00.042 Message concernant l'utilisation des réserves d'or et une loi fédérale sur la Fondation Suisse solidaire du 17 mai 2000

Messieurs les Présidents, Mesdames et Messieurs, Nous vous soumettons, par le présent message, un projet d'arrêté fédéral sur l'utilisation des réserves d'or (disposition transitoire relative à l'art. 99 de la Constitution fédérale) et de loi fédérale sur la Fondation Suisse solidaire, en vous proposant de les adopter.

Nous vous proposons également de classer l'intervention parlementaire suivante: 1998

P

98.3034

«Pour une prometteuse» (E 25.6.98, Danioth)

Nous vous prions d'agréer, Messieurs les Présidents, Mesdames et Messieurs, l'assurance de notre haute considération.

17 mai 2000

Au nom du Conseil fédéral suisse: Le président de la Confédération, Adolf Ogi La chancelière de la Confédération, Annemarie Huber-Hotz

3664

2000-0995

Condensé Afin de «donner une nouvelle substance, en Suisse et à l'étranger, aux idées si fortement menacées de solidarité et de sens civique»1, il a été décidé de lancer un projet national, tourné vers l'avenir, en créant une Fondation Suisse solidaire. Ce projet a été annoncé aux Chambres le 5 mars 1997 par le président de la Confédération d'alors.

A travers le présent message, nous vous soumettons d'abord une modification constitutionnelle permettant au législateur de fixer des règles particulières relatives à l'utilisation des réserves d'or excédentaires dont la Banque nationale suisse (BNS) n'a plus besoin pour mener la politique monétaire. Selon la proposition de disposition transitoire relative à l'art. 99 de la Constitution fédérale (Cst.), la fondation peut être mise en place grâce au produit de la vente d'une partie des réserves excédentaires. A cet effet, nous vous soumettons également le projet de loi fédérale sur la Fondation Suisse solidaire. Cette loi définit le but et les tâches de la fondation, son mode de fonctionnement, son financement et la gestion des fonds.

La partie générale du message explique pourquoi une partie des réserves d'or de la BNS peuvent être utilisées pour d'autres buts publics et elle situe le contexte juridique de la vente et de l'utilisation de ces réserves.

L'histoire de la solidarité à l'intérieur de nos frontières et envers l'étranger, ainsi que les raisons à l'origine de l'idée de la fondation sont également décrites.

Le but de la fondation est expliqué en détail: ­

renforcer la solidarité, en Suisse et à l'étranger;

­

combattre les causes de la pauvreté, de la détresse et de la violence et

­

contribuer à assurer aux personnes concernées un avenir digne.

La prévention constitue le fil conducteur de l'activité de la fondation. C'est à dessein que la solidarité n'est pas définie de manière précise et qu'elle n'est pas limitée à des groupes-cible déterminés. Dans la perspective actuelle, restreindre le champ d'activité pourrait exclure des domaines importants susceptibles de revêtir une signification particulière à l'avenir. La fondation se concentre en premier lieu sur des projets visant à prévenir durablement la détresse et la pauvreté. Créer de bonnes conditions d'existence favorise la prévention et permet d'offrir un avenir meilleur aux enfants, c'est à dire à la génération de demain. Les activités de la Fondation Suisse solidaire diffèrent par conséquent des opérations de sauvetage et des aides proposées par de nombreuses organisations aussi compétentes qu'importantes.

Trois champs d'activité découlent du but fixé à la fondation: ­

1

la fondation contribue à prévenir les causes de la pauvreté et de l'exclusion et à en atténuer les conséquences. Elle encourage l'intégration et développe la capacité des personnes concernées à se prendre en charge; Déclaration du 5 mars 1997 d'Arnold Koller, président de la Confédération à l'époque.

3665

­

elle contribue à prévenir les causes de la violence, de la violation des droits de la personne humaine et des génocides, et à en atténuer les conséquences.

Elle s'emploie à promouvoir une communauté d'existence harmonieuse et à favoriser la compréhension et la réconciliation;

­

enfin, la fondation aide à édifier les structures d'une société démocratique à même de fonctionner. Il s'agit là d'une condition essentielle pour prévenir l'extension de la pauvreté et de la violence.

Dans l'accomplissement de ses tâches, la fondation, conformément à l'un de ses objectifs généraux, veillera particulièrement à offrir des perspectives d'avenir aux enfants et aux adolescents. Pour chaque tâche, le message décrit des exemples de champs d'activité concrets envisageables pour la fondation, en Suisse et à l'étranger.

Le message expose ensuite les principes qu'applique la fondation dans ses activités.

Ces principes, tout comme les tâches prévues, constituent le fondement du concept de la fondation. Cette dernière complète les activités actuelles de l'Etat. Elle agit en partenariat avec des institutions et des organisations suisses et étrangère et elle répartit ses moyens financiers de manière équilibrée entre la Suisse et l'étranger.

Elle soutient en premier lieu des projets novateurs et contribuant au développement durable.

Dans un chapitre ultérieur, le message précise le mode de fonctionnement de la fondation et les mécanismes de son organisation: les organes de la fondation sont le conseil de fondation, les comités et le secrétariat. Le conseil de fondation établit tous les quatre ans un programme d'activités où sont fixées les priorités, sur la base desquelles les projets sont mis au concours. Les projets soutenus financièrement devront faire l'objet d'une évaluation. La fondation pourra également, dans des situations de détresse particulières, financer des aides d'urgence. Elle attribuera périodiquement le Prix de la solidarité.

Enfin, le mode de financement prévu est exposé: le capital de dotation sera constitué, dans un premier temps pour une période de 30 ans, grâce à la vente par tranches de 500 t d'or provenant des réserves excédentaires de la BNS. Toutefois, le capital de dotation s'élèvera à 7 milliards de francs au maximum. Les activités de la fondation seront financées par le produit de la gestion de ce capital, dont la valeur réelle doit être conservée. Le message précise les modalités de cette gestion et quelle politique la fondation suivra dans ce domaine.

Les explications relatives à la modification constitutionnelle et aux dispositions de la loi fédérale sur la Fondation Suisse solidaire se trouvent dans la partie spéciale du message qui est également consacrée aux conséquences que cette loi pourrait éventuellement avoir sur les finances fédérales et cantonales
et aux retombées sur l'économie suisse. L'intégration de ce projet dans la planification du Conseil fédéral et sa conformité avec la Constitution fédérale y sont également évoquées.

3666

Message 1

Partie générale

1.1

Utilisation des réserves d'or de la Banque nationale suisse (BNS)

1.1.1

Apparition de réserves excédentaires: une situation unique

1.1.1.1

Suppression de la parité-or du franc

Pendant plus d'un quart de siècle, il y a eu un large fossé entre la réalité et les textes régissant le système monétaire. Les dispositions constitutionnelles sur le franc suisse étaient encore fondées sur l'étalon-or. Ainsi, les billets de banque n'étaient qu'un substitut de l'or et ils pouvaient être convertis en or à tout moment. En fait, la paritéor n'était plus appliquée depuis longtemps. L'or était devenu une marchandise comme les autres et le franc suisse un moyen de paiement légal2. En conséquence, la parité-or du franc a été supprimée dans le droit constitutionnel (art. 99 Cst., politique monétaire), dans le cadre de la réforme de la Constitution fédérale, qui est entrée en vigueur le 1er janvier 2000. L'abandon de la parité-or du franc a également été inscrit dans la nouvelle loi fédérale sur l'unité monétaire et les moyens de paiement, qui est entrée en vigueur le 1er mai 2000.

Depuis la suppression de la convertibilité du dollar en or et le passage aux taux de change flottants, survenus au début des années 70, la parité-or du franc ne revêtait en fait plus aucune importance. Toutefois, en raison des dispositions légales relatives à la parité-or, à la convertibilité en or et à la couverture-or, la BNS devait inscrire ses réserves d'or au bilan en utilisant un prix nettement inférieur à celui de marché et il était impossible d'acheter ou de vendre de l'or. Grâce à la suppression de la parité-or, survenue le 1er mai 2000, la BNS peut utiliser de manière plus souple ses réserves d'or et les évaluer en se fondant sur un prix proche de celui du marché.

Lesdites réserves retrouvent ainsi leur fonction de réserves monétaires utilisables normalement. Suite à la suppression de la parité-or du franc, il était nécessaire de réexaminer le niveau des réserves monétaires dont la BNS a besoin pour mener la politique monétaire.

1.1.1.2

Réserves monétaires nécessaires pour mener la politique monétaire

On entend par «réserves monétaires» les actifs d'une banque centrale utilisables pour des paiements internationaux, c'est-à-dire pour exercer une influence sur les taux de change et pour coopérer sur le plan international en matière monétaire. Les réserves monétaires se composent d'or, de devises, de la position de réserve auprès du Fonds monétaire international et des moyens de paiement internationaux. Elles ne comprennent pas les actifs nationaux de la banque centrale, par exemple les titres nationaux.

2

Message du 27 mai 1998 concernant un nouvel article constitutionnel sur la monnaie; FF 1998 3488 à 3492.

3667

Il est difficile de définir théoriquement, à l'aide d'une règle générale, le niveau des réserves monétaires nécessaires à une banque centrale pour remplir sa mission sur le plan de la politique monétaire. Ce niveau dépend en effet de divers facteurs, tels que les particularités du pays, son degré de développement et le contexte monétaire.

Les réserves monétaires ont pour fonctions principales le renforcement de la confiance dans la monnaie nationale, la prévention des turbulences monétaires et la Constitution fédérale d'une tirelire de secours pour des situations de crise. Aussi estil largement admis que le niveau nécessaire de ces réserves dépend principalement de la taille de l'économie et de l'intensité des liens entre le pays concerné et l'étranger3. Ainsi, les réserves monétaires exprimées en fonction du produit intérieur brut sont en général plus importantes dans les petits pays entretenant des liens très étroits avec l'étranger que dans les grands pays. Divers critères permettent de déterminer le degré d'ouverture d'une économie nationale: le volume des importations ou des exportations ou leur part dans le produit intérieur brut, les modifications des flux de capitaux à court terme et le montant net des engagements envers les pays étrangers. Pour la Suisse, en sa qualité de place financière internationale, le montant des créances et des engagements à court terme des banques nationales envers des pays étrangers constitue un facteur prépondérant.

Cependant, tous ces critères ne permettent pas de déterminer de manière exacte le montant optimal des réserves monétaires. Dans de nombreux pays, les interventions effectuées sur les marchés des changes ont eu un impact sur le niveau des réserves.

Si l'on veut définir un critère de détermination des réserves monétaires de la BNS, il paraît raisonnable de comparer, en utilisant quelques-uns des indicateurs mentionnés, les réserves actuelles de la BNS avec celles détenues par d'autres banques centrales. Les pays dont les structures et la taille sont similaires devraient en effet détenir des réserves similaires afin d'être en mesure de faire face aux situations de crise. Dans le message du 27 mai 1998 concernant un nouvel article constitutionnel sur la monnaie, le montant et la composition des réserves monétaires de la BNS ont par conséquent4 été
analysés et comparés à ceux d'autres pays sur la base d'un rapport d'expertise (FF 1998 3534 à 3546). Ces comparaisons ont montré que la BNS ne disposait pas de réserves particulièrement élevées de devises non couvertes, mais que les réserves d'or, très bien fournies, se situaient hors du cadre habituel. Il s'agit par conséquent de savoir si la BNS a besoin, en plus de ses réserves de devises non couvertes, de la totalité de ses réserves d'or actuelles, qui atteignent près de 2600 t, pour mener la politique monétaire.

Les pays abritant une place financière internationale doivent avoir une banque centrale forte et disposant d'importantes réserves de devises. La nécessité d'importantes réserves de devises découle du fait que les places financières internationales ­ à l'instar des systèmes bancaires nationaux ­ opèrent des transformations d'échéances, ne serait-ce que dans une modeste mesure. Les banques actives sur les places financières internationales acceptent des fonds à court terme de la part d'étrangers et les prêtent à plus long terme à des étrangers également. Elles créent ainsi des liquidités pour des investisseurs étrangers. La création de liquidités implique des risques considérables pour les banques. Si leurs clients retirent leurs dépôts sans prévenir, elles doivent disposer d'actifs liquides en quantité suffisante pour garantir leur solvabilité. Les banques qui gèrent leurs risques de manière responsable devraient 3 4

Message relatif à la révision de la loi sur la Banque nationale; FF 1997 II 870.

Le nouvel article constitutionnel sur la monnaie, rapport du 24.octobre 1997 élaboré par le groupe d'experts «Réforme du régime monétaire».

3668

pouvoir éviter des problèmes de solvabilité, au moins dans des conditions normales.

Toutefois, en cas de crise financière internationale, la création de liquidités pourrait être lourde de conséquences pour les banques, en particulier si les investisseurs étrangers retirent massivement leurs dépôts. En cas de ruée sur les banques domestiques, il serait effectivement possible que des banques en principe saines soient confrontées à un manque de liquidités. Il est hors de question que la banque centrale sauve des banques insolvables. Même s'il n'existe pas d'obligation de soutien, l'existence d'une banque centrale forte dotée de réserves monétaires confortables contribue à renforcer la confiance des investisseurs étrangers dans les banques domestiques. La stabilité du système financier s'en trouve ainsi renforcée. Pour cette raison, la Suisse, qui dispose d'une importante place financière internationale, jouant un rôle dominant, en particulier dans la gestion de fortune, ne devrait pas se contenter de détenir des réserves d'un montant comparable à celui des banques centrales d'autres places économiques similaires, ouvertes sur l'extérieur.

La Suisse ne participant pas à l'Union économique et monétaire, il est justifié qu'elle détienne des réserves monétaires largement dotées par rapport à d'autres pays européens. Contrairement aux banques centrales des pays membres de l'Union européenne, la BNS ne peut pas espérer obtenir un soutien automatique de ses collègues étrangères en cas de crises financières et d'autres turbulences. Elle doit donc compter sur elle-même.

Il ressort des considérations relatives à la plausibilité, figurant dans le message concernant un nouvel article constitutionnel sur la monnaie (FF 1998 3542 à 3545), que la BNS devrait détenir, outre ses réserves de devises, des réserves monétaires supplémentaires s'élevant à 1300 t d'or. Grâce à ces réserves supplémentaires, elle peut être plus crédible en tant que banque centrale capable de faire face aux crises et tenir compte des liens étroits entre l'économie suisse et l'étranger, ainsi que de l'importance de la place financière suisse. Dans un premier temps, ces réserves supplémentaires consisteront en or. Après l'abandon du rattachement du franc à l'or, la question du montant et de la composition exacte des réserves d'or et de devises,
de même que l'évaluation des réserves d'or relèveront de la compétence exclusive de la BNS. En vertu de l'art. 99, al. 3, Cst., la BNS est tenue de continuer de constituer, à partir de ses revenus, des réserves monétaires suffisantes et de détenir une part de ces réserves sous la forme d'or.

