Rapport sur le résultat des notifications à l'AELE et à l'OMC du projet du 1er mars 2000 relatif à une modification de la loi fédérale sur la protection de l'environnement du 30 août 2000

Messieurs les Présidents, Mesdames et Messieurs, Nous vous communiquons par la présente le rapport relatif au résultat des notifications à l'AELE et à l'OMC du projet de modification de la loi fédérale sur la protection de l'environnement qui vous a été soumis dans le cadre du message du 1er mars 2000, et vous prions d'en prendre connaissance.

Nous vous prions d'agréer, Messieurs les Présidents, Mesdames et Messieurs, l'assurance de notre haute considération.

30 août 2000

Au nom du Conseil fédéral suisse: Le président de la Confédération, Adolf Ogi La chancelière de la Confédération, Annemarie Huber-Hotz

2000-1855

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Condensé Selon les engagements pris dans le cadre de traités entre Etats, les projets de prescriptions techniques doivent être présentés pour avis aux autres parties contractantes de l'AELE et de l'OMC avant d'être adoptés. Le but de cette procédure de notification est de reconnaître rapidement d'éventuelles entraves au commerce et de tenir compte d'objections justifiées dès la procédure législative préparatoire. Etant donné que les procédures de notification n'étaient pas encore achevées au moment de l'adoption du message relatif à une modification de la loi fédérale sur la protection de l'environnement, le Conseil fédéral a décidé que le résultat de ces procédures serait transmis aux Chambres fédérales ultérieurement.

La notification de la modification de la loi sur la protection de l'environnement dans le domaine de la biotechnologie n'a déclenché aucune réaction dans le cadre de la procédure de l'AELE, qui implique également l'UE sur une base informelle.

Par contre, dans le cadre de la procédure de l'OMC, la notification (G/TBT/Notif.00/49) de la modification prévue de la loi a suscité des commentaires circonstanciés de la part des Etats-Unis d'Amérique (Etats-Unis).

Les remarques émises le 3 avril 2000 par les Etats-Unis concernent notamment les trois points suivants: 1.

La mise en oeuvre de la notion constitutionnelle de «dignité de la créature»: les Etats-Unis estiment que cette notion est imprécise, subjective, et qu'elle aura des effets sur les autorisations délivrées pour l'emploi et la fabrication de produits biotechnologiques. Les Etats-Unis craignent que, suite à l'introduction de ce nouveau critère, les produits biotechnologiques puissent être soumis à des examens plus sévères de leurs conséquences pour l'environnement que les produits agricoles conventionnels.

2.

La déclaration obligatoire des produits contenant des organismes génétiquement modifiés (OGM): les Etats-Unis sont d'avis que la déclaration obligatoire n'est pas la mesure la plus efficace pour informer les consommateurs. Ils estiment qu'elle soulèverait des questions quant à son exécution et aux coûts qu'elle impliquerait pour les consommateurs et les producteurs.

3.

Les dispositions sur la responsabilité civile relatives à l'utilisation des OGM: les Etats-Unis demandent pourquoi les OGM sont traités de la même manière que des organismes pathogènes. Ils sont d'avis qu'il n'existe aucun indice laissant supposer que le danger intrinsèque pour l'environnement lié aux OGM est plus grand que le danger lié à de nouvelles plantes ou à de nouveaux animaux élevés avec des méthodes conventionnelles.

Ce rapport présente un résumé détaillé de l'avis des Etats-Unis et de la réponse suisse ainsi qu'une appréciation sous l'angle du droit de l'OMC des objections formulées par les Etats-Unis. Il arrive à la conclusion qu'une plainte déposée contre la Suisse en raison du projet Gen-Lex a peu de chance d'obtenir gain de cause.

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Rapport 1

Point de la situation

Le 1er mars 2000, le Conseil fédéral a rendu sa décision concernant le message et un projet de modification de la loi fédérale sur la protection sur l'environnement. A ce moment, les procédures internationales de notification menées dans le cadre de l'Association européenne de libre échange (AELE) et de l'Organisation mondiale sur le commerce (OMC) n'étaient pas encore achevées. Le Conseil fédéral a donc arrêté au ch. 1.2 du message (dernière phrase de l'alinéa «Règles de commerce internationales», p. 2292 de la version française) que le résultat des procédures serait communiqué aux Chambres fédérales lorsque ces procédures seraient achevées.

