Suspension du projet de défense sol-air 2020 (DSA) Rapport des Commissions de gestion des Chambres fédérales du 26 janvier 2017

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L'essentiel en bref Dans le cadre de leur inspection sur la suspension du projet DSA par le chef du DDPS, les Commissions de gestion (CdG) ont examiné les bases sur lesquelles s'était fondée la décision en question et le bien-fondé de cette dernière. A la lumière des faits, elles ont conclu que la décision n'avait pas été adéquate: au moment où celle-ci a été prise, le projet était sur la bonne voie et l'évaluation des systèmes de défense sol-air envisageables arrivait à son terme. Depuis le début, il avait été prévu que le chef du DDPS se fonderait ensuite sur les résultats de l'évaluation pour décider de poursuivre ou non le projet. Face aux CdG, celui-ci a justifié sa décision par le fait qu'il avait l'impression de ne pas avoir été informé du projet de manière appropriée. Les CdG sont cependant d'avis que cet argument ne saurait justifier sa décision, car le chef du DDPS aurait pu prendre d'autres mesures pour répondre à son besoin d'être informé. Par conséquent, les CdG considèrent que la décision de suspension n'était pertinente ni d'un point de vue factuel, ni d'un point de vue politique.

Le 22 mars 2016, le chef du DDPS a décidé de suspendre le projet de défense sol-air 2020 de moyenne portée (ci-après projet DSA). Cette décision a soulevé des questions au sein de l'opinion publique, dans les milieux spécialisés et au sein des Commissions de gestion (CdG). Ces dernières ont donc chargé un groupe de travail émanant de leurs rangs d'examiner les bases de la décision, les processus décisionnels qui les ont sous-tendues au niveau du département ainsi que l'adéquation de la décision. L'inspection des CdG se distingue clairement de l'enquête administrative ordonnée par le chef du DDPS, laquelle avait pour but de vérifier si le projet présentait des lacunes au niveau des structures, du déroulement et des contrôles, mais pas de vérifier si la décision de suspension était opportune.

Le groupe de travail a entendu les personnes responsables, en particulier le chef du DDPS, ses collaborateurs chargés du projet au sein du Secrétariat général du DDPS, le chef de l'armée, le chef de l'armement, les personnes responsables du projet au sein de l'armée et d'armasuisse ainsi qu'un consultant externe du DDPS.

En outre, il a analysé les documents relatifs au projet et plus globalement, dès lors que cela
s'est révélé nécessaire, les documents concernant le déroulement des acquisitions d'armement.

Exposé des faits Le projet DSA a pour but le renouvellement des systèmes centraux de défense antiaérienne de l'armée suisse, par le biais d'une procédure d'acquisition. Lorsque la décision de suspendre le projet a été prise, ce dernier se trouvait dans sa phase d'évaluation: différentes parties des systèmes étaient alors testées et analysées. Le chef du DDPS aurait dû prendre une décision quant à la poursuite ou à l'interruption du projet au plus tard en septembre 2016, sur la base des résultats de l'évaluation. Les clarifications menées par le groupe de travail ont montré que le chef du DDPS avait déjà le projet DSA dans sa ligne de mire peu de temps après son entrée en fonction. Les questions ouvertes et les doutes du chef du DDPS par rapport au

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projet ont encore été renforcés par des articles critiques parus dans les médias, à la suite desquels il a décidé de suspendre le projet, sans consulter au préalable les collaborateurs responsables du projet au sein du Secrétariat général du DDPS, la secrétaire générale ou les personnes responsables du projet au sein de l'armée et d'armasuisse. Les clarifications menées par le groupe de travail ont également révélé que le projet avait été mené dans les règles et que les collaborateurs responsables au sein du Secrétariat général du DDPS étaient informés en permanence de l'avancement de celui-ci.

Décision pas compréhensible Face aux CdG, le chef du DDPS a justifié sa décision de suspension, pour l'essentiel, par le fait qu'il avait l'impression de ne pas avoir été informé de manière appropriée par les responsables du projet et par les réserves qu'il avait à l'égard du projet. Les CdG considèrent que le chef du DDPS et ses collaborateurs chargés du projet au sein du Secrétariat général étaient informés de manière appropriée. Elles ont néanmoins constaté que le chef du département ne se fiait pas entièrement aux informations reçues et estimait qu'elles étaient insuffisantes. Cette perception s'explique en partie par la situation concrète, notamment par les indiscrétions et par le fait que le chef du département et des collaborateurs importants venaient tout juste de prendre leurs fonctions. Avec du recul, les CdG constatent aussi que les responsables du projet ont attiré l'attention du chef du DDPS sur des problèmes et des risques (potentiels) de manière trop peu active.

Malgré tout, les CdG considèrent qu'il n'est pas compréhensible, tant d'un point de vue factuel que politique, que le chef du DDPS décide de suspendre le projet durant sa phase d'évaluation en se fondant sur ses doutes, au lieu de chercher à éclaircir les points en suspens ou de consulter les responsables du projet.

Moment où la suspension a été prise et conséquences Les CdG considèrent également comme problématique le moment où la décision a été prise. Aucun fait, aucun problème majeur et, surtout, aucun dérapage des coûts qui auraient nécessité une décision immédiate ne s'étaient produits. En effet, le projet, au moment où il a été suspendu, se trouvait en phase d'évaluation et non en phase d'acquisition. Par conséquent, aucun
coût d'acquisition n'avait encore été occasionné.

Des informations fiables sur les coûts des systèmes analysés et sur leurs capacités ou leurs limites n'auraient été disponibles qu'à la fin de l'évaluation. Le chef du DDPS aurait dû s'en servir pour, au plus tard en septembre 2016, décider de la poursuite ou non du projet voire d'une éventuelle acquisition ­ il en avait du reste conscience, comme il l'a lui-même indiqué.

Enfin, la suspension du projet durant la phase d'évaluation a eu pour conséquence que des dépenses de l'ordre de 20 millions de francs ont été occasionnées pour la préparation de l'acquisition alors qu'aucune information exhaustive et définitive n'est disponible à ce jour sur les systèmes testés et que les coûts de ces derniers ne sont toujours pas connus.

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Conclusions et recommandations Sur la base des constatations citées précédemment, les CdG invitent le Conseil fédéral à veiller à ce que l'évaluation interrompue soit reprise et achevée rapidement, de sorte que les dépenses engagées jusqu'à présent n'aient pas été vaines et que des informations fondées concernant les systèmes analysés et d'éventuels coûts d'acquisition soient disponibles le plus vite possible. Par ailleurs, le Conseil fédéral est invité à présenter dans un rapport la manière dont les cheffes et chefs de département doivent procéder dans le cadre de décisions en matière de procédure, afin d'éviter à l'avenir la prise de décisions hâtives et coûteuses.

Les CdG invitent le chef du DDPS à prendre dorénavant les décisions de conduite en y associant les personnes responsables qui lui sont subordonnées et à veiller à ce que les décisions s'appuient sur une base objective. Elles lui demandent dans le même temps de prendre les mesures appropriées pour instaurer une culture de la communication interne et externe ouverte et active.

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Table des matières L'essentiel en bref

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Introduction

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Les faits 2.1 Présentation du projet DSA et, plus globalement, des acquisitions d'armement 2.1.1 Le projet DSA 2.1.2 Collaboration entre armasuisse et Thales Suisse SA 2.1.3 L'acquisition d'armement et l'état d'avancement du projet DSA 2.2 Chronologie des faits, de janvier 2016 à la suspension du projet et à la résiliation du contrat 2.2.1 De l'entrée en fonction du nouveau chef du DDPS à sa décision de suspendre le projet 2.2.2 La décision de suspendre le projet 2.2.3 Après la décision de suspendre le projet

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3

Appréciation 3.1 Adéquation des bases et des flux d'information 3.1.1 Questions de l'enquête 3.1.2 Les faits pertinents 3.1.3 Appréciation 3.1.4 Conclusion intermédiaire 3.2 Bien-fondé de la décision 3.2.1 Questions de l'enquête 3.2.2 Les faits pertinents 3.2.3 Appréciation 3.2.4 Conclusion intermédiaire

3341 3341 3341 3342 3347 3350 3351 3351 3351 3353 3356

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Conclusions générales et recommandations 4.1 Reprise de l'évaluation dans le cadre du projet DSA 4.2 Association des personnes compétentes et instauration d'une culture de la communication interne ouverte

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Suite de la procédure

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Abréviations

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Index des personnes auditionnées

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Annexe: Chronologie

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Rapport 1

Introduction

Le 22 mars 2016, le DDPS annonçait dans un communiqué de presse qu'il suspendait le projet de défense sol-air 2020 de moyenne portée, appelé ci-après projet DSA. Celui-ci a pour but le renouvellement des systèmes centraux de défense antiaérienne de l'armée suisse dans le cadre d'une procédure d'acquisition. Il s'agit, selon un rapport du Conseil fédéral du 27 août 2014, de combler une lacune déjà existante en termes de sécurité et de capacité: comme les systèmes actuels, qui seront d'ailleurs bientôt obsolètes, sont de très courte portée, ils ne peuvent combattre des cibles que jusqu'à 3000 m au-dessus du sol, alors que les avions de combat modernes utilisent leurs armes depuis des altitudes et à des distances plus importantes1.

Lancée en 2013 dans le cadre du projet DSA, à l'issue de différents travaux préliminaires, la procédure d'acquisition visait à intégrer dans le programme d'armement 2020 les systèmes qui devaient être achetés (mandat de projet confié à armasuisse).

Après le rejet de l'acquisition d'un nouvel avion de combat lors de la votation populaire du 18 mai 2014, le chef du DDPS de l'époque, le conseiller fédéral Ueli Maurer, avait décidé de faire passer le projet DSA à la vitesse supérieure en envisageant d'intégrer l'acquisition de ces systèmes dans le programme d'armement 2017.

Le projet DSA a été conduit dans le respect des spécifications de «TUNE14», une convention passée entre l'armée et armasuisse qui définit la procédure relative aux acquisitions d'armement. Lorsque la décision de suspendre le projet a été prise, ce dernier se trouvait dans sa phase d'évaluation: différentes parties des systèmes ­ missiles, radar et systèmes de commandement ­ étaient alors testées et analysées, et c'est sur la base de cette évaluation que, conformément à la planification du projet, un système aurait dû être retenu à l'automne 2016 (choix du type d'appareil et maturité d'acquisition) et proposé pour acquisition dans le cadre du programme d'armement 2017.

Le 22 mars 2016, le chef du DDPS a motivé vis-à-vis du Parlement et de l'opinion publique sa décision de suspendre le projet en arguant en particulier qu'il devait tout d'abord disposer d'une vue d'ensemble complète de la situation en matière de défense antiaérienne, laquelle devait notamment comprendre la question de l'évaluation et de
l'acquisition d'un nouvel avion de combat2. Peu de temps avant cette décision et encore au moment où elle a été prise, certains médias ont émis des critiques envers le projet en se fondant partiellement sur des informations pourtant confidentielles émanant du DDPS3.

1 2 3

Concept pour la sécurité à long terme de l'espace aérien, rapport du Conseil fédéral du 27.8.2014 (pp. 20 et 21).

Communiqué de presse du DDPS du 22.3.2016.

Voir en particulier le compte rendu fait dans l'émission Rundschau de la télévision suisse alémanique du 23.3.2016.

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La décision de suspendre le projet a fait l'objet de discussions controversées dans l'opinion publique et dans les milieux spécialisés, soulevant également des questions au sein des Commissions de gestion (CdG) des Chambres fédérales. C'est la raison pour laquelle ces dernières ont décidé, lors de leur séance commune du 9 mai 2016, de mener une inspection sur la suspension du projet DSA et de constituer à cet effet un groupe de travail4. Le 19 mai 2016, les CdG ont défini à l'unanimité le mandat du groupe de travail: celui-ci a été chargé d'analyser les raisons sur lesquelles repose la décision de suspension du projet ainsi que d'examiner l'opportunité de cette décision et du processus décisionnel en place au niveau du département. Le groupe de travail a étudié les questions portant sur le projet à proprement parler, plus précisément les questions techniques et celles relatives à l'historique du projet, dès lors que le chef du DDPS les avait évoquées devant lui pour justifier la suspension du projet. De même, la gestion du projet n'a été analysée plus en profondeur qu'au niveau des flux d'information en provenance et à destination du chef du DDPS. Par conséquent, l'inspection des CdG se restreint à la période allant de l'entrée en fonction du nouveau chef du département, Guy Parmelin, le 1er janvier 2016, à la décision de suspension du projet, le 22 mars 2016.

Du fait de la période définie et des questions auxquelles elle doit répondre, l'inspection des CdG se distingue clairement de l'enquête administrative ordonnée par le chef du DDPS après la décision de suspension du projet5. Chargé de cette enquête, l'ancien directeur du Contrôle fédéral des finances devait vérifier si le projet DSA présentait des lacunes au niveau des structures, du déroulement et des contrôles.

Pour cela, il a étudié l'historique du projet et évalué l'initialisation, l'organisation et le déroulement de celui-ci. En revanche, il ne s'est penché qu'accessoirement sur les processus décisionnels au niveau de la direction du département, puisqu'il n'avait pas pour mission d'examiner les bases et les motifs de la décision de suspension6.

Parallèlement à l'enquête des CdG et à l'enquête administrative, la justice militaire a ouvert au printemps 2016 une enquête sur les indiscrétions et la transmission aux médias d'informations
confidentielles relatives au projet DSA. Ses investigations n'ont cependant pas abouti et la procédure a été refermée en novembre 20167.

Lors des huit séances qu'il a tenues, le groupe de travail DSA des CdG a auditionné les personnes qui étaient susceptibles de le renseigner sur les bases et processus décisionnels en place au niveau du département 8, à savoir: le chef du DDPS, 4

5 6 7 8

Le groupe de travail est composé des conseillers aux Etats Claude Janiak (président), Alex Kuprecht et Damian Müller et des conseillers nationaux Ida Glanzmann, Doris Fiala et Thomas de Courten. Ceux-ci sont membres des deux sous-commissions DFAE/DDPS, chargées de la haute surveillance sur le DDPS. Selon les directives des CdG du 27.1.2012 relatives aux mesures visant à garantir le maintien du secret, les CdG peuvent, en cas d'inspections sensibles, mettre sur pied un petit groupe d'enquête (5 à 7 membres, avec représentation la plus appropriée possible des partis).

Communiqué de presse du DDPS du 18.4.2016.

Rapport du chargé d'enquête du 21.9.2016 à l'intention du chef du DDPS, pp. 5 et 9 (disponible uniquement en allemand).

Communiqué de presse du DDPS du 11.11.2016.

Etant donné le mandat qui lui était confié et la justification apportée devant lui par le chef du DDPS, le groupe de travail a renoncé sciemment à auditionner les personnes qui pouvaient l'informer dans les détails sur le projet à proprement parler, plus particulièrement sur les questions techniques (par ex. des représentants de l'entreprise générale).

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ses collaborateurs chargés du projet au sein du Secrétariat général du DDPS (SG DDPS)9, le chef de l'armée, le chef de l'armement, les personnes responsables du projet au sein de l'armée et d'armasuisse ainsi qu'un consultant externe du DDPS, qui avait accompagné le projet DSA pour le compte de l'ancien chef du DDPS et était encore au service du nouveau chef du département lorsque celui-ci a pris ses fonctions10. Le groupe de travail a par ailleurs demandé à l'ancien chef du DDPS des renseignements écrits sur la passation de pouvoir entre lui-même et l'actuel chef du DDPS et sur d'éventuels contacts que tous deux auraient eus depuis la passation. Enfin, il a également analysé les documents en lien avec le projet 11 et plus globalement, dès lors que cela s'avérait nécessaire, les documents concernant les acquisitions d'armement. S'appuyant sur ces informations, le groupe de travail a pu se faire une idée complète de la problématique. D'autres documents et auditions ne lui auraient pas permis d'obtenir des informations inédites et pertinentes.

Le groupe de travail a par ailleurs demandé à la personne chargée par le DDPS de mener l'enquête administrative sur le projet DSA de lui présenter ses conclusions et ses recommandations. Il s'est avéré que les faits tels qu'ils sont présentés dans le rapport du chargé d'enquête correspondent dans leurs grandes lignes à ceux qui sont exposés dans le présent rapport (voir ch. 2.2), ce qu'a notamment confirmé la réponse donnée par le chargé d'enquête lors de la consultation de l'administration. En résumé, le rapport de l'enquête administrative souligne que l'initialisation, l'organisation et le déroulement du projet ont suivi les directives et les règlements et que la gestion des risques était appropriée et efficace 12. Le chargé d'enquête partage en outre d'autres conclusions importantes du présent rapport, concernant en particulier les informations transmises par les responsables du projet au Secrétariat général du DDPS (voir ch. 3.1)13, l'importance de la décision de la surveillance de projet du 19 janvier 2016 (voir ch. 3.1)14 et pertinence de la décision de suspendre le projet (voir ch. 3.2)15.

