17.030 Message relatif à l'initiative populaire «Sortons de l'impasse!

Renonçons à rétablir des contingents d'immigration» du 26 avril 2017

Messieurs les Présidents, Mesdames, Messieurs, Par le présent message, nous vous proposons de soumettre au vote du peuple et des cantons l'initiative populaire «Sortons de l'impasse! Renonçons à rétablir des contingents d'immigration», en leur recommandant de la rejeter.

Nous vous proposons simultanément de classer l'intervention parlementaire suivante: 2014

P

14.3200

Nouvel article 121a de la Constitution fédérale. Compatibilité avec les engagements internationaux de la Suisse (N 20.3.14, Tornare)

Nous vous prions d'agréer, Messieurs les Présidents, Mesdames, Messieurs, l'assurance de notre haute considération.

26 avril 2017

Au nom du Conseil fédéral suisse: La présidente de la Confédération, Doris Leuthard Le chancelier de la Confédération, Walter Thurnherr

2017-0914

3167

Condensé L'initiative populaire «Sortons de l'impasse! Renonçons à rétablir des contingents d'immigration» a été déposée le 27 octobre 2015. Elle demande l'abrogation des art. 121a et 197, ch. 11, de la Constitution (Cst.), que le peuple et les cantons ont acceptés le 9 février 2014.

Le Conseil fédéral considère qu'il n'est pas pertinent d'abroger l'art. 121a Cst. Il rejette l'initiative et, s'appuyant sur les résultats de la procédure de consultation, renonce à soumettre à l'Assemblée fédérale un contre-projet direct à l'initiative.

Contexte Le 9 février 2014, les art. 121a et 197, ch. 11, Cst. (initiative «Contre l'immigration de masse») ont été acceptés par le peuple et les cantons. Leur mise en oeuvre implique deux missions: adapter la loi fédérale du 16 décembre 2005 sur les étrangers (LEtr) et renégocier les traités internationaux qui ne sont pas conformes à ces nouvelles dispositions constitutionnelles.

Le 4 mars 2016, le Conseil fédéral a adopté le message relatif à la mise en oeuvre de l'art. 121a Cst. D'après ce projet de loi, la réglementation applicable aux ressortissants d'États tiers devait être complétée notamment par des nombres maximaux et des contingents pour le regroupement familial, l'admission des personnes qui n'exercent pas d'activité lucrative et le domaine de l'asile. Concernant l'immigration des personnes qui peuvent se prévaloir de l'accord sur la libre circulation des personnes (ALCP) conclu avec l'Union européenne (UE) ou de la convention instituant l'Association européenne de libre-échange (AELE), le Conseil fédéral aspirait à une solution consensuelle avec l'UE. Pour le cas où il n'aurait pas été possible d'y parvenir à temps, il proposait une clause de sauvegarde unilatérale pour les ressortissants des États membres de l'UE ou de l'AELE. En cas de forte immigration en provenance de ces États, des nombres maximaux et des contingents devaient alors être introduits à l'égard de leurs ressortissants. Ce projet de loi du Conseil fédéral était compatible avec l'art. 121a Cst. Par contre, il serait entré en conflit avec l'ALCP au plus tard lors de l'activation de la clause de sauvegarde.

Les Chambres fédérales ont arrêté, le 16 décembre 2016, une mise en oeuvre de l'art. 121a Cst. qui ne correspond pas à la proposition du Conseil fédéral. Ce dernier définit en conséquence
des mesures visant à épuiser le potentiel offert par la main-d'oeuvre en Suisse. De plus, les employeurs doivent annoncer au service public de l'emploi les postes vacants dans des groupes de profession, domaines d'activités ou régions économiques qui enregistrent un taux de chômage supérieur à la moyenne. Si ces mesures n'ont pas l'effet souhaité ou si de nouveaux problèmes surgissent, des mesures supplémentaires doivent être prises (art. 21a LEtr). La réglementation décidée par les Chambres fédérales doit être mise en oeuvre de manière à être compatible avec l'ALCP. Cependant, en renonçant de manière générale à fixer des nombres maximaux et des contingents pour les ressortissants d'États membres de l'UE ou de l'AELE, elle ne met pas intégralement en oeuvre l'art. 121a Cst.

3168

Contenu de l'initiative L'initiative populaire «Sortons de l'impasse! Renonçons à rétablir des contingents d'immigration» a été déposée le 27 octobre 2015. Elle exige l'abrogation des dispositions constitutionnelles relatives à la gestion de l'immigration (art. 121a et 197, ch. 11, Cst.) qui sont en vigueur depuis le 9 février 2014.

D'après ses auteurs, cette initiative populaire permettra en particulier d'assurer le maintien des accords bilatéraux conclus avec l'UE si la mise en oeuvre de l'art. 121a Cst. devait les menacer. Ils estiment que dans une telle situation, le peuple doit pouvoir se prononcer sur le maintien de l'ALCP et, donc, des accords bilatéraux conclus avec l'UE. De plus, ils considèrent qu'outre des raisons économiques, le maintien de la place scientifique suisse en matière de recherche, la sauvegarde des soins de santé et des motifs culturels plaident en faveur de la préservation des relations bilatérales avec l'UE.