1.1.1.3

Réserves d'or non nécessaires pour la politique monétaire

Suite à l'abandon du rattachement du franc à l'or, la BNS détiendra des réserves monétaires dépassant le montant dont elle a besoin pour remplir sa mission en matière de politique monétaire. La moitié des réserves d'or, à savoir 1300 t, pourra être utilisée à d'autres fins. Cet avoir ne peut être évalué avec certitude, car l'évolution future du prix de l'or est inconnue. En partant d'un prix de l'or de 13 000 francs par kg, on obtient une valeur de près de 17 milliards de francs pour ces 1300 t. Il est également difficile d'évaluer le revenu pouvant être tiré à l'avenir de cet avoir particulier. Dans le cas d'un taux d'intérêt réel s'élevant à 3 %, l'avoir de 17 milliards de francs dégagerait un revenu annuel d'un peu plus de 500 millions de francs.

3669

Indépendamment de la décision relative à l'utilisation de cet avoir, il s'agit de savoir qui vendra les réserves d'or et si l'avoir particulier doit rester propriété de la BNS et être géré par elle.

1.1.1.3.1

Vente des réserves d'or superflues

Même après les ventes d'or prévues, la Banque nationale continuera de disposer de réserves d'or importantes en comparaison internationale. Elle a par conséquent intérêt à ce que ses ventes d'or ne déstabilisent pas les prix sur le marché de l'or.

Ainsi, elle a été partie prenante de l'accord conclu le 26 septembre 1999 avec la Banque centrale européenne et pratiquement toutes les banques centrales des pays de l'UE5. A travers cet accord, les banques centrales s'engagent à ne pas vendre plus de 2000 t d'or au cours des cinq prochaines années (de 2000 à 2004), ce qui représente 400 t par année.

Les banques centrales qui ont signé l'accord détiennent au total près de 50 % des réserves mondiales officielles d'or. Par ailleurs, les banques centrales des EtatsUnis, du Japon et de l'Australie, ainsi que la BRI et le FMI ont déclaré unilatéralement qu'ils ne vendraient pas d'or au cours des années à venir. Ces institutions détiennent environ 35 % des réserves officielles. Ainsi, la limitation des ventes s'applique à environ 85 % des réserves officielles d'or détenues au niveau mondial.

Comme la demande d'or se monte à quelque 4000 t par an et que la production minière atteint quelque 2500 t, s'ajoutant à l'offre émanant de sources non officielles (un peu plus de 1000 t par an) la vente de 400 t d'or par an provenant des réserves officielles ne devrait pas avoir d'effet notable sur les prix. L'accord ne porte pas uniquement sur une limitation des ventes. Les banques centrales se sont en effet également engagées à ne pas accroître leurs prêts d'or, ce qui devrait influencer favorablement le prix du métal jaune.

La quantité maximale qu'il a été convenu de vendre, soit 2000 t au total, comprend la totalité de l'or que la Suisse a l'intention de vendre, soit 1300 t. L'accord est donc extrêmement favorable pour la Suisse puisqu'il permet à la BNS de vendre la totalité des réserves d'or qui ne sont plus nécessaires pour mener la politique monétaire.

Comme l'accord exige que les banques centrales coordonnent les ventes d'or, cellesci doivent être effectuées par la BNS. Cette dernière est habilitée à négocier les modalités précises avec les autres banques centrales. Cela signifie que la BNS ne transférera pas des lingots d'or, mais le produit des ventes d'or aux organismes bénéficiaires, dont les missions doivent par ailleurs encore être définies.

1.1.1.3.2

Gestion des réserves d'or non nécessaires

Alors que la BNS doit, en vertu de l'accord, organiser et effectuer les ventes d'or, il n'est pas indiqué qu'elle gère durablement l'avoir particulier. Il en résulterait des problèmes de délimitation et de notables conflits d'intérêts. La Banque nationale pourrait ainsi profiter, notamment en matière d'opérations sur le marché national des capitaux, de sa meilleure connaissance de la politique monétaire; il lui serait aussi 5

Les banques centrales de Grèce et du Danemark, qui détiennent de modestes réserves d'or n'ont pas souscrit à cet accord (elles détiennent respectivement 113 et 67 t d'or).

3670

difficile de justifier les pertes qu'elle subirait au niveau de ses placements en raison des mesures de politique monétaire. Il serait par ailleurs malaisé de gérer deux portefeuilles: l'un pour les placements nécessaires pour mener la politique monétaire et l'autre pour l'avoir particulier. Ainsi, la Banque nationale devrait non seulement tenir deux comptes pour tous les placements (p. ex. placements en dollars en rapport avec les réserves monétaires et placements en dollars en rapport avec l'avoir particulier), mais aussi décider pour chaque opération quel avoir doit être utilisé. Il n'est en outre pas certain que la BNS puisse utiliser les mêmes instruments de placement que les autres gérants de fortune, même après une révision dans ce sens de la loi sur la Banque nationale. Ainsi, l'achat d'actions par une banque centrale créerait des problèmes. De toute façon, la question se pose de savoir s'il est judicieux que la BNS acquière le savoir-faire nécessaire en matière de gestion de fortune, alors que la Suisse compte de nombreux experts dans ce domaine. Par conséquent, il s'agit de retrancher intégralement et le plus rapidement possible du bilan de la BNS le montant correspondant aux réserves d'or qui ne sont plus requises pour mener la politique monétaire. L'avoir ne sera pas géré par la BNS, mais par ses futurs bénéficiaires.

1.1.2

Utilisation des réserves d'or excédentaires

1.1.2.1

Création d'une base constitutionnelle traitée séparément de la révision totale de la Constitution fédérale

Comme les réserves d'or non nécessaires, qui s'élèvent à 1300 t, constituent en principe des bénéfices retenus par la banque centrale, il s'agit de savoir s'il faut appliquer en ce qui concerne leur utilisation la clé de répartition figurant dans la Constitution fédérale (art. 99, al. 4, Cst.). En vertu de cette clé, au moins deux tiers des bénéfices de la Banque nationale reviennent aux cantons. Le Parlement a examiné cette question lors du débat sur la réforme des dispositions constitutionnelles sur la monnaie, traitée séparément de la révision totale de la Constitution fédérale, et il a décidé de créer une base constitutionnelle spéciale pour l'utilisation des réserves d'or excédentaires. Il devait ainsi être précisé, dans une disposition constitutionnelle transitoire, que la législation fédérale règle l'utilisation des réserves monétaires qui ne sont plus requises à des fins de politique monétaire et peut s'écarter du mode de répartition des bénéfices inscrit dans la Constitution fédérale. Comme la réforme des dispositions constitutionnelles sur la monnaie, traitée séparément de la révision totale de la Constitution fédérale, a, pour d'autres raisons, échoué lors du vote final du Conseil national, la base constitutionnelle prévue pour l'utilisation de l'or n'a pas vu le jour.

Le Conseil fédéral accepte toutefois le point de vue du législateur, selon lequel il convient de créer pour l'utilisation des réserves excédentaires une base constitutionnelle expresse qui s'écarte de la clé de répartition des bénéfices inscrite dans la Constitution fédérale. A travers le présent message, nous proposons par conséquent de compléter la Constitution fédérale par une disposition transitoire relative à l'art. 99. Cette disposition accordera au législateur la compétence de régler de manière particulière l'utilisation du produit de la vente de 1300 t d'or détenues par la BNS.

3671

1.1.2.2

Définition de l'utilisation dans la loi

La disposition constitutionnelle transitoire qui est proposée ne précise pas la manière d'utiliser les réserves qui ne sont plus nécessaires. L'utilisation souhaitée devra être déterminée dans la loi. La formulation ouverte de cette disposition permet de séparer le traitement des projets bien avancés de celui des idées moins concrètes relatives à l'utilisation. Ainsi, il sera possible d'accélérer des projets élaborés et de réfléchir soigneusement aux propositions se trouvant encore à l'état d'esquisse.

En conséquence, une loi fédérale relative à l'utilisation d'une première tranche des 1300 t d'or est proposée dans le présent message. Selon cette loi, 500 t d'or, mais au maximum 7 milliards de francs, seront utilisés pour constituer le capital de dotation de la Fondation Suisse solidaire prévue (voir à ce sujet les ch. 1.2 et 1.3).

Les discussions se poursuivent au sujet de la manière d'utiliser les 800 t d'or restantes. Le Conseil fédéral a l'intention de mettre en consultation trois variantes: utilisation au profit des prestations sociales, utilisation au profit de la formation et affectation à la réduction de la dette publique.

Par conséquent, l'utilisation de 800 tonnes d'or doit encore être définie. Le Conseil fédéral a chargé le Département fédéral des finances de procéder à une consultation sur l'utilisation de ce capital. D'une part, il est question d'une utilisation par tranches successives, pour des mesures visant à promouvoir la formation et pour des prestations transitoires. D'autre part, une réduction de la dette publique est proposée.

La première proposition prévoit de financer dans un premier temps des mesures de formation dans le domaine des nouvelles technologies de l'information et de la communication. Trois champs d'action figurent au premier plan: le perfectionnement des enseignants, la mise au point de logiciels éducatifs et des mesures destinées aux personnes qui accèdent difficilement aux formations usuelles. Les revenus générés par l'avoir particulier entre le moment où il aura été retranché des avoirs de la BNS et fin 2004 ou 2005, mais au minimum 600 millions de francs, seront affectés au financement des mesures visant à promouvoir la formation. Ces revenus serviront ensuite à financer des prestations transitoires dans le domaine de l'AVS. Elles permettront d'atténuer
des effets indésirables sur le plan social, pouvant résulter des nécessaires adaptations structurelles de l'AVS. Elles seront versées de manière ciblée jusqu'à l'âge ordinaire de la retraite ou jusqu'à la réinsertion professionnelle à des personnes qui ont de faibles chances sur le marché de l'emploi en raison d'un âge avancé, d'une invalidité partielle ou du fait qu'elles ont été longtemps au chômage ou qu'elles ont cessé d'exercer une activité professionnelle durant une longue période.

Ces prestations seront financées pendant douze ans.

Dans le cas de la deuxième proposition, il est question d'utiliser l'avoir particulier pour réduire la dette de la Confédération et des cantons. Les moyens financiers seraient répartis entre la Confédération et les cantons conformément à l'actuelle clé de répartition des bénéfices de la BNS, qui figure dans la Constitution. Ainsi, l'avoir particulier reviendrait à la Confédération à raison du tiers et aux cantons à raison des deux tiers. La réduction de la dette pourrait consister en un remboursement immédiat d'une partie de la dette publique, assorti d'un assainissement des bilans.

On pourrait également imaginer d'investir le produit des ventes d'or dans un fonds afin d'obtenir un rendement supérieur au taux d'intérêt des emprunts publics. Cela permettrait ultérieurement de réduire la dette dans une plus grande mesure.

3672

Au terme de la consultation, le Conseil fédéral a l'intention de soumettre sans tarder aux Chambres fédérales les bases légales requises pour l'utilisation choisie.

1.1.2.3

Autres propositions relatives à l'utilisation

1.1.2.3.1

Initiative populaire fédérale «pour le versement au fonds AVS des réserves d'or excédentaires de la Banque nationale suisse (Initiative sur l'or)»

L'Union démocratique du centre a commencé à récolter des signatures pour l'initiative populaire fédérale «pour le versement au fonds AVS des réserves d'or excédentaires de la Banque nationale suisse (Initiative sur l'or)» le 10 août 1999. Le délai imparti pour la récolte des signatures expire le 10 février 2001.

Cette initiative vise à compléter l'art. 99 (politique monétaire) de la Constitution fédérale par l'al. 3a suivant: "3a Les

réserves monétaires de la Banque nationale qui ne sont plus requises au titre de la politique monétaire ou les revenus qui en sont tirés, sont transférés au fonds de compensation de l'assurance-vieillesse et survivants. La loi règle les modalités."

A la différence de la formulation ouverte de la disposition transitoire proposée par le Conseil fédéral, l'initiative entend définir concrètement l'utilisation des réserves d'or au niveau de la Constitution fédérale.

Une autre différence entre l'initiative et la proposition du Conseil fédéral est due au fait que cette dernière prévoit pour le transfert de la contre-valeur des réserves d'or la forme d'une disposition transitoire dans laquelle les montants à transférer sont chiffrés expressément. Le caractère unique de l'opération est ainsi souligné. Celle-ci est liée à la réévaluation des réserves d'or rendue possible par la suppression de la parité-or du franc. A l'avenir, la BNS se conformera vraisemblablement, en matière de distribution des bénéfices qu'elle tire de la gestion des réserves monétaires, aux prescriptions ordinaires relatives à la répartition du bénéfice. L'initiative de l'UDC permettrait par contre au Parlement, en cas de besoin, de retrancher à nouveau des réserves de la BNS au moyen d'une simple modification de la loi. La BNS doit toutefois disposer d'un certain montant de réserves monétaires pour mener la politique monétaire. Par ailleurs, donner au Parlement la possibilité de retrancher des réserves de la BNS reviendrait à restreindre l'indépendance de cette dernière. En outre, l'al. 3a proposé dans l'initiative serait source d'un antagonisme direct avec la clé de répartition du bénéfice figurant à l'art. 99, al. 4, Cst., selon laquelle deux tiers du bénéfice net de la BNS reviennent aux cantons.

Si l'initiative de l'UDC ou d'autres initiatives concernant l'utilisation des réserves d'or devaient aboutir au cours de la même période, elles feraient l'objet de la même votation que la proposition du Conseil fédéral concernant une disposition transitoire relative à l'art. 99 Cst. Dans ce cas, la disposition transitoire proposée par le Conseil fédéral aurait le caractère d'un contre-projet.

3673

1.1.2.3.2

Motion du Groupe démocrate-chrétien: un tiers de l'or de la BNS pour le CICR

La motion du groupe démocrate-chrétien charge le Conseil fédéral de présenter un projet de loi permettant d'affecter un tiers des revenus résultant de la vente des réserves d'or excédentaires de la BNS au financement des actions sur le terrain du Comité international de la Croix-Rouge (CICR).

