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MESSAGE du

Conseil fédéral à l'Assemblée fédérale sur la modification de l'article 10 de la loi concernant la durée du travail dans l'exploitation des chemins de fer et autres entreprises de transport et de communications.

(Du 13 janvier 1948.)

Monsieur le Président et Messieurs, Nous avons l'honneur de vous soumettre le projet d'une loi modifiant l'article 10 do la loi du 6 mars 1920 qui concerne la durée du travail dans l'exploitation des chemins de fer et autres entreprises de transport et de communications.

I.

Invoquant la diversité et une insuffisance des dispositions en vigueur sur le régime et la durée des vacances du personnel de la Confédération et des entreprises de transport concessionnaires, l'union federative du personnel de;s administrations et entreprises publiques a demandé au Conseil fédéral par requête du 23 janvier 1947, de créer par une loi ayant effet dès le 1er janvier 1948, une situation uniforme et mieux en harmonie avec les exigences sociales du temps présent. L'union federative relève qu'il s'avérerait nécessaire de procéder à une revision totale de la loi du 6 mars 1920 sur la durée du travail dans l'exploitation des chemins de fer et autres entreprises de transport et de communications ; elle est toutefois prête à se contenter provisoirement d'un remaniement des dispositions concernant les vacances, afin de ne pas retarder la solution de cette question urgente entre toutes.

La requête expose que la réglementation actuelle des vacances ne répond plus aux conceptions modernes et désavantage avant tout la jeunesse, tandis que le besoin de loisirs plus étendus exige impérieusement une prolongation des vacances. Cette nécessité ne concerne pas seulement cer-

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taines professions, mais se fait sentir de façon tout à fait générale. L'adaptation des vacances aux diverses activités professionnelles telle qu'elle ressort de la réglementation actuelle, plus o\i moins heurese et équitable, doit par conséquent être mise à l'arrière-plan. Les différences qui existent encore entre la législation applicable au personnel de la Confédération et celle des entreprises de transport concessionnaires doivent faire place à une réglementation unifiée.

L'union federative insiste avant tout sur le fait que la règle des vacances minimums d'une semaine doit être abandonnée, car ces vacances, notamment dans les entreprises de transport, ne suffisent pas à procurer une détente effective au personnel. La requête vise d'autre part à ce que les vacances de trois et quatre semaines soient obtenues plus tôt que ce n'est le cas actuellement.

D'après les propositions de l'union federative, la durée des vacances pour le personnel de la Confédération et des entreprises de transport concessionnaires devrait être réglée uniformément de la façon suivante, chaque semaine de vacances englobant comme jusqu'ici un jour de repos ordinaire : De la lre à la 7e année de service inclusivement 2 semaines Dès l'année où l'agent atteint 8 ans de service ou l'âge de 30 ans révolus , 3 » Dès l'année où il atteint 15 ans de service ou l'âge de 40 ans révolus 4 » Pour les fonctionnaires des classes de traitement 1 à 10, uniformément , 4 » Postérieurement, la fédération des syndicats chrétiens du personnel de la Confédération et des entreprises publiques de transport s'est également occupée de la réforme des vacances. Partant de considérations semblables à celles de l'union federative, elle a demandé par une requête du 16 septembre 1947 que l'article 10 de la loi sur la durée du travail soit modifié et prévoie désormais: De la lre à la 10e année de service 14 jours Dès l'année dans laquelle l'agent accomplit 10 ans de service ou atteint l'âge de 35 ans 21 » Dès l'année dans laquelle l'agent atteint l'âge de 50 ans . . 28 » Cette dernière requête ne vise donc qu'à l'octroi de deux semaines de vacances dès le début et de trois semaines à partir de la dixième année de service révolue, le régime des vacances n'étant, par ailleurs, pas modifié.

II.

De prime abord, et sans préjudice de l'examen matériel des requêtes présentées, nous nous sommes demandé si l'on ne pourrait pas faire droit

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aux voeux exprimés en recourant à des moyens plus simples que l'adoption d'une nouvelle loi sur les vacances.

Il est incontestable que les normes de vacances applicables au personnel ·de la Confédération et des entreprises de transport concessionnaires sont dispersées aujourd'hui dans différents règlements et ne sont pas uniformes.