Mérites et lacunes de l'initiative L'abrogation des art. 121a et 197, ch. 11, Cst. exigée par les auteurs de l'initiative vise à rétablir la situation telle qu'elle était avant la votation du 9 février 2014 sur l'initiative populaire «Contre l'immigration de masse». Les accords prévoyant une libre circulation des personnes qui ont été conclus avec les pays membres de l'UE ou de l'AELE seraient ainsi à nouveau compatibles avec la Constitution.

Cependant, cette opération annulerait également le mandat de gestion et de limitation de l'immigration, d'une part, et d'instauration d'une préférence nationale, d'autre part, voté par le peuple et les cantons le 9 février 2014.

Le Conseil fédéral considère que l'objectif premier des auteurs de l'initiative est réalisé par la décision des Chambres fédérales en faveur d'une mise en oeuvre de l'art. 121a Cst. conforme à l'ALCP.

Renonciation à un contre-projet direct Le 21 décembre 2016, le Conseil fédéral a décidé de mettre en consultation deux propositions de contre-projet direct à l'initiative «Sortons de l'impasse! Renonçons à rétablir des contingents d'immigration». L'objectif était de reporter dans la Constitution la décision du Parlement concernant la mise en oeuvre de l'art. 121a Cst. La procédure de consultation, d'une durée raccourcie, s'est étendue du 1 er février au 1er mars 2017.

Les participants à la consultation
ont quasiment tous rejeté les deux options proposées par le Conseil fédéral. Certains ont proposé de nouvelles options, dont la teneur va toutefois dans des directions les plus diverses. Tenant compte des résultats de cette procédure de consultation, le Conseil fédéral a décidé de renoncer à présenter un contre-projet direct.

3169

Proposition du Conseil fédéral Le Conseil fédéral propose aux Chambres fédérales de soumettre l'initiative populaire «Sortons de l'impasse! Renonçons à rétablir des contingents d'immigration» au vote du peuple et des cantons sans contre-projet, en leur recommandant de la rejeter.

3170

FF 2017

Message 1

Aspects formels et validité de l'initiative

1.1

Texte de l'initiative

L'initiative populaire «Sortons de l'impasse! Renonçons à rétablir des contingents d'immigration» a la teneur suivante: La Constitution fédérale1 est modifiée comme suit: Art. 121a et 197, ch. 11 Abrogés

1.2

Aboutissement et délais de traitement

L'initiative populaire fédérale «Sortons de l'impasse! Renonçons à rétablir des contingents d'immigration» a fait l'objet d'un examen préliminaire par la Chancellerie fédérale le 18 novembre 20142 et a été déposée le 27 octobre 2015 avec le nombre requis de signatures.

Par décision du 11 novembre 2015, la Chancellerie fédérale a constaté que l'initiative avait recueilli 108 640 signatures valables et qu'elle avait donc abouti3.

L'initiative est présentée sous la forme d'un projet rédigé. Le 26 octobre 2016, dans le contexte de l'époque, le Conseil fédéral s'était exprimé en faveur d'un contreprojet à cette initiative. Aussi avait-il défini, le 21 décembre 2016, les grandes lignes de deux versions d'un contre-projet direct. Une procédure de consultation raccourcie sur ces deux projets s'est déroulée en février 2017. Ce calendrier a été fixé sur la base de l'art. 97, al. 2, de la loi du 13 décembre 2002 sur le Parlement (LParl)4. En effet, cette disposition prévoit que le Conseil fédéral dispose de 18 mois à compter du dépôt d'une initiative dont l'aboutissement a été constaté, soit en l'occurrence au plus tard le 27 avril 2017, pour soumettre à l'Assemblée fédérale un projet d'arrêté fédéral concernant un contre-projet ainsi qu'un message. Le Conseil fédéral a réévalué la situation en tenant compte des résultats de la procédure de consultation et décidé de renoncer à soumettre un contre-projet direct (cf. les motifs au ch. 5.1).

C'est pourquoi il n'a pas pu tenir le délai plus court prévu pour un projet d'arrêté fédéral accompagné d'un message sans contre-projet, qui aurait été le 27 octobre 2016 (art. 97, al. 1, let. a, LParl).

L'Assemblée fédérale doit statuer sur la recommandation de vote d'ici au 27 avril 2018. Elle peut proroger ce délai d'un an si au moins l'une des Chambres a 1 2 3 4

RS 101 FF 2014 8839 FF 2015 7603 RS 171.10

3171

FF 2017

pris une décision sur un contre-projet ou un projet d'acte en rapport étroit avec l'initiative populaire (art. 100 et 105, al. 1, LParl).

1.3

Validité

L'initiative remplit les critères de validité énumérés à l'art. 139, al. 3, Cst.: a.

elle obéit au principe de l'unité de la forme, puisqu'elle revêt entièrement la forme d'un projet rédigé (abrogation de deux dispositions constitutionnelles);

b.

elle obéit au principe de l'unité de la matière, puisqu'il existe un rapport intrinsèque entre ses différentes parties (abrogation à la fois de l'art. 121a Cst.

et de la disposition transitoire s'y rapportant);

c.

elle obéit au principe de la conformité aux règles impératives du droit international, puisqu'elle ne contrevient à aucune d'elles.

