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5487 MESSAGE du

Conseil fédéral à l'Assemblée fédérale concernant l'agrandissement de l'aéroport de Genève · Cointrin (Du 20 août 1948)

Monsieur le Président et Messieurs, Le 22 juin 1945, vous avez pris un arrêté établissant le programme général de la Confédération pour le développement des aérodromes civils.

Le message du 13 février 1945 évaluait à 84000000 de francs environ le total des subventions à allouer. Cette évaluation se fondait sur les projets alors existants. Si d'autres projets sont encore réalisés au cours des années et doivent être subventionnés au maximum à raison de 30 pour cent, le développement des aérodromes civils aura coûté au total quelque cent millions à la Confédération.

Trois ans se sont écoulés depuis l'entrée en vigueur de l'arrêté fédéral.

Il paraît indiqué d'examiner brièvement comment le trafic aérien suisse s'est développé pendant ce temps, quelle est sa situation actuelle, et quelles sont ses perspectives d'avenir.

1. LE TBAFIC AÉRIEN DE LA SUISSE ET SON DÉVELOPPEMENT Dans le message à l'appui dudit arrêté, nous affirmions que le trafic aérien apporte un complément précieux aux autres moyens de communication et que pour cette raison l'économie publique suisse avait besoin de lui.

Nous ne doutions pas non plus qu'à la fin de la seconde guerre mondiale, pour l'issue de laquelle des forces aériennes colossales jouaient un rôle déterminant, le trafic aérien civil prendrait une grande extension. Les chambres ont partagé cette manière de voir. Reconnaissant que l'ampleur que peut atteindre le trafic aérien ne dépend pas seulement de la qualité

1182 du matériel de vol, mais tout autant de celle de l'infrastructure, elles ont adopté la réglementation proposée pour le développement des aérodromes civils.

Or les résultats que nous indiquons ci-après, empruntés aux relevés de nos services de statistique, confirment de façon éclatante la justesse des prévisions d'il y a trois ans. Bien que la validité des conclusions qu'on peut déduire de tels chiffres soit quelque peu infirmée par l'instabilité de la situation politique internationale et la précarité des relations commerciales entre les Etats, il n'en reste pas moins que le trafic aérien suisse s'est immensément étendu depuis la guerre. Pour la comparaison, les résultats de 1938, dernière année complète d'exploitation avant la guerre, sont donnés à côté des résultats actuels.

Tableau I Nombre de rois BUT les lignes régulières aux aéroports de Baie, Genève et Zurich, vols en transit compris Aimée 1939 1945 1946

Nombre de vols . . .

Index

9006 100

818 9

1947

10 066 112

17 533 195

Tableau II Nombre de passagers payants sur les lignes régulières aux aéroports de Baie, Genève et Zurich, trafic en transit compris Année

Nombre de passagers .

Index

1938

43091 100

1945

11686 27

1940

147159 342

1947

267025 620

Tabkau III Trafic postal aérien sur les lignes régulières aux aéroports de Baie, Génère et Zurich, vola en transit compris Année

Voste en kg Index

1988

277 269 100

1915

84 220 30

1946

1947

596 709 1 354 520 216 489

Tableau IV Mouvement du fret sur les lignes régulières aux aéroports de Baie, Genève et Zurich, vols en transit compris Année

Fret en kg Index

1938

230 595 100

1945

87 019 38

1946

1947

948 508 2 617 194 411 1 137

1183 Tableau V Statistique douanière de l'importation et de l'exportation par voie aérienne sur les lignes régulières aux aéroports de Baie, GeneTC et Zurich Aunes

Importation Quantité Valeur kg fr.

EiDortatlon Quantité Valeur kg fr.

Total Quantité ke

Valeur fr.

1938 76856 16247798 62328 101286194 139184 117533992 1946 420759 23107277 304217 169882832 724976 192990109 1947 758 328 46 691 033 416 421 319 461 272 1 174 749 366 152 305 L'aéroport de Baie-Mulhouse n'a été ouvert à l'exploitation que le 1er juillet 1946. Les chiffres donnés pour 1938 et 1945 ne concernent donc que Genève et Zurich. De plue, en 1945, le trafic n'a commencé qu'après la fin des hostilités, et tout d'abord de façon hésitante. C'est pourquoi les chiffres de 1945 sont si bas.

