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6090 MESSAGE du

Conseil fédéral à l'Assemblée fédérale concernant un projet d'arrêté fédéral sur la constitution de réserves de crise par l'économie privée (Du 10 août 1951)

Monsieur le Président et Messieurs, Nous avons l'honneur de vous soumettre, avec le présent message, un projet d'arrêté fédéral concernant la constitution dé réserves de crise par l'économie privée.

I. L'UTILITÉ DU PROJET D'ARRÊTÉ DU POINT DE VUE D'UNE POLITIQUE VISANT A ATTÉNUER LES FLUCTUATIONS

ÉCONOMIQUES Dans le deuxième, rapport intermédiaire, sur les mesures, propres à créer des possibilités de travail, que nous vous avons présenté le 12 juin 1950.

il a été question des moyens dont dispose l'Etat pour combattre les crises économiques et contenir une surexpansion malsaine de l'activité. Nous y faisions observer que, dans notre pays, l'Etat n'a que des moyens très limités d'influencer l'évolution économique: en effet, nos principes constitutionnels et l'aversion qu'éprouvé notre population à l'égard d'interventions profondes de l'Etat exigent une prudente réserve lorsqu'il s'agit de passer de simples recommandations aux décisions. La structure federative de notre pays impose aussi des restrictions à la Confédération; d'autre part, il est d'autant plus difficile d'assurer l'équilibre économique sur le plan national que notre industrie est essentiellement orientée vers l'exportation. En dépit de ces obstacles, nous avons déclaré une fois de

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plus que nous chercherions à atténuer aussi efficacement que possible les fluctuations de l'emploi.

Notre rapport soulignait en outre que la politique de l'Etat tendant à régulariser l'activité économique ne pouvait se révéler efficace, surtout en Suisse, que si elle était l'oeuvre, non pas de quelques organes administratifs seulement, mais de l'ensemble des éléments actifs de la nation, des employeurs comme des salariés, des producteurs comme des consommateurs. Il est évident que dans un régime de libéralisme économique, les entreprises privées sont responsables en premier lieu de la marche normale des affaires et du maintien de l'emploi. C'est la raison pour laquelle l'Etat ne devrait intervenir que dans les secteurs où l'économie privée n'est pas en état d'assurer elle-même du travail en suffisance. Il est dès lors d'autant plus recommandable de créer des bases solides, aussi bien d'ordre juridique qu'économique, permettant aux entreprises privées de contribuer dans une plus large mesure que jusqu'à présent à prévenir de leur propre initiative et par leurs propres moyens les fluctuations du degré d'occupation. Le présent message expose l'un des moyens d'atteindre ce but.

Depuis que les économistes observent l'évolution, ils ont toujours constaté que les hommes agissent trop souvent à l'encontre de leur intérêt.

En période de prospérité, pour ainsi dire chacun a tendance, sous l'effet de l'optimisme général, à passer des commandes, à faire des acquisitions, en un mot à se livrer à des dépenses supplémentaires qui accentuent le rythme de l'activité et favorisent la hausse des prix. En cas de fléchissement des affaires et de baisse des prix en revanche, la grande majorité de la population, par crainte des pertes qu'elle pourrait subir ou dans l'attente de prix plus favorables encore, modère ses achats et commandes, ce qui ralentit encore davantage le rythme de l'activité. Chacun a évidemment de bonnes raisons à faire valoir pour expliquer cette attitude: on déclare que le revenu augmente en période de prospérité, qu'il risque d'être réduit à la portion congrue en temps de marasme, de sorte que des économies s'imposent tout naturellement. Le chef d'entreprise ajoute que l'accroissement des investissements et des dépenses lorsque les affaires marchent bien est une conséquence de l'intensification
de l'activité et qu'il se justifie aussi du fait que des frais généraux et des taux d'amortissement plus élevés lui permettent d'alléger d'une manière tout à fait licite ses charges fiscales dont la progression va de pair avec l'augmentation des bénéfices.

Si compréhensibles qu'ils paraissent, ces arguments sont absolument inconciliables avec une politique visant à régulariser l'activité économique.

Pour satisfaire aux exigences de l'équilibre économique, il faudrait renoncer le plus possible pendant la durée de la prospérité aux dépenses qui ne sont pas indispensables; toutefois, les sommes ainsi économisées devraient être mises de côté et n'être utilisées qu'au moment du ralentissement des affaires. En procédant ainsi, on pourrait, indéniablement, éviter de trop

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violentes fluctuations dans un sens ou dans l'autre; sans parler du fait que la collectivité a un intérêt à la marche normale des affaires, le système que nous préconisons présente l'avantage que chacun pourrait, en période de dépression, couvrir ses besoins à des conditions plus avantageuses.

L'expérience démontre qu'il ne servirait pas à grand'chose d'inviter les consommateurs à adopter un comportement approprié aux circonstances.

Ils ne sont d'ailleurs pas les seuls à accentuer le rythme de l'activité par leurs achats excessifs en période de prospérité et à stimuler la dépression par leur retenue en phase de fléchissement; les entreprises commerciales, industrielles et artisanales, ainsi que de nombreuses administrations publiques, ont également tendance à accroître leurs dépenses et investissements précisément au moment où l'économie privée est de toute façon pleinement occupée et où chaque demande supplémentaire fait monter encore davantage les frais de production et les prix.

A plusieurs reprises au cours de ces dernières années, nous avons engagé les administrations fédérales et les entreprises en régie à répartir leurs commandes et leurs dépenses d'une façon plus conforme aux nécessités d'une politique visant à stabiliser l'emploi; nous avons également invité les gouvernements cantonaux, par diverses circulaires, à en faire autant.

Les cantons et les communes ont effectivement pris nombre de dispositions utiles en vue de mieux garantir l'équilibre économique. Il s'agit maintenant de trouver des moyens qui, sans porter atteinte à la libre initiative et au sens des responsabilités du chef d'entreprise, seraient propres à inciter et encourager l'économie privée à faire preuve de modération en période de prospérité et à différer les travaux, commandes et investissements non urgents en prévision du ralentissement des affaires.

L'évolution de la situation économique au cours de ces dernières années démontre l'urgence de mesures de ce genre. Après que le ralentissement des affaires eut à peu près cessé au début de 1950, le déclenchement des hostilités en Extrême-Orient et le réarmement qui s'ensuivit partout donnèrent une nouvelle impulsion à l'activité. Les prix de presque toutes les marchandises subirent une forte hausse sur les marchés internationaux ; certaines pénuries de matières
premières d'importance stratégique entraînèrent des difficultés qui accentuèrent encore le renchérissement. S'il a été possible jusqu'à présent de soustraire jusqu'à un certain point à ces influences extérieures le coût de la vie dans notre pays, cela ne signifie nullement que la Suisse soit préservée de poussées inflationnistes. Il est d'ores et déjà évident que l'économie privée stimulée par de meilleurs rendements -- comme ce fut déjà le cas pendant les années 1946 à 1948 -- accroît ses acquisitions, ses dépenses et ses immobilisations de capitaux^ ce qui a pour effet de surcharger à l'extrême l'appareil de production, d'accentuer la pénurie de main-d'oeuvre et d'accélérer la hausse des prix de revient et de vente.

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II importe de remédier à temps et avec la plus grande énergie à ces tendances qui aboutiraient finalement à une nouvelle dépréciation de la monnaie. Dans notre pays, la hausse des prix et l'augmentation de l'indice du coût de la vie enregistrée depuis le début du conflit coréen n'ont pas été aussi prononcées que dans la plupart des Etats qui nous font concurrence. C'est un fait dont nous pouvons nous estimer heureux, car il atténue les obstacles auxquels se heurtait souvent l'écoulement de nos produits en raison du niveau relativement élevé des prix de revient et de vente.

En vue de maintenir nos possibilités d'exportation et un degré d'occupation satisfaisant en période de ralentissement des affaires, l'économie et les personnes qu'elle occupe auraient un intérêt à empêcher une sensible augmentation du coût de la vie et des frais de production. Cet objectif ne peut toutefois être atteint que si les pouvoirs publics et l'économie privée cherchent, par un effort commun, à éviter une surexpansion. Etant donné qu'il est souvent difficile au chef d'entreprise, pour des raisons d'ordre commercial et fiscal, d'adopter un comportement conforme à la politique que nous préconisons, il nous paraît d'autant plus urgent de rechercher des moyens permettant aux entreprises privées de participer aux mesures tendant à stabiliser l'emploi.

IL LES RÉSERVES DE CRISE CONTRIBUENT A ASSURER L'ÉQUILIBRE ÉCONOMIQUE Plusieurs pays étrangers se sont efforcés de stabiliser l'emploi par des mesures dirigistes, telles que le contrôle, la restriction ou l'interdiction des investissements. Sans parler du fait que le résultat de ces mesures est très contesté à l'heure actuelle, de semblables interventions de l'Etat sont incompatibles avec un régime économique fondé sur la libre initiative et le sens des responsabilités des chefs d'entreprise. D'ailleurs, la constitution n'autorise pas la Confédération à exercer une pareille influence sur l'activité économique; même l'article 31 quinquies approuvé en 1947 par le peuple et les cantons ne le lui permet pas, la liberté du commerce et de l'industrie étant réservée. Si justifié que soit le système consistant à différer en période de prospérité des travaux et commandes pour les faire exécuter pendant la dépression, il n'est réalisable que s'il repose sur le consentement général.
Bien que le Conseil fédéral n'ait pu jusqu'à présent influencer l'activité économique que par des recommandations et des avertissements, on ne saurait prétendre que ses appels à la raison n'aient pas été entendus.