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10

11

12 13 14 15

Le groupe de travail a renoncé à auditionner le collaborateur qui, dans une note interne au chef Projets et aide à la conduite, avait critiqué le projet (voir ch. 2.2.1), car ce dernier a pu livrer des informations complètes au groupe de travail. Le collaborateur a été qualifié, à tort, de lanceur d'alerte par certains médias bien qu'il ait adressé sa note, dans le cadre de son activité régulière et dans le respect de la procédure habituelle, au chef Projets et aide à la conduite, à la secrétaire générale et au chef Communication DDPS. Le nouveau conseiller militaire du chef du DDPS, le commandant de corps Dominique Andrey, n'a pas été auditionné lui non plus, car il n'a pris ses fonctions que le 1.4.2016 et n'était pas impliqué dans le projet avant que celui-ci soit suspendu.

Voir en annexe la liste des personnes auditionnées. Il ressort du rapport du chargé de l'enquête administrative que celui-ci a auditionné les mêmes personnes au sein du Secrétariat général que le groupe de travail. Il a également questionné l'ancienne secrétaire générale du DDPS ainsi que des personnes qui connaissaient mieux le projet DSA (gestion du projet, questions techniques, etc.) mais dont le rôle était insignifiant pour les questions des CdG.

Notamment le mandat de projet, les procès-verbaux des séances de la surveillance de projet, les courriels internes et les procès-verbaux des Commissions de la politique de sécurité.

pport du chargé d'enquête du 21.9.2016 à l'intention du chef du DDPS, pp. 5 et 6.

Rapport du chargé d'enquête du 21.9.2016 à l'intention du chef du DDPS, pp. 7, 68 à 70.

Rapport du chargé d'enquête du 21.9.2016 à l'intention du chef du DDPS, pp. 6 et 59.

Procès-verbal de l'audition du chargé de l'enquête administrative du 26.9.2016, pp. 8 à 10, courrier du chargé de l'enquête administrative au groupe de travail du 10.10.2016.

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A l'issue des auditions, les personnes entendues ont reçu pour vérification les extraits de procès-verbal les concernant. De plus, les chapitres du projet de rapport du groupe de travail consacrés aux faits leur ont été envoyés pour avis dans le cadre de la consultation de l'administration (correction d'erreurs formelles et matérielles). En relation avec le traitement des réponses fournies lors de cette consultation, le groupe de travail a auditionné une deuxième fois le chef du DDPS, le 28 novembre 2016. Il s'agissait d'offrir à celui-ci la possibilité de développer et de motiver devant le groupe de travail la réponse qu'il avait formulée par écrit lors de la consultation, ainsi que celle d'informer le groupe de travail des mesures qu'il avait engagées sur la base des résultats et recommandations de l'enquête administrative. Le groupe de travail a ensuite traité les réponses issues de la consultation de l'administration et de l'audition, avant d'adapter son rapport lorsque cela se révélait nécessaire 16.

Se fondant sur les clarifications menées par leur groupe de travail, les CdG ont approuvé, lors de leur séance du 26 janvier 2017, le rapport d'inspection sur la suspension du projet DSA à l'intention du Conseil fédéral, puis ont pris la décision de le publier.

Il convient de souligner concernant le présent rapport que, conformément au mandat décrit plus haut, les appréciations et les conclusions qu'il contient se réfèrent exclusivement à la décision du chef du DDPS de suspendre le projet DSA durant sa phase d'évaluation (voir également ch. 2.1.3). Cela signifie que les CdG ne s'expriment ni sur le projet DSA à proprement parler ni sur la question de l'acquisition concrète de systèmes de défense sol-air.

La structure du présent rapport est la suivante: le chapitre 2 décrit les principaux faits liés au projet DSA (chap. 2.1) et dresse leur chronologie, de l'entrée en fonction du nouveau chef du département, le 1er janvier 2016, à la décision de suspension du projet, le 22 mars 2016, avant de présenter les conséquences qui s'ensuivirent (chap. 2.2)17. Le chapitre 3 répond aux questions principales soulevées lors de l'inspection (évaluation des bases d'information et des processus décisionnels, question de l'opportunité de la décision de suspension du projet). Enfin, le chapitre 4 est consacré aux conclusions dans leurs grandes lignes.

16 17

Les dix personnes auditionnées se sont exprimées dans le cadre de la consultation. Leurs réactions ont été prises en compte dès lors qu'elles étaient pertinentes pour le rapport.

Voir aussi le tableau synoptique en annexe.

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Les faits

2.1

Présentation du projet DSA et, plus globalement, des acquisitions d'armement

2.1.1

Le projet DSA

Le projet de défense sol-air 2020 porte sur une procédure d'acquisition visant à renouveler les systèmes de défense antiaérienne de l'armée suisse, lesquels ont pour mission de protéger des objets et infrastructures importants ainsi que la population et l'armée contre les attaques aériennes. Il se compose de trois projets partiels18. La décision de suspension concerne le projet partiel de défense sol-air 2020 moyenne portée (DSA 2020 MP), que, par souci de simplification, nous désignons projet DSA dans le présent rapport.

Le projet en question comprend lui-même trois parties: 1) le déclencheur (ou «effecteur»), c'est-à-dire le missile à proprement parler, 2) le radar, plus précisément les capteurs et 3) le système de commandement requis pour relier entre eux l'arme, le radar et la centrale d'engagement. Il était prévu d'évaluer ces parties successivement. Lorsque le projet DSA a été suspendu, l'évaluation des déclencheurs était achevée et les tests des capteurs étaient en cours19.

Initialement, le renouvellement des systèmes de défense antiaérienne était prévu dans le cadre du programme d'armement 2020. De premiers examens préalables ont été effectués en 2007, 2010 et 2011 et, en 2013, le mandat de projet définitif a été formulé. Après que le peuple eut rejeté l'acquisition d'un nouvel avion de combat lors de la votation populaire du 18 mai 2014, le chef du DDPS de l'époque, le conseiller fédéral Ueli Maurer, a demandé à armasuisse, le 18 août 2014, d'avancer le projet DSA de deux ans. Pour pouvoir accélérer le processus malgré des ressources limitées, armasuisse a été chargée de recourir à une entreprise suisse qui agirait en tant qu'entrepreneur général.

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1) Le projet partiel de prolongation de l'utilisation du système de défense contre avions moyenne de 35 mm avait pour but de prolonger de dix ans la durée d'utilisation du système de défense antiaérienne pour la protection des objets (à courte distance). Cette prolongation n'a pas été contestée et les moyens financiers qu'elle nécessitait, de l'ordre de 100 millions de francs, ont été approuvés dans le cadre du programme d'armement complémentaire 2015. 2) Le sous-projet DSA 2020 MP, qui a été suspendu par le conseiller fédéral Guy Parmelin, devait combler une lacune, identifiée par le Conseil fédéral, dans la protection de l'espace aérien et permettre de combattre des cibles aériennes à une distance pouvant atteindre 40 km au-dessus du sol. Un montant de 700 millions de francs était prévu dans la planification de l'armement. 3) Le sous-projet «DSA 2020 ­ courte portée» visait, à l'instar du premier projet partiel, la protection des objets, plus précisément d'éléments de nature civile et militaire stratégiquement importants. Il n'a pas encore démarré puisqu'il a été reporté. Comme la Suisse devait posséder un système de protection des objets en dépit de ce report, la prolongation de l'utilisation du système évoquée dans le projet partiel 1 s'imposait.

Procès-verbal (non publié) de la séance de la surveillance du projet DSA du 19.1.2016.

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2.1.2

Collaboration entre armasuisse et Thales Suisse SA

A l'issue d'une procédure invitant à soumissionner, c'est l'entreprise Thales Suisse SA, ci-après nommée Thales, qui, le 25 août 2015, a été désignée entrepreneur général et chargée de préparer l'acquisition. Autrement dit, Thales devait évaluer et examiner les différents systèmes, en collaboration avec armasuisse. Le contrat signé entre armasuisse et Thales le 3 septembre 2015 définit le mandat de Thales ainsi que le montant de l'indemnité (pour les travaux préparatoires et les prestations convenues, sans l'indemnité pour d'éventuelles options supplémentaires).

Le mandat de Thales ­ et, partant, le contrat ­ se serait achevé en juin 2016 sur une proposition pour le choix du type d'appareil et, en septembre 2016, par le dépôt d'un contrat d'option pour l'acquisition. Cette option, c'est-à-dire la conclusion d'un contrat pour l'acquisition à proprement parler, aurait alors dépendu de la décision du chef du DDPS d'intégrer l'acquisition dans le programme d'armement 2017 puis de l'approbation du programme d'armement par le Parlement.

Le DDPS a résilié le contrat avec l'entreprise Thales le 29 avril 2016, quelques semaines après la décision de suspension. Cette mesure était nécessaire, car le contrat ne prévoyait aucune suspension (au sens d'une interruption) et des conséquences financières incontrôlables auraient pu en découler (notamment frais de personnel de l'entreprise générale, qui avait embauché plusieurs dizaines de personnes pour le projet). L'arrêt du projet était en revanche régi par le contrat et ses conséquences étaient claires. Aux termes du contrat, en effet, Thales avait droit à une indemnité pour les prestations fournies ainsi qu'à une marge bénéficiaire appropriée en cas de résiliation du contrat par le mandant après le 31 décembre 201520; par conséquent, l'entreprise pouvait facturer les prestations fournies (indemnité pour la préparation de l'acquisition et mandats supplémentaires de moindre ampleur convenus ultérieurement), marge bénéficiaire incluse.

Le montant versé à Thales correspond plus ou moins à l'indemnité convenue dans le contrat initial; néanmoins, les prestations convenues contractuellement n'ont pas toutes été fournies et l'évaluation n'a pas été menée à son terme. D'après le DDPS, la suspension du projet a occasionné des coûts totaux de l'ordre de 20 millions de
francs (indemnité versée à Thales et charges internes, coûts salariaux notamment)21.

En résumé, le contrat conclu avec Thales pour la préparation de l'acquisition et l'évaluation serait arrivé à échéance en septembre 2016 sans conséquences quel20

21

Le droit de résiliation du mandant était régi par l'art. 21 du contrat. Aux termes dudit article, le mandant pouvait résilier le mandat de préparation de l'acquisition jusqu'à la fin 2015 et, dans ce cas, être redevable au mandataire d'un montant maximal équivalant à un peu plus de la moitié de l'indemnité convenue contractuellement. En cas de résiliation ultérieure, le mandataire avait droit à un dédommagement pour les prestations fournies ainsi qu'à une marge bénéficiaire appropriée.

Le DDPS a publié ce chiffre sur son site Internet (DDPS > Actualités > Questions, mises au point et clarifications, état au 22.11.2016). Vers la fin de l'inspection, le DDPS a mis en ligne sur son site Internet de nouvelles informations relatives au projet DSA. Le présent rapport se concentre cependant sur les informations obtenues par le groupe de travail dans le cadre des auditions et des clarifications et ne se fonde pas sur les informations qui ont été publiées sur le site Internet du DDPS après les auditions.

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conques, y compris sans incidences autres sur les coûts. Le cas échéant, un contrat subséquent aurait dû être conclu pour une éventuelle acquisition. La décision de suspension a eu pour effet l'obligation de résilier le contrat et d'interrompre l'évaluation en cours. Par conséquent, le projet dans son ensemble, plus précisément la réalisation de l'objectif supérieur ­ c'est-à-dire la mise en place d'un système de défense sol-air de moyenne portée ­ a pris du retard, plus précisément a été provisoirement suspendu.

2.1.3

L'acquisition d'armement et l'état d'avancement du projet DSA

Les principales bases légales relatives à l'acquisition de matériel militaire se trouvent dans les art. 6 à 11 de l'ordonnance du DDPS sur le matériel de l'armée 22. La marche à suivre pour une acquisition d'armement est consignée dans «TUNE14», une convention cadre qui régit la collaboration entre l'armée et armasuisse lors de projets d'acquisition et s'inspire notamment de la méthode de gestion de projets HERMES. Les différentes phases et étapes clés de la procédure sont définies et détaillées dans «TUNE14», tant en ce qui concerne les responsabilités que les prestations à fournir. Le mandant pour l'acquisition de matériel militaire est toujours le domaine départemental de la Défense (DDPS); armasuisse, en sa qualité d'Office fédéral de l'armement, est l'autorité chargée des acquisitions et, à ce titre, elle est mandataire et fait le lien avec l'industrie.

Le projet DSA a été géré conformément à «TUNE14» et, selon les critères en vigueur, il a été soumis à une surveillance dont la direction a été confiée au commandant de corps Aldo C. Schellenberg, commandant des Forces aériennes. La surveillance de projet comprenait en outre quatre autres membres des Forces aériennes, trois membres de la Planification de l'armée, trois membres d'armasuisse (dont le responsable du projet DSA) ainsi qu'un représentant de l'Etat-major de conduite de l'armée, un représentant des Forces terrestres, un représentant de la Base d'aide au commandement et un représentant de la Base logistique de l'armée, soit un total de quinze personnes. Comme le veut «TUNE14», la surveillance de projet a pour mission de piloter le projet et d'assurer sa coordination au niveau des directions des organisations qui la composent. Elle est en outre responsable des résultats.

«TUNE14» définit également les différentes phases et étapes clés d'une acquisition d'armement. Etant donné que le projet DSA était une entreprise complexe, une évaluation préliminaire a été réalisée en vue d'élaborer différentes options et de clarifier la question de la faisabilité. Cette phase de l'évaluation préliminaire s'achève avec l'étape clé 25, qui signifie que les exigences posées au système à acquérir sont suffisamment claires pour que l'évaluation proprement dite voire ensuite la procédure d'adjudication soient lancées. Le projet DSA a atteint l'étape clé 25 le 5 décembre 2014.

22

Ordonnance du DDPS du 6.12.2007 sur le matériel de l'armée (OMat), RS 514.20.

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Les phases et étapes clés d'une acquisition d'armement

Illustration 1

Source: TUNE14 du 1.12.2013; figure établie par nos soins.

Légende: EC = étape clé / EC10: lancement du projet validé; EC20: mandat de projet octroyé; EC25: évaluation des options et sélection; EC30: concept établi et feu vert pour la réalisation; EC40: réalisation achevée et feu vert pour l'introduction; EC50: projet terminé; EC60: matériel en fin de vie.

Au moment où il a été suspendu, le projet se trouvait en phase d'évaluation. Conformément à «TUNE14», cette phase consiste en une évaluation technique, logistique et commerciale des systèmes, qui, associée à l'aptitude à l'emploi par la troupe, constitue la base déterminante pour le choix du type d'appareil et conduit à la maturité d'acquisition. Durant cette phase, la responsabilité est assumée par armasuisse (chef de projet et chef de l'armement). Le chef de l'armée et le chef du DDPS entrent en scène à la fin de cette phase d'évaluation: en concertation avec le chef de l'armée, le chef de l'armement choisit le type d'appareil et constate la maturité d'acquisition. Le chef du département décide alors si le système proposé doit être acquis et, à cet effet, être intégré dans le programme d'armement.

Conformément à la planification qui valait au moment de sa suspension, le projet DSA aurait dû être achevé en septembre 2016 (étape clé 30 atteinte). A ce momentlà, la surveillance du projet aurait déposé la demande d'acquisition auprès du chef de l'armement (choix du type d'appareil et coûts) et, conformément à la suite de la procédure, le chef du DDPS aurait décidé d'approuver celle-ci et d'intégrer l'acquisition dans le programme d'armement 2017.

Les coûts exacts de l'acquisition n'auraient pu être chiffrés qu'à la fin de l'évaluation ou dans la demande d'acquisition, puisque ce n'est qu'à ce stade que l'on peut demander aux fabricants des offres fermes. Etant donné que la phase d'évaluation du projet DSA n'a pas été achevée, aucun chiffre définitif n'est disponible aujourd'hui.

Les responsables du projet et, plus globalement, le DDPS tablaient sur des coûts

3329

FF 2017

situés entre 700 millions et 1,1 milliard de francs, suivant le nombre de systèmes à acheter, respectivement le nombre de secteurs à protéger23.

2.2

Chronologie des faits, de janvier 2016 à la suspension du projet et à la résiliation du contrat

La chronologie des faits se fonde sur les documents analysés et sur les déclarations des personnes auditionnées par le groupe de travail DSA, en particulier sur l'exposé fait par le chef du DDPS des événements primordiaux à ses yeux. Elle est récapitulée dans un tableau synoptique qui se trouve en annexe.

2.2.1

De l'entrée en fonction du nouveau chef du DDPS à sa décision de suspendre le projet

Selon ses propres déclarations, le chef du DDPS exige dès son entrée en fonction, en janvier 2016, une vue d'ensemble des 31 projets les plus importants menés au sein du département, puis décide de demander des détails sur quelques-uns d'entre eux (voir plus bas, 19.1.2016).