2

Résultat de la procédure de notification par l'AELE

La notification de la modification de la loi sur la protection de l'environnement dans le domaine de la biotechnologie n'a déclenché aucune réaction dans le cadre de la procédure de l'AELE, qui implique également l'UE sur une base informelle.

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Résultat de la procédure de notification par l'OMC

3.1

Condensé

Dans le cadre de la procédure de l'OMC, la notification (G/TBT/Notif.00/49) des modifications prévues de la loi a provoqué des commentaires circonstanciés de la part des Etats-Unis d'Amérique (Etats-Unis).

Les remarques émises le 3 avril 2000 par les Etats-Unis concernent notamment les trois points suivants: 1.

La mise en oeuvre de la notion constitutionnelle de «dignité de la créature»: les Etats-Unis estiment que cette notion est imprécise, subjective, et qu'elle aura des effets sur les autorisations délivrées pour l'emploi et la fabrication de produits biotechnologiques. Les Etats-Unis craignent que, suite à l'introduction de ce nouveau critère, les produits biotechnologiques puissent être soumis à des examens plus sévères de leurs conséquences pour l'environnement que les produits agricoles conventionnels.

2.

La déclaration obligatoire des produits contenant des organismes génétiquement modifiés (OGM): les Etats-Unis sont d'avis que la déclaration obligatoire n'est pas la mesure la plus efficace pour informer les consommateurs. Ils estiment qu'elle soulèverait des questions quant à son exécution et aux coûts qu'elle impliquerait pour les consommateurs et les producteurs.

3.

Les dispositions sur la responsabilité civile relatives à l'utilisation des OGM: les Etats-Unis demandent pourquoi les OGM sont traités de la même manière que des organismes pathogènes. Ils sont d'avis qu'il n'existe aucun indice laissant supposer que le danger intrinsèque pour l'environnement lié

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aux OGM est plus grand que le danger lié à de nouvelles plantes ou à de nouveaux animaux élevés avec des méthodes conventionnelles.

3.2

Principales remarques

Outre des commentaires d'ordre général, les Etats-Unis ont également émis des remarques au sujet de certains articles du projet Gen-Lex. Celles-ci font l'objet des commentaires ci-dessous basés sur la réponse adressée par la Suisse aux Etats-Unis.

Que signifie «dignité de la créature»?

La notion de «dignité de la créature» est une notion du droit constitutionnel suisse (art. 120, al. 2, Cst.). Elle prend en considération une valeur intrinsèque propre à l'être vivant non humain, qui interdit de le considérer simplement comme un moyen.

La modification prévue de la loi sur la protection de l'environnement (RS 814.01, LPE) ­

restreint le principe constitutionnel de dignité de la créature aux animaux et aux plantes;

­

établit que cette dignité n'est pas respectée lorsque l'on porte atteinte à des caractéristiques et des modes de vie essentiels d'un animal ou d'une plante;

­

établit que la dignité de la créature n'est pas une valeur absolue. Des modifications génétiques peuvent représenter une atteinte sérieuse à la dignité de la créature sans pour autant compromettre le respect de cette dignité, à condition que l'atteinte puisse être justifiée dans le cadre d'une pondération des intérêts.

La notion de dignité de la créature sera concrétisée par voie d'ordonnance.

Le critère de dignité de la créature sera-t-il également appliqué à des activités agricoles qui ne font pas recours au génie génétique?

Les exigences énoncées dans l'art. 29a LPE sont applicables à toute utilisation d'organismes et ne se limitent donc pas au génie génétique. Seul l'art. 29a, al. 2, sur la pondération des intérêts en présence fait référence au génie génétique. Il n'est donc pas exclu que l'on procède de façon analogue dans d'autres domaines (p. ex.

l'élevage d'animaux).

Que signifie la notion de dignité de la créature dans la loi sur la protection des animaux? Comment faut-il prouver qu'elle a été respectée?

Le principe constitutionnel de la dignité de la créature est concrétisé dans la loi sur la protection des animaux par des prescriptions concernant aussi bien l'élevage que les modifications génétiques d'animaux (vertébrés). En principe, la procédure utilisée pour les modifications génétiques des animaux est la même que celle appliquée depuis 1981 et 1997 pour autoriser des expériences sur les animaux. Comme il est manifeste que les modifications génétiques ne portent souvent pas atteinte à la dignité de la créature, le Conseil fédéral obtiendra la compétence de simplifier ou même de supprimer la procédure le cas échéant.