Seule la loi sur la durée du travail règle explicitement la durée des vacances, tandis que la loi du 30 juin 1927 sur le statut des fonctionnaires de la Confédération ne donne pas de précisions à ce sujet. Au cours des débats parlementaires, nul n'a exprimé le désir de voir le législateur décider une fois pour toutes quels droits à des vacances possèdent les fonctionnaires fédéraux non soumis à la loi sur la durée du travail. L'article 50 de la loi sur le statut des fonctionnaires dispose que le Conseil fédéral fixera la durée des vacances de ces fonctionnaires et édictera des prescriptions spéciales concernant les absences prolongées pour cause de maladie, d'accidents ou le service militaire. A l'article 62 de la même loi, le législateur a également autorisé le Conseil fédéral à édicter des prescriptions réglant les rapports de service des personnes occupées par la Confédération mais qui n'ont pas qualité de fonctionnaires, et par conséquent, à déterminer aussi la durée de leurs vacances.

Cette répartition de la compétence étant à notre avis satisfaisante, nous estimons qu'il n'y a actuellement aucun motif pour le Conseil fédéral de renoncer aux prérogatives que. le législateur lui a données, et d'élaborer, au sens de la requête de l'union federative, un projet de loi réglant de façon uniforme la durée des vacances de tout le personnel de la Confédération, et en outre, de celui des entreprises de transport concessionnaires.

Nous estimons que le voeu principal des unions du personnel pourrait être réalisé encore plus simplement et plus rapidement par une modification de l'article 10 de la loi sur la durée du travail, ainsi que le suggère d'ailleurs la fédération des syndicats chrétiens du personnel de la Confédération et des entreprises publiques de transport. En procédant de cette manière, le Conseil fédéral aurait toujours la faculté de mettre en harmonie la durée des vacances des agents non soumis à la loi sur la durée du travail avec ce que prescrirait l'article
10 ainsi modifié de cette loi, lorsque la nouvelle teneur de cet article serait, pour le personnel intéressé, plus favorable ·que celle des ordonnances actuelles fondées sur le statut des fonctionnaires.

III.

Pour l'examen matériel des requêtes des unions du personnel, il s'avérait indispensable de consulter les administrations et " associations professionnelles intéressées à savoir: les chemins de fer fédéraux, les postes, télégraphes et téléphones et la fédération suisse des transports publics, laquelle groupe l'union d'entreprises suisses de transport, l'union des funiculaires, l'association des entreprises de navigation et l'union des concessionnaires

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d'autotransports postaux. Ces administrations et associations furent aussi .de l'avis qu'il ne serait pas judicieux de dissocier les dispositions sur les vacances du personnel des entreprises de transport de la loi sur la durée du travail pour en faire une loi particulière, étant donné que les matières de toute cette législation se rapportent les unes aux autres.

Quant au régime des vacances, elles estiment souhaitable, en principe, d'accorder aux jeunes employés 14 jours de vacances au lieu de 7 jours, en dépit même des diverses difficultés d'application que cela entraînera.

Par ailleurs, elles considèrent qu'un abaissement des limites d'âge et d'années de service exigées maintenant pour l'octroi de 3 et 4 semaines de vacances serait exagéré. Les 'conséquences financières qui en résulteraient, d'une part, seraient intolérables pour beaucoup d'entreprises; d'autre part, le manque de personnel et les difficultés actuelles pour en recruter ne permettraient pratiquement pas de procéder à une telle réforme. Du reste, une comparaison avec les vacances prévues par les contrats collectifs en vigueur démontre que, dans l'ensemble, le personnel des entreprises publiques de transport est déjà plus favorisé que la plupart des salariés des autres professions. Tandis que les chemins de fer fédéraux posent la question -- sans y donner une réponse -- de savoir si l'on devrait accorder, la seconde semaine de vacances dès la première année de service, la fédération suisse des transports publics propose explicitement de n'accorder, comme jusqu'ici, que 7 jours de vacances, la première année, laquelle doit être considérée comme une année d'initiation. En ce qui concerne les jeunes agents, elle ne donne par ailleurs son adhésion à l'idée de vacances plus longues que sous la réserve expresse que le personnel des entreprises régies par le statut des transports automobiles soit soumis aux mêmes conditions de vacances que celui des entreprises publiques de transport. En revanche, la proposition de l'union federative de régler uniformément les vacances pour tout le personnel de la Confédération et des entreprises de transport concessionnaires est rejetée, parce que les conditions d'existence de ces entreprises ne sont pas telles qu'on puisse à cet égard assimiler tout simplement leur personnel aux employés de la Confédération non soumis à la loi sur la, durée du travail.