Alors qu'il vient tout juste de prendre ses fonctions, le nouveau chef du département doit faire face aux critiques acerbes formulées à l'égard du programme d'armement 2015+ et, plus concrètement, du projet de modernisation du Duro. Il indique être très absorbé par ces problèmes durant les semaines suivantes, en particulier lors de la session de printemps, qui se tient du 29 février au 18 mars 2016. Il contacte son prédécesseur au sujet de ces dossiers, afin d'obtenir des renseignements de sa part.

En revanche, il n'y a à aucun moment de contacts entre eux au sujet du projet DSA24.

23

24

Le mandat de projet du 12.12.2014 (étape clé 20) table sur quelque 700 millions de francs. Dans une feuille d'information du 21.1.2016 relative au projet et rédigée à l'intention du chef du DDPS, il est question de 820 millions de francs. Le message du 24.2.2016 sur l'armée 2016 situe les coûts pour le renouvellement de la défense sol-air de moyenne portée entre 700 millions de francs (pour une première phase) et 1,1 milliard de francs (intégralité de l'acquisition). Dans le cadre de l'enquête administrative qu'il a réalisée, le chargé d'enquête n'a trouvé aucun indice permettant d'aboutir aux chiffres évoqués dans les médias, de l'ordre de 2,5 à 3 milliards de francs. Dans l'avis qu'il a exprimé le 14.11.2016 dans le cadre de la consultation de l'administration, le chef du DDPS renvoie au rapport du chargé de l'enquête administrative, qui indique que les coûts sont estimés à un montant situé entre 500 millions et 1,7 milliard de francs. Cependant, ledit rapport explique également de manière claire et détaillée qu'il s'agit de chiffres anciens, puisqu'ils datent des années 2013 et 2014, et qu'ils ont été adaptés au fil du projet (voir pp. 60 à 63 du rapport de l'enquête administrative).

Lettre du chef du DFF au groupe de travail du 23.12.2016; lettre du chef du DDPS au groupe de travail du 12.1.2017. Le chef du DDPS a indiqué qu'il avait reçu de son prédécesseur, dans le cadre de la transmission de la direction du département, une feuille A4 présentant une liste des grands dossiers en cours et que le projet DSA ne faisait pas partie de cette liste.

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Dans un courriel qu'il leur adresse le 18 janvier 2016 à 21 h 17, le chef du DDPS informe le chef de l'armée et les directeurs des offices du DDPS qu'aucun nouveau projet ne peut être lancé, ni aucune décision de fond, être prise concernant des projets en cours, sans qu'il soit consulté. Il est ressorti des auditions menées par le groupe de travail DSA que, lorsqu'il a donné cette instruction, le chef du DDPS avait plus particulièrement en ligne de mire le projet DSA, car il avait appris que d'importantes décisions y afférentes devaient être prises peu de temps après. Le groupe de travail n'a pu véritablement établir comment le chef du département avait eu cette information, ni de qui il la tenait. Ce dernier lui a indiqué que le chef Communication DDPS avait appris, le 18 janvier 2016, qu'une décision importante concernant le projet DSA devait être prise le lendemain 25. De son côté, le chef Communication DDPS a précisé que c'est en lisant un article sur le site Internet du groupe Giardino26 qu'il avait été informé de cette prise de décision imminente27. Le consultant externe du DDPS a expliqué au groupe de travail que le chef du DDPS disposait de renseignements sur une décision imminente concernant le projet DSA, mais qu'il ne lui avait pas communiqué sa source d'information28.

Le chef du DDPS formule son instruction conjointement avec le chef Communication et un consultant externe qui était responsable du suivi des projets les plus importants du DDPS lorsque celui-ci était dirigé par le précédent chef de département, lequel consultant est resté au service du nouveau chef jusqu'en mars 2016 29. Sur ordre du chef du département, le consultant externe communique cette instruction au président de la surveillance du projet DSA et commandant des Forces aériennes par téléphone, en amont de la séance de la surveillance de projet organisée le 19 janvier après-midi30. Il évoque alors avec lui les conséquences de l'instruction pour le projet DSA. Le président de la surveillance de projet indique que les résultats de l'évaluation des déclencheurs (missiles) seront présentés lors de la séance de la surveillance de projet du 19 janvier 2016, dans l'après-midi, et que, à l'issue de cette présentation, la surveillance de projet décidera probablement de «maintenir dans la course» les deux missiles testés, autrement dit de n'exclure aucun des deux prestataires (option couplée). Les interlocuteurs en concluent qu'aucune décision de fond 25 26

27

28 29 30

Lettre du chef du DDPS au groupe de travail du 20.9.2016.

Le groupe Giardino est une association qui, aux termes de ses statuts, a notamment pour buts d'empêcher la destruction de l'armée de milice, de restaurer la crédibilité de la défense nationale ainsi que d'imposer et de mettre en oeuvre le concept de neutralité armée.

Procès-verbal (non publié) de l'audition du chef Communication DDPS du 25.8.2016 (pp. 4 et 16). Une recherche actuelle sur ce site ne permet cependant pas de trouver d'article daté du 18.1.2016; en revanche, la décision en question est évoquée dans une contribution du 19.1.2016 (http://gruppe-giardino.ch/?p=10209; uniquement en allemand). Dans le cadre de la consultation de l'administration, le chef Communication DDPS a confirmé avoir vu l'article le 18.1.2016; il suppose que celui-ci a ensuite été supprimé ou actualisé pour que l'indiscrétion prématurée soit oubliée.

Procès-verbal (non publié) de l'audition du consultant externe du DDPS du 31.8.2016 (p. 9).

Procès-verbaux (non publiés) des auditions du consultant externe du DDPS du 31.8.2016 (pp. 4 et 5) et de la secrétaire générale du DDPS du 25.8.2016 (pp. 4 et 5) Le président de la surveillance de projet a indiqué au groupe de travail que cette conversation téléphonique avait eu lieu le 18.1.2016 (procès-verbal [non publié] de l'audition du président de la surveillance de projet du 6.7.2016, p. 6), alors que le consultant externe est d'avis qu'elle a été menée dans la matinée du 19.1.2016 (réaction du consultant externe du 26.10.2016, dans le cadre de la consultation de l'administration).

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au sens de l'instruction formulée par le chef du DDPS ne sera prise si cette option ­ n'exclure aucun des prestataires et continuer d'examiner les deux systèmes ­ est retenue; aujourd'hui encore, ils sont toujours de cet avis 31. Le consultant externe fait également part de l'instruction au chef de l'armement et au représentant du SG DDPS qui assiste à la réunion de la surveillance de projet, leur précisant qu'aucune décision de fond ne devrait être prise au sujet du projet DSA. Après ces appels téléphoniques, il indique au chef du DDPS qu'il s'est entretenu avec le chef de l'armement et le président de la surveillance de projet et qu'il a pris les mesures qui s'imposaient pour qu'aucune décision de fond ne soit prise32.

Lors de la séance de la surveillance du projet DSA du 19 janvier 201633 après-midi, l'équipe de projet présente les résultats des évaluations des déclencheurs et propose de poursuivre avec l'acquisition échelonnée de deux systèmes de missiles: IRIS-T SL et CAMM-ER (option couplée). Il ressort de cette présentation et de la discussion entre les membres de la surveillance qu'aucun des deux systèmes évalués n'est à même, seul, de satisfaire intégralement aux exigences du cahier des charges. Les doutes portent notamment sur la capacité de l'IRIS-T SL à être engagé quelles que soient les conditions météorologiques et sur la portée du CAMM-ER. L'équipe de projet conclut que ces exigences seront remplies de façon satisfaisante si les deux systèmes de missiles sont combinés. Après une discussion controversée et en dépit de quelques voix critiques, la surveillance de projet approuve la proposition de l'équipe de projet. Son président mentionne alors l'instruction du chef du DDPS et précise que l'option privilégiée sera présentée par le commandant des Forces aériennes au chef du DDPS34.

Un représentant de l'unité Projets et aide à la conduite du SG DDPS, qui assiste à la réunion de la surveillance de projet, informe par courriel son supérieur et le consultant externe du contenu de la séance, en relevant en substance qu'il a été tenu compte de l'instruction du chef du DDPS de ne prendre aucune décision de fond

31 32

33

34

Procès-verbaux (non publiés) des auditions du président de la surveillance de projet du 6.7.2016 (pp. 6 et 7) et du consultant externe du DDPS du 31.8.2016 (pp. 5 et 9).

Procès-verbal (non publié) de l'audition du consultant externe du DDPS du 31.8.2016 (p. 5); Réaction du consultant externe du 26.10.2016, dans le cadre de la consultation de l'administration.

Le président de la surveillance de projet a convoqué la séance extraordinaire de la surveillance de projet du 19.1.2016 après avoir appris du responsable de projet que l'équipe de projet se pencherait ce jour-là sur la recommandation relative au choix des déclencheurs et pourrait ne pas plaider en faveur d'un seul système. Le président de la surveillance de projet a indiqué qu'il avait conscience que cela susciterait des polémiques au sein de la surveillance de projet. C'est la raison pour laquelle il a également convié à la séance les membres de l'équipe de projet en qualité d'observateurs. Ceux-ci, en tant qu'experts, pourraient répondre à certaines questions tout en suivant la discussion au sein de la surveillance de projet. Avant la séance, le président de la surveillance de projet a informé le responsable de projet et le chef du domaine de compétences de l'instruction du chef du DDPS du 18.1.2017, ce qui a eu pour effet que la séance a débuté avec un léger retard (procès-verbal [non publié] de la séance de la surveillance de projet DSA du 19.1.2016 [p. 2]; procès-verbal [non publié] des auditions du président de la surveillance de projet du 6.7.2016 [pp. 5 et 9]).

Procès-verbal (non publié) de la séance de la surveillance du projet DSA du 19.1.2016 (p. 6).

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préjugeant de décisions futures35. Cette appréciation est partagée par les autres personnes auditionnées qui étaient impliquées dans le projet (président de la surveillance de projet, chef de l'armée, chef de l'armement, chef Projets et aide à la conduite du SG DDPS, consultant externe du DDPS)36.

Le chef Projets et aide à la conduite37 et son collaborateur ont eux aussi reçu, ultérieurement, le procès-verbal de la séance. Ni eux ni le consultant externe n'estiment que l'information nécessite d'entreprendre quoi que ce soit, d'autant plus que, à ce moment-là, ils savent déjà que le président de la surveillance et le responsable de projet présenteront le projet DSA au chef du département le 2 février 2016.

Lors d'une réunion, le 19 janvier 2016, le chef Projets et aide à la conduite informe le chef du DDPS des projets les plus importants menés au sein du DDPS en se basant sur une liste qui lui a été remise et lui propose que le comité de projet et les responsables de projet respectifs lui présentent onze des 31 projets les plus importants du département, dont le projet DSA. Le chef du DDPS approuve sa proposition.

Le 2 février 2016, le président de la surveillance et le responsable de projet présentent le projet DSA au chef du département pendant environ 90 minutes. Assistent à la présentation, outre les trois personnes précitées, le chef de l'armement, le chef Communication DDPS et le chef Projets et aide à la conduite. Le président de la surveillance et le responsable de projet informent les participants sur la défense solair et son évolution, sur le profil requis pour le nouveau dispositif ainsi que sur l'état d'avancement du projet et sur la suite des opérations, c'est-à-dire les prochaines étapes clés et l'échelonnement de l'acquisition (programmes d'armement 2017 et 2020).

Les déclarations faites devant le groupe de travail DSA divergent concernant l'information relative à la décision prise le 19 janvier 2016 de retenir l'option couplée: les responsables de projet, le chef de l'armement et le chef Projets et aide à la conduite précisent que la décision de la surveillance de projet du 19 janvier 2016 leur a été communiquée lors de la présentation38, tandis que le chef du DDPS

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Courriel adressé le 20.1.2016 par le collaborateur de l'unité Projets et aide à la conduite du SG DDPS au chef Projets et aide à la conduite du SG DDPS et au chef Planification et controlling du SG DDPS, avec copie au consultant externe du DDPS.

Procès-verbaux (non publiés) des auditions du président de la surveillance de projet du 6.7.2016 (pp. 6 et 7), du chef de l'armée du 6.7.2016 (p. 6), du chef de l'armement du 25.8.2016 (p. 5), du chef Projets et aide à la conduite du SG DDPS du 31.8.2016 (p. 8) et du consultant externe du DDPS du 31.8.2016 (p. 5).

Le chef Projets et aide à la conduite a pour mission d'aider le chef du DDPS à être mieux informé de l'état d'avancement des différents projets. Il s'en acquitte en accompagnant ces projets pour le Secrétariat général. Les décisions au sein d'un projet donné sont prises par la surveillance de celui-ci, mais le chef Projets et aide à la conduite ou ses collaborateurs participent aux séances de la surveillance de projet et reçoivent les procès-verbaux.

Ce poste a été créé en janvier 2016 (procès-verbal [non publié] de l'audition du chef Projets et aide à la conduite SG DDPS du 31.8.2016 [pp. 3 et 4]).

Procès-verbaux (non publiés) des auditions du président de la surveillance de projet du 6.7.2016 (p. 4), du responsable de projet DSA du 31.8.2016 (p. 5), du chef de l'armement du 25.8.2016 (p. 7) et du chef Projets et aide à la conduite du SG DDPS du 31.8.2016 (p. 8).

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affirme ne pas en avoir été informé dans le cadre de la présentation39. Le chef Communication indique pour sa part que les responsables les auraient informés que l'option couplée avait été retenue, sans toutefois mentionner que cette décision avait été prise le 19 janvier 201640. Or, même si elle n'est pas particulièrement mise en évidence, la décision figure, avec mention de la date, sur une feuille de grand format41 utilisée, selon leurs propos, par les responsables de projet pour leur présentation42. Il est en outre difficile d'établir jusqu'à quel point les problèmes et les risques ainsi que les limites des deux systèmes (performances quelles que soient les conditions météorologiques et portée) ont été évoqués durant la présentation. Le président de la surveillance de projet a déclaré au groupe de travail qu'il avait présenté les deux systèmes et leurs caractéristiques, tandis que le chef Communication DDPS a précisé lors de son audition qu'à tout le moins la question des conditions météorologiques n'avait pas été abordée43.

Le chef du DDPS a expliqué au groupe de travail DSA avoir fait part de ses doutes et de ses réserves aux participants à la présentation et leur avoir demandé jusqu'à quand il était encore possible d'interrompre le projet.

Les responsables de projet ont indiqué au groupe de travail que, à l'issue de la présentation, aucun signe ne leur permettait de conclure que le chef du DDPS n'était pas satisfait de l'information et des réponses apportées aux questions et réserves qu'il avait formulées lors de la présentation. Dans un courriel adressé à ceux-ci, le chef Projets et aide à la conduite du SG DDPS a même qualifié la présentation de «réussie»44.

Le 14 février 2016, le journal Zentralschweiz am Sonntag publie un article critique sur le projet, dans lequel on peut lire que les services compétents décideront «dans les jours à venir» quel missile doit être acquis et que les deux armes qui sont encore dans la course ne satisfont pas aux critères en vigueur, notamment en ce qui concerne leur aptitude à fonctionner par tous les temps. Le chef du département et le chef Communication DDPS ont déclaré que, à ce moment-là, ils ignoraient tout de ces problèmes45. C'est la raison pour laquelle, le lendemain, le chef Communication contacte le chef de l'armement et le président de la
surveillance de projet. Il précise que le chef de l'armement lui explique alors que de tels articles de presse font partie du jeu et que les critiques sont infondées, le projet étant sur la bonne voie. Le chef Communication transmet ensuite ces remarques au chef du département. Le président de la surveillance de projet annonce au chef Communication que le chef de 39 40 41 42

43 44

45

Procès-verbal (non publié) de l'audition du chef du DDPS du 23.6.2016 (p. 5).

Procès-verbal (non publié) de l'audition du chef Communication DDPS du 25.8.2016 (p. 8).

Affiche d'armasuisse sur DSA 2020 (état au 25.1.2016; en français).

Procès-verbal (non publié) de l'audition du responsable de projet DSA du 31.8.2016 (p. 4); courriel du président de la surveillance de projet envoyé au groupe de travail le 17.8.2016.

Procès-verbal (non publié) des auditions du président de la surveillance de projet du 6.7.2016 (p. 4) et du chef Communication DDPS du 25.8.2016 (p. 5).

Courriel du 2.2.2016 envoyé par le chef Projets et aide à la conduite du SG DDPS au président de la surveillance et au responsable de projet DSA, avec copie au chef de l'armement.

Procès-verbal (non publié) des auditions du chef du DDPS du 23.6.2016 (pp. 5 et 6) et du chef Communication DDPS du 25.8.2016 (p. 5).