Cela étant, il est clair que les tableaux I à V apportent la preuve d'un développement fort vigoureux du trafic aérien suisse. Il nous paraît important que non seulement le nombre des passagers transportés soit aujourd'hui un multiple de ce qu'il était il y a peu de temps encore, mais qu'aussi le trafic postal se soit accru de 400 pour cent, cependant que pour le fret l'augmentation est même de 1000 pour cent (par rapport à 1938). On voit ainsi clairement que notre trafic aérien n'est pas seulement au service de milieux restreints de notre peuple, mais que toute notre économie profite de cette possibilité de transports rapides. La statistique douanière d,u tableau V corrobore ce fait.

Remarquons tout d'abord que les chiffres n'englobent ni les importations ni les exportations d'or. La table V montre que la valeur moyenne des marchandises importées par air est de 61 fr. 50 par kg. A l'exportation, la valeur correspondante est de 311 francs. C'est assez dire que l'avion est le moyen de transport que l'on préfère pour les marchandises précieuses, et cela fait ressortir plus encore l'importance de l'avion pour cette partie notable de l'industrie suisse qui produit et exporte ce que l'on peut appeler des biens nobles, représentant une quantité considérable de travail hautement qualifié.

Enfin, les chiffres cités ne nous renseignent pas seulement sur le volume et l'importance économique du trafic aérien. Ils nous renseignent aussi sur ses modifications de structure, nous montrant que le nombre des vols a à peine doublé alors que les quantités transportées étaient multipliées par 4, voire par 11. Or un examen plus approfondi montre que le tonnage offert n'est mieux utilisé en 1947 que dans la proportion de 20 pour cent environ, par rapport à 1938. C'est donc la plus grande capacité des avions qui a surtout permis d'assurer des transports dont le volume s'était accru à ce point. L'emploi de ces grands avions n'a été possible que parce que

1184 le gouvernement du canton de Genève a pris, pendant la guerre encore, l'initiative d'agrandir l'aérodrome de Cointrin. En fait, jusqu'au 14 juin 1948, cet aéroport était seul à disposer des installations nécessaires à l'atterrissage et à l'envol d'avions quadrimoteurs.

Il est encore très difficile de dire comment le trafic aérien de la Suisse évoluera dans l'avenir. Les premiers mois de l'année 1948 accusent, par rapport aux mois correspondants de 1947, un nouvel accroissement du trafic aérien d'environ 30 pour cent. La normalisation des conditions économiques et politiques du monde exercera également sur ce moyen de transport une influence bienfaisante. D'autre part, il est possible que notre trafic aérien des années 1946 et 1947 ait profité de la marche anormalement favorable des aifaires en Suisse et de la désorganisation des moyens de communication à l'étranger.

Le développement finira peut-être par se ralentir, mais il est impossible de savoir s'il pourrait atteindre son plafond à une époque prochaine.

Dans la lutte contre la concurrence que notre pays devra soutenir sur les marchés du monde entier avec les industries restaurées de l'étranger, la navigation aérienne suisse exercera certainement un effet bienfaisant sur nos exportations.

2. LE DÉVELOPPEMENT DE L'AEROPORT DE COINTRIN JUSQU'A L'HEURE ACTUELLE ET L'IMPORTANCE DE CETTE PLACE POUR LE TRAFIC AÉRIEN SUISSE Le 7 mai 1941, en pleine guerre, le Grand conseil du canton de Genève accorda un premier crédit de 4 960 000 francs pour l'agrandissement de l'aérodrome de Cointrin. Plus tard, un second crédit de 4 000 000 de francs fut également voté. Au début de 1945, Genève avait déjà engagé neuf millions de ses propres deniers dans l'agrandissement de Cointrin.

Au moment où, en 1941, Genève entreprenait l'agrandissement et le développement du terrain d'aviation disponible à Cointrin, le monde était engagé dans une guerre où l'importance de l'aviation allait toujours croissant. Presque chaque jour on entendait parler d'avions nouveaux, toujours plus grands, servant au transport des troupes et du matériel ou aux bombardements. Il était manifeste que la guerre, avec ses exigences et les moyens financiers qui étaient affectés à la satisfaction de ses besoins, donnait à l'aéronautique un développement insoupçonné. C'est bien pourquoi l'on
pouvait s'attendre que l'avenir réserverait à l'aéronautique civile d'après guerre un développement qui n'eût pas été possible dans d'autres circonstances, ou du moins qui eût été plus lent.