La motion prévoit de définir dans la loi l'utilisation d'une partie des réserves d'or de la BNS qui ne sont plus nécessaires. L'utilisation pourrait donc en principe s'appuyer également sur la disposition relative à l'utilisation de l'or proposée par le Conseil fédéral.

Il ressort toutefois du développement de la motion que cette interpellation se réfère à la partie des réserves d'or excédentaires de la BNS que le Conseil fédéral entend affecter à la Constitution fédérale du capital de dotation de la Fondation Suisse solidaire. La motion du PDC empêcherait par conséquent la mise en place d'une fondation du type de celle que le Conseil fédéral souhaite créer et qui a été approuvée par la majorité des milieux appelés à se prononcer lors de la consultation de 1998.

1.2

L'idée de la fondation

1.2.1

Introduction

La Fondation Suisse solidaire s'inscrit dans la ligne des grandes oeuvres humanitaires créées après la seconde guerre mondiale. Ce projet est un acte politique par lequel la Suisse entend manifester sa gratitude pour 150 ans de paix et de démocratie. Notre pays concrétise ainsi sa volonté de revivifier sa tradition humanitaire et de donner une impulsion et une substance nouvelles à la solidarité lorsqu'elle est menacée, en Suisse comme à l'étranger.

Les événements douloureux de la seconde guerre mondiale et de l'Holocauste ont convaincu la communauté internationale de la nécessité de prendre des mesures afin que de tels crimes ne se reproduisent plus. L'ONU, le Conseil de l'Europe et la Convention des droits de l'homme sont nés de ce constat. La Suisse a participé elle aussi à ces efforts.

Lors du discours qu'il a prononcé devant l'Assemblée fédérale le 7 mai 1995 à l'occasion du 50e anniversaire de la fin de la deuxième guerre mondiale, M. Kaspar Villiger, alors président de la Confédération, a déclaré que «le fait d'avoir été épargnés par le conflit nous place devant l'obligation morale d'agir pour que ce qui s'est passé au cours de la seconde guerre mondiale ne puisse plus jamais se reproduire. Nous sommes ainsi amenés à agir d'une part pour une solidarité avec l'Europe et le monde, et d'autre part, dans notre propre intérêt national »6.

Cent cinquante ans d'Etat fédéral, de démocratie et de paix nous ont donné l'occasion d'exprimer notre reconnaissance pour ce passé, mais aussi de faire un bilan de la situation intérieure de notre pays et de sa place dans le monde.

6

Allocution du 7 mai 1995 de M. Kaspar Villiger, alors président de la Confédération, devant l'Assemblée fédérale.

3674

Notre pays n'est pas membre des Nations Unies. La part de son budget public consacré à la coopération au développement et à l'aide humanitaire est considérée par certains pays comme insuffisante pour une nation aussi prospère. La communauté internationale attend de notre pays une participation plus active à la solution de problèmes qui requièrent de la solidarité.

A l'aube du XXIe siècle, la volonté d'être solidaires des plus faibles, de ceux qui ne trouvent pas leur place dans notre société, est menacée. Des facteurs extérieurs et intérieurs au pays génèrent incompréhension et insécurité dans une partie de la population. Notre pays est confronté à la mondialisation de l'économie, à la concurrence croissante qu'elle engendre et aux bouleversements politiques, économiques et culturels que connaît l'Europe depuis 1989. Par ailleurs, la valeur de notre neutralité est relativisée dans une Europe où la polarisation Est-Ouest a pris fin.

Sur le plan intérieur, notre pays, comme d'autres pays industrialisés, doit faire face à des problèmes sociaux tels que le chômage de longue durée et les phénomènes de marginalisation sociale qu'il entraîne. Les critiques qui ont été adressées à la Suisse sur le plan international en raison de son attitude durant la seconde guerre mondiale ont également contribué à créer un climat de doute et de peur du lendemain. Cette inquiétude peut inciter une partie de la population à se désolidariser, à se replier sur soi, à se méfier des institutions politiques et économiques.

Le Conseil fédéral est convaincu que la Fondation Suisse solidaire peut contribuer à ce que la solidarité redevienne un vecteur de notre identité et de notre cohésion nationales.

1.2.2

La solidarité comme idée de base

L'idée de solidarité a été à la base du projet de fondation. La solidarité fait partie des valeurs fondamentales de notre société et transparaît dans tous les aspects de notre vie et de notre histoire commune. Elle se manifeste dans les valeurs qui ont présidé à la construction de notre Etat fédéral et dans notre système de protection sociale; mais elle trouve également son expression dans les initiatives privées et les actions publiques de l'aide humanitaire déployées aux niveaux national et international.

Dans l'ancienne Confédération, la solidarité politique des Etats se manifestait par l'aide aux Confédérés menacés. Cette alliance entre Etats souverains est devenue communauté solidaire d'un peuple par la création de l'Etat fédéral en 1848. La Constitution fédérale de 1848 mentionnait «l'accroissement de la prospérité commune»7 comme but de la Confédération. La nouvelle Constitution fédérale précise dans son préambule la résolution de «renouveler leur alliance pour renforcer la liberté, la démocratie, l'indépendance et la paix dans un esprit de solidarité et d'ouverture au monde»8. La solidarité est la pierre angulaire de notre société et le fondement de la cohésion entre les quatre cultures nationales et les minorités qui la composent.

Notre système de sécurité sociale s'est construit dans le cadre d'un Etat fédéraliste et libéral; il fonctionne donc selon le principe de répartition des tâches entre les niveaux fédéral, cantonal et communal et selon le principe de subsidiarité qui affirme 7 8

Constitution fédérale du 29 mai 1874, art. 2.

Constitution fédérale du 18 avril 1999, préambule.

3675

la primauté de la responsabilité et de la prévoyance personnelles sur l'aide publique.

Assurances sociales, aide sociale et interventions sociopolitiques comme les bourses, les allocations familiales ou la promotion de la santé constituent le noyau de la solidarité sociale en Suisse. Face aux nouvelles formes d'exclusion sociale, la fondation peut contribuer à développer de nouvelles voies dans le système de solidarité sociale.

Les actions de solidarité locales entreprises par les mouvements bénévoles, les Eglises et les organisations d'entraide privées, sont apparues bien avant la mise en place d'un système de sécurité sociale étatique. Elles constituent toujours un pilier important de la solidarité dans notre pays. La population suisse s'est toujours montrée généreuse lors des appels en faveur des actions humanitaires lancés à la suite de catastrophes naturelles ou de conflits, ainsi qu'en témoignent le succès rencontré dans toutes les régions de Suisse par les actions lancées par la Chaîne du bonheur et la Croix-Rouge. D'autres mouvements spontanés de solidarité illustrent cette disposition du peuple suisse à agir également en-dehors des circuits de l'aide institutionnelle.

La mondialisation croissante rend la solidarité internationale d'autant plus nécessaire que s'accroît le clivage entre nations riches et nations pauvres. Pauvreté, marginalisation, misère résultant des conflits ou du développement nuisible à l'environnement: partout où ces drames surgissent, la Suisse est concernée au même titre que toutes les nations du monde.

La Suisse a une longue tradition de solidarité internationale active. Elle s'est toujours montrée prête à se lancer dans des démarches exceptionnelles. Citons par exemple l'idée de la Croix-Rouge internationale, qui n'a cessé d'agir efficacement et n'a rien perdu de son actualité après 130 années d'existence, le développement du droit international humanitaire, auquel la Suisse a largement contribué et continue de contribuer en tant que dépositaire des conventions de Genève, la collecte «le Don suisse» pour les victimes de la guerre dans les années 1945­1948, la coopération au développement et l'aide humanitaire, dont la qualité et l'efficacité sont reconnues internationalement, les nombreux engagements du Corps suisse en cas de catastrophes depuis sa création en
1973, l'aide importante et rapide apportée aux Etats d'Europe centrale et orientale à la fin de la guerre froide.

Ces actes généreux de solidarité internationale, qui ne peuvent être réalisés qu'à des intervalles de deux ou trois ans ou d'une dizaine d'années, ont établi la réputation de l'esprit solidaire de la Suisse dans le monde entier. La Fondation Suisse solidaire est digne de figurer dans cette liste de programmes de portée mondiale.

Cette solidarité généreuse ne se manifeste pas seulement à l'égard de personnes en situation de détresse et de pauvreté. Elle se manifeste aussi à l'égard des Etats, en particulier de ceux de l'Europe occidentale qui, de leur côté, s'engagent de façon massive sur le plan international. Cette composante d'une attitude solidaire à l'endroit des autres Etats ne doit pas être sous-estimée par une Suisse demeurée à l'écart de l'ONU, de l'Union européenne et de l'OTAN. Certes, la communauté internationale est consciente du fait que la Suisse, par exemple, collabore très étroitement avec les organisations onusiennes, auxquelles elle verse d'importantes contributions financières. Vu notre prospérité et notre réserve à nous engager institutionnellement, elle attend toutefois de nous une participation plus active à la résolution de problèmes qui requièrent une solidarité internationale. La création de la fondation par la

3676

Suisse serait à cet égard un signe bienvenu et ne passerait pas inaperçue sur le plan international.

Dès la fin de la deuxième guerre mondiale, et pendant des décennies, la solidarité a figuré au nombre des quatre principes de la politique extérieure de la Suisse: neutralité, disponibilité, universalité et solidarité. Dans son message de 1993 sur la politique extérieure de la Suisse pour les années 90, le Conseil fédéral a défini une stratégie orientée sur les problèmes et les objectifs et «capable dans le contexte actuel, de donner un nouveau souffle à la plupart de ces préceptes traditionnels. Cela vaut pour la solidarité...»9. La création de la Fondation Suisse solidaire serait la manifestation concrète et généreuse de cette politique du Conseil fédéral.

Le projet de fondation s'inscrit dans cette tradition multiple de la solidarité en Suisse. Mais en définitive, la solidarité se fonde toujours sur l'attitude et l'action de chaque citoyen. Elle repose sur le sens du bien commun de toute une population.

Mais pour renouveler et renforcer en permanence ce sens commun, il faut des instruments et des moyens financiers spécifiques. Le Conseil fédéral est convaincu que la fondation peut jouer un rôle important et novateur à cet égard.

1.2.3

L'origine du projet de fondation

Dans le contexte de la discussion publique sur notre histoire récente et sur le rôle de la Suisse dans le monde, le Conseil fédéral et le Parlement se sont montrés soucieux de mieux mettre en lumière cette période de notre passé. Ils se sont engagés pour que vérité et justice soient rétablies dans la plus grande transparence. Ils ont en outre confirmé leur volonté d'élargir la discussion sur le passé par différentes mesures.

La création d'une commission indépendante d'experts historiens internationaux et l'institution de la «Task Force ­ Deuxième guerre mondiale», chargée de coordonner les efforts en vue d'examiner le rôle des autorités suisses pendant la deuxième guerre mondiale, ont été les premières mesures décidées. Avec la création du comité Paul Volcker, les milieux économiques et bancaires ont participé à l'effort international en faveur des victimes du nazisme. Le «Fonds suisse en faveur des victimes de l'Holocauste/Shoah dans le besoin», financé par l'industrie et les banques, y compris la BNS, a versé des aides individuelles aux survivants des persécutions nazies et à leurs descendants dans le besoin.

Sur l'initiative du président de la BNS, une délégation du Conseil fédéral a examiné l'idée de créer une fondation de solidarité et de la financer par la vente d'une partie des réserves d'or excédentaires de la BNS. Un petit groupe de hauts fonctionnaires a élaboré un concept que le Conseil fédéral a approuvé et que le conseiller fédéral Arnold Koller, alors président de la Confédération, a présenté le 5 mars 1997 à l'Assemblée fédérale.

Dans son discours, M. Arnold Koller relevait que «la vraie réponse à l'analyse politique et morale de notre passé est la solidarité». Dans cette recherche de la vérité historique, il a recommandé de «jeter des ponts de la réconciliation entre nous ... de nouer le dialogue avec la jeunesse ... de rester vigilants à l'égard de tout soupçon d'intolérance et de racisme ..., le respect de la dignité humaine restant la priorité absolue». En conclusion de son allocution, le président de la Confédération 9

Rapport du 29 novembre 1993 sur la politique extérieure de la Suisse dans les années 90; FF 1994 I 150, 155.

3677

annonçait que le Conseil fédéral désireux de «regarder non seulement en arrière, mais aussi vers l'avant», avait décidé de «créer une oeuvre de solidarité de large envergure».

«Si nous voulons donner un signe véritable du renforcement de la tradition humanitaire de la Suisse et de notre gratitude d'avoir été épargnés par deux guerres mondiales, si nous voulons faire quelque chose de grand à la mémoire de ceux qui ont souffert inexprimablement il y a 50 ans, si nous voulons donner une nouvelle substance, en Suisse et à l'étranger, aux idées si fortement menacées aujourd'hui de solidarité et de sens civique, alors nous devons entreprendre quelque chose qui puisse apaiser les souffrances du passé et du présent, par véritable conviction, en tant qu'acte de volonté d'un pays sûr de lui.

Dans ce sens, le Conseil fédéral ­ en accord avec la Banque nationale et dans la perspective de l'année 1998, année du cent-cinquantenaire ­ a développé l'idée d'une «Fondation suisse de solidarité». Le but de cette fondation serait de soulager des cas de grave détresse humaine en Suisse et à l'étranger. Elle doit être financée par le produit de la gestion de cette partie des avoirs en or de la Banque nationale qui sera disponible pour d'autres affectations publiques après une réforme normative nécessaire en matière financière et monétaire. On peut envisager, pour cette fondation, une fortune d'un ordre de grandeur de 7 milliards de francs. La fondation gérerait les avoirs en or cités conformément aux règles du marché. S'ils sont bien gérés, on pourrait compter, à long terme, sur un rendement annuel moyen de l'ordre de quelques centaines de millions de francs; la moitié devrait être utilisée en Suisse, l'autre moitié à l'étranger. Les bénéficiaires seraient par exemple des victimes de la pauvreté, de catastrophes, de génocides et d'autres graves violations des droits de l'homme, et bien entendu les victimes de l'Holocauste ou Shoah» 10.