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l'armée lui a demandé une analyse et un avis détaillés sur les critiques formulées dans le Zentralschweiz am Sonntag46. Le 29 février 2016, il adresse cette note au chef de l'armée, au chef de l'armement et à d'autres responsables du projet au sein de l'armée et d'armasuisse, ainsi qu'au chef Communication DDPS47. Ce dernier a précisé qu'il en avait informé le chef du DDPS, mais n'avait entrepris aucune autre démarche. Le chef du DDPS a reçu cette note sur les critiques du projet le 7 mars 2016, dans le cadre de ses entretiens hebdomadaires avec le chef de l'armée, qui la lui a remise en mains propres48.

Prenant connaissance dudit article le 14 février 2016, lors du Singapore AirShow, le président de la surveillance de projet demande leurs réactions aux représentants du fabricant présents au salon. Ceux-ci lui expliquent pourquoi le système peut être utilisé par tous les temps, puis confirment leurs propos par écrit. Soucieux de désamorcer la polémique, le président de la surveillance de projet convoque une réunion à Berne le 22 février 2016, à laquelle il convie des spécialistes du fabricant. Y assistent également le chef de l'armement, le chef de l'Etat-major de l'armée (qui est aussi pilote de chasse) et le responsable de projet, ainsi que les membres de l'équipe de projet qui s'étaient montrés sceptiques à l'égard du système et avaient émis des doutes quant à sa capacité à fonctionner par tous les temps. Les participants à la réunion s'entretiennent dans le détail des critères militaires que le système doit remplir et de ses performances. Il s'avère que le fabricant garantit pour son arme une probabilité d'impact supérieure aux 75 % formulés dans le cahier des charges militaire, quel que soit le temps49. La conclusion de la réunion est en substance la suivante: «Il a été démontré, lors de tirs réels, que la probabilité d'impact de l'IRIS-T SL [le missile qui prêtait le flanc à la critique] est supérieure à celle exigée dans le cahier des charges militaire. Les phénomènes météorologiques ne devraient pas avoir d'incidence sur les performances du missile dès lors que celui-ci est associé à un capteur au sol (radar). [...] La première étape a été franchie avec l'évaluation du déclencheur. Nous ne pourrons tirer de conclusions définitives que lorsque toutes les parties du système auront été évaluées»
[trad.]50.

Le 24 février 2016, le DDPS annonce que les travaux préparatoires en vue de l'évaluation d'un nouvel avion de combat vont démarrer. Il précise dans son communiqué qu'un groupe d'experts interne composé de représentants des différents domaines concernés de l'armée, d'armasuisse et du SG DDPS répondra à des ques46 47 48 49

50

Procès-verbal (non publié) de l'audition du chef Communication DDPS du 25.8.2016 (pp. 4 et 12).

Courriel du 29.2.2016 envoyé par le président de la surveillance de projet au chef Communication DDPS.

Lettre du 20.7.2016 adressée par le chef de l'armée au groupe de travail.

Lors de son audition par le groupe de travail, le président de la surveillance de projet a expliqué qu'il pouvait bien évidemment arriver, dans certaines situations météorologiques, que l'arme ne touche pas sa cible, mais que ces situations concernaient n'importe quelle arme: le fusil d'assaut rate sa cible dans l'obscurité, le char de combat Leopard glisse s'il y a du verglas et les avions de combat ne peuvent ni décoller ni atterrir partout en cas de brouillard. Il a précisé que, comme il était illusoire d'exiger une performance parfaite quelles que soient les conditions météorologiques, la probabilité d'impact avait été fixée à 75 % dans le cahier des charges.

Procès-verbal (non publié) du bilan interne dressé le 22.2.2016, après la réunion avec le fabricant.

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tions de fond dans un rapport qu'il établira pour le printemps 2017. Le DDPS ajoute qu'un groupe externe réunissant notamment des membres de chaque parti représenté au Conseil fédéral ainsi que des représentants de l'industrie accompagnera les travaux du groupe d'experts. Ni le projet DSA ni le dispositif de défense antiaérienne ne sont évoqués dans ce communiqué51.

Pendant qu'il se rend à un rendez-vous, le 26 février 2016, le chef du DDPS fait part au chef Communication DDPS de ses doutes concernant le projet DSA. Selon ses dires, il lui précise que ses doutes portent sur les systèmes proposés et sur le processus d'acquisition prévu. Il indique à son interlocuteur qu'il examine l'éventualité de suspendre le projet, de l'analyser plus en profondeur et de l'examiner dans le cadre de l'acquisition d'un nouvel avion de combat. Selon le chef Communication, le chef du département lui fait part également de ses incertitudes au sujet des coûts, car leurs estimations divergent. Le chef Communication prend note des réflexions du chef du DDPS tout en précisant que rien ne presse s'agissant du projet DSA. Le chef du DDPS décide alors d'écarter provisoirement l'idée d'une suspension pour se concentrer sur l'examen du projet de modernisation du Duro et du développement de l'armée par les Chambres fédérales lors de la prochaine session, du 29 février au 18 mars 201652.

Lors de la séance de la surveillance du projet DSA du 1er mars 2016, le président de la surveillance informe les participants de l'état d'avancement du projet. Il s'attarde sur les critiques des médias et sur la question de la capacité des missiles évalués à être engagés par tous les temps. Il fait part de la réunion du 22 février 2016 avec le fabricant de l'arme incriminée en précisant que celui-ci garantit que son produit peut être engagé par tous les temps, plus précisément qu'il satisfait à la probabilité d'impact exigée, mais ajoute que certaines questions sont encore en suspens. Pour y répondre, la surveillance de projet ordonne de nouvelles clarifications. Elle souligne en outre que l'évaluation finale de tous les systèmes ne sera possible qu'une fois tous les tests réalisés53.

Comme pour la séance de la surveillance de projet du 19 janvier 2016, un collaborateur de l'unité Projets et aide à la conduite du SG DDPS assiste à la séance
du 1er mars. Le 2 mars 2016, il rédige à l'intention de son supérieur une note d'information succincte sur la séance, dont il adresse une copie à la secrétaire générale du DDPS et au chef Communication DDPS. Il y écrit notamment que les deux missiles ne satisfont pas entièrement aux critères requis et que la capacité de l'un d'eux à être engagé par tous les temps doit encore être confirmée. 54 Devant le groupe de travail, le président de la surveillance du projet DSA a précisé que cette note d'information

51 52 53 54

Communiqué de presse du DDPS du 24.2.2016.

Procès-verbaux (non publiés) des auditions du chef du DDPS du 23.6.2016 (p. 6) et du chef Communication DDPS du 25.8.2016 (p. 5).

Procès-verbal (non publié) de la séance de la surveillance du projet DSA du 1.3.2016.

Le groupe de travail ayant auditionné le chef Projets et aide à la conduite du SG DDPS, il a renoncé à auditionner les personnes qui lui sont subordonnées, dont le collaborateur mentionné dans le présent rapport, qui venait tout juste de prendre ses fonctions et a été présenté à tort par certains médias comme étant un lanceur d'alerte (voir note de bas de page 9), ainsi que son prédécesseur.

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ne dressait pas une synthèse correcte de la discussion de la surveillance de projet55.

Il a ajouté qu'il n'en avait eu connaissance que lors de la préparation à son audition par le groupe de travail56.

La note parvient au chef du département, qui, selon ses propres déclarations, a ainsi vent pour la première fois, par la voie interne, de problèmes rencontrés par le projet DSA57.

Le 4 mars 2016, le suppléant du président de la surveillance et le responsable de projet présentent le projet DSA à la nouvelle secrétaire générale du DDPS, car celleci n'avait pu assister à la présentation du 2 février 2016. Sont également présents, pour le Secrétariat général, le chef Projets et aide à la conduite ainsi que son collaborateur qui a participé à la séance de la surveillance de projet du 1 er mars 2016 et rédigé la note d'information du 2 mars 2016, évoquée plus haut. Le contenu de la présentation est le même que celui qui a été communiqué au chef du DDPS et les documents utilisés sont eux aussi les mêmes. Les responsables du projet et le chef Projets et aide à la conduite du SG DDPS ont indiqué au groupe de travail DSA que la décision prise le 19 janvier 2016 avait également été évoquée lors de la présentation58, alors que la secrétaire générale du DDPS a expliqué qu'elle n'en avait pas été informée59. Les articles critiques des médias et la question de la capacité des armes à être engagées par tous les temps sont eux aussi évoqués, les responsables du projet demandant alors que la communication sur le projet, jusque-là passive, comme convenu, soit plus active.

Comme pour celle du 2 février 2016, le chef Projets et aide à la conduite du SG DDPS rédige à l'issue de la présentation du 4 mars 2016 un courriel succinct à l'intention des responsables du projet. Il y qualifie la présentation de réussie et expose les conclusions de la séance les plus importantes à ses yeux, notamment le souhait d'une communication plus active60.

Le 6 mars 2016, un avis de droit externe sur la collaboration et le contrat entre armasuisse et l'entrepreneur général Thales concernant la préparation de l'acquisition dans le cadre du projet DSA est remis au chef du DDPS. Demandé par son 55

56 57 58

59

60

Procès-verbal (non publié) de l'audition du président de la surveillance de projet du 6.7.2016 (p. 11); voir aussi procès-verbal (non publié) de la séance de la surveillance du projet DSA du 1.3.2016.

Procès-verbal (non publié) de l'audition du président de la surveillance de projet du 6.7.2016 (p. 11).

Procès-verbal (non publié) de l'audition du chef du DDPS du 23.6.2016 (p. 6).

Procès-verbaux (non publiés) des auditions du président de la surveillance de projet du 6.7.2016 (p. 4), du responsable du projet DSA du 31.8.2016 (p. 5) et du chef Projets et aide à la conduite du SG DDPS du 31.8.2016 (p. 8).

Procès-verbal (non publié) de l'audition de la secrétaire générale du DDPS du 25.8.2016 (p. 7). Dans sa réaction dans le cadre de la consultation de l'administration (non datée), la secrétaire générale précise: «Malgré mon expérience des projets informatiques, il ne m'était pas possible de poser à ce moment-là toutes les questions pertinentes sur un tel projet et surtout de prendre conscience de la portée des décisions prises par la surveillance du projet, notamment durant la séance du 19 janvier 2016.» Courriel du 4.3.2016 envoyé par le chef Projets et aide à la conduite du SG DDPS au suppléant du président de la surveillance et au responsable du projet DSA, avec copie au chef de l'armée, au chef de l'armement, au chef Communication DDPS et à un collaborateur de l'unité Projets et aide à la conduite du SG DDPS.

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prédécesseur en décembre 2015, il devait permettre de savoir si le projet était mené dans les règles de l'art et si les contrats permettaient de garantir pleinement les intérêts de la Confédération en qualité de mandant, avec la marge de manoeuvre qui est la sienne. Dans leur rapport, les experts soulignent que le contrat ne contient pas de clause susceptible de porter préjudice aux intérêts de la Confédération. Néanmoins, ils ajoutent qu'il n'est pas possible d'éliminer complètement la question d'un conflit d'intérêts chez Thales Suisse, qui a été chargée par armasuisse de la préparation de l'acquisition et dont la société mère produit des éléments des systèmes sur lesquels porte l'acquisition. Au vu des mesures prises pour éviter les conflits d'intérêts et étant donné l'état d'avancement du projet, les experts recommandent toutefois de poursuivre ce projet quoi qu'il en soit61.

Le chef du DDPS a indiqué au groupe de travail DSA que cet avis de droit n'avait fait que renforcer ses doutes quant à la conduite du projet62.

Le programme d'armement 2015+, qui contient le projet controversé de modernisation du Duro, est examiné par le Parlement du 7 au 18 mars 2016. Selon ses propres déclarations, le chef du DDPS est alors entièrement absorbé par ce sujet. Le chef Communication indique que c'est également ces jours-là que la décision de résilier le contrat de travail du chef de l'armée est prise et qu'il prépare la conférence de presse y afférente; il ajoute qu'une nouvelle séance sur le projet DSA avait été annoncée pour le 22 mars 201663.

Le 21 mars 2016, l'émission Rundschau de la télévision suisse alémanique s'adresse au DDPS pour lui demander par écrit des réponses à différentes questions portant sur le projet DSA. Le chef du DDPS déduit de ces questions que les médias disposent sur le projet d'informations que lui-même ignore. Il envisage derechef de suspendre le projet, mais décide d'attendre encore, la nuit portant conseil64. Dans le même temps, le chef Communication DDPS transmet les questions de Rundschau à armasuisse, qui lui adresse les réponses le lendemain matin à 9 heures65. Le 23 mars 2016, c'est-à-dire après avoir pris la décision de suspendre le projet, le chef du DDPS participe à l'émission Rundschau, durant laquelle on lui présente notamment des documents confidentiels émanant du DDPS.

61 62 63

64 65

Expertise juridique du 15 mars 2016 du professeur I. Häner, docteur en droit, et de R. Arpagaus, docteur en droit; voir en particulier les ch. 5, 6, 8, 14 et 25.

Procès-verbal (non publié) de l'audition du chef du DDPS du 23.6.2016 (p. 6).

Procès-verbal (non publié) de l'audition du chef Communication DDPS du 25.8.2016 (p. 6); réaction du chef Communication du 5.11.2016, dans le cadre de la consultation de l'administration.

Procès-verbal (non publié) de l'audition du chef du DDPS du 23.6.2016 (p. 7).

Procès-verbal (non publié) de l'audition du chef Communication DDPS du 25.8.2016 (p. 13).

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2.2.2

La décision de suspendre le projet

Le chef du DDPS décide de suspendre le projet DSA le 22 mars 2016. Tôt le matin, il informe de sa décision la secrétaire générale et le chef Communication DDPS et demande ensuite au consultant externe de se rendre au SG DDPS. A ce stade, il n'informe personne d'autre, donc en particulier pas non plus le chef Projets et aide à la conduite du SG DDPS. Après s'être entretenu brièvement avec la secrétaire générale, le chef Communication et le consultant externe, il fait part de sa décision aux responsables du projet ­ le chef de l'armement, le président de la surveillance de projet et le chef de l'armée ­ les uns après les autres, en présence des trois personnes citées plus haut. Les responsables du projet indiquent que cette décision les a surpris et que ni le chef du DDPS ni des collaborateurs du SG ne les avaient contactés avant qu'elle ne soit prise pour clarifier les questions en suspens ou évoquer les conséquences d'une telle suspension. La décision de suspendre le projet est rendue publique dans la soirée.

Dans son communiqué de presse, le DDPS annonce qu'il a décidé de suspendre le projet DSA en attendant de disposer d'une vue d'ensemble de la situation en matière de défense aérienne (DSA et avions de combat). Et de mentionner le groupe d'experts chargé d'élaborer un rapport sur l'évaluation et l'acquisition d'un nouvel avion de combat (voir plus haut, 24.2.2016)66.

Lors de son audition par le groupe de travail DSA, le chef du DDPS a utilisé l'expression «une décision de conduite politique» pour qualifier sa décision et il a souligné que celle-ci n'était pas fondée sur des éléments techniques. Il a expliqué qu'il avait douté du projet assez vite, que les critiques des médias, notamment, avaient encore renforcé ses doutes et qu'il n'avait pas le sentiment que les responsables du projet l'informaient de manière transparente. Il a précisé qu'il traversait alors une période de pression intense du fait des débats sur le projet de modernisation du Duro et que, en prenant cette décision, il avait voulu éviter une polémique similaire à celle qu'avait suscitée le Duro ou une nouvelle débâcle comme celle du Gripen. Dans des articles de presse parus plus tard, il avance également des considérations d'ordre financier pour justifier sa décision67: au moment où celle-ci a été prise, les coûts d'acquisition étaient estimés entre 700 millions et 1,1 milliard de francs (contre 700 millions dans le mandat de projet du 12.12.2014)68.

66 67 68

Communiqué de presse du DDPS du 22.3.2016.

Voir par exemple l'interview du chef du département dans l'Aargauer Zeitung du 29.8.2016.

Dans une feuille d'information du 21.1.2016 relative au projet et destinée au chef du DDPS, les prévisions tablent sur des coûts s'élevant à 820 millions de francs et, dans le message du 24.2.2016 sur l'armée 2016, ceux-ci sont chiffrés entre 700 millions de francs (première phase) et 1,1 milliard de francs (intégralité de l'acquisition). Dans le cadre de son enquête administrative, le chargé d'enquête du DDPS n'a trouvé aucun indice permettant d'aboutir aux chiffres évoqués dans les médias, de l'ordre de 2,5 à 3 milliards de francs (voir rapport du chargé d'enquête du 21.9.2016, p. 78 ). Dans le cadre de la consultation de l'administration, le chef du DDPS a indiqué que, dans son rapport, le chargé de l'enquête administrative évoque des coûts estimés à un montant situé entre 500 millions et 1,7 milliard de francs. Précisons que ce rapport explique de façon claire et détaillée qu'il s'agit de chiffres anciens, des années 2013 et 2014, qui ont été adaptés au fil du projet (voir rapport du chargé d'enquête, pp. 60 à 63).

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Au groupe de travail, le chef du département a indiqué qu'il avait été soumis à une pression intense durant cette période: le 22 mars 2016, des attentats ont été perpétrés à Bruxelles et des rumeurs circulaient déjà concernant le départ du chef de l'armée, annoncé officiellement le 23 mars 201669.