Mais il était très difficile de tirer quelque chose de positif des nouvelles parvenues des Etats étrangers en ce qui concernait les conditions que le trafic aérien futur imposerait aux aérodromes. Le voile du secret couvrait

1185 le développement de la technique, qui ne pouvait être correctement évalué.

On se rendait aussi bien compte que les considérations économiques ne jouaient que peu ou pas de rôle dans la construction des avions servant aux transports de guerre et que ces avions, par conséquent, ne seraient pas utilisables tels quels pour un trafic aérien civil soumis au principe de la rentabilité. C'est bien pourquoi les chiffres de performance que l'on parvenait à connaître ne pouvaient que sous toutes réserves être mis à la base des études d'alors.

Un premier essai de régler internationalement les exigences à imposer aux aérodromes civils fut entrepris à Chicago à la fin de 1944. Mais les normes et données techniques encore plus ou moins valables pour la construction des aérodromes n'ont été établies qu'à la fin de 1945 à Montréal par l'organisation provisoire de l'aviation civile internationale (OPACI).

Dans ces conditions, il n'allait pas de soi que les travaux commencés à Cointrin pussent être poussés, d'après les plans primitifs, au delà de la mesure admise par les chambres le 21 juin 1945.

Ce fut ainsi en grande partie à l'initiative et aux plans perspicaces de Genève que la Suisse fut redevable de pouvoir, très tôt après la fin de la seconde guerre mondiale, participer au trafic aérien international avec un aéroport vraiment propre à cet usage.

À. La première étape de l'agrandissement de l'aéroport de Genève-Cointrin Cette première étape, pour laquelle le Grand conseil du canton de Genève mit 8 960 000 francs à disposition, comprenait avant tout la construction d'une piste en béton de 50 m de largeur et 1200 m de longueur.

Il fallut acheter de grandes étendues de terrain au dehors de l'ancien aérodrome et niveler cette zone de moraines passablement accidentée. En outre, 20 000 m 2 d'aires de manoeuvre furei^t déjà établis devant les anciens hangars et l'ancien bâtiment de station, avec deux voies de roulage entre ces aires et la piste. Finalement, on installa l'éclairage de la piste pour les vols de nuit. Les frais de tous ces travaux peuvent, à l'échelle des prix d'aujourd'hui, être qualifiés de modestes. Quand même les frais de construction d'aérodromes n'ont pas marché de pair avec la progression des frais de construction en général, il faudrait compter 2 500 000 francs de plus pour ces travaux
s'ils devaient être exécutés actuellement. Mais ils étaient terminés à la fin de 1944.

B. La deuxième étape de l'agrandissement de l'aéroport de Genève-Cointrin A la conférence aéronautique qui eut lieu à Chicago à la fin de 1944 fut rédigée une convention dont les annexes techniques contenaient entre

1186 autres choses des lignes directrices pour la construction d'aérodromes modernes. Trois catégories d'aérodromes étaient distinguées, soit: Aéroports transocéaniques d'une longueur minimum de piste principale de 2150 m au niveau de la mer; Aéroports transcontinentaux d'une longueur minimum de piste principale de 1500 m au niveau de la mer; Aéroports internationaux d'une longueur minimum de piste principale de 1050 m au niveau de la mer.

Ces minima doivent être augmentés de suppléments d'altitude, à cause de la densité moindre de l'air ai les places ne sont pas au niveau de la mer.

Déjà à la fin de 1944, l'étranger se montra intéressé à insérer la Suisse dans une ligne mondiale New York--Londres--Borne---Calcutta. La seule possibilité de préparer en Suisse, pour une date suffisamment prochaine, un aéroport propre à de tels buts, était offerte par Genève-Cointrin, où, nous l'avons vu, il existait déjà une piste dure de 1200 m. La franchise d'obstacles nécessaire à ces grands avions était également garantie à Cointrin, où les conditions de vent sont par ailleurs très favorables ; les courants aériens sont en effet canalisés par le Jura, de sorte qu'une piste unique suffisait et qu'il n'était pas indispensable d'en construire plusieurs pour les directions principales des vents.