2

Contexte dans lequel l'initiative a vu le jour

2.1

Acceptation de l'initiative populaire «Contre l'immigration de masse»

Le 9 février 2014, le peuple et les cantons ont accepté l'initiative populaire «Contre l'immigration de masse»5. À la suite de ce scrutin, les art. 121a et 197, ch. 11, ont été ajoutés à la Constitution. Ces dispositions constitutionnelles prévoient une réorientation générale de la politique migratoire de la Suisse et une adaptation des traités internationaux contraires à l'art. 121a Cst.

2.1.1

Texte des dispositions constitutionnelles

Les dispositions introduites dans la Constitution par l'acceptation de l'initiative «Contre l'immigration de masse» ont la teneur suivante: Art. 121a Gestion de l'immigration 1 La Suisse gère de manière autonome l'immigration des étrangers.

2 Le nombre des autorisations délivrées pour le séjour des étrangers en Suisse est limité par des plafonds et des contingents annuels. Les plafonds valent pour toutes les autorisations délivrées en vertu du droit des étrangers, domaine de l'asile inclus. Le droit au séjour durable, au regroupement familial et aux prestations sociales peut être limité.

3 Les plafonds et les contingents annuels pour les étrangers exerçant une activité lucrative doivent être fixés en fonction des intérêts économiques globaux de la Suisse et dans le respect du principe de la préférence nationale; ils doivent inclure les frontaliers. Les critères déterminants pour l'octroi d'autorisations de séjour sont en particu-

5

FF 2014 3957

3172

FF 2017

lier la demande d'un employeur, la capacité d'intégration et une source de revenus suffisante et autonome.

4 Aucun traité international contraire au présent article ne sera conclu.

5 La loi règle les modalités.

Art. 197, ch. 11

Disposition transitoire ad art. 121a (Gestion de l'immigration) 1 Les traités internationaux contraires à l'art. 121a doivent être renégociés et adaptés dans un délai de trois ans à compter de l'acceptation dudit article par le peuple et les cantons.

2 Si les lois d'application afférentes ne sont pas entrées en vigueur dans les trois ans à compter de l'acceptation de l'art. 121a par le peuple et les cantons, le Conseil fédéral édicte provisoirement les dispositions d'application nécessaires par voie d'ordonnance.

2.1.2

Teneur des dispositions constitutionnelles

Les art. 121a et 197, ch. 11, Cst. visent pour l'essentiel à ce que la Suisse gère l'immigration de manière autonome et limite par des plafonds et des contingents annuels le nombre des autorisations délivrées pour le séjour des étrangers en Suisse.

Ces articles impliquent les deux missions suivantes: 1. Législation: a.

La Suisse doit mettre en place un nouveau système d'admission reposant notamment sur des nombres maximaux et des contingents annuels, qui soit applicable à tous les étrangers immigrant sur son territoire. Les nombres maximaux et les contingents pour l'admission d'étrangers exerçant une activité lucrative sont fixés en fonction des intérêts économiques globaux de la Suisse et dans le respect du principe de la préférence nationale; ils doivent inclure les frontaliers. Parmi les critères déterminants pour l'octroi d'autorisations de séjour figurent, en particulier, la demande d'un employeur, la capacité d'intégration et une source de revenus suffisante et autonome (art. 121a, al. 1 à 3, Cst.).

b.

Si les lois d'application ne sont pas encore en vigueur le 9 février 2017 (soit trois ans après l'acceptation de l'initiative), le Conseil fédéral édicte provisoirement les dispositions d'application nécessaires par voie d'ordonnance (art. 121a, al. 5, et 197, ch. 11, al. 2, Cst.).

2. Traités internationaux: a.

Aucun traité international contraire aux nouvelles dispositions constitutionnelles ne peut être conclu depuis l'acceptation du nouvel article constitutionnel (art. 121a, al. 4, Cst.).

b.

Les traités internationaux contraires aux nouvelles dispositions constitutionnelles doivent être renégociés et adaptés d'ici au 9 février 2017 (art. 197, 3173

FF 2017

ch. 11, al. 1, Cst.). Les accords sur la libre circulation des personnes conclus avec l'UE6 et avec l'AELE7 ainsi que l'accord-cadre Suisse­Liechtenstein8 sont concernés par cette exigence.

2.2

Mise en oeuvre de l'art. 121a Cst.

2.2.1

Adaptation des accords prévoyant la libre circulation des personnes

La Constitution prévoit que les traités internationaux contraires à son art. 121a doivent être renégociés et adaptés dans un délai de trois ans à compter de l'acceptation de cette disposition constitutionnelle, à savoir d'ici au 9 février 2017 (art. 197, ch. 11, al. 1, Cst.). Cependant, cette disposition ne contient aucune indication sur ce qu'il adviendrait s'il n'était pas possible d'adapter lesdits traités internationaux dans le délai prescrit. En particulier, elle n'exige pas de résilier ces traités.