Nous avons déjà relevé précédemment que pour des raisons très plausibles et parfaitement compréhensibles du point de vue commercial, il était souvent difficile, voire impossible, au chef d'entreprise soucieux de Ja prospérité de son affaire d'agir selon les recommandations maintes fois

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répétées des pouvoirs publics, à savoir de différer, en période de prospérité, les commandes et les travaux qui ne sont pas urgents pour les adjuger en temps de dépression. On ne doit en effet pas oublier que l'Etat, qui, en tant que responsable de la politique visant à régulariser l'activité économique, demande au monde des affaires de freiner autant que possible ses investissements et ses dépenses en période de plein emploi, désavantage à tel point, fiscalement parlant, les entreprises prêtes à accéder à cette demande que nombre d'entre elles finissent par estimer que le jeu n'en vaut pas la chandelle.

Si les entreprises bénéficiant de la prospérité économique sont empêchées, par le fisc, d'agir conformément aux exigences d'une saine politique, cela est dû à la nature de notre législation fiscale. Le chef d'entreprise qui s'abstient de consacrer ses bénéfices supplémentaires à des acquisitions et à d'autres dépenses afin de créer des réserves destinées à être utilisées lors d'un ralentissement général des affaires est obligé, aussi bien d'après la législation en matière d'impôt pour la défense nationale que d'après les prescriptions fiscales de la plupart des cantons, de déclarer ces réserves comme bénéfice net et de payer des impôts en conséquence.

En revanche, l'entrepreneur qui utilise au fur et à mesure ses excédents de recettes pour des acquisitions, des transformations, des rénovations et d'autres dépenses, peut accroître ses frais généraux défalcables ainsi que le taux d'amortissement admis par le fisc et, de ce fait, réduire le bénéfice imposable d'une manière parfaitement licite.

Plus les exigences du fisc à l'égard des réserves constituées conformément aux recommandations des autorités seront grandes et moins l'on sera enclin, à ajourner l'adjudication de travaux et de commandes dans l'intérêt de l'économie nationale. Cela étant, on ne saurait reprocher à un chef d'entreprise d'hésiter à suivre les conseils de modération des autorités et de son association. Et s'il arrive à la conclusion, après avoir pesé le pour et le contre, que l'ajournement de travaux, commandes et investissements projetés n'est pas indiqué en raison de l'accroissement des charges fiscales qui en découlerait pour lui, on peut certes déplorer une telle décision, mais on est bien obligé de la comprendre. En raison
des avantages que présente, pour son entreprise, une diminution des charges fiscales, des appels et des recommandations ne sont guère de nature à l'inciter à renoncer, dans l'intérêt de l'économie nationale, à ces avantages immédiats, d'autant moins que, pendant les années de prospérité économique et d'augmentation des recettes, la progressivité de l'impôt ne laisse pas de s'accentuer. Aussi bien a-t-on souvent répondu aux exhortations des autorités que c'était l'Etat lui-même qui, par sa politique fiscale, poussait les entreprises à accroître toujours davantage leurs dépenses en période de prospérité, au risque d'accentuer la hausse des frais d'exploitation et des coûts de production. Et c'est pourquoi également des économistes et

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des représentants du inonde des affaires ont commencé, il y a plusieurs années déjà, à examiner les possibilités de remédier aux inconvénients d'ordre fiscal auxquels s'exposent les entreprises qui entendent tenir compte des recommandations et des avertissements officiels.

Les administrations et entreprises publiques ne se trouvent pas dans les mêmes conditions; elles n'ont pas à craindre un accroissement de charges si elles font preuve de modération en période de prospérité et n'adjugent leurs travaux et commandes qu'au moment où le ralentissement des affaires se manifeste. Il ne suffirait cependant pas que les pouvoirs publics soient les seuls à se conformer aux instructions et recommandations dont il a été question, alors que les entreprises privées pourraient agir comme elles l'entendent. Pour empêcher de trop violentes fluctuations de l'emploi et leurs funestes conséquences, il apparaît dès lors urgent de trouver une solution générale et uniforme au problème consistant à dédommager les entreprises privées pour le préjudice fiscal qu'elles subissent si elles tiennent compte des exhortations qui leur sont adressées. La situation économique actuelle, qui présente tous les symptômes de la surexpansion et menace déjà la stabilité des prix et des salaires, milite particulièrement en faveur de la mise en réserve d'une partie des recettes supplémentaires dues à l'intensification de l'activité.

L'élimination des obstacles qui entravent l'équilibre économique n'est pas commandée uniquement par les facteurs actuels d'impulsion. Il est aussi très recommandable de prendre à longue échéance des mesures visant d'une part à atténuer les dépressions et, d'autre part, à freiner une surexpansion malsaine. On aurait fait un pas décisif s'il était possible, par des moyens appropriés, d'inciter l'économie privée à verser une partie des bénéfices supplémentaires réalisés en période de prospérité à une réserve de crise spéciale qui serait affectée au financement de commandes, d'acquisitions et d'investissements en cas de fléchissement des affaires, de crise menaçante ou de dépression proprement dite. Par rapport aux méthodes usuelles de la politique tendant à régulariser l'activité économique, des réserves de ce genre présenteraient le double avantage de freiner la surexpansion pendant la prospérité et de la stimuler
durant la dépression. En effet, la constitution de réserves en période d'intense activité économique « stérilise » des sommes qui, si elles étaient dépensées, augmenteraient la demande de biens de production ou autres et accentueraient ainsi l'expansion; inversement, l'utilisation de ces réserves en cas de fléchissement des affaires est de nature à stimuler la demande de marchandises de tous genres et, partant, à améliorer le degré d'occupation.

Un autre avantage de ces réserves réside en ceci qu'elles assurent dans une large mesure des possibilités de travail : les travaux et commandes que le chef d'entreprise diffère pendant qu'il constitue ses réserves de crise seront très probablement exécutés s'il se décide, en période de ralentisse-

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ment des affaires, à utiliser les réserves en question. Cela vaut tout particulièrement pour les réparations, rénovations, améliorations techniques, investissements et acquisitions qui auront été ajournés pendant la phase de prospérité.

Mais les réserves de crise présentent encore un troisième avantage; les travaux et commandes qu'elles permettront d'exécuter s'inséreront pour l'essentiel dans l'activité économique normale; ils ne se distingueront guère des travaux et commandes adjugés habituellement par l'économie privée. Tandis que la création de possibilités de travail au moyen de fonds publics influence principalement la branche du bâtiment, les autres branches n'en profitant qu'indirectement, l'utilisation des réserves de crise de l'économie privée se traduit par une augmentation des commandes et des travaux dont bénéficient directement un beaucoup plus grand nombre de producteurs. Qu'une minoterie, une fabrique de chocolat ou un garage modernise son équipement, qu'une usine électro-chimique agrandisse ses laboratoires, qu'une fabrique d'horlogerie fasse procéder à des travaux de réparation internes, qu'une filature travaille pour les stocks, qu'un tissage prépare une nouvelle collection, qu'un grand magasin réorganise ses bureaux ou que plusieurs exportateurs se réunissent pour pouvoir mieux prospecter les marchés étrangers --- il apparaît possible, pour ainsi dire partout, de créer, avec les réserves de crise, des possibilités de travail permettant aux employés et ouvriers menacés de chômage de continuer à gagner leur vie dans leur profession et, dans la plupart des cas, à leur lieu de travail habituel.

On évite ainsi les inconvénients qu'impliqué le système consistant à combattre la crise principalement au moyen de fonds publics, système qui profite avant tout à l'industrie de la construction et oblige par conséquent les ouvriers qualifiés à se faire embaucher comme manoeuvres sur clés chantiers pour pouvoir subsister. C'est précisément à cause de cela qu'on n'a parfois pas vu d'un bon oeil les efforts déployés par les autorités en vue d'exercer une influence sur le degré d'occupation par l'octroi de subventions. Aussi convient-il d'accueillir avec d'autant plus de faveur une mesure qui garantit, du fait que les commandes sont réparties plus rationnellement dans le temps, le maintien
d'une activité plus ou moins normale dans les différentes branches et rend ainsi superflues des solutions de fortune du genre de celles dont il vient d'être question. Il est en effet manifeste que la constitution de réserves de crise conformément au projet d'arrêté ci-joint est non seulement dans l'intérêt de l'économie nationale, mais aussi et surtout dans celui des ouvriers et employés.

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III. LA COMPENSATION DES CHARGES FISCALES ENCOURAGE LA CONSTITUTION DE RÉSERVES Quand on examine les moyens qu'offre notre régime économique pour inciter les entreprises à constituer des réserves de crise avec les superbénéfices faits pendant les années de prospérité, il convient de s'arrêter en premier lieu à celui qui paraît le plus simple : à savoir Vexonération des sommes utilisées pour la constitution de telles réserves, cette exonération devant porter sur les impôts et les taxes qui seraient perçus sur ces sommes si elles étaient distribuées comme bénéfice ou versées à une réserve générale.

Cela permettrait, selon toute vraisemblance, d'éviter que les entreprises qui suivent les conseils et recommandations des autorités, en restreignant autant que possible leurs dépenses et leurs commandes en période de prospérité, ne soient désavantagées, fiscalement parlant, par rapport à celles qui, malgré toutes les mises en garde, ont fait des dépenses et des placements de capitaux au moment le plus défavorable du point de vue de la politique que nous préconisons.

C'est en 1942 qu'a été discutée pour la première fois l'idée d'encourager, à l'aide d'allégements fiscaux, la constitution de réserves de crise par l'économie privée; mais l'état des finances fédérales et une évolution économique incertaine avaient alors paru peu propices à la réalisation de cette idée.

