Circulaire du Conseil fédéral aux gouvernements cantonaux concernant certains problèmes survenus lors des élections au Conseil national du 24 octobre 1999 du 29 mars 2000

Mesdames et Messieurs les Présidents, Mesdames et Messieurs les conseillers d'Etat, Le 24 octobre 1999, les élections en vue du renouvellement intégral du Conseil national pour la 46e législature ont généralement eu lieu dans de bonnes conditions.

Des difficultés ont cependant été constatées ici et là. A ce propos, le Conseil national a fait part de ses objections par la voix des rapporteurs du Bureau provisoire et a expressément invité le Conseil fédéral à attirer l'attention des cantons sur l'importance d'une bonne organisation de la procédure électorale (BO 1999 N 2371s.). C'est la raison d'être de cette circulaire.

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A propos des art. 5 à 8, 33, 34 et 38, al. 1, let. b, LDP: Carences dans l'organisation de l'impression et de la distribution du matériel électoral

11 Rappel des faits 111 Les bulletins électoraux doivent désormais être imprimés sous la direction des autorités cantonales Le droit fédéral n'autorise que des bulletins électoraux officiels (art. 5, al. 1, et art. 38, al. 1, let. b, de la loi fédérale du 17 décembre 1976 sur les droits politiques [LDP, RS 161.1]). Ceux-ci doivent être imprimés par les cantons et comprennent des bulletins électoraux sans impression et des bulletins portant la dénomination de toutes les listes électorales (art. 33, al. 1, LDP).

Conformément à une tradition provenant du droit électoral cantonal, quelques cantons ont laissé aux partis le soin d'imprimer les bulletins électoraux officiels (chaque parti dispose d'un bulletin électoral qui est toujours de la même couleur pour toutes les élections et à tous les niveaux) en leur remboursant les frais d'impression, le contrôle ainsi que la remise du bon à tirer restant cependant du ressort d'une instance cantonale. En 1999, une liste obtint de son imprimerie, après la remise du bon à tirer officiel donné par l'administration cantonale sur la base du premier choix intervenu au sein du parti, une permutation de l'ordre de deux candidatures sur son bulletin électoral et cela sans que l'administration cantonale n'en ait été informée.

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112 Distribution postale tardive du matériel électoral Dans plusieurs quartiers d'une grande ville, le matériel électoral n'était pas encore parvenu à tous les électeurs dix jours avant le 24 octobre 1999, contrairement aux dispositions claires de la loi (art. 33, al. 2, LDP). En l'espèce, la poste avait été dépassée par la masse de documents qui lui avaient été remis le 27 septembre 1999 et cela d'autant plus qu'il y avait encore beaucoup de propagande électorale à distribuer avant les élections.

113 Emballage erroné du matériel électoral par des classes d'école Dans une commune, des classes d'école ont été chargées de l'emballage du matériel électoral. Au lieu d'un empaquetage individuel soigné, il a fallu constater que plusieurs cartes de légitimation différentes avaient parfois été envoyées à la même personne alors que d'autres électeurs ne recevaient pas le matériel nécessaire.

114 Distribution de jeux de bulletins électoraux incorrects Suite à une inadvertance survenue dans une imprimerie, des jeux de bulletins électoraux partiellement incorrects ont été distribués au début du mois d'octobre dans deux cantons. Dans l'un d'entre eux, le verso du bulletin électoral de deux listes avait été partiellement imprimé par une autre liste alors que d'autres listes manquaient ou restèrent sans impression.

115 Eviter tout privilège dans le placement des bulletins électoraux dans l'isoloir Dans un recours déposé dans une commune, un électeur a fait valoir que les bulletins électoraux de l'ensemble des listes de candidats n'étaient pas tous placés de manière visible dans l'isoloir.

12 Problèmes 121 Les voies parallèles mises en place pour l'impression des bulletins électoraux ne peuvent plus être tolérées parce qu'elles peuvent sérieusement compromettre la transmission correcte des résultats de l'élection, en particulier si l'administration cantonale, en se fondant sur l'ordre figurant sur la liste présentée pour le bon à tirer, a déjà fait imprimer l'ordre des candidats sur les formules officielles de transmission des résultats qui ont ensuite été distribuées à toutes les communes. Il en va de même pour les programmes TED s'ils sont chargés avec l'ancien ordre des candidats et transmis à la Confédération et aux administrations des districts.