1.2.4

Concrétisation du projet de fondation

1.2.4.1

Travaux préliminaires

En avril 1997, les travaux préparatoires relatifs à la fondation ont été confiés à un comité interdépartemental. Deux groupes de travail ont été chargés d'élaborer des propositions pour le financement et la gestion du capital de la fondation et les activités de celle-ci. L'un était présidé par M. Ulrich Bremi, ancien président du Conseil national, l'autre par M. Hermann Fehr, ancien conseiller d'Etat bernois.

Les groupes de travail ont procédé pendant l'été 1997 à de larges consultations avec tous les milieux concernés par le projet en Suisse. Ces consultations ont permis aux groupes de travail de réunir des informations sur les besoins et les attentes de ces milieux quant aux activités de la future fondation de solidarité, à son financement et à son fonctionnement. Les membres des groupes de travail ont eux-mêmes élaboré des propositions pour de possibles champs d'activités de la fondation.

Le groupe de travail, présidé par M. Hermann Fehr, a proposé les activités suivantes pour la fondation: prévenir l'accroissement de la misère et de la violence, promouvoir les chances d'avenir de l'enfance et de l'adolescence, reconstruire des structures collectives détruites ou inefficaces, contribuer au processus de compréhension et de réconciliation. Le groupe de travail a proposé trois types d'intervention pour la 10

Allocution d'Arnold Koller du 5 mars 1997, alors président de la Confédération.

3678

fondation: soutien de programmes à long terme, financement d'actions d'urgence et attribution d'un Prix de la solidarité.

Concernant le financement de la fondation, le groupe présidé par M. Ulrich Bremi a proposé de détacher de la BNS et de transférer à la fondation une partie des réserves d'or excédentaires de la BNS pour une valeur de 7 milliards de francs et de financer les activités de la fondation par le produit de la gestion de ce capital.

Le Conseil fédéral a pris connaissance de ces propositions et en approuvé l'orientation générale dans sa séance du 29 octobre 1997. Il a chargé le DFF de lui soumettre un projet de loi et de message.

Le 22 juin 1998, le Conseil fédéral a approuvé le projet de loi et de rapport explicatif en vue de sa mise en consultation. Sur la base des propositions des groupes de travail et du comité interdépartemental, le projet mentionnait en particulier les tâches de la fondation comme suit11: lutter contre les conséquences de la détresse matérielle en vue de développer la capacité à agir de façon autonome; combattre la marginalisation et promouvoir l'intégration sociale ainsi que le respect effectif des droits de la personne humaine; offrir des chances de développement aux enfants et aux adolescents défavorisés; contribuer à la compréhension et la réconciliation et favoriser la vie en commun; aider à édifier des structures communautaires efficaces; contribuer à prévenir génocides, violences ou tortures et à en surmonter les conséquences; soutenir des projets en faveur des victimes.

1.2.4.2

Procédure de consultation

La procédure de consultation s'est déroulée de juillet à mi-septembre 1998. En plus des cantons, des communes et des partis, la consultation s'est adressée à un cercle très large d'organisations et d'institutions. En outre, plusieurs organisations ont envoyé spontanément leur prise de position sur le projet. Les résultats ont été publiés en novembre 1998 12.

L'idée d'une Fondation Suisse solidaire a rencontré un écho très largement favorable. La majorité des participants à la consultation a reconnu la nécessité de renforcer la solidarité, sur le plan intérieur aussi bien que vis-à-vis de l'extérieur. Le projet a été salué comme un signe de reconnaissance pour 150 ans de paix et de démocratie.

Le principe d'un projet axé sur la prévention et sur les besoins futurs a été également largement approuvé. Des critiques ont toutefois été émises sur les circonstances qui ont présidé au lancement de l'idée et le moment choisi pour ce lancement.

Un canton, quelques communes, l'UDC, le Parti de la liberté, les Démocrates suisses, l'UDF, quelques organisations rattachées au Vorort, ainsi que l'USAM ont fondamentalement rejeté le projet de fondation, pour des raisons de principe, de politique financière ou de politique extérieure.

En ce qui concerne les buts et les tâches de la fondation, quatre tendances se dessinaient dans l'ensemble des réponses des partisans du projet. Quelques cantons, des commissions fédérales, le PS, les Verts et la majorité des oeuvres d'entraide et des 11 12

Rapport explicatif et projet de loi fédérale sur la Fondation Suisse solidaire pour la procédure de consultation, 22 juin 1998.

Voir le Rapport sur les résultats de la procédure de consultation sur le projet de loi fédérale sur la Fondation Suisse solidaire du 25 novembre 1998.

3679

ONG ont approuvé la diversité des tâches proposées et par conséquent la flexibilité de la fondation. Plusieurs cantons et communes, la BNS, le PRD, le PDC, le PLS et les représentants des milieux économiques, USS incluse, ont demandé que la fondation se concentre sur quelques tâches, ce qui lui conférerait un profil plus précis.

Certains milieux ont souhaité que les tâches de la fondation soient redéfinies, mais sans émettre de propositions concrètes. D'autres ont demandé que les objectifs de la fondation soient axés sur les enfants et les adolescents. D'autres enfin ont demandé que la priorité soit accordée à la lutte contre la pauvreté en Suisse ainsi qu'aux actions d'aide aux enfants et aux adolescents à l'étranger.

Il y a eu divergences d'opinion sur les questions suivantes: nécessité d'une base constitutionnelle pour le transfert de l'or à la fondation, répartition des moyens de la fondation entre les projets en Suisse et les projets à l'étranger, financement d'actions urgentes, attribution d'un Prix de la solidarité, actions de la fondation pour les victimes de l'Holocauste.

Tous les partisans du projet ont approuvé les principes régissant les activités de la fondation, notamment le fait qu'elle soutienne des programmes et non des personnes, qu'elle agisse sur le long terme, qu'elle n'opère pas elle-même sur le terrain et que ses activités complètent les actions de l'Etat et des ONG plutôt que de s'y substituer.

Le 15 mars 1999, le Conseil fédéral a approuvé les grandes lignes de la loi sur la base des résultats de la procédure de consultation. Il a notamment restreint les champs d'activités de la fondation et centré la prévention sur la pauvreté, la violence et l'édification de structures communautaires. Le Conseil fédéral a renoncé à fixer des priorités pour la phase initiale. En relation avec le problème de la violence, il a retenu que la fondation soutiendrait en particulier des projets visant à prévenir les génocides et aider leurs victimes, sans mentionner toutefois un groupe de victimes déterminé dans la loi ou dans le message. Il a en outre souhaité que la fondation s'attache à offrir des perspectives d'avenir aux enfants et aux adolescents; en revanche il n'a pas suivi la suggestion de quelques milieux consultés, qui demandaient que les tâches de la fondation se concentrent
exclusivement sur les enfants défavorisés. En ce qui concerne les prestations de la fondation, il a adapté les propositions mises en consultation de façon à ce que la loi ne prévoit le versement d'une aide d'urgence que dans des situations de détresse exceptionnelles. Il s'en est tenu au modèle de financement initialement prévu.

Les projets de loi et de message ont été adaptés au printemps 1999.

1.3

La Fondation Suisse solidaire

1.3.1

But et idée directrice

Le Conseil fédéral entend créer, avec la fondation, un instrument qui aide à renforcer la solidarité en Suisse et à l'étranger. Le but de la fondation est de contribuer à assurer un avenir digne aux personnes qui sont victimes de la pauvreté, de la détresse et de la violence, ou qui pourraient l'être.

Pour atteindre cet objectif, la fondation fera de la prévention le principe-clé de son action. Elle veut surtout contribuer à éviter l'apparition de nouvelles situations de pauvreté et de violence. Son action est tournée vers l'avenir et le long terme. Par conséquent, la fondation doit pouvoir, dans un premier temps, utiliser durant une 3680

période de 30 ans les moyens financiers mis à sa disposition. Cette durée d'utilisation peut être prolongée par la voie de la législation (art. 23, al. 2 et 3).

La fondation soutiendra, entre autres projets, ceux favorisant des actions solidaires associant les différents groupes de la population. La solidarité, qui a été une valeur maîtresse de notre pays au cours de son histoire, doit s'enraciner fermement dans la fondation et apparaître dans l'appellation de cette dernière.

1.3.2

Tâches

1.3.2.1

Champs d'activités

1.3.2.1.1

Résumé

L'article consacré aux tâches de la fondation précise et définit concrètement le but de la fondation. Le Conseil fédéral a fixé les champs d'activités en se basant sur l'évaluation des besoins réalisée à la suite de très larges consultations des milieux intéressés en Suisse, et en tenant compte des instruments existants dans notre pays et à l'étranger. Il prévoit trois tâches principales pour la fondation (cf. art. 3, al. 1, let.

a à c): contribuer à prévenir les causes de la pauvreté et de l'exclusion et oeuvrer pour en atténuer les conséquences; promouvoir l'intégration et développer la capacité des personnes concernées à se prendre en charge; contribuer à prévenir les causes de la violence, de la violation des droits de la personne et des génocides et oeuvrer pour en atténuer les conséquences; promouvoir une communauté d'existence harmonieuse et favoriser la compréhension et la réconciliation; aider à édifier des structures communautaires efficaces et démocratiques.

La pauvreté et la violence sont des menaces collectives pour la dignité humaine. Et la fondation se donne deux tâches principales: prévenir la pauvreté et l'exclusion, et favoriser l'exercice autonome des droits fondamentaux et des responsabilités; prévenir la violence individuelle et collective sous toutes ses formes, et aider les victimes blessées et traumatisées.

On ne peut parler de solidarité si les bases de l'existence et les droits fondamentaux de tous les groupes de population ne sont pas garantis. La troisième tâche que le Conseil fédéral prévoit pour la fondation joue à la fois le rôle de lien et de support à l'égard des deux premières.

L'éventail des tâches définit la marge de manoeuvre laissée par la loi, à l'intérieur de laquelle le conseil de fondation fixera des priorités dans son programme quadriannuel d'activités. Ce programme d'activités est établi avec les experts ainsi que les groupes concernés et sert de base de décision au conseil de fondation en ce qui concerne le financement des projets (voir ch. 1.3.4.2).

3681

1.3.2.1.2

Pauvreté

Aujourd'hui, la prévention de la pauvreté ne saurait se limiter à la garantie de l'existence matérielle; elle couvre aussi les possibilités de développement économiques, sociales et culturelles. La pauvreté a souvent son origine dans une accumulation d'éléments préjudiciables. Les personnes en situation précaire vivent dans un climat d'impuissance et d'insécurité difficilement surmontables qui les met hors d'état d'exercer leurs droits fondamentaux. C'est pourquoi la fondation entend contribuer à leur donner la capacité d'améliorer leur situation de façon autonome (en les aidant à s'aider elles-mêmes).

Une étude nationale13 et diverses enquêtes cantonales ont montré que la pauvreté s'accroit en Suisse, en particulier dans les villes14. Sont particulièrement concernées par la pauvreté et l'exclusion les femmes, les personnes seules, les familles monoparentales, les familles avec de nombreux enfants et les familles étrangères. Le Conseil fédéral entend axer prioritairement les activités de la fondation sur les situations de pauvreté liées à l'isolement et au manque de formation au sens large du terme. Les projets que la fondation soutiendra pourraient aider les personnes concernées à avoir de nouveau accès à la vie sociale et aux prestations publiques. Il pourrait s'agir par exemple de projets pilotes qui initient de nouvelles formes de soutien social dans des domaines dans lesquels l'aide publique n'est pas envisageable. Les groupescible seraient par exemple des personnes qui souffrent de difficultés d'intégration sociale. Pour lutter contre le chômage des jeunes, des projets pilotes dans le domaine de la formation professionnelle pourraient par exemple également être financés par la fondation. Cette dernière pourrait également soutenir des programmes d'échanges entre jeunes de communautés culturelles et linguistiques différentes et favoriser ainsi l'acquisition de compétences sociales et linguistiques facilitant l'accès à la formation et l'obtention d'un emploi. Enfin, la fondation pourrait soutenir des projets visant à enrayer l'illettrisme15; en Suisse, plus de 10% de la population est illettré et n'a de ce fait qu'un accès limité à l'information, aux possibilités de formation et aux prestations publiques.

On constate une extension de la pauvreté hors de nos frontières. Dans certaines régions
du monde cet accroissement prend des proportions dramatiques. Ces dernières années, la multiplication des dommages causés à l'environnement, les bouleversements survenus dans la société, les épidémies et les conflits ainsi que les mouvements migratoires ont fait naître des besoins énormes dans le domaine de l'aide humanitaire à long terme. Le Conseil fédéral voit là une importante possibilité d'action pour la fondation. Entre l'aide humanitaire et l'aide en cas de catastrophe, d'une part, et la coopération au développement, d'autre part, il y a un champ qui est encore peu couvert par l'aide suisse. La fondation pourrait par exemple soutenir des programmes de prévention de maladies liées à la pauvreté. Les projets qu'elle financerait pourraient s'étendre aux populations qui ne sont pas prises en considération dans les programmes d'aide internationaux ou qui ont été «oubliées».

13 14 15

R. Leu, S. Burri, Th. Prieser, Qualité de vie et pauvreté en Suisse, Berne 1997.

in «Pauvreté urbaine et exclusion sociale», rapport final de l'Institut Recherche sur l'environnement construit, Département d'architecture, EPFL, décembre 1995, p. 25 s.

Littératie et société du savoir, OCDE, Paris 1997. Littératie, économie et société, OCDE, Paris 1995.

3682

1.3.2.1.3

Violence

La discrimination, le racisme, l'exploitation, les viols et les persécutions, la torture, la guerre et les génocides sont des niveaux de gravité croissante dans l'échelle de la violence individuelle et collective. L'une des tâches de la fondation sera de venir en aide aux victimes de ces différentes formes de violence. Selon le Conseil fédéral, la fondation devra s'attacher à favoriser la compréhension interculturelle, la réconciliation et le respect des droits de la personne.

La différenciation des groupes sociaux dans la société suisse est devenue plus complexe et les modes de vie individuels subissent des transformations. Ces développements ont favorisé la naissance d'un climat d'insécurité. Certains modèles de violence se sont modifiés, d'autres ont surgi. Parmi ceux-ci figurent les conflits de générations, le racisme croissant et les agressions intra- ou interethniques. La fondation, par sa flexibilité, peut contribuer à prévenir à temps ces phénomènes en soutenant des projets pilotes qui visent à enrayer l'extension de la violence dans les villes et les agglomérations et à lutter contre la violence intrafamiliale. Un autre champ d'action possible pour la fondation est celui de la lutte contre la discrimination et le racisme. On pourrait envisager des programmes de prévention qui visent l'intégration ciblée de la population étrangère en Suisse. La fondation pourrait également promouvoir l'esprit de tolérance en finançant des campagnes de sensibilisation et d'information ou des programmes pédagogiques. Un autre domaine dans lequel la fondation pourrait agir est celui de la prévention de la croissante disposition des jeunes à la violence. La fondation pourrait par exemple également encourager une coexistence harmonieuse et la compréhension en soutenant de manière ciblée des projets dans le domaine du sport.