IV.

La commission paritaire, instituée en vertu de l'article 18 de la loi sur la durée du travail, a depuis lors également donné son avis sur les problèmes posés par les requêtes des unions du personnel et par1 les divers rapports présentés sur ce sujet. Elle s'est aussi prononcée d'emblée en faveur du principe d'une révision de l'article 10 de la dite loi. Elle n'a pu contester non plus qu'une prolongation des vacances du jeune personnel se justifiait pleinement pour des motifs sociaux et de santé. Prenant en considération les raisons invoquées par le personnel, les représentants des administrations

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soumises à la loi renoncèrent à faire une exception pour l'année d'entrée en service; la commission recommanda donc, à l'unanimité, de fixer à deux semaines par année la durée des vacances dès la première année de service inclusivement.

En ce qui concerne la réglementation appliquée par les entreprises soumises au statut des transports automobiles, la commission a pris note que le régime des vacances institué depuis le 1er mai 1947 par le contrat collectif de travail va moins loin, en ce qui concerne les sept premières années, mais prévoit en revanche des vacances plus étendues dès la 9e et jusqu'à la 14e année de service. Ceci compense cela dans une certaine mesure, et les réserves exprimées par la fédération des transports publics sont ainsi en grande partie prises en considération. Toutefois, la commission a exprimé le voeu qu'au moins cette réglementation des vacances soit aussi tôt que possible déclarée obligatoire pour l'ensemble du pays, ce qui, du reste, a été réalisé depuis lors par l'arrêté du Conseil fédéral dû 18 décembre 1947.

Dès le début, une question a été contestée au sein de la commission: Fallait-il admettre également l'amélioration préconisée par les associations du personnel et tendant à octroyer plutôt les vacances de 3 et 4 semaines ?

Les représentants du personnel souhaitaient notamment la suppression des différences existant entre les règlements des fonctionnaires I et II et la loi sur la durée du travail, différences qu'ils n'estimaient plus justifiées.

Pour leur part, les représentants des employeurs soulignèrent l'importance du sacrifice imposé déjà aux entreprises de transport par un octroi plus large des vacances de deux semaines; ils relevèrent également que si les prolongations de vacances devaient s'étendre encore à un plus grand nombre d'agents, on ne parviendrait pas à satisfaire actuellement aux besoins accrus de personnel; celui-ci, au lieu d'obtenir véritablement des vacances supplémentaires, ne recevrait très souvent qu'un dédommagement en espèces, ce qui serait en contradiction avec l'esprit de la loi. Us relevèrent aussi, à juste titre, que la réglementation actuelle pour la 3e et la 4e semaine de vacances du personnel des entreprises de transport était maintenant déjà plus favorable que les dispositions figurant dans la plupart des contrats collectifs
de travail de l'économie privée; étant donnée la concurrence, il ne serait surtout pas souhaitable d'accentuer la différence existant par rapport à la profession des transporteurs par automobiles.

Finalement, les délégués du personnel se rallièrent au maintien provisoire des conditions actuelles quant à l'octroi de la 3e et 4e semaine de vacances, mais sans reconnaître par là la pertinence des arguments invoqués.

Ils se rendirent compte que, pour l'instant, une revision plus large de l'article 10 se heurterait à des résistances qui retarderaient l'application de l'accord réalisé pour la seconde semaine de vacances. Ils se réservèrent cependant de revenir sur leur requête ultérieurement.

:216 La commission unanime conclut ainsi qu'il fallait renoncer actuelle.ment à modifier les dispositions de l'article 10 concernant le droit à 3 et 4 semaines de vacances.

Elle se prononça finalement en faveur du nouveau texte suivant pour le premier alinéa de l'article 10 de la loi sur la durée du travail : « Tout agent occupé dans les conditions prévues à l'article premier, 3e alinéa, a droit pendant l'année civile aux vacances suivantes: 14 jours, les 14 premières années de service; 21 jours, dès l'année où il atteint 15 ans de service ou l'âge de 35 ans révolus ; 28 jours, dès l'année où il atteint l'âge de 50 ans révolus. » Les 2e et 3e alinéas de l'article 10 ne sont pas modifiées.