122 L'énorme quantité de travail "due aussi à des restrictions
de personnel" a conduit la poste à enregistrer parfois des retards de livraison. Selon la jurisprudence constante du Tribunal fédéral, une surcharge de travail ou un manque de personnel ne constitue pas une excuse valable car l'Etat doit mettre à disposition les moyens matériels nécessaires qui assurent son fonctionnement normal. L'autorité de surveillance, indépendamment d'un éventuel recours, est tenue d'intervenir d'office et ne saurait s'en tenir à une simple

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constatation des faits: elle doit au contraire veiller à remédier à cette situation (ATF 107 Ib 165, 107 III 6s, 103 V 198, 101 Ia 244s; JAAC 52.52, 44.21; ZBl 80 [1979] 476).

123 Lorsque des classes d'école sont chargées de l'emballage du matériel électoral, l'administration communale doit assurer les contrôles nécessaires.

124 L'argument qui veut que lorsqu'il y a de nombreuses listes de candidats qui ne peuvent pas toutes être placées de manière lisible au-dessus de la pile dans l'isoloir et que seuls les partis représentés jusqu'à présent au Conseil national peuvent entrer en considération pour une telle place, n'est pas convaincant du point de vue du droit électoral.

13 Instructions En prévision des prochaines élections au Conseil national, nous vous prions dès lors de mieux respecter les articles 5 à 8, 33 et 34 LDP, et d'offrir les garanties suivantes: 131 Conformément à l'article 33, alinéa 1, LDP, tous les bulletins de vote doivent dorénavant être imprimés par le gouvernement cantonal. Cela n'implique nullement l'abandon du système du bulletin électoral d'une couleur spécifique selon le parti.

132 Les cantons doivent convenir avec la poste des délais de livraison et de distribution, tout au moins pour les communes à forte population.

133 Les cantons doivent s'assurer que les communes qui transfèrent l'exécution de tâches en rapport avec les élections au Conseil national ou qui les délèguent à un quelconque organe, sauvegardent la responsabilité qui leur a été transmise et garantissent le bon déroulement des élections tout au moins par des contrôles appropriés et efficaces.

134 Plusieurs cantons devront au besoin avancer d'une semaine la date limite du dépôt des listes de candidats et l'impression des jeux des bulletins électoraux afin d'empêcher que ces derniers soient imprimés et distribués de manière incorrecte.

135 On peut exiger des communes ne disposant que de peu de place dans l'isoloir qu'elles le munissent le cas échéant de casiers postaux de telle sorte que les bulletins électoraux des listes de candidats puissent être tous placés de manière visible et mis sur un pied d'égalité.

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A propos de l'art. 7 LDP: Surveillance des boîtes aux lettres communales utilisées lors du vote anticipé

21 Rappel des faits Un inconnu a soustrait d'une boîte aux lettres communale 101 votes anticipés qu'il a fait parvenir de manière anonyme avec une lettre d'accompagne2251

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ment à trois candidat(e)s au Conseil national. Les électeurs concernés avaient glissé le matériel électoral dans la boîte aux lettres communale en temps utile, avant la fermeture des urnes. Les votes y ont été dérobés à une date antérieure au dimanche électoral fixé au 24 octobre 1999.

22 Problème Le droit de vote garanti par la constitution donne aux électrices et aux électeurs le droit d'exiger que le résultat d'une votation ou d'une élection ne soit reconnu que s'il est l'expression fidèle et sûre d'une volonté librement exprimée par le corps électoral (art. 34, al. 2, cst.). La soustraction des votes anticipés de la boîte aux lettres communale constitue donc une violation du droit de vote des personnes concernées.

Le déroulement correct du scrutin reste sous la responsabilité de l'administration communale et cela même lorsqu'il y a possibilité de voter de manière anticipée dans une boîte aux lettres communale. La capacité insuffisante de la boîte aux lettres communale ne peut pas être invoquée comme justification dans des circonstances qui permettent le vol du matériel électoral rempli et déposé.