Lors de son audition, le chef du DDPS a souligné à diverses reprises qu'il avait pris la décision seul et qu'il en assumait seul la responsabilité. Il a précisé que c'est la raison pour laquelle il n'avait consulté préalablement ni les personnes responsables du projet au sein du SG, de l'armée et d'armasuisse, ni le chef de l'armée et le chef de l'armement70.

Quoi qu'il en soit, le chef du DDPS a déclaré qu'il savait où en était le projet DSA et comment devait se dérouler la suite du processus d'acquisition. En d'autres termes, il savait qu'il aurait été de nouveau informé, au plus tard en septembre, une fois tous les tests et évaluations achevés, et qu'il aurait alors toujours eu la possibilité de mettre un terme au projet DSA sans incidences autres sur les coûts.

2.2.3

Après la décision de suspendre le projet

Dans la journée du 22 mars 2016 et le jour suivant, le chef de l'armement et le chef de l'armée s'entretiennent une nouvelle fois avec le chef du DDPS pour l'informer des conséquences de la suspension du projet. Ils lui expliquent que les tests, qui sont en passe d'être achevés, devraient fournir de précieux renseignements pour l'évaluation finale des systèmes et le prient de les laisser les mener à leur terme. Concrètement, des tests de radars étaient prévus le 23 mars 2016: les systèmes radars étaient disponibles et fonctionnaient, les avions des Forces aériennes étaient prêts à décoller pour simuler des attaques et mesurer ainsi la performance des radars71. Or, le chef du DDPS rejette la demande du chef de l'armée et du chef de l'armement et exige l'arrêt immédiat des tests. Le président de la surveillance de projet, qui informe l'équipe chargée des tests, indique que celle-ci, consternée par cet ordre, exige et obtient du chef de l'armement la confirmation de la nouvelle72. Les tests prévus sont immédiatement annulés.

Le 23 mars 2016, le chef du DDPS participe à l'émission Rundschau de la télévision suisse alémanique. Il déclare qu'il voit alors pour la première fois le procès-verbal de la séance de la surveillance de projet du 19 janvier 2016 ainsi qu'une présentation en lien avec le procès-verbal, dans laquelle l'équipe de projet expose les avantages et les inconvénients des deux systèmes73.

69

70 71 72 73

Procès-verbal (non publié) de l'audition du chef du DDPS du 23.6.2016 (p. 13). Le chef de l'armée a indiqué, lors de la consultation sur le présent rapport, que c'était le chef du DDPS qui avait choisi la date pour l'annonce de la résiliation de son contrat de travail et que rien ne pressait à ce sujet.

Procès-verbal (non publié) de l'audition du chef du DDPS du 23.6.2016 (p. 8).

Procès-verbal (non publié) de l'audition du président de la surveillance de projet du 6.7.2016 (p. 8).

Procès-verbal (non publié) de l'audition du président de la surveillance de projet du 6.7.2016 (p. 8).

Présentation PowerPoint (non publiée) de l'équipe de projet intégrée DSA destinée à la séance de la surveillance de projet du 19.1.2016.

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Le 24 mars 2016 a lieu une réunion-bilan sur le projet DSA, à laquelle participent le chef du département, la secrétaire générale du DDPS, le chef Communication et le chef Projets et aide à la conduite ainsi que le chef de l'armée, le chef de l'armement, le commandant des Forces terrestres, le président de la surveillance et le responsable du projet DSA. Selon ses propres déclarations, c'est lors de cette réunion que le chef du DDPS prend connaissance pour la première fois du procès-verbal de la séance de la surveillance de projet du 19 janvier 201674.

Le 29 avril 2016, le DDPS annonce que le contrat passé avec l'entreprise générale Thales Suisse est résilié au 29 avril 2016. Il explique que, à la suite de la décision prise par le département le 22 mars 2016 de suspendre le projet DSA en attendant de disposer d'une vue d'ensemble adéquate de la situation en matière de défense aérienne et de réponses à des questions en suspens, le projet ne sera repris qu'à moyen, voire à long terme. Par conséquent, le département a décidé de renoncer à poursuivre les préparatifs d'achat menés par Thales Suisse et de résilier le contrat d'entreprise générale concerné. Il atteste en outre que Thales Suisse a livré un travail efficace et précise que la résiliation du contrat n'est pas due à des prestations lacunaires ou insatisfaisantes de l'entreprise75.

3

Appréciation

Le présent chapitre est consacré aux questions soulevées par les CdG lors de leur enquête. Le chapitre 3.1 apporte des réponses aux questions de savoir si, du point de vue des CdG, le chef du DDPS disposait d'une base d'information adéquate sur le projet et si les processus d'information et de prise de décision étaient appropriés au niveau du département. Dans le chapitre 3.2, les CdG évaluent le bien-fondé de la décision en tant que telle.

3.1

Adéquation des bases et des flux d'information

3.1.1

Questions de l'enquête

Les CdG ont demandé à leur groupe de travail d'apprécier la décision en soi (voir chap. 3.2), mais aussi et surtout de vérifier les bases sur lesquelles s'est fondée celleci ainsi que les processus décisionnels au niveau du département.

74 75

Procès-verbal (non publié) de l'audition du chef du DDPS du 23.6.2016 (p. 8).

Communiqué de presse du DDPS du 29.4.2016.

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Le groupe de travail a formulé la question principale suivante et trois questions subsidiaires: Lorsqu'il a pris sa décision, le chef du département disposait-il des informations pertinentes sur le projet et sur les conséquences d'une suspension du projet?

­

Les contacts et les flux d'information entre le Secrétariat général et les responsables du projet étaient-ils organisés clairement et de façon appropriée?

­

Ses subordonnés ont-ils informé le chef du département sur le projet DSA de façon adéquate et en temps voulu?

­

Celui-ci a-t-il pris les mesures appropriées pour accéder aux informations pertinentes?

3.1.2

Les faits pertinents

Information sur le projet Les auditions menées par le groupe de travail DSA ont montré que, entre janvier et mars 2016, les collaborateurs responsables du projet au sein du SG DDPS et, dans une large mesure, le consultant externe du DDPS étaient informés du projet en temps voulu et dans le détail76. Le consultant externe a indiqué à diverses reprises au chef du DDPS que le projet DSA pouvait rencontrer des problèmes; il lui a conseillé de s'informer à ce sujet auprès du chef de l'armée, du chef de l'armement et du président de la surveillance de projet77. Les collaborateurs compétents au sein du SG n'ont pas estimé nécessaire d'informer directement le chef du DDPS sur des points précis du projet, étant donné qu'ils considéraient que ce dernier était sur la bonne voie et que, par ailleurs, une présentation du projet avait été fixée au 2 février 2016.

C'est du reste à cette occasion que le chef du département a été informé personnellement sur le projet par le président de la surveillance et le chef de projet.

Les opinions divergent s'agissant de la question de savoir si, lors de la présentation, les responsables du projet ont informé le chef du DDPS de la décision prise par la surveillance du projet le 19 janvier 2016 et des aspects critiques du projet, notamment des performances limitées des systèmes et des questions encore en suspens concernant leur aptitude à être engagés par tous les temps. Le chef du département indique qu'il n'a pas été informé et qu'il considère la décision du 19 janvier 2016 comme incompatible avec l'instruction qu'il avait donnée le 18 janvier 2016. Le chef Communication a déclaré au groupe de travail que, lors de la présentation, la décision en faveur de l'option couplée a certes été évoquée, mais qu'il n'a pas été dit qu'elle avait été prise le 19 janvier 201678. A l'inverse, les responsables du projet déclarent qu'ils ont mentionné la décision du 19 janvier 2016 lors de la présentation.

76 77

78

Le chargé de l'enquête ordonnée par le DDPS est parvenu à la même conclusion (rapport du chargé d'enquête à l'intention du chef du DDPS du 21.9.2016, p. 7).

Précision apportée par le consultant externe le 26.10.2016 dans le cadre de la consultation de l'administration (procès-verbal [non publié] de l'audition du consultant externe du DDPS du 31.8.2016 [p. 8]).

Procès-verbal (non publié) de l'audition du chef Communication DDPS du 25.8.2016 (p. 8).

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Quoi qu'il en soit, ils ne classent pas cette décision parmi les décisions stratégiques, mais considèrent qu'il s'agit d'une décision intermédiaire normale, qui ne concerne que le projet et était indispensable pour la poursuite de l'évaluation. Cet avis est partagé par le chef de l'armée, le chef de l'armement, les collaborateurs responsables du projet au sein du SG DDPS et le consultant externe du DDPS79. La décision de fond ­ l'évaluation finale des systèmes, le choix du type d'appareil et la demande d'acquisition qui en aurait éventuellement découlé ­ n'aurait été prise qu'à la fin de l'évaluation. C'est en se fondant sur la demande d'acquisition que le chef du DDPS aurait alors dû décider, au plus tard en septembre 2016, soit de l'approuver, soit d'interrompre le projet.

Les CdG partent du principe que la décision du 19 janvier 2016 figurait, avec d'autres informations relatives au projet, sur l'affiche utilisée lors de la présentation80. En outre, le fait est que cette décision était connue des collaborateurs responsables du projet au sein du SG DDPS, puisque ceux-ci étaient présents à ladite réunion, dont ils ont reçu le procès-verbal. Selon les propos du président de la surveillance de projet et du consultant externe du DDPS, cette situation ­ c'est-à-dire la présence des collaborateurs du SG DDPS et l'envoi des procès-verbaux à ces derniers ­ avait pour but exprès que ses collaborateurs proches informent directement le chef du DDPS («petite voie hiérarchique») 81. Les collaborateurs concernés n'ont cependant pas identifié la nécessité d'en informer le chef du DDPS et ont expliqué en substance dans un courriel interne, après la réunion du 19 janvier 2016: «Il a été tenu compte de l'instruction du chef du DDPS de ne prendre aucune décision de fond préjugeant de décisions futures» [trad.]82.

Concernant l'information relative au projet, un autre fait semble important aux yeux du groupe de travail: bien que, manifestement, le chef du DDPS ait eu très vite des doutes quant au projet DSA et ait eu l'impression de ne pas être suffisamment informé, il n'a, hormis la discussion dans le cadre de la présentation du projet du 79

80

81 82

Le chargé de l'enquête administrative ordonnée par le DDPS considère lui aussi que la décision porte uniquement sur la marche à suivre (rapport du chargé d'enquête à l'intention du chef du DDPS du 21.9.2016, pp. 6 et 59).

Le président de la surveillance de projet, le responsable du projet DSA et le chef Projets et aide à la conduite ont indiqué au groupe de travail que l'affiche utilisée lors de la présentation avait été explicitée (courriel du président de la surveillance de projet au groupe de travail du 17.8.2016, procès-verbaux [non publiés] des auditions du responsable de projet du 31.8.2016 [p. 4] et du chef Projets et aide à la conduite du 25.8.2016 [p. 8]). De son côté, le chef du DDPS a expliqué au groupe de travail qu'il n'avait pas reçu l'affiche, ou en tout cas que celle-ci ne figurait pas dans son dossier sur le projet. Il a ajouté qu'il ne pouvait toutefois exclure qu'elle lui ait été montrée lors de la présentation du 2.2.2016 (courriel envoyé le 28.11.2016 par le chef du DDPS au groupe de travail).

Lors de son audition par le groupe de travail, le chef Communication DDPS a précisé qu'il ne pouvait affirmer avec certitude que l'affiche avait fait l'objet d'explications; mais, par la suite, il a également dit qu'il n'avait jamais vu l'affiche sous cette forme (procès-verbal [non publié] de l'audition du chef Communication DDPS du 25.8.2016 [p. 7], réaction du chef Communication du 5.11.2016 dans le cadre de la consultation de l'administration).

Procès-verbaux (non publiés) des auditions du président de la surveillance de projet du 6.7.2016 (p. 5) et du consultant externe du DDPS du 31.8.2016 (p. 4).

Courriel adressé le 20.1.2016 par le collaborateur de l'unité Projets et aide à la conduite du SG DDPS au chef Projets et aide à la conduite du SG DDPS et au consultant externe du DDPS.

3343

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2 février 2016, rien entrepris ni ordonné pour recevoir plus d'informations des personnes qui lui sont subordonnées au SG ainsi que de l'armée et d'armasuisse ou encore de son prédécesseur. Au cours de ses auditions, le chef du DDPS a souligné qu'il avait vite eu des doutes quant au projet et que ceux-ci n'avaient fait que croître avec les articles de presse et lorsque le projet de modernisation du Duro faisait débat. Il a indiqué qu'il en avait fait part au chef Communication DDPS à deux reprises, mais que, en revanche, il ne s'était entretenu avec personne du projet DSA ni ne s'était fait conseiller à ce sujet. Enfin, il a conclu qu'il avait pris la décision de suspendre le projet seul et en toute indépendance83. Ces propos ont été confirmés par le chef de l'armée, lequel a indiqué au groupe de travail que le chef du DDPS ne lui avait jamais fait part de ses doutes quant au projet DSA, ni ne l'avait consulté avant de suspendre celui-ci84. Le chef du DDPS a également renoncé à contacter son prédécesseur, l'actuel chef du DFF, pour lui faire part de ses doutes et lui poser des questions concernant le projet DSA, alors qu'il l'a fait pour des questions portant sur d'autres projets85.

Le chef Communication DDPS et le consultant externe, qui ont conseillé le chef du département pour la formulation de son instruction du 18 janvier 2016, ont expliqué au groupe de travail que, par cette instruction, le chef du DDPS visait spécialement le projet DSA, car il avait appris que des décisions le concernant étaient imminentes86. Ils ont ajouté que c'était la raison pour laquelle le chef du département avait décidé de charger le consultant externe du DDPS d'informer directement le président de la surveillance de projet de l'instruction, puis avait vérifié auprès de ce même consultant que l'instruction était respectée87.

Il ressort de cet exposé des faits que, peu de temps après son entrée en fonction, le nouveau chef du DDPS avait déjà le projet DSA dans sa ligne de mire. Or, il n'a pris aucune mesure particulière: il n'a pas exigé de précisions de la part des collaborateurs responsables du projet au sein du SG ou des personnes responsables au sein de l'armée et d'armasuisse. Il a certes exprimé ses réserves et ses doutes, et posé des questions, lors de la présentation du projet, le 2 février 2016. Cependant,
aucun signe ne permettait aux responsables du projet et aux collaborateurs compétents au sein du SG de conclure que les réponses ne le satisfaisaient pas et qu'elles n'avaient pas permis de balayer ses doutes; ou alors ils n'en avaient pas pleinement conscience. Seule personne à qui le chef du département a fait part de ses doutes persis83 84

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87

Procès-verbal (non publié) de l'audition du chef du DDPS du 23.6.2016 (p. 8).

Procès-verbaux (non publiés) de l'audition du chef de l'armée du 6.7.2016 (pp. 5 et 6); réaction du chef de l'armée du 30.10.2016, dans le cadre de la consultation de l'administration.

Lettre du chef du DFF au groupe de travail du 23.12.2016; lettre du chef du DDPS au groupe de travail du 12.1.2017.

Le groupe de travail n'a pu clairement identifier l'origine de cette information. Le chef du département renvoie au chef Communication DDPS qui, lui, fait mention d'un article publié le 18.1.2016 sur le site Internet du groupe Giardino. Or, une recherche actuelle sur ledit site permet de ne trouver qu'un article daté du 19.1.2016 (http://gruppegiardino.ch/?p=10209; uniquement en allemand). Le chef Communication suppose que la contribution qu'il a consultée le 18.1.2016 a été supprimée ou mise à jour pour que l'indiscrétion prématurée soit oubliée (voir aussi chap. 2.2.1, note de bas de page 27).

Procès-verbal (non publié) de l'audition du consultant externe du DDPS du 31.8.2016 (p. 5).

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tants, le chef Communication DDPS s'est adressé, après la parution d'un article critique dans le Zentralschweiz am Sonntag du 14 février, au chef de l'armement et au président de la surveillance de projet, qui lui ont assuré que ces critiques n'étaient pas fondées. Il a alors transmis cette réponse au chef du DDPS. Il a indiqué que, audelà de cette information au chef du département, il n'avait pas cru nécessaire d'en faire plus ni de recommander à celui-ci de demander des clarifications supplémentaires (voir paragraphe suivant)88.

