 %, ce qui est deux fois supérieur à la moyenne mondiale.

De nombreux pays connaissent toujours de faibles niveaux de développement, même si l'on constate d'importantes disparités régionales. L'Indice de développement humain (IDH) 2015 défini par l'ONU classe 15 des 34 pays concernés par ce chapitre dans la catégorie «faible niveau de développement». À l'exception du Yémen, tous sont situés dans la zone du Sahel et dans la Corne de l'Afrique. À l'inverse, Israël et les États du Golfe appartiennent tous à la catégorie des pays qui possèdent un IDH «très élevé», où figure également la Suisse. La même observation vaut pour l'Indice de pauvreté multidimensionnelle (IPM) du PNUD qui se réfère à différentes catégories pour mesurer la pauvreté dans 102 pays en développement. Selon les derniers chiffres publiés, les États dans la région concernée occupent les cinq dernières places du classement12, lequel révèle également que plus de 60% de la population du Niger souffre d'extrême pauvreté. Tous les États du Sahel et de la corne de l'Afrique se trouvent dans la seconde moitié du classement. Parmi les autres États couverts par ce chapitre, seul le Yémen y figure également.

Les États du voisinage Sud de l'Europe subissent, dans une proportion supérieure à la moyenne, les effets des changements climatiques, qui ont de nombreuses répercussions sur la politique de sécurité. Au cours de l'année sous revue, l'un des pires phénomènes El Niño depuis 1997/98 a provoqué une terrible sécheresse dans la Corne de l'Afrique. Le Bureau de la coordination des affaires humanitaires des Nations Unies (OCHA) révèle qu'environ 24 millions de personnes ont été confrontées à une grave insécurité alimentaire. La zone du Sahel connaît également des périodes de sécheresse catastrophiques qui provoquent régulièrement des famines aux effets dévastateurs. Dans plusieurs États du Sahel et de
la Corne de l'Afrique, la population dispose de moins de mille mètres cubes d'eau par personne et par an, ce qui correspond à la définition de la pénurie d'eau. À noter que l'Afrique du Nord et les États de la péninsule arabique présentent des valeurs encore plus basses. Le réchauffement progressif de la surface du globe devrait encore amplifier les problèmes de pénurie d'eau. Un rapport récent de la Banque mondiale montre en outre que la pénurie croissante d'eau a des conséquences économiques graves pour les États qui souffrent déjà d'importants goulets d'étranglement dans les infrastructures d'approvisionnement en eau. Dans les États concernés, la pénurie hydrique entraînera un recul du PIB qui pourrait atteindre 6% d'ici à 2050.

Un autre paramètre est la situation humanitaire catastrophique de nombreuses régions situées entre le Sahel et la Syrie. La grande majorité des quelque 125 millions de personnes qui dépendent de l'aide humanitaire dans le monde vit dans ces régions. Les causes de la détresse humanitaire sont principalement ­ mais pas exclusivement ­ les conflits qui secouent ces régions. Le conflit qui ravage la Syrie et sa 12

Niger, Éthiopie, Soudan du Sud, Tchad, Burkina Faso

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région a entraîné la plus grave crise humanitaire de notre époque. Rien qu'en Syrie, plus de 13,5 millions de personnes dépendent de l'aide internationale. Pour l'ONU, les situations en Syrie, en Iraq et au Yémen représentent les trois principales catastrophes humanitaires actuelles. D'autres crises humanitaires se déroulent également dans la Corne de l'Afrique, dans le Soudan du Sud et dans la région du Lac Tchad.

La situation de confusion que génèrent les différents défis à relever crée un terreau fertile pour l'extrémisme violent et pour l'enrôlement de jeunes gens par des groupes terroristes. Les gouvernements concernés répondent souvent à cette menace par des mesures de sécurité drastiques alors que la connaissance des causes profondes du phénomène est encore insuffisante.

La combinaison des facteurs que représentent les conflits armés et l'absence de perspectives économiques est également à l'origine d'importants mouvements de fuite et de migration dans l'arc de crise au Sud de l'Europe. La Syrie compte à elle seule plus de six millions de déplacés internes. Près de 5 millions de personnes ont trouvé refuge dans les pays voisins. Au Liban, un cinquième de la population est désormais composée de réfugiés. La Turquie accueille plus de 3 millions de réfugiés et de nombreuses personnes fuient l'Erythrée et les États du Sahel. La Corne de l'Afrique enregistre 1,8 million de réfugiés et 6,7 millions de déplacés internes. Les opérations contre Boko Haram dans la région du lac Tchad ont entraîné le déplacement de 2,6 millions de Nigérians dans leur propre pays et la fuite de 155 000 autres personnes dans les pays voisins, principalement au Niger et au Tchad.

Ces développements négatifs ont également eu un impact en Europe et en Suisse, qui s'est traduit par la crise des réfugiés et une pression migratoire. Le nombre de demandes d'asile déposées en Europe en 2016 est resté inférieur au chiffre record de l'année précédente (1,4 million), en raison notamment de la fermeture de la route des Balkans et de la signature de l'accord entre l'UE et la Turquie. Il s'élève tout de même à environ 1.3 millions demandes déposées en Europe, dont plus de 25 000 en Suisse. Les États du voisinage au Sud de l'Europe jouent un rôle central en tant que pays d'origine ou de transit des réfugiés. Dans le cas de la Suisse,
six des dix principaux pays d'origine des demandeurs d'asile en 2016 étaient situés dans les régions couvertes par ce chapitre (Erythrée, Syrie, Somalie, Iraq, Nigeria, et Ethiopie). La Gambie est un autre État de provenance des demandeurs d'asile, dont une grande partie gagne la Suisse par la route du Sahel et la Méditerranée. En 2016, le foyer de la crise des réfugiés et la pression migratoire s'est déplacé vers l'itinéraire qui franchit la Méditerranée centrale à destination de l'Italie. L'arrivée de plus de 180 000 réfugiés et migrants en Italie en 2016 constitue un nouveau record. Le décès en Méditerranée de plus de 4400 migrants qui tentaient de gagner l'Europe constituent également un triste record. La gestion de la crise des réfugiés et de la pression migratoire continue de préoccuper les États européens. Rien ne laisse présager pour l'heure une sortie de crise, car la pression migratoire en provenance du voisinage méridional de l'Europe ne devrait pas faiblir au cours de ces prochaines années.

Il existe également des liens étroits entre les attentats djihadistes commis ces deux dernières années en Europe et les évènements survenus dans l'arc de crise au Sud du continent: d'une part, les attentats perpétrés en novembre 2015 à Paris et en mars 2016 à Bruxelles ont démontré la volonté et la capacité de l'EI à planifier et à mener des attaques terroristes en Europe, à y infiltrer des combattants et des intermédiaires 1181

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et à les manoeuvrer. D'autre part, une série d'actes terroristes ont été commis à Nice, Würzburg, Ansbach, Rouen, Charleroi et Berlin par des individus radicalisés domiciliés en Europe et se réclamant de l'EI, qui ont suivi l'appel de cette organisation à mener des attaques contre des cibles occidentales. En raison de la pression croissante exercée sur l'EI par la coalition internationale, les «combattants terroristes étrangers» sont de plus en plus nombreux à rentrer en Europe. C'est pourquoi aussi la menace terroriste en Suisse reste élevée. Le principe mentionné en 1975 déjà dans l'Acte final d'Helsinki, qui établissait un lien étroit entre la sécurité en Europe et en Méditerranée est donc plus que jamais d'actualité.

L'engagement de la Suisse dans le voisinage méridional de l'Europe a notamment pour objectif de remédier sur le terrain aux causes de l'immigration irrégulière et du terrorisme. La promotion de la paix et du développement est un mandat constitutionnel conforme à l'intérêt de la Suisse à préserver un environnement stable et sûr.

C'est aussi une expression de ses propres valeurs et de sa volonté d'assumer une politique étrangère responsable. Il convient en outre de ne pas sous-estimer l'importance économique du voisinage méridional de l'Europe: certains États du MoyenOrient et d'Afrique du Nord influencent de manière significative la croissance économique mondiale de par leurs importantes ressources pétrolières.

Le volume des échanges bilatéraux entre la Suisse et les États évoqués dans ce chapitre est variable selon les régions et les pays. Il convient notamment de mentionner les Emirats arabes unis et l'Arabie saoudite, qui figurent parmi les vingt principaux partenaires commerciaux de la Suisse. Mais plusieurs États présentent un potentiel de développement économique élevé, à l'image de l'Ethiopie, qui affiche depuis quelques années un taux croissance économique impressionnant, allant jusqu'à 10%. S'il est vrai qu'un tel essor ne profite qu'à une petite partie de la population, on assiste néanmoins à l'émergence d'une classe moyenne toujours plus nombreuse. En outre, les pays densément peuplés du Sahel et de la Corne de l'Afrique comptent parmi les marchés du futur présentant un potentiel d'expansion.

La diversification croissante de l'économie locale prouve, à l'exemple du
Kenya et de l'Ethiopie, que même les pays du Sahel, de la région du lac Tchad et de la Corne de l'Afrique ont, sous certaines conditions, les moyens de s'affranchir progressivement de leur dépendance vis-à-vis des matières premières.

2.3

Les grandes lignes de l'engagement de la Suisse

La présence sur le terrain est une condition préalable à un engagement efficace de la Suisse en faveur de la paix et du développement durable. Dans ce contexte également, le vaste réseau extérieur de la Suisse avec sa vocation d'universalité constitue un atout précieux pour notre pays. La Suisse est présente dans 25 des 34 États du voisinage méridional de l'Europe par l'intermédiaire de ses ambassades ou des bureaux de coopération ou de programme de la DDC. Elle a par ailleurs fermé temporairement ses ambassades en Syrie et en Libye. Huit des 19 ambassades en service sont des ambassades intégrées qui regroupent sous un même toit les différents champs d'action de la politique extérieure, comme la défense des intérêts, les programmes de coopération internationale, les services consulaires et les centres 1182

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d'affaires (Business Hubs), en application du principe «une Suisse = une politique étrangère = une représentation sur place». La Suisse promeut activement le dialogue politique sur le terrain avec les pays partenaires et avec d'autres États qui jouent un rôle majeur dans la région. Cette démarche est complétée par des consultations politiques régulières avec les capitales et par des partenariats thématiques. Conformément à l'objectif de la stratégie de politique étrangère du Conseil fédéral, la Suisse s'efforce également de renforcer sa coopération avec des organisations régionales comme la Ligue arabe, la Communauté économique des États d'Afrique de l'Ouest (CEDEAO), la Communauté de l'Afrique de l'Est, l'Union africaine et l'Autorité intergouvernementale pour le développement dans la Corne de l'Afrique.

Une autre caractéristique est la crédibilité dont jouit la Suisse auprès de nombreux partenaires du voisinage méridional de l'Europe en tant qu'État au service de la paix et du développement durable. Cette crédibilité est le fruit d'une présence durable et significative sur le terrain qui permet à la Suisse d'instaurer la confiance et de tisser des réseaux à l'échelon régional et local. D'autres facteurs jouent également un rôle important: la neutralité de la Suisse, son passé non colonial et ses nombreuses compétences acquises au fil des décennies dans le domaine de la promotion de la paix et de la coopération au développement. La Suisse est perçue comme un acteur de la politique internationale dénué d'intentions cachées.

Un principe important de l'engagement de la Suisse est l'utilisation coordonnée des instruments à disposition et leur orientation axée sur des objectifs stratégiques communs. Ce principe prioritaire du message sur la coopération internationale 2017­ 2020 revêt une importance cruciale dans l'arc de crise au Sud de l'Europe en raison de la complexité et du caractère multidimensionnel des défis à relever dans cette zone. La mise en oeuvre de ce principe passe par l'élaboration de stratégies de coopération axées sur les besoins spécifiques des régions et des pays concernés. Ces stratégies associent tous les acteurs de la politique étrangère de la Suisse engagés dans un contexte concret, dans la mesure où cela est possible et approprié. Cela permet de développer une compréhension
commune des défis à relever et d'identifier de manière concertée les domaines dans lesquels la Suisse peut apporter une valeur ajoutée. Les stratégies de coopération définissent des priorités stratégiques communes à tous les acteurs concernés afin de faciliter la mise en oeuvre coordonnée des activités correspondantes. S'agissant de la région traitée dans ce chapitre, l'approche pangouvernementale (Whole of Government Approach, WOGA) a défini ­ et applique en partie déjà ­ onze stratégies de coopération13. La DDC, la Division Sécurité humaine (DSH), le Département fédéral de la défense, de la protection de la population et des sports (DDPS) et le SEM opèrent ainsi dans la Corne de l'Afrique dans le cadre d'une stratégie commune.

Les principaux acteurs engagés dans le voisinage méridional de l'Europe sont la DDC (aide humanitaire, coopération au développement bilatérale, programmes globaux), la Direction politique du DFAE (Division Sécurité humaine, divisions géographiques), le Secrétariat d'État à l'économie (coopération économique) et le 13

Afrique du Nord (Égypte, Algérie, Libye, Maroc, Tunisie); Moyen-Orient (Irak, Jordanie, Liban, Syrie, Turquie); Corne de l'Afrique (Éthiopie, Djibouti, Érythrée, Kenya, Somalie); Burkina Faso; Mali; Territoire palestinien occupé; Yémen; Niger; Soudan; Soudan du Sud; Tchad.

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Secrétariat d'État aux migrations (coopération internationale en matière de migration). Conformément à l'approche pangouvernementale, la mise en oeuvre des projets implique aussi d'autres services de l'administration compétents en matière de stratégies de coopération (DDPS par ex.) La coopération étroite au sein du DFAE et entre les départements contribue à la mise en oeuvre d'une politique cohérente. Elle favorise la mise en commun des ressources et renforce l'efficience et l'efficacité de l'engagement de la Suisse. Elle a également pour but de faciliter la résolution de conflits d'objectifs au sein de la politique suisse. La pratique en matière d'exportation de matériel de guerre doit par exemple être cohérente avec l'engagement de la Suisse en matière de promotion de la paix et des droits de l'homme. La Suisse s'engage en outre à éviter l'afflux d'avoirs illicites sur sa place financière et, le cas échéant, à veilleur à leur restitution aux pays d'origine En ce qui concerne la panoplie de thèmes et d'instruments à disposition, la promotion civile de la paix joue un rôle très important pour l'engagement de la Suisse dans l'arc de crise. Entrent notamment en jeu les différentes formes que peuvent revêtir les bons offices de la Suisse: en matière de médiation, la Suisse soutient les efforts de paix de l'ONU en Syrie, au Yémen et en Libye. Dans ces trois contextes de conflit, elle dirige ou appuie des initiatives de dialogue complémentaires ­ pour certaines informelles ­ à l'échelon national et local, et propose dans de nombreux pays des mesures complémentaires de transformation des conflits. Elle accompagne par exemple des processus de réconciliation au Soudan du Sud, au Mali et entre les factions palestiniennes. Dans ces régions comme ailleurs, elle s'investit en outre en faveur des minorités, religieuses ou autres (cf. ch. 3.3.4 Priorités thématiques et 3.4.2 Aide humanitaire). Les bons offices englobent également le rôle de facilitateur joué par la Suisse en qualité d'hôte de pourparlers de paix et d'autres processus de négociation, que ce soit dans le cadre de la Genève internationale ou d'autres villes comme Lausanne, Montreux ou Macolin. Les conférences organisées ces dernières années en Suisse sur le thème des crises affectant le voisinage méridional de l'Europe concernaient notamment la
Syrie, le Yémen et le programme nucléaire iranien. L'offre de bons offices de la Suisse inclut enfin l'activité de puissance protectrice. Notre pays représente les intérêts de l'Iran en Égypte depuis 1979 et les intérêts des États-Unis en Iran depuis 1980. En février 2016, l'Iran et l'Arabie saoudite ont en principe accepté que la Suisse représente leurs intérêts respectifs mais à ce jour ils n'ont pu trouver aucun consensus sur les modalités de ce mandat de puissance protectrice. Par ailleurs, la Suisse souhaite contribuer plus activement à la sécurité coopérative et à la coopération régionale au Proche-Orient, au MoyenOrient et en Afrique du Nord. Il s'agit en l'espèce d'identifier les points d'ancrage et les formats thématiques adéquats et de soutenir certaines initiatives concrètes des États concernés. Outre le renforcement de la coopération avec des organisations régionales, la Suisse s'efforce d'étendre progressivement les relations bilatérales aux acteurs de la politique sécuritaire de la région.

Notre engagement en faveur de l'état de droit, de la démocratie et de la bonne gouvernance revêt une grande importance dans cette région. La Suisse possède une vaste expérience du domaine et des questions liées à la gouvernance locale participative. Elle s'engage en faveur de la transformation des États fragiles en nations résilientes, contribue au renforcement des structures étatiques et encourage la bonne gouvernance. Ses programmes visent le renforcement des structures locales et leur 1184

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meilleure adéquation avec les besoins de la population, laquelle bénéficie ainsi d'un accès facilité aux services publics et d'une protection plus efficace contre les violations des droits de l'homme. Le soutien accordé par exemple à la Somalie lors de la mise en place de structures fédéralistes peut ouvrir des perspectives nouvelles à de nombreux États de la région et créer le fondement d'un avenir commun malgré une société divisée entre ethnies, religions et régions. La Suisse propose également son savoir-faire dans le domaine du partage du pouvoir, notamment au Mali et au Burkina Faso où elle soutient le processus de décentralisation en voie de réalisation.

La promotion des droits de l'homme est une autre composante importante de l'engagement de la Suisse dans le voisinage méridional de l'Europe. Conformément à la stratégie du DFAE en matière de droits de l'homme pour la période 2016­2019, la Suisse met l'accent sur les instruments bilatéraux et multilatéraux, les consultations politiques, les initiatives avec des acteurs régionaux de premier plan et les programmes de développement destinés à promouvoir le respect des droits de l'homme à l'échelon local et national. Elle attire l'attention du Conseil des droits de l'homme sur les violations des droits de l'homme: environ 40% des États cités par la Suisse en 2016 se situent dans le voisinage méridional de l'Europe évoqué dans ce chapitre. Dans le même temps, elle soutient la mise en place de mécanismes internationaux d'enquête indépendants sur les violations des droits de l'homme et la lutte contre l'impunité, comme la Commission d'enquête sur la Syrie. L'engagement politique de la Suisse est renforcé par des programmes visant à aider des personnes à revendiquer et à exercer leurs droits, à renforcer la société civile dans la promotion des droits de l'homme et à soutenir des institutions étatiques et non étatiques dans leurs efforts pour s'acquitter de leurs engagements en matière de respect, de protection et de garantie des droits de l'homme. Notre pays soutient par exemple un projet régional de l'ONG «Association pour la prévention de la torture» en Afrique du Nord dont l'objectif est d'aider en particulier le Maroc et la Tunisie à honorer leurs engagements internationaux suite à la ratification récente par ces pays du Protocole facultatif se
rapportant à la Convention de l'ONU contre la torture.

Les questions liées aux droits de l'homme sont également abordées dans tous les dialogues bilatéraux menés avec les pays évoqués dans ce chapitre. La Suisse anime régulièrement des dialogues et des consultations spécifiques sur les droits de l'homme avec quatre de ces États (Sénégal, Nigéria, Iran et Bahreïn), une pratique reconduite durant l'année sous revue. L'initiative suisse qui demande un renforcement de la prévention des conflits par une prise en compte plus systématique de la dimension des droits de l'homme et le renforcement de la coopération entre le Conseil de sécurité à New York et le Conseil des droits de l'homme à Genève (appel du 13 juin) bénéficiait fin 2016 du soutien de 70 États. Sur les 34 pays concernés par ce chapitre, seul le Nigeria s'est rallié à l'appel de la Suisse.

Dans le cadre de sa coopération au développement, la Suisse s'engage dans tous les aspects de la crise du voisinage méridional de l'Europe, même si les priorités varient selon les régions et les pays (voir ch. 2.4). La part des dépenses de la coopération au développement bilatérale destinées à l'Afrique et au Proche-Orient passera de 50 à 55 % au cours des quatre années à venir. Les priorités géographiques dans la région concernée sont axées sur le Mali, le Burkina Faso, le Niger, le Tchad ainsi que sur les régions «Corne de l'Afrique» et «Afrique du Nord et Proche-Orient». Un accent 1185

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thématique particulier est placé sur la création de perspectives socio-économiques.

La réduction de la pauvreté et l'amélioration des conditions de vie sont nécessaires pour assurer la sécurité et la stabilité à long terme. La priorité est accordée aux mesures concernant les systèmes de formation (duale) et visant à promouvoir une croissance économique qui bénéficie à tous ­ en particulier par l'augmentation de la quantité et de la qualité des postes de travail ainsi que par la création d'un environnement économique favorable. Les autres thèmes importants sont notamment l'amélioration de l'approvisionnement en eau potable en Afrique de l'Ouest et en Afrique du Nord (Tunisie) et le renforcement de la résilience aux effets du changement climatique. À noter que ce secteur ­ tout comme ceux de la sécurité alimentaire et de la migration ­ bénéficiera également de contributions importantes des programmes globaux de la DDC.

L'aide humanitaire de la Suisse considère l'arc de crise entre la Syrie et le Sahel comme une région prioritaire. En 2016, environ deux tiers des contributions financières liées à un contexte particulier ont été investis dans ces domaines ­ une attention particulière étant accordée à la Syrie et à ses voisins. Le montant total de l'aide allouée depuis 2011 s'élève à plus de 250 millions de francs, ce qui en fait l'opération d'aide la plus conséquente de la Suisse. Notre pays dispense également de l'aide humanitaire dans la Corne de l'Afrique, au Yémen voisin et dans la région du lac Tchad. Ses priorités portent sur le renforcement des capacités des principales organisations humanitaires que sont le CICR, le Programme alimentaire mondial (PAM) et le Haut-Commissariat des Nations Unies pour les Réfugiés (HCR). La Suisse mène également des actions directes lorsque les conditions de sécurité le permettent (voir ch. 2.4). Compte tenu de l'importance des besoins humanitaires et de l'environnement toujours plus difficile, un surcroît d'attention a été accordé en 2016 à l'aide d'urgence, soit la protection et l'approvisionnement en biens de première nécessité des populations les plus touchées. Dans les conflits armés de longue durée, il est particulièrement important de renforcer la capacité de résistance des individus et d'élaborer de nouvelles perspectives à moyen terme. Dans la Corne de
l'Afrique et dans la région du Sahel, et de plus en plus dans le contexte syrien, la Suisse recourt simultanément ­ et de manière complémentaire ­ aux instruments de l'aide humanitaire et à ceux de la coopération au développement. Notre pays accorde une grande importance à la politique humanitaire. La protection des civils et le respect du droit international humanitaire font en effet partie des priorités de la politique étrangère de la Suisse. Face à la multiplication des attaques perpétrées contre des hôpitaux et des écoles, en Syrie et au Yémen notamment, le DFAE a rappelé que de tels actes constituaient des violations graves du droit humanitaire international et que les parties à un conflit avaient l'obligation de prendre les mesures requises pour garantir la protection de la population civile. La Suisse milite également pour l'accès humanitaire et la protection des travailleurs humanitaires ­ des défis particulièrement difficiles à relever dans le contexte de la guerre en Syrie.

Trois thèmes transversaux dont l'importance n'a cessé de croître ces dernières années au niveau de la politique étrangère de la Suisse, et qui sont traités en détail au ch. 3.7 du présent rapport, concernent directement le voisinage méridional de l'Europe. Le premier de ces thèmes couvre le domaine Fuite et migration. Dans le cadre de sa politique migratoire extérieure, la Suisse participe aux efforts destinés à fournir des réponses aux déplacements forcés, en favorisant l'interaction de tous les 1186

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instruments disponibles. Ceux-ci comprennent, outre la protection et le soutien des populations déplacées, l'ouverture de perspectives durables pour ces personnes, que ce soit par le biais de la formation professionnelle, au Kenya, ou par la rénovation de bâtiments scolaires, en Jordanie et au Liban. Ces actions concrètes sur le terrain englobent également l'assistance aux populations locales et la lutte contre les phénomènes qui contraignent les populations à fuir. Les régions prioritaires de cet engagement sont le Proche-Orient, l'Afrique du Nord et la Corne de l'Afrique. Par ailleurs, lorsque cela s'avère judicieux, la Suisse lie stratégiquement la coopération internationale et la politique migratoire au sens de l'arrêté fédéral du 26 septembre 2016 concernant la continuation du financement de mesures de promotion de la paix et de la sécurité humaine pour les années 2017 à 202014 et encourage la conclusion d'accords et de partenariats dans le domaine de la migration. À ce jour, avec 62 accords de réadmission, la Suisse est un des pays au monde ayant conclu le plus grand nombre de traités dans ce domaine. Elle entend encore étoffer cette palette à l'avenir. Signalons qu'en 2016, la Suisse a conclu un accord de réadmission avec le Koweït, et a finalisé le 13 décembre 2016 les négociations en vue de la conclusion d'un tel accord avec la Turquie. Une fois que l'accord de réadmission avec la Turquie sera signé, cette dernière attendra cependant que l'UE libéralise le régime des visas en faveur des citoyens turcs pour le mettre en vigueur. En outre, des entretiens exploratoires en vue d'un accord migratoire ont été entamés avec le Mali durant l'année sous revue.

Le deuxième thème transversal est la prévention de l'extrémisme violent (PEV), que le Conseil fédéral considère comme un élément essentiel de l'engagement contre le terrorisme. D'un point de vue géographique, l'arc de crise au Sud de l'Europe est au coeur des préoccupations en raison de la situation actuelle. La PEV couvre des domaines aussi divers que la politique de paix, le développement, les droits de l'homme, la bonne gouvernance et le fonctionnement régulier de l'État de droit. Le Plan d'action de politique étrangère de la Suisse pour la prévention de l'extrémisme violent adopté en avril 2016 tient compte d'éléments essentiels comme la
prise en compte des réalités locales, le manque de participation politique, les enjeux socioéconomiques ou le renforcement du rôle des jeunes et des femmes dans l'engagement en faveur de la PEV. Ce plan est en cours de déploiement dans le voisinage méridional de l'Europe: la Suisse soutient par exemple plusieurs initiatives de la société civile en Tunisie, en Libye, au Niger, au Nigéria et au Liban. Elle lutte simultanément contre les racines de l'extrémisme violent en participant à la création de forums de dialogue. La PEV figure également en bonne place à l'ordre du jour des consultations bilatérales avec les États des régions concernées.

L'arc de crise au Sud de l'Europe est également l'une des principales zones d'application du troisième thème prioritaire qui se situe à l'interface de la paix et du développement; il s'agit de la prévention et de la résolution de conflits liés à l'eau.

La DDC et la DSH s'engagent en faveur de l'initiative Blue Peace Middle East conformément aux lignes d'action sur l'eau et la sécurité du DFAE. La paix et la gestion coopérative et durable des ressources hydriques sont étroitement liées. À travers cette action, la Suisse s'engage pour que l'eau devienne un instrument de coopération plutôt qu'une source de conflits. Son objectif est de stimuler le dialogue 14

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entre les acteurs politiques, économiques et ceux du secteur de l'eau, et de faire émerger, par un support technique approprié, de nouvelles méthodes et règles favorisant des solutions consensuelles sur le thème de l'eau. Au niveau mondial, la Suisse échange régulièrement des informations avec les pays du voisinage méridional de l'Europe, et en particulier le Sénégal et la Jordanie, afin de mieux comprendre la complexité des cycles de l'eau dans cette région du globe et de favoriser la prévention de conflits potentiels.

2.4

Priorités de la Suisse dans les différentes régions

2.4.1

Proche-Orient et Moyen-Orient

La crise syrienne est au centre des préoccupations de la Suisse au Proche-Orient et au Moyen-Orient depuis quelques années. L'engagement de notre pays repose sur trois piliers: 1) le soutien à la recherche d'une solution politique au conflit; 2) l'engagement dans la lutte contre l'impunité ainsi que la promotion et le respect du droit international humanitaire; 3) l'apport d'aide humanitaire et le renforcement de la résilience des populations dans le besoin. La recherche d'une solution politique en Syrie met l'accent sur la promotion du dialogue entre les parties au conflit, la société civile et les acteurs humanitaires. La Suisse soutient le processus de dialogue officiel des Nations Unies dirigé par l'envoyé spécial pour la Syrie Staffan de Mistura en mettant à la disposition de son bureau des expertes, experts, conseillères et conseillers et en offrant ses services en tant que pays hôte. En 2016, des pourparlers intra-syriens se sont déroulés à Genève du 29 janvier au 3 février, du 14 au 24 mars et à partir du 13 avril pour une durée de deux semaines. Depuis, les entretiens formels intra-syriens ont été suspendus mais les pourparlers internationaux se poursuivent. Les États-Unis et la Russie se rencontrent régulièrement en Suisse pour évoquer le conflit syrien. De nombreuses puissances régionales ont également participé à la réunion sur la Syrie organisée en octobre à Lausanne. Dans une lettre adressée à la fin de l'année au Secrétaire général de l'ONU, le chef du DFAE a réaffirmé la volonté de la Suisse d'offrir un soutien à la médiation à l'ONU pour ses efforts en faveur de la paix. Cela s'inscrit aussi dans le contexte de la résolution 2328, portant sur la situation à Alep et l'installation d'un mécanisme d'observation, adoptée par le conseil de sécurité de l'ONU le 19 décembre. Il reste à prouver jusqu'à quel point l'unanimité de cette adoption, le cessez-le-feu établi par la Russie et la Turquie quelques jours plus tard ainsi que le soutien pour ce cessez-le-feu du Conseil de sécurité, représentent un tournant vers un chemin vers une paix durable. La Suisse continuera de s'engager pour un processus de paix politique avec l'implication de l'ONU.

La Suisse s'implique fortement dans la promotion du dialogue non officiel qui rassemble des représentantes et représentants de la société civile,
des scientifiques et des dignitaires religieux ayant des liens avec les différentes parties au conflit. Notre pays soutient et organise de nombreux ateliers, conférences et réunions en Suisse et à l'étranger. Ce genre de plate-forme non officielle permet souvent de développer et de tester de nouvelles idées qui sont ensuite reprises dans les entretiens officiels. La création de la Civil Society Support Room, une plate-forme réunissant de nom1188

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breuses organisations de la société civile syrienne et qui favorise les contacts avec l'envoyé spécial de l'ONU, est l'une des initiatives que le DFAE a grandement contribué à mettre en oeuvre. La Suisse s'engage également en faveur du dialogue humanitaire: le dialogue humanitaire trilatéral instauré en 2013 entre la Suisse, l'Iran et la Syrie a notamment permis la création d'un groupe de travail technique associant la Suisse et la Syrie. Des délégations des deux pays se réunissent régulièrement pour évoquer des questions telles que l'amélioration des conditions de travail des acteurs humanitaires en Syrie ou l'accréditation d'ONG internationales. L'instauration de ce dialogue a contribué à améliorer les conditions d'intervention du personnel humanitaire international en Syrie. Ce support technique de communication humanitaire confère une valeur ajoutée très appréciée de la communauté humanitaire.

La promotion et le respect du droit international humanitaire constituent le deuxième axe prioritaire d'engagement de la Suisse. Grâce à l'intervention de partenaires comme l'Appel de Genève, la Suisse établit le dialogue avec des groupes armés afin que ceux-ci aient connaissance du droit international humanitaire et l'incluent dans leur code de conduite. Elle soutient également des initiatives locales recensant les violations du droit international humanitaire afin de garantir que les crimes commis ne restent pas impunis. Afin de soutenir les organisations locales dans cette tâche, la Suisse encourage leur affiliation au réseau du Groupe de coordination de la justice transitionnelle (Transitional Justice Coordination Group). La Suisse s'engage également dans le cadre multilatéral pour le respect du droit international et pour la lutte contre l'impunité au Moyen-Orient. À la fin de décembre, elle a par exemple soutenu une résolution présentée à l'Assemblée générale des Nations Unies, qui crée un mécanisme d'enquête indépendant sur les violations du droit international en Syrie.

L'aide humanitaire et la promotion de la résilience forment le troisième axe prioritaire de l'engagement de la Suisse. Depuis le déclenchement du conflit en 2011, la Suisse a débloqué plus de 250 millions de francs pour les victimes de la crise syrienne. Les moyens engagés ont notamment pour but d'améliorer la situation des
personnes touchées par le conflit en Syrie et celle des réfugiés dans les pays de premier accueil de la région. La Suisse soutient financièrement les activités d'organisations humanitaires partenaires, détache des spécialistes du Corps suisse d'aide humanitaire (CSA) et mène des actions directes. Elle a par exemple fourni des ambulances au Croissant-Rouge syrien afin de maintenir un service de sauvetage professionnel. Certaines de ces véhicules ont été utilisées pour évacuer les habitants d'Alep, à la fin de l'année.

Pour promouvoir l'autonomie économique des personnes déplacées, la Suisse soutient par exemple un projet du PNUD visant à aider des personnes en Syrie à se procurer de nouvelles sources de revenus. Ce projet vise à fournir un appui financier aux microentreprises et aux agriculteurs ainsi qu'une formation aux artisans. En novembre, deux experts du CSA se sont rendus dans le Nord de l'Iraq pour le compte du Fonds des Nations Unies pour l'enfance (UNICEF) afin de réceptionner deux unités de distribution d'eau potable destinées à quelque 150 000 personnes déplacées après l'attaque de la ville de Mossoul. Ils ont ensuite remis ces installations à un partenaire local. La Suisse peut également mener des actions directes dans 1189

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certaines régions lorsque les conditions de sécurité le permettent. Ces missions sont confiées à des experts du CSA. Ainsi, la réhabilitation de 138 écoles en Jordanie et au Nord du Liban a permis jusqu'à présent à plus de 87 000 enfants jordaniens, libanais et réfugiés de Syrie d'intégrer le système scolaire. La Suisse a également amélioré l'approvisionnement en eau dans des régions qui accueillent un nombre particulièrement élevé de réfugiés. Un nouveau programme de formation et d'aide aux start-up lancé par la DDC dans le secteur de l'eau permet de créer des emplois pour les réfugiés syriens en Jordanie et au Liban, de former des spécialistes et de rechercher des solutions entrepreneuriales aux problèmes liés à l'eau.

En 2017, la Suisse augmentera à 66 millions de francs son engagement en faveur de l'aide humanitaire et du renforcement de la résilience dans le contexte syrien. Elle entend accroître l'aide d'urgence dans toutes les régions de Syrie. En Jordanie et au Liban, l'aide humanitaire s'associera à l'aide d'urgence pour améliorer les perspectives de vie des réfugiés. La Suisse développera la coopération au développement dans ces deux pays, afin d'optimiser les systèmes nationaux de formation, d'améliorer l'approvisionnement en eau et de créer davantage d'emplois, pour les réfugiés comme pour les habitants. En outre, le DFAE prévoit d'ouvrir un bureau humanitaire à Damas en 2017, ce qui permettra de veiller sur place à ce que l'aide de la Suisse soit utilisée de la façon la plus efficace possible. Ce bureau renforcera la crédibilité de la Suisse et lui permettra de soutenir le travail des organisations humanitaires et d'améliorer l'accès à un maximum de personnes démunies.

La Stratégie suisse de coopération pour le Moyen-Orient 2015­2018, qui couvre la Syrie, la Jordanie, le Liban et l'Iraq, met l'accent sur trois domaines d'intervention: la fourniture de services de base (eau, soins, alimentation), la protection des civils et la gestion de l'eau. Elle est soutenue et mise en oeuvre par la DDC, la DSH et le SEM. Elle constitue la pierre angulaire de l'engagement suisse dans la crise syrienne.

Gérer la situation des réfugiés et favoriser la poursuite du séjour des réfugiés dans les États hôtes, à proximité de leur lieu d'origine, sont des priorités de l'engagement suisse au Proche-Orient
et au Moyen-Orient. Outre l'aide humanitaire et le renforcement de la résilience, la Suisse soutient, par le biais de projets du HCR et d'ONG, les pays d'accueil lors de la procédure d'enregistrement et d'identification des réfugiés sans laquelle ceux-ci ne pourraient faire valoir leurs droits. Elle soutient également, par exemple, un projet au Liban qui prévoit la formation de représentants des autorités chargées de la surveillance des frontières au traitement correct des migrants et des réfugiés. Elle finance un poste auprès du Bureau du HautCommissariat aux droits de l'homme (HCDH) au Liban, afin de contribuer à mieux faire respecter les droits de l'homme des réfugiés syriens. De plus, elle assiste les autorités turques dans l'élaboration d'une politique d'intégration nationale pour les réfugiés. Le Conseil fédéral ne veut cependant pas se contenter de renforcer l'engagement de la Suisse sur place. C'est ainsi que la Suisse s'est déclarée prête à intégrer dans son programme de relocalisation les réfugiés venant de la région de crise et à délivrer des visas humanitaires aux membres de famille proches de Syriens résidents en Suisse. Depuis le début de la crise syrienne, environ 1500 personnes ont été intégrées à ce programme et environ 5000 autres ont reçu un visa humanitaire.

Par ailleurs, le Conseil fédéral a décidé, le 9 décembre, que la Suisse accueillerait 1190

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encore pendant la période 2017­2018 2000 personnes particulièrement vulnérables, qui sont reconnues comme réfugiés par le HCR. À cela s'ajoute le cas des réfugiés palestiniens, dont la situation s'est nettement détériorée, notamment en raison du conflit syrien. La Suisse finance l'Office de secours et de travaux des Nations Unies pour les réfugiés de Palestine dans le Proche-Orient (United Nations Relief and Works Agency for Palestine Refugees in the Near East, UNWRA) à hauteur de quelque 20 millions de francs par année. Le mandat de commissaire général de l'UNRWA est actuellement exercé par le Suisse Pierre Krähenbühl. Notre pays assume également la présidence de la Commission consultative de l'UNRWA, ce qui lui permet de participer directement à la promotion des réformes structurelles et à la recherche de solutions à l'insuffisance de financement considérable de cette institution d'entraide.

En matière de PEV, la Suisse oeuvre au Liban pour que les mesures visant à contrer l'extrémisme violent ne revêtent pas uniquement un caractère répressif ou réactif, mais s'attaquent aux causes profondes du phénomène. Eu égard au savoir-faire acquis par la Suisse et à son engagement dans le domaine de la PEV, la Coordonnatrice spéciale des Nations Unies pour le Liban Sigrid Kaag a demandé à notre pays d'apporter un appui consultatif à l'élaboration d'une approche de la prévention de l'extrémisme violent fondée sur une «logique intégrée». L'objectif du Plan d'action du Secrétaire général de l'ONU pour la prévention de l'extrémisme violent est d'aider les États membres à élaborer des plans d'action nationaux. Par ailleurs, la Suisse met en oeuvre de nombreux projets liés à la promotion du dialogue, aux droits de l'homme et au renforcement de l'État de droit dans toute la région. Elle soutient notamment le dialogue entre les populations d'origine et les communautés syriennes immigrées afin d'éviter l'éclatement de conflits ouverts.

Le conflit qui perdure en Israël et dans le Territoire palestinien occupé (TPO) est, de loin, le plus ancien de la région, puisque l'année 2017 marquera les 50 ans de l'occupation des territoires palestiniens par Israël. Il est évident qu'une solution durable à la crise aurait une incidence positive sur les autres conflits de la région. La Suisse contribue à la promotion de la paix
entre Israël et le TPO en soutenant notamment l'initiative de paix de la France, aux travaux de laquelle elle prend une part active. Dans le cadre du conflit interpalestinien, elle oeuvre en faveur de la réconciliation entre les factions palestiniennes, sans laquelle une solution acceptable fondée sur la coexistence de deux États n'a aucune chance d'aboutir.

La Suisse est convaincue qu'un meilleur respect du droit international de la part de toutes les parties concernées est la condition sine qua non pour parvenir à une véritable relance du processus de paix au Proche-Orient, qui est aujourd'hui paralysé. La stratégie de coopération pour le Territoire palestinien occupé (TPO) met l'accent sur la promotion du droit international, des droits de l'homme et de la protection de la population civile, sur l'amélioration des prestations par le renforcement des structures locales et sur le développement agro-économique. Cette stratégie est soutenue et mise en oeuvre par la DDC et par la Direction politique du DFAE ­ en l'occurrence la DSH ­ ainsi que par la coordination régionale compétente.

La Suisse participe par exemple au renforcement de la Commission palestinienne indépendante des droits de l'homme (Palestinian Independent Commission for Human Rights, ICHR). Cette institution indépendante milite pour le respect des 1191

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droits de l'homme par l'Autorité palestinienne et effectue des visites de prisons palestiniennes. Dans ce contexte, la Suisse a également contribué à l'ouverture de la Maison de la Presse à Gaza, laquelle s'est depuis lors imposée comme un centre de travail et de formation pour les journalistes indépendants et comme un organe de vigilance indépendant de la liberté de la presse à Gaza. La Suisse s'engage également en faveur de la protection des défenseurs des droits de l'homme et de leurs proches. Elle assure notamment la mise en oeuvre, sur les territoires israélien et palestinien, d'un projet garantissant la protection juridique des défenseurs des droits de l'homme arrêtés ou placés en détention. Ces activités sur le terrain sont couplées, en cas de violation du droit international, à une politique de démarches cohérente et à des prises de position dans des enceintes multilatérales telles que le Conseil des droits de l'homme de l'ONU. La Suisse officielle dénonce ainsi régulièrement des cas de violation du droit international, notamment en relation avec l'implantation de colonies de peuplement israéliennes en Cisjordanie.

S'agissant de la protection de la population civile, la Suisse dispense une aide humanitaire aux populations vulnérables de Gaza et de Cisjordanie. Elle focalise son engagement sur les deux millions de réfugiés palestiniens qui vivent dans le TPO, dont 40 % dans des camps de réfugiés. Dans le cadre du renforcement des compétences et des capacités des autorités locales, la Suisse assiste les communautés villageoises qui oeuvrent pour la transparence. Ces communautés sont également associées à la construction d'infrastructures ­ garderies, écoles, routes, etc. Dans le domaine du développement agro-économique, la Suisse soutient les mesures visant à améliorer l'accès des paysans aux marchés. À cette fin, elle collabore avec des exploitations agricoles, le secteur privé et le ministère de l'agriculture. Elle a ainsi participé, conjointement avec le gouvernement et avec les producteurs, à la stratégie nationale de production d'olives.

La stratégie de coopération pour le Yémen met l'accent sur les deux priorités que sont la protection de la population civile et le secteur de l'eau. La situation de la population au Yémen s'est considérablement aggravée au point que 21,2 millions de
personnes, soit 80 % de la population, sont dépendantes de l'aide humanitaire. La Suisse apporte une aide humanitaire et contribue à la promotion et au respect du droit international humanitaire. Elle a consacré au total plus de 39 millions de francs à l'aide au Yémen durant les cinq dernières années. Elle participe en outre aux efforts visant à trouver une solution politique au conflit et a dépêché un conseiller auprès du bureau de l'envoyé spécial de l'ONU Ismail Ould Cheikh Ahmed. Après avoir accueilli les pourparlers de paix à Macolin en 2015, la Suisse a endossé le rôle de facilitateur lors de la préparation de la poursuite des discussions au Koweït.

La région du Golfe n'est généralement pas comprise dans l'arc de crise au Sud de l'Europe. Les monarchies du Golfe se caractérisent par une certaine stabilité intérieure et par un niveau de vie élevé. Eu égard aux tensions régionales en cours depuis des décennies, à la polarisation croissante entre l'Arabie saoudite et l'Iran en particulier, et à la situation insatisfaisante qui prévaut en matière de droits de l'homme dans certains pays, la région du Golfe est toutefois confrontée à des défis majeurs en matière de paix et de sécurité. Ces problèmes dépassent en partie le cadre régional et compliquent la résolution des conflits en Syrie et au Yémen. La Suisse tente également de jeter des passerelles par le biais de sa politique des bons offices.

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Le mandat de puissance protectrice qu'elle assume en défendant les intérêts des États-Unis en Iran est le plus vaste de tous ceux exercés par la Suisse en matière de défense des intérêts. Les relations particulières établies dans ce contexte avec les États-Unis et avec l'Iran ont permis à la Suisse de faciliter la tenue, en janvier, de discussions confidentielles dans notre pays, lesquelles ont abouti à la libération de onze personnes iraniennes et américaines. Suite à la rupture des relations diplomatiques entre l'Arabie saoudite et l'Iran, des négociations portent actuellement sur les modalités des mandats de puissance protectrice exercés par la Suisse. Des discussions en ce sens ont également été menées entre l'Iran et le Bahreïn. Notre pays développe par ailleurs ses relations avec la Ligue arabe. L'accréditation de l'ambassadeur de Suisse au Caire auprès de la Ligue arabe doit encore être approuvée formellement par le Conseil des ministres. Un protocole d'entente (MoU) visant à intensifier la coopération avec la Ligue arabe a été négocié et sera signé dans un proche avenir. Par ailleurs, l'ambassadeur de Suisse en Arabie saoudite est également accrédité comme envoyé spécial de la Suisse auprès de l'Organisation de la Coopération islamique (OCI) à Djeddah.

La région du Proche-Orient et du Moyen-Orient est l'une des plus armées du monde; elle est également considérée comme une plaque tournante du commerce international d'armes. Les armes de destruction massive, qu'elles soient nucléaires, chimiques ou biologiques, sont une source réelle de préoccupations. Dans ce contexte, l'utilisation répétée d'armes chimiques en Syrie constitue un phénomène particulièrement inquiétant et un véritable défi pour la sécurité internationale. La Suisse soutient donc depuis l'automne 2011 les efforts internationaux visant la création d'une zone exempte de toute arme de destruction massive au Proche-Orient et au Moyen-Orient, et a accueilli à cette fin plusieurs réunions de consultation. L'objectif visé est de renforcer l'architecture de la non-prolifération en général et la sécurité régionale au Proche-Orient et au Moyen-Orient en particulier. Une conférence devant réunir les principaux acteurs de la scène internationale a été annulée en raison de divergences fondamentales entre la Ligue arabe et Israël, ce qui
a entraîné l'échec de la Conférence d'examen du traité de non-prolifération nucléaire en mai 2015. Le processus de création de la zone libre est depuis lors au point mort, mais la Suisse continuera à soutenir les acteurs de la région s'ils manifestent l'intention de reprendre les négociations.

2.4.2

Afrique du Nord

Le Conseil fédéral avait rapidement réagi aux évènements politiques en Afrique du Nord et décidé, le 11 mars 2011, de soutenir les processus de transition. Le programme Afrique du Nord 2011­2016 avait concrétisé cette décision. Les révoltes et révolutions qui ont ébranlé le monde arabe n'ont pas non plus eu l'effet attendu en Afrique du Nord. Le processus de transition démocratique est poussif et son issue demeure incertaine. Certains pays cherchent même à le contrer en tentant de rétablir leur ancien régime, tandis que la Libye, en proie à la guerre, assiste à la déliquescence de son État. À ce jour, seule la Tunisie s'est engagée dans un processus de réformes, semé d'embûches au demeurant. Toutefois, avec l'esprit de coopération axé sur le long terme, les trois domaines de l'engagement suisse dans la région 1193

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gardent toute leur pertinence, en particulier en Tunisie et en Égypte, pays de concentration de notre coopération dans le cadre de la Stratégie Afrique du Nord 2017­20: 1. Soutien aux processus démocratiques et droits de l'homme; 2. Développement économique inclusif et durable et création d'emplois; 3. Migration et protection en particulier des personnes vulnérables.

Le travail futur dans la région va se baser sur les résultats et les expériences de ces quatre dernières années. Une étape importante de la transition en Tunisie s'est achevée avec la tenue d'élections législative et présidentielle libres et transparentes à la fin 2014. La Suisse, premier partenaire bilatéral du processus électoral dans le pays, a soutenu la charte d'honneur des partis politiques qui a contribué à la tenue pacifique des élections, formé 200 femmes candidates et fourni 30 000 urnes. La Suisse contribue à la transition démocratique en appuyant le travail législatif et constitutionnel entrepris par le Parlement depuis l'adoption d'une nouvelle constitution en 2014. Les droits de l'homme, en particulier la lutte contre la torture, restent un engagement important de la Suisse en Tunisie.

La Suisse a également contribué à la transition en assistant la radio tunisienne, afin qu'une information indépendante et de qualité soit garantie aux populations les plus marginalisées. Avec une couverture de l'ensemble du territoire tunisien, un million de nouveaux auditeurs ont été atteints, notamment des femmes et des jeunes. Parmi les principaux résultats dans le domaine économique, on note la création de plus de 13 500 emplois et la formation professionnelle fournie à 550 personnes, dont 85 % ont trouvé immédiatement un emploi. Le Parlement a adopté le concept de Fonds Suisse comme modèle pour la promotion de l'esprit d'entreprise et alloué trente millions de francs au titre de la participation du gouvernement aux prêts pour des jeunes entrepreneurs dans les régions. Plusieurs milliers de ménages dans la région la plus défavorisée du pays, le gouvernorat de Kasserine, ont reçu de l'eau potable à la maison pour la première fois. En matière de prévention de l'extrémisme violent (PVE), la Suisse et la Tunisie ont signé en février une déclaration d'intention. La mise en oeuvre de cette dernière s'inscrit dans un dialogue politique et
technique avec les autorités tunisiennes, ainsi qu'à travers des collaborations sur le plan pratique allant de pair et se prolongeant avec l'engagement de la Suisse sur des activités agissant sur les causes de l'extrémisme violent.

Au niveau des réformes, plus de 300 procédures contraignantes ont été simplifiées ou supprimées dans sept ministères. Enfin, la coopération dans le domaine de la migration s'est considérablement accrue dans le cadre du partenariat migratoire signé en 2012. 1521 ressortissants tunisiens ont bénéficié d'une aide au retour volontaire, qui a permis de lancer 547 micro-entreprises et de créer 941 emplois. Plusieurs milliers de jeunes ont été sensibilisés aux risques de la migration irrégulière. Le soutien suisse au Croissant-Rouge tunisien a permis de fournir de l'assistance humanitaire à plus de 1000 migrants secourus en mer sur la trajectoire Libye-Italie. Lorsque le conflit civil libyen s'est intensifié en 2014, la Suisse a soutenu le gouvernement pour le développement d'un dispositif de procédures qui seraient déclenchées en cas d'afflux de masse de personnes depuis la Libye.

Les différentes visites de haut niveau avec la Tunisie en 2016, dont la visite d'État et la visite officielle de travail du chef du DFAE à Tunis, ont permis de faire avancer plusieurs dossiers. Tout en saluant la volonté tunisienne de s'engager dans la transi1194

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tion démocratique et les réformes, la Suisse a demandé et obtenu l'amélioration des procédures d'identification dans le cadre du retour de Tunisiens en situation illégale, ainsi que l'engagement des autorités tunisiennes à mener leurs actions et réformes dans le respect des droits de l'homme et le cadre défini par eux et en mettant également l'accent sur l'aspect préventif de la lutte contre le terrorisme. Cela sera fait notamment dans le cadre du dialogue Suisse­Tunisie en matière de PVE, qui s'attaque aux causes mêmes de la radicalisation. Le nouveau programme de coopération donne ainsi la priorité à la création de perspectives pour les jeunes, en échange d'un engagement des autorités tunisiennes à intégrer cet aspect préventif dans leurs programmes et actions. La création de perspectives aura d'ailleurs aussi des bénéfices en termes de migration (prévenir le départ du pays de jeunes au chômage).

En Égypte, la Suisse a maintenu son agenda transformatif malgré un contexte de plus en plus difficile et se focalise sur le développement des moteurs-clés de changements. Par exemple, elle a soutenu quinze organisations de défense des droits de l'homme. Mille détenus et victimes de torture ont pu bénéficier d'un soutien juridique et médical. Une plate-forme interpartis chargée de négocier les règles de fonctionnement du Parlement, ainsi qu'une organisation qui, dans les universités du pays, forme une nouvelle génération de médiateurs, ont été mises en place. Dans le domaine du développement économique, la Suisse concentre son action sur la réhabilitation d'infrastructures urbaines de base et la création d'emplois, à travers un soutien accordé à de petites et moyennes entreprises. Dans le gouvernorat d'Assouan, une région particulièrement défavorisée, la Suisse implique la population dans la réhabilitation de vingt canaux d'irrigation qui permettent à des milliers d'agriculteurs d'augmenter drastiquement leur production. La Suisse a soutenu trois institutions de microfinance avec une portée totale de 435 000 clients et un portefeuille exceptionnel d'environ 110 millions de francs. Enfin, elle est intervenue auprès de 14 400 migrants rassemblés dans des centres de détention afin qu'ils aient accès à des soins de base et puissent s'intégrer au sein de la population autochtone.

La Suisse a soutenu
l'amélioration des moyens de subsistance de 40 000 réfugiés et migrants et a appuyé la création d'opportunités de travail pour plus de 5000 migrants.

En dépit de la fermeture de son ambassade en Libye en 2014, la Suisse reste, lorsque cela est possible, engagée sur place où elle plaide pour une paix inclusive et durable.

Elle soutient le processus onusien. Dans ce cadre, plusieurs rencontres ont eu lieu à Genève et ont permis de faciliter les contacts et la participation de différents acteurs du conflit qui manquaient à la table des négociations. La Suisse soutient également des projets de dialogue semi-formel et informel de paix. Elle appuie notamment des mécanismes locaux de gestion des conflits et des plates-formes de dialogue entre les acteurs-clés du conflit. Les activités de déminage humanitaire et de nettoyage des zones de conflit menées avec succès avant l'été 2014 ont été suspendues, mais les activités de sensibilisation aux risques continuent. L'engagement suisse s'est également concentré sur l'aide humanitaire et la protection des réfugiés, des migrants et des déplacés internes. Par exemple, la Suisse a financé un projet de l'Organisation internationale pour les migrations (OIM) d'aide au retour pour environ 440 migrants en détention qui souhaitaient rentrer dans leur pays d'origine.

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Le Maroc est parmi les pays les plus affectés par le changement climatique, ce qui exacerbe les différents risques naturels auxquels il est déjà confronté. Face à ce constat, la Suisse a soutenu ces dix dernières années des projets de gestion des risques complémentaires liant prévention, préparation et réponse. Après des années de support suisse, une équipe de sauvetage marocaine a par exemple obtenu en 2014 ­ une première en Afrique ­ la certification de conformité aux standards de l'ONU.

Cette collaboration continue entre la Suisse et le Maroc a contribué à un changement graduel du cadre stratégique et légal du pays en la matière. Le Maroc a ainsi adopté une Stratégie nationale intégrée de gestion des risques, approche avant-gardiste et modèle pour la région que la Suisse accompagne techniquement. La Suisse s'est aussi engagée auprès du Maroc pour la préparation et la mise en oeuvre de la COP22 en mettant un accent fort sur la jeunesse et les innovations africaines en matière de lutte contre les effets du changement climatique. Le Maroc est un pays de transit et d'immigration pour les réfugiées et migrants de l'Afrique sub-saharienne et du Moyen-Orient. La Suisse a apporté son soutien au gouvernement marocain dans l'élaboration d'une stratégie d'immigration basée sur les droits de l'homme et le droit des réfugiés, et elle est le bailleur principal pour la protection des migrants, fournissant de l'aide pour environ 40 % des plus vulnérables d'entre eux.

En Algérie, la Suisse soutient le Programme alimentaire mondial (PAM) en débloquant chaque année deux millions de francs pour appuyer les réfugiés sahraouis à Tindouf. Elle a de plus financé un projet de l'OIM qui a permis à environ 1800 Nigériens d'être rapatriés de manière volontaire dans leur pays d'origine. Au Niger, 120 projets communautaires générateurs de revenus ont été conduits dans la région de Zinder à l'intention de ceux qui sont retournés au pays et de leurs communautés.

Au-delà des spécificités individuelles, les pays d'Afrique du Nord continuent de partager des défis communs et des causes profondes de fragilité tels que la stagnation de l'économie avec des taux de chômage élevés (en particulier chez les jeunes), les énormes disparités sociales et économiques au sein des différents pays, la pauvreté de la formation professionnelle
et universitaire, la croissance démographique avec une pression accrue sur les ressources, la vulnérabilité aux changements climatiques, etc. Dans ce contexte, la Suisse planifie, dans les quatre prochaines années, d'adopter une approche plus régionale visant à contribuer à la lutte contre le terrorisme par des actions de PVE, à renforcer la coopération holistique dans le domaine migratoire, à encourager la coopération entre les pays de la région, notamment dans les domaines économique et culturel, et à promouvoir la société civile. La promotion de perspectives professionnelles et sociales pour les jeunes sera également un axe prioritaire. La nouvelle stratégie 2017­2020 sera elle aussi mise en oeuvre dans le cadre d'une approche interdépartementale: par la DDC, la Direction politique du DFAE, le SECO et le SEM, sachant que, le cas échéant, les activités importantes dans le domaine migratoire seront coordonnées avec les objectifs de la politique extérieure de la Suisse en matière de migration.

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2.4.3

La région du Sahel et du lac Tchad

La zone du Sahel et les pays limitrophes du lac Tchad occupent depuis longtemps une place importante dans la coopération internationale de la Suisse, en témoigne l'engagement annuel de celle-ci au Burkina Faso, au Mali, au Niger et au Tchad, d'un montant supérieur à 100 millions de francs. De plus, la Suisse mise sur la cohésion de sa coopération au développement, de sa promotion de la paix et de l'aide humanitaire qu'elle fournit dans la région. En veillant à coordonner encore mieux ses instruments de politique extérieure, elle s'attaque aux facteurs qui soustendent les crises et les contextes fragiles et tient compte de l'enchevêtrement des différents enjeux. Enfin, l'engagement de la Suisse au Sahel s'articule autour d'axes stratégiques communs et d'un mécanisme de coordination qui favorise les échanges entre le DFAE, le Département fédéral de justice et police (DFJP) et le DDPS. Grâce à une présence de longue date et à cette approche intégrée, la Suisse a pu approfondir ses connaissances du contexte et de ses acteurs. Elle est perçue dans la région comme un partenaire fiable et respecté, qui sait se faire entendre.

Au Burkina Faso, au Mali, au Niger et au Tchad, la coopération au développement de la Suisse mise sur des réformes structurelles qui doivent avoir un effet durable sur le développement économique et social de ces pays. La décentralisation, la bonne gouvernance, l'éducation ainsi que la création de bonnes conditions en faveur de l'emploi et de l'obtention de revenus sont des thèmes fondamentaux sur lesquels s'appuie l'ensemble de l'engagement de la Suisse dans la région. Notre pays considère la bonne gouvernance au Mali comme un moyen d'augmenter la participation politique. De plus, la priorité qui y est accordée à l'éducation permet d'encourager la naissance d'une société inclusive à même de résister aux tentations de la violence extrémiste et de contribuer à la prévention. C'est pourquoi la Suisse soutient financièrement 120 centres de formation érigés dans les régions affectées par le conflit qui s'inscrivent dans le concept de renouvellement complet du système éducatif malien. Le soutien apporté à l'élevage de moutons dans les régions arides du pays encourage l'une des rares sources de revenu des jeunes. Il contribue en outre à la sauvegarde de ces vastes paysages désertiques en
offrant à la population rurale la possibilité de gagner sa vie en restant sur ses terres traditionnelles. À Mopti et à Tombouctou, la Suisse aide par ailleurs les représentants officiels maliens, la société civile et les autorités traditionnelles à améliorer l'accès aux biens et services élémentaires, favorisant ainsi le développement régional et la cohésion sociale.

L'éducation est également un axe important de l'engagement de la Suisse au Burkina Faso, au Niger et au Tchad. Au cours des quatre dernières années, 2 760 000 enfants burkinabés, dont 48 % de filles, ont pu être scolarisés ou poursuivre leur scolarisation grâce au soutien suisse. L'engagement helvétique s'est répercuté directement sur l'éducation de base de 31 000 enfants, qui ont bénéficié de fournitures scolaires, d'une cantine, d'enseignants formés et de classes mieux équipées. Le chef du DFAE a visité l'une de ces écoles lorsqu'il s'est rendu au Burkina Faso en mars.

Près de 20 000 enseignants et directeurs d'écoles, dont 30 % de femmes, ont eu la possibilité au Niger d'améliorer les connaissances professionnelles qu'ils ont acquises sur le terrain. De plus, 200 centres communautaires qui proposent des offres alternatives d'éducation ont été créés. Ils accueillent 12 000 personnes. Au Tchad, la DDC a apporté son soutien à 500 écoles et 200 centres d'alphabétisation, ce qui s'est 1197

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traduit par la scolarisation de 70 000 enfants (43 % de filles) et l'alphabétisation de 11 000 adultes (75 % de femmes).

L'eau est un autre axe important de l'engagement de la DDC en Afrique de l'Ouest, où, en 2015, quelque 130 000 personnes ont eu accès à de l'eau potable grâce aux activités de la Suisse. Les maladies provoquées par l'eau sale ont régressé de 80 % dans certaines régions, notamment au Burkina Faso. Dans quatre régions du Tchad recensant au total quelque deux millions d'habitants, plus de 2000 foyers ont vu leurs revenus augmenter durant la période de sécheresse grâce à de nettes améliorations des méthodes d'irrigation.

Au Sahel et dans les pays limitrophes du lac Tchad, la Suisse mène dans le domaine de la promotion de la paix des activités complémentaires à celles de la coopération au développement. En soutenant au Niger le dialogue engagé à la frontière avec la Libye, elle cherche par exemple à renforcer la cohésion entre les différentes sociétés nigériennes, à éviter que le conflit libyen gagne le Niger et à contribuer à faire cesser les combats dans le Sud de la Libye. De plus, la Suisse accompagne dans toute la région l'émergence d'une culture qui, en favorisant l'échange et le débat, consolide la cohésion des communautés musulmanes ainsi que la tolérance entre groupes sociaux et religieux. Ces activités lui permettent, par exemple au Nigéria, de mener une analyse approfondie des acteurs et des dynamiques du conflit avec Boko Haram et, de ce fait, de mieux comprendre les besoins des jeunes des régions dans lesquelles ce groupe est implanté. Étant donné que les jeunes sont souvent réceptifs aux promesses faites par les groupes extrémistes, il est nécessaire de formuler des contre-arguments clairs pour les protéger des dangers d'une instrumentalisation. En ce qui concerne la prévention des conflits, enfin, la Suisse met son expérience en matière de traitement du passé au service des institutions nationales et régionales.

L'accompagnement de la Commission Vérité, Justice et Réconciliation au Mali ainsi que l'envoi d'un expert aux Chambres africaines extraordinaires, la juridiction spéciale créée pour le procès de l'ancien dictateur tchadien Hissène Habré, ne sont que quelques exemples parmi d'autres. L'envoyé spécial de la Suisse pour le Sahel a pour mission d'accroître le
rôle de la Suisse dans la région et de renforcer son rôle dans le domaine de la promotion de la paix.

Tandis que les efforts en matière de coopération au développement et de promotion de la paix se conjuguent pour trouver des issues aux situations de crise et de fragilité, l'aide humanitaire se consacre aux groupes de population les plus vulnérables dans ces situations. Elle s'emploie prioritairement à protéger les populations civiles, à alléger leurs souffrances et à assurer leur sécurité alimentaire. Rien qu'au Mali et dans les pays limitrophes, la Suisse fournit une aide humanitaire à 130 000 personnes (déplacés internes, réfugiés, communautés hôtes et personnes revenues au pays). Outre l'aide d'urgence, elle accompagne le gouvernement dans l'élaboration, à l'échelle nationale, d'une série de mesures destinées à garantir la sécurité alimentaire. Elle finance par ailleurs les activités des partenaires multilatéraux dans la région, lesquels sont souvent les premiers acteurs humanitaires sur le terrain. Dans la région du lac Tchad, plus de 450 000 personnes ont accès à des projets cofinancés par la Suisse, dont les principaux partenaires sont le CICR, le HCR et le PAM.

L'accès humanitaire est une autre priorité de la Suisse. En finançant le Service aérien humanitaire des Nations Unies (UNHAS), elle veille à ce qu'une aide 1198

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d'urgence soit apportée aux régions les plus reculées du Niger, du Tchad et du Nigéria, où les besoins sont souvent les plus criants.

Étant donné que d'importantes routes migratoires traversent le Sahel ­ le Niger et le Mali sont particulièrement concernés ­ la Suisse ne s'engage pas uniquement pour les aspects humanitaires de cette problématique. Pour à la fois atténuer les souffrances des migrants durant leur pénible périple, décharger les États et les communautés hôtes et combattre les raisons profondes des migrations, elle participe au Fonds fiduciaire d'urgence de l'Union Européenne pour l'Afrique, lancé en novembre 2015 lors du Sommet de La Valette sur la migration, et fournit également une aide directe aux pays concernés. Au Niger par exemple, elle soutient, conjointement avec l'OIM, un programme de réintégration destiné aux migrants nigériens rapatriés d'Algérie et encourage la coopération transfrontalière entre la Libye et le Niger. En octobre, la Suisse et le Mali ont décidé d'engager des négociations en vue de la conclusion d'un accord de migration. Lorsqu'il a reçu le ministre des affaires étrangères du Mali en octobre à Berne, le chef du DFAE l'a assuré que la Suisse entendait poursuivre son engagement en faveur de la paix et de la lutte contre la pauvreté au Mali. Il a insisté également sur l'importance d'une coordination entre les paramètres du développement et ceux de la politique migratoire. Enfin, il a convenu avec son homologue de l'importance de poursuivre le développement des relations bilatérales, selon une approche générale basée sur le partenariat.

Le partenariat migratoire conclu il y a cinq ans déjà avec le Nigéria, l'un des principaux pays de provenance des migrants en Suisse, permet à cette dernière d'aborder toute une série d'enjeux conjointement avec le Nigéria. Lors de sa visite dans ce pays en mars, le chef du DFAE a pu se convaincre de l'efficacité de la coopération dans ce domaine, laquelle va de la formation professionnelle et des programmes d'échange et de formation continue à un téléfilm sur les risques et les défis de la migration illégale produit au Nigéria, en passant par l'aide au retour.

La volonté de la Suisse d'intensifier sa collaboration avec les organisations régionales concerne également cette région. Dans le cas de la Communauté économique des
États de l'Afrique de l'Ouest (CEDEAO), l'une des principales organisations régionales en Afrique, elle vient compléter les domaines de l'engagement suisse dans les pays membres de la CEDEAO. La paix et la sécurité, les migrations ou encore la sécurité alimentaire en sont des domaines prioritaires. À titre d'exemple, la Suisse apporte un soutien en ressources financières et humaines notamment à l'Ecole de maintien de la paix au Mali et au Centre international Kofi Annan de formation au maintien de la paix au Ghana; elle encourage la coopération des pays membres de la CEDEAO dans le domaine des migrations et de la libre circulation des personnes et elle s'engage, dans la CEDEAO, en faveur d'une politique agricole commune qui a pour objectif la modernisation des exploitations familiales. En septembre enfin, la Suisse a soumis à la CEDEAO une déclaration d'intention dans le but de formaliser la coopération existante et de mener des échanges réguliers.

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2.4.4

Corne de l'Afrique

La Corne de l'Afrique comprend plusieurs pays considérés comme fragiles. Les causes de cette fragilité sont multiples. Après une décolonisation menée à la hâte dans la plupart des pays, le pouvoir est tombé aux mains de personnes insuffisamment qualifiées, d'anciens dirigeants rebelles et combattants pour la libération ou encore d'élites corrompues. L'échec de la transition entre les anciennes puissances colonisatrices et les nouveaux gouvernements en place a eu pour effet une mauvaise gouvernance, des concepts de développement économique inadéquats, l'absence de prospérité et une sécurité juridique trop faible. Seuls de rares pays ont su se développer et aller de l'avant. Rien d'étonnant, dès lors, à ce que la région soit une terre de contradictions. D'un côté, la Corne de l'Afrique doit faire face à de nombreux enjeux, crises et problèmes, elle affiche le plus grand nombre de réfugiés et de personnes déplacées sur le continent ainsi que les taux de mortalité maternelle et infantile les plus élevés du monde. De l'autre côté, un pays comme le Kenya a vu émerger une classe moyenne qui est de moins en moins encline à tolérer les dysfonctionnements et réclame une représentation et une participation équitables.

Dans ce contexte complexe, la Suisse intervient, sur la base de son mandat constitutionnel, de manière coordonnée et en recourant à tous les instruments dont elle dispose en termes de politiques et humanitaires ainsi que dans le domaine du développement. Par une meilleure préservation des droits de l'homme, la protection des populations civiles, la transmission de savoir-faire et l'appui technique et financier, la Suisse contribue à améliorer les conditions de vie sur place. Par son engagement, elle contribue à la paix et à la sécurité ainsi qu'au respect des droits de l'homme et à l'émergence de perspectives pour la stabilisation de la région.

Les nombreux enjeux que représentent les catastrophes naturelles récurrentes et les conflits ainsi que les déplacements de population que ceux-ci provoquent ne s'arrêtent pas aux frontières d'un pays mais sont de nature régionale. La Suisse en tient compte en poursuivant une stratégie de coopération interdépartementale pour la Corne de l'Afrique. Elle soutient les pays au niveau régional, national et local dans les domaines de la sécurité alimentaire,
de la santé, des migrations et de la bonne gouvernance, l'objectif étant de consolider durablement les structures et mécanismes de résilience locaux. La Suisse contribue ainsi à sauver des vies humaines, à réduire la pauvreté ainsi qu'à promouvoir la paix, la stabilité et la sécurité dans la région.

Elle coordonne cet engagement avec celui qu'elle déploie dans les pays voisins tels que le Soudan et le Soudan du Sud. Le Secrétaire d'État du DFAE et son homologue éthiopien ont mené en septembre 2016 les deuxièmes consultations politiques bilatérales. Ils ont notamment préconisé une meilleure coopération dans le domaine migratoire et évoqué, dans un le contexte de la situation tendue en Éthiopie, une coopération approfondie entre les deux pays au sein du Conseil des droits de l'homme de l'ONU.

En Somalie, la Suisse a soutenu la mise en place de structures fédéralistes. Après plus de deux décennies, le gouvernement somalien jouit de nouveau d'une reconnaissance internationale depuis 2012 et le pays s'est doté d'une constitution fédérale provisoire. Au Soudan, la Suisse s'emploie principalement à sauver des vies et à alléger les souffrances des personnes touchées par les conflits armés et les catas1200

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trophes naturelles. Elle déploie son engagement pour l'essentiel dans les domaines de la sécurité alimentaire, des services de base (approvisionnement en eau et santé) et de la protection des civils.

Pour le Soudan aussi, la Suisse s'appuie sur une stratégie de coopération intégrée, qui englobe principalement les activités du DFAE et du DFJP. Sur le terrain, son appui va au PAM, à d'autres organisations onusiennes et à des ONG qui assistent les civils en leur fournissant des produits alimentaires et, plus globalement, une aide d'urgence, et les soutiennent également dans le rétablissement des moyens de subsistance. Par ailleurs, les efforts de la Suisse portent plus particulièrement sur l'accès à l'eau salubre, aux installations sanitaires et aux soins médicaux des personnes déplacées. Le pays peut également envoyer sur place des experts du Corps suisse d'aide humanitaire (CSA). Depuis 2012, la Suisse soutient la stratégie de l'OIM et du HCR dans la lutte contre la traite et le trafic d'êtres humains. Au niveau politique, les relations bilatérales entre la Suisse et le Soudan, pays clé s'agissant des défis migratoires, ont été intensifiées et des consultations politiques annuelles sont prévues entre les deux pays.

Depuis son indépendance en 2011, le Soudan du Sud fait partie des pays prioritaires de l'aide humanitaire de la Suisse et de son engagement en matière de politique de paix. La stratégie de coopération, qui implique le DDPS en plus de différentes unités d'organisation du DFAE, comprend plusieurs instruments de la coopération internationale tels que la fourniture d'une aide d'urgence et d'une aide à la reconstruction ainsi que d'une aide au développement et d'une aide à la résolution des conflits. Les activités suisses sont consacrées à la sécurité alimentaire et à la garantie des moyens de subsistance ainsi qu'à la protection de la population civile et au renforcement de la sécurité humaine. Grâce au soutien de la Suisse, des points d'eau et des pompes en panne ont été réparés et de nouveaux puits creusés, ce qui a permis d'améliorer l'accès à l'eau salubre de plus de 100 000 personnes dans le Nord du pays. Étant donné que le conflit perdure au Soudan du Sud, le CICR, qui y mène actuellement la plus vaste opération en Afrique, est un partenaire important pour l'approvisionnement des
populations en détresse des deux parties au conflit.

S'inscrivant dans une approche interdépartementale, la politique extérieure de la Suisse en matière de migration est mise en oeuvre dans la Corne de l'Afrique conjointement par le SEM, la DDC, la Division Afrique subsaharienne et Francophonie (DASF) et la DSH. Dans le domaine migratoire, les activités et les projets réalisés, principalement pour le moment, le sont dans le cadre de l'instrument «Protection dans la région», qui repose lui-même sur la stratégie de coopération de la Suisse dans la Corne de l'Afrique. La protection dans la région ­ ou protection des migrants dans leur région d'origine ­ aide les autorités nationales et les acteurs de la société civile de la Corne de l'Afrique à mettre sur pied une procédure d'asile efficace et équitable, à améliorer les conditions de vie et à encourager leur autonomie sociale et économique ainsi qu'à préserver les droits de l'homme des déplacés et des migrants en quête de protection. C'est également dans ce cadre que la Suisse entend améliorer les perspectives des réfugiés. Le projet Skills for Life for Refugees, qu'elle réalise dans le camp de réfugiés de Kakuma, au Kenya, vise à dissuader les déplacés de poursuivre leur périple migratoire en leur transmettant un savoir-faire technique et en développant leurs aptitudes professionnelles. Le projet intègre aussi bien les 1201

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personnes déplacées que les communautés hôtes afin d'éviter des tensions entre les premières et la population locale. Parallèlement, la Suisse appuie le dialogue régional sur les migrations engagé par l'Autorité Intergouvernementale pour le Développement (Intergovernmental Authority on Development, IGAD). Enfin, les conditions de protection des personnes contraintes de fuir à l'étranger en raison de catastrophes naturelles doivent être améliorées dans le cadre de l'initiative Nansen.