23 Instructions En prévision des prochaines élections au Conseil national, nous vous prions dès lors d'exiger un meilleur respect des articles 5 à 8 LDP, de vous assurer, pour ce qui est du vote anticipé, que les boîtes aux lettres communales aient une grandeur appropriée et de garantir un nombre de levées suffisant pour exclure toute tentative de vol du matériel électoral ou du matériel de vote.

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A propos des art. 21, 27, al. 1 et 29, al. 4, LDP: Eviter toute lacune dans la procédure de dépôt des listes de candidats

31 Rappel des faits 311 Eviter les doubles candidatures Lors des élections au Conseil national de 1999, la Chancellerie fédérale a aussi dû intervenir afin d'empêcher la double candidature d'une personne sur deux listes différentes du même canton, double candidature qui avait échappé aux autorités cantonales.

312 Retards dûs à l'offre élargie des prestations proposées par l'administration cantonale Par souci de convivialité, plusieurs administrations cantonales s'étaient proposées de requérir elles-mêmes l'attestation de la qualité d'électeur des candidats et des signataires des listes de candidats.

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32 Problèmes 321 L'interdiction d'une double candidature à l'intérieur du même canton est une condition absolument nécessaire de la procédure d'élection au moyen de listes selon le système proportionnel en vigueur en Suisse: une double candidature qui n'est pas découverte dans la procédure régissant les listes de candidats conduit à une situation inextricable lors du dépouillement des résultats de l'élection, en particulier lorsque des bulletins sans impression remplis à la main apparaissent avec le nom de la candidature en question; à laquelle des deux listes - forcément concurrentes - les suffrages de cette candidature devront-ils être attribués comme suffrages de parti? Ce contrôle est particulièrement difficile dans les grands cantons, spécialement en période de stress. On ne saurait toutefois remédier à cette situation en procédant à de simples contrôles comparatifs par le TED comme le prouve l'année de naissance erronée donnée à deux reprises dans l'exemple cité.

322 Le but de la réglementation fédérale qui veut que les cantons fixent une date limite pour le dépôt des listes de candidats (art. 21 LDP) d'une part et que seuls des électeurs ou électrices sont habilités à signer et/ou à se porter candidat(e) (art. 22, al. 2 et art. 24 LDP) d'autre part, est de garantir que les attestations nécessaires seront bien présentées à cette date. Ce procédé est nécessaire parce que la Chancellerie fédérale doit éviter les doubles candidatures extra-cantonales (art. 27, al. 2, LDP). Cela n'est possible que s'il existe une combinaison correcte et conforme aux délais prescrits de tous les processus cantonaux.

33 Instructions En prévision des prochaines élections au Conseil national, nous vous prions dès lors de mieux respecter les articles 27 et 29 LDP et d'offrir les garanties suivantes: 331 En plus des contrôles comparatifs effectués par le TED, toutes les candidatures doivent faire l'objet d'un contrôle minutieux avec la "main" et les "yeux" et cela dans tous les cantons.

332 Au cours de la période en question, chaque canton doit par conséquent pouvoir disposer de tout le personnel nécessaire.

333 Les cantons qui offrent des prestations plus étendues doivent avancer d'une semaine si nécessaire la date limite du dépôt des listes de candidats et l'impression des jeux des bulletins électoraux. Les
attestations de la qualité d'électeur doivent être présentées à la date limite du dépôt des listes de candidats, date qui est obligatoirement communiquée aux autorités fédérales.

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A propos des art. 23, 25, al. 2, 27, al. 1, 29, al. 1, 3 et 4, ainsi que les art.

31 al. 1bis et 83 LDP: Une dénomination principale identique de différentes listes n'est pas admissible (aucune possibilité pour le canton de combler une lacune contra legem)

41 Rappel des faits 411 Situation initiale Dans un canton, deux listes concurrentes choisirent la même dénomination principale sans que ces listes ne conduisent à un sous-apparentement. Le service cantonal des votations et élections ayant exigé, dans le cadre de la mise au point des listes, soit de sous-apparenter les listes soit de modifier ou d'abandonner la dénomination principale, les deux listes formèrent un recours auprès du Conseil d'Etat.