Cette dernière rencontra un accueil plus favorable après la fin des hostilités, lorsqu'on assista à une forte reprise des affaires qui conduisit à un suremploi et, partant, à une hausse assez alarmante des prix et des coûts de production. Cela engagea alors le délégué aux possibilités de travail à proposer à plusieurs reprises aux autorités fédérales de donner aux entreprises le moyen de constituer des réserves exonérées et destinées à être utilisées pour des agrandissements et des travaux de rénovation en période de crise.

En raison des dangers de la surexpansion économique, M. Gressot, conseiller national, présenta en 1947, pendant la session d'été des .chambres fédérales, un postulat qui donnait également une forme concrète au désir de voir les entreprises constituer, avec le rendement des bonnes années, des réserves avec privilège fiscal pour pouvoir créer des possibilités de travail en cas de fléchissement du degré d'occupation. Mais
il y avait encore trop de questions à résoudre, notamment dans les domaines de la législation et de la technique fiscales, pour que nous puissions déjà songer à présenter un projet ad Jiac aux chambres. En revanche, nous traitâmes d'une manière assez détaillée, dans notre rapport intermédiaire du 12 juin 1950 sur les mesures propres à créer des possibilités de travail, le problème de la constitution de réserves de crise avec privilège fiscal; sans nous dissimuler les obstacles que rencontrerait la réalisation de cette idée, nous laissions entrevoir, dans ce rapport, que nous agirions en temps voulu et que nous chercherions une solution acceptable.

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Nous avons dit plus haut pourquoi il semblait indiqué de ne pas attendre plus longtemps pour agir: de même que pendant les années 1946 à 1948, on est de nouveau partout enclin, à la faveur de la prospérité économique, à faire toutes sortes de dépenses, d'acquisitions et de placements de capitaux qu'il serait préférable, pour des raisons évidentes, de remettre à plus tard. Mais il est apparu, déjà au cours des consultations relatives à l'élaboration d'un projet d'arrêté sur la constitution de réserves de crise par l'économie privée, qu'il serait très difficile, sinon impossible, de réaliser le plan initial, d'après lequel on aurait dû exonérer d'emblée, de l'impôt pour la défense nationale, les sommes mises de côté pendant la période d'expansion économique pour servir à créer plus tard des possibilités de travail. Il est en effet indéniable qu'une telle exonération eût été contraire au système fiscal en vigueur; outre qu'elle aurait nécessité une revision de la législation en matière d'impôt pour la défense nationale, elle aurait pu conduire à des abus. De plus, la méthode consistant à exonérer d'entrée de jeu la part des bénéfices affectée aux réserves de crise aurait entraîné toutes sortes de complications, notamment du fait que les autorités fiscales n'auraient guère pu éviter une surveillance constante des réserves, puisque l'exonération aurait dû être subordonnée à la condition que lesdites réserves fussent utilisées, pour créer des possibilités de travail et combattre la crise, à un moment fixé par les pouvoirs publics. En effet, c'est de cette manière seulement qu'on aurait pu s'assurer que les réserves seraient employées conformément au but visé et, dans le cas où celles-ci seraient utilisées prématurément ou à d'autres fins, réclamer après coup aux entreprises défaillantes l'impôt dû. Et l'on pouvait objecter avec raison que les fonctions de contrôle qu'il aurait fallu alors confier au fisc incombaient non pas à celui-ci, mais aux organes chargés d'influencer l'activité économique. Il fallait donc chercher un autre moyen d'encourager la constitution de réserves de crise, un moyen n'affectant en rien la législation fiscale et la taxation, un moyen mettant l'accent sur l'aspect économique de la constitution et de l'emploi des réserves.

Après de nombreuses consultations et conférences avec
les milieux de l'économie privée, on est arrivé à une solution qui renverse en quelque sorte les termes du problème de l'exonération. Cette solution prévoit que les réserves de crise accumulées en période de prospérité seront imposées normalement. En revanche, on ristournera l'impôt pour la défense nationale payé par les entreprises sur ces réserves dès l'instant où elles serviront à créer des possibilités de travail.

Il est certain que l'économie privée aurait préféré -- notamment pour des raisons psychologiques -- le système de l'exonération immédiate. Mais elle a compris les objections du fisc. Aussi les associations économiques ont-elles décidé, après avoir consulté leurs membres, d'approuver la nouvelle solution. Ce faisant, elles se sont laissé guider par le fait que les deux

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systèmes, celui de l'exonération immédiate et celui de la ristourne ultérieure de l'impôt, présentaient en fin de compte, pour les entreprises, des avantages matériels a peu près identiques; le second leur paraissait même préférable à certains égards. En effet, les entreprises créent une situation parfaitement claire en remplissant, pour les réserves de crise aussi, leurs obligations envers le fisc. Ainsi, elles n'ont pas à craindre, de la part de ce dernier, des investigations tendant à déterminer si les réserves existent toujours, et elles ne risquent pas non plus de recevoir un rappel d'impôt si elles ont été obligées, pour une raison quelconque, d'employer prématurément, ou à d'autres fins, lesdites réserves; car le seul inconvénient qu'impliqué une telle manière de faire est qu'elles perdent le droit à la ristourne qu'elles auraient pu faire valoir si eues avaient employé les réserves en temps voulu et conformément au but recherché.

Il est vrai qu'on a exprimé la crainte, dans les milieux de l'économie privée, que le système prévu puisse être interprété comme une sorte de subventionnement des entreprises qui font valoir leur droit à la ristourne après avoir exécuté des mesures de lutte contre le chômage. Si une telle interprétation se répandait, elle serait sans doute de nature à dissuader maintes entreprises, qui ne veulent pas entendre parler de subventions officielles, d'accumuler des réserves de crise. Mais l'opinion selon laquelle la ristourne de l'impôt payé sur les réserves de crise est une subvention camouflée n'est défendable d'aucune façon. En différant les commandes, travaux et immobilisations de capitaux qui ne sont pas urgents, l'entreprise ne se met nullement dans une situation requérant une aide financière de l'Etat; en revanche, elle supporte, du fait que les sommes affectées à la réserve de crise sont intégralement imposables, une charge supplémentaire qu'elle aurait pu éviter jusqu'à un certain point en utilisant au fur et à mesure ses surplus de recettes dus à la prospérité économique.

La ristourne prévue constitue donc purement et simplement une compensation de la charge fiscale assumée lors de la constitution de la réserve de crise, une compensation qui doit permettre aux entreprises de suivre les recommandations et les conseils des autorités dans le domaine d'une
politique visant à régulariser l'activité économique.

A maints égards, d'ailleurs, les conditions auxquelles les entreprises seront admises à bénéficier de cette compensation ne laisseront pas d'être assez défavorables pour elles. Par exemple, celles qui, en temps de prospérité, ne procèdent qu'avec circonspection à des investissements ou à. d'autres dépenses, devront renoncer aux avantages qu'impliquent l'agrandissement et la modernisation des installations. Elles peuvent également considérer comme un désavantage le fait que les réserves de crise doivent être dissociées du capital d'exploitation et placées, sans parler du fait que le rendement de ces placements sera généralement inférieur à celui qui pourrait être obtenu si ces capitaux travaillaient dans l'entreprise. Enfin

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l'exécution des mesures visant à créer du travail limite quelque peu la liberté des entreprises; de plus, celles-ci doivent se soumettre à certaines formalités administratives, peu importantes il est vrai, mais auxquelles elles pourraient échapper si elles avaient engagé immédiatement leurs disponibilités en période de prospérité. La constitution de réserves de crise sera néanmoins profitable aux entreprises en ce sens que la plupart des acquisitions et des dépenses reviennent généralement moins cher en temps de dépression qu'en période de prospérité. Les entreprises dans leur ensemble ont d'autre part un grand intérêt à une marche normale des affaires, de sorte que la ristourne de l'impôt pour la défense nationale afférent aux réserves de crise est de nature à engager l'économie privée et l'Etat à coopérer dans le domaine de la politique visant à régulariser l'emploi.

Du point de vue fiscal, l'avantage de cette ristourne réside dans le fait qu'elle n'exige aucune modification de la législation et de la pratique fiscales. La constitution de réserves de crise ne change en rien la taxation relative à l'imposition des bénéfices et de la fortune. Ces fonds sont traités sur le même pied que les réserves apparentes et imposables constituées de tout temps par les entreprises. En outre, la ristourne -- qui n'est accordée qu'à la condition d'être employée dans les délais et aux fins fixés -- n'est pas une prestation de nature fiscale de la Confédération, mais est une contribution de cette dernière à la stabilisation de l'emploi; c'est aussi la raison pour laquelle cette ristourne n'enlève pas au fonds de crise son caractère de réserve normale, apparente et imposée.

Certes, il existe un certain rapport entre cette prestation de la Confédération et la réalité fiscale en ce sens que l'impôt pour la défense nationale payé pour la réserve de crise détermine le montant de la ristourne.

Mais cette relation entre le fisc et la politique qui vise à stabiliser l'activité économique est inévitable : cette ristourne a avant tout pour effet d'assurer aux entreprises qui ont fait preuve de modération en temps de prospérité, une compensation pour les inconvénients de nature fiscale que ce comportement a entraînés. Que cette compensation doive porter, pour atteindre son but, sur l'accroissement effectif des charges
fiscales, cela ne saurait être mis en doute. H importe donc, quand au fond, que cette ristourne -- justifiée par des considérations d'opportunité -- corresponde au montant de l'impôt pour la défense nationale qui a été payé. Quant à la forme, en revanche, le droit à la ristourne est d'un genre tout nouveau et pour lequel il n'existe encore aucune désignation courante, mais qui relève nettement et uniquement de la politique visant à atténuer les fluctuations économiques.

