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FEUILLE FÉDÉRALE 99* année

Berne, le 17 juillet 1947

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Paraît, en règle générale, chaque semaine.

Prix: 28 francs par an; 15 francs pour six mois, plus la taxe postale d'abonnement ou de remboursement.

Avis: 50 centimes la ligne ou Bon espace; doivent être adressée franco & l'imprimerie des hoirs K.-J. Wyss société anonyme, à Berne.

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MESSAGE du

Conseil fédéral à l'Assemblée fédérale sur le projet d'arrêté concernant l'abrogation de la concession du chemin de fer Uerikon--Bauma et l'acquisition du tronçon Hinwil--Bäretswil--Bauma par la Confédération.

(Du 15 juillet 1947.)

Monsieur le Président et Messieurs, Invoquant la loi du 6 avril 1939 sur l'aide aux entreprises privées de chemins de fer et de navigation (RO 55, 1318) et la loi du 15 octobre 1897 concernant l'acquisition et l'exploitation de chemins de fer pour le compte de la Confédération, ainsi que l'organisation de l'administration des chemins de fer fédéraux (RO 16,529), le Conseil d'Etat du canton de Zurich a demandé au Conseil fédéral par lettre du 3 février 1944 qu'une subvention fût accordée au chemin de fer Uerikon--Bauma pour l'électrification et le renforcement de la superstructure du tronçon Hinwil--Bäretswil--Bauma. Le tronçon serait cédé gratuitement à la Confédération une fois l'électrification achevée.

Ces mesures constituent une partie du projet d'ensemble adopté par le peuple zurichois le 26 mai 1946 pour la réorganisation des chemins de fer secondaires de l'Oberland zurichois (Uerikon--Bauma, Wetzikon--Meilen, Uster--Oetwil). Avant de motiver de façon détaillée notre projet d'arrêté ci-joint sur l'acquisition du tronçon Hinwil--Bäretswil--Bauma par la Confédération, nous désirons émettre quelques considérations générales sur le projet de réorganisation de ces chemins de fer.

I.

LA RÉORGANISATION DES CHEMINS DE FER DE L'OBERLAND ZURICHOIS Les deux chemins de fer routiers Wetzikon--Meilen et Uster--Oetwil servent avant tout au trafic local. Le chemin de fer à voie normale Uerikon-- Feuille fédérale. 99e année. Vol. II.

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Bauma, devait, dans l'idée de son créateur Guyer-Zeller, canaliser te trafic entre la Suisse centrale et la Suisse du nord-est. Ces trois petits chemins de fer secondaires ont déçu les espérances qu'on avait mises en eux. Dès le début, ils ont eu beaucoup de pein« à assurer leur existence. La ligne Uerikon--Bauma n'est pas devenue la liaison principale avec le nord-est de là Suisse, de sorte que l'entreprise a dû se contenter, comme les deux chemins de fer routiers, d'un trafic local et de raccordement vraiment fort modeste et demeuré, lui aussi, très au-dessous des prévisions. Dans d'autres régions, l'établissement de chemins de fer a rendu les communes plus peuplées et plus riches. Ici, rien de semblable ne s'est passé. La population n'a pas augmenté, l'économie est demeurée stagnante. Le recensement de 1941 a même établi que le nombre des habitants avait baissé depuis dix ans. Dans ces conditions, les trois chemins de fer n'ont eu à transporter ni suffisamment de marchandises, ni suffisamment de voyageurs. Leur situation s'aggrava encore notablement lorsque se fit sentir la concurrence de l'automobile.

Etant donné ce faible trafic, les résultats d'exploitation n'ont jamais été satisfaisants. Depuis que, la guerre finie, la concurrence de l'automobile a recommencé de se faire sentir, on peut s'attendre à une nouvelle diminution des recettes. Si, malgré cette situation, les trois entreprises ont pu poursuivre leur exploitation jusqu'ici, cela est dû seulement à l'esprit d'économie de leurs directions et à l'appui répété de la Confédération, du canton de Zurich et des communes.

Béstdtats d'exploitation.

ANNÉE

UERIKON--BAUMA Bénéfice d'exploitation

fr.

1929

t

1831

Définit d'exploitation

fr.

WETZIKON--MEILEN Bénéfice d'exploitation

fr.

19700 13500 700

USTER-- OETWIL

Déficit Bénéfice d'exploitation d'exploitation

fr.

fr.

Déficit d'exploitation fr.

400

5800 1932 .

3083 3700 9874 1938 , 300 4000 1939 .

603 500 900 1940 . 103 900 600 1941 t 1259 1500 9800 863 1942 6600 11600 19025 1943 .

24500 14700 15 346 1944 .

19917 34376 29734 1945 .