412 Décision du Conseil d'Etat Le Conseil d'Etat jugea qu'il y avait lieu d'admettre partiellement les deux recours et de renoncer à exiger une modification de la dénomination de l'une ou des deux listes et cela même si aucun sous-apparentement ne devait être conclu. Pour justifier sa décision, le Conseil d'Etat considéra notamment que: a) Pour apprécier le cas d'espèce, les autorités cantonales jouissent d'une certaine marge d'appréciation tant juridique que politique; b) L'ordre chronologique du dépôt des listes de candidats n'est pas déterminant en ce qui concerne la dénomination des listes; c) Une adaptation de la dénomination d'une liste de candidats peut s'avérer d'autant plus utile qu'elle permettra de légitimer d'éventuels apparentements; l'article 29, alinéa 4, LDP, prévoit d'ailleurs explicitement une telle adaptation; d) Ainsi, des défauts subséquents pourraient-ils aussi devoir être corrigés; e) La bonne foi exigeait que les deux formations gardent leur dénomination surtout s'il n'y a pas eu de mise en garde sur les conséquences juridiques; f) La désignation d'une liste mère sans qu'il y ait sous-apparentement est illicite; g) Une décision portant sur la répartition des suffrages complémentaires provenant de bulletins électoraux désignés de façon insuffisante ne peut être exigée que pour les listes d'un même parti mais pas pour les listes de partis différents; h) On ne peut pas exiger un sous-apparentement pour des listes portant la même dénomination; i) Le logo utilisé habituellement dans le canton différencie suffisamment les deux listes portant partiellement la même dénomination; j) Les suffrages complémentaires escomptés provenant de listes électorales dont la dénomination est imprécise pourraient être négligés.

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42 Problème 421 Dans le cas d'espèce, l'argumentation développée par le Conseil d'Etat n'a pas remis en question le résultat des élections au Conseil national du 24 octobre 1999: Suite à la décision du Conseil d'Etat, la Chancellerie fédérale avait exigé, en tant que mesure immédiate destinée à sauvegarder des moyens de preuve, un décompte de tous les bulletins électoraux qui ne porteraient que la dénomination principale commune des deux listes. Ce n'est au total que deux bulletins électoraux portant une telle dénomination qui ont été dénombrés dont un seul comportait quatres lignes blanches; ne pouvant pas être classées parmi les suffrages complémentaires, ces lignes ont par conséquent été rangées parmi les suffrages blancs. Ces quatre suffrages-là n'ont pas influencé le résulat réel dans un sens ou dans un autre.

422 Toutefois, les arguments invoqués par le Conseil d'Etat dans la présente décision ne sont pas, à plusieurs égards, conformes au droit fédéral. Le Conseil national n'est plus disposé à protéger à l'avenir une telle interprétation de la loi et exige une mise au point du Conseil fédéral afin que l'application correcte de la loi fédérale sur les droits politiques ne soit pas compromise à la suite du précédent ainsi créé par la décision.

423 Il s'agit en particulier des points suivants: a) Les élections au Conseil national sont des élections qui sont régies par le droit fédéral. Si le droit cantonal peut le compléter, il ne peut en aucun cas avoir un caractère correctif (art. 83 LDP).

b) Si l'article 23 LDP exige qu'une distinction claire soit faite entre toutes les dénominations de listes, l'article 31, alinéa 1bis, LDP, demande par contre que la dénomination de la liste principale soit identique pour toutes les listes sous-apparentées. Les articles 23 et 31, alinéa 1bis, LDP, sont exactement complémentaires. Ils ne laissent aucune place à une quelconque lacune qui devrait être comblée. Le fait que les dénominations des listes de candidats resp. des listes électorales doivent être choisies de manière à pouvoir être différenciées pour ne susciter aucune image erronée et n'engendrer aucune confusion, est garanti par le droit constitutionnel: Le droit de vote reconnaît en effet à tout citoyen la faculté d'exiger que le résultat d'une élection ne soit reconnu que s'il est l'expression
fidèle et sûre de la libre volonté des citoyens (cf. explicitement à l'art. 34, al. 2, cst.; en tant que droit constitutionnel non écrit dans l'ancienne constitution, cf. ATF 124 I 57, 121 I 190 c. 3a, 12 c. 5b aa, 119 Ia 272 c. 3a et la jurisprudence constante antérieure).