De nombreuses régions du monde, et de l'Europe en particulier, sont confrontées à des crises humanitaires. Les formes de la violence se sont modifiées au cours des dernières décennies. On observe de manière générale une évolution des conflits interétatiques vers de nouvelles formes de conflits ethniques et de guerres civiles qui s'étendent au-delà des frontières des Etats. Ces conflits durent longtemps, provoquent d'importantes migrations de réfugiés et une forte proportion de victimes
civiles. Ils trouvent souvent leur origine dans les conditions de la vie sociale et communautaire. Les stratégies pour les combattre doivent donc s'inscrire dans la durée et viser le long terme.

Le constat que les génocides ne doivent plus se répéter est à l'origine de l'idée de la fondation. En contribuant à l'examen des violences du passé, la fondation peut aider à prévenir de nouvelles tensions. C'est donc conformément à son but qu'elle financera des projets qui contribuent à un travail de mémoire collectif. Elle pourrait également soutenir des actions de réconciliation et promouvoir le dialogue dans les régions en conflit, en aidant les protagonistes des conflits et leurs descendants à vivre en paix. Encourager la réconciliation et la compréhension entre divers groupes de population peut permettre de mieux faire face à ce passé conflictuel et de prévenir de nouvelles tensions. Le rôle spécifique des femmes dans le processus de réconciliation doit être soutenu par des projets appropriés.

La fondation contribuera également à atténuer les conséquences de la violence. Elle pourrait en particulier soutenir des programmes de réintégration des femmes et des enfants, principales victimes des conflits. Ces projets auraient pour but d'aider les victimes, par un soutien psychologique, à affronter les traumatismes subis lors de génocides et de guerres.

3683

La fondation pourrait également financer des programmes destinés à prévenir la discrimination et les mauvais traitements infligés aux enfants et à faciliter l'intégration sociale des victimes de ces abus. Elle pourrait notamment soutenir des programmes luttant contre l'exploitation des enfants au travail ou facilitant la réintégration d'enfants-soldats, en coopération avec les autorités suisses et locales compétentes et avec les organisations privées et internationales.

1.3.2.1.4

Structures communautaires

Les problèmes de la pauvreté et de la violence ont souvent leur origine dans l'absence ou la faiblesse de structures communautaires. Créer ou renforcer un environnement social efficace et des structures communautaires vivantes et démocratiques, c'est mettre l'accent sur un aspect important de la prévention et ajouter un élément porteur à l'éventail des tâches de la fondation. Toute structure communautaire efficace suppose une administration locale, une justice, une organisation économique, un système d'éducation et de santé, mais aussi des institutions culturelles, sportives et sociales, des centres de rencontres et des possibilités de contacts. Contribuer à édifier de telles structures et en garantir l'égal accès à tous entre dans le cadre des tâches de la fondation.

Dans le processus de mutation de la société suisse, les structures sociales traditionnelles se transforment et se défont, tandis que se développent de nouvelles formes de société civile. L'extension et l'évolution des manifestations de la pauvreté et de la violence sont étroitement liées à ce changement structurel. Par le soutien de projets, la fondation doit contribuer à ce que la participation à la vie sociétale en Suisse soit garantie à tous et faire obstacle aux phénomènes d'exclusion et de discrimination.

Les programmes de la fondation pourraient par exemple favoriser, dans les zones urbaines, la formation d'une société civile sur le plan local, contribuant ainsi à résoudre les problèmes de quartiers. La fondation pourrait soutenir des projets en faveur de centres de contacts, d'associations ou de groupements culturels, ou d'organisations sportives, porteurs d'une société vivante et pluraliste. Elle pourrait également appuyer des projets destinés à lutter contre la paupérisation et l'émigration dans des contrées ou des vallées de montagne dépeuplées.

Dans beaucoup de régions du monde qui sont touchées par les conflits et les crises, les structures politiques et économiques sont détruites ou inopérantes. La fondation peut être présente partout où ces structures manquent et où la «good governance» n'est pas assurée, en particulier dans les pays où un processus de démocratisation est en cours, la Suisse disposant dans le domaine institutionnel d'un savoir-faire traditionnel et pratique qu'elle peut mettre à la disposition de ces
régions en tenant compte des spécificités locales. La fondation pourrait faciliter l'échange de connaissances, d'expériences et de contacts entre la Suisse et l'étranger, en soutenant par exemple des projets de partenariats entre communes.

L'édification et le renforcement des formes élémentaires d'organisation au niveau de la politique, de l'économie, de la culture et du sport sont des objectifs des programmes financés par la fondation. Ceux-ci devraient être mis en place tout particulièrement dans les régions ne bénéficiant pas encore ou ne bénéficiant plus de l'aide suisse.

La fondation pourrait financer des projets visant à contribuer à l'instauration d'un Etat de droit, par exemple en formant des employés de l'administration locale ou des 3684

forces de sécurité. Elle pourrait aussi soutenir des projets visant à faire bénéficier toute la population d'un accès égal au système de soins et d'éducation.

Après des conflits et des catastrophes, la reconstruction du patrimoine culturel constitue une contribution importante à l'existence d'une société pacifique et stable. La fondation pourrait contribuer, par ses projets, à ce que l'identité culturelle d'une région détruite par des crises, renaisse et renforce ainsi le lien de la population avec son pays et sa culture.

1.3.2.2

Prise en considération des enfants et des adolescents

La fondation tiendra particulièrement compte dans ses activités de la situation des jeunes générations. La prévention et le souci d'améliorer les perspectives d'avenir sont en effet des idées-clé de la loi (cf. art. 3, al. 2).

Dans le cadre de ses activités, la fondation s'attache en particulier à offrir aux enfants et adolescents des perspectives d'avenir et des possibilités de développement.

Les enfants et les adolescents sont particulièrement touchés par l'exclusion sociale, l'exploitation et la violence. La fondation souhaite notamment contribuer par ses activités à ce que des enfants et des adolescents défavorisés puissent grandir sans encourir ces risques. Etant donné que les chances et les perspectives d'avenir des jeunes générations dépendent de leur environnement social, leur prise en considération ne peut être une tâche isolée de la fondation. Ce doit être bien davantage une sorte de précepte inspirant l'ensemble de l'activité de la fondation.

1.3.3

Principes à la base des activités

1.3.3.1

Introduction

La fondation se définit non seulement par ses buts et ses tâches, qui délimitent ses champs d'action, mais aussi par les principes régissant son activité.

Cinq principes président à son activité: elle agit à titre complémentaire des activités de l'Etat et des organisations privées; elle opère en s'appuyant sur le partenariat avec les organisations existantes et les groupes concernés; elle répartit de manière équilibrée ses moyens entre les actions en Suisse et les actions à l'étranger; elle veille à prendre en considération de façon appropriée la situation des femmes; elle s'inspire du principe du développement durable.

1.3.3.2

Complémentarité des tâches de la fondation par rapport aux activités étatiques et privées

L'activité de la fondation doit compléter celle de l'Etat et non s'y substituer.

Le principe de la complémentarité implique que la fondation intervienne là où l'Etat ne peut pas ou ne peut plus agir. Elle ne doit pas se charger de tâches et de prestations qui incombent à l'Etat de par la loi, que l'autorité soit la Confédération, le canton ou la commune. Elle ne doit pas non plus concurrencer les oeuvres d'en3685

traide. Le Conseil fédéral veillera à ce que la création de la fondation n'ait pas pour conséquence une réduction des moyens mis à la disposition de l'Etat pour remplir les tâches qui lui sont imparties par la loi. La fondation doit s'engager en faveur des groupes de personnes qui échappent à la couverture sociale ou qui n'ont pas accès au système d'aide existant.

Le Conseil fédéral est conscient du fait que, face aux nouvelles formes de la pauvreté et de la violence, les mesures de solidarité présentent des lacunes au plan institutionnel. Bien que les organisations gouvernementales et non gouvernementales s'acquittent de nombreuses tâches, avec des moyens souvent limités, la solidarité doit être renforcée en de multiples domaines. Avec la Fondation Suisse solidaire, le Conseil fédéral veut créer une oeuvre humanitaire qui ait une identité propre. Une institution qui puisse fixer ses priorités en coordination avec ses partenaires. La chance unique de pouvoir utiliser une partie des réserves d'or de la BNS doit permettre non pas d'augmenter le budget de la Confédération, mais de créer une oeuvre indépendante. Son champ d'action ne se limitera pas à un seul domaine. Et les besoins actuels, et surtout à venir, sont si considérables que la fondation devra y répondre par des actions innovatrices, par son professionnalisme. Cette nouvelle oeuvre de solidarité suisse doit être axée sur les besoins des prochaines décennies, et non sur les besoins du moment.

La délimitation entre les actions de la Fondation Suisse solidaire et celles de ses partenaires sur le plan national ou des responsables de l'aide à l'étranger ne peut pas toujours être opérée de manière rigide. C'est pourquoi leurs actions devront être coordonnées, dans toute la mesure du possible. Le Conseil fédéral recommande au futur conseil de fondation d'y veiller scrupuleusement lorsqu'il établira son programme d'activités. Le conseil de fondation devra intégrer cet élément dans le règlement des prestations qu'il élaborera; il devra également y préciser les canaux par lesquels la fondation soutiendra des projets, que ce soit sur le plan national ou à l'étranger.

1.3.3.3

Partenariat avec les organisations publiques et privées

La fondation travaille en partenariat avec les organisations publiques et privées, ainsi qu'avec les groupes concernés par son programme d'activités.

Ce partenariat s'exprime dans les activités concrètes de la fondation. Etant donné que celle-ci ne sera pas active sur le terrain, la collaboration en partenariat avec les organisations existantes privées et publiques représente un élément clé de sa stratégie. La fondation soutiendra des projets qui seront réalisés par les organisations gouvernementales et non gouvernementales (cf. ch. 1.3.4.2). Elle collaborera avec ses partenaires ainsi qu'avec des personnes directement concernées dès l'élaboration de son programme d'activités et s'appuiera sur leurs expériences, leurs compétences et leur savoir-faire.

En finançant des projets, la fondation n'apportera pas une aide déresponsabilisante aux personnes en situation de détresse. Le partenariat est une solidarité vécue, elle implique un engagement réciproque, des prestations propres et une coresponsabilité des bénéficiaires.

3686

1.3.3.4

Répartition équilibrée des moyens entre les actions en Suisse et les actions à l'étranger

La fondation partage équitablement ses fonds entre les actions en Suisse et les actions à l'étranger.

Il s'agit, en Suisse comme à l'étranger, de contribuer à ce que des groupes de population menacés par la pauvreté et la violence, puissent vivre dans la dignité. Il appartiendra aux organes directeurs de la fondation de veiller à une répartition équilibrée des moyens engagés par la fondation en Suisse et à l'étranger, cet équilibre pouvant être atteint sur une période d'activités de plusieurs années.

1.3.3.5

Prise en considération de la situation des femmes et de l'égalité des chances

La fondation encourage de façon appropriée des projets tenant compte de la situation spécifique des femmes et de l'égalité des sexes.

Les femmes sont particulièrement touchées par les problèmes et les processus auxquels la fondation entend apporter une réponse. Elles sont en effet les principales victimes de la pauvreté et de la violence, et dans beaucoup de pays, de l'oppression.

En outre, elles peuvent jouer un rôle important, dans le cadre des activités de la fondation, pour la résolution de ces probl èmes.

Les projets soutenus par la fondation devront viser à assurer une égalité entre les sexes. L'expérience de la coopération au développement montre que des solutions spécifiques peuvent être mises en oeuvre avec succès, dans l'élaboration, le soutien et l'évaluation de projets, pour répondre à la situation particulière des fe mmes.

1.3.3.6

Développement durable

La fondation s'inspire du principe du développement durable.

Face aux menaces pesant sur les générations actuelles et futures, la notion de développement durable est fondamentale; elle implique la prise en compte des aspects sociaux, économiques et environnementaux dans la réalisation des projets soutenus par la fondation.

1.3.4

Exécution des tâches

1.3.4.1

Prestations

1.3.4.1.1

Financement de projets

La fondation consacrera l'essentiel de ses moyens au soutien de projets conçus par ses partenaires. Elle ne versera pas d'aide financière à des personnes ou à des groupes de personnes. Hormis le soutien de projets, elle ne verse pas de subventions à des organisations. Cette manière de procéder la distingue d'autres organisations; elle devra éviter une politique d'arrosage.

3687

Le conseil de fondation veillera à ce que les moyens de la fondation permettent de réaliser avant tout des projets novateurs axés sur le long terme.

1.3.4.1.2

Aide d'urgence

Dans tout le système d'aide national et international, apparaissent régulièrement des situations de détresse non prévisibles qui présentent un caractère d'urgence, et pour lesquelles les garanties de financement de l'Etat ou du système d'aide existant sont soit exclues, soit nécessairement tardives. La philosophie à la base des activités de la fondation étant orientée sur le long terme et la durabilité, celle-ci ne devra agir dans de tels cas que si la situation est exceptionnelle et à titre subsidiaire. Vraisemblablement, les interventions de ce genre porteront essentiellement sur des actions à l'étranger.

Ce type d'aide financière devra toujours correspondre au but et aux tâches de la fondation et ne s'adressera pas directement à des individus; dans ce cas précis, elle ne portera pas sur des programmes à long terme. Seule une petite partie du budget sera réservée à cette aide. La fondation doit pouvoir agir dans ces situations de détresse extraordinaires de la façon la plus rapide et la moins bureaucratique possible. Le conseil de fondation mettra au point une procédure permettant de décider des aides à accorder dans des délais courts.

Afin d'éviter que les demandes ne parviennent à la fondation de tous côtés et pour faciliter le tri de ces demandes, le conseil de fondation définira également des critères de sélection dans son règlement sur les prestations (cf. art. 20).