Tenant compte de tout cela, Genève mit au point un projet de deuxième étape de développement de son aéroport. Le Conseil d'Etat approuva ce projet. Par l'arrêté fédéral du 21 juin 1945, les chambres décidèrent de le subventionner à raison de 30 pour cent des frais de construction.

Le même arrêté accordait une subvention spéciale de 2 300 000 francs pour tenir compte des efforts accomplis par Genève pour doter rapidement notre pays de son premier aéroport continental, particulièrement intéressant à ce moment pour la Confédération tout entière.

La deuxième étape de l'agrandissement prévoyait: L'extension de la piste artificielle à 2000 m; L'établissement des chemins d'accès encore nécessaires entre les aires de manoeuvre et la piste; La construction d'un nouveau bâtiment de station; La construction d'un nouveau bâtiment pour le service radiogoniométrique ; La modernisation de toutes les installations du service radioéle étriqué ; Le complètement du système des feux et des installations d'éclairage.

Les frais de construction donnant droit à la subvention furent évalués, pour cette seconde étape, à 7 900 000 francs.

1187 Sauf le bâtiment de station, tous ces travaux ont été exécutée conformément au projet. Les frais sont demeurés également dans les limites des prévisions.

Déjà en projetant cette deuxième étape, on se rendait compte de la difficulté extrême de prévoir les bâtiments nécessaires à un aéroport. Il n'y avait pas alors de principes qui eussent été confirmés par la pratique.

Ce n'est que pour le bâtiment de station qu'on crut, par analogie avec les gares de chemins de fer, en savoir assez pour établir un projet au moins général. Il se révéla par la suite que c'était une erreur.

On savait aussi très bien que le service radioélectrique de l'aéronautique, tout spécialement la navigation aux instruments et l'éclairage des aérodromes, serait transformé par la guerre dans des proportions extraordinaires, encore totalement inconnues au moment de l'établissement du projet.

C'est pourquoi les chambres approuvèrent l'article 8 de l'arrêté du 21 juin 1945, prévoyant qu'après la fin des travaux de cette deuxième étape, un perfectionnement ultérieur de l'aéroport serait subventionné de nouveau selon les normes de la législation fédérale.

C. Tableau des dépenses de la première et de la deuxième étape et des subventions fédérales Budget Fr.

Devis de la première étape Subventions fédérales prises sur les crédits pour la création de possibilités de travail Dépense du canton pour la première étape Achats de terrain

Fr.

8960000. -- 324 000.-- 8 636 000. -- 1 150 000.-- 7 486 000.--

Devis de la deuxième étape Achats de terrain

8 360 000. -- 460 000.-- 7 900 000 -- 15 386 000 --

Subvention fédérale totale: 30% des frais de construction

2 300 000.-- 2 315 800.-- 4 615 800.--

1188 Décompte Subvention fédérale maximum Payements effectués par la Confédération : Subvention spéciale Premier acompte Deuxième acompte

Fr.

4 615 800.-- FI.

2 300 000.-- 390 035.50 1 388 547.-- 4058582.50

Solde au premier juillet 1948 Réserve pour installations radioélectriques construites, mais n'ayant pas encore fait l'objet d'un décompte Réserve pour le bâtiment de station, compris dans le plan de la deuxième étape et dont les frais sont calculés à 1 300 000 francs, mais non encore construit : 30 pour cent de 1 300 000 francs

537217.50

34 446.75

390000.-- 424 446.75

Les dépenses de construction des première et seconde étapes sont donc demeurées de 375 902 fr. 50 au-dessous du devis, ce qui correspond à une subvention de

112 770.75

D. Les effets de l'agrandissement de l'aéroport de Cointrin sur le trafic aérien de Genève Les travaux des première et deuxième étapes furent terminés en été 1947, sauf le bâtiment de station. Le travail principal, soit l'établissement d'une piste artificielle de 2000x50 m, avait même été terminé une année auparavant. Or la statistique d'exploitation de l'aéroport de Cointrin montre sans équivoque que cet achèvement de la piste bétonnée a amené immédiatement un accroissement très considérable du trafic. On peut démontrer que cet accroissement ne tient pas seulement à l'expansion générale du trafic aérien, mais qu'il est dû en bonne partie à cette modernisation et à cet agrandissement de l'aéroport de Genève, pour le plus grand bénéfice de Genève et de toute la Suisse.