c) Un sous-apparentement n'est admis d'après la loi que dans le cadre d'un seul et même parti. Cette condition est assurée par l'identité de la dénomination principale.

d) Des groupements autonomes qui veulent "s'associer" uniquement pour les élections au Conseil national en tant qu'"ailes d'appartenance" différentes d'un "même" "parti" doivent le faire avant le dépôt de leurs listes en choisissant une dénomination principale et commune des listes: le lé-

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e)

f)

g)

h)

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gislateur l'a d'ailleurs voulu ainsi (cf. BO 1993 N 2486s.). Pour toutes les autres listes, c'est la disposition de l'article 23 LDP qui s'applique, laquelle exige que toute liste de candidats porte une dénomination qui la distingue des autres listes. Une modification de noms de listes après le dépôt des listes de candidats n'est admissible que sur la base d'une sommation officielle destinée à assurer la distinction.

Le canton examine les listes de candidats et accorde au mandataire des signataires un délai au cours duquel il pourra modifier des indications susceptibles de prêter à confusion (art. 29, al. 1, LDP). Le mandataire ou, s'il en est empêché son suppléant, a le droit et l'obligation de donner, au nom des signataires de la liste et de manière à les lier juridiquement, toutes les indications permettant d'éliminer les difficultés qui pourraient se produire (art. 25, al. 2, LDP). Si un défaut n'est pas supprimé dans le délai imparti, la liste est déclarée nulle (art. 29, al. 3, LDP).

Un résultat électoral serré ne peut jamais être exclu à l'avance. Cela vaut autant pour les élections au Conseil des Etats que pour les élections au Conseil national dans le système proportionnel car ici, les suffrages peuvent se répartir entre les partis et les candidatures les plus divers (cf.

FF 1975 II 2036, 1999 8714).

Le fait de neutraliser des suffrages complémentaires provenant de bulletins électoraux désignés de manière insuffisante en faveur de l'une des deux listes concurrentes portant la même dénomination principale en les considérant comme des suffrages blancs, échappe déjà au libre arbitre des deux partis puisqu'une telle décision aurait pu léser des tiers à qui la décision du Conseil d'Etat n'avait pas été communiquée: Si, dans le cas d'espèce, les deux groupements avaient obtenu assez de suffrages pour décrocher leur propre mandat, cela aurait eu pour conséquence, en cas d'abandon des suffrages complémentaires provenant de bulletins électoraux désignés de manière insuffisante, de déposséder l'un des partenaires de l'apparentement des suffrages décisifs pour l'obtention d'un mandat restant supplémentaire. Par conséquent, une partie de la volonté clairement manifestée des électeurs n'aurait à coup sûr pas été satisfaite par la conversion des suffrages complémentaires en suffrages blancs (cf. art.
34, al. 2, cst.). Une telle attitude viole par conséquent aussi le principe de la bonne foi (cf. art. 5, al. 3, cst.) à l'encontre des partenaires de l'apparentement.

On leur retire les éventuels suffrages restants qui étaient disponibles grâce à l'apparentement alors que les deux listes concurrentes portant la même dénomination principale avaient entièrement reçu ceux de leurs partenaires! C'est une raison supplémentaire qui fait que ce procédé n'aurait pas dû obtenir la protection juridique du Conseil d'Etat. En tant que personnes potentiellement touchées et atteintes par cette décision, le Conseil d'Etat aurait dû au moins la notifier aux autres partenaires de l'apparentement des deux listes concurrentes portant la même dénomination principale.

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i) La décision précitée annihile de manière illicite les conditions clairement posées par la législation en matière de sous-apparentements, ces derniers servant précisément à éviter ce qui avait été redouté lors des débats parlementaires (cf BO 1993 N 2486s). Le sens précis de la classification des différents suffrages dans le droit électoral a notamment été méconnu; la restriction juridique claire du sous-apparentement a un objectif précis: une plus grande transparence. Seule l'identité de la dénomination principale donne droit au sous-apparentement. Ce dernier doit être assuré avant le dépôt de la liste de candidats. Si le sous-apparentement n'est pas conclu, les listes de candidats doivent porter une dénomination qui les distingue clairement des autres listes au sens de l'art. 23 LDP. Des logos ne remplacent pas un tel devoir.