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Quel est le rôle de la Commission d'éthique dans le cadre des procédures d'autorisation? Sur la base de quels critères d'éthique prend-elle sa décision?

Le 28 avril 1998, le Conseil fédéral a institué la Commission fédérale d'éthique pour le génie génétique dans le domaine non humain. Cet organe consultatif prend position durant les procédures législatives et les procédures d'autorisation, et ses avis sont pris en compte dans les décisions des autorités. La commission d'éthique est composée de spécialistes reconnus de l'éthique ainsi que d'autres disciplines comme la biologie, la médecine ou le droit. Elle s'occupe actuellement des critères pour la pondération des intérêts. Elle considère les requêtes qu'elle reçoit comme des cas exemplaires et les discute de manière approfondie en tenant compte de critères plus généraux.

Les considérations d'ordre éthique ne font pas partie de l'évaluation des risques biologiques. Ce n'est que le résultat de l'évaluation des risques qui est apprécié sous l'angle de critères d'éthique.

Que signifie la notion d'«intérêts publics prépondérants» au sens de l'art. 29a, al.

3, du projet LPE?

Les intérêts publics prépondérants sont des intérêts comme l'ordre public ou la sécurité nationale. La disposition selon laquelle les autorisations peuvent être refusées lorsqu'une requête s'oppose à des intérêts publics prépondérants ne signifie pas que leur évaluation repose sur des critères autres que scientifiques.

L'art. 29d, al. 3, du projet LPE ne s'applique-t-il qu'à l'utilisation d'organismes dans l'environnement ou régit-il également les denrées alimentaires? L'art. 14, al. 1, let. e, et l'art. 27b de la loi sur l'agriculture exigent déjà une déclaration des produits agricoles génétiquement modifiés. Qu'est-ce qui distingue ces deux articles de l'art. 29d, al. 3, du projet LPE?

Le chap. «Organismes» de la loi sur la protection de l'environnement règle l'utilisation de produits qui contiennent des organismes reproductibles ou qui sont composés de tels organismes. Les produits tirés d'organismes génétiquement modifiés (OGM), mais qui n'en contiennent plus sous forme reproductible, ne relèvent donc pas des prescriptions de la LPE relatives à la déclaration des produits.

La loi sur les denrées alimentaires et la loi sur l'agriculture vont plus loin à cet égard dans
leurs prescriptions. Leur champ d'application est certes restreint à un groupe de produits déterminé (p. ex. les denrées alimentaires ou les produits agricoles), mais leurs prescriptions relatives à la déclaration s'appliquent également aux produits tirés d'OGM.

Quel est le rapport entre les prescriptions relatives à la déclaration contenues dans ce texte législatif et celles de la notification TBT dans G/SPS/N/CHE/17?

Les prescriptions relatives à la déclaration citées dans la notification mentionnée sont celles de l'ordonnance du 25 août 1999 sur la dissémination dans l'environnement. Les prescriptions de cette ordonnance reposent sur les dispositions relatives à la déclaration inscrites dans la loi sur la protection de l'environnement actuellement en vigueur.

Les prescriptions relatives à la déclaration du projet LPE (notification G/TBT/Notif.00/49) constitueront la base d'une réglementation future à l'échelon de l'ordonnance. Elles autorisent comme auparavant l'introduction de seuils pour les 4649

produits ne contenant que des traces d'OGM et permettent d'introduire un système volontaire de déclaration pour les produits fabriqués sans recours au génie génétique.

Comment les producteurs peuvent-ils se défendre contre une action en responsabilité civile alors qu'il manque une définition de la dignité de la cré ature ou de l'atteinte au respect de cette dignité? Que signifie un dommage dans ce contexte?

La responsabilité civile suisse entend par dommage un dommage pécuniaire, par exemple la perte de la vie ou une atteinte à l'intégrité de la personne dans la mesure où elles entraînent des conséquences économiques, ou encore la perte ou une détérioration de la propriété ainsi qu'une perte de revenu. L'atteinte à la dignité de la créature chez les animaux et les plantes ne relève pas de la notion de dommage et ne peut donc pas servir de base à une action en responsabilité civile.

Quelles sont les exigences requises pour prouver un dommage causé par des OGM?