Après avoir suspendu la coopération internationale de la Suisse avec l'Érythrée il y a dix ans, le Conseil fédéral a décidé en novembre 2016 d'examiner la possibilité d'une reprise de l'engagement de la DDC dans ce pays. Dotés d'un budget annuel limité à deux millions de francs, les projets pilotes réalisés dans un premier temps porteront sur la création d'emplois et la formation professionnelle, leur objectif étant l'amélioration des perspectives d'avenir des jeunes dans leur pays. Cet engagement ciblé et restreint de la DDC constitue un premier pas de la Suisse en direction du partenariat équilibré que souhaite le Conseil fédéral. Il faut en effet que chacun des deux pays y soit partie prenante, dans l'esprit de l'association des instruments évoquée dans le message sur la coopération au développement 2017­2020: la Suisse au travers de ses contributions au développement, l'Érythrée en améliorant la situation des droits de l'homme et en déployant des efforts dans les domaines migratoire et économique. L'avenir dira si le gouvernement érythréen est disposé à engager avec la Suisse un partenariat fondé sur le dialogue et dont l'un des objectifs est l'amélioration de la situation des droits de l'homme dans le pays.

La Suisse suit en permanence la situation en Érythrée. Elle ne cesse de vérifier sa pratique en matière d'asile et de renvoi et l'adapte le cas échéant. Elle veille également à ce que les droits de l'homme soient mieux mis en oeuvre par le biais des instruments du Conseil des droits de l'homme. Elle examine actuellement un engagement en ce sens avec l'ONU, sur place. Pour que ce processus soit couronné de succès, la coopération internationale doit être coordonnée le plus possible dans le pays. C'est la raison pour laquelle le Conseil fédéral a pris les contacts nécessaires pour une démarche coordonnée avec
les pays européens qui partagent les vues de la Suisse et poursuivent les mêmes intérêts qu'elle.

Le DFJP finance, depuis la fin de 2015 déjà, un projet de formation professionnelle en Erythrée et a lancé, en décembre 2016, un deuxième projet en coopération avec un institut de formation d'enseignants. Dans le cadre de ce projet, les étudiants peuvent choisir eux-mêmes la profession d'enseignant sans y être contraint par les services nationaux.

La Suisse ne cesse de renforcer ses relations avec l'Union africaine (UA), dont le siège se trouve à Addis Abeba, capitale de l'Éthiopie. Elle a été accréditée dès 2006 avec le statut d'observateur auprès de l'UA, dont elle finance depuis 2012 divers projets, notamment sur la prévention de l'extrémisme violent. Elle appuie par ailleurs la coordination de la collaboration entre l'UA et l'ONU. La Suisse et l'UA ont signé en avril une déclaration d'intention en vue de renforcer leur coopération bilatérale, en particulier dans le domaine de la paix et de la sécurité. Enfin, la Suisse a également renforcé au cours des dernières années sa collaboration avec les organisations régionales dans la Corne de l'Afrique, où l'IGAD joue un rôle important dans le domaine de la sécurité, de la stabilité et du développement de la région. En 2014, la Suisse a signé avec l'IGAD une déclaration d'intention qui porte sur une collabo1202

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ration renforcée dans les domaines du fédéralisme, de la sécurité alimentaire, des migrations, de la paix et de la sécurité ainsi que des sciences. Elle contribue en outre au renforcement institutionnel du secrétariat de l'IGAD. Ce partenariat lui permet de mener un dialogue politique avec l'IGAD et ses pays membres dans la Corne de l'Afrique ainsi que d'accroître l'impact de son engagement dans la région. La Suisse approfondit également en permanence ses relations avec la Communauté d'Afrique de l'Est (EAC), dont font notamment partie le Kenya et le Soudan du Sud et auprès de laquelle elle dispose depuis 2015 d'un statut d'observateur.

La Suisse s'engage de plus depuis son lancement en novembre 2014 dans le processus de Khartoum. Celui-ci doit renforcer le dialogue entre les États d'origine et de transite de la Corne de l'Afrique, l'Egypte et les États européens. Dans le cadre de ce processus, sont également discutés les projets de mise en oeuvre dans la Corne de l'Afrique du plan d'action de La Valette, qui est partiellement financé par le Fonds fiduciaire d'urgence de l'Union Européenne pour l'Afrique.

3

Activités de politique extérieure de la Suisse en 2016

3.1

Relations avec l'Union européenne et avec les États de l'UE/AELE

3.1.1

Union européenne

Évolution au sein de l'UE et implications pour la Suisse En 2016, aucun événement n'a autant marqué l'UE que l'acceptation du référendum sur la sortie du Royaume-Uni (Brexit). Cette décision prise par la population de l'un de ses États membres les plus importants sur les plans économique, politique et militaire a affecté pratiquement tous les domaines d'activité des institutions de l'UE.

À cela s'ajoute que les crises qui occupaient déjà l'UE depuis plusieurs années sont toujours à l'ordre du jour: gestion de la situation migratoire, crise de la dette et conflit en Ukraine. De plus, la situation sécuritaire dans l'environnement immédiat de l'UE demeure instable, comme en témoignent la tentative de coup d'État en Turquie et les conflits persistants en Syrie et en Libye (voir ch. 2.2). Enfin, suite à plusieurs attentats terroristes perpétrés sur sol européen, les défis en matière de sécurité intérieure se sont encore amplifiés. L'ensemble de ces facteurs politiques ont constitué la toile de fond sur laquelle les relations Suisse-UE se sont inscrites durant l'année sous revue.

Le référendum sur le Brexit était au coeur de tous les débats au sein de l'UE depuis bien avant sa tenue, le 23 juin 2016. Les négociations menées par le Royaume-Uni et l'UE en relation avec les exigences britanniques concernant la tenue d'un référendum ont conduit en février à la formulation, par l'UE, d'assurances, qui ont toutefois perdu leur validité avec le vote du peuple britannique en faveur de la sortie du Royaume-Uni de l'UE. Theresa May, la nouvelle première ministre britannique nommée après le référendum, a promis d'appliquer le Brexit, excluant la tenue de nouvelles élections ou d'un second référendum. En octobre, elle a annoncé que la clause de retrait de l'art. 50 du traité sur l'UE serait activée fin mars 2017 au plus tard. De son côté, l'UE avait exclu d'emblée d'ouvrir les négociations sur la sortie 1203

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du Royaume-Uni avant que cette clause ne soit formellement activée, précisant en outre que lors de ces négociations, l'accès au marché unique ne pourrait en aucun cas être dissocié du principe de la libre circulation des personnes. Les spéculations sur les futures relations entre le Royaume-Uni et l'UE sont donc allées bon train tout au long du second semestre 2016, parallèlement aux préparatifs internes des négociations menés d'un côté comme de l'autre.

Les relations bilatérales entre la Suisse et le Royaume-Uni reposent largement sur les accords bilatéraux liant notre pays à l'UE et le Conseil fédéral a donc réagi sans attendre aux changements qui s'annoncent. Il a notamment renforcé le groupe de suivi interdépartemental GB/UE, créé dès l'été 2015. En octobre 2016, le Conseil fédéral a défini ses orientations stratégiques concernant les relations futures entre la Suisse et le Royaume-Uni et institué un groupe de pilotage (DFAE, DEFR, DFF, DETEC). L'objectif du Conseil fédéral est qu'un nouveau régime propre à assurer la continuité des relations entre la Suisse et le Royaume-Uni entre immédiatement en vigueur au moment du Brexit, de manière à éviter tout vide juridique et à préserver la sécurité du droit. La Suisse s'est également employée à instaurer avec le Royaume-Uni un dialogue sur leurs futures relations réciproques ainsi que sur leurs relations respectives avec l'UE.

En raison des incertitudes découlant de l'acceptation du référendum, les prévisions de croissance à court et à moyen terme de la zone euro ont été revues à la baisse. La reprise économique s'y est néanmoins confirmée en 2016, même si elle est restée modeste. La conjoncture a été soutenue, entre autres, par le maintien de la politique monétaire très expansionniste de la Banque centrale européenne (BCE), cette politique ayant également pour effet d'exercer une certaine pression à la baisse sur l'euro. Les résultats des tests de résistance publiés fin juillet ont montré que les grandes banques européennes sont désormais largement prémunies contre les crises.

Toutefois, même si le secteur bancaire est aujourd'hui plus résistant qu'il y a quelques années, de nombreuses banques européennes ont encore besoin de renforcer leur base de fonds propres et assainir leur bilan. Par ailleurs, les discussions au sein de l'Eurogroupe ont
abouti, en mai, à la conclusion d'un accord de principe avec la Grèce sur un plan d'allégement de sa dette. Les principales mesures de ce plan, à savoir la prolongation des échéances de remboursement ainsi que la réduction des intérêts et le report de leur paiement, ne seront toutefois quantifiées et mises en oeuvre qu'en 2018, lorsque le troisième programme d'aide des pays de la zone euro se sera achevé avec succès.

Les négociations de l'accord de libre-échange entre l'UE et les États-Unis (Transatlantic Trade and Investment Partnership, TTIP) n'ont pas pu aboutir avant la fin du mandat du président Barack Obama. Le projet a en effet essuyé des critiques de plus en plus nombreuses de la part des gouvernements de plusieurs États membres de l'UE. Les élections présidentielles américaines ont en outre été remportées par Donald Trump, qui était un candidat peu favorable au libre-échange. S'il avait été conclu, l'accord aurait probablement eu des répercussions sur la compétitivité de la Suisse et il aurait alors fallu examiner, sur la base de son contenu, les options ouvertes à notre pays, telles que l'adhésion au TTIP ou la conclusion d'un propre accord de libre-échange avec les États-Unis. L'accord de libre-échange entre l'UE et le Canada (Comprehensive Economic and Trade Agreement, CETA) a quant à lui été 1204

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signé le 30 novembre 2016, non sans qu'il ait d'abord fallu amener la région belge de la Wallonie à lever son opposition, moyennant l'inclusion d'une déclaration interprétative complémentaire et de certaines garanties. Sont encore nécessaires pour la ratification de l'accord non seulement l'approbation du Conseil de l'UE et du Parlement européen, mais également celle de chacun des États membres de l'UE. Le CETA est le plus important accord commercial que l'UE ait conclu à ce jour avec un grand pays industrialisé hors de l'Europe. Sa ratification enverrait un signal positif, en relation notamment avec les négociations du TTIP.

La lutte contre l'érosion de la base d'imposition et le transfert de bénéfices des entreprises (Base Erosion and Profit Shifting, BEPS) figurait en outre toujours parmi les priorités de l'UE durant l'année sous revue. C'est ainsi qu'a été approuvée, en juillet, la directive sur la lutte contre l'évasion fiscale, qui règle la mise en oeuvre de plusieurs des recommandations du projet BEPS de l'OCDE et va même en partie audelà des normes minimales qui y sont prévues. Selon les normes minimales BEPS, qui valent aussi pour la Suisse en sa qualité d'État membre de l'OCDE, les groupes multinationaux sont tenus de fournir également aux autorités fiscales nationales des renseignements sur leurs activités dans les autres pays. De plus, compte tenu des exigences de transparence accrues, la proposition a été faite au sein de l'UE que les entreprises concernées aient l'obligation de mettre également ces renseignements à la disposition du public. Ces nouvelles exigences devraient aussi valoir pour les groupes qui ont leur siège principal dans un État tiers, comme la Suisse, et opèrent au sein de l'UE.

En 2016, comme en 2015, la situation extraordinaire en matière de migration a figuré parmi les grands défis auxquels l'UE et ses États membres ont dû faire face (voir ch. 2.2). Durant l'année sous revue, quelque 490 000 entrées irrégulières ont été enregistrées aux frontières extérieures de l'espace Schengen. De nombreux réfugiés ou migrants arrivés en Italie ont tenté de traverser la Suisse durant l'été, sans y présenter de demande d'asile. Ce phénomène était notamment la conséquence aussi bien d'un enregistrement plus systématique des réfugiés et des migrants en Italie que du traitement
rapide des cas Dublin en Suisse. Cette dernière a fait face à cette situation difficile en appliquant rigoureusement les instruments juridiques à sa disposition. Dans ses efforts visant à trouver une solution européenne globale propre à soulager les États les plus touchés par le problème migratoire, la Commission européenne a présenté deux projets de réforme du «régime d'asile européen commun». Le premier projet prévoit notamment une révision du système de Dublin en ce qui concerne la détermination du pays compétent pour l'examen des demandes d'asile. Il s'agit en l'occurrence de compléter ce système par un mécanisme de correction assurant un équilibrage des charges entre les États Dublin. La Commission européenne envisage en outre de transformer l'actuel Bureau européen d'appui en matière d'asile (EASO) en une véritable Agence de l'Union européenne pour l'asile, aux compétences élargies. Portant sur la révision de plusieurs directives de l'UE dans le domaine de l'asile, la seconde réforme vise à uniformiser autant que possible les procédures et les conditions d'accueil des personnes en quête de protection. Ces directives ne tombent toutefois pas sous le coup de l'accord d'association à Dublin conclu entre la Suisse et l'UE. La mise en oeuvre des programmes de relocalisation et de réinstallation adoptés par l'UE en 2015 s'est en outre poursuivie, l'objectif étant de relocaliser les personnes en quête de protection depuis les États 1205

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membres de l'UE et les États tiers où les demandes d'asile sont très nombreuses. Au 19 décembre 2016, 9356 requérants d'asile en provenance d'Italie et de Grèce avaient été relocalisés dans d'autres États de l'UE. Dans le cadre du programme de réinstallation et du mécanisme 1:1 décidé sur la base de la déclaration UE-Turquie, les États membres de l'UE avaient accueilli 13 887 réfugiés au 5 décembre. La Suisse a participé à titre volontaire aux programmes de relocalisation et de réinstallation, mais pas au mécanisme 1:1. Durant l'année sous revue, 368 requérants d'asile (état au 20 décembre 2016) en provenance d'Italie et de Grèce ont pu être accueillis ainsi que les 519 réfugiés du Liban et de la Syrie admis dans le cadre du programme de réinstallation arrêté en 2016.

En 2016, la Suisse a continué à s'engager en faveur de solutions européennes globales ainsi que de l'adaptation des règles en vigueur dans le domaine de la migration. C'est ainsi qu'elle s'est prononcée, dans le cadre de son association à l'accord de Dublin, pour une révision de fond du système de Dublin, qui atteint ses limites eu égard à l'importance et à la persistance des mouvements migratoires ainsi qu'à la répartition inégale des demandes d'asiles entre pays d'accueil. Elle s'est félicitée en particulier de la révision du règlement de Dublin présentée en mai par la Commission européenne. La Suisse est également partie prenante d'autres mesures de l'UE qui vont au-delà de son association aux accords de Schengen et de Dublin, comme le montre l'entrée en vigueur, en mars, de l'accord sur la participation de la Suisse à l'EASO. Cet accord lui permet d'oeuvrer directement et par divers moyens ­ mise à disposition de son expertise, soutien financier et détachement de personnel ­ à la réalisation de ses objectifs en matière de politique migratoire. Par ailleurs, en août, le Conseil fédéral a approuvé la participation de la Suisse au fonds fiduciaire d'urgence en faveur de la stabilité et de la lutte contre les causes profondes de la migration irrégulière et du phénomène des personnes déplacées en Afrique (EUTF) lancé par l'UE, moyennant une contribution d'environ 4,1 millions d'euros.

Début 2016, en raison de la forte pression migratoire observée sur la route des Balkans, plusieurs pays avaient temporairement réintroduit les contrôles
aux frontières intérieures, comme le permet le code des frontières Schengen. Le 12 mai 2016, le Conseil de l'UE a prolongé cette mesure jusqu'au 12 novembre 2016 puis, le 11 novembre 2016, pour une période supplémentaire de trois mois. Pour ce qui est de la gestion des frontières extérieures, les négociations sur le renforcement de l'agence européenne Frontex, proposé en 2015, ont abouti. Le règlement sur le nouveau corps européen de gardes-frontières et de gardes-côtes, appelé à succéder à Frontex, fait partie du développement de l'acquis de Schengen. En sus de sa contribution financière, notre pays participe directement aux missions de Frontex: en 2016, les gardes-frontières suisses et la police cantonale de Zurich y ont consacré 1780 jours d'engagement. Hors du cadre de Schengen, l'UE a continué à mener l'opération navale lancée en 2015 sous le nom d'«EUNAVFOR MED opération SOPHIA». Comportant des missions en haute mer au large des côtes libyennes, cette opération a pour but de démanteler le modèle économique des réseaux de trafic de migrants et de traite des êtres humains dans la partie Sud de la Méditerranée centrale. En été 2016, son mandat a été renforcé par l'ajout de deux nouvelles tâches de soutien: d'une part la formation des garde-côtes libyens et de la marine libyenne et, d'autre part, une contribution à la mise en oeuvre de l'embargo des Nations unies sur les armes. Ces mesures ont été prises suite au constat que, malgré la stabilité du 1206

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nombre de migrants empruntant la route de la Méditerranée, le nombre de victimes de la traversée avait sensiblement augmenté par rapport aux années précédentes. La Suisse s'est en outre engagée sur le plan de l'aide humanitaire dans le pays de transit qu'est la Grèce. Un expert du Corps suisse d'aide humanitaire (CSA) y assiste le HCR dans sa mission de protection et de soutien des réfugiés sur place, tandis que le Secrétariat d'État aux migrations (SEM) fournit une aide financière.

La situation en matière de migration a par ailleurs fortement influé sur les relations entre l'UE et la Turquie, qui ­ en tant que pays de transit ­ fait figure de partenaire incontournable dans la recherche d'une solution. Lors de leur réunion des 17 et 18 mars 2016, les chefs d'État et de gouvernement de l'UE ont donc adopté avec la Turquie une déclaration commune prévoyant d'intensifier leur coopération. Les points-clés de cette déclaration sont les suivants: tous les migrants en situation irrégulière qui partent de la Turquie pour gagner les îles grecques sont renvoyés en Turquie, et pour chaque Syrien ainsi renvoyé en Turquie, un autre Syrien est réinstallé de la Turquie vers l'UE. Il a également été convenu d'accélérer le calendrier de libéralisation du régime des visas pour les citoyens turcs et de lever l'obligation de visa pour autant que la Turquie remplisse toutes les conditions convenues à cet effet.

Le versement au partenaire turc d'une aide supplémentaire de 3 milliards d'euros d'ici fin 2018 a en outre été confirmé, de même que l'intention de bientôt ouvrir un nouveau chapitre des négociations sur l'adhésion de la Turquie à l'UE. En tant que développement de l'acquis de Schengen, la libéralisation prévue du régime des visas pour les citoyens turcs s'appliquera aussi à la Suisse et c'est pourquoi celle-ci prend part aux discussions sur cette question au niveau de l'UE, en vertu du droit de participation découlant de son association à Schengen. Soulignons enfin que les difficultés qui pesaient déjà sur les négociations menées en vue d'une éventuelle adhésion de la Turquie à l'UE se sont encore aggravées à partir du mois de juillet, suite à la tentative de coup d'État perpétrée en Turquie.

En 2016, les défis n'ont pas manqué non plus dans les relations entre l'UE et l'Ukraine. L'accord d'association qui
les lie, y compris son volet économique, est entré en vigueur à titre provisoire le 1er janvier 2016. Or, le 6 avril, les citoyens néerlandais en rejetaient la ratification lors d'un référendum consultatif, si bien que la pleine application de l'accord a été suspendue jusqu'à fin 2016. Le 15 décembre, le Conseil de l'Europe a décidé de préciser les termes de l'accord afin de tenir dûment compte des inquiétudes néerlandaises. Cette démarche devrait permettre une ratification de ce texte en 2017. Le 8 décembre, l'UE avait déjà dégagé un accord sur un renforcement du mécanisme de suspension des régimes de libéralisation des visas en cas d'abus, ouvrant ainsi la voie à la libéralisation des visas en faveur de l'Ukraine et de la Géorgie, qui devrait se concrétiser dans le courant de l'année prochaine.

Le conflit ukrainien a continué à dominer le débat sur les questions de politique de sécurité au sein de l'UE. Les diverses sanctions prises contre la Russie ont été prolongées jusqu'en 2017. L'UE entend ainsi pousser la Russie à appliquer l'accord de Minsk conclu en février 2015. Le Conseil fédéral a pris des mesures pour empêcher qu'il ne soit possible de contourner les sanctions de l'UE à partir du territoire suisse, sans pour autant s'associer à ces sanctions. La situation sécuritaire à la périphérie de l'Europe ainsi que la décision du Royaume-Uni de sortir de l'UE ont en outre influé 1207

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sur la stratégie globale de l'UE, présentée en juin par la haute représentante de l'Union pour les affaires étrangères et la politique de sécurité. Cette stratégie esquisse notamment les contours des futures politique étrangère et de sécurité commune (PESC) et politique commune de sécurité et de défense (PCSD) de l'UE.

Outre le conflit ukrainien, plusieurs questions de politique de sécurité sont tout aussi importantes pour notre pays que pour l'UE. En 2016, la Suisse a donc poursuivi sa coopération avec l'UE dans plusieurs secteurs. En particulier, elle a contribué directement à promouvoir la paix dans différentes régions en conflit par le détachement d'une trentaine d'experts civils ou militaires dans des missions de l'UE. En 2016, de nouveaux experts ont rejoint des missions de l'UE au Mali et en Ukraine.

Durant l'année sous revue, l'UE a pris différentes mesures en réaction aux attentats terroristes commis en Europe, se concentrant en particulier sur le phénomène des «combattants étrangers». Afin de renforcer le contrôle des citoyens européens au passage des frontières extérieures, un accord a été trouvé au niveau de l'UE pour adapter le code des frontières Schengen. Ainsi, les documents d'identité des personnes bénéficiant de la libre circulation devront désormais aussi faire l'objet de contrôles systématiques dans les bases de données pertinentes, tant lorsqu'elles entrent dans l'espace Schengen que lorsqu'elles en sortent. L'UE a en outre adopté au printemps la directive sur les données des dossiers passagers (Passenger Name Record, PNR), qui oblige les compagnies aériennes à transmettre les données de leurs passagers aux autorités compétentes, afin d'empêcher des actes terroristes ou des actes criminels graves et d'assurer leur poursuite pénale. Ne faisant pas partie de l'acquis de Schengen, cette directive ne s'applique pas en Suisse. Toutefois, celle-ci examine actuellement s'il ne serait pas dans son intérêt de l'appliquer, moyennant la conclusion d'un accord ad hoc. Suite aux attentats, la Commission de l'UE a encore renforcé sa proposition concernant la révision en cours de la directive de l'UE sur les armes à feu. Un objectif majeur devrait être l'adoption de dispositions plus strictes, voire l'interdiction, pour les personnes privées, d'acquérir et de posséder les armes les plus
dangereuses. Grâce aux efforts intenses qu'elle a déployés dans le cadre de son droit de participation, la Suisse a obtenu l'inscription d'une réglementation d'exception dans la directive, en vertu de laquelle la remise de l'arme de service au terme du service militaire obligatoire continuera d'être admise. Le Conseil de l'UE a approuvé fin décembre 2016 un texte de compromis au niveau des ambassadeurs. La directive sera vraisemblablement adoptée dans le courant du premier trimestre de 2017.

Évolution des relations entre la Suisse et l'UE En 2016 également, l'objectif du Conseil fédéral visant à mieux gérer l'immigration, tout en assurant le maintien et le développement de la voie bilatérale, a influé sur les relations entre la Suisse et l'UE. Les travaux se sont concentrés pour l'essentiel sur la recherche d'une solution consensuelle de mise en oeuvre de l'art. 121a de la Constitution (Cst.)15 ainsi que sur la clarification des futures conditions-cadres des relations entre les deux partenaires. Tant avant qu'après le référendum sur le Brexit, l'UE a eu pour souci d'éviter qu'un éventuel accord avec la Suisse dans le domaine de la libre circulation des personnes ne puisse constituer un précédent en vue de ses 15

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futures relations avec le Royaume-Uni. Cette précaution a rendu encore plus difficile la recherche d'une solution consensuelle entre la Suisse et l'UE.

Le 4 mars 2016, le Conseil fédéral a adopté plusieurs projets de loi concernant la mise en oeuvre des dispositions constitutionnelles sur l'immigration. Il a présenté en particulier le modèle de la clause de sauvegarde unilatérale envers les immigrants des États membres de l'UE et de l'AELE. Il donnait ainsi suite à la décision prise en décembre 2015. Les mesures unilatérales envisagées devaient permettre de respecter le délai constitutionnel de mise en oeuvre de l'art. 121a Cst. au cas où aucune solution consensuelle sur la libre circulation des personnes ne serait trouvée d'ici là avec l'UE. Malgré les diverses rencontres organisées entre le président de la Confédération et le président de la Commission européenne, Jean-Claude Juncker, les nombreux contacts entretenus avec la présidence du Conseil de l'UE et le suivi diplomatique assuré auprès des États membres du l'UE, aucun consensus n'a pu être trouvé.

Compte tenu de ces circonstances, le Parlement a adopté le 16 décembre 2016 une loi d'application de l'art. 121a Cst. À la place d'une clause de sauvegarde, la loi introduit un modèle, dont la pierre angulaire est l'obligation de communiquer les postes vacants: en présence d'un taux de chômage supérieur à la moyenne dans des groupes de professions, des domaines d'activité et des régions économiques donnés, des mesures temporaires doivent être prises en vue de soutenir les personnes enregistrées en tant que demandeurs d'emploi auprès des Offices régionaux de placement. Après l'adoption, par le Parlement, de la loi d'application de l'art. 121a Cst., le Conseil fédéral a conclu que la condition à laquelle les Chambres fédérales avaient subordonné la ratification du protocole concernant l'extension de la libre circulation des personnes (ALC) à la Croatie était remplie. L'adoption de la loi d'application permet en outre à la Suisse de remplir la condition requise pour bénéficier de la pleine association au programme de recherche européen «Horizon 2020» à partir du 1er janvier 2017. En ce qui concerne l'initiative populaire «Sortons de l'impasse! Renonçons à rétablir des contingents d'immigration» qui se rapporte également à l'art. 121a Cst., le
Conseil fédéral a décidé le 26 octobre d'élaborer un contre-projet direct. Le 21 décembre, il a communiqué les grandes lignes de ce contre-projet et chargé le DFJP d'élaborer des projets destinés à la consultation pour deux variantes d'un contre-projet. Il soumettra son message au Parlement d'ici au 27 avril 2017.

Les ressortissants bulgares et roumains bénéficient depuis l'expiration de la période de transition, soit depuis le 1er juin 2016, de la pleine libre circulation des personnes, sous réserve de l'éventuelle application de la clause de sauvegarde jusqu'au 31 mai 2019. Le 27 juillet 2016, sur mandat du Parlement, le Conseil fédéral a par ailleurs confirmé aux présidents de la Commission européenne et du Conseil européen que la demande d'adhésion de la Suisse à l'UE de 1992 devait être considérée comme caduque. Le 30 septembre 2016, le Parlement a approuvé le renouvèlement de la loi parlementaire sur la coopération avec les Etats d'Europe de l'Est. Cette nouvelle loi contient essentiellement les bases de l'appui à la transition des Etats de l'Est de l'Europe hors de l'UE ainsi que la base légale pour la contribution de la Suisse à l'élargissement La sécurité du droit en matière d'accès au marché est essentielle pour l'économie suisse, d'où la nécessité de consolider et de développer la voie bilatérale. La Suisse 1209

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et l'UE ont donc poursuivi, en 2016 également, l'objectif consistant à créer des conditions-cadres transparentes, régissant leurs relations de manière uniforme dans ce domaine. Les négociations sur un accord institutionnel ont été poursuivies et ont progressé. Parmi les points en suspens figurent le règlement des différends et le règlement des conséquences dans les cas où des différends relatifs à l'application d'accords sur l'accès au marché ne pourraient être aplanis.

En dehors des deux grands dossiers de politique européenne, les négociations avec l'UE ont surtout porté sur la coopération policière. Ainsi, après la Suisse, la Commission européenne a également adopté son mandat de négociations sur la participation de la Suisse à la coopération de Prüm, qui prévoit l'échange automatisé d'empreintes digitales et de données ADN, ainsi que sur l'accès des autorités suisses de poursuite pénale à la base de données biométriques de l'UE (EURODAC). Les négociations sur ce point ont débuté en automne 2016. Par ailleurs, les négociations relatives à la conclusion d'un arrangement complémentaire sur la participation de la Suisse à l'Agence européenne pour la gestion opérationnelle des systèmes d'information à grande échelle au sein de l'espace de liberté, de sécurité et de justice (agence eu-LISA) ont abouti en 2016. Il s'ensuit que la Suisse peut désormais reprendre formellement et en toute connaissance de cause le règlement sur lequel repose l'agence en question. Le Parlement a approuvé la reprise de ce règlement durant la session d'hiver 2016. Enfin, en créant le Fonds pour la sécurité intérieure dans le domaine des frontières (FSI-Frontières), l'UE s'est dotée de l'instrument qui a pris le relais, pour la période 2014 à 2020, du Fonds pour les frontières extérieures.

Le FSI-Frontières contribue à améliorer l'efficacité des contrôles et, partant, la protection des frontières extérieures de l'espace Schengen. Le règlement européen correspondant a valeur de développement de l'acquis de Schengen pour la Suisse.

Les négociations de l'arrangement complémentaire relatif à la participation de notre pays au FSI se sont achevées avec succès en 2016. Le Parlement a ainsi pu approuver la reprise du règlement portant création du fonds durant la session d'hiver 2016.

Dans le domaine de la sécurité des denrées
alimentaires, dans lequel l'UE et la Suisse travaillent à une extension de leur collaboration depuis 2008, les négociations reprises sur le plan technique en 2015 ont été poursuivies.

La plupart des autres dossiers n'ont pas pu être débloqués durant l'année sous revue (voir ch. 3.5.3, 3.5.4 et 3.5.5). Fn 2016, l'UE n'était toujours pas disposée à conclure de nouveaux accords d'accès au marché avec la Suisse tant que la question de la libre circulation des personnes ne serait pas réglée, ni tant qu'un accord institutionnel ne serait pas conclu. À relever à titre d'exemple l'accord sur l'électricité, dont les négociations ont certes beaucoup progressé, mais que l'UE subordonne à la résolution des questions institutionnelles. Tout cela souligne une fois de plus l'importance que les questions institutionnelles revêtent pour la future orientation des relations entre la Suisse et l'UE. Un accord sur ces questions permettra entre autres d'étendre et de consolider l'accès au marché dont la Suisse bénéficie actuellement. En raison de la longue période requise pour clarifier les modalités d'application de l'art. 121a Cst. et de ses conséquences sur l'ALCP, la Commission européenne a également repoussé à fin 2016 la mise à jour d'accords existants sur l'accès au marché, ce qui remet en question le bon fonctionnement de ceux-ci, ainsi qu'une série de coopérations techniques Ces dernières concernaient notamment l'aide transfrontalière en cas de catastrophe, la coopération dans le domaine de l'éducation 1210

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et de la recherche, le couplage des systèmes d'échange de quotas d'émissions de notre pays et de l'UE ainsi que les activités conjointes dans le domaine de la coopération au développement. Le Conseil fédéral a manifesté son mécontentement quant à cette attitude de l'UE et espère que celle-ci contribuera en 2017 à une normalisation de la situation.

3.1.2

Relations avec les États voisins

Revêtant une grande importance, les partenariats avec les États voisins, à savoir l'Allemagne, la France, l'Italie, l'Autriche et la Principauté de Liechtenstein, sont d'excellente qualité. Durant l'année sous revue, les relations avec ces États ont été consolidées et ponctuellement étendues. Elles s'inscrivent dans les priorités définies dans la stratégie de politique étrangère 2016­2019 de notre pays. En particulier, les visites diplomatiques de haut niveau se sont poursuivies et les contacts établis ont été systématiquement mis à profit pour associer nos voisins membres de l'UE à la recherche d'une solution consensuelle concernant l'ALCP. Événement de portée historique dans le domaine des transports, l'inauguration du tunnel ferroviaire de base du Saint-Gothard, le 1er juin 2016, a été l'occasion d'inviter de nombreuses personnalités suisses et étrangères, parmi lesquelles les chefs d'État ou de gouvernement de nos cinq pays voisins, ainsi que de nombreux ministres européens des transports. Les délégations de haut rang présentes à l'inauguration ont souligné l'importance de la nouvelle ligne ferroviaire à travers les Alpes (NLFA), en tant que projet européen et grand axe de transit entre la Mer du Nord et la Méditerranée.

Suite à l'ouverture du tunnel de base du Saint-Gothard, les questions de politique des transports vont encore gagner en importance dans les relations de la Suisse avec l'Allemagne et l'Italie.

En 2016 également, la qualité des relations avec l'Allemagne s'est traduite par de nombreuses rencontres de haut niveau, dans une atmosphère toujours amicale. Le président de la Confédération a notamment rencontré la chancelière fédérale allemande à quatre reprises, afin d'aborder différentes questions d'intérêt commun. La libre circulation des personnes ainsi que la situation migratoire en Europe et en particulier en Allemagne ont été au coeur de tous les entretiens officiels. Les contacts bilatéraux au niveau des ministres des affaires étrangères sont restés intenses et se sont concentrés aussi bien sur la politique européenne que sur la présidence allemande de l'OSCE en 2016. Durant l'année sous revue, les deux pays ont également approfondi la coopération qu'ils ont établie dans le domaine de la médiation. La Suisse était en outre hôte d'honneur du CeBIT, le plus grand salon de
l'économie numérique au monde, à Hanovre. Le président de la Confédération Johann N.

Schneider-Ammann a participé à l'inauguration de la manifestation, qui a permis à la Suisse de présenter ses capacités d'innovation et ses compétences numériques à un large public international. Relevons enfin qu'en ce qui concerne les questions transfrontalières relevant des domaines des transports (en particulier des transports aériens et ferroviaires), de la libre circulation des personnes, de l'énergie et de la santé, le Land du Bade-Wurtemberg occupe une place à part dans les relations avec l'Allemagne. Le fait par exemple qu'en 2016, le ministre-président fraîchement

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réélu de ce Land ait effectué sa première visite à l'étranger dans notre pays en témoigne clairement.

La coopération bilatérale avec l'Italie a de nouveau été très intense durant l'année sous revue. Après le ministre allemand des affaires étrangères Frank-Walter Steinmeier l'année précédente, ce fut au tour du ministre italien des affaires étrangères Paolo Gentiloni d'être invité en 2016 par le chef du DFAE à la conférence des ambassadeurs suisses, à Genève. Les nombreux contacts entretenus avec l'Italie ont permis de réaliser des progrès dans plusieurs domaines. Ainsi, le protocole additionnel à la convention contre les doubles impositions conclue entre la Suisse et l'Italie est entré en vigueur en 2016. La Suisse a en outre été radiée de deux listes noires tenues par les autorités italiennes. Les discussions sur les questions fiscales concernant l'enclave italienne de Campione d'Italia se sont également poursuivies. Pour ce qui est de l'accord sur l'imposition des frontaliers, il n'a pas encore été possible de le signer, en raison du lien que l'Italie a établi entre cet accord et la libre circulation des personnes. En revanche, l'accord de coopération policière et douanière signé en 2013 et complété par trois protocoles d'exécution a été ratifié et a pu entrer en vigueur en 2016. Cet accord réglemente plus précisément et plus complètement les mesures transfrontalières, comme l'observation et les poursuites pénales, et permet l'accompagnement et le transit d'agents en uniforme, ainsi que la constitution de patrouilles mixtes. Les relations entre la Suisse et l'UE ont été à l'ordre du jour de toutes les rencontres officielles qui se sont tenues en 2016 et l'Italie s'est engagée à plusieurs reprises en faveur de solutions concrètes auprès de l'UE. Les discussions ont également porté sur la coopération dans les domaines des transports et de l'énergie, ainsi que sur la question migratoire, qui, vu son ampleur et sa persistance, reste pour notre voisin du Sud un grave problème non seulement de politique intérieure, mais également de politique européenne. Relevons la bonne coopération que nous avons avec l'Italie dans ce domaine à notre frontière méridionale. Les statuts de la communauté de travail Regio Insubrica ont dû être modifiés suite à la réorganisation des provinces italiennes. Les membres
italiens de la communauté qui coopèrent avec le canton du Tessin sont désormais les régions de la Lombardie et du Piémont. Enfin, le dialogue sur les questions transfrontalières mené avec l'Italie du Nord s'est intensifié en particulier dans le domaine de l'environnement.

De nombreuses rencontres et échanges bilatéraux avec la France ont jalonné l'année 2016, à commencer par une rencontre entre le président de la Confédération et son homologue français à Colmar en janvier 2016. Adoptée à cette occasion, la déclaration commune au sujet du dossier de l'aéroport de Bâle-Mulhouse a marqué une étape importante dans le dialogue sur les questions fiscales concernant les entreprises du secteur douanier suisse de l'aéroport. Cette déclaration politique a en effet servi de base, courant 2016, aux négociations d'un accord intergouvernemental relatif à la fiscalité applicable à l'aéroport de Bâle-Mulhouse (EAP). Paraphé le 2 novembre, cet accord a permis de mettre en place un régime juridique pérenne dans le domaine fiscal et ainsi d'assurer le développement et l'attractivité de l'aéroport et des activités qu'il abrite. Un accord franco-suisse sur la fiscalité applicable à l'aéroport de Bâle-Mulhouse a par exemple été paraphé le 2 novembre. Il permet de mettre en place un régime juridique pérenne dans le domaine fiscal et d'assurer le développement et l'attractivité de l'aéroport binational. Dès que l'UE aura décidé d'accorder l'exception de la TVA dans le secteur suisse de l'aéroport, 1212

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confirmant la pratique actuelle consistant à y appliquer la TVA suisse, les procédures nationales de signature et de ratification du projet d'accord pourront être achevées. En Suisse, l'accord sera soumis au Parlement. La coopération policière et douanière ainsi que les questions de politique européenne, notamment la nécessité de trouver une solution pour l'ALCP, ont également fait l'objet de discussions entre les représentants des deux pays. Par ailleurs, la France et la Suisse ont poursuivi leurs discussions techniques sur leur accès réciproque aux marchés financiers. Dans le volet sportif, la Suisse a partagé des moments forts avec son voisin français à l'occasion de l'Euro de football, ainsi que lors du passage du Tour de France en Suisse pendant la période estivale. 2016 marque également le 500 e anniversaire de la signature de la Paix perpétuelle (Traité de Fribourg du 29 novembre 1516), rappelant la longue amitié franco-suisse et à l'occasion duquel diverses manifestations se sont déroulées à Fribourg et dans la capitale française. En ce qui concerne les relations transfrontalières, plusieurs questions concrètes ont pu être réglées durant l'année sous revue. Des progrès ont été réalisés en particulier dans le domaine de la santé et des assurances sociales, si bien que l'accord-cadre sur la santé a pu être signé le 27 septembre 2016, après plusieurs années de négociations. De plus, les discussions entamées en 2015 sur la gestion des eaux du bassin du Rhône se sont poursuivies, de même que celles sur les transports ferroviaires transfrontaliers. Enfin, au niveau régional, les rôles respectifs des divers organismes transfrontaliers de la région genevoise ainsi que leurs relations mutuelles ont été clarifiés, tandis que dans l'arc jurassien, une nouvelle stratégie de coopération transfrontalière a été élaborée.

Comme le veut la tradition, la première visite du président de la Confédération à l'étranger l'a conduit fin janvier en Autriche, à la rencontre du président Heinz Fischer et du vice-chancelier Reinhold Mitterlehner. Suite au changement à la tête du gouvernement autrichien, des rencontres ont aussi eu lieu avec le nouveau chancelier Christian Kern. Régies par une pratique de visites diplomatiques très intense, les relations bilatérales avec Vienne ont été marquées de manière prédominante
par les questions de politique européenne et de politique migratoire. La situation des réfugiés en Europe et le défi qu'elle pose au continent sont restés un thème régulièrement abordé lors des échanges avec les interlocuteurs autrichiens. Nos deux pays mènent également un dialogue soutenu au sujet de leur coopération dans des domaines aussi variés que la recherche, la formation professionnelle, la culture et les services consulaires fournis aux citoyens à l'étranger. Par ailleurs, un accord de coopération consulaire, signé en décembre 2015, est entré en vigueur en avril et vise à étendre les services offerts aux citoyens des deux parties contractantes, en particulier en assurant un élargissement de la couverture géographique offerte. Partenaire privilégié de la Suisse sur les questions de sécurité (voir ch. 3.3.1), l'Autriche assumera la présidence de l'OSCE en 2017.

En 2016 également, de nombreuses rencontres et visites de haut niveau ont permis d'entretenir les étroites relations de confiance qui unissent la Suisse et la Principauté de Liechtenstein. Les membres du Conseil fédéral ont par exemple tous rencontré ­ à plusieurs reprises pour certains d'entre eux ­ des membres du gouvernement de la principauté. Le Liechtenstein a indiqué en particulier qu'il était très intéressé à ce que la question de la libre circulation des personnes entre la Suisse et l'UE soit réglée. Il a également fait part de son souhait de coopérer encore plus étroitement avec notre pays dans divers domaines. Suite à la révision de la loi du 26 septembre 1213

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2014 sur les Suisses de l'étranger (LSEtr)16, les Suisses établis au Liechtenstein sont tenus de s'inscrire au registre des Suisses de l'étranger. Compte tenu du fait que la principauté dépend de l'arrondissement consulaire de Vienne, la Suisse a décidé de nommer un consul général honoraire à Vaduz. Celui-ci a pris ses fonctions en novembre 2016. Par cette nomination, la Suisse a également voulu souligner l'importance qu'elle attache aux excellentes relations bilatérales avec le Liechtenstein.

3.1.3

Relations avec les autres États membres de l'UE et de l'AELE

Le Conseil fédéral a mené de nombreux entretiens avec les gouvernements des États membres de l'UE afin de trouver une solution concertée avec l'UE permettant de mieux gérer l'immigration tout en consolidant la voie bilatérale. Plusieurs rencontres ont eu lieu en particulier avec la présidence tournante du Conseil de l'UE. Le chef du DFAE s'est ainsi rendu à La Haye en janvier 2016, au début de la présidence néerlandaise. Il a également rencontré à plusieurs reprises son homologue, le ministre des affaires étrangères slovaque Lajcak, avant et pendant la présidence slovaque durant les six derniers mois de l'année. Le président de la Confédération s'est quant à lui rendu à Bratislava en juin, avant de recevoir le président slovaque Andrej Kiska en Suisse quatre mois plus tard. En vue de la présidence maltaise du Conseil de l'UE durant le 1er semestre 2017, le chef du DFAE s'est rendu à La Valette en mars et le président de la Confédération a fait de même en septembre. Cette dernière visite, de deux jours, constituait la première visite d'État d'un président de la Confédération à La Valette depuis la proclamation de la République maltaise en 1964.

Les membres du Conseil fédéral ont saisi l'opportunité de réunions multilatérales et d'évènements tels le Forum économique mondial (WEF) à Davos, une conférence sur la Syrie à Londres, les réunions ministérielles informelles de l'OSCE à Potsdam et à Hambourg, le sommet humanitaire à Istanbul (WHS), le sommet du dialogue Europe­Asie (ASEM) à Oulan Bator ou encore l'Assemblée générale de l'ONU à New York pour sensibiliser les gouvernements des États membres de l'UE aux positions de la Suisse vis-à-vis de l'UE. Les ministres des affaires étrangères de Suède et de Norvège ont par ailleurs été reçus à Neuchâtel en octobre, tandis qu'en novembre, le président polonais Andrzej Duda a effectué une visite à Berne. Les contacts ont notamment été soignés avec les pays de Visegrad (Pologne, République tchèque, Slovaquie, Hongrie), qui représentent pour la Suisse d'importants partenaires économiques et dont l'influence est considérable dans les institutions européennes à Bruxelles. Outre les relations entre la Suisse et l'UE, ces différents entretiens avec des pays partenaires membres de l'UE ont porté sur la coopération en matière de migration et d'asile dans le contexte
de la crise des réfugiés en Europe.

Parmi les thèmes récurrents figuraient la lutte contre le terrorisme et la prévention de l'extrémisme violent après plusieurs attentats meurtriers en Belgique et en Allemagne.

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Des contacts réguliers ont eu lieu également avec le Royaume-Uni, tant au niveau ministériel qu'au plan technique, avant et après le vote du peuple britannique sur le Brexit, le 23 juin 2016. Le chef du DFAE s'est ainsi entretenu avec le secrétaire d'État britannique aux affaires étrangères, en mai à Londres, en marge d'un sommet international consacré à la lutte contre la corruption. Le ministre d'État britannique chargé de la politique commerciale, a été reçu à Berne par le président de la Confédération en septembre. Au vu de la forte intensité des relations économiques entre la Suisse et le Royaume-Uni et des enjeux liés au Brexit, il a été convenu de renforcer le dialogue entre les deux pays.

3.2

Relations avec des partenaires mondiaux

3.2.1

Pays prioritaires

En 2005, le Conseil fédéral avait dressé une liste des pays prioritaires avec lesquels la Suisse devait s'employer à établir des partenariats stratégiques. L'intensification et la diversification de ces partenariats restent des objectifs de la législature en cours.

Les pays concernés sont présentés ci-après dans un ordre de succession basé sur leur situation géographique, d'Ouest en Est.

Brésil Septième économie mondiale, poids lourd politique du continent sud-américain, acteur de première importance dans les enceintes multilatérales et membre du groupe des BRICS ainsi que du G20: le Brésil compte sur la scène internationale. Vu son importance, la Suisse entretient un partenariat stratégique avec le Brésil depuis 2008. Ce partenariat repose sur un dialogue politique régulier ainsi que sur une étroite coopération dans divers domaines: économie, sciences, fiscalité, finances, migration, justice et affaires consulaires. Le Brésil est le principal partenaire commercial de la Suisse en Amérique latine (14 % des importations et 33 % des exportations suisses en 2015) et la coopération bilatérale s'est encore intensifiée ces dernières années. En 2016 ­ année turbulente pour le Brésil, du point de vue tant économique, en raison de la récession, que politique, avec la destitution de la présidente Dilma Rousseff ­, les points saillants de cette coopération ont été les suivants: l'entraide judiciaire a été mise à contribution suite au scandale de corruption Petrobras et a bien fonctionné. Dans le domaine financier, après qu'un accord sur l'échange de renseignements en matière fiscale (AERF) a été conclu en 2015, des discussions ont débuté en 2016 sur la conclusion d'une CDI. De plus, le dialogue engagé entre l'AELE et le MERCOSUR ­ le marché commun sud-américain dont le Brésil fait partie ­ sur la conclusion d'un éventuel accord de libre-échange s'est achevé. Dans ce contexte, le Brésil s'est déclaré clairement favorable à une ouverture du marché, notamment lors de rencontres de travail avec le président de la Confédération, qui se sont tenues au mois d'août, à Brasilia. Par ailleurs, une déclaration d'intention signée en mars à l'occasion du dialogue politique que les deux pays mènent annuellement a posé les jalons d'une coopération scientifique plus étroite dans la forêt pluviale amazonienne ainsi que d'échanges réguliers dans le domaine des droits de l'homme. Le Brésil est également un pays partenaire priori1215

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taire de la Suisse en matière de recherche: une filiale Swissnex a ouvert ses portes à São Paulo en 2014. Enfin, les activités que Présence Suisse a déployées au Brésil depuis la Coupe du monde de football de 2014 pour mieux y faire connaître notre pays ont connu leur apothéose et leur conclusion en 2016, lors des Jeux olympiques et paralympiques de Rio de Janeiro. La Suisse était représentée à Rio par la House of Switzerland, qui a connu une très bonne fréquentation (voir ch. 3.7 Communication internationale).

États-Unis d'Amérique Incontournables sur le plan de la politique internationale et d'importance capitale pour l'économie suisse, les États-Unis constituent un important partenaire stratégique. Ces derniers représentent ainsi le deuxième marché d'exportation des produits suisses (10,6 % des exportations en 2015 ­ avec une augmentation de 35,7 % au cours des cinq dernières années) et sont la première destination des investissements directs suisses à l'étranger (18,1 %). De ce fait, et en lien avec l'AELE, la Suisse a mis en place un Trade Policy Dialogue qui permet de suivre les négociations entre les États-Unis et l'UE sur le partenariat transatlantique de commerce et d'investissement (PTCI) ­ sur lequel Donald Trump est plutôt resté discret ­ et de faire valoir ses intérêts. Une quarantaine de rendez-vous de haut niveau ont eu lieu en 2016, dont six au niveau du Conseil fédéral, témoignant de l'intensité et de l'étendue de la relation bilatérale. La relation de confiance établie entre le chef du DFAE et le secrétaire d'État américain a permis à la Suisse de poursuivre sa politique d'État hôte: John Kerry s'est rendu cinq fois en Suisse pour parler de la Syrie, et une sixième fois pour participer au WEF à Davos. La force du partenariat entre la Suisse et les États-Unis a été mise en lumière au moment de l'échange de onze personnes entre Washington et Téhéran le 17 janvier 2016, rendu possible grâce à l'action discrète et efficace du DFAE. La Suisse se positionne sur des sujets où sa valeur ajoutée est forte malgré l'asymétrie entre les deux pays ­ à l'instar des questions financières, humanitaires, de paix et de médiation, de prévention de l'extrémisme violent, d'innovation, d'énergie et d'environnement. Ainsi, le DFAE met en place les conditions cadres pour se placer comme un partenaire
naturel sur les sujets qui sont d'importance capitale pour la Suisse, et ainsi renforcer le rôle de notre pays.

Durant l'année sous revue, le gouvernement américain a multiplié les initiatives destinées à consolider l'héritage du président Obama dans le domaine de la politique extérieure: notamment le voyage présidentiel à Cuba, le sommet sur les réfugiés, le sommet de l'OTAN et l'appui à l'Afghanistan ainsi que la lutte contre l'extrémisme violent. La Suisse a suivi les propositions américaines de près et soutenu celles conformes à sa propre politique ­ comme le déminage humanitaire en Colombie ou l'appui au Global Community Engagement and Resilience Fund (GCERF). Dans le contexte des élections américaines, l'ambassade de Suisse à Washington s'est efforcée de renforcer les liens avec les membres des équipes de campagne des deux partis au cours de la deuxième moitié de l'année, de manière à faciliter les relations avec le futur gouvernement. La Suisse souhaite continuer un partenariat étroit fondé sur les intérêts communs. Le Conseil fédéral continuera à l'avenir à défendre la position de la Suisse dans des dossiers comme la libéralisation du commerce mondial, le droit international et un ordre mondial réglementé et basé sur le multilatéralisme, ainsi que la lutte contre le changement climatique.

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Afrique du Sud L'Afrique du Sud constitue le principal partenaire politique et économique de la Suisse sur le continent africain. Alors que sa diplomatie reste incontournable au niveau régional, notamment au sein de l'Union Africaine (UA), de la Communauté de développement d'Afrique australe (Southern Africa Development Community, SADC) et de l'Union douanière d'Afrique australe (SACU), l'Afrique du Sud a aussi un certain poids sur le plan international. Seul membre africain du G20, elle fait partie du groupe des BRICS depuis 2011 ainsi que du G77. Elle est désormais considérée comme un pays à revenu intermédiaire et son économie est la plus développée et diversifiée d'Afrique, portée avant tout par son secteur des services, surtout financiers, et l'exploitation d'abondantes matières premières. Au niveau bilatéral, les domaines de coopération sont multiples et variés. Sur le plan économique, l'Afrique du Sud représente un quart de l'ensemble des échanges commerciaux entre la Suisse et l'Afrique et fait partie des pays prioritaires de la «coopération et du développement économiques» du SECO, avec un soutien d'environ quinze millions de francs par an dans le cadre de la stratégie 2013­2016. La secrétaire d'État à l'économie Marie-Gabrielle Ineichen-Fleisch s'y est rendue en septembre pour une visite officielle, accompagnée par une délégation du secteur privé. Les 7 e consultations politiques, également de haut niveau, ont eu lieu en octobre dans le cadre du protocole d'entente portant sur le renforcement de la coopération diplomatique signé en 2008. À cette occasion, le secrétaire d'État Yves Rossier a reçu le vice-ministre sud-africain des affaires étrangères à Berne pour échanger sur des sujets tels que la politique internationale, les droits de l'homme, les questions financières, la coopération économique et scientifique et la formation professionnelle. À relever encore que l'Afrique du Sud fait partie depuis 2010 des pays prioritaires partenaires de la Suisse dans les domaines de la formation, la recherche et l'innovation. Nombre de projets portés par cette coopération sont venus ces dernières années enrichir l'effort commun, notamment à travers un programme de développement Science to Business et l'implantation de chaires de recherches conjointes. Cette année, la coopération en matière de
formation professionnelle s'est encore renforcée avec des échanges au mois de juin 2016 entre le SEFRI et le Department of Higher Education visant à mettre en oeuvre des mesures concrètes dans ce domaine.

Turquie La Turquie est un important partenaire qui entretient avec la Suisse des relations aussi nombreuses que variées. En raison de la situation qui prévaut actuellement en Turquie et du rôle du pays dans la région, il est utile de renforcer la coopération bilatérale par une coopération dans les domaines de la politique de paix, de l'aide humanitaire et de l'engagement multilatéral. En 2016, des contacts réguliers de haut niveau ont permis d'entretenir un dialogue ouvert et constructif. Soucieuse de soutenir les réfugiés syriens, irakiens, afghans, iraniens et autres se trouvant sur sol turc, la Suisse a poursuivi son engagement en faveur non seulement de projets d'organisations partenaires locales et internationales, mais également de la mise en place d'une autorité nationale chargée des questions migratoires. Depuis 2015, la Suisse soutient des ONG turques actives dans le domaine de l'aide aux réfugiés, y compris dans le Sud-Est du pays, aussi bien par des contributions à leurs projets que par des conseils en matière de développement de leurs capacités opérationnelles.

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L'accord bilatéral de réadmission négocié avec la Turquie devra encore être signer.

Le Conseil fédéral a immédiatement condamné la tentative de coup d'État de mijuillet et suit les développements sur place avec attention. II reconnaît à la Turquie le droit de réagir aux menaces posées par le terrorisme et par la tentative de coup d'État. La Suisse a cependant exprimée sa préoccupation quant à l'ampleur des mesures prises et la restriction des droits de l'homme survenues à la suite de la tentative de putsch. Elle a appelé en diverses occasions la Turquie à respecter les libertés fondamentales, les principes de l'état de droit et ses obligations internationales. Elle a fait part de sa position à la Turquie aussi bien lors d'échanges bilatéraux que dans les enceintes multilatérales (ONU, OSCE, Conseil de l'Europe), par exemple lors de la rencontre entre le chef du DFAE et le ministre turc des affaires étrangères, Mevlüt Çavuolu, le 3 novembre à Berne. Face aux défis actuels, le Conseil fédéral estime qu'un dialogue franc, direct et critique, tout en étant constructif, avec le gouvernement turc est le moyen le plus indiqué pour intervenir efficacement en faveur des valeurs, des intérêts et des objectifs précités, parmi lesquels figurent la promotion de la démocratie, l'état de droit et les droits de l'homme.

Compte tenu de la persistance des tensions et de la dégradation de la situation dans le Sud-Est de la Turquie, la Suisse a plusieurs fois laissé entendre qu'elle serait prête à contribuer activement à un rapprochement des parties, si une demande lui était faite dans ce sens. Le gouvernement turc a cependant fait savoir qu'il souhaitait régler la question kurde sans facilitation ou médiation venue de l'extérieur, que ce soit de Suisse ou d'ailleurs (voir ch. 1.1.1 et 1.3.2).

Russie La Russie reste un acteur incontournable pour la stabilité et la prospérité en Europe et un important partenaire pour la Suisse. Malgré une baisse du nombre de rencontres de haut niveau depuis le début du conflit en Ukraine en 2014, la Suisse a poursuivi en 2016 une politique active de dialogue vis-à-vis de la Russie. Dans un contexte de tensions internationales grandissantes, l'une des priorités de la Suisse dans ses contacts avec la Russie a été la recherche de solutions pacifiques dans les conflits dans l'Est de
l'Ukraine et en Syrie. La Suisse s'est efforcée de faciliter les contacts et de maintenir le dialogue entre la Russie et ses autres partenaires, par sa tradition de bons offices. Elle continue par exemple d'offrir son soutien à l'organisation des «Discussions internationales de Genève» regroupant la Russie, la Géorgie, et les États-Unis, ainsi que les entités séparatistes d'Abkhazie et d'Ossétie du Sud. Dans le cadre de ses efforts en matière de politique de paix, la Suisse a activement promu l'OSCE comme plate-forme d'échanges sur la sécurité européenne (voir ch. 3.3.1, OSCE). Elle a également continué à mettre en oeuvre son mandat de représentation des intérêts russes en Géorgie et des intérêts géorgiens en Russie. La promotion des relations économiques est également restée au coeur des préoccupations, dans un souci de diversification des partenaires commerciaux de la Suisse. Ces différents thèmes ont été activement abordés en avril 2016 lors de la rencontre à Moscou entre le conseiller fédéral Didier Burkhalter et son homologue russe Sergueï Lavrov, ainsi que lors de leur rencontre en marge de l'Assemblée générale de l'ONU à New York. En plus des consultations politiques régulières entre le secrétaire d'État Yves Rossier et le vice-ministre des affaires étrangères Vladimir Titov, la Suisse et la Russie ont poursuivi en 2016 les consultations techniques et 1218

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thématiques annuelles débutées en 2007, notamment dans le domaine des droits de l'homme, de la coopération économique et de la politique de sécurité. De plus, le dialogue financier au niveau des ministres s'est tenu en juin, à Moscou. Enfin, la Suisse et la Russie ont poursuivi leur collaboration dans le domaine de la justice des mineurs et de l'aide en cas de catastrophes.

Inde L'Inde ne cesse de gagner en importance dans le concert des nations. Elle devrait devenir le pays le plus peuplé du monde dès 2025 et, compte tenu de sa forte croissance persistante, figurer parmi les trois plus grandes économies mondiales à l'horizon 2030. Membre du G20, elle est également la démocratie comptant le plus grand nombre d'habitants au monde. De plus, l'Inde, qui a toujours été l'un des pays leader du mouvement des non-alignés, participe activement et avec assurance aux négociations multilatérales les plus diverses. Sur le plan économique, elle suscite un intérêt croissant non seulement en tant que pôle technologique et de recherche pour les entreprises multinationales, mais également comme destination touristique. La Suisse entretient de bonnes relations avec l'Inde, ce qui s'explique notamment par le fait qu'après la guerre d'indépendance entre le Bangladesh et le Pakistan, en 1971, elle a assuré la représentation des intérêts de l'Inde au Pakistan, et ceux du Pakistan en Inde. Depuis lors, notre pays a continuellement intensifié et valorisé ses relations bilatérales avec l'Inde. Ce fut le cas en 2016 également, notamment lors de la rencontre entre le président de la Confédération Johann N. Schneider-Ammann et le premier ministre indien Narendra Modi, qui a eu lieu en juin, à Genève. De plus, en octobre, lors de la visite de la conseillère fédérale Simonetta Sommaruga à New Dehli, la Suisse et l'Inde ont signé trois accords, à savoir un accord technique concernant l'identification et le retour des ressortissants des deux pays, un accord sur l'exemption de visa pour les diplomates ainsi qu'un accord relatif aux personnes accompagnant le personnel diplomatique et consulaire. En octobre également, après deux ans et demi d'interruption, les négociations visant la conclusion d'un accord de libre-échange (accord de partenariat commercial et économique) entre l'AELE et l'Inde ont repris à Genève. Il s'agissait du
quatorzième cycle de négociations.

Par ailleurs le nombre de contacts entre la Suisse et l'Inde qui se transforment en dialogues thématiques formels est tout à fait remarquable. En marge du «deuxième congrès international de la formation professionnelle», qui s'est tenu en juin 2016 à Winterthour, le ministre indien en charge de la formation professionnelle Rajiv Pratap Rudy et le secrétaire d'État Mauro Dell'Ambrogio ont signé un protocole d'entente sur la coopération entre la Suisse et l'Inde dans le domaine de la formation professionnelle. Le groupe de travail conjoint (Joint Working Group in Skill Development as well as Vocational Education and Training) ainsi créé a pour mission d'identifier les possibilités de coopération en faisant appel à des partenaires et à des acteurs importants des milieux de la formation professionnelle. Un nouveau cycle du dialogue financier s'est en outre tenu à New Dehli en juillet 2016. En novembre, l'Inde et la Suisse ont signé une déclaration commune en vue de l'introduction de l'échange automatique de renseignements. Quant à la «commission économique conjointe Suisse-Inde», elle s'est de nouveau réunie en octobre, à Berne. Soulignons enfin que toutes les questions bilatérales importantes se posant entre la Suisse et l'Inde sont également traitées lors des consultations politiques que les deux pays 1219

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mènent régulièrement. Ces consultations ont eu lieu en mars, à Berne, au niveau des secrétaires d'État.

Chine Depuis 2010, la Chine est le premier partenaire commercial de la Suisse en Asie et le troisième plus important en termes de volume après l'UE et les USA. Une autre caractéristique propre à la politique chinoise de la Suisse est la large palette thématique abordée dans le cadre de ses relations bilatérales. Les deux pays disposent d'une bonne vingtaine de dialogues sectoriels qui permettent des avancées concrètes sur de nombreuses questions. Parmi eux, des thèmes tels que les droits de l'homme, les flux migratoires, les relations financières, l'environnement et le développement, la sécurité et la propriété intellectuelle. En 2016, deux nouveaux dialogues thématiques ont été lancés, l'un sur la prévention de la corruption, l'autre sur la coordination au sein de l'ONU. L'intensité des relations bilatérales se reflète par le rythme soutenu des visites et des rencontres de haut niveau. Un des défis consiste ainsi à encadrer et coordonner le nombre élevés de contacts et de dialogues bilatéraux. Pour ce faire un dialogue politique a été institutionnalisé en 2007 par la signature d'un mémoire d'entente. Il prévoit des rencontres annuelles entre ministres des affaires étrangères. La Chine est le seul pays asiatique avec lequel un dialogue politique annuel est mené au niveau ministériel.

Durant l'année sous revue, les relations de la Suisse avec la Chine ont été marquées par la visite d'État du président de la Confédération à Pékin et Shanghai en avril. À cette occasion, les deux présidents se sont accordés sur un nouveau cadre pour le développement des relations bilatérales sous le sceau d'un «Partenariat Stratégique Innovateur». Ce dernier confirme et renforce le caractère pionnier de la politique chinoise de la Suisse dans tous les domaines. L'intensité et la diversité des coopérations bilatérales ont par ailleurs motivé plusieurs rencontres et voyages de haut niveau. Le conseiller fédéral Didier Burkhalter et son homologue chinois se sont rencontrés deux fois pour des discussions politiques, en janvier 2016 à Pékin et en décembre à Neuchâtel. À l'invitation de la présidence chinoise du G20, le conseiller fédéral Ueli Maurer, accompagné du président du directoire de la BNS, a participé aux
réunions des ministres des finances du G20, à Shanghai et à Chengdu, ainsi qu'à Washington à deux reprises. La Chine a également invité la Suisse à participer pour la première fois aux réunions du G20 relatives à la lutte contre la corruption (voir ch. 3.5.1). La conseillère fédérale Doris Leuthard a mené des entretiens avec le viceprésident chinois Li Yanchao ainsi que ses homologues chinois dans les domaines de l'énergie, de l'environnement et des transports à Pékin en août. Les rencontres bilatérales dans le contexte des dialogues thématiques sectoriels se sont déroulées comme prévu. Une session du dialogue sur les droits de l'homme s'est tenue en mai, une autre du comité mixte de l'accord de libre-échange en septembre, et une troisième du dialogue migratoire en octobre. Le dialogue concernant la prévention de la corruption et le recouvrement d'avoirs illicites a eu lieu en décembre, celui sur les affaires multilatérales liées à l'ONU en mai. Des progrès importants ont pu être réalisés sur le plan consulaire avec l'ouverture de douze nouveaux centres de délivrance des visas suisses en Chine (voir ch. 3.6). En février, le Conseil fédéral a décidé de l'ouverture d'un nouveau consulat général de Suisse à Chengdu, qui sera opérationnel en 2017.

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Japon Le Japon, 3e économie mondiale et membre du G7 et du G20, est un partenaire politique, économique et scientifique important de la Suisse. Au plan bilatéral, les relations avec le Japon sont stables et saines. Les conditions-cadres sont bien établies à l'exception de l'entraide judiciaire en matière pénale, où la conclusion d'un accord bilatéral moderne est bloquée en raison de la peine de mort encore pratiquée au Japon. Sur le plan multilatéral, les positions des deux pays sont très proches tant à l'ONU qu'à l'Organisation Mondiale du Commerce (OMC). La Suisse bénéficie au Japon d'une bonne image. Elle y est considérée comme une destination privilégiée et un modèle dans divers domaines. L'aide humanitaire délivrée par la Suisse à la suite des catastrophes de 2011 au Japon ainsi que les nombreuses activités déployées en 2014 à l'occasion du jubilée des 150 ans de relations diplomatiques ont permis de consolider cette image. Les relations économiques et financières entre les deux pays sont très étroites. Le Japon est le 4e marché d'exportation de la Suisse en Asie. Les deux pays ont conclu nombre d'accords bilatéraux soutenant la coopération économique, à noter particulièrement l'accord de libre-échange et de partenariat économique conclu en 2009. De plus, les deux pays entretiennent un dialogue financier tous les 18 mois. En janvier, la Suisse et le Japon ont signé une déclaration commune ayant pour objectif de conclure rapidement un accord sur l'échange automatique d'informations selon les standards de l'OCDE.

Depuis plusieurs années, le dossier de la coopération bilatérale dans les domaines de la science et de la recherche gagne en importance. En outre, le Japon est un interlocuteur incontournable sur tous les dossiers liés à la sécurité dans le monde et en Asie en particulier. Pour chapeauter et structurer les échanges bilatéraux, un dialogue politique a été institutionnalisé en 2010 par la signature d'un mémoire d'entente. Il prévoit des rencontres régulières entre le vice-ministre des affaires étrangères japonais et le secrétaire d'État du DFAE. La dernière session s'est tenue à Tokyo en décembre 2014. La visite en Suisse du premier ministre du Japon en avril 2016 a dû être reportée à cause du dramatique tremblement de terre qui a frappé le pays. À l'occasion de la visite au Japon de la
secrétaire d'État Marie-Gabrielle IneichenFleisch en octobre, une réunion du comité mixte de l'accord de libre-échange et de partenariat économique a pu de nouveau se tenir après plusieurs années.

3.2.2

Balkans occidentaux

Les pays des Balkans occidentaux (Croatie, Bosnie et Herzégovine, Serbie, Monténégro, Kosovo, Macédoine et Albanie) forment une région qui reste importante pour la politique extérieure de la Suisse. En raison de ses liens étroits avec ces pays ­ quelque 400 000 personnes originaires de la région vivent sur le territoire helvétique ­, notre pays a tout intérêt à ce que la paix, la stabilité et la prospérité économique règnent dans les Balkans. C'est pourquoi son engagement est axé principalement sur l'aide à la transition, la sécurité humaine, le maintien de la paix et la migration, le tout en étroite coordination avec les autorités locales, les autres pays donateurs, les organisations internationales comme l'UE et l'ONU, ainsi que les institutions financières internationales. Le 16 novembre 2016, le Conseil fédéral a en outre adopté un 1221

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mandat portant sur l'ouverture de négociations d'un nouvel accord dans le domaine des assurances sociales avec le Kosovo.

Au Kosovo, la Suisse participe aux opérations de maintien de la paix de la Kosovo Force (KFOR) en y détachant un maximum de 235 militaires (SWISSCOY). Le message concernant la prolongation de ce mandat au-delà de 2017 sera présenté au Parlement lors de sa session de printemps ou d'été 2017. En 2016, dans le cadre de la mission de stabilisation de l'EUFOR ALTHEA, deux équipes suisses d'observation comptant jusqu'à 20 militaires et six experts en armes de petit calibre et en munitions sont restées stationnées en Bosnie et Herzégovine. Ces missions se sont accompagnées d'une intensification de l'aide à la transition dans tous les pays des Balkans occidentaux, ainsi que d'un engagement accru dans les partenariats migratoires avec la Bosnie et Herzégovine, la Serbie et le Kosovo. Suite à la crise migratoire qui sévit en Europe, ces partenariats, de même que les relations déjà très étroites existant entre la Suisse et la région, ont encore gagné en intensité. Notre pays a offert un soutien immédiat aux États concernés. En 2016, les contacts politiques avec plusieurs pays de la région se sont consolidés et ponctuellement développés. En février, la conseillère fédérale Simonetta Sommaruga a rencontré son homologue macédonien Adnan Jashari, à Berne. En mai, le conseiller fédéral Guy Parmelin s'est rendu au Kosovo, où il s'est entretenu avec le premier ministre Isa Mustafa. En juin, le président de la Confédération Johann N. Schneider-Ammann a reçu le premier ministre serbe Aleksandar Vucic à Berne. En novembre, le conseiller fédéral Didier Burkhalter a rencontré à Berne son homologue kosovar Enver Hoxha.

3.2.3

Europe de l'Est et Asie centrale

En 2016, la politique de la Suisse dans le Caucase du Sud est restée centrée sur la promotion de la paix et l'aide au développement (voir ch. 3.3.4 Priorités géographiques et 3.4.6). La Suisse a participé à l'observation des élections législatives géorgiennes en octobre dans le cadre de l'OSCE. Elle continue à représenter les intérêts de la Russie en Géorgie, et ceux de la Géorgie en Russie. Elle a également poursuivi ses efforts pour la mise en oeuvre effective de l'accord relatif à l'administration des douanes signé entre la Russie et la Géorgie en 2011. Le point culminant d'une année de contacts politiques réguliers avec la Géorgie a été la visite du premier ministre Giorgi Kvirikashvili au président de la Confédération en juin 2016. Le conseiller fédéral Didier Burkhalter a également rencontré son homologue géorgien à Genève et à Potsdam. L'Azerbaïdjan reste le principal partenaire économique de la Suisse dans la région, ainsi qu'un membre important du groupe de vote dans les institutions de Bretton Woods. Avec l'Azerbaïdjan ainsi qu'avec l'Arménie, la Suisse maintient des contacts politiques réguliers à différents niveaux. En 2016, des accords visant à faciliter la délivrance de visas ont été signés avec les deux pays, lors des rencontres entre le chef du DFAE et ses homologues Edward Nalbandian et Elmar Mammadyarov. La Suisse a en outre signé un accord de réadmission avec l'Azerbaïdjan, celui conclu avec l'Arménie étant déjà en vigueur depuis 2005. Suite à la signature des protocoles de Zurich en 2009, la Suisse reste attachée à un rapprochement entre les pays dans la région en général, et spécifiquement entre la Turquie et l'Arménie.

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L'engagement de la Suisse en Ukraine est toujours aussi diversifié et intense. Il présente, pour simplifier, deux grands axes prioritaires: d'une part, la Suisse soutient le processus de réforme en Ukraine et d'autre part, elle se mobilise en faveur d'un règlement du conflit dans l'Est du pays, tant au niveau bilatéral que dans les enceintes multilatérales. S'inscrivant dans le cadre des projets lancés de longue date et axés sur le long terme de la DDC et du SECO, le soutien aux réformes fait partie intégrante de la stratégie de coopération en Ukraine pour la période 2015­2018.

Concrètement, la Suisse s'engage en faveur de la bonne gouvernance, de la santé ainsi que d'une économie énergétique et d'un développement financier et économique durables. Elle participe en outre à l'aide monétaire coordonnée au niveau international qui est accordée à l'Ukraine. Le crédit maximum de 200 millions de dollars mis à disposition par la Suisse s'intègre dans une action d'aide coordonnée bénéficiant d'un large soutien de la communauté internationale et visant à stabiliser l'Ukraine sur le plan financier. Il est lié au programme du Fonds monétaire international (FMI) et ne doit pas être affecté au budget militaire du pays.

Le second axe prioritaire du soutien de la Suisse à l'Ukraine, à savoir la promotion de la paix et l'engagement humanitaire en relation avec le conflit du Donbass, est présenté au ch. 3.3.4. Soulignons simplement ici qu'outre son engagement dans le cadre de l'OSCE, la Suisse soutient également les efforts du Conseil de l'Europe visant l'établissement régulier de rapports sur la situation des droits de l'homme en Crimée (voir annexe Conseil de l'Europe). De plus, en 2016 également, la Suisse a été le seul acteur humanitaire étatique qui a pu dépêcher des convois dans l'Est de l'Ukraine, approvisionnant ainsi les régions situées de part et d'autre de la ligne de contact en produits chimiques et en sable destinés à produire de l'eau potable, ainsi qu'en matériel médical. Fin mai 2016, un convoi ferroviaire a pu être organisé pour la première fois depuis le début du conflit. Un second convoi ferroviaire a suivi en septembre (voir ch. 3.4.2).