Comme l'écrit le Conseil d'Etat, l'Etat ne peut naturellement pas extorquer la conclusion d'un sous-apparentement mais il doit alors - contrairement à ce que prétend le Conseil d'Etat - imposer une distinction claire quant à la dénomination des listes de candidats.

j) Contrairement à ce qui a été prétendu dans la décision précitée, le droit constitutionnel garanti à tout citoyen et selon lequel le résultat d'une élection ne doit pas être reconnu s'il n'est pas l'expression fidèle et sûre de la libre volonté des citoyens, exclut tous les suffrages dont la prise en considération pourrait être laissée par l'Etat au libre arbitre des partis. La décision du législateur de rendre impossible les doubles candidatures dans le même canton montre l'importance accordée à ce principe (art.

27, al. 1, LDP; cf. ch. 311 et 321 ci-dessus).

43 Instructions Le Conseil national n'est désormais plus disposé à protéger des décisions de première instance prises en matière électorale et qui se trompent radicalement sur les normes juridiques applicables aux élections fédérales. En prévision des prochaines élections au Conseil national, nous vous prions dès lors de mieux respecter les articles 23 et 31, alinéa 1bis, LDP et de tenir compte des points suivants dans la mise au point des listes de candidats: 431 Si différents groupements ou partis veulent utiliser une dénomination principale identique, ils doivent désigner une liste mère. Une décision portant sur la répartition des suffrages
complémentaires provenant de bulletins électoraux désignés de façon insuffisante doit aussi être exigée, en particulier pour les listes de partis différents.

432 Aucun suffrage complémentaire ne peut être neutralisé (sans avantage ou préjudice pour quiconque).

433 Par contre, l'adaptation de la dénomination de la liste ne doit justement pas légitimer d'éventuels apparentements; l'article 29, alinéa 4, LDP, ne permet de procéder à des modifications que pour autant qu'elles aient été requises par le canton.

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A propos de l'art. 40, al. 1, LDP: Calcul correct du chiffre de répartition

51 Rappel des faits Dans les feuilles officielles de plusieurs cantons, le chiffre de répartition pour l'attribution des mandats dans le cadre d'un apparentement n'a pas été publié sur la base d'un calcul correct: La division du nombre total des suffrages de toutes les listes en présence par le nombre des mandats à attribuer plus un ayant donné un nombre entier, ce n'est pas le nombre entier immédiatement supérieur qui a constitué le chiffre de répartition .

52 Problème Que cela ne soit pas le nombre entier immédiatement supérieur qui ait constitué le chiffre de répartition aurait pu conduire, dans des circonstances moins favorables, à ce que l'on doive attribuer davantage de mandats qu'il n'y en avait à disposition (cf. FF 1993 III 452). Un tel oubli ne doit dès lors plus se reproduire.

Correctement rédigé, l'article 17, alinéa 1, de la loi fédérale du 14 février 1919 concernant l'élection du Conseil national (RO 35 363; RS 1 168) avait été transformé en 1976, dans le sens d'une "nouvelle rédaction ne modifiant pas le fond" (FF 1975 I 1361), en un article 40, alinéa 1, LDP, de telle sorte que le quotient "nombre total de suffrages : (nombre de mandats à attribuer + 1)" devait être "arrondi" au nombre entier supérieur: or, un nombre entier ne peut pas être arrondi. A la suite de la découverte de cette erreur législative, le risque de devoir faire face à une situation inconstitutionnelle fut évité en corrigeant, en 1994, la loi fédérale sur les droits politiques. Toutefois et malgré des explications détaillées dans le message (FF 1993 III 452s.), cette correction ne fut, par mégarde, pas reprise dans le texte de loi italien (et exclusivement dans celui-ci) de la modification du 18 mars 1994.