Si l'on considère que les amortissements, et versements annuels aux fonds de réserve, s'élevant, d'après les informations les plus récentes, à 27 300 francs pour l'Uerikon--Bauma, à 38 300 francs pour le Wetzikon-- Meilen, et à 16200 francs pour l'Uster--Oetwil, ne sont pas englobés

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dans ces résultats d'exploitation, on conviendra sans peine que la situation financière de ces chemins de fer est tout à fait désespérée. Dans le cas du Wetzikon--Meilen, il faut considérer comme perdus non seulement le capital-actions de 630 000 ffrancs, mais encore le capital-obligations, y compris les créances pour lesquelles les communes possèdent un droit de recours, pour un total de 600000 francs. Au cours d'un assainissement opéré pendant les années 1920 et suivantes, l'Uster--Oetwil avait réduit la valeur nominale de son capital-actions à 10 pour cent; au cours d'un second assainissement en 1939, il annula totalement le capital étranger de 340 000 francs engagé dans l'entreprise. Il aura bientôt consommé la réserve créée par ces mesures, laquelle s'élevait encore à 187 000 francs à la fin de 1939, mais à 80 700 francs seulement à la fin de 1945. L'Uerikon--Bauma enfin, qui dut recourir à un assainissement déjà en 1907, présentait à la fin de 1938 un bilan dont le solde passif était de 770700 francs. Le solde passif du bilan était de 994 400 francs à la fin de 1945.

A cette détresse financière vient s'ajouter le fait que l'état des chemins de fer eux-mêmes, du point de vue technique, laisse beaucoup à désirer. Les résultats d'exploitation n'ayant pas permis des dépenses, même urgentes, d'entretien et de renouvellement, l'équipement technique et le matériel roulant sont devenus désuets et ne peuvent plus répondre à des exigences même modestes en fait de communications. Dans le cas des deux chemins de fer routiers, le fait que leur tracé n'est distinct de la route que sur des distances très réduites gêne gravement la circulation routière et, de plus, ne permet pas une vitesse de marche qui réponde aux exigences actuelles.

La traction à vapeur de l'Uerikon--Bauma manque de souplesse. Si économe que la direction se montre, elle est en outre beaucoup trop coûteuse. Par suite du mauvais état des installations et du matériel roulant, la vitesse des trains est insuffisante, ce qui a entre autres pour conséquence des correspondances souvent défectueuses aux gares de jonction.

Cette détresse financière et le délabrement technique des installations ont rendu la, réorganisation des chemins de fer de l'Oberland zurichois absolument indispensable. II était cependant d'emblée manifeste que ces entreprises
ne pourraient, par leurs propres moyens, procéder à leur assainissement et à leur réorganisation; elles étaient contraintes de recourir à l'aide de la Confédération, du canton et des communes. L'initiative de la réorganisation fut d'ailleurs prise par le gouvernement zurichois, qui décida, déjà le 25 août 1938, de charger un spécialiste d'étudier à fond les questions économiques et de communications qui se posaient à propos des chemins de fer secondaires du canton de Zurich, afin de poser des principes pour la réorganisation des différents chemins de fer et de préparer un assainissement qui soit dans l'intérêt de toute l'économie zurichoise.

M. H. Hurlimann, ingénieur, directeur du chemin de fer de Frauenfeld à Wil, fut chargé de cette expertise par le Conseil d'Etat du canton de

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Zurich. Dans son rapport intitulé « Expertise sur les questions de communications du canton de Zurich », soumis pour préavis aux directions ferroviaires et aux communes intéressées, il recommandait, après une étude minutieuse des frais de renouvellement, du volume probable du trafic, des recettes et dépenses d'exploitation, de supprimer les trois chemins de fer et de les remplacer par un service automobile. Ce rapport fut soumis avec les avis exprimés par les administrations ferroviaires et les autorités communales, à une commission d'étude désignée par le Conseil d'Etat pour l'examen plus approfondi du problème. Cette commission comprenait des représentants de l'office fédéral des transports, des chemins de fer fédéraux, du canton de Zurich et des trois entreprises, ainsi que des délégués des autorités des districts de Meilen, Uster et Hinwil, avec d'autres intéressés de l'Oberland zurichois. Cette commission examina à son tour toutes les possibilités de réorganisation; elle se rangea finalement aux conclusions de l'expert du gouvernement, avec cette divergence toutefois qu'elle se prononça pour la conservation de l'exploitation ferroviaire du tronçon Hinwil---Bäretswil--Bauma de l'Uerikon--Bauma et pour l'incorporation de cette ligne au réseau des chemins de fer fédéraux. Les résultats des travaux de cette commission, réunis dans un rapport que la direction des finances du canton de Zurich publia en septembre 1943, furent encore soumis à une « conférence des autorités », convoquée par le gouvernement zurichois, et à laquelle étaient représentées les communes et les directions intéressées de l'administration cantonale. Cette conférence ne changea pas grand'chose aux conclusions de la commission, se bornant à quelques modifications relatives au parcours des courses automobiles à prévoir.