Le droit suisse prévoit que la preuve du dommage doit être apportée par le demandeur. En principe, il faut prouver le dommage et les causes du dommage. Dans certaines conditions, lorsqu'une preuve complète ne peut raisonnablement pas être exigée, des allégements peuvent être accordés en vertu de la jurisprudence du Tribunal fédéral.

La loi prévoit un délai de prescription de 3 ans pour des exigences de dommages-intérêts. Comment ce délai a-t-il été fixé?

En vertu du droit suisse actuel, le délai de prescription relatif est d'une année. On considère généralement que ce délai est trop court et qu'une extension à 3 ans est appropriée. La convention du Conseil de l'Europe du 21 juin 1993 sur la responsabilité civile des dommages résultant d'activités dangereuses pour l'environnement prévoit également un délai de 3 ans.

L'art. 59c du projet LPE énonce que le délai de prescription absolu pour les do mmages est limité à 20 ans en général et à 30 ans dans le cas des organismes génét iquement modifiés et des organismes pathogènes. Pourquoi les OGM sont-ils traités de la même façon que les organismes pathogènes?

Alors que les organismes pathogènes sont considérés comme dangereux, dans le cas des organismes génétiquement modifiés, c'est le manque de connaissances relatives aux conséquences à long terme qui justifie cette réglementation particulière,
et notamment le délai de prescription de 30 ans.

La loi sur les denrées alimentaires exige que toute atteinte à la santé soit exclue.

Or cette exigence pourrait s'avérer impossible à satisfaire et engendrer de facto une interdiction.

L'art. 9 de la loi sur les denrées alimentaires précise que le Conseil fédéral peut restreindre ou interdire des substances et des procédés «lorsque tout danger ne peut être exclu selon l'état des connaissances scientifiques». Un danger pour la santé ne doit donc pas être complètement exclu.

Il n'existe pas de certitude absolue ou de risque nul; par conséquent, de telles preuves ne peuvent pas être exigées. L'évaluation du risque au sens de l'ordonnance 4650

concernant la procédure d'autorisation relative aux OGM (OAOGM) repose sur des bases scientifiques et ne comporte donc pas de telles exigences. L'évaluation du danger pour la santé doit se faire selon le principe de l'équivalence en substance (substantial equivalence), c'est-à-dire que l'organisme à évaluer doit être comparé à d'autres organismes connus sous l'aspect du danger qu'il représente pour la santé.

Les produits OGM sont autorisés si, comparés aux produits conventionnels, ils ne comportent aucun risque supplémentaire.

Les produits OGM sont évalués et autorisés alors que l'on sait qu'un risque résiduel ne peut être complètement écarté. C'est pourquoi les produits autorisés sont soumis à un contrôle à long terme. Si, durant cette période, de nouvelles informations établies sur des bases scientifiques devaient révéler un danger pour l'homme ou pour l'environnement, une autorisation octroyée pourrait être révoquée à tout moment. Le fait qu'un produit «ne puisse jamais comporter de risque» n'est pas une condition nécessaire pour l'autorisation de sa mise dans le commerce.

Divers produits OGM, dont des produits contenant du soja (Roundup-Ready), du maïs (Bt176 et Bt11)1 et de la vitamine B12, ont déjà été évalués, et leur mise dans le commerce a été autorisée sur la base de la situation juridique actuelle. La pratique en vigueur montre que la loi sur les denrées alimentaires est une base juridique adéquate et nullement un «standard impossible et déraisonnable».

Le projet n'apporte aucune précision quant au type et à la fréquence des examens des produits génétiquement modifiés ni à leur contrôle par les autorités.

La loi sur la protection de l'environnement est une loi fédérale, et en tant que telle, ne fixe que les exigences et les éléments fondamentaux. Dans ce sens, elle forme la base juridique pour les exigences des examens. Des prescriptions détaillées comme la fréquence des contrôles ou la méthode de test appropriée ne sont pas fixées dans les lois fédérales, mais dans des ordonnances.

L'analyse de l'ADN est actuellement le procédé standard pour la détection de modifications génétiques dans les denrées alimentaires, les aliments pour animaux et les semences. Des méthodes de screening fiables et largement répandues existent pour tous les produits OGM disponibles sur le marché suisse. Les
produits sont contrôlés par des laboratoires accrédités, à l'aide de méthodes validées et de matériel certifié, ce qui garantit la sécurité juridique et l'égalité de traitement indispensables. Etant donné qu'il existe des valeurs seuils pour la déclaration de produits conventionnels contenant des traces d'OGM, la question de la sensibilité des méthodes de détection est sans importance pour les produits OGM autorisés.