Sur le plan des visites diplomatiques bilatérales, un point culminant a été atteint en janvier, lorsque le président de la Confédération Johann N. Schneider-Ammann
a rencontré son homologue ukrainien Petro Porochenko, lors du Forum économique mondial (WEF), à Davos. La volonté de coopérer encore plus étroitement a par ailleurs été confirmée par l'adoption d'un protocole d'entente sur la coopération entre les ministères des affaires étrangères des deux pays. Ce protocole a été signé en avril par le secrétaire d'État Yves Rossier et par le vice-ministre des affaires étrangères ukrainien Vadym Prystaiko, en marge des consultations politiques que les deux pays tiennent régulièrement.

Durant l'année sous revue, la Suisse a également poursuivi sa coopération avec les États d'Asie centrale. Les piliers de la politique extérieure de la Suisse dans cette région du monde sont restés les mêmes, à savoir, d'une part, la coopération avec les États de la région qui font partie de son groupe de vote au sein des institutions de Bretton Woods et, d'autre part, la coopération au développement centrée sur les domaines de la distribution d'eau, de la santé, de la promotion du secteur privé, de l'aide humanitaire et des droits de l'homme. La Suisse a en outre approfondi ses relations économiques en particulier avec le Kazakhstan, où se tiendra l'exposition universelle Astana Expo 2017. En juillet, à l'invitation de ce pays, le conseiller fédéral Ueli Maurer a dirigé à Almaty une réunion du groupe de vote de la Suisse au 1223

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sein des institutions de Bretton Woods. Le chef du DFF s'est ensuite rendu au Turkménistan et en Azerbaïdjan pour des visites de travail. Lors d'une rencontre organisée en novembre entre le conseiller fédéral Ueli Maurer et le ministre turkmène des finances Muhammetguly Muhammedov, à Berne, la Suisse et le Turkménistan ont signé un protocole d'entente portant sur un renforcement de la coopération entre ministères des finances. Dans le domaine de la migration, la Suisse a conclu avec le Kirghizistan, en septembre, un accord sur les visas du personnel diplomatique. Enfin, des consultations ont été menées en été avec le Kazakhstan, le Kirghizistan et le Tadjikistan sur des questions politiques ainsi que sur les droits de l'homme.

3.2.4

Continent américain17

Évolution dans la région En Amérique latine, l'année 2016 a été marquée par le dynamisme des associations économiques régionales: les négociations pour l'accord de partenariat transpacifique (TPP), incluant notamment le Canada, les États-Unis, le Mexique, le Pérou et le Chili, ont abouti en février, mais la ratification de l'accord reste incertaine; l'Alliance du Pacifique (Mexique, Colombie, Pérou et Chili) continue son intégration économique avec l'entrée en vigueur, en mai, du protocole éliminant les droits de douane sur 92 % des produits échangés entre ses membres; et le Mercosur ­ poussé par les nouveaux gouvernements libéraux en Argentine et au Brésil ­ a repris ses efforts pour avancer vers des traités de libre-échange avec l'UE et l'AELE, mais il souffre d'une certaine inertie et d'un dialogue compliqué entre ses membres, notamment avec le Venezuela.

Le continent reste encore marqué par de nombreuses tensions locales émanant des problèmes de gouvernance et des phénomènes de corruption, violence et impunité.

Malgré la capture du baron de la drogue «Chapo Guzman», le narcotrafic continue à faire des ravages au Mexique, les gangs maintiennent élevé le taux d'homicides au Salvador, au Honduras et au Guatemala, mais aussi en Colombie, au Venezuela et au Brésil. La grave situation économique au Venezuela, lequel dépend presque exclusivement de l'exportation du pétrole, a conduit le pays au bord d'une crise humanitaire liée au manque de produits de première nécessité et a exacerbé les tensions politiques et sociales ainsi que les tendances autoritaires du gouvernement du président Maduro. Au Nicaragua, le président sortant Daniel Ortega a proposé sa femme comme vice-présidente aux élections du 6 novembre. Daniel Ortega a été réélu pour un 4e mandat présidentiel de cinq ans avec 71 % des suffrages, mais avec un taux de participation contesté selon les acteurs politiques. En raison des conditions électorales prétendument irrégulières, l'opposition demande une nouvelle tenue du scrutin avec la participation d'observateurs internationaux. À Haïti, le premier tour des élections présidentielles et des législatives partielles, qui aurait dû avoir lieu en octobre, a été reporté au 20 novembre en raison des dégâts causés par l'ouragan

17

Les relations avec le Brésil et les États-Unis sont traitées au ch. 3.2.1.

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Matthew. Jovenel Moïse, candidat désigné par l'ancien chef d'État Michel Martelly, a remporté la victoire au premier tour.

Le ralentissement économique et le recul des recettes fiscales découlant de la chute du prix des matières premières ont mis à mal les politiques étatiques interventionnistes de redistribution des richesses. Alors que la dernière décennie avait été marquée par une multiplication des systèmes de subventions, les gouvernements doivent aujourd'hui composer avec des ressources en baisse et une société civile plus réactive face aux scandales de corruption. Cette situation a particulièrement affecté les gouvernements de gauche, entraînant une sanction par l'électorat: à la désignation de dirigeants plus libéraux ­ à l'instar de Mauricio Macri en Argentine en novembre 2015 ­ s'ajoutent ainsi des événements tels que le succès parlementaire de l'opposition au Venezuela en décembre 2015, l'échec du referendum constitutionnel voulu par le président Evo Morales en Bolivie en février 2016 ou encore la suspension en mai puis la destitution en septembre de la présidente Dilma Roussef au Brésil. Avec l'élection du libéral Pedro Pablo Kuczynski au Pérou en juin, la réorientation du sous-continent vers des gouvernements de centre-droite semble se consolider.

En Colombie, le processus de paix conduit par le président Santos a débouché sur la signature, en août, d'un accord de paix, visant à mettre officiellement fin à plus d'un demi-siècle de conflit armé interne. Or la population a rejeté cet accord par 50,2 % des voix lors d'un plébiscite organisé le 2 octobre. Le gouvernement colombien a immédiatement engagé des discussions avec les opposants à l'accord ainsi qu'avec les FARC. Un nouvel accord de paix a ainsi été signé le 24 novembre et validé par le parlement le 30 novembre. La cour constitutionnelle colombienne a conclu dans son arrêt du 13 décembre 2016 que la procédure accélérée pour l'adoption des lois d'application de l'accord de paix par le Congrès est en principe compatible avec la constitution même sans nouveau référendum. Les modalités pour l'adoption de la législation nécessaire pour l'application ont été approuvées par le Parlement le 28 décembre 2016. Cette décision a mis un terme à la procédure d'approbation nationale de l'accord de paix.

Avec la victoire du parti libéral
canadien en octobre 2015 et l'entrée en fonction du nouveau premier ministre Justin Trudeau, la nouvelle cartographie politique du continent américain recèle de nombreuses opportunités pour la Suisse: ses partenaires partagent davantage son point de vue, et sont donc plus proches sur le plan multilatéral, ce qui est plus propice aux échanges économiques.

Activités de la Suisse Dans la logique d'universalité et en vue de la mise en oeuvre d'initiatives de coopération concrètes, des consultations politiques ont été menées avec l'Argentine, le Brésil, le Chili, la Colombie, le Costa-Rica, l'Equateur, le Mexique, le Paraguay, le Pérou et l'Uruguay. En particulier, au cours de leurs déplacements dans le continent, le président de la Confédération Johann N. Schneider-Ammann et le conseiller fédéral Didier Burkhalter ont pu profiler la Suisse et renforcer les relations bilatérales. En juin, le chef du DFAE s'est rendu au Canada pour des entretiens avec le ministre des affaires étrangères Stéphane Dion et la ministre du développement et de la Francophonie Marie-Claude Bibeau. En octobre, c'était au tour de la conseillère fédérale Doris Leuthard de se rendre à Ottawa, où elle a rencontré son homologue 1225

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canadien pour des discussions sur les politiques énergétique et climatique ainsi que sur des questions relevant du domaine des transports. Tous ces entretiens ont mis en évidence la volonté des deux pays de donner une nouvelle dynamique à la relation bilatérale. La collaboration sera renforcée dans les domaines de la paix et de la sécurité, des droits de l'homme, ainsi que dans les zones de conflits. Le conseiller fédéral Didier Burkhalter a par ailleurs discuté à diverses reprises avec son homologue canadien de la contribution suisse à un rapprochement entre le Canada et l'Iran. En 2016, la Suisse a ainsi facilité des discussions entre les deux pays, qui ont notamment débouché ­ avec le soutien d'Oman ­ sur la libération d'une professeure canado-iranienne arrêtée en Iran.

En mai 2016, lors d'une visite de travail à Buenos Aires, en Argentine, le conseiller fédéral Didier Burkhalter a signé avec la ministre argentine des affaires étrangères Susana Malcorra une déclaration sur l'approfondissement de la coopération entre les deux pays. Les champs de coopération bilatérale concernés sont notamment les droits de l'homme, un programme commun de recherche ainsi que l'examen d'une éventuelle coopération dans la perspective de la présidence argentine du G20 en 2018. M. Burkhalter s'est également entretenu avec la vice-présidente Gabriella Michettia. Le lendemain, il a rendu visite à son homologue uruguayen Rodolfo Nin Novoa, à Montevideo. Il s'agissait de la première visite de travail d'un conseiller fédéral en Uruguay. Le chef du DFAE a également rencontré des descendants d'immigrants suisses à Nueva Helvecia.

La première visite en Colombie d'un président de la Confédération en août a permis de réitérer le soutien suisse dans la phase de post-conflit au travers de la signature d'une déclaration d'intention portant sur les domaines de la coopération suisse, notamment l'aide humanitaire, la promotion de la paix et la coopération économique, et de profiler les entreprises suisses et les possibilités de futurs investissements, y compris dans le domaine des infrastructures. Tout comme l'accord de paix initial entre le gouvernement colombien et les FARC, l'accord révisé prévoit qu'un original de l'accord doit être conservé en Suisse. De même, la qualification de l'accord par les parties comme accord spécial
selon le troisième par. de l'art. 3 commun aux conventions de Genève reste inchangée. En tant que dépositaire la Suisse ne reprend aucune garantie et aucun contrôle concernant l'application et l'observation de l'accord. De même, le dépôt légal en Suisse n'implique ni confirmation du statut juridique ni de l'applicabilité de l'accord. La Suisse reprend uniquement la tâche de conserver soigneusement l'original et de remettre une copie aux parties contractantes si elles le souhaitent. L'original est conservé aux Archives fédérales à l'instar d'autres originaux d'accords. Au terme des procédures internes, la Suisse a pris en charge l'accord pour conservation.

Le président de la Confédération s'est rendu au Mexique en novembre à l'invitation du président Enrique Peña Nieto. Ce voyage a permis de clôturer l'année de célébration des 70 ans de relations diplomatiques entre la Suisse et le Mexique et donné aux deux pays l'occasion de signer un accord sur le transport aérien ainsi que des déclarations d'intention dans les domaines de l'éducation, de la formation duale et de la réglementation des produits thérapeutiques.

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Relations avec des organisations régionales En prenant appui sur son statut d'observateur au sein de l'Organisation des États Américains (OEA), la Suisse a poursuivi son engagement en faveur du système interaméricain des droits de l'homme. Outre ses contributions au Rapporteur spécial pour la liberté d'expression, elle a apporté un soutien politique à la Commission interaméricaine des droits de l'homme au moment où cette dernière était confrontée à une grave crise financière. La Suisse a également souligné l'importance de développer la thématique Business and Human Rights. Dans cet esprit, la Suisse a organisé le 14 novembre, à Washington, en coopération avec les États-Unis, un forum international sur les grands événements sportifs et les droits de l'homme.

Le DFAE s'est efforcé de concrétiser l'offre de collaboration de la Suisse comme membre observateur de l'Alliance du Pacifique (AdP), formulée en octobre 2015 sous présidence péruvienne de l'AdP, en matière d'innovation, formation professionnelle et gestion des douanes. Le DFAE a mis pour la deuxième fois à disposition du groupe Innovation technique un expert en politique d'innovation et transfert technologique et a envoyé un expert suisse en formation duale à un séminaire au Chili en octobre. La Suisse a soutenu la première Rencontre des jeunes de l'AdP, qui a eu lieu à Lima en mai sur impulsion de Nestlé. Le secrétaire d'État Dell'Ambrogio y a participé comme orateur principal sur la thématique de la formation duale. Au Sommet de juin au Chili, l'Allemagne et la Suisse ont annoncé vouloir coordonner leurs activités futures en soutien de la formation duale, offre bien accueillie par la nouvelle présidence chilienne, qui souhaite mieux structurer la coopération avec les États observateurs dont le nombre s'élève désormais à 49.

En juillet 2016, le secrétaire général de la Communauté des Caraïbes (CARICOM) a informé le DFAE que les quinze États membres de la CARICOM avaient accepté la demande de la Suisse relative à l'obtention du statut d'observateur, moyennant l'accréditation d'un ambassadeur. Le principal objectif de cette accréditation est de coopérer avec la CARICOM en tant que plate-forme de réseautage et de lobbying, par exemple lors de candidatures suisses. La Suisse entend s'investir activement dans son rôle d'observateur, en fonction
de ses possibilités. Cela vaut en particulier pour les questions liées au changement climatique, au développement durable et aux armes de petit calibre. La coopération dans ces domaines ­ et dans d'autres également ­ se fera principalement sous la forme d'échanges ponctuels ainsi qu'au niveau multilatéral.

3.2.5

Afrique subsaharienne18

Évolution dans la région19 Dans une vingtaine d'États d'Afrique subsaharienne ont eu lieu, au cours de 2016, des élections parlementaires ou présidentielles. La qualité de ces scrutins et leur légitimité démocratique a varié. Dans quelques pays, les débats autour de ces élec18 19

Les relations avec l'Afrique du Sud sont traitées au ch. 3.2.1.

La situation au Sahel, le Bassin du Lac Tchad ainsi que la Corne de l'Afrique est aussi traitée au ch. 2.2.

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tions se font dans un cadre démocratique clair. C'est notamment le cas de la Zambie, du Bénin, du Ghana et de la Côte d'Ivoire. Il est également à noter que la République centrafricaine a réussi sa transition politique difficile, après des élections non contestées et démocratiques. La crise perdure en revanche au Burundi et les troubles naissants observés en République démocratique du Congo suite au processus électoral menacent la stabilité de la région des Grands Lacs. La bonne tenue des élections municipales en Afrique du Sud témoigne de la vitalité de la démocratie sud-africaine et les résultats indiquent une baisse de popularité du parti au pouvoir depuis la fin du régime de l'apartheid.

Malgré une conjoncture en perte de vitesses, en raison notamment de la faiblesse des cours des matières premières, l'Afrique subsaharienne présente toujours un fort potentiel de croissance. Cela s'explique entre autres par l'évolution démographique, par l'urbanisation croissante de la région ainsi que par les importants investissements ­ en grande partie internationaux ­ opérés dans des projets d'infrastructure, tels que le Grand Ethiopian Renaissance Dam, un barrage hydroélectrique en cours de construction sur le Nil. Estimée à 6000 mégawatts, la puissance de ce barrage sera pratiquement deux fois plus élevée que celle de l'ensemble des centrales nucléaires suisses.

Le changement climatique et ses conséquences, en particulier sur le phénomène météorologique El Niño, ont été à l'origine en 2016 de la plus grave sécheresse observée au cours des 30 dernières années, dans plusieurs régions d'Afrique subsaharienne entre l'Éthiopie et le Zimbabwe. Comme il n'avait déjà pas beaucoup plu en 2015, les récoltes de 2016 ont été presque totalement anéanties dans plusieurs régions. Relevons que l'engagement humanitaire international en faveur des personnes concernées ­ auquel la Suisse a participé en débloquant des fonds supplémentaires ­ a été remarquable. Du reste, la crise humanitaire dans la région du lac Tchad, la radicalisation d'une partie des jeunes au Sahel et au Nigéria, les conflits violents, le terrorisme et la mobilité accrue de la population ne sont que quelquesuns des défis auquel l'Afrique subsaharienne doit faire face. La situation sécuritaire est donc de plus en plus imprévisible, comme en témoignent
les attentats perpétrés en 2016 en Somalie, au Burkina Faso et en Côte d'Ivoire, qui visaient spécifiquement des étrangers. Il y a lieu de davantage tenir compte, à l'avenir, de cet enchaînement de défis et de difficultés que connaît la région.

Activités de la Suisse20 L'Afrique subsaharienne est destinée à jouer à l'avenir un rôle plus important dans les affaires mondiales. Pour la Suisse, présente avec quinze ambassades, deux consulats généraux et huit bureaux de coopération, la consolidation des relations avec les pays émergents d'Afrique est de mise, tant sur le plan bilatéral que multilatéral.

L'attitude africaine envers la Suisse est bienveillante et intéressée à nos compétences et nos savoir-faire, que nous pouvons offrir par le biais de la coopération au développement et les partenariats privés-publics. En 2016, la présence des représentations africaines s'est encore renforcée. Le Malawi, la Somalie, le Soudan du Sud, la Zambie, la Guinée équatoriale et Maurice ont donné suite à la proposition du DFAE 20

Les principales activités de la Suisse en faveur de la paix, de la sécurité et du développement dans la région sont présentées au ch. 2.

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de faire bénéficier leurs missions respectives à Genève, au niveau bilatéral, d'une accréditation en tant qu'ambassade à Berne. La Gambie et Sao Tomé-et-Principe ont en outre manifesté leur volonté d'ouvrir une mission à Genève.

En mars 2016, le conseiller fédéral Didier Burkhalter s'est rendu à Lagos, la capitale économique du Nigéria, où il a inauguré le consulat général de Suisse. Lors de cette visite, la Suisse et le Nigéria ont également signé des déclarations d'intention sur la restitution d'avoirs de potentats et sur la structuration du dialogue politique et des dialogues sectoriels que les deux pays mènent déjà. Une autre déclaration d'intention visant à faciliter la coopération bilatérale en matière d'entraide judiciaire a également été signée en juillet. En décembre, les deux pays ont mené des consultations politiques sous un nouveau format, qui regroupe les échanges politiques, le dialogue sur les droits de l'homme ainsi que celui mené dans le cadre de partenariats migratoires. Par ailleurs, en août, le conseiller fédéral Guy Parmelin s'est entretenu avec le ministre nigérian de la défense, puis, en septembre, le président de la Confédération Johann N. Schneider-Ammann a rencontré le président du Nigéria Muhammadu Buhar, en marge de l'Assemblée générale de l'ONU, à New York. La discussion a porté sur la restitution d'avoirs de potentats ainsi que sur l'engagement humanitaire visant à atténuer les effets de la crise dans la région du lac Tchad, où des millions de personnes sont en fuite.

Les déclarations d'intention sur la tenue de consultations politiques signées avec le Ghana et l'Angola en 2015 ont porté leurs fruits: un premier cycle de consultations a eu lieu en mars 2016 avec le Ghana, puis en septembre avec l'Angola. En ce qui concerne le Cameroun et le Togo, des visites de travail ont permis d'entretenir les contacts bilatéraux et de développer les relations politiques. En mars, afin de consolider les relations avec les États du Sahel au-delà de l'engagement assuré par la DDC depuis de nombreuses années, le conseiller fédéral Didier Burkhalter s'est rendu au Burkina Faso. Il a assuré de son soutien le nouveau président issu de la phase de transition et fait part de la solidarité de la Suisse avec cette région africaine, où les attentats terroristes sont de plus en plus nombreux. En
mai 2016, le DFAE a organisé à Berne une conférence des représentants spéciaux et des experts du Sahel, dont le but était d'intensifier les relations avec les États occidentaux partageant les mêmes positions et opérant dans cette région. Des contacts avec le nouveau représentant spécial de l'UE pour le Sahel ont en outre été établis indépendamment de cette conférence.

En 2016, la Suisse s'est engagée en faveur des processus de paix en cours dans plusieurs pays africains (voir ch. 3.3.4). Ce fut le cas en particulier au Soudan du Sud, au Burundi, au Mali et en République démocratique du Congo, où elle a mené des actions concentrées au carrefour de plusieurs domaines: politique de paix, efforts diplomatiques et coopération au développement. C'est dans ce contexte que le conseiller fédéral Didier Burkhalter a rencontré le ministre malien des affaires étrangères, en octobre, à Berne. La Suisse joue un rôle particulier et entretient des contacts privilégiés au Burundi, du fait notamment de sa présidence de la Commission de consolidation de la paix au Burundi, instituée par l'ONU. Elle a d'ailleurs profité de ces relations privilégiées pour maintenir le canal de communication entre le gouvernement burundais et la communauté internationale. La coopération au développement, l'aide humanitaire et la politique de paix sont les piliers de la poli1229

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tique extérieure de la Suisse en Afrique subsaharienne. Durant la période 2017 à 2020, la moitié des fonds de la coopération bilatérale au développement seront affectés à cette région.

L'Éthiopie gagne progressivement en importance pour la Suisse, non seulement au niveau politique et dans le domaine de la politique de migration, mais aussi, depuis peu, sur les plans économique et scientifique. Depuis 2014, des consultations politiques sont menées annuellement, au niveau du secrétaire d'État. Des thèmes importants ont également été discutés en septembre 2016, lors du deuxième cycle de consultations politiques, à Addis Abeba: la coopération dans le domaine de la migration, la coopération dans le cadre du Conseil des droits de l'homme de l'ONU ainsi que les défis humanitaires dans la Corne de l'Afrique ­ autant de questions qui ont des répercussions en Suisse également. Lors de ces consultations, les deux pays ont de nouveau discuté en détail de la situation en matière de droits de l'homme, après que l'Éthiopie a été à plusieurs reprises, à partir de fin 2015, le théâtre de manifestations de protestation violemment réprimées. Enfin, la Suisse et l'Éthiopie ont signé un accord sur le transport aérien et ouvert des négociations en vue de la conclusion d'une CDI.

En 2016, vu le nombre élevé de réfugiés érythréens, la Suisse s'est engagée de différentes manières en relation avec l'Érythrée. C'est ainsi que début 2016, le SEM, en sus de sa participation aux processus internationaux visant à maîtriser les flux migratoires, a conduit en Érythrée une mission dite d'établissement des faits. En février, le conseiller fédéral Didier Burkhalter s'est entretenu avec son homologue érythréen, en marge de la session du Conseil des droits de l'homme, à Genève. En avril, le DFAE et le DFJP ont organisé à Berne un colloque d'experts, auquel ont participé les représentants de ministères des affaires étrangères et d'offices des migrations de neuf États européens. En mai, une petite délégation suisse a participé, à Asmara, aux célébrations marquant le 25e anniversaire de l'indépendance de l'Érythrée. La délégation en a profité pour chercher le dialogue avec le gouvernement érythréen et lui exprimer les préoccupations de la Suisse, pour entretenir les relations avec les organisations de l'ONU présentes sur place et pour
mettre divers projets sur les rails. En juin, la coordinatrice de l'ONU pour l'Érythrée a été reçue à Berne. En septembre, la conseillère fédérale Simonetta Sommaruga s'est entretenue avec le conseiller politique du président érythréen, en marge du sommet de l'ONU sur les réfugiés et les migrants, à New York. De plus, lors de plusieurs rencontres organisées à cet effet, la Suisse et quelques autres pays européens également concernés par les flux de migrants érythréens ont cherché à définir une procédure commune, étape par étape. Ces efforts répondent à de nombreuses interventions parlementaires, en particulier au postulat Pfister (15.3954). Ce dernier demande, tout comme la motion Tornare (16.3600), que la Suisse s'engage en Érythrée dans les domaines des droits de l'homme, de l'état de droit et de la coopération internationale. En outre, après avoir suspendu la coopération de la Suisse avec l'Érythrée il y a dix ans, le Conseil fédéral a décidé en novembre 2016 d'examiner la possibilité d'une reprise de l'engagement de la DDC dans ce pays.

En 2016 également, la situation au Soudan du Sud, où sévit de nouveau la guerre civile depuis décembre 2013, est restée politiquement confuse et marquée par la violence et l'urgence humanitaire. En juillet, tout le personnel suisse présent dans le 1230

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pays a dû être évacué suite à une escalade de la violence jusque dans la capitale Juba, qui été restée relativement sûre jusque-là (voir ch. 3.6 Prévention et gestion des crises). Afin d'assurer les services de base à la population et d'atténuer l'insécurité alimentaire qui pèse sur le pays, l'Aide humanitaire suisse a contribué au fonds de l'ONU pour le Soudan du Sud ainsi qu'au Programme alimentaire mondial (PAM). En 2016, une visite de travail a permis de rétablir les relations bilatérales avec le Soudan, un pays important pour la Suisse non seulement pour des raisons historiques, mais également pour le rôle qu'il joue dans la région en relation avec la migration. Le Soudan a exprimé sa volonté de s'orienter vers un modèle fédéraliste.

Avec la Namibie, un accord bilatéral portant sur les services aériens a été signé par la conseillère fédérale Doris Leuthard et le ministre namibien des entreprises publiques lors de la visite de ce dernier en Suisse au mois de février. De plus, durant l'année sous revue, des délégations techniques de la Suisse et de la Namibie se sont rencontrées à Berne et à Windhoek dans le cadre de la convention sur les armes chimiques. Au Zimbabwe, le bureau en charge du programme de coopération régionale a intégré l'Ambassade de Suisse en début d'année, renforçant ainsi la présence de la Suisse à Harare. En mai, des visites de travail au Zimbabwe et au Mozambique ont permis de nouer de précieux contacts et de faire progresser les relations sectorielles, tant économiques que dans le domaine de la politique de paix. Enfin, en octobre, la Suisse et la Tanzanie ont signé un Protocole d'entente sur l'assistance mutuelle en matière pénale visant notamment à renforcer la lutte contre la corruption.

Coopération avec des organisations régionales Conformément à la stratégie de politique étrangère de notre pays et aux objectifs de politique extérieure du Conseil fédéral, il est primordial d'entretenir une étroite coopération institutionnalisée avec l'Union africaine (UA) ainsi qu'avec les organisations régionales d'Afrique subsaharienne. L'UA joue un rôle de plus en plus central en Afrique et dans le monde, comme le montre son intégration toujours plus marquée dans l'architecture africaine, notamment par son Conseil de Paix et Sécurité. En 2016, la Suisse s'est rapprochée de l'UA en
agréant avec cette organisation une déclaration d'intention. Cette dernière porte sur le développement de la coopération dans le domaine de la paix et de la sécurité sur le continent africain et vise, par le financement de projets concrets, à renforcer l'architecture africaine de paix de l'UA. La Suisse a également soumis une déclaration d'intention à la Communauté économique des États d'Afrique de l'Ouest (CEDEAO). Ce texte, s'il est adopté, augmentera la visibilité de l'engagement de la Suisse et permettra à cette dernière de profiter des retombées de la coopération avec les organisations régionales sur le plan politique également. Actuellement, cette coopération porte en particulier sur les domaines de la migration, de l'agriculture, de la sécurité alimentaire, de l'intégration régionale et de la sécurité. En 2016, un ambassadeur suisse chargé des relations de notre pays avec la Communauté d'Afrique de l'Est (CAE) a pour la première fois été accrédité auprès de cette dernière. Cela a permis à la Suisse de suivre et de soutenir le processus de médiation dirigé par cette organisation au Burundi. La deuxième réunion du comité de pilotage entre la Suisse et l'Autorité intergouvernementale pour le développement (Intergovernmental Authority on Development, IGAD), s'est tenue en mai, à Djibouti. Depuis 2014, la Suisse est liée à l'IGAD par un protocole 1231

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d'entente axé sur les domaines suivants: paix, sécurité, migration, résilience à la sécheresse et fédéralisme. Leur coopération fonctionne de manière satisfaisante.

Organisation internationale de la Francophonie (OIF) L'année 2016 aura été marquée par la présence du président Johann N. SchneiderAmmann au XVIe Sommet des chefs d'État et de gouvernements de l'OIF à Madagascar. Le président de la Confédération a mis à profit ce sommet pour organiser plusieurs rencontres officielles avec d'autres chefs d'État, dont le président Hollande et les chefs de gouvernement du Sénégal, de Madagascar, du Niger et de la République centrafricaine. La Suisse y a en outre lancé deux initiatives sur des sujets phares de sa politique étrangère: la prévention de l'extrémisme violent, et l'eau comme facteur de paix et de sécurité. Ces sujets concernent de près l'espace francophone, en particulier les pays du Sahel, durement touchés par la violence terroriste.

Dans la droite ligne de ce que la Suisse avait proposé au Sommet de Dakar en 2014, et de la stratégie Jeunesse adoptée par l'OIF au même moment, notre pays a financé la mise en place d'un «Modèle Jeune Francophone», lequel a permis la participation de plusieurs jeunes des cinq continents aux débats du Sommet à Madagascar. En matière de formation professionnelle, la Suisse continue de fournir son expertise en faveur du système de formation professionnelle au Sénégal, qui assurait la présidence de l'OIF jusqu'à la fin de cette année. La Suisse agit sur le plan politique et opérationnel au sein de l'OIF. Elle soutient les missions de M. Pascal Couchepin, ancien président de la Confédération, comme envoyé spécial de l'OIF pour la région des Grands Lacs. Elle a également fourni une petite aide en matière de justice transitionnelle et de traitement du passé à la République Centrafricaine, récemment réintégrée dans l'OIF depuis ses élections législatives et présidentielles réussies. Enfin, à Berne, le Groupe des Ambassadeurs Francophones, créé fin 2015, a débuté ses activités et reçoit un large soutien des missions diplomatiques concernées. La diversité culturelle et linguistique a été un thème de débats cette année.

3.2.6

Moyen-Orient et Afrique du Nord

Evolution dans la région21 Près de six ans après le début des soulèvements populaires, la zone Moyen-Orient et Afrique du Nord reste exposée à des crises politiques et sécuritaires sans précédent, qui vont le plus souvent en s'aggravant. Les nombreuses initiatives diplomatiques internationales visant à les atténuer ou à les résoudre n'ont pas eu les effets escomptés jusqu'ici, à l'exception de l'accord sur le nucléaire iranien signé en juillet 2015.

Les conflits en Syrie, au Yémen, en Iraq et en Libye plongent la région dans des crises politiques et humanitaires dramatiques, faisant passer au second plan les difficultés croissantes à maintenir la perspective d'une solution négociée à deux États dans le conflit israélo-palestinien. Dans ce contexte très conflictuel, des rivalités géopolitiques accrues se manifestent entre les grands pays (Russie, États-Unis) et les puissances régionales (Turquie, Iran, Arabie saoudite, Égypte et Israël) dans toute la région, mais plus particulièrement au Moyen-Orient. Dans cet ensemble, où 21

La situation au Moyen-Orient et en Afrique du Nord est aussi traitée au ch. 2.2.

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les différents acteurs défendent leurs propres intérêts, c'est l'insécurité qui domine, attisant une lutte sourde, souterraine, avec des positions parfois conciliantes, mais le plus souvent antagonistes. L'intervention de la Russie en Syrie s'inscrit ainsi dans une politique globale de restauration de sa zone d'influence et de rééquilibrage de ses relations internationales, en particulier avec les États-Unis. La Russie a renforcé, durant l'année sous revue, sa collaboration militaire avec l'Iran; la Turquie s'est également réconciliée avec le gouvernement russe, et a procédé, en août, à une intervention militaire dans le Nord de la Syrie, pour combattre les réseaux «djihadistes» mais aussi pour prévenir les velléités d'autonomie kurdes dans la région.

Enfin, l'Iran, depuis l'accord sur son programme nucléaire signé avec les grandes puissances en 2015, a entamé son processus de réintégration sur la scène internationale. Les tensions entre l'Iran, d'une part, et l'Arabie saoudite et ses alliés arabes sunnites, d'autre part, se sont accentuées. En janvier 2016, le ministre saoudien des affaires étrangères a annoncé la rupture des relations diplomatiques avec Téhéran.

Des alliés interposés de ces deux pays se confrontent en outre en Iraq, en Syrie et au Yémen.. La situation humanitaire et économique ne cesse de se détériorer dans les pays de la région dévastés par la guerre. Les perspectives à court terme demeurent «sombres», en raison de la poursuite des combats dans des pays tels que la Syrie, la Libye, le Yémen et l'Iraq, lesquels ont des retombées négatives sur l'activité économique dans l'ensemble de la région.

Activités de la Suisse22 En 2016, la Suisse s'est beaucoup engagée dans toute la région, en suivant trois axes prioritaires: soutien à la recherche de solutions politiques aux conflits, promotion et respect du droit international humanitaire et aide humanitaire aux populations dans le besoin.

Privilégiant le dialogue, qui est un aspect important de sa culture politique, la Suisse a maintenu, en 2016, un rythme élevé et régulier de contacts avec les pays de l'Afrique du Nord et du Moyen-Orient. Des visites de travail ont ainsi permis la tenue d'un nombre significatif de dialogues politiques. Le secrétaire d'État du DFAE a effectué en avril une visite officielle en République d'Iraq. Il
s'est rendu à Bagdad, Nadjaf et Erbil, capitale de la région autonome du Kurdistan. Il s'agissait de la première visite d'un représentant suisse de haut niveau dans le pays depuis plus de dix ans. L'objectif de ce déplacement était notamment d'obtenir des informations de première main sur la situation en Iraq, de voir les projets d'aide humanitaire de la Suisse et d'identifier les domaines d'action pour la coopération future.

Le 17 janvier, à l'issue de quinze sessions de discussions confidentielles en Suisse, un accord entre l'Iran et les États-Unis a été trouvé, qui a permis un échange de onze personnes au total entre les deux pays. L'action discrète de la Suisse, son soutien logistique et son appui à l'organisation de telles discussions ont contribué à la concrétisation des différents volets de cet accord, en particulier la libération et le rapatriement de ressortissants américains qui étaient détenus en Iran. Après le feu vert accordé en janvier par l'Agence internationale de l'énergie atomique (AIEA), une 22

Les principales activités de la Suisse en faveur de la paix, de la sécurité et du développement dans la région sont présentées au ch. 2.

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large part des sanctions de l'ONU, des États-Unis et de l'UE, qui frappaient l'Iran depuis dix ans, ont été levées. Suite à cela, le président de la Confédération Johann N. Schneider-Ammann a effectué une visite officielle à Téhéran fin février. Il y a rencontré le guide suprême de la révolution, Ali Khamenei, ainsi que son homologue iranien Hassan Rohani. Les entretiens ont porté en particulier sur des questions politiques et économiques. Les deux présidents ont signé une feuille de route visant à intensifier les relations bilatérales et prévoyant la tenue de dialogues thématiques sous divers formats. Six accords de coopération entre universités et instituts de recherche ont en outre été signés ou reconduits lors de cette visite. En application de la feuille de route, les premiers cycles des dialogues financier et économique ont eu lieu au printemps et en décembre 2016. De plus, en juin, une délégation iranienne de haut niveau a séjourné en Suisse pour s'entretenir de questions politiques, de droits de l'homme, de sécurité régionale et de thèmes juridiques.

Au mois de février, le conseiller fédéral Didier Burkhalter s'est rendu à Riyad. Il s'agit de la première visite d'un ministre des affaires étrangères suisse en 60 ans de relations bilatérales avec l'Arabie saoudite. Il a été reçu en audience par le roi Salman ben Abdelaziz al-Saoud, avant de s'entretenir avec son homologue Adel ben Ahmed al-Jubeir. Ces rencontres ont permis de faire un tour d'horizon des relations bilatérales et d'aborder les crises dans les pays de la région, avec une attention particulière portée aux conflits en Syrie et au Yémen ainsi qu'à la crise diplomatique avec l'Iran. Dans ce cadre, la Suisse a communiqué sa disponibilité à représenter les intérêts consulaires, respectivement de Riyad en Iran, et de Téhéran en Arabie saoudite. Des discussions en ce sens ont également été menées entre l'Iran et le Bahreïn. En mai, le président de la Confédération a reçu à Berne, le roi du Bahreïn, Hamad Bin Isa Al Khalifa. Cette rencontre a été l'occasion de soigner les relations entre les deux pays et de discuter de la situation au Moyen-Orient. À l'issue des entretiens, une convention visant à éviter la double imposition a été paraphée et deux mémorandums en matière de droits de l'homme ont été signés, dans les domaines de la lutte
contre la violence domestique et la prévention de la torture. Dans le cadre des festivités organisées pour le 50e anniversaire des relations bilatérales entre la Suisse et le Koweït, un MoU relatif à la coopération au développement a été signé à Berne, en août. De plus, le président de la Confédération Johann SchneiderAmmann a effectué fin novembre une visite d'État au Koweït sur invitation de l'émir. Plus tôt dans l'année, lors de la visite du vice-ministre des affaires étrangères, Khaled Al Jarallah, deux accords en matière de migration ont été signés, l'un portant sur la réadmission de personnes en situation irrégulière et l'autre sur la suppression réciproque de l'obligation de visa pour les détenteurs de passeports diplomatiques, de passeports spéciaux ou de passeports de service. Cet État du Golfe est un acteur important dans le domaine de l'aide au développement, en particulier en Syrie, où il est l'un des principaux fournisseurs d'aide humanitaire. La Suisse dispose quant à elle d'une expérience et d'une expertise reconnues dans la gestion efficiente et efficace de l'aide au développement.

Le conseiller fédéral Didier Burkhalter s'est rendu à Beyrouth en mai où il s'est entretenu avec le ministre libanais des affaires étrangères, Gebran Bassil, en particulier sur les questions de la prévention de l'extrémisme violent, la crise liée au grand nombre de réfugiés et les consultations politiques que la Suisse et le Liban mèneront désormais régulièrement en vertu du protocole d'accord signé en avril. Le conseiller 1234

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fédéral s'est par ailleurs rendu sur les sites des projets menés par la Suisse et ses organisations partenaires afin d'offrir aux populations des perspectives d'avenir, dans un contexte où les réfugiés notamment syriens représentent désormais un quart de la population.

Au Proche-Orient, la Suisse entretient de bonnes relations avec Israël et l'Autorité palestinienne. Malgré le blocage des négociations israélo-palestiniennes, elle a poursuivi ses efforts en faveur de la paix et d'une solution à deux États (voir ch. 3.3.4 Priorités géographiques). Ainsi, dans le cadre de la politique israélienne de colonisation des terres situées sur le Territoire palestinien occupé, elle a rappelé à plusieurs reprises que de telles initiatives étaient illégales au regard du droit international humanitaire et qu'elles constituaient également un obstacle majeur à la paix et à la mise en oeuvre de la solution à deux États.

Au mois de septembre, des consultations politiques, menées par le secrétaire d'État du DFAE, ont eu lieu avec l'Égypte. Portant sur des thèmes comme la coopération internationale, la sécurité humaine, la coopération judiciaire et les cas consulaires en relation avec des citoyens suisses, elles ont constitué une excellente plate-forme pour un dialogue politique de haut niveau sur les questions migratoires, la sécurité et la situation dans la région. À l'occasion de la visite d'État en Suisse du président de la République tunisienne, Béji Caïd Essebsi, en février, six conventions et protocoles ont été signés. Les entretiens ont porté essentiellement sur la transition démocratique en Tunisie, les relations économiques bilatérales, le programme de coopération suisse, le dialogue migratoire, la situation en matière de sécurité et la prévention de l'extrémisme violent ainsi que sur la formation professionnelle pour lutter contre le chômage des jeunes. Un groupe d'amitié Suisse­Tunisie a également été lancé et sera présidé par l'ancien conseiller fédéral Samuel Schmid. Le conseiller fédéral Didier Burkhalter s'est rendu en visite officielle en Tunisie en novembre. Cette visite a permis de lancer les premières consultations politiques entre les deux pays ainsi que le dialogue sur la prévention de l'extrémisme violent.

3.2.7

Asie et Pacifique23

Évolution dans la région En Asie, l'année sous revue a été marquée par une accentuation des basculements géopolitiques. La Chine poursuit avec ténacité le «rêve chinois», autrement dit sa vision d'une Chine qui retrouverait sa grandeur historique. En politique intérieure, cela se traduit par une rhétorique aux accents parfois nationalistes. En politique extérieure, il en est résulté, par exemple, l'initiative One Belt One Road (OBOR), à laquelle on doit notamment la création en un temps record de la Banque asiatique d'investissement dans les infrastructures (Asian Infrastructure Investment Bank, AIIB). Depuis que la Chine se profile ainsi résolument sur la scène internationale, les contours de deux pôles se dessinent de plus en plus clairement dans la région: d'un côté, les pays qui rejoignent la sphère d'influence chinoise et, de l'autre, ceux qui cherchent l'appui des États-Unis. En particulier les Philippines, qui étaient 23

Les relations avec la Chine, l'Inde et le Japon sont traitées au ch. 3.2.1.

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depuis longtemps un fidèle allié des États-Unis, cherchent aujourd'hui, sous la conduite du nouveau président Rodrigo Duterte, à se rapprocher de la Chine.

Quelques pays, comme l'Inde, le Vietnam ou l'Indonésie, s'efforcent quant à eux de diversifier leurs relations internationales. Par ailleurs, les moyens et grands États asiatiques font entendre leur voix avec de plus en plus d'assurance dans les enceintes multilatérales, et il est intéressant de noter que la Chine s'emploie désormais à assurer un rôle de médiation, par exemple en relation avec le conflit en Afghanistan.

Sous la présidence de Barack Obama, les États Unis tentaient, par leur politique de rééquilibrage (rebalancing), de pousser la Chine à s'intégrer dans l'ordre international existant et, dans le même temps, de limiter sa puissance. Parmi les mesures prises à cet effet figuraient le renforcement de leur présence militaire, l'approfondissement des partenariats stratégiques existants et la conclusion de nouveaux partenariats stratégiques, la promotion de l'intégration économique par le biais du Partenariat transpacifique (PTP), dont la ratification est mis en cause par la nouvelle administration américaine, ainsi que le dialogue avec la Chine dans le cadre du partenariat économique stratégique conclu en 2009. Cette stratégie est toutefois controversée au sein même des États-Unis, ce qui en mine l'efficacité.

Dans ce contexte, le thème de la sécurité ne cesse de gagner en importance. Cela se manifeste notamment par le volume élevé des dépenses d'armement ­ l'Inde est actuellement le plus gros importateur d'armes du monde ­ ou encore par les projets d'abandon du pacifisme constitutionnel au Japon. La dégradation de la situation sécuritaire s'explique en outre en partie par les conflits historiques jamais réglés dans la région (péninsule coréenne, Taiwan et Cachemire) ainsi que par les tensions accrues découlant des revendications de souveraineté sur certaines zones marines d'Asie de l'Est et du Sud-Est. En ce qui concerne la mer de Chine méridionale, la Cour permanente d'arbitrage de la Haye a statué sur l'affaire «Philippines vs République populaire de Chine» en juillet 2016, jugeant que les revendications de la Chine, qui étaient fondées sur des raisons historiques, n'étaient pas compatibles avec la Convention des Nations Unies
sur le droit de la mer (CNUDM). La Chine n'a toutefois pas reconnu la décision de la Cour et poursuit sa stratégie consistant à régler les conflits territoriaux en négociant sur une base bilatérale avec chacune des parties concernées. Cela semble partiellement lui réussir: Le nouveau gouvernement philippin a donné son accord à des négociations bilatérales et renoncé à se servir de l'arrêt de la Cour permanente d'arbitrage de la Haye comme moyen de pression.

Autre foyer de conflit: l'Afghanistan, où le nombre de victimes est de nouveau en augmentation et où les Talibans exercent toujours une forte pression sur les forces de sécurité. Ce qui inquiète également, c'est que l'organisation dite «État islamique» (EI) et d'autres groupes islamistes extrémistes tentent de plus en plus d'étendre leur champ d'action aux régions musulmanes d'Asie du Sud et du Sud-Est. De plus, on observe dans de nombreux États asiatiques la tendance à durcir la politique d'ordre et de sécurité. Or cette évolution s'accompagne de restrictions en matière de droits de l'homme et de libertés civiles, allant d'un contrôle renforcé des ONG à la limitation de l'influence des tribunaux indépendants, en passant par des atteintes à la liberté d'expression.

Sur le plan économique, la région fait toujours preuve d'un grand dynamisme. La locomotive chinoise continue toutefois de s'essouffler et l'influence économique de l'Europe dans la région est également en recul. Les répercussions sur la croissance 1236

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ne sont cependant pas partout les mêmes. De nombreux pays, comme le Vietnam, profitent en effet de la hausse des charges salariales en Chine pour développer leurs propres secteurs industriels, tandis que dans les pays où l'économie titube, on s'efforce d'atteindre le taux de croissance visé en s'appuyant sur l'intervention de l'État ainsi que, parfois, sur un protectionnisme accru. Le niveau de développement des pays de la région présente toujours d'importantes différences. Dans ce contexte, l'intégration économique régionale, avec la communauté de l'ANASE (ASEAN Community), la communauté économique de l'ANASE (ASEAN Economic Community, AEC) et le partenariat économique régional intégral (Regional Comprehensive Economic Partnership, RCEP), n'a guère progressé.

Activités de la Suisse En juillet, le président de la Confédération Johann N. Schneider-Ammann s'est rendu en Corée du Sud pour une visite officielle. Celle-ci a permis de renforcer la coopération bilatérale dans les domaines de la recherche et de l'éducation, y compris la formation professionnelle, et a abouti à la signature d'un accord sur les technologies de l'information. Avant cela, une session du dialogue politique bilatéral s'est tenue à Berne en avril. En janvier, la Suisse et la Corée du Sud ont signé une déclaration commune avec pour objectif de conclure rapidement un accord sur l'échange automatique d'informations selon les standards de l'OCDE. À l'endroit de la Corée du Nord, l'année sous revue a été marquée par la mise en oeuvre des nouvelles sanctions décidées par le Conseil de sécurité de l'ONU en mars et en novembre suite aux essais nucléaires et balistiques auxquels s'est livré le gouvernement de Pyongyang en janvier et en septembre 2016. Le président de la Confédération s'est rendu en Mongolie en juillet pour participer au Sommet bisannuel du «Dialogue Asie­ Europe» (ASEM). À cette occasion, il a rencontré le président mongol avec lequel il s'était déjà entretenu en janvier en marge du WEF à Davos. À la demande de la Mongolie, le dialogue bilatéral sur les questions de neutralité lancé en 2015 a été poursuivi. Une session du dialogue politique bilatéral s'est tenue à Oulan-Bator en octobre.

Compte tenu de l'avancement des travaux de réforme et de réconciliation du nouveau gouvernement du Sri Lanka, élu en janvier 2015,
la mise en oeuvre de la stratégie de coopération de la Suisse avec ce pays, convenue entre le DFAE, le DFJP et le DEFR en décembre 2015, a pu débuter en 2016. Les principaux axes de cette stratégie sont le soutien du processus de réforme et de réconciliation, ainsi que la poursuite de la dynamisation des relations bilatérales lancée en 2015 et fondée en particulier sur des contacts politiques réguliers ainsi que sur la coopération dans le domaine de la migration. En janvier 2016, le président de la Confédération Johann N. Schneider-Ammann s'est entretenu avec le premier ministre sri-lankais Ranil Wickremesinghe, en marge du WEF. En mars, le conseiller fédéral Didier Burkhalter a reçu le ministre sri-lankais des affaires étrangères Mangala Samaraweera en visite de travail, à Berne. Enfin, début octobre, la conseillère fédérale Simonetta Sommaruga s'est rendue au Sri Lanka. Elle s'est d'abord déplacée dans le Nord de l'île, où elle a eu un aperçu de l'engagement de la Suisse et a pu se rendre compte de l'évolution de la situation sur place, puis a gagné Colombo, où elle a signé un accord bilatéral sur la migration.

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Au Bhoutan, compte tenu du bon développement et de la démocratisation de cette petite monarchie himalayenne ­ classée depuis peu parmi les pays à revenu intermédiaire ­, la DDC a mis un terme à son engagement avec effet à fin 2016. Pour maintenir les bonnes relations de la Suisse avec ce pays, mais aussi pour les étendre et les approfondir, le DFAE suit une stratégie de transformation, dont le Bhoutan est partenaire politique. En septembre 2016, en marge de l'Assemblée générale de l'ONU, à New York, le président de la Confédération Johann N. SchneiderAmmann a rencontré la première ministre du Bangladesh Sheihk Hasina, tandis que le conseiller fédéral Didier Burkhalter s'est entretenu avec le conseiller en politique extérieure du premier ministre du Pakistan Sartaj Aziz. Les consultations politiques avec ce pays se sont en outre déroulées en novembre, à Islamabad. En mai, des consultations politiques ont également eu lieu avec le Népal, ainsi que, pour la première fois depuis quatre ans, avec l'Afghanistan. Les défis sécuritaires dans ce pays restent très importants. Vu l'énorme pression exercée par les Talibans et par d'autres groupes islamistes extrémistes, comme l'EI, la communauté internationale devra soutenir l'Afghanistan pendant encore de nombreuses années. C'est ainsi qu'en octobre 2016, lors de la conférence de Bruxelles sur l'Afghanistan, la communauté internationale des donateurs et le gouvernement afghan ont adopté les objectifs 2017/2018 du plan d'aide au pays, connu sous le nom d'Afghanistan compact.

En Asie du Sud-Est également, la Suisse poursuit sa stratégie consistant à intensifier ses relations bilatérales et à approfondir sa coopération avec les États de la région.

Durant l'année sous revue, les relations avec Singapour ont fait l'objet d'une attention particulière. Carrefour stratégique de la région, la cité-État doit relever des défis qui, dans de nombreux domaines tels que l'économie, les marchés financiers ou la politique de l'éducation, sont souvent similaires à ceux auxquels la Suisse doit faire face. En février, des consultations de politique extérieure ont eu lieu avec les chefs de division du ministère des affaires étrangères, en application de la déclaration commune de 2014 visant à approfondir la coopération entre les deux États. En juillet, le président de la
Confédération Johann N. Schneider-Ammann s'est rendu à Singapour en visite d'État, sur invitation de la cité asiatique, pour y discuter principalement de promotion de l'éducation et de l'innovation. En septembre, à Berne, dans le cadre de leur dialogue financier annuel, les autorités de surveillance des deux pays ont signé un accord visant à promouvoir leur coopération dans le domaine de la technologie financière (FinTech). En 2016, les relations avec les Philippines ont également gagné en dynamisme. Les consultations de politique extérieure, en mars, ont été suivies, fin avril, de la signature de l'accord de libre-échange entre les Philippines et l'AELE, dont les négociations ont été bouclées en à peine un an. Après les élections générales de mai 2016 et l'entrée en fonction du nouveau gouvernement en juin, il sera intéressant de voir comment ce dynamisme évoluera. En mars 2016, la conseillère fédérale Doris Leuthard a effectué une visite de travail en Indonésie. Le but était d'approfondir les relations avec cet État ­ membre du G20 et plus grand pays d'Asie du Sud-Est ­ dans des secteurs comme le commerce et les investissements, la promotion d'une économie propre et la formation professionnelle. De plus, au point mort depuis deux ans, les négociations d'un accord de libre-échange menées dans le cadre de l'AELE ont redémarré.

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En 2016, la Suisse a mené des consultations politiques avec d'autres pays également. En février, elle a discuté avec la Thaïlande de la situation politique intérieure du pays ainsi que de l'état des relations bilatérales. En septembre, le conseiller fédéral Didier Burkhalter a rencontré son homologue thaïlandais, en marge de la 71e Assemblée générale de l'ONU. La discussion a porté sur des thèmes d'importance régionale ainsi que sur le renforcement de la coopération des deux pays dans le domaine de la protection consulaire. Les relations bilatérales en général ainsi que le commerce et les investissements ont été au coeur des consultations menées avec le Brunéi Darussalam en avril 2016, puis avec le Vietnam en juin, où l'on a par ailleurs célébré le 45e anniversaire de l'établissement des relations bilatérales entre nos deux pays. En juillet, les discussions avec le Cambodge ont porté sur la situation politique intérieure du pays et sur la coopération au développement. Quant aux consultations menés en novembre avec le Myanmar, où la transition d'un régime militaire autocratique vers une société démocratique progresse, elles avaient à l'ordre du jour le renforcement des relations commerciales ainsi que l'engagement de la Suisse en faveur du processus de paix et de transition en cours dans le pays (voir ch. 3.3.4 Priorités géographiques, et 3.3.4 Priorités thématiques). En janvier 2016, les représentants de la Suisse ont discuté avec le ministre des affaires étrangères des Îles Salomon des possibilités d'ouverture d'une mission permanente à Genève. Enfin, en septembre, le président de la Confédération Johann N. Schneider-Ammann et le premier ministre du Royaume des Tonga se sont entretenus de la même question, en marge de la 71e Assemblée générale de l'ONU, à New York.

Relations avec des organisations régionales Début juin 2016, le conseiller fédéral Guy Parmelin s'est rendu à Singapour, où il a participé au Dialogue Shangri-La, l'une des plus importantes conférences de sécurité de la région. Il y a souligné la volonté de la Suisse de contribuer de manière constructive au dialogue sur les questions de sécurité en Asie. Quant au Dialogue Asie-Europe (Asia-Europe Meeting, ASEM), il représente pour la Suisse une importante plate-forme où elle peut présenter sa politique extérieure asiatique depuis 2012.
La participation du président de la Confédération Johann N. Schneider-Ammann au sommet de l'ASEM, qui s'est tenu en juillet, en Mongolie, a cependant aussi été placée sous le signe des relations de notre pays avec l'UE. Le président de la Confédération a en effet profité de nombreuses rencontres bilatérales pour cultiver les relations avec divers partenaires européens et pour leur présenter le point de vue de la Suisse sur ses relations avec l'UE. Lors d'une rencontre avec le président de la Commission européenne Jean-Claude Juncker, les prochaines étapes des discussions entre la Suisse et l'UE ont en outre été convenues. Enfin, le sommet de l'ASEM a également été l'occasion de mener des discussions avec le Laos, la Mongolie, la Russie et le Vietnam.

Le 24 juillet 2016, la Suisse a obtenu de l'Association des nations de l'Asie du SudEst (ANASE) le statut de partenaire de dialogue sectoriel, conformément à sa stratégie consistant à renforcer sa coopération avec des organisations régionales. Désormais, notre pays peut participer à des rencontres de haut niveau de l'ANASE et approfondir sa coopération avec cette dernière dans divers secteurs d'intérêt commun, comme les relations économiques, la coopération au développement ou la réduction des risques de catastrophes. Lors de sa première réunion, en novembre, la 1239

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commission mixte de coopération sectorielle ANASE-Suisse (ASEAN-Swiss Joint Sectoral Cooperation Commission, ASJSCC) a consacré ses travaux à la définition d'un plan d'action commun pour les quatre prochaines années.

3.3

Paix et sécurité

3.3.1

Sécurité européenne: OSCE, Partenariat pour la paix, Conseil de l'Europe

La crise de l'ordre pacifique européen perdure. Elle s'était beaucoup aggravée en 2014 dans le contexte du conflit ukrainien et de l'annexion de la Crimée au mépris du droit international. Les intenses pourparlers de Minsk se sont poursuivis, mais la mise en oeuvre des accords éponymes pour ramener la paix en Ukraine traîne. Les tensions entre la Russie et l'Occident restent très vives sur fond de méfiance mutuelle. Toutefois, l'année sous revue a aussi été marquée par des signaux positifs, dont la reprise du dialogue entre l'OTAN et la Russie, une réunion ministérielle informelle de l'OSCE à Potsdam sur l'élaboration d'un agenda commun à long terme, et les premières démarches en vue de relancer la maîtrise des armements conventionnels en Europe. Les travaux visant à trouver une solution aux conflits qui déchirent le Caucase du Sud se sont poursuivis dans les formats établis: discussions de Genève sur le conflit en Géorgie et du Groupe de Minsk sur le Haut-Karabakh.

La Suisse continue d'oeuvrer au renforcement de la sécurité coopérative et du dialogue en Europe, tant sur le plan bilatéral qu'au sein de forums de sécurité tels que l'OSCE ou le Partenariat pour la paix de l'OTAN, mais aussi dans d'autres organisations attachées aux valeurs européennes, comme le Conseil de l'Europe.

Organisation pour la sécurité et la coopération en Europe (OSCE) Bien que la Suisse ne soit plus membre de la troïka de l'OSCE, elle continue de considérer l'organisation comme prioritaire par rapport aux multiples enjeux de l'Europe. Elle a soutenu en 2016 la présidence allemande, qui a pris fin lors du Conseil des ministres organisé à Hambourg début décembre. Dix textes du Conseil des ministres concernant notamment la bonne gouvernance et la connectivité économique, la migration, le contrôle des armements en Europe («de Lisbonne 1996 à Hambourg 2016») et les défis du cyberespace ont été adoptés. En 2017, la Suisse soutiendra également la présidence autrichienne par la mise à disposition d'experts et en favorisant une étroite collaboration au siège de l'OSCE à Vienne ainsi qu'entre les services concernés des ministères des affaires étrangères et de la défense. Le quartier général viennois devrait par ailleurs bénéficier à terme du renfort de jusqu'à six officiers de l'armée suisse, à partir de 2017. La déclaration signée
en août 2015 dans le cadre du format «DACHLI» (Allemagne, Autriche, Suisse, Liechtenstein) constitue pour la Suisse un document important en ce qui concerne le renforcement de la coopération en matière de politique de sécurité focalisée sur l'OSCE. Elle prévoit une coopération renforcée dans quatre domaines: engagement en Ukraine afin d'apporter une solution pacifique au conflit, amélioration des instruments de l'OSCE dans le cycle du conflit, discussion sur la sécurité européenne au sein de l'OSCE et renforcement de la «deuxième dimension» (économie et environnement) 1240

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en favorisant la connectivité économique. En ce qui concerne l'amélioration des instruments de l'OSCE dans le cycle des conflits, qui inclut l'alerte précoce, la prévention et la résolution des conflits, la gestion des crises et celle de l'aprèsconflit, la Suisse s'implique en particulier dans la médiation, qui est considérée comme un instrument de prévention et de résolution de conflits (voir ch. 3.3.4 Priorités thématiques).

Le processus de paix de Minsk de l'OSCE reste la plate-forme principale pour une résolution pacifique de la crise ukrainienne. Au cours de l'année sous revue, la situation est restée tendue, marquée par des violations régulières du cessez-le-feu. Le conflit a fait de nouvelles victimes, quoique moins qu'en 2015. La Suisse a soutenu la mise en oeuvre des accords de Minsk élaborés lors de sa présidence de l'OSCE en 2014 de même que la mission spéciale d'observation de l'OSCE en Ukraine et la mission d'observation de l'OSCE à la frontière russo-ukrainienne, en fournissant experts et expertise. Elle a aussi assuré la coordination du groupe de travail chargé des questions humanitaires au sein du Groupe de contact trilatéral, la direction de la mission de surveillance à la frontière et la direction adjointe de la mission d'observation, pour laquelle elle a par ailleurs détaché une douzaine d'observateurs.

La Suisse a également soutenu des activités de l'ONU, du Conseil de l'Europe et d'une organisation ukrainienne visant à surveiller le respect des droits de l'homme en Ukraine, y compris en Crimée. Elle soutient en outre le nouveau ministère ukrainien des zones temporairement occupées et des déplacés internes, qui oeuvre à un rapprochement avec les régions qui ne sont plus sous le contrôle du gouvernement.

Durant l'année sous revue, la Suisse a également été le seul acteur étatique à envoyer des convois humanitaires dans l'Est de l'Ukraine, fournissant de part et d'autre de la ligne de contact des produits chimiques et du sable pour rendre l'eau potable, et du matériel médical. Fin mai 2016, la DDC a organisé un convoi ferroviaire, le premier depuis le début du conflit (voir ch. 3.4.2). Elle en a organisé un second en septembre.

Dans le Caucase du Sud, la Suisse a soutenu la recherche de solutions aux conflits qui agitent l'Ossétie du Sud, l'Abkhazie et le Haut-Karabakh. Elle
a notamment fourni à la présidence allemande de l'OSCE son envoyé spécial dans la région, prolongeant ainsi l'excellente collaboration qui avait commencé sous sa propre présidence en 2014. L'envoyé spécial a pris une part active aux efforts de médiation et à la recherche de solutions aux conflits touchant la Géorgie (Abkhazie et Ossétie du Sud) et le Haut-Karabakh. L'engagement suisse comprenait aussi des dialogues d'experts sur la gestion des conflits et des projets humanitaires en faveur de la population directement touchée par le conflit. En avril, l'escalade des violences autour du Haut-Karabakh a pu être freinée au bout de quatre jours par un cessez-lefeu résultant de la médiation russe. De nouvelles explosions de violence ont pu être évitées depuis lors.

S'agissant du renforcement de la sécurité européenne, la Suisse a créé dans le cadre de sa présidence de l'OSCE en 2014 le Panel of Eminent Persons on European Security as a Common Project, auquel elle a fourni des ressources financières et humaines. Le rapport final de ce panel a été présenté en marge de la réunion du Conseil ministériel de l'OSCE qui a eu lieu à Belgrade fin 2015, puis à un public plus large dans plusieurs pays de l'OSCE tout au long de l'année 2016. La Suisse a 1241

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soutenu à cet égard plusieurs manifestations du secrétariat de l'OSCE et activement relayé les conclusions du panel dans le cadre de l'OSCE. Elle milite par ailleurs pour la poursuite du dialogue informel sur la sécurité européenne au niveau ministériel.

Depuis l'aggravation de la situation des réfugiés en Europe, l'OSCE accorde une attention accrue à la thématique des migrations. Un groupe de travail informel dirigé par la Suisse a été créé afin de dresser un tableau d'ensemble de ce qui se fait dans ce domaine et de formuler des approches pratiques pour mieux exploiter les avantages comparatifs de l'OSCE. Il a présenté en juillet des recommandations concernant la protection des réfugiés et des migrants et leur intégration, la lutte contre le crime, la gestion des frontières, la solidarité et les partenariats. Son engagement au sein du groupe de travail informel a permis à la Suisse de renforcer son rôle de médiateur crédible et d'appuyer une approche globale, qui tienne également compte des chances et des enjeux que représentent les migrations.

Dans la «première dimension», politico-militaire, la Suisse milite pour la modernisation du document de Vienne sur les mesures de confiance et de sécurité. Elle fournit toujours, à cette fin, le coordonnateur du Forum pour la coopération en matière de sécurité. Elle soutient par ailleurs l'initiative lancée en septembre 2016 par le ministre des Affaires étrangères allemand Frank-Walter Steinmeier pour débloquer la maîtrise des armements conventionnels en Europe. En matière de cyber-sécurité, la Suisse travaille à la mise en oeuvre des mesures adoptées et au développement de nouvelles mesures de confiance (voir ch. 3.3.2, Sécurité dans le cyberespace). Concernant la gestion du terrorisme, elle s'efforce de focaliser davantage l'action de l'OSCE sur la prévention, et surtout sur la jeunesse.

Dans la «deuxième dimension», la Suisse a surtout oeuvré, pendant la période sous revue, en faveur de la connectivité économique. Le conflit en Ukraine n'a fait que renforcer la tendance à la constitution de blocs économiques dans la zone OSCE, à l'encontre des efforts pour une harmonisation et une convergence économiques mondiales. Aussi la Suisse travaille-t-elle, en étroite collaboration avec l'Allemagne et l'Autriche (les présidences actuelle et future), au
développement des compétences de l'OSCE dans le domaine économique afin que l'organisation soit en mesure de contribuer à atténuer les tensions. L'idée de créer un centre de compétence de l'OSCE dans la dimension économique a par exemple été approfondie. Depuis le deuxième semestre 2016, il est question d'évoquer ce projet au niveau ministériel.

La Suisse continuera d'oeuvrer en sa faveur en 2017.

Dans la «troisième dimension», la dimension humaine, la Suisse inscrit son action dans un contexte marqué par des discussions difficiles et une polarisation des positions entre les États participants. Elle a notamment joué un rôle de facilitateur dans les négociations, qui ont finalement échoué, concernant une décision ministérielle sur la prévention de la torture, destinée à renforcer les activités de l'OSCE dans ce domaine prioritaire de la politique des droits de l'homme de la Suisse. Elle a mis à la disposition du Bureau des institutions démocratiques et des droits de l'homme un expert suisse de cette thématique et financé son travail. La Suisse a également apporté une attention particulière à une inclusion accrue de la société civile, en soutenant notamment l'élaboration par les ONG d'une stratégie pour renforcer la mise en réseau de la société civile et la protection des défenseurs des droits de l'homme dans l'espace OSCE. Enfin, la Suisse a régulièrement eu recours aux fora de l'OSCE pour 1242

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exprimer son inquiétude sur la situation des droits de l'homme dans certains États participants de l'OSCE.

Participation de la Suisse au Partenariat pour la paix (PPP) L'année 2016 fut celle du vingtième anniversaire de l'adhésion au Partenariat pour la paix (PPP). Le conseiller fédéral Flavio Cotti a en effet signé le document cadre du PPP le 11 décembre 1996. Bien que ce texte soit issu d'un contexte sécuritaire différent, ses motivations sont, 20 après, plus que jamais d'actualité: «Ce partenariat traduit la conviction partagée que l'on ne peut assurer la stabilité et la sécurité dans la zone euro-atlantique que par la coopération et par une action commune.» Le PPP reste pour la Suisse un élément fondamental de son engagement en matière de politique de sécurité. Par suite des événements qui se sont produits en Ukraine, l'OTAN a recentré ses priorités sur la défense collective de ses membres, lesquels, lors du sommet de Varsovie en juillet, ont confirmé des mesures visant à développer les capacités de défense. Dans le même temps, l'OTAN recherche le dialogue avec la Russie dans le cadre du Conseil OTAN-Russie, en particulier pour éviter tout incident involontaire. Fidèle à elle-même, elle mène ainsi sa double stratégie fondée à la fois sur le dialogue et sur la capacité de mobilisation. S'agissant des défis à relever dans le Sud de l'Europe en matière de politique de sécurité, l'OTAN aide des États d'Afrique du Nord et du Moyen-Orient à renforcer leurs propres capacités.

La préservation des capacités militaires et de l'interopérabilité reste importante pour l'OTAN et pour ses partenaires, y compris la Suisse. La capacité à coopérer avec d'autres armées accroît la liberté d'action de notre pays et permet de collaborer à la promotion de la paix. La mission KFOR au Kosovo, le plus important des engagements de l'armée suisse en faveur de la promotion militaire de la paix, s'inscrit dans le cadre d'une opération dirigée par l'OTAN. L'une des priorités de la collaboration avec l'OTAN en 2016 fut le renforcement de l'initiative pour l'interopérabilité des partenaires. Dans ce contexte, la Suisse a participé, avec 25 autres États partenaires, à une réunion de la plate-forme d'interopérabilité lors du sommet de l'OTAN à Varsovie. La Suisse est également intéressée à maintenir une large plate-forme de
dialogue politique avec l'OTAN. En 2016, conjointement avec d'autres partenaires, elle s'est employée à consolider le modèle de discussion entre l'organisation et ses partenaires d'Europe occidentale (Finlande, Irlande, Autriche, Malte, Suède et Suisse).

La Suisse tient à ce que sa coopération avec l'OTAN repose sur des valeurs communes. En 2016, elle a donc continué à s'engager dans le domaine de la sécurité humaine, notamment dans le cadre de la résolution 1325 de l'ONU sur les femmes, la paix et la sécurité et sur la protection des populations civiles dans les conflits armés. L'OTAN joue un rôle important dans la mise en oeuvre de ce genre de thématiques, en ceci qu'elle a un effet multiplicateur au sein des forces armées alliées et partenaires; en outre, elle fait souvent figure de référence dans le domaine militaire.

La Suisse a également continué à soutenir des domaines d'activités dans lesquels elle dispose de compétences particulières (réformes dans le domaine de la sécurité, destruction de munitions, surveillance). En contrepartie, elle a bénéficié des offres de formation et des exercices multilatéraux du PPP. Enfin, notre pays profite également de son partenariat avec l'OTAN en relation avec les nouveaux défis que doi1243

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vent relever les politiques de sécurité, en particulier dans le domaine de la cybersécurité. L'année sous revue a aussi vu le lancement d'un projet pilote de coopération avec le centre de compétence en matière de cyberdéfense basé à Tallinn.

Conseil de l'Europe La crise des migrants, la lutte contre le terrorisme, la situation en Turquie après la tentative de coup d'État et les atteintes toujours plus marquées à la sécurité des journalistes et à la liberté de presse dans de nombreux États membres ont été les principaux thèmes qui ont occupé le Conseil de l'Europe (CdE) durant l'année sous revue. Les divisions de l'Europe, notamment sur la gestion de la crise migratoire et sur les défis qui se sont fait jour depuis l'annexion de la Crimée par la Russie ont marqué d'une empreinte particulière les activités du CdE en 2016. Ces divisions font clairement apparaître les fissures de l'édifice commun créé en 1949 et l'effritement du consensus autour des valeurs et principes ancrés dans la Convention européenne des droits de l'homme. Les velléités de certains États membres de se distancier de leurs engagements envers ladite convention s'ajoutent aux défis que l'institution strasbourgeoise doit s'atteler à surmonter afin de conserver son rôle primordial de gardien des droits de l'homme en Europe et sa crédibilité. C'est dans cette optique que la Suisse soutient la proposition de mise sur pied d'un 4 e Sommet des chefs d'État et de gouvernement visant à renforcer les fondements de l'édifice.

Le CdE constitue pour la Suisse un forum primordial de discussion et d'échange au sein duquel elle bénéficie d'une réputation de partenaire fiable, crédible et efficace.

Elle le doit en particulier à la politique de recherche du consensus qu'elle y promeut et aux relations étroites qu'elle entretient avec le secrétaire général, le président de la Cour européenne des droits de l'homme, le président de l'Assemblée parlementaire ainsi qu'avec d'autres organes importants du CdE. La 126 e Session ministérielle de l'organisation s'est déroulée à Sofia en mai. À cette occasion, les délégations ont largement commenté le 3e rapport du secrétaire général intitulé «Situation de la démocratie, des droits de l'homme et de l'État de droit ­ un impératif pour la sécurité de l'Europe», rapport que le secrétaire général a qualifié de
sonnette d'alarme.

Pour sa part, la Cour européenne des droits de l'homme (Cour EDH) a poursuivi sa réforme avec succès. Le nombre de requêtes pendantes est ainsi passé en dessous de la barre des 70 000 durant l'année 2016. La Cour EDH a publié dix jugements relatifs à des requêtes contre la Suisse, dont cinq faisaient état d'au moins une violation de la convention européenne des droits de l'homme (CEDH). Ces jugements concernaient le droit au respect de la vie privée et familiale, le droit à un procès équitable, le droit à ce qu'un tribunal statue à brève échéance sur la légalité de la détention et l'interdiction de discrimination. Parmi les arrêts marquants figure l'affaire concernant le gel des avoirs en Suisse de Khalaf M. Al-Dulimi et de la société Montana Management Inc. en application de la Résolution 1483 (2003) du Conseil de sécurité de l'ONU relative aux sanctions contre l'ancien régime irakien.

Par son arrêt du 21 juin 2016, la Grande Chambre a ainsi confirmé une décision de première instance qui établissait que les requérants avaient le droit de faire contrôler par les tribunaux nationaux les mesures arrêtées en vertu des sanctions de l'ONU, et que la Suisse avait donc violé leur droit de soumettre leur cause à un tribunal en matière civile. Cet arrêt confirme l'importance cruciale aux yeux de la Cour EDH du droit d'accès à un tribunal dans les affaires relevant du droit civil. S'il ne remet pas 1244

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en cause l'application de sanctions, cet arrêt obligera à l'avenir les États membres à prêter une plus grande attention au respect des droits des personnes visées par des sanctions.

L'annexe au présent rapport fournit des informations complémentaires sur les activités du CdE en lien avec la Suisse durant l'année sous revue.

3.3.2

Sécurité internationale et menaces transnationales

Dans le contexte de ces dernières années, la politique de sécurité extérieure a pris de plus en plus d'importance. Les bouleversements survenus au Proche-Orient et en Afrique du Nord ont provoqué des états de crise et une grande instabilité à la périphérie de l'Europe (voir ch. 2.2). Le terrorisme, la prolifération des armes et les risques pesant sur la sécurité du cyberespace sont porteurs de menaces croissantes.

L'environnement stratégique de la Suisse est marqué par le niveau de sollicitation extrêmement élevé que connaît l'Europe en raison de différentes situations de crise qui, de par leur nature et leur durée, ont aussi des incidences sur notre pays. Dans ces circonstances, la Suisse peut toutefois mettre à profit sa politique étrangère indépendante et participative pour apporter de précieuses contributions à la stabilisation de la situation et à la promotion de la paix et de la sécurité. Quand il s'agit de trouver des réponses communes appropriées pour relever les défis globaux, elle accorde une grande importance à la capacité d'action des organisations internationales ainsi qu'à la coopération avec les États partenaires et la société civile. Il est aujourd'hui urgent de miser sur la collaboration et sur des solutions concertées, les divisions pouvant encore être surmontées dans le cadre d'une démarche collective et constructive en matière de politique internationale, notamment dans le cas des menaces transnationales comme le terrorisme et les cyberattaques, où il convient même d'envisager une intensification de la coopération sur les questions de sécurité.

Sécurité dans le cyberespace Le cyberespace a rapidement gagné en importance politique ces dernières années.