Les résultats des délibérations de la conférence des autorités, consignés dans un rapport final du 22 juin 1944, constituèrent le fondement de la proposition du 28 juin 1945 du Conseil d'Etat au Grand conseil et de l'arrêté que le peuple zurichois adopta le 26 mai 1946. D'après ce projet, le tronçon Hinwil--Bäretswil--Bauma doit être électrifié et sa superstructure reconstruite conformément aux normes des chemins de fer fédéraux; le tronçon devra ensuite être incorporé au réseau de ceux-ci. Le reste de la ligne
de l'Uerikon--Bauma (tronçon Hinwil--Bubikon--Uerikon), ainsi que les chemins de fer Wetzikon--Meilen et Uster--Oetwil^ seront en revanche remplacés par des services automobiles, mais non de façon à offrir un succédané médiocre du chemin de fer. Au contraire, ces services devraient être excellents à tout point de vue, satisfaire pleinement aux besoins de la contrée et offrir plus d'avantages à la clientèle que les chemins de fer ne le faisaient précédemment.

On pouvait prévoir que ce projet de réorganisation des chemins de fer de l'Oberland zurichois se heurterait à des oppositions dans la contrée même que ces entreprises desservent. Des efforts ont été faits pour la conservation de l'exploitation ferroviaire sur les tronçons qui doivent

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être remplacés par des services automobiles, tout d'abord à la conférence des autorités, puis au Grand conseil du canton de Zurich. Ces tentatives n'ayant eu, pour des raisons de politique des communications et des raisons financières, aucun succès sur le terrain cantonal (le projet de réorganisation a été adopté, d'abord par le Grand conseil de Zurich, puis en votation populaire le 28 mai 1946), elles furent reprises sous la forme d'une pétition du 3 mai 1947 au Conseil fédéral. Les pétitionnaires demandent le maintien de l'exploitation ferroviaire du tronçon Uerikon--Hnrwil et prient le Conseil fédéral de se prononcer en faveur de la nationalisation de toute la ligne Uerikon--Bauma. Nous avons été contraints de repousser également cette pétition. Nos raisons sont énumérées ci-après ; elles relèvent en premier lieu des principes qui nous guident en matière de trafic et de finances et que nous avons déjà exposés dans notre message du 24 novembre 1936 à l'appui d'un projet de loi sur les chemins de fer fédéraux (FF 1936, III, 217) et dans notre message du 23 avril 1937 à l'appui d'un projet de loi fédérale sur l'aidé aux entreprises privées de chemins de fer (FF 1937,1,773).

Nous avions relevé alors qu'à une époque comme la nôtre, où les circonstances évoluent si rapidement, et dans laquelle, par le fait que les chemins de fer ont perdu le monopole des transports, la structure du trafic se trouve engagée dans une transformation dont nous n'apercevons pas le terme, on ne saurait plus partir de l'idée que le type d'exploitation qui convient à un moment donné à une certaine liaison lui conviendra toujours.

Tout au contraire, la possibilité dé briser en cas de nécessité un cadre devenu désuet et de s'adapter à des conditions nouvelles doit être créée. Le changement des exigences du trafic peut être si complet, dans certaines circonstances, qu'une ligne de chemin de fer perde tout droit à l'existence.

Et ce n'est pas seulement l'assainissement des chemins de fer fédéraux qui a inspiré ces considérations ; bien au contraire, elles s'appliquent pleinement au relèvement financier des chemins de fer privés dans la gêne. Précisément parmi les chemins de fer privés, il en est qui sont encore à peine viables ou même ne le sont plus du tout, soit que dès le début leur création ait été une erreur, soit que
les raisons qui justifiaient leur existence se soient affaiblies avec le temps. Naturellement, il n'est pas facile de tirer les conséquences de cette constatation. Les contrées desservies par de telles entreprises (et la réorganisation des chemins de fer de l'Oberland zurichois le montre bien) manquent parfois de compréhension pour la nécessité de leur suppression, même quand il s'agit de chemins de fer vieillis, absolument inaptes à répondre aux exigences actuelles du trafic. Mais l'attachement aux traditions ne devrait pas conduire à un gaspillage des deniers publics pour le maintien d'un chemin de fer qui ne sert plus à rien. La Confédération ne saurait pratiquer une politique économique saine en soutenant de ses deniers ces entreprises menacées dans leur existence et en prolongeant leurs jours artificiellement, avec le seul résultat d'ajouter de nouvelles pertes aux anciennes, malheureusement définitives. En tout cas, la Con-

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fédération ne doit pas chercher à retenir l'évolution naturelle qui impose la suppression d'un chemin de fer.