1.3.4.1.3

Prix de la solidarité

La loi prévoit que la fondation attribue périodiquement, si possible chaque année, un Prix de la solidarité à des organisations et des institutions publiques ou privées, suisses ou étrangères. Ce prix ne devra pas être décerné à une personne. Il a en effet pour vocation de mettre l'accent sur un projet, et non sur la part d'initiative personnelle de son auteur.

Le prix est attribué par le conseil de fondation, sur proposition d'un jury international. Le Conseil fédéral recommande au futur conseil de fondation d'attribuer un Prix d'un montant de 1 million de francs suisses, somme correspondant à celle dont sont dotés d'autres prix prestigieux en Europe. Le montant du prix peut être réparti entre plusieurs organisations.

Ce prix a une fonction symbolique. Il permettra à la fondation de porter une action novatrice à la connaissance du public et d'apporter une aide substantielle à l'organisation qui l'a mise en oeuvre; il permettra aussi de diffuser le savoir-faire original développé pour un projet. Enfin, il aura pour but de faire connaître dans le grand public les objectifs poursuivis par la fondation.

3688

1.3.4.2

Programme d'activités ­ Priorités

Les tâches attribuées à la fondation par la loi fixent le cadre général de ses activités.

Sur cette base, le conseil de fondation mettra sur pied un programme d'activités quadriannuel déterminant des priorités dans le cadre des trois tâches qui lui sont assignées. Ce sont ces priorités qui dessineront le profil de la fondation.

Le conseil de fondation devra veiller à ce que la fixation de ses priorités ainsi que ses activités soient coordonnées avec celles de ses partenaires. Cette coordination se traduira par un échange d'informations régulier et transparent. Le conseil de fondation réunira ses partenaires, procèdera avec eux à une analyse des besoins pour établir son programme d'activités. Il pourra ainsi déterminer où l'action de la fondation peut compléter celles déjà existantes et exploiter des voies nouvelles. Le point fort de la fondation réside dans cette possibilité de réaliser des programmes qui ne pourraient pas voir le jour autrement, malgré l'importance des besoins à satisfaire.

C'est uniquement sur la base du programme d'activités que le conseil de fondation lancera des appels d'offres périodiques, en Suisse et à l'étranger, pour inviter les organisations à lui soumettre des projets. Le conseil de fondation n'examinera aucun projet soumis à la fondation en dehors des appels d'offres. Un groupe d'experts désigné par le conseil de fondation examinera les projets reçus et les lui soumettra pour décision. L'appel d'offres devra notamment permettre à de petites organisations d'être prises en considération.

Les modalités de versement des aides de la fondation seront définies dans le règlement de prestations. Celui-ci fixera la procédure concrète du financement de projets, les modalités d'établissement des contrats avec les responsables de projets ainsi que les mesures à prendre au cas où la réalisation d'un projet ne remplirait pas les conditions fixées par la fondation.

1.3.5

Organisation

L'organisation de la fondation se base sur celle d'une fondation de droit public.

Cette forme juridique lui laisse suffisamment d'indépendance et de flexibilité. Le conseil de fondation détiendra, dans le cadre de la loi sur la fondation, une marge de manoeuvre qui lui permettra de s'adapter aux besoins du moment et de fixer des priorités quelles que soient les contraintes politiques.

La fondation devra atteindre un maximum d'efficacité et de transparence et limiter au maximum ses frais administratifs. Les tâches de chaque organe sont précisées dans la loi. Le conseil de fondation veillera à une représentation équitable des femmes dans tous les organes de la fondation.

Le Conseil fédéral nommera le président ainsi que les membres du conseil de fondation. Le Conseil fédéral pense à des personnalités jouissant d'une respectabilité professionnelle et morale reconnue, ainsi que d'une expérience solide dans l'un des domaines couverts par la fondation: secteur social, secteur humanitaire, coopération au développement, finances, formation ou culture. Les membres du conseil devront être choisis en fonction de leurs compétences propres et non de leur représentativité institutionnelle; ils ne devraient pas exercer de mandat politique au niveau fédéral.

Le Conseil fédéral veillera à ce que, dans la mesure du possible, un représentant de la jeunesse soit membre du conseil de fondation.

3689

Le conseil de fondation pourra déléguer des tâches à des comités, en particulier à un comité des finances, chargé de le conseiller pour la gestion de son capital et de contrôler l'activité des gérants de fortune.

Le conseil de fondation sera appuyé par une structure administrative relativement réduite et professionnelle, gérée par un directeur. Le secrétariat sera l'organe exécutif de la fondation. Le conseil de fondation veille à ce que la fondation dispose d'une administration au coût raisonnable et à ce que son secrétariat soit doté de façon optimale, financièrement et sur le plan du personnel. Les moyens de la fondation devront être dans la mesure du possible concentrés sur les prestations qu'elle doit verser dans le cadre des tâches qui lui sont attribuées.

Dans l'exercice de leurs activités, les organes de la fondation pourront faire appel à des experts externes.

Pour l'attribution du Prix de la solidarité, un jury composé de personnalités suisses et étrangères sera institué. Il sera chargé de proposer chaque année au conseil une ou plusieurs organisations à honorer pour des projets particulièrement novateurs et conformes aux buts de la fondation.

1.3.6

Financement

1.3.6.1

Capital de dotation

Le capital de dotation est constitué par le produit de ventes d'or effectuées par la BNS (art. 7). L'art. 23 précise que la BNS transfère à la fondation le produit de la vente de 500 t d'or, mais que le montant transféré ne doit pas excéder 7 milliards de francs. Suite à l'entrée en vigueur de la LUMMP, survenue le 1er mai 2000, la BNS a déjà commencé de vendre une partie de ses réserves d'or par tranches, en tenant compte des conditions du marché. Il est prévu de verser en priorité à la fondation le produit de la vente. Dans la perspective actuelle, celle-ci disposera ainsi dès sa création d'une partie importante de son capital de dotation. La loi prévoit que la valeur réelle des fonds transférés de la BNS à la fondation doit être conservée à long terme (art. 8, al. 1).

1.3.6.2

Gestion des fonds

Le conseil de fondation décidera du mode d'organisation de la gestion des fonds. Il pourra confier cette gestion à des sociétés externes qui gèreront le portefeuille de la fondation sur son mandat. Il est aussi possible que la société de gestion désignée comme responsable s'adjoigne d'autres sociétés de gestion pour exécuter ses tâches.

Un comité des finances composé de membres du conseil de fondation sera nommé par ce dernier. Le comité des finances élaborera des propositions pour la stratégie de placement et des directives sur la gestion des fonds; il assistera le conseil de fondation dans toutes les questions concernant la gestion des fonds. Au besoin, il pourra faire appel à des experts externes. Les tâches administratives seront assumées par le secrétariat.

3690

1.3.6.3

Politique de placement

Pour ce qui est de la gestion du capital de la fondation, le rendement moyen annuel escompté à long terme est de 5 % réels. On table sur le fait que la valeur réelle des fonds provenant des ventes d'or de la BNS et transférés à la fondation sera conservée. Il faut toutefois tenir compte du renchérissement et le compenser. Pour y parvenir, il faudra mettre en oeuvre une stratégie de placement décidée par le conseil de fondation ainsi que des directives sur la gestion des fonds s'appuyant sur les théories modernes de gestion du portefeuille et sur les expériences de diversification internationale faites en la matière. On appliquera dans ce cadre autant que possible une politique de placement à caractère social et écologique afin d'assurer la plus grande adéquation possible entre la gestion des fonds et les activités de la fondation. En ce qui concerne la désignation précise des formes de placement et les limites à définir pour les différents instruments, secteurs et catégories de placement, les directives pourront s'inspirer des prescriptions en vigueur en matière de prévoyance professionnelle (cf. ordonnance du 18 avril 1984 sur la prévoyance professionnelle vieillesse, survivants et invalidité, OPP 2; RS 831.441.1).

1.3.6.4

Création d'une réserve

Il faut souligner que les revenus issus du capital de la fondation ne pourront être réalisés que par une stratégie qui investira en actions une part substantielle du portefeuille. Cette stratégie de placement se justifie par le fait que les fonds seront placés à long terme et par la capacité du portefeuille à faire face aux risques. Etant donné l'évolution irrégulière de la bourse, les rendements sont sujets à de fortes variations d'année en année. Il faut donc s'attendre à ce qu'il y ait des années à rendement négatif.

Vu cette fluctuation plus ou moins grande des rendements, il paraît judicieux de créer une réserve. Elle sera alimentée lors des années de rendement supérieur à la moyenne et sollicitée durant les années à rendement inférieur. Elle permettra à la fondation de disposer d'un montant annuel à peu près fixe. Les détails seront réglés dans les directives de placement fixées par le conseil de fondation (art. 14, let. e).

1.3.7

Voies de recours

Selon l'art. 20, al. 2 de la loi, les organes compétents de la fondation statuent définitivement. Cette disposition concorde avec l'art. 4, al. 2, selon lequel nul ne peut se prévaloir d'un droit aux prestations de la fondation. Les voies de recours ont été exclues pour assurer à celle-ci un fonctionnement aussi autonome et efficace que possible.

1.3.8

Statut fiscal

Selon l'art. 56, let. g, de la loi fédérale du 14 décembre 1990 sur l'impôt fédéral direct (LIFD; RS 642.11), et l'art. 23, al. 1, let. f de la loi fédérale sur l'harmonisation des impôts directs des cantons et des communes (LHID; RS 642.14), les personnes juridiques qui poursuivent des buts publics ou d'intérêt public sont exo3691

nérées de l'impôt sur les gains et le capital employés exclusivement à ces fins.

Comme la Fondation Suisse solidaire remplit ces conditions, rien ne s'oppose à ce qu'elle soit libérée de l'impôt fédéral direct ainsi que des impôts directs cantonaux et communaux. La fondation devra déposer la requête correspondante auprès des autorités compétentes du canton où elle aura son siège.

Si l'impôt anticipé est prélevé sur les futurs produits des placements du capital de la fondation, celle-ci pourra en exiger le remboursement en tant qu'ayant-droit dans la mesure oû elle aura comptabilisé ces revenus au titre de recettes, conformément aux principes commerciaux la régissant (art. 24 de la loi fédérale du 13 octobre 1965 sur l'impôt anticipé; RS 642.21).

1.3.9

Classement des interventions parlementaires

La motion suivante (pt. 7), transformée partiellement en postulat (pts 1 à 6), demandait au Conseil fédéral de définir les tâches, le mode de travail et les mécanismes de contrôle de la fondation, notamment de la distinguer clairement du Fonds en faveur des victimes de l'holocauste.

Motion Danioth (98.3034) du 22 janvier 1998: «Pour une Fondation Suisse solidaire prometteuse» Avec le présent message sur la loi fédérale sur la Fondation Suisse solidaire, il peut être proposé aux Chambres de classer le postulat Danioth qui a été transmis le 25 juin 1998 (la motion [pt. 7] est encore pendante).

2

Partie spéciale

2.1

Disposition transitoire relative à l'art. 99 de la Constitution fédérale

L'art. 99, al. 4, de la Constitution fédérale prévoit que le bénéfice net de la BNS revient au moins à raison des deux tiers aux cantons. Selon la conception actuelle, qui est vraisemblablement incontestée, le produit de la vente de l'or excédentaire de la BNS devrait être réparti à l'aide de cette clé. Le Conseil fédéral estime cependant que cette approche ne conviendrait pas pour un revenu extraordinaire et unique tel que celui qui résultera de la liquidation prévue des réserves d'or. Une disposition constitutionnelle transitoire (art. 197, ch. 1) élargira par conséquent la marge de manoeuvre du législateur sur le point en question. Ainsi, la disposition proposée concernant la délégation habilite le législateur à régler l'utilisation du produit de la vente de 1300 t d'or de la BNS. En l'occurrence, il s'agit exactement de la quantité qui n'est plus nécessaire pour mener la politique monétaire (cf. ch. 1.1.1.2). Dans un premier temps, la loi fédérale sur la Fondation Suisse solidaire, qui vous est soumise conjointement avec le présent message, ne permettra d'utiliser que les 5/13 du tonnage total. La discussion au sujet des 8/13 restants aura lieu dans le cadre d'une consultation à grande échelle. Le Conseil fédéral soumettra des propositions supplémentaires au Parlement en temps utile.

3692

2.2

Loi fédérale sur la Fondation Suisse solidaire

2.2.1

Section 1

Forme juridique et objet

Art. 1 L'al. 1 annonce la Constitution fédérale d'une fondation de droit public sous le nom de «Fondation Suisse solidaire».

Le Conseil fédéral envisage de financer la Fondation Suisse solidaire grâce à la vente d'une partie des réserves d'or de la BNS. Une telle dotation en capital par la Confédération requiert une base légale formelle et prend effet dès l'entrée en vigueur de l'acte législatif constitutif.

En choisissant la forme juridique de la fondation de droit public, le législateur se propose d'axer la présente réglementation sur les besoins concrets du projet de fondation. Cette forme juridique, contrairement à celle d'une fondation de droit privé, permet à la Confédération de garder un droit de disposition direct sur l'affectation du capital de dotation. Elle garantit en outre que la Confédération puisse exercer une surveillance sur la fondation et ses activités.

La personnalité juridique de la fondation implique la jouissance et l'exercice complets des droits civils, la capacité d'être partie ainsi que celle d'ester en justice.

Toutefois, la fondation ne peut accomplir que les actes juridiques nécessaires à la réalisation de ses buts.

Le siège et l'administration de la fondation sont situés en Suisse (al. 2). Le choix du siège de la fondation et de l'emplacement de l'administration est laissé au conseil de fondation (art. 14, let. a). L'administration et le siège de la fondation ne se trouvent pas obligatoirement au même endroit.

Art. 2 L'al. 1 indique le but primordial de la fondation: le renforcement de la solidarité en Suisse et à l'étranger. La fondation entend promouvoir ou mettre en route des processus propres à renforcer la solidarité entre les êtres humains.

L'al. 2 définit les buts de la fondation. Il précise les risques collectifs qu'entend combattre la fondation: la pauvreté, la détresse et la violence. La fondation veut prévenir ces risques et en atténuer les conséquences; cette formulation des buts met en exergue le principe directeur de la fondation, à savoir la prévention.

L'al. 3 assigne à la fondation la tâche de promouvoir la capacité des bénéficiaires de l'aide à se prendre en charge. La fondation veut, dans une solidarité vécue avec d'autres organisations, contribuer à assurer aux personnes concernées un avenir digne.