L'État, l'économie et la société s'appuient de plus en plus sur les technologies de l'information et de la communication et l'accès au cyberespace leur est devenu indispensable. Alors que les nouvelles technologies sont un moteur de croissance, offrant un réseau de communication mondial au service de l'économie et de la société, on assiste en parallèle à une multiplication des activités criminelles dans le cyberespace, qui devient le théâtre d'opérations conduites à des fins de renseignement ou dans un but politico-militaire. La sûreté et la stabilité du cyberespace revêtent une importance stratégique pour la Suisse, qui dépend
fortement de l'environnement numérique grâce auquel elle fait partie d'un réseau planétaire. Dans le cadre de sa politique extérieure, la Suisse s'engage en faveur d'un cyberespace ouvert, libre et sécurisé, avec des règles claires régissant son utilisation. À cet égard, elle a défini plusieurs champs d'action prioritaires au titre de sa politique extérieure et de sécurité: 1) développement et renforcement du cadre normatif sur la base du droit international public; 2) instauration d'un climat de confiance par le biais de mesures visant à promouvoir la transparence, la coopération et la stabilité; 3) développement des capacités; 4) lutte contre la cybercriminalité.

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La Suisse oeuvre au développement et au renforcement du cadre normatif relatif au cyberespace, en partant du principe que les dispositions du droit international public en vigueur doivent aussi s'y appliquer et qu'il est également important d'arriver à une conception harmonisée de l'usage qui en est fait. En 2016, elle a concentré son action sur les travaux conduits au sein du Groupe d'experts gouvernementaux de l'ONU chargé d'examiner les progrès de l'informatique et de la télématique et la question de la sécurité internationale (GEG de l'ONU). Ce groupe s'occupe en particulier de l'élaboration de normes de conduite globales pour les États et de la mise en application du droit international dans le cyberespace sur mandat du Secrétaire général de l'ONU. Pour la première fois, la Suisse a été nommée l'été dernier pour siéger pendant un an au sein du GEG de l'ONU, lequel doit terminer son rapport pour la 72e session de l'Assemblée générale des Nations Unies. Parmi les priorités de la Suisse figurent la consolidation et la concrétisation du travail de conception déjà accompli par le groupe ainsi que l'implication dans le processus de membres extérieurs au GEG de l'ONU et d'acteurs non étatiques. La démarche de développement et de renforcement du cadre normatif a également été poursuivie dans le cadre d'autres enceintes multilatérales et relations bilatérales, ainsi que par le biais d'une participation soutenue aux consultations concernant le «Manuel de Tallinn sur le droit international applicable à la cyberguerre».

L'instauration d'un climat de confiance entre les États et la mise en place de règles communes à l'échelle mondiale sont des fondements essentiels pour une coopération internationale efficace en vue de la réduction des cyberrisques. C'est pourquoi la Suisse participe activement au processus de l'OSCE visant à la mise en place de mesures de confiance, dont le but est de contribuer à améliorer la transparence, la coopération et la stabilité entre les États tout en réduisant le risque de conflits. Dans ce cadre, la Suisse a prôné la mise en oeuvre des mesures de confiance déjà adoptées et apporté son appui à l'élaboration de dispositions complémentaires. Compte tenu de la portée mondiale des cyberrisques, elle s'est également mobilisée pour promouvoir l'universalisation du processus de l'OSCE,
qui suppose notamment une collaboration plus étroite entre les organisations régionales. En outre, vu les interdépendances inhérentes au cyberespace, elle a soutenu le développement des capacités d'autres États et encouragé l'accès des acteurs nationaux aux compétences spécialisées offertes dans d'autres pays. Cette approche a vocation à renforcer la coopération internationale tout en contribuant à accroître la sécurité globale et à combler le fossé numérique. La Suisse a également lancé plusieurs projets régionaux destinés à favoriser le développement des capacités, notamment en Europe du Sud-Est, où elle a travaillé en collaboration avec l'organisation DiploFoundation. En tant que membre fondateur du Forum mondial sur la cyberexpertise (Global Forum on Cyber Expertise, GFCE), la Suisse a pris part à l'initiative Meridian visant à encourager les échanges de pratiques et méthodes éprouvées en matière de protection des infrastructures informatiques critiques. Par ailleurs, afin d'assurer le développement continu de ses propres capacités nationales, elle a intensifié sa collaboration avec des centres de recherche internationaux, dont le Centre d'excellence OTAN pour la cyberdéfense en coopération (CCDCoE) basé à Tallinn, en Estonie. Enfin, c'est aussi pour lutter contre la cybercriminalité que la Suisse s'est engagée en faveur de l'établissement d'un cadre juridique propice à une coopération internationale effi-

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cace, s'attachant ici plus particulièrement à promouvoir un élargissement et une évolution mesurée de la convention correspondante du Conseil de l'Europe24.

Lutte contre le terrorisme Depuis plusieurs années, la lutte contre le terrorisme international représente un volet important de l'engagement de la Suisse en faveur de la paix et de la sécurité dans le monde. À l'automne 2015, face aux défis croissants, le Conseil fédéral a adopté une stratégie nationale de lutte contre le terrorisme, qui associe les mesures de politique intérieure et extérieure. Conformément à cette stratégie, la Suisse conduit une politique étrangère qui poursuit notamment l'objectif de lutter contre le terrorisme et de s'attaquer à ses racines, tout en ayant pour toute première priorité de prévenir l'extrémisme violent. Son engagement dans ce domaine est abordé plus longuement au ch. 3.3.7. Veillant à défendre ses intérêts à l'échelle internationale, la Suisse est perçue comme un partenaire fiable, attaché à la défense des droits de l'homme et du droit international humanitaire, privilégiant toujours un mode de résolution des problèmes durable, intervenant sur les causes. Les mesures prises au titre de la politique extérieure recoupent les quatre champs d'action nationaux que sont la prévention, la répression, la protection et la prévention des crises.

Dans le cadre de son engagement, la Suisse a pour principale référence la Stratégie mondiale de lutte contre le terrorisme adoptée par l'ONU en 2006, dont la mise en oeuvre est réexaminée tous les deux ans. Elle l'a été de nouveau en juin dernier et, cette année, une attention toute particulière a été accordée aux questions liées à la prévention, une préoccupation centrale de la Suisse. En dehors de l'ONU, la Suisse agit aussi au sein de différents organes multilatéraux, tels que le Forum mondial contre le terrorisme (Global Counterterrorism Forum, GCTF), le Conseil de l'Europe, l'OSCE et le Groupe d'action financière (GAFI), en vue de contribuer à la définition de mesures normatives et opérationnelles. Pour la Suisse, la situation des enfants et des adolescents représente une thématique prioritaire. Dans le cadre du GCTF, elle a donc lancé une initiative concernant le droit pénal des mineurs, laquelle a débouché sur l'adoption du «Mémorandum de Neuchâtel sur les bonnes
pratiques de justice des mineurs dans le cadre de la lutte contre le terrorisme» en septembre dernier.

La Suisse estime qu'il est primordial que les mesures de lutte antiterrorisme soient compatibles avec les dispositions du droit international et fondées sur les principes de l'état de droit. Avec un groupe de pays partageant le même point de vue, elle se mobilise depuis plusieurs années en faveur d'un plus grand respect des droits procéduraux des personnes et des entités visées par le régime de sanctions ciblées du Conseil de sécurité des Nations Unies à l'encontre d'Al-Qaïda et de l'organisation «État Islamique» (EI). Elle entend notamment veiller à ce que le statut institutionnel du médiateur auquel les personnes peuvent s'adresser pour une radiation de la liste sur laquelle elles figurent en vertu de ce régime de sanctions lui permette de remplir son mandat avec efficacité et en toute indépendance. Ces thématiques ainsi que la question de la mise en oeuvre des sanctions de l'ONU à l'encontre d'Al-Qaïda et de l'EI en Suisse, notamment dans les secteurs financier et culturel, ont été débattues 24

Convention du 23 novembre 2001 sur la cybercriminalité en date, RS 0.311.43

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lors d'une visite de l'Équipe d'appui analytique et de surveillance des sanctions concernant l'EIIL (Daech), Al-Qaïda et les Taliban qui a été constituée au sein du Conseil de sécurité des Nations Unies.

Brouillage de la distinction entre guerre et terrorisme Il existe à ce jour 19 conventions universelles de l'Assemblée générale des Nations Unies ainsi que de nombreuses résolutions du Conseil de sécurité de l'ONU qui se rapportent au terrorisme dans ses différentes manifestations. Toutefois, il n'existe toujours pas de description ni de définition juridique uniformes pour caractériser ce phénomène à l'échelle internationale. Les gouvernements nationaux étant souverains quant à son interprétation, le terrorisme revêt de multiples visages. Actuellement, compte tenu de la menace globale qu'il représente, le terrorisme inspiré par le djihadisme ou s'en réclamant est, en toute logique, celui qui cristallise l'attention de la communauté internationale. Il est répandu par des mouvements tels qu'Al-Qaïda et l'EI ainsi que d'autres groupes apparentés, dont Boko Haram au Nigéria et dans la région du lac Tchad ou encore Al-Chabab dans la Corne de l'Afrique. Si cette forme de terrorisme et bon nombre de ses incidences n'ont rien de nouveau, la menace transnationale a néanmoins gagné en ampleur sous l'effet de la montée en puissance de l'EI après la proclamation du califat mi-2014. Bien que le groupe ait essuyé cette année d'importants revers en Syrie et en Iraq, ses capacités et la menace qu'il fait peser sur la sécurité internationale ne devraient pas être sous-estimées.

Depuis les attentats du 11 septembre 2001, la mondialisation du terrorisme s'est elle aussi accélérée. La mobilité des personnes, des fonds et des marchandises est allée croissant et le développement du cyberespace a été fulgurant. Le terrorisme n'aurait pas pu accéder à sa dimension actuelle sans l'Internet et les voyages à bas coût. L'EI lui-même sait d'ailleurs parfaitement exploiter les technologies modernes de l'information et de la communication. Le fait que le terrorisme puisse trouver un terreau fertile en plein coeur de l'Europe, et plus seulement dans les pays sousdéveloppés ou en proie à des conflits, est aussi un signe de sa mondialisation. Sur les quelque 30 000 combattants étrangers qui ont rejoint l'EI ou d'autres groupes
terroristes en Syrie et en Iraq, plus de 5000 proviendraient de pays européens. Des centaines d'entre eux ayant déjà regagné l'Europe, cette dernière n'en est que plus exposée à des risques d'attaques, de propagande, de recrutement, de financement et de constitution de réseaux à caractère terroriste. Il s'est aussi avéré que plusieurs auteurs d'attentats perpétrés en Europe ne s'étaient jamais rendus dans les zones de combat mais s'étaient radicalisés sur place.

S'il est vrai que la menace terroriste nourrit aussi un climat de peur dans toute l'Europe, la situation est bien plus dramatique dans les régions en guerre: en Syrie, en Iraq, au Yémen, en Libye, en Somalie et au Nord-Est du Nigéria, toutes les parties aux conflits, y compris les gouvernements, commettent de graves violations du droit international humanitaire, causant ainsi d'immenses souffrances au sein de la population civile. On y observe par ailleurs une tendance à instrumentaliser l'action humanitaire à des fins politiques ou militaires, ou à lui faire obstacle dans les mêmes desseins, ce qui est extrêmement préoccupant. Dans ces zones en guerre, la Suisse apporte son soutien à des organisations humanitaires partenaires et se mobilise activement pour qu'il soit toujours possible de conduire des opérations humanitaires 1248

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sur les territoires contrôlés par des groupes terroristes. En parallèle, elle agit aussi pour que les coupables de crimes de guerre, de crimes contre l'humanité et de génocides ne puissent bénéficier d'aucune impunité et pour que ces agissements soient sanctionnés, quels qu'en soient les auteurs.

Même si, à ce jour, les attentats organisés ou idéologiquement motivés par l'EI n'ont pas visé la Suisse, ni ses intérêts à l'étranger, notre pays fait partie du monde occidental et reste de ce fait une cible potentielle des attaques terroristes d'inspiration djihadiste. C'est pourquoi les échanges d'informations se sont considérablement intensifiés, tant au plan national qu'international. Dans le monde entier, mais surtout en Europe, la coopération entre les autorités répressives (INTERPOL, EUROPOL, EUROJUST) et les services de renseignements s'est consécutivement renforcée, au niveau régional et international. L'étroite collaboration au sein de l'espace Schengen est pour la Suisse d'une importance capitale. Ainsi, en septembre, elle a détaché un officier de liaison supplémentaire auprès d'EUROPOL pour contribuer à l'optimisation des échanges de renseignements liés à la lutte contre le terrorisme dans l'espace européen. Ces échanges doivent être d'autant plus nourris quand ils concernent des personnes qui se rendent dans une zone de conflit pour y rejoindre les rangs d'une organisation terroriste et qui repartent un jour dans leur pays de résidence ou d'origine. La protection ciblée de l'espace Schengen et de ses frontières extérieures est l'un des objectifs déclarés de la task-force interdépartementale TETRA. La Suisse ayant tout particulièrement à coeur de prévenir l'exportation du terrorisme hors de son territoire vers les régions en conflit, la task-force TETRA a notamment pour mission d'empêcher les voyages à destination de ces régions ainsi que les activités d'appui aux crimes terroristes commis à l'étranger pour lesquels la Suisse servirait de base de transit, de préparation ou de logistique.

Au niveau de l'ONU, le Conseil de sécurité a adopté une série de dispositions contraignantes de vaste portée en matière de droit pénal et de sanctions (gel des avoirs, interdiction de voyager, embargo sur les armes). Ces dispositions visent avant tout à couper les «lignes de ravitaillement» indispensables
au fonctionnement de l'EI et d'Al-Qaïda, notamment leurs sources de financement: commerce illicite de pétrole, accès au système financier international, enlèvements contre rançon, commerce illicite des biens culturels. L'UNESCO encourage tout particulièrement la lutte contre cette dernière activité, notamment dans une optique de préservation du patrimoine culturel, un aspect essentiel en matière de prévention de l'extrémisme violent.

La Suisse apporte aussi sa contribution active à la prévention du financement du terrorisme dans le cadre du GAFI, principal organe multilatéral sur le front de la lutte contre le blanchiment d'argent et le financement du terrorisme. Pour pouvoir appliquer encore plus rapidement les sanctions financières fixées par le Conseil de sécurité des Nations Unies, le Conseil fédéral a adopté le 4 mars dernier l'ordonnance sur la reprise automatique des listes de sanctions du Conseil de sécurité des Nations Unies25.

Pour les différentes unités d'organisation de la Confédération qui s'occupent de la lutte contre le terrorisme, ces développements et d'autres évolutions ont entraîné une forte augmentation de la charge de travail, à laquelle se sont ajoutées de nouvelles 25

RO 2016 671

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tâches. Fort de ce constat, le Conseil fédéral a décidé le 18 décembre 2015 de mettre à disposition les ressources nécessaires pour la création de 86 postes supplémentaires destinés à renforcer l'efficacité dans la lutte contre le terrorisme, principalement au sein du Service de renseignements de la Confédération (SRC), de l'Office fédéral de la police (fedpol) et du Corps des gardes-frontière. Les trois postes créés au DFAE ont surtout vocation à soutenir le volet préventif de la lutte antiterroriste et de la gestion des crises.

Contrôle des armements, désarmement et non-prolifération L'engagement de la Suisse dans les domaines du contrôle des armements, du désarmement et de la prévention de la prolifération des armes conventionnelles et de destruction massive ainsi que de leurs vecteurs répond à une priorité fixée par la stratégie de politique étrangère 2016­2019 en vue de renforcer la sécurité internationale et de contribuer à l'instauration d'un ordre international juste et viable. La Suisse considère que l'institution et la consolidation de normes et de régimes de traités multilatéraux appropriés sont essentielles. En sa qualité d'État neutre, elle a un grand intérêt à ce que les relations internationales s'inscrivent dans un contexte où le respect du droit international public prime sur la puissance politique ou militaire, car c'est là un gage de prévisibilité et de stabilité. Alors que les normes et institutions existantes en matière de politique de contrôle des armements et de désarmement ont été remises en cause par des menaces et dangers d'un genre nouveau, les forums de négociations multilatérales qui ont eu lieu durant l'année sous revue n'ont guère permis de produire des avancées significatives.

Initiatives portant sur les armes de destruction massive En ce qui concerne le désarmement nucléaire, la Suisse est de nouveau intervenue dans le cadre des différentes enceintes de discussion et elle a joué un rôle constructif, mais les points de blocage des processus établis n'ont toujours pas pu être levés au cours de cette année. Lors de la 70e Assemblée générale des Nations Unies (AG de l'ONU), les divergences s'étaient clairement manifestées au sein d'un groupe de travail consacré au désarmement nucléaire. Lors de la 71e AG de l'ONU, un processus de négociation visant l'interdiction des
armes nucléaires a été lancé pour 2017.

À cet égard, il a été dérogé pour la première fois à la règle du consensus qui prévaut normalement dans le domaine du nucléaire, les négociations se fondant sur une décision prise à la majorité des voix, avec l'appui des pays ne détenant pas l'arme nucléaire et contre la volonté des principaux États qui en sont dotés ainsi que de leurs partenaires et alliés. S'en tenant à sa position de principe, la Suisse a alors esquissé la possibilité d'un compromis acceptable par les deux camps en soulignant qu'un tel processus serait beaucoup plus efficace et fructueux avec la participation des États en possession de l'arme nucléaire et de ceux sous parapluie nucléaire. Ce point de vue n'ayant pas été pris en compte, la Suisse s'est abstenue lors du vote.

Dans le cadre des négociations, elle aura à coeur de se mobiliser pour tenter à nouveau d'exercer une action médiatrice et de promouvoir une approche inclusive.

En parallèle, la Suisse a continué de déployer ses efforts pour faire progresser le processus de désarmement par étapes concrètes selon le mode opératoire prévu par le traité sur la non-prolifération des armes nucléaires (TNP). C'est dans cet esprit que, lors de la 71e AG de l'ONU, elle s'est associée à des États partenaires pour 1250

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soumettre une nouvelle fois la résolution visant à réduire le niveau de disponibilité opérationnelle des systèmes d'armes nucléaires (levée de l'état d'alerte). Il a ainsi été possible de réduire encore le nombre d'absentions. Avec la Suède, la Suisse a également évoqué, dans des documents de travail et lors d'une manifestation parallèle, les dangers croissants que représentent les missiles de croisière. Elle a par ailleurs travaillé à la conception d'initiatives multilatérales entrant dans le cadre du Partenariat international pour la vérification du désarmement nucléaire (International Partnership for Nuclear Disarmament Verification, PIVDN). Avec la Norvège et un groupe suprarégional, elle a présenté à ce titre une nouvelle résolution relative au rôle de la vérification dans le désarmement nucléaire, approuvée à une large majorité par l'AG de l'ONU.

Dans le domaine de la non-prolifération, les quatrième et cinquième essais nucléaires de la République populaire démocratique de Corée ont été très largement condamnés par la communauté internationale, avec un renforcement du régime de sanctions de l'ONU à la clé. La Suisse a adhéré à ce durcissement mais se tient prête à apporter son appui à une éventuelle reprise du dialogue, comme elle l'a déjà fait dans le cadre des négociations entre les E3/EU+3 et l'Iran, qui ont permis d'aboutir à la signature de l'accord sur le programme nucléaire iranien en 2015 et à son entrée en vigueur en janvier. L'Agence internationale de l'énergie atomique (AIEA) est chargée de contrôler que l'Iran respecte ses engagements. La Suisse, qui siègera jusqu'en 2017 au Conseil des gouverneurs de l'agence, suit avec attention les comptes rendus établis dans ce cadre tout en se mobilisant en faveur d'une procédure aussi juste que possible pour la levée des sanctions dans le cadre du régime de contrôle des exportations. Elle s'est par ailleurs déclarée prête à fournir une assistance à l'Iran pour l'aider à améliorer ses normes de sûreté nucléaire.

Sur la question du renforcement de la protection des installations et matières nucléaires contre des assauts terroristes, la Suisse a exprimé son point de vue lors du Sommet sur la sécurité nucléaire (SSN), à Washington. Elle s'est de nouveau prononcée en faveur d'une approche basée sur une conception globale de la sécurité, tenant
compte à la fois des sources d'approvisionnement civiles et du matériel militaire, jusque-là négligé à l'échelle internationale. Elle a réaffirmé cette position à l'occasion de la Conférence générale de l'AIEA et de la Conférence internationale sur l'énergie nucléaire en décembre, toutefois avec un succès limité.

Durant la période sous revue, le groupe de contrôle des exportations des pays fournisseurs nucléaires (Nuclear Suppliers Group, NSG) a consacré une grande partie de son temps à l'examen des demandes d'adhésion de l'Inde et du Pakistan. La règle veut que tout membre du NSG soit aussi un État partie au TNP, ce qui n'est pas le cas des deux candidats susmentionnés. La Suisse estime que le NSG devrait englober tous les pays fournisseurs de biens nucléaires, car ce n'est qu'à cette condition que les règles de contrôle des exportations pourront être appliquées à bon escient à l'échelle mondiale. Ces dernières années, l'Inde est devenue une grande puissance nucléaire, raison pour laquelle la Suisse prône son intégration au NSG. L'accueil éventuel d'États non parties au TNP au sein du groupe n'y fait pas encore l'unanimité. C'est pourquoi la Suisse plaide activement en faveur d'une solution consensuelle visant l'établissement de critères non discriminatoires à l'égard de l'ensemble des candidats tout en garantissant le respect des principes de non-prolifération 1251

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nucléaire et de désarmement. C'est en juin 2017, à Berne, que le NSG tiendra sa prochaine assemblée plénière, présidée par la Suisse.

En novembre, dans le cadre de la huitième conférence d'examen de la Convention sur les armes biologiques (CAB), la Suisse s'est engagée en faveur d'un renforcement du processus de suivi au titre de la convention afin de pouvoir faire face aux nombreux défis liés, entre autres, au progrès des biotechnologies ou encore à la menace exercée par des acteurs non étatiques. La Suisse n'a pas réussi à mettre en oeuvre son initiative visant à créer un groupe de travail ayant pour mission permanente d'étudier les répercussions des avancées biotechnologiques et leurs incidences sur la convention, initiative sur laquelle elle avait travaillé d'arrache-pied depuis la dernière conférence de 2011. Bien que ce projet n'ait guère été remis en cause par les États parties et que sa nécessité soit globalement reconnue, il a échoué en raison des divergences entre les différents groupes d'États sur l'organisation générale des processus de suivi jusqu'à la prochaine conférence d'examen. Il aura fallu attendre le dernier jour de la conférence pour qu'un compromis minimal se dessine sur deux points: organiser une seule assemblée plénière par an au lieu de deux et prolonger tel quel le mandat du secrétariat de la CAB. En outre, la Suisse a continué de s'engager en faveur du mécanisme permettant au Secrétaire général de l'ONU d'enquêter sur les allégations d'emploi d'armes biologiques et chimiques, en appuyant notamment la poursuite d'une série de séminaires organisée par le Laboratoire Spiez, qui est une division de l'Office fédéral de la protection de la population (OFPP). Ces séminaires doivent permettre de s'assurer que les laboratoires répertoriés par les États membres de l'ONU pour l'analyse d'échantillons lors d'enquêtes sur l'emploi présumé d'armes biologiques satisfont aux exigences fixées en matière de qualité.

Depuis le mois de mai et pour deux ans, la Suisse siège au Conseil exécutif de l'Organisation pour l'interdiction des armes chimiques (OIAC), qui a pour mission de contrôler l'application de la convention sur les armes chimiques (CAC). Dans ce contexte aussi, les événements liés au conflit syrien sont au coeur de l'engagement de la Suisse. Malgré la destruction des stocks
d'armes chimiques déclarés par le pays, ces armes ont de nouveau été en usage sur son territoire au cours de l'année sous revue, en violation totale du droit international. Dans le cadre d'une mission d'investigation mandatée par le Conseil de sécurité, l'ONU et l'OIAC ont pour la première fois indiqué dans leurs conclusions que les forces armées syriennes avaient largué du gaz de chlore dans trois des neuf cas de frappe observés et que l'organisation État islamique avait utilisé du gaz moutarde en l'une de ces occasions. La Suisse a de nouveau apporté son soutien à ces missions d'enquête (parmi d'autres) de l'OIAC, tant par sa contribution financière que par la mise à disposition d'experts, auxquelles s'est ajoutée l'analyse d'échantillons, confiée au Laboratoire Spiez. Elle s'est mobilisée pour promouvoir l'application générale de la CAC au plan national dans tous les États parties, le but étant aussi de pouvoir mieux réagir à la menace émanant d'acteurs non étatiques. C'est ainsi que, par exemple, elle s'est activement impliquée dans la mise en oeuvre d'un programme de renforcement des capacités lancé avec la Namibie. Toujours dans le cadre de l'OIAC, la Suisse a aussi pris de nouvelles initiatives pour y amorcer un processus de discussion visant à instaurer la transparence sur la question des «substances chimiques destinées à neutraliser les personnes».

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Initiatives et mesures relatives aux armes conventionnelles26 En août 2016, Genève a accueilli la deuxième Conférence des États parties au traité sur le commerce des armes (TCA). Les évolutions mondiales touchant à la politique de sécurité ont confirmé la nécessité de mettre en place des normes régissant le commerce des armes conventionnelles à l'échelle universelle. La phase initiale d'établissement du TCA, principalement consacrée à des questions d'ordre administratif, a été menée à bien et il s'agit maintenant de définir les thèmes à traiter. À cet égard, la Suisse a concentré encore davantage son action sur la mise en oeuvre efficiente et universelle du traité, ce qui l'a notamment amenée à travailler activement à la création d'un groupe de travail approprié. Disposant des compétences adéquates et d'une expérience approfondie dans les domaines concernés, elle a aidé d'autres pays à s'acquitter des engagements souscrits, par exemple avec la mise en place des missions de contrôle requises en ce qui concerne le transfert transfrontalier d'armes conventionnelles. S'agissant de l'implantation du Secrétariat du TCA à Genève, la Conférence des États parties a salué la finalisation des procédures nécessaires, et notamment l'accord de siège et l'accord administratif qui ont été signés avec la Suisse le 13 juin (voir ch. 3.3.3 La Genève internationale).

La décision prise en avril par le Conseil fédéral concernant l'exportation de matériel de guerre à destination de la région du Golfe est la première d'une telle envergure et d'une telle portée depuis l'entrée en vigueur du TCA. En se référant aux dispositions de la législation sur le matériel de guerre ainsi que du TCA, le Conseil fédéral a examiné une cinquantaine de demandes d'entreprises suisses souhaitant exporter du matériel de guerre vers cette région, dans un contexte marqué par le conflit au Yémen. Lors de cet examen, il s'est appuyé sur l'art. 5, al. 1, let. a, de l'ordonnance du 25 février 1998 sur le matériel de guerre27 («maintien de la paix, de la sécurité internationale et de la stabilité régionale») pour évaluer les demandes et décider si un refus s'imposait dans certains cas où si l'autorisation pouvait être accordée, l'appréciation des risques pour la paix, la sécurité internationale ou la stabilité régionale se fondant surtout dans ce
cadre sur l'identité de l'utilisateur final et sur la nature du matériel de guerre à exporter. Il s'agissait également de mesurer le risque d'une utilisation de ce matériel pour commettre des violations du droit international humanitaire et des droits de l'homme, selon les art. 6 et 7 TCA. En vertu de l'art. 6, par. 3, TCA, l'interdiction d'exporter est absolue dès lors que des informations fiables indiquent que les biens ou les armes en question seront utilisées pour perpétrer des crimes de guerre. Le Conseil fédéral a également tenu compte de ces considérations pour statuer. Vu les opérations militaires en cours au Yémen, il n'a autorisé l'exportation de matériel de guerre que dans les cas où il ne voyait aucune raison de supposer qu'il pourrait être utilisé dans ce pays, tant du fait de sa nature que de l'identité du destinataire final.

Lors de la cinquième Conférence d'examen de la convention des Nations Unies sur certaines armes classiques (CCAC), la Suisse a lancé, sur la base d'un document de travail, une discussion sur la nécessité de tenir systématiquement compte des effets des nouveaux développements scientifiques et technologiques sur la CCAC. Elle a 26 27

Voir aussi sur ce point le ch. 3.3.4 Priorités thématiques.

RS 514.511

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réussi à inscrire ce thème à l'ordre du jour pour 2017. Elle s'est également mobilisée pour la création en 2017 d'un groupe d'experts gouvernementaux (GEG) chargé d'examiner les systèmes d'armes létales autonomes (SALA). Dans cette perspective, elle a présenté, avec un groupe d'États suprarégional coordonné par elle, des propositions concrètes pour les priorités thématiques du GEG SALA. Ce faisant, elle a mis en avant des aspects tels que l'application et le respect du droit international public, notamment les prescriptions du droit international humanitaire et l'obligation juridique correspondante, la nécessité de contrôler la compatibilité des nouvelles armes avec le droit international en vigueur ainsi que les questions de responsabilité. En outre, la Suisse et la Nouvelle-Zélande ont réussi à faire passer la tenue, en 2017, d'un débat sur le protocole III de la CCAC concernant les armes incendiaires, au cours duquel la Suisse abordera la question du bien-fondé du protocole dans le contexte de la protection des civils et des combattants.

Le système de maîtrise des armements conventionnels et de renforcement de la confiance qui prévaut en Europe depuis la fin de la guerre froide a pour fondements le traité sur les forces armées conventionnelles en Europe (FCE), le document de Vienne des négociations sur les mesures de confiance et de sécurité ainsi que le traité sur le régime Ciel ouvert (Open Skies). Le régime du document de Vienne est le seul auquel la Suisse participe de plein droit. Depuis plusieurs années, elle met un coordinateur à disposition pour les négociations menées dans ce cadre au niveau de l'OSCE. Sur le plan thématique, la Suisse s'est prononcée en faveur de la préservation et de la mise en oeuvre intégrale des acquis mais aussi d'un processus de modernisation de grande ampleur visant à conforter les mécanismes existants et à adapter le document de Vienne aux réalités politico-militaires du 21e siècle. Ce processus de modernisation des instruments, qui, outre le document de Vienne, comprennent aussi le FCE, se trouve actuellement dans une impasse politique. Déplorant cet état de fait, la Suisse a soutenu l'initiative lancée par l'Allemagne pour une reprise du dialogue sur la maîtrise des armes conventionnelles (voir ch. 3.3.1 OSCE). Elle a également fait valoir ses positions
concernant les armes légères et de petit calibre et les munitions, ainsi qu'au sujet des deux conventions d'interdiction des mines antipersonnel et des armes à sous-munition (voir ch. 3.3.4 Priorités thématiques).

Loi fédérale sur les prestations de sécurité privées fournies à l'étranger Entrée en vigueur en septembre 2015, la loi fédérale du 27 septembre 2013 sur les prestations de sécurité privées fournies à l'étranger (LPSP)28 contribue à assurer la sécurité intérieure et extérieure de la Suisse, à préserver sa neutralité, à lui permettre de réaliser ses objectifs de politique étrangère et à garantir le respect du droit international public. De nombreux entretiens bilatéraux ont été conduits avec les entreprises concernées pour les informer sur le contenu de la loi, mais aussi pour optimiser les processus et instruments internes. Par ailleurs, des normes ont été élaborées pour la formation des prestataires de services de sécurité privés dans les domaines du droit international humanitaire et des droits de l'homme. Des prestations telles que la protection de personnes ou la surveillance de biens et d'immeubles dans des environnements complexes ont représenté près d'un tiers des plus de 300 activités déclarées avant la fin de l'année 2016. Ces dernières intègrent également une pro28

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portion importante de services de renseignements privés ainsi que de prestations de soutien logistique, de conseil et de formation destinées à des forces armées et de sécurité (domaines dans lesquels le DFAE a travaillé en étroite collaboration avec le SECO). Fin 2016, les autorités compétentes au sein du DFAE avaient ouvert six procédures d'examen en vertu de l'art. 13 LPSP: dans un cas, une interdiction a été prononcée, dans deux autres, les déclarations des entreprises concernées ont été retirées et, dans les deux derniers, le DFAE a fait savoir aux entreprises que les prestations en question pouvaient être fournies. Une seule procédure d'examen était encore en suspens à la fin de l'année. À l'échelle internationale, la Suisse a profité de sa présence au sein de diverses enceintes pour souligner la nécessité d'une meilleure réglementation et surveillance des prestataires de services de sécurité privés.

En outre, les exigences minimales fixées par la Confédération aux prestataires de services de sécurité qu'elle emploie à l'étranger ont été durcies, le but étant de relever le niveau de qualité des prestations privées de cette nature au niveau mondial.

3.3.3

L'ONU et la Genève internationale

L'ONU est la seule enceinte où peuvent se discuter un grand nombre de questions d'importance mondiale dans un cadre rassemblant tous les pays et les acteurs intéressés. L'ONU possède ainsi une universalité unique en ce qui concerne les thèmes qu'elle traite, ses membres et son rayonnement international. Aucune autre enceinte ne jouit d'une telle légitimité. Pour cette raison, l'ONU constitue, pour la Suisse aussi, un forum privilégié où poursuivre ses intérêts de politique extérieure. L'ONU permet à la Suisse d'oeuvrer à la solution de problèmes globaux et d'assumer sa part de responsabilité dans la bonne marche des affaires mondiales. L'engagement de la Suisse à long terme à l'ONU jusqu'à 2022 s'articule autour des deux axes stratégiques que sont d'une part la paix et la sécurité internationale et, d'autre part, la réforme de l'ONU. Depuis son adhésion en 2002, notre pays apporte sa contribution concrète au sein de l'ONU, que ce soit dans la prévention et la résolution des conflits, dans la promotion des droits de l'homme, dans le développement durable ou encore dans le domaine humanitaire. La Suisse s'engage également pour valoriser et renforcer le centre de gouvernance mondiale qu'est la Genève internationale, dont le parc immobilier sera d'ailleurs en grande partie rénové ces prochaines années avec un soutien financier suisse important. Pendant l'année sous revue, la Suisse a mis l'accent sur les processus suivants dans le contexte onusien: lancement de l'appel du 13 juin pour une meilleure prévention des conflits, engagement pour le premier Sommet humanitaire mondial d'Istanbul (WHS), ainsi que la Conférence de Genève sur la prévention de l'extrémisme violent.

Engagement en faveur de la paix et de la sécurité dans le cadre de l'ONU Comme les années précédentes, la Suisse a accueilli en 2016 plusieurs processus de paix. Les entretiens sur la Syrie, notamment, se sont poursuivis à Genève (voir ch. 3.3.4 Priorités géographiques), et ceux sur la question chypriote au Mont-Pèlerin dans le canton de Vaud, le tout sous l'égide de l'ONU. En plus de mettre à disposi-

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tion des experts, la Suisse a apporté, dans ce cadre, une aide en matière d'organisation et de logistique.

Dans les domaines de la paix et de la sécurité, la Suisse a focalisé son action à l'ONU sur la promotion de la prévention des conflits et l'a articulée autour de deux axes: d'une part l'engagement à renforcer les structures et les instruments de prévention des conflits de l'ONU, de l'autre une meilleure prise en compte des interdépendances entre les trois piliers de l'ONU, afin que l'organisation puisse agir de manière coordonnée et selon un vaste éventail de sujets en cas de crise. La Suisse s'est systématiquement positionnée en ce sens dans les différents organes de l'ONU. Elle s'est par ailleurs engagée dans la prévention de l'extrémisme violent (voir ch. 3.3.2 Lutte contre le terrorisme; et ch. 3.3.7 PVE). Elle a également maintenu le financement d'un expert en médiation au cabinet du directeur général de l'ONU à Genève, ce qui a permis de renforcer fondamentalement les capacités locales de l'organisation en matière de médiation et de prévention des conflits. La Suisse entend par ailleurs consolider les capacités préventives de l'ONU à long terme en encourageant une collaboration plus étroite entre les acteurs dans les domaines de la paix et de la sécurité et dans celui des droits de l'homme. À l'occasion du dixième anniversaire du Conseil des droits de l'homme en juin, elle a appelé les États membres de l'ONU à s'engager en faveur d'une meilleure prise en compte des droits de l'homme dans la prévention des conflits, notamment en intensifiant les échanges entre le Conseil des droits de l'homme à Genève et le Conseil de sécurité à New York (appel du 13 juin).

Le sujet a été traité plus en profondeur dans le cadre d'une manifestation de haut niveau organisée en septembre par la Suisse en marge de l'ouverture de la 71e Assemblée générale de l'ONU.

Dans le domaine de la consolidation de la paix, la Suisse s'est engagée en 2016 en faveur de la notion de paix durable, afin que l'action de l'ONU puisse porter ses fruits non seulement après la fin d'un conflit armé, mais aussi dans le sens d'une approche préventive avant et pendant un conflit. Elle a oeuvré pour la prise en compte dans cette notion d'aspects tels que la prévention, les droits de l'homme, la justice transitionnelle et le rôle
des femmes dans les conflits. En mai, elle a rejoint le tout nouveau «groupe des amis de la paix durable» (Group of friends of sustaining peace) afin d'oeuvrer dans ce cadre pour une application large de la notion de paix durable au sein de l'ONU. En tant que présidente de la «Peace Building Commission Burundi» de la Commission de consolidation de la paix de l'ONU, elle a par ailleurs apporté un soutien concret aux activités de l'ONU dans ce domaine, notamment en entretenant des contacts avec toutes les parties prenantes et en assurant des échanges réguliers. Dans le cadre de sa présidence, elle s'est efforcée de donner des impulsions positives en ce qui concerne la situation des droits de l'homme, le dialogue politique et le développement socio-économique.

Durant l'année sous revue, la Suisse a défendu avec succès devant l'Assemblée générale de l'ONU, conjointement avec INTERPOL et d'autres États partenaires, une résolution, laquelle a été acceptée à l'unanimité et qui vise à améliorer le soutien apporté à l'ONU dans les domaines de la criminalité organisée transnationale grâce aux bases de données d'INTERPOL.

L'exploitation et les abus sexuels restent une difficulté de taille pour l'ONU. Ce sujet ne concerne pas seulement ses missions de paix, dont la presse s'est fait l'écho 1256

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ces derniers mois, mais le système des Nations Unies tout entier, par exemple les opérations civiles ou programmes et fonds. La Suisse soutient la politique de la tolérance zéro du secrétaire général et milite au sein de différents organes onusiens pour son application et son renforcement, notamment en ce qui concerne les ressources nécessaires. Plusieurs recommandations relatives à la prévention et à la sanction de ces abus ont été formulées dans le cadre de la résolution S/RES/2272 du Conseil de sécurité et de plusieurs rapports du secrétaire général de l'ONU (A/71/97 notamment). La Suisse soutient ces recommandations et suit attentivement leur mise en oeuvre à l'échelle du système. Elle est très attentive aussi à la question de la responsabilité pénale du personnel de l'ONU, qui doit être réglée pour ce type d'infraction également.

Droits de l'homme et Conseil des droits de l'homme Pour la période 2016 à 2018, la Suisse siège pour la troisième fois au Conseil des droits de l'homme, principal organe de l'ONU en matière de droits de l'homme, qui a fêté en 2016 son dixième anniversaire. La Suisse, qui avait joué un rôle clé dans sa création, profite de l'occasion pour renforcer son soutien et pour évoquer les réussites et les enjeux futurs de l'organe, enjeux dont la réalité sur le terrain révèle l'ampleur. Les violations des droits de l'homme restent largement répandues, en particulier dans les contextes fragiles, les États en faillite et les régimes autoritaires.

L'universalité de ces droits est d'ailleurs régulièrement remise en cause. Aussi la Suisse est-elle convaincue que le Conseil des droits de l'homme est plus nécessaire que jamais et qu'il devrait veiller encore plus à l'avenir à l'application de ses décisions et de ses recommandations dans les différents pays. Compte tenu de ces éléments, elle a oeuvré pendant l'année sous revue à une implication accrue des acteurs non étatiques tels que la société civile et l'économie privée.

La Suisse dresse un bilan globalement positif des activités du conseil, de sa dynamique et de ses instruments de surveillance. Alors qu'on pouvait observer une polarisation persistante et que la Suisse était souvent contrainte de concentrer ses efforts sur le maintien de la norme internationale atteinte jusque-là, des progrès substantiels ont été accomplis:
par exemple, la Suisse a, en collaboration avec d'autres pays, présenté avec succès pour la quatrième fois une résolution sur la promotion et la protection des droits de l'homme lors de manifestations pacifiques.

Le conseil y a pris connaissance d'un ensemble de recommandations pratiques sur les moyens de mieux respecter et protéger les droits de l'homme dans ce genre de contexte. La Suisse a aussi fait avancer, au conseil, la question prioritaire de la justice transitionnelle et développé en particulier l'aspect de la prévention des atrocités et d'autres violations graves des droits de l'homme. Elle fait en outre partie des auteurs de nouveaux projets de résolution sur les droits de l'homme et l'environnement, sur l'éducation et la formation en matière de droits de l'homme et sur l'amélioration de la protection des biens culturels dans les conflits armés. Elle s'est par ailleurs impliquée activement dans le traitement de nombreuses situations propres à des pays et nécessitant une attention particulière de la part de la communauté internationale. À cet égard, elle s'est particulièrement attachée au renforcement de la responsabilité et à la lutte contre l'impunité.

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Renforcement de la capacité d'action de l'ONU Réforme de la gestion: la Suisse a soutenu les différents efforts de réforme visant à doter l'ONU d'une administration moderne et efficace. Elle a notamment oeuvré pour que les projets de réforme engagés soient poursuivis au-delà du changement de secrétaire général, en se focalisant plus particulièrement sur le personnel, principale ressource de l'organisation et élément très important pour la Genève internationale.

Elle a soutenu des réformes dans les domaines de la rémunération et de la mobilité internationale du personnel. Par ailleurs, elle s'est engagée, du point de vue de l'incidence de ce projet pour le site de Genève, dans les négociations relatives à la proposition du secrétaire général de réorganiser les services du secrétariat; elle a participé activement au débat concernant la mise en oeuvre du nouveau système de planification des ressources intégré (une plate-forme informatique nommée «UMOJA») et de la stratégie informatique générale, sans compter son engagement actif dans le cadre de la revue quadriennale du système opérationnel de l'ONU. La Suisse figure parmi les principaux bailleurs de fonds des Nations Unies puisqu'elle occupe le dix-septième rang des contributions obligatoires au budget ordinaire et le quatorzième des contributions obligatoires au budget des opérations de maintien de la paix. Elle dispose ainsi d'une voix importante sur les questions de réforme. En matière budgétaire, elle défend une utilisation efficace et avisée des ressources financières.

ACT/élection SG: dans le cadre de la réforme des méthodes de travail du Conseil de sécurité, la Suisse coordonne le groupe Responsabilité, Cohérence et Transparence (ACT), composé de 25 membres. En 2016, ACT a été particulièrement actif sur la question du processus de nomination du prochain secrétaire général de l'ONU.

Ainsi, le groupe avait fait des propositions au Conseil de sécurité pour un processus de nomination plus structuré et plus transparent. Plusieurs de ses propositions ont été mises en oeuvre et, pour la première fois dans l'histoire de l'ONU, des auditions ont été organisées en 2016 avec les douze candidates et candidats au poste de secrétaire général. Les candidats ont par ailleurs participé à un débat retransmis par une chaîne internationale. À l'issue de ce
processus, le Conseil de sécurité a pu adopter une résolution recommandant formellement à l'Assemblée générale la nomination d'Antonio Guterres. Le prochain mandat attendu devrait durer du 1er janvier 2017 au 31 décembre 2021. Par son rôle dans le cadre d'ACT, la Suisse a pu contribuer à un processus de nomination plus structuré et transparent.

Présence de la Suisse dans les organisations internationales et candidatures de ressortissants suisses Parmi les priorités de la Suisse en 2016 concernant l'ONU figurait aussi sa candidature au Conseil de sécurité pour les années 2023 et 2024. Elle s'y est essentiellement préparée en pratiquant un échange d'expériences avec des membres actuels du conseil et avec d'autres candidats. Des travaux préparatoires internes à l'administration ont également été accomplis. La Suisse est représentée au Conseil des droits de l'homme pendant la période 2016­2018 et au Conseil économique et social des Nations Unies (ECOSOC) en 2015 et en 2016. Elle a assumé la vice-présidence de l'ECOSOC de juin 2015 à juin 2016, assurant à ce titre la direction du segment humanitaire. Son élection à la Commission des statistiques de l'ONU pour la période 1258

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2017­2020, à la Commission du développement social pour la période 2017­2021 et à la Commission de la science et de la technologie au service du développement pour la période 2017 à 2020 lui permettra de défendre dans différents organes de l'ONU des intérêts spécifiques relevant de la politique extérieure. La Suisse siégera au conseil d'administration et au Conseil d'exploitation postale de l'Union postale universelle (UPU) pour la période 2017 à 2020. Au sein de l'Office de secours et de travaux des Nations Unies pour les réfugiés de Palestine dans le Proche-Orient (United Nations Relief Agency for Palestine Refugees in the Near East, UNRWA), elle assume de l'été 2016 à l'été 2017 la présidence de la commission consultative.

Ce rôle est une confirmation supplémentaire de son engagement au sein de cette agence de l'ONU, après que le Suisse Pierre Krähenbühl en a été nommé commissaire général en 2013. La Suisse préside aussi le groupe consultatif du Fonds central d'intervention d'urgence (Central Emergency Response Fund, CERF), qui accorde chaque année 500 millions de francs à des organisations humanitaires de l'ONU.

Dans le cadre de la promotion de la relève, elle a pu placer au sein du système onusien plusieurs jeunes diplômés. Elle avait par ailleurs proposé d'accueillir à Bâle le secrétariat du Forum international des régulateurs indépendants de l'audit (International Forum of Independent Audit Regulators, IFIAR). Les membres du forum ayant opté pour un autre siège, ils ont proposé de confier à la Suisse, très impliquée au sein de l'IFIAR et dont la ville candidate était arrivée en deuxième position, la vice-présidence pour la mandature 2017 à 2019. Conformément au système de rotation, elle assurera ensuite la présidence de l'IFIAR pour deux ans à partir de 2019.

Le déploiement tant quantitatif que qualitatif de citoyens suisses dans les instances internationales assure la défense des intérêts suisses. Cela a également été le cas durant l'année écoulée, où la Confédération a soutenu la candidature de ressortissants suisses à des postes dans des organisations internationales importantes. Marcel Jullier a été élu au Comité consultatif pour les questions administratives et budgétaires (CCQAB) pour la période 2017 à 2019. Le CCQAB est chargé d'examiner, pour le compte de la Cinquième Commission
(questions administratives et budgétaires) de l'Assemblée générale de l'ONU, toutes les propositions du secrétaire général relatives aux finances, au personnel et à la gestion de l'organisation, notamment le budget du secrétariat de l'ONU et de ses entités, dont un grand nombre ont leur siège à Genève. Marcel Jullier est le premier Suisse à intégrer le CCQAB.

Pascal Clivaz a quant à lui été réélu au poste de vice-directeur général de l'UPU pour la mandature 2017 à 2020. Les candidatures suivantes à des postes prestigieux ont également abouti: Daniel Neuenschwander, chef de la Division spatiale du Secrétariat d'État à la formation, à la recherche et à l'innovation depuis 2009, a été nommé à la tête de la Direction des lanceurs de l'Agence spatiale européenne (ESA). Il est le premier Suisse à diriger un programme de l'ESA depuis sa création en 1975. Hans Dreyer, jusque-là responsable du secteur Santé des plantes et variétés de l'Office fédéral de l'agriculture (OFAG), a été nommé directeur de la Division de la production végétale et de la protection des plantes de l'Organisation des Nations Unies pour l'alimentation et l'agriculture (FAO). La Suisse n'avait plus été représentée à la FAO à ce niveau depuis 2010. Le Conseil des droits de l'homme a nommé Nils Melzer rapporteur spécial de l'ONU sur la torture et autres peines ou traitements cruels, inhumains ou dégradants. Jean Ziegler a été élu au Comité consultatif 1259

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du Conseil des droits de l'homme de l'ONU comme expert indépendant pour la période 2016­2019. Hans-Jörg Bannwart a été élu pour assumer un second mandat (2017 à 2019) au sous-comité pour la prévention de la torture (SPT). Par ailleurs, le Suisse Jakob Kern dirige le bureau du Programme alimentaire mondial (PAM) à Damas.

UNESCO29 L'Organisation des Nations unies pour l'éducation, la science et la culture (UNESCO), dont le mandat est de promouvoir la paix et le développement durable à travers l'éducation, la science et la culture, participe d'une part aux réponses à apporter face à certains enjeux sécuritaires et humanitaires immédiats, et d'autre part est engagée dans les premiers efforts de mise en oeuvre et de suivi de l'Agenda 2030.

Dépositaire des principaux instruments normatifs au niveau global en matière de culture, l'UNESCO plaide pour le respect du droit international et cherche à mobiliser l'expertise et à coordonner les efforts en ce qui concerne la lutte contre la destruction ou le trafic illicite de biens culturels. La Suisse suit activement le travail en cours, tant au niveau de l'UNESCO que des diverses enceintes multilatérales ­ telles que le Conseil de sécurité de l'ONU qui a reconnu le lien explicite entre le trafic illicite des biens culturels et le financement du terrorisme. Un groupe de coordination regroupant des services de tous les Départements de la Confédération a été mis en place par le DFAE pour assurer une approche intersectorielle stratégique cohérente dans ce contexte. L'UNESCO mène également campagne pour prévenir l'extrémisme violent (PVE) notamment par l'éducation, ainsi que pour lutter contre les discriminations et la radicalisation. Les évènements et produits de l'UNESCO font l'objet d'un suivi attentif de la Suisse. À titre d'exemple le matériel pédagogique et les orientations de politique éducative en matière de PVE ont été diffusés, et un appel ministériel à l'action pour une éducation inclusive et équitable pour tous les apprenants dans un environnement préservé de la discrimination et de la violence a été soutenu.

Les objectifs de développement durable (ODD) sont considérés par l'organisation comme sa nouvelle base de travail privilégiée. L'UNESCO a d'ores et déjà endossé le rôle que lui reconnaît la communauté internationale et qui consiste à coordonner
au niveau mondial la mise en oeuvre de l'objectif relatif à l'éducation. La Suisse reste un partenaire engagé à cet égard par sa participation à l'alliance globale pour l'alphabétisation ou à la plate-forme pour l'éducation et la formation aux droits de l'homme, par son soutien à l'élaboration du rapport mondial de suivi de l'éducation (RMSE) et aux instituts spécialisés de l'UNESCO ­ sachant que les questions de PVE et d'inclusion mentionnées entrent aussi dans ce cadre. Par ailleurs, la Commission suisse pour l'UNESCO oeuvre à promouvoir la prise en compte des cibles de l'ODD4 également en Suisse, dès lors que l'Agenda 2030 se veut universel.

29

L'engagement de la Suisse dans le domaine de la culture dans le cadre de l'UNESCO est traité au ch. 3.5.6.

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La Genève internationale La Genève internationale, le coeur opérationnel des Nations Unies, permet à la Suisse de gagner en influence au niveau international et de faire valoir ses positions avec une efficacité accrue. La Suisse bénéficie ainsi d'un accès facilité aux institutions globales et d'une grande visibilité sur la scène internationale. La concentration unique de différents acteurs à Genève crée pour la communauté internationale un potentiel significatif de synergies. Genève a ainsi pu s'imposer comme un centre de gouvernance mondiale reconnu, accueillant des conférences internationales et des réunions diplomatiques de haut rang. Preuve en est l'établissement dans cette ville du secrétariat du traité sur le commerce des armes (TCA) en mars 2016. La Suisse a élaboré, en étroite collaboration avec la direction de la conférence des parties, des propositions en vue d'un accord de siège et d'un accord administratif, lesquelles ont été adoptées dans le cadre d'une réunion extraordinaire des parties. Les deux accords ayant pu être signés en juin, la Suisse a ainsi permis au secrétariat du TCA de démarrer ses travaux rapidement. Elle a par ailleurs contribué à la mise en oeuvre du traité en apportant son aide au secrétariat (voir ch. 3.3.2 Contrôle des armements, désarmement et non-prolifération).

La mise en oeuvre du message concernant les mesures pour renforcer le rôle de la Suisse comme État hôte, adopté par le Conseil fédéral en novembre 2014 et examiné par le Parlement en juin 2015, a débuté en janvier 2016 avec la mise à disposition de ressources financières additionnelles. De ce fait, la mise en oeuvre des mesures, débutée en 2013, s'est intensifiée. Les principaux axes d'action concernent le renforcement des synergies et la création de lieux de réflexion, notamment à travers l'établissement de plate-formes couvrant différents domaines thématiques et qui mettent à profit les contributions des pôles d'excellence de la Genève internationale.

Ainsi, des plate-formes mises en place dans les domaines de l'humanitaire, de la science et du désarmement ont démarré leurs activités en 2016 alors que les plateformes existantes dans les domaines de la consolidation de la paix, de l'internet et de la santé globale ont renforcé les leurs. Grâce au soutien de la Suisse, le bureau des Nations unies à
Genève disposera d'une nouvelle unité pour promouvoir une mise en oeuvre multisectorielle de l'Agenda 2030 du développement durable et ainsi tirer profit de la présence à Genève de différents acteurs. ONU Femmes dispose depuis octobre 2016 d'un nouveau bureau de liaison à Genève, également grâce au soutien de la Suisse. L'implantation de cette entité spécialisée à Genève contribuera activement au plaidoyer engagé par la Suisse en faveur de l'égalité entre les sexes et l'émancipation des femmes. Ces priorités constituent un objectif stratégique de la coopération internationale de la Suisse pour les années 2017­2020. À cela s'ajoute, pour mettre en valeur la richesse en «matière grise» de la Genève internationale, la collaboration avec des think tanks suisses et étrangers, notamment l'organisation d'une conférence en avril avec l'Université des Nations Unies (UNU) et différentes manifestations du Think Tank Hub Geneva, notamment sur la question des migrations. Quant aux efforts visant à ce que tous les États membres de l'ONU soient si possible représentés par une mission permanente à Genève, ils ont porté leurs fruits: la République coopérative du Guyana a ouvert une telle représentation en octobre.

Afin de permettre aux organisations internationales sises à Genève de disposer d'un parc immobilier moderne et efficace, la Suisse soutient des projets de construction et 1261

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de rénovation de leurs bâtiments de siège par l'octroi de prêts à des conditions avantageuses. C'est dans ce cadre que le Parlement a décidé le 17 mars d'octroyer un prêt d'un montant de 59,4 millions de francs à la Fédération internationale des Sociétés de la Croix-Rouge et du Croissant-Rouge pour la reconstruction de son siège. Par ailleurs, cinq autres demandes de soutien ont été déposées par des organisations internationales: l'ONU a ainsi sollicité un prêt d'un montant de 400 millions de francs pour la rénovation complète du Palais des Nations, ainsi que la construction d'un nouveau bâtiment pour son siège. Conformément à la décision du Parlement du 29 septembre, la Confédération contribuera au prêt consenti à l'ONU à hauteur de 292 millions de francs, les 108 millions restants étant fournis par la ville et le canton de Genève. Le 29 septembre, le Parlement a aussi octroyé un prêt de 76,4 millions de francs à l'Organisation mondiale de la santé pour la construction d'un nouveau bâtiment pour son siège, et un autre de 70 millions de francs à l'Organisation internationale du travail pour la rénovation de son siège. Par ailleurs, le Conseil fédéral a demandé au Parlement, dans son message du 20 avril, un prêt de 9,9 millions de francs en faveur du Comité international de la Croix-Rouge pour la rénovation de son siège. Le message y relatif a été approuvé par le Parlement en décembre. En juin, l'Union internationale des télécommunications a opté en faveur de la démolition et reconstruction du bâtiment de son siège le plus ancien, et donc de son maintien à Genève. Elle a déposé une demande pour un prêt sans intérêt de 150 millions de francs, y compris 12 millions pour financer les études préparatoires.

Le Conseil fédéral a approuvé le 24 août l'octroi du prêt pour le financement des travaux préparatoires. Le Parlement a approuvé le prêt y relatif en décembre.

3.3.4

Promotion de la paix

Marquée par la persistance d'un grand nombre de conflits armés et de catastrophes humanitaires, notamment au Proche et Moyen-Orient, en Ukraine et dans le bassin méditerranéen, ainsi que par la détérioration de la situation des droits de l'homme dans de nombreux pays, l'année qui s'est écoulée a de nouveau été extrêmement difficile (cf. ch. 2.2). Compte tenu de ces circonstances, les instruments de la Suisse en matière de politique de paix ont été mis en oeuvre dans des contextes très divers, et souvent dans des conditions délicates. Malgré des revers, 2016 a aussi été porteuse d'évolutions positives et propices à la promotion de la paix et de la sécurité humaine, par exemple au Myanmar et en Colombie, des pays auxquels la Suisse a pu apporter sa contribution.

Priorités géographiques30 Balkans occidentaux: pour les pays de cette région, la perspective d'une intégration à l'UE agit comme un puissant moteur de réformes économiques, sociales et politiques. La situation politique qui prévaut dans les Balkans occidentaux n'en demeure pas moins instable, avec des tensions permanentes entre pays voisins. S'ajoute à cela le poids de l'histoire, qui se manifeste notamment lors du traitement du passé ou dans les rapports entre la Serbie et le Kosovo, des dossiers sur lesquels la Suisse est 30

L'engagement de la Suisse en Ukraine et au Caucase est abordé au ch. 3.3.1 OSCE.

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engagée depuis longtemps. Au cours de l'année sous revue, elle a apporté son appui à un processus de dialogue de haut niveau en vue de la normalisation des relations entre ces deux pays et de l'intégration des Serbes du Kosovo aux institutions kosovares. Des échanges entre les représentants de la société civile serbe kosovare et le premier ministre du Kosovo ainsi que d'autres membres influents du gouvernement ont ainsi pu avoir lieu pour la première fois en juin. Pour contribuer au règlement de la crise politique au Kosovo, la Suisse a également fourni une aide à la conduite d'un processus de médiation local réunissant les quatre principaux partis politiques albanais du Kosovo. Elle a par ailleurs apporté son concours au traitement du passé dans la région, notamment dans le cadre de procès pour crimes de guerre ou d'exhumations de corps enterrés dans des fosses communes, et elle a dépêché des experts au Kosovo et en Serbie pour la mission EULEX de l'UE ainsi qu'aux côtés du PNUD et de l'OSCE.

Afrique du Nord: la violence armée s'intensifie en Libye et des tendances autoritaires resurgissent en Égypte. En Tunisie, des signes positifs sont à relever en matière de transition mais l'expérience a montré que les phases de transition sociale pouvaient s'étendre sur plusieurs dizaines d'années. Dans ce contexte, la Suisse s'est engagée en faveur de l'ouverture politique, du renforcement de la société civile et du respect de la dignité humaine au titre de sa stratégie interdépartementale de coopération 2011­2016. L'engagement de la Suisse en faveur de la paix en Afrique du Nord est abordé en profondeur au ch. 2.

Israël et Territoire palestinien occupé (TPO): en 2016, il n'a toujours pas été possible d'avancer sur la voie du règlement du conflit israélo-palestinien. L'expansion de la colonisation israélienne dans le TPO, y compris à Jérusalem-Est, n'a en rien diminué, faisant ainsi reculer les espoirs d'une solution fondée sur la coexistence de deux États. Le clivage politique qui subsiste du côté palestinien n'a pas non plus contribué à favoriser la reprise de pourparlers de paix prometteurs. Dans ce contexte, la Suisse a poursuivi son action de promotion de la paix en Israël et dans le TPO. Par ailleurs, en Israël comme dans le TPO, la Suisse a soutenu les initiatives conduites par des organisations
locales pour contribuer à la résolution du conflit dans le cadre d'un travail de relations publiques, en développant de nouveaux angles d'approche et en réduisant les obstacles à la solution à deux États, tels que les implantations israéliennes dans le TPO. L'engagement de la Suisse en faveur de la paix dans la région est abordé en profondeur au ch. 2.

Moyen-Orient: dans cette région du monde, la situation reste marquée par le conflit persistant en Syrie, également lourd de conséquences pour les États voisins, et par la crise en Iraq, avec la montée en puissance de l'organisation «État islamique» et d'autres groupes armés. Malgré les efforts soutenus de la communauté internationale et quelques avancées isolées, aucune solution politique durable n'a pu être trouvée en 2016 pour mettre fin à ces conflits. Bon nombre des activités internationales se sont déroulées sur son sol, ce qui lui a permis de conforter son rôle à l'international en tant que site d'accueil pour les pourparlers de paix. Aux côtés d'ONG nationales ou internationales, la Suisse a également oeuvré à la transformation des conflits sur place. L'engagement de la Suisse en faveur de la paix au Moyen-Orient est abordé en profondeur au ch. 2.

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Sahel: la situation générale au Sahel ne s'améliore pas, malgré le déploiement de forces armées nationales et internationales en constante augmentation. Le Mali, le Niger, le Nord du Nigéria, le Tchad et le Sud de la Libye sont en proie à des violences qui rendent le travail de la Suisse plus difficile, mais d'autant plus urgent et nécessaire. Le soutien à des espaces de dialogue dans ces zones de conflit, généralement mis en place par la société civile, nécessite l'appui des gouvernements. Un dialogue permanent est donc entretenu avec ces derniers. Depuis 2013, l'envoyé spécial de la Suisse pour le Sahel assure des contacts à haut niveau, qui soutiennent ce dialogue. Comme plusieurs des conflits en jeu sont transnationaux, la Suisse s'efforce d'adapter la dynamique de ses projets à leur dimension régionale. Cet engagement régional s'inscrit dans le cadre des «Axes stratégiques de la Suisse au Sahel» pour les années 2014 à 2018. L'engagement de la Suisse en faveur de la paix au Sahel est abordé en profondeur au ch. 2.

Grands Lacs: en République démocratique du Congo comme au Burundi, l'année 2016 a été caractérisée par des tensions et des violences liées aux élections. Face à cette situation, la Suisse a encouragé le dialogue politique par la création de plateformes d'échange, la mise à disposition d'experts en médiation et la facilitation de rencontres entre des représentants de la sphère politique, de la société civile et de la communauté internationale. Elle a étayé ces initiatives par une contribution à la défense des droits de l'homme en assurant un monitoring des violations, en soutenant des défenseurs des droits de l'homme, en formant des avocats et en intervenant au sein d'enceintes multilatérales telles que le Conseil des droits de l'homme des Nations Unies. Par ailleurs, la Suisse préside la Configuration Burundi de la Commission de consolidation de la paix de l'ONU.

Corne de l'Afrique: cette région est le théâtre de nombreux conflits. En Somalie, la milice islamiste Al-Chabab menace le fragile processus de construction de l'État. Le litige frontalier opposant l'Éthiopie à l'Érythrée demeure irrésolu et déclenche régulièrement des affrontements militaires. Quant au Soudan du Sud, il est de nouveau confronté à un risque de conflit violent entre différents dirigeants locaux. La Suisse a
apporté son soutien à la mise en oeuvre de l'accord de paix d'août 2015 pour le Soudan du Sud, où elle a également encouragé le processus de réconciliation nationale et aidé les dignitaires traditionnels à assumer leur rôle dans le cadre de l'autogestion locale. Du fait des émeutes survenues dans ce pays, la Suisse a été contrainte d'y suspendre temporairement ses activités de politique de paix en juillet et août. Bien que ces dernières aient pu reprendre début septembre, elles sont extrêmement difficiles à mener à bien dans ce contexte fragilisé. L'engagement de la Suisse en faveur de la paix dans la Corne de l'Afrique est abordé en profondeur au ch. 2.

Zimbabwe: la situation économique et financière s'est encore détériorée en 2016, ce qui a entraîné de vives tensions sociales et politiques. Sur la base de ce constat, la Suisse a apporté son soutien technique et financier à des initiatives de dialogue inclusif, ce qui s'est notamment traduit par la mise en place d'un cadre d'échanges permettant aux parties prenantes de discuter des questions d'importance nationale, y compris dans le domaine économique. Pour mémoire, la Suisse s'est engagée dès 2014 en faveur de la prévention des conflits et de l'ouverture démocratique de ce pays. Elle s'est depuis lors attachée à promouvoir la mise en oeuvre de la constitu1264

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tion, notamment dans le domaine du traitement du passé, en appuyant la mise en place de la Commission pour la paix et la réconciliation nationale.

Asie du Sud et du Sud-Est: après la victoire écrasante de la Ligue nationale pour la démocratie (LND) emmenée par la lauréate du Prix Nobel de la paix, Aung San Suu Kyi, le nouveau gouvernement du Myanmar s'est mis au travail en avril. Il a notamment eu à coeur de redéfinir le processus de paix et de le légitimer en modifiant la composition des organes de décision et de négociation et en engageant le dialogue avec les groupes n'ayant pas encore signé l'accord de cessez-le-feu. Plusieurs voyages d'étude en Suisse sur le thème du fédéralisme ont permis à des représentants de l'armée, des groupes armés et des femmes issues de communautés ethniques, des milieux politiques et de la société civile de participer à la préparation des négociations politiques entre le gouvernement et les groupes armés. Par ailleurs, la Suisse a fourni une assistance discrète à la définition du processus et de la stratégie de négociation. Dans l'État d'Arakan situé dans le Sud-Ouest du pays, où les tensions ethnico-religieuses se sont attisées durant l'année sous revue entre la majorité bouddhiste et la minorité musulmane, la Suisse fournit une aide humanitaire et soutient le dialogue interconfessionnel. Dans ce contexte, elle a mandaté des experts pour définir les options envisageables pour faire face au problème des déplacés internes.

Au Sri Lanka, le Parlement a été investi du statut d'assemblée constituante début 2016 pour pouvoir modifier la Constitution en fonction des besoins des différents groupes ethniques et assurer ainsi un meilleur partage du pouvoir. En mettant des experts à disposition, la Suisse a contribué à la valorisation des expériences et des connaissances des neuf conseils provinciaux au profit du processus de décentralisation.

Colombie31: à la demande du haut-commissariat colombien pour la paix, la Suisse a fourni un appui technique à l'élaboration d'un accord de cessez-le-feu bilatéral et définitif entre le gouvernement colombien et la guérilla des FARC, qui, adopté en juin, a ouvert la voie à la conclusion d'un accord de paix final, à même de mettre fin à plus de cinquante ans de conflits entre les deux parties. La délégation gouvernementale, et en
particulier les forces armées, ont bénéficié de ce soutien technique entre 2012 et 2016. La Suisse a également permis à six militaires colombiens de suivre une formation auprès de Swissint concernant l'observation et le monitorage d'un cessez-le-feu. En parallèle, elle a activement soutenu les efforts, la participation ainsi que le renforcement des capacités de la société civile en vue d'une mise en oeuvre éventuelle de cet accord. Dans ce contexte, la Suisse a par exemple soutenu la mise en place d'un cadre de coordination au sein de la société civile qui avait pour but de favoriser une compréhension aussi large que possible du processus de paix.

La police nationale colombienne a également bénéficié d'un appui spécifique sur cette thématique. La Suisse s'est aussi résolument engagée en faveur de la protection des défenseurs des droits de l'homme et des communautés indigènes et afrocolombiennes dans la région du Pacifique. En matière d'économie et de droits de l'homme, à l'instar des années précédentes, la Suisse a appuyé une initiative multi31

En ce qui concerne les développements politiques en Colombie ainsi que le rôle de la Suisse dans le contexte de l'accord de paix, voir ch. 3.2.4.

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acteurs qui a permis de renforcer le respect du droit international humanitaire et des droits de l'homme auprès des entreprises privées. Enfin, outre une contribution à l'application de la loi de 2011 sur les victimes et la restitution des terres, la Suisse a contribué au processus de constitution d'une mémoire historique commune aux victimes du conflit armé, et accompagné un dialogue constructif entre les représentants de différents secteurs de la société sur le thème du traitement du passé. A la demande des forces armées, la Suisse a également contribué à générer une coopération constructive entre cette entité et la future Commission Vérité.

Priorités thématiques Médiation et aide à la médiation: dans le cadre de son action, la Suisse s'est plus particulièrement concentrée sur le Myanmar, la Syrie, la Colombie et l'Ukraine ainsi que sur d'autres situations de conflit en Afrique (Burundi), en Asie (Philippines) et en Europe (Kosovo). Elle a poursuivi sa collaboration fructueuse avec des partenaires suisses et internationaux, dont l'ONU, l'OSCE et le Mediation Support Project. Elle a progressé dans sa démarche de professionnalisation de la médiation, notamment en étoffant le programme de cours correspondant. En collaboration avec les EPF, elle travaille à la mise en place d'une filière de Master of Advanced Studies en cours d'emploi consacrée à la médiation internationale au service du règlement des conflits et de la promotion de la paix, avec pour objectif de pouvoir affecter encore davantage de personnel qualifié à des missions dans ce domaine à l'avenir.

Avec l'aide de l'Allemagne, elle a par ailleurs organisé une formation à la médiation destinée aux diplomates. Le programme d'enseignement «Peace Mediation Course» a pu être reconduit et, pour la première fois, c'est en Suisse que s'est déroulé le cours de médiation de haut niveau de l'ONU, proposé en collaboration avec cette dernière. Enfin, la Suisse a apporté d'importantes contributions à l'élaboration de la politique de médiation multilatérale.

Promotion et protection de la démocratie, des élections et de la séparation des pouvoirs: pour contribuer à la prévention et à la résolution des conflits, la Suisse a continué à fournir son expertise et ses bons offices en appui à divers processus électoraux et constitutionnels. En Tunisie et au
Myanmar par exemple, les experts suisses ont contribué à nourrir le dialogue et la réflexion d'acteurs gouvernementaux, politiques et de la société civile sur le processus de réforme après des décennies de dictature, en traitant notamment du fédéralisme et de la décentralisation.

Dans ces pays et dans d'autres, comme le Zimbabwe, un soutien a également été fourni pour améliorer la capacité des tribunaux à gérer les plaintes électorales ainsi que la coopération entre autorités électorales et observateurs afin de remédier au manque de crédibilité du processus électoral. Une déclaration d'intention a été signée avec les services du Parlement tunisien en vue de proposer à ce dernier une expertise qui permettra de promouvoir la mise en place de procédures de délibération transparentes, participatives et efficaces. Grâce à ses publications sur le thème des processus démocratiques et à la formation continue de médiateurs et d'experts cantonaux et fédéraux, la Suisse accroît ses capacités dans un domaine où elle est très sollicitée.

Gestion des conflits à dimension religieuse: forte de son savoir-faire en matière de médiation dans des contextes religieux, la Suisse est intervenue au Sahel en 2016.

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Elle y a travaillé avec différents érudits musulmans qui, ayant une influence sur de jeunes membres de groupes violents, ont pu leur inculquer des arguments religieux en faveur du respect du droit international humanitaire dans les conflits armés et contre l'extrémisme violent. De plus, en Afrique du Nord et au Moyen-Orient, la Suisse a oeuvré à la création d'un espace de dialogue inclusif entre des représentants emblématiques des communautés religieuse et laïque pour les amener à rompre avec les pratiques de marginalisation et de stigmatisation réciproques. Un processus de médiation sur le statut des femmes conduit par la Suisse au Maroc a par exemple contribué à l'abolition des préjugés entre les participants laïques et religieux.

Protection des droits des minorités ethniques, religieuses, linguistiques et autres32: La protection des droits des minorités est inscrite dans le droit international et réitérée notamment dans la déclaration y relative des Nations Unies de 1992. Les diversités ethniques et religieuses sont deux composantes essentielles du pluralisme dans nos sociétés contemporaines. Pourtant, l'évolution du climat politique dans diverses régions du monde ainsi que la montée de l'extrémisme violent et l'instabilité engendrée par les conflits mettent à mal les droits des minorités religieuses et autres. Les agressions perpétrées par des groupes tels que l'EI visent parfois explicitement ce type de communautés et débouchent quelquefois sur des événements choquants, comme le massacre des Yézidis en 2014 à Sinjar, en Iraq. Dans certaines régions du Proche-Orient, les minorités chrétiennes sont particulièrement menacées et doivent fuir. Il arrive cependant que ce soient les acteurs étatiques qui limitent les droits de minorités, cette restriction pouvant notamment prendre la forme d'obstacles administratifs lors du mariage ou de punitions sévères en cas de conversion, mais aussi se faire sentir dans le monde du travail et en cours de formation. Relevons par ailleurs que les violations des droits des minorités s'inscrivent souvent dans un contexte où le respect des droits de l'homme laisse à désirer. La promotion de la liberté de croyance ­ indépendamment de toute profession de foi ­ ainsi que la protection de minorités religieuses et autres font partie intégrante de la politique extérieure
de la Suisse.

Dans certains cas, les minorités forment des gouvernements autoritaires qui règnent sur des majorités. Du point de vue suisse, ce n'est pas l'appartenance à une minorité, mais la vulnérabilité, qui constitue le critère déterminant. Il importe dès lors de protéger en priorité les personnes vulnérables. La Suisse s'attache par conséquent à préserver les droits fondamentaux des groupes de population les plus vulnérables, indépendamment de critères religieux, ethniques, sexuels ou autres. Dans le contexte mondial actuel, nombre de différents groupes de personnes font l'objet de discrimination: les Yézidis, certains courants chrétiens, les Baha'is ou les Rohingya, par exemple.

La Suisse s'engage également dans la lutte contre le racisme et la xénophobie et encourage la protection des droits fondamentaux de minorités ethniques particulièrement vulnérables. À Homs, en Syrie, elle apporte ainsi son appui à l'Église orthodoxe syrienne qui a entrepris de créer un centre destiné à fournir un soutien psychosocial aux enfants traumatisés par la guerre et déplacés à l'intérieur de leur pays. Ce 32

L'engagement suisse en faveur des minorités religieuses et autres dans le cadre de l'aide humanitaire est décrit au ch. 3.4.2.

