16.481 Initiative parlementaire Créer les bases légales répondant à l'évolution des outils d'information et de documentation du Parlement Rapport du Bureau du Conseil national du 25 août 2017

Mesdames, Messieurs, Par le présent rapport, nous vous soumettons deux projets de modification de la loi sur le Parlement et de l'ordonnance sur l'administration du Parlement, que nous transmettons simultanément au Conseil fédéral pour avis.

Le Bureau propose d'adopter les projets d'acte ci-joints.

25 août 2017

Pour le Bureau Le président: Jürg Stahl

2017-2543

6503

Condensé Les Services du Parlement (SP) développent et exploitent des systèmes d'information. Ces derniers permettent aux SP d'accomplir leurs tâches de soutien et de conseil aux organes du Parlement et d'informer le public sur les activités de l'Assemblée fédérale.

Ces systèmes d'information sont amenés à gagner en importance sous l'effet conjugué des développements techniques, de la digitalisation de la société et des attentes toujours plus élevées des utilisateurs envers eux. Grâce au progrès technique et à l'interconnexion des systèmes d'information, il est possible aujourd'hui d'obtenir des informations et des analyses toujours plus précises.

L'Assemblée fédérale dispose déjà des bases légales relatives à ses outils d'information et de documentation. La mise en relation des sources d'information existantes permet toutefois de générer de nouvelles informations. Il peut en résulter des données sensibles et des profils de la personnalité. Selon la loi fédérale sur la protection des données (LPD), de telles données ne peuvent être traitées que s'il existe une base légale. Pour satisfaire aux exigences de la LPD et faire en sorte que les députés soient informés des évolutions actuelles, les bureaux ont décidé de compléter les bases légales existantes.

Les modifications proposées par le Bureau du Conseil national visent les objectifs suivants: d'une part, encadrer le développement et l'exploitation des nouveaux systèmes d'information du Parlement et de leur administration en définissant l'étendue et les destinataires des analyses produites; d'autre part, régler les responsabilités quant à la production et à la diffusion des différents types d'analyses. Les dispositions proposées doivent également permettre de développer les systèmes d'information et leur utilisation sans que chaque avancée technologique ultérieure requière une nouvelle adaptation des bases légales. Le projet prévoit que la Conférence de coordination, qui réunit les bureaux des deux conseils, soit chargée de suivre l'évolution des systèmes d'information du Parlement sous l'angle des analyses produites et de la protection des données.

6504

FF 2017

Rapport 1

Genèse du projet

Le 2 septembre 2016, la Délégation administrative a décidé de proposer au Bureau du Conseil national (Bureau-N) d'élaborer une initiative répondant à l'évolution des outils d'information et de documentation du Parlement. Le 11 novembre 2016, le Bureau-N a suivi cette proposition et a décidé de déposer une initiative parlementaire pour créer les bases légales relatives aux futurs systèmes d'information. A sa séance du 3 février 2017, le Bureau du Conseil des Etats a approuvé cette décision.

2

Grandes lignes du projet

Le projet vise à créer les bases légales nécessaires au développement et à l'exploitation de systèmes d'information de nouvelle génération. Le Parlement et les Services du Parlement (SP) réagissent ainsi à l'évolution actuelle desdits systèmes et tâchent d'anticiper les développements futurs.

Les nouveaux systèmes d'information servent principalement à analyser des données issues de différentes sources. Pour procéder à ces analyses, ils mettent en relation des données saisies dans différents systèmes actuels, pour lesquels il existe déjà des bases légales. La mise en relation de ces différents systèmes peut générer de nouvelles informations. Il peut en résulter des données sensibles et des profils de la personnalité qui nécessitent une base légale formelle au sens de la loi fédérale sur la protection des données (LPD; RS 235.1). Pour en tenir compte, l'Assemblée fédérale édicte une modification de la loi sur le Parlement (LParl; RS 171.10).

Parallèlement, l'Assemblée fédérale fixe dans l'ordonnance sur l'administration du Parlement (OLPA; RS 171.15) les modalités des nouvelles offres (étendue, destinataires) et prescrit que tout développement des offres d'analyse est soumis à l'approbation de la Conférence de coordination. L'Assemblée fédérale s'assure ainsi que l'information nécessaire et relative à ses activités soit développée conformément à ses besoins.