Ces considérations que nous avons développées à propos des projets de lois sur les chemins de fer fédéraux et sur l'aide aux entreprises privées de chemins de fer, conviennent tout particulièrement au cas des chemins de fer secondaires de TOberland zurichois, comme il ressort avec évidence du rapport de l'expert cantonal et des conclusions de la conférence des autorités.

Le recul du trafic, la détresse financière des entreprises et le délabrement technique des installations le prouvent assez. Cela est particulièrement vrai pour le tronçon Uerikon---Hinwil qui, ne touchant pas les centres importants de Rüti et de Stäfa, fut dès le début une création manquée.

Comme la réorganisation des chemins de fer de l'Oberland zurichois a une importance surtout locale et que l'affaire concerne par conséquent en premier lieu le canton de Zurich et les contrées desservies, la participation financière de la Confédération, ainsi qu'on va le voir, ne peut être que modeste. C'est pourquoi cette aide modeste de la Confédération ne doit pas être fournie pour qu'à des erreurs anciennes s'ajoutent des erreurs nouvelles. Or ce serait une faute inexcusable de donner suite à la pétition dont nous avons parlé et de fournir les moyens de conserver le tronçon Uerikon--Hinwil, voire dé le nationaliser. Comme nous le montrerons dans la seconde partie de ce message, la situation n'est différente que pour la partie supérieure de la ligne Uerikon--Bauma, soit le trajet Hinwil-- Bäretswil--Bauma.

Les frais de l'ensemble du projet de réorganisation des chemins de fer de l'Oberland zurichois ont été calculés comme suit (niveau des prix de la fin de 1945): 1. Electrification et renouvellement technique du tronçon Hinwil---Bäretswil--Bauma, y compris la liquidation de Fr.

certaines dettes de l'Uerikon--Bauma 2 000 000 2. Installation de services automobiles pour remplacer les anciennes lignes ferroviaires Uerikon--Hinwil, Wetzikon--- Meilen et Uster--Oetwil 2 600 000 Total 4 600 000 La participation de la Confédération, du canton et des communes est prévue de la manière suivante: Confédération 500000 Canton et communes 4 100 000 Total 4600000 Les frais supplémentaires qui se produiraient si la vie continuait à renchérir seraient à la charge du canton et des communes.

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La subvention de la Confédération est accordée en application de la loi fédérale sur l'aide aux entreprises privées de chetnins de fer et de navigation. En tant qu'il s'agit de l'électrification du tronçon Hinwil--Bäretswii--Bauma, les conditions prévues par l'article 15, 2e alinéa de la loi, sont pleinement remplies. Pour cette raison, un arrêté du Conseil fédéral du 12 juillet 1946 a accordé un premier montant de 300 000 francs à cet effet. L'arrangement relatif à cette aide, passé entre la Confédération et le canton de Zurich d'une part, le chemin de fer Uerikon--Bauma d'autre part, a été alors conclu le 29 août 1946. Les travaux d'électrification sur le tronçon Hinwil--Bäretswil--Bauma sont déjà en cours, de sorte qu'ils seront sans doute achevés cet automne et que la traction électrique pourra être inaugurée en octobre, au moment du changement d'horaire.

Les 200 000 francs constituant le reliquat de la subvention fédérale envisagée étaient prévus comme aide à l'installation d'un service automobile. On estimait que la loi concernant l'aide aux chemins de fer privés n'offrait pas de fondement juridique suffisant pour accorder une telle subvention et qu'il faudrait lui donner un complément créant la possibilité de prendre sur les crédits prévus par la loi des montants destinés au remplacement d'une liaison ferroviaire par un service routier. Mais la nécessité de ce complément législatif dépend de la question de savoir si le remplacement de la voie ferrée par un moyen de transport routier entre en considération pour d'autres chemins de fer en difficultés et fondés à faire appel à l'aide fédérale, car un complément à la loi ne serait en tout cas pas nécessaire s'il s'agissait uniquement de l'aide à assurer par la Confédération pour le remplacement des tronçons Uerikon--Hinwil, Wetzikon--Meilen et Uster-- Oetwil. En effet, l'électrification et l'amélioration technique du tronçon Hinwil---Bäretswil--Bauma, évaluées à 2 000 000 francs, justifieraient déjà pleinement l'octroi d'une subvention de 500 000 francs, au versement de laquelle on pourrait attacher la condition que le canton et les communes assurent à eux seuls le financement de l'exploitation automobile.

II.