1. Le volume du trafic de Cointrin était, en 1938, bien inférieur à celui de Dübendorf. Cointrin n'avait que 57% du nombre des vols de Dübendorf, 35% de la quantité de courrier postal de Dubendorf, 34% des passagers de Dübendorf, 86% du fret de Dübendorf.

1189 2. Tandis que de 193S à 1947, l'accroissement du trafic a été pour Dubendorf de 35% quant aux vols, 75% quant au courrier postal, 234% quant aux passagers, 488% quant au fret, l'accroissement correspondant pour Cointrin est partout plus grand et s'élève à 108% quant aux vols, 980% quant au courrier postal, 1110% quant aux passagers, 1200% quant au fret.

3. Cette expansion considérable de son trafic a permis à Cointrin de surpasser Dübendorf de 115% quant à la poste aérienne, 22% quant aux passagers, 90% quant au fret.

Le nombre des vols est seul, à Cointrin, resté au-dessous du nombre correspondant de Dtibendorf.

4. Cointrin a dépassé Dübendorf en 1947, c'est-à-dire l'année de l'achèvement des deux premières étapes.

Si, malgré le nombre plus grand des passagers, les quantités plus grandes de fret et de courrier postal transportées, le nombre des vols est demeuré plus petit à Cointrin qu'à Dubendorf, c'est précisément parce que l'aéroport agrandi de Cointrin permet l'atterrissage de machines bien plus grandes que celles qui se posent à Dübendorf.

On peut dire en résumé que les espérances mises par les autorités de Genève et de la Confédération dans une transformation accélérée de l'aéroport de Cointrin ont été confirmées par les faits.

3. LE PERFECTIONNEMENT SUBSÉQUENT DE L'AÉROPORT DE GENEVE-COINTRIN Nous avons rappelé qu'il existe un arrêté fédéral prévoyant une étape subséquente du développement de l'aéroport de Genève-Cointrin et l'allocation de nouvelles subventions fédérales. D'autre part, nous avons montré par l'exemple du bâtiment de station combien il était indiqué de renvoyer à plus tard les parties constitutives d'un aéroport qu'il n'était pas possible de projeter raisonnablement faute de données sur les besoins futurs. Cette remarque s'applique surtout aux bâtiments, à propos desquels la guerre ne nous apprenait rien, et aux installations modernes du service

1190 de la sécurité aérienne, tenues secrètes pour raisons militaires jusque peu de temps avant la fin de la campagne.

Dès que des voyages d'études à l'étranger furent de nouveau possibles après la cessation des hostilités et que l'industrie aéronautique ---· surtout des puissances anglo-saxonnes -- eut été progressivement autorisée à faire un usage commercial des perfectionnements obtenus pendant la guerre et pour la guerre, on se mit activement en Suisse à faire des plans d'aérodromes et d'installations de sécurité aérienne.

En même temps se produisait l'intensification du trafic aérien, telle que nous l'avons esquissée plus haut. La Swissair était loin d'en être le seul instrument. Des sociétés étrangères y participèrent avec elle. La Transworld Airline américaine fit même choix de Genève-Cointrin comme point d'appui de sa ligne mondiale New York--Bombay.

L'importance croissante de l'aéroport de Cointrin eut pour conséquence que les entreprises de navigation aérienne élevèrent des exigences nouvelles et pressantes, relatives aux locaux et aux conditions aérotechniques. L'exploitant de l'aéroport, c'est-à-dire le canton de Genève, ne put se refuser à les examiner, sous peine de paralyser l'expansion de la place.

C'est à cette circonstance qu'est dû le fait quelque peu inusité d'une activité constructive où projet et exécution ont marché presque de pair.

Il ne fut plus possible au Conseil d'Etat de Genève de mettre au point un projet définitif et de le faire adopter par l'autorité législative, puis par les autorités fédérales, avant de commencer la halle de montage, le hangar pour les avions et le bâtiment de station. Les crédits n'étaient même pas assurés lorsque les travaux furent entrepris.

Cette façon de procéder montre que le gouvernement genevois n'a certes pas craint d'engager sa responsabilité; mais elle était en contradiction avec la législation fédérale, qui exige, lorsqu'une subvention est sollicitée, non seulement que le projet soit approuvé par le Conseil fédéral avant le début des travaux, mais encore que les chambres se soient prononcées à son sujet (voir l'arrêté fédéral du 22 juin 1945 concernant le développement des aérodromes civils).