Dans la perspective d'une éventuelle adaptation de l'ALCP, le Conseil fédéral a chargé le Département fédéral de justice et police (DFJP), le 20 juin 2014, de déposer auprès de l'UE, en collaboration avec le Département fédéral des affaires étrangères (DFAE) et le Département fédéral de l'économie, de la formation et de la recherche (DEFR), une demande en ce sens. Par courrier du 4 juillet 2014, le Secrétariat d'État aux migrations (SEM) a fait parvenir cette demande au chef de la délégation européenne auprès du Comité mixte sur l'ALCP. Le 24 juillet 2014, la haute représentante de l'UE pour les affaires étrangères a répondu au président de la Confédération de l'époque, avec l'aval des États membres de l'UE, que des négociations visant à introduire des contingents et des nombres maximaux de même qu'une préférence nationale iraient à l'encontre du principe de la libre circulation des personnes et que l'UE ne pouvait donc pas accepter la demande de la Suisse. Le 11 février 2015, le Conseil fédéral a toutefois approuvé le mandat de négociations sur l'adaptation de l'ALCP, avec l'objectif de mettre en oeuvre la gestion de l'immigration prévue à l'art. 121a Cst. en tenant compte des intérêts économiques globaux du pays et en poursuivant la voie bilatérale.

Le 2 février 2015, le président de la Commission européenne et la présidente de la Confédération de l'époque ont convenu de mener des consultations en vue de déterminer s'il existait une voie envisageable pour les deux parties qui permît de mettre en oeuvre le nouveau mandat constitutionnel tout en préservant la voie bilatérale. Au cours de ces consultations, les deux parties étaient d'accord sur le fait qu'il fallait trouver une solution consensuelle qui respectât à la fois la Constitution et l'ALCP en 6

7

8

Accord du 21 juin 1999 entre la Confédération suisse, d'une part, et la Communauté européenne et ses États membres, d'autre part, sur la libre circulation des personnes (ALCP ; RS 0.142.112.681) Annexe K de la Convention du 4 janvier 1960 instituant l'Association européenne de libre-échange, version consolidée selon l'accord de Vaduz du 21 juin 2001 (convention AELE ; RS 0.632.31) Accord-cadre du 3 décembre 2008 entre la Confédération suisse et la Principauté de Liechtenstein sur la collaboration concernant la procédure de visa, l'entrée et le séjour ainsi que la coopération policière dans la zone frontalière (RS 0.360.514.2)

3174

FF 2017

s'appuyant sur une interprétation commune de l'actuelle clause de sauvegarde (art. 14, par. 2, ALCP).

Entre février 2015 et septembre 2016, l'UE et la Suisse ont mené 15 séries de consultations sur l'ALCP. En particulier après la votation au Royaume-Uni sur la sortie de l'UE (Brexit), le 23 juin 2016, il s'est avéré qu'il n'était pas possible d'aboutir à la solution visée.

2.2.2

Modification de la loi fédérale sur les étrangers

La procédure de consultation relative à la mise en oeuvre de l'art. 121a Cst. dans la LEtr s'est déroulée du 11 février au 28 mai 20159. Le projet mis en consultation prévoyait en particulier de soumettre également les ressortissants de pays membres de l'UE ou de l'AELE à des nombres maximaux et des contingents. De nombreux participants à la consultation ne se sont pas prononcés clairement en faveur ou en défaveur du projet législatif, mais ils ont souhaité qu'on y apporte de substantielles modifications. Par contre, quelques partis politiques et partenaires sociaux l'ont rejeté fondamentalement. Une très grande majorité s'est prononcée en faveur du maintien de l'ALCP et, partant, de la voie bilatérale.

Le 4 mars 2016, le Conseil fédéral a adopté le message relatif à la mise en oeuvre de l'art. 121a Cst10. Pour le cas où il n'aurait pas été possible de parvenir à temps à un consensus sur l'adaptation de l'ALCP, le projet de loi prévoyait d'introduire une clause de sauvegarde unilatérale pour les ressortissants des États membres de l'UE ou de l'AELE, dont l'activation devait entraîner l'instauration de nombres maximaux et de contingents. À noter que les ressortissants de ces États seraient restés soumis à l'ALCP, pour les uns, et à la convention AELE, pour les autres. Lors de l'octroi d'autorisations, des limitations provisoires et ciblées au moyen de nombres maximaux et de contingents auraient toutefois été possibles en cas de forte immigration en provenance de ces pays, en activant la clause de sauvegarde unilatérale. Cette clause était certes conforme aux dispositions de l'art. 121a Cst., mais, au plus tard lors de son activation, les mesures qui en découlent n'auraient plus été compatibles avec les conditions d'admission fixées dans l'ALCP et la convention AELE, ce qui risquait de créer une insécurité juridique.

D'après le projet de loi du Conseil fédéral, la réglementation applicable aux ressortissants d'États tiers devait être complétée notamment par des nombres maximaux et des contingents pour le regroupement familial, l'admission des personnes qui n'exercent pas d'activité lucrative et le domaine de l'asile.