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centre est ouvert aux membres de toutes les communautés confessionnelles, en particulier aux chrétiens, aux sunnites et aux alaouites. En Iraq, la Suisse finance un projet des organisations Cease Fire Center for Civilian Rights, Minority Rights Group et de la Sinjar Foundation for Human Development, créée par des Yézidis.

Ces organisations aident la société civile à défendre les droits des groupes de population vulnérables, en particulier les déplacés internes, les membres de minorités et les femmes.

La Suisse met à profit les consultations politiques bilatérales ainsi que les dialogues spécifiques pour aborder les droits de l'homme et la lutte contre la detiscrimination.

Au niveau international, elle soutient les résolutions correspondantes du Conseil des droits de l'homme et de l'Assemblée générale des Nations Unies, de même que les efforts menés dans ce domaine par le Conseil de l'Europe et l'OSCE. En 2016, la Suisse a par exemple signé à nouveau la résolution de l'ONU sur la liberté de religion ou de conviction et la déclaration des droits des personnes appartenant à des minorités nationales, ethniques, religieuses et linguistiques. Durant le dialogue interactif avec la rapporteuse spéciale de l'ONU sur les questions relatives aux minorités, la Suisse a en outre fait une déclaration concernant le rapport de celle-ci consacré à la discrimination basée sur l'appartenance à une caste.

Durant sa présidence de l'OSCE, la Suisse avait co-organisé à Berlin une conférence sur l'antisémitisme en novembre 2014. En 2016, elle a encouragé l'échange d'expériences entre les États qui avaient pris part à cette conférence. En collaboration avec la Norvège, elle a mis sur pied, en janvier, un séminaire international sur les minorités ethniques et religieuses. Cette rencontre avait pour but de faire émerger de nouvelles idées et initiatives destinées à protéger les droits de minorités. Enfin, la Suisse a soutenu un projet commun du Haut-Commissariat des Nations Unies aux droits de l'homme (HCDH) ainsi que du canton et de la ville de Genève, qui a été réalisé durant le forum annuel de l'ONU sur les questions relatives aux minorités.

Au niveau du Conseil de l'Europe, la Suisse a élaboré en 2016 son 4 e rapport périodique de mise en oeuvre de la convention-cadre pour la protection des minorités nationales,
dont l'adoption par le Conseil fédéral est prévue au début 2017. Dans ce rapport, elle examine notamment la situation de la communauté juive de Suisse, reconnue comme minorité nationale.

Genre et conflit: une participation effective des femmes aux processus de paix permet d'en renforcer la viabilité. Les violences commises en temps de guerre touchent les deux sexes, mais pas de la même manière ni dans les mêmes proportions. C'est pourquoi il faut intégrer les sexospécificités dans toutes les initiatives globales de traitement et de règlement des crises ou des conflits armés. Ce principe est au coeur de la résolution 1325 du Conseil de sécurité des Nations Unies concernant les femmes, la paix et la sécurité ainsi que du plan d'action national de la Suisse, dont la mise en oeuvre s'est poursuivie en 2016. L'importance du rôle des femmes et de la dimension de genre pour la prévention de l'extrémisme violent (PEV) correspond à une nouvelle priorité de la Suisse au titre de sa politique de paix. Avec l'appui des participants à la Conférence de Genève sur la prévention de l'extrémisme violent qui s'est tenue en avril, ce thème a aussi pu trouver sa place dans les débats conduits au sein du Conseil de sécurité de l'ONU.

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Armes de petit calibre et munitions, déminage humanitaire33: le processus politique associé à la Déclaration de Genève sur la violence armée et le développement a rempli sa mission. La promotion de sociétés pacifiques et ouvertes est inscrite dans l'Agenda 2030 en tant que facteur essentiel de développement durable. Dans ce contexte, la Suisse a continué de se mobiliser en 2016 pour lutter contre le commerce illicite d'armes légères et de petit calibre et contre l'utilisation abusive de ces armes et de leurs munitions, une action qu'elle a notamment menée en soutenant des projets en Afrique centrale, ainsi qu'en Afrique occidentale, où elle a également encouragé la ratification du traité sur le commerce des armes. Dans le cadre de son initiative relative aux munitions, la Suisse a collaboré avec un groupe informel d'États pour définir des mesures concrètes destinées à endiguer la prolifération des munitions et à prévenir les accidents, en attachant une attention toute particulière à la mise en application rigoureuse et durable des normes existantes en matière de munitions, notamment dans les contextes fragiles. En mobilisant des experts et en apportant un soutien financier aux organisations partenaires sur le terrain, la Suisse a aussi contribué à promouvoir le développement des capacités locales dans divers pays d'Europe du Sud, d'Afrique et du Moyen-Orient pour y renforcer la sécurité d'entreposage, de gestion et de destruction des stocks d'armes et de munitions. Les activités de la Suisse en matière de déminage humanitaire suivent les axes définis dans sa stratégie 2016­2019 en la matière. C'est dans ce cadre qu'elle a notamment financé des projets concrets dans les pays concernés (Afghanistan, Bosnie et Herzégovine ou Colombie, par exemple) et mis à disposition des experts de l'Armée suisse pour des programmes de déminage humanitaire de l'ONU, par exemple en République démocratique du Congo (MONUSCO), au Soudan du Sud (UNMISS) et au Sahara occidental (MINURSO), ainsi qu'au siège des Nations Unies à New York, sans oublier le détachement d'une experte civile du DFAE sur le site du service de déminage de l'ONU à Genève.

Centres de Genève: conformément à l'arrêté fédéral du 24 septembre 2015, la Suisse apporte son soutien aux Centres de Genève pendant une période de quatre ans (2016­2019) et à
hauteur d'un montant de 129 millions de francs. Le Centre de politique de sécurité (GCSP), le Centre international de déminage humanitaire (CIDHG) et le Centre pour le contrôle démocratique des forces armées (DCAF) sont des centres de compétences qui jouissent d'une grande visibilité et d'une renommée internationale. Par leurs activités, ils participent aux efforts visant à réformer la gouvernance et l'architecture multilatérale dans les domaines de la promotion de la paix et de la sécurité, tout en confortant le positionnement de la Suisse et du pôle genevois. En 2016, la mise en oeuvre des mesures dictées par le message relatif au crédit-cadre 2016­2019 pour les trois centres de Genève34 a notamment eu pour priorité de promouvoir une intensification de la collaboration et une exploitation des synergies entre les trois centres regroupés dans la Maison de la Paix, où s'est aussi tenue la rencontre «International Security Forum» (ISF), une contribution de la Suisse au Partenariat pour la paix de l'OTAN (voir ch. 3.3.1).

33 34

Sur ce sujet, voir aussi ch. 3.3.2 Contrôle des armements, désarmement et nonprolifération.

Cf. message du 19 novembre 2014 concernant un crédit-cadre pour la poursuite du soutien aux trois centres de Genève 2016 à 2019 (14.091), FF 2014 8855.

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Promotion militaire de la paix: durant l'année sous revue, l'armée suisse s'est de nouveau engagée au service de la promotion de la paix dans le monde. Dans ce cadre, près de 285 de ses membres ont été mobilisés, principalement dans la région des Balkans (Kosovo ­ KFOR) et en Bosnie et Herzégovine (EUFOR Althea), où des militaires armés pour leur propre protection ont été stationnés (voir ch. 3.2.2).

Des observateurs militaires et officiers d'état-major non armés ont participé aux missions de surveillance de la trêve assurées par l'ONU (ONUST) en Israël, en Syrie et au Liban, en République démocratique du Congo (MONUSCO), au Soudan du Sud (UNMISS), au Mali (MINUSMA), au Sahara occidental (MINURSO) et au Cachemire (UNMOGIP). Par ailleurs, des instructeurs suisses sont intervenus dans des centres régionaux de formation pour la promotion de la paix au Ghana (Kofi Annan International Peacekeeping Training Centre) et au Kenya (International Peace Support Training Centre). Dans le cadre du «Projet de partenariat triangulaire de l'ONU», l'armée suisse fournit désormais une aide à la formation d'unités du génie en Afrique orientale.

Opérations civiles de maintien de la paix: le détachement d'experts civils au sein d'organisations internationales et pour des opérations de maintien de la paix fait partie des instruments éprouvés dont dispose la Suisse pour mener à bien sa politique de promotion de la paix et des droits de l'homme. Elle en a de nouveau fait usage en 2016 pour s'engager en des lieux et dans des domaines correspondant à ses priorités géographiques et thématiques. Dans le cadre du conflit persistant en Ukraine, la Suisse a continué de mobiliser jusqu'à seize experts pour la mission spéciale d'observation de l'OSCE, y compris le chef de mission suppléant, et pour la mission d'observation de l'OSCE à la frontière russo-ukrainienne, dont le chef de mission (voir ch. 3.3.1). En outre, la Suisse participe désormais à la mission de conseil de l'UE sur la réforme du secteur de la sécurité en Ukraine par l'entremise de l'un de ses experts. En vue de la consolidation de la paix et de la reconstruction des structures étatiques en Afrique, elle a aussi détaché des experts civils et de la police auprès de l'ONU pour des opérations de maintien de la paix se déroulant notamment au Mali, au Libéria, en Côte
d'Ivoire et au Soudan du Sud. De même, la Suisse est aussi engagée dans la nouvelle mission de l'UE consacrée au renforcement des capacités au Mali pour laquelle elle a délégué un spécialiste. En 2016, 180 de ses experts en promotion civile de la paix et des droits de l'homme sont intervenus dans un total de 215 missions multilatérales ou bilatérales de courte ou longue durée dans 39 pays et 7 États hôtes d'organisations internationales, ce qui a représenté la mobilisation simultanée de 87 personnes en moyenne, dont 41 % de femmes. Parmi ces personnes, 35 étaient spécialisées dans le conseil en sécurité humaine au niveau bilatéral. La participation aux missions d'observation électorale conduites par l'OSCE, l'UE et l'Organisation des États américains (OEA) fait traditionnellement partie des priorités de la Suisse au titre de son engagement. En 2016, 47 de ses 180 experts ont pris part à 11 missions de cette nature dans le cadre de 11 détachements individuels dans 71 pays.

Traitement du passé et prévention des atrocités: dans le domaine du traitement du passé et de la prévention des atrocités, la Suisse a poursuivi très activement ses efforts de soutien à des pays qui, sortant d'un conflit ou d'un régime autoritaire, doivent faire face à une histoire marquée par des violations massives des droits de l'homme ou de graves infractions au droit international humanitaire. Aux Philip1270

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pines, la Commission pour la justice transitionnelle et la réconciliation, présidée par la Suisse, a remis aux parties à l'accord de paix pour la région de Bangsamoro (le gouvernement et le Front Moro islamique de libération) son rapport final contenant une série de recommandations innovantes. En Colombie, dans le cadre de son travail sur l'héritage des violences du passé, la Suisse a poursuivi sa démarche de politique mémorielle avec les forces de sécurité. Pour sa 7 e édition, le cours annuel sur le traitement du passé a été suivi par une trentaine de hauts responsables gouvernementaux venus des Philippines, de la Thaïlande, du Sri Lanka, du Zimbabwe et de la Colombie. Au niveau multilatéral, une résolution sur les droits de l'homme et la justice transitionnelle présentée par la Suisse, l'Argentine et le Maroc a été adoptée par le Conseil des droits de l'homme de l'ONU lors de sa 33e session. La Suisse a aussi co-organisé, avec les Philippines, la deuxième conférence internationale entrant dans le cadre de l'initiative «Global Action Against Mass Atrocity Crimes», qu'elle préside depuis son lancement en 2013. Cette conférence, qui a eu lieu à Manille en début d'année, a réuni 52 États et 60 représentants d'organisations internationales et de la société civile.

3.3.5

Droits de l'homme, état de droit

Promotion et protection des droits de l'homme: la Stratégie droits de l'homme du DFAE 2016­2019 définit les instruments et principes de l'engagement de la Suisse en matière de droits de l'homme et en précise les objectifs stratégiques. Ces derniers portent sur trois axes. Le premier concerne la promotion de l'universalité, de l'interdépendance et de l'indivisibilité des droits de l'homme; le deuxième la cohérence du cadre de référence international et le renforcement des institutions et mécanismes de droits de l'homme, et le troisième le renforcement de l'engagement et la prise en compte des acteurs-clés dans le domaine des droits de l'homme. Mené dans un contexte international exigeant où les violations des droits de l'homme sont nombreuses, cet engagement exige une démarche coordonnée de l'ensemble de l'administration fédérale et nécessite de recourir à des instruments bilatéraux et multilatéraux ainsi que de collaborer avec des acteurs étatiques et non étatiques. La mise en oeuvre de la stratégie est soutenue par des plans d'action et des stratégies qui portent sur les priorités thématiques de la Suisse, à l'image de la Stratégie du DFAE pour l'égalité des chances et les droits des femmes 2017­2020.

L'abolition mondiale de la peine de mort est une priorité de la politique suisse des droits de l'homme, tant au niveau bilatéral que multilatéral. L'action de la Suisse est guidée par le plan d'action du DFAE pour l'abolition mondiale de la peine de mort.

En 2016, la Suisse a continué ou nouvellement entamé des échanges constructifs, parfois confidentiels ou informels, avec différents pays ouverts à un échange bilatéral sur ce sujet, comme la Chine, les États-Unis, l'Inde, l'Indonésie, le Pakistan, le Sri Lanka, le Vietnam et le Zimbabwe. Elle est intervenue auprès de pays où des personnes ont été exécutées ou dans lesquels les exécutions ont repris après un moratoire. La Suisse a également soutenu deux nouvelles publications, dont Pathways to Abolition, qui illustrent comment des États appartenant à diverses régions du monde ont réussi à se défaire de la peine de mort à des époques distinctes, y compris récemment. L'exposition phare Windows on Death Row du dessinateur suisse 1271

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Patrick Chappatte, laquelle porte sur les couloirs de la mort aux États-Unis, a poursuivi son itinéraire à travers différents États américains et a également été présentée en Suisse et dans d'autres pays. En outre, la Suisse a joué un rôle de premier plan dans l'adoption d'une nouvelle résolution de l'ONU sur le moratoire sur la peine de mort, soutenue par une nette majorité d'États membres. La Suisse a également soutenu des initiatives allant dans ce sens au sein du monde francophone et a poursuivi son engagement pour l'abolition de la peine de mort au Conseil des droits de l'homme de l'ONU et à l'OSCE. Le Congrès mondial triennal contre la peine de mort dont la sixième édition a eu lieu en juin à Oslo constitue un événement clé du mouvement abolitionniste international. La Suisse a participé au congrès et utilisé cette plate-forme pour promouvoir de nouveaux partenariats et de nouvelles stratégies en faveur de l'abolition universelle de la peine de mort.

D'une manière générale, les droits de l'homme sont abordés lors de tous les échanges bilatéraux que le DFAE mène avec d'autres États. En 2016, la Suisse a en outre abordé la question des droits de l'homme dans le cadre de consultations politiques bilatérales avec l'Afrique du Sud, le Bahreïn, la Corée du Nord, l'Inde, l'Iran, le Kazakhstan, le Kirghizistan, le Mexique, le Nigéria et le Tadjikistan. De nouvelles sessions des dialogues bilatéraux sur les droits de l'homme ont également eu lieu avec la Chine, la Russie, le Sénégal et le Vietnam. La Suisse a par ailleurs encouragé les collaborations entre experts ainsi que les efforts déployés par la société civile en ce qui concerne les droits de l'homme et d'autres thèmes prioritaires dans les pays concernés, comme au Nigéria, où la Suisse a mené un projet en collaboration avec la police nationale et la société civile afin de renforcer les compétences des forces de police en matière de respect et de promotion des droits de l'homme.

Au cours de l'année sous revue, les instances multilatérales globales et régionales ont continué de constituer un instrument essentiel de la politique des droits de l'homme de la Suisse, lui permettant de réunir des coalitions et ainsi d'amplifier la portée, l'influence et l'efficacité de ses initiatives. À l'ONU, la Suisse a saisi l'occasion des dix ans du Conseil
des droits de l'homme (CDH) pour plaider avec son «appel du 13 juin» pour un renforcement institutionnel et la prise en compte des droits de l'homme au sein de l'architecture onusienne (voir ch. 3.3.3 Droits de l'homme et Conseil des droits de l'homme). Tel est également l'objectif du Dialogue sur les droits de l'homme de Glion, dont la quatrième édition a été organisée par la Suisse en mai. La Suisse a présenté une nouvelle résolution sur l'une de ses priorités thématiques, la protection des droits de l'homme dans le contexte des manifestations pacifiques, qui a été adoptée en mars par le Conseil des droits de l'homme. Elle a également poursuivi ses efforts pour la protection des défenseurs des droits de l'homme, qui luttent en particulier contre la torture, pour l'égalité des sexes et pour les droits des femmes. Enfin, la Suisse a plaidé en faveur d'une prise en compte renforcée des droits de l'homme dans la politique internationale en matière de drogues à l'occasion de la session extraordinaire de l'Assemblée générale de l'ONU en avril.

En 2016, la Suisse a renforcé son engagement en faveur du respect des droits de l'homme par le secteur privé. Un plan d'action national pour la mise en oeuvre de Principes directeurs des Nations Unies relatifs aux entreprises et aux droits de l'homme a été adopté en décembre par le Conseil fédéral. Fruit de consultations 1272

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menées avec toutes les parties prenantes, ce plan d'action national répond au postulat Von Graffenried 12.3503 (Une stratégie Ruggie pour la Suisse). La Suisse a également intensifié son engagement en faveur d'initiatives multipartites pour l'intégration des Principes directeurs de la part de différents secteurs. Elle a ainsi participé à l'élaboration d'un guide relatif au négoce des matières premières. Par ailleurs, elle a contribué à la mise en place en septembre de procédures de monitoring pour l'Association du Code de conduite international des entreprises privées de sécurité ainsi qu'à la mise en oeuvre pratique des Principes volontaires sur la sécurité et les droits de l'homme, qui s'adressent au secteur extractif. La Suisse est également en première ligne d'un processus multipartite visant à renforcer la prise en compte des droits de l'homme dans l'ensemble du cycle d'organisation des grands événements sportifs. Ce processus réunit des fédérations sportives, des sponsors, des organisations internationales, des gouvernements, des comités d'organisation, des ONG et des représentants syndicaux. Dans ce cadre, la Suisse a participé à une conférence à Washington en octobre. Enfin, le Conseil fédéral a contribué en juin au renforcement de l'ancrage institutionnel des droits de l'homme en Suisse et de la cohérence entre politique intérieure et extérieure en la matière en décidant de l'établissement d'une future institution nationale des droits de l'homme.

Egalité des genres et droits des femmes: comme l'a démontré sa participation active à la 60e session de la Commission de la condition de la femme de l'ONU en mars, la Suisse continue de renforcer son engagement en faveur de l'égalité des genres et des droits des femmes. Elle a aussi intensifié l'intégration de ce thème lors d'échanges bilatéraux. Durant la 65e session du Comité pour l'élimination de la discrimination à l'égard des femmes (CEDEF) qui s'est tenue en novembre, la Suisse a présenté ses 4e et 5e rapports sur la mise en oeuvre de la Convention sur l'élimination de toutes formes de discrimination à l'égard des femmes. Le DFAE a élaboré sa première stratégie de politique étrangère sur l'égalité des genres et les droits des femmes. Elle a pour but de renforcer l'engagement de la Suisse en faveur de l'égalité des genres et la protection
des droits des femmes dans tous les domaines de sa politique extérieure. Elle vise en outre à renforcer la cohérence de l'engagement suisse et à intégrer plus systématiquement une perspective de genre dans ses activités, tout en déterminant des domaines prioritaires. Ces derniers sont les renforcements de l'autonomisation économique et de la participation politique des femmes, la lutte contre toutes les formes de violence basées sur le genre et la protection des droits en matière de santé sexuelle et reproductive.

Politique humanitaire, migration et lutte contre la traite d'êtres humains: les multiples conflits armés et violations des droits de l'homme et du droit international humanitaire survenus en 2016 ont touché directement les populations civiles de nombreux pays. C'est la raison pour laquelle la Suisse s'est engagée en faveur du respect du droit international humanitaire et de l'amélioration des conditions générales qui régissent l'action humanitaire lors du premier Sommet mondial sur l'action humanitaire qui s'est déroulé en mai, conformément à la Stratégie de la Confédération pour la protection des civils dans les conflits armés 2013­2017. Elle s'est également impliquée dans la création d'un cadre de coopération à l'échelle mondiale pour la prévention des déplacements forcés, la protection et la promotion de l'autonomie économique et sociale des personnes déplacées (voir ch. 3.3.7 Réfugiés et migrants). Dans la lutte contre la traite des êtres humains, la Suisse participe au 1273

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développement du cadre normatif et politique international et à sa mise en oeuvre.

Une conférence internationale sur la traite des êtres humains le long des routes migratoires a été organisée en novembre à Vienne, en collaboration avec la rapporteuse spéciale de l'ONU et le représentant spécial pour la lutte contre la traite des êtres humains de l'OSCE. Membre actif de la conférence des États parties à la convention des Nations Unies contre la criminalité transnationale organisée, la Suisse a contribué par ses initiatives à la définition de normes et de directives destinées à améliorer la mise en oeuvre de la convention incluant le protocole contre la traite des êtres humains et le protocole contre le trafic illicite de migrants. Dans le cadre de la lutte contre la traite des êtres humains, les efforts ont également porté sur le développement de la coopération internationale, en particulier avec la Roumanie, la Bulgarie et le Nigéria, mais aussi avec INTERPOL. C'est dans ce contexte que s'est déroulée en octobre à Lugano la quatrième Conférence mondiale INTERPOL sur la traite des êtres humains. À l'échelon national, le comité interdépartemental de pilotage du Service de coordination contre la traite d'êtres humains et le trafic de migrants a adopté le nouveau plan d'action national suisse contre la traite des êtres humains pour les années 2017 à 2020.

3.3.6

Droit international, droit international humanitaire et justice pénale internationale

Le droit international défend des valeurs chères à la Suisse: la paix, la sécurité, les droits humains. Il est particulièrement important pour la Suisse que les rapports entre pays ne soient pas basés sur l'exercice de la force, mais sur les principes de la coopération et des règles de droit sur lesquelles les États se sont mutuellement entendus.

Un ordre juridique international fiable permet le bon fonctionnement de l'économie et offre aussi aux individus des garanties. Par exemple, lorsque la Suisse a ratifié les conventions internationales de l'ONU ou la convention européenne des droits de l'homme, elle s'est engagée envers sa population et envers les autres États à protéger les droits de l'homme. Le droit international impose aux États l'obligation et le devoir de respecter, protéger et instaurer les droits de l'homme pour les groupes et les individus sur son territoire. Il offre un cadre partagé par tous pour les droits et les obligations inscrits dans le droit national. La liberté d'expression, le choix de fonder une famille ou celui d'une confession, le droit à l'égalité ou à la protection contre la discrimination figurent au nombre des droits fondamentaux garantis par le droit international. Les individus reçoivent ainsi l'assurance qu'ils vivront en sécurité dans leur pays et à l'étranger, et que les abus et les violations de leurs droits ne resteront pas impunis. De cette manière, la Suisse s'engage pour que les droits de l'homme soient respectés sur son territoire, mais aussi au-delà de ses frontières, en soutenant le développement et l'application du droit international ­ pour un monde plus juste où règnent la paix et la stabilité.

Droit international humanitaire En 2016, il est aussi urgent que difficile d'exiger l'application et le renforcement systématiques du droit international humanitaire. Si le cadre juridique établi par le droit international humanitaire est resté adéquat, ses règles ont souvent été bafouées 1274

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par les parties en conflit. Les acteurs ­ étatiques et non étatiques ­ en présence ont recours à des moyens de plus en plus radicaux pour conduire la guerre, au mépris des règles humanitaires les plus fondamentales. Des armes chimiques interdites ont notamment été utilisées, et les attaques contre des hôpitaux, des écoles ou des biens culturels sont monnaie courante dans plusieurs conflits. Comme en témoignent les conflits armés en cours en Syrie, au Yémen, en Ukraine, ou au Soudan du Sud, ce sont les populations civiles qui en paient le plus lourd tribut. Devant cette situation, l'enjeu le plus pressant n'est pas de développer de nouvelles règles, mais d'assurer un meilleur respect des règles existantes. Réagissant aux nombreuses violations graves du droit international humanitaire, la Suisse a rappelé avec insistance la nécessité de respecter les conventions de Genève.

Depuis 2012, la Suisse et le CICR oeuvrent pour l'institution d'un nouveau forum étatique de renforcement du droit international humanitaire dans le cadre des conventions de Genève. Sur mandat de la 32e Conférence internationale de la CroixRouge et du Croissant-Rouge, la Suisse et le CICR ont poursuivi leur activité de médiation en 2016. Ils ont notamment convié tous les États à poursuivre les discussions fin novembre à Genève. Ces entretiens ont permis de concrétiser les modalités de poursuite des négociations sur les fonctions et les caractéristiques d'un forum étatique et de baliser les pistes qui mèneront à la 33e Conférence internationale organisée en 2019. Peu après, la Suisse a par ailleurs soutenu le CICR dans l'organisation de la quatrième Réunion universelle des 108 commissions nationales du droit international humanitaire à Genève. À cette occasion, les débats ont porté sur l'amélioration de la protection par les lois et les politiques nationales. La Suisse avait déjà réaffirmé sa volonté de poursuivre son engagement lors du Sommet mondial sur l'action humanitaire qui s'est déroulé en mai à Istanbul (voir ch. 3.4.2).

La Suisse a par ailleurs continué à plaider en faveur du respect du droit international humanitaire dans de nombreux domaines thématiques. Co-présidente avec le CICR du Forum du Document de Montreux, elle a poursuivi en 2016 ses efforts pour élargir le cercle d'États soutenant le document de Montreux sur
les obligations juridiques pertinentes et les bonnes pratiques pour les États en ce qui concerne le recours à des opérations des entreprises militaires et de sécurité privées pendant les conflits armés. Actuellement, le document de Montreux est soutenu officiellement par 54 États et trois organisations internationales (OSCE, OTAN, UE). La Suisse a également prêté une attention particulière aux défis du droit international humanitaire liés à l'utilisation des nouvelles technologies. Dans le cadre de la convention des Nations Unies sur certaines armes classiques (CCAC), la Suisse a fourni des informations concrètes sur le respect du droit international humanitaire en matière de systèmes d'armes autonomes et formulé des propositions très remarquées sur la voie à suivre à l'avenir (voir ch. 3.3.2 Contrôle des armements, désarmement et nonprolifération). Lors de la cinquième Conférence d'examen de la CCAC, elle a souligné, aux côtés d'autres États, la nécessité d'accorder au respect du droit international humanitaire la priorité qu'il mérite. Enfin, la Suisse s'est engagée pour le respect et le renforcement du droit international humanitaire en accueillant le dixième atelier pour officiers supérieurs sur les règles internationales régissant les opérations militaires (Senior Workshop on International Rules governing Military Operations, SWIRMO) organisé par le CICR fin septembre à Lucerne. Des généraux et officiers de haut rang de plus de 70 pays ont participé à cette manifestation.

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Justice pénale internationale Le bilan de la prévention et de la répression des crimes de génocide, des crimes contre l'humanité et des crimes de guerre en 2016 est mitigé. Il est particulièrement préoccupant de constater que les protagonistes de nombreux conflits armés ­ notamment en Syrie ­ continuent à jouir d'une impunité totale. Les États rechignent trop souvent à poursuivre les responsables, ce qui encourage d'autres crimes et dénie aux victimes le droit à la justice. En conséquence, la Suisse a continué en 2016 à soutenir l'intervention de la Cour pénale internationale (CPI) dans des situations caractérisées par l'impunité dont jouissent les auteurs d'infractions gravissimes, comme c'est le cas en Syrie. La CPI, institution phare de la justice pénale internationale, doit également relever des défis majeurs dans ses domaines de compétences.

Certains États concernés et leurs élites s'opposent avec la dernière énergie au traitement du passé. L'intimidation et la subornation de témoins entravent, voire empêchent parfois l'action de la CPI. La décision prise en octobre par trois États africains ­ l'Afrique du Sud, le Burundi et la Gambie ­ de se retirer du Statut de Rome relatif à la CPI a suscité bien des remous. En novembre, la Russie a, en outre, annoncé de ne pas ratifier le Statut de Rome et a retiré sa signature. Lors de l'assemblée des États parties au Statut de Rome, qui s'est tenue en novembre, les trois États africains se sont néanmoins montrés conciliants et les États membres ont mené un dialogue ouvert et respectueux. Aucun autre État africain n'a annoncé son départ. Au contraire, nombre d'entre eux se sont expressément prononcés contre une telle démarche.

Il est en outre réjouissant de constater que la CPI a intensifié ses activités en ouvrant onze examens préliminaires et en menant dix enquêtes dans des pays du monde entier. Elle a ainsi condamné Jean-Pierre Bemba, un ancien chef rebelle de République centrafricaine, pour crimes de guerre et crimes contre l'humanité en vertu du principe de la responsabilité du commandant. La condamnation d'Ahmad Al Faqi Al Mahdi pour des attaques commises contre des bâtiments à caractère religieux à Tombouctou, au Mali, revêt une grande importance pour la protection des biens culturels dans les conflits armés. C'est en 2016 également que la CPI
a lancé une action d'envergure contre l'ancien président de Côte d'Ivoire, Laurent Gbagbo, et contre un premier représentant du groupe rebelle ougandais de l'armée de résistance du Seigneur (Lord's Resistance Army, LRA). L'ouverture en Géorgie d'enquêtes portant sur des crimes commis en Ossétie du Sud et dans la région ­ la première menée hors du continent africain ­ revêt également une importance particulière. Le Tribunal pénal international pour l'ex-Yougoslavie avait en son temps condamné Radovan Karadzic pour son rôle dans le génocide de Srebrenica et d'autres crimes graves. La condamnation à la réclusion à perpétuité de l'ancien président tchadien Hissène Habré par les Chambres africaines extraordinaires, au sein des juridictions sénégalaises, pour crimes contre l'humanité, crimes de guerre et torture, constitue un autre signal fort, car il s'agit de la première condamnation d'un ancien chef d'État prononcée dans un État tiers. Ce jugement souligne également l'importance des services nationaux de répression, indépendamment du lieu de commission de l'infraction et de la nationalité des auteurs et des victimes. La Suisse a soutenu le procès contre Hissène Habré par l'affectation de ressources humaines et financières à plusieurs tribunaux pénaux internationaux et organisations non gouvernementales.

Elle a défendu l'indépendance de la CPI et l'a soutenue politiquement, notamment 1276

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lors de l'Assemblée des États Parties de novembre 2016. Sur le plan technique, la Suisse a aidé l'institution en organisant une conférence sur l'évaluation et le renforcement de l'efficacité des procédures de la CPI en avril à Glion (VD). Elle a ainsi posé les jalons d'une rationalisation des procédures judiciaires et d'un renforcement de la crédibilité de la CPI.

Cadre juridique international et institutions chargées des droits de l'homme35 Dans tout système juridique éclairé, les droits de l'homme sont une composante indissociable d'une réglementation adéquate des relations entre les États d'une part, entre l'État et l'individu d'autre part. La Suisse s'engage pour l'instauration d'un cadre juridique international et pour des institutions des droits de l'homme fortes à l'échelon mondial, régional et national. Cette politique trouve son expression dans la ratification des conventions internationales fondamentales en matière de la protection et de la promotion des droits de l'homme, conformément aux valeurs et aux libertés helvétiques. Le Conseil fédéral a adopté le 11 décembre 2015 le message concernant l'adhésion au troisième protocole facultatif à la convention relative aux droits de l'enfant, dont l'élément central est la procédure de présentation de communications individuelles qui renforce l'importance de la convention relative aux droits de l'enfant dans la pratique. Le 16 décembre, les Chambres fédérales ont approuvé en vote final l'adhésion au protocole facultatif. En décembre, la Suisse a déposé l'instrument de ratification de la convention internationale pour la protection de toutes les personnes contre les disparitions forcées auprès du Secrétaire général des Nations Unies à New York. Au mois de novembre déjà, le Conseil fédéral a approuvé l'ordonnance relative à la loi fédérale sur la convention internationale pour la protection de toutes les personnes contre les disparitions forcées et fixé l'entrée en vigueur de la loi fédérale et de l'ordonnance en janvier 2017. En juin, le Conseil fédéral a adopté le rapport initial de la Suisse sur la mise en oeuvre de la convention relative aux droits des personnes handicapées.

Après consultation des cantons, le DFAE a élaboré durant l'année sous revue le quatrième rapport du gouvernement suisse sur la mise en oeuvre de la conventioncadre du
Conseil de l'Europe pour la protection des minorités nationales. Le but de ce rapport est de présenter au Comité des Ministres du Conseil de l'Europe les mesures prises à tous les niveaux par les pouvoirs publics au cours des dernières années. Son approbation par le Conseil fédéral est prévue au début 2017. Dans le domaine des droits des femmes, la Suisse a présenté en novembre ses quatrième et cinquième rapports sur le suivi de la mise en oeuvre de la convention des Nations Unies sur l'élimination de toutes les formes de discrimination à l'égard des femmes (CEDEF) ainsi que les progrès et les défis de la lutte contre la discrimination envers les femmes au comité compétent des Nations Unies. Elle a également soutenu le suivi de la mise en oeuvre de la résolution 1325 du Conseil de sécurité de l'ONU sur les femmes, la paix et la sécurité par le Comité pour l'élimination de la discrimination à l'égard des femmes. Une rencontre organisée en décembre en collaboration avec le Conseil de sécurité des Nations Unies a mis en évidence les interactions

35

Des informations plus détaillées sur l'engagement de la Suisse au sein du Conseil des droits de l'homme des Nations Unies sont disponibles sous le ch. 3.3.5.

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entre les deux mécanismes de régulation dans l'optique de la mise en oeuvre de la résolution 1325.

La Suisse a oeuvré au sein du Conseil des droits de l'homme de l'ONU pour qu'une attention accrue soit accordée aux conséquences néfastes de la corruption sur les droits de l'homme. Cette approche a pour but de renforcer la position de la victime et de souligner la responsabilité systémique de l'État dans l'application des mécanismes des droits de l'homme. Elle sera également développée en 2017 dans d'autres enceintes internationales. La Suisse a continué à soutenir la mise en oeuvre de la résolution A/RES/68/268, adoptée en avril 2014 par l'Assemblée générale de l'ONU, qui vise le renforcement et l'amélioration du fonctionnement de l'ensemble des organes conventionnels des droits de l'homme au sein de l'ONU. À cet effet, elle a notamment lancé et soutenu une plate-forme d'information à Genève chargée de promouvoir l'échange direct d'informations entre les membres de ces différents organes, avec des experts concernés et avec d'autres acteurs de la société civile. Le soutien à un réseau académique est un autre instrument traduisant la constance de l'engagement de la Suisse dans ce domaine. Il complète le processus politique de renforcement des organes conventionnels en proposant un débat académique de fond.

Recouvrement d'avoirs d'origine illicite Ces 25 dernières années, la Suisse a restitué des avoirs de potentats à leurs pays d'origine à hauteur de quelque deux milliards de francs. En mars, une déclaration d'intention a été signée entre le Conseil fédéral et le gouvernement de la République fédérale du Nigéria concernant la restitution d'environ 321 millions de dollars américains et comprenant un monitoring de l'usage de ces fonds par la Banque mondiale. La longue expérience de la Suisse dans le traitement de cas d'avoirs d'origine illicite est désormais reflétée dans la nouvelle loi du 18 décembre 2015 sur les valeurs patrimoniales d'origine illicite (LVP), entrée en vigueur le 1 er juillet 2016.

Vers la fin de l'année, le Conseil fédéral a prolongé d'une année, jusqu'en 2018, le blocage des avoirs des présidents déchus Ben Ali (Tunisie), Moubarak (Égypte) et Ianoukovitch (Ukraine) ainsi que des personnes politiquement exposées de leur entourage. Cette décision vise à accorder du temps supplémentaire
aux enquêtes pénales en cours et à soutenir la coopération judiciaire. La politique proactive de la Suisse dans ce domaine et la LVP suscitent un grand intérêt au niveau international, notamment au sein du Groupe anti-corruption du G20 (voir ch. 3.5.1).

Sur le plan international, la Suisse encourage le développement de standards visant à assurer la restitution transparente de fonds d'origine illicite. Elle se fonde à cet effet sur ses principes de politique extérieure, tels que la consolidation de l'état de droit et la lutte contre l'impunité. Par ailleurs, la Suisse coordonne étroitement sa politique de restitution des avoirs de potentats avec son engagement en matière de coopération au développement, en particulier dans le domaine de la lutte contre la corruption, et assure ainsi la cohérence de sa politique extérieure. Par ses initiatives, la Suisse contribue de plus au renforcement du Level Playing Field entre les centres financiers importants, c'est-à-dire à faire avancer les standards internationaux et assurer, ainsi, un environnement concurrentiel équitable.

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En 2016, la Suisse a aussi poursuivi sa collaboration avec la Banque mondiale (Stolen Asset Recovery Initiative, StAR) et le Centre international pour le recouvrement d'avoirs volés (ICAR), dans le cadre du séminaire de Lausanne. La neuvième édition de ce dernier en février a permis de poursuivre le développement de lignes directrices internationales pour assurer un recouvrement efficace des avoirs de potentats. Le mandat onusien sur lequel se fonde leur développement a été renouvelé fin 2015 par la Conférence des États parties à la convention des Nations Unies contre la corruption. L'objectif de la Suisse est de développer un guide pratique destiné aux praticiens, aux décideurs et aux législateurs pour mettre en oeuvre ces lignes directrices sous la forme d'un guide pratique. Les travaux dans ce sens se poursuivront lors de la dixième édition du séminaire de Lausanne qui se tiendra en février 2017.

3.3.7

Thèmes transversaux: prévention de l'extrémisme violent (PEV), diplomatie de l'eau, réfugiés et migrants

Dans sa Stratégie de politique étrangère 2016­2019, le Conseil fédéral souligne l'interdépendance entre la paix et le développement. Il ne peut y avoir de développement durable sans paix, et sans développement durable, il est impossible de maintenir la paix. Cette interaction se reflète dans l'Agenda 2030 dont la promotion de «l'avènement de sociétés pacifiques et ouvertes» constitue l'un des 17 objectifs du développement durable. Le message du Conseil fédéral sur la coopération internationale pour la période 2017­2020 tient également compte de ces liens étroits en définissant pour la première fois un cadre stratégique commun pour la coopération au développement, la coopération avec l'Europe de l'Est, l'aide humanitaire et la promotion civile de la paix et des droits de l'homme (voir ch. 3.4.1).

Afin de garantir une utilisation coordonnée, cohérente et efficace des instruments à disposition, le DFAE met l'accent, dans le cadre de la coopération internationale, sur des stratégies régionales et par pays propres au département ou interdépartementales, chaque fois que cela est possible et approprié. Une coordination étroite des instruments est également requise dans le cas des thèmes situés au carrefour de la politique de paix, des droits de l'homme, du développement durable et de l'aide humanitaire, d'autant que ceux-ci gagnent en importance dans le contexte actuel. Ces thèmes englobent la prévention de l'extrémisme violent, la prévention des conflits liés à l'eau par la recherche de solutions coopératives et les contributions de la politique étrangère à la gestion des mouvements de réfugiés et des flux migratoires dont l'ampleur ne cesse de croître. La mise en oeuvre de ces priorités extérieures de la Suisse exige la coopération étroite et exempte de lourdeurs bureaucratiques de toutes les instances concernées ­ diplomatie, promotion de la paix et développement.

Prévention de l'extrémisme violent La prévention de l'extrémisme violent (PEV) est devenue une priorité importante de la politique extérieure de la Suisse. Elle vise principalement à renforcer la capacité de résistance des individus et des communautés à la radicalisation violente. Outre les mesures de répression et de protection, la prévention est un moyen de lutte contre les 1279

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causes du terrorisme et de l'extrémisme violent; elle permet également de soutenir les États concernés dans la mise en place d'institutions respectueuses de l'état de droit susceptibles de prévenir et de combattre efficacement ces phénomènes.

L'extrémisme violent peut être l'expression d'une mauvaise gouvernance, de la corruption, d'une situation vécue comme une injustice personnelle, d'un sentiment d'exclusion ou d'une perte de confiance dans l'État. Par leur engagement en faveur de la promotion de la paix, des droits de l'homme et d'un fonctionnement des institutions publiques au service de l'ensemble de la population, les programmes de coopération à long terme de la Suisse contribuent, dans des situations de fragilité et de conflit, à traiter les causes profondes des conflits sociaux et politiques qui constituent un terreau fertile pour l'extrémisme violent.

Fin 2015, le Secrétaire général de l'ONU a présenté son plan d'action pour la prévention de l'extrémisme violent. Cette approche repose sur le constat que si les mesures répressives permettent de réduire le terrorisme, elles ne parviennent pas, à elles seules, à l'éradiquer à long terme du fait qu'elles ne s'attaquent pas aux causes du phénomène. Dans certains cas, de telles mesures peuvent même se révéler contreproductives si elles favorisent la discrimination ou la persécution de minorités ou de dissidents. Le défi pour les gouvernements consiste à protéger à la fois la vie et l'intégrité physique des individus, la liberté et l'état de droit. Il faut encourager l'avènement, à l'échelon politique, économique et social, d'une société pacifique et ouverte qui offre des perspectives à toutes les couches de la population, et en particulier aux jeunes. En avril, la Suisse et les Nations Unies ont organisé conjointement une conférence de haut niveau destinée à soutenir le Plan d'action du Secrétaire général de l'ONU pour la prévention de l'extrémisme violent. Cette manifestation a également permis de souligner le rôle important joué par la Genève internationale dans la prévention des conflits et de la violence.

À cette occasion, le chef du DFAE a présenté le plan d'action de politique étrangère, qui comprend sept champs d'action: 1. Participation à la définition des politiques et au renforcement des compétences dans ce domaine; 2. Acquisition
et développement des connaissances contextuelles; 3. Dialogue et prévention des conflits; 4. Promotion de la bonne gouvernance, des droits de l'homme et de l'état de droit; 5. Implication des communautés concernées, renforcement du rôle des jeunes et des femmes; 6. Éducation, formation, développement des capacités et promotion de l'emploi; 7. Communication stratégique, Internet et réseaux sociaux. Cette approche fondée sur la prévention de la violence s'appuie largement sur la longue expérience acquise par la Suisse dans la gestion et la transformation des conflits, la défense des droits de l'homme et la sécurité humaine en général, ainsi que sur l'approche adoptée par la coopération suisse dans les contextes fragiles. Début septembre, la plate-forme politique du Réseau national de sécurité (RNS) a chargé son délégué d'élaborer d'ici au second semestre 2017 un plan d'action national contre la radicalisation et l'extrémisme violent, en collaboration avec la Confédération, les cantons, les villes et les communes. Le DFAE participera activement à ces travaux. L'élaboration d'un plan d'action national permettra à la Suisse de répondre à la demande formulée par le secrétaire général de l'ONU dans son plan d'action.

Le plan d'action de la politique étrangère se traduit notamment par l'engagement de la Suisse au sein d'organismes internationaux actifs dans l'élaboration de stratégies 1280

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politiques et le développement de normes. Outre l'engagement auprès des Nations Unies déjà cité, une résolution sur la prévention de l'extrémisme violent a été déposée sous la direction de la Suisse dans la perspective du Sommet de la francophonie à Madagascar. Cette résolution a été adoptée par consensus. La Suisse a par ailleurs instauré, et dans certains cas renforcé le dialogue sur la prévention de l'extrémisme violent avec divers pays ­ dont la Tunisie ­ en vue d'instaurer une coopération opérationnelle. En outre, c'est à travers les activités qu'elle mène sur le terrain avec différents partenaires que la Suisse travaille à aborder les causes de la violence, y compris l'exclusion politique, sociale et économique. Les revendications légitimes des citoyens et des communautés doivent pouvoir s'exprimer à travers des processus de participation politique inclusifs, et non par la violence. La Suisse oeuvre ainsi à l'ouverture d'espaces de dialogues qui sont des alternatives à l'extrémisme violent, et auxquels tous les acteurs concernés doivent pouvoir être associés.

Les programmes de développement durable à long terme présentés dans le message sur la coopération internationale 2017­2020 doivent contribuer à consolider les structures démocratiques, l'état de droit, la cohésion sociale ainsi que la participation politique et économique afin d'éliminer les facteurs qui font le lit de la violence. Ces programmes sont donc des moyens importants de PVE. Dans les pays partenaires concernés, la Suisse développe des activités qui contribuent directement à la prévention de l'extrémisme violent, dans le cadre de programmes de développement existants. L'accent est mis sur la formation et la réduction du chômage des jeunes, le développement économique, le renforcement de la cohésion sociale et de la confiance mutuelle, le soutien aux mécanismes locaux de résolution des conflits et le travail psychosocial.

Cela s'applique également à un large éventail d'objectifs figurant dans l'Agenda 2030 du développement durable adopté en septembre 2015 ainsi que dans le nouvel agenda de l'ONU pour la consolidation de la paix fondé sur la résolution 2282 (2016) du Conseil de sécurité et la résolution 70/262 de l'Assemblée générale. En février, le Comité d'aide au développement (CAD) de l'OCDE a défini les critères d'éligibilité
des projets de prévention de l'extrémisme violent au titre de l'aide publique au développement. En ce qui concerne Internet et les réseaux sociaux, la Suisse soutient, au sein de diverses enceintes internationales (dont le Forum mondial contre le terrorisme), l'élaboration de recommandations sur les campagnes de communication contre la propagande incitant à la violence extrémiste ainsi que sur le traitement des contenus prônant l'extrémisme violent. Elle collabore avec le secteur privé et avec des organisations non gouvernementales.

Dans le cadre de la mise en oeuvre du plan d'action, la Suisse accorde une grande importance au Fonds mondial pour l'engagement de la communauté et la résilience (Global Community Engagement and Resilience Fund, GCERF), un instrument de financement créé en 2014 à Genève et destiné à soutenir les projets locaux de prévention de la radicalisation violente en faisant intervenir des acteurs de la société civile et du secteur privé. Pour les pays pilotes que sont le Bangladesh, le Mali et le Nigéria, un montant d'environ 15 millions de dollars a été mis à disposition sur trois ans dans le cadre d'une première levée de fonds. Le GCERF souhaite atteindre plus d'un million de personnes avec ces premiers projets lancés en juin. Une attention particulière est accordée à la participation des femmes et à la création d'opportunités 1281

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pour les jeunes. Un deuxième groupe de pays partenaires a été constitué avec le Kenya, le Kosovo et le Myanmar, où les premières activités opérationnelles devraient démarrer en 2017.

Diplomatie de l'eau Les crises liées à l'eau représentent l'un des défis majeurs de notre époque. Ainsi, ces cinq dernières années, les crises liées à l'eau figuraient parmi les risques globaux les plus importants en termes d'impacts, selon le WEF. De plus, la destruction des infrastructures hydriques ou la suppression de l'accès à l'eau peuvent devenir des armes de guerre, avec des conséquences désastreuses pour les populations civiles, comme l'a documenté le Comité international de la Croix-Rouge en Syrie. La Suisse s'attache depuis des années à promouvoir l'eau comme un catalyseur pour la coopération et la paix, et non pas à le considérer comme une source de conflit. Elle a publié en 2015 les lignes d'actions du DFAE sur le thème de l'eau et de la sécurité.

Ces lignes d'actions fournissent une approche intégrée permettant de guider le travail du département dans ce domaine, une approche qui comporte une vaste gamme d'outils allant du développement et de la coopération à la promotion de la paix et du droit international, en passant par l'aide humanitaire.

Depuis 2009, la Suisse est engagée dans plusieurs initiatives de diplomatie de l'eau (Blue Peace) au niveau régional et depuis 2012 au niveau global. Au niveau régional, la Suisse est particulièrement active en Asie centrale et au Moyen-Orient, au travers d'initiatives innovantes visant à renforcer la confiance et la transparence en ce qui concerne la gestion des bassins. En 2016, les efforts pour la région de l'Asie centrale se sont concentrés sur la préparation d'une grande conférence régionale sur la gestion des ressources en eaux transfrontalières, pour laquelle la Suisse assume un rôle de facilitateur. Cette conférence «Bâle 2» se tiendra au Kazakhstan en marge de l'exposition internationale 2017. Au Moyen-Orient, grâce à des discussions facilitées par la Suisse, des parlementaires de la Jordanie, de la Turquie et du Liban ont élaboré une vision commune relative à la concrétisation d'un mécanisme de coopération politique régionale pour l'eau et au lancement d'un processus de formalisation de la plate-forme Blue Peace» dans la région. La Suisse s'engage sur
le long terme dans ces régions pour favoriser la coopération et le dialogue, dans des contextes politiques et sécuritaires sensibles.

Sur la base de l'expérience acquise au niveau des régions, la Suisse a lancé fin 2015 le Panel global de haut niveau sur l'eau et la paix à Genève. Le panel est également soutenu par quinze pays, à savoir le Cambodge, la Colombie, le Costa Rica, l'Espagne, l'Estonie, la France, le Ghana, la Hongrie, la Jordanie, le Kazakhstan, le Maroc, Oman, le Sénégal, la Slovénie et la Suisse. La Suisse joue un rôle majeur de catalyseur et de relais politique de cette initiative. Composé de quinze personnalités nommées ad personam par les pays co-parrains et placé sous la direction de l'ancien président slovène Danilo Türk, le panel va élaborer des recommandations visant notamment à renforcer l'architecture globale pour prévenir et résoudre les conflits liés à l'eau et à faciliter l'utilisation de l'eau pour construire et consolider la paix.

Ces recommandations seront appelées à alimenter également les initiatives régionales.

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En 2016, le panel s'est réuni à deux reprises, au Sénégal et au Costa Rica. Ces deux réunions ont permis de faire avancer ses travaux sur des thèmes tels que l'eau dans les conflits armés, les conflits intersectoriels, l'avancement du droit international de l'eau douce et la question des incitations financières à la coopération. Elles ont également permis au panel de s'inspirer d'expériences régionales lors de visites de terrain et d'enrichir ses travaux à la faveur de consultations avec des organisations régionales telles que l'Organisation pour la mise en valeur du fleuve Sénégal (OMVS) et l'Organisation des États américains (OEA). La quatrième édition du panel aura lieu au printemps 2017. Travaillant de façon étroite avec les Nations Unies, le panel présentera ses conclusions courant 2017. Un Groupe d'amis informel sur l'eau et la paix s'est constitué en avril à Genève afin d'apporter un soutien politique au travail du panel. Il s'est réuni à plusieurs reprises dans le cadre de la communauté onusienne genevoise. La présidence du Groupe d'amis est exercée par la Suisse pour sa première année et son secrétariat est assuré par le Pôle eau de Genève. Près de 40 États ont participé en 2016 à une ou plusieurs réunions du Groupe d'amis.

À l'initiative du chef du DFAE, un événement parallèle de haut niveau consacré à l'eau comme source de paix s'est tenu en marge de la 71e Assemblée générale.

Organisé conjointement par quatre pays co-parrains du panel, le Costa Rica, le Sénégal, la Slovénie et la Suisse, cet événement a réuni le chef du département et des hauts représentants du Costa Rica et du Sénégal, le secrétaire général adjoint des Nations Unies et le président du panel. Cet événement parallèle de haut niveau a contribué à une sensibilisation accrue aux questions liées à l'eau, à la paix et à la sécurité, l'objectif étant de mieux ancrer la thématique «eau, paix et sécurité» dans le cadre onusien. Cette thématique a fait l'objet de plusieurs débats organisés au sein du Conseil de sécurité en 2016. Convaincue de l'importance du lien entre l'eau, la paix et la sécurité, la Suisse soutient les efforts visant à inscrire ce thème à l'agenda du Conseil de sécurité. Elle relaie en outre la question «eau, paix et sécurité» au sein d'autres organisations internationales. Lors du Sommet de la Francophonie
à Madagascar, la Suisse a abordé cette question dans les instances de l'Organisation internationale de la Francophonie, et au stand de la Suisse dans le village de la Francophonie.

L'engagement de la jeunesse aura également marqué l'année 2016: le Parlement européen de la jeunesse pour l'eau, qui bénéficie du soutien du DFAE, s'est réuni au gymnase Burier, où il a abordé avec le conseiller fédéral Didier Burkhalter le thème «eau et gestion des risques». Ce parlement vise à promouvoir l'engagement des jeunes en faveur de la politique de l'eau par l'éducation à la citoyenneté et à la démocratie.

Réfugiés et migrants Les conflits armés persistants en Syrie, dans la Corne de l'Afrique et ailleurs, le changement climatique (y compris l'un des pires phénomènes El Niño depuis 1997/98), l'extrémisme violent, les violations des droits de l'homme et la fragilité persistante de certains États ont à nouveau provoqué des exodes massifs dans plusieurs régions du globe durant l'année 2016. Une personne sur 133 dans le monde est aujourd'hui requérante d'asile, en fuite ou déplacée dans son propre pays. Plus de 1283

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85% d'entre elles vivent dans des pays émergents ou en développement. La Suisse s'implique notamment dans le domaine de la migration au niveau bilatéral dans le cadre de partenariats migratoires. De tels partenariats sont en place avec la Serbie, le Kosovo, la Bosnie et Herzégovine, le Nigéria et la Tunisie. L'ouverture de négociations en vue de la conclusion de nouveaux partenariats migratoires est actuellement à l'étude.

En complément des dialogues réguliers, la Suisse a par exemple soutenu les autorités tunisiennes dans l'élaboration de processus opérationnels standards pour la prise en charge des migrants rescapés en mer. Outre son engagement bilatéral, la Suisse a mis l'accent en 2016 sur trois domaines d'activité complémentaires qui influenceront son engagement à l'avenir: prévention des déplacements forcés; renforcement de la protection et de l'assistance et respect des droits de l'homme; promotion de l'autonomie économique et sociale des personnes déplacées, en tenant compte des intérêts et des besoins de la population locale. Ces domaines d'activité entrent dans le cadre d'une approche interdépartementale intégrée de la politique extérieure de la Suisse en matière de migration. Le Conseil fédéral fournira à cet égard des informations détaillées dans son rapport sur les activités concernant la politique migratoire extérieure de la Suisse.

Prévention des déplacements forcés Les motifs qui incitent les gens à quitter leur patrie sont multiples, et les mesures de prévention doivent donc être exhaustives. La Suisse engage à cet effet ses différents instruments de coopération internationale (CI). Son action sera d'autant plus efficace si elle réunit et coordonne ces instruments dans un cadre stratégique commun. Tel est précisément le but du message concernant la coopération internationale 2017­ 2020 (cf. ch. 3.4.1). En vertu de la combinaison des instruments présentée dans le message, le DFAE renforcera à l'avenir le lien entre la coopération internationale et la politique extérieure en matière de migration lorsqu'une telle orientation sera dans l'intérêt de la Suisse. Cette approche permettra d'appréhender les causes profondes des conflits et des migrations et aussi de conclure des accords et des partenariats dans ce domaine. L'engagement en faveur de la paix, la coopération au développement
ainsi que la politique et l'action humanitaires peuvent contribuer à endiguer les causes de fuite et de déplacement. La Suisse soutient les efforts de l'envoyé spécial de l'ONU, Staffan de Mistura, dans le conflit syrien. Elle participe à plus de vingt autres processus de paix et de médiation, notamment en Ukraine et dans la Corne de l'Afrique. En 2016, la Suisse a par ailleurs signé un accord de financement avec le PNUD afin de soutenir ses activités de prévention des conflits et les efforts déployés à long terme pour combattre les causes de conflits dans les contextes fragiles. Cela correspond à la volonté de la Suisse d'accroître à l'avenir son engagement pour la promotion de la paix et le renforcement des structures étatiques dans les contextes fragiles. Près de 50 % des moyens destinés à l'aide bilatérale dans le cadre du message 2017­2020 seront affectés aux contextes fragiles. Les atteintes aux droits de l'homme sont souvent les signes avant-coureurs d'une escalade de la violence et des conflits qui provoqueront à leur tour des déplacements de population. La Suisse a par conséquent lancé une initiative diplomatique (appel du 13 juin) durant l'été afin de resserrer la coopération entre le Conseil des droits de l'homme de l'ONU et le Conseil de sécurité.

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Protection et assistance, respect des droits de l'homme La protection et le soutien des réfugiés et des personnes déplacées dans leur région d'origine et dans les pays de transit constituent une priorité de l'action humanitaire de la Suisse. Le Haut Commissariat des Nations Unies pour les réfugiés (HCR) est le principal partenaire international de la Suisse en matière de réfugiés. La Suisse soutient les activités du HCR et d'autres organisations humanitaires partenaires, détache des experts du Corps suisse d'aide humanitaire (CSA) et mène des actions de secours directes pour les réfugiés et les personnes déplacées. Elle soutient notamment, dans les pays de premier accueil, les familles qui accueillent des réfugiés chez elles. La Suisse s'engage en outre en faveur de la protection et du respect des droits de l'homme en combinant un savoir-faire adapté au contexte et un dialogue politique actif à l'échelon bilatéral et multilatéral.

L'une de ses priorités consiste toujours à améliorer le respect du droit international humanitaire, notamment par les groupes armés en Syrie. La Suisse s'est régulièrement exprimée à ce sujet au Conseil de sécurité de l'ONU. En effet, la population civile est mieux protégée et il y a moins de personnes déplacées lorsque le droit international humanitaire est respecté. La Suisse veille à ce que la lutte contre le terrorisme n'entrave pas l'action humanitaire (voir ch. 3.3.2 Lutte contre le terrorisme). La société civile a également besoin d'aide et de protection dans les régions contrôlées par des groupes armés. Afin de résoudre les problèmes politiques et juridiques qui se posent, la Suisse s'est employée à promouvoir des programmes de recherche et des dialogues politiques en 2016, année durant laquelle la notion de protection dans la région d'origine a conservé tout son sens. Dans la Corne de l'Afrique et au Moyen-Orient, la Suisse a soutenu les pays de premier accueil dans la gestion de l'afflux de migrants et de réfugiés et dans la recherche de solutions durables. Enfin, la Suisse s'est également impliquée dans la lutte contre la traite des êtres humains au cours de l'année sous revue, notamment en tant que membre de la Conférence des États parties à la convention des Nations Unies contre la criminalité transnationale organisée, et en collaboration avec l'OSCE.
Promotion de l'autonomie économique et sociale des personnes déplacées Si un retour en toute sécurité reste l'objectif prioritaire de nombreux réfugiés et personnes déplacées, le HCR révèle que les réfugiés attendent en moyenne 17 ans une solution durable à leur situation. Il incombe là également à la Suisse d'explorer de nouvelles approches pour fournir aux personnes concernées les moyens de vivre dignement. Ses efforts se concentrent sur les deux domaines suivants: l'accès à l'éducation et la possibilité de travailler. Par ailleurs, les populations locales ont également besoin d'assistance pour prévenir les tensions et favoriser l'intégration sociale des réfugiés. La Suisse soutient un programme de formation et d'aide à la création d'entreprises dans le secteur de l'eau. Celui-ci a permis de créer des emplois destinés aux réfugiés syriens en Jordanie et au Liban, de former des spécialistes et de rechercher des solutions entrepreneuriales aux problèmes liés à l'eau. Au Soudan, des petits paysans déplacés par la guerre ont la possibilité de se créer de nouvelles perspectives économiques. Dans le camp de réfugiés de Kakuma au Kenya, un projet financé par la Suisse permet à plus de 2500 jeunes, dont 50 % de femmes, d'accéder à un apprentissage simple. La Suisse a également renouvelé son 1285

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soutien à la rénovation et à l'entretien de bâtiments scolaires en Jordanie et au Liban, ce qui profitera à des dizaines de milliers d'enfants réfugiés et autochtones.

Ces mesures ainsi que d'autres, qui exigent une coordination efficace de l'aide humanitaire et de la coopération au développement, ouvrent de nouvelles perspectives sur place et atténuent le désespoir qui pourrait induire des mouvements secondaires ­ souvent dangereux ­ vers d'autres pays. Dans le cadre de sa coopération multilatérale avec les organisations de l'ONU et les banques de développement, la Suisse multiplie ses efforts pour trouver des solutions à long terme en faveur des réfugiés et des personnes déplacées. Ainsi, avec le soutien de la Suisse, la Banque mondiale a instauré un partenariat fort avec le HCR et publié en 2016 une étude de référence très remarquée (cofinancée par la Suisse) sur les nouvelles approches en matière de développement. Dans le cadre des négociations sur la reconstitution des ressources de l'Association internationale de développement affiliée à la Banque mondiale, un mécanisme d'engagement spécifiquement destiné aux réfugiés et au soutien des pays et des communautés d'accueil est prévu à hauteur de deux milliards de dollars sur trois ans.

Engagement au niveau multilatéral: Le sort des réfugiés et des personnes déplacées de force constitue un défi pour l'ensemble de la communauté internationale. Un sommet pour les réfugiés et les migrants a été convoqué en septembre par les Nations Unies pour permettre aux représentants des États membres de discuter des défis que posent les mouvements massifs de populations et des réponses à apporter par la communauté internationale à ces déplacements. La déclaration adoptée par les participants prévoit un large éventail de mesures de protection en faveur des réfugiés et des migrants ainsi que des dispositifs visant à prévenir les migrations forcées et les mouvements de fuite.

Elle fait référence à l'Agenda 2030 et souligne que les migrations peuvent également constituer un facteur positif pour le développement durable (voir ch. 3.4.4). Par ses propositions concrètes de formulation portant sur les trois thèmes prioritaires susmentionnés, la Suisse a joué participé à l'élaboration de la déclaration. Ce sommet ne constitue toutefois qu'une étape d'un long processus
qui continuera à mobiliser la Suisse au cours de ces prochaines années. Dans le cadre du sommet, il a été décidé d'élaborer d'ici à 2018 deux pactes mondiaux portant l'un sur les réfugiés, l'autre sur les migrants. La Suisse et le Mexique ont été chargés par le président de la 71e Assemblée générale des Nations Unies de faciliter le processus de négociation du Pacte mondial sur la migration. Le succès des initiatives proposées dépendra fortement de leur capacité à profiter de ce gisement de compétences qu'offre Genève dans le traitement des thèmes liés à la migration et aux réfugiés. L'initiative Nansen et le mécanisme de suivi créé à cet effet, la plate-forme sur les déplacements liés aux catastrophes, servent de référence dans ce processus. Ils visent à améliorer la protection des personnes contraintes de fuir vers d'autres pays en raison de catastrophes naturelles ou des conséquences du changement climatique. La Suisse a par ailleurs étroitement coopéré avec l'Organisation internationale pour les migrations (OIM), le Bureau du Haut-Commissaire aux droits de l'homme (HCDH), le rapporteur spécial sur les droits de l'homme des migrants et le représentant spécial du secrétaire général des Nations Unies pour les migrations internationales et le développement.

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3.4

Développement durable et prospérité

3.4.1

Lignes d'action de la coopération internationale: Agenda 2030 et message 2017­2020

Ces dernières décennies, nombre des grands indicateurs de la réduction de la pauvreté et de l'atténuation des risques mondiaux ont enregistré des progrès parfois considérables. Entre 1990 et 2015, la pauvreté, en termes de revenus, a reculé de plus de deux tiers dans certaines régions des pays en développement; le nombre des personnes vivant dans une pauvreté extrême a chuté de 1,9 milliard à 836 millions; la mortalité infantile a diminué de plus de moitié, le nombre de décès d'enfants de moins de cinq ans passant de 12,7 millions à 6 millions. Durant cette même période, tandis que la population mondiale passait de 5,3 à 7,3 milliards, plus de 2,6 milliards de personnes ont obtenu l'accès à l'eau potable et 2,1 milliards ont pu bénéficier de meilleures installations sanitaires. Près d'un milliard de personnes employées dans l'agriculture produisent aujourd'hui plus de 80 % de la nourriture mondiale et améliorent ainsi l'alimentation et la santé dans le monde. Quelque 80 millions de personnes travaillant dans les domaines de la santé et de l'éducation ont accru leurs compétences. Plus d'un milliard d'employés du secteur tertiaire ont participé aux progrès de l'humanité et, partant, à la réalisation des Objectifs du millénaire pour le développement. La progression enregistrée varie cependant d'une région à l'autre: l'accès insuffisant à l'emploi, à l'alimentation, à la formation et aux services publics reste encore très répandu et nombre de femmes, d'hommes et de jeunes ne sont pas en mesure de déployer tout leur potentiel. La réalisation des objectifs définis dans l'Agenda 2030 exigera à l'avenir des ressources financières nettement plus élevées que celles allouées actuellement à l'aide publique au développement. Les débats qui ont entouré l'adoption de l'Agenda 2030 de développement durable, en automne 2015, et les premières conférences tenues en 2016 sur sa mise en oeuvre ont porté sur la contribution des différents acteurs et souligné notamment le rôle central du secteur privé.

Le développement durable constitue l'une des quatre priorités de la nouvelle Stratégie de politique étrangère 2016­2019 et fait partie intégrante du message sur la coopération internationale 2017­202036. En approuvant ce dernier, le Parlement a également approuvé les crédits-cadres proposés par le Conseil fédéral.
Agenda 2030 Au-delà de sa politique extérieure, notamment de sa politique économique étrangère, de sa coopération internationale et de ses politiques extérieures sectorielles, la Suisse continue de se mobiliser en faveur du développement durable. Par son engagement dans les processus internationaux spécifiques, soit en particulier les conventions multilatérales, les accords bilatéraux ainsi que les programmes régionaux et mondiaux (de l'ONU), la Suisse favorise la prise en considération des trois dimensions (économique, écologique et sociale) du développement durable.

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www.ddc.admin.ch > La DDC > Stratégie > Bases légales

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L'année 2016 a été marquée par le lancement de l'Agenda 2030, adopté en septembre 2015 par les 193 États membres de l'ONU et comptant 17 objectifs universels de développement durable (ODD). La Suisse s'est engagée à entreprendre des efforts, tant au niveau national qu'international, pour contribuer à sa réalisation. Les décisions prises en décembre 2015 et en juin 2016 par le Conseil fédéral ont défini et décrit en détail les prochaines étapes que la Suisse prévoit afin d'appliquer ce programme. Ces étapes figurent dans le premier rapport qu'elle a adressé au Forum politique de haut niveau pour le développement durable (HLPF), réuni à l'été 2016 au siège des Nations Unies à New York. Le rapport présente les bases légales, les mécanismes institutionnels à l'échelle fédérale et les procédures destinées à impliquer les cantons, les communes et les acteurs non gouvernementaux. L'orientation thématique de la mise en oeuvre de l'Agenda 2030, les directives correspondantes et le plan d'action suisse, également inclus dans le rapport, se fondent sur la Stratégie pour le développement durable 2016­2019, adoptée en janvier 2016 par le Conseil fédéral. Citant des cas pratiques, le rapport montre de plus comment la Suisse encourage, vérifie et évalue ses contributions au développement durable. Lors de la réunion de 2016 du HLPF, la Suisse fut l'un des premiers pays à présenter une série de mesures visant à mettre en oeuvre l'Agenda 2030. Elle est ainsi parvenue à faire avancer le débat international et à favoriser l'harmonisation des efforts communs.

Par son engagement proactif, la Suisse apporte une contribution cruciale à la conception des comptes rendus internationaux ainsi qu'à l'organisation des relations bilatérales et multilatérales au service de l'Agenda 2030.

La mise en oeuvre de l'Agenda 2030 en Suisse doit se fonder sur les stratégies et les instruments existants; elle doit promouvoir la responsabilité nationale et la cohérence politique et intégrer autant que possible les objectifs universels dans les politiques sectorielles et les processus habituels de planification et de contrôle. Dans ce domaine, la Suisse a poursuivi ses travaux en 2016. L'engagement pour le développement durable constitue l'une des quatre priorités de la récente stratégie de politique étrangère 2016­2019 et fait partie
intégrante du message sur la coopération internationale 2017­2020. Dans le cadre du programme de stabilisation 2017­2019 et du message sur la coopération internationale 2017­2020, le Parlement a approuvé la proposition du Conseil fédéral qui fixe la part de l'APD à 0,48 %, le taux de 0,7 %, préconisé au niveau international pour mettre en oeuvre l'Agenda 2030, demeurant un objectif à long terme.

Mise en oeuvre du message 2013­2016 L'année 2016 fut la dernière de la période couverte par le message du 15 février 2012 concernant la coopération internationale 2013­201637. Mis en oeuvre par la DDC et le SECO, ce message a permis à la Suisse de contribuer, au niveau mondial, à instaurer un développement durable à même de réduire la pauvreté et les risques globaux.. La Suisse a rendu compte des travaux menés durant la période du message 2013­2016 et publié en 2016 les résultats obtenus dans son rapport «La Coopération internationale de la Suisse en action». L'aide d'urgence et les mesures de reconstruction soutenues par la Suisse ont bénéficié directement à quelque 3,5 millions de personnes par an. Ces efforts se sont concentrés sur les conflits en 37

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Syrie, en Iraq, au Soudan du Sud et en République centrafricaine, ainsi que sur l'épidémie d'Ebola en Afrique de l'Ouest. Grâce à une gestion publique plus efficace, près de 8 millions de personnes appartenant aux couches pauvres et défavorisées de la population peuvent désormais mieux faire valoir leurs droits économiques et sociaux. Par son engagement continu dans douze régions et pays partenaires dits fragiles, la Suisse a contribué à ouvrir de nouvelles perspectives de développement à leurs habitants et à améliorer les conditions de vie de la population. Les défis globaux, tels que le changement climatique, l'accès à l'eau, aux matières premières et à l'énergie, la sécurité alimentaire, la migration et la santé mondiale, ont gagné en importance et exercent une influence considérable sur la pauvreté dans le monde.

Afin de réaliser ses objectifs au niveau international, la Suisse collabore avec treize organisations multilatérales de développement et cinq organisations multilatérales dans le domaine humanitaire. Elle a notamment favorisé la mise en place de procédures systématiques pour évaluer l'efficacité de ces organisations. Le rapport paru en 2016 constate également que la Suisse a attiré des investissements de plus de 19 milliards de dollars vers les pays en développement et en transition, généré plus de 2 milliards de kilowattheures d'énergie (provenant de sources renouvelables ou obtenue grâce à l'accroissement de l'efficacité énergétique) et préservé ou créé près d'un demi-million d'emplois.

Message sur la coopération internationale 2017­2020 En 2016, le Conseil fédéral a adopté le message sur la coopération internationale (CI) 2017­2020 et le Parlement l'a approuvé. Ce nouveau message met l'accent sur cinq domaines: 1. Aide d'urgence et contribution à la résolution de conflits (moyennant une hausse du budget par rapport à la période couverte par le message 2013­ 2016). 2. Renforcement de l'engagement dans les contextes fragiles (en 2017­2020, la part de la coopération bilatérale au développement destinée aux pays et régions fragiles d'Afrique et du Proche-Orient passera à 55 %, contre 45 % durant la période couverte par le message 2013­2016). 3. Lutte contre la pauvreté et les inégalités, qui vise en particulier à ouvrir des perspectives aux jeunes (les moyens consacrés à l'éducation
et à la formation professionnelle ont par exemple été augmentés de 50 % par rapport à la période 2013­2016).4. Atténuation des risques globaux (grâce notamment à un engagement accru dans la lutte contre le changement climatique).5. Renforcement de la collaboration avec le secteur privé, le nombre des partenariats étant appelé à doubler. Par sa coopération internationale, la Suisse entend contribuer à instaurer un développement mondial durable qui respecte l'environnement en misant notamment sur une gestion durable des ressources naturelles. Le crédit-cadre de la Division Sécurité humaine (DSH) étant désormais intégré dans ce message, la coopération au développement et la promotion civile de la paix et des droits de l'homme figurent pour la première fois dans un même cadre et poursuivent des objectifs stratégiques communs. Le message tient ainsi compte de l'expérience selon laquelle la combinaison des instruments de la DDC, du SECO et de la DSH fournit des résultats plus probants.

Le thème de la migration sera traité selon cette même approche: lorsque les intérêts de la Suisse l'exigent, coopération au développement et politique migratoire feront l'objet d'une concordance stratégique. Le nouveau message met par ailleurs l'accent sur la mesure de l'efficacité et sur la transparence des rapports concernant les résul1289

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tats obtenus et les éventuelles difficultés rencontrées. La coopération internationale de la Suisse est axée sur les résultats et chaque crédit-cadre contient des objectifs en termes d'efficacité, qui autorisent une évaluation qualitative et quantitative de leur réalisation. Le message perpétue ainsi la pratique de la coopération internationale, qui soumet régulièrement ses activités à des évaluations indépendantes et publie les résultats de ces examens. Les crédits-cadres, se montant à 11,11 milliards de francs, adoptés pour la période de quatre ans couverte par le message, tiennent compte du programme de stabilisation 2017­2019 adopté par le Conseil fédéral.

3.4.2

Aide humanitaire

Défis: 125 millions de personnes sont actuellement tributaires de l'aide humanitaire.

La moitié d'entre elles ont dû fuir leur patrie en raison d'une crise, d'un conflit ou d'une catastrophe. Hébergeant à elle seule 2,7 millions de réfugiés, la Turquie est le pays qui en abrite le plus grand nombre. En Afrique, de nombreuses régions sont ravagées par des conflits et par des sécheresses ou des inondations, conséquences directes du changement climatique. Les principales crises humanitaires se distinguent actuellement par leur durée, qui peut atteindre plusieurs années. Il arrive que leurs victimes dépendent pendant des années, voire des décennies, l'aide internationale, et on estime à 20 milliards de francs (cinq fois plus qu'il y a dix ans) les ressources requises à l'échelle mondiale pour les assister. En 2016, seule la moitié de cette somme était couverte. Pour rompre le cercle vicieux de crises et de catastrophes successives, la Suisse mise de plus en plus sur la prévention et la réduction des risques de catastrophes. Elle verse par exemple une contribution financière au mécanisme de financement en cas de pandémie (Pandemic Emergency Financial Facility), créé par la Banque mondiale et le secteur privé après la crise d'Ebola, qui vise à mobiliser très tôt des ressources financières afin de lutter contre les maladies transmissibles.