NATIONALISATION DU TRONÇON DE CHEMIN DE FEE HINWIL--BÄRETSWIL--BAUMA 1. Considérations générales.

Le chemin de fer Uerikon--Bauma, comme il ressort de ce qui précède, est celle des trois entreprises dont la situation financière est la plus difficile et dont la réorganisation serait la plus coûteuse, si l'on y comprend les frais d'installation et d'exploitation. Pourtant, ce n'est pas d'un coeur léger que le gouvernement zurichois s'est décidé à supprimer ce chemin de fer. Toutes les possibilités de le maintenir ont été examinées, mais aucune n'a pu être retenue, parce que les frais d'installation de trains légers elee-

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triques ou à moteur Diesel, mais aussi les déficits annuels que cette nouvelle forme d'exploitation faisait prévoir auraient constitué une charge trop lourde pour le canton et les communes. Ces constatations, jointes au fait que dès le début le tracé choisi pour cette ligne fut le résultat d'une conception erronée, ne s'appliquent cependant pas au tronçon ïïinwil--Baretswil--· Bauma. Diverses raisons militent au contraire pour le maintien du trafic ferroviaire sur ce tronçon.

Nous constaterons tout d'abord que les trains sont assez fréquentés entre Hinwil et Bauma, tandis qu'ils ne le sont pas entre Hinwil et Uerikon, Les touristes et promeneurs de la région de Zurich aiment à se rendre dans la belle contrée de Baretswil pour y faire des excursions ou du sport.

Le trafic de banlieue Zurich--Uster--Wetzikon, qui est déjà important, le deviendra plus encore lorsque des trains plus rapides auront été mis en service, et le tronçon Hinwil---Bauma en profitera sans nul doute.

Une autre circonstance disposait contre la suppression du trafic ferroviaire entre Hinwil et Bauma; c'est le fait que, techniquement parlant, le tracé est correctement conçu et l'essentiel de l'installation, avec les nombreux ouvrages d'art, en bon état de conservation. II y a aussi un certain intérêt militaire à une liaison ferroviaire directe entre la vallée de la Glatt et celle de la Töss. Ensuite, il s'est révélé que de tous les parcours pour lesquelß l'éventualité d'un trafic automobile a été examinée, c'est le remplacement de ce tronçon qui aurait présenté les plus grosses difficultés.

On aurait eu grand'peine à trouver un tracé de ligne propre à satisfaire à tous les besoins.

La conservation du chemin de fer sur le trajet Hinwil--Baretswil-- Bauma ayant dû être, pour ces raisons, considérée comme la seule solution juste, il restait à décider qui devait se charger à l'avenir de l'exploitation.

Ainsi réduit à un tronçon de 11 km environ, le chemin de fer ne pourrait évidemment plus être exploité par une entreprise autonome. Le gouvernement zurichois prit donc contact avec les organes des chemins de fer fédéraux, qui déclarèrent qu'une coopération sur ce tronçon serait concevable et que, si la ligne était améliorée de manière à satisfaire aux exigences des chemins de fer fédéraux, ceux-ci pourraient organiser des trains
directs Wetzikon--Hinwil--Bauma, solution qui présente de multiples avantages.

Le tronçon en cul-de-sac Wetzikon--Hinwil devient un parcours de transit et trouve son prolongement naturel vers la vallée de la Töss. Les trains peuvent être ainsi mis en service sur un parcours plus long, et les automotrices et voitures être utilisées plus rationnellement. Le transbordement à Hinwil disparaît, les temps de parcours peuvent être réduits, Hinwil et les autres stations sont mieux desservies. Baretswil pourra compter sur un trafic d'excursion et de tourisme plus intense, d'autant plus que les chemins de fer fédéraux ne perçoivent plus de surtaxes de montagne et qu'ainsi la région du Bachtel peut être atteinte de Zurich et de Winterthour

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plus avantageusement qu'auparavant. On est en outre fondé à croire que le trafic de banlieue à partir de Zurich est destiné à prendre un plus grand développement, vu que le bassin économique de la ville de Zurich s'étendra toujours plus loin. Maintenant qu'il y a déjà un intense trafic professionnel entre Uster/Wetzikon et Zurich, les localités de Hinwil et de Baretswil sont, elles aussi, toujours plus rapprochées de la ville, qui va s'agrandissant sans cesse.

