9.2.3

Message concernant l'Accord entre le Conseil fédéral suisse et le Gouvernement de la République socialiste du Vietnam sur la protection de la propriété intellectuelle et la coopération dans ce domaine du 12 janvier 2000

9.2.3.1 9.2.3.1.1

Partie générale Aperçu

La République socialiste du Vietnam (ci-après dénommée : le Vietnam) est un des partenaires privilégiés de la coopération suisse au développement. Ce pays cumule actuellement les problèmes d'un pays en développement et les difficultés que lui vaut sa transition de l'économie planifiée à l'économie de marché. Dans le cadre de sa politique d'ouverture et de libéralisation, le Vietnam a déposé une demande d'adhésion à l'Organisation mondiale du commerce (OMC). La Suisse a déjà conclu plusieurs accords avec le Vietnam, mais aucun d'eux ne porte sur la protection de la propriété intellectuelle. La lacune devrait maintenant être comblée puisque le présent accord traite exclusivement de la propriété intellectuelle et de la coopération dans ce domaine. La Suisse lui donne valeur d'exemple, en ce sens qu'il exprime sa volonté de contribuer activement au développement de pays tels que le Vietnam.

L'accord a été signé le 7 juillet 1999 à Hanoi, après d'intensives négociations.

9.2.3.1.2

Point de la situation

Le Vietnam procède actuellement à des réformes en profondeur dans tous les secteurs. Longtemps coupé du monde, le pays doit même, dans certains domaines, tout reprendre de zéro. A titre d'exemple, le Code civil vietnamien n'est entré en vigueur qu'en juillet 1996. Son adoption même constitue une sorte de révolution. Il règle notamment le droit des personnes, de la famille et de la propriété, le droit foncier et le droit de la propriété intellectuelle. Même si le Vietnam est sans conteste en état de développer la législation dont il a besoin, il lui faudra consentir encore de grands efforts pour mettre pleinement en oeuvre les réformes entamées.

Le pays recèle un potentiel qui suscite la convoitise du monde des affaires international. Il y a longtemps que le Japon, la Corée du Sud, Taïwan et les pays de l'ASEAN sont sur place. L'Union européenne entreprend à son tour de faire valoir les intérêts de ses entreprises face à cette concurrence asiatique. Il va de soi que la France a une longueur d'avance sur ses partenaires européens et s'affirme comme un investisseur déjà solidement implanté. Quant aux Etats-Unis, ils ont établi des relations diplomatiques avec le Vietnam et, dans la foulée, ont rapidement conclu des accords et mis au point des programmes.

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2000-0051

9.2.3.1.3

Relations économiques de la Suisse avec le Vietnam

Les résultats qui, dès 1986 ont commencé de récompenser les efforts d'ouverture et de libéralisation économique du Vietnam, sa situation au coeur d'une des régions les plus dynamiques du monde, ses ressources naturelles encore à exploiter, sa maind'oeuvre abondante concourent à faire du pays un partenaire économique intéressant.

Plusieurs entreprises suisses se sont engagées dès le début des années 90 sur ce marché, notamment par le biais d'investissements à long terme.

La Suisse et le Vietnam ont déjà conclu plusieurs accords économiques : un accord de promotion et de protection réciproque des investissements, en 1992; une déclaration d'intention concernant les domaines de coopération économique, en 1993; un accord de commerce et de coopération économique, en 1993 encore; toujours la même année, des accords relatifs à l'octroi d'un crédit mixte de 25 millions de francs (passé à 35 millions de francs en 1996) et d'une aide à la balance des paiements de 15 millions de francs; et enfin, un accord visant à éviter la double imposition, signé en 1996 et entré en vigueur le 1er janvier 1998. De plus, la Suisse a soutenu en 1993, à raison de 10 millions de francs, une action internationale destinée à financer les arriérés de paiement du Vietnam envers le Fonds monétaire international. En 1998, enfin, un centre pour la promotion des technologies respectueuses de l'environnement, soutenu par la Suisse, a pu être ouvert.

Les relations économiques bilatérales se développent depuis quelques années à un rythme soutenu. La croissance du volume du commerce extérieur s'exprime par un taux à deux chiffres. L'an dernier, les exportations suisses à destination du Vietnam représentaient 83,4 millions de francs, les importations en provenance de ce pays, 83,2 millions de francs. Ses investissements directs, qui totalisent 633 millions de dollars (1997), placent la Suisse au 13 e rang des investisseurs.

La création du réseau d'accords économiques mentionné ci-dessus visait un double objectif: former un cadre juridique adapté au développement rapide des relations économiques et contribuer au soutien des réformes économiques menées par le Vietnam. Ce réseau souffrait toutefois d'une lacune patente au chapitre de la protection de la propriété intellectuelle. Voilà pourquoi le présent accord a été négocié, qui tient notamment compte de l'Accord sur les aspects des droits de propriété intellectuelle qui touchent au commerce («accord ADPIC»), adopté dans le cadre de l'OMC.