2.1

Offre actuelle en matière d'information et de documentation

Les SP exploitent déjà de nombreux systèmes d'information afin d'assister l'Assemblée fédérale dans l'accomplissement de ses tâches: tous les objets parlementaires sont saisis dans CURIA et sont accessibles sur le site Internet du Parlement via Curia Vista; les votes des conseils sont détaillés dans ELAN et ELAS; VERBALIX contient les procès-verbaux des débats des conseils; MEMO offre des produits médiatiques et génère des revues de presse et autres bulletins d'information; LIBERO contient et propose des articles scientifiques et des monographies; enfin, SESAME permet d'accéder à des documents électroniques et à d'autres périodiques.

6505

FF 2017

Le processus d'information actuel prévoit que les banques de données, sites Internet, médias, etc. sont épluchés séparément, en vue de repérer les offres pertinentes.

Les SP rédigent plusieurs bulletins d'information p. ex. sous la forme de revues de presse, de documents électroniques, d'abonnements aux objets de Curia Vista, etc.

qu'ils proposent aux utilisateurs. A la demande des organes parlementaire ou des députés, les SP peuvent aussi rassembler des documentations sur des thèmes et des objets spécifiques, en se fondant sur un grand nombre de systèmes d'information. Ce faisant, ils font également appel à des offres d'information de l'administration fédérale et d'autres institutions. L'analyse des différentes sources d'information joue aussi un rôle central dans les prestations d'assistance et d'analyse que les SP fournissent aux organes parlementaires, par exemple dans le domaine de la haute surveillance parlementaire.

Actuellement, les députés ainsi que les collaborateurs des secrétariats des groupes et des SP effectuent leurs recherches de renseignments dans chacun des systèmes précités au moyen de moteurs internes. Vu que ces systèmes ne contiennent pas toutes les données répondant à leurs besoins, ils utilisent aussi des offres externes telles que les sites Internet de l'administration fédérale, des partis politiques, des groupes d'intérêt et d'institutions publiques ou privées.

2.2

Développement des offres actuelles

Les nouveaux systèmes d'information regroupent en un seul lieu toutes les informations pertinentes pour le travail politique et qui sont contenues dans différentes banques de données. Ce regroupement permet de mettre en relation les informations, de les présenter de manière agrégée et d'en extraire différents types d'analyses. La représentation de celles-ci sous forme de visualisations permet à l'utilisateur de prendre connaissance de nombreuses informations en un coup d'oeil.

Les SP travaillent actuellement sur le développement de deux systèmes d'information complémentaires: ­

Le système CUBE rassemble les principales informations sur les objets parlementaires et projets d'actes, sur les délibérations au sein des conseils, ainsi que sur les membres de l'Assemblée fédérale et les organes du Parlement. Il permet d'offrir des analyses quantitatives (statistiques) de l'activité du Parlement, de ses membres et de ses organes, comme le nombre d'interventions pendantes par groupe parlementaire, le nombre d'objets parlementaires liquidés par session, le nombre d'actes adoptés (et leur forme) par unité de temps et par organe qui en est à l'origine, etc. Ces analyses statistiques facilitent la planification des travaux des conseils et permettent de donner au public une vue d'ensemble de l'activité du Parlement. Une première version du système est actuellement exploitée au sein des SP. Son développement et la mise à disposition de nouvelles analyses sont en cours.

­

Le système SOPRANO ­ actuellement en phase de conception ­ mettra en perspective l'activité du Parlement avec des contributions externes, comme des articles scientifiques, des prises de position d'organisations politiques et

6506

FF 2017

de la société civile, des rapports émanant des autorités fédérales et cantonales ou des articles de presse. Ces contenus, disponibles sous forme numérique, pourront être mis en relation de manière simplifiée, sur la base d'une analyse sémantique. Cela permettra de suivre l'activité politique de manière systématique («monitorage politique» et analyses). Les utilisateurs autorisés, c'est-à-dire les députés ainsi que les collaborateurs des secrétariats des groupes et des SP, recevront automatiquement des informations utiles à leur activité. Ils pourront définir les thèmes politiques, les objets parlementaires, les actes législatifs et les acteurs sur lesquels ils souhaiteront recevoir des informations, en sélectionnant des sources spécifiques, en filtrant les informations souhaitées (par ex.: exclusivement les thèmes traités par la Commission de l'économie et des redevances) et en déterminant le rythme auquel ils souhaiteront être informés. SOPRANO sera basé sur des informations publiques, sur des informations internes et sur des informations confidentielles selon la LParl. Certaines informations seront en outre protégées par le droit d'auteur. Les droits d'accès actuellement en vigueur s'appliqueront de manière identique pour SOPRANO de sorte que les documents internes ou confidentiels selon la LParl ne seront accessibles qu'aux personnes strictement autorisées à les consulter.