La question de la forme sous laquelle l'exploitation pourrait être reprise par les chemins de fer fédéraux a été minutieusement examinée. On a d'abord envisagé une communauté d'exploitation avec les chemins de fer fédéraux: le matériel roulant des deux entreprises aurait été employé en commun sur le tronçon Hinwil--Bauma et les tronçons voisins; et les prestations en nature auraient été balancées par l'exploitation de trains légers (automotrices) par l'Uerikon--Bauma et de trains lourds par les chemins de fer fédéraux. Mais le tronçon Hinwil--Bauma est si court, et si étroitement lié, techniquement et économiquement, au réseau des chemins de fer fédéraux, que la conservation d'une exploitation séparée, ayant sa propre comptabilité, ne se justifierait pas. Il apparaît donc que la solution la plus indiquée, c'est la reprise par la Confédération. Les chemins de fer fédéraux possédant toutes les lignes contiguës et étant seuls en mesure d'assurer une exploitation rationnelle du parcours Hinwil--Bauma, le rachat de ce tronçon constitue vraiment la conclusion naturelle de l'évolution commencée par la nationalisation du chemin de fer de la vallée de la Toss et celle du chemin de fer Wald--Büti.

2, Remarques sur le projet d'arrêté et le contrat d'acquisition.

Le fondement légal pour la nationalisation des chemins de fer n'est plus constitué par la loi fédérale du 15 octobre 1897 sur le rachat, à laquelle se réfère encore la requête du gouvernement zurichois du 3 février 1944, mais bien par la loi sur les chemins de fer fédéraux, du 23 juin 1944 (RO 61, 771), d'après laquelle l'acquisition de nouveaux chemins de fer ou la construction de nouvelles lignes par la Confédération ne peuvent être décidées que par un arrêté fédéral soumis au referendum (art. 2). C'est pourquoi la décision est réservée expressément à l'Assemblée fédérale (art. 7, lettre /).
H est tenu compte de cette situation dans le préambule et à l'article 3 du projet d'arrêté.

L'article premier du projet d'arrêté traite tout d'abord de l'abrogation de la concession actuelle du chemin de fer Uerikon--Bauma. Il y a lieu de distinguer à ce propos entre l'annulation de la concession pour le tronçon Hinwil--Baretswil--Bauma, qui doit être racheté par la Confédération, et l'annulation de la concession pour le tronçon Uerikon--Hinwil, trajet sur lequel l'exploitation ferroviaire doit être supprimée et remplacée par des courses automobiles. Vu l'achèvement prochain de l'électrincation et de la réfection technique du tronçon Hinwil---Baretswil--Bauma, il faut que

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la Confédération l'acquière prochainement et en annule la concession actuelle à bref délai, mais la suppression de l'exploitation ferroviaire entre Uerikon et Hinwil, c'est-à-dire le remplacement envisagé par des services d'automobiles, se fera sans doute encore attendre assez longtemps. Certes, les préparatifs pour cette exploitation automobile ont été déjà commencés, par la création, le 30 octobre 1946, de la société anonyme des transports de FOberland zurichois, mais les longs délais (2 ans ou plus) avec lesquels il faut compter actuellement pour l'acquisition de véhicules à moteur ne permettront pas de supprimer l'exploitation du tronçon Uerikon--Hinwil en même temps que le tronçon Hinwil--Bäretswil--Bauma sera nationalisé.

Comme il ressort des articles 1 à 3 du contrat d'acquisition, la nationalisation du tronçon Hinwil--Bäretswil--Bauma a lieu, non pas par voie de rachat, mais par voie de cession gratuite par la société du chemin de fer Uerikon--Bauma. Les chemins de fer fédéraux reçoivent donc la ligne exempte de toutes charges, sans frais, dans un état technique irréprochable et électrifiée conformément aux normes des chemins de fer fédéraux. Ce n'est qu'à cette condition que la direction générale et le conseil d'administration des chemins de fer fédéraux se sont déclarés prêts à reprendre ce tronçon.

Bien que la reprise apporte aux chemins de fer fédéraux certains avantages, surtout dans le domaine de l'exploitation, la ligne elle-même n'a pour eux aucune valeur commerciale; l'article 19 de la loi sur les chemins de fer .fédéraux n'est donc pas applicable à cette nationalisation; cela signifie que le compte de construction des chemins de fer fédéraux ne doit en supporter aucune charge. Comme il n'y a pas de prix d'achat et qu'il ne s'agit donc pas d'un rachat à mettre à la charge du compte de construction, il n'est pas non plus possible de porter en compte, lors de la nationalisation, la prestation faite par la Confédération, en application de l'article 11 de la loi du 6 avril 1939 sur l'aide aux entreprises privées de chemins de fer et de navigation, pour permettre le renouvellement technique et l'électrification. L'article 3 du contrat d'acquisition statue par conséquent que cette aide doit être considérée comme déjà prise en considération du fait que la ligne et son matériel sont
cédés gratuitement à la Confédération.

L'article 4 du contrat d'acquisition règle la reprise par les chemins de fer fédéraux du personnel actuellement au service de l'Uerikon--Bauma.