C'est pourquoi les ofifices fédéraux compétents, bien qu'ils aient collaboré à l'élaboration des plans des installations de la troisième
étape, actuellement en construction, ont toujours réservé expressément la pleine liberté de décision du Conseil fédéral et des chambres.

Le projet de la troisième étape de Cointrin nous est parvenu, avec le devis définitif, le 18 mai 1948. D'autre part, le financement sur le terrain cantonal a été assuré par une décision du Grand conseil de Genève, du 24 avril 1948, prise à l'unanimité.

Vu les circonstances particulières qui viennent d'être décrites, le Conseil fédéral est d'avis qu'avec certaines réserves il y a lieu de donner suite

1191 à la demande de subvention du canton de Genève. Les raisons qui permettent de passer sur le désaccord avec la législation fédérale applicable sont les suivantes : 1° Le subventionhement d'une troisième étape est assuré en principe par l'arrêté fédéral du 21 juin 1945.

2° Les perfectionnements annoncés par Genève pour être approuvés et subventionnés sont nécessaires et urgents si l'on tient à une exploitation bien ordonnée et à la sécurité indispensable de la navigation aérienne.

3° L'intensification soudaine du trafic aérien à Genève par suite de l'exécution des étapes I et II, ne permet pas de différer certains travaux; on doit reconnaître d'autre part que les difficultés qui s'opposaient à l'élaboration d'un projet empêchaient de respecter les dispositions légales.

Quant aux réserves que nous croyons nécessaire de formuler, nous pensons qu'elles devraient être les suivantes: 1° Les devis des projets approuvés par la Confédération sont approximatifs et doivent dans tous les cas être considérés comme des maxima.

Les dépassements de devis ne peuvent donc donner lieu à subvention.

2° Les projets détaillés et les dossiers de soumission de toutes les catégories de travaux doivent être soumis à l'approbation du département des postes et des chemins de fer, Celui-ci a la compétence de refuser la subvention pour les catégories de travaux et les solutions techniques qu'il ne croit pas favorables à l'exécution rationnelle des constructions admises en principe par le Conseil fédéral et les chambres.

3° Dana le cas des constructions qui sont déjà commencées ou achevées et que le Conseil fédéral et les chambres ont approuvées en principe, le département des postes et des chemins de fer peut refuser la subvention de travaux déjà effectués si ceux-ci n'étaient pas nécessaires à la réalisation la plus rationnelle des projets acceptés.

4° Les subventions sont payées au vu du décompte final avec les entrepreneurs des différentes constructions ou catégories de travaux.

Toutes dépenses ultérieures sont considérées comme des dépenses d'entretien.

5° Les bâtiments de la troisième étape de perfectionnement de l'aéroport de Cointrin, en tant qu'ils auront été approuvés par le Conseil fédéral et les chambres, sont indispensables et urgents si l'on veut une exploitation bien ordonnée et la sécurité aérienne
normale. Les bâtiments qui seraient construits ultérieurement devraient l'être d'après les principes de l'économie commerciale, en vue d'un rendement proportionné à leur coût, et ne pourraient plus être subvention-

1192 nés, sauf si des prescriptions fédérales s'opposaient à leur exploitation sous l'angle du rendement.

A. Le projet de la troisième étape du développement de l'aéroport de Cointrm L'intensification du trafic aérien due, comme nous l'avons montré, à l'achèvement des deux premières étapes, et qui a dépassé toutes les prévisions, a contraint bien vite de reconnaître que les perfectionnements déjà apportés n'étaient pas entièrement suffisants.

Les aires de stationnement et d'attente des avions avaient semblé généreusement calculées. On voit maintenant qu'elles étaient trop petites.

Lorsque plusieurs quadrimoteurs doivent partir à la même heure, les manoeuvres deviennent si dangereuses que de nouvelles surfaces bétonnées sont indispensables.

Les hangars étaient notablement trop petits pour abriter ne fût-ce qu'une partie des avions stationnant à Cointrin. En outre, certains types d'avions dépassaient tout simplement par leurs dimensions celles des hangars existants.

L'aérogare prévue pour la deuxième étape se révéla d'avance insuffisante. Les plans durent être modifiés dès le début des travaux. Le bâtiment achevé présentera une dimension frontale de 237 m.