En adoptant cette conclusion, la commission a exprimé instamment "le voeu qu'aucun effort ne soit négligé pour assurer la mise en vigueur de ces nouvelles dispositions rétroactivement au 1er janvier 1948.

V.

Tenant compte des considérations qui précèdent, nous nous rallions en principe à la proposition de la commission pour la loi sur la durée du travail; ce projet est une oeuvre d'entente entre les représentants des administrations des entreprises soumises à la loi sur la durée du travail, d'une part, et leur personnel, d'autre part. Nous reconnaissons en particulier que la prolongation de vacances proposée pour le jeune personnel répond à un besoin social et doit être appliquée aussi rapidement que possible; par ailleurs, nous nous voyons également obligés de prendre en -considération la portée financière et les difficultés que soulève l'octroi de plus larges concessions. Qu'il suffise de mentionner, par exemple, que le .régime étendu de la 2e semaine de vacances coûtera aux seuls postes, télégraphes et téléphones la somme de 700 000 francs, les frais de l'application intégrale des requêtes présentées étant évalués en revanche à environ 2 700 000 francs. Même si ces chiffres ne devaient pas être entièrement atteints en réalité, ils démontrent suffisamment que la prudente réserve des administrations était d'autant plus fondée que tout accroissement de personnel se heurte en outre à de grandes difiicultés.

Nous 'proposons en conséquence de modifier l'article 10 de la loi sur la durée du travail dans ce sens que le personnel des entreprises de transport ^soumises à cette loi aurait droit à 14 jours de vacances dès et y compris la première année de service au lieu de la 8e année, et de renoncer en revanche à la modification des autres dispositions. Le texte du projet de loi ci-joint diffère en outre, quant, à la forme, de la proposition de la commission pour "la loi sur la durée du travail; il ne s'agit cependant que d'une modification

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rédactionnelle qui n'a pas de portée matérielle et vise simplement à éliminer les divergences d'interprétation que la pratique a révélées jusqu'à présent.

Quant au souhait de la commission de voir ces nouvelles prescriptions entrer rapidement en vigueur, nous nous efforcerons d'y donner suite dans la mesure du possible.

En vous priant, Monsieur le Président et Messieurs, de bien vouloir examiner et adopter le projet de loi ci-joint lors de votre prochaine session, nous saisissons cette occasion pour vous présenter les assurances de notre haute considération.

Berne, le 13 janvier 1948.

Au nom du Conseil fédéral suisse : 8878

Le préaident de la Confédération, CELIO.

Le chancelier de la Confédération, LEIMGRTJBER.

Feuille fédérale. 100e année. Vol. I.

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218 Projet)

Loi fédérale modifiant

l'article 10 de la loi qui concerne la durée du travail dans l'exploitation des chemins de fer et autres entreprises de transport et de communications

L'ASSEMBLÉE FÉDÉRALE DE LA CONFÉDÉRATION SUISSE, vu le message du Conseil fédéral du 13 janvier 1948, arrête: Artide premier L'article 10 de la loi fédérale du 6 mars 1920 concernant la durée du travail dans exploitation des chemins de fer et autres entreprises de transport et de communications est abrogé et remplacé par la disposition suivante: Art. IO. 1 Tout agent occupé dans les conditions prévues à l'article premier, 3e alinéa, a droit pendant l'année civile aux vacances suivantes: Jusq'à la fin de l'année dans laquelle il a accompli sa 14* année de service 14 jours, dès l'année où il accomplit sa 15e année de service ou atteint l'âge de 35 ans 21 jours, dès l'année ou il atteint l'âge de 50 ans 28 jours.

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Chaque période de sept jours de vacances comprend un des jours de repos prescrit à l'article 9.

3

Pour déterminer le nombre des années de service, on tiendra compte de tout le temps passé par l'agent au service d'entreprises de transport et de communications soumises à la présente loi.

Art. 2

Le Conseil fédéral fixe la date de l'entrée en vigueur de la présente loi.

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MESSAGE du Conseil fédéral à l'Assemblée fédérale sur la modification de l'article 10 de la loi concernant la durée du travail dans l'exploitation des chemins de fer et autres entreprises de transport et de communications. (Du 13 janvier 1948.)

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