La rédaction de cet article a été dictée par le principe que le personnel de cette ligne ne devait subir aucun tort du fait de la nationalisation du tronçon Hinwil--Bäretswil--Bauma et du remplacement du tronçon Uerikon-- Hinwil par un service automobile. Le personnel permanent pleinement occupé par l'Uerikon--Bauma doit donc être repris par les chemins de fer fédéraux sitôt que l'Uerikon--Bauma n'aura plus besoin de lui. Naturellement, il ne s'agit là que du personnel apte au service. Le personnel inapte et les employés de plus de 60 ans ne seront pas repris. Si l'entreprise automobile à créer ne peut les occuper, ils seront autant que possible pensionnés d'après les prescriptions en vigueur ; dans les autres cas, leurs créances sur

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les institutions de secours et de prévoyance seront converties de la manière la plus conforme à leurs intérêts (cession du droit à l'assurance, continuation de l'assurance aux irais de l'assuré, indemnité de sortie, etc.). Cette garantie des droits du personnel qui ne pourra plus trouver d'occupation ni aux chemins de fer fédéraux ni auprès de la nouvelle entreprise automobile, sera encore expressément spécifiée dans l'arrangement spécial relatif à l'aide qui sera accordée pour l'organisation des services automobiles. AfiTM que chacun des employés de l'TJerikon--Bauma soit au clair le plus tôt possible sur sa situation et sache s'il sera engagé par les chemins de fer fédéraux, des tractations sur cet objet ont déjà été ouvertes entre les deux entreprises sur l'initiative du département des postes et des chemins de fer.

Etant donné l'actuel manque de personnel, les chemins de fer fédéraux s'efforceront d'ailleurs, dans leur propre intérêt, de s'attacher le personnel de l'Uerikon--Bauma dans toute la mesure du possible.

Quant aux institutions de prévoyance (caisse de pensions et de secours, caisse de maladie), les prétentions que peuvent avoir à leur égard les agents de l'TJerikon--Bauma qui passent au service des chemins de fer fédéraux feront, conformément à l'article 5 du contrat d'acquisition, l'objet d'un arrangement à conclure entre la direction générale des chemins de fer fédéraux, la direction des finances du canton de Zurich et le conseil d'administration de l'TJerikon--Bauma; la situation de ces nouveaux fonctionnaires à l'égard des institutions correspondantes des chemins de fer fédéraux sera réglée en même temps. Conformément à l'article 1er de la loi du 28 juin 1889, concernant les caisses de secours des compagnies de chemins de fer et de bateaux à vapeur (RO 11, 246), cet arrangement spécial doit être approuvé par le département des postes et des chemins de fer. Le chemin de fer TJerikon--Bauma avait au début sa propre caisse de pensions. Cette caisse ayant été dissoute le 1er janvier 1945, le personnel fut assuré auprès de la « fondation de la caisse de pension de l'ASCOOP ».

Vu que l'Uerikon--Bauma prévoyait déjà sa liquidation, les stipulations suivantes furent insérées dans l'article 8 du contrat d'assurance conclu avec l'ASCOOP: 1. En cas de liquidation du chemin de fer
TJerikon--Bauma et du passage de l'ensemble des assurés ou d'une partie d'entre eux »ux chemins de fer fédéraux ou à une autre personne morale reprenant les droits de l'TJerikon--Bauma, la caisse de pension de l'ASCOOP met à la disposition des assurée transférés la totalité du capital de couverture qui les concerne.

2. Il est loisible aux chemins de fer fédéraux de continuer d'assurer à la caisse de pensions de l'ASCOOP le personnel passé à leur service. Pour ce personnel, la cotisation ordinaire de l'administration est fixée à 8 pour cent des traitements réels. Au reste, les dispositions réglementaires sont applicables.

3. Un excédent éventuel de la liquidation de la caisse de pensions du chemin de fer TJerikon--Bauma (règlement de la caisse de pensions et de secours du personnel du chemin de fer TJerikon--Bauma, des 3 et 8 décembre 1934, en vigueur depuis le 1er janvier 1935) sur le capital de couverture exigé par la caisse de pensions de l'ASCOOP sera versé au fonds de développement de l'TJerikon--

592 Bauma (art. 7 du présent contrat), fonds qui peut aussi être mis à contribution pour, le financement éventuel des mises à la retraite prématurées.

4. Les employés occupés à l'heure par l'Uerikon--Bauma au moment de l'adhésion de cette entreprise à la caisse de pensions de l'ASCOOP seront attribués à partir du 1er janvier 1945 à la caisse pour ancienneté de service de l'ASCOOP.

Les cotisations ordinaires pour ces employés sont fixées d'après les dispositions de l'article 6, lettre b, et de l'article 7 ci-dessus.