En tout cas, ce droit ne ressortit d'aucune manière à la législation fiscale; c'est pourquoi on a soigneusement évité, en rédigeant le projet d'arrêté ci-joint -- qu'il s'agisse de son économie générale ou du droit à la ristourne -- de toucher au droit fiscal en vigueur.

Feuille fédérale. 103e année. Vol. II.

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Ces constatations, indispensables si l'on considère les choses sous l'aspect du droit administratif, peuvent paraître moins essentielles aux entrepreneurs: dans tous les cas, cette mesure conserve le caractère d'une ristourne fiscale. Cependant, la forme sous laquelle elle est effectuée revêt une grande importance du point de vue législatif, administratif et budgétaire ; en revanche, elle n'a qu'une importance secondaire du point de vue de la politique visant à stabiliser l'activité économique et de la gestion des entreprises.

IV. LA COLLABORATION DES CANTONS En moyenne, la Confédération ne touche environ que le tiers des impôts perçus sur le rendement des entreprises qui entrent en ligne de compte pour la constitution de réserves de crise; deux tiers du produit fiscal sont encaissés par les cantons et les communes. Dans ces conditions, la décision du chef d'entreprise -- placé devant ce dilemme: constituer des réserves de crise ou continuer à faire des investissements et des dépenses non indispensables -- pourrait être grandement influencée s'il avait l'assurance que les impôts payés par lui sur les dites réserves lui seraient ristournés intégralement et non pas à raison d'un tiers seulement. De manière générale, dans tous les milieux qui souhaitent la constitution de réserves de crise suffisantes, on est d'avis qu'une ristourne portant uniquement sur l'impôt pour la défense nationale ne présenterait assez d'attrait que si les bénéfices étaient assez amples pour porter la progressivité à un niveau élevé. Mais les bénéfices de cette nature sont relativement rares. C'est la raison pour laquelle une enquête de la commission fédérale d'étude des prix arrive à la conclusion que seule une minorité des entreprises accepteraient de constituer des réserves de crise si la ristourne se limitait uniquement à l'impôt pour la défense nationale. Si donc l'on veut inciter un nombre aussi élevé que possible d'entreprises à économiser en prévision d'une phase de dépression, il faut aussi que les cantons et les communes encouragent, de leur côté, la constitution de réserves. Seule la coopération des cantons et des communes peut permettre de réduire sensiblement la demande privée et conférer ultérieurement toute l'efficacité désirable à l'initiative qui vise à constituer des fonds de crise, puis à la création de
possibilités de travail.

Cantons et communes ont le même intérêt que la Confédération à contribuer autant que possible à atténuer les fluctuations économiques.

Nous supposons donc qu'ils voudront bien étudier, de leur côté, des mesures propres à faciliter également la constitution de réserves de crise.

Le fait que la Confédération donne la préférence à la méthode de la ristourne sur celle de l'exonération fiscale -- c'est-à-dire à une méthode qui n'affecte en rien la législation fiscale -- contibuera certainement à faciliter la coopération des cantons. En effet, pour la Confédération comme

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pour la plupart des cantons, l'exonération fiscale des sommes versées aux fonds de crise aurait entraîné une modification de la législation fiscale, ce qui eût probablement eu pour effet de déclencher d'autres demandes de revision. Maints cantons eussent alors renoncé à s'engager dans cette voie, si favorables qu'ils aient été à la constitution de fonds de crise. Notons encore que le choix d'une autre méthode que celle que préconise la Confédération eût entraîné d'autres et considérables difficultés. La préférence donnée à la ristourne libère les cantons des risques inhérents à l'autre méthode. Ils peuvent désormais -- au même titre que la Confédération -- encourager la création de réserves de crise sans modifier leur législation fiscale. Toutefois, les cantons et les communes restent libres de donner la préférence au système de l'exonération fiscale ou à toute autre méthode.

Ce qui importe en dernière analyse, c'est d'offrir aux entreprises la possibilité de constituer des réserves de crise sans que cela entraîne pour elles un accroissement des charges fiscales, accroissement auquel elles pourraient échapper si elles engageaient toutes leurs disponibilités en période de prospérité.

Au printemps déjà, les départements fédéraux compétents ont informé la conférence des directeurs cantonaux de l'économie publique et celle des directeurs cantonaux des finances que la Confédération avait l'intention d'encourager par des mesures législatives la constitution de réserves de crise. Les directeurs cantonaux étaient priés de donner leur avis.

Les directeurs cantonaux de l'économie publique ont accueilli favorablement les propositions de la Confédération, considérées comme un net progrès dans la voie des mesures à prendre pour régulariser l'activité économique, combattre l'inflation et préparer la lutte contre la chômage. TI a faisaient portant observer que pour assurer le succès des mesures envisagées, il était indispensable d'inciter l'économie privée à constituer des réserves de crise en lui offrant des avantages suffisants. Aussi la conférence a-t-elle exprimé le voeu que tous les gouvernements cantonaux soutiennent les efforts de la Confédération.

La conférence des directeurs cantonaux des finances reconnaît également que le projet est digne du plus grand intérêt, étant de nature à rendre plus efficace
la politique tendant à stabiliser l'emploi. Elle fait néanmoins de sérieuses réserves quant au choix de la méthode, notamment en raison du fait que l'étendue de la prestation de l'Etat en temps de crise dépendrait de l'impôt pour la défense nationale perçu sur les réserves et que les entreprises qui n'auraient pas été à même de constituer des réserves ne bénéficieraient pas de la mesure prévue. La conférence reconnaît néanmoins qu'en contre-partie de la prestation qui lui est offerte, l'entreprise fait un sacrifice en acceptant que les fonds affectés à sa réserve lui soient soustraits jusqu'à un moment donné. Elle fait remarquer en outre que pour participer aux mesures de la Confédération, les cantons devraient très

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probablement, dans la plupart des cas, réviser leur législation, surtout si les communes devaient être, elles aussi, appelées à apporter leur concours.

La conférence estime dès lors que les cantons ne pourront vraisemblablement pas adopter en temps voulu des mesures analogues à celles qu'envisage la Confédération. En dépit de ces réserves, elle a déclaré vouloir leur accorder toute son attention, afin d'en faciliter autant que possible l'exécution.

Parmi les gouvernements cantonaux qui ont fait part de leurs observations au département fédéral de l'économie publique, un seul s'est prononcé contre l'idée dont s'inspire le projet. Il est d'avis que le système de la ristourne est trop compliqué et que l'exonération immédiate des réserves constituerait pour l'économie privée un attrait beaucoup plus puissant, permettant d'accroître considérablement l'efficacité des mesures visant à régulariser l'activité économique. Les autres cantons ont approuvé le projet, encore que plusieurs d'entre eus aient formulé des réserves quant à certaines dispositions. Pour des raisons faciles à comprendre, les gouvernements cantonaux n'ont toutefois pas encore été à même de donner des assurances quelconques au sujet de la participation de leur canton aux mesures de la Confédération, V. PARTICULARITÉS DE L'ARRÊTÉ FÉDÉRAL L'idée dont s'inspire notre projet est une innovation sur le plan économique. Aussi l'élaboration du projet exigea-t-elle maintes études et recherches. La commission d'étude des prix du département fédéral de l'économie publique prit une part importante à ces travaux préparatoires, en procédant à une enquête approfondie auprès d'un nombre relativement élevé d'entreprises qui paraissaient entrer en ligne de compte pour la constitution de réserves. Les avis formulés par les chefs d'entreprise permirent de connaître par la voie la plus directe l'opinion des principaux intéressés; ils nous facilitèrent aussi la tâche en attirant notre attention sur divers aspects du problème. En analysant les résultats de son enquête, la commission d'étude des prix n'a pas manqué d'examiner très soigneusement toutes les questions se rattachant à la constitution de réserves de crise. Son rapport circonstancié, qui sera publié incessamment, nous a été d'une très grande utilité.

Avant sa mise au point définitive, nous avons
soumis le projet aux associations patronales et aux syndicats; nombre de leurs suggestions et désirs ont pu être retenus lors de sa rédaction. Une conférence d'experts réunissant les représentants des autorités fiscales de plusieurs cantons a en outre été chargée d'examiner s'il était possible de déterminer sans trop de complications le montant de l'impôt pour la défense nationale afférent aux réserves de crise ; les fonctionnaires cantonaux préposés à la taxation

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en matière d'impôt fédéral pour la défense nationale ont été unanimes à déclarer que la détermination de l'impôt ne présentait aucune difficulté technique.

Malgré sa concision, le projet d'arrêté traite toutes les questions fondamentales d'une manière aussi complète que possible; l'ordonnance d'exécution contiendra notamment les dispositions de procédure et réglera les détails d'ordre technique. Si le projet confère néanmoins au Conseil fédéral quelques attributions sur certains points importants, il faut en rechercher la cause non pas dans l'intention d'accroître, sur le plan économique, les pouvoirs des organes d'exécution, mais dans le caractère spécial des mesures envisagées. Selon l'arrêté, leur application s'étendra sur un laps de temps relativement long, sur plusieurs années pour le moins. Ainsi que nous l'avons déjà relevé dans notre rapport intermédiaire du 12 juin 1950, il est toutefois absolument impossible, surtout avec un régime économique comme le nôtre, de prévoir à longue échéance et de soumettre à des règles rigides les modalités d'une politique visant à stabiliser l'emploi. Pour que l'Etat puisse intervenir efficacement dans l'évolution économique, il faut que son action soit très souple et s'adapte aux circonstances et aux besoins.