Avant même que le Conseil fédéral n'adopte le message relatif à la mise en oeuvre de l'art. 121a Cst., le Tribunal fédéral s'est exprimé, dans un arrêt du

9

10

Cf. rapport sur les résultats de la procédure de consultation, disponible sur: www.admin.ch > Droit fédéral > Procédures de consultation > Procédures de consultation terminées > 2015 > DFJP FF 2016 2835

3175

FF 2017

26 novembre 2015, sur le rapport entre l'art. 121a Cst. et l'ALCP11. Il y considérait que, s'il y avait effectivement conflit de normes entre les modifications du droit national liées à la mise en oeuvre de l'art. 121a Cst. (modification de la LEtr) et l'ALCP, ce dernier primait dans l'application du droit.

Le 16 décembre 2016, les Chambres fédérales ont décidé de mettre en oeuvre l'art. 121a Cst. d'une manière qui ne correspond pas à la proposition du Conseil fédéral12. Le délai référendaire est échu le 7 avril 2017 sans avoir été utilisé. Le Conseil fédéral devra adopter les dispositions d'exécution nécessaires au niveau des ordonnances d'ici à janvier 2018 et les mettre en vigueur le plus rapidement possible, en même temps que les modifications de loi sur lesquelles elles reposent.

La réglementation décidée par le Parlement prévoit que le Conseil fédéral arrête des mesures visant à épuiser le potentiel qu'offre la main-d'oeuvre en Suisse. De plus, les employeurs doivent annoncer au service public de l'emploi les postes vacants dans des groupes de profession, domaines d'activités ou régions économiques qui enregistrent un taux de chômage supérieur à la moyenne. Si ces mesures n'ont pas l'effet souhaité ou si de nouveaux problèmes surgissent, des mesures supplémentaires doivent être prises (art. 21a LEtr).

Outre ces mesures en faveur des demandeurs d'emploi, il est prévu d'améliorer la mise en oeuvre de l'ALCP et de la convention AELE. Ces améliorations concernent en particulier l'exclusion de l'aide sociale en cas de recherche d'un emploi en Suisse (art. 29a LEtr) et l'extinction du droit de séjour après la cessation involontaire des rapports de travail (art. 61a LEtr). Quant aux ressortissants d'États tiers, l'idée de fixer de nouveaux nombres maximaux et contingents pour le regroupement familial, l'admission des personnes qui n'exercent pas d'activité lucrative et le domaine de l'asile a été abandonnée, contrairement à ce que prévoyait le projet de loi du Conseil fédéral.

La réglementation décidée par l'Assemblée fédérale peut être mise en oeuvre de manière à ce qu'elle soit compatible avec l'ALCP. Cependant, elle n'applique pas de nombres maximaux ni de contingents de manière généralisée aux ressortissants des pays membres de l'UE ou de l'AELE. En conséquence, elle ne met pas intégralement en oeuvre l'art. 121a Cst.

11

12

Arrêt du TF du 26 nov. 2015, 2C_716/2014, en particulier consid. 3.3 ; cf. à ce sujet le message du 4 mars 2016 relatif à la modification de la loi fédérale sur les étrangers (Gestion de l'immigration et améliorations de la mise en oeuvre des accords sur la libre circulation des personnes), ch. 1.2.3 ; FF 2016 2835 2852.

FF 2016 8651

3176

FF 2017

3

Buts et contenu de l'initiative

Les principaux objectifs des auteurs de l'initiative et le contenu de l'initiative se résument comme suit13: Les auteurs de l'initiative estiment qu'il n'est guère possible de mettre en oeuvre l'art. 121a Cst. sans compromettre gravement les accords bilatéraux conclus avec l'UE. Ils précisent que le peuple suisse s'est prononcé plusieurs fois en faveur de ces accords. Ils sont donc d'avis qu'il doit à présent faire un choix clair entre la poursuite de la voie bilatérale et l'application de l'art. 121a Cst.

D'après les auteurs de l'initiative, l'un des arguments avancés pendant la campagne de votation sur l'initiative sur l'immigration de masse était que l'art. 121a Cst. était compatible avec les accords bilatéraux, ce qui s'est révélé faux. Les auteurs de l'initiative indiquent que, les sept accords des Bilatérales I étant liés, la violation de la libre circulation entraînerait la résiliation de l'ALCP et, partant, rendrait automatiquement caducs les six autres accords («clause guillotine» prévue à l'art. 25, par. 4, ALCP).

Ils expliquent en outre qu'une mise en oeuvre intégrale de l'art. 121a Cst. impliquerait l'exclusion de la Suisse de différentes coopérations européennes, comme les programmes Horizon 2020 et Erasmus+, deux projets importants pour la recherche et la formation, et le programme MEDIA, un projet primordial pour la branche de l'audiovisuel.

Les auteurs de l'initiative rappellent que, sur le plan économique, la Suisse est étroitement liée à l'UE. Ils précisent que, si les accords des Bilatérales I devaient disparaître, la Suisse serait désavantagée sur le marché intérieur européen et qu'elle serait également lésée dans les domaines de la recherche, de l'apprentissage et de la culture, où les réseaux transnationaux ont fortement gagné en importance.