Il a donc déjà été tenu compte par ces stipulations du passage éventuel d'agents de l'Uerikon--Bauma au service des chemins de fer fédéraux prévu par le contrat d'acquisition. Ainsi nous avons la garantie que la question des prétentions des intéressés à l'égard des institutions de prévoyance pourra être résolue à la pleine satisfaction du personnel au moment de la nationalisation du tronçon Hinwil--Bäretswil--Bauma et de la suppression de l'exploitation ferroviaire du parcours Uerikon--Hinwil.

Comme dans les précédents contrats de rachat, c'est le Tribunal fédéral qui, à l'article 6, est désigné comme autorité compétente pour trancher les différends que pourraient faire naître l'interprétation ou l'exécution du contrat.

L'approbation du contrat d'acquisition par l'assemblée générale de l'Uerikon--Bauma, réservée à l'article 7, était déjà un fait accompli au moment de la signature du contrat. Elle avait, en effet, été donnée lors de l'assemblée générale extraordinaire de l'entreprise, le 6 août 1945. Le président et le secrétaire reçurent le pouvoir de signer le projet de contrat, si celui-ci ne subissait, dans sa rédaction définitive, plus de modifications notables. Or il n'en a subi aucune, le seul changement ayant consisté à tenir compte, à l'article 1er, 2e alinéa, du fait que tous les travaux d'électrification et de renouvellement (y comrpis la mise en place de rails usagés des CFP) peuvent avoir lieu simultanément, tandis qu'une rédaction précédente prévoyait, par suite de la pénurie de matériel, que le remplacement des rails aurait lieu seulement lors d'une seconde étape, après la nationalisation.

Nous vous recommandons, Monsieur le Président et Messieurs, d'adopter le projet d'arrêté ci-joint, et saisissons cette occasion pour vous prier d'agréer les assurances de notre haute considération.

Berne, le 15 juillet 1947.

6649

Au nom du Conseil fédéral suisse: Le 'président de la Confédération, ETTER.

Le chancelier de la Confédération, LEIMGBUBEE.

Annexes : 1. Projet d'arrêté.

2. Contrat du 15 juillet 1947 sur l'acquisition du tronçon de chemin de fer Hinwil---Baretswil---Bauma par la Confédération.

593

(Projet.)

Arrêté fédéral concernant

l'abrogation de la concession du chemin de fer Uerikon--Bauma et l'acquisition du tronçon Hinwil--Bäretswil--Bauma par la Confédération.

L'ASSEMBLÉE FÉDÉRALE DE LA CONFÉDÉRATION SUISSE, vu les articles 2 et 7, lettre /, de la loi du 23 juin 1944 sur les chemins de fer fédéraux; vu le message du Conseil fédéral du 15 juillet 1947, arrête :

Article premier.

La concession d'un chemin de fer d'Uerikon à Bauma par Hinwil, délivrée par arrêté fédéral du 29 juin 1895 (Recueil des chemins de fer 13, 387) et modifiée par les arrêtés fédéraux des 21 décembre 1900 (ibid. 16, 272), 20 décembre 1912 (ibid. 28, 234) et 23 décembre 1914 (ibid. 30, 249), est abrogée: 1° Pour le tronçon Hinwil--Bauma dès le moment où ce tronçon aura été acquis par la Confédération conformément à l'article 2; 2° Pour le tronçon Uerikon--Hinwil, à une date à fixer par le département fédéral des postes et des chemins de fer d'accord avec le gouvernement du canton de Zurich, à partir de laquelle l'exploitation ferroviaire de ce tronçon doit être supprimée.

Art. 2.

Est approuvé le contrat conclu entre le Conseil fédéral et la compagnie de chemin de fer Uerikon--Bauma à la date du 15 juillet 1947 sur l'acquisition par la Confédération du tronçon électrifié Hinwil--Bauma.

Art. 3.

Le Conseil fédéral est chargé de publier le présent arrêté conformément à la loi fédérale du 17 juin 1874 concernant les votations populaires sur les lois et arrêtés fédéraux et de fixer la date de son entrée en vigueur.

a II est chargé de l'exécution du présent arrêté.

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MESSAGE du Conseil fédéral à l'Assemblée fédérale sur le projet d'arrêté concernant l'abrogation de la concession du chemin de fer Uerikon--Bauma et l'acquisition du tronçon Hinwil--Bäretswil--Bauma par la Confédération. (Du 15 juillet 1947.)

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Jahr

1947

Année Anno Band

2

Volume Volume Heft

28

Cahier Numero Geschäftsnummer

5262

Numéro d'affaire Numero dell'oggetto Datum

17.07.1947

Date Data Seite

581-593

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