Que ce soit pour des analyses statistiques de l'activité du Parlement ou pour le suivi de thèmes politiques plus généraux, les utilisateurs de ces nouveaux systèmes d'information ne seront plus obligés de chercher l'information à de multiples endroits.

Ils pourront être tenus au courant de l'évolution d'une thématique ou de l'examen d'un projet de loi spécifique de manière régulière, en recevant uniquement les informations spécifiques dont ils ont besoin.

2.3

Aspects juridiques

Conformément à l'art. 5 LParl, les conseils et leurs organes informent le public de leurs travaux en temps utile et de manière détaillée, pour autant qu'aucun intérêt public ou privé prépondérant ne s'y oppose. Les SP assistent l'Assemblée fédérale dans l'exercice de ses attributions.

Les informations relatives à l'activité de l'Assemblée fédérale font l'objet de différentes bases légales, notamment en ce qui concerne le Bulletin officiel (art. 4 LParl et art. 1 OLPA), Curia Vista (art. 5 LParl), le registre des intérêts (art. 11 LParl), le registre des intergroupes parlementaires (art. 63 LParl), l'information du public sur les travaux des commissions (art. 48 LParl), la publication des résultats des votes des conseils (art. 82 LParl ainsi que les art. 57 du règlement du Conseil national [RS 171.13] et 44a du règlement du Conseil des Etats [RS 171.14]) et la publication des notices biographiques des députés (art. 16 OLPA). Les SP procèdent déjà à des analyses statistiques concernant l'activité de l'Assemblée fédérale et proposent des informations sur le suivi de l'activité politique (cf. chap. 2.1). Ces offres seront désormais numérisées et étoffées. La modification proposée de la LParl et de l'OLPA permet d'ancrer ces développements dans la législation.

6507

FF 2017

Conformément à l'art. 3 LPD, les opinions ou activités religieuses, philosophiques, politiques ou syndicales d'une personne font partie des données sensibles. En vertu de cette même loi, les profils de la personnalité sont un assemblage de données qui permet d'apprécier les caractéristiques essentielles de la personnalité d'une personne physique.

La LPD ne s'applique pas aux délibérations des Chambres fédérales et des commissions parlementaires (art. 2 al. 2 let. b LPD) Le développement des offres actuelles en matière d'information et de documentation créée cependant de nouvelles possibilités (ch. chap. 2.2), notamment de nouveaux types d'analyses. En mettant en relation des informations existantes, on peut par exemple présenter les opinions politiques exprimées par les députés de manière plus complète, plus rapide, plus efficace et plus simple. En outre, ces mises en relation peuvent aboutir à des profils de la personnalité. Ces analyses sont soumises aux dispositions générales de la LPD (par ex. droit d'accès, exactitude des données).

Même si les opinions politiques exprimées par les députés font partie de leur mandat, le Bureau propose néanmoins de préciser les dispositions légales actuelles et d'ancrer dans la loi l'objectif de ces systèmes d'information, ce afin de répondre à l'exigence de la LPD de disposer d'une base légale formelle. Pour cette raison, l'art. 64 LParl est modifié. Parallèlement, la modification de l'ordonnance doit garantir que les organes de l'Assemblée fédérale soient en mesure de suivre et de piloter les développements de ces systèmes.

S'agissant des données sensibles, il est important que les nouveaux systèmes d'information n'analysent que des données liées aux opinions ou activités religieuses, philosophiques, politiques ou syndicales des députés et n'aient pas accès aux autres données sensibles, c'est-à-dire celles qui concernent la santé, la sphère intime, l'appartenance à une race, des mesures d'aide sociale ainsi que des poursuites ou sanctions pénales et administratives.

3

Commentaire par article

3.1

Loi sur le Parlement

Art. 64, al. 2, let. cbis Conformément au droit en vigueur, les SP tiennent à jour une documentation et fournissent des services dans les domaines de la documentation et des technologies de l'information (art. 64, al. 2, let. c, LParl) et informent le public sur l'Assemblée fédérale et ses travaux (art. 64, al. 2, let. e, LParl).

L'al. 2, let. cbis (nouveau) crée la base légale permettant d'utiliser les nouvelles offres d'information numériques de l'Assemblée fédérale. Il permet expressément le traitement de données sensibles et de profils de personnalité au sens d'une loi formelle comme l'exige la LPD. Vu que l'expression de l'opinion politique fait partie des tâches des députés, l'objectif des systèmes d'information est explicité au niveau de la loi: il s'agit d'analyser les données utiles à l'accomplissement des tâches de l'Assemblée fédérale, de ses organes et des députés.