Les auteurs de l'initiative relèvent que la Suisse manque, par exemple, de personnel soignant et de personnel médical, une situation qui risque d'empirer à l'avenir. Ils déclarent que, même en consolidant ses propres formations, elle reste tributaire de spécialistes étrangers. Ils affirment en outre que ces spécialistes ne sont disposés à venir travailler en Suisse que s'ils y sont les bienvenus et qu'ils y ont pratiquement les mêmes droits sociaux que les Suisses, comme le prévoit l'ALCP. Enfin, les auteurs de l'initiative ajoutent
que de nombreux citoyens suisses tirent également profit de la libre circulation des personnes avec les États membres de l'UE ou de l'AELE. Ils estiment que près de 500 000 Suisses vivent dans les pays de l'UE, dont quelque 150 000 ne possèdent que la nationalité suisse et dépendent donc de la libre circulation des personnes pour pouvoir continuer de travailler dans leur pays d'accueil et ne pas être renvoyés en Suisse.

D'après les auteurs de l'initiative, les mesures d'accompagnement destinées à lutter contre la sous-enchère salariale contribuent pour une large part à préserver le niveau

13

Les arguments des auteurs de l'initiative sont disponibles à l'adresse suivante (seulement en allemand, état le 12.4.2017): www.initiative-rasa.ch > Ziele > Unsere Argumente > RASA Broschüre Okt. 2016; «Erfolgreich bleiben. Warum die Masseneinwanderungsinitiative die Schweiz in eine Sackgasse führt, und wie wir aus ihr herauskommen».

3177

FF 2017

des salaires en Suisse. Ils expliquent qu'elles sont liées juridiquement aux accords bilatéraux et seraient donc caduques si l'on renonçait à maintenir ces accords.

Les auteurs de l'initiative considèrent qu'ils pourraient retirer leur initiative si la mise en oeuvre de l'art. 121a Cst. ne menaçait pas les Bilatérales, ce qui garantirait une sécurité du droit durable. Le Parlement peut soumettre au vote du peuple et des cantons un contre-projet direct. Là aussi, l'initiative pourrait être retirée pour autant que ce contre-projet garantisse le maintien des accords bilatéraux avec l'UE.

4

Appréciation de l'initiative

4.1

Appréciation du but général de l'initiative

Le Conseil fédéral partage l'objectif des auteurs de l'initiative de maintenir l'ALCP et la voie bilatérale avec l'UE. Ce cadre juridique revêt en effet une grande importance pour la Suisse.

Les citoyens suisses ont montré à plusieurs reprises leur volonté de suivre la voie bilatérale, en particulier lors des votations suivantes:

14 15 16 17 18

­

21 mai 2000: acceptation de l'arrêté fédéral du 8 octobre 1999 portant approbation des accords sectoriels entre, d'une part, la Confédération suisse et, d'autre part, la Communauté européenne ainsi que, le cas échéant, ses États membres ou la Communauté européenne de l'énergie atomique14;

­

5 juin 2005: acceptation de l'arrêté fédéral du 17 décembre 2004 portant approbation et mise en oeuvre des accords bilatéraux d'association à l'Espace Schengen et à l'Espace Dublin15;

­

25 septembre 2005: acceptation de l'arrêté fédéral du 17 décembre 2004 portant approbation et mise en oeuvre du protocole relatif à l'extension de l'accord entre la Confédération suisse, d'une part, et la Communauté européenne et ses États membres, d'autre part, sur la libre circulation des personnes aux nouveaux États membres de la Communauté européenne et portant approbation de la révision des mesures d'accompagnement concernant la libre circulation des personnes16;

­

26 novembre 2006: acceptation de la loi fédérale du 24 mars 2006 sur la coopération avec les États d'Europe de l'Est17;

­

8 février 2009: acceptation de l'arrêté fédéral du 13 juin 2008 portant approbation de la reconduction de l'accord entre la Suisse et la Communauté européenne et ses États membres sur la libre circulation des personnes, ainsi qu'approbation et mise en oeuvre du protocole visant à étendre l'accord sur la libre circulation à la Bulgarie et à la Roumanie18.

FF 2000 1507 FF 2005 2581 FF 2005 4117 FF 2006 6823 FF 2008 8005

3178

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En vertu de la clause guillotine (art. 25, par. 4, ALCP), tous les autres accords bilatéraux I cesseraient automatiquement d'être applicables six mois après la notification de la dénonciation de l'ALCP. Entre autres, l'accord relatif aux marchés publics, l'accord sur la prévention des obstacles techniques au commerce, l'accord relatif aux échanges de produits agricoles ou l'accord sur le trafic aérien ou sur le trafic terrestre seraient donc eux aussi caducs. De même, l'accord associant la Suisse au programme Horizon 2020, conclu en 2014, deviendrait également caduc si l'ALCP était dénoncé.

Parallèlement à l'annulation des accords directement visés par la clause guillotine, l'UE pourrait remettre en question une série d'autres traités qu'elle estime être liés à l'ALCP. Ce risque concerne notamment les accords d'association à Schengen (AAS)19 et à Dublin (AAD)20. L'AAS et l'AAD ne sont pas formellement liés à l'ALCP (pas de clause guillotine), mais ils pourraient être remis en question par l'UE, pour qui l'existence d'un accord de libre circulation avec la Suisse était une condition préalable à l'association de la Suisse à l'acquis de Schengen. De plus, du fait de l'étroite corrélation entre ces deux accords, l'AAD ne peut être appliqué que si l'AAS l'est également (art. 14, par. 2, AAD).