Manque de confiance Durant les auditions du groupe de travail, plusieurs personnes interrogées ont expliqué que, si le chef du DDPS n'avait pas fait part de ses réserves et de ses questionnements aux responsables du projet, c'était parce qu'il ne se sentait pas suffisamment informé par eux et ne leur faisait pas entièrement confiance. Selon les mêmes personnes, cette réaction du chef du département reposait notamment sur le fait que les responsables du projet, s'ils conduisaient certes bien le projet et respectaient les procédures, n'étaient pas assez explicites avec lui concernant les problèmes et les risques89. Elles ont expliqué à ce sujet que, souvent, l'administration ne se rend pas compte que les questions techniques ­ en l'espèce les performances limitées des systèmes ­ sont susceptibles d'avoir une portée politique et donc de revêtir de l'importance pour le chef du département. Et d'ajouter qu'il y a fréquemment des groupes aux intérêts divergents au sein du DDPS, plus précisément au sein de l'armée, et que cette situation favorise les indiscrétions, ce qui s'est avéré être le cas tant pour le dossier d'acquisition du Gripen que pour le projet DSA. En l'espèce, les responsables du projet n'ont pas pris la mesure de l'existence d'un camp, au sein des Forces aériennes, qui voulait abandonner le renouvellement de la défense sol-air au profit de l'acquisition de nouveaux avions de combat et qui pouvait être tenté de faire échec au projet DSA en orchestrant certaines indiscrétions90.

Le chef du DDPS lui-même a motivé la suspension du projet DSA devant les responsables du projet et le groupe de travail en arguant qu'il ne se sentait pas informé de manière complète et transparente. Il a toutefois indiqué au groupe de travail et aux médias que le président de la
surveillance de projet et le chef de l'armement avaient toute sa confiance91. Le chef Communication DDPS a du reste rapporté que ceux-ci avaient sollicité la confiance du chef du département et que ce dernier la leur avait accordée92.

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90

91 92

Procès-verbal (non publié) de l'audition du chef Communication DDPS du 25.8.2016 (pp. 4 et 12).

Procès-verbal (non publié) de l'audition du consultant externe du DDPS du 31.8.2016 (pp. 7, 8 et 12), procès-verbal (non publié) de l'audition du chef Projets et aide à la conduite du 25.8.2016 (p. 13), procès-verbal (non publié) de l'audition du président de la surveillance de projet du 6.7.2016 (p. 17).

Procès-verbal (non publié) de l'audition du consultant externe du DDPS du 31.8.2016 (p. 13), procès-verbal (non publié) de l'audition de la personne chargée de l'enquête administrative du 26.9.2016 (p. 14).

Procès-verbal (non publié) de l'audition du chef du DDPS du 23.6.2016 (p. 12), interview du chef du DDPS publiée dans le Tages-Anzeiger du 9.4.2016.

Procès-verbal (non publié) de l'audition du chef Communication DDPS du 31.8.2016 (p. 13).

3345

FF 2017

Il nous faut, dans ce contexte, nous arrêter sur le rôle particulier joué par le chef Communication DDPS. Ayant fait son entrée au Secrétariat général à la demande du chef du DDPS lui-même, il a indiqué au groupe de travail, lors de son audition, qu'il était quasiment le seul collaborateur personnel du chef du DDPS à l'époque de l'entrée en fonction de ce dernier et qu'il était également le seul au sein du département à dialoguer avec lui dans un climat de confiance 93. Le chef du DDPS a fait en sorte que le chef Communication DDPS participe à toutes les réunions importantes, en particulier aux présentations des principaux projets, et lui a fait part rapidement de ses doutes quant au projet DSA. Bien que le chef Communication ait été conscient de son rôle particulier et de sa fonction «hybride» de responsable de la communication et de «collaborateur quasi personnel» du chef du DDPS, et bien que ce dernier ait évoqué à deux reprises (le 26 février 2016 et le 22 mars 2016), devant lui, ses doutes quant au projet DSA, il n'a pas estimé nécessaire d'entreprendre quoi que ce soit, hormis les clarifications, déjà évoquées, à l'issue de la parution de l'article critique dans le Zentralschweiz am Sonntag du 14 février 201694. Devant le groupe de travail DSA, il a souligné que les conseils qu'il prodiguait au chef du DDPS portaient exclusivement sur la communication relative au projet et que, ayant eu l'impression que celui-ci se déroulait bien, il avait lui aussi été surpris par la décision de le suspendre95.

Il est également ressorti des auditions menées par le groupe de travail DSA que la secrétaire générale du DDPS, qui a pris ses fonctions le 1 er février 2016, n'a pas joué de rôle déterminant dans la décision de suspendre le projet. Or, l'une des principales missions d'un secrétaire général consiste à conseiller le chef du département 96. De plus, étant donné que le chef du département en personne avait demandé la nomination de la secrétaire générale à ce poste, laquelle connaissait parfaitement l'administration fédérale du fait de ses précédentes activités, celle-ci doit également être considérée comme une personne de confiance. Pourtant, le chef du DDPS s'est à peine entretenu avec elle du projet DSA et l'a encore moins consultée avant de prendre sa décision97. La secrétaire générale a indiqué aux
CdG qu'elle avait eu elle aussi certains doutes quant au projet, d'autant plus que des questions étaient restées en suspens, de son point de vue, après la présentation du 4 mars 2016. Cependant, elle n'a pas jugé nécessaire d'intervenir étant entendu que le projet aurait toujours pu être arrêté au plus tard en septembre98.

93

94 95 96 97 98

Procès-verbal (non publié) de l'audition du chef Communication DDPS du 31.8.2016 (pp. 3 et 4). Lors de la consultation de l'administration, le chef Communication DDPS a précisé ces déclarations et indiqué qu'elles ne renvoyaient qu'aux collaborateurs personnels, étant donné que ceux-ci n'étaient arrivés que plus tard. Il a ajouté que le chef du DDPS pouvait également dialoguer dans un climat de confiance avec d'autres personnes, par exemple avec le chef de l'armée, le chef de l'armement et le consultant externe. Or, il est ressorti des auditions menées par le groupe de travail que celui-là n'avait pas échangé avec ces personnes, tout au moins pas au sujet du projet DSA.

Voir chap. 2.2.1.

Procès-verbal (non publié) de l'audition du chef Communication DDPS du 25.8.2016 (pp. 3,4, 6 et 15).

Voir art. 41, al. 1, LOGA, RS 172.010, et art. 5 Org-DDPS, RS 172.214.1.

Procès-verbaux (non publiés) des auditions du chef du DDPS du 6.7.2016 (p. 7) et de la secrétaire générale du DDPS du 25.8.2016 (p. 9).

Procès-verbal (non publié) de l'audition de la secrétaire générale du DDPS du 25.8.2016 (pp. 6 et 8).

3346

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3.1.3

Appréciation

Selon les CdG, les informations que le groupe de travail a recueillies en menant les auditions et en étudiant les documents sur le projet montrent que, si les responsables du projet ont bien informé le département de manière appropriée, certaines informations importantes n'ont manifestement pas été communiquées au chef du DDPS ou ne l'ont été que partiellement. Les CdG ont constaté avec le recul que le chef du DDPS n'avait pas suffisamment confiance dans les responsables du projet.

Information sur le projet Les flux d'information entre les responsables du projet au sein de l'armée et d'armasuisse, d'une part, et du SG DDPS, d'autre part, étaient clairement définis.

Du point de vue des CdG, les collaborateurs responsables du projet au sein du SG DDPS étaient informés en temps voulu et de manière complète des principaux avancements du projet. Certes, le chef du département n'était pas informé dans les mêmes proportions, mais ce degré d'information était adapté à son échelon. Il est également apparu que celui-ci avait l'impression de ne pas être suffisamment informé et qu'il n'avait pas suffisamment confiance dans les informations reçues (voir cidessous les explications sur la problématique de la confiance). Selon les CdG, on peut se demander si, globalement, le flux d'information était régi de manière appropriée en général et au sein du SG. Dans le même temps, il convient de souligner que ni les responsables du projet au sein de l'armée et d'armasuisse ni les collaborateurs chargés du projet au sein du SG ne savaient que le chef du DDPS n'était pas satisfait des informations reçues. Celui-ci avait certes émis des doutes et posé des questions sur le projet lors de la présentation du 2 février 2016. Néanmoins, il n'avait pas exigé d'informations complémentaires, ni de la part des responsables du projet, ni du chef de l'armée et du chef de l'armement, qui, en raison de leur fonction, étaient les premiers à devoir le conseiller. Il apparaît avec le recul qu'à la fin de la présentation, le chef du DDPS n'était toujours pas satisfait, selon ses déclarations, de l'information reçue, alors que les autres participants partaient du principe que celle-ci était complète et suffisante et ont déclaré qu'ils n'avaient rien remarqué des doutes persistants du chef du DDPS.

Globalement, les CdG considèrent par
conséquent que les responsables du projet ont rempli leur devoir d'information (obligation de fournir l'information) en informant en permanence et de manière exhaustive les collaborateurs compétents au sein du SG et en présentant le projet au chef du DDPS le 2 février 2016. Si ce dernier considérait que ces informations n'étaient pas suffisantes, il lui revenait de le dire clairement et d'exiger un complément d'informations (obligation d'aller chercher l'information).

Les CdG soulignent à ce sujet que le chef du DDPS dit n'avoir entendu parler de la décision de la surveillance de projet du 19 janvier 2016 que lors de la réunion-bilan du 23 mars 2016, précisant que cette décision était à ses yeux en contradiction avec son instruction du 18 janvier 2016. Différentes personnes interrogées ont indiqué que, par cette instruction, le chef du département visait explicitement le projet DSA, car il avait appris qu'une décision le concernant était imminente. Dans ce contexte, on aurait été en droit d'attendre de lui qu'il s'assure que son instruction était respec3347

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tée par les responsables du projet et qu'il se renseigne à ce sujet (par ex. lors de la présentation du projet du 2 février 2016). Les CdG considèrent en outre comme incompréhensible le fait que, apparemment, ni l'instruction ni son application par les responsables du projet DSA n'aient été abordées au cours de l'un des entretiens réguliers (comptes rendus) que le chef du département a eus avec le chef de l'armée ou avec le chef de l'armement.

Enfin, et ce point est déterminant pour les CdG, le chef du DDPS, qui ne se sentait pas informé de manière appropriée par les responsables du projet, aurait pu et/ou dû prendre différentes mesures alternatives pour obtenir des réponses aux questions qu'il se posait sur le projet et avoir accès aux informations importantes pour lui. Il aurait notamment dû confronter à ses doutes et aux critiques des médias les collaborateurs responsables du projet au sein du SG DDPS ou les responsables du projet, y compris le chef de l'armée et le chef de l'armement, dont l'une des missions est, par définition, de le conseiller. Surtout, il aurait dû exiger d'eux des éclaircissements.

Comme il l'a fait pour d'autres dossiers, il aurait également pu contacter son prédécesseur, qui avait lancé le projet DSA et l'avait suivi pendant longtemps. Or, il ne l'a fait à aucun moment et a suspendu le projet sans consulter préalablement les responsables au sein de son département, ce que les CdG considèrent comme inapproprié.

Même si, au final, le chef de département est le responsable suprême au sein du département et est libre de ses décisions, les CdG sont d'avis que cela ne l'exonère pas de la responsabilité, voire de l'obligation (de diligence) qu'il a, avant de prendre une décision d'une telle portée, de consulter les experts et les personnes compétentes qui lui sont subordonnées, en l'occurrence ses collaborateurs responsables du projet au sein du SG et les responsables de l'armée et d'armasuisse. Puisqu'il ne l'a pas fait, les CdG ne peuvent pas établir s'il avait pleinement conscience de toutes les conséquences de sa décision ­ financières et légales ou éventuellement en termes de sécurité de l'espace aérien ­ ou s'il en a tenu compte de manière adéquate.

Manque de confiance Devant le groupe de travail DSA, le chef du DDPS a justifié sa décision de suspendre le projet en
arguant (principalement) qu'il ne se sentait pas suffisamment informé par les responsables du projet. Plusieurs personnes interrogées ont du reste indiqué qu'il ne faisait pas confiance à ceux-ci. Comme l'ont mentionné de façon convaincante certaines personnes auditionnées, cette problématique tient également au fait que les responsables du projet ont probablement manqué de clarté lorsqu'ils ont évoqué devant le chef du DDPS les problèmes et les risques du projet, car ils considéraient que ceux-ci étaient d'ordre purement technique et ils ne se sont pas rendu compte qu'ils pouvaient également avoir une portée politique. De plus, les auditions menées par le groupe de travail ont clairement fait ressortir que le projet DSA était contesté au sein des Forces aériennes; plus précisément, il existait un camp, en leur sein, qui voulait faire échec au renouvellement de la défense sol-air au profit de l'acquisition de nouveaux avions de combat, le cas échéant à l'aide d' indiscrétions.

Les CdG condamnent ces indiscrétions et regrettent que les investigations menées à ce sujet par la justice militaire n'aient rien donné. Par ailleurs, elles sont d'avis, avec le recul, que les responsables du projet auraient dû informer le chef du DDPS des 3348

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problèmes et risques (potentiels) de façon plus active. En l'espèce, ces circonstances ont certainement contribué en partie à susciter la méfiance du chef du DDPS. Par ailleurs, considérant les divergences existantes au sein de l'armée (en l'occurrence concernant les cas Gripen et DSA), les CdG s'interrogent sur le fait que les responsables du projet n'aient pas été conscients de l'existence de camps opposés au sein des Forces aériennes et n'en aient pas tenu compte.

Aux yeux des CdG, toutes ces explications ne justifient toutefois pas de façon compréhensible et appropriée la suspension du projet. Il a déjà été expliqué plus haut que le chef du DDPS aurait pu prendre différentes mesures alternatives pour remédier à un problème qu'il avait lui-même identifié: le manque d'information. De même, diverses mesures pertinentes auraient permis de résoudre le problème de la confiance; la suspension du projet n'en fait cependant pas partie.

En dépit des tentatives d'explications exposées plus haut, les CdG n'ont finalement pas réussi à savoir exactement sur quoi se fondait le manque de confiance du chef du département envers les responsables du projet. Les auditions du groupe de travail ont en effet montré que, manifestement, ce problème avait surgi très tôt, c'est-à-dire dès la communication de l'instruction du 18 janvier 2016, soit seulement deux semaines environ après l'entrée en fonction du chef du DDPS et, quoi qu'il en soit, avant sa première prise de contact avec les responsables du projet. Rétrospectivement, on peut dire que cette méfiance du chef du département n'était pas fondée au regard des faits: les responsables du projet n'ont pas cherché à dissimuler des informations et ils ont informé le SG, plus précisément de proches collaborateurs du chef du DDPS, sur le projet DSA en temps voulu et de manière exhaustive. Or, certaines informations importantes n'ont visiblement pas été communiquées au chef du département ou ne l'ont été que partiellement.

Les CdG sont d'avis que le manque de confiance du chef du DDPS est en lien avec le rôle ambigu du chef Communication DDPS, à savoir avec sa fonction «hybride» de responsable de la communication et de personne de confiance du chef du département. Etant donné que ce dernier évoquait avec son chef Communication des sujets et des problèmes qui ne relevaient
pas directement de la communication, par exemple ses doutes quant au projet DSA, le chef Communication DDPS se retrouvait dans un rôle de conseiller qui allait au-delà des questions de communication, ce dont il semblait du reste être conscient. Si celui-ci a certes souligné devant le groupe de travail DSA qu'il avait toujours perçu son rôle du point de vue de la communication et qu'il n'avait prodigué des conseils que dans ce domaine, les CdG ne comprennent pas qu'il n'ait pas conseillé à son supérieur d'engager un dialogue avec le chef de l'armée et le chef de l'armement ainsi que, éventuellement, avec les responsables du projet afin d'évoquer ses doutes et les questions en suspens. Les CdG pensent certes que ce conseil aurait été pertinent du point de vue de la communication au plus tard après la parution des articles critiques dans les médias, mais elles ont également conscience que le chef Communication venait tout juste à l'époque de prendre ses fonctions et que le chef du DDPS était nouveau lui aussi.

Pour les CdG, le rôle de la secrétaire générale soulève lui aussi des questions. Il est ressorti des auditions du groupe de travail DSA que le chef du DDPS ne s'était quasiment pas entretenu avec celle-ci de ses doutes quant au projet et ne l'avait pas plus consultée avant de prendre sa décision. Inversement, la secrétaire générale, à 3349

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qui des aspects du projet avaient semblé critiques selon ses dires, n'a pris aucune initiative. Elle a justifié cette passivité en avançant qu'elle savait que le projet aurait encore pu être arrêté au plus tard en septembre. Les CdG n'ont pu établir clairement si la secrétaire générale, qui, rappelons-le, était entrée en fonction le 1er février 2016 seulement, aurait dû constater elle-même la nécessité d'intervenir ou si elle pouvait s'attendre à ce que le chef du département lui fasse part de sa perception des problèmes et l'associe à la réflexion en cas de questions importantes. Le fait est que, pour une décision de la portée de celle qui a été prise dans le cas du projet DSA, la secrétaire générale, du fait de sa fonction, aurait dû être impérativement associée au processus par le chef du DDPS.