L'art. 146a de la loi sur l'agriculture établit que les animaux de rente génétiquement modifiés ne peuvent être mis en circulation que si des motifs importants en justifient la production et l'écoulement. Quels sont les «motifs importants» dans ce contexte?

Comme il n'est actuellement pas possible de juger définitivement des possibilités et de l'évolution du génie génétique en ce qui concerne les animaux de rente, le Conseil fédéral s'est vu attribuer la compétence d'instaurer le régime de l'autorisation et de concrétiser le critère «motifs importants». A l'heure actuelle, il serait prématuré de vouloir préciser ce critère. Parmi les applications potentielles du génie génétique 1

En outre, le maïs Mon810 a été autorisé le 27.7.2000 en tant que denrée alimentaire et en tant que fourrage.

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dans le domaine des animaux de rente, l'élevage de races résistantes aux maladies occupe une place primordiale.

Lors de la concrétisation de l'art. 146a de la loi sur l'agriculture, le Conseil fédéral tiendra compte de principes généraux comme celui de la proportionnalité, du caractère scientifique et de l'égalité de traitement et se basera sur les standards et les recommandations en vigueur sur le plan international.

4

Appréciation de l'avis des Etats-Unis sous l'angle du droit de l'OMC

4.1

Introduction

Ce chapitre évalue brièvement les principaux aspects de l'avis des Etats-Unis sous l'angle du droit de l'OMC et présente la marge de manoeuvre que les règles de commerce internationales concèdent dans ce domaine aux législateurs nationaux. Il y a lieu de relever à cet égard que les principes et les règles de l'OMC ne constituent pas un système rigide et figé, mais qu'ils sont continuellement développés par les pratiques en vigueur dans les Etats membres et par leurs décisions, et concrétisés par la jurisprudence établie dans le cadre de procédures de règlement des différends de l'OMC. Cette évolution est caractérisée par une prise en compte croissante des exigences relatives à la protection de l'environnement. En outre, il a été envisagé de remettre en question les règles actuelles de l'OMC dans le cadre d'une future négociation. L'exposé ci-après représente donc une appréciation basée sur les conditionscadre actuelles du droit de l'OMC.

Le but de l'OMC, organisation édifiée sur le GATT, est de créer des conditions favorables à une croissance économique durable par la mise en place d'un ordre du commerce multilatéral ouvert et transparent. Une série de principes et de règles ont été établis à cette fin. Les Etats membres ont notamment l'obligation d'appliquer le même traitement à des produits similaires. En particulier, ils doivent en principe étendre à toutes les parties contractantes les concessions qu'ils ont accordées à un autre Etat (principe de la nation la plus favorisée), et doivent traiter les marchandises étrangères de la même façon que les produits similaires du pays (principe du traitement national). En outre, les restrictions quantitatives ainsi que les entraves non justifiées au commerce sont interdites. Enfin, le principe de la transparence commande que les mesures concernant le commerce soient présentées ouvertement.

Ces règles de l'OMC, qui valent aussi pour la Gen-Lex, concernent le commerce transfrontière et par conséquent l'importation d'organismes génétiquement modifiés, mais elles ne régissent pas l'utilisation des organismes en Suisse. Pour les EtatsUnis, par contre, les règles régissant la commercialisation de produits génétiquement modifiés sont primordiales, ce qui les a incités entre autres à proposer des négociations dans le cadre de l'OMC et a également influencé leur avis sur la notification suisse du projet Gen-Lex.

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4.2

Quelques éléments de l'avis des Etats-Unis sous l'angle de l'OMC

Protection de la «dignité de la créature» et commission d'éthique Le projet Gen-Lex est destiné à mettre en oeuvre le mandat constitutionnel concernant la prise en compte de la dignité de la créature. C'est pourquoi on a institué le principe selon lequel le respect de la dignité de la créature chez les animaux et les plantes ne doit pas être compromis. Une commission d'éthique est en outre instituée, qui se prononce sur les questions d'ordre éthique dans le cadre de sa fonction consultative. En principe, l'OMC ne se préoccupe pas de réflexions générales d'éthique.