Même si l'impact d'une dénonciation de l'ALCP et de la fin concomitante des Bilatérales I de même que celui d'une éventuelle abrogation d'autres traités entre la Suisse et l'UE sont difficiles à évaluer, il faut s'attendre à de graves conséquences pour l'économie suisse. Pour une petite économie ouverte comme celle de la Suisse, l'accès aux marchés internationaux est une nécessité vitale. Les exportations de la Suisse sont destinées à près de 60 % aux marchés de l'UE, et ses importations en proviennent à 80 %. Grâce aux accords bilatéraux, la Suisse bénéficie d'un accès élargi au marché intérieur de l'UE, qui compte 500 millions de consommateurs.

Forte de ses 28 États membres, l'UE est donc, de loin, le principal partenaire commercial de la Suisse21.

Si l'initiative devait être rejetée par le peuple et les cantons lors d'une votation, il n'y aurait toujours pas de mandat explicite visant à dénoncer l'ALCP. En effet, contrairement à l'initiative Ecopop22, qui a été rejetée, ni l'art. 121a Cst., qui resterait
alors applicable, ni les dispositions transitoires prévues à l'art. 197, ch. 11, Cst.

ne contiennent de disposition en ce sens.

Reste à savoir s'il resterait possible, au cas où l'art. 121a Cst. serait maintenu, de conclure des traités internationaux qui ne contiennent ni contingents ni nombres maximaux. Il faudrait alors, en cas de nouvel élargissement de l'UE vérifier si la Suisse peut signer le protocole d'extension s'y rapportant.

19

20

21 22

Accord du 26 octobre 2004 entre la Confédération suisse, l'Union européenne et la Communauté européenne sur l'association de la Confédération suisse à la mise en oeuvre, à l'application et au développement de l'acquis de Schengen (RS 0.362.31).

Accord du 26 octobre 2004 entre la Confédération suisse et la Communauté européenne relatif aux critères et aux mécanismes permettant de déterminer l'État responsable de l'examen d'une demande d'asile introduite dans un État membre ou en Suisse (RS 0.142.392.68).

Cf. message du 7 décembre 2012 relatif à l'initiative populaire « Contre l'immigration de masse » ; ch. 4.2.1, 4.2.2 et 4.3.1 ; FF 2013 279.

Cf. message du 23 octobre 2013 concernant l'initiative populaire «Halte à la surpopulation ­ Oui à la préservation durable des ressources naturelles» ; FF 2013 7783.

3179

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4.2

Conséquences en cas d'acceptation de l'initiative

L'abrogation des art. 121a et 197, ch. 11, Cst. par le peuple et les cantons permettrait de résoudre le conflit entre la Constitution et l'ALCP ainsi que la convention AELE. Cependant, elle entraînerait simultanément l'annulation du mandat de gestion et de limitation de l'immigration, d'une part, et d'instauration d'une préférence nationale, d'autre part, attribué par le peuple et les cantons. Il est vrai que le solde migratoire net est en recul depuis l'acceptation de l'initiative «Contre l'immigration de masse». Le Conseil fédéral estime qu'il faut tout de même continuer de gérer et limiter l'immigration au moyen de mesures appropriées comme celles prévues dans la mise en oeuvre de l'art. 121a Cst. décidée par les Chambres fédérales le 16 décembre 2016. Abroger complètement l'art. 121a Cst. irait à l'encontre de ce but. Par ailleurs, le Conseil fédéral est opposé, pour des raisons tenant au fonctionnement démocratique, à ce que l'on revienne sur la décision du peuple et des cantons du 9 février 2014 après un laps de temps si court, bien que la Constitution puisse être révisée en tout temps (art. 192, al. 1, Cst.).

Le Conseil fédéral présume que la loi d'exécution de l'art. 121a Cst. arrêtée par l'Assemblée fédérale pourra être en principe maintenue si l'initiative est acceptée.

Ce n'est qu'une fois les dispositions d'exécution définies qu'il sera possible d'évaluer les conséquences de la législation de mise en oeuvre décidée par l'Assemblée fédérale sur les finances et le personnel.

4.3

Mérites et lacunes de l'initiative

L'abrogation des art. 121a et 197, ch. 11, Cst. exigée par les auteurs de l'initiative mène à la suppression de la discordance entre la Constitution et l'ALCP.

La modification de la LEtr décidée par l'Assemblée fédérale le 16 décembre 2016 en vue de mettre en oeuvre l'art. 121a Cst. prévoit de renoncer à l'utilisation de nombres maximaux et de contingents pour l'admission de ressortissants de pays membres de l'UE ou de l'AELE (cf. ch. 2.2.2).