Ce principe s'applique naturellement en premier lieu au choix du moment où doit être déclenchée la lutte contre le chômage. Nombre d'autres détails ne sauraient être arrêtés d'avance. Le Conseil fédéral estime pourtant ne s'être fait octroyer des attributions dans le projet que là où l'établissement de normes strictes compromettrait le succès de son action sur le processus économique. Il ne prendra d'ailleurs de décisions importantes qu'après avoir consulté les milieux intéressés. Le projet d'arrêté le prévoit expressément, en ce qui concerne le déclenchement de la lutte contre la dépression (art. 5) et les mesures propres à créer des possibilités de travail dont la mise à exécution est subordonnée à une autorisation spéciale (art. 6, 2e al.).

Si le Conseil fédéral n'a pas cru devoir envisager expressément une consultation préalable dans les autres domaines où des attributions lui sont conférées par le projet, c'est parce qu'il se propose de recourir aux organes consultatifs qui doivent être institués par la loi fédérale sur la lutte contre le chômage et la création de possibilités de travail, actuellement en préparation.

1. La participation de l'économie privée est facultative

L'arrêté que nous vous proposons n'exercera aucune contrainte sur les entreprises. C'est là une de ses caractéristiques essentielles. Les entreprises demeurent absolument libres de constituer ou non des réserves de crise au sens du projet. Celui-ci respecte non seulement l'indépendance des chefs d'entreprise sur ce point, mais il les autorise en outre à dissoudre la réserve de crise avant le déclenchement de la lutte contre le chômage s'ils estiment devoir le faire pour une raison quelconque. A cet effet, les entreprises ont la faculté de demander d'une manière anticipée le déblocage des fonds

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mis en réserve (art. 4, 2e et 3e al.). Elles n'ont pas non plus l'obligation, une fois engagée la lutte contre la dépression, de créer des possibilités de travail au sens de l'arrêté. Le chef d'entreprise peut, au contraire, affecter ses réserves à des fins auxquelles la Confédération ne reconnaît pas le caractère de mesures propres à assurer du travail, mais qui répondent mieux à ses besoins immédiats. Si la réserve est dissoute prématurément ou n'est pas employée conformément aux dispositions de l'arrêté, le chef d'entreprise perd son droit à la ristourne (art. 8), mais ne subit pas d'autre préjudice.

Maints industriels ont exprimé la crainte que le présent projet, qui respecte sans réserve la pleine indépendance des entreprises, ne soit le prélude à une obligation de constituer des réserves. De semblables appréhensions, qui seraient évidemment peu propices à la réalisation de notre idée, ne sont pas fondées. En vertu de la constitution, la Confédération ne peut prendre des mesures visant à stabiliser l'emploi qu'à la condition d'observer le principe de la liberté du commerce et de l'industrie, qui interdit d'astreindre les entreprises à constituer des réserves. Certes, l'article Slbis, 3e alinéa, lettre a, de la constitution admet, au besoin, des dérogations à ce principe, lorsque d'importantes branches économiques ou professions sont menacées dans leur existence; mais lorsqu'il s'agit de mesures tendant à stabiliser l'emploi conformément à l'article Slquinquies de la constitution, la Confédération est dépourvue de moyens de contrainte.

9. Le placement obligatoire des réserves de crise en bons de dépôt de la Confédération Pour que la constitution de réserves de crise ait une influence favorable sur le degré d'occupation, il apparaît indispensable de disjoindre de l'entreprise une part aussi élevée que possible des sommes affectées aux dites réserves. Selon toute apparence, on ne saurait se contenter d'exiger qu'elles figurent dans la comptabilité, car le chef d'entreprise continuerait à disposer librement de la contre-valeur de sa réserve, réduite il est vrai du montant des impôts y afférents, et pourrait ainsi utiliser ces liquidités pour n'importe quelles dépenses. Il serait d'autant plus porté à le faire qu'en période de prospérité, il n'aurait aucun intérêt, du point de vue strictement
commercial, à laisser reposer ses disponibilités ; il chercherait au contraire à en tirer un meilleur profit en les réintroduisant dans le circuit économique. C'est ainsi que les entreprises pourraient tout de même, quand les affaires marchent bien, faire certaines dépenses qui ne sont pas indispensables et que la constitution de réserves doit précisément empêcher.

Dans la mesure où il sauvegarde l'intérêt que doivent susciter les mesures envisagées (cf. p. 739), le blocage des fonds affectés aux réserves revêt une

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importance particulière du point de vue d'une politique tendant à stabiliser l'emploi.

Il ressort en outre de ce qui précède que si les sommes affectées aux réserves de crise n'étaient pas bloquées le plus possible, on courrait le risque que de nombreux chefs d'entreprise les utilisent prématurément et en soient privés au moment même où la lutte contre la dépression serait déclencbée. Il convient d'autant plus de tenir compte de cette éventualité que les mesures propres à créer des possibilités de travail seront exécutées en une période de ralentissement général de l'activité, au cours de laquelle les liquidités et la capacité financière de nombre d'entreprises s'amenuisent de toute façon.

Pour que les réserves de crise contribuent à freiner la surexpansion et soient utilisées rationnellement, l'arrêté fédéral prévoit que les entreprises sont tenues de les placer, du moins partiellement, en bons de dépôt de la Confédération (art. 4). La fonction de ces titres exige qu'ils soient nominatifs et incessibles. Nous avons déjà signalé à la page 733 que l'entreprise est autorisée à demander la restitution de sa réserve avant le déclenchement de la lutte contre le chômage, ce qui entraîne la caducité du droit à la ristourne. Elle peut reprendre possession de ses fonds soit à l'échéance du bon de dépôt, soit en en exigeant le remboursement prématuré. En revanche, la banque nationale ne réescomptera pas les bons de dépôt.

Quant à savoir si l'octroi de crédits par les banques contre nantissement de bons de dépôt est compatible avec le but que nous recherchons, c'est là un problème dont la solution dépend essentiellement de la situation économique. Il ne serait certes pas recommandable d'empêcher absolument les entreprises de recourir à ce moyen pour surmonter leurs difficultés dues à un manque momentané de disponibilités. Attendu que les fluctuations économiques peuvent mettre brusquement à très forte contribution les liquidités dont dispose l'économie privée, la possibilité d'obtenir des crédits contre remise de bons de dépôt est un facteur que les entreprises prendront en considération lorsqu'elles seront appelées à prendre une décision au sujet de la constitution de réserves. L'interdiction de se procurer des fonds par cette méthode pourrait en outre inciter l'économie privée, au cas où ses liquidités
devaient s'amenuiser considérablement, à demander le remboursement anticipé de bons de dépôt, de sorte qu'une partie importante des réserves serait perdue pour la création ultérieure de possibilités de travail. Si l'on veut que l'économie privée dispose de réserves suffisantes et que celles-ci demeurent intactes jusqu'au moment de la crise, une certaine souplesse s'impose en ce qui concerne le nantissement des bons de dépôt.

Les fonds affectés aux réserves de crise peuvent contribuer bien davantage à régulariser l'activité économique s'ils sont non seulement distraits de l'entreprise et placés en bons de dépôt non négociables, mais encore

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stérilisés. Cela revient à dire que la Confédération renoncerait à remettre dans le circuit économique les sommes qu'elles recevrait en échange des bons de dépôt. Dans les circonstances actuelles, la Confédération est prête à procéder à cette stérilisation. Il ne faut toutefois pas en conclure que le maintien de cette mesure se justifie dans tous le cas. Une certaine souplesse s'impose aussi dans ce domaine; les pouvoirs publics devront adapter leur politique de stérilisation à l'évolution de la situation économique et à l'état du marché de l'argent et des capitaux, auquel différents milieux sont intéressés au plus haut point.

3. Le droit à la ristourne Le chef d'entreprise a droit à la ristourne de l'impôt pour la défense nationale afférent aux versements à la réserve de crise. Aux termes du projet d'arrêté, la Confédération est tenue de s'acquitter de cette prestation dès que le chef d'entreprise a rempli les conditions requises, c'està-dire constitué normalement, placé en bonne et due forme et utilisé sa réserve conformément aux dispositions de l'arrêté. Le droit à la ristourne dépend essentiellement des dispositions prises par le chef d'entreprise, et non pas du bon vouloir des autorités, attendu qu'après le déclenchement de la lutte contre le chômage, les réserves peuvent être affectées sans autorisation officielle à toute une série de mesures et que cette autorisation doit être octroyée dans les autres cas, pourvu que l'emploi des dites réserves assure du travail. La Confédération, pour sa part, constituera une réserve jusqu'à concurrence du montant global présumé des ristournes qui seront revendiquées.

Il serait possible de freiner la surexpansion plus radicalement encore si l'Etat stérilisait le capital qu'il sera appelé, selon toute probabilité, à verser ultérieurement sous la forme de ristournes. Toutefois, l'opportunité et l'étendue d'une mesure de ce genre sont commandées par les exigences d'une politique financière prudente, ainsi que par tous les autres éléments qui régissent également la stérilisation des fonds qu'obtiendra la Confédération en échange des bons de dépôt.