La Suisse au Sommet humanitaire mondial (SHM): lors de ce sommet, réuni en mai 2016 à Istanbul, gouvernements, organisations humanitaires et société civile ont cherché ensemble des solutions aux défis humanitaires les plus urgents. Représentée par le conseiller fédéral Didier Burkhalter, la Suisse a formulé trois préoccupations prioritaires: 1) respect du droit international humanitaire, des droits de l'homme, des droits des réfugiés et protection de la population civile; 2) prévention des crises, traitement à long terme des causes de conflits et action politique en vue de résoudre les conflits armés; 3) réaction de la communauté internationale face aux conflits armés et aux crises ainsi qu'aux déplacements forcés qu'ils engendrent. Concrètement, le Sommet d'Istanbul a débouché sur la signature de la «Grande négociation» (Grand Bargain), un accord non contraignant conclu entre les principaux bailleurs de fonds humanitaires, dont la Suisse, et les organisations
spécialisées, afin d'améliorer l'efficacité et la qualité de l'aide humanitaire. Le sommet a en outre revalorisé le rôle du secteur privé. À ce titre, le CICR et le HCR ont fondé, avec l'appui de la Suisse, le Laboratoire humanitaire mondial (Global Humanitarian Lab), dont la mission consiste à collaborer avec des universités et le secteur privé afin de développer des prestations et des produits innovants pour les activités humanitaires.

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Coopération multilatérale et soutien aux organisations partenaires: en 2016, deux tiers environ des ressources financières de l'aide humanitaire de la Suisse ont été alloués à la coopération avec des organisations multilatérales, notamment le CICR, le Programme alimentaire mondial (PAM) et le HCR. Organisation indépendante, impartiale et neutre, le CICR joue un rôle central dans nombre de régions en conflit.

La Suisse collabore étroitement avec cet acteur et a présidé, en 2016, le groupe des principaux donateurs, afin d'aider le CICR à mobiliser les ressources dont il a besoin. Si la Suisse verse des contributions financières aux organisations multilatérales, elle met également à leur disposition des spécialistes du Corps suisse d'aide humanitaire (CSA). Durant l'année sous revue, quatorze de ces spécialistes ont été détachés auprès du HCR et du PAM. Trois spécialistes de la gestion de l'eau ont par exemple sensiblement contribué à améliorer l'approvisionnement en eau potable et l'assainissement dans les camps de réfugiés gérés par le HCR en Grèce.

Aide humanitaire et crise syrienne: au mois de mars, le conflit syrien est entré dans sa sixième année et la situation humanitaire de la population reste catastrophique (voir ch. 2.2). Aussi le président de la Confédération, Johann Schneider-Ammann, at-il promis, lors de la Conférence de Londres sur la Syrie (février 2016), que la Suisse consacrerait 50 millions de francs supplémentaires au titre de l'aide humanitaire pour la région en crise. Depuis le début de ce conflit, la Suisse a versé 250 millions de francs d'aide à la Syrie et aux pays voisins. Elle soutient en particulier le CICR, diverses institutions humanitaires de l'ONU et des ONG internationales par un appui financier et par la mise à disposition de spécialistes du CSA.

L'Aide humanitaire de la DDC réalise en outre ses propres projets. En juillet, le délégué à l'aide humanitaire a ainsi remis au Croissant-Rouge arabe syrien (CRAS) douze ambulances neuves, dont l'organisation avait besoin d'urgence compte tenu des destructions dues à la guerre, des attaques visant les hôpitaux et du nombre énorme de victimes. En 2017, 66 millions de francs supplémentaires seront consacrés à des projets d'aide sur place, notamment dans le domaine de l'aide humanitaire et du renforcement de l'autonomie
économique de la population.

Engagement en Ukraine: depuis le printemps 2015, la Suisse livre des produits nécessaires au fonctionnement des usines hydrauliques de la région de Donetsk, qui distribuent de l'eau potable dans la majorité des villes de part et d'autre de la «ligne de contact» entre les zones contrôlées par les forces gouvernementales et non gouvernementales. La Suisse reste le seul pays à organiser des transports humanitaires qui passent cette fameuse ligne, le quatrième convoi l'ayant franchie en mai. Que ce soit par camion ou par rail, la Suisse a acheminé au total 720 tonnes de produits indispensables pour traiter l'eau, ainsi que du matériel médical et des médicaments destinés aux hôpitaux de la région. Les transports de 2016 ont garanti à près de quatre millions de personnes un accès sûr à de l'eau potable durant toute l'année.

Des milliers de personnes bénéficient par ailleurs d'équipements médicaux neufs (qui ont remplacé du matériel obsolète ou endommagé).

Intervention rapide après le séisme en Équateur et le passage de l'ouragan Matthew en Haïti: un violent tremblement de terre, d'une puissance de 7,8 sur l'échelle de Richter, a frappé l'Équateur le 16 avril, tuant plusieurs centaines de personnes et provoquant de graves dégâts sur la côte. Dans les douze heures qui suivirent, le délégué à l'aide humanitaire a dépêché sur place des spécialistes stationnés en 1291

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Colombie et en Bolivie. D'autres membres du CSA sont arrivés de Suisse peu après.

La Suisse a fourni de l'eau potable à quelque 30 000 personnes dans la région sinistrée. En octobre, Haïti fut le pays des Caraïbes le plus durement touché par l'ouragan Matthew. L'Aide humanitaire de la DDC a aussitôt envoyé sur les lieux une équipe du CSA réunissant des spécialistes de différents domaines (hébergements d'urgence, eau et installations sanitaires, logistique et sécurité). Haïti comptant parmi les pays prioritaires de la DDC, la Suisse disposait de nombreux spécialistes sur place, qui ont pu être recrutés rapidement afin de participer à l'aide d'urgence.

Des installations mobiles de traitement de l'eau ont pu être acheminées vers la région sinistrée et ont fourni chaque jour de l'eau potable à quelque 12 000 habitants. Le 17 octobre, un nouveau détachement du CSA s'est rendu à Haïti, emportant à bord de l'avion 60 électrolyseurs destinés à produire du chlore. Ces appareils permettent d'obtenir une quantité suffisante de solution chlorée pour traiter l'eau et protéger ainsi la population contre les risques de contamination par des agents pathogènes à transmission hydrique, comme le choléra. De plus, 4500 bâches ont été achetées à Saint-Domingue et acheminées par voie terrestre en Haïti, pour être distribuées dans la région frappée par la catastrophe. Au cours d'une deuxième phase, la Suisse distribuera d'autres biens achetés à Saint-Domingue (plus de 3000 panneaux de tôle ondulée, planches en bois et outils) aux personnes sinistrées pour leur permettre de reconstruire leurs maisons. Elle soutient ainsi non seulement le marché local, mais aussi l'initiative individuelle des populations touchées. Au total, 2,6 millions de francs ont été mobilisés pour l'aide immédiate et les mesures prises apportent de l'aide à quelque 100 000 personnes.

Aide destinée aux habitants des foyers de crise en Afrique subsaharienne: au Soudan du Sud, les combats qui opposent des groupes politiques rivaux ont jeté des milliers de personnes sur les routes durant l'été. Déjà déplorable, la situation humanitaire s'est encore aggravée (cf. ch. 2.2). La Suisse a décidé de verser 2 millions de francs supplémentaires en faveur de la population en détresse. 3 autres millions de francs ont été alloués à la population d'Afrique australe
et aux pays entourant le lac Tchad, en particulier le Nord du Nigéria et le Niger. Dans le Nord du Nigéria, ces fonds ont en particulier apporté un appui considérable à un programme d'allocations en espèces du CICR, qui permet aux bénéficiaires d'acheter les biens dont ils ont besoin d'urgence sur les marchés locaux et de soutenir ainsi l'économie régionale. En Afrique australe, le phénomène climatique El Niño et les sécheresses qu'il a provoquées ont compromis la sécurité alimentaire de 32 millions de personnes. L'Aide humanitaire de la DDC a versé des contributions financières au PAM et mis un spécialiste du CSA à sa disposition. Ce dernier s'est rendu en Afrique du Sud, d'où il a participé à la coordination du programme régional d'assistance.

Clôture du programme de reconstruction dans le Caucase du Sud: l'Aide humanitaire de la DDC a mené des activités dans le Caucase du Sud depuis le terrible séisme qui a secoué le Nord de l'Arménie en 1988. Dans le cadre de la stratégie suisse de coopération 2013­2016, elle a aidé le pays à développer ses capacités de sauvetage en faveur de 1,75 million de personnes (soit 65 % de la population). En Géorgie, plus de 420 familles sinistrées ont pu retourner dans des maisons réparées ou reconstruites grâce au financement de l'Aide humanitaire de la DDC. Depuis 2013, plus de 7700 personnes peuvent par ailleurs utiliser sept écoles maternelles et primaires réhabilitées. Grâce à l'amélioration de la prévention des catastrophes, 1292

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27 000 personnes vivant dans six communes de montagne bénéficient d'une meilleure protection contre les catastrophes naturelles. Le savoir-faire suisse a en outre renforcé le service géorgien de sauvetage en montagne, créé en 2013. Le programme de l'Aide humanitaire de la DDC dans le Caucase du Sud s'est achevé en 2016.

Réduction des risques de catastrophe: en 2016 aussi, l'Aide humanitaire de la DDC a mené des programmes destinés à réduire les risques de catastrophes. Elle s'est surtout attachée à renforcer les autorités locales et les communes. Au niveau multilatéral, elle a principalement collaboré avec le Partenariat mondial pour la réduction des catastrophes naturelles et le rétablissement (GFDRR) de la Banque mondiale, qui apporte un appui technique et financier aux pays en développement, afin qu'ils puissent mieux se préparer aux risques. La Suisse préside le comité consultatif du GFDRR depuis le 1er juillet. À ce titre, elle s'efforce en priorité d'intensifier l'engagement dans les régions urbaines à risque ainsi que de créer des synergies et de promouvoir la collaboration avec d'autres fonds et organisations à l'oeuvre dans le domaine du changement climatique.

L'aide humanitaire dans le cadre de questions de minorités38: la protection des minorités, religieuses et autres, est un volet important de la politique étrangère de la Suisse. L'action menée dans ce domaine s'adresse fondamentalement aux populations qui, du fait de leur appartenance à une minorité, font effectivement partie des groupes de personnes les plus vulnérables. Il se trouve que, ces dernières années, de nombreux conflits sont empreints des oppositions entre groupes religieux ou ethniques. Dans de tels contextes, l'aide humanitaire risque d'être accusée de partialité.

Il arrive ainsi que des acteurs du conflit fassent barrage à des opérations d'aide humanitaire absolument essentielles, telles que la fourniture de soins médicaux à des blessés graves. La situation qu'a connue la ville assiégée d'Alep en 2016 en est un exemple on ne peut plus actuel.

Les acteurs humanitaires sont donc exposés au risque d'être perçus comme partiaux.

Pour l'éviter, ils doivent respecter en toutes circonstances les principes humanitaires, énoncés dans le message sur la coopération internationale 2017­2020 et au nombre de quatre: humanité,
neutralité, impartialité et indépendance. Non seulement la stricte observation de ces principes est un impératif pour permettre l'accès sécurisé de l'aide humanitaire, mais elle sert aussi les intérêts des populations qui en bénéficient, car si ces dernières sont appréhendées comme un groupe privilégié, elles peuvent vite devenir la cible d'une répression. L'aide humanitaire est non-discriminatoire et se fonde sur l'application du critère de la «vulnérabilité». Ainsi, dans plusieurs contextes actuels, ce sont les minorités chrétiennes, les Kurdes, les Yézidis, les Turkmènes ou les Rohingya qui sont considérées comme victimes et qui reçoivent l'assistance des acteurs humanitaires en raison de leurs besoins individuels. L'aide humanitaire contribue à la réduction des tensions entre différentes factions. Certaines interventions qui ont vocation à prévenir les conflits entre différentes communautés, ou du moins à les réduire, renforcent la résilience de la population locale. C'est dans cet esprit que l'Aide humanitaire de la Suisse s'engage dans divers projets, notamment en Syrie, en Iraq et au Liban.

38

L'engagement de la Suisse en faveur des minorités, religieuses et autres, dans le cadre de sa politique de paix est abordé au ch. 3.3.4 Priorités thématiques.

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Par exemple, un appui est fourni au projet Livelihood Restoration in Crisis Affected Communities (restauration des moyens de subsistance au sein des communautés touchées par un conflit) conduit en Syrie par le PNUD, le montant global de la contribution s'élevant ici à cinq millions de francs. Cette initiative a pour but de renforcer la résilience des populations locales, qu'elles soient déplacées ou résidantes, et d'oeuvrer ainsi à la préservation de la diversité culturelle tout en favorisant les échanges, tant entre les communes qu'en leur sein. Parmi les projets concrets qui ont été entrepris figurent la réhabilitation d'infrastructures de services de base, telles que les réseaux d'approvisionnement en eau, les écoles et les centres médicaux. Le programme du PNUD est déployé à Homs, dans les régions de Damas, de Lattaquié et de Tartous, où règne une grande diversité ethnique et religieuse. La reconstruction du village de Maaloula, resté sous le contrôle de l'EI pendant plusieurs mois et en partie anéanti, est ainsi réalisée avec le soutien du PNUD. Parmi les différentes communautés religieuses qui vivent dans ce village, les chrétiens appartiennent en majorité à l'Église gréco-catholique. Le PNUD aide les habitants à évacuer les décombres et les gravats des bâtiments détruits par les combats et à reconstruire leurs maisons dans le style traditionnel.

En Iraq, la Suisse soutient à hauteur d'un million et demi de francs un projet de protection engagé par l'oeuvre internationale de bienfaisance Save the Children.

S'adressant à plus de 12 000 enfants et 7000 adultes de la commune de Khanaqin (Diyala), le projet intervient sur trois grands fronts: protection et droits de l'enfance, enseignement, aide psychosociale. Dans la province de Diyala, on recense près de 120 000 déplacés internes. Bon nombre d'entre eux résident dans la commune de Khanaqin, la plus ancienne d'Iraq. La population y constitue une riche mosaïque ethnico-religieuse: on y trouve des familles d'origine kurde, arabe ou turkmène, et chiites et sunnites cohabitent avec d'autres minorités religieuses.

Enfin, la Suisse prend également des mesures directement destinées à améliorer la gestion de l'eau assurée par le département régional du ministère libanais compétent dans la plaine de la Bekaa. La région, dont la population est en
majorité chiite ou chrétienne, est en proie à des tensions croissantes depuis l'arrivée de quelque 380 000 réfugiés syriens sunnites, notamment en raison des difficultés d'accès à l'eau potable. Doté d'une enveloppe de 4,1 millions de francs, le projet qui y est mis en oeuvre doit contribuer à prévenir les risques de conflit.

3.4.3

Coopération bilatérale au développement 39

En 2016, la coopération bilatérale au développement était déjà axée sur l'orientation définie dans le message sur la coopération internationale 2017­2020. Les activités se sont surtout concentrées sur le développement mondial durable, la réduction de la pauvreté, la résolution de conflits et de crises, la gestion durable des ressources naturelles et le respect des droits de l'homme. En moyenne, 35 millions de francs ont été mis annuellement à disposition dans le cadre des sept programmes régionaux menés en Afrique, en Asie et en Amérique latine. Quant aux quinze programmes par 39

La coopération bilatérale au développement dans les régions en crise de la Syrie au Sahel est abordé en profondeur au ch. 2.

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pays, ils se sont vus allouer 20 millions de francs en moyenne. En 2016, douze des 21 pays ou régions partenaires étaient considérés comme fragiles.

Engagement dans les contextes fragiles: une part croissante des plus démunis vivent dans des contextes fragiles. Grâce à ses programmes de coopération tenant compte des situations de conflit, la Suisse contribue à consolider la paix, à faire respecter les droits de l'homme et à renforcer les principales institutions étatiques, notamment dans la Corne de l'Afrique, en Afrique de l'Ouest et au Honduras. Au sein du CAD de l'OCDE, elle assure de plus la coprésidence du Réseau international sur les conflits et la fragilité. À ce titre, elle a largement favorisé l'adoption, en 2016, de la «Déclaration de Stockholm ­ Surmonter la fragilité et consolider la paix dans un monde en mutation». Lors de la rencontre ministérielle, à Stockholm, du Dialogue international sur la consolidation de la paix et le renforcement de l'État, le conseiller fédéral Didier Burkhalter a appelé les États, compte tenu des crises mondiales et des problèmes de sécurité, à ne pas négliger la coopération au développement à long terme et axée sur la prévention de la violence, mais au contraire à maintenir leur engagement dans les contextes fragiles. Le message sur la coopération internationale 2017­2020 intègre cet appel.

Partenariats public-privé pour le développement: l'engagement de la DDC avec des partenaires privés s'est encore renforcé en 2016. La DDC a fait un effort particulier pour apporter à son engagement avec des partenaires privés une plus grande clarté stratégique et opérationnelle. Ayant accès aux compétences et aux ressources du secteur privé, elle est à même de suivre encore plus efficacement ses objectifs en matière de développement. Elle peut ainsi explorer davantage des formes novatrices de coopération, augmenter le nombre de ses partenariats public-privé pour le développement et renforcer leur impact à grande échelle. Des partenariats bilatéraux, comme par exemple un projet avec Nestlé et le ministère vietnamien de l'agriculture, réduisent l'empreinte hydrique de la production de café dans ce pays; des initiatives multi-acteurs comme le Swiss Capacity Building Facility avec, entre autres, Swiss Re, Crédit Suisse et Zurich Foundation offrent une assistance technique
aux institutions financières dans les pays en développement et les soutiennent dans la recherche de financement auprès d'investisseurs. La DDC contribue aussi à des fonds globaux comme la Drugs for Neglected Diseases Initiative qui réunissent des dizaines de partenaires publics et privés pour soutenir la recherche de traitements contre les maladies tropicales négligées. Finalement la participation à des plate-formes public-privé encourage le dialogue politique entre les divers acteurs de la coopération au développement, par exemple sur la thématique de l'eau.

Formation: en matière d'éducation de base et de formation professionnelle, la Suisse possède une expérience et un savoir-faire de renommée internationale. En 2016, elle s'est mobilisée encore davantage dans ce domaine et a aidé 29 pays en transition ou en développement à développer leur offre de formation. La création d'un comité de donateurs pour la mise en oeuvre de la formation professionnelle duale marque une étape charnière de la coopération avec d'autres pays donateurs ayant ce type de système. Dans le cadre de sa coopération bilatérale au développement, elle oeuvre en faveur de systèmes éducatifs inclusifs. Elle contribue ainsi à réduire la pauvreté, à atténuer les inégalités et à prévenir les conflits. Lorsqu'ils sont au bénéfice d'une formation de qualité, les individus sont en effet en mesure d'influer sur la société, de 1295

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participer à la vie économique, de s'ouvrir de nouvelles perspectives et de surmonter les tensions. La coopération dans le domaine de la formation a également été développée dans les contextes fragiles. Des réfugiés dans un camp au Kenya ont ainsi pu suivre un apprentissage financé par la Suisse. En Bosnie et Herzégovine, les projets suisses ont permis de porter le taux de placement des chômeurs de 15 à 40 % en 2016, tandis que 35 % des écoles professionnelles ont mis en place un programme basé sur le système dual et que 3900 jeunes ont trouvé un emploi. Nombre des pays partenaires de la Suisse possèdent une population très jeune. Si cette caractéristique présente un risque ­ celui que beaucoup de jeunes manquent de perspectives individuelles et professionnelles ­ elle recèle aussi un potentiel énorme pour le développement. Face à cette situation, la DDC entreprend depuis l'été 2016 d'élaborer en vue de la faire adopter, une stratégie destinée à renforcer l'éducation de base et la formation professionnelle et à accroître leur complémentarité dans ses pays partenaires.

Afrique Australe, Afrique de l'Est et du Nord et Territoire palestinien occupé: dans les pays et régions prioritaires que sont le Mozambique, la Tanzanie, le Territoire palestinien occupé, l'Afrique australe, les Grands Lacs, la Corne de l'Afrique et l'Afrique du Nord, la Suisse concentre sa coopération bilatérale dans les secteurs de la gouvernance, du développement économique et de la santé. Face à la crise des réfugiés et dans le cadre de l'Agenda 2030, un accent a été mis sur la migration, la formation professionnelle des jeunes et leur intégration dans le marché du travail.

Des initiatives de formation professionnelle qui visent les jeunes ont été lancées en Somalie et dans un camp de réfugiés dans le Nord du Kenya grâce au crédit additionnel approuvé en septembre 2015 par le Parlement dans le but de juguler la crise des réfugiés. En Tunisie, dans le cadre du partenariat migratoire, la Suisse a confirmé son rôle comme donateur principal en matière de migration et elle copréside, avec l'UE, un groupe de coordination des bailleurs. Le partenariat migratoire a permis d'intensifier les discussions en matière de migration avec le gouvernement tunisien. La Suisse a ainsi pu soutenir différents projets en matière de protection des
réfugiés et des migrants, par exemple un projet d'élaboration d'une loi sur l'asile en Tunisie. Les programmes suisses sont mis en oeuvre par trois départements de la Confédération: le DFAE (Direction politique et DDC), le DEFR (SECO) et le DFJP (SEM).

Afrique de l'Ouest: la fragilité et l'extrémisme violent n'ont pas diminué dans la région, se manifestant au travers d'un attentat en janvier à Ouagadougou, d'une détérioration de la situation sécuritaire dans la région du lac Tchad et dans des incidents violents liés aux difficultés de la mise en oeuvre de l'accord de paix au Mali. Les élections contestées au Niger et au Tchad, la lente progression du processus de transition au Burkina Faso et les obstacles au processus de paix au Mali laissent penser que de nouvelles crises peuvent être attendues dans la région. Le Bénin se voit par contre progresser grâce à un processus électoral non contesté. En 2016, la DDC a élaboré de nouvelles stratégies de coopération 2017­2020 pour le Mali, le Bénin et le Burkina Faso, s'adaptant au contexte au travers d'une meilleure prise en compte de la fragilité et une plus grande focalisation de ses actions sur les jeunes. Cette approche sera appliquée aux trois domaines principaux d'activité de la Suisse dans la région: l'éducation de base et la formation professionnelle, la gouvernance et le développement rural.

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Amérique Latine et Caraïbe: la Suisse a poursuivi son engagement en Bolivie, en Amérique centrale, à Cuba et en Haïti dans un contexte régional marqué par une dégradation des perspectives de développement, conséquence d'une faible croissance due à la baisse des prix des matières premières et une faible diversification économique. Elle est intervenue pour améliorer l'accès à l'innovation technologique, à la formation professionnelle, aux services financiers et aux marchés afin de contribuer au développement d'activités économiques stables, à la croissance de la productivité et à l'augmentation des revenus des populations. Par exemple en Bolivie, 7400 unités productives et personnes issues des segments les plus pauvres de la population ont ainsi vu leurs revenus augmenter de 20 %. Les revendications de la société civile face aux cas d'abus de pouvoir et de corruption et les tendances centralisatrices, voire autoritaires, de certains gouvernements ont confirmé l'importance pour la Suisse de maintenir son engagement en matière de bonne gouvernance et de respect des droits de l'homme. Elle le fait en soutenant des organisations de la société civile et en favorisant des dynamiques participatives et des espaces de débat inclusifs.

Asie orientale: dans cette région, la Suisse accorde la priorité aux pays et aux groupes de population les plus pauvres, qui ne bénéficient ni de la forte croissance économique ni de l'accroissement de la prospérité. Continuant à oeuvrer pour la bonne gouvernance en 2016, elle a favorisé la mise en place d'un cadre propice à des démocraties stables, au respect des droits de l'homme et à une société civile forte. Par son engagement, elle a notamment soutenu les réformes politiques au Myanmar, qui s'ouvre peu à peu au monde, et en Mongolie. Au Laos et au Cambodge, elle s'est engagée pour que les gouvernements rendent compte de leurs actions à la population et que celle-ci soit consultée. Les programmes que la DDC met en oeuvre pour promouvoir la formation professionnelle dans les pays cités ont largement contribué, en 2016 aussi, au développement d'un secteur jusqu'alors peu reconnu et fort négligé et ont ainsi ouvert des perspectives à des jeunes issus de classes sociales défavorisées. Les efforts entrepris afin d'améliorer l'accès à des soins de santé appropriés, en particulier
pour les enfants et les femmes enceintes, ont permis d'investir dans l'avenir de ces pays et en faveur d'un développement socialement plus juste. Les petits paysans d'Asie orientale jouent un rôle crucial pour la sécurité alimentaire et dans le combat contre la malnutrition chronique, encore très répandue. La DDC s'est attachée à promouvoir l'équilibre alimentaire et à améliorer les conditions de vie en facilitant l'accès à la terre, aux droits fonciers et à des modes de production durable.

Asie du Sud: vu son poids démographique et sa situation géopolitique, cette région revêt une grande importance pour le développement international. Le niveau de développement, la gravité des crises et la fragilité varient selon les pays partenaires de la Suisse dans la région (Afghanistan, Bangladesh, Népal et Pakistan). En Afghanistan, la communauté internationale et la Suisse sont parvenues à poursuivre leurs activités en faveur du développement malgré une nouvelle intensification des affrontements armés. Au Népal, l'accent a été mis sur la reconstruction après le séisme du printemps 2015. Une crise gouvernementale et économique de plusieurs mois a cependant retardé la réalisation des programmes de développement. Bien que le gouvernement du Bangladesh soit englué dans une crise profonde, les efforts visant à renforcer et à moderniser le système de formation professionnelle ont enregistré 1297

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des progrès notables. Dans tous les pays partenaires, la bonne gouvernance et les droits de l'homme sont les domaines qui présentent les plus grands défis.

3.4.4

Programmes globaux et recherche

Changements climatiques, crises alimentaires, crises de l'eau, risques sanitaires et migration exercent une influence croissante sur les perspectives de développement des pays pauvres. La DDC s'attaque à ces défis mondiaux par le biais de ses différents programmes globaux: Sécurité alimentaire, Changement climatique, Eau, Santé et Migration et développement.

Eau40: suite à l'adoption de l'Agenda 2030, la Suisse s'est fortement engagée dans la mise en place d'un mécanisme de suivi des résultats et de compte rendu des progrès accomplis dans le secteur de l'eau en coopération avec UN-Water et d'autres institutions onusiennes. En matière d'eau et de sécurité, l'engagement et le positionnement international de la Suisse s'est confirmé. Les premiers résultats des travaux du Panel global de haut niveau sur l'eau et la paix, créé à l'initiative de la Suisse fin 2015, ont été présentés durant l'Assemblée générale 2016 de l'ONU à New York (. Parallèlement à son travail de facilitateur politique sur la question des eaux transfrontalières, la Suisse soutient des projets innovants, notamment au Moyen-Orient et en Asie Centrale. La Suisse aide également l'Organisation mondiale de la météorologie (OMM) à mettre au point une base de données hydrologiques, qui permettra de faciliter les décisions politiques transfrontalières et contribuera ainsi à prévenir les conflits. Dans le domaine de la gestion des déchets liquides issus du traitement des eaux, la Suisse s'est fortement engagée avec le secteur privé dans le développement de solutions innovantes au niveau des grandes agglomérations des pays en développement. Dans le cadre de la convention sur la protection et l'utilisation des cours d'eau transfrontières et des lacs internationaux de la Commission économique pour l'Europe des Nations Unies (CEE-ONU), la Suisse a participé aux travaux destinés à améliorer la gestion transfrontalière des eaux souterraines, des lacs et des écosystèmes aquatiques. La Suisse a aussi organisé la 4 e session de la Conférence des parties du protocole Eau et Santé de la CEE-ONU à Genève en novembre.

Changement climatique: dans les négociations multilatérales sur le climat, après l'avancée majeure obtenue avec l'adoption de l'accord de Paris en 2015, la Suisse s'est attelée à préparer la mise en oeuvre de l'accord. Au-delà de son
engagement continu dans les organes directeurs du Fonds pour l'environnement mondial (FEM) et du Fonds d'adaptation, la Suisse, en sa qualité de membre de son conseil d'administration, a contribué au développement institutionnel du Fonds vert pour le climat (FVC) dans une phase décisive pour son opérationnalisation. Outre sa contribution au FVC, la Suisse soutient les pays en développement dans leurs efforts de planification et de mise en oeuvre de mesures d'atténuation et d'adaptation aux changements climatiques avec d'autres programmes. À titre d'exemple, elle a lancé de nouveaux projets de coopération pour renforcer la résilience des villes face aux 40

À ce sujet, voir également 3.3.7, Diplomatie de l'eau

1298

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changements climatiques et pour accompagner la définition de trajectoires de développement urbain sobres en carbone. En tant que membre de la Coalition pour le climat et l'air pur (CCAC), la Suisse partage son savoir-faire pour réduire les émissions de polluants climatiques en visant de multiples bénéfices, notamment pour la santé. La Suisse s'est par ailleurs engagée pour la mobilisation de la société civile et de la jeunesse autour des enjeux climatiques dans le cadre de la 22 e Conférence des parties à la convention-cadre de l'ONU sur les changements climatiques au Maroc.

Sécurité alimentaire: par le biais d'institutions internationales, comme l'Organisation des Nations Unies pour l'alimentation et l'agriculture (FAO), le Fonds international de développement agricole (FIDA) et l'Union africaine (UA), la Suisse a maintenu en 2016 son appui à l'élaboration et à l'application de nouvelles politiques et de directives optionnelles visant à améliorer les conditions-cadres de la petite paysannerie en Afrique et en Asie. Ces efforts visent notamment à garantir les droits fonciers, à accroître l'efficacité des systèmes de vulgarisation et à mettre à disposition des semences et des auxiliaires agricoles de meilleure qualité. La Suisse a par ailleurs soutenu la définition de stratégies pour réduire les pertes de denrées alimentaires et encouragé des solutions innovantes, tels que les services d'information via téléphone mobile ou des vidéos de formation destinées aux agriculteurs. Membre du conseil d'administration du Groupe consultatif pour la recherche agricole internationale (GCRAI), la DDC est à même d'influer sur l'orientation des programmes internationaux de recherche agricole. Durant l'année écoulée, elle a plaidé pour la mise au point de nouvelles sortes de cultures, plus résistantes aux aléas climatiques.

Santé: en 2016, la Suisse a présidé le conseil exécutif d'ONUSIDA et ainsi joué un rôle essentiel dans le dialogue politique mondial sur la santé et les droits sexuels et reproductifs (voir ch. 3.5.4). Elle a en particulier motivé le conseil exécutif à prendre des décisions concrètes face aux risques qui menacent le financement de l'organisation. La Suisse a par ailleurs co-facilité la rencontre de haut niveau sur le VIH/sida, organisée en juin. Sa fonction lui a permis de contribuer au succès
de cette rencontre, qui a débouché sur l'adoption d'une déclaration politique. En 2016, elle a en outre joué un rôle de chef de file dans la recherche d'une solution en vue de créer un mécanisme mondial pour coordonner et financer la recherche et la mise au point de produits médicaux destinés à traiter des maladies présentes surtout dans les pays en développement. Un premier succès auquel la Suisse a apporté une contribution directe est la création d'un observatoire mondial de la recherche-développement en santé et la réalisation de projets de recherche innovants. Enfin, le dynamisme de la Suisse a permis de convaincre des pays BRICS à soutenir financièrement les projets de recherche.

Migration et développement41: puisque la migration figure dans plusieurs des objectifs de l'Agenda 2030, il s'agit à présent de les réaliser. Les nombreuses crises et guerres actuelles risquant de priver les personnes touchées de toute perspective, la Suisse a soutenu, au Sommet de l'ONU sur les réfugiés et les migrants, réuni en 2016 à New York, que les défis à court terme engendrés par les mouvements de population appellent également des réponses sur le long terme, axées sur le développement. La Suisse applique d'ores et déjà une telle approche globale de la politique 41

À ce sujet, voir également ch. 3.3.7 Réfugiés et migration.

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migratoire et a par exemple entrepris d'intensifier sa collaboration dans ce domaine avec le Sri Lanka, les deux pays prévoyant de placer la migration de main-d'oeuvre, le retour et la réconciliation au centre de leurs préoccupations communes. La migration présente toutefois diverses facettes. Par leur capacité de travail, les migrants participent le plus souvent à la prospérité, tant de leur pays de destination que de leur pays d'origine. Ils apportent ainsi une contribution non négligeable au développement durable, ce qui est soutenue par la Suisse. Dans les pays de destination des travailleurs migrants, au Proche-Orient par exemple, elle oeuvre en faveur de pratiques correctes dans le recrutement de main-d'oeuvre provenant de pays en développement. La DDC s'attache par ailleurs, à différents niveaux et avec l'aide du secteur privé, à faire de la formation professionnelle non seulement un facteur au service du développement local, mais aussi de la migration régulière.

Recherche sur les défis globaux: l'Agenda 2030 reconnaît la place déterminante de la recherche et l'innovation dans la réduction de la pauvreté et la transition vers un développement durable global. Le développement durable mondial guide les activités de recherche soutenues par la DDC. Le Swiss Programme for Research on Global Issues for Development (r4d) ­ programme de recherche commun à la DDC et au Fonds national suisse de recherche scientifique (SNF) ­ finance actuellement 41 projets impliquant des institutions de recherche dans 42 pays d'Afrique, d'Asie et d'Amérique latine. Ce programme vise notamment à générer de nouvelles connaissances scientifiques pertinentes pour le développement et à mettre cette information à la disposition des décideurs. La DDC soutient les échanges entre les communautés scientifiques, politique et praticienne dans le but de réfléchir ensemble à la réalisation de l'Agenda 2030.

3.4.5

Coopération multilatérale au développement

La coopération suisse au développement a poursuivi et accru de manière ciblée son étroite collaboration avec ses partenaires prioritaires du secteur multilatéral. En matière de prévention des crises, de reconstruction et de renforcement des institutions étatiques, elle a par exemple accordé un soutien financier important au Programme des Nations Unies pour le développement (PNUD), qui assure la transition entre aide humanitaire et activités de développement. Afin de promouvoir davantage encore l'égalité des sexes, la Suisse a apporté son appui à l'entité des Nations Unies pour l'égalité des sexes et l'autonomisation des femmes (ONU Femmes) pour lui permettre d'ouvrir un bureau de liaison à Genève. Au sein du Conseil économique et social (ECOSOC) de l'ONU, dont elle a exercé la vice-présidence pendant une année, la Suisse a assumé la responsabilité du segment humanitaire, première occasion pour les États membres de prendre position suite au Sommet mondial sur l'action humanitaire en mai. Grâce à une gestion efficace des négociations sur la résolution humanitaire, la Suisse a également contribué à ce que la communauté internationale transpose les premiers constats du sommet dans un cadre normatif. La Suisse s'est fortement engagée au sein de l'Assemblée générale et de l'ECOSOC pour renforcer le système opérationnel de l'ONU, en faisant des propositions concrètes. Ces efforts ont notamment conduit à ce que la Suisse facilite la résolution

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quadriennale de l'Assemblée générale sur la réforme du système opérationnel en automne.

Comme au sein du FMI, la Suisse occupera un siège de directeur exécutif du groupe de la Banque mondiale en alternance avec la Pologne. Une convention a été conclue à cet effet en mai et entrera en vigueur en 2020. La Suisse continuera de représenter le groupe de vote au niveau ministériel dans le cadre du Comité de développement.

Les négociations de la 18e reconstitution des ressources de l'Association internationale de développement (IDA18), membre du groupe de la Banque mondiale, se sont déroulées en 2016. Les priorités auxquelles la Suisse tient particulièrement (changement climatique, égalité des sexes, fragilité et création d'emplois) ont conservé leur statut de thématiques spéciales et ont été complétées par un cinquième domaine: gouvernance et développement institutionnel. Le modèle de financement marque un tournant important: l'IDA aura pour la première fois accès aux marchés des capitaux et pourra ainsi accroître considérablement sa capacité d'octroi de crédits. Reconnaissant le besoin financier à l'échelle mondiale pour réaliser l'Agenda 2030, la Suisse a appuyé ce projet. Elle a en outre soutenu d'emblée le projet, achevé en août, qui a conduit le groupe de la Banque mondiale à réformer les normes environnementales et sociales qu'elle applique aux projets d'investissement, et prévoit de suivre de près leur application.

L'assemblée constitutive de la Banque asiatique d'investissement dans les infrastructures (BAII) s'est tenue à Pékin en janvier. Elle a adopté un grand nombre de documents de base, notamment les normes environnementales et sociales de l'institution. Dans le débat sur la stratégie énergétique, la Suisse plaide pour que la banque s'attache à promouvoir les énergies renouvelables et ne finance pas de centrales nucléaires ni de centrales à charbon. Elle s'est par ailleurs associée avec le Royaume-Uni, la Pologne, la Suède, la Norvège, le Danemark et l'Islande pour former le groupe de vote Wider Europe. La direction de ce groupe est actuellement assurée par une représentante du Royaume-Uni, tandis que la Suisse met à disposition une directrices suppléante pour la première période de fonction, soit de juin 2016 à juin 2018. En 2016, la Suisse a participé à la stabilité financière et au
renforcement de l'efficacité des banques régionales de développement. Elle a maintenu son soutien au Fonds africain de développement de la Banque africaine de développement et participé au programme d'approvisionnement en eau dans les zones rurales. Dans le cadre des négociations visant à reconstituer les ressources du fonds de la Banque asiatique de développement (BAsD), la Suisse a insisté sur le développement du secteur privé et la prévention des risques naturels. Elle a par ailleurs consenti une hausse de capital afin de participer à la réforme du secteur privé de la Société interaméricaine d'investissement (SII).

3.4.6

Coopération avec l'Europe de l'Est

Aide à la transition: la Suisse appuie la transition vers des systèmes démocratiques basés sur l'économie de marché dans les Balkans occidentaux et dans huit pays de l'ex-Union soviétique. Le crédit-cadre prévu à cet effet est mis en oeuvre par la DDC et le SECO. Les pays des Balkans occidentaux souffrent comme par le passé de 1301

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déficits démocratiques et d'un développement économique faible. À cela s'ajoutent des éléments d'incertitude quant à la prochaine intégration des pays des Balkans dans l'UE, qui reste toutefois le moteur de ces pays pour les réformes en cours et à venir. La Suisse soutient dans ces pays les réformes visant la démocratisation, la décentralisation et la promotion de la bonne gouvernance au niveau local. Par exemple en Serbie, neuf municipalités de l'Est du pays peuvent désormais financer des projets d'importance pour leurs communautés ayant réussi à doubler leur revenu en levant une taxe à la propriété.

La Suisse poursuit son appui aux réformes que ces pays ont engagées dans les domaines de la santé, de la gestion de l'eau, de la protection de l'environnement et de la formation professionnelle. Cette approche consiste notamment à soutenir ces pays dans leurs efforts visant à créer des emplois générant des revenus suffisants et destinés en particulier aux jeunes, dont il importe d'améliorer les perspectives dans leur pays. La mise en oeuvre de la déclaration UE-Turquie de mars 2016, qui vise à mettre fin à la migration irrégulière de la Turquie vers l'UE, a contribué à une forte réduction de la migration le long de la «route des Balkans». La Suisse, qui avait été très active lors de la crise en 2015, poursuit ses activités dans ce domaine dans le cadre des dialogues migratoires avec la Serbie, la Bosnie et Herzégovine et le Kosovo. Ces dialogues sont soutenus par des projets financés par le SEM, qui visent une meilleure gestion des flux migratoires.

Le conflit ukrainien et la récession russe ont eu des répercussions néfastes sur l'économie des pays de l'ex-Union soviétique soutenus par la Suisse. Même si ces pays présentaient des déficits démocratiques auparavant et n'ont affiché qu'une croissance économique très modeste, des résultats remarquables ont été obtenus tant dans le domaine économique qu'en matière de gouvernance. Dans les trois États du Caucase du Sud (Arménie, Géorgie et Azerbaïdjan), les activités ont sensiblement amélioré l'accessibilité et la qualité des services financiers, de la vulgarisation agricole et des services vétérinaires, et ainsi accru la productivité. Les entreprises géorgiennes soutenues par les projets livrent désormais aux supermarchés 53 %, soit plus de 1400 tonnes,
de fromage emballé sur place. De plus, le nombre d'emplois et les revenus des producteurs ont augmenté. En Arménie, la hausse de la productivité dans la région couverte par le projet a réduit l'émigration par rapport à celle enregistrée ailleurs. Grâce à l'encouragement des fusions de communes, plus de 38 000 citoyens peuvent s'adresser à un guichet unique pour régler leurs affaires administratives et bénéficient ainsi de services publics moins coûteux et de meilleure qualité.

Au Tadjikistan, des progrès ont été enregistrés vers l'instauration de l'état de droit.

Des groupes de population pauvres reçoivent en effet des conseils juridiques, connaissent leurs droits et bénéficient ainsi d'un meilleur accès à des mesures de protection.

Contribution à l'élargissement: par sa contribution à l'élargissement, la Suisse participe depuis 2007 à la réduction des disparités économiques et sociales au sein de l'UE élargie. Par la même occasion, elle renforce ses relations bilatérales avec les nouveaux États membres de l'UE. Depuis 2012, 210 projets ont été approuvés en faveur des pays ayant rejoint l'UE en 2004 (UE-10) et dotés d'un crédit global d'un milliard de francs (géré par la DDC et le SECO). Sur ces 210 projets, environ 80 ont pu être achevés sur le terrain. L'état des paiements est actuellement de plus de 65 %.

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Vu l'avancement des travaux, tous les projets devraient atteindre leurs objectifs dans les délais prévus. Les effets positifs directs sur les relations bilatérales avec les pays partenaires se traduisent d'une part par l'amélioration des relations politiques et par la conclusion de partenariats notamment avec des organismes officiels, des universités et des ONG. D'autre part, la Suisse soutient également l'intégration des nouveaux pays membres de l'UE dans le marché commun, qui, grâce à la forte hausse du pouvoir d'achat induite dans les pays bénéficiaires, ouvre de futurs marchés prometteurs à l'industrie suisse d'exportation. Par ailleurs, ces contributions ont eu des retombées directes sur la Suisse, à travers des mandats à des entreprises, consultants, organisations, universités et associations helvétiques, pour un montant de près de 110 millions de francs. Achevée en janvier, une évaluation externe de la contribution à l'élargissement a débouché sur une appréciation positive de l'ensemble du programme: cohérent sur les plans financier et thématique, il complète d'autres efforts (UE, EEE, AELE et Norvège) destinés à atténuer les disparités socioéconomiques. La pertinence des projets examinés a le plus souvent été jugée bonne, voire très bonne. La Lituanie en est un exemple: en 1990, la Suisse a commencé à financer l'équipement médical de maternités lituaniennes. La contribution à l'élargissement a permis de poursuivre cette coopération de manière efficace. Au total, 27 hôpitaux profiteront d'un montant de quelque 46 millions de francs pour réaliser diverses rénovations (isolation, chauffage et réseau d'eau) et équiper leurs maternités d'appareils médicaux modernes. Des mesures de formation continue dispensée au personnel garantissent une meilleure prise en charge des patientes et une bonne utilisation des appareils. Les hôpitaux bénéficient en outre d'un appui pour créer une banque de données regroupant les informations relatives aux patients.

Les diverses activités menées ont contribué à réduire de manière significative la mortalité maternelle et infantile.

3.4.7

Partenariats institutionnels

Pour atteindre les objectifs de la coopération internationale et du développement durable, il importe d'opter pour des solutions applicables par les acteurs tant étatiques, que ceux de l'économie privée et de la société civile. Grâce à leur expérience, leurs programmes et leurs activités opérationnelles, des ONG, des entreprises privées et des centres de compétences suisses participent de diverses manières à la coopération internationale de la Suisse. La DDC a conclu des partenariats institutionnels avec ces acteurs afin de mettre leur savoir-faire, leurs connaissances et leurs moyens d'action au service du développement durable. Selon le message couvrant la période 2017­2020, les partenariats avec les ONG suisses demeureront un pilier important de la coopération internationale. De par leur connaissance des contextes locaux, leurs compétences techniques et méthodologiques, leur expérience et leurs résultats, les ONG sont en effet des partenaires essentiels. La DDC soutient, pour autant qu'ils complètent ses activités et permettent de créer des synergies thématiques, certains programmes menés et placés sous l'entière responsabilité des ONG dans les domaines de la coopération au développement, de l'aide humanitaire et de la coopération avec les pays de l'Est. Les programmes des ONG doivent répondre à des exigences élevées, surtout en termes d'efficacité. En 2016, d'intenses discus1303

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sions ont accompagné la négociation des contributions aux programmes pour les années 2017 et 2018.

Les ONG suisses incluent de plus en plus l'Agenda 2030 dans leurs activités et dans l'orientation de leurs programmes: elles inscrivent les approches appliquées jusqu'ici avec succès dans ce grand cadre stratégique et redéfinissent les priorités de leurs programmes en conséquence. Elles jouent également un rôle crucial dans la réalisation des projets que la DDC met au concours. Une grande part de la collaboration comprend un dialogue permanent au sujet des programmes ainsi qu'un échange de connaissances thématiques et techniques. Les partenariats institutionnels permettent à la fois d'exploiter et de renforcer les compétences des ONG. Le partenariat avec la Croix-Rouge suisse accroît par exemple les capacités de celle-ci dans les domaines suivants: promotion de systèmes de santé primaire, gestion des risques de catastrophe, aide d'urgence en situation de crise et approfondissement de la collaboration avec le Mouvement de la Croix-Rouge et du Croissant-Rouge. Les partenariats peuvent aussi permettre à une ONG de renforcer un profil particulier et unique, comme celui de la Fondation Hirondelle dans la promotion de médias impartiaux de qualité en cas de conflit.

3.4.8

Cohérence des politiques en faveur du développement durable

Il n'est possible d'instaurer un développement durable qu'en harmonisant diverses politiques sur la base de certains principes. Le traitement ordinaire des affaires entre les départements et la prise de décision au niveau du Conseil fédéral garantissent que les politiques sectorielles tiennent compte d'intérêts différents, qu'elles soient aussi cohérentes que possible et ne sapent pas les objectifs de la politique étrangère. À cet effet, l'Agenda 2030 constitue pour la première fois un cadre de référence adopté au niveau politique, valable à l'échelle mondiale et entériné par la Suisse.

Le Conseil fédéral a précisé la notion de cohérence des politiques en faveur du développement durable dans diverses décisions concernant la réalisation de l'Agenda 203042. Cette cohérence implique un examen approfondi et des efforts spécifiques pour améliorer l'harmonisation au niveau des interfaces entre certaines politiques sectorielles d'importance stratégique. À ce titre, la cohérence constitue un principe stratégique pour mettre en oeuvre l'Agenda 2030, tant dans les relations internationales qu'au niveau des diverses politiques sectorielles en Suisse. La difficulté à assurer la cohérence varie selon le domaine politique et les mesures d'application. Cette problématique fera l'objet d'une réflexion approfondie durant une période de transition, fixée entre 2016 et 2017 par le Conseil fédéral, notamment pour inclure l'Agenda 2030 dans la politique intérieure. Dans le message sur la coopération internationale 2017­2020, le Conseil fédéral a déjà esquissé les priorités qu'il entend donner à sa politique de cohérence en faveur du développement durable au niveau international, c'est-à-dire à l'égard des pays émergents, en développement 42

Stratégie pour le développement durable 2016­2019, publiée le 27 janvier 2016; message du 17 février 2016 sur la coopération internationale 2017­2020; réponses à diverses interventions parlementaires.

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et en transition. Il prévoit d'accorder à l'avenir une attention particulière aux domaines où la Suisse et l'économie suisse jouent un rôle particulier et où une grande responsabilité leur incombe. Les domaines en question sont notamment les prestations financières, l'agriculture et alimentation, la chimie et les produits pharmaceutiques ainsi que le négoce de matières premières. Dans leurs efforts destinés à accroître la cohérence des politiques suisses au niveau international, le Conseil fédéral et les offices concernés mettront notamment l'accent sur les secteurs suivants: 1) fiscalité et flux financiers internationaux; 2) environnement; 3) échanges commerciaux, investissements et responsabilité des entreprises; 4) migration; 5) santé.

En ce qui concerne les relations extérieures de la Suisse, le Conseil fédéral a pris d'importantes décisions en 2016 afin de promouvoir la cohérence des politiques en faveur du développement durable. L'élaboration, en exécution de trois postulats43, d'un rapport sur les flux financiers déloyaux et illicites en provenance des pays en développement constituait à cet égard une priorité. Le rapport présente les liens qui existent entre les flux financiers internationaux et les écarts de prospérité entre des pays ayant atteint divers niveaux de développement; il explique aussi comment la Suisse participe aux travaux visant à élaborer une réglementation mondiale durable44. Par ailleurs, dans le cadre d'une réforme du droit des sociétés anonymes, le Conseil fédéral a présenté des propositions destinées à accroître la transparence des paiements des sociétés de matières premières afin de participer ainsi à un développement durable de l'économie mondiale45.

Par ces efforts, de même que par sa volonté d'accroître encore la cohérence des politiques en faveur du développement durable au niveau international, le Conseil fédéral met en oeuvre une recommandation issue de l'examen par les pairs, réalisé en 2013 au sein du Comité d'aide au développement (CAD). Cette recommandation appelait la Suisse à mettre sur pied un suivi systématique et un système d'analyse de ses politiques nationales et internationales qui ont un impact sur les pays en développement. Les offices chargés de la coopération suisse au développement s'efforcent de recourir à des instruments appropriés afin
d'observer davantage leurs activités bilatérales et multilatérales sous l'angle de la cohérence politique en faveur du développement durable, afin de les piloter en conséquence et d'en rendre compte.

Les décisions prises et les travaux menés par le Conseil fédéral en 2016 font de la Suisse un des pays les plus actifs à cet égard. Preuve en est le fait qu'elle joue, avec la Finlande, un rôle pionnier au sein d'une communauté de travail consacrée aux bonnes pratiques dans le domaine de la cohérence politique, qui a été fondée en 2015 afin de compléter le comité correspondant créé au sein de l'OCDE.

43 44 45

Postulats 13.3533 / 13.3848 / 15.3920 Rapport du 12 octobre 2016 sur les flux financiers déloyaux et illicites en provenance des pays en développement.

Message du 23 novembre 2016 concernant la modification du code des obligations (droit de la société anonyme).

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3.4.9

Suivi rigoureux et leçons à en tirer

Dans le cadre d'une coopération internationale efficace, telle que la Suisse entend la conduire, il importe de garantir que les projets et programmes obtiennent les résultats escomptés. La mesure de l'efficacité fait dès lors partie intégrante de la coopération internationale de la Suisse et de ses partenaires, car elle permet de savoir dans quelle mesure cette coopération a amélioré les conditions de vie des groupes visés.

Elle sert toujours à identifier les effets à court et à long terme des activités déployées, à considérer d'un oeil critique ses propres activités, de même que les difficultés rencontrées, et à promouvoir ainsi l'apprentissage institutionnel.

Le terme «effet» est utilisé pour désigner les changements concrets induits par un projet. Tous ces changements fournissent des indications sur l'efficacité de l'engagement. Prouver l'efficacité d'un projet n'est toutefois pas un but en soi, mais constitue un moyen, pour la Suisse et ses partenaires, d'améliorer sans cesse leur travail et de tirer les leçons des expériences les plus récentes. L'analyse critique des succès et des erreurs présuppose que l'organisation a intégré la capacité d'apprendre dans sa culture et qu'elle s'efforce d'améliorer sans cesse ses interventions. Il convient en principe de distinguer deux types d'instruments: le suivi et l'évaluation. Le suivi sert à collecter en continu des informations sur les indicateurs prédéfinis pour mesurer la réalisation des objectifs. Grâce au suivi, la Suisse vérifie si un projet est sur la bonne voie et peut l'adapter en temps utile s'il n'évolue pas comme initialement prévu.

L'évaluation est l'examen externe d'un ou de plusieurs projets, voire de toute une stratégie. Elle apprécie les résultats obtenus et l'efficacité du projet ou de tout un portefeuille d'activités. S'appuyant sur les données du suivi, elle soupèse également la pertinence, l'efficience et la durabilité des projets. Publiée en 2016, une évaluation de l'engagement de la DDC dans le domaine de l'éducation de base a par exemple montré que les activités menées par la Suisse affichent une efficacité élevée, surtout grâce à l'expérience de la Suisse et au réseau étendu qu'elle a su tisser.

Au Burkina Faso, le nombre des classes bilingues est ainsi passé de 78 à 677 entre 2001 et 2013. L'évaluation a cependant aussi
souligné que les projets visant l'éducation de base pourraient être menés à une plus grande échelle au niveau national. Chaque année, la DDC soumet environ 120 projets à une évaluation, soit un dixième environ de son portefeuille. Les évaluations sont réalisées par les responsables de projets de la DDC eux-mêmes ou confiées à l'externe.

Par ailleurs, la DDC commande tous les ans environ cinq grandes évaluations indépendantes. Elles portent toujours sur un portefeuille de projets qui s'inscrivent le plus souvent dans l'une des priorités thématiques définies dans le message. La DDC accorde une priorité absolue à la qualité de ses évaluations. Toutes sont conduites conformément aux critères définis par le CAD et respectent les normes de la Société suisse d'évaluation. En 2016, la Suisse a de plus publié un rapport complet consacré à la réalisation des objectifs du message 2013­2016. Ce rapport a signalé que l'appui de la DDC a par exemple permis d'assurer à plus de 1,5 million de personnes un accès direct et durable à de l'eau potable et à des installations sanitaires. Par ailleurs, afin d'augmenter la capacité d'apprendre de la DDC, deux à trois stratégies pays sont soumises chaque année à une évaluation externe par des pairs. Le travail de la Suisse est en outre régulièrement examiné par les pairs dans le cadre du CAD et les résultats des examens paraissent dans des rapports. Ceux-ci permettent à la 1306

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coopération internationale de tirer les leçons de ses activités tout en les comparant avec celles d'autres pays.

3.5

Politiques extérieures sectorielles

Les aspects thématiques des politiques extérieures sectorielles relèvent majoritairement de la deuxième partie du quatrième axe stratégique de la Stratégie de politique étrangère 2016­2019 du DFAE, Développement durable et prospérité. Par son engagement dans ces multiples domaines, la Suisse contribue à l'instauration d'un environnement international propice à la prospérité.

3.5.1

Politique financière et économique internationale

Dialogue financier: la Suisse mène des dialogues financiers et réglementaires avec de nombreux pays du G20 et d'autres grands États partenaires dans le but d'entretenir des contacts réguliers avec leurs autorités et d'harmoniser les positions défendues dans le cadre des organisations internationales compétentes. Des questions bilatérales sont également traitées dans ce cadre. En 2016, des dialogues ont ainsi été menés avec l'Allemagne, la Chine, le Royaume-Uni, l'Inde, l'Iran, la Pologne, la Russie, Singapour et les États-Unis.

Relations fiscales bilatérales: le protocole modifiant la convention contre les doubles impositions (CDI) conclue entre la Suisse et l'Italie est entré en vigueur le 13 juillet 2016, avec la norme internationale sur l'échange de renseignements sur demande. L'accord sur l'échange de renseignements en matière fiscale (AERF) signé en novembre 2015 avec le Brésil a été approuvé en décembre par le Parlement.

La procédure d'approbation est encore en cours au Brésil. La Suisse a conclu un total de 54 CDI (dont 50 sont en vigueur) assortis d'une clause d'assistance administrative conforme à la norme internationale, de même que 10 AERF (dont 9 sont en vigueur).

Garantie du respect des obligations fiscales: le Parlement a approuvé dans le courant de l'année l'instauration de l'échange automatique de renseignements (EAR) en matière fiscale avec un premier groupe d'États et de territoires, dont l'Australie, l'Islande, la Norvège, Guernesey, Jersey, l'île de Man, le Japon, le Canada et la République de Corée. Ce système entrera en vigueur le 1 er janvier 2017 avec un premier échange de renseignements en 2018. Aucun référendum n'ayant été lancé contre l'accord d'EARavec l'UE (28 États membres et Gibraltar), approuvé en juin 2016, celui-ci entrera en vigueur en janvier 2017 également. La Suisse compte étendre le principe à d'autres États et territoires. Dans l'optique d'introduire un EAR en 2018 (avec un premier échange de données en 2019), la Suisse a signé en novembre et en décembre des déclarations communes avec l'Argentine, l'Uruguay, le Brésil, le Mexique, l'Inde, l'Afrique du Sud, Saint-Marin, Israël, la NouvelleZélande et le Chili. L'introduction de l'EAR avec ces États et d'autres (Andorre, la Barbade, les îles Bermudes, les îles Vierges britanniques, les îles Caïman, les îles Féroé, le Groenland, l'île Maurice, Monaco, les Seychelles, ainsi que les îles Turks1307

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et-Caïcos) a été mise en consultation le 1er décembre. Le Parlement délibèrera sur ce dossier en 2017.

Forum mondial: le Forum mondial sur la transparence et l'échange de renseignements à des fins fiscales a attribué à la Suisse la note globale «conforme pour l'essentiel» au terme de la deuxième phase de l'examen par les pairs de la mise en oeuvre de la norme internationale d'échange de renseignements sur demande. Cette appréciation positive est due en particulier à l'inscription dans la loi sur l'assistance administrative fiscale d'une exception à la notification des contribuables faisant l'objet d'une demande d'assistance administrative, à l'extension du réseau des accords conformes à la norme et à l'augmentation des ressources en personnel dans le but de garantir un échange de renseignements efficace.

OCDE ­ questions fiscales: dans le cadre du Projet de lutte contre l'érosion de la base d'imposition et le transfert de bénéfices (Base Erosion and Profit Shifting, BEPS) du G20 et de l'OCDE, la Suisse a signé le 27 janvier l'accord multilatéral portant sur l'échange automatique des déclarations pays par pays (Le Conseil fédéral a adopté le message y relatif le 23 novembre. Cet accord définit notamment la nature des informations échangées entre les États sur les activités des entreprises multinationales présentes sur leur territoire. La Suisse décidera dans une phase ultérieure avec quels pays partenaires elle entend procéder à de tels échanges. Dans le même ordre d'idées, le Parlement a adopté en juin la loi sur la réforme de l'imposition des entreprises III (RIE III). La réforme a pour but d'adapter la fiscalité des entreprises aux normes internationales tout en renforçant la compétitivité du site entrepreneurial suisse. La RIE III ayant fait l'objet d'un référendum, ce sera au peuple de se prononcer sur l'avenir de cette réforme.

Groupe d'action financière (GAFI): le GAFI a soumis la Suisse à une évaluation en 2016 afin de vérifier que ses 40 recommandations contre le blanchiment d'argent et le financement du terrorisme avaient été intégrées dans le droit national et, pour la première fois, que les consignes étaient appliquées efficacement. Le rapport sur la Suisse approuvé par l'assemblée plénière du GAFI a été publié en décembre. Il classe la Suisse au-dessus de la moyenne des autres pays
déjà évalués, surtout en ce qui concerne la mise en oeuvre effective.

Sanctions: les intérêts de la Suisse en matière de politique extérieure jouent un rôle déterminant dans la décision, prise en toute autonomie, de reprendre intégralement, partiellement ou de ne pas reprendre les sanctions imposées par l'UE. Dans le cas de l'Iran, la mise en oeuvre de l'accord global sur le nucléaire a eu lieu en janvier. Aussi le Conseil fédéral a-t-il levé les sanctions suisses, en même temps que l'étaient celles de l'ONU et de l'UE. En ce qui concerne la situation en Ukraine, le Conseil fédéral a continué en 2016 à appliquer sa politique en prenant toutes les mesures nécessaires afin que le territoire suisse ne soit pas utilisé pour contourner les sanctions prises contre la Russie.

G20: la priorité de la présidence chinoise du G20 en 2016 résidait, parallèlement à la poursuite de l'agenda courant du G20, dans le renforcement de la croissance économique mondiale par la promotion de l'innovation, des réformes structurelles, des réseaux internationaux et du développement durable ainsi que par l'association de larges couches de la population à cette croissance. La Chine a invité la Suisse à 1308

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prendre part de nouveau, après une première fois en 2013, au volet financier du G20, lui donnant ainsi l'occasion de participer aux rencontres des ministres des finances et des gouverneurs des banques centrales de même qu'aux réunions préparatoires de leurs suppléants, et de s'impliquer dans les groupes de travail du volet financier.

L'association de la Suisse à ces travaux souligne l'importance du rôle qui lui est reconnu au niveau international dans le domaine financier. L'Allemagne a pris la présidence du G20 le 1er décembre, et réinvité la Suisse à prendre part au volet financier.

Lutte contre la corruption: sur le plan multilatéral, la présidence chinoise du G20 a invité la Suisse à participer en 2016, en plus du segment financier du G20, au groupe de travail anticorruption du G20, et plus particulièrement à mettre son expertise au service du recouvrement d'avoirs, domaine que la Chine avait hissé au rang de priorité pour cette année. Dans ce contexte, la nouvelle loi suisse sur les valeurs patrimoniales d'origine illicite a été reconnue comme exemplaire. Le conseiller fédéral Didier Burkhalter a profité du sommet anticorruption qui s'est tenu à Londres en mai pour souligner les efforts consentis par la Suisse afin de restituer les fonds étrangers provenant de la corruption. Dans le sillage de la publication des Panama Papers, ce sommet avait pour thème principal l'accroissement de la transparence, en ce qui concerne notamment les ayants droit économiques de personnes morales et d'autres constructions juridiques (y compris les trusts), mais aussi le secteur des matières premières, les marchés publics et le sport. En mars 2016, une réunion ministérielle sur la convention anticorruption de l'OCDE a lancé la phase 4 des examens de pays et réitéré la volonté des États membres de lutter contre la corruption dans les transactions commerciales internationales. Sur le pan bilatéral, la Suisse a engagé avec la Chine et le Brésil des dialogues anticorruption dans le but de favoriser les échanges sur les questions de prévention.

Small Advanced Economies Initiative: la Suisse est membre de la Small Advanced Economies Initiative depuis 2015. Il s'agit d'une collaboration avec six autres pays (Nouvelle-Zélande, Singapour, Israël, Irlande, Danemark et Finlande) qui ont en commun le fait d'être considérés
comme des économies avancées par le Fonds monétaire international (FMI) et dont la population comprend entre 5 et 10 millions de personnes. Cette plate-forme informelle lancée par la Nouvelle-Zélande permet d'échanger à un haut niveau avec des pays qui font face à des défis et à des opportunités similaires dans le système économique global actuel, et d'aborder des thèmes comme la science et l'innovation, la politique économique, la politique étrangère et la politique commerciale du point de vue des petites nations. La Suisse a participé à la réunion annuelle de haut niveau (Principals' Meeting) qui s'est tenue en septembre à Dublin.

3.5.2

Environnement

Gouvernance internationale de l'environnement: la Suisse attache une grande importance à la promotion et à l'exploitation des synergies entre les différents traités internationaux concernant l'environnement. Elle a renouvelé son engagement dans ce sens à l'occasion de la deuxième Assemblée des Nations Unies pour l'environne1309

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ment (ANUE 2), où il a notamment été décidé d'accorder au Programme des Nations Unies pour l'environnement (PNUE) un rôle clé quant à l'atteinte des objectifs de l'ONU en matière de développement durable. La huitième conférence ministérielle «Un environnement pour l'Europe» de la Commission économique pour l'Europe des Nations Unies (CEE-ONU) fut principalement consacré à la lutte contre la pollution de l'air et à la promotion d'une économie verte. L'engagement actif de Bertrand Piccard (Solar Impulse II), illustré par la projection d'une vidéo, a assuré à la Suisse une présence forte.

Climat: l'année 2015 a été cruciale pour la politique internationale en matière de climat, vu l'adoption de l'accord de Paris sur le climat lors de la Conférence sur le climat (COP21). En 2016, les négociations internationales se sont par contre normalisées en termes d'intensité et de visibilité avec deux priorités: la mise en oeuvre de l'accord de Paris après 2020 et la ratification de l'accord dans les meilleurs délais.

L'objectif fixé par la France et le Maroc, hôte de la COP22, d'atteindre en 2016 le nombre de ratifications nécessaire pour permettre l'entrée en vigueur de l'accord, a été atteint. L'accord de Paris est donc entré en vigueur début novembre. La communauté internationale a ainsi marqué par un signal fort sa volonté de lutter activement contre le changement climatique. La Suisse aussi a entamé les préparatifs du processus de ratification. Le Conseil fédéral soumettra le message correspondant aux Chambres fédérales en 2017. Le moment fort de la politique internationale en matière de climat a eu lieu au Rwanda, où les États membres du protocole de Montréal relatif à des substances qui appauvrissent la couche d'ozone ont décidé lors de leur séminaire d'octobre de réduire d'ici à 2035 de 85 % par rapport au niveau actuel les hydrofluorocarbures, particulièrement nocifs pour le climat. En parallèle, la Suisse s'est encore engagée activement, en 2016, en faveur de nombreux thèmes pertinents pour le climat tels que la forêt, l'agriculture, l'énergie, le transfert de technologie et la recherche, les droits de l'homme, l'égalité des sexes, la santé, mais aussi et surtout la nouvelle plate-forme sur les déplacements liés aux catastrophes, qui succède à l'initiative Nansen (voir ch. 3.3.5).

Substances chimiques
et déchets: le nombre des ratifications de la nouvelle convention de Minamata sur le mercure a continué d'augmenter en 2016, avec notamment celle de la Suisse le 25 mai. Il en faut 50 pour que la convention entre en vigueur, et ce chiffre pourrait être atteint en 2017. Dans la perspective de la première conférence des parties à la convention, qui aura lieu après l'entrée en vigueur, la Suisse a maintenu sa candidature pour le siège du secrétariat, qu'elle propose d'intégrer au secrétariat commun des trois conventions sur les substances chimiques et les déchets, lequel se trouve à Genève.

Protection et exploitation durable de la biodiversité: il faut renforcer l'exploitation des synergies entre les différents accords relatifs à la protection et à une exploitation durable de la biodiversité, sur le modèle du processus adopté pour les trois conventions relatives aux substances chimiques et aux déchets. Telle était l'une des priorités de la Suisse lors de la treizième conférence des parties à la convention sur la diversité biologique (CDB COP13) qui s'est tenue en décembre au Mexique.

Protection des espèces: la lutte contre le commerce illégal d'animaux et de plantes était le thème principal de la dix-septième conférence des parties à la convention sur le commerce international des espèces de faune et de flore sauvages menacées 1310

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d'extinction (CITES COP 17), qui a eu lieu en septembre et octobre en Afrique du Sud. Si l'on veut contrer le braconnage, qui a pris des proportions intolérables, surtout en Afrique, il faut impérativement améliorer la coordination internationale de la lutte contre le commerce illégal. La Suisse soutient des initiatives internationales de lutte contre le trafic de produits issus de la faune sauvage, notamment dans le cadre d'Interpol et de la troisième Conférence internationale sur le commerce illicite d'espèces sauvages qui s'est tenue au Vietnam en novembre.

Commission baleinière: la présidence suisse de la Commission baleinière internationale (CBI) a pris fin à l'issue du séminaire organisé en Slovénie fin octobre. La chasse à la baleine pratiquée par le Japon pour des raisons scientifiques, et qui a repris, dans des proportions moindres, après le jugement de la Cour internationale de justice, reste très controversée.

Congrès mondial de la nature de l'UICN: le Congrès mondial de la nature de l'Union internationale pour la conservation de la nature (UICN), qui se tient tous les quatre ans, a eu lieu en octobre à Hawaii et a donné lieu à la publication d'une nouvelle «liste rouge» des espèces menacées. Dans ce cadre aussi, la Suisse avait à coeur de promouvoir, par un renforcement des synergies, une meilleure collaboration entre les différents forums consacrés à la biodiversité.

Conférence de l'ONU sur le logement et le développement urbain durable: la troisième Conférence de l'ONU sur le logement et le développement urbain durable (Habitat III) a eu lieu en octobre. La Suisse a pris une part active aux négociations relatives au document final, le nouvel agenda urbain, qui a été adopté par la conférence et qui renforcera l'engagement de la communauté internationale en faveur du développement urbain durable et servira de référence pour les mesures visant à relever les défis actuels et futurs dans les zones urbaines. Ce document prévoit que les États pourront, s'ils le souhaitent, rendre périodiquement des comptes sur leur mise en oeuvre de l'agenda. Plus de la moitié de la population mondiale vit aujourd'hui en ville. Ainsi, le nouvel agenda urbain contribuera aussi à la mise en oeuvre de l'Agenda 2030 de développement durable.

Conseil de l'Arctique: en 2015, les États membres du Conseil de
l'Arctique ont repoussé l'examen des demandes d'octroi du statut d'observateur en suspens (dont celle de la Suisse) au prochain sommet ministériel, qui aura lieu au printemps 2017 sous la présidence américaine. Initialement organe de coopération apolitique sur le développement durable, la protection de l'environnement mais aussi le sauvetage en mer, le Conseil de l'Arctique a vu son importance politique croître récemment. Les observateurs comptent notamment parmi leurs rangs, outre les grands États européens, des États comme la Chine, le Japon et la Corée du Sud. Par sa présence active à des rencontres importantes concernant l'Arctique (l'Assemblée du Cercle de l'Arctique en octobre à Reykjavik et la conférence ministérielle de la Maison blanche sur les sciences de l'Arctique en septembre à Washington), la Suisse a souligné qu'elle est prête à contribuer au développement durable de cette région.

Économie verte: lors de la huitième conférence ministérielle «Un environnement pour l'Europe», les gouvernements ont approuvé le cadre stratégique paneuropéen pour une écologisation de l'économie et ­ à l'instigation de la Suisse qui s'est beaucoup impliquée dans le processus ­ pour l'initiative Batumi sur l'économie verte 1311

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(BIG-E), soit un ensemble d'engagements volontaires pris par les pays et les organisations intéressées à entreprendre des actions pour une économie verte. À l'initiative de plusieurs pays, dont la Suisse, le Panel international des ressources (IRP) du PNUE a commencé à travailler sur les questions de gouvernance dans le domaine des ressources naturelles, y compris dans le secteur des matières premières.

3.5.3

Santé, transports et énergie

Santé: la Suisse a encore oeuvré, en 2016, en faveur de la réforme de l'Organisation mondiale de la santé (OMS), contribuant en particulier à l'élaboration d'un corpus de règles sur les relations entre l'OMS et les acteurs non étatiques et s'engageant pour la création d'un programme de maîtrise des situations d'urgence ayant des conséquences sanitaires et humanitaires. Elle a également contribué au développement de nouvelles stratégies sectorielles de lutte contre le VIH/sida, l'hépatite virale et les maladies sexuellement transmissibles. La Suisse a par ailleurs assumé un rôle clé dans le processus de coordination et de financement de la recherche et du développement de nouveaux médicaments contre des maladies négligées qui frappent plus particulièrement les pays en développement. Elle a aussi oeuvré à l'élaboration d'une stratégie de lutte contre la démence. En 2016, la Suisse a assuré la présidence du comité exécutif d'ONUSIDA et oeuvré comme facilitateur lors de la réunion de haut niveau de l'Assemblée générale de l'ONU sur le VIH/sida (voir ch. 3.4.4), poursuivant par ailleurs son engagement au Fonds mondial de lutte contre le sida, la malaria et la tuberculose. La Suisse était aussi représentée à une réunion de haut niveau de l'Assemblée générale de l'ONU sur les résistances antimicrobiennes.

Dans le cadre de la session extraordinaire de l'Assemblée générale de l'ONU (UNGASS) sur la drogue et ses préparatifs, elle s'est engagée pour une politique en matière de drogue axée sur les droits de l'homme et les droits en matière de santé.

La politique suisse des quatre piliers dans ce domaine a suscité l'intérêt de la communauté internationale.

Lors de la rencontre annuelle du quintette de la santé (Allemagne, Autriche, Liechtenstein, Luxembourg et Suisse) à Luxembourg, à laquelle a participé le conseiller fédéral Alain Berset, les discussions ont notamment porté sur la prévention des addictions, les services de santé électroniques (eHealth) et les compétences en matière de santé (Health Literacy). L'accord-cadre sur la santé avec la France a été signé en 2016. Il doit faciliter la conclusion de projets de coopération transfrontaliers dans le domaine de la santé. Les débats techniques concernant l'accord Suisse-UE dans le domaine de la santé publique se sont achevés en 2015, mais sa signature
reste liée à la conclusion d'un accord-cadre sur les questions institutionnelles (voir ch. 3.1.1).