3.1.4

Conclusion intermédiaire

L'enquête des CdG a montré que le chef du département et ses collaborateurs responsables du projet au sein du SG avaient été informés sur le projet en temps voulu et de manière appropriée. Vu l'état d'avancement du projet ­ le chef du département n'aurait dû prendre une décision quant à la poursuite du projet et à l'acquisition d'un système de DSA qu'à l'issue de l'évaluation, au plus tard en septembre 2016 ­, les CdG considèrent comme compréhensible et adapté à l'échelon le fait que les collaborateurs compétents au sein du SG et les responsables du projet n'ont pas transmis au chef du DDPS des informations aussi détaillées que celles qu'ils avaient euxmêmes reçues.

Or, devant le groupe de travail DSA, le chef du DDPS a motivé sa décision de suspension en arguant qu'il ne se sentait pas suffisamment informé et qu'il avait des doutes et des questions concernant le projet. Pour les CdG, le fait qu'il ait suspendu le projet en s'appuyant sur ses doutes au lieu d'en faire part aux responsables du projet ou à ses collaborateurs responsables au sein du SG pour exiger d'eux des éclaircissements n'est pas compréhensible. Elles ne trouvent par ailleurs cette approche ni appropriée ni opportune.

Les CdG ne contestent pas le fait que, sous certaines conditions, le chef de département peut, dans le cadre de sa responsabilité de conduite, décider de suspendre un projet tel que le projet DSA. Elles reconnaissent également que les circonstances concrètes doivent être prises en compte. Il s'agit notamment des indiscrétions et du fait que le chef du département et des collaborateurs importants venaient tout juste de prendre leurs fonctions. Il est par ailleurs ressorti de certaines déclarations faites lors des auditions que les responsables du projet n'avaient pas, face au chef du département, thématisé de façon suffisamment proactive des problèmes potentiels.

Ces circonstances n'exonèrent cependant pas le chef du DDPS de l'obligation qu'il a, avant de prendre une décision, de s'informer dans le détail des conséquences possibles de cette décision et de veiller à ce que celle-ci soit aussi fondée objectivement jusqu'à un certain point. De même, les circonstances ne peuvent justifier le fait qu'en prenant sa décision en mars, le chef du département a anticipé sans nécessité, puisqu'il aurait pu de toute façon
décider au plus tard en septembre, sur la base des résultats complets de l'évaluation des systèmes, de la poursuite du projet (voir ch. 3.2.2 et 3.2.3). Enfin, il aurait également pu prendre des mesures alternatives.

3350

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3.2

Bien-fondé de la décision

3.2.1

Questions de l'enquête

Chargé par les CdG d'examiner et d'apprécier la décision de suspendre le projet DSA, le groupe de travail a formulé la question principale suivante et trois questions subsidiaires: La décision de suspendre le projet est-elle compréhensible et appropriée?

­

Que penser du moment choisi pour la prise de décision?

­

Comment juger le motif officiel de la décision (établissement d'une vue d'ensemble complète de la situation en matière de défense antiaérienne et meilleure coordination entre le projet DSA et l'acquisition de nouveaux avions de combat)?

­

Que penser des conséquences de la décision?

3.2.2

Les faits pertinents

Le moment Les travaux du groupe de travail ont montré que le chef du DDPS avait suspendu le projet DSA à un moment où l'évaluation des systèmes était encore en cours et où les résultats des systèmes testés n'étaient pas encore disponibles. Le chef du département connaissait la situation, car, après la publication interne de la décision de suspension, le chef de l'armée et le chef de l'armement ­ qui, selon leurs propos, ont été abasourdis par cette décision ­ ont évoqué les tests en cours et leur importance pour l'évaluation. Toujours selon leurs déclarations, ainsi que d'après celles du chef du département, ils ont clairement expliqué qu'une interruption ne permettrait pas de mener à terme l'évaluation et empêcherait donc l'appréciation des systèmes et de leurs coûts.

Le chef du DDPS savait également qu'il avait la possibilité d'arrêter le projet DSA au plus tard en septembre 2016 sans incidences autres sur les coûts, une fois l'évaluation terminée. A ce moment-là, il aurait en effet reçu la proposition des responsables du projet et du chef de l'armement et aurait pu décider d'intégrer ou non dans le programme d'armement 2017 les systèmes retenus99.

L'enquête menée par le groupe de travail indique par ailleurs que la décision de suspendre le projet et le moment auquel elle a été prise ont été influencés par les indiscrétions et les critiques parues dans certains médias. Elle montre que le chef du DDPS a envisagé pour la première fois de suspendre le projet après la parution de l'article critique du Zentralschweiz am Sonntag, le 14 février 2016, puis a définitivement tranché le lendemain de la réception, le 21 mars 2016, de questions critiques soumises par l'équipe de l'émission Rundschau de la télévision suisse alémanique.

99

Procès-verbal (non publié) de l'audition du chef du DDPS du 23.6.2016 (pp. 11 et 22)

3351

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Ajoutons que ces deux contributions ainsi que l'information mise en ligne par le groupe Giardino le 18 et le 19 janvier 2016 reposaient toutes sur des indiscrétions100.

Motivation Comme évoqué dans la chronologie, la décision de suspendre le projet a été motivée dans le communiqué de presse par le fait que le département voulait tout d'abord disposer d'une vue d'ensemble complète de la défense antiaérienne (DSA et avions de combat)101. Lors de son audition par le groupe de travail, le chef du DDPS a en revanche souligné que sa décision était «une décision de conduite politique» et ne reposait pas sur des aspects techniques. Il a également indiqué à plusieurs reprises qu'il avait ainsi voulu éviter une polémique similaire à celle qu'avait suscitée le Duro. Le chef Communication a expliqué que le chef du DDPS avait également invoqué des considérations d'ordre financier, car il avait entendu parler de différentes estimations des coûts du projet102. Or, les arguments avancés par le chef du DDPS lors de son audition par le groupe de travail DSA ne portaient pas sur des considérations de cet ordre ou sur l'historique du projet103. De même, celui-ci n'a évoqué que de manière accessoire l'avis de droit sur la collaboration avec Thales (voir ch. 2.2.1)104.

Lors de leurs auditions par le groupe de travail, les responsables du projet au sein de l'armée et d'armasuisse ont été unanimes: devant eux, le chef du département n'avait pas motivé sa décision avec clarté ou en arguant de la nécessité d'avoir une vue d'ensemble de la situation105. Les dires du consultant externe du DDPS lors de son audition par le groupe de travail corroborent d'ailleurs cette version: ce serait lui qui aurait suggéré de communiquer la décision en avançant l'argument de la volonté de se moderniser et de disposer d'une vue d'ensemble, et non en mettant l'accent sur les problèmes106. Le chef Communication a toutefois fait remarquer que le chef du DDPS avait évoqué devant lui la vue d'ensemble et la coordination entre l'acquisition d'un système DSA et celle d'un nouvel avion de combat dès leur entretien du 26 février 2016107.

Les avis divergent s'agissant de la question de la nécessité de disposer d'une nouvelle vue d'ensemble. En août 2015, l'ensemble du Conseil fédéral considérait encore que l'actuelle vue d'ensemble de la défense antiaérienne ­ c'est-à-dire le concept pour la sécurité à long terme de l'espace aérien, qu'il avait adopté le 27 août 100 101 102 103 104

105

106 107

Voir chap. 2.2.1, en particulier la note de bas de page 27.

Communiqué de presse du DDPS du 22.3.2016.

Procès-verbal (non publié) de l'audition du chef Communication du 25.8.2016 (p. 5).

Quelques mois après la suspension du projet, néanmoins, le chef du DDPS évoque dans une interview des considérations d'ordre financier (voir Aargauer Zeitung du 29.8.2016).

Le chef du DDPS indiqué lors des auditions que l'avis de droit avait renforcé ses doutes quant au projet, mais qu'il n'avait pas été déterminant dans sa décision (procès-verbal [non publié] de l'audition du chef du DDPS du 23.6.2016 [pp. 6 et 20]).

Procès-verbaux (non publiés) des auditions du chef de l'armée du 6.7.2016 (p. 11), du chef de l'armement du 6.7.2016 (p. 6) et du président de la surveillance de projet du 6.7.2016 (p. 7).

Procès-verbal (non publié) de l'audition du consultant externe du DDPS du 31.8.2016 (p. 14).

Procès-verbal (non publié) de l'audition du chef Communication DDPS du 25.8.2016 (p. 5).

3352

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2014 ­ gardait toute son actualité et était suffisante108. Devant le groupe de travail, le chef de l'armée et le commandant des Forces aériennes ont estimé que l'actuelle vue d'ensemble était d'actualité et appropriée. De plus, ils ne considèrent pas qu'il soit indispensable ou approprié, du point de vue technique, de mieux coordonner les deux acquisitions, même s'ils ont souligné devant le groupe de travail que les deux systèmes étaient nécessaires, plus précisément que la sécurité ne pouvait être assurée que par une combinaison d'un système de défense sol-air et d'un avion de combat109. Le chef du DDPS a tenu des propos similaires dans les médias 110.

Conséquences Conséquence directe de la décision de suspendre le projet, les tests qui étaient en cours ont dû être interrompus, sur ordre exprès du chef du département. Il n'est donc plus possible de disposer des données qui auraient permis une évaluation complète des systèmes devant être éventuellement achetés (y compris l'évaluation de leurs capacités et de leurs limites ainsi que les chiffres précis sur les coûts d'acquisition).

Cependant, comme l'évaluation était déjà très avancée lorsque la décision a été prise, l'entreprise générale a facturé, pour les dépenses qu'elle avait déjà effectuées, une somme à peu près équivalente au montant initialement négocié pour son indemnité. En d'autres termes, les montants budgétés ont été dépensés sans que la prestation convenue soit fournie ou que les résultats définitifs et complets de l'évaluation, incluant des données fondées sur les coûts définitifs d'acquisition, soient disponibles.

Le retard pris dans l'acquisition de nouveaux systèmes pour la défense sol-air est une autre conséquence de la décision de suspension. La lacune de sécurité qui, selon le Conseil fédéral, existe d'ores et déjà dans le domaine de la défense aérienne, à savoir la défense contre des cibles de moyenne portée, va donc subsister encore un certain temps111. Etant donné que les résultats de l'évaluation ne sont pas disponibles, les systèmes analysés ne peuvent pas être appréciés dans la nouvelle vue d'ensemble.

3.2.3

Appréciation

Moment choisi Les CdG considèrent que le moment choisi pour la suspension est incompréhensible et erroné. En effet, le chef du département savait ­ le chef de l'armée et le chef de l'armement avaient explicitement attiré son attention là-dessus ­ qu'une suspension ne permettrait pas de mener à terme l'évaluation et empêcherait donc toute apprécia108

Avis du Conseil fédéral du 19.8.2015 sur la motion 15.3709 (Nouvelle stratégie pour les Forces aériennes).

109 Procès-verbal (non publié) de l'audition du chef de l'armée du 6.7.2016 (p. 10); position écrite du chef des Forces aériennes du 15.7.2016 à l'intention du groupe de travail DSA.

110 Voir interview du chef du DDPS dans le Tages-Anzeiger du 9.4.2016.

111 Concept pour la sécurité à long terme de l'espace aérien, rapport du Conseil fédéral du 27.8.2014 (p. 20); procès-verbal (non publié) de l'audition du chef de l'armée du 6.7.2016 (p. 10).

3353

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tion des systèmes. Par ailleurs, et il l'a lui-même indiqué, il savait qu'il aurait eu la possibilité d'interrompre le projet jusqu'en septembre 2016.

Auditionné par le groupe de travail, le chef du DDPS a mentionné à plusieurs reprises la pression intense qu'il ressentait du fait des discussions et des critiques concernant la modernisation du Duro, précisant qu'il avait voulu à tout prix éviter une polémique similaire à celle qu'avait justement suscitée le Duro. Etant donné ce souhait et le fait que le chef du DDPS a pris sa décision au lendemain de la réception de questions critiques de la part de l'émission Rundschau sur le projet DSA, les CdG ne peuvent exclure l'influence de la pression médiatique sur sa décision, en particulier sur le moment choisi pour la prendre, ni le fait que, en prenant cette décision, le chef du DDPS voulait éviter d'autres articles critiques et d'autres indiscrétions au sujet du projet DSA. Les CdG pensent que les comptes rendus des médias doivent certes être pris en considération dans des décisions de conduite; cependant, avant de s'appuyer sur de tels articles, le chef du département doit vérifier si les critiques qu'ils contiennent sont justifiées. Si tel n'est pas le cas ou si les articles concernent un projet qui, de toute évidence, est sur la bonne voie, comme le projet DSA, il incombe au chef du département ou au département concerné de mettre en place une opération de relations publiques adéquate pour réagir à ces articles et répondre aux questions critiques.

Motivation Dans sa communication au grand public, le chef du DDPS a avancé comme argument pour justifier sa décision de suspension la nécessité d'avoir tout d'abord une vue d'ensemble de la défense antiaérienne. Or, devant le groupe de travail, il a motivé sa décision en arguant pour l'essentiel qu'il avait l'impression de ne pas être informé par les responsables du projet de manière appropriée; c'est également ce motif qu'il a donné aux responsables. Selon les CdG, ce fait et la déclaration de l'expert externe, selon lequel c'est seulement lors de la discussion sur la façon de communiquer la décision au public que la justification par la nécessité d'une vue d'ensemble n'a été retenue ou «échafaudée», montrent que la motivation présentée au public ne coïncide pas entièrement avec les faits.

Comme évoqué
plus haut, les avis divergent quant à la nécessité d'établir une nouvelle vue d'ensemble. Cette question est notamment d'ordre politique. Par conséquent, les CdG considèrent que le chef du DDPS a le droit de faire établir une nouvelle vue d'ensemble. Mais elles sont également d'avis que l'élaboration d'une nouvelle vue d'ensemble ne justifie pas la décision de suspendre le projet DSA peu avant la fin de la phase d'évaluation. Le chef du DDPS aurait pu tout simplement demander cette vue d'ensemble sans interrompre l'évaluation, permettant ainsi l'intégration des résultats de l'évaluation dans le nouveau concept. Comme déjà exposé à plusieurs reprises, l'évaluation se serait achevée au plus tard en septembre 2016. A ce moment-là, des informations fondées auraient été disponibles sur les systèmes envisageables pour la défense antiaérienne et sur leurs coûts d'acquisition.

Ces informations auraient été utiles pour une vue d'ensemble (notamment en ce qui concerne le financement des systèmes).

Par ailleurs, lorsque le chef du DDPS indique qu'il faut voir dans sa décision une «décision de conduite politique», qui ne repose pas sur des aspects techniques, les 3354

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CdG considèrent que l'argument ne justifie pas le fait que celui-ci a pris sa décision seul, le 22 mars 2016, sans consulter les personnes responsables du projet. Bien sûr, tout chef de département a le droit et même l'obligation de procéder à des analyses politiques et de prendre les décisions de conduite qui s'imposent. Néanmoins, comme exposé plus haut (voir ch. 3.1.3), de telles décisions de conduite doivent quand même être fondées objectivement jusqu'à un certain point. Or, les CdG sont d'avis que cela n'est pas le cas pour le projet DSA. A cela s'ajoute un facteur aggravant: une telle décision de conduite est prévue dans le processus d'acquisition du DDPS; en l'espèce, elle était programmée pour septembre 2016 au plus tard. A ce moment-là, le chef du DDPS aurait dû prendre la «décision de conduite politique» en s'appuyant sur les résultats de l'évaluation et en ayant connaissance des chiffres précis concernant les coûts d'acquisition.

Conséquences La suspension du projet en pleine phase d'évaluation a pour conséquence qu'à ce jour, il n'existe aucune appréciation complète des systèmes évalués pour la défense sol-air alors que des frais d'un montant de quelque 20 millions de francs ont été occasionnés. Concrètement, il n'a pas été possible de déterminer quels systèmes entreraient en ligne de compte pour une acquisition, si ceux-ci satisferaient aux exigences militaires et de quelle manière112 ou avec quelles restrictions, et enfin quel serait leur coût réel. Or, ces informations auraient été fondamentales pour évaluer une éventuelle acquisition sur le plan politique, alors justement que les estimations des coûts étaient jusqu'à présent imprécises et qu'elles ont évolué au cours des dernières années.