4. Sauvegarde de la responsabilité individuelle des cheîs d'entreprise Simplicité de la procédure administrative Nous avons tenu à exclure du projet toute disposition qui pourrait être interprétée comme une ingérence
de l'Etat dans les affaires internes des entreprises. Il y a lieu cependant d'accorder aux autorités responsables le droit de maintenir dans certaines limites et de contrôler jusqu'à un certain point l'utilisation des réserves ; en effet, il est évident que leur emploi, d'où découle le droit à la ristourne de l'impôt pour la défense nationale, doit contribuer aussi efficacement que possible à assurer un degré d'occu-

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pation satisfaisant. C'est la raison pour laquelle le projet restreint les cas d'utilisation des réserves sans autorisation préalable; pour d'autres possibilités d'emploi, qui ne se justifient pas d'emblée du point de vue de la politique que nous préconisons et qui doivent être par conséquent examinés individuellement, une autorisation spéciale des autorités est nécessaire, même si la lutte contre la dépression est déjà engagée.

Pour déterminer si une autorisation spéciale doit être accordée, la Confédération ne s'inspirera que des principes qui régissent sa politique tendant à régulariser l'activité économique, tous les autres éléments d'appréciation demeurant du ressort exclusif des chefs d'entreprise. Ceux-ci pourront ainsi se prononcer en toute liberté sur l'affectation des réserves à telle fin plutôt qu'à telle autre. La Confédération ne sera dès lors nullement tenue de s'opposer à un emploi irrationnel des réserves, étant donné que les chefs d'entreprise ont seuls la faculté d'envisager toutes les conséquences de leurs actes. Le présent projet d'arrêté ne porte donc atteinte en aucune façon à la responsabilité individuelle des intéressés.

Si le projet d'arrêté écarte sur ce point toute possibilité d'ingérence de l'Etat, il tend aussi à simplifier au maximum la procédure administrative. Le chef d'entreprise qui se propose de constituer une réserve en décidera sans le concours des autorités. Il placera simultanément la contrevaleur de cette réserve ou une partie de celle-ci en bons de dépôt de la Confédération, qu'il peut acquérir comme n'importe quel autre effet public.

Les formalités administratives sont également réduites au minimum indispensable en cas d'application des mesures de lutte contre le chômage. Le chef d'entreprise pourra prendre une série de décisions sans consulter les autorités. C'est ainsi qu'il lui sera loisible, sans autorisation préalable, de faire exécuter des travaux de construction, qu'il s'agisse d'ateliers de fabrication ou d'immeubles destinés à son personnel, ainsi que de moderniser et de développer son appareil de production. Pour d'autres mesures propres à maintenir l'emploi, il devra, il est vrai, solliciter une autorisation spéciale ; la procédure à suivre sera néanmoins fort simple, puisque le projet d'arrêté prévoit que des prescriptions seront édictées à
ce sujet. Enfin, l'administration de la preuve que des possibilités de travail ont été créées est facilitée en ce sens que les chefs d'entreprise pourront recourir aux services d'experts-comptables et de sociétés fiduciaires.

VI. LE COMMENTAIRE DE DIVERS ARTICLES DU PROJET

Art. 2 Bien qu'il incombe à l'entreprise d'administrer la preuve qu'elle a créé des possibilités de travail (art. 9) et de motiver ainsi son droit à la ristourne, il est nécessaire, pour que les autorités puissent vérifier si les pièces justificatives présentées sont exactes et complètes, que l'entreprise qui constitue

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une réserve de crise et peut ultérieurement revendiquer la ristourne dispose d'une comptabilité en bonne et due forme. Pour avoir quelque garantie que tel est bien le cas sans devoir établir des prescriptions spéciales ni instituer la formalité du permis, on a prévu que le droit de constituer des réserves de crise au sens de l'article premier est subordonné d'une manière générale à l'inscription de l'entreprise au registre du commerce. A défaut d'inscription, le .Conseil fédéral peut, aux conditions prévues dans l'arrêté, donner une autorisation spéciale, soit individuellement à l'entreprise qui la sollicite, soit -- pour simplifier les choses --· d'une manière générale à plusieurs entreprises qui recourent aux services du bureau de comptabilité d'une association professionnelle.

Art. 3 II est nécessaire de fixer un minimum pour les versements annuels, parce que la gestion de réserves trop modiques serait trop coûteuse par rapport à leur utilité. D'autre part, étant donné le tarif actuellement en vigueur en matière d'impôt pour la défense nationale, les entreprises qui ne pourraient alimenter leur réserve que par des versements très minimes n'auront très vraisemblablement pas grand intérêt à en constituer. Il faut éviter cependant qu'un minimum trop élevé pour les transferts annuels à la réserve n'entraîne la complète élimination de certaines branches qui pourraient avoir un intérêt à participer aux mesures envisagées. Pour tenir compte notamment des possibilités des petits artisans, d'une part, et des désirs formulés par les associations patronales, d'autre part, le montant minimum dont il s'agit a dès lors été fixé à 3000 francs.

La fixation d'un montant maximum pour la réserve globale d'une entreprise doit limiter les charges financières de la Confédération, dans l'intérêt même de tous les contribuables. Les données statistiques dont nous disposons ne permettent cependant que très difficilement de se faire une idée de l'ampleur qu'atteindront les réserves et les ristournes. Au surplus, on ignore combien d'entreprises se résoudront à constituer des réserves.

On ne saurait pas davantage établir un pronostic sur l'évolution ultérieure de la situation économique et, partant, sur les possibilités qu'auront les entreprises d'accumuler des réserves avec une partie de leurs bénéfices.

C'est pourquoi nous désirons nous réserver la faculté, sans porter atteinte aux réserves déjà constituées, d'adapter aux circonstances le montant global qu'une entreprise sera autorisée à affecter à sa réserve de crise.

Les périodes de grande prospérité ne sont généralement pas suivies immédiatement de périodes de crise. L'expérience démontre qu'entre ces deux phases s'intercale un laps de temps plus ou moins long, au cours duquel les facteurs d'impulsion s'affaiblissent, sans qu'il soit déjà nécessaire de créer des possibilités de travail. Dans de pareilles circonstances, la constitution de réserves de crise est non seulement superflue, mais doit

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encore pouvoir être suspendue, de façon que le ralentissement des affaires ne s'intensifie et ne s'accélère pas,

Art. 4 Premier alinéa. Les réserves de crise étant intégralement imposables, le système de la ristourne, tel qu'il est envisagé, peut mettre à forte contribution les disponibilités des entreprises. C'est ce danger qui a suscité dans les milieux de l'économie privée le plus d'appréhensions. Du point de vue de la politique de l'emploi, il serait incontestablement très recommandable de bloquer totalement les réserves de crise jusqu'au moment où serait engagée la lutte contre le chômage, non seulement dans le dessein d'atténuer la surexpansion, mais encore pour éviter que les disponibilités ne soient utilisées prématurément. Or l'entreprise qui constitue une réserve doit, indépendamment de la dépense qu'impliqué l'acquisition des bons de dépôt de la Confédération, payer les impôts afférents à ladite réserve.

C'est jusqu'à concurrence du montant des ces impôts que l'entreprise assumerait une charge supplémentaire, à laquelle elle pourrait toujours se soustraire en réduisant son bénéfice imposable par des immobilisations de capitaux ou d'autres dépenses.

La charge fiscale additionnelle dont il vient d'être question et qui est inhérente au système de la ristourne, est certainement de nature à faire beaucoup hésiter de nombreuses entreprises à constituer des réserves de crise. H y a lieu d'attribuer à cet inconvénient d'autant plus d'importance qu'en période de prospérité, les disponibilités des entreprises sont, de toute façon, fortement engagées par suite des hausses de prix qui renchérissent le réapprovisionnement en produits manufacturés ou en matières premières. D'autre part, la Confédération n'a aucun intérêt à provoquer une trop sensible diminution des liquidités, étant donné que les circonstances la contraignent d'encourager les entreprises à constituer des stocks importants dans l'intérêt de la défense nationale économique. Dès que notre projet d'arrêté sera sur le point d'être appliqué, il s'agira donc d'examiner, compte tenu de la situation économique, jusqu'à quel pourcentage peut être étendue l'obligation de placer les réserves en bons de dépôt de la Confédération. Cette façon de procéder serait certainement justifiée si elle engageait de nombreuses entreprises à constituer des réserves de crise, alors qu'elles pourraient y renoncer si elles étaient tenues d'en bloquer le montant intégral. Dans
la première hypothèse, les réserves de crise, même si elles ne devaient être placées que partiellement, contribueraient bien davantage à régulariser l'activité économique qu'elles ne pourraient le faire si l'on s'en tenait résolument au blocage intégral. De toute façon, l'obligation de placer les réserves en bons de dépôt de la Confédération doit s'étendre à 60 pour cent au minimum de leur montant.

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2e alinéa. li est prévu que les entreprises auront le choix entre des bons de dépôt à échéances de 4 et 8 ans. Si une entreprise a besoin de ses fonds avant le déclenchement de la lutte contre la dépression et si, d'autre part, elle ne peut pas attendre que ses bons de dépôt arrivent à échéance, elle pourra en demander le remboursement anticipé. Dans ce cas, l'intérêt dû par la Confédération jusqu'au moment du remboursement subira néanmoins une réduction qu'on déterminera en prenant en considération la limitation de la durée de validité des titres et le fait que l'entreprise ne doit pas tirer profit d'avoir délibérément choisi les bons de dépôt à échéance la plus longue, quitte à en demander, au besoin, le remboursement.

Art. 5 La lutte contre le chômage doit être déclenchée après consultation des cantons et des associations centrales des employeurs et des travailleurs, qui, bien au courant de l'état du marché du travail dans les différentes régions et les diverses branches, pourront aider le Conseil fédéral à déterminer opportunément 1© moment de son intervention. Le Conseil fédéral prendra aussi l'avis de la banque nationale, étant donné que la mise à exécution de mesures propres à créer des possibilités de travail entraîne le remboursement des bons de dépôt, lequel doit accroître sensiblement les disponibilités de l'économie privée.