2.2.2

Section 2

Tâches et exécution

Art. 3 L'al. 1 de cet article précise et commente les buts de la fondation exposés à l'art. 2, en énumérant les tâches principales (cf. ch.1.3.2). Celles-ci ont un caractère impératif et doivent être interprétées dans le cadre de l'objectif supérieur défini à l'art. 2.

3693

Elles ne sont pas énumérées selon leur ordre de priorité. Les tâches principales constituent les axes thématiques autour desquels la fondation devra orienter ses activités. Le conseil de fondation établira ses priorités dans le cadre de ces tâches dans son programme d'activités (voir art. 18).

Les trois champs d'activités forment un tout. Les let. a et b prescrivent à la fondation deux domaines d'intervention globaux: la pauvreté et la violence. Vu que l'édification de structures communautaires pour une société efficace et démocratique est une condition fondamentale à la prévention des dangers que représentent la pauvreté et la violence, la let. c constitue une troisième composante, à la fois lien et support de l'ensemble des tâches.

L'al. 2 fixe une règle générale pour l'activité de la fondation. Le conseil de fondation veillera en principe, en établissant son programme d'activités et en sélectionnant les projets qu'il soutiendra, à ce que la fondation contribue à ouvrir des possibilités de développement et des perspectives aux jeunes générations. En revanche, cette disposition ne doit pas être interprétée de manière absolue, comme devant s'appliquer à tout projet financé par la fondation ou comme obligeant à limiter l'activité de la fondation à un groupe-cible spécifique.

Art. 4 L'al. 1 prévoit que la fondation soutient des programmes (let. a), finance à titre subsidiaire des actions d'urgence dans des situations exceptionnelles (let. b) et décerne périodiquement le Prix de la solidarité (let. c). L'énumération des prestations possibles est ainsi exhaustive.

En ce qui concerne les bénéficiaires potentiels mentionnés à la let. a, on distingue entre les institutions et organisations gouvernementales et les institutions et organisations non gouvernementales. Au nombre des bénéficiaires gouvernementaux figurent avant tout les organismes publics, les communes et les autres corporations de droit public. Par organisations non gouvernementales, on entend aussi bien les grandes oeuvres d'entraide et institutions connues à vocation sociale et humanitaire que les organisations locales intervenant en Suisse ou à l'étranger. La fondation ne verse pas d'aide financière à des personnes ni à des groupes de personnes.

La fondation collabore avec ses partenaires sur une base contractuelle. Selon l'al. 2,
nul ne peut se prévaloir d'un droit aux prestations de la fondation. La fondation ne rend pas de décisions au sens de l'art. 5 de la loi fédérale du 20 décembre 1968 sur la procédure administrative (LPA; RS 172.021). Les contrats qu'elle conclut avec ses partenaires doivent prévoir un remboursement des fonds de la fondation en cas de changement d'affectation.

Art. 5 La Fondation Suisse solidaire se définit non seulement par ses tâches, mais aussi par les principes de son activité (cf. ch. 1.3.3). Ces derniers constituent la base de ses activités concrètes et doivent se refléter dans le règlement des prestations (art. 20).

Les principes ne sont pas énumérés selon un ordre de priorités. Ils fixent des orientations pour le travail de la fondation, le conseil de fondation devant donner autant que possible la préférence à des projets qui remplissent ces critères.

3694

Art. 6 L'al. 1 met le conseil de fondation en devoir de veiller constamment à une utilisation efficace des moyens de la fondation, que ce soit en relation avec l'activité des organes de la fondation ou en relation avec l'activité générale de celle-ci.

L'al. 2 prescrit au conseil de fondation de faire régulièrement évaluer, par une instance indépendante, le travail des organes de la fondation ainsi que les projets qu'elle soutient. Les rapports d'évaluation doivent être soumis à l'autorité de surveillance (art. 22, al. 2, let. e).

2.2.3

Section 3

Financement et gestion des fonds

Art. 7 Le capital de dotation est constitué par la vente d'une partie des réserves d'or, effectuée par la BNS. Le transfert du produit à la fondation constitue en principe, bien qu'il puisse dans une certaine mesure être nécessaire de procéder par étapes en raison de la situation du marché de l'or, une opération unique qui est par conséquent régie par une disposition transitoire (art. 23). Il est prévu que la BNS transfère à la fondation le produit de la vente de 500 t d'or; le montant transféré ne devra toutefois pas excéder 7 milliards de francs. Ce capital peut encore être complété par des dons de tiers. Pour ne pas concurrencer les collectes de fonds des oeuvres d'entraide existantes, la fondation renonce à rechercher activement des dons.

C'est à dessein que le sort que subirait le capital de dotation dans le cas d'une liquidation éventuelle n'est pas réglé. Le cas échéant, il incomberait aux Chambres de statuer sur les modalités.

Art. 8 L'al. 1 prévoit que la valeur réelle des fonds provenant des ventes d'or de la BNS et transférés à la fondation doit être conservée à long terme. Au sens de cette disposition, la valeur réelle du capital de dotation qu'il convient de conserver est donc égale au produit cumulé des ventes d'or de la BNS, qui pourront le cas échéant se faire par tranches. Le conseil de fondation veille à ce que les revenus provenant de ce capital ne soient affectés aux activités de la fondation que dans la mesure où le permet l'obligation de conserver à long terme la valeur.

Selon l'al. 2, la fondation place sur les marchés financiers suisses et étrangers, de façon à générer un revenu, les fonds que lui a transférés la BNS. Le taux de rendement de la fortune des institutions de prévoyance donne une idée du montant possible des produits. De 1985 à 1998, le portefeuille des titres d'une caisse de retraite a dégagé un rendement nominal moyen de 7,6 %. Avec une stratégie accordant un peu plus de poids aux actions et à la diversification internationale, ce qui est parfaitement plausible pour un portefeuille sans limite de temps, il est raisonnable de tabler sur un rendement légèrement supérieur. Il faut toutefois savoir que les produits annuels sont sujets à une fluctuation plus ou moins accentuée. La création d'une réserve (cf. ch. 1.3.6.4) permettra à la fondation de disposer d'un montant annuel plus ou moins constant.

3695

La recommandation de donner la priorité, selon les possibilités, aux placements à finalité sociale ou écologique souligne que l'engagement de la fondation pour le développement durable vaut aussi pour ses placements. Il s'agit de rechercher la plus grande adéquation possible entre les buts et l'activité de la fondation, d'une part, et la gestion de son capital, de l'autre.

Selon l'al. 3, il incombera au conseil de fondation de définir la stratégie de placement et d'édicter des directives sur la gestion des fonds. La stratégie de placement, les instruments de placement, qui devront être décrits en détail dans les directives (cf. art. 14, let. e) ainsi que les limites à fixer pour chaque catégorie et secteur peuvent s'inspirer des prescriptions valables pour la prévoyance-vieillesse (cf. OPP 2).

La marge de manoeuvre des organes de la fondation et des gérants de fortune peut toutefois varier en fonction des besoins de la fondation.

Art. 9 Les prestations de la fondation sont couvertes par les revenus de son capital ainsi que par ses autres actifs. Alors que le capital résultant de la vente de l'or doit être maintenu à sa valeur réelle (art. 8, al. 1) et que seul le revenu peut en être affecté à l'exploitation, les autres actifs de la fondation constitués par des dons de tiers peuvent être utilisés sans restriction. Ces ressources sont censées couvrir non seulement les prestations citées à l'art. 4, mais encore les coûts d'exploitation de la fondation.

Ces derniers comprennent toutes les dépenses d'administration et d'organisation de la fondation, notamment l'infrastructure et le personnel, les honoraires des experts externes et les frais de la gestion de fortune.

2.2.4

Section 4

Organes de la fondation

Art. 10 Les al. 1 et 2 fixent le nombre ainsi que la durée du mandat des membres du conseil de fondation nommés par le Conseil fédéral. Dans la composition du conseil de fondation, on veillera à éviter les conflits d'intérêt entre les activités de la fondation et celle des membres du conseil. Les exigences auxquelles ces derniers devront satisfaire nécessitent un grand investissement personnel. La limitation de la charge à douze ans permet le rajeunissement périodique du conseil.

La Fondation Suisse solidaire est une oeuvre de solidarité suisse. Ce principe trouve son expression dans l'al. 3 qui prévoit que les membres du conseil de fondation doivent être de nationalité suisse. Pour une fondation au caractère symbolique et à l'orientation internationale telle que la Fondation Suisse solidaire, le Conseil fédéral doit toutefois avoir la possibilité de donner exceptionnellement la qualité de membre à une personnalité étrangère.

Art. 11 L'al. 1 autorise le conseil de fondation à instituer des comités et à leur accorder des compétences décisionnelles. Ces comités peuvent être chargés d'établir le programme d'activités quadriannuel, de sélectionner les projets ou de financer des actions d'urgence. La composition est décidée par le conseil de fondation. Elle peut varier d'une période d'activités à l'autre, en fonction des priorités choisies par le 3696

conseil de fondation. Ce dernier doit veiller, lors de la composition des comités, à ce que ces derniers soient impartiaux et accomplissent leur travail dans l'intérêt de la fondation. Les détails sont réglés par le conseil de fondation dans le règlement d'organisation (art. 21).

Selon l'al. 2, le conseil de fondation doit nommer en son sein un comité des finances. Les membres qui composeront ce comité devront disposer de connaissances reconnues en matière de gestion de fortune et d'une expérience pratique dans la gestion d'un portefeuille international diversifié, avec toutes les tâches d'organisation qui en découlent. Le comité des finances fait des propositions au conseil de fondation en ce qui concerne la stratégie de placement et élabore des directives sur la gestion des fonds (art. 15, let. a). Il assiste le conseil de fondation dans toutes les questions de gestion des fonds et dans les affaires concernant le financement de la fondation.

Art. 12 Un directeur nommé par le conseil de fondation gère le secrétariat (al. 14, let. f).

Art. 13 Pour vérifier la légalité des activités et des opérations financières de la fondation, le Conseil fédéral nomme un organe de révision. Il s'agit d'un organe de révision indépendant, au professionnalisme reconnu. Le Contrôle fédéral des finances peut par exemple entrer en considération.

2.2.5

Section 5

Compétences

Art. 14 Le conseil de fondation est l'organe suprême de la fondation. Il jouit des compétences décisionnelles fondamentales, sous réserve, pour certaines d'entre elles, de l'approbation du Conseil fédéral (cf. art. 20, al. 1., et art. 21). Il dispose des compétences essentielles pour la conduite stratégique et politique de la fondation, l'organisation et le contrôle des organes subalternes. La liste complète de ces compétences figure à l'art. 14, let. a à j.

Selon la let. b, le conseil de fondation définit les grandes lignes de l'activité de la fondation, en tenant compte du contexte national et international, ainsi que les priorités de sa politique et ses relations avec le public.

Les organes mentionnés à la let. c, auxquels le conseil de fondation peut déléguer des compétences décisionnelles au sens de l'art. 4, let. a et b, sont le secrétariat et les comités. La compétence de statuer sur des aides d'urgence (art. 4, let. b) peut être confiée, par exemple, à un comité. La délégation de compétences doit être réglée préalablement dans le règlement de prestations (art. 20, al. 1). Par information du public (let. j), on entend en particulier des renseignements complets et réguliers sur les activités de la fondation, la publication de tous les documents prévus à la let. i, ainsi que les rapports d'évaluation externe.

3697

Art. 15 Le comité des finances traite toutes les affaires relevant de la gestion du capital de la fondation et du financement de l'activité de celle-ci, et les soumet pour décision au conseil de fondation (cf. ch. 1.3.6.2 et 1.3.6.3).

Art. 16 Le secrétariat prépare les dossiers du conseil de fondation et exécute ses décisions.

Le conseil de fondation précise dans le règlement d'organisation (art. 21) les compétences du directeur fixées dans la loi ainsi que celles qu'il lui délègue. Il incombe au directeur, à titre de compétence subsidiaire générale, d'assumer toutes les tâches qui ne relèvent pas d'un autre organe ou que la loi n'a pas réglées autrement.

Le secrétariat veille à assurer des contacts permanents avec les organisations partenaires de la fondation.

Art. 17 Cet article régit la vérification interne par un organe de révision. Ce dernier a pour tâche de vérifier la comptabilité et sa conformité au droit, ainsi que les comptes annuels. En vertu de son mandat de contrôle, il peut examiner tous les documents internes nécessaires et demander des renseignements oraux et écrits aux organes de la fondation. L'organe de révision est tenu de rendre compte chaque année au conseil de fondation des résultats de ses travaux. Ces rapports sont à soumettre à l'autorité de surveillance (art. 22, al. 2, let. d).

2.2.6

Section 6

Procédure et surveillance

Art. 18 Le conseil de fondation établit en collaboration avec ses partenaires ainsi qu'avec les groupes concernés, un programme d'activités pour une période de quatre ans (cf.

ch. 1.3.4.2). Il y fixe des priorités thématiques sur la base des tâches définies par la loi (art. 3). Le programme d'activités doit être soumis à l'autorité de surveillance.

(art. 22, al. 2, let. a).

Art. 19 Selon cet article, le conseil de fondation met périodiquement au concours des projets pour réaliser son programme d'activités (art. 18). Cette procédure souligne le caractère particulier de la fondation et la distingue des autres institutions comparables de droit public. Dans le cadre des appels d'offres, toute organisation ou institution peut proposer des projets, pour autant que ceux-ci correspondent au programme d'activités de la fondation. Les projets soumis pourront être examinés par un comité d'experts désigné par le conseil de fondation. Ce dernier doit veiller à ce que les propositions de projets soient jugées par les experts en toute indépendance et uniquement sur la base des critères définis par la fondation. Il faut éviter en particulier que les experts à la fois présentent des demandes de financement et jugent celles-ci.

Le conseil de fondation décide du financement des projets. Les détails de procédure sont fixés dans le règlement des prestations (art. 20).

3698

Art. 20 Le règlement des prestations définit les critères et la procédure applicables au dépôt des projets, à leur sélection et à la décision sur l'octroi de prestations, au sens de l'art. 4. Il précise en outre les conditions que doivent remplir les organisations et institutions se proposant de réaliser un projet (expérience opérationnelle, preuve de leurs prestations, composition de leurs organes, système de récolte de fonds, efficacité, but non lucratif, garantie de l'évaluation de leurs activités, etc.).

Le principe de la transparence, évident dans le cas d'une corporation de droit public, oblige la fondation à définir clairement les critères de choix des projets et à les rendre publics.