C'est pourquoi, pour autant que ces réflexions ne créent pas d'entraves au commerce qui ne puissent être justifiées au nom de motifs reconnus par l'OMC, comme la protection de l'environnement, la santé ou l'ordre public, elles n'engendrent aucun conflit avec les règles de l'OMC. Ainsi, la condition proposée selon laquelle une pondération des intérêts devra être effectuée avant toute modification du patrimoine génétique des animaux et des plantes ne suscite aucune question pouvant intéresser l'OMC, car cette disposition n'est pas applicable au commerce transfrontière d'organismes génétiquement modifiés, mais uniquement à la réalisation de modifications génétiques en Suisse.

Différence entre le traitement de produits génétiquement modifiés et le traitement de produits conventionnels Le projet Gen-Lex fait une différence entre le traitement des produits génétiquement modifiés et le traitement des produits conventionnels, c'est-à-dire des produits non génétiquement modifiés. La question de savoir jusqu'à quel point les produits génétiquement modifiés et les produits conventionnels doivent être considérés comme similaires n'a pas été résolue de manière définitive dans le cadre de l'OMC. La Suisse toutefois est d'avis qu'il ne s'agit pas de produits similaires. Par conséquent, une différence de traitement est justifiée. Cependant, même en considérant que les produits génétiquement modifiés et les produits conventionnels sont similaires, une différence de traitement pourrait à notre avis se justifier si elle s'avérait nécessaire pour atteindre des objectifs légitimes, notamment pour empêcher des pratiques trompeuses ou pour protéger la santé et la sécurité de l'homme, la vie et la santé des animaux et des plantes ou l'environnement.

Mise dans
le commerce des OGM L'art. 29a, al. 3, du projet LPE prévoit que l'autorisation de mise dans le commerce d'organismes génétiquement modifiés peut être refusée lorsque des intérêts publics prépondérants s'y opposent. Conformément au droit de l'OMC, cela est permis, p. ex. pour des raisons d'ordre public. Par contre, un refus de la mise dans le commerce d'un organisme génétiquement modifié pour des raisons autres que celles reconnues dans le cadre de l'OMC pourrait entrer en conflit avec les engagements pris.

Responsabilité civile L'OMC ne connaît pas de réglementation relative au droit de la responsabilité civile appliqué dans ses Etats membres. Il n'en demeure pas moins qu'un régime national de responsabilité ne doit pas violer les principes exposés sous 4.1. Il ne doit notamment pas être conçu de façon à constituer une entrave indirecte à l'accès au marché 4653

de produits étrangers. Le délai de prescription prolongé prévu dans le projet GenLex pour les organismes génétiquement modifiés ne pose pas problème sous l'angle du droit de l'OMC dans le cas où les organismes génétiquement modifiés ne sont pas considérés comme similaires à d'autres organismes. Toutefois, même s'ils étaient considérés par l'OMC comme similaires, un délai de prescription prolongé pour les dommages dus à l'utilisation d'organismes génétiquement modifiés ne créerait pas de conflit avec le droit de l'OMC tant qu'il pourrait effectivement être justifié par un risque plus élevé lié à la modification génétique ou par une plus grande incertitude.

4.3

Conclusions

L'exposé ci-dessus a montré que du point de vue du droit de l'OMC, la marge de manoeuvre laissée aux Etats pour l'utilisation des organismes génétiquement modifiés est relativement importante. Les critères pour l'homologation de semences génétiquement modifiées constituent probablement le point le plus critique du projet. A ce propos, il faut noter en particulier qu'un refus de la mise dans le commerce d'organismes génétiquement modifiés pour d'autres raisons que celles reconnues par l'OMC pourrait créer une situation de conflit non négligeable au sein de cette organisation. Le refus d'une autorisation ne serait admissible que si une telle mesure s'avérait nécessaire pour protéger la vie ou la santé de l'homme, des animaux et des plantes, pour protéger l'environnement ou encore pour sauvegarder l'ordre public ou la sécurité nationale. En fixant les modalités des dispositions d'exécution du projet Gen-Lex, il faudra en outre veiller à ce que ces dispositions soient notifiées conformément aux engagements pris au niveau international. On veillera lors de leur application à ce que notamment les procédures pour la détection de modifications génétiques soient non discriminatoires et transparentes, et qu'elles n'entravent pas inutilement le commerce. Nous estimons que s'il est tenu compte des présentes considérations lors des prochaines délibérations sur le projet et lors de l'élaboration des dispositions d'exécution, il y a peu de risque qu'un recours déposé contre la Suisse en raison du projet Gen-Lex obtienne gain de cause.

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