Les constatations faites au cours du deuxième semestre de 1948 et en 1949 ont confirmé qu'un ralentissement du rythme de l'activité peut fort bien ne pas affecter simultanément et avec la même intensité les différentes branches économiques. Si la contraction n'a pas partout la même gravité, la Confédération aura le devoir de doser très soigneusement ses interventions en ne faisant d'abord bénéficier des mesures propres à maintenir l'emploi que les secteurs particulièrement touchés par la dépression et, éventuellement, en limitant ces mesures selon la nature et l'ampleur du fléchissement. La création de possibilités de travail au profit d'entreprises isolées ne doit entrer en ligne de compte qu'exceptionnellement et dans des cas particulièrement graves. Nous estimons qu'une intervention de ce genre serait justifiée par exemple lorsqu'une entreprise dont l'activité est un des facteurs essentiels de la prospérité d'une région se trouve en difficulté.

Art. 6 Pour que l'application du projet d'arrêté ait une influence favorable en temps de crise, les entreprises doivent, cela va de soi, affecter leurs réserves, non pas à la couverture de leurs dépenses courantes, mais au financement de mesures propres à stimuler leur activité. S'il existe d'emblée suffisamment de garanties que les entreprises utiliseront leurs réserves rationnellement, on peut les laisser choisir elles-mêmes entre les différentes possibilités d'emploi qui s'offrent à elles. Ce sera presque toujours le cas

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si les fonds disponibles sont engagés dans des installations fixes. En effet, l'expérience démontre qu'en période de contraction économique, les entreprises renoncent à la construction de bâtiments ou à l'acquisition de machines et d'équipement technique si elles n'y sont pas encouragées au moyen de fonds mis à leur disposition au titre de la création de possibilités de travail. Or le projet d'arrêté autorise les entreprises, une fois que la lutte contre la dépression est engagée, à procéder, sans autorisation préalable, à la construction, à la transformation et à la rénovation d'ateliers de fabrication, de bureaux et de bâtiments pour le personnel; il en est de même en ce qui concerne l'acquisition de machines, d'appareils, d'installations techniques et de moyens de transport destinés à l'entreprise, pourvu qu'il s'agisse de produits suisses. Nous nous proposons d'appliquer à la notion de produit suisse les critères établis par la division du commerce du département fédéral de l'économie publique pour la délivrance des certificats d'origine.

Indépendamment des possibilités d'emploi dont nous venons de parler, d'autres mesures propres à stimuler l'activité peuvent aussi se révéler utiles et même nécessaires; leur mise à exécution sans autorisation ne saurait être toutefois tolérée, parce qu'il importe d'examiner au préalable jusqu'à quel point elles permettent effectivement de créer des possibilités de travail supplémentaires. Il s'agit essentiellement de mesures qui, telles que la production pour les stocks, l'exécution de travaux de réparation et de revision au sein de l'entreprise, la formation d'ouvriers et d'employés à un autre genre d'activité, sont destinées à empêcher le licenciement du personnel. Il faut y ajouter l'intensification des recherches techniques et scientifiques, la création de nouveaux dessins et modèles dans les branches sujettes aux fluctuations de la mode, la reconstitution de stocks par les maisons de commerce, le développement de l'exportation et de la propagande à l'étranger. Exceptionnellement, les entreprises dûment autorisées pourront aussi se procurer des machines et appareils d'origine étrangère s'il appert que la Suisse a un intérêt à une amélioration éventuelle des relations économiques avec le pays fournisseur ou si les machines et appareils en question sont
indispensables pour compléter des acquisitions faites en Suisse même. Le Conseil fédéral ou l'organe d'exécution désigné par lui accordera des autorisations spéciales pour l'exécution de mesures de ce genre, à condition toutefois qu'elles soient conciliables avec les exigences de la politique de l'emploi et n'entraînent pas une dispersion indésirable des réserves dont disposent les entreprises.

Afin que l'économie privée n'ignore pas jusqu'au moment où sera engagée la lutte contre la dépression à quelles fins et à quelles conditions elle pourra un jour utiliser ses réserves, des prescriptions seront établies avec le concours des associations économiques en vue de déterminer pour le moins jusqu'à quel point les entreprises peuvent espérer obtenir des

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autorisations spéciales pour l'exécution de mesures propres à créer des possibilités de travail.

Art. 7 Le mode de détermination de la ristourne, tel qu'il est exposé dans cet article, découle de la nécessité, dûment justifiée pour des raisons d'opportunité, d'offrir une compensation aux entreprises qui supportent dea charges fiscales accrues du fait que, tenant compte des recommandations officielles, elles ont renoncé en période de prospérité à des immobilisations de capitaux ou autres dépenses qui réduiraient leur bénéfice imposable pour utiliser les sommes ainsi économisées à créer des possibilités de travail.

Il va de soi que pour atteindre son but, cette compensation doit correspondre au montant effectif de l'impôt pour la défense nationale afférent aux réserves de crise. Le fait qu'une partie de l'impôt perçu sur les réserves au titre de la défense nationale reste attribuée aux cantons ne doit donc pas entrer en ligne de compte dans la détermination du montant de la ristourne; en effet, seules les charges fiscales effectives qu'elle assume intéressent l'entreprise qui doit prendre une décision quant à l'utilisation de ses bénéfices; elle ne s'occupe pas de savoir à qui est finalement destiné son argent. Si la Confédération déterminait la ristourne en fonction uniquement de la part qui lui revient sur l'impôt pour la défense nationale, il ne fait pas de doute que les entreprises seraient sensiblement moins enclines à constituer des réserves de crise. En revanche, l'économie privée n'exige pas que la compensation corresponde, au franc et au centime près, au montant de l'impôt pour la défense nationale. Il ressort déjà du rapport de la commission d'étude des prix du département fédéral de l'économie publique que les entreprises approuvent dans leur ensemble une simplification du mode de détermination de la ristourne, pourvu qu'il n'en résulte pas une réduction substantielle de la compensation.

Cela étant, nous avons envisagé à l'alinéa 2 pour les entreprises individuelles, les sociétés de personnes et les communautés de personnes une procédure dont l'application ne garantit pas absolument l'équivalence entre le montant de l'impôt perçu sur les réserves au titre de la défense nationale et celui de la ristourne. Les entreprises en cause sont en effet considérées comme des contribuables indépendants, alors qu'en réalité ce ne sont pas les entreprises comme telles, mais le titulaire de la
raison individuelle ou les associés qui sont assujettis à l'impôt. Tant l'administration fédérale des contributions que les autorités fiscales cantonales appelées à se prononcer ont fait remarquer d'emblée que ce mode de calcul facilite singulièrement aux entreprises, même si eues ne sont pas assujetties à l'impôt pour la défense nationale, le recours à la procédure en matière de ristourne et simplifie ainsi la tâche des autorités de taxation, qui sont les administrations cantonales de l'impôt pour la défense nationale.

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Art. 8 Alors que l'article 7 indique d'une façon générale comment se calcule la ristourne en fonction des versements à la réserve et de l'impôt pour la défense nationale y afférent, l'article 8 expose les principes selon lesquels on apprécie l'étendue du droit à la ristourne. La somme consacrée à l'exécution de mesures propres à créer des possibilités de travail constitue l'élément d'appréciation fondamental. Si cette somme correspond à la totalité de la réserve et de la ristourne y afférente selon l'article 7, l'entreprise peut revendiquer cette ristourne intégralement. Pour avoir droit à la totalité de la ristourne, l'entreprise doit donc affecter à la création de possibilités de travail non seulement sa réserve, mais encore le montant de la ristourne. Si par exemple la réserve constituée au cours de plusieurs années s'élève à 450 000 francs, la ristourne correspondante selon l'article 7 étant de 50 000 francs, l'entreprise qui se propose de revendiquer la ristourne totale devra consacrer 500 000 francs aux mesures de lutte contre la dépression.

Si la dépense consentie par l'entreprise ne représentait que 450 000 francs, montant de 10 pour cent inférieur à celui qu'il faudrait débourser pour pouvoir revendiquer la totalité de la ristourne, celle-ci subirait, conformément à l'alinéa 2, une réduction proportionnelle, soit 10 pour cent de 50 000 francs, et n'atteindrait donc que 45 000 francs. Aux termes du 3e alinéa, on procédera de la même manière si, avant le déclenchement de la lutte contre la crise, une entreprise demande le remboursement de bons de dépôt, soit en les dénonçant par anticipation, soit en renonçant à les proroger à leur échéance. Si, pour en rester à notre exemple, une entreprise disposant d'une réserve de 450 000 francs distrait 45 000 francs de leur destination normale en requérant le remboursement anticipé de bons de dépôt, son droit à la ristourne se réduit aussi de 10 pour cent, soit à 45 000 francs. Encore ne pourra-t-elle revendiquer cette dernière somme que si elle consacre 450 000 francs à la création de possibilités de travail. Si ses dépenses sont inférieures à 450 000 francs, la ristourne à laquelle elle a droit sera réduite encore davantage, conformément au 2e alinéa.

Art. 9 II incombe aux entreprises de motiver leur droit à la ristourne au moyen des pièces
justificatives nécessaires à cet effet. Pour qu'elles soient dispensées de produire une documentation volumineuse et pour que les renseignements qu'elles fournissent aient plus de poids, elles auront la faculté de faire attester par une société fiduciaire ou un expert-comptable l'exactitude de la preuve sommaire qu'elles sont appelées à administrer.

L'expérience démontrera si ces attestations offrent une garantie suffisante contre les abus pour que la Confédération puisse limiter à quelques sondages la vérification des preuves produites. Il serait très désirable en effet

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que les autorités puissent restreindre ainsi leur contrôle à un minimum.