6508

FF 2017

3.2

Ordonnance sur l'administration du Parlement

L'OLPA est complétée par une section 9, intitulée «Systèmes d'information et analyses», qui précise l'étendue des analyses ainsi que les utilisateurs autorisés.

En outre, le projet donne à la Conférence de coordination la compétence de fixer l'étendue et les destinataires des analyses. Cela permet de garantir que l'Assemblée fédérale puisse suivre et piloter les développements des systèmes d'information. La Conférence de coordination sera chargée d'examiner ces développements ultérieurs, qui porteront essentiellement sur les offres de données relatives à chacun des députés: elle vérifiera les questions liées à l'étendue et aux destinataires et prendra les décisions nécessaires.

Par contre, l'offre relative aux objets, aux thèmes et à l'activité des organes parlementaires continuera d'être développée conformément au devoir général d'informer qui incombe à l'Assemblée fédérale et en fonction de l'évolution technologique.

Art. 16e

Systèmes d'information

L'al. 1 dispose que les SP exploitent des systèmes d'information et précise l'objectif de ces derniers, qui est de soutenir l'activité de l'Assemblée fédérale, des organes parlementaires, des députés, des collaborateurs des secrétariats des groupes et des collaborateurs des SP.

L'al. 2 énumère les données issues des systèmes d'information du Parlement qui peuvent désormais être traitées et mises en relation. Il s'agit des données relatives aux objets parlementaires, aux débats et aux votes des conseils ainsi qu'aux délibérations des commissions. L'accès aux procès-verbaux et aux autres documents des commissions est réglé à l'al. 4. Les données accessibles au public relatives aux objets parlementaires ainsi qu'aux débats et aux votes des conseils sont mises en relation à des fins statistiques et de publication. En outre, des informations classifiées telles que les procès-verbaux et autres documents des commissions peuvent être mises en relation sur l'extranet, à l'intention d'un cercle restreint d'utilisateurs.

L'al. 3 énumère d'autres informations externes pouvant être mises en relation dans le cadre du suivi de l'activité politique. La notion de «publications» renvoie par exemple aux offres numériques telles que les revues scientifiques. Ces publications peuvent être mises en relation avec des informations accessibles au public issues d'organisations étatiques et privées, par exemple avec des communiqués de presse d'associations et de partis politiques. En vertu de l'al. 4, lorsque des procès-verbaux et autres documents des commissions sont traités, seules les personnes visées aux art. 6a et 6b OLPA y ont accès, c'est-à-dire les membres des commissions, les collaborateurs des secrétariats des groupes et ceux des SP. Cette solution garantit que le développement de l'offre d'information ne nécessite aucune modification des droits d'accès actuels.

Art. 16f

Analyses et communication des données

La Conférence de coordination fixe l'étendue et les destinataires des analyses. Sont essentiellement concernées les indications sur le travail parlementaire des députés à

6509

FF 2017

titre individuel. Ce faisant, la Conférence de coordination se penchera non seulement sur les questions légales, notamment en matière de protection des données, mais elle évaluera également les conséquences que peuvent avoir les analyses sur le travail des députés (par ex. l'analyse du temps de parole d'un député particulier).

Le développement des technologies de l'information étant extrêmement rapide, cette solution permet aussi de garder une certaine flexibilité et de faire en sorte qu'il ne soit pas nécessaire d'adapter les bases légales à chaque nouveauté technique. La Conférence de coordination est chargée de suivre ces développements et toute nouvelle utilisation concernant les analyses de données personnelles sera soumise à son approbation.

4

Conséquences

4.1

Conséquences financières et effet sur l'état du personnel

La modification proposée n'a d'incidence directe ni sur les finances, ni sur le personnel. Elle crée toutefois des besoins spécifiques qui sont traités dans le cadre de projets de développement des systèmes d'information. L'allocation des ressources nécessaires au développement de ces systèmes sera demandée selon le processus budgétaire ordinaire.

5

Bases légales

La LParl se fonde sur l'art. 164, al. 1, let. g, de la Constitution fédérale (Cst.; RS 101), lequel dispose que les dispositions relatives à l'organisation et à la procédure des autorités fédérales sont édictées sous la forme d'une loi fédérale. Conformément à l'art. 17 LPD, les organes fédéraux ne sont en droit de traiter des données personnelles que s'il existe une base légale. Enfin, l'art. 70 LParl confère à l'Assemblée fédérale la compétence d'édicter sous forme d'ordonnances de l'Assemblée fédérale les dispositions d'exécution fixant des règles de droit qui s'appliquent à l'administration du Parlement.

6510