Transports routier, ferroviaires et maritimes: les ministres des transports de l'Allemagne, de l'Italie, de la France, de l'Autriche, de la Suisse, du Liechtenstein et de la Slovénie se sont réunis à Lugano en mai dans le cadre du Suivi de Zurich et à l'occasion de l'ouverture du Saint-Gothard, pour évoquer la sécurité des transports et la mobilité dans la région alpine. La cérémonie d'inauguration du tunnel de base du Saint-Gothard, qui a eu lieu le 1er juin, a été couverte par les médias du monde 1312

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entier. Ce tunnel ferroviaire, le plus long du monde (57 km), est un élément clé de la Nouvelle ligne ferroviaire à travers les Alpes (NLFA). Sa mise en service commerciale a eu lieu le 11 décembre. La Suisse et l'Allemagne ont signé le 7 mars un protocole d'entente par lequel elles renforcent leur volonté politique d'électrifier la ligne du Haut-Rhin (Bâle­Schaffhouse par le territoire allemand). Des discussions pour en assurer le financement sont en cours. La Suisse a participé financièrement à une étude préalable sur le projet de raccordement ferroviaire de l'aéroport de BâleMulhouse. Un accord dans ce sens a été signé en avril. La Suisse et la région Bourgogne-Franche-Comté ont signé le 5 décembre une déclaration d'intention concernant le projet de raccordement ferroviaire entre Bienne et Belfort. Sur la ligne de Luino, les travaux visant à adapter le profil de l'axe aux semi-remorques de quatre mètres de hauteur ont commencé pendant l'été. La Suisse y contribue à hauteur de 120 millions d'euros. La Suisse et l'Italie ont signé en mai une déclaration d'intention concernant la navigation touristique sur le lac Majeur et sur le lac de Lugano. Par ailleurs, l'accord entre les deux pays sur la reconnaissance mutuelle et l'échange des permis de conduire est entré en vigueur en juin. Enfin, la Suisse a signé en mai avec l'Ukraine et la Moldavie un protocole de libéralisation du transport routier de marchandises, qui est entré en vigueur en septembre..

Trafic aérien: l'Allemagne n'a toujours pas ratifié l'accord aérien international sur les procédures d'approche de l'aéroport de Zurich. Ses autorités examinent toujours les modifications, demandées par la Suisse en 2014, des procédures visant à découpler les approches sur l'axe Est (Ostanflug) dans le nouveau règlement d'exploitation 2014. De nouveaux accords de trafic aérien ont été conclus avec le Mexique, la Namibie, l'Indonésie et la Colombie, un autre paraphé avec la Côte d'Ivoire. L'Organisation de l'aviation civile internationale (OACI) a tenu son assemblée générale triennale avec élection du Conseil à son siège de Montréal à l'automne. Le siège du groupe de rotation ABIS, auquel appartient la Suisse, est désormais occupé par l'Irlande.

Énergie: dans le domaine de l'énergie, la conclusion d'un accord bilatéral sur l'électricité avec l'UE dépend
de facteurs institutionnels et en particulier du sort réservé à l'accord sur la libre circulation des personnes (voir ch. 3.1.1). Les nombreuses interdépendances avec les pays voisins requièrent un approfondissement des coopérations bilatérales. Les contacts avec l'Autriche, l'Italie et l'Allemagne ont donc été particulièrement intensifiés l'an dernier. En juin, les directeurs allemands, autrichiens, luxembourgeois et suisses de l'énergie se sont ainsi rencontrés en Suisse. Lors de leurs échanges, la question de la centrale nucléaire de Beznau et celle de la recherche d'un site d'enfouissement de déchets nucléaires près de la frontière allemande ont notamment été abordées. Dans le domaine de l'innovation, des délégations suisses, composés notamment d'entreprises du secteur énergétique, ont pris part au CleantechInnovate London en février et aux Swiss-US Energy Innovation Days à San Francisco en août. Le sujet Cleantech a primé les visites de la conseillère fédérale Doris Leuthard en Chine, en Indonésie et au Canada. Elle a été accompagnée chaque fois par une délégation économique du secteur de l'énergie.

La Suisse a poursuivi son action en faveur du renforcement d'institutions multilatérales telles que l'Agence internationale de l'énergie (AIE), les organisations internationales de l'énergie atomique (l'AIEA de l'ONU et l'AEN de l'OCDE), l'Agence 1313

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internationale pour les énergies renouvelables (International Renewable Energy Agency, IRENA) et le Conseil mondial de l'énergie (World Energy Council, WEC).

La Suisse a participé à la Semaine de la durabilité de l'IRENA à Abou Dhabi en janvier, au Congrès mondial de l'énergie du WEC à Istanbul en octobre et au septième Forum international pour le dialogue sur l'énergie au service du développement durable de la Commission économique pour l'Europe des Nations Unies à Bakou en octobre.

Dans le cadre de la coopération au développement, la Suisse a continué en 2016 à encourager l'accès à des sources d'énergie modernes ainsi que l'amélioration des conditions-cadres visant à renforcer l'efficacité énergétique et à promouvoir les énergies renouvelables. La coopération au développement met l'accent sur une gestion rigoureuse, axée sur les résultats, de l'énergie dans les villes, notamment dans le domaine de la mobilité, de l'approvisionnement en eau, du traitement des eaux usées et de la gestion des déchets.

3.5.4

Formation, recherche et innovation (FRI)

Coopérations scientifiques bilatérales: elles continuent de se développer conformément aux priorités fixées par la stratégie internationale FRI de 2010. Plusieurs voyages de délégations suisses dans différents pays (Chine, Iran, Liban, Indonésie, Soudan, Kenya, Éthiopie, etc.) ou l'accueil de délégations étrangères en Suisse ont permis d'intensifier des collaborations existantes ou d'évaluer plus nettement, dans certains cas, le potentiel d'un approfondissement éventuel d'une future coopération.

En Europe, ce sont principalement les relations avec les pays voisins et certains États membres de l'UE (Slovaquie, Pologne, Bulgarie, etc.) qui ont fait l'objet de discussions approfondies à un haut niveau. Pour sa part, la Commission fédérale des bourses pour étudiants étrangers a attribué 201 bourses pour l'année académique 2016­2017. En décembre 2015 le Secrétariat d'État à la formation, à la recherche et à l'innovation (SEFRI) a par ailleurs publié une feuille de route pour le développement du réseau swissnex46 dans une perspective de consolidation, d'allégement, de souplesse et d'innovation. Le projet-pilote d'un swissnex mobile a été lancé conjointement avec Présence Suisse en vue de l'Exposition universelle de 2017 à Astana au Kazakhstan.

Coopérations scientifiques multilatérales: s'agissant du programme-cadre de recherche Horizon 2020, qui comprend le programme de recherche de la Communauté européenne de l'énergie atomique (Euratom) et le projet de réacteur thermonucléaire expérimental international (ITER), la pleine association de la Suisse reste prioritaire pour le Conseil fédéral. L'association partielle avec l'UE décidée en septembre 2014 était valable jusqu'à la fin de l'année sous revue. Avec la ratification du protocole concernant l'extension de l' accord sur la libre circulation des personnes (ALCP) à la Croatie, les conditions d'une participation pleine et entière de la Suisse au programme Horizon 2020 sont remplies.

46

Pour en savoir plus: www.swissnex.org

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La Suisse abrite depuis 1954 le siège du Laboratoire européen pour la physique des particules (CERN), qui est à la pointe de la recherche mondiale et dont elle est un membre fondateur. Cette longue expérience a fait apparaître les avantages nombreux et durables que ce genre de structures internationales recèle pour son paysage scientifique. La Suisse est aujourd'hui associée à des dizaines d'organisations de ce type, dont les champs d'activité s'étendent de l'astronomie à la biologie en passant par la fusion nucléaire. En font notamment partie l'ITER, placé sous la direction de l'UE et mis en oeuvre dans le cadre des conventions sur l'association de la Suisse aux programmes-cadres de recherche européens. L'objectif déclaré d'ITER, projet issu d'une collaboration à l'échelle mondiale, est de démontrer que la fusion nucléaire peut être utilisée comme source d'énergie. Au mois de juin a été publié le calendrier actualisé, validé par le Conseil ITER, du chantier et de la mise en service d'ITER à Cadarache, en France. Le début de la phase opérationnelle y est reporté de 2020, délai fixé initialement, à 2025. La fin des expériences décisives est prévue pour 2035.

L'initiative européenne EUREKA soutient des projets de coopération transnationaux en matière de recherche et de développement répondant aux attentes du marché. Elle poursuit son internationalisation: l'examen de l'intégration du Chili a commencé à l'initiative de la présidence suisse en 2014/2015 et doit aboutir lors de la conférence ministérielle de juin 2017. S'agissant du programme européen d'assistance à la vie active (AVA), qui vise à améliorer la qualité de vie, la santé et l'autonomie des personnes âgées, les participants suisses affichent un excellent taux de réussite de plus de 30 %. Saint-Gall a accueilli en septembre le forum international 2016 du programme AVA, où des représentants du monde politique, de l'industrie et de la recherche ont partagé leurs expériences et leurs idées et où ont été présentées les dernières innovations technologiques adaptées aux personnes âgées.

Coopération en éducation: le Conseil fédéral poursuit le but d'une association au programme éducatif et de jeunesse Erasmus+ à moyen terme. La réalisation de cet objectif dépendra de la solution trouvée à l'ALCP et de son extension à la Croatie (voir ch. 3.1.1),
de même que des coûts et de la situation financière de la Confédération. La mesure transitoire adoptée en 2015 par le Conseil fédéral en faveur des participants suisses a-t-elle à nouveau été appliquée durant l'année sous revue, et sera-t-elle prolongée en 2017.

La stratégie de la Suisse pour la coopération internationale en matière de formation professionnelle (CIFP) est mise en oeuvre à travers les activités et selon les priorités thématiques et géographiques de plusieurs offices de la Confédération (SEFRI, DDC, SECO, DFAE/DP, SEM, IFFP). La cohérence entre les activités des offices précités est assurée par un groupe de coordination interdépartemental institutionnalisé, depuis 2014 sous l'égide du SEFRI. La CIFP vise notamment le renforcement et la promotion de la formation professionnelle suisse au niveau international. Un outil utile est le Congrès international sur la formation professionnelle, dont la deuxième édition a eu lieu en juin à Winterthour. Le succès de cet évènement a, une fois de plus, mis en évidence que le modèle de formation professionnelle duale suisse continue à susciter de l'intérêt à l'étranger. Des coopérations bilatérales avec des pays prioritaires sont en cours de mise en oeuvre ou en phase de concrétisation, notamment avec les États-Unis ou l'Afrique du Sud. Pour la promotion du système 1315

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de formation professionnelle à l'étranger, la Suisse peut notamment compter sur le soutien et la collaboration des pays voisins germanophones, qui connaissent un système similaire et mènent également des projets à l'étranger dans ce domaine.

Domaine spatial: la Suisse poursuit son engagement en faveur du renforcement de la gouvernance globale des activités spatiales et de la stabilité dans l'espace. Elle milite pour éviter que des conflits armés s'y développent et pour que les activités spatiales soient menées de façon sûre et durable sur le long terme. Au Comité de l'ONU pour les utilisations pacifiques de l'espace extra-atmosphérique (UNCOPUOS), la Suisse a ainsi contribué à l'adoption, en juin, de lignes de conduite visant à assurer la viabilité à long terme des activités spatiales. Dans le cadre de la co-présidence, partagée avec le Luxembourg, du Conseil ministériel de l'Agence spatiale européenne (ESA), la Suisse a soutenu l'organisation d'une seconde réunion informelle sur l'espace, réunissant les ministres des États membres de l'ESA et de l'UE. Les conclusions de cette réunion organisée avec les Pays-Bas durant leur présidence du Conseil des ministres de l'UE ont été reprises dans le The Hague Manifesto on Space Policy, en vue de la préparation de la déclaration commune relative aux objectifs communs de la Commission européenne et du directeur général de l'ESA, laquelle a été signée fin octobre. La Suisse a intensifié ses actions lors de sa coprésidence, et les décisions prises par le Conseil ministériel de l'ESA au cours de sa réunion à Lucerne, ont aussi été possibles grâce notamment à ses efforts de collaboration, de négociation et de médiation. À Lucerne, l'Espagne a pris la présidence du Conseil ministériel de l'ESA.

3.5.5

Culture

La Suisse développe et entretient avec l'étranger des collaborations culturelles denses. Sur le plan bilatéral, l'année écoulée a notamment permis la signature d'un accord sur le trafic illicite des biens culturels entre la Suisse et le Pérou. Elle a également été marquée par la signature, en novembre, d'un protocole d'entente destiné à renforcer la coopération culturelle avec l'Autriche et, en mars, d'une lettre d'intention entre l'Institut mexicain du cinéma et l'Office fédéral de la culture (OFC) sur l'opportunité d'établir un accord de coproduction cinématographique entre la Suisse et le Mexique à l'horizon 2017.

La Fondation suisse pour la culture Pro Helvetia a mené à terme le programme thématique d'échanges avec la Russie Swiss made in Russia ­ Contemporary Cultural Exchanges 2013­2016. Afin de pérenniser ces échanges fructueux, la fondation ouvrira un bureau de liaison à Moscou début 2017 et dont les préparatifs ont eu lieu en 2016. Pro Helvetia met par ailleurs en place un programme d'échanges avec l'Amérique latine, qui sera lancé en 2017, et poursuit ses efforts de promotion des acteurs culturels suisses à l'étranger, en renforçant tout particulièrement la présence d'artistes suisses lors d'évènements phares internationaux (foires, festivals, etc.). La fondation développe par ailleurs un nouveau modèle d'exportation pour les métropoles européennes, afin de renforcer la présence des artistes suisses et de leurs oeuvres dans ces régions.

1316

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Sur le plan multilatéral, l'action de la Suisse en matière culturelle a pour partenairesclés le CdE, l'UE et l'UNESCO. L'UE est le principal organisme de promotion culturelle à l'échelle régionale et constitue pour la Suisse un allié pertinent en matière de politique culturelle internationale. Malgré la votation populaire du 9 février 2014 et ses conséquences sur les relations entre la Suisse et l'UE, l'année sous revue a permis une poursuite des négociations techniques entre les parties en vue de conclure un accord portant sur la participation de la Confédération au programme Europe créative 2014­2020 (volets MEDIA et Culture). La conclusion de cette future entente reste toutefois tributaire de la clarification des questions institutionnelles.

Afin de pouvoir pallier partiellement l'exclusion de la Suisse du programme MEDIA, l'ordonnance du DFI sur les mesures compensatoires introduites en 2014 offre aux réalisateurs suisses la possibilité de déposer des demandes pour participer à des projets européens, d'assurer la continuité des projets dont la réalisation s'étale sur plusieurs années et de faciliter la réintégration ultérieure de la Suisse au volet MEDIA. Depuis le 1er juillet, les mesures compensatoires MEDIA sont réglées dans l' ordonnance du DFI du 21 avril 2016 sur les mesures d'encouragement de la présence internationale de la cinématographie suisse et les mesures compensatoires MEDIA (OPICin)47. Sur la base de cette nouvelle ordonnance, il sera désormais possible de soutenir des ensembles de projets axés sur l'international. La nouvelle ordonnance renforce également le soutien à l'exportation et la présence des films suisses aux festivals internationaux.

Dans le cadre de l'UNESCO, l'engagement de la Suisse dans le domaine de la culture continue de cibler le suivi des instruments normatifs. S'agissant de la convention sur la protection et la promotion de la diversité des expressions culturelles, la Suisse a fourni à l'UNESCO son deuxième rapport périodique, qui a été dûment approuvé par le Conseil fédéral. Dans le cadre du patrimoine culturel immatériel, le premier dossier présenté par la Suisse pour inscription auprès de l'UNESCO a été évalué favorablement, permettant à la Fête des Vignerons de Vevey de se voir inscrite sur la liste représentative du patrimoine culturel immatériel
de l'humanité.

Un deuxième dossier, le Carnaval de Bâle, a été déposé en 2016 par l'OFC, pour inscription en 2017. L'oeuvre de Le Corbusier a été inscrite sur la liste du patrimoine mondial, marquant le succès d'une candidature transnationale pilotée par la France à laquelle se sont associés six autres pays, dont la Suisse. L'immeuble «Clarté» à Genève et la Villa «Le Lac» de Corseaux sont les deux objets suisses inscrits dans ce cadre, aux côtés de quinze autres oeuvres situées en France, en Belgique, en Allemagne, en Inde, en Argentine et au Japon.

3.5.6

Société de l'information et gouvernance d'Internet

Le cadre de la coopération internationale pour la création d'une société de l'information universaliste et axée sur le développement découle des deux phases (à Genève en 2003 et à Tunis en 2005) du Sommet de l'ONU sur la société de l'information (SMSI). Dans le contexte des travaux de suivi du SMSI ­ mis à jour par les conclusions de la rencontre de haut niveau SMSI+10 en 2015 qui met l'accent sur 47

RS 443.122

1317

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les aspects de développement ­ la Suisse veille à une coordination et à une représentation active de sa position dans les organisations internationales compétentes. La Suisse attache une grande importance à ce que les discussions sur la mise en oeuvre des conclusions du SMSI intègrent les groupes d'intérêts les plus divers.

Sur le plan international, la Suisse s'engage pour le développement de l'utilisation et de l'administration d'Internet et promeut un cadre juridique et politique pour que la gouvernance d'Internet soit empreinte des principes fondamentaux de liberté, de démocratie et d'état de droit (voir ch. 3.3.2). À cette fin, la Suisse préconise fortement que le processus de dialogue implique tous les acteurs concernés. Lancée en 2014 par la Suisse, la Geneva Internet Platform (GIP) contribue également à une meilleure entente entre tous les acteurs, en mettant notamment l'accent sur les pays en développement. Les plates-formes de discussion créées dans le sillage du SMSI à l'image de l'Internet Governance Forum (IGF), notamment le Dialogue européen sur la gouvernance de l'Internet (EuroDIG) mis en place avec le concours de la Suisse, permettent à celle-ci de s'impliquer dans le débat sur les développements ultérieurs de l'approche multipartite.

En étroite collaboration avec le CdE, la Suisse contribue à l'élaboration des principes fondamentaux des droits de l'homme, de la bonne gouvernance, de la transparence et de la participation citoyenne en tant que piliers de l'évolution de la gouvernance d'Internet. L'instauration de la confiance, le développement de normes de conduite responsable des États et le renforcement des capacités pour un cyberespace sûr figurent également au nombre de ses priorités. La Suisse, notamment par son soutien au GIP et à l'IGF, dont le secrétariat se trouve à Genève, encourage aussi le renforcement de Genève en tant que place internationale de premier plan comme lieu de débats, ainsi que de transmission des connaissances et des compétences dans les domaines de la gouvernance d'Internet et de la cybersécurité.

Par ailleurs, la Suisse s'est impliquée activement dans les travaux de l'Internet Corporation for Assigned Names and Numbers (ICANN), la société responsable de l'administration des noms de domaines Internet, afin de progresser dans les travaux en cours qui
ont pour but de transférer la surveillance des fonctions IANA (Internet Assigned Numbers Authority, autorité d'Internet chargée de l'attribution des numéros d'adresse) à la communauté mondiale d'Internet. L'apport de la Suisse au sein du Comité consultatif gouvernemental de l'ICANN, dont la présidence est assumée par l'un de ses ressortissants, est apprécié pour son caractère constructif.

3.6

Services de proximité

Tâches consulaires En collaboration avec le réseau de représentations, la Direction consulaire (DC) du DFAE propose aux Suisses de l'étranger un large éventail de services sous la forme d'un guichet unique (voir sous-chapitre «relations avec les Suisses de l'étranger»), auxquels s'ajoutent ceux du Centre de gestion des crises. En tant que guichet unique, la DC se charge d'assister les Suisses voyageant ou établis à l'étranger, quels que soient leurs besoins, de façon coordonnée et sous sa propre responsabilité. La Helpline DFAE joue quant à elle le rôle d'interlocuteur central et répond 24 heures 1318

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sur 24 et 365 jours par an aux questions de particuliers, d'administrations publiques, de prestataires privés et d'autres personnes ou institutions au sujet des prestations consulaires. Elle contribue en outre à la qualité du service public, puisqu'elle apporte un soutien aux représentations à l'étranger, qui peuvent dévier les appels vers la Helpline en dehors des heures de bureau locales. Forts d'une expérience de plusieurs années à l'étranger et rompus aux affaires consulaires, les collaborateurs de la Helpline DFAE ont pu répondre directement à 97 % des quelque 65 000 demandes qui leur ont été adressées en 2016 et ont transmis les autres dossiers aux services spécialisés ou aux représentations compétentes.

Les ressortissants helvétiques effectuent plus de dix millions de voyages à l'étranger par an. Dans le cadre de la protection consulaire, le DFAE fournit une aide complète et efficace aux Suisses confrontés à une situation d'urgence à l'étranger dont ils ne peuvent se sortir par leurs propres moyens. Il mise également sur la prévention et en appelle au sens des responsabilités des Suisses en publiant des conseils aux voyageurs qui les incitent à préparer soigneusement leurs déplacements. Malgré cela, le nombre de cas traités par la protection consulaire a plus que doublé entre 2007 (463) et 2016 (1051). En 2015, l'Aide sociale aux Suisses de l'étranger de la DC a approuvé 114 nouvelles requêtes de rapatriement en Suisse, donné satisfaction à 259 demandes de soutien monétaire à l'étranger, porté assistance à des touristes confrontés à des difficultés financières dans 158 cas et remboursé aux cantons les trois premiers mois d'aide sociale pour les Suisses de l'étranger rentrant au pays dans 533 cas. Les dépenses brutes sont restées légèrement inférieures à 3.2 millions de francs.

En outre, 54 nouveaux cas ont été examinés dans le cadre de la convention en vigueur entre la Suisse et la France concernant l'assistance aux indigents. Grâce à son application mobile Itineris48, le DFAE informe et assiste les Suisses dans le monde entier. Cette application a déjà été téléchargée plus de 60 000 fois.

Le DFAE a fourni en 2016 des prestations consulaires dans 90 arrondissements consulaires couverts par des consulats généraux entièrement équipés et par des sections consulaires d'ambassades. En raison
du manque de ressources, la concentration des services consulaires dans des centres régionaux s'est poursuivie. Afin d'éviter aux Suisses de l'étranger de parcourir des distances plus importantes pour obtenir des prestations qui nécessitent une présence physique, le DFAE mise désormais sur dix stations mobiles pour l'établissement de passeports, acquises en partie auprès de cantons qui n'en avaient plus usage. En 2016, ce dispositif a permis de saisir les données biométriques de quelque 4000 Suisses de l'étranger lors de 56 étapes dans 38 pays. Après une augmentation très marquée du nombre de passeports délivrés en 2015, aussi bien en Suisse qu'à l'étranger, le nombre de demandes soumises a de nouveau baissé l'année dernière ­ une évolution prévisible vu la quantité de demandes déposées entre 2003 et 2005 après l'introduction du passeport lisible en machine. Selon la statistique des mouvements de population établie par l'Office fédéral de la statistique (OFS), 30 103 Suisses ont émigré à l'étranger en 2015 alors que 25 952 concitoyens sont rentrés au pays. Tout citoyen projetant de se rendre à l'étranger, de s'y installer ou de revenir au pays peut consulter gratuitement les informations très complètes mises à disposition par Émigration Suisse (Swiss-emi48

www.itineris.eda.admin.ch

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gration). Avec quelque 580 000 connexions en 2015, ce site est l'un des plus visités du DFAE.

Collaboration consulaire Le 7 juin 2016, l'ancienne base de données pour les Suisses de l'étranger a été remplacée par un logiciel conforme aux prescriptions stratégiques de la Confédération en matière de cyberadministration. La gestion des services consulaires et l'échange de données se font désormais en grande partie par voie numérique. Le guichet en ligne nécessaire à cette fin est disponible depuis le mois d'octobre. Par ailleurs, un accord sur la collaboration consulaire entre la Suisse et l'Autriche est entré en vigueur en avril. Des consultations ont en outre été menées avec la Turquie, l'Allemagne, l'Iran, l'Inde et la Russie ainsi que dans un cadre quadrilatéral avec l'Autriche, l'Allemagne et le Liechtenstein. Les entretiens menés avec la France au sujet de l'avenir de la convention de 1931 sur l'assistance aux indigents se sont également poursuivis. Depuis longtemps, cette convention n'est en effet plus appliquée comme prévu. La France a arrêté il y a plusieurs années de facturer à la Suisse le soutien accordé aux Suisses de l'étranger en France, et n'a pas non plus procédé à des versements en compensation des dépenses d'assistance encourues par la Suisse.

Par conséquent, le montant net en faveur de la Suisse est estimé à quelque 20 millions de francs. La France a quant à elle défendu jusqu'ici le point de vue que la convention est devenue obsolète lors de l'entrée en vigueur de l'ALCP en 2002.

Prévention et gestion des crises Étant donné l'évolution volatile des conditions de sécurité dans différentes régions du monde, les efforts menés dans l'intérêt des ressortissants suisses à l'étranger en matière de prévention et de gestion des crises et de préparation à celles-ci revêtent une importance significative. La fréquence des évènements à caractère terroriste a particulièrement augmenté, et ce dans le monde entier. Régulièrement, des citoyens suisses à l'étranger sont directement touchés (enlèvement d'une Suissesse au Mali, meurtre de deux citoyens suisses lors des attentats de Ouagadougou, au Burkina Faso, et de deux autres à Nice, en France, etc.). Dans ce contexte, les conseils aux voyageurs du DFAE49 restent un élément central du travail du Centre de gestion des crises (KMZ). Les renseignements
qu'ils fournissent sur les risques en matière de sécurité à l'étranger sont constamment mis à jour pour 176 pays. Le KMZ propose également des informations à un large public sur l'assistance pouvant être offerte par le DFAE en cas de besoin et sur les limites de celle-ci.

Le KMZ porte une attention constante à l'évolution des conditions de sécurité dans le monde et organise des réunions sur les pays à risques afin d'analyser les défis sur place avec d'autres services concernés du DFAE et de l'administration fédérale.

C'est notamment sur la base de ces évaluations que le KMZ a apporté un soutien spécifique au renforcement de la sécurité et des mesures de prévention des crises dans les représentations diplomatiques suisses. En outre, le KMZ a coordonné les dispositions prises en amont de différentes manifestations de grande envergure (dont le Championnat d'Europe de football en France, les Jeux olympiques de Rio et la Journée mondiale de la jeunesse à Cracovie). Il s'est également chargé de la gestion 49

www.dfae.admin.ch > Représentations et conseils aux voyageurs

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d'un grand nombre de crises (notamment le tremblement de terre en Équateur, l'évacuation de la représentation suisse au Soudan du Sud et un grand nombre d'attaques terroristes en Belgique, en France, en Allemagne, au Burkina Faso, en Turquie, en Indonésie et ailleurs). Afin de renforcer encore davantage la gestion des crises, le KMZ a poursuivi la standardisation et le développement de ses processus et de ses instruments. Pour créer de nouvelles synergies, le DFAE a en outre regroupé sur un seul site l'ensemble des services actifs dans le domaine de la sécurité et de la gestion des crises (KMZ, DC, Division Politique de sécurité et Aide humanitaire).

Relations avec les Suisses de l'étranger La tendance de ces dernières années s'est confirmée durant l'année sous revue, puisque le nombre de Suisses enregistrées auprès d'une représentation suisse à l'étranger a connu une croissance d'un peu plus de 2 %, pour atteindre 780 000 personnes. Environ trois quarts de nos expatriés sont binationaux et près des deux tiers vivent en Europe, dont à peu près 97 % dans un pays de l'Union européenne.

Le pays de résidence le plus prisé ­ et de loin ­ est la France, qui compte 203 000 Suisses enregistrés. Il est suivi par l'Allemagne, qui accueille 91 000 de nos concitoyens.

Entrée en vigueur le 1er novembre 2015, la loi sur les Suisses de l'étranger constitue la base légale du guichet unique, dont la mise en place s'est échelonnée sur plusieurs années. Ce dispositif, proposé par le DFAE en collaboration avec les représentations à l'étranger, la Helpline DFAE et la DC, permet à tous les citoyens, qu'ils résident en Suisse ou à l'étranger, ainsi qu'aux autorités des communes, des cantons et de la Confédération d'obtenir rapidement, par l'intermédiaire d'une plate-forme centralisée, des informations pertinentes sur différents thèmes liés aux Suisses de l'étranger.

Le guichet unique constitue un élément essentiel d'une politique cohérente et globale à l'égard des Suisses de l'étranger et permet de fournir aux clients les prestations qu'ils demandent. Grâce à cet outil, les citoyens, les entreprises et les institutions peuvent entrer facilement en contact avec les autorités suisses, quel que soit le domaine dont relève leur requête. En proposant ce canal centralisé, la Confédération tient compte de l'augmentation de
la mobilité ainsi que des besoins particuliers de ses citoyens vivant à l'étranger. Sur mandat de la Confédération, le DFAE alloue des aides financières aux institutions qui fournissent des services à titre privé aux Suisses de l'étranger. Le DFAE collabore étroitement avec l'Organisation des Suisses de l'étranger (OSE), son principal interlocuteur, sur la base d'une convention de prestations. En 2016, l'OSE a publié six numéros de la «Revue Suisse», le magazine de la Cinquième Suisse. C'est dans ce magazine que le DFAE publie des informations officielles et des rapports de la Confédération.

Visas En 2016, les représentations suisses à l'étranger ont traité plus de 530 061 demandes de visas dans le monde entier, ce qui correspond à un léger recul d'un peu moins de 4,5 % par rapport à 2015, dû principalement à un ralentissement de la demande en Chine, en Inde et en Russie. Dans le domaine des visas, l'importance d'assurer un accès facilité à la Suisse, comme place économique et destination touristique ainsi que pour les besoins de la Genève internationale, a été rappelée dans différents contextes, tant par le Conseil fédéral que par le Parlement. L'extension des possibili1321

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tés de dépôt des demandes de visas reste dès lors une priorité. Plusieurs instruments sont utilisés, à savoir l'externalisation et les mandats confiés à d'autres États Schengen. Ainsi, grâce au système d'externalisation, 72 % des demandes de visa pour la Suisse sont enregistrées par des entreprises externes. En 2016, de nouveaux centres d'enregistrement des demandes ont été ouverts dans plusieurs villes chinoises (Chengdu, Wuhan, Shenyang, Xi'an, Hangzhou, Nanjing, Shenzhen, Kunming, Changsha, Fuzhou, Jinan et Chongqing) et à Tunis (Tunisie). Pour ce qui a trait aux représentations Schengen, dans les pays où la Suisse ne dispose pas de représentation propre, l'établissement de visas Schengen est délégué localement à un autre État membre de l'espace Schengen. Au 31 octobre2016, la Suisse avait signé un accord avec 20 États Schengen (y compris l'accord avec la Principauté du Liechtenstein) et représentait leurs intérêts dans 61 cas, alors qu'elle-même était représentée sur 61 sites. Depuis 2015, les demandes de visa Schengen peuvent être complétées et transmises en ligne dans certaines représentations, actuellement au nombre de 34.

3.7

Communication

Information DFAE Au sein du DFAE, la responsabilité de l'information et de la communication vis-àvis du public en Suisse et à l'étranger incombe à Information DFAE, qui a pour mission d'expliquer les décisions du Conseil fédéral en matière de politique extérieure et de présenter les tâches et les activités du DFAE et de son chef en s'appuyant sur les lignes directrices de la communication officielle. L'objectif de ces lignes directrices est de garantir que le travail d'Information DFAE, mené en collaboration avec les médias, permette aux citoyens de se forger une opinion de manière libre et authentique, et contribue à mettre les informations en contexte, à créer la transparence et à instaurer un climat de confiance à l'aide d'une communication active et factuelle.

En 2016, les priorités du DFAE en matière de communication ont porté sur la préparation d'informations sur la stratégie de politique étrangère 2016­2019 et sur le message sur la coopération internationale de la Suisse 2017­2020. Les priorités ont été expliquées de manière à faire apparaître la continuité avec la stratégie de politique étrangère et la coopération internationale existantes, tout en montrant clairement les modifications que le Conseil fédéral souhaite y apporter. En vue d'informer le grand public, le DFAE a publié des brochures résumant les principaux axes et aspects. Il a également ­ pour la première fois ­ mis en place un blog destiné à recueillir les questions et les commentaires de la population afin de renforcer l'interaction avec celle-ci. Autre dossier important pour la communication: la politique de la Suisse à l'égard de l'UE. Dans ce domaine, Information DFAE a agi en concertation avec le DFJP et le DEFR et a communiqué principalement au sujet des mesures prises par le Conseil fédéral pour appliquer le nouvel article constitutionnel sur l'immigration et au sujet des négociations avec l'UE relatives aux questions institutionnelles. La communication du négociateur en chef Suisse-UE a également occupé une place importante dans ce dossier, tout comme la communication ciblée

1322

FF 2017

sur les différents groupes d'intérêt en Suisse ainsi qu'envers les médias étrangers, mais aussi envers l'UE et ses États membres.

Dans le cadre de ses relations avec les médias, Information DFAE a publié des communiqués relatifs à l'actualité du DFAE ainsi que des discours de représentants importants du département. De nombreuses requêtes de journalistes ont également été traitées, notamment en lien avec le coup d'État en Turquie ou différents attentats terroristes (p. ex. à Bruxelles et à Nice). Ce travail a été mené en coordination étroite avec les sections compétentes d'autres départements. Afin de donner aux représentants des médias un aperçu concret de l'engagement de la Suisse, le DFAE a par ailleurs organisé deux voyages de presse: le premier, consacré au rôle des experts suisses dans la promotion de la paix, s'est déroulé en Ukraine, alors que le deuxième a abordé l'engagement de la Suisse dans la lutte contre la traite des êtres humains et a conduit les participants à Vienne et en Bulgarie. Pour présenter en détail des thèmes appartenant aux domaines d'activité du DFAE, Information DFAE a en outre préparé diverses manifestations, dont l'édition 2016 de la Conférence annuelle de la coopération suisse au développement, qui a porté sur l'Agenda 2030. En outre, Information DFAE a élaboré un concept pour la présence de la DDC lors de foires grand public comme le Comptoir suisse ou la BEA, afin de donner un aperçu de la coopération au développement. Enfin, l'engagement de la Suisse en matière de politique extérieure a également été expliqué au grand public à l'aide de courtsmétrages et de brochures rééditées, dont l'«ABC Suisse-ONU» et l'«ABC des droits de l'homme».

Service historique DFAE Au sein du DFAE, le Service historique traite toutes les questions historiques concernant le département. En 2016, il a été chargé en premier lieu de l'analyse des sources pertinentes et de l'examen de la thèse d'un «accord secret» qui aurait été conclu entre la Suisse et l'Organisation de libération de la Palestine (OLP) en septembre 1970. Cette thèse a été reprise dans de nombreux journaux et dans l'ouvrage «Schweizer Terrorjahre. Das geheime Abkommen der PLO». Un groupe de travail interdépartemental, composé de représentants du DFAE, du DFJP et du DDPS, et placé sous la direction du chef du Service
historique du DFAE, a été chargé de vérifier cette thèse et les accusations qu'elle implique. En mai, le Conseil fédéral a pris connaissance du rapport final du groupe de travail et en a autorisé la publication intégrale. Ce rapport conclut qu'il n'y a eu aucun accord secret avec l'OLP en septembre 1970 et que les enquêtes de police judiciaire après l'attentat de Würenlingen ont été complètes.

Le Service historique du DFAE est aussi l'unité compétente pour examiner les demandes d'accès aux dossiers d'archives du département, représentations suisses à l'étranger comprises, ainsi qu'aux dossiers versés par l'ancienne «Commission indépendante d'experts Suisse ­ Seconde guerre mondiale». Il a traité 50 demandes portant sur un total de 161 dossiers durant l'année 2016. Par ailleurs, l'expertise du service a été sollicitée dans le cadre de la commémoration de dates importantes liées aux relations bilatérales de la Suisse ou à d'autres aspects de la politique extérieure.

Enfin, le service prépare la présidence suisse 2017 de l'Alliance internationale pour la mémoire de l'Holocauste (AIMH), en étroite collaboration avec des représentants 1323

FF 2017

d'organisations juives et de gens du voyage, ainsi que des pédagogues et des personnes actives dans la promotion des droits de l'homme.

Communication internationale Présence Suisse (PRS) a reçu le mandat légal d'analyser l'image de la Suisse à l'étranger, d'en promouvoir une perception positive et différenciée et de contribuer ainsi à la sauvegarde des intérêts du pays à l'étranger en utilisant les instruments des relations publiques. Selon l'art. 3 de l'ordonnance du 12 décembre 2008 sur la communication internationale50, l'orientation de la communication internationale est définie tous les quatre ans dans la stratégie de communication internationale. En 2016, le Conseil fédéral a adopté la nouvelle stratégie de communication internationale pour la période 2016­2019. Les grands axes ne sont pas modifiés. La communication internationale restera fidèle à la devise «renforcer ses atouts»: elle continuera de mettre en avant les qualités et les avantages de la Suisse et de transmettre de façon cohérente la politique et les positions de la Suisse à l'étranger.

La stratégie révisée compte onze thèmes prioritaires: le rôle de la Suisse en Europe; le système politique suisse; la Suisse, pays solidaire et responsable; Genève internationale; formation recherche et innovation (FRI); économie et compétitivité; tourisme; environnement, transports et énergie; questions fiscales et financières; culture; sport. Les instruments éprouvés de la communication internationale sont maintenus; il s'agit notamment de la présence lors de grandes manifestations internationales, du soutien aux représentations suisses à l'étranger pour leurs activités de diplomatie publique (Public Diplomacy), de l'invitation de délégations étrangères et de la communication par l'intermédiaire des réseaux sociaux, qu'il est prévu de renforcer. La coordination stratégique de la communication internationale relève toujours de la responsabilité du groupe de travail interdépartemental (GTID) Communication internationale, au sein duquel sont représentés les sept départements fédéraux et la Chancellerie fédérale ainsi que Suisse Tourisme, Switzerland Global Enterprise (S-GE) et Pro Helvetia. L'image de la Suisse à l'étranger est restée bonne, comme le montre le suivi de PRS. Ainsi, elle occupe la huitième place du classement établi par le Nation
Brands Index (NBI), qui compare l'image de 50 pays. En 2016, l'intérêt des médias étrangers pour la Suisse s'est focalisé sur les initiatives populaires «Pour le renvoi effectif des étrangers criminels (initiative de mise en oeuvre)» et «Pour un revenu de base inconditionnel». L'accueil réservé par la Suisse aux réfugiés ainsi que le traitement de la population musulmane ont eux aussi été abordés à de nombreuses reprises. Après le oui britannique au Brexit, de nombreux médias de ce pays ont par ailleurs mentionné la voie bilatérale entre la Suisse et l'UE comme modèle potentiel pour le Royaume-Uni. L'inauguration du tunnel de base du Saint-Gothard a elle aussi retenu l'attention des journalistes du monde entier. Les résultats du suivi de l'image de la Suisse ainsi que les besoins et les opportunités en matière de communication définissent le cadre de l'utilisation des instruments de la communication internationale.

En ce qui concerne les évènements internationaux d'envergure, l'année 2016 était placée sous le signe de la présence de la Suisse lors des grandes manifestations 50

RS 194.11

1324

FF 2017

sportives. Pour la première fois, une Maison de la Suisse a ouvert ses portes lors d'un championnat d'Europe de football. Accessible pendant toute la durée de ce championnat organisé en France, elle a mis l'accent sur la production artistique suisse. Plus d'un million de visiteurs ont vu la présence suisse lors du Championnat d'Europe de football et quelque 900 000 personnes ont suivi les activités de la Maison de la Suisse sur les réseaux sociaux. Des représentants du parlement et du gouvernement ont visité la Maison de la Suisse à Paris. Quelques semaines plus tard, la Maison de la Suisse a été ouverte à Rio de Janeiro à l'occasion des Jeux olympiques. PRS était également sur place pendant les Jeux paralympiques, ce qui constitue une première. La Maison de la Suisse a servi de cadre aux cérémonies de remise des médailles aux athlètes suisses, mais aussi de plate-forme de réseautage et de marketing pour le pays. Les entreprises suisses ont ainsi eu la possibilité de présenter leurs produits à un large public et les régions touristiques suisses (Jungfrau, StMoritz, Lucerne/Titlis, Genève, Lausanne et Montreux) ont pu exposer leurs atouts sur le marché brésilien. Le président de la Confédération, Johann N. SchneiderAmmann, les conseillers fédéraux Guy Parmelin et Alain Berset, et quelque 240 000 autres personnes ont visité la Maison de la Suisse à Rio. Un sondage réalisé auprès des visiteurs fait état d'une impression très positive de la présence suisse lors des Jeux olympiques et des Suisses en général. Ainsi, environ un quart des personnes interrogées ont exprimé le désir de visiter la Maison de la Suisse à plusieurs reprises.

Par ailleurs, 45 % des visiteurs avaient une meilleure perception du pays après s'être arrêtés à la Maison de la Suisse. Les médias de référence brésiliens et internationaux ont par ailleurs publié plus de 600 articles, ce qui correspond à une valeur publicitaire de 7,2 millions de francs.

Comme précédemment, PRS a utilisé en 2016 des outils de communication différenciés selon les publics cibles afin que les messages stratégiques répondent aux attentes des destinataires. À cet égard, les activités de diplomatie publique organisées en collaboration avec les représentations à l'étranger ont joué un rôle important. En 2016, l'inauguration du tunnel de base du Saint-Gothard
a ainsi été une excellente occasion de mettre en avant les forces de la Suisse et ses compétences-clés telles que l'innovation, la précision et la légitimation démocratique des projets d'infrastructure.

Cet ouvrage du siècle a également permis de placer l'accent sur la contribution de la Suisse aux infrastructures de transport européennes. Plus de 70 manifestations ont été organisées à ce sujet dans quelque 40 représentations du monde entier. Pour la communication à l'étranger, PRS a fourni des produits d'information et de communication ainsi qu'une identité visuelle créée pour l'occasion et a mené en parallèle une campagne sur les réseaux sociaux. Au total, huit délégations de journalistes ont été invitées en Suisse en lien avec cette thématique. Des représentants des médias ainsi que des représentants politiques ont pu se faire une idée de l'impact de ce projet exceptionnel en matière de politique des transports. Les projets liés à l'ouverture du tunnel du Saint-Gothard organisés par PRS et les représentations à l'étranger ont donné lieu à des échanges avec de nombreux leaders d'opinion dans les pays membres de l'UE et ont suscité une attention accrue de la part des médias.

En 2016, PRS a également soutenu la poursuite du tour du monde de «Solar Impulse» depuis Hawaï. En plusieurs étapes, cet avion solaire suisse a finalement atteint Abu Dhabi, ce qui a suscité un intérêt médiatique spectaculaire: quelque 70 000 publications en ligne en onze langues et 28 590 reportages radio et télévisés 1325

FF 2017

en anglais. La campagne de PRS visait avant tout à présenter les avantages de l'innovation suisse et s'est concentrée sur la collaboration avec les représentations suisses. Elle a permis d'entrer en contact avec de nombreux décideurs et leaders d'opinion dans les pays visités par «Solar Impulse» en 2016, à savoir les États-Unis, l'Espagne, l'Égypte et les Émirats arabes unis. Les principales plates-formes de communication telles que les deux grandes manifestations sportives, l'inauguration du tunnel de base du Saint-Gothard ou le tour de monde de «Solar Impulse» ont fait l'objet d'une coordination étroite avec des campagnes de communication sur les réseaux sociaux élaborées par PRS. La communication sur les plates-formes numériques constitue l'une des priorités de la nouvelle stratégie de communication internationale. Dans ce contexte, PRS a commencé au cours de l'année sous revue à dispenser dans les représentations à l'étranger des formations sur les réseaux sociaux. La distribution de matériel d'information et de publicité représente également un soutien majeur aux activités de communication internationale, puisqu'elle a permis d'établir un contact avec environ 650 000 personnes en 2016, principalement par l'intermédiaire du réseau extérieur.

3.8

Ressources, réseau extérieur et personnel

Le réseau extérieur de la Suisse ­ élément essentiel de la mise en oeuvre du mandat constitutionnel relatif à la politique extérieure ­ se fonde sur les principes de l'universalité, de la cohérence et de l'efficience. Il se compose actuellement d'environ 170 représentations de carrière et de 200 représentations honoraires. En 2016, deux nouveaux consulats généraux ont été inaugurés, à Lagos (Nigéria) et à Chengdu (Chine). Tous deux répondent avant tout à des intérêts économiques. Des contrôles réguliers de la pertinence et de l'adéquation du réseau extérieur sont effectués afin que celui-ci tienne compte des besoins de la politique extérieure de la Suisse et de l'évolution rapide des exigences liées aux développements internationaux. Cela implique également le recours aux nouvelles technologies, comme la biométrie mobile, et à des solutions novatrices, à l'image de la «co-location» avec des pays partenaires. Ce terme désigne le regroupement dans un même bâtiment de représentations diplomatiques et/ou consulaires de plusieurs pays. Malgré l'utilisation commune d'un bâtiment, les représentations suisses concernées continuent de défendre les intérêts politiques et économiques du pays de manière indépendante et autonome. Plusieurs accords de partage de locaux ont déjà été concrétisés: avec les Pays-Bas à Mascate (Oman) et à Luanda (Angola) et avec le Danemark à Abuja et à Lagos (Nigéria). Dans les deux premiers cas, la représentation suisse se trouve dans les locaux de celle des Pays-Bas. Le consulat général de Suisse à Lagos se trouve quant à lui dans les locaux de la représentation danoise, tandis que la représentation danoise à Abuja a établi ses quartiers dans l'ambassade de Suisse. D'autres projets sont en passe d'être réalisés. Il s'agit de représentations communes avec l'Allemagne à Téhéran (Iran; hébergement des services de visas) ainsi qu'avec l'Autriche à Dublin (Irlande). Lors de sa séance du 16 septembre 2016, le Conseil fédéral a délégué au DFAE la compétence de conclure de nouveaux accords de partage de locaux avec les Pays-Bas à Oslo (Norvège) et avec la Norvège à Maputo (Mozambique).

1326

FF 2017

La coopération avec d'autres partenaires du réseau extérieur fait elle aussi l'objet d'une coordination conjointe de plus en plus étroite. Les questions relatives à la gestion des Swiss Business Hubs sont abordées et traitées conjointement dans le cadre du comité tripartite Swiss Business Hubs. La collaboration entre le DFAE, le SECO et Switzerland Global Enterprise s'est intensifiée en 2015 avec l'introduction de ces rencontres trimestrielles. Des coopérations de ce type, porteuses de nombreuses opportunités de synergies pour toutes les parties concernées, sont discutées et développées avec d'autres partenaires du réseau extérieur. Dans la période sous revue, il s'agit en particulier de Suisse Tourisme et du SEFRI ainsi que de Pro Helvetia sur le plan administratif. Le 23 septembre 2016, une Swiss House a été ouvert au Pier 17, sur le site du Consulat général de Suisse à San Francisco. Caractérisés par une architecture novatrice, ces locaux hébergent désormais également le Swiss Business Hub, l'antenne swissnex à San Fransisco ainsi que les bureaux de Suisse Tourisme.

Les réformes du DFAE, lancées en 2008, sont en phase finale. Elles ont consisté pour l'essentiel à réorganiser la DDC (2008 à 2012), à faire de la Direction des ressources un centre de services pour l'ensemble du département et à intégrer les représentations à l'étranger. La mise en oeuvre progressive du principe «une représentation par site» et la création d'ambassades intégrées vont de pair avec un renforcement de la cohérence des priorités de la politique extérieure. Fin 2016, environ 35 des 40 sites concernés avaient lancé ou même achevé le processus d'intégration. La mise en oeuvre de l'intégration implique une harmonisation de nombreuses procédures, l'unification de diverses règles et leur application dans la pratique. Les sites déjà intégrés génèrent des synergies thématiques et conceptuelles qui contribuent au renforcement de l'image de la Suisse. Au cours de l'année sous revue, une évaluation indépendante des représentations intégrées a été menée, sous la forme d'un examen par les pairs effectué par la Suède. Le rapport sera publié en même temps qu'une «réponse du management».

En 2016, des démarches ont été entreprises en vue d'appliquer les mesures d'économies concernant les charges de personnel prévues pour le budget
2017 selon le programme de stabilisation 2017­2019. Le DFAE est tenu de contribuer avec un montant de 5,5 millions de francs en 2016 aux réductions des charges de personnel; ce chiffre sera de 5,2 millions de francs pour la période 2017­2019. Dans la mesure du possible, ces mesures seront réalisées au moyen de réorganisations telles que l'intégration de deux départements consulaires au sein d'un centre consulaire régional, l'exploitation de synergies ou encore des adaptations des catalogues de prestations des représentations. À la centrale, des réductions de prestations ont été mises en oeuvre dans les domaines du personnel, des finances et de l'informatique, mais aussi des services logistiques et des tâches diplomatiques et consulaires afin d'atteindre les objectifs d'économies.

Sur le plan de la politique du personnel, le Conseil fédéral a publié un avis en mai pour donner suite au rapport de la Commission de gestion du Conseil des États (CdG-E) «Adéquation du personnel au service diplomatique». Dans cet avis, le gouvernement a répondu en partie aux recommandations de la CdG-E et validé pour le reste un processus plus large d'examen du cadre de l'évolution professionnelle au DFAE. Il est prévu que cette analyse initiée en mai soit présentée au Conseil fédéral 1327

FF 2017

en février 2017. Elle doit inclure l'évaluation des conséquences d'un éventuel passage à un système de rémunération fonctionnel pour les services consulaire et diplomatique et déterminer de manière générale quelle forme une telle transition pourrait prendre afin que les parcours professionnels et les carrières liés à la politique étrangère soient mieux adaptés au contexte actuel et davantage axés sur les défis à venir.

1328

FF 2017

Liste des abréviations AELE

Association européenne de libre-échange

AEN

Agence pour l'énergie nucléaire

AERF

Accord d'échange de renseignements fiscaux

AIE

Agence internationale de l'énergie

AIEA

Agence internationale de l'énergie atomique

AIMH

Alliance internationale pour la mémoire de l'Holocauste

ALCP

Accord du 21 juin 1999 entre la Confédération suisse, d'une part, et la Communauté européenne et ses Etats membres, d'autre part, sur la libre circulation des personnes (RS 0.142.112.681).

ANASE

Association des nations de l'Asie du Sud-Est

ASEM

Dialogue Asie-Europe (Asia-Europe Meeting)

AS-MPC

Autorité de surveillance du Ministère public de la Confédération

BAII

Banque asiatique d'investissement dans les infrastructures

BAsD

Banque asiatique de développement

BCE

Banque centrale européenne

BEPS

Projet de lutte contre l'érosion de la base d'imposition et le transfert de bénéfices (Base Erosion and Profit Shifting)

BIG-E

Initiative de Batumi pour une économie verte (Batumi Initiative on Green Economy)

BNS

Banque nationale suisse

Brexit

Acceptation du référendum sur la sortie du Royaume-Uni de l'Union européenne

BRICS

Groupe composé des cinq grands pays émergents suivants: Brésil, Russie, Inde, Chine et Afrique du Sud

CAC

Convention du 13 janvier 1993 sur l'interdiction de la mise au point, de la fabrication, du stockage et de l'emploi des armes chimiques et sur leur destruction (RS 0.515.08) (Convention sur les armes chimiques)

CAD

Comité d'aide au développement

CARICOM

Communauté des Caraïbes ou Marché commun des Caraïbes

CBI

Commission baleinière internationale (International Whaling Commission)

1329

FF 2017

CCAC

Convention du 10 octobre 1980 sur l'interdiction ou la limitation de l'emploi de certaines armes classiques qui peuvent être considérées comme produisant des effets traumatiques excessifs ou comme frappant sans discrimination (RS 0.515.091) (Convention sur certaines armes classiques)

CdG

Commission de gestion du Conseil national ou du Conseil des États

CDI

Convention contre les doubles impositions

CEDEF

Convention du 18 décembre 1979 sur l'élimination de toutes les formes de discrimination à l'égard des femmes (RS 0.108) (Convention sur l'élimination de toutes les formes de discrimination à l'égard des femmes)

CEDH (Convention)

Convention du 4 novembre 1950 de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales (convention européenne des droits de l'homme, RS 0.101)

CEDH (Cour):

Cour européenne des droits de l'homme

CEE-ONU

Commission économique des Nations Unies pour l'Europe

CERN

Organisation européenne pour la recherche nucléaire

CETA

Accord économique et commercial global (Comprehensive Economic and Trade Agreement)

CGIAR

Groupe consultatif pour la recherche agricole internationale (Consultative Group on International Agricultural Research)

CI

Message du 17 février 2016 concernant la coopération internationale de la Suisse 2017 - 2020 (FF 2016 2179)

CIAB

Convention du 10 avril 1972 sur l'interdiction de la mise au point, de la fabrication et du stockage des armes bactériologiques (biologiques) ou à toxines et sur leur destruction (RS 0.515.07) (convention sur l'interdiction des armes biologiques)

CICR

Comité international de la Croix-Rouge

CIDHG

Centre international de déminage humanitaire - Genève

CITES

Convention du 3 mars 1973 sur le commerce international des espèces de faune et de flore sauvages menacées d'extinction (RS 0.453)

CNUDM

Convention des Nations Unies sur le droit de la mer

COP

Conférence annuelle des États parties signataires de la conventioncadre des Nations Unies sur les changements climatiques

COPUOS

Comité des utilisations pacifiques de l'espace extra-atmosphérique

CPDD

Cohérence des politiques pour le développement durable

CPI

Cour pénale internationale

CSA

Corps suisse d'aide humanitaire

1330

FF 2017

DASF

Division Afrique subsaharienne et Francophonie

DC

Direction consulaire

DCAF

Centre pour le contrôle démocratique des forces armées

DDC

Direction du développement et de la coopération

DDPS

Département fédéral de la défense, de la protection de la population et des sports

DEFR

Département fédéral de l'économie, de la formation et de la recherche

DETEC

Département fédéral de l'environnement, des transports, de l'énérgie et de la communication

DFAE

Département fédéral des affaires étrangères

DFF

Département fédéral des finances

DFI

Département fédéral de l'intérieur

DFJP

Département fédéral de justice et police

DR

Direction des ressources

DSH

Division Sécurité humaine

EAC

Communauté d'Afrique de l'Est (East African Community)

EAP

EuroAirport Bâle-Mulhouse

EAR

Échange automatique de renseignements en matière fiscale

EASO

Bureau européen d'appui en matière d'asile

ECOSOC

Conseil économique et social des Nations Unies (Economic and Social Council)

ECOWAS

Communauté économique des États de l'Afrique de l'Ouest

EEE

Espace économique européen

EI

État islamique

ELN

Armée de libération nationale (Colombie) (Ejército de Liberación Nacional)

EPFL

École polytechnique fédérale

ESA

Agence spatiale européenne

EUFOR

Forces opérationnelles de l'Union européenne

eu-LISA

Agence européenne pour la gestion opérationnelle des systèmes d'information à grande échelle au sein de l'espace de liberté, de sécurité et de justice

EURODAC

Base de données biométriques de l'UE

EUTF

Fonds fiduciaire d'urgence de l'Union européenne pour l'Afrique 1331

FF 2017

FAO

Organisation des Nations Unies pour l'alimentation et l'agriculture

FARC

Forces armées révolutionnaires de Colombie

FCE

Traité sur les forces conventionnelles en Europe

fedpol

Office fédéral de la police

FIDA

Fonds international de développement agricole

FMI

Fonds monétaire international

FNS

Fonds national suisse de la recherche scientifique

FSI Frontières

Fonds pour la sécurité intérieure dans le domaine des frontières extérieures et des visas pour la période 2014­2020

G20

Groupe des 20 (États-Unis, Japon, Allemagne, Chine, Royaume-Uni, France, Italie, Canada, Brésil, Russie, Inde, Corée du Sud, Australie, Mexique, Turquie, Indonésie, Arabie saoudite, Afrique du Sud, Argentine, Union européenne).

G7

Groupe des 7 (Allemagne, France, Italie, Japon, Canada, Royaume-Uni, États-Unis)

GAFI

Groupe d'action financière

GBM

Groupe de la Banque Mondiale

GCERF

Fonds mondial pour l'engagement de la communauté et la résilience

GCF

Fonds vert pour le climat

GCSP

Centre de politique de sécurité - Genève

GCTF

Forum mondial contre le terrorisme

GEF

Fonds pour l'environnement mondial

GFN

Groupe des fournisseurs nucléaires

GOMNUIP

Groupe d'observateurs militaires des Nations Unies pour l'Inde et le Pakistan

HCDH

Haut-Commissariat des Nations Unies aux droits de l'homme

HCR

Haut Commissariat des Nations Unies pour les réfugiés

HLPF

Forum politique de haut niveau sur le développement durable

ICAR

Centre international pour le recouvrement d'avoirs volés

IFFP

Institut fédéral des hautes études en formation professionnelle

IGAD

Autorité intergouvernementale pour le développement

IRENA

Agence internationale pour les énergies renouvelables

ITER

Réacteur thermonucléaire expérimental international

1332

FF 2017

IUCN

Union internationale pour la conservation de la nature

KFOR

Force pour le Kosovo

KMZ

Centre de gestion des crises

LPSP

Loi fédérale du 27 septembre 2013 sur les prestations de sécurité privées fournies à l'étranger (RS 935.41)

LRA

Armée de résistance du Seigneur (Lord's Resistance Army)

LVP

Loi du 18 décembe 2015 sur les valeurs patrimoniales d'origine illicite (RS 196.1)

MERCOSUR

Marché commun du Sud (Mercado Común del Sur)

MINURSO

Mission des Nations Unies pour l'organisation d'un référendum au Sahara occidental

MINUSMA

Mission multidimensionnelle intégrée des Nations Unies pour la stabilisation au Mali

MINUSS

Mission des Nations Unies au Soudan du Sud

MONUSCO

Mission de l'Organisation des Nations Unies pour la stabilisation en RD Congo

MoU

Protocole d'entente (Memorandum of Understanding)

NLFA

Nouvelle ligne ferroviaire à travers les Alpes

OACI

Organisation de l'aviation civile internationale

OCDE

Organisation de coopération et de développement économiques

OCHA

Bureau de la coordination des affaires humanitaires

ODD

Objectifs de développement durable

OEA

Organisation des États américains

OFAG

Office fédéral de l'agriculture

OFC

Office fédéral de la culture

OFCOM

Office fédéral de la communication

OFEV

Office fédéral de l'environnement

OFPP

Office fédéral de la protection de la population

OIAC

Organisation pour l'interdiction des armes chimiques

OIC

Organisation de Coopération Islamique

OIF

Organisation internationale de la Francophonie

OIM

Organisation internationale pour les migrations (OIM)

OLP

Organisation de libération de la Palestine 1333

FF 2017

OMC

Organisation mondiale du commerce

OMM

Organisation météorologique mondiale

OMS

Organisation mondiale de la santé

ONG

Organisation non gouvernementale

ONU

Organisation des Nations Unies

ONUSIDA

Programme commun des Nations Unies sur le VIH/sida

ONUST

Organisme des Nations Unies chargé de la surveillance de la trêve

OSCE

Organisation pour la sécurité et la coopération en Europe

OSE

Organisation des Suisses de l'étranger

OTAN

Organisation du Traité de l'Atlantique Nord

PAM

Programme alimentaire mondial

PESC

Politique étrangère et de sécurité commune de l'Union européenne

PEV

Prévention de l'extrémisme violent

PiR

Protection dans la région ((Protection in the Region)

PNUD

Programme des Nations Unies pour le développement

PPP

Partenariat pour la paix

PRS

Présence Suisse

PSDC

Politique de sécurité et de défense commune

RNS

Réseau national de sécurité

S_GE

Switzerland Global Enterprise

SACU

Union douanière sud-africaine (Southern African Customs Union)

SADC

Communauté de développement sud-africaine (Southern African Development Community)

SARC

Croissant-Rouge syrien (Syrian Arab Red Crescent)

SECO

Secrétariat d'État à l'économie

SEFRI

Secrétariat d'État à la formation, à la recherche et à l'innovation

SEM

Secrétariat d'État aux migrations

SMM

Mission d'observation de l'OSCE en Ukraine (OSCE Special Monitoring Mission to Ukraine)

SMSI

Sommet mondial sur la société de l'information

SRC

Service de renseignement de la Confédération

1334

FF 2017

StAR

Initiative pour le recouvrement des avoirs volés (Stolen Asset Recovery Initiative)

SWISSCOY

Formation de l'armée suisse au Kosovo

TCA

Traité du 2 avril 2013 sur le commerce des armes (RS 0.518.61) (Arms Trade Treaty)

TNP

Traité du 1er juillet 1968 sur la non-prolifération des armes nucléaires (RS 0.515.03)

TPO

Territoire palestinien occupé

TPP

Accord de partenariat transpacifique (Trans-Pacific-Partnership)

TTIP

Partenariat transatlantique de commerce et d'investissement

TUE

Traité sur l'Union européenne

UA

Union africaine

UE

Union européenne

UNEP

Programme des Nations Unies pour l'environnement

UNESCO

Organisation des Nations Unies pour l'éducation, la science et la culture

UNGASS

Session extraordinaire 2016 de l'Assemblée générale des Nations Unies sur le problème mondial de la drogue

UNHAS

Service aérien d'aide humanitaire des Nations Unies

UNICEF

Fonds des Nations Unies pour l'enfance

UNRWA

Office de secours et de travaux des Nations Unies pour les réfugiés de Palestine dans le Proche-Orient

UPU

Union postale universelle

WEC

Conseil énergétique mondial (World Energy Council)

WEF

Forum économique mondial

WHS

Sommet humanitaire mondial

WOGA

Approche interdépartementale (Whole Government Approach)

1335

FF 2017

Index des pays A Afghanistan ............................................. 1159, 1170, 1260f, 1236, 1238, 1269, 1294 Afrique du Sud .1141, 1152, 1165, 1244, 1227s, 1272, 1276, 1292, 1307, 1311, 1315 Albanie ....................................................................................................... 1221, 1357 Algérie .................................................................................... 1177, 1183, 1196, 1199 Allemagne .......................... 1144s, 1151, 1160, 1164, 1177, 1211, 1214, 1227, 1240, ......................... 1242, 1254, 1266, 1307,1309, 1312s, 1317, 1320s, 1329, 1344, 1363 Andorre................................................................................................................. 1253 Angola .............................................................................................. 1160, 1229, 1326 Antigua-et-Barbuda .............................................................................................. 1169 Arabie saoudite ............................... 1266, 1168, 1177, 1182, 1184, 1192s, 1232-1234 Argentine ......................................... 1141, 1164, 1166, 1177, 1224­1226, 1307, 1317 Arménie ................................................................................. 1173, 1222, 1292s, 1344 Australie ..................................................................................................... 1307, 1332 Autriche ....................................................1140, 1144, 1151, 1160, 1164, 1211, 1213, .......................................................................... 1240, 1242s, 1313, 1316, 1320, 1326 Azerbaïdjan ...................................................................................... 1222, 1224, 1302 B Bahreïn ......................................................................... 1177, 1185, 1193, 1234, 1272 Bangladesh ................................................................... 1170, 1219, 1238, 1281, 1297 Barbade................................................................................................................. 1307 Belgique ....................................................1245, 1205, 1214, 1317, 1321, 1360, 1363 Bénin .......................................................................................................... 1228, 1136 Bhoutan
................................................................................................................ 1238 Bolivie .............................................................................................. 1170, 1225, 1297 Bosnie et Herzégovine ........ 1170, 1173, 1175, 1221s, 1269s, 1284, 1296, 1302, 1345 Brésil ............................................1141, 1165, 1177, 1136s, 1224s, 1307, 1309, 1325 Brunéi Darussalam ............................................................................................... 1239 Bulgarie .................................................................................. 1209, 1274, 1314, 1323 Burkina Faso............. 1145, 1177s, 1180, 1183, 1185, 1197s, 1229, 1296, 1306, 1321 Burundi .......................................... 1152, 1155, 1228s, 1231, 1256, 1264, 1266, 1276 C Cambodge......................................................................................... 1239, 1282, 1297 Cameroun ................................................................................................... 1177, 1229 Canada ................................... 1141, 1153, 1164, 1166, 1204, 1224-1226, 1307, 1313 Chili ................................................................... 1177, 1224s, 1227, 1294, 1307, 1315 Chine ... 1141, 1144, 1152, 1160, 1164s, 1176, 1220, 1235­1237, 1271s, 1307­1309, ......................................................................... 1311, 1313s, 1319, 1321s, 1326, 1357 Chypre ........................................................................................................ 1168, 1255 Colombie ..................................................1142, 1153, 1168, 1216, 1224­1226, 1237, ................................................................ 1262, 1265s, 1269, 1271, 1282, 1292, 1313 1336

FF 2017

Congo (Kinshasa) .......................................................................... 1228s, 1264, 1269s Corée (Nord)............................................................................................... 1237, 1373 Corée (Sud) ........................................................ 1141, 1166, 1237, 1251, 1307, 1311 Costa Rica .......................................................................................1175, 1225, 1282s Côte d'Ivoire........................................................................... 1228, 1270, 1276, 1313 Croatie ..................................................... 1140, 1163, 1209, 1221, 1314s, 1360, 1366 Cuba ........................................................................................................... 1316, 1297 D Danemark ..................................................................... 1145, 1160, 1301, 1309, 1326 Djibouti............................................................................................. 1177, 1283, 1231 E Egypte........... 1154, 1177s, 1180, 1183s, 1194s, 1203, 1232, 1235, 1263, 1278, 1326 El Salvador ........................................................................................................... 1224 Emirats Arabes Unis ............................................................... 1177, 1179, 1182, 1326 Equateur ............................................................. 1145, 1177, 1184, 1225, 1291, 1321 Erythrée ........................................... 1140, 1159, 1177, 1179, 1181, 1183, 1230, 1264 Espagne .................................................................................. 1282, 1316, 1326, 1344 Estonie .............................................................................................. 1246, 1282, 1349 Ethiopie ................................ 1177s, 1280-1183, 1200, 1202, 1228, 1230, 1264, 1314 F Finlande ........................................................................ 1243, 1305, 1309, 1344, 1360 France ...................... 1140, 1144s, 1154, 1164, 1168, 1191, 1211­1213, 1248, 1282, ......................... 1310, 1312, 1315, 1317, 1319­1321, 1325, 1344s, 1345, 1360, 1365 G Gambie ......................................................................... 1152, 1169, 1181, 1229, 1276 Géorgie ................................ 1168, 1207, 1218,
1222, 1240s, 1276, 1293, 1302, 1345 Ghana .................................................................................... 1199, 1228s, 1270, 1282 Grèce ........................................................................... 1204, 1206s, 1291, 1357, 1366 Guatemala............................................................................................................. 1224 Guinée équatoriale ................................................................................................ 1228 Guyana ....................................................................................................... 1169, 1261 H Haïti ............................................................................. 1143, 1176, 1224, 1291s, 1297 Honduras ................................................................................ 1170, 1173, 1224, 1295 Hongrie ....................................................................................................... 1214, 1282 I Iles Salomon ......................................................................................................... 1239 Inde......................... 1141, 1165, 1177, 1219, 1235s, 1251, 1271s, 1307, 1317, 1320s Indonésie ................................................. 1145, 1166, 1177, 1236, 1238, 1313s, 1321

1337

FF 2017

Irak .............................................. 1148s, 1154, 1159, 1177-1179, 1181, 1183, 1189s, ............................................................. 1217, 1232s, 1244, 1248, 1263, 1267s, 1293s Iran .............................................. 1141, 1152, 1154, 1165s, 1168, 1177, 1184s, 1189, ....................... 1192s, 1217, 1226, 1232­1234, 1251, 1272, 1307s, 1314, 1320, 1326 Irlande........................................................................... 1243, 1309, 1313, 1326, 1365 Islande .................................................................................... 1301, 1307, 1360, 1364 Israël ............................ 1154, 1177, 1180, 1191, 1193, 1205, 1235, 1263, 1270, 1309 Italie..........................................................1140, 1144, 1151, 1255, 1164, 1181, 1194, ......................................................................... 1205s, 1228, 1307, 1312s, 1349, 1360 J Japon ..................................................... 1141, 1164s, 1221, 1235s, 1307, 1311, 1317 Jordanie ..................................................1167, 1177, 1187s, 1190, 1282, 1285s, 1345 K Kazakhstan ............................................................................ 1223s, 1272, 1282, 1314 Kenya ......................................................................... 1143, 1173, 1177, 1182s, 1187, ................................................................. 1200s, 1203, 1270, 1282, 1285, 1296, 1314 Kirghizistan ...................................................................................... 1224, 1272, 1345 Kosovo ........... 1148, 1168, 1175, 1221s, 1243, 1262s, 1266, 1270, 1282, 1284, 1302 Koweït .................................................................................... 1177, 1187, 1192, 1234 L Laos ............................................................................................................ 1239, 1297 Liban ...................................................... 1267, 1177, 1181, 1183, 1187, 1190s, 1206, ........................................................................... 1234, 1270, 1282, 1285s, 1293, 1314 Libéria .................................................................................................................. 1270 Libye .............................................. 1148, 1154, 1167,
1177­1179, 1182­1184, 1187, ................................................... 1193­1195, 1198s, 1203, 1206, 1232s, 1248, 1263s Liechtenstein ....................... 1141, 1144, 1164, 1211, 1213s, 1240, 1312, 1320, 1322 Lituanie................................................................................................................. 1303 Luxembourg .......................................................................... 1144, 1312s, 1316, 1344 M Macédoine ................................................................................................ 1221s, 1366 Madagascar ............................................................................. 1175, 1232, 1281, 1283 Malaisie ................................................................................................................ 1177 Malawi .................................................................................................................. 1228 Mali ................................................ 1140, 1177­1179, 1183­1185, 1187, 1197­1199, ........................................................ 1208, 1229, 1264, 1270, 1276, 1281, 1296, 1320 Malte .................................................................................................................... 1243 Maroc ...... 1173, 1177, 1183, 1185, 1196, 1267, 1271, 1282, 1299, 1310, 1345, 1357 Maurice....................................................................................................... 1228, 1307 Mauritanie ............................................................................................................ 1177 Mexique............. 1166, 1175, 1177, 1224­1226, 1272, 1286, 1397, 1310, 1316, 1355 Moldavie..................................................................................................... 1313, 1370 Monaco ................................................................................................................. 1307 1338

FF 2017

Mongolie ...................................................................... 1170, 1173, 1237, 1239, 1297 Monténégro ................................................................................................ 1221, 1360 Mozambique ..................................................................................... 1231, 1296, 1326 Myanmar ....................................... 1142, 1155, 1168, 1239, 1262, 1265s, 1282, 1297 N Namibie ............................................................................................ 1231, 1252, 1313 Népal ................................................................................................ 1170, 1238, 1297 Nicaragua ................................................................................................... 1173, 1224 Niger ..........1173, 1179-1181, 1183, 1185, 1187, 1196-1199, 1232, 1264, 1292, 1296 Nigéria .............1142, 1145, 1154, 1260, 1066, 1172, 1175, 1181, 1185, 1196, 1198s, .................................... 1228s,1248, 1264, 1272, 1274, 1278, 1281, 1284, 1292, 1326 Norvège ............. 1160, 1169, 1214, 1251, 1301, 1303, 1307, 1326, 1344, 1355, 1360 Nouvelle-Zélande ............................................................................. 1254, 1307, 1309 O Oman ............................................................................ 1160, 1177, 1226, 1282, 1326 P Pakistan ........................................................................ 1170, 1219, 1238, 1351, 1297 Papouasie-Nouvelle-Guinée ................................................................................. 1269 Paraguay ........................................................................................... 1160, 1177, 1225 Pays-Bas ....................................................................... 1140, 1160, 1316, 1326, 1344 Pérou ........................................................................................................ 1224s, 1316 Philippines ......................................................... 1169, 1177, 1235s, 1238, 1266, 1271 Pologne ......................................................................... 1314, 1301, 1407, 1314, 1360 Portugal ................................................................................................................ 1366 Q Qatar
........................................................................................................... 1177, 1179 R République centrafricaine ....................................................... 1228, 1232, 1276, 1289 République tchèque .............................................................................................. 1214 Roumanie ................................................................................................... 1209, 1274 Royaume-Uni (Grande-Bretagne)........ 1140, 1149s, 1162s, 1171, 1203s, 1207, 1209, ....................................................................1212,1215, 1239, 1301, 1307, 1324, 1366 Russie ............ 1141, 1148s, 1151­1154, 1165, 1168, 1176s, 1188, 1207, 1209, 1212, ............ 1215, 1239­1241,1243s, 1270, 1272, 1302, 1307s, 1316, 1320s, 1343s, 1365 Rwanda ................................................................................................................. 1310 S Saint-Kitts-et-Nevis .............................................................................................. 1169 Saint-Marin........................................................................................................... 1307 Saint-Vincent-et-les-Grenadines........................................................................... 1169 Sao Tomé-et-Principe ................................................................................. 1169. 1229 1339

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Sénégal .......................................... 1175, 1177, 1185, 1188, 1232, 1272, 1276, 1282s Serbie............................................................... 1175, 1221s, 1262s, 1284, 1302, 1366 Seychelles ............................................................................................................. 1307 Singapour .............................................................................. 1166, 1238s, 1307, 1309 Slovaquie ................................................................................ 1140, 1214, 1314, 1345 Somalie ........................ 1177­1179, 1181, 1183, 1185, 1200, 1228, 1248, 1264, 1296 Soudan ..................................................... 1177­1179, 1183, 1200s, 1231, 1285, 1314 Soudan du Sud ....................................... 1145, 1177­1181, 1183s, 1200s, 1228-1231, .......................................................................... 1264, 1269s, 1275, 1289, 1292, 1321 Sri Lanka ...................................................................... 1169, 1237, 1265, 1271, 1300 Suède ............................................................................ 1214, 1243, 1251, 1301, 1327 Syrie ...... 1138s1142s, 1149, 1152­1154, 1159, 1367­1170, 1176­1186, 1188­1193, ............ 1203, 1206s, 1214, 1216­1218, 1232­1235, 1248, 1252, 1255, 1263, 1266s, ............................................................... 1270, 1275s, 1282­1285, 1289, 1291, 1293s T Tadjikistan .............................................................................. 1179, 1224, 1272, 1302 Taïwan (Taipei chinois) .............................................................................. 1236, 1359 Tanzanie ..................................................................................................... 1231, 1296 Tchad ................................................................ 1139, 1177­1283, 1185s, 1197­1199, ...................................................................1227­1229, 1248, 1264, 1276, 1292, 1296 Territoire palestinien occupé ..... 1145, 1154, 1168, 1179, 1177s, 1183s, 1291s, 1232, ............................................................................ 1235, 1259, 1263, 1296, 1323, 1344 Thaïlande .................................................................................................... 1239,
1371 Togo ..................................................................................................................... 1329 Tonga.......................................................................................................... 1169, 1239 Tunisie ........................ 1140, 1173­1175, 1177, 2279, 1183, 1185­1187, 1193­1195, ..................................... 1235, 1263, 1266, 1278, 1281, 1284, 1296, 1322, 1347, 1357 Turkménistan .............................................................................................. 1224, 1293 Turquie .......... 1141, 1145, 1149, 1154s, 1164­1167, 1181, 1183, 1187s, 1190, 1203, .......... 1206s, 1217s, 1222, 1232s, 1244, 1282, 1290, 1302, 1320s, 1323, 1343, 1355 U Ukraine ....... 1143, 1151s, 1155, 1165, 1167s, 1170, 1176s, 1203, 1207s, 1218, 1223, ...................................................................1240­1243, 1262,1266, 1270, 1278, 1284, .................................................................. 1291, 1302, 1308, 1313, 1323, 1342­1345 Uruguay ...........................................................................................1177, 1225s, 1307 USA (Etats-Unis d'Amérique) ..... 1141, 1148­1153, 1164s, 1168, 1184, 1188, 1193, ................. 1204, 1216, 1218, 1220,1224, 1227, 1232­1236, 1271s, 1307, 1315, 1326 V Venezuela ........................................................................................................... 1224s Vietnam ................................................. 1174, 1177, 1236s, 1239, 1271s, 1295, 1311

1340

FF 2017

Y Yémen .................................................... 1152, 1154, 1167, 1170, 1177­1181, 1183s, ...................................................................1186, 1192, 1232­1234, 1248, 1253, 1275 Z Zambie .................................................................................................................. 1228 Zimbabwe ..................................................................... 1228, 1231, 1264, 1266, 1271

1341

FF 2017

Annexe

Informations complémentaires concernant le Conseil de l'Europe 1 1.1

Organes Comité des Ministres

Au cours de l'année sous revue, les débats du Comité des Ministres (CM) ont encore été marqués par les attentats terroristes perpétrés dans différentes villes d'Europe, la question étant de savoir quelle réponse le Conseil de l'Europe (CdE) pouvait apporter à l'extrémisme violent et à la radicalisation conduisant au terrorisme. Durant la vaste discussion engagée sur la base du protocole additionnel à la Convention européenne du 27 janvier 1977 pour la répression du terrorisme 51, adopté l'an dernier, la Suisse a mis l'accent sur l'importance de la lutte contre le terrorisme, tout en soulignant que les valeurs de la démocratie, des droits de l'homme et de l'état de droit devaient être observées. Elle a rappelé qu'elle s'engageait partout dans le monde en faveur de la prévention de la violence et fait connaître son expérience en la matière: une bonne intégration, y compris sur le marché du travail, ainsi qu'une approche locale basée sur une collaboration complète sont des éléments importants de prévention de la radicalisation. Enfin, la Suisse a apporté son soutien à l'initiative du Secrétaire Général Thorbjørn Jagland portant sur la mise en oeuvre d'un plan d'action visant à encourager l'émergence de sociétés inclusives.