Un hangar plus petit est nécessaire pour les avions légers du trafic touristique et à la demande. Il faut aussi une halle de montage, avec ateliers, pour les réparations et les grandes revisions, s'étendant à plusieurs semaines, des avions employés sur les lignes.

Les conditions d'accès de l'aéroport à partir de la ville étaient tout à fait insuffisantes et dangereuses. Leur adaptation à un trafic routier fortement accru ne pouvait être évitée, non plus que l'installation de places de stationnement pour les véhicules à moteur.

La sécurité de la navigation aérienne exigeait l'éloignement de certains obstacles. Les installations radioélectiiques doivent être adaptées au trafic plus intense et aux prescriptions internationales en vigueur, qui tiennent compte des dernières conquêtes de la technique. L'éclairage de nuit et par mauvais temps doit également être modernisé, les installations existantes étant insuffisantes par suite du rôle toujours plus grand que jouent les vols par tous les temps.

Tous ces bâtiments et installations représentent un minirmim dont ne saurait se passer une exploitation aéronautique bien ordonnée. Les ouvrages
simplement désirables, mais non indispensables, n'ont pas été pris en considération. Le total du devis a pu ainsi être abaissé de 3 000 000 de franca environ.

Les détails de la troisième étape font l'objet d'un rapport aux commissions des chambres.

1193 Résumé des frais

Nouvelles aires de stationnement et d'attente Hangar Halle de montage Ateliers et garages . . . . . ' Hangar pour petits avions Bâtiment de station Installations de lutte contre l'incendie Routes d'accès et parcs d'autos Enlèvement des obstacles au vol Places d'évitement et plateforme de compensation . . . .

Compléments à l'éclairage Installations radioélectriques

Fr.

2 890 000 3240000 1 725 000 2 840 000 1 460 000 4 305 000 120 000 1 673 000 112 000 450 000 385 000 1 465500 20 665 500

B. Flan financier Selon l'article 2 de l'arrêté fédéral du 22 juin 1945 concernant le développement des aérodromes civils, il sera tenu compte dans chaque cas," pour -la fixation des subventions, de la situation financière du bénéficiaire.

Le message qui accompagnait le projet d'arrêté montre d'autre part que la création d'aérodromes nécessaires et appropriés à leur but est une affaire qui intéresse tout le pays, et que les frais de construction sont si élevés qu'ils ne peuvent être mis à la charge des seuls intéressés régionaux.

Pour élucider la question du chiffre de la subvention fédérale, nous avons établi, en commun avec les autorités du canton de Genève, un budget de l'aéroport en 1949, reposant sur l'hypothèse que le trafic aérien de Cointrin en 1949 serait le même qu'en 1947. Cette hypothèse se justifie par le fait que dès 1949 l'aéroport de Zurich-Kloten sera en pleine exploitation, de sorte qu'une partie du trafic se détournera indubitablement vers Zurich, Ce budget pour 1949 prévoit un total de dépenses de 2 316 526 francs contre 1 115 648 francs seulement aux recettes. Le déficit que doit supporter Genève, et qui est certainement supportable pour l'économie de ce canton, est donc de 1 200 878 francs.

Ce budget a été établi dans l'hypothèse d'une subvention fédérale de 30 pour cent.

C. Vue d'ensemble de la participation de la Confédération D'après l'article 2 de l'arrêté fédéral du 22 juin 1945 concernant le développement des aérodromes civils, la Confédération peut allouer, sur les frais de la troisième étape du perfectionnement de l'aéroport de GenèveCointrin, une subvention de 30 pour cent au maximum.

Feuille, fédérale. 100" année. Vol. II.

80

1194 Nous fondant sur les explications qui précèdent, nous exprimons l'avis que c'est ce taux maximum de subvention qui devrait être appliqué en l'occurrence.

Les engagements financière qui en résultent pour la Confédération se calculent ainsi: Fr.

Fr.

Total des frais de construction, à l'exclusion des installations radioélectriques 19200000 Subvention fédérale 30% de 19 200 000 fr,. .

5760000 Coût des installations radioélecFr.

triques 1 465 500 1 465 500 Là-dessus, servent à la sécurité aérienne générale et doivent être payés par la Confédération . . .

302 676 302 676 Coût de la sécurité aérienne locale. 1162 824 Subvention fédérale: 30% de 1 162824 fr.. .