9.2.3.2 9.2.3.2.1

Partie spéciale: contenu de l'accord Dispositions matérielles et institutionnelles

L'accord contient des dispositions matérielles et de droit procédural. Pour éviter de rediscuter de notions de base et pour simplifier le processus de négociations, il est fait référence aux dispositions de l'accord ADPIC et à d'autres accords relatifs à la propriété intellectuelle, ce qui a permis de limiter le nombre des dispositions du nouvel accord.

Les parties contractantes s'engagent à assurer une protection adéquate, effective et non discriminatoire des droits de propriété intellectuelle et à édicter à cette fin les dispositions légales nécessaires (voies de droit). La notion de «propriété intellectuelle» inclut les domaines déjà couverts par l'accord ADPIC; mais comme la définition va plus loin ­ elle revêt une forme ouverte ­, il est possible de l'étendre à de 1435

nouveaux domaines (art. 1). La Suisse et le Vietnam confirment les engagements actuels qui leur incombent dans le cadre de l'Organisation mondiale de la propriété intellectuelle (OMPI). Le Vietnam, qui n'est pas encore partie à certains accords, s'engage à entreprendre les démarches pour y adhérer avant le 1er janvier 2002. Ce délai peut toutefois être raccourci ou prolongé à la demande de l'une des deux parties, pour tenir compte des progrès accomplis par le Vietnam et de sa capacité d'adhérer aux accords internationaux, notamment ceux de l'OMC. Quant à l'adhésion aux autres accords (mentionnés dans l'annexe 1 du présent accord), elle fait l'objet d'une clause de «best endeavour» (engagement de tous les efforts possibles). Une clause prévoyant le réexamen périodique de l'annexe 1 assure la souplesse voulue face aux développements du droit de la propriété intellectuelle sur le plan international (art. 2). Les parties contractantes doivent assurer un niveau de protection au moins égal à celui de l'accord ADPIC. Son statut de pays en développement justifie que le Vietnam bénéficie d'une période de transition, dont le terme a été fixé au 31 décembre 2001. Le Vietnam viendrait-il à accorder, avant cette échéance, à un autre pays ou à un groupe de pays un niveau de protection égal à celui qui découle de l'accord ADPIC, qu'il serait tenu d'accorder le même traitement à la Suisse (art. 3).

Deux principes fondamentaux sont rappelés à l'art. 4: le traitement national et la clause de la nation la plus favorisée. Le traitement national signifie que tout ressortissant suisse bénéficie d'un traitement non moins favorable que celui qui est réservé aux Vietnamiens. Actuellement, ce principe n'est pas appliqué strictement, du moins en ce qui concerne les voies de droit. La clause de la nation la plus favorisée doit empêcher que les ressortissants suisses ne soient traités moins favorablement que ceux de n'importe quel Etat tiers. Toute dérogation à ces deux principes doit être conforme aux dispositions de l'accord ADPIC. A la différence de l'art. 3, l'art. 4 vise à assurer la non-discrimination, indépendamment du niveau de protection, qu'il s'agisse de l'application des lois ou de la pratique administrative et judiciaire. Cette disposition continuera en outre à jouer son rôle lorsque le niveau de protection prévu
dans l'accord ADPIC aura été atteint. Il en ira de même lorsque le pays sera devenu membre de l'OMC. L'accord ADPIC ne régissant pas tous les domaines de façon exhaustive, il est tout à fait concevable qu'un jour ou l'autre le Vietnam s'engage, dans un accord bilatéral, à accorder à un pays tiers une protection dans un domaine technologique nouveau (les banques de données, par exemple), auquel cas la Suisse pourrait invoquer la clause de la nation la plus favorisée.

L'accord s'applique également à la Principauté de Liechtenstein aussi longtemps que ce pays est lié à la Suisse par le traité d'union douanière et le traité sur la protection des brevets (art. 5). En cas de divergences d'interprétation ou de difficultés d'application de l'accord, chacune des deux parties peut demander l'ouverture de consultations. Si celles-ci n'aboutissent pas à une solution, on recourra à la voie diplomatique. Etant donné que l'accord de promotion et de protection réciproque des investissements de 1992 (APPI), dont il a déjà été fait mention, contient des dispositions relatives à la protection de la propriété intellectuelle ainsi que son propre mécanisme de règlement des différends, le présent accord contient une règle de conflit (art. 6, al. 3). Celle-ci doit empêcher que la procédure de règlement des différends de l'APPI ne soit déclarée inapplicable en vertu du principe de la «lex posterior» ou de la «lex specialis» (art. 6).