53 Instructions 531 En prévision des prochaines élections au Conseil national, nous vous prions dès lors d'observer scrupuleusement l'article 40, alinéa 1, LDP et de calculer le chiffre de répartition de manière correcte et conforme au texte de la loi: cela vaut aussi pour la programmation du TED et pour la répartition des mandats entre listes apparentées.

532 De son côté, le Conseil fédéral proposera aux Chambres fédérales, dans le cadre du prochain message concernant la modification de la législation fédérale correspondante, une rédaction correcte du point de vue linguistique et mathématique de la version italienne de l'article 40, alinéa 1, LDP.

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A propos des art. 78 et 86 LDP ainsi que du devoir de transmission: Principes régissant l'instruction de recours touchant les droits politiques

61 Rappel des faits Dans une commune, un électeur forma un recours électoral, recours envoyé par fax, non signé et formulé de manière partiellement confuse; le recourant sollicitait un entretien auprès du chef du département compétent afin de pouvoir lui exposer ses critiques. C'est à juste titre que le Conseil d'Etat n'entra pas en matière.

62 Problème Parce qu'il n'a pas été signé et qu'il a été envoyé trop tard et uniquement par fax (cf. à ce sujet ATF 121 II 252), ce recours souffre de fautes formelles décisives qui justifient à plus d'un titre une décision de non entrée en matière.

L'exposé des motifs, l'indication des voies de recours ainsi que la décision sur les dépens comportent des arguments pertinents mais également plusieurs éléments critiquables dans un Etat fondé sur le droit.

63 Instructions En prévision des prochaines élections au Conseil national, nous vous prions dès lors d'observer scrupuleusement les articles 78 et 86 LDP ainsi que le devoir de transmission à l'autorité compétente et de prescrire ce qui suit s'agissant de l'instruction des recours: 631 Le dépôt d'un recours auprès du département chargé de son instruction en lieu et place du gouvernement cantonal ne constitue en principe pas un motif de non entrée en matière ou de rejet. Un recours électoral déposé auprès d'une autorité cantonale incompétente doit au contraire être transmis sans délai au gouvernement cantonal. On ne peut tout au plus déroger à ce devoir de transmission qu'en présence d'une réglementation cantonale prévoyant expressément une solution différente (ATF 118 Ia 243s.).

632 En matière de recours électoral adressé au gouvernement cantonal, le législateur, à l'article 78 LDP, se contente d'exiger du recourant que "le mémoire de recours soit motivé par un bref exposé des faits". Le recourant doit donc indiquer avec suffisamment de précision le lieu et le moment où les faits contestés se sont produits. Toutefois, l'autorité de recours doit déterminer d'office les faits et appliquer d'office le droit en rendant son jugement.

633 Lorsque l'indication des voies de recours d'un gouvernement cantonal indique dans la décision sur recours que ce dernier doit être déposé en autant de doubles qu'il y a d'intéressés, une telle formulation n'apparaît pas seulement peu conviviale pour le citoyen et en contradiction
avec le souhait explicitement exprimé par le Conseil fédéral le 13 janvier 1999 mais elle est carrément prohibitive, peu claire et chicanière. S'agissant d'une élection fédérale, le gouvernement cantonal doit s'en tenir aux prescriptions de la législation fédérale. Des prescriptions supplémentaires plus contraignantes ne peuvent pas se justifier eu égard à la constitution fédérale.

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634 Toutes les décisions prises sur des recours qui ne sont pas dilatoires ou contraires à la bonne foi sont gratuites (art. 86 LDP; JAAC 60.72, ch. 4.1 et 4.2).

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Transfert de données à des fins statistiques Comparées aux précédentes élections au Conseil national, celles de 1999 ont connu de plus gros problèmes lors du transfert des données à l'Office fédéral de la statistique et lors de la saisie des données. Cet Office prendra directement contact avec les cantons concernés en temps voulu.

Nous vous prions d'agréer, Mesdames et Messieurs les Présidents, Mesdames et Messieurs les conseillers d'Etat, l'assurance de notre haute considération.

29 mars 2000

Au nom du Conseil fédéral suisse: Le président de la Confédération, Adolf Ogi La chancelière de la Confédération, Annemarie Huber-Hotz

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