L'autorité de surveillance doit approuver le règlement des prestations. Ceci est important non seulement pour l'autorité de surveillance, mais aussi pour les milieux intéressés aux prestations de la fondation.

Selon l'al. 2, les organes compétents de la fondation prennent des décisions sans appel. L'exclusion du droit de recours devrait garantir l'activité autonome et efficace de la fondation. Les prestations de la fondation définies à l'art. 4, let. a, sont censées être fournies rapidement et de façon non bureaucratique. Il va de soi que le financement des actions d'urgence (art. 4, let. b) ou la remise du Prix de la solidarité (art.

4, let. c) ne sauraient non plus être compromis par des voies de recours. Nul ne pouvant se prévaloir d'un droit aux prestations de la fondation (art. 4, al. 2), le pouvoir de contrôle d'une instance de recours serait de toute façon restreint. En revanche, la légalité du fonctionnement de la fondation est assurée par les examens de l'organe de révision (art. 17) et par les autorités de surveillance (art. 22). Si les organes de la fondation contreviennent à la présente loi fédérale, au règlement des prestations ou au règlement d'organisation, la voie de recours hiérarchique au Département fédéral de l'intérieur, puis au Conseil fédéral, est ouverte. Il est également possible de déposer plainte en cas de violation par la fondation de dispositions contractuelles ou dispositions de droit privé.

Art. 21 Le règlement d'organisation fixe la composition, les attributions et les compétences décisionnelles du conseil de fondation (art. 10 et 14), celles des comités nommés par ses soins
(art. 11 et 15), celles du secrétariat (art. 12 et 16), ainsi que les rapports de service liés à la gestion. Les salaires des personnes employées par la fondation devront être adaptés aux conditions usuelles. Ils ne peuvent dépasser ceux des employés et fonctionnaires engagés par contrat de droit public et assumant des responsabilités et une charge de même ordre. Comme le règlement des prestations (art. 20), le règlement d'organisation doit être lui aussi approuvé par l'autorité de surveillance.

Art. 22 La fondation est placée sous la surveillance du Département fédéral de l'intérieur et sous la haute surveillance du Conseil fédéral. Pour l'exercice de cette surveillance, on observera les principes généraux du droit administratif. La surveillance porte sur la légalité de la conduite des affaires et la conformité de l'utilisation des ressources de la fondation avec ses buts, aux termes de la présente loi, du règlement des prestations (art. 20) et du règlement d'organisation (art. 21). Dans les questions d'appré3699

ciation, l'autorité de surveillance fait preuve de retenue. Les contraventions à la loi ou aux dispositions d'exécution (règlement des prestations, règlement d'organisation) peuvent faire l'objet de recours hiérarchiques. Les instruments à la disposition de l'autorité de surveillance sont, selon l'al. 2, let. a à e, le programme d'activités quadriannuel, le budget annuel, les comptes annuels, le rapport annuel (art. 14, let. i), le rapport annuel de l'organe de révision (art. 17, let. c) ainsi que les rapports d'examen et d'évaluation (art. 6, al. 2).

2.2.7

Section 7

Dispositions finales

Art. 23 En vertu de l'art. 7, le capital de dotation est constitué par le produit de ventes d'or effectuées par la BNS. Par ailleurs, la disposition transitoire précise que le produit de la vente de 500 t d'or est transféré à la fondation et que le montant transféré ne doit toutefois pas dépasser 7 milliards de francs. La BNS vendra l'or par tranches en tenant compte de la situation régnant sur le marché. Il est donc possible, voire vraisemblable, que le produit soit également transféré en plusieurs tranches à la fondation.

Dans un premier temps, la fondation doit pouvoir utiliser durant 30 ans, à partir de l'entrée en vigueur de la loi, les moyens financiers qui lui ont été transférés (al. 2).

En vertu de l'al. 3, la législation peut prolonger la durée d'utilisation ou prévoir une nouvelle utilisation des moyens financiers. Le législateur peut en principe modifier ou abroger n'importe quand ses actes. Le délai de 30 ans confirme toutefois l'intention de faire de la fondation une institution s'inscrivant dans le long terme. A l'échéance du délai, il faudra pouvoir décider ce qu'il convient de faire en se fondant sur une évaluation approfondie de la situation. Si la fondation correspond aux attentes, il est vraisemblable que les générations futures opteront pour un maintien. En revanche, si la durée d'utilisation n'était pas prolongée ou si une nouvelle utilisation n'était pas décidée, les moyens financiers reviendraient à raison de deux tiers aux cantons et d'un tiers à la Confédération (al. 4), par analogie avec la clé de répartition du bénéfice figurant à l'art. 99, al. 4, de la Constitution fédérale.

3

Conséquences financières et effets sur l'état du personnel

3.1

Conséquences financières pour la Confédération et les cantons

L'art. 99, al. 4, Cst. prévoit qu'au moins les deux tiers du bénéfice net de la BNS reviennent aux cantons. A travers la création de la loi sur la fondation, qui se base sur la modification constitutionnelle soumise simultanément, il est fait usage de la possibilité de traiter le produit des ventes d'or de la BNS en dérogeant à l'art. 99, al. 4, Cst. Les versements à la Confédération et aux cantons seraient plus élevés si les fonds destinés à la fondation restaient en possession de la BNS, qui les gérerait et les redistribuerait conformément à la clé de répartition actuelle. La Confédération et les cantons subissent donc un manque à gagner d'un montant équivalent au revenu provenant de la gestion du produit des ventes d'or destiné à la fondation.

3700

3.2

Effets sur l'état du personnel de la Confédération

La loi fédérale n'aura aucun effet sur l'effectif du personnel de la Confédération, puisque la fondation est indépendante. Les coûts de personnel de la fondation seront couverts par les ressources et pris en charge par la fondation elle-même (art. 9). La surveillance définie à l'art. 22 peut être exercée avec le personnel fédéral actuel.

4

Conséquences économiques

4.1

Disposition constitutionnelle relative à l'utilisation des réserves d'or de la BNS

Suite à la suppression de la parité-or du franc, la BNS détient des réserves d'or plus importantes que celles dont elle a besoin pour mener la politique monétaire. 1300 t d'or seront vendues et le produit de la vente sera utilisé pour d'autres tâches publiques.

La disposition constitutionnelle transitoire relative à l'utilisation de l'or est nécessaire afin qu'il soit possible de s'écarter de la clé de répartition du bénéfice figurant à l'art. 99, al. 4, Cst., clé selon laquelle au moins deux tiers des bénéfices de la Banque nationale reviennent aux cantons. En soi, cette disposition n'entraîne toutefois pas une extension du champ d'action de l'Etat, car elle ne définit pas l'utilisation des fonds.

La vente et le retranchement des réserves d'or ne réduisent pas la future marge de manoeuvre de la BNS en matière de conduite de la politique monétaire, car les 1300 t d'or concernées représentent expressément des réserves qui ne sont plus nécessaires (voir ch. 1.1.1).

Les ventes d'or prévues ne devraient pas exercer d'effets notables sur le prix de l'or, vu qu'elles seront étalées sur une période de cinq ans et coordonnées avec celles d'autres banques centrales (voir ch. 1.1.1.3.1).

Par contre, la question se pose de savoir si la vente et le retranchement de réserves d'or aura des conséquences sur l'évolution des taux de change et de l'inflation.

Etant donné que la Banque nationale reconvertira sur une longue période les 1300 t d'or en titres suisses et étrangers générateurs de revenus, les quelque 17 milliards de francs provenant des ventes d'or ne devraient influencer ni les taux de change, ni l'inflation.

Quant au retranchement du patrimoine de la BNS, il ne devrait en principe pas avoir de retombées sur les taux de change ni sur l'inflation. Toutefois, la forme sous laquelle la BNS transférera les fonds à leurs nouveaux bénéficiaires aura de l'importance. Le transfert sous la forme d'un portefeuille de titres, sans incidence sur la masse monétaire, ne poserait pas de problème du point de vue de la politique monétaire. Un transfert sous la forme de devises étrangères n'exercerait pas non plus d'influence sur l'évolution de la masse monétaire suisse. Des effets au niveau des taux de change (appréciation du franc suisse) seraient toutefois possibles, si les bénéficiaires convertissaient en francs
suisses, en une seule fois, la totalité de l'avoir.

Par contre, un transfert en francs suisses ­ comme c'est le cas pour la distribution annuelle du bénéfice de la BNS à la Confédération et aux cantons ­ aurait un impact sur la masse monétaire et il devrait être compensé par la BNS. Cela serait en principe possible en vendant une quantité adéquate de devises ou d'actifs en francs. Si la 3701

totalité du montant de quelque 17 milliards de francs devait être versé en une seule fois et compensé à l'aide de ventes de devises, les répercussions sur les taux de change seraient considérables. Il serait par conséquent important d'effectuer les versements par tranches, notamment si le transfert se faisait sous la forme de francs suisses. La BNS pourra d'autant mieux compenser d'éventuels effets non souhaités que l'affectation de l'avoir particulier, et donc les besoins des bénéficiaires, seront connus tôt.

4.2

Loi fédérale sur la Fondation Suisse solidaire

L'équivalent de 500 t d'or sera cédé à une fondation qui encouragera des oeuvres de bienfaisance en Suisse et à l'étranger à l'aide de revenus réels se montant à quelque 200 millions de francs par an. Cette fondation sera une organisation dotée d'une structure simple. Il ne sera pas créé de voies de recours inutiles.

La nouvelle fondation répondra à des besoins qui n'étaient pas satisfaits suffisamment jusqu'ici. Les oeuvres d'entraide existantes ne seront par conséquent ni concurrencées, ni subventionnées (voir ch. 1.3.3.2 et 1.3.4.1.1). Les synergies résultant de la coopération avec des oeuvres d'entraide existantes seront toutefois mises à profit.

L'activité de la fondation n'aura pas de retombées notables sur la macro-économie.

5

Programme de la législature

Dans le rapport du Conseil fédéral du 1er mars 2000 sur le Programme de la législature 1999­2003, la fondation est citée comme une des priorités de la politique gouvernementale (R 6 et R 20; FF 2000 2168, 2177, 2192). Le rapport souligne qu'il faut renouveler et renforcer le sentiment de solidarité vis-à-vis de l'étranger et que la création de la Fondation Suisse solidaire contribuera de manière marquante à cet objectif. Il indique également que la fondation fournira en Suisse une assistance qui complétera l'aide sociale accordée par les cantons et les communes et qu'un message relatif à une base constitutionnelle permettant de créer et de financer la fondation précitée sera présenté conjointement avec le message, déjà prêt, concernant une loi fédérale sur ladite fondation. Dans ses objectifs pour l'an 2000, le Conseil fédéral précisait déjà qu'il entendait concrétiser au plus vite la fondation Suisse solidaire, dont les activités tournées vers l'avenir pouvaient renforcer la solidarité à l'intérieur de la Suisse et à l'égard de l'étranger (objectif 17). Le présent message combine les deux projets, qui sont étroitement liés. Il constitue une nouvelle étape vers la mise en place de l'institution, annoncée à plusieurs reprises.

6

Constitutionnalité

6.1

Création de la fondation

Pour la création de la Fondation Suisse solidaire, la Confédération s'appuie sur sa compétence étendue en matière de politique étrangère (cf. art. 54, al. 1, Cst.). Cette compétence fédérale n'englobe pas seulement la possibilité de conclure des traités internationaux; elle autorise également la Confédération à édicter des actes législatifs concernant les relations extérieures de la Suisse. Il ne doit donc pas obligatoire3702

ment s'agir de mesures concernant directement les relations des autorités suisses avec les autorités étrangères, internationales et supranationales. Il peut également s'agir de mesures qui, bien qu'elle portent sur les relations avec des organisations privées ou suisses, sont cependant conformes à des objectifs importants de la politique étrangère. Cette condition est remplie dans le cas de la fondation.

La compétence de la Confédération peut également se fonder sur une compétence non écrite, justifiée par la nature de l'objet (pouvoirs inhérents). Une telle compétence a une valeur constitutionnelle. La doctrine et la pratique admettent une telle compétence quand le règlement d'une matière incombe de par sa nature au pouvoir fédéral; on parle dans ce cas de compétence justifiée par la structure fédérative de l'Etat (cf. Peter Saladin, dans Commentaire de la Constitution fédérale, art. 3, no 134). La Confédération a invoqué cette compétence à plusieurs reprises, notamment dans le cas des festivités du «700e anniversaire de la Confédération» (cf. FF 1988 II 1058) et des festivités 1998 (cf. FF 1995 II 918). Le projet de Fondation Suisse solidaire constitue un cas comparable, puisqu'il a été annoncé à l'occasion de la célébration du 150e anniversaire de l'Etat fédéral suisse et du 200e anniversaire de la République helvétique. L'entrée en vigueur, le 1er janvier 2000, de la Constitution fédérale mise à jour, n'a rien changé à la situation juridique, de sorte que la compétence tacite de la Confédération peut continuer d'être invoquée dans de tels cas. Par ailleurs, la création de la fondation par la Confédération ne touche pas aux compétences des cantons.

En résumé, la création de la fondation, au sens de la loi fédérale sur la Fondation Suisse solidaire peut s'appuyer sur la compétence de la Confédération en matière de politique étrangère et sur les compétences non écrites de la Confédération justifiées par la nature de l'objet (pouvoirs inhérents).

6.2

Transfert des fonds

En vertu de l'art. 23 de la loi fédérale sur la Fondation Suisse solidaire, la BNS transfère à la fondation le produit de la vente de 500 t d'or; toutefois, le montant transféré ne doit pas excéder 7 milliards de francs. En vertu de l'art. 7 du projet de loi, cet avoir constitue le capital de dotation de la fondation. L'arrêté fédéral sur l'utilisation des réserves d'or, qui vous est également soumis sous la forme de projet, représente la base constitutionnelle du transfert de l'avoir. Ce projet prévoit de compléter la Constitution fédérale par une disposition transitoire relative à l'art. 99 (politique monétaire). Ainsi, la loi règle l'utilisation du produit de la vente de 1300 t d'or de la BNS. La loi sur la Fondation Suisse solidaire fait usage de cette possibilité à hauteur de 500 t. En raison de la disposition finale mentionnée à l'art. 24, al. 2, le Conseil fédéral ne pourra mettre en vigueur cet acte que lorsque le peuple et les cantons auront approuvé l'arrêté fédéral sur l'utilisation des réserves d'or.

L'ensemble du projet est par conséquent conforme à la Constitution fédérale.

3703