Cette réglementation peut être mise en oeuvre de manière à ce qu'elle soit compatible avec l'ALCP. Elle rétablit ainsi la sécurité juridique dans les rapports avec l'UE et avec les États membres de l'AELE, comme l'exigent les auteurs de l'initiative, et assure le maintien des accords bilatéraux. Toutefois, notamment en ne fixant ni nombres maximaux ni contingents pour les ressortissants des pays membres de l'UE et de l'AELE, elle n'applique pas intégralement l'art. 121a Cst.

La déclaration des auteurs de l'initiative selon laquelle la disparition des accords bilatéraux risquerait d'entraîner le renvoi de nombreux Suisses vivant dans l'UE (cf. ch. 3) n'est pas fondée. En effet, l'ALCP prévoit qu'en cas de dénonciation ou de non-reconduction, les droits acquis par les personnes concernées ne sont pas touchés et que les parties contractantes régleront d'un commun accord le sort des droits en cours d'acquisition (art. 23 ALCP).

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4.4

Compatibilité avec les obligations internationales

L'initiative ne contient pas de dispositions qui iraient à l'encontre des actuelles obligations internationales de la Suisse.

5

Conclusions

5.1

Renonciation à un contre-projet direct

Le 26 octobre 2016, le Conseil fédéral a pris la décision de principe de recommander le rejet de l'initiative et d'y opposer un contre-projet direct. Il a alors précisé qu'il définirait la teneur de ce contre-projet dès que le Parlement aurait pris sa décision concernant la mise en oeuvre de l'article constitutionnel sur l'immigration (art. 121a Cst.; cf. ch. 2.2.2). Il avait pour objectif de reporter dans la Constitution cette décision d'ordre législatif. Le 21 décembre 2016, après la décision du Parlement du 16 décembre 2016, le Conseil fédéral a défini les grandes lignes de deux versions d'un contre-projet direct pour permettre un large débat. Écourtée afin de respecter les délais de traitement légaux, la procédure de consultation a duré du 1er février au 1er mars 2017 (cf. ch. 1.2).

Dans la première version, l'actuel art. 121a, al. 4, Cst. devait être remplacé par une disposition arrêtant que la gestion de l'immigration devait tenir compte des accords internationaux d'une grande portée pour la position de la Suisse en Europe. Cette solution permettait de prendre en compte non seulement la décision du Parlement de mettre en oeuvre l'article en question de manière à ce qu'il soit compatible avec l'ALCP, mais aussi le fait que le peuple a confirmé la voie bilatérale à plusieurs reprises dans les urnes. Elle prévoyait en outre d'abroger l'art. 121a, al. 5, Cst. et la disposition transitoire s'y rapportant (art. 197, ch. 11, Cst.).

La seconde version du contre-projet direct consistait, quant à elle, à abroger cette disposition transitoire sans modifier l'art. 121a Cst. lui-même.

Les deux propositions du Conseil fédéral ont été rejetées à la quasi-unanimité des participants à la consultation, bien que la première ait bénéficié d'un soutien un peu plus fort que la seconde. Une des principales critiques formulées à l'encontre de la première version a été le manque de clarté de l'expression «accords internationaux d'une grande portée pour la position de la Suisse en Europe», qui risquait de créer une insécurité juridique. Certains participants ont en outre estimé que la relation avec l'art. 5, al. 4, Cst. posait problème: le projet ne faisait que répéter, pour ces accords, le principe déjà inscrit dans cette disposition selon lequel il convient de respecter le droit international. De plus, d'aucuns
ont demandé que les instruments nécessaires à la gestion de l'immigration soient décrits de manière plus ouverte.

S'agissant de la seconde proposition, bon nombre des participants à la consultation étaient d'avis que la solution proposée n'aurait aucun effet étant donné que le délai de mise en oeuvre était de toute façon déjà passé. Aux yeux de certains, ce projet remettait en question la mise en oeuvre décidée par le Parlement et créait un mandat de durée illimitée pour la mise en oeuvre de l'art. 121a Cst., même, le cas échéant, sans procéder à l'adaptation ad hoc de l'ALCP et de la convention AELE. Plusieurs 3181

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ont critiqué pour leur part le fait que la mise en oeuvre de l'art. 121a Cst. n'était ainsi que reportée à une date indéterminée.

Des participants à la consultation privilégiaient une autre version de contre-projet direct, qui pouvait assurer le maintien de la voie bilatérale. Certains ont formulé des propositions. Cependant, il n'y avait aucune unité concernant le contenu d'une nouvelle version de contre-projet.

Compte tenu des résultats de la procédure de consultation et du fait que le référendum contre la modification de la LEtr relative à la mise en oeuvre de l'art. 121a Cst.

n'a pas abouti, le Conseil fédéral renonce à proposer un contre-projet direct. La procédure de consultation a montré une nouvelle fois, à quelques exceptions près, que la voie bilatérale avec l'UE bénéficie d'un large soutien. De plus, la plupart des participants à la consultation soutiennent aussi la mise en oeuvre de l'art. 121a Cst.

telle que décidée par les Chambres fédérales.

5.2

Rejet de l'initiative

Le Conseil fédéral rejette l'initiative populaire «Sortons de l'impasse! Renonçons à rétablir des contingents d'immigration» et propose aux Chambres fédérales de la soumettre au peuple et aux cantons en leur recommandant de la rejeter.

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