Les sociétés fiduciaires et les experts-comptables désirant être habilités à établir ces attestations auront à solliciter une autorisation officielle, qui ne sera généralement délivrée qu'aux membres d'un des groupements affiliés à la chambre suisse pour expertises comptables.

Art. 12 Nous estimons qu'il est judicieux d'instituer une commission de recours indépendante de l'administration, afin que l'on puisse faire appel au concours de spécialistes particulièrement aptes à se prononcer sur des problèmes techniques difficiles auxquels l'application de l'arrêté fédéral pourrait donner lieu. Seules les dispositions prises par les organes fédéraux en vertu de l'article 6, 2e alinéa, seront soustraits à l'appréciation de la commission de recours, parce qu'il s'agit en l'occurrence de décisions d'ordre économique contre lesquelles on peut recourir au Conseil fédéral conformément aux articles 124 et suivants de la loi fédérale d'organisation judiciaire du 16 décembre 1943.

A l'appui de ce qui précède, nous vous proposons d'adopter le projet d'arrêté sur la constitution de réserves de crise par l'économie privée.

Veuillez agréer, Monsieur le Président et Messieurs, les assurances de notre haute considération.

Berne, le 10 août 1951.

Au nom du Conseil fédéral suisse: Le président de la Confédération, Ed. de STEIGER 8840

Le chancelier de la Confédération, LEIMGKUBER

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(Projet)

ARRÊTÉ FÉDÉRAL sur la constitution de réserves de crise par l'économie privée

L'Assemblée fédérale de la Confédération su'Use, vu l'article 31 quinquies de la constitution; vu le message du Conseil fédéral du 10 août 1951, arrête : I, GÉNÉRALITÉS Article premier Règle fondamentale Lorsque des entreprises de l'économie privée affectent une part de leur bénéfice net à la constitution d'une réserve de crise, la Confédération leur ristourne, conformément aux dispositions ci-après, le montant de l'impôt pour la défense nationale payé sur les sommes versées à ladite réserve; la condition en est que ces entreprises créent des possibilités de travail en période de chômage.

Art. 2

Champ d'application Le présent arrêté est applicable aux entreprises inscrites au registre du commerce. Le Conseil fédéral peut le rendre applicable à d'autres entreprises si leur comptabilité satisfait aux exigences prévues aux articles 957 et suivants du code des obligations. Le présent arrêté peut en outre être déclaré applicable d'ime façon générale aux entreprises qui recourent aux services du bureau de comptabilité d'une association professionnelle.

Feuille fédérale. 103« aimée. Vol. II.

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II. CONSTITUTION DES RÉSERVES DE CRISE

Art. 3 Ampleur des réserves 1

Les versements à la réserve ne doivent pas être inférieurs à trois mille francs par an. Ils ne pourront dépasser au total, au choix de l'entreprise, cinquante pour cent de la somme des salaires payés par année, ou de la valeur d'assurance des immeubles et de l'équipement, ou encore de la valeur du stock de marchandises. Les réserves doivent être mentionnées séparément dans la comptabilité, 2 Le Conseil fédéral édicté des prescriptions à ce sujet. Il peut réduire le montant global autorisé ou suspendre temporairement la constitution de réserves, Art. 4 Placement des réserves 1

Les réserves de crise, ou la partie de celles-ci fixée par le Conseil fédéral, mais au moins soixante pour cent, doivent être placées en bons de dépôt de la Confédération, lesquels produisent un intérêt fixé d'après les conditions usuelles du marché.

2 Les bons de dépôt sont émis pour un certain nombre d'années.

L'entreprise peut en requérir le remboursement anticipé pour la fin d'un semestre de l'année civile.

3 Les bons de dépôt sont remboursables, indépendamment de leur échéance, dès le moment où la lutte contre le chômage est engagée. S'ils viennent à échéance antérieurement, l'entreprise peut en demander la prorogation ou le remboursement.

III. LUTTE CONTRE LE CHÔMAGE

Art. 5 Durée 1

Lorsque le chômage menace ou est déjà apparu, le Conseil fédéral, après avoir consulté les cantons et les associations économiques centrales, fixe le moment où commencera la lutte contre le chômage. Si la situation l'exige, il peut la limiter temporairement à certaines des mesures mentionnées à l'article 6, à certaines branches économiques et, à titre exceptionnel, à des entreprises isolées.

2 Le Conseil fédéral fixe un délai pour l'exécution des mesures destinées à créer des possibilités de travail.

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Art, 6 Mesures propres à créer des possibilités de travail 1

La lutte contre le chômage une fois engagée, les entreprises ont la faculté, sans avoir à requérir au préalable une autorisation officielle spéciale, de créer les possibilités de travail énumérées ci-après: a. Construction, agrandissement, transformation et rénovation, à l'intérieur du pays, d'ateliers de fabrication, de bâtiments administratifs, de bâtiments à but social, de cantines, d'installations d'épuration, de canalisations et de logements destinés aux employés et ouvriers de l'entreprise ; b. Acquisition de machines, d'appareils, de moteurs, d'installations techniques et de moyens de transport de fabrication suisse destinés à l'entreprise.

2 Le Conseil fédéral peut accorder des autorisations spéciales pour d'autres mesures de lutte contre le chômage propres à améliorer les possibilités d'exportation, à augmenter d'une manière générale la capacité de rendement des entreprises ou à maintenir et à accroître sous une autre forme le degré d'occupation. Il peut édicter, avec le concours des associations économiques, des prescriptions à ce sujet.

IV. LE DROIT A LA RISTOURNE

Art. 7 Détermination 1

La ristourne prévue à l'article premier correspond à la différence entre le montant de l'impôt pour la défense nationale, tel qu'il a été définitivement fixé et payé sur la base du bénéfice net, du rendement net ou du revenu des exercices sur le résultat desquels la réserve de crise a été constituée, et le montant de l'impôt qui aurait été obtenu après déduction de la part du rendement ayant servi à constituer la réserve de crise, 2 Si l'entreprise est exploitée sous une raison individuelle, par une société de personnes ou par une autre communauté de personnes sans personnalité juridique, la ristourne correspond à la différence entre les montants de l'impôt pour la défense nationale calculés, d'une part, sur le revenu commercial de l'entreprise pendant les années déterminantes et conformément au tarif applicable aux célibataires, et, d'autre part, sur le revenu commercial diminué de la part affectée à la réserve de crise.

3 La ristourne selon les alinéas 1er, et 2 est déterminée par l'administration de l'impôt pour la défense nationale du canton sur le territoire duquel l'entreprise a son siège.

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Art. 8 Etendue 1

L'entreprise a droit à la totalité de la ristourne prévue à l'article 7 si elle prouve qu'elle a affecté à la création de possibilités de travail une somme équivalant à la réserve de crise et à la ristourne correspondante.

2 Si la somme affectée à la création de possibilités de travail ne représente qu'une partie de la réserve et de la ristourne correspondante, cette dernière est réduite proportionnellement.

3 La ristourne subit également une réduction proportionnelle si l'entreprise demande le remboursement de bons de dépôt avant que la lutte contre le chômage ait été engagée.

Art. 9 Administration de la preuve 1

II incombe à l'entreprise d'administrer la preuve qu'elle a constitué une réserve de crise et créé des possibilités de travail.

2 Le Conseil fédéral fixe les modalités de l'administration de la preuve.

Il peut, au besoin, faire procéder lui-même à des enquêtes pour vérifier si les moyens de preuve présentés sont exacts et complets.

3 Toute ristourne obtenue sur la base d'indications inexactes ou incomplètes doit être remboursée à la Confédération.

Art. 10 Transfert et prescription 1

Si une entreprise fusionne ou est reprise avec actif et passif, le droit à la ristourne passe à son successeur.

2 Le droit à la ristourne se prescrit par deux ans à compter de l'expiration du délai fixé par le Conseil fédéral pour l'exécution des mesures destinées à créer des possibilités de travail.

V, DISPOSITIONS D'EXÉCUTION ET ENTRÉE EN VIGUEUR

Art. 11 Exécution Le Conseil fédéral édicté les dispositions d'exécution nécessaires.

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Art. 12 Recours 1

Toutes les décisions des autorités chargées par le Conseil fédéral de l'exécution du présent arrêté, à l'exception des dispositions prises en vertu de l'article 6, 2e alinéa, peuvent être déférées dans les trente jours à une commission de recours, qui statue en instance unique.

2 La commission de recours se compose de sept membres désignés par le Conseil fédéral après consultation des associations centrales des employeurs et des travailleurs. Son organisation fera l'objet d'un règlement édicté par le Conseil fédéral.

3 Pour la procédure en matière de recours, les articles 127, 128, 130 et 131 de la loi fédérale d'organisation judiciaire du 16 décembre 1943 sont applicables par analogie.

Art. 13 Première constitution de réserves Des réserves de crise peuvent être constituées pour la première fois au moyen de prélèvements sur les bénéfices des exercices se terminant dans le courant de 1951.

Art. 14

Entrée en vigueur 1 Le Conseil fédéral est chargé de publier le présent arrêté conformément aux dispositions de la loi fédérale du 17 juin 1874 concernant les votations populaires sur les lois et arrêtés fédéraux.

2 Le Conseil fédéral fixe la date de l'entrée en vigueur du présent arrêté.

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MESSAGE du Conseil fédéral à l'Assemblée fédérale concernant un projet d'arrêté fédéral sur la constitution de réserves de crise par l'économie privée (Du 10 août 1951)

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23.08.1951

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