En parallèle à la prévention du terrorisme, la crise des réfugiés et des migrants en Europe a été au coeur des préoccupations. M. Jagland a rappelé à tous les chefs de gouvernement des États membres du CdE que la convention européenne des droits de l'homme (CEDH)52 s'appliquait à tous les individus sur le continent européen, y compris aux réfugiés extra-européens qui séjournent en Europe. Il a appelé les États membres à respecter les normes minimales des droits de l'homme pour l'accueil, l'hébergement et les procédures d'asile. À cet effet, il a nommé un représentant spécial sur les migrations et les réfugiés, à qui il a confié la mission d'observer la situation des réfugiés ainsi que de conseiller et de soutenir les États membres pour qu'ils respectent les droits fondamentaux des réfugiés. Celui-ci a su s'imposer comme un interlocuteur privilégié au travers de son expertise et des visites qu'il a effectuées régulièrement dans les régions particulièrement touchées par la crise des réfugiés. En accord avec les propositions du Secrétaire Général et de l'Assemblée parlementaire
(lancement d'une campagne pour mettre fin à la rétention d'enfants migrants, dont la rapporteuse est une parlementaire suisse), le CM s'est notamment penché sur le sort des réfugiés mineurs non accompagnés, qui ont besoin d'une protection particulière.

À l'instar des deux dernières années, la crise en Ukraine s'est régulièrement invitée au programme du CM. Début 2016, le Secrétaire Général a envoyé en Crimée une mission spéciale conduite par le diplomate suisse Gérard Stoudmann. Il a chargé celle-ci d'analyser la situation des droits de l'homme et de vérifier l'application des 51 52

RS 0.353.3 RS 0.101

1342

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dispositions de la CEDH dans la péninsule. Les questions concernant le statut de la Crimée étaient exclues du mandat de la mission, qui a tiré de ses travaux la conclusion qu'il était indispensable d'ouvrir la Crimée aux mécanismes de suivi ordinaires du CdE ainsi que de rechercher des solutions qui, pour pouvoir être efficaces dans un contexte difficile, devaient être pragmatiques et novatrices. Le CM a réaffirmé dans une nouvelle résolution l'indépendance, la souveraineté et l'intégrité territoriale de l'Ukraine à l'intérieur des frontières internationalement reconnues; il a de nouveau condamné l'annexion de la Crimée par la Fédération de Russie, au mépris du droit international, et a exprimé ses vives préoccupations quant à la situation des droits de l'homme en Crimée; enfin, il a appelé les autorités concernées à accorder aux institutions des droits de l'homme du CdE un accès complet et illimité à tous les territoires, y compris la Crimée, afin que celles-ci puissent exercer leurs activités de suivi sans restriction aucune.

La lutte contre le terrorisme, la crise des réfugiés et le respect des droits de l'homme dans les régions en conflit étaient également au coeur des discussions de la 126e session du Comité des Ministres, qui s'est tenue le 18 mai à Sofia. Autre point fort, le Secrétaire Général y a présenté son troisième rapport sur la situation de la démocratie, des droits de l'homme et de l'état de droit en Europe, dont il a tiré des conclusions préoccupantes. Il a indiqué que la sécurité démocratique est mise à mal en Europe et que des droits fondamentaux tels que la liberté d'expression et la liberté de réunion ainsi que le droit à la vie privée sont de plus en plus restreints.

Ainsi, la sécurité des journalistes n'est pas garantie de manière satisfaisante dans près de la moitié des États membres du CdE et le pluralisme des médias y est insuffisant. De plus, l'indépendance et l'impartialité de la justice ne sont pas suffisamment assurées; les ingérences politiques, la corruption et la non-application des décisions judiciaires sont préoccupantes. Le rapport formule différentes recommandations, dont le renforcement de l'indépendance de la justice ainsi que la protection des groupes particulièrement vulnérables et des défenseurs des droits de l'homme.

Le Secrétaire Général Thorbjørn
Jagland était l'un des premiers personnages officiels de haut rang à se rendre en Turquie peu de temps après la tentative de coup d'État, qu'il a condamnée sans équivoque. Dans le même temps, il a demandé au gouvernement turc de respecter les principes de l'état de droit et des droits de l'homme dans les efforts que celui-ci déployait pour gérer la crise. Un groupe d'experts du Conseil de l'Europe a remis ses recommandations concernant la manière de mettre en adéquation avec la CEDH les mesures prises dans le contexte de l'état d'urgence. De son côté, la Commission de Venise a publié une prise de position sur les décrets adoptés au sujet de l'état d'urgence et sur leur compatibilité avec la CEDH. Le Commissaire aux droits de l'homme a invité la Turquie à mettre fin à l'état d'urgence le plus rapidement possible et à rétablir les procédures juridiques ordinaires. À l'issue d'une visite ad hoc en Turquie, le Comité européen pour la prévention de la torture (CPT) a rédigé un rapport sur le traitement des détenus depuis l'échec de la tentative de putsch. La Suisse a elle aussi condamné au sein du CM la tentative de coup d'État tout en faisant part de ses préoccupations quant aux arrestations massives et à l'incarcération de nombreux juges, fonctionnaires, enseignants, journalistes et responsables politiques membres de l'opposition. Elle a appelé la Turquie au respect des procédures de l'état de droit et des principes de la CEDH.

1343

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Le Comité des Ministres a adopté en juin la Convention du CdE sur une approche intégrée de la sécurité, de la sûreté et des services lors des matches de football et autres manifestations sportives. Celle-ci s'appuie sur la coopération internationale pour renforcer la sécurité durant les manifestations sportives. Elle a été signée par quatorze États membres le 3 juillet à Saint-Denis, en France, en marge du championnat d'Europe de football; la Suisse figurait parmi les premiers signataires.

Au cours de l'année sous revue, la Suisse a assumé la présidence du groupe de rapporteurs du CM sur les relations extérieures du CdE, dont les principaux travaux ont porté sur la politique de voisinage, les relations avec l'UE et l'OSCE ainsi que l'élaboration d'une résolution biennale sur la collaboration du CdE avec l'ONU. La Suisse a également présidé le Fonds fiduciaire pour les droits de l'homme, un regroupement de pays contributeurs qui finance les projets efficaces et simples de soutien à la mise en oeuvre de la CEDH et des arrêts de la Cour européenne des droits de l'homme. Outre la Suisse, ses membres sont l'Allemagne, la Finlande, la Norvège, les Pays-Bas et le Royaume-Uni.

1.2

Assemblée parlementaire

L'Espagnol Pedro Agramunt a succédé à la Luxembourgeoise Anne Brasseur à la présidence de l'Assemblée parlementaire du Conseil de l'Europe (APCE) pour les années 2016 et 2017. Du fait de la menace que laissait planer l'APCE de maintenir contre la délégation russe les sanctions et la suspension de ses droits de vote, la délégation russe a décidé durant l'année sous revue de renoncer d'emblée à remettre les documents nécessaires à son accréditation et de continuer à boycotter les sessions de l'APCE, comme elle l'avait déjà fait les deux années précédentes. Une fois de plus, la situation politique et humanitaire en Ukraine a été au centre de différentes discussions. Dans une résolution, l'APCE a exigé la libération immédiate de Nadia Savtchenko et de tous les autres prisonniers politiques détenus dans l'Est de l'Ukraine, dans la Fédération de Russie et en Crimée, libération qu'elle considère comme une étape prioritaire dans la mise en oeuvre de l'accord de Minsk. Après sa libération au milieu de l'année, Nadia Savtchenko a participé à l'APCE en qualité de parlementaire ukrainienne et demandé que la délégation russe ne soit pas autorisée à retrouver les bancs de l'assemblée munie de la totalité de ses droits tant que des citoyens ukrainiens seraient détenus sur le territoire de la Fédération de Russie et que les droits de l'Ukraine ne seraient pas respectés.

Autre temps fort des discussions, la crise des réfugiés et des migrants. L'APCE a débattu à diverses reprises de la tragédie des réfugiés en mer Méditerranée, sans toutefois parvenir à un consensus quant à la façon de réagir aux défis posés par la crise des migrants. Au cours des discussions sur la lutte contre le terrorisme, il a été souligné que les droits de l'homme, la notion d'état de droit et les autres valeurs communes du CdE devaient être respectés. Les gouvernements des États membres ont été appelés à prendre exclusivement des mesures nécessaires et appropriées dans la lutte contre le terrorisme. Dans son allocution devant l'APCE, le président de la Commission européenne Jean-Claude Juncker a évoqué la coopération entre le CdE et l'UE, soulignant que les deux entités reposaient sur le même socle et défendaient les mêmes valeurs. Il a expliqué que le CdE était la référence en matière de droits de 1344

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l'homme et a confirmé qu'un CdE fort et indépendant était de l'intérêt des deux entités. Concernant la crise des migrants et les attentats terroristes, il a indiqué que l'Europe se trouvait dans une situation difficile et a félicité le CdE pour son engagement dans la question migratoire. Il a ajouté que la coopération européenne était d'une grande importance dans la lutte contre le terrorisme, comme l'illustre la signature du protocole additionnel à la convention européenne pour la répression du terrorisme sur les combattants terroristes étrangers. Il a précisé que le CdE jouait un rôle important dans le maintien de l'équilibre entre sécurité et liberté et, dans ce contexte, il a affirmé que l'adhésion de l'UE à la CEDH était une priorité politique de la Commission européenne.

Le président français François Hollande s'est lui aussi exprimé devant l'APCE pour évoquer l'état d'urgence dans son pays depuis les attentats terroristes de novembre 2015 et assurer que la France continuait de garantir les droits fondamentaux sans restriction aucune. Il a par ailleurs proposé d'organiser une rencontre des chefs d'État durant la présidence française du Comité des Ministres, en 2019. La demande du Parlement jordanien de se voir octroyer le statut de partenaire pour la démocratie a été accueillie favorablement. Celui-ci est devenu le quatrième parlement national, après ceux du Maroc, de la Palestine et du Kirghizistan, à obtenir ce statut.

1.3

Congrès des pouvoirs locaux et régionaux

Composée de représentants des cantons et des communes, la délégation suisse au congrès a participé aux deux parties de session de l'année 2016, qui étaient consacrées au thème de l'éthique et de la transparence aux niveaux local et régional. Dans le contexte de la crise des réfugiés et des migrants, le congrès s'est penché, à sa séance de mars, sur la question de l'intégration des migrants et de la lutte contre la traite des êtres humains au niveau local. Dans le cadre de la surveillance de la mise en oeuvre de la Charte européenne du 15 octobre 1985 de l'autonomie locale 53, les membres du congrès ont par ailleurs étudié des rapports sur la situation de la démocratie locale et régionale en France et en Slovaquie et ont engagé un dialogue sur les travaux de suivi en Arménie, en Géorgie et en Ukraine. Le dernier débat a été conduit par un parlementaire suisse, lequel présidait la commission compétente.

À l'été, le conseiller fédéral Didier Burkhalter a renouvelé les membres de la délégation suisse pour les années 2016 à 2020 et, dans la foulée, la délégation nouvellement nommée a participé à la session d'octobre à Strasbourg. Outre la nouvelle présidente du congrès, les délégués ont élu les présidents des deux chambres et des trois commissions du congrès. Le président de la délégation suisse a été élu à l'un des postes de vice-président de la Commission de suivi. La prévention de la corruption et l'utilisation abusive de fonds publics pour des campagnes électorales ont constitué d'importants sujets de discussion durant la session plénière. De plus, les délégués ont adopté les priorités du congrès pour les années 2017 à 2020 ainsi qu'une résolution visant à augmenter la participation des femmes aux niveaux local et régional. Au cours de l'année sous revue, les membres suisses du congrès ont participé notamment à la surveillance des élections locales en Arménie et en Bosnie 53

RS 0.102

1345

FF 2017

et Herzégovine et contribué à l'élaboration de rapports de suivi relatifs au respect de la charte citée plus haut.

2 2.1

Droits de l'homme Comité directeur pour les droits de l'homme

En 2016 aussi, le Comité directeur pour les droits de l'homme (CDDH) s'est concentré sur la réforme de la Cour européenne des droits de l'homme. Il a adopté un rapport à l'intention du Comité des Ministres relatif aux mesures prises au niveau national par les États parties à la CEDH dans le cadre de la mise en oeuvre de la déclaration de Brighton de 2012. Il a par ailleurs approuvé les travaux de ses souscomités, qui se sont consacrés aux thèmes suivants: élections des juges à la cour, mise en oeuvre efficace des arrêts par les États et examen de la compatibilité des projets de loi avec la CEDH.

Dans le domaine du développement et de la promotion des droits de l'homme, le CDDH a notamment adopté une analyse juridique des mesures de lutte contre les mutilations génitales et les mariages forcés. Il a par ailleurs approuvé les ébauches élaborées par les différents rapporteurs, sur lesquelles seront fondés les futurs travaux relatifs aux thèmes des droits sociaux, de la liberté d'opinion par rapport à d'autres droits de l'homme, des migrations et des droits de l'homme ainsi que des institutions nationales des droits de l'homme. Le CDDH avait défini comme prioritaire le traitement de ces sujets aux cours des prochaines années. Lors de sa session de décembre, il s'est informé sur l'état d'avancement des différents travaux et a pris acte des avancées avec satisfaction.

Le 3 mars, le Comité des Ministres a adopté des recommandations sur les entreprises et les droits de l'homme qui reposent dans une large mesure sur les principes directeurs de l'ONU, définis en 2011. Ces recommandations comprennent des directives qui doivent aider les États membres à empêcher et à éliminer les violations des droits de l'homme causées par des entreprises. Elles appellent les États à prendre des mesures qui inciteront les entreprises à respecter les droits de l'homme et détaillent la question de l'accès aux mécanismes judiciaires, à la lumière de l'expertise en la matière et des normes juridiques du CdE, notamment la responsabilité civile et pénale, la réduction des obstacles juridiques, l'assistance judiciaire et un système de réclamations collectives. Les recommandations ne sont pas une simple reproduction des principes directeurs de l'ONU, elles concrétisent ceux-ci en partie et vont un peu plus loin qu'eux s'agissant
de leur caractère contraignant, toujours relatif. Le CDDH prévoit d'organiser en juin 2017 un séminaire de haut rang sur les travaux qui seront alors achevés, mettant ainsi en oeuvre la recommandation Rec(2016)3 sur les droits de l'homme et les entreprises adoptée le 2 mars 2016 par le Comité des Ministres.

1346

FF 2017

2.2

La Suisse devant la Cour européenne des droits de l'homme

Durant la période sous revue, la cour a rendu dix arrêts concernant la Suisse. Dans cinq cas, elle a constaté au moins une violation de la CEDH. Voici les dix arrêts en question (dans l'ordre chronologique)54:

54

­

Di Trizio (2 février 2016): violation de l'interdiction de discrimination (art. 14 CEDH) en relation avec le droit au respect de la vie privée et familiale (art. 8 CEDH) en raison de l'évaluation de l'invalidité selon la méthode dite mixte.

­

Meier (9 février 2016): pas de violation de l'interdiction du travail forcé (art. 4 CEDH) du fait de l'obligation de travailler imposée à un détenu ayant atteint l'âge de la retraite.

­

Bédat (29 mars 2016; Grande Chambre): pas de violation de la liberté d'expression (art. 10 CEDH) au travers de la condamnation d'un journaliste à une amende pour avoir publié des documents couverts par le secret de l'instruction dans une affaire pénale.

­

Derungs (10 mai 2016): violation du droit à un examen judiciaire à bref délai de la détention (art. 5, par. 4, CEDH) en raison d'un délai de onze mois jusqu'à la décision du Tribunal concernant la demande de libération. Pas de violation du droit à un examen judiciaire de la détention (art. 5, par. 4, CEDH) découlant du refus du Tribunal administratif d'ordonner une audience.

­

Cicad (7 juin 2016): pas de violation de la liberté d'expression (art. 10 CEDH) au travers de la constatation d'un tribunal civil, selon lequel la qualification d'antisémites des propos d'un professeur de sciences politiques porte atteinte à la personnalité de celui-ci, et au travers de l'obligation de retirer l'article litigieux du site Internet.

­

Al-Dulimi et Montana Management Inc. (21 juin 2016; Grande Chambre): violation du droit à un procès équitable (art. 6, par. 1, CEDH) en raison de l'absence de contrôle judiciaire concernant l'application des sanctions de l'ONU (listes noires).

­

Naït-Liman (21 juin 2016): pas de violation du droit à un procès équitable (art. 6, par. 1, CEDH) pour non-entrée en matière des tribunaux civils concernant une demande en dommages-intérêts pour actes de torture subis en Tunisie.

­

Rivard (4 octobre 2016): pas de violation du droit à ne pas être jugé ou puni deux fois (art. 4, par. 1, protocole no 7 à la CEDH) pour amende pénale et retrait du permis de conduire concernant la même infraction.

Des résumés plus complets des cas suisses (et de cas importants concernant d'autres États) sont publiés depuis 2008 dans les rapports trimestriels de l'Office fédéral de la justice: www.bj.admin.ch > État & Citoyen > Droits de l'homme > Jurisprudence de la CEDH.

1347

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­

Vukota-Boji (18 octobre 2016): violation du droit au respect de la vie privée et familiale (art. 8 CEDH) en raison d'une base légale insuffisante pour la surveillance de la requérante par l'assurance-accident. Pas de violation du droit à un procès équitable (art. 6, par. 1, CEDH) par l'utilisation des résultats de la surveillance.

­

El Ghatet (8 novembre 2016): violation du droit au respect de la vie privée et familiale (art. 8 CEDH) par le rejet de la demande de regroupement familial.

2.3 2.3.1

Discrimination et racisme Lutte contre le racisme

Dans son rapport et ses recommandations de 2014, la délégation de la Commission européenne contre le racisme et l'intolérance (ECRI) exige un rapport intermédiaire relatif à la mise en oeuvre de deux recommandations qui portent, l'une sur les compétences et les ressources de la Commission fédérale contre le racisme (CFR), l'autre sur la mise en place de services indépendants de lutte contre toute forme de discrimination des personnes lesbiennes, gays, bisexuelles, transgenres et intersexuées (LGBT).

Le Service de lutte contre le racisme (SLR), qui coordonne le contenu du compte rendu à l'ECRI, a élaboré une prise de position sur ces deux points, en collaboration avec les services compétents pour les thèmes spécifiques et avec le service du DFAE compétent pour l'ECRI. Dans le cadre de ses activités déployées pour lutter contre toute forme de discrimination raciste, le SLR s'est concentré sur les communautés des Yéniches, des Sinti et des minorités nomades ainsi que sur l'islamophobie, l'antisémitisme et le racisme envers les Noirs. De nombreux projets sont réalisés et soutenus financièrement dans chacun de ces quatre domaines (en 2016, une quinzaine de projets ont été soutenus à hauteur de 160 000 francs suisses environ).

2.3.2

Protection des minorités

La Suisse a ratifié la Convention-cadre du 1er février 1995 pour la protection des minorités nationales55 en 1998. Elle reconnaît comme minorités nationales au sens de cet instrument les minorités nationales linguistiques, les membres de la communauté juive, les Yéniches, les Sinti et les Manouches suisses, qu'ils soient nomades ou sédentaires. Durant l'année 2016, le DFAE a consulté techniquement les cantons et communes dans la perspective de l'élaboration du 4e rapport de mise en oeuvre de la convention-cadre qui sera remis au CdE au début 2017 pour son évaluation par le Comité consultatif de la convention-cadre et le Comité des Ministres. En 2016, la Suisse, représentée par le DFAE et le DFI, a continué à s'engager dans le cadre du comité ad hoc d'experts sur les questions relatives aux Roms et aux Gens du voyage (CAHROM). Lors du dialogue avec la société civile des Roms et des Gens du 55

RS 0.441.1

1348

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voyage qui a eu lieu à l'occasion de la réunion plénière du CAHROM de novembre 2016, une table ronde s'est tenue au sujet du mode de vie des Roms et des Gens du voyage itinérants ou semi-itinérants. Des représentants des Sinti et Yéniches suisses y ont pris part.

La Suisse a publié en décembre 2015 le 6e rapport de la Suisse concernant la mise en oeuvre de la Charte européenne du 5 novembre 1992 des langues régionales ou minoritaires56. Le rapport indique les mesures prises par la Suisse pour mettre en oeuvre les dispositions de la charte. Le comité d'experts de la charte, dans le cadre du suivi régulier de l'application de la charte dans les pays signataires, a organisé sa visite en Suisse en mai. Il a pu rencontrer les autorités fédérales et cantonales impliquées dans la promotion des langues régionales ou minoritaires en Suisse ainsi que les représentants des locuteurs des minorités concernées. Le CdE a remis à la Suisse son rapport d'évaluation en automne 2016. Le rapport contient des questions et des propositions du comité d'experts au sujet des langues minoritaires et présente les recommandations du Conseil des Ministres adressées à la Suisse, qui sont au nombre de trois: 1. poursuivre les mesures relatives à l'utilisation régulière de l'italien dans le secteur public du canton des Grisons, 2. prendre des mesures afin que le romanche ne soit pas discriminé en raison des fusions de communes dans ce canton et 3. reconnaître le francoprovençal selon la partie II de la charte. Les travaux de mise en oeuvre de ces recommandations seront entrepris par les autorités suisses à partir de 2017.

2.3.3

Égalité entre femmes et hommes

La Suisse a participé fin juin/début juillet 2016 à la Conférence de la Commission pour l'égalité de genre (GEC) du CdE accueillie par l'Estonie à Tallinn, qui avait pour objet l'évaluation des cinq objectifs de la Stratégie 2014­2017 du CdE et la discussion de la prochaine stratégie. La conférence a mis un accent particulier sur l'impact des médias sociaux sur l'égalité entre femmes et hommes, et sur les solutions électroniques. En outre, un panel de haut niveau a débattu des priorités de la prochaine stratégie du CdE et a esquissé plusieurs recommandations, notamment s'agissant de l'action en faveur des femmes migrantes et de la formation scolaire en matière d'égalité des genres dispensée aux garçons et aux filles. En outre, à l'occasion de la 10e réunion de la GEC en novembre, la Suisse a présenté l'outil d'analyse salariale en entreprises Logib, et son utilisation dans le cadre des marchés publics, ainsi que les expériences faites aux niveaux national et international. L'événement a suscité un vif intérêt auprès des États membres, plusieurs d'entre eux ayant implémenté ou étant sur le point d'implémenter l'outil. Lors de la même réunion, la Suisse a également participé au groupe de travail visant à élaborer un projet de recommandation pour la lutte contre le sexisme.

56

RS 0.441.2

1349

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2.3.4

Prévention de la torture

Le Comité européen pour la prévention de la torture (CPT) a adopté son rapport relatif à sa visite en Suisse d'avril 2015 lors de sa réunion plénière de début novembre 2015. Les autorités suisses ont reçu ledit rapport à la fin du mois de décembre 2015. Le rapport du CPT et l'avis du Conseil fédéral ont été publiés en juin 2016. Le CPT, qui avait visité des établissements de police, des établissements pénitentiaires et des unités psychiatriques, n'a recueilli que très rarement des allégations ou des indices laissant supposer l'application de la torture ou de mauvais traitements graves en Suisse. Cependant, il a notamment conseillé aux autorités suisses d'accentuer leurs efforts afin de placer les détenus atteints de graves troubles mentaux dans des structures adaptées et non pas dans des sections de haute sécurité.

Lors de sa séance plénière du mois de mars, le CPT a en particulier mené des discussions sur ses activités liées à l'arrivée massive de migrants en situation irrégulière en Europe. En avril, il a appelé les États à revoir le traitement des condamnés à la réclusion à perpétuité, en rappelant notamment qu'il était inhumain d'incarcérer une personne à vie sans lui offrir aucune perspective de libération. Le 26 juin, à l'occasion de la Journée internationale pour le soutien aux victimes de torture, le CPT et le Sous-comité des Nations Unies pour la prévention de la torture ont rappelé que l'obligation de protéger la dignité des personnes détenues était plus importante que jamais dans le contexte global d'instabilité et de crise économique.

2.4

Droits de l'enfant

Le 2 mars, le Comité des Ministres a adopté la nouvelle Stratégie du CdE pour les droits de l'enfant qui s'étendra sur six ans, soit de 2016 à 2021. Cinq domaines prioritaires y sont identifiés: l'égalité des chances pour tous les enfants; la participation; une vie exempte de violence; une justice adaptée à tous les enfants et les droits de l'enfant en matière numérique. Le Comité des Ministres a adopté le 3 mars le mandat, pour une année, du nouveau Comité ad hoc pour les droits de l'enfant (CAHENF), qui aura pour mission principale de coordonner la mise en oeuvre de la stratégie 2016­2021, d'évaluer son impact et de veiller à ce que la perspective des droits de l'enfant soit promue au sein de l'organisation et dans les États membres. La première réunion du CAHENF a eu lieu à Strasbourg les 28 et 29 septembre.

2.5

Bioéthique

Le Comité de bioéthique du Conseil de l'Europe (DH-Bio) a mené différents projets en 2016. Le volet du placement et du traitement involontaires présenté dans le projet de nouveau protocole additionnel à la convention sur les droits de l'homme et la biomédecine relatif à la protection des droits de l'homme et de la dignité des personnes atteintes de troubles mentaux a provoqué une levée de boucliers lors de la consultation publique, notamment de la part de l'APCE, qui considère comme discriminatoire toute référence à une maladie psychique comme base du traitement et du placement involontaires et n'accepte aucune formulation à cet égard. À l'heure 1350

FF 2017

actuelle, la suite de la procédure n'a pas encore été arrêtée définitivement. La Suisse participe activement au débat au travers de ses nombreuses délégations représentées au sein des différents organes du CdE.

En ce qui concerne les études portant sur les tendances liées à de nouvelles technologies émergentes (génétique, mégadonnées, neurosciences, nanotechnologies) et à leurs aspects éthiques, il a été décidé de tout mettre en oeuvre pour soumettre leurs résultats au débat public. À cette fin, une enquête sera préparée en vue d'identifier les pratiques appropriées pour susciter l'intérêt public et de les évaluer. Il est prévu d'intégrer ses résultats dans la suite de la planification stratégique. Enfin, le DH-Bio a décidé d'élaborer une prise de position sur l'interdiction de la commercialisation dans la bioéthique en guise d'aide à l'interprétation de l'art. 21 de la Convention du du 4 avril 1997 sur les Droits de l'homme et la biomédecine57 (convention d'Oviedo). La première proposition a été débattue, son traitement se poursuit. La Suisse suivra attentivement le processus.

2.6

Médias et société de l'information

La Suisse est représentée au sein du Comité directeur sur les médias et la société de l'information (CDMSI) par le biais du service des affaires internationales de l'Office fédéral de la communication (OFCOM). Elle fait aussi partie du Comité d'experts sur le pluralisme des médias et la transparence de leur propriété (MSI-MED) et du Comité d'experts sur les intermédiaires internet (MSI-NET). Le CDMSI a finalisé et approuvé ses commentaires sur la recommandation 2089(2016) de l'Assemblée parlementaire relative à la propriété intellectuelle à l'ère numérique, puis a décidé de les remettre au Comité des Ministres. Il a organisé un atelier sur la mise en oeuvre de la norme du CdE relative à la protection des journalistes et a pris acte des expériences réalisées avec la plateforme en ligne qui, lancée il y a un an, appuie la mise en oeuvre de ladite norme.

Le CDMSI a salué l'adoption des recommandations CM/Rec(2016)1 sur la protection et la promotion du droit à la liberté d'expression et du droit à la vie privée en lien avec la neutralité du réseau; de la recommandation CM/Rec(2016)4 sur la protection du journalisme et la sécurité des journalistes et autres acteurs des médias; de la recommandation CM/Rec(2016)5 sur la liberté d'Internet et de la Stratégie sur la gouvernance d'Internet 2016­2019 du CdE. Il a pris acte du rapport du Secrétaire Général Thorbjørn Jagland consacré à la «Stratégie sur la gouvernance d'Internet 2012­2015», des travaux préparatoires de l'édition 2016 du «Forum de l'ONU sur la gouvernance d'Internet» organisé à Guadalajara et d'une information relative au Dialogue européen sur la gouvernance d'Internet, qui s'est tenu à Bruxelles.

Le CDMSI s'est penché sur le programme des Comités d'experts MSI-MED et MSINET ainsi que sur leurs avancées. Concernant le MSI-MED, il a étudié le projet de recommandation du Comité des Ministres relative au pluralisme des médias et à la transparence de leur propriété, dont il a salué la structure, et a fait des propositions pour la suite des travaux. Lors des deux séances qu'il a tenues en 2016, le MSI-NET 57

RS 0.810.2

1351

FF 2017

s'est consacré aux travaux relatifs à une recommandation sur les rôles et les responsabilités des fournisseurs de services Internet et à une étude sur les effets des algorithmes en termes de droits de l'homme, laquelle devrait être achevée au premier semestre 2017. Par ailleurs, le comité a été chargé de réfléchir à une éventuelle mise à jour des lignes directrices pour les fournisseurs de services Internet dans le cadre de la protection des droits de l'homme en ligne. Pour ces travaux, la Suisse défend une mise à jour et un développement équilibrés de l'acquis du CdE, qui tiennent compte des dernières avancées sociales, techniques et économiques.

3 3.1

État de droit Droit public: Comité ad hoc des conseillers juridiques sur le droit international public

Le Comité ad hoc des conseillers juridiques sur le droit international public (CAHDI) est un organe du CdE qui réunit deux fois par an les conseillers juridiques des ministères des affaires étrangères des États membres pour qu'ils échangent leurs points de vue et leurs expériences. La Suisse participe régulièrement aux réunions du CAHDI. Cette plateforme lui permet de débattre des dernières évolutions en matière de droit international public, de discuter de sa mise en oeuvre dans la législation nationale et de coordonner ses prises de position avec les autres États membres.

Une fonction importante du CAHDI est celle de l'observation des réserves aux traités internationaux. La Suisse examine attentivement les réserves d'autres États et fait valoir ses objections si elle considère qu'une réserve n'est pas admissible. À chaque séance, le CAHDI examine une liste de réserves susceptibles d'objections.

Les échanges qui s'ensuivent au sein du CAHDI permettent de débattre de questions portant sur l'interprétation des réserves et de se concerter entre États membres quant à des réserves éventuellement inadmissibles. L'objection à une réserve d'une partie à un traité par un certain nombre d'autres parties peut inciter celle-ci à retirer sa réserve ou à l'atténuer. Par conséquent, les discussions au sein du CAHDI permettent à la Suisse de contribuer directement à la sauvegarde de l'intégrité du droit international, en particulier dans le domaine des droits de l'homme, et servent ses relations conventionnelles avec d'autres États.

3.2 3.2.1

Droit pénal Lutte contre la traite des êtres humains

En 2016, la Suisse a élaboré un nouveau plan d'action national contre la traite des êtres humains. Ce plan doit couvrir les années 2017 à 2020 et se base sur les recommandations transmises à la Suisse le 30 novembre 2015 par le Comité des Parties à la Convention du 16 mai 2005 sur la lutte contre la traite des êtres humains 58. Le 6 avril 2016, la Suisse a publié le rapport exploratoire commandité au Forum suisse pour l'étude des migrations et de la population de l'Université de Neuchâtel et 58

RS 0.311.543

1352

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portant sur l'exploitation de la force de travail en Suisse. Ce rapport constitue une première étape nécessaire afin de lutter plus efficacement contre la traite des êtres humains aux fins d'exploitation de la force de travail en Suisse, comme le préconise le Groupe d'experts sur la lutte contre la traite des êtres humains (GRETA) du CdE dans son rapport d'évaluation sur la mise en oeuvre de la convention par la Suisse.

En outre, la Suisse a participé aux 18e et 19e réunions du Comité des Parties à la convention le 23 mai et le 4 novembre.

3.2.2

Cybercriminalité

La Convention du 23 novembre 2001 sur la cybercriminalité59 est entrée en vigueur pour la Suisse le 1er janvier 2012. Une adaptation de la législation s'est avérée nécessaire au sujet de l'infraction que constitue l'accès indu à un système informatique (art. 143bis du code pénal60, élément constitutif du hacking) et de la collaboration internationale (art. 18b de la loi du 20 mars 1981 sur l'entraide pénale internationale61). La convention prévoit que les États membres se rencontrent au moins une fois par an pour se concerter sur sa mise en oeuvre et son développement futur.

L'Office fédéral de la justice (qui fait partie du bureau, lequel prépare les travaux du comité) et le Service national de coordination de la lutte contre la criminalité sur internet (SCOCI) participent aux rencontres du Comité de la convention sur la cybercriminalité (T-CY) à Strasbourg. Les débats internationaux se concentrent d'une part sur des questions relatives à l'accès transfrontalier à des données informatiques stockées (art. 32 de la convention sur la cybercriminalité) et, d'autre part, sur les défis liés aux services d'informatique en nuage.

3.2.3

Trafic d'organes

La Convention du CdE contre le trafic d'organes humains, adoptée en juillet 2014 par le Comité des Ministres, est ouverte à la signature depuis le 25 mars 2015. La Suisse soutient pleinement le but poursuivi par la convention et, après avoir évalué les conséquences juridiques d'une ratification, l'a signée le 10 novembre 2016. La Suisse dispose d'ores et déjà d'un cadre juridique solide pour lutter contre ce type de trafic, mais la ratification nécessitera encore quelques adaptations de la loi du 8 octobre 2004 sur la transplantation62.

Durant l'année sous revue, le Comité européen sur la transplantation d'organes (CDP-TO) a abordé des points liés à la promotion de la qualité et de la sûreté des organes, tissus et cellules destinés à une transplantation. La lutte contre le trafic de tissus, cellules et organes humains et la nécessité d'élaborer un protocole ont aussi constitué des points de discussion importants. Les discussions menées dans le cadre du nouveau projet du CD-P-TO Impact of Oocyte Banking on Donor Situation ont été particulièrement intéressantes pour la Suisse. Un groupe d'experts du CD-P-TO 59 60 61 62

RS 0.311.43 RS 311.0 RS 351.1 RS 810.21

1353

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a travaillé sur la brochure destinée aux femmes Women's Guide to Informed Choices on Medically Assisted Reproductive Options. L'objectif de la brochure est de renforcer les compétences des femmes en matière de santé s'agissant des questions de fécondité ainsi que des possibilités et des limites de la procréation médicalement assistée.

3.2.4

Prévention et lutte contre la violence domestique

La Convention du CdE du 11 mai 2011 sur la prévention et la lutte contre la violence à l'égard des femmes et la violence domestique (convention d'Istanbul) est entrée en vigueur le 1er août 2014. Il s'agit du premier instrument contraignant à l'échelle de l'Europe qui protège les femmes et les filles de toutes les formes de violence, y compris la violence domestique. La convention a pour objectif de prévenir, poursuivre et éliminer toutes les formes de violence à l'égard des femmes. Elle vise également à éliminer la discrimination des femmes et à promouvoir l'égalité entre les femmes et les hommes. Ce faisant, elle est centrée sur les droits, la protection et le soutien des victimes. La Suisse a signé la convention le 11 septembre 2013.

Le Conseil fédéral a adopté le message le 2 décembre 2016.

3.2.5

Transfèrement des personnes condamnées

La Convention du du 21 mars 1983 sur le transfèrement des personnes condamnées63 permet aux détenus étrangers de purger leur peine dans leurs pays d'origine.

Le transfert est soumis au consentement de la personne détenue et des États concernés. Le protocole additionnel du 18 décembre 199764 à la convention prévoit un transfèrement sans consentement de la personne condamnée lorsque cette personne s'est évadée de l'État de condamnation pendant l'exécution de la peine et qu'elle est frappée d'une mesure d'expulsion ou de reconduite à la frontière. La mise en oeuvre de ces dispositions posait problème et nécessitait un amendement du protocole.

En 2016, le Comité d'experts sur le fonctionnement des Conventions européennes sur la coopération dans le domaine pénal (PC-OC), présidé par la Suisse, a adopté un projet de protocole portant modification du protocole de 1997 que le Comité européen pour les problèmes criminels (CDPC) a approuvé et soumis au Comité des Ministres. Les modifications ont pour objet d'élargir le champ d'application du protocole de 1997. Elles définissent les règles applicables au transfert de l'exécution des peines dans les cas suivants: a) la personne condamnée a quitté l'État de condamnation pour regagner l'État dont elle est ressortissante, ce qui, dans la plupart des cas, rend impossible au premier l'exécution de la peine, et b) la personne condamnée fait l'objet d'une mesure d'expulsion ou de reconduite à la frontière après avoir purgé sa peine. Les États ont la possibilité de déclarer qu'ils appliqueront ces nouvelles dispositions de façon provisoire.

63 64

RS 0.343 RS 0.343.1

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3.3

Drogues

Le Groupe Pompidou a été fondé en 1971 à l'initiative du président français du même nom. Intégré en 1980 dans l'organisation du CdE, il compte aujourd'hui 38 États membres, auxquels s'ajoute le Mexique en qualité de pays observateur. Le Groupe Pompidou coordonne les questions politiques d'intérêt commun en matière de drogues et veille à créer un lien entre politique, science et travail sur le terrain dans le domaine des stupéfiants. Les plateformes de discussion ouvertes, qui ne sont contraignantes ni sur le plan juridique, ni sur le plan politique, revêtent une importance déterminante puisqu'elles sont indispensables à la conception d'une politique innovante. Le Groupe Pompidou reste la seule entité dans le cadre de laquelle la Suisse peut procéder à des échanges de vues avec d'autres pays européens sur les questions de politique en matière de drogue. La plupart des autres États membres du groupe ­ y compris la Norvège et la Turquie, qui ne sont pas membres de l'UE ­ ont en revanche l'occasion de se rencontrer également dans le cadre des forums de l'UE pour discuter des choix politiques dans ce domaine.

Au cours du premier semestre de l'année sous revue, les travaux du groupe se sont concentrés sur la préparation et le suivi de la session extraordinaire de l'Assemblée générale des Nations Unies sur le problème mondial de la drogue (SEAGNU), à laquelle le Groupe Pompidou était très bien représenté, à commencer par son président, le ministre norvégien de la santé, qui a lu une déclaration sur les aspects sanitaires et les droits de l'homme dans les politiques en matière de drogue. De plus, le groupe a organisé deux événements en marge de l'UNGASS, l'un consacré aux «droits de l'homme dans le domaine de la drogue», l'autre au «traitement de l'abus de substances chez les jeunes». Pendant la seconde partie de l'année ont eu lieu les réunions techniques organisées par le groupe sur les thèmes «nouvelles substances psychotropes», «les questions de genre dans les politiques en matière de drogue» et «les réponses apportées par le système judiciaire aux détenus toxicomanes». De plus, MedNet, le réseau méditerranéen du groupe, a fêté ses dix ans d'existence.

Représentée par le Domaine de direction Police judiciaire fédérale de l'Office fédéral de la police (fedpol), la Suisse préside depuis le 1 er janvier
2011 le Groupe Aéroports, fonction qu'elle continuera d'assumer dans le cadre du programme de travail 2015­2018. Ce groupe, qui se compose de représentants des autorités policières et douanières et des corps de gardes-frontière, a pour mission l'harmonisation et l'amélioration des mesures de contrôle en matière de lutte contre le trafic de drogue dans les aéroports européens. En 2016 a été organisée la 31 e réunion annuelle du Groupe Aéroports, dans le cadre du programme d'exécution de la loi. Des représentants de différentes organisations internationales ainsi que des représentants d'anciens États membres du Groupe Pompidou y ont participé. En octobre a eu lieu la réunion annuelle du réseau international sur le contrôle des précurseurs chimiques et, en décembre, celle consacrée à la cybercriminalité liée à la drogue. Du fait de ses ressources et des priorités qu'elle a définies pour sa stratégie de lutte contre la criminalité, la police judiciaire fédérale s'est retirée en 2016 des réseaux dans les domaines des précurseurs chimiques et de la cybercriminalité.

1355

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3.4

Coopération transfrontalière

Le Conseil fédéral a adopté le 24 août de2016 le message concernant la ratification du protocole additionnel à la charte européenne de l'autonomie locale sur le droit de participer aux affaires des collectivités locales65. Le Comité européen sur la démocratie et la gouvernance (CDDG) s'est réuni les 19 et 20 mai 2016. Il a procédé à l'examen du cadre de référence de ses activités prioritaires et procédé à un échange de vues sur la démocratie et la gouvernance électronique. Il s'est également penché sur les lignes directrices relatives à la participation de la société civile aux décisions politiques.

3.5

Commission de Venise, Conseil consultatif des juges européens, Commission européenne pour l'efficacité de la justice

La Commission européenne pour la démocratie par le droit (Commission de Venise) est un organe du CdE qui conseille les États membres sur les questions constitutionnelles. En 2016, elle n'a établi aucune expertise ni aucun rapport relatifs à la Suisse.

Les lignes directrices, études et compilations suivantes présentent cependant un intérêt pour la Suisse: ­

Lignes directrices conjointes visant à prévenir et à répondre à l'utilisation abusive de ressources administratives pendant les processus électoraux (en collaboration avec l'OSCE/BIDDH), publiées sous CDL-AD(2016)004

­

Liste des critères de l'État de droit, publiée sous CDL-AD(2016)007

­

Compilation d'avis et de rapports de la Commission de Venise concernant les partis politiques, publiée sous CDL-PI(2016)003 (en anglais)

­

Compilation d'avis de la Commission de Venise concernant les normes légales relatives à la protection de l'administration locale, publiée sous CDL-PI(2016)002 (en anglais)

­

Compilation des avis et des rapports de la Commission de Venise concernant la liberté d'opinion, publiée sous CDL-PI(2016)011 (en anglais)

Le Conseil mixte de justice constitutionnelle, un organe de coopération entre les cours constitutionnelles et la Commission de Venise, a poursuivi ses travaux de diffusion de la jurisprudence constitutionnelle en alimentant le Bulletin de jurisprudence constitutionnelle et la base de données CODICES. Le Conseil consultatif de juges européens (CCJE) a adopté lors de sa réunion plénière de novembre son avis n°19 sur «le rôle des Présidents de tribunaux». La Commission européenne pour l'efficacité de la justice (CEPEJ) a publié le 6 octobre son rapport biennal sur les systèmes judiciaires européens fondé sur les données 2014 récoltées auprès des États membres. Elle a poursuivi ses activités de coopération afin d'optimiser le fonctionnement des tribunaux au sein des États membres du CdE et dans les pays limitrophes. Des experts suisses président les groupes de travail «délais judiciaires» et 65

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1356

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«qualité» de la CEPEJ et ont participé aux activités de coopération, notamment en Albanie, en Grèce, au Maroc et en Tunisie.

4 4.1

Démocratie Vote électronique

En novembre 2016, le Comité ad hoc d'experts sur les normes juridiques, opérationnelles et techniques relatives au vote électronique (CAHVE) a adopté le projet d'une recommandation remaniée relative à la norme pour le vote électronique 2016 ainsi que des lignes directrices à l'intention du CM. En amont de la rencontre, un groupe d'experts indépendant des autorités a élaboré, en se fondant sur les décisions prises jusque-là par le comité, des ébauches de projet qui ont été soumises entre juin et août aux membres du CAHVE pour consultation et portent sur une plate-forme électronique interactive. Après s'être exprimée sur l'ébauche de projet dans le cadre de la consultation, la Chancellerie fédérale a envoyé deux représentants à la réunion du CAHVE.

4.2 4.2.1

Santé Produits pharmaceutiques et soins

Au sein du Comité européen sur les produits et les soins pharmaceutiques (CD-PPH) de la Direction européenne de la qualité du médicament et soins de santé (EDQM), la Suisse a participé, durant la période sous revue, à l'élaboration de deux résolutions: 1) la résolution CM/Res(2016)2 sur les bonnes pratiques en matière de reconstitution dans les établissements de santé des médicaments destinés à un usage parentéral et 2) la résolution CM/Res(2016)1 sur les exigences relatives à l'assurance de qualité et d'innocuité des médicaments préparés en pharmacie pour les besoins particuliers du patient. Les deux résolutions ont été adoptées par le Comité des ministres le 1er juin 2016.

Dans le cadre du Comité d'experts sur les normes de qualité et de sécurité relatives à la pratique et au suivi pharmaceutiques (CD-P-PH/PC), la Suisse a en particulier participé aux travaux en matière de développement et d'implémentation d'indicateurs pour l'évaluation de la qualité des soins pharmaceutiques en Europe, de dispensation individualisée automatisée de médicaments, de reconstitution de produits pharmaceutiques en établissement de soins, de prévention des inégalités d'accessibilité aux médicaments, de risques pour la santé publique en situation de crise en Europe et de bonnes pratiques de distribution à distance des médicaments. Par ailleurs, en tant que responsable du projet, la Suisse a finalisé un concept de formation pour les thérapeutes en médecine traditionnelle, notamment chinoise. Ce document a été distribué aux États membres comme modèle permettant une meilleure coordination et une standardisation des formations et des reconnaissances professionnelles.

Le projet d'approbation et de mise en oeuvre de la Convention du CdE sur la contrefaçon des produits médicaux et les infractions similaires menaçant la santé publique 1357

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(convention Médicrime) est en cours d'élaboration. Cette convention, signée par la Suisse le 28 octobre 2011, constitue le premier instrument réglementant ce domaine au plan international et définit les infractions en lien avec la fabrication, l'offre et le commerce de produits thérapeutiques (médicaments et dispositifs médicaux) contrefaits ainsi que la protection des droits des victimes de tels actes. Elle règle également la collaboration nationale et internationale des autorités impliquées.

En avril, la Suisse a terminé la période de présidence de deux ans du Comité d'experts sur la réduction des risques de santé publique liés à la contrefaçon des médicaments et à la criminalité connexe (CD-P-PH/CMED). Durant ces deux ans, la Suisse a pu apporter une contribution importante à la conduite des activités du comité qui a un agenda chargé dans le domaine de la lutte contre les médicaments contrefaits. Durant la période sous revue, la Suisse a continué de s'engager dans les projets en cours, tels que la mise en place d'une banque de données européenne centralisée pour l'enregistrement des contrefaçons de médicaments (par ex., la Suisse a notamment animé une formation internationale en ligne) et la poursuite du développement d'un réseau d'autorités basé sur des points de contact uniques (PCU). Une déléguée suisse a également participé à titre d'intervenante à une formation de sensibilisation à la criminalité dans le domaine des médicaments à Oslo.

Enfin, la Suisse est également représentée dans le Comité européen sur la transfusion sanguine (CD-P-TS) et dans le Comité restreint d'experts sur l'assurance de qualité dans les services de transfusion sanguine (CD-P-TS/GTS). Le comité d'experts est chargé d'actualiser et de réviser le Guide to the preparation, use and quality assurance of blood components qui lie également la Suisse en ce qui concerne les critères d'aptitude pour les dons. Dans le cadre de ce comité d'experts, la Suisse a apporté une contribution importante, en tant que rapporteur, à l'élaboration des Good Practice Guidelines for Blood Establishments and hospital blood banks required to comply with EU Directive 2005/62/EC. Ce document a pour but de servir de lignes directrices pour l'application de la directive de l'UE et de combler ainsi les lacunes existantes au niveau de la mise en oeuvre.

4.2.2

Pharmacopée

La Pharmacopée européenne (Ph. Eur.), élaborée sous l'égide du Conseil de l'Europe, est un recueil de prescriptions relatives à la qualité des médicaments (y compris des principes actifs), des excipients pharmaceutiques et de certains dispositifs médicaux. Élaboré sur la base de la Convention du 22 juillet 1964 relative à l'élaboration d'une Pharmacopée Européenne66, l'ouvrage a force contraignante dans les 37 États parties de ladite convention et dans l'UE. La Ph. Eur. comprend plus de 2600 monographies et textes généraux. À l'élaboration de nouvelles prescriptions s'ajoute la révision permanente de prescriptions existantes de la Ph. Eur.

L'adaptation continuelle de la pharmacopée aux dernières avancées technologiques et scientifiques garantit un contrôle approprié des matières premières et des préparations dans un marché mondialisé et participe à la lutte contre les falsifications de médicaments.

66

RS 0.812.21

1358

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L'ouvrage est élaboré sous la responsabilité de l'EDQM, sise à Strasbourg. Chaque État partie est tenu de participer à ces travaux et de transposer dans son droit national les prescriptions de qualité adoptées. La période sous revue a vu la réalisation des addenda 8.6, 8.7 et 8.8 de la huitième édition de la Ph. Eur. Par ailleurs, 8 États européens, 18 États non européens, la Taiwan Food and Drug Administration (TFDA) et l'Organisation mondiale de la santé (OMS) suivent de près les activités de la Ph. Eur., si bien que celle-ci exerce une influence déterminante, de portée mondiale, sur la qualité des médicaments et des substances médicamenteuses.

La division Pharmacopée de Swissmedic, l'Institut suisse des produits thérapeutiques, est l'autorité nationale de pharmacopée de la Suisse. À ce titre, elle coordonne la contribution suisse à la Ph. Eur. Cette contribution est fournie par des experts suisses issus de l'industrie, des hautes écoles, des pharmacies et des autorités. Ces experts siègent dans la majorité des comités spécialisés de la Ph. Eur. (plus de 70 entités au total), et réalisent chaque année l'équivalent de 9 années-personnes en termes de travail. Plus de la moitié de ces tâches sont effectuées par des collaborateurs de Swissmedic.

Les experts de la Ph. Eur. étant nommés pour une durée de trois ans, la Commission européenne de pharmacopée (COM), qui est l'organe décisionnel de la Ph. Eur., a renouvelé son présidium au cours de l'année sous revue. Pour la première fois dans l'existence plus que cinquantenaire de la Ph. Eur., un Suisse, responsable de la division Pharmacopée de Swissmedic, a été nommé président de la COM. Le nouveau président a débuté en juin son mandat de trois ans. La contribution fournie par la Suisse illustre d'une part l'importance de la pharmacopée et met en évidence d'autre part l'expertise de la Suisse, qui est l'un des principaux pays du monde dans le secteur pharmaceutique.

4.2.3

Protection sanitaire du consommateur

La délégation suisse a participé aux deux réunions du Comité d'experts sur les matériaux pour contact alimentaire (P-SC-EMB) qui ont eu lieu en 2016. La dernière résolution qui a été adoptée est la résolution (2013)9 relative aux métaux et alliages constitutifs des matériaux ou objets destinés à entrer en contact avec des denrées alimentaires. Pour certains types d'utilisation, comme par exemple la coutellerie en argent, les conditions des tests indiquées dans la résolution doivent encore être revues car beaucoup d'articles en argent ne sont plus conformes s'ils sont testés selon les conditions indiquées dans la résolution. Un groupe de travail ad hoc comprenant des représentants de laboratoires nationaux de référence et de représentants de l'industrie des métaux et alliages a été formé pour discuter des conditions de tests. Les résultats de tests sont présentés et discutés pendant les séances du groupe ad hoc mais aussi en séance plénière du groupe d'experts. En fonction des résultats des discussions, des modifications ou des précisions devront être apportées à la résolution sur les métaux et alliages destinés à entrer en contact avec des denrées alimentaires.

Au sein du groupe P-SC-EMB, le travail se concentre également sur la révision des anciennes résolutions de sorte que celles-ci tiennent compte des connaissances 1359

FF 2017

scientifiques, toxicologiques et techniques actuelles. Pour de nombreux types de matériaux, ces résolutions du CdE sont les seules recommandations existantes (droit mou) et elles revêtent une grande importance pour les diverses associations actives dans les domaines concernés. Un groupe de travail ad hoc s'occupe de la révision de la résolution sur les matières et articles en papier et carton car il n'existe pas de législation harmonisée au niveau européen. Il réunit des représentants des laboratoires nationaux (pour la Suisse: deux représentants de laboratoires cantonaux) et des représentants de l'industrie du papier et du carton. Le principal point de discussion de ce groupe de travail est l'élaboration d'une liste positive de substances autorisées dans la fabrication des emballages en papier ou en carton destinés à entrer en contact avec des denrées alimentaires.

Le travail dans le domaine des encres d'emballage continue principalement grâce à l'Allemagne et à la Suisse qui collaborent pour établir une liste identique des substances évaluées. Cette liste de substances servira de base pour celle du CdE. La délégation suisse a poursuivi sa participation au Comité d'experts sur les produits cosmétiques (P-SC-COS) par la finalisation de recommandations relatives à l'utilisation des huiles essentielles spécifiquement dans les cosmétiques, se basant sur deux publications nationales françaises. Ce document sera publié prochainement.

Un document concernant les exigences minimales pour une évaluation toxicologique des encres de tatouage et de maquillage permanent est en cours de finalisation. Ce document, une fois publié, va apporter des connaissances nouvelles dans ce domaine très en vogue dans la population. Le groupe ad hoc des laboratoires officiels de contrôle des cosmétiques (OCCL) a organisé pour la première fois un colloque sur la qualité des cosmétiques en juin. Il s'est réuni en juin et en décembre pour discuter de l'avancement des systèmes d'essai d'aptitude (PTS) en cours portant notamment sur les parabènes dans les baumes à lèvres et sur une étude de surveillance du marché (MSS) relative aux produits de blanchiment des dents.

4.3

Culture, éducation, jeunesse et sport

Le Comité directeur de la culture, du patrimoine et du paysage (CDCPP) s'est réuni au mois de juin. La délégation suisse se composait d'une représentante du Service international de l'Office fédéral de la culture (OFC), qui a été élue à la viceprésidence du CDCPP pour une année. Aux côtés de la Finlande (présidence), de la Moldova, de l'Italie, de la Pologne, de la Croatie, de l'Islande, du Monténégro et de la Norvège, la Suisse a été, au sein du comité, le seul membre francophone du bureau pour cette période. Elle est ainsi étroitement associée aux travaux en cours, ce qui revêt une importance particulière dans le contexte de l'actuelle non-participation de la Suisse aux programmes de promotion culturelle de l'UE (Europe créative).

4.3.1

Culture

En 2016, l'action du Comité directeur de la culture, du patrimoine et du paysage (CDCPP) en matière culturelle a notamment été marquée par le développement du Cadre d'indicateurs sur la culture et la démocratie (IFCD), développé en collabora1360

FF 2017

tion avec la Hertie School of Governance de Berlin, qui vise à documenter les relations entre les investissements réalisés dans la culture et la situation démocratique des États membres. L'IFCD a fait l'objet d'un lancement public, organisé en collaboration avec la Commission européenne, le 14 octobre à Bruxelles. La réforme du système d'information qu'est le Compendium des politiques et tendances culturelles en Europe et la révision du concept d'expositions d'art du CdE ont constitué d'autres thématiques prioritaires.

La Suisse participe en outre à l'accord partiel élargi du CdE sur les itinéraires culturels (APE) depuis 2013. À l'occasion de la réunion annuelle du Conseil de direction de l'APE des 14 et 15 avril, un nouvel itinéraire a été certifié et deux anciens itinéraires se sont vu retirer leur certification, portant à 32 le nombre total d'itinéraires culturels certifiés par le CdE. La Suisse n'est pas directement associée à ce nouvel itinéraire. La contribution de la Confédération à l'APE sur les itinéraires culturels du CdE s'est établie à 11 900 euros en 2016.

4.3.2

Patrimoine

Dans le domaine du patrimoine, l'action du Comité directeur de la culture, du patrimoine et du paysage (CDCPP) s'est focalisée en 2016 sur la définition et l'adoption de la «Stratégie pour le patrimoine culturel européen au XXIe siècle», conformément aux conclusions de la 6e Conférence des Ministres du patrimoine culturel, organisée par la présidence belge du Comité des Ministres les 23 et 24 avril 2015 à Namur.

Privilégiant une gestion participative et démocratique du patrimoine culturel européen, cette nouvelle stratégie est articulée autour de trois composantes: les composantes sociales, le développement territorial et économique et la connaissance et l'éducation. Elle doit servir de boîte à outils pour les États souhaitant moderniser leurs politiques patrimoniales, ceux-ci étant invités à y recourir librement en fonction de leurs priorités propres. Les Journées européennes du patrimoine et le système HEREIN (observatoire des politiques et des valeurs européennes du patrimoine), que la Suisse soutient et défend de longue date, ont constitué d'autres thématiques prioritaires. Conçu pour servir de plateforme d'information et d'outil de dialogue et de mise en réseau aux professionnels et autorités chargés du patrimoine en Europe, le système HEREIN permet d'assurer le suivi de la mise en oeuvre des conventions patrimoniales du CdE. La Suisse est aussi membre de l'Association Internationale sans but lucratif AISBL HEREIN, qui vise à encourager l'échange d'expériences et d'informations sur les politiques patrimoniales.

Par l'adoption de «l'Appel de Namur», les ministres du patrimoine culturel et leurs représentants réunis à Namur en avril 2015 avaient en outre condamné les destructions délibérées du patrimoine culturel dans les situations de conflit et le trafic illicite des biens culturels, décidant ainsi d'engager des discussions au sein du CdE en vue de renforcer la coopération européenne dans ce domaine. La Suisse a de ce fait été directement associée aux travaux de révision totale de la convention européenne sur les infractions visant des biens culturels (convention de Delphes). Les négociations menées dans le cadre de deux rencontres d'experts, les 31 mai et 1er juin, puis du 7 au 10 novembre, ont conduit à l'élaboration d'un projet préliminaire pour le nouveau texte de la convention. Les négociations se poursuivront lors 1361

FF 2017

de deux rencontres courant 2017. Il est prévu que le texte définitif de la convention révisée soit prêt fin 2017 et puisse être présenté au Comité européen pour les problèmes criminels (CDPC) lors de sa réunion de décembre 2017.

4.3.3

Paysage

L'Office fédéral de l'environnement (OFEV) a continué à soutenir les actions menées dans le cadre de la Convention européenne du paysage du 20 octobre 2000 67, par le versement d'une contribution de 40 000 francs suisses en 2016. Les actions soutenues sont liées au développement du système d'information du CdE pour la mise en oeuvre de la convention et à la préparation des réunions des ateliers de la convention sur les politiques nationales du paysage.

4.3.4

Médias (Eurimages)

La révision de la Convention européenne du 2 octobre 1992 sur la coproduction cinématographique68 a été adoptée le 29 juin par les délégués des ministres du CdE, lors de leur 1261e réunion. Elle vise à mieux refléter les pratiques actuelles de l'industrie, en relation notamment avec l'émergence des nouvelles technologies et la diversification des modèles de coproduction. Elle permet ainsi une reconnaissance des coproductions à partir d'une participation minoritaire de 10 % (contre 20 % auparavant). La Suisse a initié les démarches relatives à la signature de la convention révisée au deuxième semestre 2016. Le Comité de direction du Fonds européen de soutien à la coproduction et à la diffusion d'oeuvres de création cinématographique et audiovisuelles (Eurimages) soutient les coproductions, les distributeurs de films et les salles de cinéma européens. En 2016, 16 projets de coproduction auxquels des partenaires suisses sont associés ont été jugés éligibles et lui ont été soumis pour approbation. Au total, 8 des 16 projets proposés ont été soutenus, dont 2 impliquant une participation majoritaire suisse. Le montant total des soutiens alloués par Eurimages à des projets de films s'élève cette année à 2 336 000 euros, dont environ 504 000 euros ont bénéficié à des productions suisses.

Par suite de l'exclusion de la Suisse du programme MEDIA de l'Union européenne, des demandes de soutien relatives à la distribution de films et aux salles de cinéma ont également été déposées. Les premières concernent principalement la promotion de films européens en Suisse. En 2016, 7 distributeurs ont été soutenus quant au lancement de 33 films au total, pour un montant de 332 000 euros. Concernant le soutien aux salles de cinéma, la Suisse a reçu en 2016 un soutien de 380 000 euros, à répartir sur un total de 69 salles. La contribution de la Confédération à Eurimages s'est établie à 648 000 euros en 2016, année pendant laquelle la Suisse a en retour été soutenue à hauteur de 1 216 000 euros par ce programme.

67 68

RS 0.451.3 RS 0.443.2

1362

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4.3.5

Éducation et enseignement supérieur

Dans le domaine de l'enseignement supérieur, les activités se sont focalisées en particulier sur le domaine de la Convention du 11 avril 1997 sur la reconnaissance des qualifications relatives à l'enseignement supérieur dans la région européenne 69 (convention de Lisbonne). Le comité de la convention a adopté une déclaration concernant la reconnaissance des qualifications des réfugiés, des personnes déplacées et des personnes assimilées aux réfugiés et ayant comme objectif l'élaboration d'une recommandation sur la reconnaissance des qualifications dont sont titulaires ces personnes.

En matière d'éducation, les travaux se sont concentrés sur les mesures éducatives aptes à lutter contre le phénomène de radicalisation. Ce thème a été le sujet principal de la Conférence des ministres de l'éducation qui s'est tenue à Bruxelles du 11 au 12 avril. La conférence a ainsi approuvé un projet sur l'éducation aux valeurs démocratiques destiné précisément à répondre à ce phénomène touchant une frange de la jeunesse dans les pays européens. Dans le domaine de l'enseignement des langues, la Suisse participe et collabore aux différentes activités du Centre européen des langues vivantes (CELV), notamment à la médiation du projet Plurimobil (mobilité pour des apprentissages plurilingues et interculturels). Dans le cadre du programme 2016­2019 du CELV, la Suisse coordonne un projet de développement intitulé «Vers un cadre commun de référence pour les enseignants de langue».

4.3.6

Jeunesse

Le Comité directeur européen pour la jeunesse (CDEJ) a poursuivi ses activités dans le cadre de ses trois priorités stratégiques pour les années 2016/2017, à savoir: la participation des jeunes au processus démocratique; la mise en oeuvre de la recommandation (2015) 3 sur l'accès des jeunes des quartiers défavorisés aux droits sociaux et la promotion de sociétés inclusives et pacifiques, notamment grâce à la prolongation de la campagne de lutte contre le discours de haine jusqu'en 2017. Les résultats attendus et les orientations du programme d'activités 2016­2017 ont été définis pour chaque priorité.

Le comité a également entrepris des travaux pour améliorer la cogestion avec les représentants non gouvernementaux de la jeunesse et le fonctionnement du Comité mixte pour la jeunesse (CMJ) et a mis en place des groupes de travail sur les priorités pour plus d'efficacité. Durant l'année sous revue, la rédaction du projet de recommandation sur l'accès des jeunes aux droits s'est poursuivie, une entreprise délicate en raison notamment de thèmes liés à l'orientation sexuelle ou à l'identité de genre. La recommandation CM/Rec(2016)7 a finalement été adoptée par le Comité des Ministres le 28 septembre 2016.

69

RS 0.414.8

1363

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4.3.7

Sport

À la fin 2016, 37 Etats avaient rejoint l'accord partiel élargi sur le sport (APES), auquel la Suisse a adhéré le 1er janvier 2008; la Belgique, dernière venue, y a adhéré le 16 mai 2016. Par ailleurs, 27 organisations sportives font partie du Comité consultatif de l'APES. Au mois de juin, la Conférence annuelle de l'APES a eu lieu à Vienne, sur le thème «l'insertion par le sport des migrants nouvellement arrivés». La Conférence des Ministres du sport s'est déroulée à Budapest au mois de novembre.

Le thème principal en a été «la bonne gouvernance au niveau régional». La lutte contre le dopage, le sport et les migrants et la collaboration de l'APES avec l'Union européenne ont également été abordés.

Les priorités 2017 de l'APES ont été approuvées par les ministres. L'APES fêtant ses dix ans d'existence, une rétrospective de ses activité durant ces années, notamment dans le domaine de la bonne gouvernance, sera présentée. La Suisse collabore au sein de divers groupes de travail qui ont été mis sur pied dans le cadre de la Convention du 16 novembre 1989 contre le dopage70. Elle peut ainsi apporter sa contribution à la poursuite du développement du programme mondial de lutte contre le dopage. En 2016 aussi, des accusations de dopage dans les disciplines sportives les plus diverses ont fait les gros titres, en particulier avant les Jeux olympiques de Rio, renforçant les membres des groupes de travail dans leur conviction qu'il était indispensable de créer des agences nationales de lutte contre le dopage indépendant.

Dans le cadre du Comité ad hoc européen pour l'Agence mondiale anti-dopage (CAHAMA), les États membres du CdE adoptent des positions communes vis-à-vis de l'Agence mondiale anti-dopage (AMA). Le CAHAMA s'est réuni à trois reprises en 2016 pour préparer les réunions des comités compétents de l'AMA. Les travaux au cours de l'année sous revue se sont focalisés sur le renforcement de la lutte mondiale contre le dopage. La création d'une instance de contrôle indépendante des fédérations sportives internationales est à l'étude. En 1990, la Suisse a adhéré à la Convention européenne du 19 août 1985 sur la violence et les débordements de spectateurs lors de manifestations sportives et notamment de matches de football71.

Un comité permanent a été créé pour surveiller la mise en oeuvre de cette
dernière.

La Suisse, qui y est représentée par fedpol, a assuré sa vice-présidence jusqu'en juin.

En 2016, le comité permanent a tenu deux séances ordinaires, auxquelles fedpol a participé.

Après près de 30 ans d'existence, la convention citée plus haut a été entièrement révisée et rebaptisée Convention du CdE sur une approche intégrée de la sécurité, de la sûreté et des services lors des matches de football et autres manifestations sportives. Le Comité des Ministres a adopté le texte révisé le 4 mai. Le 10 juin, le Conseil fédéral a décidé de signer la convention révisée et de la soumettre au Parlement pour ratification, après consultation. La convention a été ouverte à la signature le 3 juillet, lors d'une cérémonie organisée près de Paris en marge du quart de finale de l'EURO2016 entre la France et l'Islande. Le Conseil fédéral avait donné délégation à la directrice adjointe de fedpol pour qu'elle signe au nom de la Suisse la convention révisée, sous réserve de ratification. La consultation sera ouverte en 2017. La 70 71

RS 0.812.122.1 RS 0.415.3

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convention entièrement révisée ne comporte pas qu'un volet répressif, elle propose également des solutions de bon accueil, l'accent étant mis sur une approche commune intégrée, qui repose sur des pratiques qui ont fait leurs preuves au plan international. Elle régit par ailleurs les tâches du Point national d'information «football» (PNIF). Fedpol assume d'ores et déjà le rôle du PNIF en Suisse, sur la base de l'ancienne convention.

4.4

Cohésion sociale

La Plateforme européenne de cohésion sociale a tenu sa première réunion les 27 et 28 juin. Son mandat consiste à assurer l'intégration de la question de la cohésion sociale dans toutes les activités du CdE en identifiant les principaux obstacles à l'accès aux droits sociaux ainsi qu'à encourager l'échange de bonnes pratiques et les approches innovantes en matière de cohésion sociale et à examiner les nouvelles tendances et les nouveaux défis liés à la cohésion sociale. Lors de la première réunion, trois groupes de travail ont été mis sur pied; chacun d'entre eux traitera un volet du mandat.

4.5

Protection des données

La Suisse a participé aux travaux du Comité ad hoc sur la protection des données (CAHDATA) institué par le Comité des Ministres du CdE afin d'examiner le projet de modernisation de la Convention du 28 janvier 1981 pour la protection des personnes à l'égard du traitement automatisé des données à caractère personnel 72. Le CAHDATA a tenu une seule réunion en 2016, les 15 et 16 juin. L'Irlandais Seamus Carroll a été élu à la présidence. Le CAHDATA a terminé son examen du projet d'amendement de la convention et chargé le secrétariat de transmettre le projet de protocole d'amendement au Comité des Ministres pour examen. Les réserves posées par l'UE afin d'assurer la cohérence entre le projet de modernisation de la convention et la réforme de la législation européenne ont pu être levées. Il subsiste en revanche des réserves de la Fédération de Russie, qui souhaite introduire des exceptions en faveur du secret d'État. Le CAHDATA a également pris note de la déclaration de la Fédération de Russie qui s'oppose au mécanisme de vote permettant à l'UE de voter pour les États membres.

4.6

Environnement

La Convention du 19 septembre 1979 relative à la conservation de la vie sauvage et du milieu naturel de l'Europe73 (convention de Berne) laisse une marge de manoeuvre suffisante pour éviter que des dégâts trop importants ne soient causés sur le bétail. C'est la raison pour laquelle le Conseil des États a rejeté l'initiative déposée 72 73

RS 0.235.1 RS 0.455

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par le canton du Valais74, laquelle demande la dénonciation de la convention de Berne et la négociation d'une nouvelle adhésion. L'initiative a été adoptée par le Conseil national à la session d'automne. Le Conseil des Etats traitera à nouveau cette initiative en 2017. Au cours de l'année sous revue, le Conseil fédéral a organisé la consultation relative à la motion Engler75 qui demande une révision de la loi du 20 juin 1986 sur la chasse76 en vue d'autoriser les interventions visant à réguler les populations d'espèces protégées sources de conflits, sans dénoncer la convention de Berne. Ce projet devrait être soumis au Parlement en 2017.

4.7

Banque de développement du Conseil de l'Europe

Au cours de la période sous revue, la Banque de développement du Conseil de l'Europe (CEB) a fêté ses 60 années d'existence. Elle s'est concentrée en 2016 notamment sur la mise en oeuvre opérationnelle du Fonds pour les migrants et les réfugiés, créé à la fin 2015. Près d'une vingtaine de donateurs ont promis d'y contribuer à hauteur de quelque vingt millions d'euros, qui ont pu rapidement être mobilisés. La Croatie, la Grèce, la Macédoine, le Portugal, la Serbie et la Slovénie en sont les bénéficiaires. La Suisse n'a pas participé à ce fonds en raison des priorités claires qu'elle a définies dans le domaine multilatéral concernant ses organisations partenaires. Par ailleurs, la CEB a défini sa stratégie pour les années 2017 à 2019, qui s'articule autour de trois axes: 1) croissance durable et inclusive; 2) intégration des réfugiés et des migrants 3) mesures de protection du climat.

74 75 76

Initiative 14.230, déposée par un canton: Loup. La récréation est terminée!

Motion 14.3151: Coexistence du loup et de la population de montagne.

RS 922.0

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