348 847 Total des frais de construction 20 665 500 Dépenses totales de la Confédération . . . .

6 411 523 Dépenses totales du canton 14 253 977 20 665 500 20 665 500 Nous avons l'honneur de vous recommander d'adopter le projet d'arrêté fédéral ci-joint.

Veuillez agréer, Monsieur le Président et Messieurs, les assurances de notre haute considération.

Berne, le 20 août 1948.

Au nom du Conseil fédéral suisse: Pour le président de la Confédération, Ed. de STEIGER Le vice-chancelier, 7219

Ch. OSER

1195 (Projet)

ARRÊTÉ FÉDÉRAL concernant l'agrandissement de l'aéroport de Genève -Cointrin

L'Assemblée fédérale de la Confédération suisse,

vu l'arrêté fédéral du 22 juin 1945 (*) concernant le développement des aérodromes civils; vu le message du Conseil fédéral du 20 août 1948, arrête : Article premier La Confédération alloue au canton de Genève, pour la poursuite immédiate de l'agrandissement de l'aéroport de Genève-Cointrin, une subvention de 30 pour cent des frais de construction, au maximum 6109000.

francs.

Art. 2 L'agrandissement aura lieu conformément aux projets d'août 1947 et d'avril 1948 remis par le canton de Genève.

Il comprendra: oe. L'élargissement des aires de stationnement et d'attente; b. La construction d'un nouveau hangar d'aviation; c. La construction d'une halle de montage; d. La construction d'ateliers et de garages; e. La construction d'un hangar pour les petits avions; /. La construction d'un bâtiment de station; g. L'installation de moyens de lutte contre l'incendie; À. La création de routes d'accès et de parcs pour véhicules à moteur; i. L'enlèvement des obstacles au vol; k. La construction de places d'évitement; l. Le complètement des installations d'éclairage; m. La modernisation et la réinstallation de l'outillage radioélectrique.

Art. 3 Pour les installations servant à la sécurité aérienne et devant être mises à la charge de la Confédération, il est ouvert un crédit de 303 000 francs.

(*) KO ci, 867.

1196 Art. 4 Pour le calcul de la subvention fédérale, on tiendra compte des frais nets de construction prévus par les projets dont le détail a été approuvé par le département des postes et des chemins de fer, des honoraires des ingénieurs et architectes ayant projeté la construction, jusqu'au décompte y compris. Ne sont pas subventionnés les frais causés par d'autres délibérations, l'activité des autorités, commissions et délégations, non plus que les frais purement financiers et les intérêts.

Art. 5 Le détail des projets et les dossiers d'adjudication doivent être soumis à l'approbation du département des postes et des chemins de fer.

Cette formalité doit être encore remplie pour les travaux déjà entrepris ou exécutés. Les travaux partiels qui ne sont pas nécessaires à l'exécution rationnelle des ouvrages et installations énumérés à l'article 2 peuvent être exclus de la subvention par le département des postes et des chemins de fer.

Art. 6 La progression des travaux sera surveillée par le département des postes et des chemins de fer. A cet effet, le gouvernement cantonal donnera aux fonctionnaires de ce département tout l'appui et tous les renseignements désirables.

Art. 7 Un décompte des travaux partiels terminés sera remis au fur et à mesure de leur achèvement. Les subventions sont payées sur la base de ces décomptes, après leur approbation par le département des postes et des chemins de fer.

Art. 8 En acceptant la subvention fédérale, le canton de Genève s'engage à exploiter et à entretenir lui-même l'aéroport ou à le faire exploiter et entretenir par des tiers. Les conditions de détail de cette exploitation et de cet entretien seront précisées par la concession qu'accordera le département des postes et des chemins de fer.

Art. 9 Le présent arrêté, qui n'est pas de portée générale, entrera en vigueur aussitôt que le canton de Genève aura déclaré accepter les conditions qui y sont prévues.

Si cette déclaration n'est pas faite jusqu'au 1948, l'arrêté perdra sa validité.

Art. 10 Le Conseil fédéral est chargé de l'exécution du présent arrêté.

7219

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MESSAGE du Conseil fédéral à l'Assemblée fédérale concernant l'agrandissement de l'aéroport de Genève Cointrin (Du 20 août 1948)

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1948

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5487

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26.08.1948

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