La coopération repose sur le principe de la complémentarité. Les parties contractantes s'engagent, afin d'éviter les redondances, à coordonner leurs efforts avec ceux 1436

d'autres pays donateurs ou d'organisations internationales. La Suisse a approuvé la création d'un programme spécial de coopération (PSC) s'appliquant à la propriété intellectuelle, valable trois ans dans un premier temps. Il viendra appuyer les efforts fournis par le Vietnam en vue d'adhérer à l'OMC. Les grandes lignes du PSC sont fixées dans l'annexe 2 de l'accord (art. 7). Un comité mixte est chargé de préciser les modalités du PSC et de veiller à son exécution; les parties contractantes peuvent se consulter à son propos (art. 8).

L'accord entrera en vigueur lorsque les deux parties se seront notifié l'accomplissement de leurs procédures internes d'approbation. Il pourra être dénoncé à n'importe quel moment, moyennant un préavis de six mois (art. 9).

9.2.3.2.2

Coopération dans le domaine de la propriété intellectuelle

L'expérience en matière de propriété intellectuelle que requiert l'économie de marché faisant défaut au Vietnam à ce stade de son développement, il est indispensable de mettre sur pied un programme de coopération qui l'aide à appliquer les dispositions matérielles de l'accord, afin que celui-ci ne reste pas lettre morte. Le PSC explicité dans l'annexe 2 doit s'appliquer trois ans pour commencer. Le comité mixte qui sera constitué devra définir les besoins et les priorités du Vietnam, établir des programmes de travail et surveiller leur bonne exécution.

Une liste des activités envisagées a été dressée, qui sert de point de départ. Priorité est donnée aux points suivants: modernisation de la législation (principalement dans la perspective de l'adhésion du Vietnam à l'OMC et à d'autres conventions importantes administrées par l'OMPI); formation de personnel qualifié; modernisation de l'infrastructure liée aux technologies de l'information; soutien aux services officiels nationaux désireux de créer des antennes décentralisées. La formation ne sera pas réservée aux seuls collaborateurs de l'Office de la propriété intellectuelle et de l'Office du droit d'auteur, mais s'étendra aux autorités douanières et aux juges. Ces activités doivent aussi attirer l'attention du public sur la nécessité de protéger les innovations et de lutter contre la piraterie.

9.2.3.3

Conséquences financières

L'accord est sans conséquence financière directe sur le budget de la Confédération.

Les dépenses afférentes au programme de coopération dans le domaine de la protection de la propriété intellectuelle seront imputées au cinquième crédit de programme de 960 millions de francs destiné à assurer la continuation du financement des mesures de politique économique et commerciale au titre de la coopération internationale au développement (FF 1996 III 693).

9.2.3.4

Programme de la législature

L'accord est conforme à la teneur de l'objectif 19 (Consolidation de la présence de la Suisse à l'étranger par l'élargissement et l'approfondissement des relations bilatérales et multilatérales) et se range parmi les projets mentionnés sous les objets par-

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lementaires 1995­1999 (A 2, Relations internationales) du rapport sur le Programme de la législature 1995­1999 (FF 1996 II 289).

9.2.3.5

Relation avec les autres instruments de la politique commerciale et avec le droit européen

L'accord s'inscrit dans le processus d'intégration du Vietnam dans le système commercial multilatéral et est lié à sa demande d'adhésion à l'OMC. Il se fonde au premier chef sur l'accord ADPIC et sur les conventions internationales administrées par l'OMPI. Il concorde donc avec les engagements qui incombent à la Suisse en vertu de ces conventions.

L'accord n'est pas en relation avec le droit communautaire ni avec les engagements découlant de l'AELE. Il n'y a donc aucune incompatibilité avec le droit européen.

En matière de coopération, l'accord implique une complémentarité et une coordination avec les autres pays donateurs et les organisations intergouvernementales (ce qui inclut l'Union européenne).

9.2.3.6

Validité pour la Principauté de Liechtenstein

L'accord s'applique à la Principauté de Liechtenstein, aussi longtemps que ce pays est lié à la Suisse par une union douanière (art. 5).

9.2.3.7

Constitutionnalité

L'arrêté fédéral se fonde sur la compétence générale de la Confédération en matière de politique extérieure, prévue à l'art. 54, al. 1, de la constitution. La compétence de l'Assemblée fédérale d'approuver les traités internationaux découle de l'art. 166, al. 2, de la constitution. L'accord en question peut être dénoncé à n'importe quel moment moyennant un préavis de six mois. Il n'implique ni une adhésion à une organisation internationale, ni une unification multilatérale du droit. L'arrêté fédéral soumis à votre approbation n'est donc pas sujet au référendum facultatif au sens de l'art. 141, al. 1, let. d, de la constitution.

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