Il est donc incompréhensible, du point de vue des CdG, que, pour justifier sa décision, le chef du DDPS avance des doutes sur les coûts devant son chef Communication puis partiellement et plus récemment devant le grand public. Il est indéniable que les données sur les coûts estimés des systèmes ont considérablement évolué au cours du projet, même s'il s'est avéré que certains chiffres dévoilés dans les médias étaient obsolètes ou tout simplement faux. Le fait est cependant que le chef du DDPS, en suspendant le projet, n'a pas cherché à stopper une évolution des coûts incontrôlable puisque le
projet ne se trouvait pas encore en phase d'acquisition et que, par conséquent, aucun coût d'acquisition n'avait encore été occasionné. Il a plutôt empêché l'instauration de la transparence des coûts en 2016 encore puisque, 112

Etant donné que, devant le groupe de travail, le chef du DDPS n'a pas motivé la suspension par des raisons techniques ou des questions concernant les exigences militaires, les CdG n'ont pas approfondi ces aspects. Mais la personne chargée de l'enquête administrative par le DDPS a examiné les exigences militaires relatives au projet DSA et il est parvenu à la conclusion que les exigences définies en 2010 n'ont pas été modifiées sur le principe durant le déroulement du projet, mais ont été peaufinées sur la base des résultats des tests. Le chargé d'enquête a également constaté que ces exigences sont évaluées au début en fonction des capacités, puis plus tard en fonction des systèmes. Au cours de la phase d'évaluation, dans laquelle se trouvait le projet DSA, les systèmes sont comparés avec les exigences puis évalués. Il est possible, en fonction de l'évaluation, qu'il soit nécessaire d'adapter les exigences militaires. Le chargé d'enquête recommande certes de vérifier s'il serait possible à l'avenir de proposer une définition plus stricte de ces exigences, mais il souligne dans le même temps que celles-ci peuvent et doivent évoluer au cours de la phase d'évaluation (rapport du chargé d'enquête à l'intention du chef du DDPS du 21.9.2016, pp. 6, 75 à 76, 85 à 86).

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l'évaluation ayant été interrompue, il n'existe pas d'informations fiables sur les coûts d'une possible acquisition future de ces systèmes. Enfin, il convient d'ajouter que les dépenses effectuées à ce jour correspondent approximativement aux coûts totaux budgétés de l'évaluation. Autrement dit, l'évaluation menée à son terme n'aurait pas entraîné de surcoûts.

En résumé, la décision a donc eu pour conséquence qu'aucune appréciation complète des systèmes évalués n'existe et que le manque de transparence subsiste quant aux capacités des systèmes et à leurs coûts d'acquisition alors que des frais d'un montant de quelque 20 millions de francs ont été occasionnés (indemnité versée à l'entreprise générale externe et dépenses internes au DDPS). Cette constatation est encore aggravée par le fait que l'on ne sait toujours pas dans quelle mesure les données obtenues avant l'interruption de l'évaluation seront encore valides et pourraient être réutilisées si l'évaluation était reprise. Si tel n'était pas le cas ­ cette possibilité croît au fur et à mesure que la durée de la suspension augmente ­ l'évaluation et les tests des systèmes devraient reprendre depuis le début et auraient donc des conséquences financières.

3.2.4

Conclusion intermédiaire

Les CdG sont d'avis que ni le moment choisi pour prendre la décision ni la motivation de cette dernière ne sont compréhensibles. Le chef du DDPS a décidé de suspendre le projet en sachant que des tests importants étaient en cours et qu'une évaluation complète des systèmes susceptibles d'être achetés, y compris des informations sur leurs coûts d'acquisition, serait impossible sans les données résultant de ces tests. De plus, il n'ignorait pas qu'il aurait pu arrêter le projet en septembre 2016, au moment de se prononcer sur le programme d'armement 2017. La poursuite, plus précisément la clôture de l'évaluation n'aurait pas coûté plus que l'interruption, car l'indemnité négociée initialement avec l'entrepreneur général correspond approximativement à l'indemnité que celui-ci a pu facturer pour les dépenses effectuées jusqu'au moment de la suspension.

La suspension a donc eu pour effet que quelque 20 millions de francs ont été dépensés pour la préparation de l'acquisition sans que les données définitives et complètes sur les systèmes testés, sur leurs capacités et sur leurs limites ainsi que sur leurs coûts d'acquisition soient disponibles. Cela est d'autant plus important que les informations sur les coûts estimés des systèmes ont évolué considérablement au cours du projet et que la transparence des coûts n'est toujours pas possible en raison de la suspension. En suspendant le projet, le chef du DDPS n'a pas cherché à stopper une évolution incontrôlable des coûts, mais il a plutôt empêché l'instauration de la transparence des coûts.

De plus, l'argument communiqué au grand public pour justifier la décision ­ l'élaboration d'une vue d'ensemble de la situation en matière de défense aérienne et une meilleure coordination entre l'acquisition de systèmes de défense sol-air et celle de nouveaux avions de combat ­ n'est pas convaincant selon les CdG. En effet, cette élaboration aurait pu être lancée parallèlement, pendant que la phase d'évaluation du projet DSA était menée à son terme. Une fois l'évaluation achevée, à l'automne, ses 3356

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résultats auraient pu être intégrés dans la vue d'ensemble et, comme exposé à diverses reprises, le chef du DDPS aurait encore pu arrêter le projet. En outre, les CdG déplorent que la justification communiquée au public ne coïncide pas entièrement avec la justification donnée par le chef du DDPS devant les CdG, celui-ci ayant avancé devant le groupe de travail comme principales raisons pour justifier sa décision de suspension ses doutes subjectifs et l'information sur le projet, lacunaire selon lui.

4

Conclusions générales et recommandations

Les CdG ont chargé leur groupe de travail d'évaluer la décision prise le 22 mars 2016 par le chef du DDPS de suspendre le projet DSA, ainsi que les bases décisionnelles et les motifs que celui-ci a exposés au groupe de travail pour justifier sa décision (ces motifs ne coïncident pas entièrement avec la motivation de la suspension communiquée aux médias et au grand public). Se basant sur les clarifications menées par leur groupe de travail, les CdG s'expriment ci-après exclusivement sur la décision prise par le chef du DDPS de suspendre le projet DSA durant sa phase d'évaluation, et non sur le projet à proprement parler ni sur la question de l'acquisition concrète de systèmes de défense sol-air.

Les CdG déduisent des explications présentées au chapitre précédent deux constatations et recommandations centrales.

4.1

Reprise de l'évaluation dans le cadre du projet DSA

La première constatation porte sur la décision de suspendre le projet. Les CdG sont convaincues que celle-ci ne repose pas sur des motifs fondés et qu'elle a été prise au mauvais moment. La décision a eu pour effet l'arrêt de l'évaluation, laquelle aurait dû s'achever au plus tard en septembre 2016. Ce n'est qu'à ce moment-là que l'appréciation finale des systèmes, et aussi des coûts, aurait été disponible. En se basant sur cette appréciation, le chef du département aurait alors dû prendre la décision d'intégrer l'acquisition dans le programme d'armement ou de l'annuler, voire de l'ajourner. Or, on ne dispose aujourd'hui que de résultats partiels du fait de la décision de suspendre le projet, alors que les dépenses effectuées correspondent approximativement à l'intégralité des frais budgétés pour l'évaluation.

Les CdG sont d'avis que seule la reprise rapide de l'évaluation permettra l'utilisation des données collectées avant la suspension du projet et la prompte clôture de la phase d'évaluation, de sorte que les dépenses effectuées jusqu'à présent ne soient pas vaines et qu'une appréciation fondée des systèmes évalués, de leurs capacités et de leurs limites ainsi que de leurs coûts d'acquisition soit disponible le plus rapidement possible. Sur cette base, il reviendrait tout d'abord au chef du DDPS puis au Parlement de décider de l'acquisition éventuelle de nouveaux systèmes de défense sol-air de moyenne portée.

3357

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Recommandation 1 Les CdG invitent le Conseil fédéral à veiller, avec le chef du DDPS, à la reprise de l'évaluation des systèmes combinés par Thales Suisse et à sa fin rapide, de sorte que les dépenses effectuées jusqu'à présent n'aient pas été vaines et que des informations fondées concernant les systèmes évalués, en particulier leurs éventuels coûts d'acquisition, soient disponibles le plus vite possible.

Par ailleurs, le Conseil fédéral est invité à présenter dans un rapport la manière dont les cheffes et chefs de département doivent procéder dans le cadre de décisions en matière de procédure, afin d'éviter à l'avenir la prise de décisions hâtives et coûteuses.

Elles adressent par ailleurs aux Commissions de la politique de sécurité des Chambres fédérales un courrier dans lequel elles leur demandent de contribuer, dans le cadre de leur mission, à la reprise rapide de la phase d'évaluation du projet DSA et à sa clôture.

4.2

Association des personnes compétentes et instauration d'une culture de la communication interne ouverte

Les CdG déplorent que le chef du département ait pris sa décision de suspendre le projet DSA sans consulter les personnes et experts compétents qui lui sont subordonnés et qu'il se soit écarté sans motif valable du processus décisionnel prévu.

Il va sans dire que les CdG reconnaissent à tout chef de département le droit d'effectuer des analyses politiques et de prendre des décisions de conduite. Cela ne signifie cependant pas que ces décisions doivent être incompréhensibles du point de vue tant factuel que politique, au contraire: elles doivent toujours être fondées objectivement et faire l'objet d'une réflexion approfondie sur leurs conséquences. Pour que ces conditions soient garanties, les processus décisionnels importants (et le processus d'acquisition de l'armement en est un) et les responsabilités sont clairement définis au sein du département. Ces règles permettent d'effectuer les indispensables contrôles («checks and balances») et visent à s'assurer que les responsables et experts compétents sont associés aux décisions importantes et que celles-ci reposent sur une base solide.

Du point de vue des CdG, aucune raison ne justifiait, dans le cas du projet DSA, le non-respect du processus décisionnel prévu, qui plus est sans consultation des responsables compétents (en particulier le chef de l'armée, le chef de l'armement et la secrétaire générale). Conformément au processus d'acquisition de l'armement, plus précisément à la planification du projet, une évaluation complète des systèmes et une estimation solide des coûts auraient dû être disponibles au plus tard en septembre 2016; sur cette base, le chef du département aurait dû décider d'intégrer le projet d'acquisition dans le programme d'armement ou, au contraire, de l'arrêter sans incidences sur les coûts. Les CdG sont d'avis qu'une interruption du projet avant ce 3358

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moment-là n'aurait été justifiée qu'en présence d'indications étayées de défaillances dans la gestion de projet ou de problèmes graves, ce qui n'était pas le cas pour la suspension du projet DSA et n'a du reste pas été invoqué par le chef du DDPS.

Dans ce contexte, les CdG attendent du chef du DDPS qu'il tienne compte du processus décisionnel prévu et des responsabilités lors de futures décisions de conduite et qu'il prenne ses décisions sur une base rigoureuse.

Dans le cadre de la présente inspection, les CdG ont cependant également appris que la décision du chef du DDPS était imputable jusqu'à un certain point aux doutes de celui-ci quant à la fiabilité des informations reçues concernant le projet. Avec du recul, le fait que les responsables du projet ont attiré l'attention du chef du DDPS sur des problèmes et risques (potentiels) de manière trop peu active ou ne se rendaient pas suffisamment compte que des questions techniques peuvent avoir une importance politique semble également avoir contribué à cette décision, sans oublier que le chef du DDPS venait tout juste de prendre ses fonctions. Parallèlement, les indiscrétions répétées ont elles aussi accentué ses doutes quant au projet et à sa direction et influé sur sa décision de suspendre le projet durant la phase d'évaluation.

Par conséquent, les CdG considèrent d'une part qu'à l'avenir, le chef du DDPS devra associer plus systématiquement à ses décisions les experts qui lui sont subordonnés ou les cadres compétents. D'autre part, elles invitent ceux-ci à informer le chef du DDPS de possibles risques et problèmes dans des projets de façon plus ouverte et plus proactive. Pour que cette approche soit garantie, il faut que le chef du DDPS, dans le cadre de sa responsabilité de conduite, prenne les mesures appropriées pour instaurer une culture de la communication interne et externe ouverte et active. Ces mesures lui permettront en outre de remédier à la problématique des indiscrétions.

Recommandation 2 Les CdG invitent le chef du DDPS à tenir compte, pour de futures décisions de conduite d'une certaine portée politique, des processus décisionnels prévus et d'y associer les personnes responsables qui lui sont subordonnées. Parallèlement, il doit veiller à instaurer une culture de la communication interne et externe ouverte et active en prenant les mesures appropriées.

3359

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5

Suite de la procédure

Les CdG invitent le Conseil fédéral à prendre position sur les explications et demandes ci-dessus d'ici au 27 avril 2017 au plus tard.

26 janvier 2017

Au nom des Commissions de gestion des Chambres fédérales Le président de la CdG-E: Hans Stöckli, conseiller aux Etats Le président de la CdG-N: Alfred Heer, conseiller national Le président du groupe de travail DSA: Claude Janiak, conseiller aux Etats La secrétaire des CdG: Beatrice Meli Andres

3360

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Abréviations Al.

Alinéa

Art.

Article

CdG

Commissions de gestion des Chambres fédérales

CdG-E

Commission de gestion du Conseil des Etats

CdG-N

Commission de gestion du Conseil national

DDPS

Département fédéral de la défense, de la protection de la population et des sports

DSA

Défense sol-air

RS

Recueil systématique du droit fédéral

SG

Secrétariat général

TUNE14

Convention cadre qui régit la collaboration entre l'armée et armasuisse lors de projets d'acquisition

3361

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Index des personnes auditionnées Blattmann, André

Commandant de corps, chef de l'armée

Falcone-Goumaz, Nathalie

Secrétaire générale du DDPS (depuis le 1.2.2016)

Grüter, Kurt

Chargé par le DDPS de l'enquête administrative sur le projet DSA, ancien directeur du Contrôle fédéral des finances

Knechtenhofer, Bernhard

Chef Projets et aide à la conduite, SG DDPS

Parmelin, Guy

Conseiller fédéral, chef du DDPS (depuis le 1.1.2016)

Schellenberg, Aldo C.

Commandant de corps, commandant des Forces aériennes / président de la surveillance du projet DSA

Schregenberger, Hans-Christof

Consultant externe du DDPS (jusqu'en mars 2016)

Sonderegger, Martin

Chef de l'armement / Directeur d'armasuisse

Von Rotz, Gregor

Responsable du projet DSA, armasuisse

Wiedmer, Urs

Chef Communication DDPS, SG DDPS (depuis le 1.1.2016)

3362

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Annexe

Chronologie Tableau synoptique des faits Date

Evénement

Janv. 2016

Le chef du DDPS exige une vue d'ensemble des projets les plus importants du DDPS

A partir du 7.1

Début de la publication d'articles critiques sur le projet de modernisation du Duro

18.1.

Instruction du chef du DDPS (courriel): aucune décision de fond concernant un projet ne peut être prise sans qu'il soit consulté

19.1.

Séance de la surveillance du projet DSA (présentation des résultats de l'évaluation des déclencheurs, poursuite de l'option couplée)

19.1.

Sur proposition du chef Projets et aide à la conduite, le chef du DDPS décide de se faire expliquer dans le détail onze des projets les plus importants, dont le DSA

2.2.

Présentation du projet DSA au chef du DDPS, par le président de la surveillance et le responsable du projet

14.2.

Article critique du Zentralschweiz am Sonntag sur le projet DSA, concernant notamment la capacité de l'un des missiles évalués à être engagé par tous les temps

22.2.

Réunion du président de la surveillance et de l'équipe de projet avec le fabricant de l'arme critiquée

24.2.

Lancement du processus d'acquisition d'un nouvel avion de combat

26.2.

Le chef du DDPS fait part au chef Communication DDPS de ses réserves et évoque la possibilité de suspendre le projet

29.2.­18.3. Session de printemps 29.2.

Position (note) du président de la surveillance de projet sur l'article critique paru le 14.2 dans le Zentralschweiz am Sonntag à l'intention du chef de l'armée et du chef Communication DDPS

1.3.

Séance de la surveillance du projet DSA (discussion sur les articles critiques et sur la capacité des systèmes à être engagés par tous les temps)

2.3.

Le chef du DDPS prend connaissance d'une feuille d'information critique sur la séance de la surveillance de projet du 1.3.2016

4.3.

Présentation du projet DSA à la secrétaire générale du DDPS, par le suppléant du président de la surveillance et le responsable du projet

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Date

Evénement

6.3.

Le chef du DDPS reçoit l'avis de droit relatif au contrat passé par armasuisse avec l'entreprise générale Thales pour la préparation de l'acquisition dans le cadre du projet DSA

7.­18.3.

Examen au Parlement du programme d'armement 2015+ et du projet de modernisation du Duro

21.3.

Demande de l'émission Rundschau de la télévision suisse alémanique au DDPS: répondre par écrit à des questions concernant le projet DSA

22.3.

Décision de suspendre le projet (publication à 17 h 30) (attentats de Bruxelles)

22.­23.3

Le chef du DDPS ordonne l'arrêt immédiat de tous les tests en cours

23.3.

Participation du chef du DDPS à l'émission Rundschau (jour de l'annonce de la résiliation des rapports de travail avec le chef de l'armée)

24.3.

Réunion-bilan du chef du DDPS avec les responsables du projet

14.4.

Deuxième émission Rundschau sur le projet DSA, lors de laquelle sont diffusés des documents classifiés

18.4.

Lancement de l'enquête administrative et enquête par la justice militaire

29.4.

Résiliation du contrat de préparation de l'acquisition passé avec l'entreprise Thales

Source: chronologie établie par nos soins, sur la base des explications fournies par les personnes auditionnées, en particulier le chef du DDPS, et des documents analysés

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